• École : leçon de notation (L’Express)
    http://www.lexpress.fr/education/ecole-lecon-de-notation_1720607.html

    Supprimer les notes n’aurait guère de sens. Dire à quoi elles servent en aurait un, celui de signifier si l’école est d’abord là pour former ou pour trier.
    […]
    Dès 1920, le psychologue américain Edward Thorndike parvient à isoler ce qu’il appelle « l’effet de halo » […] - « la note de gueule » […].
    En 1947, Karl Posthumus prouve que la majorité des enseignants répartissent les notes selon une courbe de Gauss : un peu de très mauvaises, un peu de très bonnes et beaucoup de moyennes ; et ce, quelle que soit la performance « objective » des élèves - phénomène récemment rebaptisé par le professeur de mathématiques André Antibi « la constante macabre ».
    En 1965, Jean-Jacques Bonniol prouve qu’une copie moyenne sera sur-notée si elle est corrigée après une mauvaise copie et sous-notée si elle l’est après une excellente copie. Dix ans plus tard, Jean-Paul Caverni, Jean-Marc Fabre et Georges Noizet affinent Thorndike en mesurant l’effet du passé scolaire d’un élève dans la façon dont il est noté - c’est « l’effet source », qui vaut au redoublant, à niveau identique, une moins bonne note qu’à l’élève affichant un an d’avance.

    […]

    Une première piste invite à défendre la note en tant que partie d’un tout qui la dépasse : l’évaluation. […] l’essentiel étant ici, non la notation, mais la correction, à savoir l’ensemble des mesures que l’enseignant met en œuvre pour permettre à l’élève de conforter ses apprentissages. Cette première piste dessine une école attentive à la réalité des apprentissages ; elle ne fonctionne qu’à partir du moment où les enseignants n’ignorent rien des effets pervers de tout système de notation, qu’ils notent dans le souci d’encourager et non de sanctionner et qu’ils assortissent la note d’un riche appareil pédagogique permettant à chacun d’apprendre de ses erreurs.

    […]

    La seconde piste s’inscrit dans une vision de l’école comme gare de triage. Réputée infaillible, la note apparaît ici comme une façon d’aider chacun à se situer par rapport aux autres plutôt que par rapport aux savoirs : c’est la note des concours et des classements, celle qui prétend objectiver de futures hiérarchies sociales et professionnelles.

    #éducation #évaluation #notation #évaluation_diagnostique #évaluation_formative #évaluation_sommative #constante_macabre #sélection #fiction_scientifique

  • « L’obsession évaluative », une maladie française ? (LeMonde.fr)
    http://orientation.blog.lemonde.fr/2011/10/20/l%E2%80%99obsession-evaluative-une-maladie-francaise

    L’évaluation a sa propre science : la #docimologie. Des études fondées sur l’exploration de copies d’examen ont par exemple démontré qu’une note n’était « stabilisée » en mathématiques qu’après avoir fait la moyenne de… 78 correcteurs. En philo, il en faut 162. C’est dire la fragilité d’un processus dans lequel la valeur est inévitablement relative. […]
    Le sociologue Pierre Merle soulignait ainsi en 2006 dans son ouvrage "L’élève humilié – L’école, un espace de non‐droit ?" (PUF) que « les humiliations subies par l’élève sont le produit de l’idéologie scolaire du classement qui autorise la mise en exergue de l’élève jugé faible et incapable ».
    Toujours est‐il que ce sujet reste encore tabou alors qu’il est générateur de frustrations et de violence. La plupart du temps, les professeurs n’ont d’ailleurs pas conscience du poids de ces petits mots, petites remarques assassines, […]. C’est la société française tout entière qui doit s’interroger sur le poids de mots qui blessent et sur son incapacité à encourager plutôt qu’à humilier…
    […] En 2003, le professeur des universités André Atibi a inventé le terme "constante macabre" pour expliquer pourquoi et comment il y aura toujours un tiers de bons élèves, un tiers de moyens et un tiers de mauvais dans une classe. Et cela quel que soit la moyenne de la classe !

    #éducation #évaluation #constante_macabre #élève