company:bnp paribas

  • Les peuples Sioux partent à l’attaque des banques françaises - Les Inrocks
    https://www.lesinrocks.com/2017/05/26/actualite/actualite/les-peuples-sioux-partent-lattaque-des-banques-francaises

    S’ils ont perdu face à Trump, qui a relancé la création du pipeline Dakota Access, cinq activistes Sioux de Standing Rock lancent une série d’actions contre les banques européennes, qu’ils accusent de financer des projets climaticides. On était avec eux à Paris, à l’offensive contre la BNP Paribas et la Société Générale.

    #dakota #again #peuples_autochtones #banques_françaises #premières_nations #natives #Native_Americans

  • C’EST CASH ! Intelligence artificielle, technologie : vers une quatrième révolution industrielle ? (RT)
    https://www.crashdebug.fr/diversifion/15990-c-est-cash-intelligence-artificielle-technologie-vers-une-quatrieme

    Source : Youtube.com

    Information complémentaire :

    Crashdebug.fr : 40% des start-up européennes d’intelligence artificielle n’utilisent pas d’intelligence artificielle (Le Figaro)

    Crashdebug.fr : « Handle » L’Autruche robot effrayante de Boston Dynamics faite pour remplacer les magasiniers qui chargent les palettes

    Crashdebug.fr : Selon un rapport, 50.000 entrepôts utiliseront 4 millions de robots d’ici 2025

    Crashdebug.fr : Les scientifiques veulent une IA orwellienne morale dans les assistants intelligents pour moucharder les propriétaires et discuter de la façon de contacter la police

    Crashdebug.fr : BNP Paribas Fortis : 140 robots ont déjà pris 100 emplois

    Crashdebug.fr : 40% des start-up européennes d’intelligence artificielle n’utilisent pas (...)

  • BNP Paribas Fortis : 140 robots ont déjà pris 100 emplois
    https://www.crashdebug.fr/high-teck/15803-bnp-paribas-fortis-140-robots-ont-deja-pris-100-emplois

    Avec l’argent dette, le monde bancaire est le plus facile à informatiser #robots.

    BNP Paribas Fortis a annoncé la semaine dernière son intention de fermer environ 40% de ses succursales d’ici 2021. En outre, plus de 2.200 emplois seront supprimés, « autant que possible par des processus naturels et par des plans de départ volontaire ». Ces suppressions de postes sont dues au fait que les clients entrent de moins en moins souvent dans leurs agences, explique le PDG Max Jadot dans les éditions du week-end des journaux De Tijd et L’Echo.

    20.000 emplois supprimés en 20 ans

    Le monde bancaire était autrefois l’un des bastions de l’emploi les plus stables. Ceux qui parvenaient à trouver du travail dans une banque avaient souvent un emploi à vie. Mais sous l’impulsion de l’automatisation, des changements (...)

  • Un projet de licence universitaire financée par BNP Paribas fait débat
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/02/22/un-projet-de-licence-universitaire-financee-par-bnp-paribas-fait-debat_54269

    La dizaine d’élus représentant les enseignants, les personnels et les étudiants du conseil d’administration – qui réunit 30 membres – du regroupement universitaire PSL (comptant dans ses rangs l’université Paris-Dauphine, l’Ecole normale supérieure Paris, l’Observatoire de Paris…) s’est mobilisée, quand elle a découvert qu’une licence sur les questions de développement durable était sur les rails avec la grande banque française pour seul mécène. Le projet a néanmoins été adopté à une large majorité (19 pour, trois contre, sur le total des 22 votants), lors du conseil d’administration de PSL, jeudi 21 février, délocalisé au rectorat de Paris, à la suite d’une tentative de blocage d’étudiants, mobilisés sur cette question.

    ça fait envie, hein ?
    https://www.youtube.com/watch?v=cGrzjSuMq8k


    #enseignement_supérieur #formation #privatisation

    • Argent public, profits privés : BNP Paribas et la « School of Positive Impact »
      http://pssp-lab.org/Argent-public-profits-prives-BNP-Paribas-et-la-School-of-Positive-Impact.h

      Les premiers articles parus dans la presse ont largement mis en avant le financement par le seul groupe BNP Paribas : « Un projet de licence universitaire financée par BNP Paribas fait débat », « BNP Paribas se paye un cursus universitaire pour se reverdir », etc. Or, cette manière de présenter les choses tend à occulter le fait que les dépenses de mécénat effectuées par les entreprises sont défiscalisées à hauteur de 60 %, dans les limites de 0,5 % de leur chiffre d’affaire (soit un plafond confortable de 212 millions d’euros pour BNP Paribas, selon les résultats du groupe en 2018). Autrement dit, le coût réel de cette « School of Positive Impact » pour la banque serait de seulement 3,2 millions d’euros, le reste (4,8 millions d’euros) étant à la charge de l’État, sous la forme de perte de recettes budgétaires. BNP Paribas engage ainsi, de manière irrévocable, de l’argent public, sans que le ministère du Budget (sans même mentionner le Parlement !) puisse se prononcer sur le bon emploi de cet argent.

      Reste également à savoir pour qui l’impact sera positif. Cet argent, qui est dans sa composition davantage public que privé, bénéficierait à un regroupement d’universités et de grandes écoles déjà très bien dotées par rapport à d’autres établissements dans l’enseignement supérieur. De manière classique, mais contrairement aux idées reçues sur la #philanthropie et le #mécénat, les riches donnent d’abord... aux riches. C’est ce qu’illustre bien le cas des « #fondations_académiques », créées en 2007 par la loi relative aux libertés et responsabilités des universités : les fondations qui ont réussi à collecter le plus grand volume de dons sont celles de grandes écoles telles que HEC (160 millions d’euros collectés entre 2008 et 2017) ou l’École polytechnique (80 millions), loin devant celles des universités, accueillant pourtant un bien plus grand nombre d’étudiants (35 millions pour la fondation la mieux dotée des universités françaises – celle de l’Université de Strasbourg –, seulement 1,5 million pour celle de l’Université Paris-Sud) (2)... Bien loin de réduire les inégalités de dotation déjà criantes au sein de l’enseignement supérieur, les dons effectués par les entreprises et les riches particuliers les renforcent.

  • Le projet de loi anti-Opep refait surface au Congrès américain
    https://www.latribune.fr/economie/international/le-projet-de-loi-anti-opep-refait-surface-au-congres-americain-807056.html

    Aux États-Unis, des parlementaires ont récemment remis sur la table un projet de loi visant à empêcher l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) d’influencer les cours de l’or noir mais risquant aussi de provoquer de forts remous géopolitiques et financiers.

    Le projet de loi baptisé "No Oil Producing and Exporting Cartels Act of 2019" ou #NOPEC a été déposé la semaine dernière à la fois devant la Chambre des représentants et devant le Sénat américain. Cette loi, si elle était adoptée, permettrait aux autorités américaines de poursuivre tout groupe de pays s’accordant pour influencer les prix du pétrole en ajustant leur production. L’idée est d’abaisser in fine le prix de l’essence à la pompe. Pour l’heure, aucune date n’a été fixée pour son examen en séance plénière.

    L’#Opep, et son chef de file l’#Arabie_saoudite, sont directement visés. Le cartel a notamment décidé fin 2016, en association avec plusieurs pays partenaires dont la Russie, de s’imposer des quotas pour tenter de redresser les cours de l’or noir.

    Proposé pour la première fois en 2000, le projet de loi NOPEC réapparaît depuis par intermittence au Congrès américain malgré l’opposition de la Chambre américaine de commerce et de la fédération du secteur pétrolier API. Il n’a toutefois jamais été adopté. Les présidents républicain George W. Bush et démocrate Barack Obama avaient toujours averti qu’ils y mettraient leur veto.

    Le projet de loi apporte à l’administration américaine « un moyen de pression important si les prix devaient grimper », estimaient récemment dans une note les analystes de Barclays.

    Il pourrait aussi fournir « des options législatives pouvant être considérées comme des sanctions au regard du meurtre (du journaliste saoudien Jamal) Khashoggi, des tensions entre la Russie et l’Ukraine et des arrangements que l’Opep et ses partenaires pourraient envisager le mois prochain à Bakou », relevaient-ils.
    Le cartel et ses partenaires doivent discuter en Azerbaïdjan d’éventuels ajustements à l’accord les liant. Donald Trump appelle régulièrement l’Opep, parfois vertement, à ouvrir plus grand les vannes.

    Si le texte devait être adopté, le cartel - Arabie saoudite en tête -, « n’aurait alors plus aucun intérêt à se réserver une marge de manœuvre en cas de troubles », souligne James Williams de WTRG Economics.

    L’Opep maintient en effet depuis plusieurs décennies de quoi augmenter rapidement sa production pour pouvoir maintenir l’offre d’or noir sur le marché mondial, et Ryad est plusieurs fois monté au créneau pour éviter une flambée des prix, au moment des guerres en Irak ou des combats en Libye par exemple. Mais c’est coûteux. Or sans ce coussin de sécurité, « les prix fluctueront au moindre pépin », affirme M. Williams.

    « Toute loi NOPEC soulève le problème des relations entre les Etats-unis et l’Arabie saoudite », rappelle Harry Tchilinguirian de BNP Paribas. Certes les Etats-Unis, grâce à l’essor du pétrole de schiste, sont désormais moins dépendants des importations de pétrole. Mais Ryad reste « la pierre angulaire de la politique étrangère de Donald Trump au Moyen-Orient, en particulier pour tout ce qui concerne l’Iran_ », ajoute-t-il. Et le royaume est un important acheteur d’armes américaines.

    Par ailleurs, « si les prix du pétrole descendaient trop, les revenus des pays du Moyen-Orient chuteraient d’autant et leur population pourrait de nouveau manifester son mécontentement comme lors du Printemps arabe », remarque M. Williams.
    Pour tous ces risques économiques et géopolitiques, l’administration américaine n’aurait pas intérêt, selon lui, à promulguer le texte. Mais, ajoute-t-il, « avec ce président, on n’est jamais certain de rien ».

  • Beware ! Les hordes asiatiques vont déferler sur l’Occident !
    Il s’agit de produits intermédiaires (diesel) raffinés en Chine.

    Armada of Giant New Tankers Lines Up to Ship Diesel Out of Asia - Bloomberg
    https://www.bloomberg.com/news/articles/2019-01-24/armada-of-giant-new-tankers-lines-up-to-ship-diesel-out-of-asia


    Photographer : Tim Rue/Bloomberg

    • Maintenance season in Europe seen pulling cargoes West
    • New China refineries, weak local demand seen driving shipments

    A fleet of giant newly built oil tankers is gearing up to ship diesel out of East Asia.

    Five very large crude carriers, which typically carry about 2 million barrels of oil each, are currently positioned in the seas off China’s eastern and southern coasts, according to shipping intelligence and tracking company Kpler. Two more newbuilds are set to swell that fleet shortly. If all were fully loaded, they would haul a total approaching what is currently held in independent storage in Europe’s key trading hub of the Amsterdam, Rotterdam and Antwerp ports.

    It’s a large volume coming at once,” said Olivier Jakob, director at Petromatrix GmbH in Zug, Switzerland.

    China is boosting output, with more refinery capacity coming online, while weak local demand for middle distillates is helping to push products west, said Jakob. The start of refinery maintenance season in Europe also stoking Western demand for the fuel. China’s first round of export quotas also signaled an increase in diesel exports at the start of the year, while independent gasoil/diesel stocks in ARA are at their lowest seasonally since 2014.

    Three of the seven VLCCs highlighted by Kpler — the San Ramon Voyager, Ascona and Olympic Laurel — have already taken on board a combined 3.5 million barrels of diesel, according to a Bloomberg calculation from Kpler data, but are not yet fully loaded. Of the remaining four, one is currently loading, one is en route to Singapore where it may take on product, and two have yet to fully leave their construction yards.

    We expect the majority of these cargoes to head west around the Cape of Good Hope,” said Eli Powell, a Kpler analyst. Discharging is likely in northwest Europe, with possible partial discharges in West Africa.

    European demand conditions are quite favorable,” said Harry Tchilinguirian, global head of commodity markets strategy at BNP Paribas in London. “It would make sense to try to move a lot of volume into Europe in short order to meet that demand.

    The surge in Asian exports mirrors an increase in shipments of oil products, much of it diesel, from India and the Middle East into Europe in recent weeks. January’s monthly arrivals from India are set to hit their highest since at least 2017, and shipments from the Persian Gulf will be at their highest since July last year.

  • L’informatique de la BNP tombe encore en panne
    https://www.linformaticien.com/actualites/id/51117/l-informatique-de-la-bnp-tombe-encore-en-panne.aspx

    A croire que les années impaires sont maudites pour la banque. En 2015 et 2017, ses sites étaient tombés en rade. La BNP commence 2019 sur les chapeaux de roues, avec un incident affectant non seulement ses sites et ses apps, mais aussi les opérations de paiement et de retrait par carte.

    La journée d’hier fut particulièrement compliquée pour les clients de la BNP Paribas. Un grand nombre d’entre eux se sont plaints sur les réseaux sociaux de problèmes non seulement pour accéder aux sites Internet de la banque et à ses applications mobiles, mais aussi pour retirer de l’argent ou encore effectuer des achats. Selon certain témoignages, les DAB de la BNP eux-mêmes étaient hors service.

    Sur Twitter, la BNP a prévenu, un peu tardivement aux yeux de ses clients, qu’un incident était effectivement en cours. Le problème a été résolu dans la soirée, la banque expliquant dans un autre tweet qu’il s’agit d’un « incident informatique interne survenu sur l’accès à nos sites et applications mobiles et certaines opérations de paiement et de retrait par carte ». Sa filiale en ligne Hello Bank a elle aussi été touchée par cette panne.

    En l’absence de postmortem ou d’un minimum d’explications de la part de la banque, impossible pour l’heure de connaître avec exactitude l’origine de l’incident. On se rappellera qu’en juin 2017, la BNP avait connu un problème technique, en l’occurrence une panne DNS : le seul serveur gérant le nom de domaine de la banque étant tombé en rade. Cette panne faisait écho à une autre, similaire, survenue en 2015. Mais cette fois-ci, le problème semble plus grave puisque le système de paiement par carte bancaire à lui aussi été touché.

    • Panne chez BNP Paribas : un incident interne, pas une cyberattaque
      https://www.latribune.fr/entreprises-finance/banques-finance/panne-chez-bnp-paribas-un-incident-interne-pas-une-cyberattaque-803199.htm

      La banque, qui se montre peu disserte, affirme avoir subi une panne informatique dont l’ampleur reste difficile à évaluer. La non-disponibilité du réseau a concerné les clients particuliers et professionnels français, belges (Fortis) mais aussi ceux d’Hello Bank !, l’offre 100% en ligne de l’établissement bancaire. Elle a débuté mardi 8 janvier en fin de matinée et aurait été totalement résolue dans le courant de la soirée.

      Le périmètre de la panne reste flou puisque ni le nombre de clients affectés, ni les produits concernés n’ont été communiqués par la banque. En France, l’établissement bancaire compte près de 7 millions de clients particuliers. Impossibilité d’effectuer un retrait, de payer en magasin ou encore de réaliser des opérations en ligne... « Le paiement par chèque fonctionne », a répondu le compte SAV à un client sur Twitter, s’attirant les sarcasmes des internautes. Sur les réseaux sociaux, de nombreux particuliers ont partagé leur mécontentement.

  • L’envers des friches culturelles | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/231218/l-envers-des-friches-culturelles

    Terrains vagues, bâtiments désaffectés, rails à l’abandon… Un peu partout en France, ces espaces qui faisaient auparavant l’objet d’occupations illégales sont convertis en lieux culturels par une poignée d’entrepreneurs ambitieux. Ces sites, souvent éphémères, se présentent comme « engagés » et « créatifs » et participant à la revalorisation de quartiers dépréciés. Mais cette « valorisation » semble avant tout financière. Une enquête parue dans le numéro 11 du Crieur, toujours en librairie.

    • C’est que Ground Control s’inscrit plus largement dans une politique foncière en pleine expansion au sein de la SNCF : l’urbanisme transitoire. « Cette démarche dite d’“urbanisme temporaire” ou transitoire est un levier essentiel de valorisation, avance Fadia Karam, directrice du développement de SNCF Immobilier. Cela permet d’intensifier l’usage de nos sites parfois vides et d’éluder des coûts de gardiennage, d’entretien et de sécurité, en limitant la détérioration et l’obsolescence de notre patrimoine. En dotant nos sites de nouveaux usages, nous développons la valeur de nos actifs. »

      icf-habitat

      La stratégie d’urbanisme transitoire du groupe ferroviaire prend naissance en 2013, quand une galerie de street art propose à ICF Habitat, filiale logement de la SNCF, d’investir provisoirement une de ses tours de logement destinée à la démolition. L’initiative, baptisée Tour Paris 13, est une telle réussite – trente mille visiteurs en un mois – que la SNCF entrevoit rapidement dans ce site culturel éphémère un formidable outil de communication sur la future HLM qui s’érigera en lieu et place de la tour. Et, par ricochet, d’augmentation de l’attractivité de ce quartier résidentiel grâce aux artistes graff les plus célèbres de la scène mondiale venus s’approprier l’immeuble en friche.

      Rapidement surnommée la « cathédrale du street art », la tour a été l’objet d’une grande attention médiatique, à l’image de Télérama, qui ira jusqu’à suivre en direct, avec trois caméras, la destruction du bâtiment en 2014. Trois ans plus tard, le même journal publiait un article élogieux sur le nouvel « immeuble HLM à l’architecture délirante » situé dans l’« eldorado parisien du street art ». Une opération de communication bénéficiant à la fois à l’acteur privé – la galerie Itinerrance – et à la SNCF, qui a pu aisément vendre ses logements flambant neufs à un prix lucratif.

      En 2015, deux ans après Tour Paris 13, l’occupation temporaire du dépôt de train de la Chapelle par Ground Control est appréhendée par SNCF Immobilier comme un projet pilote en vue de mieux formaliser sa démarche d’urbanisme transitoire. Après cette expérience concluante de friche culturelle éphémère, la filiale lance en fin d’année un appel à manifestation d’intérêt afin que seize de ses espaces désaffectés soient reconvertis provisoirement en « sites artistiques temporaires ».

      En réinvestissant une deuxième fois le dépôt de la Chapelle en 2016, puis la Halle Charolais de la gare de Lyon, Denis Legat devient, avec son concept Ground Control, le fer de lance de l’urbanisme transitoire prôné par la société nationale des chemins de fer. Au plus grand bonheur de Marie Jorio, cadre développement au sein de SNCF Immobilier qui, à propos du site de la Chapelle, déclare sans ambages : « Avec Ground Control, nous avons fait exister cette adresse plus rapidement et avons créé de l’attractivité : les opérateurs ont envie d’y aller et d’innover ! »

      Aux yeux de la SNCF, la friche culturelle Ground Control a en effet servi d’outil marketing pour mieux promouvoir l’aménagement urbain qui prévoit la construction de cinq cents logements dans ce coin morne du XVIIIe arrondissement. Quant aux visiteurs, ils ont été les cobayes de la future identité urbaine de ce quartier dévitalisé, Ground Control constituant un showroom hype au service du complexe immobilier en devenir. « L’ADN ferroviaire du site du dépôt Chapelle est ressorti très fortement dans l’appétence et le succès du concept, révèle ainsi SNCF Immobilier. Le projet urbain en cours de définition fera revivre cet ADN et cette identité ferroviaire très forte qui constituent un actif immatériel et un capital fort. »

      Le recours aux occupations temporaires pour accroître la valeur financière d’un projet immobilier et préfigurer ses futurs usages est de plus en plus systématique. En janvier 2018, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Île-de-France avait recensé pas moins de soixante-dix-sept projets d’urbanisme transitoire en région francilienne depuis 2012 – dont plus de la moitié sont en cours. Quatre cinquièmes des propriétaires des sites sont des acteurs publics ( collectivités locales, établissements publics d’aménagement, SNCF, bailleurs sociaux ) et les occupations à dimension culturelle sont largement prédominantes.

      Les pouvoirs publics locaux ont par ailleurs décidé d’accompagner pleinement cette dynamique d’optimisation foncière. Le conseil municipal de Paris et le conseil métropolitain du Grand Paris ont tous deux récemment adopté le vœu qu’à l’avenir, tout projet d’aménagement urbain soit précédé d’une opération d’urbanisme transitoire. De plus, sur la quarantaine de projets d’urbanisme temporaire actuels, vingt-sept sont soutenus par la région Île-de-France dans le cadre de son appel à manifestations d’intérêt sur l’urbanisme transitoire lancé en 2016. Une enveloppe qui s’élève à 3,3 millions d’euros.

      Là encore, malgré les incantations à l’« innovation urbaine » et à la « transition écologique » de cet appel à projets, c’est avant tout l’argument économique qui fait mouche. « Il faut en moyenne douze ans pour qu’une ZAC [ zone d’aménagement concerté ] sorte de terre, avançait l’an dernier Chantal Jouanno, alors vice-présidente de la région. Durant ce laps de temps, les immeubles ne servent à personne, peuvent être squattés et perdre leur valeur. » La nature a horreur du vide. Les édiles parisiens également.
      Espace public, bénéfice privé

      Cultplace et La Lune rousse ne se contentent pas d’accaparer des friches. L’ensemble de leurs sites éphémères et établissements présentent en effet la particularité d’être des espaces hybrides, à la fois publics et privatisables, culturels et commerciaux. Des logiques tout autant artistico-festives que marchandes, qui ont permis aux entrepreneurs culturels de s’approprier une dénomination en vogue : celle de « tiers-lieu ».

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      Conceptualisé par le sociologue américain Ray Oldenburg dans un ouvrage intitulé The Great Good Place ( 1989 ), le tiers-lieu désigne à l’origine les espaces de sociabilité situés en dehors du domicile et du travail, comme les cafés ou les parcs publics. Cette expression aux contours flous a été employée afin de qualifier les premiers fablabs, les hackerspaces et autres jardins urbains partagés. Mais au grand dam des tenants de l’éthique open source et de l’esprit collectif de la débrouille, le terme de tiers-lieu s’est progressivement dénaturé jusqu’à qualifier de facto tout espace hébergeant des activités pluridisciplinaires, gratuites comme lucratives.

      « Je vois nos sites comme des écrins pour l’initiative, pour l’émergence d’envies, s’enflamme ainsi Renaud Barillet. Mais la réalité économique d’un tiers-lieu comme la friche 88 Ménilmontant fait qu’on a besoin de clients. Ce que l’on fabrique, ce sont des initiatives privées mais qui peuvent avoir une quote-part d’intérêt général. »

      Loïc Lorenzini, adjoint au maire du XVIIIe arrondissement chargé des entreprises culturelles, porte néanmoins un autre regard sur l’émergence de ces tiers-lieux. « Ground Control au dépôt de la Chapelle, cela n’a pas été évident avec eux au début, se souvient l’élu. Il y avait un service d’ordre avec des vigiles à l’entrée du lieu, ce qui n’a pas vraiment plu aux habitants du quartier. »

      Sa circonscription héberge actuellement deux sites artistiques temporaires de la SNCF : L’Aérosol – un hangar de fret reconverti en espace dédié au graffiti – et La Station-gare des mines – ancienne gare à charbon devenue salle de concert. Ces deux occupations de sites ferroviaires en friche préfigurent d’importants projets d’aménagement urbain comportant des logements, des bureaux ou encore l’Arena 2, une salle omnisports qui devrait être inaugurée en vue des Jeux olympiques de 2024.

      « Ces entreprises culturelles sont venues bousculer la vision classique de la culture, c’est-à-dire une vision subventionnée, avance Loïc Lorenzini. L’enjeu avec ces tiers-lieux, c’est qu’ils ne deviennent pas le cache-sexe de projets privés urbanistiques. Notre rôle est de rappeler que dans un arrondissement populaire comme le XVIIIe, il y a des enjeux locaux forts, telle la gentrification. »

    • Dernier avatar en date des tiers-lieux culturels qui foisonnent dans la capitale, La Recyclerie se présente comme « une start-up innovante qui réinvente le concept du tiers-lieu ( ni la maison ni le travail ) et fédère un large public sur le thème de l’écoresponsabilité ». Inauguré en 2014, cet établissement, composé d’un café-cantine, d’un atelier de réparation et d’une mini-ferme urbaine, est implanté au sein d’une station de train désaffectée de la Petite Ceinture, la gare Ornano, au nord du XVIIIe arrondissement.

      Les quais de la gare désaffectée du boulevard Ornano sur la ligne de Petite Ceinture. Les quais de la gare désaffectée du boulevard Ornano sur la ligne de Petite Ceinture.

      Un emplacement loin d’être anodin : la station à l’abandon se situe en effet porte de Clignancourt, à deux pas des échoppes discount des puces de Saint-Ouen, de la préfecture de police chargée des demandes d’asile de la capitale et d’un bidonville de Roms installé en contrebas de l’ancienne voie ferrée. Un carrefour où vendeurs à la sauvette, chiffonniers et migrants tentent de survivre par l’économie informelle.

      Malgré le fait qu’un tiers-lieu culturel ne soit pas de prime abord le projet urbain le plus pertinent en termes de besoins sociaux dans ce quartier populaire, « le maire de l’époque, Daniel Vaillant, a personnellement appuyé notre dossier, dévoile Marion Bocahut, présentée comme cheffe de projet écoculturel du lieu. La mairie du XVIIIe n’avait pas les moyens financiers d’acheter la gare Ornano, nous avons donc racheté l’intérieur du bâtiment ».

      La Recyclerie appartient à Sinny & Ooko, une société « créatrice de tiers-lieux et d’événements » dirigée par Stéphane Vatinel. Figure du milieu de la nuit, connu pour avoir fondé en 1992 le Glaz’art, un club électro emblématique installé dans un ancien dépôt de bus, l’entrepreneur a repris de 2003 à 2008 les rênes du Divan du monde, salle de spectacle historique de Pigalle.

      Par l’intermédiaire de son entreprise, ce quinquagénaire hyperactif est aujourd’hui l’exploitant de La Machine du Moulin rouge, l’incontournable discothèque techno du nord de la capitale, et du Pavillon des canaux, une bâtisse abandonnée sur les bords du bassin de la Villette réhabilitée en coffice – mi-café, mi-espace de travail.

      Quand il rachète la gare Ornano pour installer son tiers-lieu empreint « des valeurs collaboratives et du Do It Yoursef », Stéphane Vatinel fait appel à son ami Olivier Laffon, qui s’investit financièrement dans l’opération. Cet ancien magnat de l’immobilier devenu millionnaire a été le promoteur de mégacentres commerciaux, à l’instar de Bercy Village, Vélizy 2 ou Plan de campagne dans les Bouches-du-Rhône. Mais avec sa holding C Développement, Olivier Laffon s’est reconverti dans l’entreprenariat social.

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      Sa réalisation la plus célèbre demeure le Comptoir général, un ancien entrepôt au bord du canal Saint-Martin reconverti en 2009 en bar et « espace événementiel écosolidaire » à l’ambiance exotique. Devenu une référence quasi caricaturale du « Paris branché », le Comptoir général a fait appel jusqu’en 2013 aux services de Sinny & Ooko afin de développer et d’animer sa programmation. Une alliance pérenne entre les deux hommes d’affaires puisque C Développement avait précédemment investi dans le rachat du Divan du monde et dans La Machine du Moulin rouge, établissements gérés par Stéphane Vatinel…

      Pour les événements écoculturels de La Recyclerie, Sinny & Ooko a fait appel à un partenaire des plus édifiants : la fondation Veolia. L’entreprise du CAC 40, connue pour être le géant mondial de la privatisation de l’eau, finance en effet en grande partie la programmation du lieu et est partenaire de son cycle de conférences sur l’économie circulaire. La bibliothèque de La Recyclerie a de surcroît été ouverte avec des livres offerts par la multinationale. « Veolia nous accompagne aussi dans notre développement, notamment avec Scale up ( “changement d’échelle” ), un programme de l’Essec Business School qui nous a permis de savoir comment dupliquer un lieu comme La Recyclerie », détaille Marion Bocahut.

      Le concept de La Recyclerie a effectivement depuis peu changé d’échelle. Sinny & Ooko a inauguré en août dernier un nouveau tiers-lieu écoculturel baptisé la Cité fertile. Ici, comme pour Ground Control, SNCF Immobilier a fait signer à Sinny & Ooko, à l’aune de son appel à projets sur l’urbanisme transitoire, une convention d’occupation de trois ans de son ancienne gare de fret basée à Pantin. « Nous sommes là pour opérer une transition entre une gare de marchandises et le futur écoquartier de la ville de Pantin », assume Clémence Vazard, cheffe du projet de la Cité fertile.

      L’écoquartier prévoit mille cinq cents logements et près de cent mille mètres carrés de bureaux et de locaux commerciaux. Une opération foncière des plus rentables pour SNCF Immobilier et les promoteurs. Surnommée la « Brooklyn parisienne », Pantin constitue depuis peu un eldorado de la spéculation immobilière : l’ancienne cité industrielle a vu flamber de 15 % en cinq ans le prix du mètre carré, un record parmi les villes de la petite couronne parisienne.

      En attendant, sur près d’un hectare, la Cité fertile veut « explorer et imaginer la ville de demain » en attirant un million de curieux par an avec ses ateliers, ses conférences et sa cantine approvisionnée en circuits courts. Clémence Vazard explique que l’équipe a consulté la municipalité de Pantin afin d’« identifier les acteurs locaux et demander leurs contacts ». Parmi la cinquantaine de personnes salariées sur le site, une seule pourtant se consacre à cette ouverture sur les Pantinois. « En tout cas, si on a un partenariat comme Veolia qui peut se présenter, ce serait le meilleur pour nous », souligne la cheffe de projet. Avant de préciser : « Sinny & Ooko possède l’agrément Entreprise solidaire d’utilité sociale ( Esus ), en aucun cas nous ne faisons du greenwashing. »

      L’originalité de cette friche éphémère réside cependant ailleurs. La Cité fertile héberge en effet depuis septembre le « campus des tiers-lieux », école de formation et incubateur d’entreprises dont le but est de développer les tiers-lieux culturels en tant que modèles économiques d’avenir. « Depuis l’an dernier, Sinny & Ooko est certifié comme organisme de formation. Nous proposons un module pour apprendre à être responsable de tiers-lieu culturel, détaille Clémence Vazard. Nous avons déjà formé une soixantaine de personnes, dont certaines ont récemment monté leur propre tiers-lieu à Montreuil – la Maison Montreau – ou à Niamey, au Niger – L’Oasis, un espace de coworking parrainé par Veolia. »

      Selon les formateurs Sinny & Ooko, le tiers-lieu culturel est un modèle démultipliable à souhait, telle une unité standardisée qui se résume, selon sa plaquette de présentation, à un « HCR [ hôtel café restaurant ] à portée culturelle », où une activité économique « socle » de bar-restauration permet de financer une programmation qui fait vivre le lieu.
      Friche partout, créativité nulle part

      En moins de cinq ans, Cultplace, La Lune rousse et Sinny & Ooko ont édifié un véritable petit empire économique en Île-de-France. Elles ont même l’ambition de s’implanter durablement à travers l’Hexagone en reproduisant des fac-similés de leurs tiers-lieux respectifs. Renaud Barillet a ainsi récemment remporté deux appels à projets à Bordeaux et un autre à Lyon afin d’édifier « des projets très proches en termes d’ADN et de ventilation des espaces de ce qu’est La Bellevilloise ».

      En Charente-Maritime, à Rochefort, Cultplace est en train de mettre sur pied Grand foin, « une déclinaison rurale de La Bellevilloise », aux dires de Renaud Barillet. Par ailleurs, depuis 2016, Denis Legat et son équipe débarquent chaque été aux Rencontres de la photographie d’Arles, où ils investissent un ancien hangar de la SNCF avec leur habituelle formule Ground Control.

      Stéphane Vatinel, quant à lui, doit ouvrir d’ici 2023 La Halle aux Cheminées, un tiers-lieu dans une ancienne friche militaire de Toulouse dont le concept n’est autre qu’un copier-coller de La Recyclerie. Autant de jalons d’une hégémonie économico-culturelle dont se défend du bout des lèvres Renaud Barillet : « C’est vrai que ceux qui ont commencé à réaliser des tiers-lieux arrivent aujourd’hui à se développer et je pense que pour un nouveau venu, ce n’est pas si simple. Les appels d’offres demeurent très économiques et orientés vers l’immobilier. »

      Ce business model des friches est si bien rodé et rencontre un tel succès qu’il en devient vecteur d’une certaine uniformisation. À Paris, en plus du Poinçon, la gare de Montrouge rénovée par Cultplace, et de La Recyclerie, ex-gare Ornano, la plupart des seize stations de la Petite Ceinture deviendront des tiers-lieux, à l’instar du Hasard ludique, « lieu culturel hybride » niché porte de Saint-Ouen, ou de La Gare-jazz à la Villette – en lieu et place de l’ancien squat artistique Gare aux gorilles.

      La gare Masséna vue depuis la rue Regnault. La gare Masséna vue depuis la rue Regnault.

      Dans le cadre de Réinventer Paris, l’ancienne gare Masséna sera quant à elle réhabilitée en « lieu de vie et de proximité » d’ici 2019 avec bar et cantine, ferme urbaine, boutiques bio, espaces artistico-culturels et bureaux. Enfin, Stéphane Vatinel a l’an dernier remporté l’exploitation de deux sites en friche grâce à Réinventer la Seine, un appel à projets visant à « la construction d’un territoire métropolitain évident et d’envergure internationale ». Une usine désaffectée à Ivry et l’ancien tribunal de Bobigny seront ainsi, à l’horizon 2022, reconvertis tous deux en tiers-lieux écoculturels estampillés Sinny & Ooko.

      À cette dynamique de duplication des tiers-lieux s’ajoutent les dizaines de terrasses temporaires qui essaiment chaque été dans les interstices urbains de la capitale, à l’image de la Base Filante, une friche éphémère de trois mille mètres carrés qui a ouvert ses portes en juillet dernier à deux pas du Père-Lachaise. L’initiative est portée par quatre collectifs, dont certains ont déjà pris part à la conception d’une autre terrasse temporaire, la friche Richard Lenoir, ou à l’aménagement de La Station-gare des mines.

      Au programme de la Base Filante, le sempiternel quatuor bières artisanales, cours de yoga, tables de ping-pong et musique électronique. « On assiste à une sorte de standardisation qui annihile toute créativité : tout espace en friche se voit devenir un lieu éphémère avec un bar et des transats, s’alarme Quentin, du collectif Droit à la ( Belle )ville. La créativité s’arrête dès qu’il y a une tireuse à bière artisanale… »

      Enfin, la mise en avant quasi généralisée de l’imaginaire « squat », via la scénographie récup’ et DIY, comme à travers la rhétorique de l’alternative et du collaboratif dans la communication de ces lieux festifs, participe également à cette uniformisation des sites culturels. « Ces friches font croire à une fausse occupation de l’espace alors qu’il y a des vigiles à l’entrée, fulmine Quentin. On vend de faux espaces de liberté où on dit aux gens ce qu’ils doivent consommer et où. »

      Pour les chercheuses Juliette Pinard et Elsa Vivant, « cette esthétique du squat […], donnant la part belle aux atmosphères brutes et industrielles, participe à la mise en scène de ces lieux temporaires en tant qu’“espaces alternatifs” et expérience singulière ». En institutionnalisant les occupations transitoires, les friches culturelles éphémères ont réussi le tour de force de neutraliser la portée subversive des squats artistiques, qui contestaient la propriété privée en privilégiant le droit d’usage, tout en s’appropriant leurs codes esthétiques.

      « Et le squat devient fréquentable », titrait ainsi Télérama en avril dernier à propos des occupations transitoires après que Libération eut publié sur son blog Enlarge Your Paris un entretien intitulé « Les friches font entrer les villes dans l’ère des squats légaux ».

      Dans le quartier Darwin. Dans le quartier Darwin.

      Le phénomène des friches culturelles se circonscrit de moins en moins à la région Île-de-France. À Bordeaux, les instigateurs du site culturel Darwin Écosystème, installé depuis 2009 dans l’ancienne caserne Niel et qui se présente comme un « lieu d’hybridation urbaine mêlant activités économiques et initiatives citoyennes », ne se sont jamais cachés de s’être inspirés directement de La Bellevilloise. Le promoteur immobilier Résiliance a de son côté mis à disposition un terrain vague de vingt hectares situé au nord de Marseille à Yes We Camp, un collectif de cinquante salariés spécialisé dans la création de friches culturelles éphémères, à Paris comme à Roubaix.

      Depuis cette année, la vaste parcelle en jachère accueille un « parc métropolitain d’un nouveau genre, à la fois lieu de vie, de mémoire, de pratiques culturelles et sportives ». Le site, baptisé Foresta, est inséré dans un projet d’aménagement porté par Résiliance et articulé autour d’un immense entrepôt commercial réservé aux grossistes du marché textile chinois.

      Quant aux anciens abattoirs de Rezé, dans l’agglomération nantaise, ils hébergent depuis juillet dernier Transfert, trois hectares de friche culturelle définie par ses concepteurs comme un « espace qui se mue en un lieu de transition où l’on imagine, invente et fabrique ensemble un lieu de vie qui questionne la ville de demain ». L’occupation provisoire durera cinq ans, le temps nécessaire à accroître l’attractivité et la valeur immobilière de ce no man’s land qui doit accueillir un gigantesque projet d’aménagement urbain prévoyant trois mille logements.

      Cette politique de l’éphémère à fin mercantile semble ainsi définitivement être sur les rails qui la conduiront à se pérenniser et à s’étendre à l’ensemble du territoire. « Nous avons désormais un vivier de porteurs de projets qui nous sollicitent, affirme Charlotte Girerd, de SNCF Immobilier. Depuis 2015, une vingtaine de projets d’urbanisme transitoire ont été mis en œuvre. Notre ambition est que d’ici 2019-2020, deux à trois sites répondant à la démarche d’urbanisme transitoire soient lancés chaque année, avec la volonté de travailler de plus en plus hors d’Île-de-France. »

      Une filiale de la SNCF à la manœuvre d’opérations immobilières spéculatives, des collectivités publiques au service du développement économique, des entreprises culturelles de plus en plus hégémoniques… Si les friches culturelles viennent « questionner la ville de demain », elles soulèvent aussi une tout autre question : comment faire exister une politique culturelle affranchie de toute logique économique ?

    • L’envers des friches culturelles | Mickaël Correia
      https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/231218/l-envers-des-friches-culturelles

      ( ai manqué publié un doublon ; j’ajoute ici pour mémoire l’ensemble de l’article et des #)

      MICKAËL CORREIA
      Terrains vagues, bâtiments désaffectés, rails à l’abandon… Un peu partout en France, ces espaces qui faisaient auparavant l’objet d’occupations illégales sont convertis en #lieux_culturels par une poignée d’#entrepreneurs ambitieux. Ces sites se présentent comme « engagés » et participant à la revalorisation de quartiers dépréciés. Mais cette « valorisation » semble avant tout financière. Une enquête parue dans le numéro 11 du Crieur, toujours en librairie.

      En haut de la rue de Ménilmontant, dans l’Est parisien, une palissade court le long du numéro 88. Pour les passants, impossible de deviner ce que cachent ces hautes planches de bois. Mais depuis l’an dernier, le 88 ouvre ses portes dès les prémices de l’été. Et il suffit de montrer patte blanche à un vigile nonchalant pour y découvrir une vaste friche réhabilitée en terrasse éphémère.

      Tables et chaises de guingois, mobilier en palettes de chantier et buvette en pin, décoration de bric et de broc, fresques street art… Tout respire l’esthétique récup’ et Do It Yourself. Sous la chaleur écrasante, certains sont avachis sur une chaise longue et sirotent une bière. D’autres s’adonnent paresseusement à une partie de ping-pong sur fond de musique électro.
      Durant tout l’été, dans cette scénographie naviguant entre squat urbain et guinguette, la #friche dénommée sobrement 88 Ménilmontant propose pêle-mêle initiations au yoga, ateliers de sophrologie ou performances artistiques. Entre deux palmiers en pot et une « fresque végétale collaborative », quelques rares graffitis semblent avoir été tracés bien avant la réhabilitation de cet espace en jachère. « Ce sont de vieux graffs qu’on pourrait presque qualifier d’historiques, assure une habitante du quartier. Avant, il y avait un squat d’artistes ici et tout a été rasé ! »

      À peine quatre ans auparavant, en lieu et place du 88 Ménilmontant, se dressaient d’anciens ateliers d’artisans miroitiers. Occupé depuis 1999 par un collectif libertaire, le bâtiment, rebaptisé La Miroiterie, était au fil des ans devenu un #squat incontournable de la scène musicale underground parisienne. Ses concerts éclectiques – hip-hop francilien, punk suédois, rap libanais, sans compter les interminables jam-sessions jazz du dimanche – attiraient chaque semaine un public bigarré.

      Certes, le lieu commençait à être insalubre, la qualité sonore n’était pas toujours au rendez-vous et les murs tagués sentaient la bière éventée. Mais comme le soulignent Emy Rojas et Gaspard Le Quiniou, qui y ont organisé une trentaine de concerts sous l’étiquette Arrache-toi un œil, « en passant le portail du squat, il y avait une sensation de liberté difficile à retrouver dans des lieux plus institutionnels ». Avec ses soirées à prix modiques, ses ateliers d’artistes indépendants et ses stands proposant fanzines et autres disques autoproduits, cet espace autogéré incarnait un îlot de #contre-culture mythique bien au-delà des frontières de la capitale.

      En avril 2014, l’effondrement d’un mur vétuste lors d’un concert sonne le glas de cette aventure singulière. Menacés d’expulsion depuis 2009 par un promoteur immobilier ayant acquis la parcelle, les occupants de La Miroiterie sont évacués sans ménagement ni projet de relogement, et ce malgré quinze années d’animation du quartier et le soutien de nombreux habitants.

      À deux pas de l’ex-Miroiterie siège l’imposante Bellevilloise. Fort de ses deux mille mètres carrés de salle de concert, d’espace d’exposition et de restaurant, cet établissement culturel est aujourd’hui l’un des repaires incontournables du Paris branché. Chaque année, le site accueille près de deux cent mille visiteurs qui viennent clubber ou applaudir des groupes estampillés « musique du monde ». À ces activités festives s’ajoutent des débats publics, avec parfois des invités de prestige comme Edgar Morin ou Hubert Reeves, et des soirées privées de grandes entreprises telles que Chanel et BNP Paribas.

      La façade de La Bellevilloise à Paris.

      Plus qu’un temple dédié à la #culture et aux grands événements parisiens, La Bellevilloise est aussi la figure de proue des friches urbaines reconverties en sites culturels. Ancienne coopérative ouvrière de consommation créée peu de temps après la Commune, bastion militant où Jean Jaurès tenait ses rassemblements, l’immeuble à l’abandon, qui hébergea après guerre une caisse de retraites, a été racheté au début des années 2000. À la manœuvre de cette opération immobilière, un trio de jeunes entrepreneurs issus du monde du spectacle et de la publicité. « Nous étions assez pionniers à l’époque. Mobiliser une surface aussi importante sur Paris pour des activités culturelles, c’était novateur », reconnaît Renaud Barillet, l’un des trois fondateurs et directeur général associé de La Bellevilloise.

      Quand le site est inauguré en 2006, le chef d’entreprise est pleinement dans l’air du temps. Motrice de nombreuses occupations illégales de friches industrielles, la vague techno qui a submergé l’Europe à la fin des années 1980 est alors en train de progressivement s’éteindre. Les warehouses berlinoises, ces entrepôts désaffectés investis le temps d’une soirée clandestine, se transforment en clubs électros commerciaux. À Paris, l’organisation en 2001 d’une fête techno sauvage dans l’ancienne piscine désaffectée Molitor, en plein XVIe arrondissement, marque le chant du cygne des free parties urbaines.

      La façade de La Condition publique à Roubaix.

      Le tournant des années 2000 voit dès lors les débuts de la réhabilitation des lieux industriels en #espaces_culturels. L’ancien marché couvert Sainte-Marie à Bruxelles est reconverti en 1997 en complexe culturel baptisé Les Halles de Schaerbeek. De son côté, la manifestation Lille 2004 Capitale européenne de la culture fait émerger nombre d’établissements dans des usines abandonnées par l’industrie textile locale. « Nous nous sommes inspirés de La Condition publique, un lieu culturel installé dans un ancien entrepôt de laine à Roubaix depuis Lille 2004, mais aussi de ce que fabriquait Fazette Bordage, la créatrice du Confort moderne à Poitiers, première friche culturelle en France », détaille Renaud Barillet.

      Du point de vue de l’équipe de La Bellevilloise, se pencher sur le 88 de la rue de Ménilmontant était une démarche des plus évidente. « Nous avons toujours été préoccupés par ce que La Miroiterie allait devenir, car un squat, par définition, c’est éphémère, explique l’entrepreneur. Comme elle est située juste derrière La Bellevilloise, nous nous sommes dit que si une opération immobilière se préparait, il fallait être attentif à l’ensemble architectural, aux problèmes de nuisances sonores, etc. »

      Ayant eu vent de ce que le récent propriétaire du lieu voulait édifier un immeuble d’un seul tenant, les dirigeants de La Bellevilloise interpellent Bertrand Delanoë, à l’époque maire de la capitale. À peine quelques mois plus tard, #Paris_Habitat, bailleur social de la ville de Paris, rachète le lot immobilier et un projet de réhabilitation est ficelé avec Renaud Barillet et ses comparses : côté rue, des logements étudiants avec, au rez-de-chaussée, sept ateliers-boutiques d’artistes design. En fond de cour, l’entrepreneur a prévu « une fabrique d’image et de son [ un studio de production et une salle de concert – ndlr ], des espaces de coworking, des bureaux et un spa à dimension artistique ».

      Bertrand Delanoë en 2010.

      Partant, l’ancienne Miroiterie est démolie. Afin de rentabiliser cette friche et d’engranger des recettes qui serviront à la construction du nouvel établissement (dont l’ouverture est prévue en 2021), l’équipe a mis sur pied une terrasse éphémère dès le printemps 2017. Bien éloigné des visées culturelles à but non lucratif de La Miroiterie, le 88 Ménilmontant n’est pas sans susciter l’ire des riverains et des anciens occupants du squat.

      Figure historique de La Miroiterie, Michel Ktu déclare ainsi par voie de presse : « Ils montent des salles en piquant nos idées parce qu’eux n’en ont pas. Ils récupèrent un décor de squat, mettent des câbles électriques apparents, des trous dans le mur, des canapés défoncés et des graffs, mais ils ne savent pas accueillir les gens ni les artistes. » « Il y a une surface vide, autant qu’elle soit utilisée, se défend Renaud Barillet. Quant à la forme “transat et tireuses à bière”, on ne va pas réinventer l’eau chaude : c’est un modèle basique et provisoire. »

      Faire du blé sur les friches

      Renaud Barillet n’en est pas à son galop d’essai. Avec son acolyte, Fabrice Martinez, également cofondateur de La Bellevilloise et ancien chef de publicité chez Nike et Canal+, il a récemment créé le groupe Cultplace, qui s’affiche comme une « fabrique de lieux de vie à dimension culturelle ». Les ambitieux entrepreneurs ont ainsi reconverti en 2013 un coin des halles de La Villette, anciens abattoirs aux portes de la capitale rénovés au début des années 2000. Dans cet écrin de métal et de verre appartenant au patrimoine public, ils ont conçu un restaurant-scène de jazz baptisé La Petite Halle.

      La rotonde du bassin de la Villette.

      Au sud du bassin de la Villette, La Rotonde, ex-barrière d’octroi du nord de Paris datant du XVIIIe siècle, a quant à elle été réhabilitée par ces businessmen en Grand Marché Stalingrad, hébergeant des « comptoirs food », un concept-store design et un club. Le bâtiment, alors à l’abandon, avait été restauré à l’initiative de la ville de Paris en 2007.

      Durant la seule année 2018, deux friches industrielles reconverties en site culturel ont ouvert sous la houlette de #Cultplace. L’ancienne gare désaffectée de Montrouge-Ceinture a été confiée par Paris Habitat et la mairie du XIVe arrondissement à Renaud Barillet afin d’être rénovée en café-restaurant culturel. Sur les bords du canal de l’Ourcq, à Pantin, les gigantesques Magasins généraux ont été quant à eux réhabilités en 2016. Longtemps surnommés le « grenier de Paris », ces entrepôts stockaient auparavant les grains, farines et charbons qui approvisionnaient la capitale.

      Si l’immeuble de béton accueille depuis peu le siège du géant de la publicité BETC, Cultplace y a niché à ses pieds Dock B – le B faisant référence à La Bellevilloise –, mille deux cents mètres carrés de cafés-comptoirs, scène artistique et terrasse qui devraient être inaugurés à la rentrée 2018. « Tous nos lieux sont indépendants, car nous ne sommes pas sous tutelle publique ni même subventionnés, insiste Renaud Barillet. Nous ne dépendons pas d’un grand groupe ou d’un seul investisseur. »

      Logo de CultPlace.

      Cultplace n’est cependant pas la seule entreprise partie à la conquête des friches industrielles de la métropole parisienne. En vue de concevoir et d’animer le Dock B, Renaud Barillet s’est associé à l’agence Allo Floride. Avec La Lune rousse, une société organisatrice d’événementiels, cette dernière a été à l’initiative de Ground Control, un bar temporaire inauguré en 2014 à la Cité de la mode et du design. Depuis cette première expérience lucrative, La Lune rousse s’est fait une spécialité : l’occupation provisoire, sous l’étiquette Ground Control, de sites désaffectés appartenant à la SNCF.

      Ainsi, en 2015, quatre mille mètres carrés du dépôt ferroviaire de la Chapelle, dans le XVIIIe arrondissement, ont été mis à disposition de l’entreprise le temps d’un été afin de le reconvertir en « bar éphémère, libre et curieux ». La manifestation s’est révélée si fructueuse en termes d’affluence qu’elle a été renouvelée l’année suivante par la SNCF, attirant quatre cent mille personnes en cinq mois.

      Espace insolite chargé d’histoire industrielle, musique électro, transats, ateliers de yoga, comptoirs food et esthétique récup’, le concept Ground Control utilise exactement les mêmes ficelles que Cultplace pour produire ses friches culturelles. Quitte à réemployer les mêmes éléments de langage. Se définissant ainsi comme un « lieu de vie pluridisciplinaire » ou comme une « fabrique de ville, fabrique de vie », Ground Control, couronné de son succès, a pris place depuis 2017 au sein de la Halle Charolais, un centre de tri postal de la SNCF situé près de la gare de Lyon. Un million de visiteurs annuels sont cette fois-ci attendus dans le hangar à l’abandon.

      Ouvertes en février, la « Halle à manger », qui peut servir trois cents couverts par jour, les boutiques et les galeries-ateliers de Ground Control se réclament toutes d’un commerce équitable ou bio. Et si, sur la cinquantaine de #salariés sur le site, quarante-deux sont employés en tant que #saisonniers, ce « laboratoire vivant d’utopie concrète », aux dires de ses créateurs, n’hésite pas à s’afficher comme un « lieu engagé » accueillant tous ceux qui sont en « mal de solidarité ».

      Toutefois, Denis Legat, directeur de La Lune rousse, ne s’est pas seulement attelé à la réhabilitation d’une jachère urbaine en friche culturelle « alternative et indépendante ». Depuis plus de vingt ans, cet homme d’affaires s’est solidement implanté dans le business de l’organisation des soirées d’entreprise. Sa société compte à son actif la mise en œuvre de la Nuit électro SFR (si_ c)_ au Grand Palais, afin de « célébrer l’arrivée de la 4G à Paris », ou encore la privatisation de la salle Wagram lors d’une soirée Bouygues Bâtiment.

      Récemment, La Lune rousse a conçu un « bar à cocktail domestique et connecté » pour le groupe Pernod Ricard, présenté lors d’un salon high-tech à Las Vegas, et scénographié la summer party de Wavestone, un cabinet de conseil en entreprise coté en bourse. Des clients et des événements bien éloignés des « initiatives citoyennes, écologiques et solidaires » brandies par Ground Control…

      Malgré l’ambivalence éthique de La Lune rousse, la SNCF s’est très bien accommodée de cette entreprise acoquinée avec les fleurons du secteur privé français pour occuper plusieurs de ses friches. « Ce sont des lieux qui nous appartiennent et que nous ne pouvons pas valoriser immédiatement, justifie Benoît Quignon, directeur général de SNCF Immobilier, la branche foncière du groupe. Nous choisissons donc de les mettre à disposition d’acteurs qui se chargent de les rendre vivants. »

      En faisant signer à La Lune rousse une convention d’occupation temporaire de la Halle Charolais jusque début 2020, l’objectif de SNCF Immobilier est assurément de rentabiliser financièrement cet espace vacant sur lequel un programme urbain dénommé « Gare de Lyon-Daumesnil » prévoit la création de six cents logements, de bureaux et d’équipements publics d’ici 2025.

      C’est que #Ground_Control s’inscrit plus largement dans une politique foncière en pleine expansion au sein de la SNCF : l’#urbanisme_transitoire. « Cette démarche dite d’“urbanisme temporaire” ou transitoire est un levier essentiel de valorisation, avance Fadia Karam, directrice du développement de SNCF Immobilier. Cela permet d’intensifier l’usage de nos sites parfois vides et d’éluder des coûts de #gardiennage, d’entretien et de #sécurité, en limitant la détérioration et l’obsolescence de notre patrimoine. En dotant nos sites de nouveaux usages, nous développons la valeur de nos actifs. »

      La stratégie d’urbanisme transitoire du groupe ferroviaire prend naissance en 2013, quand une galerie de street art propose à ICF Habitat, filiale logement de la SNCF, d’investir provisoirement une de ses tours de logement destinée à la démolition. L’initiative, baptisée Tour Paris 13, est une telle réussite – trente mille visiteurs en un mois – que la SNCF entrevoit rapidement dans ce site culturel éphémère un formidable outil de #communication sur la future HLM qui s’érigera en lieu et place de la tour. Et, par ricochet, d’augmentation de l’attractivité de ce quartier résidentiel grâce aux artistes graff les plus célèbres de la scène mondiale venus s’approprier l’immeuble en friche.

      Rapidement surnommée la « cathédrale du #street_art », la tour a été l’objet d’une grande attention médiatique, à l’image de Télérama, qui ira jusqu’à suivre en direct, avec trois caméras, la destruction du bâtiment en 2014. Trois ans plus tard, le même journal publiait un article élogieux sur le nouvel « immeuble HLM à l’architecture délirante » situé dans l’« #eldorado parisien du street art ». Une opération de communication bénéficiant à la fois à l’acteur privé – la galerie Itinerrance – et à la SNCF, qui a pu aisément vendre ses logements flambant neufs à un prix lucratif.

      En 2015, deux ans après Tour Paris 13, l’occupation temporaire du dépôt de train de la Chapelle par Ground Control est appréhendée par SNCF Immobilier comme un projet pilote en vue de mieux formaliser sa démarche d’urbanisme transitoire. Après cette expérience concluante de friche culturelle éphémère, la filiale lance en fin d’année un appel à manifestation d’intérêt afin que seize de ses espaces désaffectés soient reconvertis provisoirement en « sites artistiques temporaires ».

      En réinvestissant une deuxième fois le dépôt de la Chapelle en 2016, puis la Halle Charolais de la gare de Lyon, Denis Legat devient, avec son concept Ground Control, le fer de lance de l’urbanisme transitoire prôné par la société nationale des chemins de fer. Au plus grand bonheur de Marie Jorio, cadre développement au sein de SNCF Immobilier qui, à propos du site de la Chapelle, déclare sans ambages : « Avec Ground Control, nous avons fait exister cette adresse plus rapidement et avons créé de l’attractivité : les opérateurs ont envie d’y aller et d’innover ! »

      Aux yeux de la SNCF, la friche culturelle Ground Control a en effet servi d’outil #marketing pour mieux promouvoir l’#aménagement_urbain qui prévoit la construction de cinq cents logements dans ce coin morne du XVIIIe arrondissement. Quant aux visiteurs, ils ont été les cobayes de la future identité urbaine de ce quartier dévitalisé, Ground Control constituant un showroom hype au service du complexe immobilier en devenir. « L’ADN ferroviaire du site du dépôt Chapelle est ressorti très fortement dans l’appétence et le succès du concept, révèle ainsi SNCF Immobilier. Le projet urbain en cours de définition fera revivre cet ADN et cette identité ferroviaire très forte qui constituent un actif immatériel et un capital fort. »

      Le recours aux occupations temporaires pour accroître la valeur financière d’un projet immobilier et préfigurer ses futurs usages est de plus en plus systématique. En janvier 2018, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Île-de-France avait recensé pas moins de soixante-dix-sept projets d’urbanisme transitoire en région francilienne depuis 2012 – dont plus de la moitié sont en cours. Quatre cinquièmes des propriétaires des sites sont des acteurs publics ( collectivités locales, établissements publics d’aménagement, SNCF, bailleurs sociaux ) et les occupations à dimension culturelle sont largement prédominantes.

      Les pouvoirs publics locaux ont par ailleurs décidé d’accompagner pleinement cette dynamique d’optimisation foncière. Le conseil municipal de Paris et le conseil métropolitain du Grand Paris ont tous deux récemment adopté le vœu qu’à l’avenir, tout projet d’aménagement urbain soit précédé d’une opération d’urbanisme transitoire. De plus, sur la quarantaine de projets d’urbanisme temporaire actuels, vingt-sept sont soutenus par la région Île-de-France dans le cadre de son appel à manifestations d’intérêt sur l’urbanisme transitoire lancé en 2016. Une enveloppe qui s’élève à 3,3 millions d’euros.

      Là encore, malgré les incantations à l’« innovation urbaine » et à la « transition écologique » de cet appel à projets, c’est avant tout l’argument économique qui fait mouche. « Il faut en moyenne douze ans pour qu’une ZAC [ zone d’aménagement concerté ] sorte de terre, avançait l’an dernier Chantal Jouanno, alors vice-présidente de la région. Durant ce laps de temps, les immeubles ne servent à personne, peuvent être squattés et perdre leur valeur. » La nature a horreur du vide. Les édiles parisiens également.

      Espace public, bénéfice privé

      Cultplace et La Lune rousse ne se contentent pas d’accaparer des friches. L’ensemble de leurs sites éphémères et établissements présentent en effet la particularité d’être des espaces hybrides, à la fois publics et privatisables, culturels et commerciaux. Des logiques tout autant artistico-festives que marchandes, qui ont permis aux entrepreneurs culturels de s’approprier une dénomination en vogue : celle de « #tiers-lieu ».

      Conceptualisé par le sociologue américain Ray Oldenburg dans un ouvrage intitulé The Great Good Place ( 1989 ), le tiers-lieu désigne à l’origine les espaces de sociabilité situés en dehors du domicile et du travail, comme les cafés ou les parcs publics. Cette expression aux contours flous a été employée afin de qualifier les premiers fablabs, les hackerspaces et autres jardins urbains partagés. Mais au grand dam des tenants de l’éthique open source et de l’esprit collectif de la débrouille, le terme de tiers-lieu s’est progressivement dénaturé jusqu’à qualifier de facto tout espace hébergeant des activités pluridisciplinaires, gratuites comme lucratives.

      « Je vois nos sites comme des écrins pour l’initiative, pour l’émergence d’envies, s’enflamme ainsi Renaud Barillet. Mais la réalité économique d’un tiers-lieu comme la friche 88 Ménilmontant fait qu’on a besoin de clients. Ce que l’on fabrique, ce sont des initiatives privées mais qui peuvent avoir une quote-part d’intérêt général. »

      Loïc Lorenzini, adjoint au maire du XVIIIe arrondissement chargé des entreprises culturelles, porte néanmoins un autre regard sur l’émergence de ces tiers-lieux. « Ground Control au dépôt de la Chapelle, cela n’a pas été évident avec eux au début, se souvient l’élu. Il y avait un #service d’ordre avec des #vigiles à l’entrée du lieu, ce qui n’a pas vraiment plu aux habitants du quartier. »

      Sa circonscription héberge actuellement deux sites artistiques temporaires de la SNCF : L’Aérosol – un hangar de fret reconverti en espace dédié au graffiti – et La Station-gare des mines – ancienne gare à charbon devenue salle de concert. Ces deux occupations de sites ferroviaires en friche préfigurent d’importants projets d’aménagement urbain comportant des logements, des bureaux ou encore l’Arena 2, une salle omnisports qui devrait être inaugurée en vue des Jeux olympiques de 2024.

      « Ces entreprises culturelles sont venues bousculer la vision classique de la culture, c’est-à-dire une vision subventionnée, avance Loïc Lorenzini. L’enjeu avec ces tiers-lieux, c’est qu’ils ne deviennent pas le cache-sexe de projets privés urbanistiques. Notre rôle est de rappeler que dans un arrondissement populaire comme le XVIIIe, il y a des enjeux locaux forts, telle la gentrification. »

      Les friches culturelles, têtes de pont de la gentrification ? C’est justement ce que dénonce le collectif d’habitants Droit à la (Belle)ville, créé en 2015 dans l’est de Paris. « Ces tiers-lieux excluent symboliquement les #habitants les plus #précaires du quartier, fustige Claudio, l’un des membres de l’association. On autorise temporairement des occupations de friche par des acteurs privés mais en parallèle, dès qu’il y a une occupation informelle de l’espace public à Belleville, comme quand, encore récemment, des jeunes font un barbecue improvisé dans la rue ou des militants organisent un marché gratuit, la police est systématiquement envoyée. »
      Et Quentin, également du collectif, d’ajouter : « Pour ces entrepreneurs et pour les élus, les artistes ne sont que des créateurs de valeur. Les sites culturels qui les hébergent participent à changer l’image de notre quartier, à le rendre plus attractif pour les populations aisées. Ce sont des espaces qui sont pleinement inscrits dans la fabrication de la ville pilotée par le #Grand_Paris. »

      Ambitionnant de faire de la région Île-de-France une métropole compétitive et mondialisée, le projet d’aménagement territorial du Grand Paris entrevoit dans les tiers-lieux culturels un outil de promotion de son image de #ville_festive, innovante et écoresponsable à même d’attirer une « #classe_créative ». Une population de jeunes cadres qui serait, aux yeux des décideurs, vectrice de développement économique.

      Les futures friches estampillées La Bellevilloise sont ainsi pleinement ancrées dans la stratégie de développement urbain et de #marketing_territorial portée par les élus de la #métropole. Dans l’ancienne station électrique Voltaire, au cœur du XIe arrondissement, Renaud Barillet prévoit pour 2021 un cinéma et un « restaurant végétalisé et solidaire ». L’exploitation de ce bâtiment industriel a été remportée par l’entrepreneur dans le cadre de Réinventer Paris, un appel à projets urbains lancé fin 2014 par la mairie de Paris afin de développer « des modèles de la ville du futur en matière d’architecture, de nouveaux usages, d’innovation environnementale et d’écoconstruction ».

      Le dirigeant de La Bellevilloise vient même de réussir à faire main basse sur l’ancienne piscine municipale de Saint-Denis, via le concours Inventons la métropole du Grand Paris. Avec l’aide d’un investissement financier de la part de #Vinci Immobilier, la piscine dyonisienne à l’abandon sera « à la frontière entre l’hôtel, le gîte et l’auberge de jeunesse » et le relais d’« initiatives entrepreneuriales, culturelles, artistiques, sportives et citoyennes ».

      « On est conscient de notre impact dans un quartier mais la gentrification est un rouleau compresseur sociologique qui nous dépasse », assure pourtant Renaud Barillet. « Nous ne sommes pas dans un processus naturel mais bien dans un conflit de classes. À Paris, nous sommes dans une continuité d’expulsion des #classes_populaires qui a débuté depuis la Commune en 1871, analyse Chloé, du collectif Droit à la (Belle)ville. Dans ces friches, les entrepreneurs vont jusqu’à récupérer le nom, l’imaginaire politique, les anciens tags de ces espaces pour les transformer en valeur marchande. »

      La Bellevilloise n’hésite ainsi nullement à s’afficher sur ses supports de communication comme « Le Paris de la Liberté depuis 1877 » et, dans le futur projet du 88 de la rue Ménilmontant, le spa pourrait s’appeler « Les Thermes de La Miroiterie ». « Ils accaparent des ressources que les habitants ont créées, que ce soient les ouvriers qui ont mis sur pied La Bellevilloise à la fin du XIXe siècle ou les punks libertaires de La Miroiterie au début des années 2000, souligne Claudio. Ces tiers-lieux culturels transforment des valeurs d’usage en valeur d’échange… »

      Rien ne se perd, tout se transforme

      Dernier avatar en date des tiers-lieux culturels qui foisonnent dans la capitale, La Recyclerie se présente comme « une start-up innovante qui réinvente le concept du tiers-lieu ( ni la maison ni le travail ) et fédère un large public sur le thème de l’écoresponsabilité ». Inauguré en 2014, cet établissement, composé d’un café-cantine, d’un atelier de réparation et d’une mini-ferme urbaine, est implanté au sein d’une station de train désaffectée de la Petite Ceinture, la gare Ornano, au nord du XVIIIe arrondissement.

      Un emplacement loin d’être anodin : la station à l’abandon se situe en effet porte de Clignancourt, à deux pas des échoppes discount des puces de Saint-Ouen, de la préfecture de police chargée des demandes d’asile de la capitale et d’un bidonville de Roms installé en contrebas de l’ancienne voie ferrée. Un carrefour où vendeurs à la sauvette, chiffonniers et migrants tentent de survivre par l’économie informelle.
      Malgré le fait qu’un tiers-lieu culturel ne soit pas de prime abord le projet urbain le plus pertinent en termes de besoins sociaux dans ce quartier populaire, « le maire de l’époque, Daniel Vaillant, a personnellement appuyé notre dossier, dévoile Marion Bocahut, présentée comme cheffe de projet écoculturel du lieu. La mairie du XVIIIe n’avait pas les moyens financiers d’acheter la gare Ornano, nous avons donc racheté l’intérieur du bâtiment ».

      La Recyclerie appartient à #Sinny_&_Ooko, une société « créatrice de tiers-lieux et d’événements » dirigée par Stéphane Vatinel. Figure du milieu de la nuit, connu pour avoir fondé en 1992 le Glaz’art, un club électro emblématique installé dans un ancien dépôt de bus, l’entrepreneur a repris de 2003 à 2008 les rênes du Divan du monde, salle de spectacle historique de Pigalle.

      Par l’intermédiaire de son entreprise, ce quinquagénaire hyperactif est aujourd’hui l’exploitant de La Machine du Moulin rouge, l’incontournable discothèque techno du nord de la capitale, et du Pavillon des canaux, une bâtisse abandonnée sur les bords du bassin de la Villette réhabilitée en coffice – mi-café, mi-espace de travail.

      Quand il rachète la gare Ornano pour installer son tiers-lieu empreint « des valeurs collaboratives et du Do It Yoursef », Stéphane Vatinel fait appel à son ami #Olivier_Laffon, qui s’investit financièrement dans l’opération. Cet ancien magnat de l’immobilier devenu millionnaire a été le promoteur de mégacentres commerciaux, à l’instar de Bercy Village, Vélizy 2 ou Plan de campagne dans les Bouches-du-Rhône. Mais avec sa holding C Développement, Olivier Laffon s’est reconverti dans l’#entreprenariat_social.

      Sa réalisation la plus célèbre demeure le Comptoir général, un ancien entrepôt au bord du canal Saint-Martin reconverti en 2009 en bar et « espace événementiel écosolidaire » à l’ambiance exotique. Devenu une référence quasi caricaturale du « Paris branché », le Comptoir général a fait appel jusqu’en 2013 aux services de Sinny & Ooko afin de développer et d’animer sa programmation. Une alliance pérenne entre les deux hommes d’affaires puisque C Développement avait précédemment investi dans le rachat du Divan du monde et dans La Machine du Moulin rouge, établissements gérés par Stéphane Vatinel…

      Pour les événements écoculturels de La Recyclerie, Sinny & Ooko a fait appel à un partenaire des plus édifiants : la fondation Veolia. L’entreprise du #CAC_40, connue pour être le géant mondial de la privatisation de l’eau, finance en effet en grande partie la programmation du lieu et est partenaire de son cycle de conférences sur l’économie circulaire. La bibliothèque de La Recyclerie a de surcroît été ouverte avec des livres offerts par la multinationale. « Veolia nous accompagne aussi dans notre développement, notamment avec Scale up ( “changement d’échelle” ), un programme de l’Essec Business School qui nous a permis de savoir comment dupliquer un lieu comme La Recyclerie », détaille Marion Bocahut.

      Le concept de La Recyclerie a effectivement depuis peu changé d’échelle. Sinny & Ooko a inauguré en août dernier un nouveau tiers-lieu écoculturel baptisé la Cité fertile. Ici, comme pour Ground Control, SNCF Immobilier a fait signer à Sinny & Ooko, à l’aune de son appel à projets sur l’urbanisme transitoire, une convention d’occupation de trois ans de son ancienne gare de fret basée à Pantin. « Nous sommes là pour opérer une transition entre une gare de marchandises et le futur #écoquartier de la ville de Pantin », assume Clémence Vazard, cheffe du projet de la Cité fertile.

      L’écoquartier prévoit mille cinq cents logements et près de cent mille mètres carrés de bureaux et de locaux commerciaux. Une opération foncière des plus rentables pour SNCF Immobilier et les promoteurs. Surnommée la « Brooklyn parisienne », Pantin constitue depuis peu un eldorado de la spéculation immobilière : l’ancienne cité industrielle a vu flamber de 15 % en cinq ans le prix du mètre carré, un record parmi les villes de la petite couronne parisienne.

      En attendant, sur près d’un hectare, la Cité fertile veut « explorer et imaginer la ville de demain » en attirant un million de curieux par an avec ses ateliers, ses conférences et sa cantine approvisionnée en circuits courts. Clémence Vazard explique que l’équipe a consulté la municipalité de Pantin afin d’« identifier les acteurs locaux et demander leurs contacts ». Parmi la cinquantaine de personnes salariées sur le site, une seule pourtant se consacre à cette ouverture sur les Pantinois. « En tout cas, si on a un partenariat comme Veolia qui peut se présenter, ce serait le meilleur pour nous », souligne la cheffe de projet. Avant de préciser : « Sinny & Ooko possède l’agrément Entreprise solidaire d’utilité sociale ( Esus ), en aucun cas nous ne faisons du greenwashing. »

      L’originalité de cette friche éphémère réside cependant ailleurs. La Cité fertile héberge en effet depuis septembre le « campus des tiers-lieux », école de formation et incubateur d’entreprises dont le but est de développer les tiers-lieux culturels en tant que modèles économiques d’avenir. « Depuis l’an dernier, Sinny & Ooko est certifié comme organisme de formation. Nous proposons un module pour apprendre à être responsable de tiers-lieu culturel, détaille Clémence Vazard. Nous avons déjà formé une soixantaine de personnes, dont certaines ont récemment monté leur propre tiers-lieu à Montreuil – la Maison Montreau – ou à Niamey, au Niger – L’Oasis, un espace de coworking parrainé par Veolia. »

      Selon les formateurs Sinny & Ooko, le tiers-lieu culturel est un modèle démultipliable à souhait, telle une unité standardisée qui se résume, selon sa plaquette de présentation, à un « HCR [ hôtel café restaurant ] à portée culturelle », où une activité économique « socle » de bar-restauration permet de financer une programmation qui fait vivre le lieu.

      Friche partout, créativité nulle part

      En moins de cinq ans, Cultplace, La Lune rousse et Sinny & Ooko ont édifié un véritable petit empire économique en Île-de-France. Elles ont même l’ambition de s’implanter durablement à travers l’Hexagone en reproduisant des fac-similés de leurs tiers-lieux respectifs. Renaud Barillet a ainsi récemment remporté deux appels à projets à Bordeaux et un autre à Lyon afin d’édifier « des projets très proches en termes d’ADN et de ventilation des espaces de ce qu’est La Bellevilloise ».

      En Charente-Maritime, à Rochefort, Cultplace est en train de mettre sur pied Grand foin, « une déclinaison rurale de La Bellevilloise », aux dires de Renaud Barillet. Par ailleurs, depuis 2016, Denis Legat et son équipe débarquent chaque été aux Rencontres de la photographie d’Arles, où ils investissent un ancien hangar de la SNCF avec leur habituelle formule Ground Control.

      Stéphane Vatinel, quant à lui, doit ouvrir d’ici 2023 La Halle aux Cheminées, un tiers-lieu dans une ancienne friche militaire de Toulouse dont le concept n’est autre qu’un copier-coller de La Recyclerie. Autant de jalons d’une hégémonie économico-culturelle dont se défend du bout des lèvres Renaud Barillet : « C’est vrai que ceux qui ont commencé à réaliser des tiers-lieux arrivent aujourd’hui à se développer et je pense que pour un nouveau venu, ce n’est pas si simple. Les appels d’offres demeurent très économiques et orientés vers l’immobilier. »

      Ce business model des friches est si bien rodé et rencontre un tel succès qu’il en devient vecteur d’une certaine uniformisation. À Paris, en plus du Poinçon, la gare de Montrouge rénovée par Cultplace, et de La Recyclerie, ex-gare Ornano, la plupart des seize stations de la #Petite_Ceinture deviendront des tiers-lieux, à l’instar du Hasard ludique, « lieu culturel hybride » niché porte de Saint-Ouen, ou de La Gare-jazz à la Villette – en lieu et place de l’ancien squat artistique Gare aux gorilles.

      La gare Masséna vue depuis la rue Regnault.

      Dans le cadre de Réinventer Paris, l’ancienne gare Masséna sera quant à elle réhabilitée en « lieu de vie et de proximité » d’ici 2019 avec bar et cantine, ferme urbaine, boutiques bio, espaces artistico-culturels et bureaux. Enfin, Stéphane Vatinel a l’an dernier remporté l’exploitation de deux sites en friche grâce à Réinventer la Seine, un appel à projets visant à « la construction d’un territoire métropolitain évident et d’envergure internationale ». Une usine désaffectée à Ivry et l’ancien tribunal de Bobigny seront ainsi, à l’horizon 2022, reconvertis tous deux en tiers-lieux écoculturels estampillés Sinny & Ooko.

      À cette dynamique de duplication des tiers-lieux s’ajoutent les dizaines de #terrasses_temporaires qui essaiment chaque été dans les interstices urbains de la capitale, à l’image de la Base Filante, une friche éphémère de trois mille mètres carrés qui a ouvert ses portes en juillet dernier à deux pas du Père-Lachaise. L’initiative est portée par quatre collectifs, dont certains ont déjà pris part à la conception d’une autre terrasse temporaire, la friche Richard Lenoir, ou à l’aménagement de La Station-gare des mines.

      Au programme de la Base Filante, le sempiternel quatuor bières artisanales, cours de yoga, tables de ping-pong et musique électronique. « On assiste à une sorte de standardisation qui annihile toute créativité : tout espace en friche se voit devenir un lieu éphémère avec un bar et des transats, s’alarme Quentin, du collectif Droit à la ( Belle )ville. La créativité s’arrête dès qu’il y a une tireuse à bière artisanale… »

      Enfin, la mise en avant quasi généralisée de l’imaginaire « squat », via la scénographie récup’ et DIY, comme à travers la rhétorique de l’alternative et du collaboratif dans la communication de ces lieux festifs, participe également à cette uniformisation des sites culturels. « Ces friches font croire à une fausse occupation de l’espace alors qu’il y a des vigiles à l’entrée, fulmine Quentin. On vend de faux espaces de liberté où on dit aux gens ce qu’ils doivent consommer et où. »

      Pour les chercheuses Juliette Pinard et Elsa Vivant, « cette #esthétique_du_squat […], donnant la part belle aux atmosphères brutes et industrielles, participe à la #mise_en_scène de ces lieux temporaires en tant qu’“espaces alternatifs” et expérience singulière ». En institutionnalisant les occupations transitoires, les friches culturelles éphémères ont réussi le tour de force de neutraliser la portée subversive des squats artistiques, qui contestaient la propriété privée en privilégiant le droit d’usage, tout en s’appropriant leurs codes esthétiques.

      « Et le squat devient fréquentable », titrait ainsi Télérama en avril dernier à propos des occupations transitoires après que Libération eut publié sur son blog Enlarge Your Paris un entretien intitulé « Les friches font entrer les villes dans l’ère des squats légaux ».

      Dans le quartier Darwin.

      Le phénomène des friches culturelles se circonscrit de moins en moins à la région Île-de-France. À Bordeaux, les instigateurs du site culturel Darwin Écosystème, installé depuis 2009 dans l’ancienne caserne Niel et qui se présente comme un « lieu d’hybridation urbaine mêlant activités économiques et initiatives citoyennes », ne se sont jamais cachés de s’être inspirés directement de La Bellevilloise. Le promoteur immobilier Résiliance a de son côté mis à disposition un terrain vague de vingt hectares situé au nord de Marseille à Yes We Camp, un collectif de cinquante salariés spécialisé dans la création de friches culturelles éphémères, à Paris comme à Roubaix.
      Depuis cette année, la vaste parcelle en jachère accueille un « parc métropolitain d’un nouveau genre, à la fois lieu de vie, de mémoire, de pratiques culturelles et sportives ». Le site, baptisé Foresta, est inséré dans un projet d’aménagement porté par Résiliance et articulé autour d’un immense entrepôt commercial réservé aux grossistes du marché textile chinois.

      Quant aux anciens abattoirs de Rezé, dans l’agglomération nantaise, ils hébergent depuis juillet dernier Transfert, trois hectares de friche culturelle définie par ses concepteurs comme un « espace qui se mue en un lieu de transition où l’on imagine, invente et fabrique ensemble un lieu de vie qui questionne la ville de demain ». L’occupation provisoire durera cinq ans, le temps nécessaire à accroître l’attractivité et la valeur immobilière de ce no man’s land qui doit accueillir un gigantesque projet d’aménagement urbain prévoyant trois mille logements.

      Cette politique de l’éphémère à fin mercantile semble ainsi définitivement être sur les rails qui la conduiront à se pérenniser et à s’étendre à l’ensemble du territoire. « Nous avons désormais un vivier de porteurs de projets qui nous sollicitent, affirme Charlotte Girerd, de SNCF Immobilier. Depuis 2015, une vingtaine de projets d’urbanisme transitoire ont été mis en œuvre. Notre ambition est que d’ici 2019-2020, deux à trois sites répondant à la démarche d’urbanisme transitoire soient lancés chaque année, avec la volonté de travailler de plus en plus hors d’Île-de-France. »

      Une filiale de la SNCF à la manœuvre d’opérations immobilières spéculatives, des collectivités publiques au service du développement économique, des entreprises culturelles de plus en plus hégémoniques… Si les friches culturelles viennent « questionner la ville de demain », elles soulèvent aussi une tout autre question : comment faire exister une politique culturelle affranchie de toute logique économique ?

  • Acte IV : Gilets Jaunes des Luttes, via @paris
    https://paris-luttes.info/acte-iv-gilets-jaunes-des-luttes-11225

    Appel commun à un cortège massif des collectifs et des luttes pour un Acte IV, samedi 8 décembre, au départ de la Gare Saint Lazare et en direction des Champs-Élysées. Soyons plus nombreu.ses que jamais !

    Samedi 1er décembre, au milieu des nombreux affrontements entre Gilets jaunes et forces de police, un cortège hors du commun a vu le jour : à l’appel des Cheminots de l’Intergare, du Comité Adama, de la Plateforme d’Enquêtes Militantes, de l’Action Antifasciste Paris-Banlieue et du Comité de Libération et d’Autonomie Queer, nous avons défilé ensemble au départ de Saint-Lazare, vers les Champs-Élysées.

    Samedi 8 décembre, nous appelons à reproduire ces alliances pour faire front commun...

    Les banlieues hésitent à rejoindre le mouvement des « gilets jaunes », Louise Couvelaire (mais les lycéens du 93 et bien d’autres avant eux dès le 24 novembre ont déjà tranché, ndc)
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/05/les-banlieues-hesitent-a-rejoindre-le-mouvement-des-gilets-jaunes_5392966_32

    Les #banlieues hésitent à rejoindre le mouvement des « gilets jaunes »
    Après être restées à l’écart des #manifestations, des associations des quartiers populaires tentent de mobiliser.

    Pendant plusieurs semaines, elles n’ont pas bougé. Elles ont pris soin de rester à l’écart, « par prudence », expliquent-elles. D’abord parce qu’elles ont pensé que le mouvement était principalement conduit par des groupes d’extrême droite. Ensuite parce qu’elles ne voulaient pas qu’on impute aux banlieues les violences lors des manifestations. « Heureusement que les Noirs et les Arabes des cités n’y étaient pas dès le départ ! On leur aurait tout mis sur le dos », lance un associatif.
    Passé les premières réticences, certaines associations de banlieue tentent désormais de mobiliser les troupes. L’objectif ? Que les quartiers populaires rejoignent les « gilets jaunes » « massivement ». Un scénario que redoutent les pouvoirs publics. D’autant plus que les lycéens ont commencé à s’arrimer au mouvement.

    Les académies de Créteil et Versailles, en région parisienne, ont été parmi les premières à être touchées par les blocages, vendredi 30 novembre, sur fond de contestation autour de la réforme du baccalauréat et de Parcoursup. Ils étaient plus nombreux ce lundi à Aubervilliers et à Gagny (Seine-Saint-Denis), et à Chelles (Seine-et-Marne). Mardi, la contestation s’est poursuivie en Ile-de-France ainsi que dans plusieurs agglomérations de province, dont Marseille, Toulouse et Lyon, où des affrontements ont eu lieu entre manifestants et forces de l’ordre.

    « Nous, ce qu’on veut surtout, avant de pouvoir faire un plein d’essence, c’est du travail », lâche un résident des Yvelines
    « L’idée que les banlieues puissent se mettre en mouvement inquiète tout le monde, commente Stéphane Peu, député PC de Seine-Saint-Denis, sollicité ces derniers jours par plusieurs ministères anxieux de l’état d’esprit des quartiers. Je constate un soutien aux “#gilets_jaunes” mais pas de connexion directe. »
    Jusqu’à présent, nombre d’habitants des quartiers populaires se sont contentés d’observer ou de soutenir le mouvement à distance. « Pour une fois qu’on ne se retrouve pas en première ligne, lâche un résident des Yvelines, âgé d’une trentaine d’années, qui a participé, plus jeune, à des échauffourées dans sa ville. Et puis nous, ce qu’on veut surtout, avant de pouvoir faire un plein d’essence, c’est du travail. » D’autres ont participé dès la première journée de mobilisation, le 17 novembre, à des blocages, mais sans se revendiquer des « banlieues ». Ils l’ont fait au titre de leur activité professionnelle (contrats précaires, chauffeur VTC…) ou de leur situation personnelle (mère célibataire, chômage…), comme tout autre manifestant. « Le mouvement est né dans les zones rurales et les villes moyennes, alors forcément, les habitants des cités étaient moins représentés », précise un « gilet jaune » de Seine-Saint-Denis.

    La semaine dernière, le comité Vérité pour Adama – du nom d’Adama Traoré, 24 ans, mort en juillet 2016 à la suite d’une interpellation par des gendarmes dans le Val-d’Oise – a lancé un premier appel à rejoindre la manifestation du samedi 1er décembre, à la gare Saint-Lazare, à Paris, où se sont retrouvés ses alliés habituels : cheminots, étudiants proches de l’ultragauche et antifascistes. Etaient aussi présents le député de La France insoumise de Seine-Saint-Denis, Eric Coquerel, et le porte-parole du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), Oliver Besancenot. « Du MIB [Mouvement de l’immigration et des banlieues] au Larzac… Au comité Adama. En jaune », était-il inscrit sur l’une des banderoles.

    Cette semaine, le comité Adama, qui appelle à une « alliance des luttes », veut passer à la vitesse supérieure en activant tous ses réseaux. « Nous ne sommes pas porte-parole des quartiers ni représentatifs, il est essentiel que d’autres acteurs viennent grossir les rangs, on ne peut pas le faire tout seul : nous sommes donc en lien avec des associations en Ile-de-France mais aussi en province prêtes à suivre », affirme Assa Traoré, sœur d’Adama et figure de la lutte contre les violences policières.
    « Grave erreur »
    « On se sent une lourde responsabilité par rapport aux risques de violences et c’est en partie pour cela que l’on a hésité à y aller, explique Almamy Kanouté, militant politique et membre du comité Vérité pour Adama. Mais si nous restons plus longtemps absents de cette révolte légitime, cela va nourrir encore un peu plus le sentiment d’exclusion des habitants des quartiers. » Pour l’association, il s’agit avant tout d’« emmerder l’Etat » en essayant de « canaliser les énergies » sur des opérations précises : sièges de bâtiments institutionnels, opérations de péages gratuits…
    « Inciter les jeunes des quartiers à se joindre aux manifestations est une grave erreur, tempête un associatif. On sait très bien que certains ne viendront pas pour marcher ni bloquer, et personne ne pourra rien maîtriser. » « Parce que des “gilets jaunes” ont été violents, alors les quartiers n’auraient plus le droit d’y aller, sous prétexte qu’ils le seront forcément ? Et encore une fois on serait mis de côté ! Non », s’insurge Assa Traoré.
    Lire aussi Face à la crise du mouvement des « gilets jaunes », les préfets sonnent l’alerte politique
    La contestation actuelle, « déstructurée », leur permet de se joindre au mouvement « sans avoir à demander l’autorisation ni à attendre une invitation ». Estimant que les quartiers populaires urbains sont confrontés aux mêmes problématiques que les territoires ruraux et périurbains – vie chère, fins de mois difficiles, injustice sociale… –, le comité Adama – associé au collectif des cheminots de l’Intergare, à l’Action antifasciste Paris-banlieue et au site Plate-forme d’enquêtes militantes –, veut également « faire remonter » certaines revendications propres aux habitants des banlieues, qui ne figurent, à l’heure actuelle, dans aucun des cahiers de doléances de « gilets jaunes », telle que la lutte contre le racisme, les discriminations et les violences policières.
    « L’enjeu pour les habitants des banlieues, c’est avant tout d’avoir un boulot, souligne Anasse Kazib, du collectif des cheminots de l’Intergare et militant à SUD-Rail. Il y a une rage dans les quartiers, mais ils ne se mobilisent pas facilement. » « Pour l’instant, ça n’a pas l’air de prendre, mais personne ne sait comment la situation peut évoluer, conclut Stéphane Peu. Les phénomènes déclencheurs sont toujours imprévisibles. »
    Louise Couvelaire

    « Les “gilets jaunes”, la mèche qui allume l’incendie », Bertrand Bissuel et Raphaëlle Besse Desmoulières
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/05/les-gilets-jaunes-la-meche-qui-allume-l-incendie_5392928_823448.html

    Alors que les lycéens et les routiers se mobilisent, historiens et observateurs analysent le risque de coagulation.

    Le mouvement des « gilets jaunes » va-t-il s’éteindre ou donner des idées à d’autres composantes du corps social ? La question reste totalement ouverte, en dépit des annonces faites, mardi 4 décembre, par Edouard Philippe pour répondre aux attentes de milliers de personnes, engagées dans la bataille depuis près d’un mois. « Je suis très inquiète », confie au Monde Danielle Tartakowsky, historienne et auteure de plusieurs ouvrages sur les manifestations de rue en France. Pour elle, les mesures dévoilées mardi ne sont pas de nature à faire retomber la tension : « Ça vient beaucoup trop tard, il aurait fallu faire ça au début. » Dominique Andolfatto, professeur de science politique à l’université de Bourgogne, n’est guère plus optimiste, et considère que « le gouvernement joue la montre en escomptant que la mobilisation pourrisse sur pied ».

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    Si le blocage des dépôts pétroliers de Lorient et de Brest a été levé après le discours de M. Philippe, les lycéens ont continué, mardi, à s’opposer à la réforme du lycée et à Parcoursup, avec plusieurs incidents à la clé. Deux sites d’universités parisiennes ont également été gagnés par le vent de fronde. Et l’UNEF appelle à défiler, le 13 décembre, contre l’augmentation des frais d’inscription infligée aux étudiants venus de pays extérieurs à l’Europe. La FNSEA, de son côté, brandit la menace de manifestations d’agriculteurs, la semaine prochaine.

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    Fronts ouverts
    A ce stade, la jonction n’a pas été établie entre ces nouveaux foyers de contestation. Mais ils représentent autant de fronts ouverts pour l’exécutif. D’autres pourraient surgir, à un échelon plus local. « Dans les entreprises, ça crée un appel d’air, avec une montée des revendications salariales, comme l’illustre le conflit en cours chez BNP Paribas », observe Jean-Dominique Simonpoli, directeur général de l’association Dialogues. Les « gilets jaunes » sont « la mèche qui allume l’incendie », déclare Yves Veyrier, numéro un de FO : « S’agrège dessus des mécontentements rentrés qui voient une opportunité de se faire entendre. » Espéré par la gauche de la gauche, dès le lendemain de la victoire d’Emmanuel Macron à la présidentielle, « le troisième tour social est là », considère un haut fonctionnaire, familier de ces problématiques. Et « la révolte vient de loin », ajoute-t-il, en faisant référence au titre d’un ouvrage de Charles Tillon, une figure du PCF au XXe siècle.

    Si la comparaison avec Mai-68 a pu être faite, Mme Tartakowsky ne la juge pas forcément pertinente. « A l’époque, il s’agissait de violences de la part d’étudiants qui défendaient leurs universités qu’ils considéraient comme leur territoire, dit-elle. Ça n’a rien à voir avec la violence de certains “gilets jaunes” qui est offensive et qui intervient sur le #territoire de l’autre – Paris et dans les quartiers riches. »

    L’issue du bras de fer est tributaire d’un élément : le soutien de l’opinion publique, resté élevé même après les violences de samedi. Un sondage BVA, réalisé lundi et mardi, révèle cependant que, pour près de sept personnes sur dix, un report de la hausse des prix des carburants justifierait l’arrêt de la confrontation.

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    « Ovni social »
    Mais personne ne peut prédire ce qui va se passer. « La forme du mouvement ne se prête pas à une sortie de crise classique car il n’y a pas d’interlocuteur, ce qui est désarmant », souligne un ex-conseiller de l’exécutif, qui a servi sous une précédente législature. « Les “gilets jaunes” représentent un phénomène que l’on n’a jamais connu, une sorte d’ovni social et politique qui a vu le jour à la faveur d’une #cyber-contestation, lancée sur les réseaux sociaux par des inconnus », complète Raymond Soubie, président de la société de conseil Alixio.

    Pour le moment, les organisations de salariés sont en dehors ou à côté des « gilets jaunes », mais elles peuvent difficilement rester spectatrices. Quelques-unes se mettent d’ailleurs en mouvement. Ainsi, les fédérations CGT et FO, dans le monde du transport, exhortent les salariés à cesser le travail, à partir du 9 décembre, estimant que les dispositions prises mardi en faveur du pouvoir d’achat sont trop faibles. La section cégétiste de l’entreprise Lafarge a de son côté annoncé qu’elle allait rejoindre les « gilets jaunes » samedi. A l’échelon confédéral, la CGT appelle à une « grande journée d’action », le 14 décembre « pour les salaires, les pensions et la protection sociale ». Mais les autres centrales, qui critiquent une façon de faire « unilatérale », ne semblent pas emballées.

    « L’ensemble des organisations syndicales ont un coup à jouer, il y a un espace à prendre face à un mouvement qui n’est pas parvenu à s’organiser, commente Jean-Marie Pernot, de l’Institut de recherches économiques et sociales. Mais chacun y allant de son couplet, elles sont inaudibles. » « La conjoncture devrait justifier un front commun et de s’entendre sur quelques propositions-clés », appuie M. Andolfatto, qui rappelle que la désunion ne date d’hier. C’est d’autant plus regrettable pour elles que le mouvement social actuel constitue « un moment unique », décrypte M. Pernot. Toutefois, les numéros uns des confédérations syndicales doivent se retrouver jeudi pour une réunion informelle au siège de la CFDT.

    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Gérard Collomb : « La situation appelle à se rassembler plus qu’à se fractionner »

    Mais la séquence d’aujourd’hui montre qu’une partie des actifs ne compte pas sur les corps intermédiaires pour exprimer leurs doléances. Un tel phénomène « commence à émerger dans certaines entreprises où il y a pourtant une présence syndicale », rapporte M. Simonpoli, en évoquant « des salariés qui s’organisent entre eux », sans passer par les canaux traditionnels. « C’est inquiétant pour les syndicats et les directeurs de ressources humaines, poursuit-il. Avec qui va s’organiser la négociation, en interne ? »
    Au fond, tout se passe comme si les « gilets jaunes » révélaient la fragile légitimité des #partenaires_sociaux « établis ». « La question se pose mais elle n’a pas été mise au jour par la mobilisation en cours, objecte Philippe Louis, le président de la CFTC. Nos organisations doivent faire leur mue, inventer de nouvelles méthodes pour aller au-devant des salariés et leur proposer d’autres services. »
    En attendant, des milliers de personnes crient leur colère et le rejet de nos institutions. Toutes sont jetées dans un même sac, aux yeux de M. Soubie : les partis politiques, les corps intermédiaires… « C’est très préoccupant pour le fonctionnement de notre démocratie », conclut-il

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  • Building a #token Valuation Methodology From the Ground Up
    https://hackernoon.com/building-a-token-valuation-methodology-from-the-ground-up-be3ab5f22bfe?s

    “An unsophisticated forecaster uses statistics as a drunken man uses lamp posts — For support rather than for illumination”, Andrew Lang ( Nobel Prize in Literature, 1912)Recently, along with researchers from BNP Paribas and CDC Recherche, we published a report that identified the variables of analysis when building a token valuation model. The report is the first in a series of reports on this subject, but the objective remains the same — to build a token valuation model, one must first determine the variables of analysis.In computer science, Garbage In, Garbage Out (GIGO), is an expression used to convey the concept that incorrect or poor-quality input data will produce a faulty output or “garbage” output. The token valuation space currently suffers from this issue. Since the launch of Token (...)

    #blockchain #blockchain-valuation #token-valuation #token-valuation-method

  • Les grandes banques françaises continuent de financer le réchauffement climatique
    https://www.bastamag.net/Les-grandes-banques-francaises-continuent-de-financer-le-rechauffement

    Une nouvelle conférence internationale sur le #Climat s’ouvre le 3 décembre en Pologne, à Katowice. A cette occasion, deux rapports des Amis de la Terre et d’Oxfam France font le point sur les investissements des grandes banques françaises dans le secteur énergétique. Leur conclusion est sans appel : BNP Paribas, la Société générale, le Crédit agricole et les autres continuent, trois ans après l’Accord de Paris, à financer massivement les énergies sales fortement émettrices de gaz à effet de serre, tandis (...)

    En bref

    / #Multinationales, #Finance, Climat

    • Selon Oxfam, en 2016 et 2017, les six plus grandes #banques françaises ont consacré près des trois quarts de leurs financements vers le secteur énergétique au charbon, au pétrole et au gaz – ces #énergies fossiles qui sont la première source de gaz à effet de serre au niveau mondial. Soit 43 milliards d’euros, contre seulement 12 milliards pour les énergies renouvelables sur la même période. 43 milliards, c’est un peu plus que le budget alloué à la transition écologique par le gouvernement en 2019 (34,2 milliards).

  • « CumEx Files » : l’histoire secrète du casse du siècle
    https://www.lemonde.fr/long-format/article/2018/10/18/cumex-files-l-histoire-secrete-du-casse-du-siecle_5371029_5345421.html

    Cinquante-cinq milliards d’euros ont été subtilisés en 15 ans à plusieurs Etats européens par des financiers opérant en bande organisée sur les marchés. Une enquête du « Monde », associé à dix-huit médias européens.

    https://youtu.be/aPXomQaSMxU

    La crise… Partout, en ce mois de juin 2011, la crise s’écrit, se crie, se propage. Les dizaines de milliards d’euros injectés pour secourir les banques après le krach de 2008 ont achevé d’asphyxier des pays surendettés. L’Europe est au bord du gouffre, l’euro attaqué, la Grèce coule. Mais, au moins, les chefs d’Etat peuvent-ils se satisfaire d’avoir fait bon usage de l’argent public, pour préserver le secteur bancaire, poumon de l’économie.

    Loin du tumulte du monde, en ce même été 2011, à Bonn, en Allemagne, au fond d’un petit bureau gris de l’administration, une inspectrice des impôts lit et relit un drôle de courrier qu’elle ne se résout pas à classer. C’est une demande de remboursement d’impôts adressée au fisc par un fonds de pension, comme il en arrive tous les jours à l’Office fédéral des impôts pour les acheteurs d’actions cotées en Bourse.

    Mais cette demande-là l’intrigue. Le fonds réclame beaucoup d’argent, pour un très grand nombre d’achats et de ventes d’actions effectués dans des temps record, autour du jour, justement, où ces actions libèrent leurs dividendes. Il a fallu investir des dizaines de milliards pour ces transactions, alors que cette caisse de retraite n’a qu’un seul bénéficiaire. Un Américain, dont le domicile, dans un quartier ultrarésidentiel du New Jersey, lui sert de siège social. Bien loin de Wall Street, donc. Comment peut-elle brasser autant d’argent ?

    Comme il y en a pour près de 54 millions d’euros, la jeune femme décide d’y regarder de plus près. Elle se plonge dans le monde opaque des transactions boursières, auquel elle ne connaît rien. Et, au lieu des millions escomptés, adresse au fonds une longue liste de questions. Sans savoir qu’elle est, à elle seule, sur le point de mettre au jour le plus grand scandale fiscal de toute l’histoire en Allemagne : entre 7 milliards et 12 milliards d’euros subtilisés en sept ans entre 2005 et 2012.

    Il ne s’agit pas d’une simple fraude à l’impôt, mais d’un vol, commis dans les caisses de l’Etat au préjudice des contribuables, par une bande organisée de fonds de placement, de banques, de courtiers et d’avocats. Le casse du siècle, en somme, monté par des délinquants en col très blanc, et baptisé « CumEx » (en latin : avec ou sans… dividendes).

    Le cerveau, un ancien du fisc

    Comme dans toutes les bonnes histoires de fraude à grande échelle, il faut un cerveau. Il est ici allemand, fils de pasteur, et s’appelle Hanno Berger. C’est un ancien haut fonctionnaire du fisc de Francfort, et, à ce titre, contrôleur de la Bourse et des banques, tôt reconverti en fiscaliste. Un avocat brillant et si bien informé qu’il se voit rapidement courtisé par les millionnaires avides de ficelles fiscales.

    Or, après des années à repousser les limites de l’optimisation fiscale, il s’ennuie un peu. C’est alors qu’en 2006 ou 2007, il identifie le filon du siècle. La finance s’apprête alors à connaître sa crise la plus violente depuis 1929, mais elle baigne encore dans l’argent facile et la spéculation. Hanno Berger a repéré une façon de gagner gros, très vite : utiliser les crédits d’impôts qui résultent du versement des dividendes d’actions cotées en Bourse. Ces remboursements sont normalement réservés à certaines catégories d’investisseurs qui ont, bien entendu, acquitté au préalable leur impôt sur les dividendes. Mais le fiscaliste va s’en affranchir, en profitant de tous les stratagèmes qu’offrent les marchés financiers.

    « Au fond, c’est toujours le contribuable qui paie la facture »

    Le procédé n’est pas nouveau et avait été repéré dès les années 1990 par les contrôleurs du ministère de l’économie. Mais il n’a jamais été « industrialisé ». Surtout, alors que le législateur pensait avoir mis fin aux fraudes grâce à une loi ad hoc en 2007, Berger le génial fiscaliste a identifié une faille. Son plan est simple, même s’il passe par des techniques compliquées : mettre au point des montages où les actions changent de main si vite, d’un intervenant à un autre et d’un pays à l’autre, qu’il est difficile de savoir, à un instant « T », qui détient quoi et combien.

    Ainsi, l’impôt payé une seule fois pourra être récupéré plusieurs fois. Parfois même, l’impôt sera récupéré sans avoir été payé. Les montages seront si complexes que le fisc n’y verra que du feu. Poussée à grande vitesse, la machine des crédits d’impôts va devenir une vraie machine à cash. « Et, au fond, c’est toujours le contribuable du pays concerné qui paie la facture », reconnaît aujourd’hui un ancien disciple du maître à penser.

    Martingale en poche, Hanno Berger ne met pas longtemps à recruter des volontaires dans sa clientèle de banques et de grandes fortunes. Ce n’est pas du vol, leur répète-t-il avec aplomb, d’autant qu’à première vue, il ne s’agit que d’une variante de l’arbitrage de dividendes, une stratégie d’optimisation fiscale fondée sur des méthodes similaires d’échanges rapides d’actions. C’est tout au plus une excroissance d’un business pratiqué depuis des années par toutes les grandes banques de la planète.

    En coulisses, la fête continue

    Petit à petit, ce commerce se structure, les équipes s’étoffent. Hanno Berger bouscule les nouvelles recrues : « Ceux qui seraient tentés de penser qu’il y aura moins de crèches ou d’écoles maternelles construites en Allemagne à cause de notre business n’ont rien à faire ici ! »

    Les grands noms de la finance se laissent convaincre : banques internationales prestigieuses, fonds d’investissement ou de pension américains, courtiers de renom, avocats en vue… Des établissements aussi réputés que Goldman Sachs ou BNP Paribas prêtent main-forte à de petites « maisons » privées, comme la banque suisse J. Safra Sarasin, bien connue des grandes fortunes.

    La crise qui se profile dès la mi-2007, puis plonge le monde dans la tourmente après la chute de la banque américaine Lehman Brothers, le 15 septembre 2008, semble même les encourager à jouer contre les deniers publics.

    La finance mondiale, pour avoir trop spéculé, se découvre pourtant rongée de l’intérieur par des produits financiers toxiques. Les Etats sont appelés à son secours, ils consacrent des plans de sauvetage géants au secteur bancaire, en prêts ou en injections en capital. Les banques font acte de contrition, promettent de renoncer aux activités spéculatives pour se recentrer sur le financement de l’économie réelle… Officiellement, la fête est finie.

    Mais, en coulisses, les agapes continuent. Les témoins de ces années-là évoquent luxe, filles et cocaïne devant les enquêteurs et les médias partenaires du Monde. Autour d’Hanno Berger, un noyau dur de spécialistes se structure. Ces derniers évoluent entre la City de Londres et Francfort. Ils ont créé leurs propres boutiques financières dès 2008, pour gagner en discrétion et toucher le jackpot. C’est avec eux que traitent les banques et les fonds.

    Leur repaire : un restaurant indien ultrachic de Londres, The Cinnamon Club, qui, jadis, abrita l’ancienne bibliothèque de Westminster. C’est là, entre deux coupes de champagne, que se discutent les montages, les règles de partage des gains et les consignes de sécurité. La confidentialité est impérative, toutes les traces sont scrupuleusement effacées : à chaque opération nouvelle, un téléphone neuf est utilisé.

    Dans le premier cercle se trouve Paul Mora, un ancien de la banque allemande HVB, qui a fondé la société Ballance Capital avec un transfuge de la Deutsche Bank. Il y a aussi Sanjay Shah, qui a appris le métier chez Merrill Lynch et propose les services de son fonds spéculatif, Solo Capital. Il est l’heureux propriétaire d’un yacht de luxe, qu’il a baptisé… Cum-Ex. Ou Neil Anand, qui a quitté JP Morgan pour la société de gestion Duet, et Darren Thorpe qui a fait de la petite banque australienne Macquarie un géant du CumEx. Enfin, bien sûr, Hanno Berger lui-même, qui finit par fonder son propre cabinet, BSK.

    A l’assaut d’autres coffres-forts

    En 2009, la crise financière se mue en crise de l’euro, la Banque centrale européenne (BCE) déverse des tonnes de liquidités pour maintenir la zone euro à flot, mais le business du CumEx continue à prospérer. De nombreux fonds sont ainsi créés pour acheter et vendre des actions autour du jour du versement des dividendes. Ils se servent dans les caisses de l’Etat allemand et se partagent le pactole avec les grandes banques – qui prennent soin de rester en retrait.

    Alors que, sous leurs yeux, l’Europe prend l’eau, une cinquantaine de banques participent à ces schémas frauduleux. En vérité, il s’agit de l’investissement parfait, avec un niveau de risque zéro, car indépendant des fluctuations du marché. Ces opérations génèrent des centaines de millions d’euros, alors qu’elles n’ont aucune finalité économique – sinon d’instaurer un droit de tirage permanent sur le fisc.

    La France aurait pu être un terrain de choix, mais Hanno Berger s’y est cassé les dents.

    Le filon est si juteux que le système s’exporte, pour fracturer d’autres coffres-forts fiscaux. A lui seul, le trader Sanjay Shah dérobe au Danemark 1,4 milliard d’euros, entre 2012 et 2015. Il a organisé, entre-temps, de grands concerts de Prince, de Snoop Dogg et de Ricky Martin avec sa fondation philanthropique. D’autres membres du groupe ont gagné des centaines de millions, en reproduisant l’arnaque en Autriche, en Suisse, en Norvège et en Belgique.

    La France aurait pu être un terrain de choix, mais Hanno Berger s’y est cassé les dents. Dès 2007, il avait pourtant missionné cinq prestigieux cabinets d’avocats parisiens pour tenter de trouver la faille. En vain. Contrairement à ses voisins, l’Hexagone n’utilise plus, depuis 2005, le système des avoirs fiscaux, qui permet de tromper le fisc en réclamant des remboursements multiples. La fraude n’y est plus possible, même si l’optimisation fiscale des dividendes y prospère.

    Game over

    Lorsque l’existence de la manœuvre s’ébruite en Allemagne, le ministère des finances tente de réformer le système. « Big problem, game over », écrit un disciple d’Hanno Berger. Une fois encore, les financiers trouvent la parade, en utilisant des fonds de pension américains dissimulés derrière des sociétés à Gibraltar. Ils engrangent encore quelques milliards avant que l’inspectrice des impôts de Bonn ne les mette définitivement hors jeu, en 2011.

    L’Allemagne ouvre alors enfin les yeux sur le gigantesque hold-up dont elle a été victime. Les députés votent en urgence une réforme qui interdit le « CumEx » à compter du 1er janvier 2012. Ils installent une commission parlementaire, tandis qu’aux quatre coins du pays, des enquêtes pénales sont ouvertes.

    La plupart des braqueurs ont fui, certains sont signalés en Suisse ou à Dubaï. Mais en 2017, les langues se sont déliées. Certains escrocs ont commencé à parler, et les premières mises en examen tombent en mai 2018, dont celles d’Hanno Berger et Paul Mora. Les premiers procès devraient avoir lieu début 2019. Les banques, elles, risquent des poursuites au civil, ne pouvant en droit allemand être poursuivies au pénal en temps que personnes morales.

    L’Allemagne sait ce qu’elle doit à celle qui a fait vaciller le château de cartes, un jour de juin, il y a huit ans. La jeune inspectrice des impôts de Bonn, que n’ont découragée ni les bataillons d’avocats ni les menaces de poursuites, préfère rester anonyme. « Je ne suis pas une héroïne. J’ai juste fait mon travail », dit-elle.

  • « BNP Paribas, dans les eaux troubles de la plus grande banque européenne » : un système décortiqué (France 3)
    https://www.crashdebug.fr/dossiers/15165-bnp-paribas-dans-les-eaux-troubles-de-la-plus-grande-banque-europee

    1... Nouvelles confirmations du politique sans pouvoir et du vote-illusion

    2... Le président de BNP est le conseiller spécial de la présidence depuis Sarkozy

    3... BNP a failli faire faillite en 2011 à cause du dollar, a une filiale suisse douteuse et des paradis fiscaux en nombre

    4... Rappelons aussi que BNP est le premier acheteur d’obligation de l’Etat français et qu’elle est exposée aux risques en GRECE + en ITALIE + à Deutsche Bank + un montant inconnus de dérivés d’où les rumeurs de fusion habituelles (mariage Franco-Allemand à mon avis)

    Contributeur anonyme

    C’est une fresque implacable. Elle raconte un demi-siècle de l’histoire de la BNP, une banque française spécialisée, dans les années 1960, dans le financement des PME et la bancarisation des ménages. Un établissement sans (...)

    #En_vedette #Dossiers

  • Olivier Delamarche, Ce que nous ne voulons pas savoir...
    https://www.crashdebug.fr/diversifion/15150-olivier-delamarche-ce-que-nous-ne-voulons-pas-savoir

    J’ai trouvé la prestation d’Olivier Delamarche très pédagogique, car ce n’est pas évident, de ré-expliquer les même choses, 50.000 fois, en restant zen.... ; ) aussi la synthèse est bonne, et cela peut réellement éclairer les gens. Je conseille donc à tout le monde cette intervention.

    Amicalement,

    L’Amourfou.

    Source : Youtube.com

    Informations complémentaires :

    Crashdebug.fr : Exclusif. Philippe Béchade en OFF sur la Deutsche Bank : « C’est Lehman Brothers au cube ! » (Contributeur anonyme)

    Crashdebug.fr : P. Jovanovic - L. Fendt : La revue de presse (Septembre 2018)

    Crashdebug.fr : Olivier Delamarche : « L’Italie prépare sa sortie de l’euro »

    Crashdebug.fr : BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale lancent avec 13 autres multinationales une plateforme blockchain commune (...)

    #En_vedette #Divers

  • BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale lancent avec 13 autres multinationales une plateforme blockchain commune d’ici la fin de l’année
    https://www.crashdebug.fr/actualites-france/15132-bnp-paribas-credit-agricole-et-societe-generale-lancent-avec-13-aut

    BLOCKAIN : ... BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale lancent avec 13 autres multinationales une plateforme commune

    Donc si une banqueroute mondiale, monétaire, bancaire arrivait demain - à tout hasard - ? :

    Faillite de l’euro et spoliation totale

    Puis une solution alternative en échangeant créances et dettes via cette plateforme remplaçant la monnaie, les titres de propriété tout en étant traçable depuis l’origine

    https://www.cbanque.com/actu/69686/bnp-paribas-credit-agricole-et-societe-generale-lancent-avec-13-autres-mult

    Contributeur anonyme

    Quinze multinationales, dont des groupes bancaires et le groupe pétrolier Shell, ont annoncé mercredi la création d’une plateforme blockchain pour faciliter les échanges commerciaux liés aux matières (...)

  • #pognon_de_dingue Belgique « Nous visualisons la dette du photovoltaïque et nous la payons sur 20 ans » RTBF La Première - 18 Septembre 2018
    https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_jean-luc-crucke-nous-visualisons-la-dette-du-photovoltaique-et-nous-la-p

    Le gouvernement wallon a dévoilé lundi sa solution à la dette du photovoltaïque. La mise en œuvre de cette solution aura dans un premier temps pour conséquence une « diminution de la facture énergétique » des Wallons, « parce que le véhicule bancaire utilisé permet de capter la surcharge qui existait sur le prix de l’électricité, et de combiner cette surcharge avec une globalisation de la dette sur 20 ans. Ce qui permet d’étaler cette dette, et en même temps de diminuer la charge sur le consommateur » explique à la RTBF le ministre wallon de l’Energie Jean-Luc Crucke (MR).

    Selon Jean-Luc Crucke, « le système imaginé par monsieur Furlan et toute sa bande consistait à placer tous ces certificats verts dans le frigo, dans les tiroirs, on les cachait en-dessous du paillasson, et on verrait bien, si un jour le marché revient à une meilleure santé, comment on peut les réinjecter. Ce système coûtait déjà. Ici ce que nous faisons, c’est que non seulement on visualise la dette, mais on annule les certificats verts. Donc on ne met plus au frigo. Je dis au Parti socialiste et au précédent gouvernement que l’addition est là, elle a un coût et il faut pouvoir l’assumer sans faire mal à tous les citoyens qui n’en sont pas responsables. Je mets la dette à jour et, de manière pérenne, définitive, durable, je dis que nous la payons sur 20 ans ».


    « Tout est transparent »
    Le recours à la banque #BNP #Paribas #Fortis pour le financement de la dette a un coût « qui est intégré dans le calcul que nous avons fait. Quand on mettait les certificats verts au frigo cela avait aussi un coût, mais un coût pour rien puisque c’était pour cacher. Ici c’est pour régler : une fois pour toutes, on annule les certificats verts. Je rappelle que, depuis 2003, il y a eu 53 millions de certificats verts qui ont été publiés. Et sur ces 53 millions, seuls 35 millions ont été absorbés par le marché » selon le ministre.

    « Le choix de la banque a fait l’objet d’un marché public. Trois banques ont soumissionné et la solution la plus intéressante et qui permettait d’avoir un véhicule extérieur au budget wallon, c’est celle de BNP Paribas Fortis. Tout cela est transparent » assure Jean-Luc Crucke.

      #environnement #énergie #électricité  #éoliennes #écologie #énergie_éolienne #énergies #politique #dette #photovoltaïque

  • #pognon_de_dingue Belgique : Bulle du photovoltaïque : pas de nouvelles taxes, le système de certificats verts maintenu RTBF 17 Septembre 2018
    https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_bulle-du-photovoltaique-pas-de-nouvelles-taxes-le-systeme-de-certificats


    . . . . .
    BNP Paribas Fortis financera la dette
    Il fallait trouver une solution à la bulle d’un milliard et demi d’euros créées par l’octroi de nombreux certificats verts, qui faisaient office de subside à l’installation de panneaux photovoltaïques, tout en respectant l’engagement pris à l’égard des détenteurs de ces panneaux.

    Désormais, la dette des certificats verts ne sera plus stockée dans le giron d’Elia (chargée de racheter les certificats verts) et de la Région wallonne. La banque BNP Paribas Fortis assurera en effet le financement de cette dette en la transformant en obligations (en bons verts). 
    . . . . .
    #environnement #énergie #électricité   #écologie #énergies #politique #dette #BNP #Paribas #Fortis #photovoltaïque

  • La dette, l’arme française de la conquête de la Tunisie Éric Toussaint - 7 juillet 2016 - Orient XXI
    https://orientxxi.info/magazine/la-dette-l-arme-qui-a-permis-a-la-france-de-s-approprier-la-tunisie,1395

    Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, la Tunisie a expérimenté à son détriment le mécanisme de la dette extérieure comme instrument de domination et d’aliénation de la souveraineté d’un État. Livrée pieds et poings liés à ses créanciers extérieurs, la régence de Tunis perdra son autonomie pour devenir un protectorat français.


    Avant 1881, date de sa conquête par la France qui la transforme en protectorat, la régence de Tunis, province de l’empire ottoman, disposait d’une importante autonomie sous l’autorité d’un bey. Jusqu’en 1863, elle n’emprunte pas à l’étranger : la production agricole assure bon an mal an l’indépendance alimentaire du pays. Mais avec l’accession au trône de Mohammed el-Sadik Bey (Sadok Bey) en 1859, l’influence des puissances européennes, en particulier de leurs banquiers, grandit. Le premier emprunt de la Tunisie à l’étranger cette année-là constituera une véritable arnaque qui débouchera dix-huit ans plus tard sur la conquête de la Tunisie par la France.

    Les banquiers parisiens, comme leurs collègues londoniens, disposent de liquidités abondantes et cherchent des placements à l’étranger plus rémunérateurs que chez eux. Quand, début 1863, le bey fait savoir qu’il souhaite emprunter 25 millions de francs, plusieurs banquiers et courtiers de Londres et de Paris proposent leurs services. Finalement, c’est Émile Erlanger qui emporte le « contrat ». Selon le consul britannique, il lui aurait proposé 500 000 francs afin d’obtenir son soutien. Erlanger, associé à d’autres, obtient également l’autorisation du gouvernement français de vendre à la bourse de Paris des titres tunisiens.

    Une escroquerie à grande échelle
    Selon un rapport établi en 1872-1873 par Victor Villet, un inspecteur français des finances, l’emprunt est une pure escroquerie. D’après le banquier Erlanger, 78 692 obligations tunisiennes sont émises, chacune d’une valeur nominale de 500 francs. L’emprunteur (la Tunisie) doit recevoir environ 37,7 millions de francs (78 692 obligations vendues à 480 francs, soit 37,77 millions) et rembourser à terme 65,1 millions. Selon l’enquête de Villet, Erlanger a prélevé un peu plus de 5 millions de francs de commission (soit environ 13 % du total), plus 2,7 millions détournés, certainement par le premier ministre du bey et le banquier. Donc, pour disposer de 30 millions, le gouvernement tunisien s’engage à rembourser plus du double (65,1 millions).

    Cet emprunt extérieur doit servir à restructurer la dette interne évaluée à l’équivalent de 30 millions de francs français. Il s’agit concrètement de rembourser les bons du trésor beylical ou « teskérés », ce qui est fait, mais les autorités en émettent de nouveau pour un montant équivalent. Victor Villet raconte : « En même temps que dans les bureaux du représentant de la maison Erlanger à Tunis on remboursait les anciens titres..., un courtier du gouvernement (M. Guttierez) installé dans le voisinage reprenait du public l’argent que celui-ci venait de recevoir, en échange de nouveaux teskérés émis au taux de 91 %. À la faveur de cette comédie de remboursement, la dette se trouva simplement... augmentée de 15 millions à peu près ».

    En moins d’un an, l’emprunt est dilapidé. Dans le même temps, l’État se retrouve, pour la première fois de son histoire, endetté vis-à-vis de l’étranger pour un montant très élevé. La dette interne qui aurait dû être remboursée par l’emprunt extérieur a été multipliée par deux. Le bey choisit, sous la pression de ses créanciers, de transférer la facture vers le peuple en augmentant de 100 % la mejba, l’impôt personnel.

    Des profits juteux grâce aux « valeurs à turban »
    La mesure provoque en 1864 une rébellion générale. Les insurgés accusent le gouvernement d’avoir vendu le pays aux Français. Le bey tente par la force d’extorquer un maximum d’impôts et d’amendes à la population. Son échec l’oblige à monter avec le banquier Erlanger un nouvel emprunt en mars 1865 d’un montant de 36,78 millions de francs à des conditions encore plus mauvaises et scandaleuses qu’en 1863. Cette fois, un titre de 500 francs vendu 480 francs en 1863 ne l’est plus qu’à 380 francs, à peine 76 % de sa valeur faciale. Résultat, l’emprunteur s’endette pour 36,78 millions, cependant il ne reçoit qu’un peu moins de 20 millions. Les frais de courtage et les commissions prélevées par le banquier Erlanger et ses associés Morpurgo-Oppenheim s’élèvent à 18 %, plus près de 3 millions détournés directement par moitié par les banquiers et par moitié par le premier ministre et ses associés. La somme à rembourser en 15 ans s’élève à 75,4 millions de francs.

    Les banquiers ont réalisé une très bonne affaire : ils ont prélevé à l’émission environ 6,5 millions de francs sous forme de commissions, de frais de courtage et de vol pur et simple. Tous les titres ont été vendus en quelques jours. Il règne à Paris une euphorie à propos des titres des pays musulmans (Tunisie, empire ottoman, Égypte), désignés comme les « valeurs à turban », les banquiers payant la presse pour publier des informations rassurantes sur les réalités locales.

    À la merci des créanciers
    Les nouvelles dettes accumulées au cours des années 1863-1865 mettent la Tunisie à la merci de ses créanciers extérieurs ainsi que de la France. Il lui est tout simplement impossible de rembourser les échéances. L’année 1867 est une très mauvaise année agricole. Pressé de se procurer des devises, le bey privilégie l’exportation des produits agricoles au détriment du marché intérieur, avec à la clef d’abord la disette dans plusieurs provinces de la régence, puis une épidémie de choléra.

    En avril 1868, sous la dictée des représentants de la France, le bey établit la Commission internationale financière. Le texte du décret du 5 juillet 1869 constitue un véritable acte de soumission aux créanciers. L’article 9, particulièrement important, indique très clairement que la Commission percevra tous les revenus de l’État sans exception. L’article 10, décisif pour les banquiers, prévoit qu’ils y auront deux représentants. L’une des tâches principales de la commission — la plus urgente — est de restructurer la dette. Aucune réduction de dette n’est accordée à la Tunisie. Au contraire, les banquiers obtiennent qu’elle soit portée à 125 millions de francs. C’est une victoire totale pour ces derniers, représentés par les délégués d’Alphonse Pinard et d’Émile Erlanger qui ont racheté en bourse des obligations de 1863 ou de 1865 à 135 ou 150 francs. Ils obtiennent grâce à la restructuration de 1870 un échange de titres quasiment au prix de 500 francs.

    Les autorités tunisiennes sont complices de ce pillage. Le premier ministre Mustapha Khaznadar, d’autres dignitaires du régime — sans oublier d’autres Tunisiens fortunés qui détenaient également des titres de la dette interne —font d’énormes profits lors de la restructuration.

    Indemnisés et largement satisfaits, Pinard et Erlanger se retirent alors de Tunisie. Émile Erlanger construit un empire financier, notamment grâce à ses opérations tunisiennes, met la main sur le Crédit mobilier de Paris et, quelques années plus tard, sur la grande agence de presse Havas. De son côté, Alphonse Pinard poursuit ses activités en France et dans le monde, participe à la création de la Société générale (l’une des trois principales banques françaises aujourd’hui) ainsi qu’à une autre banque qui s’est transformée au cours du temps en BNP Paribas (la principale banque française actuelle).

    Mise sous tutelle
    Depuis la conquête de l’Algérie à partir de 1830, Paris considère que la France a plus qu’un droit de regard sur la Tunisie. Encore faut-il trouver le prétexte et le moment opportun. Dans la région, l’Égypte a la priorité pour des raisons géostratégiques : la possibilité d’avoir un accès direct à l’Asie avec l’ouverture du canal de Suez entre la Méditerranée et la mer Rouge en 1869 ; l’accès à l’Afrique noire par le Nil ; la proximité de l’Orient par voie terrestre ; le potentiel agricole de l’Égypte ; la concurrence entre le Royaume-Uni et la France (celui des deux pays qui contrôlera l’Égypte aura un avantage stratégique sur l’autre).

    Lors du Congrès de Berlin en juin 1878 qui partage l’Afrique, tant l’Allemagne que l’Angleterre abandonnent à la France la Tunisie — qui ne présente aucun attrait pour l’Allemagne. Pour le chancelier allemand Otto von Bismarck, si la France se concentre sur la conquête de la Tunisie avec son accord, elle sera moins encline à récupérer l’Alsace-Lorraine. Le Royaume-Uni, qui donne la priorité à la Méditerranée orientale (Chypre, Égypte, Syrie…), voit aussi d’un bon œil que la France soit occupée à l’ouest en Tunisie.

    La diplomatie française n’a de cesse de provoquer un incident ou de trouver un prétexte qui justifie une intervention de la France. Le conflit entre la tribu algérienne des Ouled Nahd et les Kroumirs tunisiens est l’occasion de lancer une intervention militaire française de grande ampleur. Vingt-quatre mille soldats sont envoyés contre les Kroumirs. Le traité du 12 mai 1881 signé entre le bey de Tunis et le gouvernement français instaure un protectorat français en Tunisie. La leçon ne doit pas être oubliée.
    #Éric_Toussaint

    #Tunisie #dette #havas #Émile_Erlanger #diplomatie #Alphonse_Pinard #BNP_Paribas #banquiers #bourse

  • Les entreprises françaises viennent de battre leur record... de distribution de dividendes
    https://www.marianne.net/economie/les-entreprises-francaises-viennent-de-battre-leur-record-de-distribution-
    https://www.marianne.net/sites/default/files/styles/mrn_article_large/public/maxstockworld161219.jpg?itok=MnKQHDuC

    D’après une étude du gestionnaire d’actifs Janus Henderson, les dividendes versés aux actionnaires au deuxième trimestre ont augmenté de 12,9% à l’échelle mondiale. Une hausse encore plus importante sur le sol français.

    Pas de crise pour les dividendes. Une étude du gestionnaire d’actifs Janus Henderson rapporte que les dividendes versés par les entreprises aux actionnaires au deuxième trimestre 2018 ont augmenté, de par le monde, de 12,9% en un an pour atteindre 497,4 milliards de dollars distribués. Une augmentation qui touche 12 pays, dont particulièrement la France et les États-Unis.

    L’Europe (hors Royaume-Uni) se distingue avec un total de 176,5 milliards de dollars de dividendes distribués. Soit une augmentation de 18,7% par rapport au deuxième trimestre 2017. Elle est ainsi le continent le plus généreux auprès des actionnaires. Dans le détail, on remarque le fort apport de la France dans l’augmentation de ces données. A lui seul, le pays a distribué 50,9 milliards de dollars de ses bénéfices à ses investisseurs, enregistrant là une hausse de 23,5%.

    Nestlé, entreprise la plus généreuse avec ses actionnaires

    L’Amérique du Nord talonne le vieux continent avec un total de 127,3 milliards de dollars distribués (+5,1%). Aux États-Unis, le trimestre a également été prolifique avec 117,1 milliards de dollars de dividendes reversés (+4,5 %). « Seulement une société américaine sur 50 a réduit sa part de dividendes redistribués », indique d’ailleurs l’étude qui rappelle aussi que les dividendes progressent régulièrement outre-Atlantique, avec seulement quatre trimestres de baisse au cours des dix dernières années.

    Selon le gestionnaire d’actifs, le secteur minier a connu la plus forte augmentation, suivi de près par les secteurs de la technologie, de l’énergie et des biens de consommation cyclique (automobile, par exemple).C’est pourtant une entreprise historique de l’industrie agroalimentaire, le suisse Nestlé, qui trône au premier rang des entreprises qui reversent le plus de dividendes à ses actionnaires. Le constructeur automobile allemand Daimler et le conglomérat coréen Samsung complètent le podium. Deux entreprises françaises suivent ensuite, le laboratoire pharmaceutique Sanofi et la banque BNP Paribas. L’entreprise pétrolière et gazière Total prend la dixième place. Un top 10 qui représente 9% du total des dividendes mondiaux.

    Optimisme quant à la poursuite de la croissance des bénéfices

    Même si la période est marquée par une guerre commerciale menée par les États-Unis, le gestionnaire d’actifs Janus Henderson se dit « optimiste quant à la poursuite de la croissance globale des bénéfices des sociétés » pour les années à venir même si « à plus long terme, l’impact sur le commerce international de l’intensification de la guerre commerciale avec les États-Unis pourrait avoir une incidence négative sur la rentabilité des sociétés, bien que son ampleur soit largement incertaine à l’heure actuelle. »

  • Trois banques françaises accusées de spéculer sur la faim dans le monde
    https://www.crashdebug.fr/actualites-france/15042-trois-banques-francaises-accusees-de-speculer-sur-la-faim-dans-le-m

    Vous pensez certainement que cette spéculation sur les matières premieres ne touche que ces pauvres africains, (sous entendu...) donc on s’en fiche.... he bien détrompez vous...., vous en faites les frais vous aussi tout les mois...

    Rappel : Un repenti de la haute finance luciférienne témoigne : « Si seulement les gens savaient comment fonctionne réellement le monde… »

    Deux ans après un premier rapport pointant du doigt quatre banques françaises qui spéculaient sur la faim dans le monde, l’ONG dresse un nouveau bilan. Le Crédit Agricole s’est retiré de ce genre de fonds mais BNP Paribas, BPCE et la Société générale, non.

    L’ONG Oxfam France vient de publier la seconde édition de son rapport lancé en 2013 sur les établissements bancaires français qui spéculent sur la faim dans le monde (...)

  • Unédic. Les évadés fiscaux font leur beurre sur l’argent des chômeurs
    Sylvie Ducatteau, 27 Avril 2018, L’Humanité
    https://www.humanite.fr/unedic-les-evades-fiscaux-font-leur-beurre-sur-largent-des-chomeurs-654533

    Des citoyens ont retracé le circuit très opaque de la dette de l’assurance-chômage française. Leur enquête montre que les détenteurs de cette créance, auxquels l’Unédic verse 400 millions d’euros d’intérêts par an, opèrent dans les #paradis_fiscaux.

    Ce vendredi matin, au moment même où le Conseil des ministres se penche sur les réformes de la formation professionnelle, de l’apprentissage et du système d’indemnisation du #chômage qui constituent le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » – un titre pour le moins décomplexé –, une quinzaine de membres du Groupe d’audit citoyen de la dette de l’assurance-chômage (Gacdac) rendent public un premier rapport sur la dette de l’Unédic. Ils dénoncent l’opacité du financement de l’organisme chargé de la gestion des cotisations de 16,5 millions de salariés, un « système-dette » volontairement mis en place par ses dirigeants avec le soutien de l’État et des investisseurs sur les marchés financiers, détenteurs de 35 milliards d’euros de titres de créances sur l’assurance-chômage. Des investisseurs dont certains flirtent avec les paradis fiscaux, et se trouvent en bonne place sur les listings des Panamas et Paradise Papers révélés dans la presse.

    Où va l’argent de l’Unédic ? Quel est le niveau d’#évasion_fiscale tiré des cotisations des salariés et de la CSG, l’impôt payé par les salariés et les retraités pour financer une partie de la protection sociale ? Après plusieurs semaines d’enquête dans les méandres de la comptabilité et des opérations financières de l’Unédic, ce que les membres du Groupe d’audit citoyen de la dette de l’assurance-chômage (Gacdac) ont découvert les a laissés pantois. D’autant que plus d’un chômeur sur deux n’est pas indemnisé.

    Si le montant de la dette du gestionnaire des allocations-chômage, estimée entre 34 et 37 milliards d’euros, n’a pas vraiment surpris les membres du Gacdac, la proximité de l’Unédic avec certains créanciers adeptes de l’optimisation, voire de l’évasion fiscales les a, en revanche, stupéfiés. « L’opacité du système ne nous a pas aidés. Nous ignorons précisément où sont les titres (de dette de l’Unédic), mais nous savons avec certitude que les entités qui les détiennent sont présentes dans les listings des #Paradise_papers ou #Panama_Papers (ces fichiers de comptes cachés dans les paradis fiscaux qui ont fuité dans la presse – NDLR). Sur cinquante investisseurs que j’ai réussi à repérer, la moitié est présente sur ces listes », révèle Louise Ferrand, qui a conduit les recherches documentaires pour le groupe d’audit.

    Pour emprunter sur les marchés financiers, l’Unédic, via des #banques dites « placeuses », émet des titres, des obligations, pour l’essentiel assez encadrés. Pour ses besoins de financement à court terme, elle recourt à des Euro Medium Term Notes (EMTN) imaginés aux États-Unis, des prêts très flexibles en taux, durée et peu réglementés, donc très prisés des « investisseurs », qui peuvent les échanger sans trop de contraintes. Pour ses affaires, l’Unédic fait appel à une vingtaine d’établissements financiers : les banques françaises BNP Paribas, Société générale, Crédit agricole, Bred et Natixis, les britanniques Barclays et HSBC, la suisse Crédit suisse, ou encore l’italienne Unicrédit, les allemandes Commerzbank AG, Nord/LB, Landesbank Baden-Württemberg, DZ Bank AG et Helaba, les américaines Citigroup et J.P. Morgan, la canadienne Scotiabank et la japonaise Daiwa Capital.

    « Aucune de ces banques, quel que soit le montant des titres qu’elle achète, n’a à rougir puisqu’on estime qu’elles pratiquent toutes, avec plus ou moins de dextérité, l’évasion fiscale », notent les auteurs de l’audit, déçus de n’avoir pu présenter un tableau exhaustif des acteurs de la dette de l’assurance-chômage. Notamment ceux du marché dit secondaire, où se joue le gros de la partie, et qui, grâce à des réformes des Codes du commerce, monétaire et financier de 2002, bénéficient de véritables paravents qui garantissent leur anonymat.

    Une fois acquis par les banques, les titres de l’Unédic sont en effet revendus sur un autre marché, le marché secondaire, en échange d’une commission, bien sûr, via une chambre de compensation, institution financière qui joue les intermédiaires dans les transactions en assurant leur bonne exécution. En l’occurrence, Euroclear, l’une des deux chambres européennes ; la seconde, Clearstream, avait défrayé la chronique dans les années 2000. Selon le Gacdac, l’Unédic verserait autour de 400 millions d’intérêts aux investisseurs sans les connaître vraiment, expliquait son directeur, Vincent Destival, auditionné par les sénateurs en 2015 : « Nous n’avons pas de suivi précis sur la manière dont notre dette est renégociée sur les marchés entre détenteurs primaires et des investisseurs intéressés. Nous savons à quel prix mais nous ignorons qui sont les vendeurs et les acheteurs. » L’un d’eux a pourtant été repéré par les auteurs du rapport : Sicav-Fis, adepte de l’optimisation fiscale. « En fouillant, je suis tombée sur ce fonds de compensation privé. Il a été créé pour gérer la réserve du régime général des pensions de retraite des Luxembourgeois. En 2016, il possédait pour 7,95 millions d’euros de titres de l’Unédic », précise Louise Ferrand.

    Les citoyens auditeurs ont ainsi retracé le circuit d’une partie de la dette de l’assurance-chômage française passant par le Luxembourg : le Crédit suisse (sous le coup d’une enquête pour blanchiment aggravé, pour ne pas avoir déclaré des milliers de comptes au fisc français) gère pour Sicav-Fis un emprunt de 252 millions d’euros qu’il a lui-même placé avec HSBC (un champion des placements dans les paradis fiscaux, qui vient d’éviter un procès en versant 300 millions à l’État français pour compenser les impôts dus) sur le marché primaire pour le compte de l’Unédic. « Nous demandons que la clarté soit faite sur l’identité des créanciers. Nous voulons savoir où passe l’argent de la collectivité », explique Pascal Franchet, du Gacdac. Lui ne se fait pas d’illusions sur la réponse attendue à la longue liste de questions que les auditeurs posent, dans une lettre jointe à leur rapport, à la ministre du Travail, aux administrateurs et à la direction de l’#Unédic. « Les dirigeants ont fait le choix du système-dette, de l’endettement pour financer l’#assurance-chômage avec le soutien de l’État qui garantit les emprunts. Cet aval de l’État permet à l’Unédic d’obtenir des taux d’emprunt très bas auprès des banques. Mais, si les taux remontent, ce qui est probable, ce sera une catastrophe pour le système d’assurance-chômage », poursuit Pascal Franchet.

    La dette équivaut désormais à un an de recettes de cotisations. Des cotisations dont le taux stagne depuis maintenant quinze ans, alors que le nombre de #chômeurs a, lui, doublé. « En fait, les allocations-chômage sont une variable d’ajustement. D’où la nouvelle course à la #radiation qui s’annonce », déplore Pascal Franchet.

    #guerre_aux_pauvres #pillage #escroquerie #abus_de_biens_sociaux #fraude_fiscale_en_bande_organisée_avec_circonstances_aggravantes.

  • Comment l’assurance chômage a été transformée en machine à cash pour les marchés financiers
    https://www.bastamag.net/Comment-l-assurance-chomage-a-ete-transformee-en-machine-a-cash-pour-les

    Le gouvernement présente ce 27 avril son projet de réforme de l’assurance chômage. Il prévoit notamment d’augmenter les contrôles aux dépens des demandeurs d’emploi. But affiché : réduire le chômage et améliorer la situation financière du système, qui accuse une dette dépassant les 33 milliards. Pourtant, les recettes de l’assurance-chômage sont suffisantes pour couvrir en l’état les indemnités versées aux chômeurs. Alors d’où vient cette dette, qui la détient, empochant des centaines de millions d’euros (...)

    #Résister

    / Quel avenir pour nos #Protections_sociales ?, Emploi , #Spéculation_financière, #Finance, Protections sociales, #Revenus, A la (...)

    #Quel_avenir_pour_nos_protections_sociales_ ? #Emploi_
    https://www.bastamag.net/IMG/pdf/audit_dette_assurance_chomage_rapport_interme_diaire.pdf

    • Conséquence directe : une explosion de la dette de l’Unédic, qui devrait passer de 8,9 milliards d’euros en 2009 à plus de 36 milliards fin 2018. Elle aura donc quadruplé en neuf ans. Le montant des intérêts payés aux créditeurs a lui aussi explosé : de 223 millions d’intérêts en 2013 à 400 millions en 2018. Au final, 2 milliards d’euros d’intérêts ont été versés aux créanciers en six ans. Le taux d’endettement de l’Unédic – le montant de sa dette rapporté à ses recettes – est de 93 %. « Ce taux en lui-même n’est pas inquiétant, réagissent les membre du Gacdac. Par contre, les causes de ce recours systématique à l’emprunt – le chômage qui augmente, des dépenses qui ne lui incombent pas, le refus d’augmenter les cotisations malgré un faible pourcentage de chômeurs indemnisés – ainsi que la qualité des prêteurs (des banques privées pratiquant des taux élevés pour servir les intérêts de créanciers dont l’identité est cachée), sont inquiétants. »

      L’identité exacte des créanciers de l’Unédic est en effet inconnue à la fois des chômeurs, des parlementaires, et même du directeur de l’Unédic. Ce dernier, Vincent Destival, déclarait en 2015 devant l’Assemblée nationale : « Nous n’avons pas de suivi précis sur la manière dont notre dette est renégociée sur les marchés entre les détenteurs primaires et des investisseurs intéressés. Nous savons à quel prix elle est renégociée, mais nous ignorons qui sont les vendeurs et les acheteurs. »

      La spirale de la dette enclenchée après 2003

      Comment en est-on arrivé à ce que l’assurance chômage affiche 36 milliards d’euros de dette au compteur, à rembourser à… on ne sait pas trop qui ? Pendant plus de vingt ans, de sa création en 1959 jusqu’à 1981, date de son premier déficit, l’Unédic n’a pas eu recours à l’emprunt. Mais la crise économique qui éclate au milieu des années 70 fait exploser le nombre de chômeurs, qui dépasse le million en 1980. Elle emprunte 6 milliards de francs en 1981, « auprès d’un groupe d’assurances, de mutuelles et d’instituts de prévoyance », précise le Gacdac. [...]

      Regardons un des derniers avis d’émission de titres de l’Unédic. En novembre dernier, l’assurance chômage émet des « titres négociables à moyen terme », au taux d’intérêt faible de 0,125%, pour un montant emprunté de 1,25 milliard d’euros. Que nous apprend l’avis d’émission ? Que l’Unédic passe, pour émettre ces titres, par des « agents placeurs », qui ne sont autres que des filiales du Crédit agricole, de BNP Paribas, de la banque allemande Deutsche Zentralgenossenschaftsbank, ainsi que de la banque d’investissement étasunienne Meryll Lynch.

      Ces institutions jouent le rôle d’intermédiaires entre l’Unédic et les créanciers. « L’Unédic émet des obligations à long terme auprès des banques privées comme la Société Générale ou la BNP (c’est le marché primaire de la dette). Celles-ci achètent ces obligations pour le compte de leurs clients qui soit les conservent, soit les revendent (c’est le marché secondaire de la dette) », explique le Gacdac. Ensuite, d’autres intermédiaires entrent en jeu quand il s’agit du remboursement du capital et du paiement des intérêts. Dans ce cas, ce sont des dépositaires, comme Euroclear dans le cas de cette émission de novembre, ou même Clearstream pour des émissions antérieures [5].

      https://www.bastamag.net/IMG/pdf/audit_dette_assurance_chomage_rapport_interme_diaire.pdf

      #dette #Unedic #chômeurs

    • Des citoyens ont retracé le circuit très opaque de la dette de l’assurance-chômage française. Leur enquête montre que les détenteurs de cette créance, auxquels l’Unédic verse 400 millions d’euros d’intérêts par an, opèrent dans les paradis fiscaux.


      https://www.humanite.fr/unedic-les-evades-fiscaux-font-leur-beurre-sur-largent-des-chomeurs-654533
      https://www.humanite.fr/speculation-et-paradis-fiscaux-main-basse-sur-largent-du-chomage-654534

  • L’or noir américain vise le monde

    Grâce à un essor de production de #pétrole_brut, les États-Unis sont devenus le deuxième pays producteur au monde, derrière la Russie. Le pays extrait plus de 10 millions de barils par jour, cela grâce à leur infrastructure de haut niveau.

    Depuis la fin de l’interdiction d’exporter du brut en 2015, les sociétés américaines ont exporté en moyenne 1,1 million de barils par jour dans 37 pays. Même si le Canada est la première destination, les États-Unis visent la Chine à présent.

    Malgré la diminution des importations, le pays continuera d’acheter du brut à l’étranger. En effet, les raffineries américaines ne sont pas conçues pour transformer le pétrole considéré comme léger. Elles ont été construites pour raffiner le pétrole lourd venant par exemple du Canada, du Venezuela ou du Mexique, qu’elles achètent peu cher, et revendent en se faisant au passage une marge importante.

    Selon M. Tchilinguirian, spécialiste des marchés pétroliers à BNP Paribas, les États-Unis ne peuvent pas devenir complètement indépendants du pétrole étranger. L’idée n’est pas seulement de devenir moins dépendant, mais aussi de pousser l’industrie de l’énergie à se projeter à l’étranger.

    Les entreprises américaines construisent donc des #oléoducs et des terminaux pour exporter mondialement l’or noir américain.

    L’#Europe est la destination la plus logique, car les #raffineries européennes sont plus compatibles avec le brut léger américain et les coûts de transport sont moins importants comparés à l’Asie, qui pourrait être une nouvelle destination à l’avenir.

    https://www.gbnews.ch/petrole-les-etats-unis-vise-le-monde
    #pétrole #USA #Etats-Unis #exportations

  • Comment le groupe Total a aidé le Congo à berner le FMI

    http://www.lemonde.fr/evasion-fiscale/article/2018/04/10/comment-le-groupe-total-a-aide-le-congo-a-berner-le-fmi_5283316_4862750.html

    « Le Monde » révèle comment le groupe a imaginé un opaque montage offshore pour permettre au Congo d’échapper à la vigilance du Fonds monétaire international.

    Caniculaire été 2003. Alors que le mercure dépasse allègrement les 30 degrés, les avocats d’un cabinet de Jersey échangent avec le gendarme financier de l’île anglo-normande. Il s’agit d’obtenir un accord de principe de la part de la commission des services financiers pour s’assurer de la légalité d’un montage opaque qui est en train d’être échafaudé dans la plus grande discrétion. « Ce dossier est extrêmement urgent », plaident-ils.

    C’est le point de départ d’une nébuleuse histoire liant le géant pétrolier Total à la République du Congo, qui peine à se relever financièrement après une guerre civile meurtrière. Avec l’aide de la banque BNP Paribas, la multinationale et le Congo ont cherché à contourner des engagements pris par Brazzaville envers le Fonds monétaire international (FMI). Ce dernier joue un rôle décisif dans l’allégement des dettes souveraines et ne doit en aucun cas être mis au courant de ce qui se trame : contre des promesses de transparence comptable, le FMI doit annoncer l’accession du Congo au statut très convoité de « pays pauvre très endetté », qui garantirait une annulation substantielle de la dette d’Etat.

    Total, de son côté, vante l’irréprochabilité de sa charte éthique, établie après l’absorption d’Elf, en mars 2000. Impossible dès lors de dévoiler aux instances internationales ou même à ses actionnaires le micmac financier qui se mijote dans les paradis fiscaux.

    L’étendue de cette tentaculaire affaire, qui s’étend sur trois continents différents, à l’insu du FMI, des créanciers congolais et du public, a été découverte par Le Monde en enquêtant sur des centaines de documents des « Panama Papers » et « Paradise Papers », deux fuites de données massives issues de cabinets d’avocats offshore, révélées en 2016 et 2017 avec le consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses partenaires.

    Passer l’éponge sur l’historique d’Elf

    Il faut donc remonter à 2003 pour comprendre l’histoire. Si l’avocat de Jersey se fait pressant, en ce 9 juillet, c’est qu’il s’agit d’une affaire de la plus haute importance pour son client, Total. La multinationale française vient de mettre la touche finale à un épineux problème qu’elle traînait comme un boulet depuis le tournant du siècle. Après plusieurs années de négociations, Total est enfin parvenu à un accord avec Brazzaville, qui permet au géant français des hydrocarbures de passer l’éponge sur le passif litigieux de son prédécesseur, Elf, dont les dirigeants sont alors en procès. A couteaux tirés avec Total, dans un climat de Françafrique qui ne dit pas son nom, le gouvernement congolais réclamait notamment réparation pour le rachat par la compagnie pétrolière, à prix bradé, des parts de l’Etat congolais dans Elf-Congo.

    C’est chose faite, le 10 juillet 2003, avec l’adoption d’un « accord général transactionnel », négocié par Denis Gokana, conseiller spécial du président congolais… et ancien ingénieur chez Elf. En quelques signatures, tous les contentieux sont effacés. Lavé des péchés d’Elf, Total obtient même les droits d’exploitation d’un nouveau champ pétrolifère. La multinationale française a dû pour cela consentir à un geste financier ; mais plutôt que de verser au Congo des espèces sonnantes et trébuchantes, elle lui cède pour 1 franc symbolique ses parts dans une concession pétrolière maritime en fin de vie, située au large des côtes africaines.

    Estimé à 160 millions de dollars (129 millions d’euros), ce « cadeau » n’est pas une si bonne nouvelle pour le Congo. Etranglé par ses dettes, le pays a besoin de liquidités plutôt que de champs pétroliers. L’une des solutions consisterait à vendre par anticipation le pétrole qui sera extrait du champ dans les prochaines années, pour empocher immédiatement des devises. Impossible ! Le FMI interdit de tels préfinancements pétroliers aux pays qui sollicitent son aide et le Congo s’est publiquement engagé à se passer de telles pratiques.

    Le 7 octobre 2003, le président Denis Sassou-Nguesso signe donc une loi pour vendre le champ à Likouala SA, une société congolaise fraîchement créée, ce qui lui permet de récupérer immédiatement une première tranche de 80 millions de dollars ainsi que la promesse d’une seconde tranche, d’un montant identique, dans quelques années. « La nécessité pour la République du Congo de monétiser au plus vite ses intérêts dans le champ de Likouala s’est avérée déterminante dans la logique de l’opération qui a ensuite été mise en place, avec la cession de ses droits à la société Likouala SA », explique au Monde un porte-parole de Total. Voilà pour la version officielle.

    La création du montage

    En coulisses se trame une histoire bien plus complexe. Les éléments rassemblés par Le Monde permettent de penser que Likouala SA, loin d’être une compagnie pétrolière comme les autres, était en réalité un faux nez de la République du Congo. La société a été créée en septembre 2003, quelques semaines avant d’obtenir la concession sur le champ pétrolier.

    Ses actionnaires ne sont ni des investisseurs congolais ni de grandes multinationales occidentales, mais une société-écran baptisée Montrow International Limited, enregistrée aux îles Vierges britanniques un mois plus tôt. Les autorités de ce territoire des Caraïbes sont très peu regardantes sur les modalités des montages offshore et permettent un enregistrement extrêmement rapide des sociétés-écrans.

    Pour rajouter une couche d’opacité, Montrow International Limited est elle-même logée dans un trust tout juste créé à Jersey, le Montrow Trust. Ce type de structure de droit anglo-saxon présente un avantage incomparable pour les entreprises en quête d’opacité : les propriétaires officiels sont les avocats du cabinet Nautilus, qui ne sont en réalité que de simples gestionnaires (trustees). Les bénéficiaires du trust restant invisibles, les véritables détenteurs de la concession pétrolière sont donc protégés par un double verrou de confidentialité.

    Pour s’offrir la concession, la mystérieuse Likouala avait besoin de 70 millions de dollars. Difficile d’obtenir de tels montants pour une société sortie de nulle part, dotée d’à peine 15 000 euros de capital et détenue par des actionnaires inconnus. Cette somme lui a pourtant été prêtée par la banque française BNP Paribas.

    Likouala SA, une coquille vide

    C’est ce prêt qui expliquerait pourquoi le Congo s’est donné tant de mal pour ériger un mur étanche avec le champ pétrolier : frappé de l’interdiction de s’endetter lui-même pour des projets pétroliers, l’Etat congolais n’aurait en aucun cas pu effectuer la même opération avec sa société pétrolière publique, sous peine de s’attirer les foudres du FMI. Grâce à ce montage habile, Brazzaville a donc pu obtenir l’argent frais de la BNP sans éveiller les soupçons de l’institution internationale. Sollicité par Le Monde, le FMI n’a pas souhaité commenter ces révélations.

    Total a toujours affirmé n’avoir gardé qu’un intérêt subalterne dans le champ pétrolier après en avoir cédé sa participation, en 2003. Des documents montrent au contraire que la multinationale française a continué à y jouer un rôle de premier plan. C’est Total qui a élaboré le montage offshore impénétrable permettant de dissimuler les propriétaires du champ pétrolier, avec l’aide du cabinet d’avocats Gide Loyrette Nouel et de Nautilus, un prestataire offshore basé à Jersey. Total, toujours, qui a payé les avocats de Gide Loyrette Nouel pour rédiger le contrat de prêt entre Likouala et la BNP. Total, encore, qui est resté à l’époque le seul maître à bord dans Likouala, comme en attestent les contrats confidentiels épluchés par Le Monde. Total, enfin, qui a prévu de racheter pour seulement 1 500 euros les actions de la société Likouala afin de les rétrocéder gracieusement à Brazzaville, après le remboursement du prêt bancaire.

    Likouala SA, gérée par un cadre congolais de Total, n’est en réalité qu’une coquille vide sans dépenses ni revenus, sans personnel ou compte en banque à son nom. En vertu d’un « contrat d’“operating délégué” », elle a en effet transféré « tous les aspects techniques, administratifs, légaux, comptables et financiers » à Total, qui continue d’exploiter les puits pétroliers.

    Omniprésence de Total

    C’est également Total qui règle l’intégralité des frais administratifs des sociétés offshore et se charge de rembourser l’emprunt à la BNP, comme le confirme une source proche du dossier : « La BNP n’a qu’un seul interlocuteur dans ce deal : Total. D’ailleurs, la créance est garantie par Total. » La banque française récupère au passage un nouveau client de poids. « La contrepartie, c’est qu’il ne fallait pas trop poser de questions… »

    Pourtant, dans l’entourage du pétrolier, on affirme au contraire que toutes les conditions du prêt étaient posées par la banque. En substance, pour que le prêt soit accepté par la banque, la BNP aurait imposé à Total un certain nombre de garanties, notamment que la République du Congo n’apparaisse jamais dans le cadre du montage offshore. Et pour cause : à la même époque, la BNP préside le comité rassemblant les créanciers privés du Congo. Elle connaît donc l’étendue de la dette congolaise et ne peut pas prêter directement au Congo dans ces conditions.

    L’omniprésence de Total est telle que, dès la création du montage, l’un des gestionnaires de Jersey met en garde le géant des hydrocarbures. Dans un mail envoyé à Gide Loyrette Nouel, le fiscaliste écrit : « Avec autant de garanties (…) envers Total, si jamais cela devait pour une quelconque raison atterrir devant les tribunaux, je pense que le juge pourrait décider que Total est le véritable gestionnaire » du montage… ce qu’évidemment Total veut absolument éviter. D’autant que son prédécesseur, Elf, avait déjà fait l’usage de montages peu ou prou identiques dans les années 1990, de l’aveu même du PDG de l’époque, Loïk Le Floch-Prigent.

    L’attaque des vautours

    Ce secret aurait pu s’oublier dans les placards de Total sans l’entrée en jeu d’Elliott Management, un fonds d’investissement américain spécialisé dans l’achat de dette souveraine, considéré comme un « fonds vautour » pour ses méthodes très agressives.

    L’une de ses filiales aux îles Caïmans, Kensington International Limited, détient une partie de la dette congolaise, rachetée au rabais. Elle cherche à obtenir le paiement de sa créance depuis quelques années déjà, mais faute d’obtenir le remboursement intégral des 93 millions de dollars qu’elle réclame encore à l’Etat congolais, Kensington s’est tournée vers Likouala, qu’elle soupçonne d’être une « façade » du Congo-Brazzaville.

    Représenté par Appleby – le cabinet d’avocats au cœur des « Paradise Papers » –, le fonds assigne l’actionnaire unique de Likouala, Montrow, devant un tribunal aux îles Vierges britanniques, après avoir obtenu des jugements favorables à Jersey, en Angleterre et aux Etats-Unis. Cherchant notamment à établir une volonté de dissimulation et de fraude de la part du Congo, les plaignants se livrent à une bataille légale féroce et très coûteuse durant la période d’instruction, qui s’étale sur toute l’année 2007. L’un des acteurs va jusqu’à assigner Gide Loyrette Nouel et la BNP en justice en France dans le but d’obtenir des documents permettant de prouver la fictivité du montage offshore, mais les plaintes sont jugées irrecevables.

    Le règlement secret

    Ce procès aux îles Vierges, prévu pour février 2008, est l’occasion pour la justice de déterminer une bonne fois pour toutes qui est le véritable propriétaire de Likouala. Mais la vérité judiciaire n’éclatera pourtant jamais au grand jour. Les avocats de Kensington et du Congo parviennent in extremis à un règlement à l’amiable. Dans l’accord paraphé le 15 janvier 2008, le Congo se résout à payer « une somme d’argent (…) en règlement des revendications découlant des jugements au Royaume-Uni ».

    En échange, Kensington renonce à toute prétention supplémentaire sur « les dettes souveraines qu’elle a achetées ». Le fonds d’investissement abandonne aussi toutes ses procédures judiciaires, y compris contre Total et la BNP. En professionnels respectueux du secret des affaires, les cabinets d’avocats représentant Kensington s’engagent même à effacer les milliers de pages de documentation utilisées durant le préprocès. Aucune publicité n’est faite de l’accord, ou du contenu des discussions.

    La société Likouala n’existe plus depuis janvier 2011. Quelques mois auparavant, elle avait cédé pour 130 millions de dollars sa concession pétrolière à CongoRep, une coentreprise détenue par la République congolaise et la compagnie franco-britannique Perenco. Une fois les dettes à la BNP et à Total soldées, Brazzaville devait récupérer au moins 52,2 millions de dollars dans l’opération. Les pudiques comptes publics congolais empêchent pourtant toute vérification.

    Total a assuré dès 2003 avoir « cédé son intérêt de 65 % dans la concession » Likouala sans jamais plus s’appesantir sur la question. Contactée à de multiples reprises, la société s’est contentée de justifier, par le biais d’un porte-parole du groupe, que « cette opération s’est inscrite dans un cadre légal et n’a causé de préjudice à personne. » Les autres protagonistes n’ont pas souhaité commenter les informations du Monde, et pour cause : la plupart sont liés à une clause de confidentialité qui leur interdit de « publier des communiqués de presse à des fins de divulgation de l’accord » signé aux îles Vierges britanniques.

  • BNP Paribas et le Crédit agricole parmi les plus gros « sponsors » européens de l’arme atomique
    https://www.bastamag.net/BNP-Paribas-et-le-Credit-agricole-parmi-les-plus-gros-sponsors-europeens-d

    D’après un rapport de l’ONG néerlandaise Pax publié aujourd’hui, les institutions financières privées ont investi 525 milliards de dollars dans des entreprises participant à la production d’armes nucléaire, entre janvier 2014 et octobre 2017. 329 banques, sociétés d’assurance, fonds de pension et gestionnaires d’actifs sont concernées dans 24 États. Si le top 10 de ces investisseurs se situe aux États-Unis, Pax identifie BNP Paribas et le Crédit agricole parmi les plus gros financeurs européens, ainsi que (...)

    En bref

    / #Le_risque_nucléaire, #Finance, #Multinationales

    • Le Crédit Agricole a quant à lui investi plus d’1,8 milliards de dollars dans l’entreprise Lockheed Martin, numéro un mondial de la défense et de la sécurité, notamment connu pour ses avions de combats. Ses F16, et ses missiles Hellfire auraient été utilisés par l’armée israélienne lors de l’opération « Plomb Durci » à Gaza en 2009, qui selon Amnesty international a visé indistinctement des cibles militaires et civiles, faisant des centaines de morts y compris des enfants, et pouvant constituer des crimes de guerre.