• Le Conseil d’Etat juge illégal le recours à la « technique des nasses » par les forces de l’ordre lors des manifestations
    https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2021/06/10/le-conseil-d-etat-juge-illegal-le-recours-a-la-technique-des-nasses-par-les-

    Le Conseil d’Etat a annulé, jeudi 10 juin, quatre dispositions phares du schéma national de maintien de l’ordre sur lequel il avait été saisi par plusieurs syndicats et associations. Parmi elles, la très sensible « technique des nasses », utilisées pour encercler des groupes de manifestants. —« Si cette technique peut s’avérer nécessaire dans certaines circonstances précises, elle est susceptible d’affecter significativement la liberté de manifester et de porter atteinte à la liberté d’aller et venir »—, note le Conseil d’Etat dans son communiqué. « Le Conseil d’Etat annule ce point car rien ne garantit que son utilisation soit adaptée, nécessaire et proportionnée aux circonstances », est-il précisé dans le communiqué.

    [...]
    S’agissant de la presse, l’instance considère que les journalistes « n’ont pas à quitter les lieux lorsqu’un attroupement est dispersé » et qu’ils n’ont pas « l’obligation d’obéir aux ordres de dispersion » des forces de l’ordre. « Les journalistes doivent pouvoir continuer d’exercer librement leur mission d’information, même lors de la dispersion d’un attroupement. »

    (...) Concernant la technique de la « nasse », dite de « l’encerclement », le ministère a estimé que le Conseil ne l’interdisait pas mais demandait « que les conditions d’emploi soient précisées ». « Le gouvernement va s’y employer », affirme le ministère.

    (...) A Beauvau, on a relevé que la juridiction administrative précisait en outre que les journalistes « ne devaient pas faire obstacle aux forces de l’ordre ».

    #police #maintien_de_l'ordre

    • Maintien de l’ordre : le désaveu politique du Conseil d’Etat
      https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2021/06/11/le-conseil-d-etat-annule-quatre-dispositions-du-schema-national-du-maintien-

      Quatre dispositions du schéma national du maintien de l’ordre ont été annulées par la juridiction. Parmi celles-ci, la pratique de la « nasse », qui consiste à encercler les manifestants, a été jugée jeudi illégale car insuffisamment précise.

      C’est un camouflet pour le ministère de l’intérieur. Dans une décision rendue publique, jeudi 10 juin, le Conseil d’Etat a annulé quatre dispositions majeures du schéma national du maintien de l’ordre (SNMO), la « bible » des forces de sécurité en matière de gestion des manifestations. La réflexion autour de cette nouvelle doctrine, lancée en juin 2019 par Christophe Castaner, alors ministre de l’intérieur, avait été parachevée quinze mois plus tard – avec une année de retard sur le calendrier prévu – le 16 septembre 2020, à l’occasion de la publication d’un document de 29 pages.

      Le texte, aux dires des associations, avait été formalisé « sans réelle concertation ni transparence » dans le but de doter police et gendarmerie de règles d’action communes après des mois d’affrontements avec les « gilets jaunes ». Dès sa parution, il avait été critiqué, notamment en raison de la consécration du recours à des services non spécialisés – brigades anticriminalité, brigades de recherche et d’intervention ou de répression de l’action violente – dans les opérations de maintien de l’ordre, ou de la confirmation d’usage des grenades de désencerclement et des lanceurs de balles de défense (LBD) à l’origine de dizaines de mutilations et de blessures graves, essentiellement entre 2018 et 2019.
      Lire aussi Le ministère de l’intérieur dévoile la nouvelle doctrine du maintien de l’ordre

      Défense de la liberté d’informer
      Les plus vives dénonciations, portées par une quarantaine d’associations dont la Ligue des droits de l’homme (LDH), le Syndicat de la magistrature (SM) ou le Syndicat national des journalistes (SNJ), visaient également des pratiques considérées comme gravement attentatoires aux libertés publiques, parmi lesquelles celle de la « nasse », consistant à encercler des protestataires un temps indéfini, et dont l’usage était devenu quasi systématique en cas de manifestation d’ampleur. Si le SNMO validait son recours « utile, sur le temps juste nécessaire (…) aux fins de contrôle, d’interpellation ou de prévention d’une poursuite des troubles », le Conseil d’Etat a purement et simplement annulé cette disposition en considérant qu’elle n’encadrait pas de manière suffisamment précise les cas dans lesquels il était possible de mettre en œuvre cette technique.
      C’est cependant en matière de défense de la liberté d’informer que la juridiction suprême de l’ordre administratif s’est montrée la plus incisive en rappelant son caractère essentiel à la vie démocratique « en ce qu’elle permet de rendre compte des idées et opinions exprimées et du caractère de cette expression collective ainsi que, le cas échéant, de l’intervention des autorités publiques et des forces de l’ordre ». Et en annulant trois mesures emblématiques relatives au travail des journalistes lors des manifestations.

      Le SNMO prévoyait ainsi que le port d’équipements de sécurité par des reporters soit assorti d’éléments d’identification et n’induise aucune « infraction ou provocation ». Cette obligation aux termes « ambigus et imprécis » ne relève pas, a estimé le Conseil d’Etat, de la compétence du ministre de l’intérieur, auquel il n’appartient pas davantage « d’édicter ce type de règles à l’attention des journalistes comme de toute personne participant ou assistant à une manifestation » .

      Idem en matière d’obligation faite aux journalistes de quitter les lieux d’une manifestation après un ordre de dispersion. Balayant cette injonction, le Conseil d’Etat a jugé la mesure entachée d’illégalité. Aussi, pour « rendre compte des événements qui s’y produisent », les journalistes peuvent-ils « continuer d’exercer librement leur mission lors de la dispersion d’un attroupement sans être tenus de quitter les lieux, dès lors qu’ils se placent de telle sorte qu’ils ne puissent être confondus avec les manifestants et ne fassent obstacle à l’action des forces de l’ordre ».

      Enfin, en réservant aux seuls journalistes « accrédités auprès des autorités » un droit d’accès au canal d’informations dédié des forces de l’ordre lors de manifestations, sans autre forme de précision, le SNMO aurait porté « une atteinte disproportionnée à la liberté de la presse et à la liberté de communication ». La disposition a également été annulée.

      Arrêt jugé trop timide

      Pour les associations, une telle décision apparaissait loin d’être acquise. Au cours de la procédure, le rapporteur public, dont les conclusions préfigurent en règle générale la position du Conseil d’Etat, n’avait, en effet, rien trouvé à redire aux dispositions soumises à l’examen du juge administratif suprême, se bornant à requérir l’annulation des conditions imposées au port d’équipements spéciaux par les journalistes. « Le Conseil d’Etat, se félicite Me Patrice Spinosi, qui intervenait au nom du SNJ et la LDH, a clairement mis un coup d’arrêt à la volonté caractérisée du gouvernement de fragiliser l’indépendance de la presse. Un journaliste n’est pas un manifestant, il est là pour informer. Sans lui, il n’y a plus de regard. »

      Plusieurs associations se montrent toutefois déçues par l’arrêt, jugé trop timide. Eric Mirguet, directeur du pôle programme et plaidoyers de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture, une ONG partie à la procédure, déplore ainsi « une décision a minima » . L’interdiction des nasses, notamment, « est basée sur la seule liberté de manifester alors que c’est aussi une pratique dangereuse qui peut porter atteinte à l’intégrité physique des personnes qui y sont soumises, qui est indiscriminée en ce qu’elle s’applique à des individus ciblés sur leur seule présence dans un lieu donné et non des actes qu’on leur reprocherait ».

      Parmi d’autres, l’association, qui a publié en mars 2020 un volumineux rapport d’observation sur les conditions du maintien de l’ordre, fruit d’une année de travail sur le terrain, estime que le Conseil d’Etat « a fait le choix de taire ces préoccupations » . Jeudi dans la soirée, le ministère de l’intérieur a fait savoir que « des modifications seront apportées pour permettre d’atteindre les objectifs voulus par le texte, tout en respectant les orientations de la décision rendue par le Conseil d’Etat », qui a validé « la très grande majorité du texte ».

  • Déconfinement : la mise en garde du conseil scientifique
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/05/10/deconfinement-la-mise-en-garde-du-conseil-scientifique_6079727_3244.html

    On ne lui a pas demandé son « avis » sur le calendrier du déconfinement, mais le conseil scientifique entend bien faire savoir à quel point la stratégie du président de la République lui paraît risquée. Dans un document de 36 pages remis au gouvernement jeudi, l’instance qui conseille l’exécutif dans la gestion de la crise du Covid 19 s’inquiète d’un calendrier décorrélé des données épidémiologiques. Elle plaide pour une réouverture « prudente et maîtrisée » afin d’éviter une « possible quatrième vague » de l’épidémie de Covid-19 dès cet été.

    Le conseil – qui s’est « autosaisi » pour rédiger cet avis, contrairement à d’autres, sollicités par l’exécutif – reconnaît que la réouverture est « souhaitable » car elle « répond à de fortes attentes et donne une perspective à l’ensemble de la société », avec des bénéfices psychologiques, sociaux et économiques « sans doute majeurs ». Mais il s’alarme du « décalage entre les conditions d’ouverture envisagées et le niveau de vaccination de la population qui sera atteint » le 19 mai, date à laquelle les commerces et les terrasses de café rouvriront.

    #on_ne_lui_a_pas_demandé_son_avis

  • #Watizat, #GUIDE d’information pour les personnes exilées

    Nos principes

    COMPLET – Le guide comprend à la fois les #informations juridiques précises sur la procédure d’asile et des #conseils et #adresses_utiles au quotidien (permanences juridiques, distributions de nourriture, accès aux soins, douches, accueils de jour, cours de français, etc.). Il vise ainsi à mettre en relation les personnes exilées avec les acteurs présents sur le territoire et capables de leur venir en aide.

    A JOUR – Le guide est mis à jour tous les mois pour répondre à l’exigence d’une information la plus juste possible dans un contexte où les lois liées à l’asile et le monde associatif sont en constante évolution.
    Le mois de publication est inscrit sur la couverture du guide.
    La couverture change de couleur tous les mois pour identifier rapidement les guides obsolètes qui circuleraient encore.

    MULTILINGUE – Le guide est actuellement disponible en français, anglais, arabe et pachto pour permettre à un maximum de personnes d’avoir un accès effectif à cette information, même s’ils ne maîtrisent pas le français.

    Les différentes sections du guide ont été pensées avec les personnes exilées sur les campements afin de répondre au mieux à leurs besoins.


    https://watizat.org

    #asile #migrations #réfugiés #France

  • La crise sanitaire n’a pas eu lieu 2/2
    https://www.pardem.org/la-crise-sanitaire-na-pas-eu-lieu-22

    https://www.youtube.com/watch?v=KNV19wz3GXg

    Tout est sujet à caution dans le récit officiel et médiatique de la crise « sanitaire ». Les choix du gouvernement d’interdire aux médecins de ville de prescrire et donc de traiter les malades, de tout miser sur de nouvelles molécules plutôt que de chercher un remède parmi les molécules connues, de confiner pour ne pas « saturer » les hôpitaux publics dont les gouvernements successifs ont réduit les capacités d’accueil et de soin depuis des décennies, de favoriser et de pré-acheter des vaccins vis-à-vis desquels la communauté scientifique est très divisée mais qui rapportent gros aux grands groupes pharmaceutiques démontrent le mépris du pouvoir envers le service public et la santé publique.
    Les interdits imposés (confinement, couvre-feu, fermetures administratives, attestations de déplacement, application de traçage « TousAntiCovid ») montrent que le souci du gouvernement Macron et de l’Union européenne n’est pas la santé publique mais bien de museler la population, favoriser l’accroissement des profits des multinationales, la paupérisation des services publics pour mieux les décrédibiliser et les privatiser.

    #covid-19 #coronavirus #santé #santé_publique #france #confinement #bigdata #sante abandon de #soins #hôpital #demondialisation #Sécurité_Sociale #destruction #protection #Démocratie

    • Les différents facteurs démographiques pesant sur la « surmortalité » imputée à la Covid.

      Alors évidemment c’est complexe et nécessite de l’attention mais c’est cependant éclairant. Car ne l’oublions pas le gouvernement fait dire aux chiffres ce qui l’arrange tandis que les éléments de l’Insee et ceux d’autres pays de l’Union européenne ne mettent pas en avant les mêmes causes. Cette vidéo ne conteste pas la réalité du virus mais le discours pseudo scientifique délivré pour conforter les décisions politiques de Macron et les conséquences qu’elles engendrent pour chacun, pour la nation et pour les libertés publiques.

      https://www.youtube.com/watch?v=_ijmxx0Rd-E

      #conseil_scientifique

  • Belgique : "Journalope", "Collabo","On va te pendre" : quand les agressions verbales et les menaces se multiplient pour les journalistes de terrain Barbara Boulet, RTBF, 29 Avril 2021

    C’est un 1er avril qui n’aura pas amusé mon collègue Pierre-Yves. Pierre-Yves Meugens est reporter à Bruxelles. Cet après-midi-là, pour la radio, il part relayer une équipe au bois de la Cambre où s’est organisée une grande "boum" en dépit des mesures sanitaires. https://www.rtbf.be/info/regions/detail_des-milliers-de-personnes-reunies-au-bois-de-la-cambre-une-operation-de-

    Il est à peu près 17h30 quand Pierre-Yves arrive sur place. Entre les projectiles qui volent, les autopompes qui arrosent, et la charge de la cavalerie, il reçoit des jurons. "A 8 ou 9 reprises sur la soirée, des gens qui voyaient le sigle RTBF sur mon micro, me criaient des insultes comme ’Merdia’ ou ’Journalope’, se souvient Pierre-Yves. A un moment, une voiture est passée, un passager m’a crié ’collabo’. Je n’ai pas répondu. Ce n’est qu’à la fin de la soirée, quand un plus jeune, apparemment ivre, criait en boucle ’journalope’ que j’ai fini par réagir, j’en ai eu marre. Je lui ai demandé pourquoi il disait ça et s’il imaginait une démocratie sans journalistes. Je lui ai expliqué que j’étais là notamment pour leur laisser la parole, à lui et aux autres participants. Il m’a dit que de toute façon, j’allais déformer. Je vais le dire franchement : ce soir-là je suis rentré découragé, même si la majorité des gens ont été respectueux et même charmants"

    Un policier conseille de partir
    Dix jours plus tôt, au même endroit, c’est une équipe de l’émission télé Investigation qui se fait malmener, en marge d’une manifestation contre la "dictature sanitaire". "Dégagez ! Vous n’avez rien à faire ici" s’époumone un manifestant, puis "Je ne te cause pas sale pute", à la journaliste qui tente de défendre son droit d’être là. Des participants devront même s’interposer entre un homme particulièrement agressif et l’équipe. Un policier en civil ira jusqu’à conseiller à l’équipe de quitter les lieux pour sa sécurité. Et au moment où les collègues s’éloignent, fusent encore des "Menteurs !" et autres "Bande de collabos". "J’avais le sentiment qu’il ne s’agissait plus d’une simple question de défiance, se souvient aujourd’hui la journaliste Clémence Dath. Mais bien d’une forme de haine » . La RTBF a décidé de déposer une plainte en justice pour ces faits.

    Ces exemples-là se sont multipliés ces dernières semaines. Et pas uniquement sur les lieux de manifestations tendues, d’ailleurs. Ainsi, un de ces dimanches matins, à Liège, mon collègue technicien radio Renaud Huvelle pousse la porte d’une rôtisserie du quartier des Guillemins à Liège. Le suit un homme d’une quarantaine d’années très énervé, qui se met à l’insulter et à le traiter d’assassin. Renaud n’était pas de service ce week-end-là, mais il portait un masque siglé RTBF. "L’homme était difficile à interrompre, se souvient Renaud. Il semblait vouloir en venir aux mains. J’ai essayé de calmer la situation en minimisant mon rôle à la RTBF. La serveuse a essayé d’appeler la police. Il est finalement parti au bout de 10 minutes".

    Voitures banalisées, matériel moins siglé
    Avec la crise sanitaire et les mesures adoptées par le gouvernement, sans généraliser pour autant, les situations de tensions se sont multipliées pour les équipes de terrain. Au point qu’aujourd’hui, il leur arrive de mettre en place des stratégies – improvisées ou non- pour les éviter. Par exemple, le week-end dernier, les collègues télé qui ont couvert les événements de Droixhe se sont consciencieusement abstenus de rester statiques et visibles pendant les minutes qui ont précédé l’intervention en direct. "Il y a quelques années, ces réflexes n’existaient pas", commente Anne Poncelet qui coordonne la couverture de l’actualité liégeoise à la RTBF. "Récemment, j’ai même retiré la garde de week-end d’une journaliste enceinte car j’avais peur qu’elle soit confrontée à de pareilles tensions".

    Des équipes de deux personnes au moins
    Cela fait aussi un moment que la RTBF anonymise davantage les reporters : matériel moins siglé et dans certains cas, même, des voitures banalisées. A la rédaction, où des cas sont "surtout remontés depuis la fin de l’année dernière", le problème est d’ailleurs pris au sérieux par la direction de l’information, qui l’inscrit systématiquement à l’ordre du jour de ses comités éditoriaux pour faire le point avec les chefs d’équipe, rappeler les consignes de sécurité ou annoncer de nouvelles mesures. La RTBF essaie de ne plus envoyer de journalistes ou cadreurs seuls sur les manifestations, par exemple.

    "Nous avons une double crainte, commente le directeur de l’Information Jean-Pierre Jacqmin. D’abord, bien sûr, qu’un membre de l’équipe se fasse agresser. Ensuite, il y a le risque de perdre le contrôle éditorial". C’est le cas où une équipe ne peut plus maîtriser son intervention en direct.

    Ce qui s’est passé avec l’équipe d’investigation (à qui un policier a conseillé de quitter la manifestation) pose aussi sérieusement question : la presse finira-t-elle par déserter certains lieux d’actualités pour raison de sécurité ? Des journalistes vont-ils finir par craindre d’aller sur le terrain ?

    Jean-Pierre est en contact régulier avec les directions des autres rédactions francophones pour échanger sur le problème et envisager des solutions. Parce qu’il faut bien dire que le phénomène n’est pas propre à la RTBF et à sa particularité d’être un média de service public.

    Une tendance de fond
    Le journaliste du JT d’RTL Loïc Parmentier nous raconte avoir lui aussi été malmené avec son collègue caméraman dans une petite artère à l’orée du bois de la Cambre. C’était le 2 avril dernier, vers 22h30, à l’issue de ce qu’on pourrait appeler "l’after de la boum". Ils sont pris à partie par une dizaine d’hommes agressifs qui vocifèrent "bande de collabos. On va vous tondre, on va vous pendre". Et qui les accusent d’être "à la solde" tantôt "du gouvernement", tantôt " du capital ". L’un d’eux faisait mine de vouloir donner des "coups de boule". "Impossible de discuter" , se souvient Loïc, qui estime que le problème est devenu récurrent.

    C’est précisément aussi l’avis de l’Association des journalistes professionnels, l’Ajp. La secrétaire générale Martine Simonis ne cache d’ailleurs pas son inquiétude : "On doit faire le constat d’un climat hostile, de menaces. Avant, on avait des événements sporadiques lors de manifs qui tournent mal. Des cas isolés. On a aujourd’hui beaucoup plus un mouvement de fond qui vise les journalistes. Donc avec des groupes qui pensent qu’il faut agresser des journalistes. Que les journalistes sont leurs ennemis. Ces groupes sont très minoritaires mais très actifs et très visibles dans l’espace public". Aucun média ne serait d’ailleurs épargné. Même si l’audiovisuel et les photographes de presse écrite sont sans doute plus exposés, en raison de leur plus grande visibilité.

    Journalistes perçus comme symboles de l’autorité
    La secrétaire générale explique que ce public-là perçoit les journalistes comme des symboles de l’autorité, ce qu’ils ne sont pas : "Pour toutes ces personnes en opposition – et c’est tout à fait leur droit de l’être- les journalistes sont les seuls qu’ils peuvent atteindre pour se défouler. Les politiques, ils ne les atteignent pas. Les représentants de l’ordre, ils préfèrent ne pas s’y frotter. Ils assimilent les journalistes au pouvoir… Ce qui est une vraie erreur d’analyse".

    Comme journalistes, nous ne sommes pas les porte-parole des autorités, même s’il faut admettre que la crise sanitaire en particulier a montré la difficulté de trouver au quotidien la juste distance, le recul critique nécessaire.

    Photographe grièvement blessé à Reims
    Si ce climat hostile a atteint la Belgique aujourd’hui, il a aussi sérieusement progressé partout en Europe. Avec de récentes dérives graves : fin février, un photographe de L’Union, à Reims en France, a été grièvement blessé, après une agression par un groupe de 13 personnes, à proximité de la voiture qui portait le logo du journal. "Ce sont des attaques qu’on voyait avant dans des pays compliqués pour la liberté de la presse comme le Mexique ou certains pays de l’Est. Et tout à coup, on voit que les attaques physiques se passent aussi ici".

    La situation s’aggrave en Europe
    Heureusement, toutes les agressions sont loin d’être aussi graves. Mais quand même. D’après la plateforme du conseil de l’Europe pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes, l’an dernier, en Europe, 70 alertes ont été recensées pour des cas (sérieux) de harcèlement et d’intimidations (dont 4 pour la Belgique). 52 pour des faits de violences physiques (aucune en Belgique). A titre de comparaison, en 2019, il n’y en avait "que" respectivement 43 et 33. Plus préoccupant encore : pour ce début d’année 2021, il y a déjà eu 29 alertes pour violences physiques, c’est presque autant que pour toute l’année 2019.

    La méthode trumpienne favorise les agressions
    "En Europe, on observe deux tendances nouvelles, analyse Ricardo Gutiérrez, secrétaire général de la Fédération européenne des journalistes (FEJ). Des agressions physiques, souvent dans le cadre de couvertures de manifs. Il y a eu des cas en France, en Grèce, en Italie, en Pologne, en Russie, en Espagne, en Turquie, au Royaume-uni et en Serbie. Et puis on a des attaques verbales qui émanent de politiciens de haut rang, parfois même de premiers ministres. Même au Royaume Uni, une ministre s’en est prise à une journaliste. C’est la méthode trumpienne, faire passer les journalistes pour les ennemis du peuple. Les discréditer en les critiquant verbalement. Le problème est que ces critiques verbales quand elles émanent de l’autorité publique, incitent au passage à l’acte. Quelqu’un d’un peu énervé dans une manif tapera plus vite sur un journaliste quand le Premier ministre du pays aura verbalement agressé les médias".

    Inertie des États
    Le secrétaire général de la Fédération européenne des journalistes pointe aussi l’inertie des États en la matière : "La liberté de la presse est un droit qui exige des États qu’ils prennent des mesures pour que ce droit s’exerce pleinement. Mais ils ne le font pas. Ils ont presque tous (sauf la Russie) voté une recommandation en 2016, mais à part la Suède et les Pays-Bas [où la situation a pris des proportions énormes, voir encadré ci-dessous], personne n’a pris d’initiatives ni de mesures concrètes depuis lors. C’est ça qui est grave : les États se donnent une image de protecteur de liberté de la presse mais ils ne prennent pas de mesures concrètes". Dans le rapport d’évaluation du Conseil de l’Europe, pas de trace de la Belgique : "Elle n’y est pas du tout citée car elle n’a rien fait" , regrette Ricardo Gutiérrez.

    La suite : https://www.rtbf.be/info/inside/detail_journalope-collabo-on-va-te-pendre-quand-les-agressions-verbales-et-les-

    #journalisme #médias #censure #presse #_journaliste #fait_divers #politique #conseil_de_l_europe #presse #propagandistes

  • #Enfermement illégal à la frontière franco-italienne : le #Conseil_d’Etat s’en lave les mains

    Dans une décision du 23 avril 2021, le Conseil d’Etat refuse d’ordonner la fermeture des locaux de « #mise_à_l’abri » des postes de la #police_aux_frontières (#PAF) de #Menton (#Alpes-Maritimes) et de #Montgenèvre (#Hautes-Alpes) où sont enfermées sans cadre légal et sans droits les personnes étrangères à qui l’entrée sur le territoire français est refusée.

    Reconnaissant que des personnes sont enfermées dans des locaux « qui ne sont prévus dans aucun texte », et pour une dizaine d’heures, le juge des référés du Conseil d’Etat valide pourtant ces pratiques de #privation_de_liberté dépourvues de tout fondement légal et dénoncées depuis plus de 5 ans par nos associations et les instances de protection des droits humains.

    S’il admet le « grand inconfort » lié au maintien dans ces locaux, le juge se satisfait des quelques récents efforts que les autorités françaises prétendent avoir accomplis, en réaction à notre initiative contentieuse, tels que la fourniture d’une « #saladette » en guise de repas (jusqu’alors les personnes devaient se contenter de madeleines…). Quant au respect des #droits des personnes (notamment le droit d’être informé, d’être assisté d’un interprète, de demander l’asile, de contacter un médecin, un proche, un conseil ou encore un avocat), le juge se contente de rappeler aux autorités « l’obligation du respect des droits » et la « grande vigilance » à apporter à « des situations particulières » sans autre précision et sans prononcer aucune injonction. Vœux pieux qui resteront sans doute lettre morte, maintenant ces pratiques dans la plus totale opacité.

    Pourtant, la situation n’est pas celle d’un « grand inconfort » mais bien d’un manque total de #respect de la #dignité : enfermement de plusieurs dizaines de personnes dans des locaux exigus parmi lesquelles des hommes, des femmes, des familles, des femmes enceintes, des enfants en bas âge, des mineurs isolés, des personnes malades, des demandeurs d’asile, etc., privation de liberté pendant plus de 10 heures sans aucun droit y compris celui de demander l’asile ou d’avoir accès à un médecin, impossibilité d’assurer la sécurité sanitaire de ces personnes, traumatisme d’un enfant hospitalisé en état de choc post-traumatique suite à cet enfermement, etc.

    Cette décision témoigne une fois de plus de l’indifférence du Conseil d’Etat quand il s’agit de condamner les violations des droits des personnes exilées. Mais nos associations continueront la lutte pour mettre fin à ce scandale et garantir un Etat où les droits de toutes et de tous seront effectivement respectés.

    communiqué de presse reçu via la mailing-list Migreurop, le 28.04.2021

    #justice (sic) #montagne #frontière_sud-alpine #Alpes #frontières #asile #migrations #réfugiés #France #Italie

  • Lettre commune d’organisations françaises contre le règlement de censure terroriste
    https://www.laquadrature.net/2021/04/22/lettre-commune-dorganisations-francaises-contre-le-reglement-de-censur

    Après la lettre commune européenne, nous signons, avec 11 associations et organisations françaises, une lettre adressée aux parlementaires français de l’Union européenne pour leur demander de rejeter le règlement de censure terroriste sur lequel ils sont appelés à voter le 28 avril prochain. Nous y soulignons non seulement les dangers de ce texte pour nos libertés mais surtout la contradiction directe entre la proposition de règlement européen et la décision du Conseil constitutionnel qui a censuré en (...)

    #anti-terrorisme #censure #législation #ConseilConstitutionnel-FR #LaQuadratureduNet

  • Données de connexion : la France contourne la justice européenne
    https://www.mediapart.fr/journal/france/220421/donnees-de-connexion-la-france-contourne-la-justice-europeenne

    Le Conseil d’État était appelé à se prononcer sur l’application d’une jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne ayant jugé illégale l’obligation de conservation généralisée imposée aux opérateurs. Tout en reconnaissant ces décisions, il en écarte leur application en raison de la « menace » pesant actuellement sur la sécurité nationale.

    C’est une véritable acrobatie juridique à laquelle s’est livré le Conseil d’État dans sa décision, rendue mercredi 21 avril, relative à l’obligation de conservation généralisée des données de connexion imposée en France aux acteurs du numérique.

    Saisie par un collectif d’associations qui demandaient son annulation, la plus haute juridiction administrative était confrontée à un dilemme en apparence insoluble. D’un côté, une jurisprudence constante au niveau européen, encore rappelée au mois d’octobre dernier dans un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), a déjà jugé cette obligation contraire aux textes européens protégeant la vie privée. Mais, ce faisant, ce sont des dizaines de milliers de procédures pénales utilisant des données de connexion ou de géolocalisation qui risqueraient de tomber dans l’illégalité.

    Comme le rappelle le Conseil, ces données sont en effet particulièrement nombreuses et utilisées massivement par les services de renseignement, la police et certaines autorités administratives.

    Il les classe ainsi en trois catégories : « Les données d’identité, qui permettent d’identifier l’utilisateur d’un moyen de communication électronique (par exemple les nom et prénom liés à un numéro de téléphone ou l’adresse IP par laquelle un utilisateur se connecte à Internet) ; les données relatives au trafic, parfois appelées “fadettes”, qui tracent les dates, heures et destinataires des communications électroniques, ou la liste des sites internet consultés ; les données de localisation, qui résultent du “bornage” d’un appareil par l’antenne-relais à laquelle il s’est connecté. »

    Face à la perspective de chaos juridique que représenterait l’annulation du droit d’accès à ces données, le Conseil d’État était pressé, de l’autre côté, par le gouvernement de tout simplement écarter l’application de la jurisprudence européenne, au mépris de la Constitution et au risque d’une guerre juridique ouverte entre les juges français et européens.

    Grâce à une pirouette juridique particulièrement technique, détaillée dans un arrêt de 39 pages, les magistrats du Palais-Royal ont finalement réussi à trouver une voie médiane. Mais celle-ci les conduit à faire le grand écart en acceptant la jurisprudence de la CJUE, tout en neutralisant son application en France par un raisonnement juridique inédit.

    La position de la CJUE sur la question de la conservation et de l’accès aux données de connexion est pourtant bien connue, et affirmée par une série de décisions sans ambiguïtés. La décision fondatrice de cette jurisprudence, l’arrêt « Digital Rights Ireland », a été rendue dès 2014. Celle-ci avait invalidé une directive européenne visant à harmoniser les législations nationales en matière de collecte et d’utilisation des données de connexion.

    Dans l’arrêt « Digital Rights Ireland », la cour estimait que l’obligation de conservation indiscriminée faite aux opérateurs constituait « une ingérence » dans les droits fondamentaux « d’une vaste ampleur et d’une gravité particulière dans l’ordre juridique de l’Union, sans qu’une telle ingérence soit précisément encadrée par des dispositions permettant de garantir qu’elle est effectivement limitée au strict nécessaire ».

    Deux ans plus tard, l’arrêt « Tele2 » du 21 décembre 2016 avait jugé contraire à la législation européenne toute « réglementation nationale prévoyant, à des fins de lutte contre la criminalité, une conservation généralisée et indifférenciée de l’ensemble des données relatives au trafic et aux données de localisation de tous les abonnés et les utilisateurs inscrits concernant tous les moyens de communication ».

    Parallèlement, en France, un collectif d’associations, regroupant notamment La Quadrature du Net et l’hébergeur associatif French Data Network (FDN), avait saisi le Conseil d’État pour demander l’annulation de plusieurs décrets imposant une obligation de conservation, notamment ceux pris en application de la loi renseignement de juillet 2015.

    En juillet 2018, le juge administratif avait finalement décidé de demander, avant de se prononcer, l’avis de la CJUE, à laquelle il avait envoyé une série de questions préjudicielles.

    Ses réponses sont tombées le 6 octobre 2020. Sans surprise, ce nouvel arrêt « La Quadrature du Net » a confirmé la jurisprudence de la CJUE. Si elle reconnaît le droit aux États d’exiger un accès aux données de connexion détenues par les opérateurs et fournisseurs d’accès, notamment en cas de « menace pour la sécurité nationale », l’obligation de conservation doit « être temporellement limitée au strict nécessaire ». « Cette conservation ne saurait présenter un caractère systématique », réaffirmait l’arrêt.

    Enfin, le 2 mars dernier, la CJUE rendait un nouvel arrêt concernant cette fois plus spécifiquement l’utilisation des données de connexion dans le cadre d’une procédure pénale.

    Dans cette nouvelle décision, les juges européens ont jugé illégal tout accès « à des fins pénales » à ces données en dehors « des procédures visant à la lutte contre la criminalité grave ou à la prévention de menaces graves contre la sécurité publique ». En pratique, cela voudrait dire que les services de police et de gendarmerie n’ont désormais plus le droit d’accéder aux données stockées par les opérateurs dans le cadre d’une bonne partie de leurs enquêtes ne portant pas sur des infractions assez graves.

    La décision rendue mercredi 21 avril concerne le recours déposé par La Quadrature du Net et FDN. Acculé par la réponse aux questions préjudicielles du 6 octobre 2020 et par le nouvel arrêt du 2 mars, le gouvernement a tenté ces dernières semaines de convaincre le Conseil d’État d’opter pour une solution radicale : tout simplement refuser d’appliquer la jurisprudence de la CJUE.

    Selon le site d’information Contexte, l’exécutif a dans ce but transmis au Conseil un mémoire affirmant que la conservation généralisée des données de connexion est « indispensable » pour que l’État puisse remplir certains objectifs « constitutionnels », comme la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la nation, la recherche d’auteurs d’infractions et leur prévention, et la lutte contre le terrorisme. Le gouvernement, pointe Contexte, affirme que les données de connexion sont utilisées dans plus de 85 % des enquêtes. Autant de procédures qui seraient menacées en cas d’application de la jurisprudence de la CJUE.

    Dans son arrêt, le Conseil d’État écarte clairement la solution proposée par le gouvernement et qui aurait conduit à un conflit ouvert entre juges français et européens.

    « Contrairement à ce que soutient le premier ministre, il n’appartient pas au juge administratif de s’assurer du respect, par le droit dérivé de l’Union européenne ou par la Cour de justice elle-même, de la répartition des compétences entre l’Union européenne et les États membres, affirme l’arrêt. Il ne saurait ainsi exercer un contrôle sur la conformité au droit de l’Union des décisions de la Cour de justice et, notamment, priver de telles décisions de la force obligatoire dont elles sont revêtues. »

    Une définition « monstrueuse » de la sécurité nationale

    En conséquence, l’arrêt ordonne bien au gouvernement d’abroger « dans un délai de six mois » deux textes imposant aux opérateurs de communications électroniques la conservation des données de connexion pendant un an : l’article R. 10-13 du code de la propriété intellectuelle « pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales » et un décret du 25 février 2011 pour pouvoir identifier les auteurs de contenus illicites.

    Mais, dans le même temps, « le Conseil d’État rappelle que la Constitution française demeure la norme suprême du droit national. En conséquence, il lui revient de vérifier que l’application du droit européen, tel que précisé par la CJUE, ne compromet pas en pratique des exigences constitutionnelles qui ne sont pas garanties de façon équivalente par le droit européen », explique le communiqué de la juridiction. Et, parmi ces « exigences constitutionnelles », figurent celles « relatives à la sécurité nationale et à la lutte contre la criminalité ».

    Or, affirme l’arrêt, « à la date de la présente décision, l’état des menaces pesant sur la sécurité nationale […] justifie légalement que soit imposée aux opérateurs la conservation générale et indifférenciée des données de connexion ».

    Cette menace « procède d’abord de la persistance d’un risque terroriste élevé ». « Par ailleurs, poursuit l’arrêt, la France est particulièrement exposée au risque d’espionnage et d’ingérence étrangère, en raison notamment de ses capacités et de ses engagements militaires et de son potentiel technologique et économique. » Enfin, « la France est également confrontée à des menaces graves pour la paix publique, liées à une augmentation de l’activité de groupes radicaux et extrémistes ».

    Ce faisant, le Conseil d’État innove donc en reconnaissant l’existence d’un état d’exception, détaché de l’état d’urgence, qui permettrait de déroger au droit commun. « En revanche », pointe le Conseil d’État, cette solution va imposer « au gouvernement de réévaluer régulièrement la menace qui pèse sur le territoire ». Ainsi, un décret devrait être régulièrement pris afin de « justifier la conservation généralisée des données et de subordonner l’exploitation de ces données par les services de renseignement à l’autorisation d’une autorité indépendante ».

    Cette première étape du raisonnement du Conseil d’État permet de justifier la conservation généralisée des données de connexion et leur exploitation par les services de renseignement. Reste la question de leur exploitation dans le cadre d’enquêtes pénales qui, elle, reste en théorie illégale.

    Pour contourner ce problème, le juge administratif estime que la solution proposée par la CJUE, consistant en une conservation ciblée des données et limitée aux crimes graves, est, en toute logique, impossible à mettre en place. « En effet, pointe son communiqué, il n’est pas possible de prédéterminer les personnes qui seront impliquées dans une infraction pénale qui n’a pas encore été commise ou le lieu où elle sera commise. »

    Par contre, souligne le Conseil, la CJUE a également autorisé l’utilisation, dans le cadre d’une enquête pénale portant sur la criminalité grave, de la pratique dite de « conservation rapide » des données consistant à « demander aux opérateurs de geler les données de trafic et de localisation relatives à une personne, pour les besoins d’une enquête pénale, sur une courte période ».

    Et cette autorisation vaut « lorsque cette conservation rapide porte sur des données initialement conservées aux fins de sauvegarde de la sécurité nationale », poursuit l’arrêt. « Ainsi, l’autorité judiciaire est en mesure d’accéder aux données nécessaires à la poursuite et à la recherche des auteurs d’infractions pénales dont la gravité le justifie. Le même principe s’applique nécessairement aux autorités administratives indépendantes disposant d’un droit d’accès aux données de connexion », conclut le Conseil d’État.

    Ainsi, si la conservation indiscriminée des données de connexion est bien en théorie interdite, conformément à la jurisprudence de la CJUE, elle reste imposée aux opérateurs au motif de la menace actuelle pesant sur la sécurité nationale afin que puissent y accéder les services de renseignement. Et elles pourront toujours être utilisées dans les enquêtes pénales au titre de la « conservation rapide ». Le juge devra toutefois vérifier le respect du « principe de proportionnalité entre gravité de l’infraction et importance des mesures d’enquête mises en œuvre, qui gouverne la procédure pénale ».

    Concernant l’accès des services de renseignement aux données de connexion, l’arrêt impose cependant une limite en apparence importante. Les avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), saisie des demandes d’accès, qui n’étaient jusqu’à présent que consultatifs, devront désormais être « conformes », c’est-à-dire qu’ils s’imposeront au gouvernement. Cependant, le premier ministre pourra contourner cette obligation en « cas d’urgence dûment justifiée ».

    Une construction juridique qui a provoqué la colère des associations requérantes. « Le Conseil d’État a réinterprété la notion de “sécurité nationale” pour l’étendre très largement au-delà de la lutte contre le terrorisme et y inclure par exemple l’espionnage économique, le trafic de stupéfiants ou l’organisation de manifestations non déclarées, dénonce ainsi dans un communiqué La Quadrature du Net. Ainsi, il peut conclure que la sécurité nationale est systématiquement menacée, justifiant le contournement permanent des garanties protégeant les libertés fondamentales, et ce même en dehors des périodes officielles d’état d’urgence, soumises à un contrôle démocratique (aussi théorique soit-il). »

    « Cette décision traduit le blanc-seing donné par le Conseil d’État au gouvernement et aux services de renseignement, poursuit le communiqué. Reléguant le droit à la vie privée, à la sûreté ou à la liberté d’expression à une pure déclaration de principe dénuée d’effectivité, le Conseil d’État confère à la sacro-sainte sécurité nationale une définition si monstrueuse qu’elle lui permet d’annihiler le reste des droits fondamentaux. Aujourd’hui, il a durablement inscrit dans le droit français le renversement de principe en matière de surveillance : tout le monde est suspect, de tout. »

    #données #surveillance #CJUE #Conseild'État-FR #FrenchDataNetwork-FDN #LaQuadratureduNet

    • le Conseil d’État innove en reconnaissant l’existence d’un état d’exception, détaché de l’état d’urgence, qui permettrait de déroger au droit commun.

      « Le Conseil d’État a réinterprété la notion de “sécurité nationale” pour l’étendre très largement au-delà de la lutte contre le terrorisme et y inclure par exemple l’espionnage économique, le trafic de stupéfiants ou l’organisation de manifestations non déclarées, dénonce ainsi dans un communiqué La Quadrature du Net. [...] Aujourd’hui, il a durablement inscrit dans le droit français le renversement de principe en matière de surveillance : tout le monde est suspect, de tout. »

  • La Quadrature du Net : Le Conseil d’État valide durablement la surveillance de masse
    https://www.laquadrature.net/2021/04/21/le-conseil-detat-valide-durablement-la-surveillance-de-masse

    Le Conseil d’État vient de rendre une décision qui restera une tache indélébile sur la plus haute juridiction administrative et sur la France. Au mépris le plus total du droit européen, il a refusé d’appliquer l’arrêt de la Cour de justice de l’UE (CJUE) qui, en octobre 2020, estimait que tant le droit français du renseignement que l’obligation de conservation généralisée et indifférenciée de l’ensemble des données de connexion (IP, localisation, etc.) étaient contraires aux droits fondamentaux. Ce faisant, le Conseil d’État isole la France dans son Frexit sécuritaire et libère les renseignements français des principes de l’État de droit.

    En apparence, la décision d’aujourd’hui conduit à l’annulation ou à l’abrogation de certains des décrets attaqués par La Quadrature du Net, FDN, la FFDN et Igwan.net, qui organisent une obligation de conserver de manière généralisée et indifférenciée les données de connexion (ce qui entoure une communication, comme la liste des numéros de téléphone appelés, les adresses IP, la géolocalisation, etc.). Mais cette illusion est aussitôt dissipée par le Conseil d’État qui prescrit lui-même les correctifs superficiels qui permettront au gouvernement de maintenir sa surveillance de masse. À côté de cette fausse concession, il rejette purement et simplement le reste de nos arguments contre les services de renseignement.

    Le Conseil d’État autorise la conservation généralisée des données de connexion en dehors des situations exceptionnelles d’état d’urgence sécuritaire, contrairement à ce qu’exigeait la Cour de justice de l’UE dans sa décision du 6 octobre 2020 contre la France. Pour arriver à une conclusion aussi brutale, le Conseil d’État a réinterprété la notion de « sécurité nationale » pour l’étendre très largement au-delà de la lutte contre le terrorisme et y inclure par exemple l’espionnage économique, le trafic de stupéfiant ou l’organisation de manifestations non-déclarées. Ainsi, il peut conclure que la sécurité nationale est systématiquement menacée, justifiant le contournement permanent des garanties protégeant les libertés fondamentales et ce même en dehors des périodes officielles d’état d’urgence, soumises à un contrôle démocratique (aussi théorique soit-il).

    De même, le Conseil d’État permet la communication des données de connexion à la police pour n’importe laquelle des finalités comprises dans cette notion délirante de « sécurité nationale », alors que la CJUE exige que cette mesure de surveillance soit limitée à la seule lutte contre la criminalité grave...

  • Paris pousse le Conseil d’Etat à défier la justice européenne sur les données de connexion
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/04/08/paris-pousse-le-conseil-d-etat-a-defier-la-justice-europeenne-sur-les-donnee

    Jusqu’où un Etat peut-il surveiller sa population au nom de la sécurité ? Cette question posée au Conseil d’Etat fait trembler les ministères de l’intérieur, de la justice et des armées depuis l’arrêt rendu le 6 octobre 2020 par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur le suivi de la trace des communications numériques de l’ensemble de la population.

    L’enjeu est de savoir si la France peut légitimement demander aux fournisseurs de services de communications électroniques de conserver de manière généralisée et indifférenciée pendant un an les données de toutes nos communications personnelles ou professionnelles : numéro de téléphone appelé ou appelant, date, heure et durée de la communication, géolocalisation, identification du matériel utilisé, nom et adresse de l’utilisateur du matériel, adresse IP utilisée pour les services Internet, etc. De quoi permettre aux services de renseignement, à la justice et à la police de puiser, sous conditions, dans cette masse d’informations au gré de leurs besoins préventifs ou probatoires. Il s’agit aussi bien de pouvoir surveiller une personne soupçonnée d’amitiés terroristes que de vérifier a posteriori la présence d’une autre sur le lieu d’un cambriolage.

    Logiquement le Conseil d’Etat est censé se conformer au cadre très restrictif fixé par la CJUE, puisque le droit des traités de l’UE s’impose en tant que norme supérieure. Mais, « cette perspective inquiète le gouvernement », reconnaît-on à Matignon. Dans le mémoire déposé au nom du premier ministre Jean Castex devant les juges du Palais-Royal, que Le Monde a pu consulter, Claire Landais, secrétaire générale du gouvernement, souligne que cet arrêt fait « peser des risques majeurs sur l’ensemble des capacités opérationnelles des services de renseignement et des services d’enquête judiciaire ».

    Aller au clash

    Adoptant une position politique très offensive et une analyse juridique inédite, le gouvernement français demande tout bonnement au Conseil d’Etat d’aller au clash sur ce sujet avec les institutions européennes. Pour arbitrer ce dossier ultrasensible, la juridiction administrative suprême a décidé de réunir sa formation la plus solennelle, l’assemblée du contentieux, le 16 avril.

    Pour les juges européens, le stockage généralisé des données de connexion et de localisation est bel et bien contraire à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

    Déjà en 2016, dans un arrêt dit « Tele2 », la CJUE avait, au nom du droit à la vie privée, interdit aux Etats d’imposer aux opérateurs une « conservation généralisée et indifférenciée des données ». Saisi par un groupe d’associations de défense des libertés sur Internet emmené par la Quadrature du Net, le Conseil d’Etat a décidé en 2018 de ne pas faire une application de cet arrêt, jugeant qu’il ne répondait pas à tous les cas de figure. Il a préféré, avant de trancher sur le fond, adresser cinq questions préjudicielles à la Cour de Luxembourg sur les marges d’interprétation du droit européen susceptibles de permettre ces intrusions dans la vie privée au nom de la sécurité nationale ou de l’ordre public.

    L’arrêt du 6 octobre 2020 est la réponse extrêmement détaillée à ces questions, également soulevées par la Cour constitutionnelle belge. Pour les juges européens, le stockage généralisé des données de connexion et de localisation est bel et bien contraire à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à la directive « ePrivacy » de 2002 sur la protection de la vie privée sur Internet.

    « Les utilisateurs des moyens de communications électroniques sont en droit de s’attendre, en principe, à ce que leurs communications et les données y afférentes restent, en l’absence de leur consentement, anonymes et ne puissent pas faire l’objet d’un enregistrement », dit la CJUE.

    Elle reconnaît toutefois aux Etats le droit d’introduire des exceptions à ce principe dès lors que cela « constitue une mesure nécessaire, appropriée et proportionnée (…) pour sauvegarder la sécurité nationale, la défense et la sécurité publique, ou assurer la prévention, la recherche, la détection et la poursuite d’infractions pénales ». En répétant que rien ne peut justifier que ces dérogations deviennent la règle.
    Le filet français

    Dans le détail, la Cour européenne autorise le stockage général et indifférencié de données au nom de la « sauvegarde de la sécurité nationale » si l’existence de « circonstances suffisamment concrètes permettant de considérer que l’Etat membre concerné fait face à une menace grave, (…) réelle et actuelle ou prévisible ». De plus, la mesure ne peut être ordonnée que pour « une période limitée ». On est loin du filet français qui attrape tout, tout le temps, au cas où…

    En matière de lutte contre la criminalité et de sauvegarde de la sécurité publique, les conditions sont encore plus restrictives. La collecte de données ne peut être décidée qu’à l’encontre de personnes « préalablement identifiées (…) sur la base d’éléments objectifs comme présentant une menace pour la sécurité publique », ou dans une zone géographique donnée face à « une situation caractérisée par un risque élevé de préparation ou de commission d’actes de criminalité grave ». En revanche, sur la conservation des identifiants d’adresses IP ou sur l’analyse des données de connexions en temps réel, les juges de Luxembourg se montrent plus ouverts.

    Les juges français sont liés par cette demande d’interprétation qu’ils ont adressée au juge européen. Mais le gouvernement leur demande de juger nul et non avenu l’arrêt de Luxembourg. Au motif que la Cour de justice de l’UE aurait outrepassé ses compétences, puisque la sécurité nationale reste de la compétence de chaque Etat.

    Mme Landais écrit que « l’exigence constitutionnelle de sauvegarde des intérêts fondamentaux de la nation, l’objectif à valeur constitutionnelle de recherches des auteurs d’infraction pénale et l’objectif de lutte contre le terrorisme, composante de l’objectif à valeur constitutionnelle de protection de l’ordre public (…), impliquent nécessairement cette conservation » des données. Priver la France du droit de conserver ces données porterait atteinte au « fondement de notre ordre constitutionnel ».
    Exploitation devenue banale

    Selon nos informations, Jean-François Ricard, le procureur national antiterroriste, et Rémy Heitz, le procureur de Paris, sont allés le 22 mars plaider leur cause aux côtés des responsables des services de renseignement intérieur et extérieur lors d’une audience d’instruction orale non publique au Conseil d’Etat. Bertrand Dacosta, président de la formation de jugement, cherchait notamment à mesurer concrètement ce qu’il se passerait s’il faisait sienne la position de la CJUE. Une catastrophe, lui ont répondu ses interlocuteurs…

    L’exploitation des données de connexion est devenue banale au point d’être utilisée dans plus de 85 % des enquêtes judiciaires. Le nombre de réquisitions adressées par l’autorité judiciaire aux opérateurs progresse régulièrement de 1,8 million en 2017 à 2,5 millions en 2020. Dans le même temps, les demandes des services de renseignement sont passées de 61 000 à 72 000.

    Paris est donc prêt à donner un coup de canif dans le respect de l’ordre juridique européen, quitte à risquer une procédure pour manquement de la part de la Commission européenne. Une position politique osée à l’heure où Bruxelles cherche à ramener dans le chemin du droit européen des Etats comme la Hongrie.
    Bras de fer juridique

    Au sein du gouvernement, on nourrit l’espoir d’une réaction politique coordonnée de nature à faire évoluer le droit européen sur la conservation des données alors que le bras de fer juridique sur ce sujet dure depuis maintenant près d’une décennie. La position de la Cour constitutionnelle belge, qui devrait être connue à peu près au même moment que la décision du Conseil d’Etat, sera surveillée de près.

    « Dès lors qu’une telle surveillance n’a pas sa place dans le monde matériel, pourquoi serait-elle plus acceptable dans le monde immatériel ? », dénonce Alexis Fitzjean O Cobhthaigh, l’avocat de la Quadrature du Net

    Du côté de la Quadrature du Net, on demande en revanche d’appliquer le droit européen construit pour protéger la liberté et la démocratie. « Ce n’est pas parce que les services de police se sont accoutumés depuis vingt ans à puiser dans ces données que cela légitime la surveillance de masse », explique Me Noémie Levain, avocate bénévole au sein de l’association.

    Pour illustrer ce qui est en jeu, Alexis Fitzjean O Cobhthaigh, l’avocat de la Quadrature du Net, s’amuse à transposer la conservation généralisée des données de connexion avant l’apparition du téléphone mobile et d’Internet. Selon lui, cela se serait traduit par « un suivi à la trace de l’ensemble de la population, une surveillance de l’ensemble des correspondances écrites, l’établissement d’un registre recensant l’ensemble des courriers et colis échangés, leurs expéditeurs, leurs destinataires, leur poids, leur forme, leur fréquence, etc. Une telle surveillance est l’apanage des régimes autoritaires et n’a pas sa place dans un Etat de droit. Dès lors qu’une telle surveillance n’a pas sa place dans le monde matériel, pourquoi serait-elle plus acceptable dans le monde immatériel ? »

    Une chose est sûre, l’arrêt d’assemblée du Conseil d’Etat devrait provoquer un séisme. Soit au détriment des services d’enquête judiciaire, soit au détriment du respect du droit européen.

    #écoutes #surveillance #CJUE #LaQuadratureduNet #Conseild'État-FR

  • Macron roi

    Alors que le #Parlement est en ce jour transformé en une chambre d’enregistrement des désirs du Roi, il importe de revenir sur le bilan d’une année de gouvernement-covid. Est-ce la pandémie qui est hors de contrôle, ou bien notre président ? Les deux certainement.

    « Le président a acquis une vraie #expertise sur les sujets sanitaires. Ce n’est pas un sujet inaccessible pour une intelligence comme la sienne. » #Jean-Michel_Blanquer, Le Monde, le 30 mars 2021

    « Ce n’est pas Macron qui manque d’#humilité, c’est l’humilité qui n’est pas à la hauteur », #EmmanuelMacronFacts

    « Père Ubu – Allons, messieurs, prenons nos dispositions pour la bataille. Nous allons rester sur la colline et ne commettrons point la sottise de descendre en bas. Je me tiendrai au milieu comme une citadelle vivante et vous autres graviterez autour de moi » Alfred Jarry, Ubu roi, Acte IV, scène 3

    Je serai bref. On écrit bien trop sur Macron. Les trois épigraphes ci-dessus disent à peu près tout. Il faudrait juste ajouter que dans certaines versions de la mythologie grecque Hybris est l’un des enfants de la Nuit et d’Érèbe, une divinité des Enfers. L’#hybris désigne la #démesure, l’#excès_de_pouvoir et le vertige auquel il conduit. La Vème République est une détestable machine à produire de l’hybris. Des présidents hors de contrôle.

    En ce 31 mars 2021, Macron roi préside un #Conseil_de_défense_sanitaire où ne siège autour de lui qu’une petite grappe de ministres choisis par ses soins. Conseil opaque, soumis au secret et échappant à tout #contrôle_législatif . Le soir du même jour, il annonce ses décisions à ses sujets, au nom d’un « nous », dont on ne saura jamais s’il est de majesté ou s’il renvoie aux choix collectifs et débattus d’un #exécutif. Ce « je-nous » annonce donc le #reconfinement de toute la métropole, avec la fermeture des écoles. Je propose de déduire de ces décisions les trois #échecs de Macron, qui correspondent à trois #fautes, lesquelles sont directement en rapport avec la démesure qui caractérise le personnage, #démesure encouragée par la fonction et notre #constitution épuisée. Quand faire le #bilan d’une politique se résume, de facto, à la caractérologie de son Auteur, on se dit qu’il est grand temps de changer de République et d’en finir avec le #présidentialisme.

    Le premier échec de Macron roi, c’est le reconfinement de toute la métropole avec ses conséquences en termes de #santé_mentale, de #précarisation accrue pour les plus pauvres et les classes moyennes, et d’aggravation de la #crise_économique. L’engagement pris à de multiples reprises de ne pas reconfiner nationalement n’a jamais été accompagné de la politique qu’un tel choix exigeait. Macron a mis tout le pays dans une #impasse. Le reconfinement est la conséquence directe de ce choix. La décision de laisser filer l’#épidémie fin janvier, - dans un contexte de diffusion des variants, avec l’exemple anglais sous les yeux, et contre l’avis de toute la #communauté_scientifique -, a été, littéralement, criminelle. Macron était parfaitement informé de la flambée qui aurait lieu mi-mars. Nous y sommes.

    Le second échec de Macron roi, distrait et appuyé par son fou préféré dans son obstination à ne #rien_faire pour sécuriser sérieusement l’#Éducation_nationale, aura été la #fermeture contrainte des #écoles et le prolongement du semi-confinement des étudiant.es, qu’il convient de ne pas oublier : les dégâts sont pour elle et eux sans fin, que certain.es aident à réparer : https://blogs.mediapart.fr/parrainer-un-e-etudiant-e/blog/260221/parrainer-un-e-etudiant-e-pour-entrer-dans-le-monde-dapres-appel-ten. En plus des scandales des #masques, des #tests et des #vaccins, Macron et son gouvernement sont en effet directement comptables d’une #inaction incompréhensible. Monté sur son « cheval à phynances », Macron roi a certes arrosé les entreprises de centaines de milliards, mais n’en a dépensé aucun pour l’#Hôpital, l’École, l’#Université, la #Recherche et plus généralement la #sécurisation_sanitaire des #lieux_publics, parmi lesquels tous les lieux de #culture.

    Or, depuis bientôt un an, des chercheurs font la démonstration que des solutions existent (voir ici : https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/120121/rendre-l-universite-aux-etudiants-sans-attendre-les-decideurs ) et que la stratégie « #Zéro_Covid » est certainement la plus efficace et la plus propre à protéger des vies : voir par exemple les propositions concrètes de Rogue-ESR (https://rogueesr.fr/zero-covid). Pourquoi donc « une intelligence comme la sienne » ne parvient-elle pas à s’élever jusqu’à la compréhension que la #détection de la saturation en #CO2 d’un lieu fermé et l’utilisation de #filtres_Hepa sont des dispositifs techniques simples, efficaces et susceptibles de limiter la propagation du #virus ? Même des esprits infiniment plus bornés que le sien – Wauquiez par exemple (https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/covid-l-efficacite-des-purificateurs-d-air-contre-le-sa), qui dégage 10 millions pour des #purificateurs_d’air dans les écoles et lycées - ont parfaitement saisi au bout de 6 mois ce que Macron-Roi mettra deux ans à reconnaitre.

    Le troisième échec de Macron roi, le plus terrible, est le nombre de #morts, de vies brisées, de souffrances psychiques et physiques que des années de soins peineront à soulager. Bientôt 100 000 morts. Des légions de "covid longs", des enfants, des adolescents et des étudiants habités par l’angoisse de contaminer leur parents … Question : combien de milliers de vies auraient pu être épargnées, non pas seulement par des décisions énergiques fin janvier 2021, mais par un véritable #plan_d’action visant à apporter une sécurité sanitaire digne de ce nom, à toute la population ? Pourquoi 3000 #lits de #réanimation supplémentaires seulement maintenant et pas à l’été 2020, avant la seconde vague ? Pourquoi Zéro mesure technique et financière pour les #universités quand des étudiants se suicident ? Pourquoi Zéro vaccin pour protéger les enseignants ? Pourquoi faire si peu de cas de « La valeur d’une vie » (https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/260121/la-valeur-d-une-vie) ?

    L’analyse des causes de ces #échecs montre que ce ne sont pas des #erreurs, mais des #fautes politiques. Tout d’abord une gestion présidentialiste et autocratique de la #crise_sanitaire, couplée avec un virage idéologique vers l’extrême droite. Ensuite le refus de toute #politique_d’anticipation, qui est à concevoir comme une conséquence du « #en-même-temps » : le #laisser_faire néolibéral du macronisme se conjugue avec un retrait massif de l’#Etat et un affaiblissement de la #Fonction_publique. Enfin la #gestion_sanitaire de Macron roi a pris lors de cette épidémie la forme d’un #pari : s’accoutumer au virus, #vivre_avec, le laisser filer permettra peut-être d’éviter un #confinement. Le pari au lieu de la #raison et de la #délibération, le jeu avec la science, le rêve de devenir un savant, l’adulation de Raoult, Macron roi devenu « l’expert », l’épidémiologiste en chambre. La limite de cette folie est éthique : un #pouvoir, quel qu’il soit, ne peut pas parier des vies comme dans une partie de poker.

    A ces trois fautes correspondent trois marqueurs de l’identité politique de Macron roi : l’#opportunisme, le #jeu et le #cynisme. Macron est certainement le président le plus dangereux que nous ayons eu depuis Pétain. Il est le président qui aura consenti à la mort de dizaines de milliers de citoyen.ne.s, qui aura fait le lit de l’#extrême_droite et aura remplacé la politique par un jeu de roulette russe. Président hors de contrôle, il est devenu à lui seul le haut comité médical qu’il a institué. Il est devenu à lui seul tout le Parlement. Il est devenu sa propre caricature. Le Roi et le fou du Roi. Seul en son Palais, "divertissant son incurable ennui en faisant des paris avec la vie de ses sujets"*.

    Pascal Maillard

    Père Ubu s’interrogeait ainsi : « Le mauvais droit ne vaut-il pas le bon ? ». Il parait que sous la plume de Jarry cette question rhétorique renvoyait au cynisme politique de Bismarck.

    * L’expression est de l’écrivain Yves Charnet, dans un livre à paraître.

    https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/010421/macron-roi

    #macronisme #Macron #France #covid #coronavirus #Blanquer

  • #Covid-19 : le dédoublement des classes au collège pourrait protéger les #parents
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/03/24/covid-19-le-dedoublement-des-classes-au-college-pourrait-proteger-les-parent

    Des épidémiologistes préconisent de tenir compte du risque accru de contamination des adultes dans les foyers abritant des collégiens.

    Tandis que les contaminations par le SARS-CoV-2 augmentent fortement, le rôle des #enfants et des adolescents dans la dynamique de l’épidémie de Covid-19 reste une question essentielle. Les mesures annoncées jeudi 18 mars par le gouvernement de dédoublement des lycées seront-elles suffisantes ? Depuis septembre, la France est parvenue à garder ses établissements ouverts, en imposant le port du masque dès l’école primaire et un mélange de présentiel et de distanciel au lycée.

    « Les écoles ne semblent pas constituer des amplificateurs de transmission : la circulation du virus en milieu scolaire reflète plutôt celle qui est observée au sein de la collectivité » , a indiqué le conseil scientifique dans son avis du 11 mars. Il s’appuie un éditorial publié dans le British Medical Journal , signé par plusieurs épidémiologistes dont le professeur Arnaud Fontanet (Institut Pasteur), membre du conseil scientifique. « Les enfants continuent de faire des formes plus légères de la maladie, et très peu d’études suggèrent que les enseignants seraient plus à risque que d’autres professions », résume Arnaud Fontanet.

    Mais concernant la transmission du virus, les choses varient selon l’âge, comme l’a montré Comcor, une étude que le professeur a conduite avec ses collègues de l’Institut Pasteur, à l’état de prépublication et régulièrement mise à jour. Le risque majeur est en effet que les enfants ramènent le virus au domicile, où il n’y a pas de mesures barrières, et qu’ils le transmettent à leurs parents et grands-parents, davantage sujets aux formes graves de la maladie – sans compter l’impact psychologique que cela peut avoir. Ainsi le fait d’avoir un collégien ou un lycéen ou un enfant gardé par une assistante maternelle accroît le risque pour les adultes du foyer d’être infectés de respectivement 27 %, 29 % et 39 %, souligne ce travail. Quand l’enfant est en maternelle, ce surrisque est de 15 %. Mais avoir un enfant en école primaire n’est pas, jusqu’alors, associé à un surrisque d’infection. « Il reste généralement admis que les enfants de moins de 10 ans sont 30 % à 50 % moins susceptibles d’être infectés, constate le professeur Fontanet. En revanche, les avis sont partagés sur la contagiosité. »

    L’arrivée du variant anglais, environ 60 % plus contagieux, qui devrait représenter 90 % des cas fin mars, pourrait changer la donne. La prochaine analyse, prévue courant avril, devrait éclairer les choses.

    Contagiosité accrue du variant anglais

    En attendant, les derniers chiffres inquiètent. Le nombre de contaminations augmente parmi les 12,4 millions d’élèves français : 15 484 ont été contaminés dans la semaine du 11 au 18 mars, contre 9 221 la semaine précédente, et 1 809 personnels (1 106 une semaine auparavant), selon https://www.education.gouv.fr/covid19-point-de-situation-du-vendredi-19-mars-2021-322762" target="blank" rel="noopener" title="Nouvelle fenêtre" >le dernier point de situation du ministère de l’éducation nationale. De même, le nombre de classes fermées a augmenté de 833 à 2018 en une semaine. Cette hausse est en partie imputable à la multiplication des tests salivaires (250 000 tests réalisés au soir du vendredi 20 mars) mais sans doute aussi à la contagiosité accrue du variant anglais. La situation est particulièrement tendue en Ile-de-France et Hauts-de-France.

    Au regard de la forte poussée épidémique, faut-il aller plus loin ? « Le dédoublement des classes, un jour sur deux ou une semaine sur deux, devrait également être discuté pour les collèges », préconise Arnaud Fontanet. Il propose aussi que les mesures mises en place en Ile-de-France et en Hauts-de-France le soient dans d’autres départements connaissant une poussée épidémique forte, et un taux d’occupation déjà élevé des lits de réanimation, « afin de tester leur efficacité qui repose sur l’adhésion des Français, le principal objectif étant d’éviter les réunions en lieu privé, à son domicile ou ailleurs, là où beaucoup d’infections ont lieu », rappelle-t-il. Quitte à y être moins strict sur la fermeture des commerces.

    Pour Mahmoud Zureik, professeur d’épidémiologie et de santé publique à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, « si on veut limiter drastiquement la circulation du virus, il n’y a pas d’autre solution qu’un confinement strict et la fermeture des écoles ». « L’école joue un rôle, c’est indéniable, la durée des contacts, leur nature, leur fréquence, constituent autant d’ingrédients pour la transmission du virus »_, explique le professeur Zureik.

    « Ne fermer les écoles primaires qu’en dernier recours »

    La France fait figure de quasi-exception en la matière. Car de nombreuses études mettent en évidence l’impact délétère de la fermeture des écoles sur la santé mentale des enfants et sur leur apprentissage, particulièrement pour les enfants du primaire de milieux défavorisés. « La balance bénéfices-risques penche clairement en faveur de l’ouverture des établissements scolaires », rappelait dans nos colonnes, le 17 mars, la pédiatre Christèle Gras-Le Guen, présidente de la Société française de pédiatrie (SFP). « Les situations de stress, d’anxiété, de syndrome dépressif, sévices sur enfants, sont en forte augmentation, d’où l’intérêt majeur à laisser les écoles ouvertes », renchérit le professeur Alexandre Belot, rhumato-pédiatre à l’hôpital Femme-Mère-Enfant de Lyon, également membre de la SFP.

    Dans son dernier avis, le conseil scientifique préconise « de ne fermer les écoles primaires qu’en dernier recours » mais les laisser ouvertes doit s’accompagner « de mesures efficaces de réduction du risque ». Tous les observateurs demandent plus de dépistages ciblés. « Il faudrait s’inspirer d’autres pays comme le Royaume-Uni ou l’Autriche qui diffusent largement les #autotests : deux tests par semaine dans les écoles primaires, un par semaine dans le secondaire », préconise Arnaud Fontanet. Pour ralentir, voire casser les chaînes de transmission.

    Les syndicats déplorent un protocole sanitaire insuffisant [eh ben, depuis le temps...ndc]. « Le déni du ministre de l’éducation nationale [Jean-Michel Blanquer martèle que le virus circule peu à l’école] a retardé de plusieurs mois des mesures de protection nécessaires pour faire baisser la circulation du virus », regrette Mahmoud Zureik. Ce sont, par exemple, l’#aération, les #extracteurs_d’air, penser autrement les #cantines, etc. Un constat partagé par le collectif Du côté de la science, dont il fait partie. « L’objectif de laisser les écoles est noble, mais il faut s’en donner les moyens », tranche l’épidémiologiste.

    #Société_française_de_pédiatrie #conseil_scientifique #du_coté_de_la_science

  • Exiting democracy, entering authoritarianism: state control, policing and surveillance in Greek universities

    A bill regarding the “safety” and policing of Greek universities, among other issues, was voted on the 11th of February 2021, by 166 MPs from New Democracy, the right-wing ruling party, and Greek Solution, a far-right party, despite the unanimous opposition of left-wing parties (132 MPs), the Greek academic and student community and police unions. It came in the context of the COVID-19 pandemic which has arguably been an extremely difficult, painful, insecure, traumatic and challenging situation that has affected everyone’s life, including economic, health and cultural systems around the world. That context is accompanied by an extremely uncertain, obscure and blurry future that heightens insecurity globally and locally. The education system has been particularly affected with universities being closed for over a year; teaching is only taking place virtually (with detrimental effects on the mental health of both teaching staff and students); and where it is extremely difficult due to social distancing regulations for the educational community to come together, discuss and exchange views on pressing matters regarding the future of Higher Education.

    What does the bill entail?

    The bill “Admission into Higher Education, Protection of Academic Freedom, Upgrading of the Academic Environment and further provisions”, which became law (4477/2021) on the 17th of February 2021, requires from all Higher Education institutions the implementation of security systems such as: the surveillance and recording of both image and sound (CCTV cameras, microphones etc) on open and closed University spaces; movement censors and alarm systems; restricted access to university spaces only for university staff and students or even biometric controls at the entrances; electronic detection systems for illegal substances and objects; and Control Centers for Signals and Images to be established within University premises.

    The law also dictates the introduction of both Units and Committees for “Safety and Protection”, as well as Disciplinary Councils for Students together with a list of a variety of disciplinary offences. The former will be responsible for the drafting, implementation, assessment and management of security agendas and requirements for each individual university, while the latter will be conducting “disciplinary interrogations” and fulfill duties such as: autopsy, witness cross-examination, interrogation of the “persecuted” and composing experts’ reports. The Disciplinary Council will have the power to impose fines and even expel students who have committed disciplinary offences. The Units and Committees for Safety and Protection as well as the Disciplinary Councils, will be composed by University teaching and research staff, transforming them thus, from teachers and researchers to cops and security managers.

    Importantly, Article 18 of the law also dictates for the first time in a democratic European country the establishment of a police security force for universities under the name: “Squads for the Protection of Universities”. The Squads will be carrying a truncheon, handcuffs and anaesthetic/pepper spray gases; they will be patrolling campuses and police stations are to be established within University premises without the consent of university authorities. Further, these squads are to be staffed initially with 1030 police officers (Special Guards), a number that is set to increase depending on the “security needs” of each institution. While for the Prime Minister, Kyriakos Mitsotakis, the creation of these Squads and the extensive surveillance of public Universities are “a means of closing the door to violence and opening the way to freedom” and “it is not the police who enter universities, but democracy”; for the majority of the academic community as well as opposition parties, this legislation is an alarming move towards authoritarianism as it opens the doors to the permanent policing and surveillance of universities.

    Abolishing the self-rule of universities and academic freedom through permanent policing, surveillance and disciplining of universities

    To assess those worries we need firstly to set the context. Greek universities (in something that is often uncommon in universities in the Anglo-American part of the world, but very common in Southern Europe, France and Latin America) are very much intertwined with Greek politics and wider social struggles. They constitute an energetic social and political space, which is closely connected to and strengthens wider society’s social struggles against forms of oppression and injustice, rather than simply being sterile spaces of providing information. As such they have historically played a crucial role in Greek politics and constitute “a stronghold of democracy”. Students who occupied the National Technical University of Athens in 1973 against the military junta - an occupation which ended when tanks invaded the gates of the University killing dozens of students and people in the surrounding areas - are considered to be one of the key factors for the overthrown of the junta regime and the transition of Greece to democracy. Since then the academic and student community has been engaging in various forms of protest and solidarity to wider social struggles, while the entrance of police to university premises was banned by law in 1982. The police were only eligible to enter after a University Dean’s request or if a serious crime took place. The “asylum” law as it was called, was abolished in August of 2019, almost as soon as the conservative government of New Democracy came to power.

    Within this context, the fact that the education law (4477/2021) was drafted for the first time in Greek history jointly by both the Ministry of Education and the Ministry of Citizen’s Protection (i.e. Ministry of Policing), shapes as will become clear, the character and goals of the legislation; which are nothing less than the targeting and criminalization of the socio-political character of the Greek University and academic freedom.

    Therefore the first thing to consider that substantiates the worries of the academic community is that the 1030 police officers (Special Guards) who will form the “Squads for the Protection of Universities” will not have graduated from the 3-year Police Academy degree, which was the principle requirement so far in police hiring procedures. Rather Special Guards are trained through speedy processes and are staffed through rapid hiring procedures of candidates that have declared an interest in becoming police officers, hold simply a high school degree and have completed their military service (compulsory for men in Greece) – preferably from the special forces, reserve military forces, Presidential Guard or from 5-year forces of military volunteers or from bodies of professional soldiers. In the summer of 2019 when the right-wing government of New Democracy was elected, 1,500 Special Guards were recruited to staff riot police and motorbike police (DIAS squads) and now 1030 more will staff University Police. As the Reader of Criminology at Teesside University, George Papanikolaou, argues, we are witnessing a restructuring of the Greek police, whereby male personnel shaped through military type of training and culture will be incorporated in frontline squads to deal with citizens.

    It is no wonder then, given the historical tensions in Greece between student movements and the police, that the academic and student community fear a regression to an authoritarian state, where they will be dealt with as “internal enemies” and handled accordingly. These fears become more and more real as both before and after the bill was passed, the police have engaged in widespread blind violence and authoritarian practices: driving motorbikes at students peacefully protesting against the bill; breaking the teeth and jaw with a fire extinguisher of a peaceful student protestor; torturing in public sight a student that was member of the student group, which as a form of protesting against the educational law had peacefully occupied the administration building of the Aristotelian University of Thessaloniki; and even kidnapping students from their own houses in the city of Chania, Crete.

    It should also be noted that the lack of training of the Special Guards has also raised serious concerns and objections within police unions, who unilaterally oppose the staffing of the university squads in such a way. Despite the lack however of proper training, these squads will have the authority to patrol, arrest, conduct preliminary interrogations, prevent and address any “deviant” or criminal behaviour within University spaces (Article 18); and are to staff the Control Centers for Signals and Images together with university personnel. The fact that the law (Article 19) clearly states that Special Guards can perform all police duties except for preliminary interrogation, a function that they are set to perform in universities, creates serious questions for the academic and student community. It is also not clarified by the law what is meant by “deviant” behavior or the ways in which these squads are going to “prevent” it (i.e. will they stop and search students and staff and conduct inspections in teaching rooms)? Further, university authorities are to facilitate the new patrolling “Special Forces” in “all possible ways” to implement their duties. Again, it remains unclear by the law what this facilitation will entail and whether Deans and university Senates will have the right to object or even to reject such facilitation.

    This last point leads us to the most important issue about this legislation. The educational law (Article 18 para.5) dictates that these police squads will not answer to university authorities, as required so far by the constitutional autonomous character of universities. Instead, they will directly fall under the mandate of the Ministry of Citizen’s Protection and the Greek police. All these aspects are very distant from the protection of academic freedom that the legislation alleges to support. Academic freedom entails freedom of scientific research and teaching, freedom of circulation of ideas as well as, the constitutional prerequisite of the fully autonomous nature of universities. Therefore, the fact that these squads will act and be managed and supervised by the Greek police renders this law unconstitutional regarding the principle of university self-rule. The legislation hinders academic freedom and arguably transforms Greek Universities into fortresses of control, surveillance, repression and policing. The fact that the undersecretary of education justified the establishment of police squads and stations within universities on the grounds that it was also a practice during the military junta, attests further to the worries of the academic community regarding academic freedom and university’s self-rule.

    Further, while for universities in the Anglo-American world widespread surveillance is a common and more often than not, unchallenged practice; most probably these universities were not blackmailed (although some recent developments regarding freedom of speech in British Universities might prove otherwise) by their country’s government through legislation (in the Greek case Parts C(d) and D (b) of the law) that their funding would be cut if they did not implement the surveillance and disciplinary prerequisites of the law. A factor that again verifies the abolition of University’s self-rule. Regarding the 24/7 surveillance data of the Centers for Signals and Images it is not clear concerning privacy and data protection, how long the data will be stored, what will be the purpose of processing it and, most importantly, what safety valves are there in order to prevent misuse of the data. So far practices in Greece show that the EU General Data Protection Regulation (GDPR) is not being upheld. As the expert on Data Protection and Privacy law, Prof. Mitrou, has argued “The Greek law has not respected the GDPR as standard borderline and has (mis)used ‘opening clauses’ and Member State discretion not to enhance but to reduce the level of data protection”.

    Making the situation worse, the fact that University’s teaching and research personnel, who are to staff these Centres along with the police are largely unfamiliar with security planning and surveillance systems, makes more probable for the University police squads to oversee handling of the data. Creating hence serious concerns over who will supervise these squads against violating EU laws regarding data processing and misuse. Similar questions are being posed for the staffing of Units and Committees for Safety and Protection. Moreover, it is not clarified whether the University police squads will also be equipped with devices allowing for live facial recognition and fingerprint identification that Greek police is to receive by summer 2021. An issue that creates even more intense unease regarding the legitimacy and protection of handling of also biometric data of students and staff.

    In essence, the fact that there have been various cases in the Anglo-American world where privacy and data protection safeguards have been breached: administrators of surveillance systems and university administrators monitor emails and social media of staff and students; their on- and sometimes off-campus movements; and have used this monitoring to let go of academic personnel and suppress any type of protest or diffusion of information that while abiding by university’s code of ethics is not approved by university administration; attests to the worries of the Greek academic and student community regarding academic freedom. This is affirmed by the Foundation for Individual Rights in Education (FIRE)- which has already found that such monitoring practices are open to misuse and hence can turn to not only illiberal but unconstitutional tools. These alarming developments should perhaps make us all reflect on whether we are trading away too much of our liberty in the name of “safety” and whether we want universities to become authoritarian institutions. But how did we come to this?

    Deliberate efforts at defamation of the Greek public university

    During the previous months, the government of New Democracy together with pro-government media engaged in a malicious campaign aiming to defame public universities and represent them to Greek citizens as “sites of lawlessness”, disorder and delinquency. There are definitely problems in Greek universities (mainly caused by the severe underfunding over the past decade), but they are not as depicted by the mass media as centres of crime and havoc. Sofia Vidali, a professor of criminology, eloquently deconstructs such representations in her article “Criminality and Policing in Greek Higher Education: ‘truths’ and ‘lies’”, by showing that instances of delinquency and petty criminality relate to wider socio-economic and spatial characteristics of the area in which each University is placed. Moreover, offences within and in the surrounding areas (both are counted as one in official police statistics) of University premises constitute a very minor subtotal (2,053 offences out of approximately 1,835,792) of the country’s crimes for the periods 2007-2018.

    Arguably, one of the key stereotypes that has been employed by the Minister of Education, Niki Kerameus, and pro-government media propaganda, was that academics are afraid of being hostage to students (particularly students with leftist leanings). They constructed a “moral panic” (see Coehn, S. 1972/2002) around two incidents. The one was the symbolic building in 2006 of the Dean’s office of Democritus University of Thrace by students in protest at the scandalous mismanagement of their alimentation. While the Dean’s office was empty when the building occurred, the stereotype purposefully constructed was that the students had trapped the Dean inside his office, with Mrs. Kerameus stating on 8/02/2021 that “we need to convince young people that it is not normal to build professors within their offices”. The second case was an unfortunate and atypical incident at the Economic University of Athens in October 2020, where young people from the anti-authoritarian political realm forced the Dean to wear a label saying that he supported squatted buildings. While unanimously the academic community had condemned the event and, despite it being an exception rather the rule, the incident has been represented as the common feature of university life. These representations were widely used to justify and legitimize to the wider public the necessity for disciplining, surveillance and establishment of a police force within universities.

    As part of these representations was also an orchestrated defamation of University professors who challenged such depictions. A typical example was that the Greek government has attempted to justify its law through false pretenses of “best practice” stemming from examples in the Western World and particularly Oxford University; saying that there is a police force established for the security of the latter. When a Greek professor at the University of Oxford, Antonios Tzanakopoulos, denied the presence of such police force, Greek pro-government media and Ministers, following largely Trump’s techniques of communication, attempted to distort and slander his statements by saying that he is a liar and a defrauder who spreads fake news. It should be noted that the Oxford UCU has openly taken a stance against the law, while denying the existence of a university police force in its premises. These processes of disinformation, censoring and silencing of any voice that runs counter to the government’s agenda has been a common practice throughout the past year, rendering Greece 4th before last within the EU regarding press freedom and a flawed democracy. It should be emphasised that no police force is established in any European University. Rather, as is the current case in Greece, security personnel and porters (which can be both private and public servants) under a university’s authority are responsible for security issues.

    Importantly, these deliberate practices of defamation of Universities, their academic staff and students come after almost a decade of severe underfunding of the Greek university. During the acute economic crisis (2010-2018), university funding was cut from 75% to even 120% in some Universities, placing Greece in the last positions in Europe in terms of university funding and infrastructures (including the firing of the porters and security personnel). Hence it comes as a great disappointment for university personnel to see that the government is willing to provide 50 million euros (20 million annually for the salaries of the 1030 university police squads and 30 million for the implementation of security systems), when 91 million is the entire budget for universities, who still suffer from underfunding. This money could arguably be used to hire more teaching, research and administrative personnel, porters and the development of infrastructures (i.e. teaching spaces and lab equipment). Arguably the problems that Greek Universities face due to chronic underfunding will not be solved by policing and surveillance.

    It should also be highlighted that the defamatory representations purposefully tend to omit that Greek universities, despite their underfunding and global inequalities in terms of knowledge production, where if you don’t publish in English you literally don’t exist, achieve really good positions in Global University Rankings (ranked among the top 1000 Universities in the world). Crucially these slandering representations come after another legislation (4653/2020) of the Ministry of Education, which equated the degrees of private colleges with those of public universities that significantly “upgraded” the degrees of the former and “downgraded” the degrees of the latter. Private colleges in Greece do not produce research and the knowledge that they provide does not go through the same quality assessments as that of public universities. This “upgrade” of private colleges is combined with another controversial aspect of the law (4477/2021) under discussion, which reduces the numbers of students’ induction to public universities by 20%-30%, channeling arguably the “left-out” students to private colleges. An aspect that not only reduces further the funding of public universities but will also afflict the most vulnerable social strata of Greek society by hindering their educational and social mobility. In other words, the representations of criminality and “lawlessness” and the wider defamation and degrading of the public university, propagated by the mass media and the right-wing government, facilitates the latter in legitimizing the domination of the “law and order” dogma while at the same time fulfilling its neoliberal agenda of privatization of higher education.

    Conclusive remarks: What university do we want?

    As Prof. Costas Douzinas, at Birkbeck University, has argued, what is missing from all contemporary discussions about higher education in Greece and abroad is the core question of what universities do we want? The university at its core aims towards the complete freedom of thinking, critiquing, challenging, researching and circulating of ideas in a constant search for the “truth”. It aims to deepen democracy, including cognitive democracy by providing a pluriversality of knowledges, pedagogies and methodologies to understand the world around us. As such university education has a value in and of itself, which cannot be reduced simply to a tool(vocational) value. Indeed the knowledge provided by universities is about the blossoming of the human soul and mind by constantly shaping an understanding about the human condition, of our individual selves, the world and our societies, which is an “absolute human value” in and of itself (Carr 2009:14). In this way students will later be able to contribute not only to the economy but also to democracy.

    When the University simply becomes a vocational school – a trend that we largely see growing globally and is arguably also the aim of the Greek education law by attempting to downgrade public universities and criminalise socio-political action - then it stops cultivating knowledge and becomes instead simply a depository of information; a commodity that if invested in, will provide the necessary skills for the production of a “disciplined” learner/ consumer/worker to only serve the needs of each nation’s economic growth (Drummond, 2003). As such the University loses its liberatory and democratic essence and its interconnection to social struggles. Professor Boaventura de Sousa Santos powerfully demonstrates what is at stake globally if we continue to follow this trend: “Wherever you are, there are always people struggling against oppression, and you should really try to work with them if you are at the university. Otherwise, the university will be soon a capitalist enterprise like any other, whose market value is defined by rankings, students will be consumers and teachers, workers or, more nicely, collaborators. If we fail our social responsibility, the university as we know it will have no future”. This article is a call against such a dark future that will affect us all globally and locally and may jeopardise the future of democracy and academic freedom as we know it.

    References

    Carr, D. (2009) “Revisiting the Liberal and Vocational Dimensions of University Education”, in British Journal of Educational Studies. 57 (1): pp. 1-17.

    Cohen, Stanley. 2002 [1972]. Folk Devils and Moral Panics. London: Routledge.

    Drummond, J. (2003) “Care of the Self in a Knowledge Economy: Higher Education, Vocation and the Ethics of Michel Foucault”, Educational Philosophy Theory, Vol. 35 (1), pp. 57-69.

    https://www.crimetalk.org.uk/index.php/library/section-list/1012-exiting-democracy-entering-authoritarianism

    #Grèce #université #surveillance #police

    ping @isskein @karine4

    • Traduction :

      Exit la démocratie, bienvenue dans l’autoritarisme : contrôle de l’État, maintien de l’ordre et surveillance dans les universités grecques

      Un projet de loi concernant la « #sécurité » et le #maintien_de_l’ordre dans les universités grecques, entre autres, a été voté le 11 février 2021, par 166 députés de Nouvelle Démocratie, le parti de droite au pouvoir, et de Solution grecque, parti d’extrême droite, malgré l’opposition unanime des partis de gauche (132 députés), de la communauté universitaire et étudiante grecque et des syndicats de police. Cette décision est intervenue dans le contexte de la pandémie de COVID-19, qui a sans doute été une situation extrêmement difficile, douloureuse, insécurisante, traumatisante et éprouvante, qui a affecté la vie de chacun et de chacune, y compris les systèmes économiques, sanitaires et culturels du monde entier. Ce contexte s’accompagne d’un avenir extrêmement incertain, obscur et flou qui accentue l’insécurité au niveau mondial et local. Le système éducatif a été particulièrement touché : les universités sont fermées depuis plus d’un an, l’enseignement ne se tient qu’à distance —avec des effets néfastes sur la santé mentale du personnel enseignant et des étudiant·es — et, en raison des règles de distanciation sociale, il est extrêmement difficile pour la communauté éducative de se réunir, de discuter et d’échanger des points de vue sur des questions urgentes concernant l’avenir de l’enseignement supérieur.
      Quel est le contenu de la loi ?

      Le projet de loi « Admission dans l’enseignement supérieur, protection de la #liberté_académique, amélioration de l’environnement académique et autres dispositions », qui est devenu une loi (4477/2021) le 17 février 2021, exige de tous les établissements d’enseignement supérieur la mise en œuvre de systèmes de sécurité tels que : la surveillance et l’enregistrement d’images et de sons (#vidéosurveillance, #microphones, etc.) dans les espaces ouverts et fermés de l’université ; la contrôle inquisitorial des mouvements et les systèmes d’alarme ; la restriction de l’accès aux espaces universitaires aux seuls personnels et aux étudiants de l’université, voire des contrôles biométriques aux entrées ; des systèmes de #détection_électronique de substances et d’objets illégaux ; et la mise en place de centres de contrôle des signaux et des images dans les locaux universitaires.

      La #loi prévoit également la création d’unités et de comités pour la « sécurité et la protection », ainsi que de #conseils_de_discipline pour les étudiant·es, avec une liste de diverses infractions disciplinaires. Les premiers sont désormais responsables de l’élaboration, de la mise en œuvre, de l’évaluation et de la gestion des programmes et des exigences en matière de sécurité pour chaque université, tandis que les seconds vont mener des « #interrogatoires_disciplinaires » et rempliront des fonctions telles que l’autopsie 1, contre-interrogatoire des témoins, interrogatoire des « persécutés » et rédaction de rapports d’expertise. Le #Conseil_de_discipline aura le pouvoir d’imposer des amendes et même d’expulser les étudiant·es qui ont commis des #infractions_disciplinaires. Les unités et les comités de sécurité et de protection, ainsi que les conseils de discipline, seront composés de membres du personnel d’enseignement et de recherche de l’université, passant ainsi d’enseignants et de chercheurs à des flics et des gestionnaires de sécurité.
      Il est important de noter que l’article 18 de la loi impose également, pour la première fois dans un pays européen démocratique, la création d’une force de #sécurité_policière pour les universités sous le nom de « #Brigades_pour_la_protection_des_universités ». Ces #brigades seront munies d’une #matraque, de #menottes et de gaz anesthésiants et gaz-poivres ; elles doivent patrouiller dans les campus et des postes de police doivent être installés dans les locaux des universités sans nécessiter le consentement des autorités universitaires. En outre, ces brigades doivent être dotées initialement de 1030 policiers (gardes spéciaux), mais leur nombre est appelé à augmenter en fonction des « besoins de sécurité » de chaque institution. Alors que pour le Premier ministre, Kyriakos Mitsotakis, la création de ces brigades et la surveillance étendue des universités publiques sont « un moyen de fermer la porte à la violence et d’ouvrir la voie à la liberté » et que « ce n’est pas la police qui entre dans les universités, mais la démocratie« , pour la majorité de la communauté universitaire ainsi que pour les partis d’opposition, cette législation est un pas alarmant vers l’autoritarisme car elle ouvre les portes au contrôle et à la surveillance permanentes des universités.
      La fin de l’autonomie des universités et des libertés académiques par l’exercice d’une surveillance et une discipline permanentes au sein des universités

      Pour analyser les causes de l’inquiétude, commençons par expliquer dans quel contexte elles prennent place. Les universités grecques — ce qui est souvent rare dans les universités de la partie anglo-américaine du monde, mais très courant en Europe du Sud, en France et en Amérique latine — sont très étroitement liées à la politique grecque et aux luttes sociales plus largement. Elles constituent un espace social et politique vigoureux, étroitement impliqué dans les luttes sociales contre les formes d’oppression et d’injustice ; elles contribuent à les amplifier, plutôt que d’être de simples espaces d’information aseptisés. En tant que telles, elles ont historiquement joué un rôle crucial dans la politique grecque et constituent « un bastion de la démocratie ». Les étudiant∙es qui ont occupé l’Université technique nationale d’Athènes en 1973 contre la junte militaire — occupation qui s’est terminée lorsque des chars ont envahi les portes de l’université, tuant des dizaines d’étudiants et de personnes dans les environs — sont considéré∙es comme l’un des facteurs-clés du renversement du régime de la junte et de la transition de la Grèce vers la démocratie. Depuis lors, la communauté universitaire et étudiante s’est engagée dans diverses formes de protestation et de solidarité avec des luttes sociales plus larges, tandis que l’accès de la police dans les locaux universitaires a été interdit par la loi en 1982. La police n’était autorisée à entrer qu’à la demande du doyen de l’université ou en cas de crime grave. La loi « asile », comme on l’appelait, a été abolie en août 2019, presque aussitôt après l’arrivée au pouvoir du gouvernement conservateur de Nouvelle Démocratie.

      Dans ce contexte, le fait que la loi sur l’éducation (4477/2021) ait été rédigée pour la première fois dans l’histoire de la Grèce conjointement par le ministère de l’Éducation et le ministère de la Protection du citoyen (c’est-à-dire le ministère de la Police), façonne, comme nous allons le voir, le caractère et les objectifs de la législation, soit rien de moins que le ciblage et la criminalisation du caractère sociopolitique de l’université grecque et de ses libertés académiques.

      Ce qui nourrit les inquiétudes de la communauté universitaire, pour commencer, tient à ce que les 1030 officiers de police (gardes spéciaux) qui forment les « brigades de protection des universités » n’auront pas obtenu le diplôme de l’Académie de police à l’issue de trois ans d’études, diplôme qui était jusqu’à présent la principale exigence dans les procédures de recrutement de la police. Les gardes spéciaux auront une formation accélérée et seront recrutés par des procédures d’embauche expéditives parmi les candidats ayant déclaré leur intérêt pour le métier d’officier de police ; ils seront simplement titulaires d’un diplôme d’études secondaires et auront effectué leur service militaire (obligatoire pour les hommes en Grèce) de préférence dans les forces spéciales, les forces militaires de réserve, la garde présidentielle ou les forces de 5 ans des volontaires militaires ou des corps de soldats professionnels. À l’été 2019, lorsque le gouvernement de droite de la Nouvelle Démocratie a été élu, 1 500 gardes spéciaux ont été recrutés pour la police anti-émeute et la police à moto (brigade DIAS) et maintenant 1030 de plus seront employés à la police universitaire. Comme le soutient George Papanikolaou, maître de conférences en criminologie à l’université de Teesside, nous assistons à une restructuration de la police grecque, dans laquelle les agents masculins dotés d’une formation et une culture de type militaire se trouveront incorporés dans des brigades de première ligne pour traiter avec les citoyens.

      Il n’est donc pas étonnant, étant donné les tensions historiques en Grèce entre les mouvements étudiants et la police, que la communauté universitaire et étudiante craigne une régression vers un État autoritaire, où ses membres seront traité·es comme des « ennemis de l’intérieur » et traités en conséquence. Ces craintes deviennent de plus en plus réelles car, avant et après l’adoption de la loi, la police s’est livrée à une violence aveugle généralisée et à des pratiques autoritaires : conduire des motos sur des étudiants qui manifestaient pacifiquement contre la loi ; casser, avec un extincteur, les dents et la mâchoire d’un étudiant manifestant pacifiquement ; torturer en public un étudiant membre d’un groupe d’étudiant∙es qui, pour protester contre la loi sur l’éducation, avait occupé pacifiquement le bâtiment administratif de l’Université Aristote de Thessalonique ; et même enlever des étudiant∙es dans leur propre maison dans la ville de Chania, en Crète2.

      Il convient également de noter que le manque de formation des gardes spéciaux a également soulevé de sérieuses préoccupations et objections au sein des syndicats de police, qui s’opposent unilatéralement à la dotation en personnel des escouades universitaires de cette manière. Malgré l’absence de formation adéquate, ces brigades auront le pouvoir de patrouiller, d’arrêter, de conduire des interrogatoires préliminaires, de prévenir et de traiter tout comportement « déviant » ou criminel dans les espaces universitaires (article 18) ; et elles devront doter les centres de contrôle des signaux et des images d’un personnel universitaire. Le fait que la loi (article 19) stipule clairement que les gardes spéciaux peuvent exercer toutes les fonctions de police, à l’exception des interrogatoires préliminaires, fonction qu’ils sont censés exercer dans les universités, soulève de sérieuses questions pour la communauté universitaire et étudiante. La loi ne précise pas non plus ce que l’on entend par comportement « déviant » ni la manière dont ces brigades vont le « prévenir » — faut-il entendre qu’elles vont arrêter et fouiller les étudiants et le personnel et effectuer des inspections dans les salles de cours ? En outre, les autorités universitaires doivent faciliter les nouvelles patrouilles des « forces spéciales » par « tous les moyens possibles » pour accomplir leurs tâches. Là encore, la loi ne précise pas clairement ce que cette facilitation implique et si les doyens et les sénats des universités auront le droit de s’y opposer ou même de la rejeter.

      Ce dernier point nous amène à la question la plus importante concernant cette législation. La loi sur l’éducation (article 18, paragraphe 5) stipule que ces escadrons de police ne relèvent pas des autorités universitaires, comme l’exigeait jusqu’à présent la dimension constitutionnelle de l’autonomie des universités (franchises universitaires). Au lieu de cela, elles relèvent directement du mandat du ministère de la Protection du citoyen et de la police grecque. Tous ces aspects sont très éloignés de la protection des libertés académiques que la législation prétend assurer. Les libertés académiques impliquent la liberté de la recherche scientifique et de l’enseignement, la liberté de circulation des idées ainsi que le prérequis constitutionnel de la nature totalement autonome des universités. Par conséquent, le fait que ces brigades soient placées sous la gestion et la supervision de la police grecque rend cette loi inconstitutionnelle au regard du principe d’autonomie des universités. La législation porte une entrave manifeste aux libertés académiques et transforme sans doute les universités grecques en forteresses de la police qui les contrôlent, les surveillent et participent à leur répression. Le fait que le sous-secrétaire à l’éducation ait justifié la mise en place de brigades et de postes de police au sein des universités au motif qu’il s’agissait d’une pratique courante sous la junte militaire, renforce les craintes de la communauté universitaire concernant les libertés académiques et l’autonomie des universités.

      Si la surveillance généralisée est une pratique courante et généralement incontestée dans les universités du monde anglo-américain, il y a fort à parier que ces universités n’ont pas fait l’objet d’un chantage — bien que certains développements récents concernant la liberté d’expression dans les universités britanniques puissent laisser penser le contraire — de la part du gouvernement de leur pays par le biais d’une législation — dans le cas de la Grèce, les parties C (d) et D (b) de la loi. La loi précise en effet que leur financement serait réduit si elles n’appliquaient pas les conditions de surveillance et de discipline prévues, ce qui confirme à nouveau l’atteinte à l’autonomie des universités. En ce qui concerne les données de surveillance 24/7 des Centres pour les Signaux et les Images, pour ce qui concerne la protection de la vie privée et des données, beaucoup de doutes subsistent : combien de temps les données seront stockées, quel sera le but de leur traitement et, plus important encore, quelles sont les soupapes de sécurité prévues pour empêcher l’utilisation abusive des données. Jusqu’à présent, les pratiques en Grèce montrent que le règlement général de l’UE sur la protection des données (RGPD) n’est pas respecté. Comme le professeur Mitrou, expert en protection des données et en droit de la vie privée, l’a souligné :

      « La législation grecque n’a pas respecté le RGPD comme limite normale et a (mal) utilisé les « clauses d’ouverture » comme le pouvoir discrétionnaire des États membres, non pas pour améliorer mais pour réduire le niveau de protection des données ».

      Pour ne rien arranger, le fait que le personnel d’enseignement et de recherche de l’université, devant travailler dans ces centres avec la police, ne maîtrise guère les systèmes de planification et de brigades de la sécurité, rend plus vraisemblable que les brigades de police de l’université superviseront le traitement des données. On peut donc se demander qui contrôlera ces brigades pour éviter qu’elles ne violent la législation européenne relative au traitement et à l’utilisation abusive des données. Des questions similaires se posent pour la dotation des unités et des comités de sécurité et de protection en personnel. Il n’existe, qui plus est, aucune précision pour savoir si les brigades de la police universitaire seront également équipées des dispositifs permettant la reconnaissance faciale instantanée et l’identification des empreintes digitales, éléments dont la police grecque doit disposer d’ici l’été 2021. Une question qui crée un malaise encore plus grand concernant la légitimité et la protection du traitement des données biométriques mêmes des étudiants et du personnel.

      En pratique, nous avons connaissance de plusieurs cas dans le monde anglo-américain où les garanties de protection de la vie privée et des données ont été violées : les administrateurs de systèmes de surveillance et les administrateurs d’université surveillent les courriels et les médias sociaux du personnel et des étudiants, leurs mouvements sur le campus et parfois hors du campus, et ont utilisé ces moyens de surveillance pour avoir prise sur le personnel universitaire et étouffer tout type de protestation ou de diffusion d’informations qui, bien que respectant la charte éthique de l’université, ne soient pas approuvées par l’administration de l’université. Cela avive les inquiétudes de la communauté universitaire et étudiante grecque concernant les libertés académiques. C’est ce que confirme la Fondation pour les droits individuels dans l’éducation (FIRE), qui a déjà constaté que de telles pratiques de surveillance sont susceptibles d’être utilisées à mauvais escient et peuvent donc se transformer en outils non seulement contraires aux libertés publiques mais aussi anti-constitutionnels. Ces évolutions alarmantes devraient peut-être nous amener à nous demander si nous n’abandonnons pas une trop grande partie de notre liberté au nom de la « sécurité » et si nous voulons voir les universités devenir des institutions autoritaires. Mais comment en sommes-nous arrivé·es là ?
      Des tentatives délibérées de diffamer l’université publique grecque

      Au cours des mois précédents, le gouvernement de la Nouvelle Démocratie et les médias pro-gouvernementaux se sont engagés dans une campagne malveillante visant à diffamer les universités publiques et à les présenter aux citoyens grecs comme des « sites d’anarchie », de désordre et de délinquance. Les universités grecques connaissent incontestablement des problèmes — principalement dus au grave sous-financement de ces dix dernières années — mais on peut les considérer comme des lieux de criminalité et de désordre. Sofia Vidali, professeur de criminologie, déconstruit avec éloquence ces représentations dans son article intitulé « Criminalité et maintien de l’ordre dans l’enseignement supérieur grec : ‘vérités’ et ‘mensonges’« , en montrant que les cas de délinquance et de petite criminalité sont liés aux caractéristiques socio-économiques et spatiales plus larges de la région dans laquelle se trouve chaque université. En outre, les infractions commises à l’intérieur et à l’extérieur des locaux universitaires — qui sont comptabilisées comme une seule et même zone dans les statistiques officielles de la police— ne représentent qu’une infime partie (2 053 infractions sur environ 1 835 792) des crimes commis dans le pays entre 2007 et 2018.

      Parmi les exemples majeurs utilisés par la ministre de l’Éducation, Niki Kerameus, et par la propagande médiatique pro-gouvernementale, on trouve la peur qu’auraient eu les universitaires de devenir otages de leurs étudiant∙es — en particulier des étudiants de gauche. Les médias ont construit une « panique morale » (voir Coehn, S. 1972/2002) autour de deux incidents. Le premier fut de murer symboliquement, en 2006, le bureau du doyen de l’université Démocrite de Thrace par les étudiants en signe de protestation contre la gestion scandaleuse de la restauration étudiante. Alors que le bureau du doyen était vide au moment de l’installation, les étudiants auraient piégé le doyen dans son bureau : Madame Kerameus déclarant le 8/02/2021 que « nous devons convaincre les jeunes qu’il n’est pas normal de construire des installations dans le bureau des professeurs« . La seconde affaire est un incident malheureux et atypique survenu à l’Université économique d’Athènes en octobre 2020, où des jeunes issus du milieu politique anti-autoritaire ont forcé le doyen à porter un panneau indiquant son soutien à l’occupation des bâtiments. Alors que la communauté universitaire avait unanimement condamné l’événement et, bien qu’il s’agisse d’une exception plutôt que de la règle, l’incident a été représenté comme le quotidien de la vie universitaire. Ces représentations ont été largement utilisées pour justifier et légitimer auprès du grand public la nécessité de discipliner, de surveiller et d’établir une force de police au sein des universités.

      Dans ce contexte médiatique, il y a également eu une diffamation orchestrée des professeurs d’université qui ont contesté les interprétations de la Ministre. Un exemple typique est que le gouvernement grec a tenté de justifier sa loi par de prétextes mensongers de « meilleures pratiques » qui auraient cours dans le monde occidental et en particulier à l’Université d’Oxford ; affirmant qu’il existe une force de police établie pour la sécurité de cette dernière. Lorsqu’un professeur grec de l’Université d’Oxford, Antonios Tzanakopoulos, a nié la présence d’une telle force de police, les médias et ministres pro-gouvernementaux grecs, suivant largement les techniques de communication de Trump, ont tenté de déformer et de calomnier ses déclarations en disant qu’il est un menteur et un falsificateur à l’origine de la diffusion des fake news. Il faut noter que l’UCU d’Oxford a ouvertement pris position contre la loi, tout en niant l’existence d’une police universitaire sur son campus. Ces processus de désinformation, de censure et de réduction au silence de toute intervention qui irait à l’encontre des buts poursuivis par le gouvernement ont eu cours tout au long de l’année dernière, faisant de la Grèce l’avant-dernier pays de l’UE en matière de liberté de la presse et un exemple de démocratie faussée3. De fait, aucune force de police n’est établie dans une université européenne. Au contraire, comme c’est encore le cas actuellement en Grèce, les agent∙es de sécurité et les gardien∙nes — qui peuvent être des fonctionnaires ou des particuliers — placé∙es sous l’autorité de l’université ont la responsabilité des questions de sécurité.

      Ces pratiques délibérées de diffamation des universités, de leur personnel académique et de leurs étudiant∙es surviennent après presque une décennie de grave sous-financement de l’université grecque. Pendant la crise économique aiguë (2010-2018), le financement des universités a été réduit de 75 %, voire de 120 % dans certaines universités4, plaçant la Grèce aux dernières places en Europe en termes de financement et d’infrastructures universitaires — ce qui inclut le licenciement des gardien∙nes et du personnel de sécurité. C’est donc une grande déception pour le personnel universitaire de voir que le gouvernement est prêt à fournir 50 millions d’euros — 20 millions par an pour les salaires des 1030 brigades de police universitaires et 30 millions pour la mise en place de systèmes de sécurité — alors que la totalité du budget [NDLR de sécurité] des universités, qui souffrent toujours de sous-financement, se monte à 91 millions d’euros5. Cet argent pourrait sans doute être utilisé pour embaucher davantage de personnel d’enseignement, de recherche et d’administration, des agents de gardiennage et l’investissement dans les infrastructures — c’est-à-dire des espaces d’enseignement et des équipements de laboratoire. Le maintien de l’ordre et la surveillance ne résoudront aucun des problèmes auxquels les universités grecques se trouvent confrontées en raison de leur sous-financement chronique.

      La diffamation médiatique que subissent les universités grecques fait passer soigneusement sous silence qu’en dépit de leur sous-financement et leur handicap en termes de production de connaissances à l’échelle mondiale — si on ne publie pas en anglais, on n’existe littéralement pas — conservent de très bonnes places dans les classements mondiaux des universités (classées parmi les 1000 premières universités du monde). Il est important de noter que ces représentations calomnieuses font suite à une autre législation (4653/2020) du ministère de l’éducation, qui mettait sur un pied d’égalité les diplômes des collèges privés et ceux des universités publiques, « améliorant » considérablement les diplômes des premiers et « dévalorisant » les diplômes des secondes. En Grèce, les collèges privés ne produisent pas de recherche et les connaissances qu’ils dispensent ne sont pas soumises aux mêmes évaluations de qualité que celles des universités publiques. Cette « revalorisation » des collèges privés est associée à un autre aspect controversé de la loi (4477/2021) en cours de discussion, qui réduit de 20 à 30 % le nombre d’étudiant∙es admis∙es dans les universités publiques, en canalisant les étudiant∙es « exclu∙es » vers les collèges privés. Un aspect qui non seulement réduit davantage le financement des universités publiques, mais qui touche également les couches sociales les plus vulnérables de la société grecque en entravant leur mobilité éducative et sociale. En d’autres termes, les représentations de la criminalité et de l’ »anarchie » et, plus généralement, la diffamation et la dégradation de l’université publique, propagées par les médias et le gouvernement de droite, aident ce dernier à légitimer la domination du dogme de la « loi et de l’ordre » tout en parachevant la réalisation de son programme néolibéral de privatisation de l’enseignement supérieur.
      Remarques conclusives : Quelle université voulons-nous ?

      Comme l’a fait valoir le professeur Costas Douzinas, de Birkbeck University, ce qui fait défaut dans toutes les discussions contemporaines sur l’enseignement supérieur en Grèce et à l’étranger, c’est la question fondamentale de savoir quelles universités nous voulons.

      L’université vise essentiellement à assurer la liberté totale de penser, de critiquer, de contester, de rechercher et de faire circuler les idées dans une recherche constante de la « vérité ». Elle vise à approfondir la démocratie, y compris la démocratie cognitive, en fournissant une pluralité de savoirs, de pédagogies et de méthodologies pour comprendre le monde qui nous entoure. En tant que tel, l’enseignement universitaire a une valeur en soi, qui ne peut être instrumentalisée à une simple finalité professionnelle. En effet, le savoir dispensé par les universités vise à l’épanouissement de l’âme et de l’esprit humains en façonnant constamment une compréhension de la condition humaine, de notre moi individuel, du monde et de nos sociétés, ce qui constitue une « valeur humaine absolue » en soi (Carr 2009:14). De cette façon, les étudiant∙es seront plus tard en mesure de contribuer non seulement à l’économie mais aussi à la démocratie.

      Lorsque l’université devient simplement une institution de formation professionnelle — tendance que nous voyons prospérer dans le monde et qui est sans doute aussi l’objectif de la loi grecque sur l’éducation qui entend dévaloriser les universités publiques et criminaliser l’action sociopolitique — elle cesse alors d’être un lieu de culture de la connaissance, mais une simple banque d’informations ; une marchandise qui, si l’on y investit, fournira les compétences nécessaires à la production d’un apprenant/ consommateur/travailleur « discipliné » pour servir uniquement les besoins de la croissance économique de chaque nation (Drummond, 2003). L’université perd ainsi son essence émancipatrice et démocratique et le lien organique qu’elle noue avec les luttes sociales. Le professeur Boaventura de Sousa Santos démontre avec force ce qui est en jeu au niveau mondial si nous continuons à suivre cette tendance :

      « Où que vous soyez, il y a toujours des gens qui luttent contre l’oppression, et vous devriez vraiment essayer de travailler avec eux si vous êtes à l’université. Sinon, l’université sera bientôt une entreprise capitaliste comme une autre, dont la valeur marchande est définie par les classements, les étudiant∙es seront des consommateur∙trices et les enseignant∙es, des travailleursou des travailleuses ou, pour mieux dire, des collaborateurs ou collaboratrices. Si nous abandonnons notre responsabilité sociale, l’université telle que nous la connaissons n’aura pas d’avenir ».

      Cet article est un appel contre un tel avenir sombre qui nous affectera tous globalement et localement et qui pourrait mettre en péril l’avenir de la démocratie et de la liberté académique telles que nous les connaissons.

      https://academia.hypotheses.org/31734

      ping @etraces

  • European countries should lift the taboo on Afrophobia and start addressing this phenomenon
    https://www.youtube.com/watch?v=FKs5N0mq7A4&feature=emb_logo

    “Racism and racial discrimination against people of African descent remain a widespread yet unacknowledged problem in Europe. It is time to recognise it and take measures to combat Afrophobia more effectively”, said today the Council of Europe Commissioner for Human Rights, Dunja Mijatović, releasing a report on the topic ahead of the International Day for the Elimination of Racial Discrimination.

    The report is based on the discussions that the Commissioner held on 24 November 2020 with human rights defenders working on combating Afrophobia. It highlights that people of African descent continue to be exposed to particularly grave forms of racism and racial discrimination, including racial stereotyping, racist violence, racial profiling in policing and criminal justice, and practices which perpetuate social and economic inequalities.

    This situation is compounded by the prevailing denial of the problem and a lack of public debate on Afrophobia in Europe. Cases and patterns of human rights violations affecting people of African descent are not given adequate consideration, even when they are reliably attested.

    The report also points to the limited research and equality data, the insufficient efforts to address the legacy of colonialism and the slave trade, and the lack of educational and awareness-raising efforts that contribute to the invisibility of the problem.

    The Commissioner underlines the important work carried out by human rights defenders of African descent and NGOs working on combating Afrophobia. She regrets the threats to their lives and safety and the various forms of pressure they are subjected to, such as harassment and attacks in the media online and offline, as well as surveillance and censorship.

    Human rights activists of African descent are also regularly sanctioned for occupying the public space, for example in conducting demonstrations. They face a higher risk of being profiled by automated tools and there appears to be inadequate police protection and a lack of prosecution for attacks against human rights defenders, often carried out by right-wing extremist groups.

    “There is a wealth of international standards and guidelines underlying states’ obligations to combat racism and racial discrimination, paying particular attention to persons of African descent. Member states should implement them as a matter of urgency to reverse the situation”, said the Commissioner.

    She recommends making the fight against racism and racial discrimination a top priority and showing a clear commitment to addressing the legacy of colonialism and the slave trade. “There is a need to overcome the resistance to the acknowledgment of responsibility for these violations”, says the Commissioner. She also stresses the need to reflect historical slavery and the colonial past, as well as their present-day ramifications, in school curricula.

    The Commissioner also draws attention to the importance of taking steps to stamp out racial profiling and impunity for racist crimes committed by law enforcement agents; taking action against all forms of incitement to hatred against people of African descent and enhancing protection against hate crimes; strengthening measures to combat discrimination in access to education, employment, housing and health care, and ensuring that artificial intelligence systems do not discriminate.

    Lastly, the Commissioner stresses member states’ obligation to provide protection and support to human rights defenders working to combat Afrophobia, facilitating a safe and free environment for them to carry out their work without unnecessary or disproportionate legal, political or administrative obstacles. They must be given a voice in national policy and should have more opportunities for dialogue at regional level. “It is time that European countries face the roots and present forms of racism and discrimination and start building more inclusive societies”, concluded the Commissioner.

    https://www.coe.int/en/web/commissioner/-/european-countries-should-lift-the-taboo-on-afrophobia-and-start-addressing-thi
    #Afrophobie #discriminations #racisme #discriminations_raciales #conseil_de_l'Europe #Europe #rapport #droits_humains #stéréotypes #violence #violence_raciale #profilage_ethnique #inégalités #colonialisme #esclavage #invisibilisation #harcèlement #censure #surveillance #responsabilité #éduction #intelligence_artificielle #IA #AI

    Pour télécharger le rapport:


    https://rm.coe.int/combating-racism-and-racial-discrimination-against-people-of-african-d/1680a1c0b6

    ping @cede @isskein @_kg_ @karine4

  • Pesticides : le Conseil constitutionnel retoque les dérogations aux distances d’épandage et donne raison aux ONG écologistes
    https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/metiers/agriculture/pesticides-le-conseil-constitutionnel-retoque-les-derogations-aux-dista

    Une victoire pour les associations écologistes. La méthode d’élaboration des chartes locales qui permettent de réduire les distances de sécurité entre les habitations et les zones d’épandage de pesticides est contraire à la Constitution, a jugé vendredi 19 mars le Conseil constitutionnel.

    Est-ce qu’il y a un compteur du nombre de foutaises invalidées pour chaque gouvernement au fur et à mesure du temps ? En ce moment, c’est plus ou c’est moins ? Ça dépend des saisons ? Est-ce que l’INSEE tient à jour des courbes de la surmortalité des textes officiels décédés face au conseil constitutionnel ?

    Parce qu’à la longue, on a vraiment l’impression que la Macronie est infoutue d’adopter la moindre décision sans contrevenir à la Constitution.

  • Près d’un salarié sur deux qui transmet le virus en entreprise se sait malade
    https://www.bfmtv.com/economie/pres-d-un-salarie-sur-deux-qui-transmet-le-virus-en-entreprise-se-sait-malade

    « De façon inquiétante, 46% des personnes sources de l’infection en milieu professionnel étaient symptomatiques au moment du contact infectant et s’étaient donc rendues sur leur lieu de travail se sachant symptomatiques », pointe le conseil scientifique reprenant les données de l’étude ComCor.

    #covid-19 #travail #carence #présentéisme #conseil_scientifique

    • Rarement la bêtise du « monde du travail » ne m’aura autant sauté aux yeux. Les employeurs sont évidemment les premiers responsables mais pas les seuls, malheureusement. A commencer par le gouvernement : aucune règle stricte n’a été établie concernant le télétravail. Toujours cocasse donc de les voir s’étonner que « ce n’est pas respecté ». Ils n’ont toujours pas compris (ou plutôt font semblant de ne pas comprendre) que le seul truc que les patrons comprennent plus ou moins, ce sont des lois avec sanctions en cas de non respect. Et puis les employés, qui trop souvent ne sont pas en reste pour montrer qu’ils peuvent être aussi idiots que leur employeur.
      Je suis sûr que si je demande à mes collègues comment le virus se propage, je n’aurai pas beaucoup de réponses justes (faut dire que la communication gouvernementale est toujours à la ramasse là dessus). Mais pourtant je bosse dans une entreprise du secteur de la santé (on forme même des professionnels de santé à propos du Covid, c’est fou d’ailleurs comme certains arrivent à séparer ce qu’ils enseignent de leur pratique quotidienne). La dernière fois que j’ai demandé à ce qu’on ouvre la fenêtre de la cuisine pendant la pause déjeuner, on m’a répondu qu’on l’ouvrait 5 minutes avant et que c’était suffisant. Donc depuis je suis en télétravail à temps plein, ça fait 5 mois, j’en avais un peu marre de passer pour le chieur de service (bonus : le bureau à côté du mien, c’est sans masque toute la journée, même se laver les mains c’est trop demander). Je plains toutes celles et ceux qui ont l’obligation de rester sur place à leur taf... Je n’oublie pas aussi que les années précédentes certains venaient avec leur gastro (très sympa, en plus d’être contaminants, les chiottes sont occupées la moitié de la journée et bien pourries). Est-ce que c’est typiquement français cette bêtise crasse ou faudrait que je déménage ailleurs ? (je sais que les 3 jours de carence ça joue aussi, mais franchement dans le lot y en a qui sont pas dans le besoin, et au pire y a le télétravail, mais c’est vu comme un « congé » dans ma boîte).

    • Ces gens qui nous gouvernent, se sentent en train d’écrire l’Histoire. Ils se voient dans le costume de Pétain à Verdun ou de Thiers en 1871. Pour eux, gouverner, c’est punir, c’est avoir son lot de cadavres. Même ceux qu’on aurait pu éviter. Surtout ceux-là. Sans morts gratuites, pas de postérité.
      Ces gens sont des malades à oublier très vite. Enfin pas trop non plus. A oublier correctement. C’est à dire en évitant de leur faire des statues ou en attribuant leurs noms à des rues ou des boulevards...

  • Council of Europe’s anti-torture Committee calls on Malta to improve the treatment of detained migrants

    In a report published today on a rapid reaction ad hoc visit to Malta in September 2020, the Council of Europe’s anti-torture committee (CPT) urges the Maltese authorities to change their approach towards immigration detention and to ensure that migrants deprived of their liberty are treated with both dignity and humanity.

    The Council of Europe’s Committee for the Prevention of Torture and Inhuman or Degrading Treatment or Punishment (CPT) has published today the report on its ad hoc visit to Malta focussing on immigration detention, which took place from 17 to 22 September 2020, together with the response of the Maltese authorities.

    In the report, the CPT acknowledged the significant challenges posed to the Maltese authorities by the arrival of increasing numbers of migrants, exacerbated by the Covid-19 pandemic. Nonetheless, this situation cannot absolve Malta from its human rights obligations and the duty of care owed to all migrants deprived of their liberty by the Maltese authorities.

    Overall, the CPT found an immigration system that was struggling to cope: a system that purely “contained” migrants who had essentially been forgotten, within poor conditions of detention and regimes which verged on institutional mass neglect by the authorities. Indeed, the living conditions, regimes, lack of due process safeguards, treatment of vulnerable groups and some specific Covid-19 measures were found to be so problematic that they may well amount to inhuman and degrading treatment contrary to Article 3 of the European Convention on Human Rights.

    The carceral design of detention centres such as Hermes Block and the Warehouses at Safi Detention Centre remained totally inappropriate: large rooms crammed with beds, no privacy, and communication with staff via locked doors. Migrants were generally locked in their accommodation units with little to no access to daily outdoor exercise and no purposeful activities. Other deficiencies included a lack of maintenance of the buildings (especially the sanitary facilities), insufficient personal hygiene products and cleaning materials and an inability to obtain a change of clothes. Moreover, there was also a systematic lack of information provided to detained persons about their situation, compounded by minimal contact with the outside world or even staff.

    Vulnerable migrants in particular were not getting the care and support they required. Not only were young children and their parents as well as unaccompanied/separated minors being detained, but they were held in very poor conditions, together with unrelated adult men. Clear protection policies and protocols for looking after vulnerable migrants need to be put in place.

    The CPT underlined that there is an urgent need for Malta to revisit its immigration detention policy, towards one better steered by its duty of care to treat all persons deprived of their liberty with dignity.

    The CPT stressed that the problem of migration into Malta was not new and will almost certainly continue given the push factors that exist in those countries from which the vast majority of migrants come. Therefore, Malta together with the support of the European Union and other member states must put in place an immigration detention system which abides by European values and norms.

    In their response, the Maltese authorities provided detailed information on the steps being taken to improve the conditions of detention for detained migrants and outlined the measures taken and currently underway to reduce the pressure on the immigration detention system, including notably the significant reduction in the number of migrants being detained and instead transferred into open centres and the many refurbishment works underway to improve conditions.

    https://www.coe.int/en/web/cpt/-/council-of-europe-s-anti-torture-committee-calls-on-malta-to-improve-the-treatm

    #détention_administrative #rétention #asile #migrations #réfugiés #Malte #rapport #Conseil_de_l'Europe

    ping @isskein @karine4

  • Doctolib : le chiffrement des données incomplet ?
    https://www.franceinter.fr/justice/doctolib-le-chiffrement-des-donnees-incomplet

    La plateforme de prise de rendez-vous Doctolib assure une sécurisation des données que les patients lui confient. Nous avons procédé à un test pour vérifier comment ces données étaient sécurisées. Verdict : les données ne sont pas chiffrées de bout en bout, ce que la société conteste. Pour prendre rendez-vous avec un médecin, ou pour se faire vacciner, de plus en plus d’utilisateurs ont recours à la plateforme de prise de rendez-vous en ligne Doctolib. Pour ce faire, il faut créer un compte, fournir des (...)

    #Amazon #Doctolib #cryptage #données #CloudComputing #AmazonWebServices-AWS #santé #COVID-19 (...)

    ##santé ##Conseild'État-FR

  • Protection des migrants en Méditerranée : le Conseil de l’Europe s’alarme des politiques migratoires de l’UE
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/03/09/protection-des-migrants-en-mediterranee-le-conseil-de-l-europe-s-alarme-des-

    Protection des migrants en Méditerranée : le Conseil de l’Europe s’alarme des politiques migratoires de l’UE. Dans un rapport publié mardi, l’instance européenne épingle le « manque de volonté des Etats européens » d’établir des politiques de protection, qui cause la perte de « milliers de vies humaines ».Refoulements d’embarcations, naufrages plus fréquents…, la situation des migrants qui traversent la Méditerranée s’est détériorée en 2020, aggravée par la crise sanitaire. Le Conseil de l’Europe a vilipendé mardi 9 mars le « manque de volonté des Etats européens » d’établir des politiques de protection, qui cause la perte de « milliers de vies humaines ».
    « Depuis des années, les pays d’Europe se sont engagés dans une course vers l’abîme, pour maintenir hors de nos frontières les personnes ayant besoin de notre protection, avec des conséquences désastreuses », déplore Dunja Mijatovic, commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, en introduction d’un rapport publié mardi. « Leur réponse est l’un des exemples les plus flagrants de la façon dont les mauvaises politiques migratoires portent atteinte aux droits humains et coûtent la vie à des milliers d’êtres humains. »
    Le document dresse le bilan de la mise en place des recommandations publiées en 2019, dans un précédent rapport, par le Conseil de l’Europe. Et le constat est sans appel : « La situation des droits humains dans la région méditerranéenne reste déplorable », et s’est « encore détériorée ». Sur la période observée, entre juillet 2019 et la fin de 2020, plus de 2 600 décès ont été recensés par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Le rapport rappelle que ce chiffre est sans doute sous-estimé, les noyades se produisant bien souvent hors des radars. « Les naufrages en Méditerranée demeurent tragiquement fréquents. » Le Conseil de l’Europe énumère plusieurs raisons à la détérioration de la situation, notamment « le retrait progressif des navires affrétés par les Etats », en même temps que les entraves, administratives et judiciaires, posées aux opérations de sauvetage menées par les organisations non gouvernementales (ONG). « L’approche des Etats consiste encore à limiter le travail vital des ONG, plutôt que de considérer qu’elles comblent les lacunes laissées par leur propre désengagement. »
    L’institution estime que ce désengagement des Etats européens vise à « accroître la possibilité » que les personnes en mer soient interceptées par les garde-côtes libyens et reconduites dans ce pays, malgré les « graves violations des droits humains » qui y sont commises contre les migrants. Certains pays n’ont d’ailleurs pas hésité à signer ou renouveler des accords avec Tripoli, et à « externaliser » certaines responsabilités.
    « Développer des voies de migration sûres et légales » Elle dénonce également la pratique, « en augmentation », des refoulements d’embarcations de migrants, documentée dans le cas des autorités maltaises, grecques et chypriotes, et suspectées de la part de l’agence Frontex. Le Conseil de l’Europe souligne que le contexte d’épidémie de Covid-19 a encore dégradé la situation : ainsi, en novembre 2020, un navire a été utilisé pour maintenir 1 195 migrants en quarantaine au large de la Sicile, et les délais de débarquement ont été allongés pour d’autres bateaux, quand les ports n’étaient pas tout simplement rendus inaccessibles.
    Le rapport invite les Etats européens à « développer des voies de migration sûres et légales », par exemple en généralisant les « visas humanitaires », encore « sous-utilisés », ou en assouplissant les règles permettant le regroupement familial. De telles réformes permettraient de limiter les « trafics et la traite d’êtres humains ».En conclusion, Mme Mijatovic appelle les pays membres du Conseil de l’Europe, tous signataires de la Convention européenne des droits de l’homme, à prendre des mesures pour préserver la vie des migrants tentant de traverser la Méditerranée. « Il s’agit là d’une question de vie ou de mort – et il en va de la crédibilité de l’engagement des pays européens en faveur des droits humains », prévient-elle.

    #Covid-19#migrant#migration#UE#conseildeleurope#politiquemigratoire#pandemie#politiquemigratoire#sante#mortalité#traite#regroupementfamilial#droit#visahumanitaire#quarantaine

  • Vaccins : le Conseil d’Etat examine le partenariat entre Santé.fr et Doctolib
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2021/03/08/campagne-de-vaccination-le-conseil-d-etat-appele-a-se-prononcer-sur-le-parte

    Des associations et syndicats s’inquiètent du fait que la plate-forme héberge ses données sur les serveurs de la société américaine Amazon, mais Doctolib assure que les informations médicales des Français sont protégées. Si l’on cherche sur le site gouvernemental Santé.fr où se faire vacciner contre le Covid-19, on peut trouver une liste de centres de vaccination par département, ainsi que des liens pour prendre rendez-vous directement en ligne, en passant par des plates-formes de rendez-vous médicaux (...)

    #Microsoft #Amazon #AmazonWebServices-AWS #Doctolib #cryptage #[fr]Règlement_Général_sur_la_Protection_des_Données_(RGPD)[en]General_Data_Protection_Regulation_(GDPR)[nl]General_Data_Protection_Regulation_(GDPR) #données #HealthDataHub #santé #COVID-19 #PrivacyShield #CJUE (...)

    ##[fr]Règlement_Général_sur_la_Protection_des_Données__RGPD_[en]General_Data_Protection_Regulation__GDPR_[nl]General_Data_Protection_Regulation__GDPR_ ##santé ##CNIL ##Conseild'État-FR

  • « L’Etat de droit mute doucement vers une forme ultra-sécuritaire » , Asma Mhalla, le 06 novembre 2018
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/11/06/l-etat-de-droit-mute-doucement-vers-une-forme-ultra-securitaire_5379355_3232

    Spécialiste des enjeux de l’économie numérique, Asma Mhalla montre, dans une tribune au « Monde », le glissement progressif d’un Etat de droit à un Etat de surveillance attentatoire aux droits des citoyens.

    (Quelqu’un.e traverse le wall, s’il vous plait ?)

    • Le Conseil d’Etat a fini par valider, le 18 octobre, le décret permettant la création du fichier TES (Titres électroniques sécurisés) qui rassemble les données personnelles et biométriques de la quasi-totalité de la population française. Et ce, bien que les risques d’une telle base de données qui généralise la reconnaissance faciale et la surveillance de masse perdurent.

      La même semaine, une étude produite conjointement par Cliqz et Ghostery, deux sociétés produisant des outils de protection des données personnelles, propose une analyse de premiers résultats – à interpréter avec beaucoup de précaution du reste – du règlement général sur la protection des données (#RGPD) appliqué depuis le 25 mai. Face à la promesse initiale de protéger les données personnelles des citoyens européens, l’effet semblerait être particulièrement aberrant puisqu’il aurait au contraire renforcé la position hégémonique de #Google sur ses marchés.

      Au nom de quel principe l’Etat s’autorise-t-il ce qu’il interdit aux entreprises privées ? Ne serions-nous pas en train de basculer d’un Etat de droit vers un Etat de sécurité avec la bénédiction paradoxale du droit lui-même et sans que cela n’émeuve grand monde ? Ce signal a priori faible marque pourtant une étape symbolique forte quant à notre devenir démocratique.

      Concept fondateur du droit public moderne, la fiction juridique qu’est l’Etat de droit traduit une certaine vision du pouvoir qui apparaît comme inhérente à la conception libérale de l’organisation politique : donnant à voir un pouvoir limité parce que régi par des règles, il implique que les gouvernants ne soient pas placés au-dessus des lois, mais exercent une fonction encadrée par le droit. La notion peut aussi se définir par opposition à l’Etat policier, caractérisé par le pouvoir discrétionnaire de l’administration.

      Or, à y regarder de plus près, une répartition inédite du pouvoir prend actuellement forme cristallisée autour de la capacité à collecter et exploiter les métadonnées. Matérialisée par l’apparition de deux pôles, l’un économique, l’autre sécuritaire, articulés autour d’un projet commun tacite de surveillance. C’est autour de ce phénomène que les luttes de pouvoir se concentrent désormais et que la relation des surveillants, Etat et plates-formes géantes, se dessine face aux surveillés.

      Les recours compliqués

      En dépit de leurs postures officielles en apparence divergentes, ces deux pôles d’un nouveau genre se positionnent sur un même continuum porté par une vision du monde cohérente où souveraineté algorithmique et souveraineté territoriale se compléteraient, où le « capitalisme de surveillance » irriguerait à la fois les intérêts publics et privés. Les termes initiaux du contrat social « liberté contre sécurité » glissent sans grande résistance vers la formulation « liberté contre sécurité contre vie privée » articulée autour d’un régime de vérité contemporain qui pose comme postulat que plus nous possédons de données, plus nous nous rapprochons avec précision de la « vérité ».

      Ce transfert d’une partie de la souveraineté de l’Etat le pousse à renforcer ses prérogatives en termes de souveraineté territoriale pour mieux s’auto-légitimer au regard du peuple. Par nécessité de survie, l’Etat de droit mute doucement vers une forme ultra-sécuritaire.

      Dès lors, à ce nouveau régime de vérité est assorti un discours dominant formalisé autour d’une rhétorique du repli, de la peur, de la menace, de la lutte antiterroriste. Légitimant ainsi la collecte massive de données et les dispositifs de surveillance généralisée qu’ils soient en réalité à des fins marchandes ou sécuritaires. Les intrications entre plates-formes privées et services d’intelligence, services d’ordre et armées nationales sont de notoriété publique, forment une complexe toile d’acteurs qui enregistre le moindre frémissement de nos existences numériques et physiques.

      Incertitude

      Le péril démocratique est aggravé par les systèmes de prédiction algorithmique. Ainsi, nul n’échappera à la surveillance et son corollaire la prédictibilité, ultime stratégie de neutralisation de l’incertitude. Car dans ce monde en réseau, c’est bien l’incertitude qui devient la hantise du pouvoir. La police et la justice interviennent désormais de façon prédictive et préventive avant le crime même. Pour être puni, il n’est plus nécessaire de commettre un crime mais de risquer de le commettre. Par cet impératif sécuritaire, nous risquons de faire face à une justice pénale sans crime qui nous considérerait tous coupables parce que tous potentiellement dangereux.

      Or l’Etat, par l’entremise du #Conseil_d’Etat, prend la responsabilité de préfigurer le développement et l’utilisation de ces technologies de surveillance émergentes. A titre d’exemple, l’article 4 du décret autorisant la création du fichier TES prévoit que son accès ne sera guère limité à la lutte contre la falsification et la contrefaçon mais également ouvert aux agents « chargés des missions de prévention et de répression des atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation et des actes de terrorisme » . Ce champ d’application très flou laisse craindre toutes sortes de dérives dans les usages policiers à venir de ce fichier. Abus qui seront démultipliés par le croisement du « mégafichier » avec nos données personnelles.

      Les recours pourront se révéler compliqués pour les citoyens. Sur le modèle des bureaucraties classiques, les algorithmes savent légitimer leur opacité pour conserver leur fonctionnalité. Face à ce qui apparaît comme l’évidence sécuritaire certains applaudissent, d’autres s’engourdissent. Reste que nous ne réussissons pas à nous saisir collectivement de ces occasions offertes pour débattre de la condition de nos libertés publiques et individuelles. A l’aune de ces évolutions récentes, les mots du philosophe Michaël Foessel formulés dès 2010 résonnent avec une acuité toute particulière : « la sécurité est le préalable de la démocratie, pas son horizon indépassable. »

      #État #capitalisme_de_plateforme #biométrie #reconnaissance_faciale #données #métadonnées #surveillance #sécuritaire #justice_pénale_sans_crime

  • Partage de données : les services de renseignement violent la Constitution
    https://www.laquadrature.net/2021/03/01/partage-de-donnees-les-services-de-renseignement-violent-la-constituti

    La Quadrature du Net vient de demander au Conseil d’État de saisir le Conseil constitutionnel d’une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) contre une disposition de la loi renseignement, l’article L. 863-2 du code de la sécurité intérieure. Comme le révélait le journal Le Monde il y a près de deux ans, un data-center attenant au siège de la DGSE permet aux services de renseignement d’échanger des données collectées dans le cadre de leurs activités de surveillance, et ce en contournant certaines (...)

    #DGSE #données #finance #surveillance #ConseilConstitutionnel-FR #Conseild'État-FR (...)

    ##LaQuadratureduNet

  • Extrait du Rapport annuel du référent déontologue ministériel - 2019 cité par le Canard enchaîné du 17 février.
    https://www.interieur.gouv.fr/fr/content/download/126152/1008827/file/rapport-annuel-du-referent-deontologue-mi-2019.pdf

    * FOCUS SUR L’USAGE DE LA #FORCE_PUBLIQUE***

    Depuis plus d’un an, le contexte particulier de la contestation sociale interroge sur l’usage de la force par les #policiers et les #gendarmes engagés sur des dispositifs de maintien de l’ordre. S’il n’est pas contestable que police et gendarmerie sont bien les dépositaires du monopole de la #force_légitime, ni que l’usage de la force légitime puisse s’avérer violent, au sens commun du terme, cet usage ne peut, en tout cas, se concevoir que dans le but de protéger les intérêts de la société et la sécurité des personnes et des biens. Prévu par le droit, l’usage de la force, et c’est ce qui fonde sa légitimité, doit être également accepté par la population.

    Aussi se pose la question de son mésusage ou des abus qui peuvent en être faits dès lors qu’il excède, notamment, les conditions de nécessité et de proportionnalité auxquelles il est soumis. C’est une interrogation qui questionne en permanence les inspections générales de la #police et de la #gendarmerie, instances de contrôle des deux institutions, lorsqu’elles ont à enquêter sur les conditions d’usage de la force publique. Mais c’est aussi une question qui interpelle l’ensemble du corps social et mérite une réflexion ouverte et globale qui permette de comprendre comment l’usage de la force peut répondre aux exigences de l’#ordre_public, tout en étant conforme aux #droits_de_l’Homme et à l’évolution des mœurs.

    Consulté par le ministre de l’intérieur sur la #déontologie des forces de l’ordre dans le maintien de l’ordre public, le référent déontologue ministériel a formulé plusieurs observations :

    « Plus que par le passé, la France est observée, parfois critiquée, par le monde et ses organisations politiques, juridictionnelles ou associatives, du #GRECO du #Conseil_de_l’Europe aux ONG comme l’#Action_des_chrétiens_pour_l’abolition_de_la_torture dans son rapport de mars 2020. Nous ne pouvons nous satisfaire de décisions comme celle de la Cour européenne des droits de l’homme [#CEDH] le 30 avril 2020 qui condamne la France à l’unanimité pour une interpellation menée le 18 juin 2002 par les forces de sécurité durant laquelle les policiers ont eu des gestes « particulièrement violents » et « pas strictement nécessaires » à l’encontre du requérant, alors suspecté dans une affaire de menaces de mort et subornation de témoins avant d’être blanchi.

    Nous travaillons sur plusieurs aspects de la déontologie qui sont communs à tous les secteurs du ministère de l’intérieur : probité, gestion des conflits d’intérêts et cadeaux, présence sur les réseaux sociaux, apparence physique en service.

    Mais, même en dehors de saisine à lui destinée sur ce point, le référent déontologue ministériel est attentif à l’usage de la force par les personnels. Car cette question délicate est spécifique à ce ministère chargé de la paix publique et de la police judiciaire, condition d’exercice plénier de la #justice.

    Le référent ministériel insiste sur la fonction des forces de sécurité qui est de faire respecter le droit et les libertés. La police et la gendarmerie nationales ne sont pas là pour atténuer ou restreindre les libertés, elles sont là pour garantir les conditions d’exercice des libertés conformément à notre Constitution (art.12 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen).

    La manifestation sur la voie publique est un droit. Bien entendu, ni l’insulte, ni l’agression des forces de l’ordre, ni les atteintes aux biens publics ou privés, lesquelles sont des délits. Le fonctionnaire et le militaire doivent savoir résister aux tensions et ne passer à l’action que quand ils en ont reçu l’ordre. Au commandement revient l’impératif de ne donner qu’un ordre légal et de l’accompagner des moyens raisonnables de mise en œuvre. Le manifestant n’est pas un ennemi. Il reste une personne qu’il convient de ramener dans le cadre de la loi et d’interpeller s’il commet des délits mais il ne s’agit ni de le « chasser » ni de le « réduire ».

    Et ce premier rapport ne peut éviter de souligner cinq points :

    1° En premier lieu, une déontologie de l’usage proportionné de la force et des armes est essentielle pour que les forces de sécurité (police et gendarmeries nationales) jouent le rôle que la République leur a confié.
    Ce principe exprimé notamment aux articles L435-1 et R434-18 du code de la sécurité intérieure (code de déontologie de la police et de la gendarmerie nationales) est essentiel pour les métiers publics de sécurité. Il implique de tous, et d’abord de la hiérarchie, sens de la nécessité, de la proportionnalité.

    2° Cette déontologie ne peut être fondée que sur le discernement des cadres et de chaque fonctionnaire ou militaire. Tel est bien le discernement rappelé à l’article R434-10 du code de sécurité intérieure (code de déontologie de la police et de la gendarmerie nationales). Le discernement en situation de stress, face à des violences, dont la gravité est en hausse, mérite toute notre attention. Le discernement porte sur l’analyse de la situation, la nature des forces utilisées, l’usage du temps (savoir passer de l’attente nécessaire à la réaction immédiate) et de la géographie (gestion des foules, issue de dispersion toujours ouverte), les ordres de manœuvres et de déplacement donnés aux effectifs et aussi, la nature des procédés qu’il s’agisse d’armes, de matériel ou de techniques d’intervention. (cf l’interdiction de la grenade GLI-F4 en janvier 2020 par le ministre de l’intérieur). Le discernement doit pouvoir maîtriser les mauvaises habitudes : colère et peur ne sont pas bonnes conseillères.

    3° La déontologie qui décrit les procédés adéquats pour mener les missions doit pouvoir être relayée par des recommandations du donneur d’ordres étudiées, testées et clairement exprimées. En ce sens, la publication du nouveau schéma national du maintien de l’ordre est attendue. Il était mentionné dans le rapport de la commission d’enquête sur les forces de sécurité à l’Assemblée nationale présidée par le député Jean-Michel Fauvergue (juillet 2019). La place du renseignement dans la préparation des grands dispositifs lors de manifestations doit être renforcée.

    4° La formation des personnels affectés à cette mission aussi indispensable que difficile du maintien de l’ordre doit être prioritaire.La formation se fait aussi par l’expérience des cadres intermédiaires qui contribuent à former sur le terrain leurs collègues plus jeunes. Quelle réponse à l’outrage et à la rébellion ? Quelles sommations et quelles informations diffuser aux manifestants, avant, pendant et après la manifestation ?

    5° Enfin le contrôle, et d’abord le contrôle interne doit être assumé comme une des causes de fierté de l’institution. Et non pas seulement subi au fil des enregistrements de scènes de rue par les téléphones toujours prompts à filmer les épisodes de fureur réciproques. Ceci suppose choix des équipes d’inspection sachant, quand il le faut, mêler inspection de direction générale (IGPN et IGGN) et inspection généraliste (IGA et même IGJ conformément à l’article 15 du code de procédure pénale). Et pourquoi s’interdire, dans certains cas délicats, de s’adjoindre des « sapiteurs » externes au ministère pour apporter une vue en toute apparence d’impartialité objective au sens de la jurisprudence européenne ? Ceci suppose que ne soient pas acceptées les quelques occasions où, dans une enquête administrative, la manifestation de la vérité est contredite par des témoignages unis et trop semblables ou unanimement mutiques des fonctionnaires et militaires qui participaient à la même action. Ceci suppose enfin, que pédagogie soit tirée des contrôles internes afin de ne plus reproduire des erreurs qui sont lourdes de conséquences. Quant aux contrôles externes, ils exigent une bonne coopération des administrations de sécurité : le Défenseur des droits joue un rôle constructif. Et quant à la justice, elle doit toujours pouvoir exercer sa mission en pleine indépendance. La maîtrise de la force continuera à être observée attentivement par le référent déontologue ministériel et la réunion des référents déontologues spécialisés. »

    Le déontologue est le magistrat Christian Vigouroux : https://fr.wikipedia.org/wiki/Christian_Vigouroux

  • #Université : une entreprise adepte de l’#optimisation_fiscale décroche le #marché des #tests_d’anglais

    Le gouvernement vient de confier l’organisation de #tests d’#anglais à l’université à une entreprise à la légitimité contestée, immatriculée à #Chypre et adepte de l’optimisation fiscale, pour plus de 8 millions d’euros par an. Au grand dam du corps enseignant.

    Dans les #facs vidées par le Covid-19 et qui se sentent abandonnées par l’État, l’attribution d’un #marché_public, fin décembre, a fait l’effet d’une petite bombe chez les enseignants en langue. L’objet de ce marché estimé à plus de 8 millions d’euros par an : l’organisation de tests et #certifications en anglais pour des centaines de milliers d’étudiants en licence, BTS ou DUT.

    Si quatre entreprises s’affrontaient au départ, le duel final a opposé #ETS_Global, une société qui fait référence (à l’origine du célèbre test #Toefl), à #PeopleCert, une entreprise fondée par un homme d’affaires grec et inconnue de la quasi-totalité des linguistes en France.

    Si ETS Global était devant, PeopleCert a cassé ses tarifs de 34,72 % pendant la phase de négociation avec le ministère de l’#enseignement_supérieur, d’après nos informations, pour emporter finalement le contrat.

    « La première chose que j’ai faite quand j’ai entendu ce nom, c’est d’aller voir leur site, qui comporte des fautes d’orthographe que je reprocherais à mes étudiants ! », raille Alexandra Sippel, maîtresse de conférences en cultures anglo-saxonnes à l’université Toulouse-Jean-Jaurès.

    Le choix de l’État est d’autant plus étonnant que PeopleCert pratique l’optimisation fiscale agressive, selon des documents consultés par Mediapart.

    #PeopleCert_International_Limited, l’entité qui a signé avec le ministère, est la société de tête d’un groupe qui en compte une dizaine (à Athènes, Londres, Istanbul ou Dubaï). Elle est immatriculée à Chypre, #paradis_fiscal européen très prisé, notamment des oligarques russes.

    C’était, lors de sa création, une société « boîte aux lettres » basée à l’adresse d’un cabinet de domiciliation chypriote. Elle contrôle deux sociétés britanniques, mais qui ne salarient que 8 personnes.

    En réalité, l’essentiel du travail est effectué par les sociétés grecques du groupe, dont la principale, #PeopleCert_Global_Services, employait 210 personnes en 2017 – en Grèce, le salaire minimum est presque deux fois moindre qu’en France.

    Étonnamment, PeopleCert Global Services réalisait seulement 412’000 euros de résultat pour 9,2 millions de chiffre d’affaires en 2018, tandis que la coquille chypriote #PeopleCert_International engrangeait 3,4 millions d’euros de profits.

    Il faut dire que les statuts de l’entité grecque autorisent deux des directeurs (dont le fils du fondateur) à effectuer « le transfert de n’importe quelle somme d’argent illimitée » vers les autres sociétés du groupe. En clair, le montage semble conçu pour transférer artificiellement les profits vers ce paradis fiscal.

    Entre 2015 et 2019, PeopleCert International a accumulé plus de 15 millions d’euros de bénéfices à Chypre, où le taux habituel de l’impôt sur les sociétés n’est que de 12,5 %, soit trois fois moins qu’en France.

    PeopleCert répond qu’aujourd’hui « plus de dix personnes sont employées dans les bureaux à Chypre, un État membre de l’UE ». « PeopleCert respecte la législation de chaque pays où il est implanté, en particulier la législation comptable, et y paie les impôts et taxes correspondants », indique #Frédéric_Borne, responsable du développement commercial de l’entreprise pour l’ouest de l’Europe.

    De son côté, le ministère de l’enseignement supérieur déclare à Mediapart que, Chypre étant membre de l’Union européenne, « l’implantation géographique du titulaire [du marché – ndlr] et de ses salariés n’a pas été prise en compte dans l’analyse des offres », car cela aurait été contraire au droit. Sur l’optimisation fiscale ? Aucun commentaire.

    Le fondateur grec du groupe, #Anastasios_Byron_Nikolaides, soigne aussi sa fiscalité personnelle. Entre 2011 et 2017, il contrôlait 100 % de PeopleCert International via des sociétés basées au #Liberia, remplacées en 2017 par une coquille offshore à Chypre, #PeopleCert_Holdings_Europe. Sollicité par Mediapart, il a refusé de répondre.

    Sa stratégie étonne d’autant plus qu’il répète à longueur d’interviews son attachement à la Grèce : ses parents, professeur d’anglais et institutrice, lui auraient inculqué le « philotimo », terme désignant le sens de l’honneur, du devoir, de la communauté.

    En 2018, il se félicitait de ne pas avoir abandonné son pays durement touché par la crise. « PeopleCert a fait ses preuves en maintenant non seulement son siège social en Grèce, mais aussi en y conservant des emplois ; aujourd’hui, plus de 90 % des employés de l’entreprise sont grecs », déclarait-il à Ritsa Masoura, présentée comme journaliste contributrice au Huffington Post Grèce, mais qui confie à Mediapart avoir travaillé deux ans pour PeopleCert.

    Les universitaires français apprécieront cette interprétation personnelle du « philotimo ». Ils sont nombreux, de toute façon, à s’élever contre le principe même de cette « #privatisation » des tests d’anglais. De quoi s’agit-il, exactement ?

    Jusqu’en 2018, chaque étudiant était libre de passer ou non une évaluation pour attester son niveau en langue (en plus de son diplôme) et de l’inscrire sur son CV. Il pouvait opter pour un dispositif public et gratuit (#le_Cles), ou bien pour le fameux #Toeic (organisé sur les campus, mais aux frais des candidats), ultra-populaire dans les écoles d’ingénieurs et les formations professionnalisantes.

    Puis Édouard Philippe, premier ministre, a décidé qu’une certification en langue serait obligatoire pour toute une série de diplômes (licence, BTS, DUT…) et a jugé indispensable de contracter avec un prestataire privé, au motif que le Cles manquerait de reconnaissance internationale.

    Depuis, la communauté universitaire est vent debout, dénonçant ici « une gabegie annoncée », là « une démonétisation des enseignements et diplômes accrédités par l’État », ou encore une « atteinte au plurilinguisme ». En septembre dernier, quinze associations de professeurs de langue ont lancé un #recours devant le #Conseil_d’État contre les textes rendant ces certifications obligatoires.

    Fin janvier, les mêmes ont attaqué l’attribution du marché à PeopleCert. « La question de la légitimité de cette entreprise se pose, de même que la question de la pertinence des critères d’attribution du marché et des modalités de sélection de l’entreprise retenue », écrivent-elles dans un communiqué.

    « Conclu sans montant maximum », le marché est reconductible tacitement chaque année jusqu’en 2024. Or, s’il s’agit de tester 22 000 étudiants en 2021, le volume doit gonfler à 281 000 étudiants « minimum » sur l’année universitaire 2023-2024. D’après les estimations de deux maîtresses de conférences, le coût pour l’État pourrait alors dépasser 32 millions d’euros par an. « [C’est] la moitié de l’enveloppe supplémentaire dévolue en 2020 à l’amélioration des conditions de vie étudiante », pointent-elles.

    Compte tenu de l’arrivée récente de PeopleCert dans l’univers des langues, sa victoire n’a fait qu’alimenter la controverse.

    Si la firme affirme avoir fait passer 7 millions d’examens dans 189 pays, elle ne précise pas la part de tests de langue dans ce total. Or, PeopleCert s’est construit en donnant des formations aux entreprises, aux particuliers ou aux ministères en cybersécurité, marketing digital ou management. Et s’il s’est ensuite fait un nom dans les certifications, c’est surtout en informatique et management.

    Plutôt que de développer son offre, PeopleCert a fondé son #business sur le rachat de certifications développées par d’autres. Depuis 2018, il distribue #Itil, une certification en gestion des services informatiques développée par un ancien organisme public anglais. En septembre, PeopleCert a acquis l’association américaine #IASSC et sa certification #Lean_Six_Sigma, populaire pour améliorer les performances des entreprises, récupérant ainsi de prestigieux clients comme Amazon, BMW, Cisco ou l’armée américaine.

    L’entreprise a adopté la même stratégie pour se diversifier dans les langues, avec sa marque #LanguageCert. Alors qu’il peinait jusqu’en 2015 à être reconnu dans le milieu universitaire, PeopleCert a ainsi acquis « toute la #propriété_intellectuelle et le matériel d’évaluation connexe pour les qualifications d’anglais de #City_&_Guilds, l’un des organismes de récompense les plus anciens et les plus prestigieux du Royaume-Uni », comme il le précise dans un dossier de présentation envoyé au corps enseignant français, le 1er février.

    Pour asseoir sa légitimité, PeopleCert s’est aussi payé un grand nom du secteur : #Michael_Milanovic, ancien PDG de #Cambridge_Assessment, qui baigne dans le milieu depuis plus de quarante ans.

    « Ils veulent se crédibiliser, mais leurs certifications en anglais sont des coquilles vides, confie Brice*, sous le couvert de l’anonymat, figure du secteur qui a côtoyé de près PeopleCert. On y voit bien leur philosophie : une plateforme qui délivre des examens créés par d’autres, mais pas un organisme de recherche et développement. Où sont les employés qui développent les items des tests de langues, où sont les psychomotriciens et statisticiens qui valident que la notation évalue bien ce qu’elle est censée évaluer ? »

    Cambridge Assessment et le leader du marché, #ETS_Global, emploient des dizaines de chercheurs pour développer et améliorer en permanence leurs systèmes de certification. Un coût que s’épargne PeopleCert avec sa stratégie de rachat.

    Malgré tout, le bilan de LanguageCert reste maigre, avec seulement une poignée de contrats signés ces dernières années : un au Royaume-Uni avec l’agence des visas et de l’immigration, et trois en Espagne, avec la région de Madrid, l’Andalousie et l’#université_Carlos-III.

    Et en #France ? L’entreprise a fait passer « 15’000 certifications pour l’année 2020, majoritairement par l’intermédiaire de ses 90 organismes de formation agréés sur 170 lieux d’examen », expose PeopleCert. Sans préciser s’il s’agit de tests d’anglais.

    Pour tenir le rythme, la société va devoir changer de braquet, puisque le marché signé avec le ministère prévoit la délivrance de 636’000 tests minimum sur quatre ans, soit un rythme annuel dix fois plus élevé que le total des tests réalisés en 2020 par la société en France.

    Le vice-président de la Société des anglicistes de l’enseignement supérieur, Cédric Sarré, s’interroge : « Ont-ils des examinateurs accrédités en France ? Des centres d’accréditation ? Leurs certifications sont-elles déjà utilisées par d’autres universités ? À ce stade, nous n’avons pas d’informations. »

    Responsable commercial de l’entreprise pour l’Europe de l’Ouest, Frédéric Borne répond que les étudiants auront le choix entre un test papier ou par ordinateur et que la surveillance des examens se fera au sein des universités, avec un chef surveillant dans chaque établissement pour vérifier le bon déroulé des tests.

    « Tous les services réalisés en France seront payés en France à des Français déployés sur le terrain », ajoute-t-il. Sans préciser si les corrections se feront en Grèce, pays où se trouve la grande majorité des salariés de PeopleCert.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/150221/universite-une-entreprise-adepte-de-l-optimisation-fiscale-decroche-le-mar