• Mise au point : les dangers de la nouvelle pénalisation des universités

    La #commission_mixte_paritaire (#CMP) qui s’est tenue hier après-midi, lundi 9 novembre 2020, était chargée de trancher les points de désaccords persistants entre l’Assemblée nationale et le Sénat à propos de la loi de programmation de la recherche. Pour cela, elle devait trancher, article par article, entre la version du texte votée par l’Assemblée nationale en première lecture et celle retenue par le Sénat.

    Les choix qu’elle a faits ont été pour le pire. Mais sur un point bien précis, pourtant, la CMP a choisi d’innover, plutôt que de trancher : elle a inséré dans la loi un nouvel article 20 bis AA qui dispose que :

    « Le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement supérieur sans y être habilité en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ou y avoir été autorisé par les autorités compétentes, dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement, est passible des #sanctions définies dans la section 5 du chapitre Ier du titre III du livre IV du #code_pénal ».

    Cet article est tombé du ciel. Plus précisément, il élargit de façon considérable un précédent article, que le Sénat avait lui-même déjà sorti de son chapeau (amendement n°147), et à propos duquel Academia n’a eu de cesse de sonner l’alerte.

    Un tel article est très grave – l’un des plus graves que contient la LPR, même – pour les raisons que nous avons exposées dans les minutes qui ont suivi la fin de la CMP : il sonne rien moins que la fin pure et simple des contestations sur les campus et ouvre grand la porte à toutes les dérives autoritaires.

    Il faut d’ailleurs mesurer la bassesse de la manœuvre de la ministre : jusqu’à présent, la ministre avait veillé à ne donner aucune prise directe à une #contestation du projet de loi par les étudiant·es et leurs organisations. Elle savait, en effet, que si cette #contestation_étudiante venait à s’ajouter à la fronde des personnels de l’ESR, le projet de loi ne s’en relèverait pas. Le nouveau #délit qui a été introduit hier montre, pourtant, que ces organisations étudiantes se trouvaient bien, en réalité, au centre du viseur gouvernemental. Car ce sont bien elles, à n’en pas douter, qui seront les premières victimes de la #pénalisation des #contestations dans les établissements.

    Un énorme doute nous étreint, au passage. Academia a déjà expliqué la basse manœuvre procédurale dont a usé la ministre pour court-circuiter tout débat autour de la mise à l’écart du Conseil national des universités. Et si, assistée de quelques chefs d’établissement, elle avait fait pire encore ? Et si l’introduction d’un tel article en commission mixte paritaire – ce qui revient à évincer littéralement les deux chambres, à supprimer toute forme de débat public à propos de cette mesure, et à court-circuiter toute protestation étudiante – était, elle aussi, préméditée ? Ce qui est sûr, c’est que, préméditation ou improvisation de dernière minute, l’introduction d’un délit de grande ampleur au stade d’une commission mixte paritaire dite « conclusive » est une ignominie. Ce ne sont pas des pratiques qui, dans une démocratie, devraient être permises.

    Une rumeur circule néanmoins à propos de ce délit, à laquelle il faut couper court : celle selon laquelle les collègues affectés dans un établissement, ou sous contrat avec celui-ci, ainsi que les étudiant·es qui y sont inscrit·es n’entreraient pas dans le champ du délit nouvellement créé. Cette interprétation est tout à fait discutable : dès lors que la formule choisie intègre dans le champ du délit toutes les personnes situées dans l’enceinte de l’université qui n’y ont pas été « autorisé[es] par les autorités compétentes », son champ d’application est, au contraire, très étendu. Quelques explications très brèves s’imposent à ce propos .

    La pénalisation des « non-autorisé·es »

    Il n’y a rien de plus simple que de placer quelqu’un dans une situation de ne pas être autorisé·e à être dans tout ou partie de l’université, y compris si cette personne est un personnel de cette université ou un·e étudiant·e qui y est inscrit·e.

    Il existe, pour cela, deux moyens.

    Le premier moyen relève de ce que l’on nomme le pouvoir de police général du président d’établissement. Celui-ci est « responsable du maintien de l’ordre » dans l’université (article L. 712-2, 6° du code de l’éducation, complété par l’article R. 712-1). A ce titre, il peut, soit lui-même, soit par l’entremise du directeur ou de la directrice de site ou de composante auquel·le il a donné délégation, refuser la tenue de certaines manifestations ou évènements, et même interdire « à toute personne et, notamment, à des membres du personnel et à des usagers de l’établissement ou des autres services ou organismes qui y sont installés l’accès de ces enceintes et locaux » d’accéder à ces locaux (article R. 712-8 du même code). Sur ce fondement, la possibilité de se retrouver en situation « non autorisée » est considérable, et ce, quand bien même on est directement rattaché à l’établissement.

    Le deuxième moyen est plus puissant encore, car il est préventif, et fait écho à une vive polémique qui s’était développée en février dernier, concernant l’université Paris-Descartes (université de Paris). Il suffit, pour cela, de créer, dans le règlement intérieur des établissements, des obligations sévères concernant l’organisation des évènements scientifiques, des réunions publiques et autres assemblées générales, ou concernant l’accès aux locaux des présidences ou aux séances des conseils d’administration. On songe, par exemple, à des obligations de présenter, deux mois à l’avance, une demande d’affectation d’un local auprès du président de l’université » ou aux interdictions de se rendre dans certains locaux sans autorisation formelle préalable, que le « badgage » à grande vitesse des universités rend aujourd’hui très concrètes.

    C’est même une tendance de fond des dernières années, que nous sommes nombreux·ses à dénoncer : les « non-autorisé·es » se multiplient à l’infini, la tradition d’accessibilité aux campus est en voie de disparition, les universités, devenues paranoïaques sous l’impulsion de réseaux comme Vigilance Universités ou Qualité de la science française, se ferment physiquement, en même temps que les collègues et les étudiant·es se trouvent sans cesse plus contrôlé·es, que ce soit pour faits de grève ou pour prétendu·es radicalisations.

    Et voilà donc que maintenant, d’un trait de plume dans les règlements intérieurs, ces « non-autorisé·es » sont en voie de pénalisation, avec des peines disproportionnées allant d’un à trois ans d’emprisonnement. Mais quelle université sommes-nous donc en train de voir éclore ?
    L’atteinte aux franchises universitaires

    Précisons, enfin, qu’une fois ces règlements intérieurs rédigés pour ce qui concerne les personnels et les étudiant·es de l’établissement, et indépendamment même de ces règlements intérieurs pour tou·tes les autres, les forces de l’ordre pourront intervenir, au titre du flagrant délit, et les procureurs pourront engager des poursuites, sans même que le président de l’établissement ne les sollicite. C’est, autrement dit, la reprise en main des universités qui se dessine au travers de cette disposition, et une attaque d’une violence presque sans précédent à l’égard des franchises universitaires.

    Cette manière de faire a la finesse d’un bulldozer. Depuis l’article 157 du décret impérial du 15 novembre 1811 relatif au régime de l’université, qui disposait :

    « Hors les cas de flagrant délit, d’incendie ou de secours réclamés de l’intérieur des lycées, collèges et autres écoles publiques appartenant à l’université, aucun officier de police ou de justice ne pourra s’y introduire pour constater un corps de délit ou pour l’exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt dirigé contre des membres ou élèves de ces établissements, s’il n’en a l’autorisation spéciale et par écrit de nos procureurs généraux, de leurs substituts ou de nos procureurs impériaux »,

    les franchises universitaires, tout comme les libertés académiques dont elles sont une déclinaison, plient seulement devant le droit pénal. Dès lors, il existe une manière très simple de procéder, que la ministre et celles et ceux qui la soutiennent ont bien assimilées : cette manière de faire consiste, non pas à toucher directement aux « franchises universitaires », mais à « se contenter » d’étendre le champ de la pénalisation des universités, et donc… le pouvoir d’intervention des autorités extérieures aux universités. C’est comme cela que l’on tue, sans le dire et sans l’assumer, mais de manière incontestable, ces franchises.

    *

    Bref, on l’aura compris, il est parfaitement irresponsable de faire circuler la rumeur selon laquelle les collègues affectés dans un établissement, ou sous contrat avec celui-ci, ainsi que les étudiant·es qui y sont inscrit·es n’entreraient pas dans le champ du délit nouvellement créé.

    N’oublions pas, non plus, que cet article nouveau, que la CMP a introduit hier, est le décalque d’un article du code pénal, le L. 422-31, qui existe d’ores et déjà depuis dix ans concernant les établissements scolaires et non universitaires, à la suite d’une des lois les plus liberticides du quinquennat de Nicolas Sarkozy, la loi du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public. Un article qui a allègrement servi, au printemps 2018, à placer en garde à vue, puis à déférer devant un juge des adolescent·es occupant le lycée Arago à Paris.

    Quand la police a embarqué tout le monde, la question de savoir lesquel·les de ces lycéen·nes étaient, ou non, inscrit·es dans l’établissement, et bien personne ne l’a posée…

    https://academia.hypotheses.org/28160
    #criminalisation #université #facs #grèves #luttes #police #ESR

    • L’université en taule

      Dernière étape significative du processus législatif pour la LPPR/LPR, la commission mixte paritaire s’est achevée hier, lundi 9 novembre, sur le pire des textes, et pire encore.

      Certes, l’amendement 234, celui qui asservissait les libertés académiques aux « valeurs de la République », a été redéfini pour être neutralisé. En revanche, l’amendement 147 (dit du « #délit_d’entrave ») a été encore aggravé, transformant la LPPR, loi de précarisation et de privatisation, en un cauchemar qui dépasse notre imagination : « tout délit d’entrave est désormais passible de 1 an de prison et de 7 500€ d’amendes, et s’il est commis en réunion, de 3 ans de prison et de 45 000€ d’amendes. »

      Cette prétendue « loi recherche » est donc une loi de précarisation, de privatisation et de criminalisation, qui entend nous faire passer de l’université au pénitencier.

      C’est la fin des franchises universitaires, consubstantielles à l’université depuis ses origines. Est-ce la fin de l’université comme espace ouvert, garantissant la production collective et la diffusion des connaissances, fonctionnant comme un organe démocratique vital ? Est-ce la fin des mouvements sociaux étudiants que nous connaissons, privés d’une bonne partie de leur répertoire d’action ? La réponse dépend de nous, de la puissance de nos collectifs.

      Chez Université Ouverte, nous ne parvenons même pas à compter le nombre d’années cumulées que nous aurions, nous tou·tes, passées en prison – d’autant plus que, paraît-il, nous agissons en bande organisée. Notre lutte pour une université ouverte aurait clairement commencé (ou fini ?) en taule.

      Assurément, il sera encore plus difficile encore pour les plus précaires, pour les plus dominé·es (nous pensons notamment à nos camarades n’ayant pas une nationalité européenne) de se mobiliser pour défendre leurs droits, leurs conditions d’étude, de travail et de vie. Tou·tes, nous devons faire bloc et être là pour elles et eux.

      Game over, donc ? Certainement pas !

      D’une part, nous comptons bien faire tomber cet amendement qui criminalise le mouvement social. D’autre part, quoi qu’il arrive, nous n’arrêterons pas de lutter ! Comme l’intersyndicale de l’ESR de Montpellier, nous appelons à rejoindre les collègues de l’Éducation nationale dans la rue !

      https://universiteouverte.org/2020/11/10/luniversite-en-taule

    • Retour du délit d’entrave : c’est pour cet après-midi

      >>> Mise à jour 5 février 2021 : Les deux #amendements des députés LR ont été rejetés par l’Assemblée nationale ce jeudi 4 février vers 23h30, après avis défavorables de la rapporteure, Laurence Vichnievsky, et du garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, qui ont déclaré ne pas souhaiter multiplier les infractions pénales nouvelles pour chaque profession et situation. Il faut se réjouir de cette position du gouvernement et de la majorité : le soutien qui avait été accordé à l’amendement n° 147 du sénateur Lafon, lors des débats sur la loi de programmation de la recherche fin octobre, n’a donc pas été renouvelé.

      A noter que lors des débats sur l’amendement n° 1255, le député Breton a regretté ces deux avis défavorables et pointé les prétendues « dérives idéologiques » à l’université. « Des courants, cancel culture etc., visent à vous empêcher de parler », a-t-il expliqué, et « sont en train de s’infiltrer à l’université ».

      A suivre au Sénat…

      L’Assemblée nationale poursuit l’examen du projet de loi confortant le respect des principes de la République. Elle examinera, ce jeudi 4 février 2021 à une heure encore indéterminée de l’après-midi ou de la soirée, deux amendements particulièrement importants pour les universités. Il s’agit des amendements n° 1255 et 1832.

      L’amendement n° 1255, déposé par les députés (LR) Benassaya et Therry, est propre à l’enseignement supérieur et prévoit que :

      « Le fait d’entraver ou de tenter d’entraver, par des pressions ou des insultes sur les enseignants universitaires, l’exercice des missions de service public de l’enseignement supérieur est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »

      L’amendement n° 1832, déposé par l’inénarrable député Aubert accompagné de douze de ses collègues, concerne l’ensemble des agents publics ou privés en charge d’une mission de service public et prévoit que :

      « Le fait d’entraver à l’aide de menaces, violences, voies de fait, destructions ou dégradations au sens du présent code, l’exercice par un professionnel de santé de son activité professionnelle, l’exercice par un enseignant de sa mission de service public, ou l’exercice par un agent public ou privé de sa mission de service public est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. »

      Contexte défavorable

      Le contexte dans lequel ces deux amendements vont être discutés est très défavorable. Certes, les tentatives des Républicains (amendements n° 20, 203, 878, 1152 et 1613) et du Rassemblement national (amendement n° 1645) d’interdire le voile à l’université ont à nouveau échoué hier soir ; mais les discussions ont montré qu’un nombre désormais important de député·es, y compris de la majorité, croient mordicus que l’enseignement supérieur et la recherche sont devenus des hauts lieux de la « radicalisation » et du « séparatisme ». Ils et elles en sont persuadé·es, car ils et elles pensent en avoir la preuve irréfutable : à l’université, des enseignant·es et des chercheur·ses travaillent sur « le décolonialisme, le racialisme, l’indigénisme et l’intersectionnalité », qui sont des « mouvements puissants et destructeurs », comme l’expliquait hier soir sans rire la vice-présidente de l’Assemblée nationale, Annie Genevard.

      Ce discours n’est pas cantonné à l’opposition de droite et d’extrême droite. Il suffisait d’écouter, hier soir, la députée LREM Anne Christine Lang, transfuge du PS (voir la vidéo, à partir de 4h58 min) :

      « Il y a un autre combat, qui est effectivement encore plus urgent et beaucoup plus fondamental, et qui nous concerne tous, qui est évidemment le fait de défendre l’universalisme républicain à l’université contre les coups de butoir qui lui sont portés, défendre l’héritage des Lumières contre des théories qui, encore une fois, ne sont pas anecdotiques. Et elles ne sont pas anecdotiques, Monsieur Mélenchon, parce que si l’on respecte évidemment le débat que vous évoquiez sur les thèses indigénistes, sur l’intersectionnalité, le problème est que les partisans de ces théories excluent tout autre débat. Et c’est leur intolérance et une forme de totalitarisme intellectuel qu’il nous faut combattre […] ».

      Nous ne sommes pas sûr·es que la communauté de l’ESR ait bien pris la mesure de ce qui se passe : une partie de nos gouvernant·es est aujourd’hui convaincue que « l’université est malade », pour reprendre les mots d’Annie Genevard hier soir, et qu’un nombre grandissant d’enseignant·es-chercheur·ses travaillent contre la République, tout en faisant régner la terreur au sein des établissements.

      Au rythme où vont les choses, cette panique morale, savamment entretenue par quelques universitaires à la responsabilité gigantesque, risque à tout instant de se traduire sur le plan juridique. On a évité de très peu le choc lors de la préparation de la loi de programmation de la recherche, avec les tentatives de subordonner les libertés académiques aux « valeurs de la République » et de créer un délit d’atteinte au bon ordre des établissements. Mais la deuxième salve arrive déjà : les deux amendements qui seront examinés cet après-midi ou ce soir en sont l’une des manifestations. Et d’ailleurs, si ce n’est pas pour cette fois, ce sera pour la prochaine… Il ne fait plus aucun doute que l’université est dans le viseur.
      Les amendements n° 1255 et 1832

      À première vue, pourtant, les amendements n° 1255 et 1832 pourraient paraître défendables. Comment pourrait-on être contre une mesure destinée à protéger les « enseignants universitaires » contre les « entraves » et « tentatives d’entraves », par des « pressions ou des insultes », à « l’exercice des missions de service public de l’enseignement supérieur » (amendement n° 1255) ou contre des « entraves », « à l’aide de menaces, violences, voies de fait, destructions ou dégradations », à « l’exercice par un enseignant de sa mission de service public » (amendement n° 1832) ? Comment pourrait-on être contre une disposition qui lutterait contre des perturbations du type de celles qui ont gravement perturbé le colloque international sur la « nouvelle école polonaise d’histoire de la Shoah » en février 2019 à l’EHESS ?

      En réalité, ces deux amendements ressemblent en bien des points à l’amendement n° 147 du sénateur Lafon, qui avait été introduit dans la loi de programmation de la recherche lors d’une triste nuit au Sénat fin octobre 2020. Nous résumerons cela en trois points :

      Ces amendements cherchent à établir des infractions aux formulations très vagues, ce qui leur assure une portée répressive élargie. Car qu’est-ce qu’une « entrave » à « l’exercice des missions de service public de l’enseignement supérieur » et qu’est-ce qu’une « pression » ou une « menace » ? A l’évidence, les blocages entreront dans le champ de l’infraction, mais plus généralement toute forme de chahut, comme des interventions vives lors des débats ou la perturbation de conseils d’administrations. On sait par avance quels en seront, plus généralement, les effets sur la liberté d’expression dans les universités : comme à chaque fois que l’on pénalise un champ qui ne l’était pas, on le contraint à s’auto-discipliner de manière préventive ; et, sous prétexte de réagir à quelques situations ponctuelles, on introduit une atteinte à la liberté d’expression dont les effets insidieux débordent largement les hypothèses initiales.
      Les peines encourues sont en tout état de cause disproportionnée. Un an de prison et 15 000 euros d’amende pour l’amendement 1255, trois ans et 45 000 euros pour l’amendement 1832, alors même qu’en cas de violence ou de dégâts matériels, des infractions existent évidemment déjà et peuvent être lourdes.
      Mais le plus grave est ailleurs, et cela avait déjà été pointé à maintes reprises en novembre et décembre dernier, par exemple par Paul Cassia : cette grande pénalisation de l’enseignement supérieur est une attaque directe contre les « franchises universitaires », en ce qu’elle grignote l’autonomie dans la gestion de l’ordre public universitaire. Comme l’expliquait Academia, avec ces nouvelles dispositions pénales, si jamais elles sont adoptées, les forces de l’ordre pourront intervenir, au titre du flagrant délit, et les procureurs pourront engager des poursuites, sans même que le président de l’établissement ne les sollicite. C’est, autrement dit, la reprise en main des universités qui se dessine au travers de ces amendements, dont la prochaine étape, écrivait Paul Cassia :

      « est la reprise en mains ministérielle et parquetière de l’indépendance des universitaires dans leur cœur de métier, l’enseignement et la recherche, ainsi que le laissaient d’ores et déjà présager les propos tenus par la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal en séance publique au Sénat le 16 janvier 2019 à propos de l’augmentation des frais d’inscription spécifiques aux étudiants étrangers prévu par le programme « Bienvenue en France » : les professeurs et maîtres de conférences des universités « sont des fonctionnaires de l’Etat, il est évidemment très important qu’ils portent les politiques publiques décidées par l’Etat, c’est le devoir de tout fonctionnaire, ce devoir d’obéissance et ce devoir de loyauté ».

      L’enjeu autour de ces deux amendements est donc considérable. Si l’un ou l’autre est adopté, il est loin d’être sûr que le Conseil constitutionnel prononce une censure de l’ordre de celle accomplie pour la LPR : la qualité de « cavalier législatif » de ces deux amendements est loin d’être établie, et c’est d’ailleurs pour cela que les services de l’Assemblée nationale ont autorisé leur discussion.

      Alors, se fait-on peur pour rien ? La majorité parlementaire rejettera-t-elle ces deux amendements venant des rangs des Républicains comme elle a rejeté hier soir ceux interdisant le port du voile à l’université ? On peut l’espérer et on sera fixé cet après-midi. Une chose est sûre, en revanche : c’est qu’à ce jeu-là, on ne s’en sortira plus bien longtemps, si notre seule stratégie collective, en matière de défense des libertés académiques, est de nous terrer en espérant que, d’elle-même, la mitraille cesse.

      https://academia.hypotheses.org/30635

  • Mobilisations policières

    La police est un instrument central de l’État face aux #contestations_sociales et les modes de #répression qu’elle déploie relèvent depuis longtemps de la sociologie des mouvements sociaux (Combes et Fillieule, 2011). L’étude de ce que l’on appelle en #France le « #maintien_de_l'ordre » est un domaine particulier de la #sociologie_de_la_police ou des #mouvements_sociaux, de même que les recherches sur le #protest_policing ou le #public_order_policing, qui réunissent des sociologues des mobilisations et des sociologues de la police ou des institutions pénales. En France, la répression de la #protestation a pris ces dernières années un tour sur lequel bien des observateurs se sont exprimés, qu’il s’agisse de journalistes ou de chercheurs en sciences sociales ­ l’essentiel consistant bien sûr à comprendre la #brutalisation des #forces_de_l'ordre à l’égard de la #contestation_de_rue.
    Or, depuis les mobilisations du printemps 2016, les policiers français n’ont pas seulement été acteurs des mouvements sociaux par le biais de l’action qu’ils exerçaient sur eux. En tant que profession particulière, en tant qu’#agents_publics, ils ont remarquablement su jouer de l’articulation entre leur rôle instrumental, leur rôle répressif d’un côté et la défense de leurs intérêts propres. Passé le printemps 2016, on a vu les organisations professionnelles de la police concurrencées par des protestations de rue menées par des « #policiers_en_colère » contestant à la fois l’institution policière et le pouvoir syndical des leurs (Guénot, 2019)…

    https://www.cairn.info/revue-societes-contemporaines-2019-4-page-47.htm
    #police

    ping @davduf

  • https://twitter.com/Nordengail/status/1253057150655528960

    Aujourd’hui on a commencé les premières contestations d’amendes reçues 135 € (attestations) et c’est une honte

    Un qui allait apporter des médicaments à son ami malade : 135 € d’amende parce que « son ami n’a que se débrouiller » (il y a une case pour ça sur l’attestation et l’ami n’a pas de famille en France)

    Le deuxième est analphabète. « Attestation mal remplie »

    Il est analphabète mais très intelligent : il a gardé toutes ses attestations depuis le début, je vais envoyer tout le paquet avec la contestation, histoire qu’ils voient qu’il ne sait pas écrire son nom, comment ils osent lui mettre une amende

    Je vous réponds ici si d’autres se posent la question : il faut attendre de recevoir l’amende par courrier à votre adresse, ne pas payer et envoyer un courrier de contestation à l’adresse indiquée

    Lien vers http://lesaf.org/wp-content/uploads/2020/04/Guide-pratique-2-sur-les-contraventions-relatives-aux-re%CC%80gles-de-confine

    #arbitraire #confinement #violences_policières

  • VIEQUES, AU LARGE DE PORTO RICO. Sous la plage, les bombes
    https://www.courrierinternational.com/article/2007/01/25/sous-la-plage-les-bombes

    Je ne connaissais pas cette histoire

    Lisant, au printemps 2006, un article du magazine Caribbean Edge sur #Vieques, cette petite île située à 7 milles de la côte de Porto Rico, je m’étonnais. L’auteur y vantait “ses forêts luxuriantes, ses plages immaculées et ses eaux cristallines” et en faisait “l’endroit idéal pour se détendre et découvrir les charmes paisibles d’une île caribéenne vraiment nature”. Il a dû se tromper d’île, me suis-je dit. Il ne peut s’agir de l’île utilisée pendant plus de cinquante ans par l’armée américaine comme terrain d’essai pour ses armes aériennes, un endroit où le taux de cancers est de 30 % supérieur au reste de #Porto_Rico, celui d’hypertensions de 381 % supérieur et celui de cirrhoses de 95 % plus élevé.

    résumé en tags
    #colonie #évictions_forcées #terrain_militaire #bombardements #mort #contestations #répression #parc_naturel #tourisme malgré #pollutions

  • La #loi sécuritaire, le bruit des bottes et le silence des pantoufles | La plume d’un enfant du siècle
    https://marwen-belkaid.com/2017/10/05/la-loi-securitaire-le-bruit-des-bottes-et-le-silence-des-pantoufles

    On se rappelle que l’état d’urgence avait été utilisé pour réprimer des #contestations sociales ou écologistes. Rien ne nous dit que ce nouvel arsenal législatif liberticide ne sera pas utilisé à nouveau contre les opposants politiques et contre la rue ainsi que la caste appelle dédaigneusement les mobilisations sociales du haut de sa #démophobie patente. Nombreux sont pourtant ceux à accepter ce #totalitarisme doux qui s’annonce au prétexte qu’ils n’auraient rien à se reprocher. Les mêmes expliquent que si l’on n’a rien à se reprocher l’on n’a rien à craindre de ces lois liberticides mais défendre les libertés des gens qui nous ressemblent ça n’est pas défendre la liberté, simplement ses petits intérêts. Au-delà de ça, l’état d’urgence a montré à quel point ces pratiques se passant de l’autorisation judiciaire étaient bien plus présentes pour persécuter qu’autre chose. Sur les près de 6000 perquisitions administratives (qu’il faudra désormais appeler « visites domiciliaires », une pratique que n’aurait pas renié le novlangue orwellien), seulement 20 personnes ont été mises en examen pour un lien quelconque avec le #terrorisme. 99,7% des perquisitions administratives étaient donc abusives et ont sans doute créé ou renforcé une défiance à l’égard de l’Etat. Parce que c’est là l’un des points les plus dramatiques de cette frénésie #sécuritaire : elle ne fait que renforcer la défiance voire la haine que certains peuvent avoir envers l’Etat et elle peut même créer cette défiance chez des personnes qui étaient à mille lieues d’un tel ressentiment. Même d’un point de vue pratique, ces mesures sont absurdes.

  • Frédéric Deshusses, #Grèves et #contestations_ouvrières en #Suisse, 1969-1979.

    Longtemps négligées par l’historiographie, les contestations ouvrières font désormais partie intégrante d’un nombre croissant d’études consacrées aux années 19681. Toutefois, les recherches historiques en Suisse avaient jusqu’à présent ignoré cette évolution, comme en témoigne la synthèse publiée en 2012 par Damir Skenderovic et Christina Späti2. C’est à combler cette lacune que ce petit ouvrage de Frédéric Deshusses entend contribuer.


    http://www.lemouvementsocial.net/comptes-rendus/frederic-deshusses-greves-et-contestations-ouvrieres-en-suisse-19
    #livre #luttes_ouvrières #travail #histoire

  • #China #Chine, l’ #élite et le #projet de #réformes
    http://www.argotheme.com/organecyberpresse/spip.php?article1663
    Le tablier #PC, malgré les labeurs, doit partir au placard.

    Des réformes en Chine enfermée dans l’ #idéologie de l’unicité, trouvent leurs empêcheurs de tourner en rond. L’ #histoire contemporaine de la #future première #puissance #économique mondiale est jalonnée de #contestations qui ne lui permettent guère, et sans remords, de demeurer un cloître du parti #communiste .

  • #KOWEÏT : #révolte des #Bidouns

    http://goo.gl/9luVf

    Des #sous-citoyens, comme dans toutes les #monarchies du #Golf #arabique, se révoltent.

    Les unes des médias laissent certains pays absents de ce qui est le #printempsarabe. Les #contestations dans ces derniers, pour une #citoyenneté démocratisée, que mènent les #peuples sont comme silencieuses, au regard de l’absence d’une couverture médiatique. Notamment quand des catégories brimées lèvent la voix.

  • Des « indignés » à la chinoise - Les blogs du Diplo
    http://blog.mondediplo.net/2011-11-29-Des-indignes-a-la-chinoise#nh1

    D’après le rapport 2009 du programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l’écart entre les 10 % les plus riches de la population et les 10 % les plus pauvres est de 6,9 en Allemagne et de 15,9 aux Etats Unis. Selon le professeur Li Shi, de l’université de Pékin, en 2008, le revenu des 10 % des Chinois les plus riches était 23 fois plus élevé que le revenu des 10 % les plus pauvres contre 7,3 fois en 1998. Aujourd’hui encore les personnes vivant à la campagne ont, en moyenne, un revenu trois fois moins élevé que celles qui habitent les villes.

    #Chine #contestations #inégalités