• #Corsica_Linea accueille des Ukrainiens et expulse des Algériens

    La même compagnie de bateaux qui a accueilli des réfugiés ukrainiens à Marseille sert désormais à expulser des sans-papiers de l’autre côté de la Méditerranée. C’est ce que révèlent les témoignages de plusieurs employés de la compagnie Corsica Linea.

    La compagnie de transport maritime Corsica Linea était fière, le 23 mars 2022, d’annoncer aux côtés de la préfecture des Bouches-du-Rhône l’ouverture du premier centre d’accueil de réfugiés ukrainiens. 1.700 places au total. L’un de ses #ferries, le « Méditerranée », est mis à disposition pour héberger jusqu’à 800 Ukrainiens. Dans les Echos, on apprend que l’initiative humanitaire vient du #Club_Top_20, qui regroupe les entreprises les plus influentes du territoire marseillais.

    Une fois vidés de leurs réfugiés, début juin, les bateaux de Corsica Linea ont repris la mer. À 20 mètres de la cabine du commandant de bord, cachés de la vue des passagers lambdas : d’autres étrangers. Des #sans-papiers que la France expulse vers l’Algérie. La compagnie corse préfère cette fois rester discrète.

    Un mécano découvre le pot aux roses

    Camille (1), la quarantaine, travaille comme ouvrier mécanicien sur l’un des bateaux de la compagnie Corsica Linea. Le mardi 20 septembre, il embarque à Marseille direction Alger, à bord du ferry Danielle Casanova. Un nom donné en hommage à une résistante communiste corse. Il a l’habitude de faire ce voyage. Mais cette fois-ci, il se passe quelque chose de différent :

    « La veille, l’officier me demande de remettre en état “les cellules des gardes et des prisonniers” parce qu’on est susceptibles de rapatrier des mecs le lendemain. Je ne comprends pas de quoi il s’agit. »

    Le mardi matin avant 8 heures, il fait son boulot et retape les sanitaires. Le marin se pose des questions :

    « Je remarque que tout est arrondi pour ne pas se blesser. »

    « Je demande à mes collègues, personne ne sait rien. Je me dis que la seule chose que je peux faire, c’est de faire durer le temps. Alors un truc que je peux faire en 30 minutes, j’y passe deux heures », décrit Camille.

    Puis vient un moment de flottement. Aux alentours de 9 heures et demi, le mécano entend « des mecs arriver, c’était bruyant. Là, je vois la #police_aux_frontières (#Paf) arriver avec des migrants, ça se bouscule… Ils sont trois, la trentaine, escortés, un flic devant, un flic derrière ». Camille ajoute :

    « Ils ont les poignets menottés, des casques de boxeur sur la tête [pour ne pas se blesser le crâne]. »

    Le jeune ouvrier décide d’entamer une discussion avec les hommes de la Paf. « Ils me disent que les #expulsions ont commencé en juin sur le bateau “Méditerranée” ». Le même qui a servi d’accueil aux Ukrainiens. « Les flics me parlent d’une reconduite prévue la semaine prochaine, et lancent un : “Et ça continuera” », rapporte Camille dans son uniforme bleu marine, d’un ton qui se veut calme.

    D’après son témoignage, les cabines en inox sont surnommées : « La #prison » et surveillées par des caméras vidéo 24 heures sur 24. Elles sont fermées à clef de l’extérieur, pas de hublot. La coursive devant la prison est verrouillée par deux portes à code. Selon un rapport interne du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) sur les #éloignements en bateau vers l’Algérie, « aucune procédure d’exploitation des enregistrements n’existe et la surveillance vidéo n’est pas signalée ». Le marin confie :

    « J’ai été chialer un bon coup dans les chiottes. Moi, je n’ai pas signé pour virer des Arabes, ça non ».

    Il se met à travailler salement pour appeler un collègue nettoyeur et lui montrer ce qu’il a vu :

    « Je simule un problème de mécanique, je fais exprès de faire un taf de porc pour faire traîner les choses. »

    Son collègue Alix (1) monte de l’hôtellerie pour nettoyer ce qu’a fait Camille. Il a accepté de livrer son témoignage. « Quand je vois ces #cellules_d’isolement en métal, je suis un peu choqué. Trois hommes [les Algériens] me regardent, ils ont l’air apeurés. » Il continue :

    « C’est comme une prison. Je me suis souvenu des Ukrainiens, ils n’étaient pas au même endroit ni traités de la même façon. Je n’ai pas compris ce qui se passait, je n’avais jamais vu une cellule de ma vie, sauf à la télé ».

    Des menaces

    Le jeune marin chargé de l’entretien a été témoin d’un autre moment sur le bateau. « J’étais à la réception quand la Paf est arrivée, elle a demandé à parler au commissaire de bord », raconte Alix. « J’ai rempli pour eux la feuille des besoins spécifiques, et tout en bas, il y avait déjà deux noms inscrits pour des visas “courte durée” : c’était pour la police. On leur attribue des cabines et des tickets-repas ».

    Les agents de la Paf vont manger au self avec les marins, se promener sur le pont, et ce pendant toute la traversée en mer aller-retour, du mardi au jeudi. Le mardi soir, un matelot de garde aurait crié : « Il y a une merde en cellule avec les reconduits, j’appelle les forces de l’ordre ! ». Selon les marins, tout le monde pouvait entendre ces mots, passagers compris.

    Dans un enregistrement fourni par Camille, on entend distinctement un policier menacer un migrant de l’attacher s’il continue de crier et de gesticuler. Le jeune détenu pleure et tape sur les murs :

    « Je vais casser ma tête, comme ça le commandant, il m’emmène à l’hôpital et je pars pas ».

    Puis on entend le policier dire à ses collègues :

    « S’il nous fait trop chier, on lui fait une piqûre de calmant ».

    Il revient vers lui :

    « Prends sur toi, ça va être casse-couille pendant 20 heures, mais prends sur toi, allez. »

    On entend Camille poser une question à l’agent de la Paf, qui lui répond froidement :

    « Je ne sais pas, c’est la première fois que je viens. »

    Dans un autre enregistrement, on entend un migrant hurler : « Un être humain il est pas capable de rester là wallah ». Et un autre, d’une voix aiguë : « Monsieur, monsieur, je vous en prie, il faut ouvrir, monsieur je suis tranquille, je vous en prie… » Camille enchérit :

    « C’est intenable. Je me retiens de pleurer plusieurs fois, j’ai fait des exercices de respiration, je me sentais impuissant. »

    Il faut dire que le marin vient du militantisme « no-border », pour la libre circulation des personnes. « Je ne peux pas recevoir des migrants chez moi et en expulser ensuite, ce n’est pas possible. Et même s’ils ont été condamnés par la justice, ils n’avaient pas le choix de commettre des délits pour survivre, vu qu’ils n’ont pas le droit de travailler », pointe le mécanicien, reprenant illico sa casquette d’activiste.

    Quand ils arrivent à Alger, le débarquement dure de 9h à 14h. « C’est normal, c’est la #Hogra (dialecte algérien signifiant humiliation publique, injustice, excès de pouvoir) », sourit Alix. Il leur est interdit de sortir de l’enceinte portuaire. Puis les marins ne voient plus la Paf, jusqu’au mardi suivant. Même scénario le 27 septembre : d’autres expulsions vers Alger ont lieu. Camille simule un problème mécanique et en profite pour faire des vidéos des #cellules.

    https://www.youtube.com/watch?v=ZuG0MR5n1PA&feature=emb_logo

    Un bras de fer franco-algérien

    Comme l’avaient révélé StreetPress et Mediapart, Alger a pendant de longs mois refusé le retour de ses ressortissants. En guise de représailles, « l’État français [a] décidé de réduire de 50 % le nombre de #visas délivrés aux ressortissants algériens », précise l’ONG Euromed Rights, une association de défense des droits des étrangers basée au Danemark. Mais les tensions semblent s’apaiser et les expulsions auraient démarré au mois de juin avec une pause pendant l’été. « Près de 80 % des incarcérés en centre de rétention administrative (#Cra) sont des Algériens. C’est une très très forte majorité », affirme une source d’un Cra du Sud de la France. « Ils sont piochés d’un peu partout, mais principalement au Cra de Marseille. Le test PCR n’est même plus imposé ». Avant cela, les exilés pouvaient refuser et ainsi retarder l’échéance.

    Dans un retour de mail daté du mois de juin, la préfecture des Bouches-du-Rhône confirme utiliser plusieurs « vecteurs disponibles » – aériens, terrestres ou maritimes – pour les #reconduites_aux_frontières des étrangers en situation irrégulière sur le territoire français. Jointe à nouveau début octobre, elle ne souhaite rien commenter ou ajouter. Même si elle ne répond pas à nos questions sur ce contrat entre le ministère de l’Intérieur et Corsica Linea, elle ne dément pas. Selon la presse algérienne et Euromed Rights, la France a signé un contrat en juin avec la société privée Corsica Linea pour le retour des migrants par la mer.

    Une détention arbitraire ?

    D’après les témoignages de Camille et Alix, les reconduits ne sortent pas des cellules avant que le bateau ne soit à quai à Alger. Ils sont alors remis aux autorités algériennes, et souvent à nouveau emprisonnés pour « immigration illégale ».

    Patrick Henriot, magistrat honoraire, secrétaire général du groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) souligne que les textes applicables à l’exécution forcée des #mesures_d’éloignement n’autorisent pas les services de police à priver les personnes de liberté pendant leur acheminement vers le pays de renvoi.

    Certes ils peuvent user d’une certaine contrainte mais elle doit être « strictement nécessaire » et en toutes circonstances rester « proportionnée ». La Paf est là pour sécuriser ces personnes. « Or le #confinement_forcé, pendant toute la durée du trajet, dans une cabine fermée qui n’est rien d’autre qu’une cellule, apparaît manifestement disproportionné » explique Patrick Henriot, qui continue :

    « Sans compter qu’il y a là une atteinte à la dignité des personnes au regard des conditions dans lesquelles se déroule cet emprisonnement qui ne dit pas son nom. »

    Le magistrat ajoute : « Sur un navire, c’est le capitaine qui est titulaire du pouvoir de police. Certes, il peut demander aux policiers de lui prêter main-forte dans l’exercice de ce pouvoir mais la contrainte doit s’exercer sous sa responsabilité, et il doit lui-même veiller à ce qu’elle reste proportionnée ». Selon nos informations, le capitaine n’accompagnait à aucun moment les policiers, leur laissant le plein pouvoir.

    Contactée plusieurs fois par mail et par téléphone, la compagnie Corsica Linea s’est refusée à tout commentaire.

    https://www.streetpress.com/sujet/1665408878-corsica-linea-accueille-ukraniens-expulse-algeriens-marseill
    #tri #catégorisation #réfugiés #réfugiés_ukrainiens #réfugiés_algériens #expulsion #bateaux #Algérie #France #détention_arbitraire

    ping @isskein @karine4

  • L’Allemagne annonce un confinement partiel, avec fermeture des commerces non-essentiels et des écoles
    https://www.nouvelobs.com/coronavirus-de-wuhan/20201213.OBS37460/angela-merkel-annonce-la-fermeture-des-commerces-non-essentiels-ecoles-a-

    Tous les commerces non-essentiels, ainsi que les écoles et crèches vont fermer en Allemagne à partir de mercredi et jusqu’au 10 janvier, a annoncé ce dimanche 13 décembre la chancelière Angela Merkel, pour tenter d’endiguer la deuxième vague de virus.

    Constatant « les très nombreux décès » dus à l’épidémie de coronavirus et « la croissance exponentielle » des infections, la dirigeante conservatrice a assuré : « Nous sommes contraints d’agir et nous agissons maintenant ».

    Dans une résolution adoptée par l’Etat fédéral et les 16 Etats régionaux, les employeurs sont ainsi invités à privilégier le plus possible le télé-travail ou les vacances pour leurs employés pendant trois semaines et demie « afin de mettre en application dans tout le pays le principe de “nous restons à la maison” ».

    La pandémie « est hors de contrôle », a averti le dirigeant de la Bavière, Markus Söder, lors d’une conférence de presse avec la chancelière et le ministre des Finances, Olaf Scholz. C’est « une catastrophe qui touche davantage nos vies que toute autre crise de ces 50 dernières années », a-t-il ajouté.

    • #Coronavirus : comment l’Allemagne a perdu son statut de « bon élève » face à l’épidémie
      https://www.europe1.fr/international/coronavirus-comment-lallemagne-a-perdu-son-statut-de-bon-eleve-face-a-lepide

      Face à la « croissance exponentielle » des infections au coronavirus à quelques jours de Noël, l’Allemagne serre la vis. Dimanche, la chancelière Angela Merkel a annoncé une batterie de nouvelles restrictions qui resteront en vigueur jusqu’au 10 janvier, faisant entrer son pays dans un #confinement_partiel, avec notamment la fermeture des commerces « non-essentiels » et des écoles. Un coup dur pour les habitants d’un pays qui avait fait figure de bon élève européen lors de la première vague du printemps, mais qui paye aujourd’hui son retard pris dans les décisions, ainsi qu’un certain relâchement du côté de la population, alors que l’extrême-droite attise la méfiance envers les règles sanitaires dans certaines régions.

      La résistance de certains Länder

      Angela Merkel avait pourtant alerté dès le mois d’octobre sur l’aggravation de la situation sanitaire. La chancelière, rappelle Hélène Kohl, correspondante d’Europe 1 en Allemagne, était « partisane dès la mi-octobre d’un confinement beaucoup plus strict. Mais l’Allemagne est un pays fédéral, elle ne peut pas décider toute seule, et doit consulter les présidents des 16 #Länder ». Or, Angela Merkel s’est à ce moment-là heurtée au refus des régions les moins touchées.

      Un retard dans les décisions que le pays paye cher. Pour Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale à la faculté de médecine de l’université de Genève, la situation allemande est « l’exemple même de tout retard qui est extrêmement préjudiciable à la situation sanitaire, mais aussi à la vie sociale et économique ». Ainsi, rappelle-t-il, « les Irlandais, qui ont commencé le 21 octobre à confiner de façon assez stricte, ont complètement repris le contrôle sur l’épidémie ».

      Un relâchement de la population

      Par ailleurs, a-t-on noté un relâchement des précautions du côté des habitants outre-Rhin ? Peut-être, répond Hélène Kohl. « En réalité, les Allemands ont profité de toute la liberté qui leur a été laissée », ajoute-t-elle, prenant l’exemple des petits arrangements avec les règles adoptés par beaucoup de restaurants depuis le 1er novembre, et l’annonce de la fermeture des restaurants, bars, institutions culturelles et enceintes sportives. « On a vu fleurir un peu partout des offres alternatives, avec un restaurant qui ouvre ses fenêtres et devient un stand de vin chaud », raconte la correspondante d’Europe 1. A Berlin, par exemple, « dans certaines rues, on se retrouve avec quasiment tous les restaurants ouverts et des gens qui s’attroupent pour boire un vin chaud, en enlevant le masque ».

      Des bastions d’extrême-droite sensibles au complotisme
      Enfin, comme dans beaucoup de pays, l’Allemagne doit composer avec une partie de sa population peu encline à se plier aux instructions. « Il y a ce mouvement des récalcitrants qui ne croient pas à la dangerosité du virus, qui est bien installé en Allemagne », explique Hélène Kohl. « Certes, ça correspond à 5-10% de la population, mais dans certaines régions dans l’est du pays, c’est un mouvement qui est porté par l’extrême-droite, et les régions où on vote le plus à l’extrême-droite sont celles qui dérapent. »

      #extrême_droite #Allemagne #covid-19 #école

  • Donc depuis hier au milieu de centaines d’appels à rouvrir les #librairies et signer des pétitions pour les sauver, y’a des libraires qui expliquent que ça va aller.
    Peut-être qu’une parole de concernée par la culture ET la santé réussira à se faire entendre ?
    Courage à tou-te-s <3

    " Merci d’arrêter d’appeler à rouvrir les librairies. Les employé-es des librairies sont fatiguées par un travail physique épuisant et ne veulent pas être exposées inutilement au virus. Les appels d’animateur.trices radios, bédéistes, écrivain-es etc ne connaissent pas la réalité des employé.e.s. Ce qui pose notamment la question de qui a accès à la parole (spoiler : pas nous). Nous sommes sur les rotules. Nous savons travaillé comme des dingues depuis la fin du confinement. Les librairies sont pleines à craquer.
    Tout le monde dit que c’est une bonne chose mais pas du tout. On nous touche, les distances de sécurité ne sont absolument pas respectées, les gens ne se lavent pas toujours les mains, certains baissent leur masque pour nous parler. Non ce n’est pas un commerce essentiel et oui, c’est un haut lieu de rencontre entre les gens et donc de contamination. Quant à ceux.celles qui parlent de la Culture avec un grand C. C’est un mythe. La Culture, ce sont des femmes très mal payées, pour la plupart ultra diplômées et donc (très) frustrées.
    Dans la librairie où je travaille certaines ont des doctorats, aucune n’est contente de venir travailler pour cette paye, soit le SMIC. Une petite librairie où le droit du travail n’est pas respecté. On est debout toute la journée,rien n’est prévu question ergonomie, on n’a pas de salle de pause. Je ne détaille pas le reste (bien plus grave) par souci d’anonymat. Et l’inspection du travail ne vient pas. Pas d’inspection du travail, pas de droit du travail. Pas de possibilité non plus de prendre des congés payés en enchaînant les CDD.
    Si vous voulez arrêter notre confinement, payez-nous ! Car voilà le nerf de la guerre.Sinon, laissez-nous tranquille, nous avons besoin de repos. Ce boulot est trop méconnu. Il s’agit d’un travail de manutentionnaire. Et de caissière. Et d’agent.e Amazon (chercher et remettre les livres en rayon). plus d’une tonne de colis en une seule journée), avons sérieusement mal au dos (bonjour les rendez-vous chez l’ostéopathe), des ongles de pied noirs (chariot de plus de 100 kg qui nous roule dessus). Sans compter les micro agressions de la part des client.e.s. Le tout avec le sourire bien sûr (d’ailleurs merci au masque de nous permettre de cacher notre exaspération).
    De toute façon ce confinement est un confinement de classe (je sais, c’est un gros mot mais ce serait bien qu’on parle un peu plus de classe).
    Alors que les cadres télé-travaillent, les livreurs et autres sont sur les routes. Et puis qui a besoin qu’une librairie reste ouverte ? Ceux qui ont les moyens. Quant à la survie de la librairie ? Celle-ci a fait des chiffres d’affaire de dingue (dignes de Noël) depuis la fin du 1er confinement (sans que jamais cela se répercute sur le salaire des salarié.e.s) et nous travaillons déjà à un système de collecte des commandes par les client.e.s. Nous avons travaillé aujourd’hui, retravaillerons la semaine prochaine de manière quasi-normale avec le rideau fermé mais n’avons pas besoin que des hordes de client.e.s nous contaminent. Toutes les librairies ne sont pas en difficulté. Certaines se portent très bien. Et enfin il y a un virus qui circule oui ou non ? Alors ne dîtes plus « j’aurais adoré être libraire » car non vous n’auriez pas aimé être manutentionnaire-caissière au SMIC, avec 10% seulement de votre temps consacré à parler littérature. Ne signez pas de pétition appelant à la réouverture des librairies. Laissez-nous récupérer. On se réjouissait tellement de pouvoir souffler un peu et d’avoir le temps de lire tout ce que nous devons conseiller. Merci. Une libraire épuisée.

    Source sur twi : https://twitter.com/FacheeLa/status/1322590249055326212

    #confinement_de_classe #precariat #salariat #culture

  • “Stay in Your Box!”: Migrant Workers and Social Discipline/Distancing in Singapore

    10 April 2020 – Jia Ye – Singapore has been hailed as a ‘model’ response to COVID-19, but in recent days its cramped and crowded migrant worker dormitories, were been the site of a surge of cases. In this podcast #Jia_Ye – Geographer at Nanyang Technical University – tells us about the impossibility of social distancing for workers – who remain in the dorms, in the trucks and on their work sites. She also gives us an insider’s look into Singapore’s state led response, and the unique codes of self-policing and ‘civility’ that hold it in place.

    https://4mpodcast.com/2020/04/12/stay-in-your-box-migrant-workers-and-social-discipline-in-singapore
    #audio #podcast #travailleurs_étrangers #migrations #Singapour #distanciation sociale #hébergement #logement

    ping @zhipeng_li

    • Le Japon face à l’épidémie. Gestion de crise et #responsabilité_civique

      La prétendue discipline japonaise, qui passe pour un modèle de #civisme_spontané, dépend en réalité en grande partie des décisions du gouvernement, comme le montre la récente progression de l’épidémie, qui discrédite la trop simpliste explication culturaliste.

      Jusqu’à la mi-mars, la situation japonaise semblait sous-contrôle avec un taux de propagation relativement faible. Or, depuis fin mars, le nombre de nouveaux cas dont les voies de transmission ne sont pas identifiées augmente rapidement. Le 7 avril le Premier ministre Shinzô Abe déclare l’état d’urgence dans sept préfectures du pays, et demande aux citoyens un #confinement_volontaire en s’appuyant sur un plan de soutien à l’économie de grande ampleur.

      En comparaison des mesures prises par plusieurs pays pour tester en masse et/ou faire appliquer un confinement obligatoire, la gestion de crise japonaise soulève plusieurs questions. La bonne organisation des institutions de santé publique, les procédures de gestion de crise sanitaire et les mesures de prophylaxie permettent-elles d’expliquer la décision de ne pas recourir aux tests de dépistage à grande échelle, ou bien cette décision relèverait-elle de contraintes légales et sanitaires ? Si la lente progression du nombre de cas jusqu’à la mi-mars nourrissait encore certaines explications simplistes fondées sur la discipline des Japonais, l’accélération récente des cas discrédite le facteur culturaliste, et met en question le rôle de la responsabilité civique et les conditions de son application.
      Pour préparer cette analyse que seul le temps pourra mener à son terme nous proposons ici de décrire les mesures de lutte contre l’épidémie depuis le mois de janvier jusqu’au début du mois d’avril 2020 et d’éclairer le rôle joué par la responsabilité civique dans la gestion de crise sanitaire actuelle.
      Le système de gestion de crise sanitaire

      La loi de Mesures contre les maladies infectieuses de 1998, révisée pour la dernière fois le 14 mars 2020 pour y ajouter le Covid-19, définit le système japonais de gestion de crise sanitaire qui relève de la compétence et de la coordination renforcée entre le secrétariat du Cabinet, le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales, les gouvernements locaux et les experts formés en comité consultatif. Différentes mesures plurisectorielles sont articulées à différents niveaux que l’on peut synthétiser en trois piliers : l’identification de clusters, le renforcement du système de santé, et la responsabilité civique. En fonction des critères qui figurent dans la loi, lorsque les voies de contamination ne sont plus suffisamment identifiées et que le risque de contamination atteint un certain niveau, le Premier ministre, après avoir activé la structure décisionnelle de crise, peut déclarer l’état d’urgence sanitaire.

      Cependant, la loi ne prévoit pas de mesures de coercition pour appliquer l’état d’urgence, à la différence notamment de ce qu’a fait la France (il est par exemple impossible de sanctionner le non-respect de demande de confinement par des amendes ou des peines de prison). Contrairement à ce qu’une partie de la presse étrangère rapporte, l’étendue des restrictions des libertés individuelles et l’absence de sanctions n’en font pas un « d’état d’urgence a minima » qui reposerait sur le civisme culturel et la pression sociale de la société japonaise.

      Le civisme ou la citoyenneté responsable se définit selon Luigi Lombardi Vallauri comme une attitude qui « (…) est libre, entièrement facultative ; même comme simple attitude, elle n’est pas exigée du sujet à l’intérieur d’un système normatif, en tous cas elle ne l’est pas à l’intérieur d’un ordre juridique positif », il s’agirait donc d’ « (…) une attitude et non pas (d’) une situation passive ni (d’) un devoir dont on répond devant les institutions »

      . En demandant aux citoyens de réduire leur interaction sociale à 80 % pour freiner la propagation du virus, le Premier ministre s’appuie bien sur la responsabilité civique des Japonais et non pas sur leur civisme. D’un point de vue général le recours au pilier de la responsabilité civique trouverait son fondement dans l’article 12 de la Constitution :

      La liberté et les droits garantis au peuple par la présente Constitution sont préservés par les soins constants du peuple lui-même, qui s’abstient d’abuser d’une façon quelconque de ces libertés et de ces droits ; il lui appartient de les utiliser en permanence pour le bien-être public.

      Plus particulièrement, la déclaration de l’état d’urgence vise à la préservation du bien public, lequel ne peut être garanti, d’après le discours du Premier ministre, que par les restrictions sur l’activité économique et sociale. Ce serait donc un renforcement des actions relevant de la responsabilité civique de tous les acteurs de la société civile qui, articulé aux deux autres piliers eux même renforcés, permettrait encore de résoudre la crise sanitaire]. En outre, le 2 avril Shinzô Abe a mentionné devant la Chambre des représentants réunis en séance plénière, la possibilité de réformer la loi pour y inclure des dispositions ayant pour objectif de réprimer le non-respect des mesures de distanciation sociale

      .

      On observe donc depuis le début de la gestion de crise sanitaire un processus graduel d’activation de la responsabilité civique lequel évolue en fonction de la progression de l’épidémie et de sa compréhension.
      Les premières mesures de lutte contre la propagation du Covid-19 de janvier à février 2020

      Le 5 janvier 2020, l’OMS a publié une note informative sur l’émergence en Chine, dans la ville de Wuhan, province du Hubei, d’une maladie respiratoire dont les causes étaient inconnues. Le 6 janvier, le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales publie en coordination avec l’Institut national des maladies infectieuses une note informative sur l’émergence dans la ville de Wuhan (province du Hubei, Chine), d’une maladie respiratoire dont les causes sont inconnues. Les premières recommandations sont formulées à l’attention des voyageurs en provenance de Wuhan qui présenteraient des symptômes (fièvres, courbatures, difficultés respiratoires). Le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales adresse aux gouvernements locaux une note pour renforcer la coordination entre les centres de santé (health centers, hokenjô), les structures hospitalières, et l’Institut national des maladies infectieuses. Le 15 janvier, le premier cas est relevé. Dès le 21 janvier et conformément à l’article 15 de la loi de Mesures contre les maladies infectieuses, l’Institut national des maladies infectieuses réalise des tests pour les personnes qui ont été en contact avec les cas confirmés. Dans le cadre de la mise en place d’un système de surveillance, les porteurs potentiels du virus peuvent être testés sans que leur lien avec la ville de Wuhan soit établi. Les tests sont également réalisables dans les centres de santé locaux. La priorité est néanmoins donnée aux patients présentant des symptômes sévères pour permettre une prise en charge rapide.

      En se fondant sur les directives publiées par l’Institut national des maladies infectieuses, et les premières analyses chiffrées, le gouvernement applique le 21 janvier les premières mesures de prévention contre la propagation du Covid-19 pour contrôler l’état de santé des personnes entrant sur le territoire japonais en provenance de régions à risques, et d’identifier les voies de transmission. Le 23 janvier, 2 cas sont confirmés (23 personnes ont été en contact avec eux et font l’objet d’un examen). Le gouvernement renforce les mesures, notamment la mise en place de dispositifs pour effectuer les enquêtes épidémiologiques. Le 30 janvier, le gouvernement crée une cellule de crise sous la supervision du directeur adjoint du secrétariat du Cabinet du Premier ministre et demande la mise en place d’un comité consultatif d’experts qui se réunit pour la première fois le 16 février.

      L’identification des clusters est la première priorité. Le groupe de recherche dirigé par le virologue Hitoshi Oshitani (université du Tohoku), en coordination avec le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales et le comité consultatif, analyse la propagation du Covid-19 en fonction du comportement des personnes infectées afin d’identifier les modes de contagion. Depuis le 3 février, différentes structures sont également déployées dans les centres de santé pour contacter les personnes revenues au Japon après un séjour à l’étranger, dans le but de retracer les voies de transmission. Entre le 3 février et le 26 mars, un grand nombre de personnes ont été prises en charge par ces centres de santé (environ 500) ouverts sans interruption (24h/24 et 7j/7). Selon le document officiel publié le 25 février, il reste très peu de cas dont les voies de transmission n’ont pas été identifiées.

      Ensuite, le second pilier vise à soutenir le système de santé et à freiner la propagation du virus par une prise en charge adaptée des patients. Pour faire face à une hausse possible du nombre de cas, le gouvernement a augmenté les capacités d’accueil (nombre de lits) et de soins spécifiques (équipement de dispositif d’assistance respiratoire). Depuis le 13 février, des structures hospitalières sont préparées au niveau national (1059) dont une partie est dédiée exclusivement aux maladies infectieuses (412).

      Enfin, la responsabilité civique est encouragée par l’intermédiaire de recommandations à l’attention des citoyens, publiées notamment sur le site des différents ministères, comme les règles d’hygiène de base (lavage de mains, éternuer et tousser dans son coude, port du masque), et l’auto-confinement en cas de symptômes (rhume et grippe compris). Il est demandé aux personnes présentant des symptômes légers d’attendre 4 jours avant de consulter un médecin (2 jours pour les personnes âgées).

      Parallèlement à la mise en route des procédures de gestion de crise sanitaire, et sans concertation, le Premier ministre Shinzô Abe déclare la fermeture des écoles primaires, des collèges et des lycées, le 27 février.
      Le tournant de la politique de lutte et la crise de confiance. Fin février - fin mars 2020

      La décision soudaine du Premier ministre de fermer les écoles a suscité de vives critiques relayées par la presse. Il s’agirait d’une mesure arbitraire dès lors que, d’une part, elle a été prise en dehors du cadre d’état d’urgence sanitaire et, d’autre part, qu’elle n’a fait l’objet d’aucune concertation avec le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales, le ministère de l’Éducation, les gouvernements locaux et le comité consultatif des experts

      . L’absence de structures suffisamment déployées en amont de cette prise de décision pour aider les familles à s’organiser en recourant notamment au télétravail reflèterait le manque de coordination entre les sphères politique, administrative, les entreprises et les citoyens pour permettre l’application cohérente des mesures de lutte contre l’épidémie qui figurent dans le système de gestion de crise et qui reposent sur la responsabilité civique. De fait, l’objectif de distanciation sociale aurait été amoindri par les modes de garde collective alternatifs auxquels les familles ont dû avoir recours.

      Le 11 mars, deux experts scientifiques interviennent à la Diète pour répondre aux questions des parlementaires sur les mesures prises par le gouvernement. Les deux experts s’entendent sur le fait que la décision de fermer les écoles est avant tout politique et ne repose sur aucune analyse scientifique. Ils sont néanmoins en désaccord sur l’usage des tests. Selon Shigeru Omi, Président du comité consultatif des experts, invité par le parti de la majorité (le Parti Libéral Démocrate), le dépistage des cas avancés doit être la priorité, limitant de fait le nombre de tests effectués. Masahiro Kami, Président du conseil du centre de recherche sur la gouvernance médicale, invité par un des partis de l’opposition (le Parti Démocrate Constitutionnel), souligne quant à lui l’importance d’effectuer le maximum de tests possibles pour obtenir des données statistiques fiables. Le pourcentage de la population testée par rapport à la population totale est un des plus faibles en comparaison internationale.

      En effet, la loi sur les Mesures contre les maladies infectieuses ne mentionnant pas l’obligation de recourir à des tests à grande échelle, la décision du gouvernement de ne pas tester en masse repose sur le fonctionnement efficace du premier pilier de la gestion de crise : l’identification des clusters. L’avancée quotidienne des recherches pour comprendre les facteurs de propagation du virus permet grâce à une coordination avec le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales de communiquer les derniers résultats au gouvernement et au comité consultatif.

      La gestion de crise confuse du gouvernement reflète dès lors l’existence de conflits d’intérêts divergents opposant les partisans de la poursuite de l’activité économique, soutenue par le Keidanren (Fédération des organisations économiques) et le ministère de l’Économie et de l’Industrie, aux partisans du dépistage en masse et du confinement généralisé demandés par l’Association des médecins du Japon et certains membres du comité consultatif. Les connaissances scientifiques relatives à la propagation du Covid-19 encore fragiles et les enjeux de pouvoir inhérents aux intérêts divergents entre groupes d’acteurs concernés expliquerait la difficulté rencontrée par le gouvernement pour adopter une ligne d’action cohérente, alors que la définition du problème de santé publique

      et plus précisément son niveau de risque fait encore l’objet d’un manque de consensus.

      S’ajoute à ces tensions politiques et scientifiques, une perte de confiance de l’opinion publique liée à la gestion de crise sur le navire de croisière Diamond Princess et sa médiatisation, au déficit de transparence sur le nombre de cas réellement infectés causée par le non-recours au dépistage massif, et à la fermeture précipitée des écoles. Dans ce contexte la révision de la loi sur les Mesures contre les maladies infectieuses en vue d’y intégrer le Covid-19 est votée à la quasi-unanimité (à l’exception du Parti communiste). Cette nouvelle loi est appliquée le 14 mars pour une durée de deux ans et permet au Premier ministre de déclarer l’état d’urgence sanitaire. Le 19 mars, les effets des mesures de lutte contre la propagation du virus sont analysés lors du huitième comité consultatif des experts. Ce comité se tient dans un contexte mondial de pandémie où l’état d’urgence sanitaire est déclaré dans plusieurs pays du monde dans lesquels une part croissante des citoyens est forcée au confinement.
      La prise de conscience du risque dans un contexte de pandémie mondiale – les mesures d’urgence depuis fin mars 2020

      D’après les membres du comité consultatif, bien que la corrélation scientifique soit difficile à établir, les efforts des citoyens pour respecter les gestes barrières, la demande du gouvernement de fermer les écoles, d’annuler ou de reporter des événements, semblent avoir été efficaces pour ralentir la progression de la contagion par le Covid-19. Cependant, ils s’inquiètent de l’augmentation du nombre de cas isolés et importés de l’étranger dans les grandes villes (Tokyo, Osaka, Nagoya). Cette tendance semble indiquer le début d’une nouvelle vague de cas, localisés dans certaines régions, et dont les symptômes peuvent être sévères. L’apparition de gros clusters, au sein desquels les voies de transmission du virus ne peuvent plus être identifiées, risque d’entraîner, selon les membres du comité consultatif, une situation comparable à celle de l’Italie, de la France ou des États-Unis.

      L’articulation des mesures de lutte contre la propagation du Covid-19 autour des trois piliers est donc renforcée. Le comité recommande alors un renforcement des mesures de prévention face à la formation de nouveaux clusters, une augmentation des budgets accordés au système de santé, ainsi qu’un partage plus efficace des informations entre les gouvernements locaux pour gérer plus étroitement le risque d’infection en fonction des régions. Une augmentation des capacités de test de dépistage est déployée. Enfin, la communication est ciblée sur les conditions de propagation du risque en demandant d’éviter les lieux fermés, les interactions sociales rapprochées, et les rassemblements collectifs.

      Dans ce contexte, le gouvernement décide de la réouverture des écoles après les vacances de printemps, laissant toutefois les gouvernements locaux prendre leur décision en fonction de la situation sanitaire locale. Les contradictions apparentes entre la décision de ré-ouvrir les écoles et l’évolution de la situation sanitaire, à l’égard de laquelle le comité consultatif a émis des recommandations d’urgence, entraînent une nouvelle confusion dans la politique de gestion de crise sanitaire. Ce manque de cohérence pourrait de nouveau altérer l’efficacité des mesures reposant sur la responsabilité civique en réduisant la perception du risque à quelques jours du pont pour l’équinoxe de printemps pendant lequel la floraison des cerisiers attire chaque année un grand nombre de Japonais dans les lieux publics, les restaurants et les bars.

      La veille du long week-end, les deux gouverneurs de Kobe et d’Osaka ont appelé les citoyens à limiter leurs déplacements leur demandant un confinement volontaire. Le discours et les actions des deux gouverneurs locaux avaient pour objectif d’accroître la prise de conscience du risque des citoyens et de prévenir leurs comportements, contrastant avec le manque d’anticipation du gouvernement central. Déjà fin février, le gouverneur de Hokkaido, Naomichi Suzuki, a fait preuve de réactivité en déclarant l’état d’urgence. Le 19 mars il déclare la fin de l’état d’urgence en réponse à la baisse du nombre de nouveaux cas alors que la propagation du virus augmente dans les grandes villes comme Tokyo. La réactivité d’une partie des gouvernements locaux face au manque d’anticipation et de préparation du gouvernement central rappellerait notamment la crise du modèle de gouvernance analysée lors de la catastrophe nucléaire du 11 mars 2011.

      À partir du 25 mars, la gouverneure de Tokyo, Yuriko Koike, recommande aux habitants de la capitale de limiter les sorties et les déplacements pendant les week-ends (fermeture progressive d’un grand nombre de parcs, de bars, d’établissements de karaoké, de cinémas, et promotion du télétravail). Les gouverneurs des préfectures de Chiba, Saitama et Aichi demandent aux citoyens de ne pas se rendre à Tokyo. Face à cette gestion politique confuse, la confiance de l’opinion publique dans la capacité du gouvernement à endiguer cette épidémie continue de baisser.

      L’état d’urgence, déclaré le 7 avril pour sept préfectures (Tokyo, Kanagawa, Saitama, Chiba, Osaka, Hyogo, Fukuoka), devrait permettre au gouvernement d’appliquer plus efficacement les mesures de lutte contre l’épidémie grâce au déploiement d’une coordination institutionnelle entre les sphères politique, administratives et la société civile qui faisait défaut jusqu’à présent. En effet, alors qu’il ne disposait pas de suffisamment de marge de manœuvre politique et budgétaire, l’état d’urgence, assorti d’un grand plan de soutien à l’économie, permet au Premier ministre de procéder à l’activation à un degré avancé de la responsabilité civique pour soutenir les deux autres piliers - identification des clusters et renforcement du système de santé.
      Conclusion

      La responsabilité civique en tant que pilier de gestion de crise sanitaire diffère du civisme qui est une attitude et non un devoir
      . Elle dépend de la communication et de la politique conduite par les autorités. L’identification des clusters, l’analyse des facteurs de propagation du virus dans la société japonaise, les capacités des structures hospitalières, le cadré légal et les enjeux économiques sont autant de variables, parfois divergentes, qui ont orienté la politique de gestion de crise du gouvernement central et des autorités locales. On observe donc une interférence des logiques de santé publique dans le système politique et économique créant un espace de confrontation qui donne lieu à de nouveaux compromis et qui résultent dans l’état d’urgence sanitaire : les autorités demandent aux citoyens de réduire les interactions sociales de 80 % sans établir, pour le moment, un régime exceptionnel de restriction des libertés individuelles. La réticence du gouvernement à mettre en place un tel régime repose sur les valeurs démocratiques et pacifistes de la Constitution d’après-guerre qui incarne les libertés civiques. Or, depuis son entrée en vigueur le 5 mai 1947, sa légitimité provoque de fortes controverses politiques relayées notamment dans le débat public sur les libertés civiques pendant l’état d’urgence. En juin 2017 le vote de la loi Anti-terroriste a déclenché des critiques virulentes au sein de l’opinion publique, des avocats et des journalistes dénonçant son contenu liberticide. En cas d’échec des mesures reposant sur le volontariat la question se pose donc de savoir si la responsabilité civique pourrait évoluer vers un modèle plus normatif et coercitif ? Ou bien le Japon parviendra-t-il à « imaginer un autre mode de réponse à la crise sanitaire et notamment une réponse qui ne sacrifie pas – ou qui sacrifie moins – les libertés » ?

      Pour soutenir les secteurs économiques et les ménages impactés par la crise sanitaire, le gouvernement déploie un plan massif (plan de soutien à l’économie de 915 milliards d’euros). Le gouvernement aurait-il recours à l’incitation économique pour activer la responsabilité civique à un niveau avancé ? Quelle est sa marge de manœuvre face aux non-bénéficiaires des aides financières ? La gestion de crise exacerbe en effet les inégalités de la société japonaise face aux conséquences socioéconomiques engendrées par les mesures de lutte contre l’épidémie. Selon l’enquête réalisée par la Chambre du commerce et de l’industrie de Tokyo, seulement 26 % des PME ont pu mettre en place le télétravail (57,1 % des entreprises de plus de 300 employés, contre seulement 14,4 % des entreprises de moins de 50 employés). Les inégalités face au télétravail altèrent donc l’efficacité des mesures reposant sur la responsabilité civique. Celle-ci est aussi remise en question face aux inégalités sociales et juridiques. Par exemple, la récente mobilisation juridique pour défendre les travailleurs d’Uber Eats pose la question urgente des droits des travailleurs indépendants face aux risques de contagion et aux conséquences socioéconomiques engendrées.


      https://laviedesidees.fr/Le-Japon-face-a-l-epidemie.html

      #géographie_culturelle

      –-> A mettre en lien avec la lecture culturaliste face à la crise en #Suisse :
      https://seenthis.net/messages/848845

    • Coronavirus : l’#exception japonaise ?

      En quelques mois, la pandémie de coronavirus a plongé le monde dans une situation de paralysie dont la durée est difficilement appréhendable. Le Japon, pris entre le report des JO et la rentrée scolaire, semble avoir maîtrisé l’épidémie dès les premières semaines, enrayant de fait son développement exponentiel. Il reste néanmoins des difficultés principalement dues à une réduction des investissements publics dans les hôpitaux contraints de réduire leur accueil.

      Au loin, une sirène retentit. Dans un pays où la population vieillissante est composée à 28% de personnes ayant plus de 65 ans, les ambulances tournoient quotidiennement. Mais en cette période de confinement, elles génèrent une tension latente absente d’ordinaire. Car ça y est. Le Japon, en proie au SARS-CoV-2, a franchi, lui aussi, le pas vers un confinement souple, plus conseillé qu’imposé, mis en place en deux temps, d’abord pour les sept préfectures les plus touchées depuis le 11 avril (Tôkyô, Kanagawa, Saitama, Chiba, Ôsaka, Hongo et Fukuoka), puis, devant la multiplication des cas, en généralisant ces mesures à l’ensemble du Japon le 17 avril. C’est dans un contexte politique très tendu que le Japon doit administrer cette nouvelle crise, à l’origine d’un report et peut être d’une annulation des Jeux Olympiques dont les préparatifs avaient été organisés à grands frais et non sans contestation, la décision de leur accueil ayant été prise deux ans seulement après le triple désastre (tremblement de terre, tsunami, explosion de la centrale nucléaire dai-ichi à Fukushima) qui avait dévasté le Nord-Est du Japon en 2011. Si elle devait se produire, cette annulation représenterait la seconde pour le Japon, la première ayant été motivée par le début de la seconde guerre mondiale. Mais pour l’heure, la guerre est déclenchée au virus, selon les termes du président français, repris par les dirigeants Japonais. Quelle est la situation au Japon et comment le gouvernement fait-il face à la crise ? D’une crise sanitaire à l’autre, le Japon a-t-il tiré les leçons de la communication sur les effets sanitaires développée après Fukushima ? Le système social en place permet-il de pallier à la vulnérabilité de certaines couches de la population ? Quelle est l’ampleur de l’épidémie au Japon comparativement à la situation française ? Autant de questions qui s’imposent afin d’évaluer les diverses mesures mises en place, et de permettre l’élaboration de nouvelles stratégies dans la gestion des désastres sanitaires, au-delà d’une réflexion qui s’impose quant à une refonte de notre système économique et à celui de nos modes de vie.

      Les mesures prises durant le début de l’épidémie et le report des JO

      Depuis le début de l’année, les informations d’abord jugées douteuses en provenance de son voisin chinois sur la potentialité d’une pandémie de covid 19, se sont confirmées. La globalisation des échanges commerciaux, celle du tourisme de masse, ainsi que celle des voyageurs auront eu raison des discours les plus rassurants quant à une maîtrise possible de la pandémie. Chargé d’accueillir les Jeux Olympiques en 2020, le gouvernement japonais n’ayant déclaré que 9 personnes contaminées au 30 janvier 2020, a d’abord été soupçonné de dissimuler le nombre de cas sur son territoire afin de ne pas entraver une organisation qui s’était avérée fort coûteuse, leur coût total étant évalué à 11,5 milliards d’euros[1]. Ces JO revêtent en effet une importance toute particulière dans le cas présent, puisque l’un de leurs objectifs était de médiatiser la réouverture de la zone d’évacuation autour de la centrale nucléaire de Fukushima Dai-ichi, notamment via la localisation du relai de la flamme olympique dans des tronçons de la zone d’évacuation rouverts pour l’occasion[2].

      A la mi-février, alors que le gouvernement japonais luttait contre une annulation probable des JO, les voix d’opposition pour une meilleure gestion d’une possible épidémie dans le pays se firent entendre. Dans un communiqué publique, le Premier Ministre japonais Shinzo Abe, annonce alors quelques restrictions, essentiellement fondées sur la responsabilité civile, en demandant de multiplier le télétravail tant que faire se peut, le report des évènements prévus dans les prochaines semaines, l’évitement des attroupements, la ventilation des espaces confinés, l’annulation des évènements sportifs, et la fermeture des écoles quinze jours avant les vacances saisonnières, la rentrée scolaire au Japon s’effectuant en avril. A un niveau individuel, le savonnement des mains et les lavements de bouche. Dans son allocution, le Premier Ministre spécifie néanmoins le maintien des Jeux Olympiques, et notamment le départ du relai de la flamme Olympique à Fukushima qui devait se dérouler le 16 mars.

      Quelques jours avant le départ du relai, le gouvernement doit néanmoins faire face au refus des coureurs de participer à la course, estimant être doublement mis en danger, par l’exposition aux radiations encore élevées dans la zone, et à celle au coronavirus, l’événement attirant de nombreux spectateurs. Le gouvernement propose alors que le relai soit remplacé par le transport en bus de la flamme olympique renfermée dans une lanterne de cuivre, au moment où les organisations d’athlétismes canadiennes et américaines, en pleine pandémie, demandent le report des JO, finalement décidé par le comité d’organisation international.

      Quand minimaliser les risques ne fait que les augmenter

      Hormis Hokkaidô, dont le gouverneur a déclaré l’état d’urgence dès le 28 février, en demandant à ses habitants le port du masque et un confinement stricte, le Japon, en dépit de la mise en place d’un comité consultatif d’experts dirigé par Omi SHIGERU et suivant une logique épidémiologique très critiquée durant la gestion de l’accident nucléaire de Fukushima, se refuse à effectuer une campagne massive de dépistages argumentant le possible déclenchement d’une vague d’inquiétude démesurée de la population. Pire encore, le 20 mars, la décision de rouvrir les écoles et facultés à la rentrée scolaire début avril est annoncée simultanément à une montée en tension générée par l’apparition de nouveaux clusters qui touchent les principales zones urbaines de Tôkyô, Nagoya, Ôsaka et Kyôto.

      Néanmoins, les échanges de voyageurs en provenance des pays les plus touchés sont limités et des premières mesures fiscales sont annoncées afin de faciliter le confinement. Parmi elles, la possibilité de reporter le paiement des taxes, charges et autres impôts et la mise en place d’un prêt d’urgence. En 2 mois, depuis son premier cas mi janvier, le Japon décompte 1200 cas testés positifs sur son territoire (les dépistages n’étant pas systématiques, ces chiffres ne sont donc qu’indicatifs), dont seulement 5% sont estimés être graves. Si la multiplication du nombre de contamination est rapide, le pays réussi à maintenir une certaine stabilité en raison de plusieurs facteurs. Le premier est une distanciation physique culturellement acquise, puisqu’on ne se touche pas physiquement ni pour se saluer, ni pour exprimer ses marques d’affection. Le second est le fait que la plupart des foyers possèdent des masques en raison de forts rhumes des foins générés par le pollen de certaines essences végétales importées contre lesquelles les japonais n’ont pas d’immunité. Cette « coutume » du port du masque est bien antérieure à la crise du sras et autres grippes influenzas. Les japonais les portent également en cas de rhume afin de ne pas contaminer leurs congénères. En outre, bien que les masques chirurgicaux soient de fabrication nationale, la plupart des distributeurs du Japon, dès le début de l’épidémie, se sont trouvés en rupture de stock. La population en détenait néanmoins suffisamment pour ne pas être affectée par cette pénurie, celle-ci étant comblée par la fabrication artisanale de masques courante dans le pays. Le troisième est le niveau d’hygiène. Ainsi, de l’alcool pour se désinfecter les mains est proposé à l’entrée de la plupart des magasins, les aliments sont emballés (ce qui génère par ailleurs une consommation de plastique extrêmement élevée), tandis que des employés, protégés de masque, de gants et d’écrans de plastique transparent se consacrent à la désinfection des paniers et charriots dans les surfaces alimentaires.

      Le gouvernement comptait donc essentiellement sur la conscience civile, entrainée par les nombreux désastres naturels (tremblements de terre, typhons, inondations) et industriels (maladie de minamata engendrée par la pollution au mercure dans le nord de Kyushu, catastrophe nucléaire de Fukushima) pour faire face au péril. Fort de cette assurance, le Premier Ministre Abe tout en annonçant un plan de soutien économique s’affiche, lors d’une conférence de presse, affublé d’un masque en coton et promet que deux masques en coton seront distribués par foyer dès la mi-avril, générant les sarcasmes de nombreux citoyens. Abenomics[1]était devenu Abenomask (les masques d’Abe)[2], la majorité de la population estimant que les mesures prises restaient insuffisantes face à l’accroissement rapide du nombre de cas et à la détérioration inquiétante de la situation dans les pays occidentaux.

      Quelles sont les mesures prises depuis le 11 avril ?

      Les 7 et 11 avril, de nouvelles mesures sont annoncées par le gouvernement et par la maire de Tôkyô, Yuriko KOIKE, la mégalopole étant la plus touchée par la maladie qui s’avère être une maladie urbaine, en raison de la densité de population qui facilite la transmission d’un individu à l’autre et de la pollution aérienne qui augmenterait le taux de mortalité par le virus selon une récente étude menée par Harvard T.H. Chan School of Public Health[3]. L’air, dans les villes japonaises, étant de bonne qualité en raison d’une circulation automobile réduite, de la quasi suppression du diesel limité aux véhicules de transport, et d’une ventilation suffisante assurée par leur localisation côtière, les risques de contamination sont plus à craindre dans les lieux où la promiscuité est importante, présents en grand nombre dans les villes : transports en commun, Izakaya (bars populaires), pachinko et autres karaoke.

      Ces mesures sont les suivantes :

      Une modification de la loi a été faite afin d’imposer :

      – l’arrêt provisoire d’activité pour toutes les structures scolaires dont la superficie dépasse les 1000 m2

      – la fermeture temporaire de tous les commerces autres que ceux fournissant les denrées nécessaires au quotidien et dont la surface est supérieure à 1000m2

      – la fermeture temporaire de l’ensemble des centres d’exposition, bibliothèques, salles de concert et autres musées dont la surface est supérieure à 1000m2

      – la fermeture des établissements sportifs, ainsi que des salles de loisirs (pachinko, Majong et autres Game center) ou autres lieux de divertissements (cabarets, karaoke, internet-café, night club, etc.)

      Une requête de coopération est par ailleurs faite, sans contrainte légale :

      – les établissements éducatifs (petites universités, auto-école, etc.) de moins de 1000m2 peuvent continuer leur activité en prenant les mesures de précaution pour se protéger.

      – Les centres d’exposition, bibliothèques et autres salles de concert en deçà de 1000m2sont priés de fermeture temporaire

      – Les commerces hors vente de produits nécessaires au quotidien sont priés de fermer sauf ceux dont la surface est inférieure à 100 m2qui peuvent continuer leur activité en respectant les mesures de précaution.

      Il est également demandé aux cultes, services de garde d’enfants et autres services sociaux d’arrêter ou de limiter leurs services en respectant les règles de protection.

      Les hôpitaux, vétérinaires, hôtels, transports, services funéraires, média, bains publics, supermarchés et autres kombinis(supérettes) devront, quant à eux, assurer les mesures de précaution afin de continuer leur activité. Cette règle est également appliquée aux bars et restaurants dont les horaires d’activité sont néanmoins réduits. Ainsi, leur activité est permise de 5 h du matin à 20h.

      Le télétravail est recommandé pour les autres activités.

      Si les tests sont limités, une application-test est envoyée sur l’ensemble des téléphones portables via Line, un service de messagerie très populaire au Japon afin de distribuer un questionnaire permettant d’appréhender le nombre de personnes présentant les symptômes de la maladie.

      Les mesures annoncées pour la capitale seront finalement appliquées sur l’ensemble du pays, devant une accélération du nombre de personnes contaminées, une semaine après leur annonce.

      Ici comme ailleurs, héroïser les plus vulnérables ne leur permet pas de faire face

      Mais très vite, les voix se lèvent. La cessation d’activité est insoutenable pour une grande partie de la population. Des manifestations, respectant les distances sécuritaires, sont organisées à Tôkyô, avec pour mot d’ordre : « sans argent, pas de confinement ! ».

      Après des discussions tendues au parlement, le gouvernement décide finalement, le 20 avril, la distribution de 100 000 jpy/personne (850 euros) qui seront versés au chef de famille, afin de combler les pertes dues au confinement.

      Par ailleurs, la fermeture des internet-cafés où dormaient les personnes sans foyer, communément désignées sous le terme de « réfugiés des cyber cafés » (netto kafe nanmin) , une population estimée par les associations de suivi social à 4000 personnes pour la seule ville de Tôkyô et à 500 par le gouvernement, se retrouve à la rue. La maire de Tôkyô a proposé, pour solutionner le problème, le réquisitionnement d’hôtels ou d’équipements d’accueils afin de permettre leur hébergement, mais également de maîtriser les cas de contagion éventuels. Néanmoins, les associations s’occupant du suivi des personnes sans domicile fixe tirent la sonnette d’alarme. Le dirigeant de Tôkyô Umbrella kikin partage sur les réseaux sociaux les secours quotidiens promulgués à ces nouveaux homeless qui viennent de perdre leur travail suite aux fermetures contraintes des magasins qui les employaient[1].

      La politique de confinement est dramatique, et c’est pour éviter d’avoir à l’imposer que le gouvernement avait tenté de maîtriser l’épidémie, notamment en permettant au département la réquisition d’hôtels afin d’isoler les personnes positives asymptômatiques ou présentant des symptômes légers. Cette mesure a été adoptée sur l’ensemble du territoire. La liste de ces hôtels fait l’objet d’une publication régulière dans la presse, comme c’est le cas pour la préfecture spéciale de Kyôto dont le répertoire des hôtels mobilisés à cet effet a été publié le 21 avril 2020 dans le journal Asahi, l’un des quotidiens nationaux les plus lus du Japon[2].

      Malgré l’ensemble des mesures promulguées par les institutions aux diverses échelles d’intervention (aux niveaux national, départemental et local), les hôpitaux commencent à être engorgés dès la mi-avril[3] et les patients se voient refuser leur demande d’hospitalisation. Pire encore, les opérations de patients atteints du cancer sont annulées une à une, en raison du manque de personnel, en sous-effectif, en partie victime de la maladie. Shintsuke TENNÔ, représentant de l’association des malades du cancer témoigne, dans un reportage de la NHK du 20 avril[4], d’un problème récurrent dans la plupart des pays qui ont fait le choix de réduire leur soutien aux hôpitaux publics. Ainsi, le Japon a opté pour une réduction importante du nombre de lits d’hôpitaux depuis plusieurs années. En 1998, le nombre de lits réservés en cas d’épidémie était de 9060 lits, contre 1869 aujourd’hui. Si le nombre de lits total reste assez important en raison de la présence de dispensaires nombreux dans le pays, ainsi que du grand nombre de lits en psychiatrie, soit 7.79 lits pour 1000 personnes contre 3.09 lits pour 1000 personnes en France[5], des études sur le sujet (voir : Intensive Care Medicine journal , National Center for Biotechnology Information , ou encore more recent analysis publiées dans Critical Care Medicine Journal comparent le nombre de lits en réanimation dans les pays d’Asie) montrent que le nombre de lits en réanimation pouvant être mobilisés en cas d’épidémie est drastiquement plus faible, puisqu’il est de 7,3 lits pour 100 000 personnes au Japon contre 11,6 lits pour 100 000 personnes en France.

      Depuis octobre dernier une accélération notable de ce processus avait été activée, visant à la suppression de 130 000 lits d’hôpitaux en 5 ans décidée par le ministère des finances[1]. Ici aussi, les discussions quant au maintien des investissements publics dans le secteur médical sont remises sur le devant de la scène.

      Si certains choix politiques sont semblables, les cas français et japonais sont néanmoins bien distincts

      Le 23 avril 2020, à l’heure où la France déplore 119 151 cas de malades confirmés et 21240 décès pour une population moitié moindre, le Japon (126 millions d’habitants) ne compte que 12061 personnes testées positives et 300 décès attribués au covid19. Si l’on se concentre sur la tendance globale, depuis janvier, l’épidémie de covid19 au Japon s’est propagée à un rythme régulier, avec un nombre de cas détectés qui a été multiplié par 10 tous les mois. Etant donné le temps d’incubation du SARS-CoV-2, environ 5 jours[1], ceci correspond à un taux de reproduction (le nombre moyen de transmissions par malade) moyen de l’ordre de 1,5.

      En comparaison, le cas de la France est très différent avec un nombre de cas détectés qui, entre la mi-janvier et la mi-mars quand le confinement a été déclaré, a été multiplié par 10000 ! Le taux de reproduction peut être évalué à 2,15. Cela semble assez proche du cas Japonais, mais, dans les faits, les conséquences de cette différence sont dramatiques - c’est le principe d’une exponentielle - avec un nombre de morts près de 100 fois plus importants en France qu’au Japon.

      Évolution de l’épidémie de covid19 au Japon et en France (d’après les données de l’European Centre for Disease Prevention and Control). Au 23 avril 2020, la base de données faisait état de 11 772 cas détectés et de 287 décès au Japon, et de 119 151 cas détéctés et de 21340 décès en France.

      D’autre part, malgré un nombre de tests qui peut paraître faible au regard d’autres pays, le rapport entre le nombre de cas détectés et le nombre de décès est de 42 au Japon. Il est de 5,6 en France. En comparaison, il est de 45 en Corée du Sud, vantée pour avoir su juguler l’épidémie grâce à des tests massifs. Il semble donc que le Japon retrouve une grande partie des cas de COVID-19, même si l’apparition de cas non traçables de plus en plus nombreux montre qu’il s’agit d’un problème complexe qui n’est pas maitrisé pour l’instant. De son côté, la France, qui n’a pas vu arriver l’épidémie et s’est retrouvée submergée, ne teste qu’environ 10% des cas : ceux qui sont dans un état critique et doivent aller à l’hôpital.

      Une tendance positive se dessine cependant : la courbe du nombre de cas/jour (histogramme bleu) descend côté français où le taux de reproduction R est donc clairement passé en dessous de 1. Cela semble aussi être le cas au Japon, grâce à la déclaration d’état d’urgence, même s’il est encore trop tôt pour être sûr que ce soit une tendance robuste. Il faut s’attendre néanmoins au Japon à une augmentation du nombre de décés par jour lié à l’augmentation des cas les jours et semaines précédentes.

      Ainsi, en comparaison de la France, le Japon a été relativement épargné par l’épidémie de covid19. Il a certainement bénéficié d’habitudes de sa population, une distanciation physique culturelle, le port fréquent du masque et une hygiène très présente, pour limiter la progression de l’épidémie. Le Japon n’a cependant pas pu éviter de déclarer l’état d’urgence, montrant que l’épidémie ne peut être jugulée que par des mesures fortes. Les semaines qui viennent vont être décisives pour ces deux pays qui doivent confirmer la décroissance de l’épidémie, pour la France organiser le déconfinement et pour le Japon faire repartir progressivement son économie. Plus généralement, si l’on peut déplorer l’impréparation de scénarii pourtant connus et analysés depuis plus de trente ans (voir à ce sujet les travaux de l’anthropologue Frédérick Keck[1]), cet épisode aura néanmoins montré, certes non sans coût, que l’impossible devenait possible, au moins pour un moment, lorsque volontés étatiques et citoyennes se conjuguaient. Peut-être est-il temps d’appréhender ce désastre comme une opportunité de réfléchir à la mondialisation des échanges tant de voyageurs que des marchandises pour la limiter au nécessaire aussi en vue d’une réduction de notre empreinte carbone, mais également d’évaluer le coût de la délocalisation des industries nationalement vitales. A un niveau local, cette occasion faitémerger la nécessité d’une réflexion sur l’orientation des investissements publics, tant dans le secteur hospitalier, que dans les structures d’accueil et d’habitat à destination des plus démunis, les épisodes épidémiques étant l’un des critères fondamentaux à l’origine de l’élaboration d’institutions publiques de logements permettant de « loger le peuple » afin de prémunir la sécurité (entre autres) sanitaire de chacun[2].

      http://japosphere.blogs.liberation.fr/2020/04/28/coronavirus-lexception-japonaise
      #chronologie

  • Le confinement marque une #frontière_culturelle en #Suisse

    La notion de #responsabilité_individuelle parle plus aux #Suisses_alémaniques qu’aux #Romands, davantage adeptes d’un Etat fort. Les raisons en sont historiques et culturelles.

    Exiger le moins pour obtenir le plus ; imposer le #semi-confinement pour aboutir au confinement : pour un œil étranger, la stratégie de la Suisse pour freiner la propagation du #coronavirus s’apparente au mieux à un exercice d’acrobatie, au pire à un orgueil démesuré. Pourtant, si l’on en croit les images de nos villes ce week-end, semi-désertes, il n’est pas dit qu’on perde ce pari. Par la grâce de la discipline helvétique ? Pas seulement. Plus profondément, c’est à la notion de responsabilité individuelle et de rôle de l’Etat qu’il faut probablement attribuer ce résultat.

    Or, ces notions ne sont pas totalement identiques selon qu’on est citoyen latin ou alémanique. En #Suisse_romande, on a vu se multiplier les appels au #confinement_total, espéré par beaucoup jusqu’à vendredi dernier. Des citoyens l’ont même demandé sous forme de pétitions. On sentait aussi cette préférence chez certains conseillers d’Etat romands, même si exprimée à demi-mot pour ne pas court-circuiter la Confédération, désormais à la manœuvre.

    En Suisse alémanique en revanche, les appels s’en tenaient au #respect_des_règles en vigueur, hormis des personnalités de l’UDC, réclamant des mesures plus strictes, avec de notoires exceptions, comme le conseiller national Roger Köppel. Même si Zurich a fermé ses rives du lac devant un afflux de promeneurs, le maître mot demeure « responsabilité individuelle ». C’est ce qu’il fallait comprendre du discours fort d’Alain Berset, taclant au passage le verticalisme aux accents certes gaulliens mais jugé inefficace de notre voisin français.

    La synthèse entre la France et l’Allemagne

    La Suisse, c’est une autre histoire, mélange du nord et du sud de l’Europe : « Au Nord, comme en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas, le premier réflexe est le laisser-faire, dans la certitude que les barrières naturelles se réinstalleront d’elles-mêmes, explique Olivier Meuwly, historien. Dans la culture germanique, on présuppose que la responsabilité individuelle entraînera la #responsabilité_collective. Une vision étrangère à la culture du Sud, où l’ordre est censé venir d’en haut. »

    La Suisse, à cheval, décline ces deux cultures. Historiquement, elle fait la synthèse entre la France et l’Allemagne, ou la Grande-Bretagne et l’Italie. L’historien rappelle que dans les guerres de religion déjà, la Suisse a tenté la #synthèse en cherchant le #compromis.

    Deux paradigmes pour un seul objectif, la #liberté : « Dans le brillant discours d’Alain Berset, toutes les influences se synthétisent et on perçoit une #mosaïque_organiquement_organisée », estime Olivier Meuwly. Ce curieux #assemblage s’articule aussi autour de l’esprit de #milice, du #fédéralisme et de la #démocratie_directe, « trois piliers de la « #suissitude », trois logiques qui marquent les #comportements ».

    La responsabilité individuelle découle de la faiblesse de l’Etat

    Cette valorisation de la responsabilité individuelle trouve ses fondements dans la #faiblesse_de_l’Etat, rappelle Irène Herrmann, historienne et professeure à l’Université de Genève : « Au XIXe siècle, Berne a lutté pour s’arroger un peu du pouvoir des cantons. Une partie lui est échue, une autre a été conférée aux citoyens, à travers la démocratie directe : ils devaient en user modérément et exercer sur eux-mêmes le pouvoir que l’Etat, très faible, était incapable d’imposer. Cet héritage institutionnel est très fort et, par conséquent, on n’imagine pas aujourd’hui que cela puisse marcher autrement. »

    C’est un peu moins vrai dans les cantons qui ont rejoint la Confédération plus tardivement, comme le Valais, Genève et Neuchâtel. « Ceux-là acceptent plus volontiers la #délégation de #responsabilités à l’Etat, alors que les cantons alémaniques ont tendance à glorifier la culture politique basée sur la responsabilité individuelle, poursuit l’historienne. Cela aboutit à une survalorisation du pouvoir de décision de l’individu. » D’autres répondront qu’elle est salutaire. Ces différences de perception pourraient expliquer l’attente des Latins envers Berne à serrer la vis.

    Un #Röstigraben de l’embrassade ?

    Plus prosaïquement, ce souhait n’est sans doute pas étranger au fait que les cantons latins déplorent plus de mortalité que la Suisse alémanique. C’est vrai aussi pour l’Italie ou l’Espagne, contrairement à l’Allemagne et à l’Autriche. Ce constat amène le politologue alémanique Michael Hermann, qui dirige l’institut de recherche Sotomo, à émettre une hypothèse : « Il est frappant d’observer que le coronavirus a une #géographie_culturelle. Et si c’était le fait d’un #rapport_à_l’autre différent ? Les habitants des pays latins sont plus tactiles, ils observent moins de #distance_sociale que dans les pays germaniques. »

    Un Röstigraben de l’embrassade ? Pourquoi pas. Sa supposition s’appuie aussi sur le fait que les décès actuels sont le résultat de contagions qui datent d’il y a trois semaines environ, soit avant les mesures mises en place par Berne. Michael Hermann insiste aussi sur d’autres différences : le #sport est plus largement pratiqué outre-Sarine, la #prévention sur la santé occupe plus d’espace qu’en Suisse romande : « Adeptes de la marche, de la nature et du grand air, les Alémaniques auraient beaucoup de mal à supporter le confinement. C’est possible que cela compte aussi dans l’#autodiscipline qu’ils observent. »

    Il n’empêche : au-delà des divergences dont les racines plongent dans un passé qui, même ignoré, constitue le génome des Suisses, ceux-ci ont majoritairement suivi l’injonction des autorités et déserté leurs villes. Qu’il soit permis de s’en égayer avec ce mot d’Olivier Meuwly : « On dit des Romands qu’ils sont très français, mais ils se révèlent aussi alémaniques ! »

    https://www.letemps.ch/suisse/confinement-marque-une-frontiere-culturelle-suisse

    –-> article paru le 23.03.2020

    Pour rappel, un extrait du discours de Berset :


    https://seenthis.net/messages/843863#message844245

    ping @simplicissimus

  • Contre l’état d’urgence sanitaire, pour un libre confinement – ACTA
    https://acta.zone/contre-letat-durgence-sanitaire-pour-un-libre-confinement

    [...] il nous est impossible de respecter scrupuleusement les règles du confinement, de rester cloîtrés devant Netflix, en constatant la guerre que les autorités livrent dehors. Face au gouvernement qui s’octroie le droit de juger qui peut encore sortir et pour quel motif, nous jugeons qu’il est nécessaire d’organiser des réseaux de solidarité et d’entraide à la hauteur de la situation. Si nous bravons les lois du confinement en sortant dans la rue pour nourrir la solidarité, nous veillons à le faire avec soin, pour ne pas répandre la contamination. C’est ce « soin » lui-même qui nous pousse à sortir. Penser le confinement libre c’est faire l’hypothèse qu’il nous est possible de se donner les moyens de mesurer collectivement et singulièrement les risques à prendre ou ne pas prendre, d’évaluer les situations afin de pouvoir s’organiser ensemble. [...]

    Collectif El Manba soutien migrants 13 / Collectifs habitants Maison blanche / Collectif 5 novembre / Assemblée de la plaine / Brigada de solidaritat populari marseille / Manifesten / Dar la Mifa / Maison du peuple Marseille / Précaires déters 13 / Squales Marseille

    Un point de vue salubre à compter parmi les pratiques d’une médecine sociale qui ne peut être l’apanage des institutions et des professionnels, malgré quelques assertions approximatives. Par exemple, leur manière de parler de la surmortalité dans un 93 (effectivement emblématique) en valeur absolue ( multi-séculaire anti-parisianisme marseillais oblige ?), sans savoir les détails plus fins qui sont produits ici : « la différence de mortalité devient de plus en plus marquée : 35% plus importants dans le 93 que sur Paris. »
    https://seenthis.net/messages/847816

    #soin #solidarité #confinement_libre #Marseille #médecine_sociale épidémiologie_populaire #amateurs
    #surmortalité dans la #société_d'abandon

  • #François_Héran : « L’#idéologie du #confinement national n’est qu’un ruineux cauchemar »

    Technique de lutte contre l’#épidémie, le confinement devient une dangereuse idéologie s’il prend prétexte de la #protection_sanitaire pour viser les seuls migrants, souligne le sociologue François Héran dans une tribune au « Monde ».

    Tribune. « Fermer nos frontières », telle serait pour certains la leçon à retenir de la crise sanitaire, une mesure qu’on aurait dû adopter de longue date. Mais les fermer à qui ? Aux seuls migrants ou à tous les voyageurs internationaux ? Dans nos cerveaux, le projet d’ouvrir ou de fermer les frontières est associé à la politique migratoire.

    Or, le virus ne fait aucune différence entre le migrant et le voyageur. Il n’a pas d’idéologie, il obéit à la loi des grands nombres et à cette donnée de base : l’immigration représente une part minime des passages aux frontières, moins de 1 %. Une politique de confinement national qui alléguerait la protection sanitaire pour cibler les migrants tout en négligeant 99 % des passages de frontière renouerait avec les errements du passé, bien décrits par l’historien Antonin Durand dans un article de la revue en ligne De facto.

    La France a délivré en 2019 environ 270 000 titres de séjour d’au moins un an à des migrants non européens

    La somme des franchissements de frontière enregistrés dans le monde en 2018 pour des séjours de moins d’un an s’élève à 1,4 milliard, selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT). Malgré l’essor des communications à distance, ce nombre a progressé de 50 % en dix ans. Voyages de loisir pour une grosse moitié, mais aussi visites aux proches, voyages d’étude, pèlerinages, déplacements professionnels (stages, missions, travaux saisonniers). Sans surprise, l’Europe concentre la moitié des entrées aux frontières. Or le record mondial revient à la France : pas moins de 89 millions d’entrées en 2018, migration non comprise. Devant l’Espagne (83 millions), les Etats-Unis (80 millions), la Chine (63 millions) et l’Italie (62 millions).

    Il est plus difficile d’estimer le nombre d’entrées à des fins de migration permanente. Mais l’ordre de grandeur est cent fois moindre. La France a délivré en 2019 environ 270 000 titres de séjour d’au moins un an à des migrants non européens – dont une part vivaient déjà sur place sans papiers (ce qui empêche d’additionner simplement les illégaux aux légaux). S’ajoute à ce noyau une partie des 170 000 demandeurs d’asile, « dublinés » compris : ceux qui n’obtiennent ni le statut de réfugié ni une régularisation pour raison familiale ou autre (et, donc, ne figureront pas dans la statistique des titres des années suivantes). Au total, en calculant large et sans doubles comptes, on peut estimer à 400 000 environ le nombre d’entrées annuelles de migrants non européens sur le territoire français. Quant aux citoyens de l’Union européenne, qui peuvent s’installer sans titre de séjour, les enquêtes de l’Insee estiment leur afflux, bon an mal an, autour de 140 000.

    Déguiser une politique migratoire en politique sanitaire

    Ainsi, chaque année en France, 540 000 entrées environ relèvent de la migration, ce qui est très peu sur l’ensemble des 90 millions d’entrées provisoires ou durables : 0,6 %. Même assortie d’une grosse marge d’erreur, c’est une donnée incontournable pour le contrôle sanitaire. Les contrôles aux frontières pour ralentir la propagation des épidémies sont légitimes, mais rien ne justifie de les réserver aux migrants, alors que les voyageurs internationaux sont de 140 à 200 fois plus nombreux. Ce serait déguiser une politique migratoire en politique sanitaire.

    Or la confusion est courante. Dans un entretien récent (Le Figaro du 14 avril), Philippe de Villiers jubile : l’épidémie a sonné le glas du mondialisme, la France rentre dans ses frontières et les multiplie à l’envi en interne, sous forme de gestes barrières. Et de fustiger la mondialisation, coupable d’avoir favorisé « quatre crises mortelles : sanitaire, migratoire, économique, et bientôt financière ». J’invite M. de Villiers à se pencher sur un fleuron de la mondialisation qu’il connaît bien, le parc du Puy du Fou. Son site multilingue (français, anglais, espagnol, italien, allemand, néerlandais, russe et chinois) vante la part croissante des visiteurs étrangers (+ 38 % en 2018) et arbore le titre de « meilleur parc du monde » décerné par… le site Internet TripAdvisor. Et j’imagine qu’il ne discrimine pas les immigrés à l’embauche. On le voit, l’intérêt bien compris n’a que faire de l’idéologie du confinement national. Libéré de la crise, le parc vendéen saura renouer avec le succès en misant à nouveau sur la mondialisation.

    On a pris conscience dans la crise que les métiers à forte utilité sociale mobilisent les immigrés plus qu’à leur tour. On vérifie aussi que, sans la clientèle étrangère, des secteurs entiers sont sinistrés. Les 89 millions d’entrées de l’année 2018 ont produit 140 millions de nuitées de non-résidents – autant que les nuitées de clients français ! Le Louvre ne serait pas le premier musée de la planète s’il ne vendait pas 75 % de ses billets à des étrangers. Et ainsi de suite.

    Vous rêviez d’un monde appliquant sans faille l’idéologie du « confinement national » ? La fermeture des frontières à la faveur de l’épidémie vous en apporte la preuve expérimentale : un monde sans migrants ni visiteurs étrangers est un monde à l’arrêt ou sévèrement amputé. C’est un monde où les citoyens des pays du Nord – cuisante ironie – peuvent devenir à leur tour des étrangers indésirables dans les pays du Sud, voire dans leur propre pays, comme l’ont vécu ces Français en croisière interdits de débarquer à Marseille, pris au même piège que les passagers de l’Aquarius en 2018.

    Interdépendance

    Il est bon que les Etats souverains cherchent à garantir sur leur sol certaines productions stratégiques pour la défense et la santé. Mais le souverainisme atteint ses limites avec les effets ruineux du confinement national et sous le coup des décisions souveraines des autres pays. On ne perd pas son indépendance si, au lieu de fabriquer soi-même son pain, on l’achète chez son boulanger ; on entre en interdépendance et c’est ce qu’on appelle le marché, avec son lot de coopérations, d’échanges et de régulations. Ainsi en va-t-il des relations internationales, de l’intégration européenne ou des conventions internationales en matière de mobilité, de migration ou d’asile.

    La tendance à franchir toujours plus les frontières n’est ni une mode ni une anomalie. C’est une lame de fond. Au nom de quoi voudrait-on dissuader les jeunes, les actifs ou les retraités de parcourir le monde ? La migration, à sa modeste échelle, participe de ce mouvement. Il faut réguler cette mobilité, c’est inévitable, mais on voit mal comment inverser la mondialisation croissante des voyages internationaux, sauf à rêver d’un confinement perpétuel.

    Technique de lutte en temps d’épidémie, le confinement se dégrade en idéologie s’il allègue la protection sanitaire des nations pour viser les seuls migrants. L’immigration zéro est un déni de réalité tout autant que le slogan « no border ». De la même façon, le rêve d’un monde fermant ses frontières à tous les étrangers n’est qu’un ruineux cauchemar. Une fois déconfiné, le monde continuera de circuler – et il y aura tout à voir.

    François Héran est sociologue, anthropologue et démographe, titulaire de la chaire migrations et sociétés au Collège de France, ancien directeur de l’Institut national d’études démographiques (INED) de 1999 à 2009, animateur de l’Institut Convergences Migrations. Derniers ouvrages parus : « Avec l’immigration. Mesurer, débattre, agir », (La Découverte, 2017) et Migrations et sociétés (Fayard, 2018).

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/04/26/francois-heran-l-ideologie-du-confinement-national-n-est-qu-un-ruineux-cauch
    #confinement_national #migrants #migrations #coronavirus #covid-19
    #frontières #fermeture_des_frontières #nationalisme #liberté_de_circulation #liberté_de_mouvement

    –------

    Voir aussi cet autre texte de Héran :
    #Voyageurs_internationaux ou immigrants, le virus ne fait pas la différence
    https://seenthis.net/messages/844270

    ping @thomas_lacroix @karine4 @isskein

    • Entretien. Pour l’épidémiologiste suédois #Anders_Tegnell, “fermer les frontières est ridicule”

      L’épidémiologiste à l’origine de la stratégie controversée de la Suède pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 s’est entretenu avec Nature. Selon lui, l’approche basée sur la responsabilisation a bien fonctionné dans son pays.

      https://www.courrierinternational.com/article/entretien-pour-lepidemiologiste-suedois-anders-tegnell-fermer

      Après, voilà... c’est le gars derrière la stratégie de lutte contre le coronavirus en Suède...

    • Le #nationalisme est-il bon pour la santé ?

      Les gouvernements ont arrêté le monde en sept jours. Dès janvier, alors que l’Organisation mondiale de la santé s’était prononcée contre les restrictions du trafic international de voyageurs (https://www.who.int/news-room/articles-detail/updated-who-advice-for-international-traffic-in-relation-to-the-outbreak-of-the), la circulation en provenance de Chine avait été suspendue par plusieurs pays, voisins ou plus lointains, comme l’Italie.

      Mais c’est à la mi-mars que tout a basculé. Malgré la progression de l’épidémie, de plus en plus d’États ont remplacé les contrôles sanitaires aux frontières par des blocages fondés sur la nationalité. En une semaine, entre le 16 et le 23 mars, la plupart d’entre eux ont interdit l’entrée à toutes les nationalités, à l’exception de leurs propres ressortissants (https://www.iatatravelcentre.com/international-travel-document-news/1580226297.htm).

      Ces restrictions peuvent paraître justifiées pour des raisons sanitaires. De fait, la distanciation sociale, lorsqu’elle est parfaitement respectée, réduit efficacement la propagation de l’épidémie. Par extension, ne pourrait-on pas penser que la « distanciation nationale » contribue, elle aussi, à cette réduction ?
      Une stratégie inefficace

      En janvier, lorsque l’OMS recommande de ne pas restreindre le trafic international, son avis est fondé sur l’inefficacité sanitaire d’une telle mesure. Une fois que le virus est présent sur un territoire, il se propage en effet à travers les contacts locaux. Fermer les frontières ne retarde que de peu l’épidémie, comme l’ont montré de nombreuses études sur la propagation des virus de la grippe ou d’Ebola.

      Ces résultats ont été confirmés pour le Covid-19. Un article publié dans la prestigieuse revue Science a étudié les effets des restrictions de voyage sur la propagation de l’épidémie en cours. Il conclut que l’impact d’une forte réduction des voyages vers et à partir de la Chine (à hauteur de 90 %) reste modeste sur la progression de l’épidémie, tant que cette réduction n’est pas combinée avec des efforts importants visant à réduire de 50 % la transmission à l’intérieur des communautés nationales, notamment par un dépistage précoce et isolation.

      L’article compare également l’impact des restrictions internes que la Chine a adoptées le 23 janvier à l’égard de Wuhan à celui des restrictions internationales que les pays ont adoptées à l’égard de la Chine. Les restrictions décidées à Wuhan ont retardé la progression de l’épidémie dans le reste de la Chine de seulement 3 à 5 jours. La raison est que des personnes qui n’avaient pas (encore) de symptômes avaient déjà voyagé dans d’autres villes chinoises avant la quarantaine.

      L’étude montre que les « frontières » installées autour de Wuhan ont eu un effet plus marquant à l’échelle internationale. En prenant cette mesure, la Chine a réduit le nombre de cas importés dans d’autres pays de 80 % jusqu’à la mi-février, lors du déclenchement de l’épidémie dans plusieurs pays.

      Ce résultat n’est pas surprenant : les mesures plus ciblées, à commencer par le dépistage, l’isolement des cas infectés et la distanciation sociale, sont plus efficaces pour contenir une épidémie, que les restrictions de la mobilité.
      https://www.youtube.com/watch?v=gxAaO2rsdIs&feature=emb_logo

      Des dangers pour la santé publique

      Le 18 mars, trois chercheurs américains tentaient encore de montrer l’inutilité de fermer les frontières avec la Chine. Pour cela, ils ont analysé l’évolution du nombre de personnes infectées par pays et par jour, à partir de 27 janvier. Comme le montre leur graphique, certains pays ayant fermé leurs frontières avec la Chine (en rouge) peuvent connaître un nombre d’infections plus élevé que d’autres pays qui ne l’ont pas fait (en bleu).

      Un collectif de seize spécialistes en santé mondiale ont alerté, dans la prestigieuse revue médicale The Lancet, sur le caractère disproportionné des fermetures des frontières – mesures qui contreviennent aux recommandations de l’OMS et qui sont susceptibles d’aggraver la crise sanitaire.

      Les restrictions au trafic international risquent en effet d’aggraver la situation, pour plusieurs raisons. Sanitaires, d’abord : même quand des exceptions sont prévues pour le personnel soignant et les équipements médicaux, la rareté des moyens de transport ralentit la réponse sanitaire.

      Alimentaires, ensuite : même si le stock mondial de céréales est pour le moment suffisant, l’arrêt des exportations peut perturber les prix en provoquant ici des excédants, là des pénuries alimentaires qui aggraveront la crise sanitaire.

      D’équité, enfin : la fermeture des frontières nuit, de façon tragique, aux plus vulnérables. Chaque année, le commerce international permet d’acheminer assez de maïs, de blé et de riz pour nourrir 2,8 milliards de personnes dans le monde. En 2018, l’Afrique subsaharienne, une région où résident un quart des 820 millions de personnes malnutries du monde, avait pu importer plus de 40 millions de tonnes de céréales.


      La fermeture des frontières risque d’augmenter l’insécurité alimentaire des plus pauvres, comme l’indique un récent rapport du Programme alimentaire mondial des Nations unies.
      Fermer les frontières, est-ce légal ?

      Un article publié récemment dans Science rappelle que la restriction du trafic viole le droit international. En effet, la plupart des États qui ont procédé à la fermeture des frontières ne respectent pas le Règlement sanitaire international de l’OMS qu’ils ont eux-mêmes adopté en 2005.

      Ce Règlement, qui constitue un traité légalement contraignant, dispose, à son article 43, que les mesures prises par les États face aux risques sanitaires « ne doivent pas être plus restrictives pour le trafic international, ni plus intrusives ou invasives pour les personnes, que les autres mesures raisonnablement applicables qui permettraient d’assurer le niveau approprié de protection de la santé » (43-1). Pour être proportionnées, les mesures doivent s’appuyer sur « des principes scientifiques » et sur « les éléments scientifiques disponibles » (43-2). Lorsqu’un État prend des mesures qui « entravent de manière importante le trafic international », comme le « refus de l’entrée ou de la sortie des voyageurs internationaux pendant plus de 24 heures », cet État doit « fournir à l’OMS les raisons de santé publique et les informations scientifiques » qui justifient » ces décisions (43-3).

      Or les principes et les informations scientifiques disponibles ne justifient pas les restrictions du trafic international. De plus, la plupart des pays n’ont pas notifié à l’OMS les raisons de santé publique qui ont motivé leur décision. Les chercheurs enjoignent les gouvernements de suivre plutôt les recommandations de l’OMS en augmentant le nombre de tests et en s’assurant que la distanciation sociale est respectée.
      Le biais nationaliste

      Dans des situations de crise, le risque de prendre des décisions biaisées augmente et avec lui, notre capacité à aggraver la situation. L’un de ces biais est de surestimer l’importance des frontières nationales ou des différences entre les populations. En sciences sociales, ce biais est appelé « nationalisme méthodologique », pour le distinguer du nationalisme comme idéologie politique.

      On peut l’illustrer par trois autres exemples. Premièrement, le biais nationaliste nous empêche de percevoir correctement un problème de santé humaine. Ainsi, le virus a été souvent présenté comme étant « chinois ». Le 27 janvier, un journal danois avait même publié une caricature remplaçant chacune des étoiles du drapeau de la Chine par un virus. L’ambassade chinoise au Danemark avait déploré « le manque d’empathie » et une « offense à la conscience humaine ». Le journal danois s’en est défendu, en estimant que les Chinois et les Danois représentaient « deux types de compréhension culturelle ». Or cette surestimation des différences culturelles peut conduire non seulement à l’absence d’empathie, mais aussi à la confiance dans l’idée que pour faire face à un virus perçu comme étranger, la solution est de fermer les frontières.

      Deuxièmement, le biais nationaliste peut expliquer les temps de réaction à un problème sanitaire. Par exemple, l’Italie a fermé ses frontières avec la Chine le lendemain de l’hospitalisation d’un couple de touristes chinois à Rome le 30 janvier. Mais elle a mis plus de trois semaines pour prendre les premières mesures adéquates.

      Pendant trois semaines, les recommandations du ministère de la Santé visaient uniquement les personnes qui revenaient de l’étranger et les médecins cherchaient surtout des patients ayant voyagé. Lorsque le 20 février, un Italien de 38 ans avait développé les symptômes sans lien apparent avec l’Asie, l’anesthésiste qui a décidé de le tester a dû désobéir au protocole qui réservait les tests aux personnes ayant voyagé à l’étranger.

      Troisièmement, le biais nationaliste a conduit les gouvernements à interdire l’arrivée des étrangers tout en faisant une exception pour les ressortissants ou les résidents. Or, si le but est de réduire le nombre d’interactions sur un territoire, pourquoi permettre le retour des nationaux, dont les liens sociaux et familiaux sont plus nombreux que ceux des étrangers ? Et pour les nationaux, la règle qui leur permet de revenir, quelle que soit la prévalence de l’épidémie dans leur pays, leur rend-elle vraiment service ?

      Les gouvernements ont arrêté le monde en sept jours sans en voir toutes les conséquences. Combien de temps nous faudra-t-il pour les corriger ?

      https://theconversation.com/le-nationalisme-est-il-bon-pour-la-sante-135709

      ping @karine4

  • Societal exit from lockdown/ Déconfinement sociétal /Maatschappelijke exit-strategie

    Apport d’expertises académiques / Inbreng van academische expertise / Contribution of academic expertise

    Preprint Version 1.1April 17, 2020

    https://07323a85-0336-4ddc-87e4-29e3b506f20c.filesusr.com/ugd/860626_731e3350ec1b4fcca4e9a3faedeca133.pdf

    cf. Coronavirus - Une centaine de chercheurs émettent dix recommandations pour le déconfinement
    https://www.lalibre.be/dernieres-depeches/belga/coronavirus-une-centaine-de-chercheurs-emettent-dix-recommandations-pour-le-

    #covid-19 #lockdown #belgique

  • #Etudiants_confinés : « Certains confient ne pas avoir mangé depuis deux ou trois jours »

    Depuis le début du confinement, un collectif bordelais a distribué plus de 700 colis à des étudiants précaires coincés sur le campus et affamés par la fermeture des restos U.

    Quand on est un grand gaillard de 1,87 mètre enfermé depuis trois semaines dans un logement du #Crous de 9m2, la notion de #confinement prend une tout autre dimension. Pour se brosser les dents, attraper un sachet de pâtes ou travailler à son bureau, Abdessamad, 25 ans, a seulement deux options : pivoter sur lui-même ou tendre le bras. L’étudiant en ingénierie des risques économiques et financiers à l’université de Bordeaux ne se plaint pas. Il a l’habitude. D’origine marocaine, il vit depuis deux ans sur le campus. Ce qui le stresse, surtout, c’est d’attraper le #Covid-19. Alors, tous les jours, il désinfecte à l’eau de Javel le sol, son bureau, les poignées… Mais plus encore que le virus, Abdessamad a peur de ne pas pouvoir manger à sa faim. « J’avais un petit job étudiant. J’ai dû tout arrêter. Là, je suis à découvert depuis une dizaine de jours. Je ne sais pas trop comment je vais faire », soupire-t-il. Il explique « ne pas chercher à manger équilibré », mais plutôt à se « remplir le bide pour pas cher ».
    « Solidarité »

    Comme lui, environ 3 500 étudiants sont restés confinés dans le campus de Bordeaux. Dans cette zone périurbaine désormais quasi déserte, on repère aisément leurs silhouettes. De temps à autre, au milieu du silence, ils passent une tête à travers les seules fenêtres restées ouvertes. La plupart sont des étrangers ou des ultramarins qui n’ont pas pu rentrer chez eux. Les plus fragiles s’enfoncent dans la précarité car ils ont perdu leur job d’appoint ou parce que leurs parents, eux-mêmes en difficulté, ne peuvent plus les soutenir. Il y a ceux aussi qui sont rupture familiale. Tous subissent de plein fouet la fermeture des restaurants universitaires, cafétérias et associations étudiantes.

    C’est le cas d’Imarou, un Nigérian de 22 ans d’allure fluette qui étudie l’électronique : « Jusque-là, je m’en sortais plutôt bien. Les repas sont copieux et pas chers dans les restos U. Mais depuis que tout a fermé, je suis sur le fil. Je me rationne pour tenir sur la durée. » Ce « régime forcé » lui a déjà valu de perdre deux kilos depuis la mi-mars.

    Marqués par « leur #détresse », une quinzaine de doctorants, d’étudiants et d’enseignants - un noyau dur de militants contre la réforme des retraites - ont monté un collectif citoyen baptisé « Solidarité : #continuité_alimentaire Bordeaux ». Depuis le 18 mars, ces bénévoles se relaient chaque jour pour préparer des « colis de survie » dans un local prêté par l’université. « Dès le début, on a diffusé un formulaire de contact sur les réseaux sociaux. On a aussi posé des affiches pour connaître leurs besoins. Certains étudiants nous ont carrément confié ne pas avoir mangé depuis deux ou trois jours », soupire Jean (1), doctorant en philosophie.
    A l’intérieur des sacs distribués gratuitement, des féculents, des conserves, des produits d’hygiène… De quoi tenir au moins une bonne semaine. « On respecte un protocole sanitaire ultrastrict », indique Natacha, étudiante en philo. En vingt jours, plus de 900 requêtes ont été recensées sur le campus et 700 paquets livrés. « Par contre, on ne peut pas mettre de produits frais, c’est trop compliqué à gérer », poursuit la jeune femme.

    « Folie »

    Le collectif, qui réclame le gel des #loyers pour ce public fragile, enregistre environ 40 à 50 demandes par jour. « C’est la folie ! Et la preuve qu’il faut agir sans tarder », alerte Jean. Il précise que « l’initiative a aussi séduit des collectifs lyonnais et parisiens désireux de mettre en place le même système ». A Bordeaux, pour tout financer, une #cagnotte en ligne a été lancée. Elle comptabilise à ce jour environ 45 000 euros de dons. « Le problème, c’est que les fonds sont bloqués le temps que la plateforme vérifie les justificatifs. On a dû avancer 20 000 euros de notre poche et on arrive à court de marchandises », se désolent les bénévoles, qui craignent de ne plus pouvoir assurer leurs livraisons quotidiennes.

    « Ce qu’on aurait aimé, c’est plus de réactivité. De la part du Crous notamment », raille l’une des membres du collectif. « Nous assurons la continuité de nos services, répond Anie Bellance, responsable du service social du Centre régional des œuvres universitaires et scolaires à Bordeaux. Il a fallu toutefois les renforcer durant cette période, ce qui ne se fait pas du jour au lendemain. La temporalité n’est pas la même entre un collectif et une administration… Nous avons dû attendre les directives de l’Etat. » Des distributions alimentaires ont désormais lieu deux fois par semaine, sur présentation de la carte étudiante, grâce au soutien de la Banque alimentaire, de la chambre d’agriculture, de la mairie et de l’université de Bordeaux. Des points de vente sont également prévus. Pour l’heure, 500 étudiants ont été identifiés et bénéficient de cette aide. « Ce chiffre devrait croître. La principale difficulté est de les capter et de les informer. Jusque-là, beaucoup étaient inconnus de nos services », souligne Anie Bellance.

    https://www.liberation.fr/amphtml/france/2020/04/07/etudiants-confines-certains-confient-ne-pas-avoir-mange-depuis-deux-ou-tr
    #confinement #faim #étudiants #France #précarité #précarité_étudiante #étudiants_étrangers #coronavirus

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    Appel du Collectif « Solidarité : Continuité Alimentaire Bordeaux »
    http://www.club-presse-bordeaux.fr/communiques/appel-collectif-solidarite-continuite-alimentaire-bordeaux

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    En lien avec la maudite #continuité_pédagogique :
    https://seenthis.net/messages/831759

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    Ajouté sur la métaliste coronavirus et faim :
    https://seenthis.net/messages/838565

    ping @_kg_ @karine4

    • « Etre confiné avec des #cafards, c’est terrible » : à #Villeneuve-d’Ascq, les étudiants à l’abandon

      Les étudiants les plus précaires du campus scientifique de l’#université_de_Lille sont logés dans des bâtiments insalubres. Sans ressources financières, ils sont dépendants de l’aide alimentaire fournie par des associations.

      Résidence universitaire Evariste-Galois, à Villeneuve-d’Ascq (Nord), troisième étage, bâtiment B. Vendredi 17 avril, l’heure du déjeuner s’annonce. Mohammed Hassan, 25 ans, étudiant en master de sciences de la santé, prépare son repas. Pas de quoi décourager le cafard en train de courir sur son plan de travail. Partager ses jours, ses nuits, son sommeil avec des blattes et des punaises de lit, c’est, depuis plus d’un mois, le quotidien de centaines d’étudiants logés dans des bâtiments insalubres du campus scientifique de l’université de Lille.

      Au sein de la métropole lilloise, ils sont 5 700 étudiants à passer la période de confinement dans un logement social étudiant. Ceux qui peuvent débourser 330 euros habitent les confortables studios de 18 m2 avec douche et coin cuisine dans l’une des élégantes résidences récemment sorties de terre ou tout juste rénovées. Ceux qui ont dû faire le choix d’un loyer plus modeste (162 euros) doivent supporter de vivre 24 heures sur 24 dans les chambres de 9 m2 des vieux bâtiments des résidences Bachelard, Camus et Galois.


      https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/04/21/a-villeneuve-d-ascq-les-etudiants-a-l-abandon_6037293_3224.html
      #Lille #insalubrité
      #logement

    • Le Covid tue, la #précarité_étudiante affame

      Étudiant-es et membres du personnel de l’université Paris 8 Saint-Denis, militant-es à Solidaires étudiantes ou à RUSF pour certain-es, nous avons réalisé avec l’antenne Paris 8 du Secours Populaire une distribution de 100 colis alimentaires ce vendredi 17 avril à destination des étudiant-es de notre université. Nous allons continuer : en moins de 5 jours, nous avons reçu plus de 700 mails d’étudiant-es, ayant tou-tes des difficultés pour s’acheter de quoi manger et des demandes continuent d’affluer chaque jour depuis.

      Le confinement est un miroir grossissant de la précarité. Nous sommes mobilisé-es depuis novembre pour dénoncer les conséquences de la précarité étudiante. Aujourd’hui, nous sommes tou-tes dans une situation où il est impossible de fermer les yeux sur la gravité de la situation, en général et spécifiquement pour les étudiant-es de notre université. En effet, nous avons un très grand nombre d’étudiant-es étranger-es, sans-papiers, salarié-es, parents.

      Ne nous y trompons pas, nous le faisons car cela est nécessaire et non pas car nous trouvons cela normal. Il faut maintenant que les universités, les CROUS et les différentes institutions qui ne l’ont pas fait se saisissent réellement de cette urgence. Comment est-il envisageable qu’en 2020 des étudiant-es se rationnent pendant des semaines ou ne puissent plus manger ? Comment est-il possible que des personnes, en ces temps de confinement, craignent plus que tout les expulsions pour causes d’impayés alors qu’ils et elles habitent dans des logements insalubres ?

      Qu’en est-il de la continuité pédagogique quand près d’un-e étudiant-e sur 20 n’a même pas de quoi manger ? Au détour de cette aide alimentaire, les étudiant-es nous glissent quelques mots sur leurs situations. Nombreux et nombreuses sont celles et ceux qui n’ont pas d’accès à un ordinateur, à une connexion internet, à un lieu calme pour travailler. Nombreux également sont les témoignages de détresse psychologique face à la situation exceptionnellement angoissante dans laquelle ils et elles se trouvent. Face à cela, nous l’affirmons, les rendus de devoirs et examens en ligne sont loin d’être une priorité voire même une possibilité pour elles et eux : comment travailler quand on a extrêmement faim ? La validation de cette année reste pourtant un enjeu vital pour les plus précaires, afin de garder leurs bourses et visas. Nous attendons des enseignant-es de notre université plus qu’un don ponctuel : il s’agit de prendre des mesures responsables et courageuses de validation, pour ne pas pénaliser encore plus celles et ceux qui vivent actuellement un enfer.

      De nombreuses autres initiatives de ce type fleurissent un peu partout à destination des étudiant-es (à Bordeaux, Paris, Lyon par exemple) et nous encourageons les personnes qui le peuvent à le mettre en place. Plus que jamais, la solidarité est nécessaire en cette période de confinement et le restera par la suite.

      Le Collectif Solidarité Etudiante Paris 8

      Communiqué reçu via la mailing-list Facs et labos en lutte, le 21.04.2020

    • « En résidence CROUS ou dans les palais de la République, les priorités ne sont pas les mêmes »

      Aujourd’hui, la Confinée Libérée donne à la parole à S., syndiquée à Solidaires Etudiant·es, assistante d’éducation (AED) dans un collège et étudiante en M2 de sciences politiques à l’Université Paris 8. Elle revient sur la précarité étudiante, en s’appuyant sur le récit et les analyses des mobilisations du mois de novembre suite à l’immolation d’un étudiant de Lyon II, jusqu’aux dernières initiatives qui ont émergé depuis le début de la crise sanitaire et du confinement, pour assurer la distribution de colis alimentaires aux étudiant·es.

      Je suis étudiante, mobilisée depuis longtemps et syndiquée depuis bientôt deux ans à Solidaires Etudiant·es. Je suis inscrite à l’Université Paris 8 depuis le début de mes études en sciences politiques, et c’est une fac que j’aime profondément. Les gens et les enseignements m’ont séduite, je n’ai pas voulu en changer pour la poursuite en master.

      Le militantisme politique puis syndical m’ont fait, bon gré mal gré, prendre conscience de l’importance dramatique de la précarité étudiante au fur et à mesure des mois. Il faut dire que Paris 8, comme le département dans lequel elle se situe, est une fac hors-norme. Ici, encore plus qu’ailleurs, nous avons des étudiant·es étrangèr·es, sans-papiers, salarié·es, parents, en reprise d’études et pour beaucoup précaires.

      Au mois de septembre je commence mon M2, la fin théorique de mes études tout en me questionnant sur l’éventualité de faire une thèse. Nous avons plein de projets pour le syndicat en local et en national. Je reprends le travail au collège du 18ème où je suis surveillante et je prévois d’aller voir ma meilleure amie qui fait un échange universitaire au Québec.

      Et là, le 8 novembre. Un étudiant tente de s’immoler devant le CROUS et c’est un camarade de Solidaires Etudiant-es. C’était un vendredi, une journée particulièrement chargée pour moi et je ne l’apprends qu’à 23h dans le métro à 23h, en lisant un article à gerber du Figaro qui questionne sa nationalité. Je me prends une sacré claque. Je le connais un peu, il m’a formé l’année passée et son image me revient en tête. On le savait qu’il y a des situations dramatiques, on en est conscient-e, mais on ne l’a jamais autant été.

      Le lendemain, nous avons notre premier week-end fédéral de formation non mixte. Je suis censée animer la première, à 9h, sur la prise de parole en public. Même si tout ça me paraît bien inutile, nous décidons quand même de maintenir et de voir avec des camarades de Lyon qui seront là. Le lendemain la fébrilité est palpable, nous sommes partagé·es entre la tristesse et la colère, l’inquiétude, le stress, l’envie de bien faire. On fait cette formation. Les mots qui sortent de ma bouche me paraissent prononcés par une autre. Je suis épuisée comme les autres, je n’ai presque pas dormi, j’ai réfléchi sans trouver de sens. Je donne des conseils qui me paraissent futiles, j’essaie de rester debout.

      Après cette formation, nous décidons un peu spontanément de devenir une cellule de gestion de crise. Le téléphone fédéral vibre sans arrêt, la presse cherche à nous contacter, d’autres syndicats aussi. Nous établissons dans l’urgence un plan d’action et nous tentons d’être efficaces tout en prenant soin les un-es des autres. Pendant deux jours, nous cherchons des chiffres, construisons notre argumentaire pour dénoncer la précarité qui l’a touché lui comme tant d’autres, le menant à commettre cet acte d’une insoutenable violence. Le mardi 12 nous décidons collectivement d’appeler tou·tes les étudiant·es, à se rassembler devant tous les CROUS de France, pour ne pas laisser ce drame devenir un fait divers. L’acte de notre camarade EST politique, il l’a exprimé, un des enjeux est de ne pas laisser des médias et des politiques personnaliser la chose par des explications psychologisantes et individuelles. Beaucoup d’étudiant-es crèvent de suicide avant de crever de faim. Nous voulons qu’on arrête de balayer cela d’un revers de la main, nous voulons plus de bourses, de logements, un meilleur accès à la santé, que tout-es puissent manger à leur faim. Nos exigences sont nombreuses mais la situation l’exige. Nous voulons qu’on nous entende, qu’on nous écoute et qu’on nous considère. Nous voulons qu’il ne soit plus possible de fermer les yeux sur les situations de précarité.

      Une fois cette mobilisation devenue nationale, quelles réponses avez-vous reçu des institutions comme le CROUS et le Ministère et des universités ?

      D’abord, un long silence des institutions. Nous apprenons que la ministre Frédérique Vidal est allée à Lyon II, la fac de notre camarade, voir la Présidence, en catimini, sans en informer quiconque, surtout pas les camarades sur place. De notre côté, après l’appel du directeur de cabinet du ministère le 9 novembre, plus aucune nouvelle.

      La première communication officielle arrive après le rassemblement national du 12, deux heures après que les grilles du ministère aient cédées face à la colère des étudiant·es. Le ministère reproche aux manifestant·es de Paris, mais aussi de Lyon et de Lille leur violence, les réactions disproportionnées, le manque de rationalité. Pour nous, la violence est dans l’ignorance des institutions, la violence c’est d’attendre tout ce temps pour une réaction publique. Nos camarades de Lille ne respectent pas la République à cause de quelques pages arrachées, à Paris nous entachons la politique pour une porte (grande soit) sortie de ses gonds. Et toujours rien qui est dit, les journaux font des reportages, même depuis l’étranger. Pendant ce temps, le ministère et le CROUS nous accablent d’un silence complice. L’Université de Lyon II rétorque ne pas avoir eu connaissance des problèmes financiers de notre camarade. C’est la foire aux excuses bidons, les officiels se cachent derrière des procédures administratives et un manque d’information, la ministre va rendre visite aux pingouins pour soutenir la recherche à l’autre bout du monde. Et nous nous efforçons de continuer à faire raisonner notre colère, la rendre entendable, qu’elle soit politique.

      Le 18 novembre, le ministère se décide à accueillir les syndicats étudiants représentatifs sur le sujet, et donc pas Solidaire Etudiant-es. Nous n’avons pas de sièges au CNESER donc nous ne méritons pas d’être entendu-es. Encore une fois, le mépris est crasse, l’ignorance blesse. Des militant·es d’autres organisations poussent en notre faveur et finalement, nous sommes reçu·es.

      Tout ça pour quoi ? Nous pensions que ce serait difficile et pourtant le ministère se surpasse, les annonces sont presque pires que le silence. Trois mesures d’urgence. Un numéro vert, qui mettra un mois et demi à être mis en place, pour finalement avoir au téléphone des opérateurs et opératrices (sans doute pas formé·es) qui nous renvoient vers les assistant·es social·es du CROUS. On nous propose également d’appliquer la trêve hivernale aux logements CROUS. Combien de tentatives de suicides le ministère attendra-t-il avant de transformer les baux locatifs du CROUS en baux de droit commun ? Le suspens est complet. Enfin, et là l’indécence prime, on nous propose un « renforcement du statut d’étudiant·es engagé·es ». On veut donc nous acheter. Les tenants de la démocratie représentative libérale pense qu’on fait ça pour nos carrières peut-être ? La colère exprimée dans nos rassemblements et prises de parole serait une tentative d’obtenir des aménagements de validation ? Au cas où le doute plannerait encore, nous ne sommes de toute évidence pas programmé·es de la même manière. L’agrément « solidarité » manque à leur algorithme. Pendant ce temps, les universités votent de banales motions en Conseil d’Administration, dénoncent avec des textes, nous offrent des mots et s’affranchissent des actions courageuses qui auraient du sens.

      Pour vous donc cette mobilisation contre la précarité s’enchaîne avec le mouvement social contre la réforme des retraites, puis vient ensuite s’articuler au mouvement contre la LPPR, plutôt porté par les enseignant·es-chercheur·es titulaires et précaires. Comment cette question de la précarité t’est-elle apparue comme transversale dans ces mobilisations ?

      Prendre en compte la question de la précarité, en partant d’un point de vue situé qu’on essaie d’élargir, c’est un tremplin pour remettre en cause le système dans son ensemble. Avec les témoignages qu’on a pu lire en amont et pendant le mouvement des retraites, la société se précarise. Les vieux et vieilles ont faim et sont obligées de distribuer des pubs dans les boîtes aux lettres avec leurs dos courbés, des travailleur·euses sont contraintes de dormir dans leur voiture et de multiplier les boulots, des étudiant·es squattent des canaps et se contentent d’un repas par jour. Bien sûr que la précarité est transversale, la concentration des richesses s’accroît au niveau international. Comme souvent, je vais te répondre que le problème est le système qui nous fait miroiter l’accumulation des richesses comme une fin en soi et donne à l’argent une valeur en propre. Quand on a un Président qui souhait que les jeunes projettent de devenir millionnaires comme objectif de vie, qui cela étonne encore qu’on laisse les délaissé·es du broyeur capitaliste de côté ?

      Après l’enjeu pour nous était de se joindre aux revendications interprofessionnelles tout en n’étouffant pas nos revendications spécifiques. Qu’on ne s’y méprenne pas, ce n’est pas un enjeu d’égo ou autre, mais une malheureuse habitude de voir vite balayer les demandes étudiant·es avec un effet d’annonce. Et puis, pour une fois qu’on parle de nous aussi comme des personnes entières, qui ont une vie hors de la fac, dont l’avenir n’est pas uniquement dicté par « l’insertion professionnelle à l’issue du diplôme » mais également par « comment je vais payer mon loyer ET mes courses alimentaires ce mois-ci ». Car on nous vante les aides sociales aux étudiant·es, mais on oublie de dire que l’augmentation des bourses n’est pas non plus indexée sur l’inflation, que l’échelon max des bourses n’est même pas 80e supérieur à la moyenne des loyers payés par les étudiant·es. On parle de mérite pour ne pas parler de reproduction. J’ai rien inventé, ça fait des années que les sociologues le disent, et c’est pas les « procédures spécifiques d’entrée à Science Po » pour les élèves de REP+ qui les feront mentir.

      L’enjeu aussi était de mettre en évidence une situation particulièrement inquiétante chez les étudiant·es précaires, pour lesquel·les on peut parler de réelle pauvreté. Car le terme de précaire a été repris à toutes les sauces et perdait à certains moments de son sens. Pendant les luttes contre la LPPR, on a vu des profs titulaires en poste depuis trente ans, nous faire des leçons sur ce qu’est la précarité. Je veux bien entendre que l’état de l’enseignement supérieur dans son ensemble est critique, mais faut pas exagérer non plus. On avait aussi un peu envie de leur répondre : « Qui êtes-vous pour donner des cours de fin de mois difficiles aux étudiant·es qui multiplient les taffs et comptent à l’euro près pendant leur courses et aux enseignant·es vacataires qui signent leur contrat 8 mois après la prise de poste et sont payé-es en dessous du SMIC avec autant de retard ? ». Le système est merdique mais le souci de précision est important pour ne pas tomber directement dans l’indécence.

      L’annonce du confinement intervient la semaine suivant la grande manifestation du 5 mars de l’enseignement supérieur et de la recherche. Où, quand et comment le confinement est venu vous cueillir, si on peut dire ?

      Cette période de mobilisation était pour nous assez chargée, on menait de front ces luttes interprofessionnelles, les luttes spécifiques à l’ESR et la préparation du congrès annuel de Solidaire Etudiant-es, qui est un temps fort de la fédération, où on discute de comment on va continuer à lutter et de nos priorités. Et en fait, c’est exactement là que l’annonce du confinement est venue nous cueillir. Nous hésitions à le maintenir, parce que ça faisait plusieurs semaines qu’on parlait des mesures d’hygiènes spécifiques, de l’achat de masques, de gants, de gel hydroalcoolique. On arrive le jeudi sur place, à Clermont-Ferrand et les débats se déroulent le vendredi, le samedi, le dimanche, entrecoupés des annonces gouvernementales. La crise prend de l’ampleur, on commence toutes et tous à s’inquiéter. On était censé s’arrêter le lundi après-midi. Finalement, dimanche nous mettons un terme au Congrès, en urgence après les annonces de la ministre des transports. L’idée était d’éviter que nous soyons bloqué·es pendant des semaines de confinement à Clermont-Ferrand.

      Pendant qu’on organisait nos changements de billets de train dans l’urgence, des nouvelles inquiétantes tombent pour les étudiant·es hébergé·es en résidences CROUS. Apparemment, ils et elles sont appelé·es à partir sous 72h, et sinon ? Rien n’est clair, tout le monde navigue à vue. Encore une cellule de crise qui se répartit en plusieurs pôles, on réagit aux annonces qu’on a, tout en étant comme beaucoup dans la crainte de la suite. On commence à sentir que le gros du boulot n’est pas passé. Cette situation exceptionnelle risque d’être également exceptionnellement dangereuses pour les étudiant·es déjà précaires. L’inquiétude grandit. Dans le train de retour à Paris, chacun·e y va de ses inquiétudes, les fous rires nerveux tentent péniblement de masquer la fatigue.

      Comment vous y réagissez en tant que syndicat ? Quelles sont les urgences que vous identifiez et comment vous arrivez à travailler en confinement ?

      Le lendemain, on se met au boulot avec l’objectif d’identifier au plus tôt les risques encourus par les étudiant·es. En terme de précarité en premier lieu : risques d’expulsion, perte de revenus (petits jobs, travail non déclaré, interim non renouvelé), risque en terme d’accès à la santé notamment. Et puis ensuite tout ce qui concerne la fameuse « continuité pédagogique » et les modalités de contrôle des connaissances, les fameuses annonces qui garantissent la valeur des diplômes vous voyez de quoi je parle ? Pendant que tout autour de nous à un arrière goût de fin du monde.

      Après deux grosses journées de boulot, on sort une longue lettre ouverte qui liste tous les problèmes urgents que l’on a identifié. On essaie de la publier un peu partout, de l’envoyer aux institutions concernées au niveau national avec la fédération. Ensuite arrive le moment du relai en local, on l’envoie sur nos listes : l’intersyndicale de l’université, les services centraux, les différents départements et UFR mais aussi bien entendu le CROUS (pour toutes les questions d’hébergement). Le boulot est énorme, la fatigue et le stress aussi. Encore une fois, c’est le fait d’être un collectif nous porte et nous aide à supporter tout le reste, tout en gardant les pieds sur terre quand le sol semble se dérober sous nos pieds. Le collectif permet aussi de s’appuyer sur les forces de chacun·es. Qui est meilleur·e en recherche de contact, en rédaction, en analyse de texte de loi ou en communication avec les instances.

      En local, on se dit que vu notre fac et la précarité déjà plus importante des étudiant·es qu’elle accueille qui est plus importante que la moyenne, les risques sont accrus. On tente de mettre en place des permanences téléphoniques, d’être en contact avec des profs qui nous font remonter des cas effarants. Les étudiant·es ont perdu leur taff du jour au lendemain, s’inquiètent pour elleux et leur famille. Tout semble exacerbé, comme passé sous une énorme loupe de la galère.

      Et puis cet appel qui marque un tournant. On fait le point avec une prof membre du Réseau Université Sans Frontière sur la fac, on discute des cas auxquels on se retrouve confronté lors de nos permanences téléphoniques ou par mail. Et là, cet étudiant étranger qui n’ose plus sortir à cause des problèmes de papiers et qui s’est mis en mode rationnement. C’est insoutenable encore une fois. On décide de faire quelque chose. En trois jours on lance une réunion, nous sommes cinq derrières nos ordinateurs et identifions les problèmes : la TUNE d’abord, enfin l’absence de tune plutôt, le manque de nourriture, les problèmes de santé (physique et mentale), les problèmes de loyer. On se sent à la fois impuissantes et dans l’incapacité de rester sans rien faire. Donc on trouve une idée : contacter l’antenne du Secours Pop sur la fac, avec qui on a déjà travaillé. D’abord, s’assurer qu’ils et elles puissent manger. Mettre en place une boîte mail, faire tourner l’appel auprès des étudiant·es et des profs qui servent de relais. En trois jours, c’est publié sur les réseaux sociaux et ça tourne dans les différents UFR. Lancement de l’appel un lundi à 19h, le mardi à 10h30 je me connecte et j’ai déjà 180 messages. Le sentiment d’urgence encore, je mets entre parenthèses le télétravail et j’y passe ma journée. Les mails continuent d’arriver. On met en place une première liste : cette première distribution, ce sera 100 colis permettant de tenir deux semaines qui seront distribués aux étudiant·es de l’université. On gère d’un côté les demandes et de l’autre on s’organise pour avoir des bénévoles : gérer les mails, aider sur place pour les distributions, aller livrer les personnes dans une totale impossibilité de se déplacer.

      Et puis, les problèmes de continuité pédagogique bien sûr. Mon énervement contre ces profs qui sont attaché·es à leurs ethos comme des moules à leur rocher. On présume que le confinement libère du temps, certain·es donnent plus de boulot du coup avec des « Profitez en pour avancer sur vos recherches ». Face à cela, des étudiant·es nous confient leur épuisement mental, leurs problèmes de réseaux, l’absence d’ordinateur. Des personnes qui composent des dossiers de dix pages sur leur portable et nous demande si nous pouvons les aider à recharger leur forfait 4G, de crainte de ne pouvoir valider leur année et donc de perdre leur bourse ou encore de ne pouvoir renouveler leur titre de séjour.

      Une année de la colère, qui n’est pas finie. Et cette interview de Frédérique Vidal dans le journal 20 minutes, qui romantise tout ça. Elle affirme que le confinement permet de développer un tout nouveau lien entre étudiant·es et professeur·es et que dans l’ensemble les problèmes d’accès aux outils de travail concernent une minorité. J’aimerais bien l’inviter dans notre boîte mail, lui montrer la réalité. Heureusement qu’elle préserve la valeur des diplômes. Pendant que certain·es essaient juste de survivre et de préserver leur santé physique et mentale. De toute évidence, en résidence CROUS ou dans les palais de la République, les priorités ne sont pas les mêmes.

      https://universiteouverte.org/2020/04/29/en-residence-crous-ou-dans-les-palais-de-la-republique-les-priori

    • Étudiant·es confiné·es dans 9m² : précarité au carré

      À l’annonce du confinement, les étudiant·es résidant dans les quelque 700 résidences CROUS de France ont été invité·es à quitter leurs logements exigus pour rejoindre le domicile familial : 25 à 40% d’entre elles et eux sont alors resté·es, par choix (crainte de contaminer leur famille) ou par obligation (cherté des billets de transport, précarité administrative interdisant tout déplacement international, etc.). Si les résident·es des CROUS figurent déjà parmi les étudiant·es les moins privilégié·es – le statut de boursièr·e est un prérequis à la demande – celles et ceux qui furent contraint·es de rester dans leur chambre à la mi-mars l’étaient donc encore moins. Cela a été confirmé dès les premiers jours du confinement lorsque le collectif Solidarité : Continuité Alimentaire a reçu plusieurs centaines de demandes de colis de produits d’alimentation et d’hygiène fondamentaux de la part des étudiant·es confiné·es dans les CROUS de Bordeaux. En causes : la perte de leurs salaires, la cessation de l’activité des restaurants universitaires et la fermeture quasi-totale des épiceries solidaires, par manque de bénévoles et d’approvisionnements. En d’autres termes, le confinement a été l’accélérateur d’une problématique connue depuis déjà bien longtemps : celle de la précarité étudiante.

      Pour réagir face à cette situation de crise, nous, étudiant·es et jeunes chercheur·ses de l’ESR, avons décidé de créer le 2 avril dernier, dans la continuité de l’initiative bordelaise et de son homologue lyonnaise, Solidarité étudiante, le collectif Solidarité alimentaire (Paris). Chaque semaine, nous proposons aux étudiant·es d’une cinquantaine de CROUS parisiens de remplir un formulaire en ligne indiquant leurs besoins. Les distributions sont effectuées tous les week-ends devant les CROUS, en respectant les règles sanitaires : désinfection de tous les produits des colis, port de masques et respect des distances de sécurité. Nous avons jusqu’à présent distribué plusieurs centaines de colis et les demandes ne cessent d’augmenter chaque semaine, preuve que le gouvernement se contente d’effets d’annonce pour se défausser de la responsabilité d’une précarité aux conséquences trop souvent dramatiques.

      À une semaine de la fin du confinement, alors que certaines universités sont davantage occupées à l’organisation à distance des évaluations de fin de semestre, et ce dans l’inconsidération des situations d’inégalité dans lesquelles elles placent les étudiant·es, il est temps que le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche et de l’Innovation regarde la réalité en face et cesse de botter en touche : certes, des fonds d’urgence ont été débloqués il y a plusieurs semaines, mais il est scandaleux qu’en France des milliers d’étudiant·es ne puissent, en plein confinement, répondre à leurs besoins élémentaires. Il est scandaleux que seul·es les étudiant·es ayant réussi à quitter leurs résidences soient défrayé·es de leur loyer quand celles et ceux qui ont été contraint·es d’y rester, souvent les plus précaires, doivent continuer à le payer, et ce alors même qu’ils et elles n’ont plus de sources de revenus. Et il est tout aussi scandaleux que ces mêmes étudiant·es continuent d’être évalué·es dans de telles conditions au prétexte d’une prétendue continuité pédagogique. Au-delà des actions d’urgence mises en place pendant le confinement, il est absolument nécessaire que l’État, sans se satisfaire de solutions d’appoint, encore moins d’effets d’annonce, trouve des solutions pérennes capables d’endiguer la précarité étudiante, comme celle du salaire étudiant, sans lesquelles jamais les mauvais jours ne finiront.

      https://universiteouverte.org/2020/05/05/etudiant%c2%b7es-confine%c2%b7es-dans-9m%c2%b2-precarite-au-carre

      –-> Collectif solidarité alimentaire :
      https://www.facebook.com/collectifsolidaritealimentaire

  • Milan, épicentre de la pandémie de Covid-19. #Minuit c’est l’heure où les invisibles deviennent visibles. Le métro désert, à part quelques dizaines de jeunes et de moins jeunes livreurs qui rentrent chez eux. C’est ça, le confinement à deux vitesses. C’est ça, le #digital_labor.


    https://twitter.com/AntonioCasilli/status/1250133061280333827
    #Milan #travail #métro #coronavirus #covid-19 #livreurs #uber #confinement_à_deux_vitesses #confinés #non-confinés #livraisons #vidéo #Italie #visibilité #in/visibilité #invisibles

    Avec ce commentaire de Alexis Kauffmann :

    Incroyable image ! Les rats dans les caves qui nourrissent les chats qui chantent au balcon.

  • #Grèce : un cas de #coronavirus dans un deuxième camp de migrants

    Le camp de #Malakasa, non loin d’#Athènes, a été placé en « confinement sanitaire total ».

    Un deuxième camp de migrants près d’Athènes a été placé dimanche 5 avril en quarantaine par les autorités grecques après un test au coronavirus qui s’est révélé positif pour un ressortissant afghan, a annoncé le ministère des Migrations.

    Le camp de Malakasa, à quelque 38 km au nord-est d’Athènes, a été placé « en confinement sanitaire total » pour 14 jours, avec interdiction d’y entrer ou d’en sortir.

    Selon le ministère, un Afghan âgé de 53 ans, souffrant déjà d’une maladie, s’est présenté de lui-même au dispensaire du camp après avoir ressenti des symptômes du Covid-19. Il a été emmené dans un hôpital d’Athènes où il a été testé positif au nouveau coronavirus. Sa famille a été placée à l’isolement et un examen complet du camp est en cours, a ajouté le ministère.

    Les camps de migrants qu’abrite la Grèce accueillent des dizaines de milliers de demandeurs d’asile dans des conditions précaires. Un foyer d’infection avait été repéré jeudi dans celui de Ritsona, à 80 km au nord d’Athènes, où 23 personnes ont jusqu’à présent été testées positives. Aucun membre du personnel du camp ne semblait touché par le virus, selon « le Monde ». « Nous alertons depuis des mois sur le manque d’hygiène dans les camps des îles. Face à cette épidémie, il devient urgent de transférer au plus vite les personnes les plus vulnérables vers le continent, vers des hébergements adaptés », estimait Boris Cheshirkov, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés en Grèce, cité par le quotidien du soir.

    https://www.nouvelobs.com/coronavirus-de-wuhan/20200405.OBS27087/grece-un-cas-de-coronavirus-dans-un-deuxieme-camp-de-migrants.html
    #confinement #confinement_sanitaire_total #asile #migrations #réfugiés #covid-19 #camp_de_réfugiés

    Sur le camp de Ritsona :
    https://seenthis.net/messages/838008

    ping @luciebacon

    • Coronavirus : dans le camp de Malakasa en quarantaine, « personne ne manque de nourriture »

      Le camp de Malakasa, situé à 38 kilomètres au nord-est d’Athènes, a été placé en “confinement sanitaire total” pour 14 jours après qu’un cas de coronavirus y a été détecté. Les autorités grecques et l’OIM doivent assurer l’approvisionnement des résidents en nourriture et produits d’hygiène. Des tests sont également effectués.

      Plus personne n’entre ni ne sort du camp de Malakasa, en Grèce. Installé près d’un terrain militaire, à quelque 38 kilomètres au nord-est d’Athènes, ce camp – normalement ouvert – a été placé dimanche 5 avril en "confinement sanitaire total" pour 14 jours.

      Un migrant afghan y a été testé positif au Covid-19, a annoncé le ministère des Migrations. Cet homme de 53 ans, souffrant déjà d’une maladie, s’est présenté de lui-même au dispensaire du camp après avoir ressenti des symptômes du Covid-19.

      Il a été emmené dans un hôpital d’Athènes où il a été testé positif au nouveau coronavirus. Sa famille a été placée à l’isolement et un examen complet du camp est en cours, a ajouté le ministère.

      Interrogée par InfoMigrants, Christine Nikilaidou, responsable des informations publiques de l’Organisation internationale des migrations (OIM) – qui gère le camp – confirme que les résidents sont soumis à des tests. Si elle affirme ne pas savoir exactement combien de tests ont déjà été effectués, elle avance que l’entourage proche de l’Afghan malade a été testé en priorité.
      Distribution de nourriture et kits d’hygiène

      L’immense majorité des 1 611 personnes qui vivent dans le camp de Malakasa est originaire d’Afghanistan. En temps normal, les allées de graviers du camp grouillent d’enfants qui courent. Mais, ces jours-ci, le camp semble désert. La pluie tombe en permanence et l’OIM incite les familles à rester à l’intérieur de leur conteneur.

      Dans ces petits bâtiments posés sur le sol, les familles disposent de l’eau courante et de l’électricité mais les murs sont tachés d’humidité et le manque d’espace est criant.

      Jusqu’à la fermeture du camp, les résidents pouvaient aller faire leurs courses dans les commerces de la ville ou à Athènes. Toute sortie étant désormais interdite, l’OIM assure se coordonner avec les autorités grecques pour permettre des distributions de nourriture et de kits d’hygiène aux résidents du camp.

      "Ces distributions commenceront dans quelques jours. Les kits sont prêts mais nous attendons de recevoir les résultats des tests déjà effectués. Nous savons que, pour le moment, tout le monde a des provisions et personne ne manque de nourriture", affirme Christine Nikilaidou.

      Le camp de Malakasa est le deuxième camp de migrant en Grèce à être placé en quarantaine en raison du coronavirus. Un foyer d’infection avait déjà été repéré jeudi dans le camp de Ritsona, à 80 km au nord d’Athènes, où 23 personnes ont jusqu’à présent été testées positives.

      Comme de nombreux autres pays européens, la Grèce a imposé à sa population des mesures de confinement depuis le 23 mars. Les autorités grecques ont annoncé samedi qu’elles seraient étendues pour trois semaines, jusqu’au 27 avril.

      https://www.infomigrants.net/fr/post/23905/coronavirus-dans-le-camp-de-malakasa-en-quarantaine-personne-ne-manque
      https://seenthis.net/messages/839727

    • Greece Quarantines Second Migrant Camp After COVID-19 Case Confirmed

      Greece has quarantined a second migrant facility on its mainland after a 53-year-old man tested positive for the new coronavirus, the migration ministry said on Sunday.

      The Afghan man lives with his family at the Malakasa camp, just north of Athens, along with hundreds of asylum seekers. He has been transferred to a hospital in Athens and tests on his contacts will continue as authorities try to trace the route of the virus.

      Greece confirmed 62 new cases of COVID-19 later in the day, bringing the total in the country to 1,735 since its first case was reported in February. Seventy three people have died.

      Last week, the Ritsona camp in central Greece was sealed off after 20 tested positive for the new coronavirus. It was the first such facility in the country to be hit since the outbreak of the disease. [L8N2BQ1V9]

      Greece has been the main gateway into the European Union for people fleeing conflict in the Middle East and beyond. More than a million people reached its shores from Turkey in 2015-16.

      At least 110,000 people currently live in migrant facilities - 40,000 of them in overcrowded camps on five islands.

      “The number (of migrants and refugees) is very large, therefore it is a given, mathematically, that there will be confirmed cases,” Migration Minister Notis Mitarachi told Skai TV. “We have an emergency plan in place ... But it is more difficult to implement it on the islands.”

      No cases have been recorded in camps on Greek islands so far.

      The conservative government wants to replace all existing camps on islands with enclosed detention centers, but its plans have been met with resistance from local authorities and residents who want all facilities shut.

      To contain the spread of the virus the government also wants new arrivals isolated from the rest of the migrants but most islands have not designated areas of accommodation, ministry officials said. About 120 people who recently arrived on Lesbos have not yet found a shelter, according to sources.
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      Aid groups have urged Greece to evacuate the camps, warning the risk of the fast-moving virus spreading among people living in squalid conditions is high and containing an outbreak in such settings would be “impossible”.

      The camp in Malakasa, 40 km (25 miles) northeast of Athens, will be put into quarantine for two weeks, the ministry said on Sunday, adding that police guarding the site would be reinforced to ensure the restrictions are implemented.

      A separate, enclosed facility started operating last month for migrants who arrived after March 1, the ministry said.

      Greece has imposed a nationwide lockdown and banned arrivals from non-EU countries as well as Germany, Britain, Italy and Spain. The measures have hit its economy which is relying on tourism for a recovery after a decade-long debt crisis.

      https://www.nytimes.com/reuters/2020/04/05/world/europe/05reuters-health-coronavirus-greece-camp.html?searchResultPosition=5

    • COVID-19 : Διαμαρτυρία μεταναστών στη Μαλακάσα

      Στο προσφυγικό κέντρο της Μαλακάσας μετανάστες διαμαρτύρηθηκαν και ζητούν να υποβληθούν σε τεστ για τον COVID-19. Η κυβέρνηση αποφάσισε τον υγειονομικό αποκλεισμό του κέντρου για 14 ημέρες, αφού ένας 53χρονος Αγφανός βρέθηκε θετικός στον ιό. Στο μεταξύ, ο Εθνικός Οργανισμός Δημόσιας Υγείας συνεχίζει την ιχνηλάτηση με στόχο τον εντοπισμό άλλων κρουσμάτων εντός της δομής φιλοξενίας, ενώ ειδικά συνεργεία απολυμαίνουν τους κοινόχρηστους χώρους.

      Οι υγιείς μετανάστες και πρόσφυγες διαμένουν σε χώρο πλήρως απομονωμένο, ενώ η αστυνομία έχει ενισχύσει την παρουσία της στην περίμετρο του χώρου φιλοξενίας. Μετά την Ριτσώνα, η παλιά δομή της Μαλακάσας είναι το δεύτερο προσφυγικό κέντρο που μπαίνει σε καραντίνα με στόχο να περιοριστεί η εξάπλωσης της πανδημίας.


      https://gr.euronews.com/2020/04/06/covid-19-diamartyria-metanaston-sti-maklakasa

      –-> Commentaire de Vicky Skoumbi reçu via mail via la mailing-list Migreurop :

      Aujourd’hui, c’était le deuxième jour d’une quarantaine de quatorze jours pour l’ancien camp de réception de Malakasa – celui qui se trouve juste à côté du nouveau camp fermé destinés à ceux qui sont arrivés après le 1 mars. A cet ancien camp géré par l’OIM mis sous quarantaine suite au recensement d’un cas de coronavirus -voir mail précédent- les migrants ont organisé une protestation juste derrière les barbelés pour réclamer un dépistage généralisé dans le camp –voir la vidéo sur https://gr.euronews.com/2020/04/06/covid-19-diamartyria-metanaston-sti-maklakasa

      Jusqu’à maintenant les seules personnes dépistées ont été la famille du malade et quelques contacts. 1.611 personnes habitent dans le camp, la plupart en containers de six personnes, mais il y a 133 personnes qui sont logés dans des espaces communs et 116 dans des abris de fortunes- voir photo.

      Pour les personnes qui ne sont pas logés en containers, il y 30 toilettes chimiques et 16 douches, tandis que chaque container dispose de sa propre toilette et d’une douche.

      D’après le quotidien grec Journal de Rédacteurs (Efimerida tôn Syntaktôn : https://www.efsyn.gr/ellada/ygeia/237999_poly-liga-kai-poly-arga-ta-metra-kai-sti-malakasa) les autorités ont fait trop peu et trop tard. Trois jours avant que le malade de 53 ne soit transféré à Athènes, un cas suspect d’une femme enceinte présentant tous les symptômes n’a pas été dépisté et aucune mesure n’a été prise.

    • How my dream of freedom died in Greece’s ‘holding pens’

      Ahmed fled Syria only to end up in the Malakasa refugee camp, where more than 1,000 people are being denied basic human rights.

      When Ahmed landed in darkness on the Greek island of Lesbos he was convinced that the road ahead could not be as hard as the one he had just travelled.

      But, instead of the volunteers and blankets that have met hundreds of thousands of asylum seekers before him, he was greeted by a jeering crowd of locals and had to be rescued by police. “It was the worst feeling I’ve ever had,” he said. “I felt that my dream of Greece was a false one.”

      Ahmed was among the more than 2,000 refugees who have arrived in Greece since the beginning of March, when the country suspended all access to asylum.

      Their experiences, from seeing their children drowned at sea to being attacked by angry islanders, separated from family and dumped in remote detention camps, offer a month-long, nightmarish vision of what Europe would look like with no asylum rights.

      Greece shut off access after Turkey opened its borders in February and encouraged refugees to cross in a bid to pressure the European Union for more aid money in support of its military involvement against Russia and the Assad regime over the Syrian enclave of Idlib.

      Born in Syria’s capital, Damascus, Ahmed fled his home to escape military service with the regime. The 30-year-old told his story from inside the Malakasa detention camp in central Greece.

      He spent the past four years in Turkey, where he met and married his wife, Hanin. Their precarious life and their wedding were documented in a Guardian photo essay last year.

      But the couple were unable to make ends meet and Hanin, by now pregnant, made the journey by dinghy to Lesbos six months ago, with Ahmed promising to follow. She arrived safely and gave birth to their daughter, who is now two months old. Ahmed has yet to meet his child.

      His first week on Lesbos was spent camping in a fenced-off area of the port city of Mytilene before he was shipped off, along with 450 other new arrivals, on a Greek navy vessel.

      Amelia Cooper, a case worker at the Lesbos Legal Centre who spoke to some of those detained at the port, said: “The suspension of the right to seek asylum was followed by deliberate attempts to isolate new arrivals and prevent their access to lawyers, journalists and members of the European parliament.”

      In the middle of last month, Greek authorities began work on two sites, one in Malakasa, where 1,340 people have been sent, and another near the border with Bulgaria in Serres, which is housing 600 people. A video of Malakasa shows white tents behind a chainlink fence topped with razor wire. A Greek contractor who posted the video on 28 March, with construction work still going on, acts as narrator: “The money is flowing. These illegal strays are good business.”

      “These sites are fundamentally different,” said Belkis Wille from Human Rights Watch. “They are open-air prisons, filled with people who have been denied their basic rights and are being held as de facto detainees without any legal framework.”

      Most people in Malakasa and Serres are thought to be holding a deportation order from the Greek police. Refugees say they were forced to sign this Greek-language document despite being unable to read it. Under European law everyone is entitled to an individual assessment of their claim for protection but these documents declare that the accused must be deported for illegally entering Greece.

      For the past four years, the larger flow of people across the eastern Aegean has been reduced by an arrangement between the EU and Ankara that saw Turkey get €6bn in aid in return for restricting crossings. Under this deal, Greece has returned 2,000 new arrivals. Since early March, Turkey has stated that even this deal is dead.

      Ahmed said the uncertainty of the situation was unbearable: “I lived through four years of war in Syria. This month is worse than those four years: can you imagine?”

      Conditions at the Serres site, where tents are packed tightly together behind fences on a dry riverbed, are even worse than at Malakasa. Detainees say they have no electricity to even charge a phone. The Serres police union said in a statement that the site was “totally unsuitable”.

      Spyros Leonidas, mayor of the nearest village, Promaxonas, said the camp was “unfit for animals, let alone people”. “There are newborns and pregnant women among the people. And there is no hot water,” he said.

      The fate of those in detention remains unclear.

      The Greek government has said that the suspension of asylum will be lifted , and the EU home affairs commissioner, Ylva Johansson, said last week she had received assurances that those who arrived in March would be able to apply for asylum.

      However, Greece’s migration and asylum minister, Notis Mitarakis, subsequently said that people who had been issued with deportation orders would not be granted an asylum process.

      None of the detainees reached by the Observer had been notified of any change in their access to asylum. The Greek asylum service is closed until 10 April 10 because of the Covid-19 crisis.

      Vassilis Papadopoulos, a lawyer and former senior official at the migration ministry under the previous government, said that Ahmed and the other detainees were “being made an example of” to show there was a tough new policy.

      “What happened in March brought the numbers [of crossings] down so they’re going to keep doing it, even if they say something different,” he added.

      https://www.theguardian.com/world/2020/apr/05/how-my-dream-of-freedom-died-on-the-road-to-greeces-gulag

      –-> commentaire de Vicky Skoumbi reçu via mail, le 06.04.2020:

      Dans un article du Guardian sont décrites les conditions de vie inhumaines et les violations systématiques de droits fondamentaux dans les centres fermés de Malakassa et Serres. Ces centres ont été créés récemment pour que ceux et celles qui sont arrivés après le 1 mars y sont détenus en vue d’une expulsion ou d’un renvoi forcé vers la Turquie. Il s’agit de véritables prisons à ciel ouvert, où le manque d’eau courante et l’absence totale de toute mesure d’hygiène créent les conditions idéales pour une propagation généralisée de coronavirus. Le camp à l’endroit dit Klidi de Serres, construit au milieu de nulle part sur le lit d’une rivière asséchée, expose les personnes qui y sont détenus même au risque d’inondation. Vu l’extrême urgence de la situation- en Grèce les derniers jours des très fortes pluies sont tombées- j’aimerais vous rappeler l’appel à fermer immédiatement ce camp (en grec) et dont la traduction en français se trouve en PJ. Merci de partager.

      #Malakassa #Serres #Klidi

    • Coronavirus en Grèce : deux camps de réfugiés en quarantaine

      Ritsona et Malakasa, deux camps de réfugiés de la région d’Athènes, ont été mis en quarantaine après le dépistage de plusieurs cas de coronavirus. Les ONG craignent la propagation du virus dans des lieux pas du tout adaptés aux règles d’hygiène ni de distanciation sociale.

      « Les paniers repas distribués ne sont pas suffisants et ne couvrent pas les besoins nutritionnels de la population », explique Parwana, une réfugiée afghane, dans une vidéo publiée sur le groupe facebook (https://www.facebook.com/watch/?ref=external&v=969395506808816) d’une initiative solidaire. « Nous manquons également de médicaments, alors que des personnes vulnérables qui ont besoin de suivre des traitements résident dans le camp. »

      Depuis jeudi, le camp de Ritsona, au nord-est d’Athènes, où vit cette adolescente, a été mis en quarantaine après le dépistage de 23 cas de coronavirus parmi les demandeurs d’asile. Les tests ont été effectués après qu’une résidente du camp, une Camerounaise de 22 ans, a été détectée positive au lendemain de son accouchement le 28 mars dans un hôpital athénien. Les 23 demandeurs d’asile atteints du virus ont été mis à l’isolement pour éviter la contamination des autres résidents.

      L’accès au camp est désormais interdit, sauf au personnel de l’agence sanitaire publique et de l’Organisation International des migrations (OIM) en charge du camp. Les demandeurs d’asile ne peuvent plus sortir et reçoivent des paniers repas et des objets de première nécessité distribués par l’OIM, alors qu’en temps normal ils reçoivent une assistance financière du Haut-Commissariat aux Réfugiés (UNHCR) et peuvent aller faire leurs courses à la ville la plus proche, qui se trouve à huit kilomètres...

      À Ritsona, les conditions de vie ne sont pas les plus mauvaises parmi les 30 camps établis en Grèce continentale : quelque 2700 personnes logent dans 195 conteneurs et 222 dans des petits appartements qui disposent d’une cuisine, d’une douche et de toilettes. La quarantaine, l’absence d’activités, les paniers repas peu fournis, le manque de médicaments, les difficultés à voir un médecin et le report des rendez-vous pour la demande d’asile rendent toutefois le quotidien des demandeurs d’asile de plus en plus éprouvant.

      Malakasa, « une bombe à retardement »

      Dimanche, un deuxième camp a été mis en quarantaine, celui de Malakasa à 38 km au nord-est d’Athènes. Un Afghan de 53 ans qui s’était présenté de lui-même dans la clinique du camp, toussant et avec de la fièvre, a été diagnostiqué positif au coronavirus après avoir été transporté dans un hôpital athénien.

      La famille du réfugié a été mise à l’isolement et le camp bouclé par des renforts de police. Selon Human Rights Watch (HRW), les conditions sont déplorables dans ce centre où ont notamment été transférées toutes les personnes arrivées après le 1er mars sur les îles grecques en face de la Turquie. La Grèce avait alors suspendu le droit d’asile face à la menace d’Ankara de laisser passer les réfugiés en Europe. D’après HRW, qui a recueilli plusieurs témoignages, dans chaque tente vivent jusqu’à dix demandeurs d’asile. Les mesures de distanciation sociale et les gestes barrières ne peuvent donc pas être appliqués. Dans un communiqué du 26 mars, le syndicat de la police d’Athènes et de l’Attique dénonce aussi le manque d’hygiène à Malakasa. « C’est une bombe à retardement, tous les moyens sanitaires de base manquent… »

      https://www.courrierdesbalkans.fr/deux-camps-de-refugies-en-quarantaine-en-Grece

    • Via Migreurop

      Il me semble qu’en ce qui concerne le camp de Malakasa, il y a une erreur due au fait qu’actuellement à Malakasa il y a deux camps, un camp fermé destiné à ceux qui sont arrivés après le 1 mars et où en effet les conditions sont terribles, et un camp plus ancien, le camp ouvert géré par l’OIM où la grande majorité est dans de containers pour 6 personnes avec toilette et douche. Comme je vous ai écrit dans un mail précédent
      1.611 personnes habitent dans le camp, la plupart en containers de six personnes, mais il y a 133 personnes qui sont logés dans des espaces communs et 116 dans des abris de fortunes
      Et c’est bien ce camp ouvert qui a été mis en quarantaine, il ne faudrait pas confondre les deux camps
      Merci de transmettre

    • Il me semble qu’en ce qui concerne le camp de Malakasa, il y a une erreur due au fait qu’actuellement à Malakasa il y a deux camps, un camp fermé destiné à ceux qui sont arrivés après le 1 mars et où en effet les conditions sont terribles, et un camp plus ancien, le camp ouvert géré par l’#OIM où la grande majorité est dans de #containers pour 6 personnes avec toilette et douche.
      1’611 personnes habitent dans le camp, la plupart en containers de six personnes, mais il y a 133 personnes qui sont logés dans des espaces communs et 116 dans des abris de fortunes
      Et c’est bien ce camp ouvert qui a été mis en quarantaine, il ne faudrait pas confondre les deux camps

      –-> Commentaire de Vicky Skoumbi, reçu via la mailing-list Migreurop, le 08.04.2020

    • Greece’s Malakasa migrant camp: What life is like during the coronavirus lockdown

      On April 5, the Malakasa camp near Athens was placed in “full sanitary isolation” for 14 days, after a migrant tested positive for the novel coronavirus. Greek authorities and the UN migration agency are providing the camp’s residents with both food and hygiene products. But residents told us: “We feel like we’ve been completely abandoned.”

      For the next 14 days, no one is allowed to enter or leave Greece’s Malakasa migrant camp. Located on a vast military field, 38 kilometers northeast of Athens, the camp has been placed in “full sanitary isolation” after an Afghan migrant living there tested positive for COVID-19, Greece’s ministry of migration announced earlier this week.

      The 53-year-old man, who was already suffering from another illness, visited the camp clinic after experiencing COVID-19 symptoms. The man was then taken to a hospital in Athens where he tested positive for the coronavirus. The ministry said that his family had been placed in quarantine, and that officials were screening the camp to get a full overview of the gravity of the situation.

      Christine Nikilaidou, a spokewoman for the UN migration agency (IOM), told InfoMigrants that all camp residents were currently being tested. She could not specify exactly how many tests had been carried out so far, but she said that the people who had been in contact with the ill Afghan had been given priority.

      ‘Feel completely abandoned’

      The vast majority of the 1,611 people living in the Malakasa camp are from Afghanistan. Under normal circumstances, the gravel paths that run through the camp are full of children playing with each other. But after the lockdown went into force, the camp feels totally deserted. For days, rain has been pouring down non-stop, and the IOM has told all camp residents to stay inside.

      Although residents live in fitted shipping containers that contain both running water and electricity, the space inside them is cramped and the walls are often stained with mold from the humidity.

      Souad* lives with her husband and three children in one of the containers. On Sunday, she abruptly woke to the sound of loudspeakers. “I went to the window and saw police cars driving through the camp and a voice announcing that we had been placed in lockdown and wouldn’t be allowed to go out anymore,” she told InfoMigrants.

      Souad, who comes from a Middle Eastern country she did not want to identify, said that aside from that, the camp’s residents have not received much information about the situation. “We are completely isolated and no one has told us what we should do, we feel like we’ve been completely abandoned. My husband has health problems related to high blood pressure and diabetes, and we don’t have enough medication,” she said.

      Food distribution and hygiene kits

      Prior to the lockdown, camp residents would either do their grocery shopping in Malakasa village, or in Athens. But after the camp went into lockdown and all outings were banned, IOM and Greek authorities are in charge of providing the camp’s residents with both food and hygiene products.

      “These distributions will start in a few days. The kits are ready but we are waiting to receive the results of the tests that we’ve already carried out. We know that for the moment, everyone has provisions, and no one is running out of food,” Nikilaidou said.

      Souad confirmed that her family has enough food to last them for at least another few days, but said their biggest concern is the lack of access to medication and protective gear, such as gloves and masks. “They don’t let us out and they don’t provide us with what we need to protect ourselves from COVID-19. All they did was give each family a bottle that contained a cleaning liquid, that’s all I have with my husband and my three children to deal with the virus,” she said.

      Malakasa is the second migrant camp in Greece to have been placed in full lockdown due to the coronavirus. Last Thursday, an outbreak was detected in the Ritsona camp, 80 kilometers north of Athens, where 23 people have tested positive so far.

      Like many other European countries, Greece went into lockdown on March 23. On Saturday, April 4, the government announced the lockdown would be extended for another three weeks, until April 27.

      https://www.infomigrants.net/en/post/24010/greece-s-malakasa-migrant-camp-what-life-is-like-during-the-coronaviru

  • Expliquer le Coronavirus avec les données : pourquoi tant de morts en Italie ? Et dans le monde ?

    (très très mauvaise qualité de l’image)

    –-> il souligne avant tout, ce qui est tout à fait logique, que les personnes qui ont eu un #test de #dépistage rentrent dans les #statistiques

    –-> #Décès : distinction entre ceux qui meurent DE covid (sans autre pathologie auparavant) et ceux qui meurent AVEC covid (personnes qui ont une autre pathologie, et apparemment c’est surtout des #maladies_cardiovasculaires qui seraient là un facteur aggravant) :
    – AVEC covid 98,8% des cas
    – DE covid 1,2% des cas


    –-> 85,6% des personnes décédées ont plus de 70 ans


    –-> mise en garde d’une « bombe à retardement », tous les jeunes, notamment les étudiant·es, mais aussi des travailleurs, qui habitent au Nord de l’Italie et qui sont rentré·es au Sud pour se confiner... danger pour les régions du Sud où la population est très âgée...


    –-> La question de la #temporalité de la maladie :
    – 4 jours entre le moment dans lequel le dépistage est fait et l’hospitalisation
    – 5 jours entre l’hospitalisation en thérapie intensive et le décès

    –-> Source, une étude épidémiologique du 20 mars de l’ISS (https://www.iss.it) :


    –-> Quand le système hospitalier commence à s’effondrer (manque de lits en #soins_intensifs), et qu’il n’y a pas assez de lits en thérapie intensive, les patients décèdent après 5 jours entre le moment dans lequel elles rentrent à l’hôpital en soins ordinaires et le décès


    –-> Et quand le #système_hospitalier s’effondre complètement et qu’il n’y a même plus de lits en soins hospitaliers, les personnes en #confinement_domestique ne sont même plus hospitalisées et on ne fait plus de test de dépistage...
    –-> augmentation du nombre de décès non comptabilisés

    Quand est-ce qu’un système hospitalier collapse ?


    –-> graphique qui montre, par pays, le nombre de « patients actifs » (contaminés) par rapport au nombre de patients en thérapie intensive (sur ce graphique en nombres absolus)
    –-> division des pays entre effondrement, situation très critique, critique, sous stress


    –-> Taux de mortalité en #Chine
    –-> une courbe qui, comme dit le conférencier, semble bien trop parfaite...


    –-> en #Corée_du_Sud


    –-> en Italie, où la courbe, à un certain moment, au lieu de baisser car le système sanitaire arrive à contrôler les morts, elle augmente. Le conférencier explique cela notamment par le fait que le système de santé s’est effondré, donc il y a des personnes à l’intérieur des hôpitaux qui sont contaminés alors qu’elles étaient hospitalisées pour autre chose, des personnes qui ne peuvent pas être hospitalisées, etc.


    –-> Espagne, même tendance qu’en Italie


    –-> #UK #Angleterre


    –-> #Allemagne

    Eléments communs des pays qui soit ont un fort taux de décès et ceux qui ont un faible taux de décès :


    –-> le nombre de tests de dépistage, qui permet de faire un confinement plus ciblé et une hospitalisation plus rapide


    –-> nombre de lits en soins intensifs


    –-> nombre de lits en hôpital (pas forcément en soins intensifs)

    https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=1578893788930683&id=100004302308708?sfnsn=scwspwa&d
    #coronavirus #Italie #taux_de_mortalité

    ping @simplicissimus @fil

  • #Denis_Salas : « La #justice se trouve confrontée à un phénomène totalement inédit »

    Pour le magistrat et président de l’association française pour l’histoire de la justice, "l’#état_d'urgence_sanitaire" instauré pour deux mois doit nous inciter à réfléchir aux #libertés_individuelles et au maintien du #débat_démocratique.

    La France est officiellement en "état d’urgence sanitaire" pour une durée de deux mois. La loi publiée ce mardi au Journal Officiel encadre notamment le #confinement décidé par le gouvernement mais également un certain nombre de mesures de #restriction_des_libertés. Denis Salas, magistrat, essayiste et président de l’association française pour l’histoire de la justice se penche sur le rôle dévolu à l’institution judiciaire, son rapport au pouvoir politique et s’interroge également sur cette remise en question des libertés individuelles dictée par la nécessité sanitaire.

    Denis Salas, quel rôle particulier incombe à l’institution judiciaire dans ce contexte de pandémie ?

    L’institution judiciaire tourne actuellement au ralenti. Les tribunaux sont pratiquement à l’arrêt, même si subsistent des audiences en urgence, comme les comparutions immédiates ou certaines audiences en matière civile. En matière de politique pénale, on voit apparaître ce que l’on pourrait appeler une #justice_prophylactique qui cherche à prévenir les risques à travers des notions juridiques nouvelles comme la #mise_en_danger_de_la_vie_d’autrui, #infraction utilisée pour tous ceux qui sortent sans autorisation ou encore des sanctions relatives au marché noir, par exemple pour ceux qui revendent des masques ou des caducées. De nouveaux #délits apparaissent pour violation des règles de confinement avec des peines d’#amende aggravées, voire des peines d’#emprisonnement de six mois en cas de réitération des infractions.

    D’un point de vue philosophique, je dirais que c’est un usage de la #fonction_dissuasive_de_la_peine qui consiste à afficher une volonté répressive mais l’application avec des tribunaux à l’arrêt se situe au second plan.

    Autrement dit, des mesures difficiles à mettre en œuvre ?

    Oui. Les tribunaux étant à l’arrêt, même si certaines urgences sont maintenues, je ne vois pas comment obtenir une application réaliste de ces infractions. Je pense donc que la fonction d’annonce de ces nouvelles infractions est en soi un but recherché par le législateur. On espère que cet affichage va dissuader des personnes de se comporter de manière illicite face au confinement : un moyen pénal d’obtenir la docilité de la population. La dissuasion reste une fonction classique de la peine mais en l’occurrence elle est pleinement utilisée pour obtenir la docilité de la population.

    J’ignore ce que diront les historiens plus tard mais je pense que c’est une forme de criminalité nouvelle en période de pandémie qui apparaît sur fond d’urgence sanitaire.

    La justice a-t-elle déjà été confrontée dans le passé à une situation similaire ?

    Concernant une pandémie, il faut remonter au XIXe siècle, à la grippe espagnole durant la Première Guerre mondiale, mais en France, à des périodes beaucoup plus anciennes, voire au Moyen Âge. La justice se trouve confrontée à un phénomène totalement inédit, ce qui explique les hésitations, les types de réponses qui sont apportées et son fonctionnement même qui peut en être affecté.

    Une justice confrontée néanmoins à un certain nombre de situations d’urgence : comparutions immédiates ou encore situations de violences conjugales ou familiales pour lesquelles les associations ont tiré la sonnette d’alarme.

    Nous verrons quel contentieux va nourrir les comparutions immédiates, sans doute un contentieux lié aux infractions au confinement : attroupements, déplacements abusifs, usage du marché noir pour revendre des masques ou d’autres produits de ce type. C’est un contentieux qui rappelle celui de l’Occupation. En travaillant sur la justice des "années sombres", nous y avions trouvé nombre d’affaires issues de la répression de la Résistance mais beaucoup d’autres de la répression du marché noir, une analogie que l’on retrouve aujourd’hui.

    Concernant les violences conjugales et familiales, les procès en cours d’assises, que ce soient viols ou « féminicides », sont reportés. Ce qui constitue une non-réponse à la situation de fait. Mais certains tribunaux maintiennent des permanences au civil où des Juges aux Affaires familiales (JAF) peuvent décider d’éloigner par exemple un mari violent. Il appartient aux magistrats d’apprécier l’urgence des situations.

    Sur la question de la détention, vous avez co-signé une tribune publiée par le journal Le Monde la semaine dernière.

    Il s’agit d’une question très préoccupante. Des révoltes ont eu lieu dans plusieurs prisons françaises, des mutineries en Italie, notamment à Naples. Dans ce texte commun, nous demandons la réduction des courtes peines par le biais de circulaires de politique pénale prises par la Chancellerie, le juge restant libre de prendre la décision, ou encore l’examen de la sortie en libération conditionnelle des détenus malades ou âgés, afin de réduire la surpopulation carcérale. D’autant que nous avons été condamnés récemment par la Cour Européenne des Droits de l’Homme. La situation s’avère surtout préoccupante dans les maisons d’arrêt, avec le problème de la détention provisoire dont l’on pourrait dépasser exceptionnellement les délais légaux vu l’état d’urgence. Mais n’y a-t-il pas une violation des droits constitutionnels liés aux libertés individuelles si l’on prolonge les détentions provisoires au-delà du délai fixé par la loi ? L’état d’urgence autorise-t-il de telles dérogations qui pourraient porter atteinte gravement aux libertés individuelles ?

    Les dispositions prévues dans le texte sur l’état d’urgence sanitaire publié au Journal Officiel peuvent faire l’objet d’un recours devant le juge administratif.

    On se demandait s’il n’y allait pas y avoir des recours « liberté » pour protester contre le confinement. Or, c’est l’inverse qui s’est produit avec ce recours devant le Conseil d’Etat, formulé par un syndicat de jeunes médecins qui réclamait un durcissement des mesures actuelles et un confinement total. Le juge n’est donc pas sollicité comme un défenseur des libertés mais comme un agent de durcissement des atteintes aux libertés. Et en l’occurrence, le Conseil d’Etat décide de ne pas aller jusqu’à un confinement total mais enjoint le gouvernement à durcir certaines dispositions, relatives à la pratique des activités sportives ou les marchés ouverts. Le Conseil d’Etat considère que c’est l’atteinte à la vie qui est en jeu, atteinte grave et manifeste à la sécurité et à la vie des personnes, article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme.

    En fait, le juge ne se positionne pas par rapport aux libertés classiques d’aller et venir, actuellement très restreintes mais par rapport à une autre liberté fondamentale qui est l’atteinte à la vie. En cette période exceptionnelle, il se positionne non pas comme un agent de contrôle d’activités gouvernementales au nom des libertés en général mais comme un agent de défense de la société.

    La justice avait eu à traiter récemment d’un autre état d’urgence, celui lié à la menace terroriste en novembre 2015.

    Oui et on peut se poser cette question : allons-nous vers un état d’exception permanent ? Car les principales mesures de l’état d’urgence promulgué en 2015 sont depuis inscrites dans le droit commun. Questionnement soulevé par le philosophe italien Giorgio Agamben qui théorise l’état d’exception. Pour lui, nous vivons dans des sociétés confrontées au risque en permanence et la tentation des gouvernements peut être de s’installer dans un régime d’exception permanent afin de neutraliser ces risques. Le principe de précaution devient alors déterminant.

    Dans la vision d’un état d’exception permanent, il n’existe plus d’infractions, seulement des menaces, plus de délinquants mais des groupes-cibles, les personnes infectées par exemple et des territoires concernés. Il y a là quelque chose d’extrêmement périlleux pour les libertés.

    Il s’agit donc d’un risque important selon vous ?

    Le risque de pérenniser l’exception dans le droit existe parce que l’état d’exception s’étend considérablement pour des raisons légitimes évidemment. Il est limité par le fait que les institutions de contrôle subsistent et par la notion de proportionnalité. Toutes les mesures doivent être proportionnelles par rapport aux exigences sanitaires et des contre feux, des contre-pouvoirs peuvent être soulevés.

    Je voudrais citer l’exemple de la Corée du Sud qui ne pratique pas le confinement mais le dépistage massif et le traçage de la population dépistée, en repérant les cercles de proximité où la personne a pu contaminer ses proches. Le contrôle sanitaire ne porte que sur cette population à risque avec une géolocalisation, une traçabilité, une visibilité de tous ses déplacements, via une plateforme numérique. Cela a représenté un travail très long car il y a 51 millions d’habitants en Corée du Sud. La population vit dans la sécurité, l’activité économique globale continue. Le suivi des personnes confinées est extrêmement pointu et offre en même temps une visibilité à l’ensemble de la population. Quand on va travailler, on sait qui est contaminé, qui ne l’est pas, à proximité. On a donc un modèle alternatif de gestion de l’épidémie, opposé au confinement mais au prix d’une atteinte grave aux libertés individuelles pour une durée indéterminée.

    La lecture de Michel Foucault vous inspire également une réflexion particulière.

    Je suis en train de relire les Anormaux, un cours au Collège de France de 1975. Dans sa première leçon, il oppose deux grands modèles de leçon à l’épidémie : celui de la lèpre, dès le Moyen Âge, où l’on exclut les personnes infectées aux marches de la cité, et celui de la peste, à la fin du Moyen Âge, qui est à l’inverse un modèle d’inclusion. On n’exclut pas les malades des villes, on les garde avec nous, afin d’accumuler un savoir biomédical sur cette population ciblée afin de lutter contre l’épidémie. Cette fresque de Foucault est lumineuse pour expliquer dans quelle mesure nous sommes aujourd’hui dans le modèle de la peste, un modèle presque mondialisé. "La peste, écrit Foucault, c’est le moment où le quadrillage d’une population se fait jusqu’à son point extrême. Où rien des communications dangereuses, des communautés confuses, des contacts interdits, ne peut se produire. Le moment de la peste est celui du quadrillage exhaustif d’une population par un pouvoir politique dont les ramifications atteignent sans arrêt le grain des individus eux-mêmes, leur temps, leur habitat, leur localisation, leur corps. La peste porte aussi le rêve politique d’un pouvoir exhaustif, d’un pouvoir sans obstacle, d’un pouvoir entièrement transparent à son objet, d’un pouvoir qui s’exerce à plein."

    Cette citation explique ce que Foucault appelle la biopolitique. Actuellement, nous assistons à une médicalisation du pouvoir politique et judiciaire, y compris pour la politique pénale avec des savoirs médicaux, statistiques, juridiques, des mesures qui sont prises au nom d’une logique prophylactique afin d’éliminer le danger. Et ce que craint Foucault, c’est que cette biopolitique, cette gestion massive d’une population, au nom de sa santé, crée un pouvoir exorbitant des politiques où le savoir scientifique et le pouvoir politique s’additionnent. Au nom du bien public, bien sûr, mais c’est un pouvoir énorme qui se crée, un pouvoir disciplinaire qui s’étend à l’ensemble de la population.

    La lecture de Foucault, en cette période de pandémie, nous invite à nous interroger, à rester vigilants du point de vue des libertés car ce pouvoir démesuré accordé aux politiques et aux scientifiques sur notre vie quotidienne peut susciter des inquiétudes, même si sur le moment il est nécessaire. Tenons compte des avertissements de Michel Foucault et de son analyse. Il faut absolument que cet état d’urgence sanitaire soit limité dans le temps, contrôlé par le Parlement et le juge et qu’au lieu d’une seule liberté fondamentale, l’atteinte à la vie, l’ensemble des libertés soit considéré comme devant être protégé, que l’on recherche davantage l’adhésion de la population que sa soumission passive. Dans ce contexte d’atteinte massive aux libertés, au nom de l’état de nécessité sanitaire, il faut que le débat démocratique reste vivant.

    https://www.franceculture.fr/droit-justice/denis-salas-la-justice-se-trouve-confrontee-a-un-phenomene-totalement-
    #coronavirus #état_d'urgence #urgence #répression #dissuasion #docilité #criminalité #pandémie #histoire #comparutions_immédiates #marché_noir #tribunaux #prisons #détention #maisons_d’arrêt #détention_provisoire #confinement_total #atteinte_à_la_vie #état_d’exception_permanent #état_d’exception #Agamben #Giorgio_Agamben #principe_de_précaution #menaces #exception #proportionnalité #Corée_du_Sud #traçage #dépistage_massif #cercles_de_proximité #géolocalisation #contrôle_sanitaire #Michel_Foucault #Foucault #lèpre #peste #quadrillage #biopolitique #médicalisation #santé #savoir_scientifique #pouvoir_politique #bien_public #pouvoir_disciplinaire #débat_démocratique

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    Citation pour @etraces :

    Je voudrais citer l’exemple de la Corée du Sud qui ne pratique pas le confinement mais le dépistage massif et le traçage de la population dépistée, en repérant les cercles de proximité où la personne a pu contaminer ses proches. Le contrôle sanitaire ne porte que sur cette population à risque avec une géolocalisation, une traçabilité, une visibilité de tous ses déplacements, via une plateforme numérique. Cela a représenté un travail très long car il y a 51 millions d’habitants en Corée du Sud. La population vit dans la sécurité, l’activité économique globale continue. Le suivi des personnes confinées est extrêmement pointu et offre en même temps une visibilité à l’ensemble de la population. Quand on va travailler, on sait qui est contaminé, qui ne l’est pas, à proximité. On a donc un modèle alternatif de gestion de l’épidémie, opposé au confinement mais au prix d’une atteinte grave aux libertés individuelles pour une durée indéterminée.

    • Dans le miroir obscur de la pandémie. L’état d’exception de la pandémie semble avoir accompli, au moins en partie, le rêve du capitalisme

      Je parlais avec un ami qui habite à Bergame, ville au Nord de l’Italie où j’ai vécu et étudié et qui est aujourd’hui l’une des plus affectées par l’épidémie du Coronavirus. Celui-là m’a décrit la situation comme « un épisode infini de Black Mirror ». Effectivement, il est difficile d’écarter la sensation que nous vivons une dystopie, comme celles qui sont représentées dans tant de séries du genre. Ce n’est pas un hasard si Black Mirror, peut-être la plus célèbre parmi ces séries, comporte le mot « miroir » dans son titre. Ses épisodes ne représentent pas un monde lointain – une époque distante, des galaxies éloignées, des univers parallèles – mais un futur proche de datation incertaine. À la fois étranges et familières, ses intrigues nous laissent imaginer à quoi mènerait le renforcement de tendances déjà présentes dans notre quotidien. Ce que nous vivons en ce moment peut être appréhendé de la même manière, la modification de nos habitudes semblant annoncer un futur déjà là. Que peut-on comprendre du monde où nous vivons à partir de cet « épisode infini » ? Les moments exceptionnels ou de crise peuvent aider à porter un regard critique sur ce que chacun considère comme « normal ». J’ai proposé ailleurs qu’on se regarde dans le « miroir de la terreur » pour mieux comprendre la société du capitalisme tardif qui avait engendré les formes nouvelles de terrorisme[1]. De façon analogue, je crois pertinent de réfléchir aux temps présents à partir de l’image en train de se former sur le miroir obscur de la pandémie.

      La situation nous invite à penser sur plusieurs plans : l’organisation politique, la reproduction économique, le rapport à la nature ou les usages de la science. Je veux problématiser ici seulement l’idée de « distanciation sociale », rapidement acceptée en tant que norme autour du globe, entraînant la progressive interdiction des rencontres et la normalisation d’une vie quotidienne menée en confinement. La situation pandémique repose sur une contradiction qu’il faut souligner. La rapide expansion de la maladie résulte des flux globaux qui ont unifié les populations à l’échelle planétaire. De la pandémie naît le paradoxe d’une population globale unifiée en un statut égal de confinement. Il y a, en somme, un isolement concret des individus dans un monde entièrement connecté. Ce paradoxe n’est pas un paradoxe exclusif de la pandémie, mais un paradoxe que la pandémie a mené à l’extrême, le rendant par là visible. En réalité, la dialectique entre séparation et unification (de ce qui est séparé) est à la base du développement du capitalisme occidental ayant unifié le globe.

      Guy Debord avait déjà remarqué cette contradiction structurante lorsqu’il a essayé de comprendre la phase « spectaculaire » du capitalisme, qui s’annonçait au siècle dernier. Ce qu’il a appelé la « Société du Spectacle » était une forme sociale basée sur le principe de la séparation. Ce qui a été souvent décrit comme une société de communication des masses pouvait être compris à l’inverse comme une société où la faculté de communiquer était massivement perdue. La communication au sens fort était l’apanage de la vie en communauté, un langage commun engendré par une existence en commun. Ce qui arrivait aux sociétés du capitalisme avancé était précisément le contraire. L’expansion dans l’espace – grandes villes, banlieues écartées, circulation économique globale – et la rationalisation du travail, à partir de l’hyperspécialisation des tâches individuelles, ont signifié l’éloignement concret entre les personnes et la perte de l’entendement commun, facteur amplifié par le monopole de l’Etat sur l’organisation de la vie collective. La disparition progressive de la communauté et de ses formes de communication était la condition préalable au surgissement des médias de masse – lesquels étaient le contraire des moyens de communication, puisqu’ils étaient fondés sur l’isolement réel croissant. Les millions de spectateurs prostrés devant des appareils télé, en consommant les mêmes images sans pouvoir s’en parler, restaient une figuration assez claire du fait que le spectacle, comme l’a écrit Debord, « réunit le séparé, mais il le réunit en tant que séparé » (§29). Certains croient que cette critique serait devenue désuète grâce à l’avènement de l’internet et des technologies qui en découlent. Au lieu de spectateurs prostrés devant les appareils télé d’hier, on aurait aujourd’hui des spectateurs « actifs », qui s’échangent des messages, produisent et diffusent leurs propres contenus. Mais la vérité est que rien dans le dernier demi-siècle n’a mis en question la séparation fondamentale sous-jacente au développement même des technologies de communication. La scène très habituelle d’amis autour d’une table de restaurant, qui au lieu de se parler regardent les écrans de ses propres portables, devrait suffire pour démontrer cette vérité. De nos jours, le séparé est réuni comme séparé là même où il occupe le même espace physique.

      Ce qui nous a été dérobé en ce moment de pandémie a été la possibilité de cohabiter l’espace physique. Dans les conditions présentes, l’interdiction des rencontres et l’obligation du confinement semblent plus aisément acceptables pour la population mondiale que ne l’auraient été l’interdiction ou une panne de l’internet ou des réseaux sociaux. Ironiquement, la « distanciation sociale » est maintenant revendiquée pour le sauvetage d’une société qui a toujours été fondée sur la distanciation. Le seul endroit de rencontre existant dans une société productrice de marchandise est, en vérité, le marché – c’est là que les marchandises entraînent par la main ses producteurs et consommateurs et c’est pour son compte que les hommes se rencontrent. C’est l’absence de ces rencontres, maintenant interdites, qui étonne tout le monde – la fermeture des espaces de travail et de consommation. Mais le capitalisme, qui était un rapport social médiatisé par des choses, s’est dédoublé dans un rapport social médiatisé par des images. Et il est désormais possible d’être dans un lieu sans y être. Il est possible de travailler (jusqu’à un certain degré) et consommer (sans limite) sans qu’on ait besoin de sortir de chez soi. Tout peut être à la portée de la main (ou plutôt du doigt qui touche l’écran), on peut tout avoir sans sortir de chez nous – la promesse du bonheur offert par le marché et réitéré par chaque publicité n’était-elle déjà la promesse d’une vie en confinement ?

      L’état d’exception de la pandémie semble alors avoir réalisé, au moins en partie, le rêve du capitalisme. Dans le cas où l’épisode dystopique que nous vivons en ce moment se révèle un « épisode infini », il serait aisé d’imaginer une population totalement habituée aux rapports virtuels, au confinement nourri par Netflix et les services de livraison. Les voyages seraient interdits, restreints aux flux des marchandises, fruit d’un secteur productif majoritairement automatisé. Le spectacle, qui depuis longtemps s’efforçait de détruire la rue, d’abolir la rencontre et de faire disparaître tous les espaces de dialogue – pour anéantir les alternatives à la pseudo-communication spectaculaire – aurait finalement atteint son but. L’espace réel, délaissé par les êtres humains confinés et obligés de s’enfuir dans la virtualité, n’appartiendrait plus qu’aux marchandises. La circulation humaine, « sous-produit de la circulation des marchandises », serait finalement devenue superflue, et le monde en entier livré aux « marchandises et leurs passions » (Debord, §168 et §66).

      Ceci n’est qu’un exercice d’imagination – un scénario improbable pour l’instant. Il est aisé d’anticiper pourtant que dans l’avenir nous assisterons à une augmentation du contrôle des flux globaux et de la circulation de personnes sous des prétextes sanitaires, avec une progressive normalisation des procédés d’exception actuels (de façon analogue à ce que nous avons connu pour le terrorisme après le 11 septembre 2001). De toute façon, faire des pronostics dans un contexte tellement incertain est toujours hasardeux. Mais le moment demande de la réflexion et penser à ce qu’on connaît est ce qu’on peut faire de mieux. Ce que nous ressentons comme le moins problématique en ce moment est sans doute ce qui exige précisément d’être problématisé. Reste à espérer que la distanciation sociale se convertisse en distanciation ou « effet de distanciation » (Verfremdungseffekt) dans le sens attribué par Brecht – celui de rupture avec la représentation autonomisée de la société du spectacle et ses illusions (dont la plus grande de toutes : celle de l’économie capitaliste, reproduction insensée et incessante de valeur abstraite en dépit de la vie). Une distanciation par rapport à cette forme de société : une occasion nécessaire pour repenser de manière critique les séparations qui la fondent, et les limites imposées par le capitalisme à la vie quotidienne.

      Mars 2020.

      #Gabriel_Zacarias est MCF à l’Université de Campinas au Brésil.

      http://www.palim-psao.fr/2020/04/dans-le-miroir-obscur-de-la-pandemie.l-etat-d-exception-de-la-pandemie-se

  • Pour sortir du #confinement, un plan d’urgence anticapitaliste

    Par bien des aspects, la #crise_sanitaire en cours est un révélateur de l’incapacité du #capitalisme européen à résoudre les grands problèmes de l’humanité. L’#Italie, la #France et l’#Espagne sont les pays où le virus frappe le plus fort car le #système_sanitaire a été ravagé par les politiques austéritaires depuis au moins une décennie. En France, ce sont 69.000 lits qui ont été supprimés à l’hôpital entre 2003 et 2017, 4.000 en 2018. Par souci d’économie, les réserves stratégiques de masques et de respirateurs ont été supprimées (près d’un milliard de masques dans les années 2000 - supprimé par Xavier Bertrand en 2011). Toujours par souci d’économie, la recherche publique sur les coronavirus n’a pas été soutenue et un temps précieux a été perdu dans la possibilité de trouver des traitements efficaces. La rigueur budgétaire et la recherche du profit sont les principaux responsables de la situation dans laquelle nous nous trouvons.

    Confinement ou immunité collective ?

    Face à la pandémie, les gouvernements hésitent entre deux solutions. La première, minoritaire, défendue par les gouvernement britanniques et néerlandais est l’acquisition d’une immunité de groupe. Cette immunité à l’avantage d’éviter les nouvelles épidémies. Selon les connaissances que nous avons du virus (R0 ~ 2.5), cela nécessite que 60% de la population entre en contact avec le virus et en soit immunisée. Ce processus est très bien décrit par le groupe de modélisation de l’équipe ETE (Laboratoire MIVEGEC, CNRS, IRD, Université de Montpellier) (http://alizon.ouvaton.org/Rapport2_Immunisation.html). Une fois ce taux atteint, la population dans son ensemble (y compris les personnes non immunisées) est protégée contre une nouvelle épidémie.

    Cependant, sans mesure de contrôle, les projections montrent qu’entre 81 et 89% de la population pourrait être infectée. Soit entre 20% et 30% de plus que le seuil pour atteindre l’immunité collective. Cela représente potentiellement 20 millions de personnes infectées en plus dans un pays comme la France.

    Nous ne connaissons pas précisément le taux de létalité du virus. Les chiffres dont nous disposons sont tous biaisés, et a priori largement surestimés, par l’absence de tests systématiques dans la population. Plus on dépiste, plus on détecte des personnes contaminées présentant peu ou pas de symptômes, plus ce taux est bas. Mais aussi bas soit ce taux, lorsqu’il est multiplié par des dizaines de millions de personnes, les morts se compteraient très probablement en centaines de milliers. Par ailleurs, l’austérité budgétaire et l’affaiblissement des systèmes de santé doivent être intégrés dans l’équation. La létalité du Covid-19 est visiblement provoquée par un choc cytokinique qui nécessite une prise en charge en soin intensifs avec respirateurs. Plus la pénurie de respirateurs est grande, plus la mortalité est haute, plus les équipes médicales doivent choisir qui maintenir en vie et qui sacrifier par manque de moyens. C’est sûrement ce qui explique les taux de mortalité très élevés par rapport à d’autres pays en Italie, en Espagne et dans une moindre mesure en France (bien que cela pourrait s’aggraver au pic de l’épidémie) qui sont mal équipés en nombre de lits en « soins aigus ».

    Dans la plupart des pays, ces chiffres ne sont pas assumables par les gouvernements en place. Et ce sont ces projections qui ont poussé partout le pouvoir à confiner les populations malgré la crise économique majeure et les conséquences sociales dramatiques que cela entraine.

    En effet, la distanciation sociale permet de ralentir la progression du virus, d’aplatir le pic, et donc de diminuer l’afflux de malades en détresse à l’hôpital. Ce processus est décrit de façon très intuitive dans le Washington Post (https://www.washingtonpost.com/graphics/2020/world/corona-simulator). La distanciation sociale peut recourir à plusieurs mécanismes, de la fermeture des écoles jusqu’au confinement total. L’étude publiée le 16 mars par l’Imperial College COVID-19 Response Team (https://www.imperial.ac.uk/media/imperial-college/medicine/sph/ide/gida-fellowships/Imperial-College-COVID19-NPI-modelling-16-03-2020.pdf) réalise des projections du nombre de lits occupés en soins intensifs en fonction de plusieurs scénarios de confinements. Si cette étude est forcément incomplète, notamment car les courbes dépendent du moment où les mesures sont mises en œuvre, cela nous montre que les mesures de confinement, dans le cas où aucun traitement ne serait trouvé, devraient s’étaler jusqu’à la fin de l’année 2021 pour que la population atteigne les 60% d’immunisés. Dans le cas contraire, tout relâchement du confinement pourrait correspondre à un nouveau développement incontrôlé de l’épidémie dans la population.

    Mais comment imaginer que la situation que nous vivons depuis une semaine en France se poursuivent pendant des mois ? Ce n’est tenable ni économiquement, ni socialement. Ce n’est pas le propos de cet article (pour cela voir le texte de Mimosa Effe : https://npa2009.org/idees/societe/le-confinement-la-destruction-du-lien-social-et-ses-consequences), mais le #confinement_de_classe que nous vivons actuellement doit s’arrêter. Toute vie sociale est stoppée alors qu’il faut continuer à travailler. Même si nous arrêtions toutes les productions non indispensables, ce serait tout de même des millions de travailleurs.euses qui devraient continuer à faire tourner l’hôpital, l’électricité, l’eau, le traitement des ordures ou l’alimentation – mais aussi tous les autres métiers qui permettent à ces secteurs de fonctionner ! Et cela dans un contexte d’atomisation total de notre camp avec tous les reculs sociaux et l’Etat policier total qui vont avec. A cela s’ajoute les dégâts psychologiques, les violences domestiques faites aux femmes ou la situation criminelle que sont en train de vivre les migrant.e.s, les prisonniers.ères et les sans-abris.

    Nous l’avons vu, le confinement est d’abord imposé par la faillite de notre système de santé et l’impréparation au risque de pandémie qui sont dues à l’austérité imposée par les gouvernements successifs en France et en Europe. Dans la forme qu’il prend, généralisé dans la vie sociale mais pas au travail, de classe, policier, il est la solution que les capitalistes pensent avoir trouvé pour limiter la casse et maintenir au maximum leur place dans la concurrence internationale. Mais la gestion capitaliste de cette épidémie est marquée par l’impossibilité de planifier une quelconque sortie de crise. Un gouvernement anticapitaliste, au service de la population, motivé par la santé plutôt que par les profits, pourrait mettre en place une toute autre politique.

    Existe-t-il une troisième voie ? De toute urgence prendre des mesures anticapitalistes pour sortir du confinement !

    Il ne s’agit pas ici de dire que le confinement pourrait être levé du jour au lendemain. Nous l’avons vu, étant donné les conditions d’impréparation des gouvernements et la dégradation des capacités de l’hôpital public à supporter une telle épidémie, le confinement était la seule solution pour éviter une mortalité élevée. En ce sens, toutes les initiatives syndicales ou de travailleurs.euses pour stopper le travail - et se protéger - dans les productions non-essentielles sont fondamentales. Le slogan « nos vies valent plus que leurs profits » prend ici tout son sens. Il est également fondamental de dénoncer le gouvernement qui nous explique qu’il faut renforcer le confinement mais continuer à travailler, bien au-delà des secteurs essentiels à la lutte contre l’épidémie. Pénicaud, Macron, Philippe sont plus préoccupé.e.s par le maintien des profits que par notre santé. Les scandaleuses mesures contre le droit du travail, les 35h, nos congés, articulées au renforcement de l’Etat policier, ont été prise au moment où la sidération était la plus haute dans la population.

    Mais il est indispensable maintenant de déterminer quelles sont les conditions qui permettraient d’envisager la levée du confinement à très court terme :

    – Il faut de tout urgence pratiquer le dépistage de masse. D’ailleurs, entre les lignes, le Ministre Olivier Veran reconnait lors de sa dernière conférence de presse (https://www.youtube.com/watch?v=wpGjmCkLDHs

    ) que le confinement ne pourra être levé que lorsqu’il sera possible d’effectuer plus de dépistages revenant sur la communication gouvernementale qui affirmait que le dépistage n’était plus un outil en phase 3. Le dépistage de masse permet de n’isoler que les malades et leur entourage. Il permet également une prise en charge précoce des patients considérés comme « à risque » et ainsi de diminuer la létalité du virus. Le problème, c’est que le fournisseur n’arrive pas à suivre la demande en kit de dépistage (https://www.thermofisher.com/order/catalog/product/11732088#/11732088). Il faut donc de toute urgence organiser la production de kits de dépistages en réquisitionnant les entreprises du secteur et en passant outre les brevets.

    – De toute urgence également, il faut injecter des moyens dans la santé et l’hôpital public pour augmenter les capacités de prise en charge des patients en détresse respiratoire. C’est l’inverse des politiques menées jusqu’alors qui font fonctionner l’hôpital comme une entreprise, en flux tendu, incapable de s’adapter à des situations d’urgence. Pour l’instant, le gouvernement a débloqué 2 milliards d’euros pour l’hôpital. Dans le même temps, il injecte 43 milliards dans l’économie et garantit 350 milliards d’euros aux entreprises privées !

    – Pour augmenter le nombre de lits en soins intensifs et protéger celles et ceux qui travaillent il faut réorganiser en profondeur l’appareil industriel pour planifier les productions utiles à résoudre la crise sanitaire : masques, respirateurs, oxygène… En ce sens, il faut soutenir l’action de la CGT qui demande la réouverture et la nationalisation de Luxfer, seule usine d’Europe à produire des bouteilles d’oxygène médical fermées. C’est un bon exemple qui pourrait se poser pour d’autres productions.

    Enfin, l’attention est captée à une échelle assez large sur la mise en place d’un traitement. Le plus prometteur, la chloroquine (ou son dérive l’hydroxy chloroquine) est testée dans plusieurs pays et de nombreux services hospitaliers, y compris en France, ont commencé à l’utiliser sur des malades. Ce médicament semble réduire la charge virale et la durée du portage du virus. Si ce traitement s’avère efficace, la question de la nationalisation de l’industrie pharmaceutique va devenir compréhensible à une échelle très large.C’est peut-être la peur de cette évidence qui motive les grands groupes du secteur à anticiper en proposant de fournir ce traitement gratuitement, que ce soit #Sanofi (https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-sanofi-pret-a-offrir-aux-autorites-francaises-des-millions-) ou #Novartis (https://www.lefigaro.fr/flash-eco/coronavirus-novartis-offre-130-millions-de-doses-de-chloroquine-20200320) !

    Ainsi, nous pouvons affirmer que le confinement aurait pu être largement réduit, voire évité, en généralisant les dépistages, en développant les capacités d’accueil de l’hôpital public et en accélérant les tests sur des traitements antiviraux.

    Ce plan d’urgence n’est possible à court terme que si l’on s’affronte au capitalisme. Il faut reprendre le contrôle, sans indemnité ni rachat, sur l’appareil productif, notamment dans le domaine de la santé, des protections pour les salariés, de l’industrie pharmaceutique et biochimique.

    Macron et son gouvernement, LR et le PS avant lui, portent une lourde responsabilité dans la situation actuelle. L’heure de solder les comptes arrivent. Les réponses anticapitalistes pourraient alors apparaître comme une solution à une échelle inédite jusqu’alors. Pour cela, sans attendre la fin du confinement, il nous faut renforcer les réseaux de solidarité, les réseaux militants pour recommencer à agir dans la situation.

    https://npa2009.org/idees/sante/pour-sortir-du-confinement-un-plan-durgence-anticapitaliste
    #anticapitalisme #anti-capitalisme #austérité #hôpitaux #lits #masques #réserves_stratégiques #stock #respirateurs #recherche #rigueur_budgétaire #immunité_collective #immunité_de_groupe #létalité #taux_de_létalité #tests #dépistage #choc_cytokinique #distanciation_sociale #flattening_the_curve #aplatir_la_courbe #vie_sociale #travail #atomisation #Etat_policier #impréparation #troisième_voie #droit_du_travail #dépistage_de_masse #soins_intensifs #industrie #nationalisation #Luxfer #chloroquine #industrie_pharmaceutique #responsabilité

    ping @simplicissimus @fil @reka

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    Citation sélectionnée pour @davduf :

    Le confinement de classe que nous vivons actuellement doit s’arrêter. Toute vie sociale est stoppée alors qu’il faut continuer à travailler. Même si nous arrêtions toutes les productions non indispensables, ce serait tout de même des millions de travailleurs.euses qui devraient continuer à faire tourner l’hôpital, l’électricité, l’eau, le traitement des ordures ou l’alimentation – mais aussi tous les autres métiers qui permettent à ces secteurs de fonctionner ! Et cela dans un contexte d’atomisation total de notre camp avec tous les reculs sociaux et l’Etat policier total qui vont avec. A cela s’ajoute les dégâts psychologiques, les violences domestiques faites aux femmes ou la situation criminelle que sont en train de vivre les migrant.e.s, les prisonniers.ères et les sans-abris.

    • Le confinement, la destruction du #lien_social et ses conséquences

      Le 19 mars l’Assemblée rejetait l’amendement visant à prolonger le délai d’#avortement pendant la crise sanitaire. Si ce n’est finalement que peu étonnant de la part des députés LREM, ce rejet est révélateur de quelque chose de plus profond. Le confinement de la population va mettre en danger massivement les #femmes et les #classes_populaires de manière générale.

      Quelle que soit la façon dont certains ont essayé de le tourner, le confinement est profondément inégalitaire. Il y a ceux et celles qui ont un logement pour se confiner et les autres qui n’en ont pas, celles et ceux qui ont un logement décent et les autres qui ont un logement insalubre, celles et ceux qui ont une maison avec un jardin et celles et ceux qui doivent se pencher à la fenêtre pour respirer de l’air frais.

      Le message du gouvernement à l’aide de mesures coercitives violentes (oui les amendes sont effectives et en Seine-Saint-Denis elles ont conduit à des arrestations et des garde-à-vue) fait croire à la portée individuelle du confinement sans prise en charge collective de ses répercussions. Face à cela, certainEs ont essayé de mettre en place des réseaux de solidarité dans les immeubles, dans les quartiers, ... Si ces réseaux sont nécessaires et même indispensables, ils ne contrebalancent pas les problèmes qui se posent avec le confinement et qui vont forcément causer là aussi des morts, et parfois ils confortent même dans l’idée qu’il faut nécessairement rester chez soi : promener son chien, faire du jogging serait dangereux. Le propos de cet article n’est pas de dire que le confinement est inutile pour contrer le Covid-19 mais que le confinement n’est pas viable à moyen terme, c’est pourquoi la sortie de crise ne peut venir que de la mise en place d’un plan d’urgence visant à dépister et à soigner ce qui veut dire concrètement donner des moyens aux personnels de santé et des moyens de protection à la population.

      Le confinement face à l’organisation sociale de la dernière phase du capitalisme

      Le confinement dans l’histoire n’a jamais été une partie de plaisir, mais elle pose question dans le capitalisme tel qu’il s’organise aujourd’hui. Depuis les trente dernières années : on peut dire que la tendance à détruire les structures familiales est plutôt lourde. Les foyers composés de personnes seules s’élèvent à 35% des foyers (20% des femmes et 15% des hommes) auxquels se rajoutent presque 9% de familles monoparentales (dont le gros du contingent est composé de femmes). La grande majorité des foyers composés d’une personne seule ont plus de 65 ans (plus de 70%)1. Le problème c’est qu’avec cette épidémie ce sont ces mêmes personnes considérées comme vulnérables qui vont donc se retrouver complètement isolées.

      De l’autre côté, l’on sait aussi qu’un ménage sur douze vit dans un logement surpeuplé, 18% des logements sont considérés comme trop bruyant (donc mal isolés), 22% n’ont pas de système de chauffage efficient et près de 13% ont des problèmes d’humidité.2

      Le confinement produit aussi des rapports au travail qui accentuent ce qui existait auparavant : d’une part il y a ceux qui télétravaillent et ceux qui continuent de travailler dans des conditions de sécurité face au virus alarmantes et avec l’idée que le travail s’accompagne de toute une série de mesures restrictives.3 Mais à cela, il faut encore ajouter que le télétravail n’est pas le même pour tout le monde (que l’on soit cadre ou que l’on fasse un travail administratif) surtout quand l’on se retrouve face à un travail qui s’accompagne de plus en plus d’une perte de sens, d’autant plus qu’il envahit la sphère privée et que les loisirs sont considérablement réduits. Quant aux précaires, aux étudiantEs, à celles et ceux qui travaillaient sans contrat de travail, c’est une situation dramatique qui s’ouvre sans qu’aucune aide ne soit prévue si ce n’est un chômage auxquels ils n’ont pas tous droit.

      De plus, le système capitaliste entraîne une détresse psychologique : la dépression, le suicide ou les tentatives de suicides vont s’accentuer avec la perte de lien social, la perte d’activités émancipatrices et une vie tournée autour du travail.

      Toute la prise en charge associative, comme du service public de ses éléments là, comme de la prise en charge de l’extrême pauvreté va être ou drastiquement réduite voire inexistante.

      Dans le confinement, les femmes trinquent (et meurent !)

      Outre la question de l’avortement dont nous avons parlé plus haut, les femmes vont subir une répercussion violente du confinement. Elles assumeront plus de tâches ménagères qu’à l’ordinaire et de tâches de soin, et on le sait ce sont elles qui dans la plupart des foyers assumeront le suivi de « l’école à la maison » et d’occuper les enfants, sans compter les familles monoparentales ou les mères se retrouveront seules face à l’éducation de leurs enfants.

      Le confinement va augmenter les violences intra-familiales et en particulier les violences conjugales, c’est déjà ce qu’a révélé l’expérience du Wuhan4. Là encore, ces violences seront encore moins prises en charge qu’avant puisque le 3919 ne fonctionne plus pendant cette crise contrairement à ce qu’avait annoncé Marlène Schiappa.5 Au sixième jour du confinement, cette tendance est d’ailleurs aussi relatée par la FCPE ce dimanche.6

      Le manque d’accès à l’avortement pourra provoquer des recherches de solutions mettant en danger les femmes subissant des grossesses non-désirées quand celles-ci ne provoqueront tout simplement pas le suicide.

      Dans le même temps, on pourra noter que les adolescents LGBT confrontés en permanence à l’homophobie pourraient là aussi augmenter les tentatives de suicides et les suicides, alors même que c’est déjà une cause importante de suicides chez les adolescentEs.

      Ajoutons à cela que des secteurs largement féminisés se trouve en première ligne de la gestion de la maladie : infirmières, caissières, ...

      L’isolement des individus entraîne une baisse de la conscience de classe

      Le confinement produit un rapport de force dégradé de manière objective. En ce moment, des lois d’exception sont en train de passer à l’Assemblée diminuant nos droits, sans possibilité de riposte et si la légitimité du gouvernement reste affaiblie, les mesures prises rencontrent au moins une part de consentement. Si c’est le cas, c’est bien parce que la crise que l’on rencontre, a de grosses difficultés à être résolue par le système sans faire des milliers de morts.

      Individuellement, les gens ne peuvent pas se protéger et pour une grande majorité restent donc chez eux de peur (et cette peur est fondée) de devenir malade ou de l’être déjà et de contaminer d’autres personnes. Le problème c’est que sans dépistage massif et traitement le confinement risque de durer longtemps.

      Or, isolément, les gens ne peuvent d’une part pas s’organiser (ce qui dégrade le rapport de force) et de l’autre entraîne une baisse de la conscience de classe dans ce qu’elle a de plus simple car c’est l’organisation du travail qui fonde objectivement cette conscience. De plus, le confinement, repose sur le consentement d’une population à être confinée : c’est d’ailleurs par les réseaux sociaux, mais aussi dans la presse ou dans son entourage une pression sociale à « Restez chez vous », mais aussi à prendre le temps de lire ou de se cultiver.

      De fait cette pression sociale, construit alors le modèle de ceux qui y arriveraient en étant forts, en ayant accès à de la culture ou à des habitudes culturelles. Les vieux qui vivent seuls, les dépressifs, les pauvres, ceux qui n’ont pas accès à la culture se retrouveraient alors mis à l’amende.

      Pour l’instant, cette idéologie ne se fait que sous forme de pression, mais elle pourrait produire autre chose, elle passerait alors du consentement à la collaboration : elle est déjà en partie à l’œuvre de manière minoritaire, elle passe par la délation de celles et ceux qui sortent et la volonté d’un durcissement des mesures coercitives.

      Le confinement ne peut qu’être une mesure à court terme, sinon les effets violents décrits auront des effets durables, surtout si, comme c’est le cas aujourd’hui le mouvement ouvrier ne riposte pas.

      https://npa2009.org/idees/societe/le-confinement-la-destruction-du-lien-social-et-ses-consequences
      #confinés #non-confinés #inégalités #logement #mesures_coercitives #amendes #Seine-Saint-Denis #arrestations #garde_à_vue #rester_chez_soi #isolement #télétravail #chômage #détresse_psychologique #santé_mentale #école_à_la_maison #soins #care #tâches_ménagères #conscience_de_classe #lois_d’exception

  • Non, je vais pas tenir un journal de confinée.
    Juste témoigner de ce qui se met en place ici #en_temps_de_pandémie.
    Mes voisin·es ont créé, la semaine dernière, un groupe sur WhatsApp pour s’organiser, s’entraider, s’informer, se soutenir, faire des courses groupées.
    J’ai pris le train en route car je n’ai pas de forfait internet sur mon mobile mais j’ai accès grâce au Wifi. J’avais reçu un message il y a quelques jours mais je ne savais ce que c’était. Ben, voilà, c’était une invitation à rejoindre le groupe, c’est fait. Et ça fait du bien cette #solidarité de voisinage #ça_fait_du_bien !

    • Tant mieux nous ici à 40km de Paris les choses se mettent en place aussi, je croise les doigts pour que les gens profite de ce confinement pour sortir de leur léthargie, et lisent des choses importantes qu’ils n’ont normalement pas le temps de lire. Mais j’ai très peut d’espoir. Surtout qu’ils mettent les bouchés doubles coté lois. amitiés Odilon, f.

    • #confinement_solidaire à opposer à #confinement_inégalitaire ou #confinement_violent ? Encore à la recherche d’un tag. Profite bien ! Ici dans la courée de Ménilmontant mes hôtes n’ont encore reçu aucune invitation des voisin·es à avoir des contacts réguliers alors qu’il s’agit d’une voie privée et que ça crée des liens comme une copro. Elle et il ont noté que certain·es qui avaient l’habitude de mettre leur bien en AirBnB sont parti·es sans prêter leur maison à des ami·es moins bien logé·es. Des maisons confortables avec jardin qui restent vides... Pas la grande classe.
      #bourgeoisie

  • Academics are not a #vital_profession

    Amidst the COVID-19 crisis, Dutch universities claim the status of ‘vital profession’, but that claim gambles with the health of academics and support and maintenance staff. Shocking as it may be to take in, most academics do not perform ‘vital’ tasks, and ‘business as usual’ is not what is demanded from educational leadership at this moment.

    There is no democracy without a vibrant intellectual climate, and universities are an important constitutive element of such a climate. Acutely, however, most of what academics in universities do can be missed, or at the very least postponed. At this point in the COVID-19 crisis, we should admit this, rather than claim special status in order to stick to the bureaucratic formats that have become the prevailing ways in which academic teaching is performed. It may come as a shock to academics, well-versed as we are in accumulating signs of status, but nurses, doctors, firemen, (hospital) janitors, primary school teachers, shop keepers, and electricity mechanics are much more vital at this moment than most academics. And this should have consequences for the ways universities respond to the current situation.
    A vital profession?

    When Dutch academics began asking for a ‘vital profession’ status in this pandemic, this initially struck us as a joke. The Dutch government had decided to close all schools, but remain open for parents with a ‘vital profession’ and no alternative childcare. ‘Vital professions’ include educational staff, but mostly as a way to support health care professionals, meaning teachers in primary schools. And beyond that, ‘vital professions’ include teachers with responsibility for secondary schooling exams. It soon turned out that, indeed, academics and universities were not joking but were actively lobbying to be considered ‘vital’, so that they too could claim continued access to childcare and schools. The lobby was successful, apparently, because on March 17, the VSNU sent the following press release:

    “University staff fall under the ‘crucial professions’ when they are needed to organise (distance) education, as the VSNU is assured by the Ministry of Education, Culture and Science. According to the VSNU, this definition applies in practice in any case, but not exhaustively, to:

    Teachers
    ICT personnel required to maintain the ICT infrastructure and distance learning support programmes.

    For further information we refer to the website of the central government.”

    Subsequently, emails were distributed with messages such as this: ‘The ministry has clarified that university teachers belong to the vital occupations in the Netherlands. This means that if you have no one else at home who can take care of your children, you have a right to send them to daycare or school.’

    As of yet, however, this ‘vital profession’ status is not made explicit on the official government website the VSNU refers to, although the Ministry of Education sent a letter to Parliament on March 19th confirming this ‘vital profession’ status. The list on the central government’s website, however, still only mentions ‘school teachers’ – a label university boards appear, all of a sudden, to be entirely comfortable with.

    “It may come as a shock to academics but nurses, doctors, firemen, (hospital) janitors, primary school teachers, shop keepers, and electricity mechanics are much more vital at this moment.”

    These emails were surely meant to support staff that was struggling to combine work and care at home. Teaching staff in particular has indeed been put in a highly stressful and overwhelming situation, trying to ‘move’ teaching to online spaces, navigate anxieties about the pandemic and worries about loved ones, often while juggling homeschooling and childcare. It makes sense to provide support. Yet, the ‘vital professions’ claim makes clear that universities as employers have difficulty organizing solidarity.

    Yes, some courses run through this semester and certainly, students should be enabled to graduate this academic year (that is, in absence of compensation enabling an extra year of study). But not all staff is involved in these tasks. Instead of effectively redistributing work and supporting staff that needs the support, the universities opted for a general ‘vital profession’ claim, effectively overburdening the already quite precarious health care system and schools in the Netherlands while exposing more people than necessary to infection. In the process, choices that are highly personal and ethical – do I take my child to daycare in the midst of a pandemic? – are decided by decree.
    The delirium of ‘impact’

    For some time now, Dutch universities are in a delirium over their ‘impact to society’. Being a ‘vital profession’ is part of that delirium. And it takes our mind off of what should now be done. Many students are not coping with the situation in such a way that it allows for the ‘business as usual’ model currently adopted. Especially international students are struggling. They are anxious about the virus itself and are far away from family, or they have moved back home and are therefore far away from the university. Students do not always have the support network in place to help them through this crisis and they often live in very small rooms. With hospitality and other businesses locked down, many also have to survive without the additional income they earn in part time jobs. The students need support and universities’ staff is offering this, often by digital means and from home. But many students, and in particular international students, we find, need more to alleviate mental stress and financial uncertainty about the future.

    The first thing not to do, is to act as if we’re in ‘business as usual’. What we see happening is massive resources being deployed to keep students to deadlines rather than apply leniency, to not change teaching objectives (bureaucratically expressed in ‘learning goals’), to move all face-to-face teaching to online, digitally mediated teaching, through platforms controlled by the tech industry. This is madness. We are experiencing a crisis unprecedented in the history of modern higher education, which is profoundly changing the nature of higher education while putting everybody, students and staff, under intense pressure. In the face of a transformation of such magnitude, ‘business as usual’ cannot be the preferred course of action. There are two main reasons for this.
    We cannot teach, so don’t pressure students to learn

    The first is that teaching cannot properly be done. Only when education and pedagogy is expressed in bureaucratic ‘learning goals’ does it make sense to provide students with recorded lectures and consider it equivalent to what the meeting of students and teachers can and should be. Digital alternatives are, of course, provided with the best intentions, and considered as substitutes for lack of better options. But the very idea that they are substitutes is revealing with respect to how our society has to come understand what education is. What we have to resist is the idea that we are now doing ‘online teaching’.

    “Students are anxious about the virus itself, about being far away from family, or moved back home and therefore far away from the university.”

    What we are doing, rather, is trying to make it to the end of the semester without harming the interests of our students. But in the current crisis, the flight to the digital is a form of denial rather than a way of coping with the crisis. This is the hard pill to swallow: teaching, challenging each other’s minds, studying and discovering together, is not possible at the moment. Therefore, in order to ensure that students do not incur delays, why not enact leniency, and adapt learning goals given the circumstances under which learning must take place? Why stick to bureaucratically engrained ‘learning goals’? Alternative options should be considered, such as a pass or fail grading option, or adapting exam requirements.

    The second is that the ‘business as usual’ approach takes an exorbitant toll on supporting staff and outsourced personnel and heightens inequalities between tenured and temporary staff, and therefore signifies a lack of solidarity of academics with support staff, catering services, cleaning staff, as well as with primary school teachers and day care professionals. When we received the first emails requesting us to work from home and ‘move teaching online’, it became apparent which workers were asked to continue being on site: maintenance staff. Some of those e-mails assured staff who needed to come in for emergency meetings that ‘coffee machines will continue to be maintained, and can be used.’ So, workers were, and currently are, maintaining coffee machines and cleaning offices, after academics were already working home and before the buildings began to close (but note that many buildings remain open).

    “The first thing not to do, is to act as if we’re in ‘business as usual’.”

    This put maintenance staff, generally badly paid and often non-white, at risk of being infected with COVID-19. The vitality of academics, thus depends on the vulnerability of others to a potentially lethal disease. And after the schools closed on Monday March 16th, it also put them in the situation of needing to make arrangements for childcare in order to show up for their job, just because we presumably cannot endure without our coffee. It is crucial that in the time to come, we include outsourced maintenance staff in our considerations of who is the university and who is actually ‘vital’. This crisis has made visible, yet again, that, to a large extent, vital work is indeed social reproductive work – the work that makes so-called productive work possible in the first place. We should make sure that, like academic staff, maintenance staff should continue to be paid throughout this crisis, and that no one loses their job in this crisis.

    What we demand from Dutch universities:

    1) Barring medical researchers and staff who are immediately involved in managing the COVID-19 crisis, the claim to a ‘vital profession’ should be rescinded;

    2) All efforts should be aimed at providing relief for students, and this includes leniency, adjusting deadlines, extra retakes, all in such a way as to make sure students can both move on with their studies or graduate, and incur the least financial burdens;

    3) Both the safety and the continuation of pay for support and maintenance staff should be secured, regardless of whether their work has been outsourced;

    4) Temporary staff in particular requires extra support; leniency should be applied in tenure tracks, and PhD trajectories should be extended.

    5) Pressure should be put on the central government to provide financial support for temporary staff, but in particular for students. Government has announced a huge package of financial relief measures for businesses. Why not for students? The forgiving of student debt and the extension of studies without tuition are two obvious options beyond postponing debt payments and, effectively, extending student debt, as announced by the Ministry’s letter to Parliament of March 19.

    Earlier this, week, hundreds of Cambridge students asked their university to let them retake this year. These are not outrageous demands; they are demands that appreciate the size of what hit us, and of what is likely to come. It is time to start operating in radically different registers, that face the magnitude of what is happening to our educational institutions in and beyond this crisis. Rather than a digitized ‘business as usual’, this is what is demanded of the kind of educational leadership now required.

    https://www.scienceguide.nl/2020/03/academics-are-not-a-vital-profession
    #Pays-Bas #profession_vitale #coronavirus

    Ce terme de #profession_vitale , appliquée au monde académique... à rapprocher avec celui de #continuité_pédagogique en France :
    https://seenthis.net/messages/831759

    #terminologie #mots #vocabulaire

  • « Les connards qui nous gouvernent » par Frédéric Lordon, 19 mars 2020
    https://blog.mondediplo.net/les-connards-qui-nous-gouvernent

    Bien sûr ça n’est pas moi qui le dis — ça non. C’est Claude Askolovitch. Plus exactement, Claude Askolovitch rapporte les propos d’un « ami pneumologue ». En même temps, on sent qu’il les endosse un peu. Ça n’est pas exactement lui qui le dit mais un peu comme si quand même. En tout cas, tous les papiers de la respectabilité sont dûment tamponnés : un journaliste de France Inter et d’Arte, on pourra difficilement plus en règle. Et donc tout d’un coup, sans crier gare, le voilà qui parle, ou laisse parler, de nos gouvernants comme de « connards ».

    On se demande ce qui l’a piqué — en même temps il faut admettre : quand une vidéo appelée à demeurer dans la mémoire collective montre Agnès Buzyn, ci-devant ministre de la santé, déclarer fin janvier qu’évidemment le virus restera à Wuhan et qu’il n’y a aucune chance que nous en voyions jamais la couleur ; quand, jusqu’au 12 mars après-midi, le ministre Blanquer assène qu’il n’y a aucune raison de fermer les écoles (moi aussi, comme Claude Askolovitch, j’ai un ami : dans la classe de sa fille, sept cas positifs, mais pourquoi embêter les parents avec d’inutiles soucis de garde ?), et que le soir même la fermeture générale est annoncée ; quand, dans un tweet à ranger sur la même étagère que la vidéo de Buzyn, Macron, comme un hipster du 11e arrondissement qui aurait fait l’atelier poésie au collège, nous invite — le 11 mars –- : « Nous ne renoncerons à rien, surtout pas à rire, à chanter, à penser, à aimer, surtout pas aux terrasses, aux salles de concert, au fêtes de soir d’été, surtout pas à la liberté », pour le 12 fermer les écoles, le 14 laisser son premier ministre annoncer un début de confinement général, et le 16 morigéner la population qui continuait sur la lancée de l’exemple qu’il lui donnait depuis des semaines ; quand on se remet sous les yeux le tableau d’ensemble de ces ahurissements, on se dit en effet que tous ces gens se sont fait prendre soit par surprise, soit par connerie. Et que l’hypothèse de la surprise étant à l’évidence exclue, il ne reste que celle de la connerie — qui n’est pas une surprise.

  • Le garçon porcher, La princesse au petit pois et Le costume neuf de l’empereur, trois contes d’Hans Christian Andersen

    https://www.franceculture.fr/emissions/lectures-denfance/le-garcon-porcher-la-princesse-au-petit-pois-et-le-costume-neuf-de

    Quelles sont vos premières lectures, vos lectures d’enfance ? C’est la question posée par la réalisatrice Marguerite Gateau à trente comédiens en 1988. Cette collection toute simple a un double mérite : Elle s’entend comme une série de rencontres avec des comédiens et comédiennes que nous aimons ou avons aimés, dont les voix nous ravissent. Et elle nous replonge dans nos propres souvenirs de lectures. S’il existe une mémoire collective, c’est peut-être celle de l’enfance, constituée de toute une littérature transmise de génération en génération. Et l’on s’étonnera d’entendre parler d’une époque où l’on se cachait pour lire, le soir, sous les couvertures. La lampe électrique est l’héroïne de cette collection qui s’entend aussi comme la trace d’une pratique et d’une époque, celle où l’on cherchait tout dans les livres. Cette collection s’adresse aux adultes nostalgiques et aux enfants en quête de belles histoires. La collection sera suivie en fin d’été par une série de lectures de contes d’Oscar Wilde et de contes du monde entier

    #confinement_avec_des_enfants #sortir_des_écrans

  • Expropriations in the works for creation of closed migrant centers

    The long-awaited creation of closed centers for asylum seekers on five northeastern Aegean islands was announced on Monday by government spokesman Stelios Petsas, who stressed that a legislative act will be issued to allow for the acquisition of properties, land and sites by expropriation.

    Petsas said the legislative act will “authorize” the Migration and Asylum Ministry to proceed “with the expropriation...of the necessary property and land for crisis management in order to address the urgent need to avoid endangering public health and order.”

    The closed centers will be created on Lesvos, Chios, Samos, Kos and Leros.

    Given the objections and concerns of local communities, Petsas said that the site selection was made following an “exhaustive dialogue” with the competent regional and local authorities and after an appeal was made by the regional governor of the north Aegean islands, Costas Moutzouris, for a state of emergency to be declared on the islands.

    However, Petsas’ announcement sparked a backlash on the islands, given that the capacity of some of these structures will be 20,000 people. Emergency meetings were held by municipal councils on Lesvos, Samos and Chios, while a scheduled meeting with government officials in Athens on Thursday has been cast in doubt.

    According to Petsas, the structures will shelter new arrivals in order to facilitate the identification and asylum processes. He added that they will also be used to detain migrants who exhibit abusive behavior and those who are not entitled to asylum and are slated for return to their country of origin.

    In addition, the operation of these new structures foresees internal regulations, such as allowing residents to leave the centers for a limited period of time. Residents will be given special cards for this purpose. The structures will be closed at night. The government has declared that “the violation of any internal rules will adversely affect asylum claims and speed up the process of the offender’s return [to their country of origin].”

    The closed centers are part of a broader four-pronged government plan to resolve the migration problem. This also entails tightening border security, speeding up asylum procedures and increasing returns.

    The government hopes that the creation of the closed structures will eventually dampen the of local communities’ opposition, once conditions on the islands improve. Petsas stressed Monday that the aim is to support local communities.

    http://www.ekathimerini.com/249392/article/ekathimerini/news/expropriations-in-the-works-for-creation-of-closed-migrant-centers
    #centres_fermés #Grèce #îles #migrations #réfugiés #Samos #Lesbos #Chios #asile #Kos #Leros

    ping @karine4

    • En Grèce, des réfugiés enfermés de force dans un camp « coupé du monde »

      L’épidémie de coronavirus peut-elle étouffer des injustices flagrantes et des atteintes aux droits de l’homme, au sein même de l’Europe ? C’est la question qu’on peut se poser alors que depuis le 21 mars, 189 réfugiés et migrants ont été transportés, depuis l’île grecque de #Lesbos, dans un camp récemment improvisé au nord de la Grèce. Dans un endroit totalement isolé, dénommé « #Klidi » (qui signifie aussi « la clef », en grec) où quelques dizaines de tentes ont été installées, entourées d’impressionnants grillages et fils barbelés sous la garde d’une présence policière massive.

      Parmi ces migrants, contraints à un #confinement_forcé, on trouve de nombreuses femmes, au moins un bébé de trois mois, et aussi six mineurs non accompagnés. Tous dorment sur des nattes posées sur le sol de tentes prévues pour cinq. Mais qui accueillent dix personnes chacune, sans que rien n’ait été organisé pour séparer les hommes des femmes. Et encore moins pour les prémunir, dans cette #promiscuité imposée, contre l’éventuelle apparition du coronavirus. D’après les images qui sont parvenues à Libération, des toilettes chimiques et des cabines de douches extérieures ont également été plantées au milieu du décor désolé de ce camp installé sur le lit d’une rivière desséchée. En cas de pluie, il sera rapidement inondé. Il y fait froid la nuit, il y fera bientôt trop chaud la journée sous les tentes en plastique qui ne disposent d’aucun coin d’ombre. « On est loin ! C’est la brousse, ici…Nous sommes totalement coupés du monde ! Depuis hier, il n’y a même plus d’électricité », s’alarme Joshua (1) dans un message reçu mardi soir.

      Procédures pour le droit d’asile gelées

      « De quel crime se sont rendus coupables, ces gens pour être confinés dans cette situation inhumaine ? », s’est ému cette semaine le quotidien Efimerida Ton Syntakton (« Le journal des rédacteurs »), l’un des rares médias grecs à avoir dénoncé cet #enfermement qui ne respecte ni la convention de Genève, ni la Convention européenne des droits de l’homme. Qui s’en soucie ? Bruxelles se tait. Et le gouvernement grec du Premier ministre, Kyriákos Mitsotákis, a de toute façon gelé toutes les procédures de droit d’asile depuis le 1er mars, réagissant alors à la décision du président turc, Recep Tayyip Erdogan, d’ouvrir les frontières aux réfugiés et migrants qui se trouvaient en Turquie. La menace d’un afflux massif depuis la Turquie a permis à la Grèce de faire jouer une clause d’urgence, bloquant provisoirement le droit d’asile, tout en négligeant de consulter ses partenaires européens, comme le veut pourtant la règle.

      Et dans l’immédiat, la mise entre parenthèses du droit d’asile permet désormais de considérer de facto comme des migrants illégaux promis à la déportation, tous ceux qui ont accosté depuis mars sur les îles grecques. Avant même de quitter Lesbos, les 189 réfugiés transportés à Klidi avaient d’ailleurs été sommés de signer un document en grec. Sans savoir qu’ils acceptaient ainsi leur future déportation. Le coronavirus (et les mauvaises relations actuelles entre la Grèce et la Turquie) retarde dans l’immédiat ces rapatriements forcés. Mais le confinement dans un camp quasi militaire au nord de la Grèce risque de générer de nouvelles souffrances pour ces réfugiés jugés indésirables.

      Ils avaient pourtant déjà connu bien des épreuves au cours de leur long périple vers l’Europe. Certains avaient même été la cible d’un push back, un refoulement forcé, alors que leur fragile embarcation se dirigeait vers les côtes grecques. Il y a une dizaine de jours, installés sous le vent et la pluie, sur la plage de Skala Sikamia dans le nord de Lesbos, des réfugiés racontaient ainsi avec moult détails comment leur zodiac, avec 43 personnes à bord, avait été violemment attaqué le 5 mars par deux frégates des garde-côtes grecs qui ont pris le risque de les faire tous basculer dans la mer. Sans prêter aucune attention à la douzaine d’enfants présents. Au regard du droit international, les push back sont évidemment totalement illégaux. Mais malgré, de nombreux témoignages, celui du 5 mars n’a suscité aucune réaction officielle de la part des partenaires européens de la Grèce.

      Après avoir passé près de deux semaines sur une plage de l’île, les naufragés qui avaient miraculeusement survécu à cette attaque policière en pleine mer, se retrouvent donc enfermés à Klidi pour une durée indéterminée. Sans recours possible à un avocat ou même, dans l’immédiat, à un médecin.

      Stratégie cruelle

      Une stratégie cruelle semble refléter la nouvelle politique migratoire du gouvernement grec. Déjà le 14 mars, un bateau militaire avait conduit dans un autre camp fermé proche d’Athènes, 436 migrants et réfugiés arrivés eux aussi en mars à Lesbos. « Il fait très froid la nuit, et les journées se passent à attendre sans rien faire ni savoir ce qu’on va devenir », avait expliqué la semaine dernière par SMS Mohamed (1) enfermé dans ce camp de Malakassa, proche d’Athènes qui accueillerait déjà plus de 2 000 de personnes. « On a pris nos noms et on nous a attribué chacun un numéro. Pour le reste, on ne nous dit rien », souligne de son côté une femme enfermée à Klidi.

      Sur ce nouveau site où les bétonneuses étaient encore en action quand les 189 réfugiés sont arrivés, même les policiers présents se sont émus des conditions de vie imposée aux nouveaux reclus. Dans la lettre qu’ils ont adressée à leur hiérarchie cette semaine, selon le site local Anexartitos.gr, ils signalent que le premier jour ils ont dû distribuer des sandwichs pris sur leurs propres rations à des femmes et des enfants dont « certains au bord de l’évanouissement », qui n’avaient pas été nourris pendant toute la durée de leur transport jusqu’à ce camp. Lequel est qualifié dans cette lettre d’« endroit totalement inapproprié », pour des réfugiés qui ne tarderont pas à ressentir un sentiment d’« asphyxie », préviennent encore les policiers, en raison à la fois de l’#isolement du lieu et de la promiscuité imposée à ceux qui y résident.

      Dans un article récent, intitulé « La clef perdue de l’humanité » (jouant sur le nom du lieu : « klidi »), Efimerida Ton Syntakton s’interroge : « Combien de jours et combien de nuits, un être humain peut-il supporter de vivre dans un tel lieu d’enfermement ? » Tout en s’adressant aux lecteurs : « Pensez-y, sachant combien nous-mêmes, nous avons du mal à supporter la quarantaine dans nos propres maisons. » Mais dans l’immédiat, « la clef » de l’indifférence s’est refermée sur ces destins rendus encore plus invisibles par le confinement de la planète au temps du coronavirus.

      (1) Les prénoms ont été changés.

      https://www.liberation.fr/planete/2020/03/25/en-grece-des-refugies-enfermes-de-force-dans-un-camp-coupe-du-monde_17830

      #coronavirus

      ping @thomas_lacroix

    • Commission approves 130 mln euros for closed migrant centres on three islands

      The European Commission approved on Monday the disbursement of 130 million euros for the construction of the three closed migrant facilities on the Greek islands of #Samos, #Leros and #Kos.

      According to a statement from the Greek Migration Ministry, the European Commission “welcomes the efforts made” by the country to address the migration situation in Greece and “fully recognizes the urgent need for this financial support.”

      The approval came by the EU’s #Asylum_Migration_and_Integration_Fund (#AMIF) following by a positive opinion from the European Commission.

      In june, Migration Minister Notis Mitarakis sought 132.68 million euros from the state budget to press forward with the new reception faciltiies as the request for European Union funding was taking time.

      https://www.ekathimerini.com/255390/article/ekathimerini/news/commission-approves-130-mln-euros-for-closed-migrant-centres-on-three-
      #aide #aide_financière #financement #EU #UE #Union_européenne