continent:amérique du sud

  • Mercosur : une partie de la majorité contre Macron et la Commission
    https://www.mediapart.fr/journal/international/010719/mercosur-une-partie-de-la-majorite-contre-macron-et-la-commission

    La signature de l’accord de libre-échange Mercosur entre la Commission européenne et quatre pays d’Amérique du Sud, dont le Brésil de Bolsonaro, a provoqué de vives critiques au sein de LREM. Les tenants de la position de la France indique que tout a été négocié pour préserver les clauses écologiques. Mais le texte est encore confidentiel.

    #EUROPE #critiques,_union_européenne,_Bolsonaro,_Mercosur,_traité_de_libre-échange,_Jean-Claude_Juncker,_LREM,_Macron

  • Amérique du Sud : on saigne bien les juments | Luce Lapin et copains
    https://luce-lapin-et-copains.com/2018/08/20/amerique-du-sud-on-saigne-bien-les-juments

    Le placenta des juments gestantes produit une hormone, l’#eCG, gonadotrophine chorionique équine (equine chorionic gonadotropin), qui est extraite de leur sang dans des fermes, en Argentine et en Uruguay, et utilisée dans nos élevages, car elle fait ovuler les femelles sur commande — d’où une plus grande « production »… donc profit. « Pendant deux mois et demi, des juments gestantes subissent des prélèvements sanguins massifs hebdomadaires. Elles sont ensuite avortées, mises à la reproduction et saignées à nouveau. Et ainsi de suite jusqu’au départ pour l’abattoir » (vidéo).
    Entretien avec Adeline Colonat, directrice de campagne des « fermes à sang » pour Welfarm – PMAF, Protection mondiale des animaux de ferme.

    #hormones #fermes_à_sang #placenta #élevage_industriel #juments #argentine #uruguay #animaux

  • De #femme en femme, les vénus des chasseurs préhistoriques ! - YouTube
    https://www.youtube.com/watch?v=iB4c4KML-84&list=PLEnK6o7pdzkcOXswIItmemHGLTf0d0NZ6&index=79

    Lors de la dernière période glaciaire en Europe, les femmes charmaient les rêves des premiers artistes de l’humanité, chasseurs de rennes, mammouths ou chevaux. Elles se profilèrent bien souvent sur l’horizon de leurs imaginaires, dans des grottes et, statuettes de pierre ou d’ivoire, animèrent leurs habitats. Ainsi la superbe Vénus de Lespugue, plantée dans le sol près du foyer projetait-t-elle son ombre mouvante sur la paroi du petit abri de Gravettiens dans le piémont pyrénéen, tandis que la Vénus impudique devait exprimer quelques émois parmi les nombreux habitants magdaléniens de l’immense abri périgourdin de Laugerie, en bordure de Vézère. L’esthétique diamétralement opposée de ces deux chefs-d’œuvre du Musée de l’Homme, invite à la réflexion admirative sur le génie créateur des Sapiens d’alors, faisant de l’Image, le creuset du sens et le support sensible de la communication. Denis Vialou, préhistorien au Muséum national d’Histoire naturelle, membre de l’Académie des Sciences d’Outremer, étudie avec son équipe de recherche associée au CNRS la #préhistoire des #Sapiens en Europe et en Amérique du Sud. Leurs recherches comparatives sont essentiellement consacrées aux comportements symboliques, dans leurs manifestations monumentales ou sous forme d’objets, et aux comportements économiques et sociaux.

  • Impact cosmique majeur il y a 12 800 ans
    Les preuves géologiques et paléontologiques découvertes dans le sud du Chili appuient la théorie selon laquelle un impact cosmique majeur s’est produit il y a environ 12 800 ans.

    Lorsque James Kennett, professeur émérite de géologie à l’Université de Santa Barbara, et ses collègues ont entrepris il y a plusieurs années d’examiner les signes d’un impact cosmique majeur survenu vers la fin du Pléistocène, ils ignoraient l’ampleur de l’effet climatique projeté.

    « C’est beaucoup plus extrême que ce que je pensais quand j’ai commencé ce travail », a noté Kennett. « Plus le travail a été fait, plus il semble être extrême. »

    Il parle de l’hypothèse du « Younger Dryas Impact », qui postule qu’une comète fragmentée s’est écrasée sur la Terre il y a près de 12 800 ans, provoquant des changements climatiques rapides, des extinctions de mégafaune, une diminution soudaine de la population humaine et des changements culturels ainsi que des incendies de forêt étendus. L’hypothèse suggère un mécanisme possible de déclenchement des changements brusques du climat à cette époque, en particulier un refroidissement rapide de l’hémisphère Nord, appelé Younger Dryas , au milieu d’une tendance générale au réchauffement naturel et à la fonte des inlandsis, mise en évidence par des changements dans les fossiles. et record de sédiments.

    Controversée dès le moment où elle a été proposée, cette hypothèse continue encore à être contestée par ceux qui préfèrent attribuer le renversement final du Pléistocène à des causes terrestres. Mais Kennett et ses fidèles piliers de l’hypothèse d’impact du Younger Dryas Boundary (YDB) ont récemment reçu un élan important : la découverte d’un très jeune cratère d’impact de 31 km de large sous la calotte glaciaire du Groenland. ils croient peut-être être l’un des nombreux fragments de comètes qui ont touché la Terre au début du Younger Dryas .

    Maintenant, dans un article publié dans la revue Nature Scientific Reports, Kennett et ses collègues, dirigés par le paléontologue chilien Mario Pino, présentent une nouvelle preuve d’un impact cosmique, cette fois très au sud de l’équateur, qui conduirait probablement à la combustion de biomasse, au changement climatique et extinctions de mégafaunales il y a près de 13 000 ans.

    « Nous avons identifié la couche YDB aux hautes latitudes de l’hémisphère sud, à près de 41 degrés au sud, près de la pointe de l’Amérique du Sud », a déclaré Kennett. Il s’agit d’une extension majeure de l’événement de la BDY. "La grande majorité des preuves à ce jour, at-il ajouté, a été retrouvée dans l’hémisphère Nord.

    Selon Kennett, cette découverte a débuté il y a plusieurs années lorsqu’un groupe de scientifiques chiliens étudiant les couches de sédiments d’un site paléontologique et archéologique du Quaternaire bien connu, Pilauco Bajo, a reconnu les changements connus pour être associés à un événement d’impact de la YDB. Ils comprenaient une couche de « tapis noir », vieille de 12 800 ans, qui coïncidait avec la disparition des fossiles de mégafaune du Pléistocène sud-américain, un changement brusque de la végétation régionale et une disparition des artefacts humains.

    « Parce que la séquence de ces événements ressemblait à ce qui avait déjà été décrit dans les documents de YDB pour l’Amérique du Nord et l’Europe de l’Ouest, le groupe a décidé d’analyser les mandataires liés aux impacts à la recherche de la couche YDB », a déclaré Kennett. Cela a donné la présence de sphérules microscopiques interprétées comme ayant été formées par fusion en raison des températures extrêmement élevées associées aux chocs. La couche contenant ces sphérules présente également des concentrations maximales en platine et en or, et des particules de fer natif que l’on trouve rarement dans la nature.

    « Parmi les sphérules les plus importantes figurent celles qui sont riches en chrome », a expliqué Kennett. Les sphérules du site Pilauco contiennent un taux inhabituel de chrome, élément non présent dans les sphérules à impact YDB de l’hémisphère Nord, mais en Amérique du Sud. « Il se trouve que les roches volcaniques du sud des Andes peuvent être riches en chrome, et ces roches ont fourni une source locale pour ce chrome », a-t-il ajouté. « Ainsi, les objets cométaires doivent avoir également frappé l’Amérique du Sud. »

    Kennett a noté que d’autres éléments de preuve, qui concordaient avec la documentation antérieure et actuelle de la région par les scientifiques chiliens, indiquaient une « très grande perturbation de l’environnement à environ 40 degrés de latitude sud ». Celles-ci comprenaient un événement de combustion de la biomasse important mis en évidence, entre autres, par du micro-charbon de bois et des signes de combustion dans des échantillons de pollen prélevés au niveau de la couche d’impact. « C’est de loin le plus grand événement de brûlure dans cette région que nous voyons dans cet enregistrement qui s’étend sur des milliers d’années », a déclaré Kennett. De plus, a-t-il poursuivi, l’incendie coïncidait avec le moment des principaux incendies liés à la BDY en Amérique du Nord et en Europe occidentale.

    Les couches sédimentaires de Pilauco contiennent un précieux récit de pollen et de graines qui montrent un changement de caractère de la végétation régionale, preuve d’un climat en mutation. Cependant, contrairement à l’hémisphère Nord, où les conditions sont devenues plus froides et plus humides au début du Dryas plus jeune, l’inverse s’est produit dans l’hémisphère Sud.

    « Les assemblages de plantes indiquent que la végétation est passée de conditions humides et froides à Pilauco à des conditions chaudes et sèches », a déclaré Kennett. Selon lui, les ceintures climatiques zonales atmosphériques se sont déplacées « comme une bascule », avec un mécanisme synergique, apportant le réchauffement de la planète.

    dans l’hémisphère nord alors même que l’hémisphère Nord a connu un refroidissement et une expansion de la glace de mer. Selon Kennett, la rapidité - dans quelques années - du changement climatique est mieux attribuée aux changements des systèmes atmosphériques liés aux impacts, plutôt qu’aux processus océaniques plus lents.

    Entre-temps, l’impact avec ses principaux effets sur l’environnement, y compris le brûlage, aurait contribué à l’extinction de la mégafaune locale du Pléistocène sud-américain - y compris des paresseux géants, des chats à dents de sabre, des mammouths et des gomphotheres semblables à des éléphants - ainsi que la fin de la culture semblable à la culture Clovis dans le nord, at-il ajouté. La quantité d’os, d’artefacts et de champignons associés à la mégafaune qui étaient relativement abondants dans le sol du site de Pilauco a décliné précipitamment au niveau de la couche d’impact, indiquant une perturbation locale majeure.

    La distance de ce site YDB récemment identifié - à environ 6 000 kilomètres du site bien étudié le plus proche d’Amérique du Sud - et sa corrélation avec les nombreux sites de l’hémisphère Nord « étend considérablement l’ampleur de l’impact de la YDB », a déclaré Kennett. Les preuves sédimentaires et paléo-végétatives recueillies sur le site de Pilauco sont conformes aux précédentes études séparées menées par des scientifiques chiliens, qui indiquent une brûlure généralisée et des changements climatiques soudains dans la région aux alentours du début de la YDB. Cette nouvelle étude renforce encore l’hypothèse selon laquelle un impact cosmique aurait déclenché les conditions atmosphériques et océaniques du Dryas plus jeune, a-t-il déclaré.

    « C’est une preuve supplémentaire que le début du climat du Dryas plus jeune est un événement mondial extrême, avec des conséquences majeures sur la vie animale et la vie humaine de l’époque », a déclaré Kennett. « Et cette section Pilauco est conforme à cela. »

    Sedimentary record from Patagonia, southern Chile supports cosmic-impact triggering of biomass burning, climate change, and megafaunal extinctions at 12.8 ka | Scientific Reports
    https://www.nature.com/articles/s41598-018-38089-y

    #Préhistoire #12800BP #Météorite #Climat

    Mario Pino, Ana M. Abarzúa, Giselle Astorga, Alejandra Martel-Cea, Nathalie Cossio-Montecinos, R. Ximena Navarro, Maria Paz Lira, Rafael Labarca, Malcolm A. LeCompte, Victor Adedeji, Christopher R. Moore, Ted E. Bunch, Charles Mooney, Wendy S. Wolbach, Allen West, James P. Kennett. Sedimentary record from Patagonia, southern Chile supports cosmic-impact triggering of biomass burning, climate change, and megafaunal extinctions at 12.8 ka. Scientific Reports, 2019; 9 (1) DOI: 10.1038/s41598-018-38089-y

  • Rien de tel que de réactiver un bon vieux contentieux territorial (chacun court après l’unité nationale à sa façon…)
    contentieux réactivé en 1962-63 sous la présidence de Rómulo Betancourt, fondateur d’Action démocratique.

    Militares venezolanos exigen a #Guyana retirarse de territorio en disputa
    http://www.el-nacional.com/noticias/politica/militares-venezolanos-exigen-guyana-retirarse-territorio-disputa_279709


    referencial

    Funcionarios del Frente Institucional Militar y miembros de la Institución de Estudios Fronterizos de Venezuela enviaron un informe ante «las acciones y actuaciones de la República Cooperativa de Guyana al pretender desconocer la vigencia del Acuerdo de Ginebra.»

    El informe señala que Venezuela nunca reconoció la validez del Laudo Arbitral de París de 1899, «por estar viciado desde su inicio de componendas entre los árbitros del laudo como ha quedado plenamente comprobado», reseñó Infobae.

    Para el grupo de altos oficiales y profesionales en materia fronteriza, «el 26 de mayo de 1966, Gran Bretaña e Irlanda del Norte dieron la independencia a la Colonia Inglesa de Guayana, asumiendo el Acuerdo de Ginebra de 1966, la República Cooperativa de Guyana y la República de Venezuela».

    Además solicitan que Guyana se retire de la tenencia ilegal del territorio #Esequibo y «de las concesiones de explotación por ser riquezas de Venezuela, inalienables e imprescriptibles».

    El FIM considera que el gobierno, la sociedad civil, política y militar «acuerden una alianza patriótica para ejercer por vía jurisdiccional la reivindicación del territorio Esequibo_», declarando ese territorio Estado de la República Bolivariana de Venezuela.

    • Un excellent point en 2017 sur les contentieux sur le plateau des Guyanes.

      Litiges transfrontaliers sur le plateau des Guyanes, enjeux géopolitiques à l’interface des mondes amazoniens et caribéens
      http://journals.openedition.org/espacepolitique/4242

      Résumé
      Limites et frontières internationales ont toujours constitué des thèmes importants dans les études géopolitiques. Dans une perspective diplomatique, les frontières terrestres et maritimes sont en interrelation. Ces interrelations compliquent les pourparlers pour déterminer des limites, ce qui est particulièrement net dans le cas des différents pays composant le plateau des Guyanes, une région géomorphologique localisée entre les fleuves Orénoque et Amazone en Amérique du Sud. Cette région contient le plus grand espace forestier tropical continu et intact au monde, mais son sous-sol contient aussi du pétrole, de l’or, des diamants et autres ressources naturelles qui suscitent de nombreuses convoitises et accroissent les difficultés pour résoudre les litiges frontaliers hérités de la colonisation. Le présent article analyse les principaux aspects des conflits maritimes et territoriaux toujours en cours sur le Plateau des Guyanes, sous l’angle de la géohistoire et de la géopolitique. Il examine leurs causes et leurs conséquences. Il en conclut que tous les États de la région, à l’exception du Brésil, sont aux prises avec des litiges territoriaux. L’article souligne également l’importance des intérêts économiques dans la résolution de ces litiges territoriaux, car ces zones contestées, riches en ressources aiguisent l’appétit des multinationales dans le jeu géopolitique régional.

      PLAN

      Cadre conceptuel et géographique : Plateau des Guyanes et notion de « revendication territoriale »
      • Le Plateau des Guyanes
      • Les frontières internationales et leur contestation
      Les revendications continentales
      • Le cas de l’Essequibo
      • Le cas du Triangle de la New River
      • Le cas des affluents de la rivière Lawa
      Les revendications maritimes
      Conclusion


      Carte 2 - les litiges du Plateau des Guyanes

    • La Cour internationale de justice est en cours d’examen d’une requête introduite par la Guayana en avril 2018. Le Venezuela a refusé de prendre à l’instance, arguant de l’accord de Genève de 1966 et conteste la recevabilité de la requête.

      Le délai pour la présentation du contre-mémoire par le Venezuela à la Cour à échu hier, 18 avril 2019.

      La Cour doit maintenant statuer sur la recevabilité.

      Sentence arbitrale du 3 octobre 1899 (Guyana c. Venezuela)
      https://www.icj-cij.org/fr/affaire/171

  • Cartographie de mouvements féministes en pleine ébullition | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/international/070319/cartographie-de-mouvements-feministes-en-pleine-ebullition

    Mediapart a sollicité quatre universitaires pour dresser la cartographie de mouvements féministes en pleine ébullition, de l’Amérique centrale à l’Amérique du Sud, en passant par l’Espagne, où la mobilisation pour le « 8-M » fut massive l’an dernier. Deuxième épisode de notre série.

    #féminisme #8_mars

  • De Che Guevara à Guaido
    http://www.dedefensa.org/article/deche-guevara-a-guaido

    De Che Guevara à Guaido

    Pour comprendre ce qui se passe en Amérique du sud, j’aimerais avoir recours au dernier Tintin, celui qui se passe chez les Picaros et qui décrit si opportunément une révolution orange menée par des guérilleros grimés en touristes (à moins que ce ne soit l’inverse, avec ce Séraphin Lampion qui exprime dans les derniers albums le dernier homme nietzschéen, triomphant et crétin…). Cette révolution se veut du reste non-violente, comme le charivari médiatique de Guaido, promu Quisling rédimé et putschiste d’honneur par les médias azimutés, hallucinés et surtout infatigables de notre temps ! Et elle aboutit, cette révolution menée par un Tintin mué en ingénieur social, au même maintien de la misère que partout ailleurs. Récemment je voyais un programme espagnol qui m’annonçait que le coût (...)

  • Montagne d’or en Guyane : l’ONU « somme » la France d’écouter les populations autochtones
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/01/11/guyane-l-onu-s-immisce-dans-la-future-mine-de-la-montagne-d-or_5407578_3244.

    L’affaire de la Montagne d’or était déjà lourde de polémiques, voilà qu’un nouvel acteur s’immisce dans le dossier de cette future mine industrielle dans la forêt de Guyane. L’Organisation des Nations unies (ONU), par le biais de son Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, « somme » la France soit de reprendre son processus de consultation afin d’écouter les populations autochtones sur ce sujet, soit de suspendre ce projet gigantesque.
    Lire aussi : Face aux critiques, le projet de mine « Montagne d’or » en partie corrigé

    Dans un communiqué rendu public jeudi 10 janvier, le Comité défend vigoureusement les droits des peuples amérindiens de l’Ouest guyanais. Or, eux qui sont « les premiers concernés » par les souhaits d’extraction d’or du consortium des multinationales Nordgold (Russie) et Colombus Gold (Canada), ont vu leur opposition être « totalement ignorée » jusqu’à présent.

    Le principe d’une « alerte rapide » adressée au gouvernement français a été décidé le 14 décembre 2018. Elle est censée prévenir lorsqu’une situation risque de tourner au conflit. Elle prend en fait une forme assez pressante, puisqu’il est demandé aux pouvoirs publics de formuler leur réponse d’ici au 8 avril. Il s’agit surtout d’une procédure inédite pour la France.

    « Ce comité traite entre cinq et quinze cas par an, expose Vincent Ploton du Service international pour les droits de l’homme, l’ONG ISHR, basée en Suisse, qui a soutenu la requête des opposants amérindiens. Ce genre d’infractions est malheureusement courant en Amérique du Sud et en Asie, mais c’est la première fois que Paris est rappelé à l’ordre pour un manque de respect des droits autochtones. Il y a eu un précédent avec une affaire d’extraction d’uranium au Niger, mais cela concernait Areva, pas la puissance publique. »

    #paywall #racisme #montagne_d'or #or #droits_autochtones

  • Les génomes andins anciens montrent des adaptations distinctes à l’agriculture et à l’altitude. (7000BP)

    Les populations anciennes des Andes péruviennes se sont adaptées à leur environnement de haute altitude et à l’introduction de l’agriculture d’une manière distincte des autres populations du monde confrontées à des circonstances similaires, selon les conclusions présentées lors de la réunion annuelle de l’American Society of Human Genetics (ASHG) 2018 à San Diego, Californie

    John Lindo, PhD, JD, professeur assistant d’anthropologie à l’Université Emory, et un groupe de collaborateurs internationaux dirigé par Anna Di Rienzo, PhD, à l’Université de Chicago et Mark Aldenderfer, PhD, à l’Université de Californie, Merced, ont exposé utiliser de nouveaux échantillons d’ADN vieux de 7 000 ans provenant de sept génomes entiers pour étudier l’adaptation des anciens peuples andins à leur environnement. Ils ont comparé ces génomes à 64 génomes des populations des hautes terres andines et des basses terres du Chili, afin d’identifier les adaptations génétiques qui avaient eu lieu avant l’arrivée des Européens dans les années 1500.

    « Les contacts avec les Européens ont eu un impact dévastateur sur les populations d’Amérique du Sud, notamment en introduisant des maladies, la guerre et des perturbations sociales », a expliqué le Dr Lindo. « En nous concentrant sur la période antérieure, nous avons pu distinguer les adaptations environnementales des adaptations découlant d’événements historiques. »

    Ils ont constaté que les génomes des populations andines étaient adaptés à l’introduction de l’agriculture et à l’augmentation de la consommation d’amidon qui en résultait différemment des autres populations. Par exemple, les génomes des populations agricoles européennes montrent un nombre accru de copies du gène codant pour l’amylase, une enzyme de la salive qui aide à décomposer l’amidon. Bien que les Andins aient également suivi un régime riche en amidon après avoir commencé à cultiver, leurs génomes ne possédaient pas de copies supplémentaires du gène de l’amylase, ce qui a suscité des questions sur la manière dont ils auraient pu s’adapter à ce changement.

    De même, les génomes tibétains, qui ont été largement étudiés pour leur adaptation à la haute altitude, montrent de nombreux changements génétiques liés à la réponse à l’hypoxie - la façon dont le corps réagit à de faibles niveaux d’oxygène. Les génomes andins n’ont pas montré de tels changements, ce qui suggère que ce groupe s’est adapté à la haute altitude d’une autre manière.

    Les chercheurs ont également constaté qu’après le contact avec les Européens, les hauts plateaux andins avaient connu une réduction effective de leur population de 27%, très inférieure à la moyenne estimée de 96% des populations des basses terres. Les découvertes archéologiques antérieures montraient jusqu’à présent une certaine incertitude, et les résultats génétiques suggéraient qu’en vivant dans un environnement plus rude, les populations des hautes terres pourraient avoir été quelque peu protégées de la portée et des conséEventPilot Webquences du contact avec l’Europe.
    Les résultats ont également montré une certaine sélection de gènes liés au système immunitaire après l’arrivée des Européens, suggérant que les Andins qui ont survécu étaient mieux à même de répondre aux maladies nouvellement introduites telles que la variole.

    #Préhistoire #Néolithique #Amérique_du_Sud #Andes #Adaptation #colonisation

    http://www.ashg.org/press/201810-Andean-highlands.shtml
    Reference: Lindo J et al. (2018 Oct 17). Abstract: The genetic prehistory of the Andean highlands 7,000 years BP through European contact. Presented at the American Society of Human Genetics 2018 Annual Meeting. San Diego, California.

    https://eventpilot.us/web/page.php?page=IntHtml&project=ASHG18&id=180120684

  • Ce que nous dit l’approvisionnement en cristaux de quartz de haute qualité sur le site de l’atelier de la carrière de Valiente, Pleistocène tardif - début de l’Holocène.

    Late Pleistocene to early Holocene high-quality quartz crystal procurement from the Valiente quarry workshop site (32°S, Chile, South America)

    L’acquisition de ressources lithiques de haute qualité fait partie des processus de prise de décision les plus révélateurs de l’archéologie des premiers groupes humains peuplés des Amériques. (...).

    Cet article présente les résultats des fouilles effectuées dans un atelier de fabrication de cristaux de quartz translucide de haute qualité, qui ont donné des dépôts stratigraphiques stratifiés datés au radiocarbone de manière cohérente, qui éclairent le comportement des étapes initiales de l’approvisionnement lithique.

    Sur la base d’une analyse détaillée du contexte du site de Valiente (32 ° S, Chili, Amérique du Sud), les auteurs discutent des étapes de la production bifaciale de la technologie ponctuelle. Le gisement a fourni des preuves de l’occupation cumulative sur une période comprise entre 12 630 et 11 320 années auparavant.

    Cette période d’environ 1 300 ans coïncide avec une importante tendance à l’assèchement de l’environnement, indiquée par les registres de pollen locaux et régionaux. De plus, il est synchrone du processus selon lequel les paysages naturels sont devenus les premiers paysages de travail (?) (taskscapes) de la région, englobant ainsi des changements culturels majeurs liés à l’organisation de l’utilisation des sols. Ces résultats sont discutés dans le cadre de données archéologiques contemporaines afin de discuter d’aspects spécifiques de la technologie et de la prise de décision des tout premiers colons d’Amérique du Sud.

    #Préhistoire #Pleistocène_tardif #12000BC #Industrie_lithique

    https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0208062

    César Méndez, Amalia Nuevo Delaunay, Roxana Seguel, Antonio Maldonado, Ismael Murillo, Douglas Jackson, Eugenio Aspillaga, Roberto Izaurieta, Víctor Méndez, Macarena Fernández

    Published : November 29, 2018
    https://doi.org/10.1371/journal.pone.0208062

    https://journals.plos.org/plosone/article/figure/image?id=10.1371/journal.pone.0208062.g008&size=inline

  • Pourquoi les gauches s’effondrent-elles en Amérique du Sud ?
    https://lemediapresse.fr/international/pourquoi-les-gauches-seffondrent-elles-en-amerique-du-sud

    La tension, aussi bien politique que sociale, a atteint son paroxysme au Brésil. L’extrême droite est au pouvoir après la victoire de Jair Bolsonaro. Ce dernier a su tirer profit des scandales de corruption qui ont fait chuter Lula et Dilma Roussef. Plus largement, il y a également des problèmes relatifs à une conjoncture économique […]

  • Projet de mon prochain patriarche sur l’or.
    Patriarche n°8 - El Dorado
    à partir de cette image

    "Bernard Otto Holtermann and the world’s largest “nugget” of gold, North Sydney, ca. 1874-1876 / montage photograph by American and Australasian Photographic Company" The “nugget” was found in Hill End, New South Wales by German prospector, Bernhard Otto Holtermannon 19th October 1872. More than half of the 630 lbs weight was pure gold, at that time having the value of 12,000 pounds ($24,000). Today, with gold worth say $1400 per ounce, the value today would be over $10 million. Three photographs were used to create this image of Holtermann, (supposedly holding the worlds’ largest accumulation of rock and gold ever brought to the surface in one piece). He was posed in the studio with his hand on a headclamp, the nugget was inserted and both placed on a photograph of the verandah of his mansion, built from the proceeds of his goldmine.[1]

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    Fiche wikipédia sur la montagne d’or
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Montagne_d%27or_(mine)


    Résultats de la coulée de boues (de cyanure) issue de la rupture de barrages de Bento Rodrigues en 2015
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    Projet Montagne d’or en Guyane : après la mine de Lefa en Guinée, Nordgold peut-il faire mieux ? - Outre-mer la 1ère
    https://la1ere.francetvinfo.fr/pojet-montagne-guyane-apres-mine-lefa-guinee-nordgold-peut-il-fa

    L’Etat doit se prononcer sur la réalisation de ce projet avant la fin de l’année. François de Rugy, le ministre de la Transition écologique a été interrogé à plusieurs reprises par la presse à ce sujet. Il a déclaré sur France Inter que « le projet ne pouvait pas être mené tel qu’il avait été envisagé ». A l’Assemblée nationale, le ministre a été plus loin en ajoutant « qu’il fallait le revoir de fond en comble ».

    Nordgold en Guinée
    En attendant la décision de l’Etat, deux journalistes du Monde et de France Inter se sont intéressés aux activités en Guinée du groupe russe Nordgold censé se charger de l’exploitation de la Montagne d’or en Guyane.

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    Le projet de Montagne d’or en Guyane va être revu pour obtenir le feu vert de l’Etat

    Cette mine d’or, qui serait la plus grande jamais construite sur le territoire français, provoque l’hostilité d’une partie de la population.

    https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/09/07/montagne-d-or-nordgold-pret-a-revoir-son-projet-pour-obtenir-le-feu-vert-de-

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    Guyane française : la traque des orpailleurs clandestins
    https://www.youtube.com/watch?v=kRtFvKlC43w

    Cayenne : le nouveau far west français
    https://www.youtube.com/watch?v=SebdJ9FN-mc

    Chasseur de chercheur, l’or de Guyane
    https://www.youtube.com/watch?v=5geIRZZPWSc

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    Controverses géopolitiques 1A - Projet de la montagne d’or en Guyane
    https://www.youtube.com/watch?v=9qEeddqdPNA

    Mines en Guyane : le projet Montagne d’or "inacceptable" pour les autochtones
    https://www.youtube.com/watch?v=j5XaI65Hn-Y

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    mine d’or en Australie

    The ‘Super Pit’ is Australia’s largest open cut gold mine. It is 3.5 km long, 1.5 km wide and 350 m deep, and is large enough to be seen from space. It produces around 28 tonnes of gold per year, and they estimate it won’t reach the end of its life until 2021.

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    Mine de Yanacocha (Pérou)
    La plus grande mine d’or à ciel ouvert d’Amérique du sud


    https://fr.wikipedia.org/wiki/Mine_de_Yanacocha

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    Cartographie

    Schéma structural de la Guyane française( C. Delor , 2004 )


    http://www.jump-voyage.com/carte-guyane-francaise/vacances-guyane

    http://sphaera.cartographie.ird.fr/images/telechargement/00756.pdf

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    Vers la structuration d’une filière aurifère « durable » ? Etude du cas de la Guyane française
    Jessica Oder

    L’objectif de cet article est de se demander si la filière aurifère légale en Guyane française peut servir les objectifs du développement durable. En effet, cette filière est en proie à des difficultés : alors que les cours de l’or sont en constante augmentation, le nombre d’opérateurs miniers diminue constamment, depuis près de sept ans. Ce paradoxe aurifère guyanais trouve ses origines dans la volonté étatique française d’organiser la filière et d’en faire un exemple en matière de « durabilité », volonté clairement exprimée à la suite du Grenelle de l’Environnement. Principalement élaboré à partir d’entretiens semi-directifs et d’archives, l’article a notamment cherché à analyser les principaux éléments de cette structuration, le schéma départemental d’orientation minière (SDOM), en cours d’adoption, et plusieurs initiatives destinées à améliorer les pratiques des opérateurs miniers qui sont majoritairement des artisans. Toutefois, cette évolution révèle des antagonismes entre les parties prenantes (collectivités territoriales, services de l’État, opérateurs miniers et environnementalistes). Ces derniers ont fait surface lors de l’affaire du Camp Caïman, impliquant la multinationale Iamgold, et pendant le processus d’élaboration du SDOM lui-même. Des problématiques connexes telles que les revendications locales de gestion de la ressource aurifère, mais aussi et surtout l’orpaillage illégal, dressent des perspectives d’avenir plutôt incertaines pour la filière aurifère.

    https://journals.openedition.org/echogeo/12587

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    #mad_meg #or

    • José-Maria de Heredia
      Les Conquérants de l’Or

      Après que Balboa menant son bon cheval
      Par les bois non frayés, droit, d’amont en aval,
      Eut, sur l’autre versant des Cordillères hautes,
      Foulé le chaud limon des insalubres côtes
      De l’Isthme qui partage avec ses monts géants
      La glauque immensité des deux grands Océans,
      Et qu’il eut, s’y jetant tout armé de la berge,
      Planté son étendard dans l’écume encor vierge,
      Tous les aventuriers, dont l’esprit s’enflamma,

      Rêvaient, en arrivant au port de Panama,
      De retrouver, espoir cupide et magnifique,
      Aux rivages dorés de la mer Pacifique,
      El Dorado promis qui fuyait devant eux,
      Et, mêlant avec l’or des songes monstrueux,
      De forcer jusqu’au fond de ces torrides zones
      L’âpre virginité des rudes Amazones
      Que n’avait pu dompter la race des héros,
      De renverser des dieux à têtes de taureaux
      Et de vaincre, vrais fils de leur ancêtre Hercule,
      Les peuples de l’Aurore et ceux du Crépuscule.

      Ils savaient que, bravant ces illustres périls,
      Ils atteindraient les bords où germent les béryls
      Et Doboyba qui comble, en ses riches ravines,
      Du vaste écroulement des temples en ruines,
      La nécropole d’or des princes de Zenu ;
      Et que, suivant toujours le chemin inconnu
      Des Indes, par delà les îles des Épices
      Et la terre où bouillonne au fond des précipices
      Sur un lit d’argent fin la Source de Santé,
      Ils verraient, se dressant en un ciel enchanté
      Jusqu’au zénith brûlé du feu des pierreries,
      Resplendir au soleil les vivantes féeries
      Des sierras d’émeraude et des pics de saphir
      Qui recèlent l’antique et fabuleux Ophir.

      Et quand Vasco Nuñez eut payé de sa tête
      L’orgueil d’avoir tenté cette grande conquête,
      Poursuivant après lui ce mirage éclatant,
      Malgré sa mort, la fleur des Cavaliers, portant
      Le pennon de Castille écartelé d’Autriche,
      Pénétra jusqu’au fond des bois de Côte-Riche
      À travers la montagne horrible, ou navigua
      Le long des noirs récifs qui cernent Veragua,
      Et vers l’Est atteignit, malgré de grands naufrages,
      Les bords où l’Orénoque, enflé par les orages,
      Inondant de sa vase un immense horizon,
      Sous le fiévreux éclat d’un ciel lourd de poison,
      Se jette dans la mer par ses cinquante bouches.

      Enfin cent compagnons, tous gens de bonnes souches,
      S’embarquèrent avec Pascual d’Andagoya
      Qui, poussant encor plus sa course, côtoya
      Le golfe où l’Océan Pacifique déferle,
      Mit le cap vers le Sud, doubla l’île de Perle,
      Et cingla devant lui toutes voiles dehors,
      Ayant ainsi, parmi les Conquérants d’alors,
      L’heur d’avoir le premier fendu les mers nouvelles
      Avec les éperons des lourdes caravelles.

      Mais quand, dix mois plus tard, malade et déconfit,
      Après avoir très loin navigué sans profit

      Vers cet El Dorado qui n’était qu’un vain mythe,
      Bravé cent fois la mort, dépassé la limite
      Du monde, ayant perdu quinze soldats sur vingt,
      Dans ses vaisseaux brisés Andagoya revint,
      Pedrarias d’Avila se mit fort en colère ;
      Et ceux qui, sur la foi du récit populaire,
      Hidalgos et routiers, s’étaient tous rassemblés
      Dans Panama, du coup demeurèrent troublés.

      Or les seigneurs, voyant qu’ils ne pouvaient plus guère
      Employer leur personne en actions de guerre,
      Partaient pour Mexico ; mais ceux qui, n’ayant rien,
      Étaient venus tenter aux plages de Darien,
      Désireux de tromper la misère importune,
      Ce que vaut un grand cœur à vaincre la fortune,
      S’entretenant à jeun des rêves les plus beaux,
      Restaient, l’épée oisive et la cape en lambeaux,
      Quoique tous bons marins ou vieux batteurs d’estrade,
      À regarder le flot moutonner dans la rade,
      En attendant qu’un chef hardi les commandât.
      II

      Deux ans étaient passés, lorsqu’un obscur soldat
      Qui fut depuis titré Marquis pour sa conquête,
      François Pizarre, osa présenter la requête
      D’armer un galion pour courir par-delà
      Puerto Pinas. Alors Pedrarias d’Avila
      Lui fit représenter qu’en cette conjoncture
      Il n’était pas prudent de tenter l’aventure
      Et ses dangers sans nombre et sans profit ; d’ailleurs,
      Qu’il ne lui plaisait point de voir que les meilleurs
      De tous ses gens de guerre, en entreprises folles,
      Prodiguassent le sang des veines espagnoles,
      Et que nul avant lui, de tant de Cavaliers,
      N’avait pu triompher des bois de mangliers

      Qui croisent sur ces bords leurs nœuds inextricables ;
      Que, la tempête ayant rompu vergues et câbles
      À leurs vaisseaux en vain si loin aventurés,
      Ils étaient revenus mourants, désemparés,
      Et trop heureux encor d’avoir sauvé la vie.

      Mais ce conseil ne fit qu’échauffer son envie.
      Si bien qu’avec Diego d’Almagro, par contrats,
      Ayant mis en commun leur fortune et leurs bras,
      Et don Fernan de Luque ayant fourni les sommes,
      En l’an mil et cinq cent vingt-quatre, avec cent hommes,
      Pizarre le premier, par un brumeux matin
      De novembre, montant un mauvais brigantin,
      Prit la mer, et lâchant au vent toute sa toile,
      Se fia bravement en son heureuse étoile.

      Mais tout sembla d’abord démentir son espoir.
      Le vent devint bourrasque, et jusqu’au ciel très noir
      La mer terrible, enflant ses houles couleur d’encre,
      Défonça les sabords, rompit les mâts et l’ancre,
      Et fit la triste nef plus rase qu’un radeau.
      Enfin après dix jours d’angoisse, manquant d’eau
      Et de vivres, sa troupe étant d’ailleurs fort lasse,
      Pizarre débarqua sur une côte basse.

      Au bord, les mangliers formaient un long treillis ;
      Plus haut, impénétrable et splendide fouillis

      De lianes en fleur et de vignes grimpantes,
      La berge s’élevait par d’insensibles pentes
      Vers la ligne lointaine et sombre des forêts.

      Et ce pays n’était qu’un très vaste marais.

      Il pleuvait. Les soldats, devenus frénétiques
      Par le harcèlement venimeux des moustiques
      Qui noircissaient le ciel de bourdonnants essaims,
      Foulaient avec horreur, en ces bas-fonds malsains,
      Des reptiles nouveaux et d’étranges insectes
      Ou voyaient émerger des lagunes infectes,
      Sur leur ventre écaillé se traînant d’un pied tors,
      Ces lézards monstrueux qu’on nomme alligators.
      Et quand venait la nuit, sur la terre trempée,
      Dans leurs manteaux, auprès de l’inutile épée,
      Lorsqu’ils s’étaient couchés, n’ayant pour aliment
      Que la racine amère ou le rouge piment,
      Sur le groupe endormi de ces chercheurs d’empires
      Flottait, crêpe vivant, le vol mou des vampires,
      Et ceux-là qu’ils marquaient de leurs baisers velus
      Dormaient d’un tel sommeil qu’ils ne s’éveillaient plus.

      C’est pourquoi les soldats, par force et par prière,
      Contraignirent leur chef à tourner en arrière,
      Et, malgré lui, disant un éternel adieu

      Au triste campement du port de Saint-Mathieu,
      Pizarre, par la mer nouvellement ouverte,
      Avec Bartolomé suivant la découverte,
      Sur un seul brigantin d’un faible tirant d’eau
      Repartit, et, doublant Punta de Pasado,
      Le bon pilote Ruiz eut la fortune insigne,
      Le premier des marins, d’avoir franchi la Ligne
      Et poussé plus au sud du monde occidental.

      La côte s’abaissait, et les bois de santal
      Exhalaient sur la mer leurs brises parfumées.
      De toutes parts montaient de légères fumées,
      Et les marins joyeux, accoudés aux haubans,
      Voyaient les fleuves luire en tortueux rubans
      À travers la campagne, et tout le long des plages
      Fuir des champs cultivés et passer des villages.

      Ensuite, ayant serré la côte de plus près,
      À leurs yeux étonnés parurent les forêts.

      Au pied des volcans morts, sous la zone des cendres,
      L’ébénier, le gayac et les durs palissandres,
      Jusques aux confins bleus des derniers horizons
      Roulant le flot obscur des vertes frondaisons,
      Variés de feuillage et variés d’essence,

      Déployaient la grandeur de leur magnificence ;
      Et du nord au midi, du levant au ponent,
      Couvrant tout le rivage et tout le continent,
      Partout où l’œil pouvait s’étendre, la ramure
      Se prolongeait avec un éternel murmure
      Pareil au bruit des mers. Seul, en ce cadre noir,
      Étincelait un lac, immobile miroir
      Où le soleil, plongeant au milieu de cette ombre,
      Faisait un grand trou d’or dans la verdure sombre.

      Sur le sable marneux, d’énormes caïmans
      Guettaient le tapir noir ou les roses flamants.
      Les majas argentés et les boas superbes
      Sous leurs pesants anneaux broyaient les hautes herbes,
      Ou, s’enroulant autour des troncs d’arbres pourris,
      Attendaient l’heure où vont boire les pécaris.
      Et sur les bords du lac horriblement fertile
      Où tout batracien pullule et tout reptile,
      Alors que le soleil décline, on pouvait voir
      Les fauves par troupeaux descendre à l’abreuvoir :
      Le puma, l’ocelot et les chats-tigres souples,
      Et le beau carnassier qui ne va que par couples
      Et qui par-dessus tous les félins est cité
      Pour sa grâce terrible et sa férocité,
      Le jaguar. Et partout dans l’air multicolore
      Flottait la végétale et la vivante flore ;

      Tandis que des cactus aux hampes d’aloès,
      Les perroquets divers et les kakatoès
      Et les aras, parmi d’assourdissants ramages,
      Lustraient au soleil clair leurs splendides plumages,
      Dans un pétillement d’ailes et de rayons,
      Les frêles oiseaux-mouche et les grands papillons,
      D’un vol vibrant, avec des jets de pierreries,
      Irradiaient autour des lianes fleuries.

      Plus loin, de toutes parts élancés, des halliers,
      Des gorges, des ravins, des taillis, par milliers,
      Pillant les monbins mûrs et les buissons d’icaques,
      Les singes de tout poil, ouistitis et macaques,
      Sakis noirs, capucins, trembleurs et carcajous
      Par les figuiers géants et les hauts acajous,
      Sautant de branche en branche ou pendus par leurs queues,
      Innombrables, de l’aube au soir, durant des lieues,
      Avec des gestes fous hurlant et gambadant,
      Tout le long de la mer les suivaient.

      Cependant,
      Poussé par une tiède et balsamique haleine,
      Le navire, doublant le cap de Sainte-Hélène,
      Glissa paisiblement dans le golfe d’azur
      Où, sous l’éclat d’un jour éternellement pur,
      La mer de Guayaquil, sans colère et sans lutte,

      Arrondissant au loin son immense volute,
      Frange les sables d’or d’une écume d’argent.

      Et l’horizon s’ouvrit magnifique et changeant.

      Les montagnes, dressant les neiges de leur crête,
      Coupaient le ciel foncé d’une brillante arête
      D’où s’élançaient tout droits au haut de l’éther bleu
      Le Prince du Tonnerre et le Seigneur du Feu :
      Le mont Chimborazo dont la sommité ronde,
      Dôme prodigieux sous qui la foudre gronde,
      Dépasse, gigantesque et formidable aussi,
      Le cône incandescent du vieux Cotopaxi.

      Attentif aux gabiers en vigie à la hune,
      Dans le pressentiment de sa haute fortune,
      Pizarre, sur le pont avec les Conquérants,
      Jetait sur ces splendeurs des yeux indifférents,
      Quand, soudain, au détour du dernier promontoire,
      L’équipage, poussant un long cri de victoire,
      Dans le repli du golfe où tremblent les reflets
      Des temples couverts d’or et des riches palais,
      Avec ses quais noircis d’une innombrable foule,
      Entre l’azur du ciel et celui de la houle,
      Au bord de l’Océan vit émerger Tumbez.

      Alors, se recordant ses compagnons tombés
      À ses côtés, ou morts de soif et de famine,
      Et voyant que le peu qui restait avait mine
      De gens plus disposés à se ravitailler
      Qu’à reprendre leur course, errer et batailler,
      Pizarre comprit bien que ce serait démence
      Que de s’aventurer dans cet empire immense ;
      Et jugeant sagement qu’en ce dernier effort
      Il fallait à tout prix qu’il restât le plus fort,
      Il prit langue parmi ces nations étranges,
      Rassembla beaucoup d’or par dons et par échanges,
      Et, gagnant Panama sur son vieux brigantin
      Plein des fruits de la terre et lourd de son butin,
      Il mouilla dans le port après trois ans de courses.
      Là, se trouvant à bout d’hommes et de ressources,
      Bien que fort malhabile aux manières des cours,
      Il résolut d’user d’un suprême recours
      Avant que de tenter sa dernière campagne,
      Et de Nombre de Dios s’embarqua pour l’Espagne.
      III

      Or, lorsqu’il toucha terre au port de San-Lucar,
      Il retrouva l’Espagne en allégresse, car
      L’Impératrice-Reine, en un jour très prospère,
      Comblant les vœux du prince et les désirs du père,
      Avait heureusement mis au monde l’Infant
      Don Philippe — que Dieu conserve triomphant !
      Et l’Empereur joyeux le fêtait dans Tolède.
      Là, Pizarre, accouru pour implorer son aide,
      Conta ses longs travaux et, ployant le genou,
      Lui fit en bon sujet hommage du Pérou.
      Puis ayant présenté, non sans quelque vergogne
      D’offrir si peu, de l’or, des laines de vigogne
      Et deux lamas vivants avec un alpaca,
      Il exposa ses droits. Don Carlos remarqua

      Ces moutons singuliers et de nouvelle espèce
      Dont la taille était haute et la toison épaisse ;
      Même, il daigna peser entre ses doigts royaux,
      Fort gracieusement, la lourdeur des joyaux ;
      Mais quand il dut traiter l’objet de la demande,
      Il répondit avec sa rudesse flamande :
      Qu’il trouvait, à son gré, que le vaillant Marquis
      Don Hernando Cortès avait assez conquis
      En subjuguant le vaste empire des Aztèques ;
      Et que lui-même ainsi que les saints Archevêques
      Et le Conseil étaient fermement résolus
      À ne rien entreprendre et ne protéger plus,
      Dans ses possessions des mers occidentales,
      Ceux qui s’entêteraient à ces courses fatales
      Où s’abîma jadis Diego de Nicuessa.
      Mais, à ce dernier mot, Pizarre se dressa
      Et lui dit : Que c’était chose qui scandalise
      Que d’ainsi rejeter du giron de l’Église,
      Pour quelques onces d’or, autant d’infortunés,
      Qui, dans l’idolâtrie et l’ignorance nés,
      Ne demandaient, voués au céleste anathème,
      Qu’à laver leurs péchés dans l’eau du saint baptême.
      Ensuite il lui peignit en termes éloquents
      La Cordillère énorme avec ses vieux volcans
      D’où le feu souverain, qui fait trembler la terre
      Et fondre le métal au creuset du cratère,
      Précipite le flux brûlant des laves d’or

      Que garde l’oiseau Rock qu’ils ont nommé condor.
      Il lui dit la nature enrichissant la fable ;
      D’innombrables torrents qui roulent dans leur sable
      Des pierres d’émeraude en guise de galets ;
      La chicha fermentant aux celliers des palais
      Dans des vases d’or pur pareils aux vastes jarres
      Où l’on conserve l’huile au fond des Alpujarres ;
      Les temples du Soleil couvrant tout le pays,
      Revêtus d’or, bordés de leurs champs de maïs
      Dont les épis sont d’or aussi bien que la tige
      Et que broutent, miracle à donner le vertige
      Et fait pour rendre même un Empereur pensif,
      Des moutons d’or avec leurs bergers d’or massif.

      Ce discours étonna Don Carlos, et l’Altesse,
      Daignant enfin peser avec la petitesse
      Des secours implorés l’honneur du résultat,
      Voulut que sans tarder Don François répétât,
      Par-devant Nosseigneurs du Grand Conseil, ses offres
      De dilater l’Église et de remplir les coffres.
      Après quoi, lui passant l’habit de chevalier
      De Saint-Jacque, il lui mit au cou son bon collier.
      Et Pizarre jura sur les saintes reliques
      Qu’il resterait fidèle aux rois Très-Catholiques,
      Et qu’il demeurerait le plus ferme soutien
      De l’Église Romaine et du beau nom chrétien.
      Puis l’Empereur dicta les augustes cédules

      Qui faisaient assavoir, même aux plus incrédules,
      Que, sauf les droits anciens des hoirs de l’Amiral,
      Don François Pizarro, lieutenant général
      De Son Altesse, était sans conteste et sans terme
      Seigneur de tous pays, îles et terre ferme,
      Qu’il avait découverts ou qu’il découvrirait.
      La minute étant lue et quand l’acte fut prêt
      À recevoir les seings au bas des protocoles,
      Pizarre, ayant jadis peu hanté les écoles,
      Car en Estremadure il gardait les pourceaux,
      Sur le vélin royal d’où pendaient les grands sceaux
      Fit sa croix, déclarant ne savoir pas écrire,
      Mais d’un ton si hautain que nul ne put en rire.
      Enfin, sur un carreau brodé, le bâton d’or
      Qui distingue l’Alcade et l’Alguazil Mayor
      Lui fut remis par Juan de Fonseca. La chose
      Ainsi dûment réglée et sa patente close,
      L’Adelantade, avant de reprendre la mer,
      Et bien qu’il n’en gardât qu’un souvenir amer,
      Visita ses parents dans Truxillo, leur ville,
      Puis, joyeux, s’embarqua du havre de Séville
      Avec les trois vaisseaux qu’il avait nolisés.
      Il reconnut Gomère, et les vents alizés,
      Gonflant d’un souffle frais leur voilure plus ronde,
      Entraînèrent ses nefs sur la route du monde
      Qui fit l’Espagne grande et Colomb immortel.
      IV

      Or donc, un mois plus tard, au pied du maître-autel,
      Dans Panama, le jour du noble Évangéliste
      Saint Jean, fray Juan Vargas lut au prône la liste
      De tous ceux qui montaient la nouvelle Armada
      Sous Don François Pizarre, et les recommanda.
      Puis, les deux chefs ayant entre eux rompu l’hostie,
      Voici de quelle sorte on fit la départie.

      Lorsque l’Adelantade eut de tous pris congé,
      Ce jour même, après vêpre, en tête du clergé,
      L’Évêque ayant béni l’armée avec la flotte,
      Don Bartolomé Ruiz, comme royal pilote,
      En pompeux apparat, tout vêtu de brocart,

      Le porte-voix au poing, montant au banc de quart,
      Commanda de rentrer l’ancre en la capitane
      Et de mettre la barre au vent de tramontane.
      Alors, parmi les pleurs, les cris et les adieux,
      Les soldats inquiets et les marins joyeux,
      Debout sur les haubans ou montés sur les vergues
      D’où flottait un pavois de drapeaux et d’exergues,
      Quand le coup de canon de partance roula,
      Entonnèrent en chœur l’Ave maris stella ;
      Et les vaisseaux, penchant leurs mâts aux mille flammes,
      Plongèrent à la fois dans l’écume des lames.

      La mer étant fort belle et le nord des plus frais,
      Leur voyage fut prompt, et sans souffrir d’arrêts
      Ou pour cause d’aiguade ou pour raison d’escale,
      Courant allègrement par la mer tropicale,
      Pizarre saluait avec un mâle orgueil,
      Comme d’anciens amis, chaque anse et chaque écueil.
      Bientôt il vit, vainqueur des courants et des calmes,
      Monter à l’horizon les verts bouquets de palmes
      Qui signalent de loin le golfe, et débarquant,
      Aux portes de Tumbez il vint planter son camp.
      Là, s’abouchant avec les Caciques des villes,
      Il apprit que l’horreur des discordes civiles
      Avait ensanglanté l’Empire du Soleil ;
      Que l’orgueilleux bâtard Atahuallpa, pareil
      À la foudre, rasant villes et territoires,

      Avait conquis, après de rapides victoires,
      Cuzco, nombril du monde, où les Rois, ses aïeux,
      Dieux eux-mêmes, siégeaient parmi les anciens Dieux,
      Et qu’il avait courbé sous le joug de l’épée
      La terre de Manco sur son frère usurpée.

      Aussitôt, s’éloignant de la côte à grands pas,
      À travers le désert sablonneux des pampas,
      Tout joyeux de mener au but ses vieilles bandes,
      Pizarre commença d’escalader les Andes.

      De plateaux en plateaux, de talus en talus,
      De l’aube au soir allant jusqu’à n’en pouvoir plus,
      Ils montaient, assaillis de funèbres présages.
      Rien n’animait l’ennui des mornes paysages.
      Seul, parfois, ils voyaient miroiter au lointain
      Dans sa vasque de pierre un lac couleur d’étain.
      Sous un ciel tour à tour glacial et torride,
      Harassés et tirant leurs chevaux par la bride,
      Ils plongeaient aux ravins ou grimpaient aux sommets ;
      La montagne semblait prolonger à jamais,
      Comme pour épuiser leur marche errante et lasse,
      Ses gorges de granit et ses crêtes de glace.
      Une étrange terreur planait sur la sierra
      Et plus d’un vieux routier dont le cœur se serra
      Pour la première fois y connut l’épouvante.
      La terre sous leurs pas, convulsive et mouvante,

      Avec un sourd fracas se fendait, et le vent,
      Au milieu des éclats de foudre, soulevant
      Des tourmentes de neige et des trombes de grêles,
      Se lamentait avec des voix surnaturelles.
      Et roidis, aveuglés, éperdus, les soldats,
      Cramponnés aux rebords à pic des quebradas,
      Sentaient sous leurs pieds lourds fuir le chemin qui glisse.
      Sur leurs fronts la montagne était abrupte et lisse,
      Et plus bas, ils voyaient, dans leurs lits trop étroits,
      Rebondissant le long des bruyantes parois,
      Aux pointes des rochers qu’un rouge éclair allume,
      Se briser les torrents en poussière d’écume.
      Le vertige, plus haut, les gagna. Leurs poumons
      Saignaient en aspirant l’air trop subtil des monts,
      Et le froid de la nuit gelait la triste troupe.
      Tandis que les chevaux, tournant en rond leur croupe,
      L’un sur l’autre appuyés, broutaient un chaume ras,
      Les soldats, violant les tombeaux Aymaras,
      En arrachaient les morts cousus dans leurs suaires
      Et faisaient de grands feux avec ces ossuaires.

      Pizarre seul n’était pas même fatigué.
      Après avoir passé vingt rivières à gué,
      Traversé des pays sans hameaux ni peuplade,
      Souffert le froid, la faim, et tenté l’escalade
      Des monts les plus affreux que l’homme ait mesurés,
      D’un regard, d’une voix et d’un geste assurés,

      Au cœur des moins hardis il soufflait son courage ;
      Car il voyait, terrible et somptueux mirage,
      Au feu de son désir briller Caxamarca.

      Enfin, cinq mois après le jour qu’il débarqua,
      Les pics de la sierra lui tenant lieu de phare,
      Il entra, les clairons sonnant tous leur fanfare,
      À grand bruit de tambours et la bannière au vent,
      Sur les derniers plateaux, et poussant en avant,
      Sans laisser aux soldats le temps de prendre haleine,
      En hâte, il dévala le chemin de la plaine.
      V

      Au nombre de cent six marchaient les gens de pied.
      L’histoire a dédaigné ces braves, mais il sied
      De nommer par leur nom, qu’il soit noble ou vulgaire,
      Tous ceux qui furent chefs en cette illustre guerre
      Et de dire la race et le poil des chevaux,
      Ne pouvant, au récit de leurs communs travaux,
      Ranger en même lieu que des bêtes de somme
      Ces vaillants serviteurs de tout bon gentilhomme.

      Voici. Soixante et deux cavaliers hidalgos
      Chevauchent, par le sang et la bravoure égaux,
      Autour des plis d’azur de la royale enseigne
      Où près du château d’or le pal de gueules saigne

      Et que brandit, suivant le chroniqueur Xerez,
      Le fougueux Gabriel de Rojas, l’alferez,
      Dont le pourpoint de cuir bordé de cannetilles
      Est gaufré du royal écu des deux Castilles,
      Et qui porte à sa toque en velours d’Aragon
      Un saint Michel d’argent terrassant le dragon.
      Sa main ferme retient ce fameux cheval pie
      Qui s’illustra depuis sous Carbajal l’Impie ;
      Cet andalou de race arabe, et mal dompté,
      Qui mâche en se cabrant son mors ensanglanté
      Et de son dur sabot fait jaillir l’étincelle,
      Peut dépasser, ayant son cavalier en selle,
      Le trait le plus vibrant que saurait décocher
      Du nerf le mieux tendu le plus vaillant archer.

      À l’entour de l’enseigne en bon ordre se groupe,
      Poudroyant au soleil, tout le gros de la troupe :
      C’est Juan de la Torre ; Cristobal Peralta,
      Dont la devise est fière : Ad summum per alta ;
      Le borgne Domingo de Serra-Luce ; Alonze
      De Molina, très brun sous son casque de bronze ;
      Et François de Cuellar, gentilhomme andalous,
      Qui chassait les Indiens comme on force des loups ;
      Et Mena qui, parmi les seigneurs de Valence,
      Était en haut renom pour manier la lance.
      Ils s’alignent, réglant le pas de leurs chevaux
      D’après le train suivi par leurs deux chefs rivaux,

      Del Barco qui, fameux chercheur de terres neuves,
      Avec Orellana descendit les grands fleuves,
      Et Juan de Salcedo qui, fils d’un noble sang,
      Quoique sans barbe encor, galope au premier rang.
      Sur un bravo étalon cap de more qui fume
      Et piaffe, en secouant son frein blanchi d’écume.

      Derrière, tout marris de marcher sur leurs pieds,
      Viennent les démontés et les estropiés.
      Juan Forès pique en vain d’un carreau d’arbalète
      Un vieux rouan fourbu qui bronche et qui halète ;
      Ribera l’accompagne, et laisse à l’abandon
      Errer distraitement la bride et le bridon
      Au col de son bai brun qui boite d’un air morne,
      S’étant, faute de fers, usé toute la corne.
      Avec ces pauvres gens marche don Pèdre Alcon,
      Lequel en son écu porte d’or au faucon
      De sable, grilleté, chaperonné de gueules ;
      Ce vieux seigneur jadis avait tourné les meules
      Dans Grenade, du temps qu’il était prisonnier
      Des mécréants. Ce fut un bon pertuisanier.

      Ainsi bien escortés, à l’amble de leurs deux mules
      Fort pacifiquement s’en vont les deux émules :
      Requelme, le premier, comme bon Contador,
      Reste silencieux, car le silence est d’or ;

      Quant au licencié Gil Tellez, le Notaire,
      Il dresse en son esprit le futur inventaire,
      Tout prêt à prélever, au taux juste et légal,
      La part des Cavaliers après le Quint Royal.

      Or, quelques fourrageurs restés sur les derrières,
      Pour rejoindre leurs rangs, malgré les fondrières,
      À leurs chevaux lancés ayant rendu la main,
      Et bravant le vertige et brûlant le chemin,
      Par la montagne à pic descendaient ventre à terre.
      Leur galop furieux fait un bruit de tonnerre.
      Les voici : bride aux dents, le sang aux éperons,
      Dans la foule effarée, au milieu des jurons,
      Du tumulte, des cris, des appels à l’Alcade,
      Ils débouchent. Le chef de cette cavalcade,
      Qui, d’aspect arrogant et vêtu de brocart,
      Tandis que son cheval fait un terrible écart,
      Salue Alvar de Paz qui devant lui se range,
      En balayant la terre avec sa plume orange,
      N’est autre que Fernan, l’aîné, le plus hautain
      Des Pizarre, suivi de Juan, et de Martin
      Qu’on dit d’Alcantara, leur frère par le ventre.
      Briceño qui, depuis, se fit clerc et fut chantre
      À Lima, n’étant pas très habile écuyer,
      Dans cette course folle a perdu l’étrier,
      Et, voyant ses amis déjà loin, se dépêche
      Et pique sa jument couleur de fleur de pêche.

      Le brave Antonio galope à son côté ;
      Il porte avec orgueil sa noble pauvreté,
      Car, s’il a pour tout bien l’épée et la rondache,
      Son cimier héraldique est ceint des feuilles d’ache
      Qui couronnent l’écu des ducs de Carrion.

      Ils passent, soulevant un poudreux tourbillon.

      À leurs cris, un seigneur, de ceux de l’avant-garde,
      S’arrête, et, retournant son cheval, les regarde.
      Il monte un genet blanc dont le caparaçon
      Est rouge, et pour mieux voir se penche sur l’arçon.
      C’est le futur vainqueur de Popayan. Sa taille
      Est faite pour vêtir le harnois de bataille.
      Beau comme un Galaor et fier comme un César,
      Il marche en tête, ayant pour nom Benalcazar.
      Près d’Oreste voici venir le bon Pylade :
      Très basané, le chef coiffé de la salade,
      Il rêve, enveloppé dans son large manteau ;
      C’est le vaillant soldat Hernando de Soto
      Qui, rude explorateur de la zone torride,
      Découvrira plus tard l’éclatante Floride
      Et le père des eaux, le vieux Meschacébé.
      Cet autre qui, casqué d’un morion bombé,
      Boucle au cuir du jambard la lourde pertuisane
      En flattant de la voix sa jument alezane,
      C’est l’aventurier grec Pedro de Candia,

      Lequel ayant brûlé dix villes, dédia,
      Pour expier ces feux, dix lampes à la Vierge.
      Il regarde, au sommet dangereux de la berge,
      Caracoler l’ardent Gonzalo Pizarro,
      Qui depuis, à Lima, par la main du bourreau,
      Ainsi que Carbajal, eut la tête branchée
      Sur le gibet, après qu’elle eut été tranchée
      Aux yeux des Cavaliers qui, séduits par son nom,
      Dans Cuzco révolté haussèrent son pennon.
      Mais lui, bien qu’à son roi déloyal et rebelle,
      Étant bon hidalgo, fit une mort très belle.

      À quelques pas, l’épée et le rosaire au flanc,
      Portant sur les longs plis de son vêtement blanc
      Un scapulaire noir par-dessus le cilice
      Dont il meurtrit sa chair et dompte sa malice,
      Chevauche saintement l’ennemi des faux dieux,
      Le très savant et très miséricordieux
      Moine dominicain fray Vincent de Valverde
      Qui, tremblant qu’à jamais leur âme ne se perde
      Et pour l’éternité ne brûle dans l’Enfer,
      Fit périr des milliers de païens par le fer
      Et les auto-da-fés et la hache et la corde,
      Confiant que Jésus, en sa miséricorde,
      Doux rémunérateur de son pieux dessein,
      Recevrait ces martyrs ignorants dans son sein.

      Enfin, les précédant de dix longueurs de vare,
      Et le premier de tous, marche François Pizarre.

      Sa cape, dont le vent a dérangé les plis,
      Laisse entrevoir la cotte et les brassards polis ;
      Car, seul parmi ces gens, pourtant de forte race,
      Qui tous avaient quitté l’acier pour la cuirasse
      De coton, il gardait, sous l’ardeur du Cancer,
      Sans en paraître las, son vêtement de fer.

      Son barbe cordouan, rétif, faisait des voltes
      Et hennissait ; et lui, châtiant ces révoltes,
      Laissait parfois sonner contre ses flancs trop prompts
      Les molettes d’argent de ses lourds éperons,
      Mais sans plus s’émouvoir qu’un cavalier de pierre,
      Immobile, et dardant de sa sombre paupière
      L’insoutenable éclat de ses yeux de gerfaut.

      Son cœur aussi portait l’armure sans défaut
      Qui sied aux conquérants, et, simple capitaine,
      Il caressait déjà dans son âme hautaine
      L’espoir vertigineux de faire, tôt ou tard,
      Un manteau d’Empereur des langes du bâtard.
      VI

      Ainsi précipitant leur rapide descente
      Par cette route étroite, encaissée et glissante,
      Depuis longtemps, suivant leur chef, et, sans broncher,
      Faisant rouler sous eux le sable et le rocher,
      Les hardis cavaliers couraient dans les ténèbres
      Des défilés en pente et des gorges funèbres
      Qu’éclairait par en haut un jour terne et douteux ;
      Lorsque, subitement, s’effondrant devant eux,
      La montagne s’ouvrit sur le ciel comme une arche
      Gigantesque, et, surpris au milieu de leur marche
      Et comme s’ils sortaient d’une noire prison,
      Dans leurs yeux aveuglés l’espace, l’horizon,

      L’immensité du vide et la grandeur du gouffre
      Se mêlèrent, abîme éblouissant. Le soufre,
      L’eau bouillante, la lave et les feux souterrains,
      Soulevant son échine et crevassant ses reins,
      Avaient ouvert, après des siècles de bataille,
      Au flanc du mont obscur cette splendide entaille.

      Et, la terre manquant sous eux, les Conquérants
      Sur la corniche étroite ayant serré leurs rangs,
      Chevaux et cavaliers brusquement firent halte.

      Les Andes étageaient leurs gradins de basalte,
      De porphyre, de grès, d’ardoise et de granit,
      Jusqu’à l’ultime assise où le roc qui finit
      Sous le linceul neigeux n’apparaît que par place.
      Plus haut, l’âpre forêt des aiguilles de glace
      Fait vibrer le ciel bleu par son scintillement ;
      On dirait d’un terrible et clair fourmillement
      De guerriers cuirassés d’argent, vêtus d’hermine,
      Qui campent aux confins du monde, et que domine
      De loin en loin, colosse incandescent et noir,
      Un volcan qui, dressé dans la splendeur du soir,
      Hausse, porte-étendard de l’hivernal cortège,
      Sa bannière de feu sur un peuple de neige.

      Mais tous fixaient leurs yeux sur les premiers gradins
      Où, près des cours d’eau chaude, au milieu des jardins,
      Ils avaient vu, dans l’or du couchant éclatantes,
      Blanchir à l’infini, les innombrables tentes
      De l’Inca, dont le vent enflait les pavillons ;
      Et de la solfatare en de tels tourbillons
      Montaient confusément d’épaisses fumerolles,
      Que dans cette vapeur, couverts de banderoles,
      La plaine, les coteaux et le premier versant
      De la montagne avaient un aspect très puissant.

      Et tous les Conquérants, dans un morne silence,
      Sur le col des chevaux laissant pendre la lance,
      Ayant considéré mélancoliquement
      Et le peu qu’ils étaient et ce grand armement,
      Pâlirent. Mais Pizarre, arrachant la bannière
      Des mains de Gabriel Rojas, d’une voix fière :
      Pour Don Carlos, mon maître, et dans son Nom Royal,
      Moi, François Pizarro, son serviteur loyal,
      En la forme requise et par-devant Notaire,
      Je prends possession de toute cette terre ;
      Et je prétends de plus que si quelque rival
      Osait y contredire, à pied comme à cheval,
      Je maintiendrai mon droit et laverai l’injure ;
      Et par mon saint patron, Don François, je le jure ! —

      Et ce disant, d’un bras furieux, dans le sol
      Qui frémit, il planta l’étendard espagnol
      Dont le vent des hauteurs qui soufflait par rafales
      Tordit superbement les franges triomphales.

      Cependant les soldats restaient silencieux,
      Éblouis par la pompe imposante des cieux.

      Car derrière eux, vers l’ouest, où sans fin se déroule
      Sur des sables lointains la Pacifique houle,
      En une brume d’or et de pourpre, linceul
      Rougi du sang d’un Dieu, sombrait l’antique Aïeul
      De Celui qui régnait sur ces tentes sans nombre.
      En face, la sierra se dressait haute et sombre.
      Mais quand l’astre royal dans les flots se noya,
      D’un seul coup, la montagne entière flamboya
      De la base au sommet, et les ombres des Andes,
      Gagnant Caxamarca, s’allongèrent plus grandes.
      Et tandis que la nuit, rasant d’abord le sol,
      De gradins en gradins haussait son large vol,
      La mourante clarté, fuyant de cime en cime,
      Fit resplendir enfin la crête plus sublime ;
      Mais l’ombre couvrit tout de son aile. Et voilà
      Que le dernier sommet des pics étincela,

      Puis s’éteignit.

      Alors, formidable, enflammée
      D’un haut pressentiment, tout entière, l’armée,
      Brandissant ses drapeaux sur l’occident vermeil,
      Salua d’un grand cri la chute du Soleil.

      https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Conqu%C3%A9rants_de_l%E2%80%99Or

    • Question @simplicissimus
      En cherchant l’ideogramme chinois pour l’or, j’ai trouvé un symbole de « triple or »

      https://fr.wiktionary.org/wiki/%E9%91%AB
      mais il n’y a pas de traduction ni définition pour ce signe. Gogol translate traduit par Xin et Xin veut dire nouveau, mais j’ai un doute.
      Est-ce que tu sait si un triple or fait un nouveau mot qui n’a pas de rapport direct à l’or ou est ce que ca veux dire qu’il y a trois fois plus d’or dans cet or ?

    • Merci @mad_meg de ta grande confiance en mes capacités ! et, surtout, merci de mobiliser ma curiosité qui ne demande que cela…

      Je ne suis pas sinisant, mais un peu de recherche en partant de ton idéogramme me donne des éléments de réponse. Apparemment, différents idéogrammes retranscrivent le même son, transcrit xīn (et parfois jīn, avec la même prononciation…, le trait horizontal, dont le nom typographique est un #macron est la marque du premier ton (haut et long dixit WP https://fr.wikipedia.org/wiki/Macron_(diacritique)#Transcription_du_chinois )

      cf. gg:translate (à l’écoute du robot qui prononce ces trois idéogrammes, je ne perçois pas vraiment de différence)
      https://translate.google.fr/#zh-CN/fr/金%0A鑫%0A新

      D’après Chine nouvelle et son dictionnaire (Xinhua, justement l’un des xin, comme pour Xin Jiang (ex-Sinkiang dans les transcriptions françaises anciennes)

      • 金 : or

      • 鑫 : ton « triple or », signifiant prospère (et pas d’autre info, si ce n’est que ce caractère est très utilisé pour les noms de commerce…)

      • 新 : nouveau

      Au passage, je trouve les articles de Chine nouvelle particulièrement bien faits… et tu peux apprendre à l’écrire (semble-t-il çar le lien demande une connexion à son compte gmail…)

      https://www.chine-nouvelle.com/outils/dictionnaire.html

    • De mon point de vue, un incontournable : L’Or de Blaise Cendrars

      L’Or (roman) — Wikipédia
      https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Or_(roman)

      L’Or (sous-titré La Merveilleuse Histoire du général Johann August Suter) est un roman de Blaise Cendrars paru chez Grasset en 1925. C’est le premier roman publié par son auteur, connu jusqu’alors pour ses poèmes (Les Pâques à New York, la Prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de France) et ses collaborations avec les peintres dans les milieux d’avant-garde.

    • Merci @simplicissimus j’étais sur que tu saurais résoudre cette énigme du « triple or » j’avais vu en effet beaucoup de logos commerciaux avec ce signe. Pour L’Or de Cendras je l’avais lu dans ma jeunesse mais je m’en souviens pas très bien, je vais voir si je te retrouve dans mes livres pour m’y replongé car c’est le moment de m’y mettre vu ma thématique actuelle.
      Et merci aussi pour le lien vers les mines sauvages des indiens du venezuela. Je vais regarder ca de près, ainsi que ce macron que j’ai pas bien compris ce que c’est ^^

    • Sinon sur l’or ca me fait toujours pensé à ce passage du deuxième chant de Maldoror - je pense pas l’utilisé mais j’en profite pour le collé ici

      Un jour, donc, fatigué de talonner du pied le sentier abrupte du voyage terrestre, et de m’en aller, en chancelant comme un homme ivre, à travers les catacombes obscures de la vie, je soulevai avec lenteur mes yeux spleenétiques, cernés d’un grand cercle bleuâtre, vers la concavité du firmament, et j’osai pénétrer, moi, si jeune, les mystères du ciel ! Ne trouvant pas ce que je cherchais, je soulevai la paupière effarée plus haut, plus haut encore, jusqu’à ce que j’aperçusse un trône, formé d’excréments humains et d’or, sur lequel trônait, avec un orgueil idiot, le corps recouvert d’un linceul fait avec des draps non lavés d’hôpital, celui qui s’intitule lui-même le Créateur ! Il tenait à la main le tronc pourri d’un homme mort, et le portait, alternativement, des yeux au nez et du nez à la bouche ; une fois à la bouche, on devine ce qu’il en faisait. Ses pieds plongeaient dans une vaste mare de sang en ébullition, à la surface duquel s’élevaient tout à coup, comme des ténias à travers le contenu d’un pot de chambre, deux ou trois têtes prudentes, et qui s’abaissaient aussitôt, avec la rapidité de la flèche : un coup de pied, bien appliqué sur l’os du nez, était la récompense connue de la révolte au règlement, occasionnée par le besoin de respirer un autre milieu ; car, enfin, ces hommes n’étaient pas des poissons ! Amphibies tout au plus, ils nageaient entre deux eaux dans ce liquide immonde !… jusqu’à ce que, n’ayant plus rien dans la main, le Créateur, avec les deux premières griffes du pied, saisît un autre plongeur par le cou, comme dans une tenaille, et le soulevât en l’air, en dehors de la vase rougeâtre, sauce exquise ! Pour celui-là, il faisait comme pour l’autre. Il lui dévorait d’abord la tête, les jambes et les bras, et en dernier lieu le tronc, jusqu’à ce qu’il ne restât plus rien ; car, il croquait les os. Ainsi de suite, durant les autres heures de son éternité. Quelquefois il s’écriait : « Je vous ai créés ; donc j’ai le droit de faire de vous ce que je veux. Vous ne m’avez rien fait, je ne dis pas le contraire. Je vous fais souffrir, et c’est pour mon plaisir. » Et il reprenait son repas cruel, en remuant sa mâchoire inférieure, laquelle remuait sa barbe pleine de cervelle.

      https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Chants_de_Maldoror/Chant_II

    • Encore une question pour @simplicissimus ou toute personne qui aurais des infos là dessus.
      Dans un interview sur la chaine Thinkerview mais je ne sais plus laquelle, le mec qui fait les entretiens dit que la Chine constituerait un stock d’or de manière à pouvoir étaloné le yuan sur l’or et prendre ainsi le dessus sur le dollar et faire du yuan la nouvelle monnaie de référence. J’en sais pas plus, mais si quelqu’un·e à des infos là dessus, ou sur cette rumeur, je suis prenneuse.
      Merci

      sur gogol j’ai trouver quelques infos de 2017 mais je sais pas ce que ca vaut
      https://www.loretlargent.info/crise/la-chine-adossera-le-yuan-%E5%85%83-a-l%E2%80%99or/7762
      https://www.businessbourse.com/2017/12/13/letalon-or-russo-chinois-signifie-fin-de-domination-dollar-americain
      https://medium.com/@Pierre_Paperon/alibaba-et-un-standard-mon%C3%A9taire-le-yuan-or-419b578c58d7
      https://blogs.mediapart.fr/jean-paul-baquiast/blog/170917/le-brics-prepare-la-mise-en-place-dun-nouvel-etalon-or

    • Une histoire de la ruée vers l’or, en Californie, à partir de 1848
      https://www.youtube.com/watch?v=XKxVyBo9jek

      Effondrement minier survenu sur la mine d’Elura située à 600 km à l’ouest-nord-ouest de Sydney, qui exploitait un gisement découvert dans les années 1970. Les mineurs y extrayaient de l’or, de l’argent, de l’ilménite, du leucoxène (altération de l’ilménite1), du zircon, du cuivre, du zinc et du plomb. L’effondrement s’est heureusement produit peu après le retrait des mineurs (et du matériel de chantier).

    • Dans l’Aude, la vallée de l’Orbiel minée par une pollution à l’arsenic
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/05/dans-l-aude-la-vallee-de-l-orbiel-minee-par-une-pollution-a-l-arsenic_539270
      #paywall je vais voire si il y a d’autres sources sur ce sujet.

      https://www.lindependant.fr/2018/11/14/pollution-a-larsenic-dans-lorbiel-suite-aux-intemperies-trois-associati
      –—

      https://www.lindependant.fr/2014/08/02/cet-arsenic-qui-empoisonne-la-vie-de-la-vallee-de-l-orbiel,1914128.php

      La préfecture a reconduit le 8 juillet un arrêté de 1997 interdisant la mise sur le marché des légumes-feuilles, légumes-racines, de thym ou d’escargots issus de huit communes.

      Le triste rituel est reconduit, chaque année, à de rares exceptions près, depuis 1997. Le 8 juillet, le préfet de l’Aude Louis Le Franc a, comme ses prédécesseurs, signé l’arrêté « portant suspension de la mise sur le marché des légumes feuilles, des légumes racines, des poireaux cultivés, du thym et des escargots ramassés dans la vallée de l’Orbiel, de ses environs et du site industriel de Salsigne ».

      C’est, comme pour les arrêtés des années passées, à de multiples analyses effectuées de 1997 à 2007 sur les végétaux que se réfère la préfecture. Arsenic, plomb, cadmium, mercure, voilà les éléments dont des « concentrations supérieures aux teneurs au-delà desquelles la sécurité des populations ne peut être garantie » ont été détectées.

      De quoi justifier ces suspensions de mise sur le marché des carottes, navets, choux, épinards, salades, mâche, blette, céleris branches et autres poireaux « cultivés sur des parcelles inondables, irriguées ou arrosées par des eaux en provenance de l’Orbiel et de ses affluents » : Villanière, Villardonnel, Conques-sur-Orbiel, Salsigne, Lastours et Villalier sont visées. Même mesure, donc, pour le thym et les escargots, avec une liste de villages concernés à laquelle viennent se rajouter Fournes-Cabardès et Limousis.

      –-----
      La mine d’or de Salsigne est un des sites les plus pollué en France.
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Mine_d%27or_de_Salsigne

    • Un bouquin sur le sujet signalé par @vanderling ;
      Ni or ni maître. Montagne d’or et consorts


      https://seenthis.net/messages/828122

      –—
      Au fait j’ai fait ce dessin il y a un bon moment mais il n’a pas encore été exposé et j’ai pas encore fait l’appli.
      J’ai pour le moment seulement un aperçu.

    • Merci @vanderling :)
      il fait 140x220cm
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      RÉVÉLATIONS - FRANÇAFRIQUE : PARFUM DE CORRUPTION EN GUINÉE

      https://www.youtube.com/watch?v=j_whCfWEOds

      Un projet français capable de séduire des pontes du CAC 40 pour exploiter une mine de bauxite en Guinée tourne au vinaigre : entre paradis fiscaux et corruption, dictature tropicale et néocolonialisme, récit d’un incroyable scandale, au cœur d’une Françafrique qui ne veut pas mourir.

      L’enquête de Thomas Dietrich : https://www.lemediatv.fr/articles/enquetes/revelations-francafrique-parfum-de-corruption-en-guinee-KYxpRbuCQLyo39-sS5

  • Loin de la terre promise

    Venus d’#Amérique_latine, des milliers de travailleurs et travailleuses récoltent les #fruits et #légumes de #Provence. Parfois confrontés à des employeurs malhonnêtes, certains ouvriers s’organisent.

    « En France, plus personne veut bosser dans l’#agriculture ! » Appuyé contre son tracteur sous le soleil écrasant de la fin d’été, L., maraîcher bio entre #Arles et #Avignon, se désole de la #pénurie de #main-d’œuvre française. Dans cette plaine fertile des #Bouches_du_Rhône, c’est le constat amer que font la plupart des agriculteurs. « Les Français, ils ne tiennent pas le coup ! » renchérit un de ses collègues. La solution : des #ouvriers_étrangers, bosseurs et pas exigeants.

    Après les Espagnols, les Portugais et les Marocains, ce sont des milliers de #travailleurs_sud-américains qui viennent dans le Sud de la France via des entreprises d’#intérim espagnoles comme #Terra_Fecundis, #Laboral_Terra ou #Eurofirm. Créées par des notables de la région de Murcia, Alicante ou Valence, dans le sillage de la crise du BTP de 2008 en Espagne qui a mis des milliers d’ouvriers sur le carreau, elles envoient dans toute l’Europe des travailleurs « en provenance de pays à faible coût », comme elles le mettent en avant auprès des agriculteurs.

    Des nouveaux travailleurs pas chers

    Côté agriculteurs, tout est facilité : même si le salaire horaire doit être désormais le même que celui des Français (lire ci-dessous), les boîtes d’intérim payent les cotisations sociales espagnoles, moins chères d’environ 10%. Entre l’exploitant et les travailleurs, aucun contrat individuel, mais une « commande » collective est passée auprès des entreprises espagnoles qui leur « livrent » les travailleurs en bus. L’agriculteur n’a plus qu’à régler la facture. Leur période d’embauche est calquée sur les besoins et les aléas de la production : ils sont donc révocables à tout moment.

    « Ce système arrange tout le monde ! constate Béatrice Mesini, sociologue. A la fois les agriculteurs qui ont tout à y gagner mais aussi les travailleurs eux-mêmes, qui sont très contents de pouvoir toucher 7,50 euros de l’heure pour vivre et rembourser leurs dettes au lieu de 3,50 à 5,50 euros en Espagne et encore moins chez eux en Amérique du Sud. »

    Des #abus et de la #surexploitation

    « Ils ne nous déclaraient que huit jours par mois alors qu’on travaillait tous les jours. » Sifrid

    Mais à quel prix ? Sous-déclaration des heures de travail, conditions de #logement déplorables, retenues démesurées sur le #salaire (la nourriture, les frais de santé, etc.)… Les accusations sont nombreuses. Rencontré à Beaucaire, Sifrid, Equatorien, raconte son arrivée en France en 2006, via Terra Fecundis (TF) : « Ils ne nous déclaraient que huit jours par mois alors qu’on travaillait tous les jours et parfois on n’était payés que plusieurs mois plus tard, dénonce le quadragénaire, le visage tanné par le soleil. En plus, ils prélèvent une somme pour les transports, pour le logement, pour tout ! Ils ne payent pas ­légalement ! »

    André Fadda, du syndicat CGT intérim 13, le confirme : « Dans le #travail_détaché, la première infraction qu’on note, tous secteurs confondus, c’est les amplitudes #horaires qui ne sont jamais respectées, dénonce-t-il. Ils peuvent parfois travailler jusqu’à 200, voire 250 heures par mois. »

    Des pratiques épinglées par la #justice

    La justice française s’est penchée sur le cas de ces entreprises espagnoles. En 2011, une information judiciaire pour #homicide involontaire est ouverte au Tribunal de Tarascon, à la suite de la #mort par #déshydratation d’#Iban_Elio_Granda_Maldonado, un travailleur TF. Aucune mesure n’a été prise à ce jour et la procédure s’éternise.

    A l’été 2017, la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Marseille ouvre une #enquête pour « #dissimulation_d’activité » et « #fraude_au_détachement ». Rien n’en est encore ressorti. D’ailleurs, sur les 3000 contrôles effectués en 2016 dans des #exploitations_agricoles, seules 329 entreprises ont été déclarées en #infraction. TF brouille les pistes : elle reste injoignable à son siège espagnol de Murcia et son adresse française à Châteaurenard nous mène vers l’appartement d’un de ses salariés, qui confirme qu’il n’y a plus de bureaux ici depuis trois ans.

    Les pratiques douteuses de ces entreprises ont attiré l’œil de la Mutuelle sociale agricole (MSA) et de l’Inspection du travail dont les contrôles sont de plus en plus fréquents. Sont ciblés ceux faisant appel aux prestations de TF, Laboral Terra, etc. Ennuyés par ces contrôles, les agriculteurs commencent à se montrer réticents aux services de ces sociétés. Un exploitant ayant souhaité rester anonyme témoigne : « Parfois, j’embauche quelques Equatoriens. Avant, je le faisais via Terra Fecundis mais maintenant, je passe par un groupement d’employeurs de droit français : au moins, on ne risque plus une descente de gendarmes. »

    Lassés d’être considérés comme des « négriers » et des « esclavagistes », des exploitants visités en viennent à mettre dehors les journalistes de manière musclée : « Vous voyez la porte là ? Eh ben, vous la prenez. Basta, on en a marre de lire des conneries sur notre dos. » D’autres, un peu plus enclins à la discussion, finissent par confier leur désarroi : « On sait qu’il y a des pratiques anormales, mais nous on est réglo et ça se passe très bien. Et puis ils sont là pour bosser ! » Ceux-ci ont cessé de « se faire livrer » par Terra Fecundis et recrutent désormais leurs #saisonniers en direct.

    S’organiser pour se faire respecter

    Petit à petit, les Sud-Américains qui ont acquis la nationalité espagnole contournent le détachement et passent par #Réagir, un groupement d’employeurs agricoles départemental. Sous la serre, Manuel, Johana, Maula, Rolando et Gloria, en pleine plantation du fenouil, ne regrettent pas d’avoir quitté TF : « Ici au moins, nos heures supplémentaires sont payées et les jours fériés et les dimanches majorés. » Un cadre qui plaît aussi à leur employeur qui souligne que « le paiement des charges en France ouvre le droit à une couverture sociale et à une #mutuelle ».

    Pourtant, même là, la situation est loin d’être idéale et ne garantit pas toujours de meilleurs traitements au quotidien… Blanca (le prénom a été changé à la demande de la personne ndlr ) travaille dans une entreprise française de conditionnement de fruits et légumes dans la région d’Avignon : « Je travaille trois jours et demi par semaine mais entre 5h du matin et 19h, avec des pauses. Dans l’entreprise, on nous a dit qu’on ne pouvait pas travailler plus de 48h par semaine ! lance cette mère de famille en riant un peu jaune. Mais bon, moi ça m’arrange pour les enfants. »

    Même si très peu d’entre eux parlent le français, ces travailleurs commencent à connaître leurs droits et des formes d’organisation collective émergent. La #solidarité est forte : des #cagnottes sont montées pour aider certains à payer des frais médicaux, des tournois de volley sont organisés pour souffler, se retrouver… Et en profiter pour s’échanger des contacts de boulot. Lassé de se « faire voler par les entreprises espagnoles », Peters, ancien saisonnier de TF, a monté sa propre entreprise pour mettre directement les travailleurs et les agriculteurs en lien : « Comme je parle bien français, à force je connaissais les employeurs et ils faisaient directement appel à moi. Je me suis lancé. »

    De leur côté, Santiago et Nelly sont cofondateurs d’une toute récente association, #Latinos_Sin_Fronteras, à Beaucaire : « On ne veut pas être vus que comme des machines à travailler. On est aussi des musiciens, des peintres, et on veut promouvoir notre culture, explique Santiago. « On voudrait aussi proposer des cours de français », rajoute Nelly. Julien Sanchez, le maire (FN) de #Beaucaire, n’a pas l’air très disposé à les aider dans leurs démarches. Mais la dynamique est lancée et entre deux matches de volley, certains soufflent que malgré les pressions, ils aimeraient monter un syndicat…

    Le #détachement : une politique européenne

    Pensé à l’origine pour favoriser la circulation des travailleurs au sein de l’Union européenne, le détachement est mis en place en 1996 à travers une directive qui précise qu’un travailleur détaché est « tout travailleur qui, pendant une période limitée, exécute son travail sur le territoire d’un Etat membre autre que l’Etat sur le territoire duquel il travaille habituellement ». Accusé de favoriser le « #dumping_social », le texte est amendé en 2017 en proposant d’établir l’égalité de rémunération et de règles salariales entre travailleurs détachés et locaux, tout en maintenant le règlement des #cotisations_sociales dans le pays d’origine. Il limite aussi la durée du détachement à douze mois et compte « protéger les travailleurs de la fraude et de l’exploitation ».

    Ces règles ont été entérinées en juillet 2018 par une nouvelle directive. « Pour l’Europe, c’est un système de win win win ! explique la sociologue Béatrice Mesini. A la fois pour le pays d’origine, pour le pays récepteur et pour le pays de mise à disposition. Tout le monde est gagnant et c’est pour ça que ça marche. »

    En Europe, le nombre de #travailleurs_détachés a augmenté de 45% entre 2010 et 2014, passant de 1,3 à 1,9 million, contre 600 000 en 2007. Le Ministère du travail français en recensait 516 101 en 2017, soit deux fois plus qu’en 2016, alors qu’en PACA, dans le secteur agricole, ils étaient 67 357 à venir ramasser des fruits et légumes, soit 7,4% de l’emploi salarié régional


    https://lecourrier.ch/2018/10/07/loindelaterrepromise-france
    #travailleurs_étrangers #travail #exploitation #maraîchage
    cc @isskein

  • Bike Trip : 5000 km à vélo pour cartographier l’Amérique du Sud
    https://www.trekmag.com/news-bike-trip-5000-km-velo-cartographier-amerique-sud
    https://www.trekmag.com/media/news/2018/09/alban-vignette.jpg

    Alban Vivert est parti de Bogota début mai, pour une itinérance sur deux roues à travers la #Colombie, l’#Équateur et le #Pérou. Un périple musclé, avec 5 130 km et 95 000 mètres de dénivelé positif. Durant quatre mois, il sillonne les routes et les petits chemins, passe des cols à plus de 4 000 m d’altitude et pédale sous tous les temps. Accroché en permanence à son vélo, un GPS qui enregistre sa trace. Car au-delà du défi sportif, l’idée d’Alban était "d’apporter quelque chose au pays visité".
    L’utilisation du #vélo, véhicule passe partout, a permis de cartographier des routes inexistantes sur #Google_Maps et de nourrir une base de données de 110 000 photos des régions traversées, toutes géolocalisées et ajoutées le jour même sur #Mapillary ou #OpenStreetMap. « Au total, j’ai cartographié plus de 10 000 objets, du chemin de terre au café du coin en passant par les maisons ou les administrations », raconte le voyageur. [...]
    Dans chaque pays traversé, le projet #Nomad_Maps s’est appuyé sur les communautés « OpenStreet » locales. Des contributeurs à la cartographie collaborative qui ont géolocalisé leur maison, leur quartier ou lancé des projets. « Le but final, c’est ce qu’on appelle le ’carto empowerment’, c’est à dire se remettre à exister par l’information géographique. À Bogota, j’ai par exemple travaillé avec une association qui agissait dans un quartier délaissé. En le cartographiant de manière exhaustive, les habitants pouvaient ainsi montrer qu’ils existaient. Il rendaient ainsi leur quartier attractif au niveau touristique ou pour les investisseurs pour ne pas qu’il tombe en désuétude et dans l’oubli des politiques publiques », raconte Alban.

    #cartographie

  • Chili con carbon - CQFD, mensuel de critique et d’expérimentation sociales
    http://cqfd-journal.org/Chili-con-carbon

    Le Chili, cette bande de terre aux climats extrêmes qui s’étire sur 4 300 kilomètres, est un pays isolé par des frontières naturelles. « Une île sur le continent sud-américain », comme s’amusent à dire les Chiliens. Au nord, c’est le désert d’Atacama, qui sépare le pays du Pérou et de la Bolivie. C’est dans cette zone la plus aride du monde que les habitants de Mejillones et Tocopilla ont vu s’installer au pied de leurs maisons des zones industrielles.

    Engie [1], la multinationale française de l’énergie, y exploite en effet des centrales à charbon – depuis 1995 à Mejillones et depuis 1915 à Tocopilla. Elle participe ainsi à transformer ces ports de pêche traditionnels en zones industrielles très polluées, appelées communément au Chili des « zones sacrifiées ». Dans l’indifférence

    #Chili #Charbon #Engie

  • « Changer de système ne passera pas par votre caddie »

    En rendant cheap la nature, l’argent, le travail, le care , l’alimentation, l’énergie et donc nos vies - c’est-à-dire en leur donnant une #valeur_marchande - le capitalisme a transformé, gouverné puis détruit la planète. Telle est la thèse développée par l’universitaire et activiste américain #Raj_Patel dans son nouvel ouvrage, intitulé Comment notre monde est devenu cheap (Flammarion, 2018). « Le capitalisme triomphe, non pas parce qu’il détruit la nature, mais parce qu’il met la nature au travail - au #moindre_coût », écrit Patel, qui a pris le temps de nous en dire plus sur les ressorts de cette « #cheapisation » généralisée.

    Raj Patel est professeur d’économie politique à l’université du Texas d’Austin. À 46 ans, c’est aussi un militant, engagé auprès de plusieurs mouvements, qui a travaillé par le passé pour la Banque mondiale et l’Organisation mondiale du commerce. Logique, quand on sait qu’il se définit lui-même comme « socialiste », ce qui « n’est pas facile au Texas », nous précise-t-il dans un éclat de rire. Patel a déjà écrit sur les crises alimentaires, dont il est un expert. Il signe aujourd’hui un nouvel ouvrage, Comment notre monde est devenu cheap, co-écrit avec Jason W. Moore, historien et enseignant à l’université de Binghampton.

    Ces deux universitaires hyper-actifs y développent une nouvelle approche théorique pour appréhender l’urgence dans laquelle nous nous trouvons, mêlant les dernières recherches en matière d’#environnement et de changement climatique à l’histoire du capitalisme. Pour eux, ce dernier se déploie dès le XIVème siècle. Il naît donc avec le #colonialisme et la #violence inhérente à l’#esclavage, jusqu’à mettre en place un processus de « cheapisation » généralisé, soit « un ensemble de stratégies destinées à contrôler les relations entre le capitalisme et le tissu du vivant, en trouvant des solutions, toujours provisoires, aux crises du capitalisme ». Une brève histoire du monde qui rappelle, sur la forme, la façon dont Yuval Harari traite l’histoire de l’humanité, mais avec cette fois une toute autre approche théorique, que Raj Patel n’hésite pas à qualifier de « révolutionnaire ».

    Entretien autour de cette grille de lecture, qui offre également quelques perspectives pour sortir de ce que les auteurs appellent le « #Capitalocène », grâce notamment au concept d’ « #écologie-monde ».

    Usbek & Rica : Des scientifiques du monde entier s’accordent à dire que nous sommes entrés depuis un moment déjà dans l’ère de l’#Anthropocène, cette période de l’histoire de la Terre qui a débuté lorsque les activités humaines ont eu un impact global significatif sur l’écosystème terrestre. Mais vous allez plus loin, en parlant de « Capitalocène ». Le capitalisme serait donc la cause de tous nos problèmes ?

    Raj Patel : Si vous avez entendu parler de l’Anthropocène, vous avez entendu parler de l’idée selon laquelle les humains sont en grande partie responsables de la situation désastreuse de notre planète. À ce rythme, en 2050, il y aura par exemple plus de plastique que de poissons dans les océans. Si une civilisation survient après celle des humains, les traces qui resteront de notre présence seront le plastique, la radioactivité liée aux essais nucléaires, et des os de poulet. Mais tout cela n’est pas lié à ce que les humains sont naturellement portés à faire. Il y a quelque chose qui conduit les humains à cette situation. Et si vous appelez cela l’Anthropocène, vous passez à côté du fond du problème. Ce n’est pas l’ensemble des comportements humains qui nous conduit à la sixième extinction. Il y a aujourd’hui beaucoup de civilisations sur Terre qui ne sont pas responsables de cette extinction de masse, et qui font ensemble un travail de gestion des ressources naturelles formidable tout en prospérant. Et ces civilisations sont souvent des populations indigènes vivant dans des forêts.

    Mais il y a une civilisation qui est responsable, et c’est celle dont la relation avec la nature est appelée « capitalisme ». Donc, au lieu de baptiser ces phénomènes Anthropocène, appelons-les Capitalocène. Nous pouvons ainsi identifier ce qui nous conduit aux bouleversements de notre écosystème. Il ne s’agit pas de quelque chose d’intrinsèque à la nature humaine, mais d’un système dans lequel évolue un certain nombre d’humains. Et ce système nous conduit vers une transformation dramatique de notre planète, qui sera visible dans l’étude des fossiles aussi longtemps que la Terre existera.

    Vous établissez, avec votre co-auteur, une histoire du capitalisme fondée sur sept choses « cheap ». Quelles sont-elles, et comment êtes vous parvenus à cette conclusion ?

    Dans ce livre, nous évoquons les sept choses que le capitalisme utilise pour éviter de payer ses factures. C’est d’ailleurs une définition courte du capitalisme : un système qui évite de payer ses factures. C’est un moyen de façonner et de réguler les relations entre individus, et entre les humains et la reste de la vie sur Terre. Ces sept choses sont la nature « cheap », l’argent « cheap », le travail « cheap », le care « cheap », l’alimentation « cheap », l’énergie « cheap » et les vies « cheap ». Nous sommes parvenus à cette conclusion en partie grâce à un raisonnement inductif fondé sur l’histoire, mais aussi en s’intéressant aux mouvements sociaux d’aujourd’hui. Par exemple, le mouvement Black Lives Matter ne proteste pas uniquement contre l’inégalité historique qui résulte de l’esclavage aux Etats-Unis. Ses membres se penchent aussi sur le changement climatique, l’équité entre les genres, le travail, la réforme agraire ou la nécessaire mise en place de meilleurs systèmes alimentaires et de systèmes d’investissement solidaires qui permettraient à des entreprises d’émerger.

    C’est une approche très complète, mais l’idée qui importe dans la structuration des mouvements sociaux est celle d’intersectionnalité. Et on peut identifier nos sept choses « cheap » dans presque tous les mouvements intersectionnels. Tous les mouvements visant à changer l’ordre social se tiennent à la croisée de ces sept choses.

    Vous expliquez que la nourriture est actuellement peu chère, mais que cela n’a pas été le cas à travers l’histoire. Dans votre introduction, vous prenez pour exemple les nuggets de MacDonald’s pour illustrer votre théorie des sept choses « cheap ». Pourquoi ?

    Il n’a pas toujours été possible d’obtenir un burger ou quelques chicken nuggets pour un euro ou deux. Au XIXème siècle, les ouvriers anglais dépensaient entre 80 et 90% de leurs revenus en nourriture. Aujourd’hui, nous consacrons à peu près 20% à l’alimentation. Quelque chose a changé. Et le nugget est devenu un fantastique symbole la façon dont le capitalisme évite de payer ses factures.

    Reprenons nos sept choses « cheap ». La nature « cheap » nous permet de retirer un poulet du monde sauvage et de le modifier en machine à produire de la viande. Cette approche de la nature est assez révélatrice de la façon dont le capitalisme opère. La deuxième chose, c’est le travail : pour transformer un poulet en nugget, il vous faut exploiter des travailleurs. Et partout dans le monde, ces ouvriers avicoles sont extrêmement mal payés. Une fois que les corps de ces ouvriers sont ruinés par le travail à la chaîne, qui va veiller sur eux ? Généralement, cela retombe sur la communauté, et particulièrement sur les femmes. C’est cela que j’appelle le « cheap care ». Les poulets sont eux-mêmes nourris grâce à de la nourriture « cheap », financée par des milliards de dollars de subventions. L’énergie « cheap », c’est-à-dire les énergies fossiles, permet de faire fonctionner les usines et les lignes de production. Et l’argent « cheap » permet de faire tourner l’ensemble, parce que vous avez besoin de taux d’intérêt très bas, et que les grandes industries en obtiennent des gouvernements régulièrement. Et enfin, vous avez besoin de vies « cheap » : il faut reconnaître que ce sont les non-blancs qui sont discriminés dans la production de ce type de nourriture, mais aussi que les consommateurs sont considérés comme jetables par l’industrie.

    Vous insistez sur le fait que le capitalisme est né de la séparation entre nature et société, théorisée notamment par Descartes. Et que cette naissance a eu lieu au XIVème siècle, dans le contexte de la colonisation. On a donc tort de dire que le capitalisme est né avec la révolution industrielle ?

    Si vous pensez que le capitalisme est né au cours de la révolution industrielle, vous êtes en retard de trois ou quatre siècles. Pour que cette révolution advienne, il a fallu beaucoup de signes avant-coureurs. Par exemple, l’idée de la division du travail était déjà à l’oeuvre dans les plantations de cannes à sucre à Madère à la fin du XIVème siècle ! Toutes les innovations dont on pense qu’elles proviennent de la révolution industrielle étaient déjà en place quand les Portugais ont apporté la production de sucre, l’esclavage et la finance à Madère.

    Quant à la division du monde entre nature et société, il s’agit là du péché conceptuel originel du capitalisme. Toutes les civilisations humaines ont une façon d’opérer une distinction entre « eux » et « nous », mais séparer le monde entre nature et société permet de dire quels humains peuvent faire partie de la société, et d’estimer qu’on est autorisé à exploiter le reste du monde. Les colons arrivant en Amérique considéraient ceux qu’ils ont baptisé « Indiens » comme des « naturales ». Dans une lettre à Isabelle Iʳᵉ de Castille et Ferdinand II d’Aragon, Christophe Colomb se désole de ne pouvoir estimer la valeur de la nature qu’il a devant lui aux Amériques. Il écrit aussi qu’il reviendra avec le plus d’esclaves possibles : il voit certains hommes et la nature comme des denrées interchangeables car ils ne font pas partie de la société. Cette frontière entre nature et société est propre au capitalisme, et c’est pourquoi il peut utiliser les ressources fournies par la nature tout en la considérant comme une immense poubelle.

    Le capitalisme fait partie, selon vous, d’une écologie-monde, un concept forgé par votre co-auteur. En quoi ?

    Nous nous inspirons de Fernand Braudel et du concept d’économie-monde. En résumé, l’historien explique que si l’on veut comprendre comment fonctionne le monde, on ne peut pas prendre l’Etat-nation comme unité fondamentale d’analyse. Il faut comprendre que cet endroit est défini par son rapport aux autres endroits, tout comme les humains sont définis par leurs relations aux autres humains. On doit également penser au système dans lequel le pays que l’on étudie se trouve.

    L’économie n’est qu’une façon de penser la relation entre les humains et le tissu du vivant. Par exemple, Wall Street est une façon d’organiser le monde et la nature. Les traders qui y travaillent font de l’argent en faisant des choix, et en les imposant via la finance et la violence qui lui est inhérente. Le tout pour structurer les relations entre individus et entre les humains et le monde extra-naturel. Ce que nous faisons, c’est que nous replaçons tout cela dans son écologie, et c’est pourquoi le concept d’écologie-monde fait sens. Si vous vous intéressez à la façon dont les humains sont reliés les uns aux autres, vous devez choisir la focale d’analyse la plus large possible.

    Vous dites qu’il est plus facile d’imaginer la fin du la planète que la fin du capitalisme. Pourquoi ?

    J’expliquais dernièrement à mes étudiants que nous avons jusqu’à 2030 si l’on veut parvenir à une économie neutre en carbone. Et ils étaient désespérés et désemparés. Ce désespoir est un symptôme du succès du capitalisme, en cela qu’il occupe nos esprits et nos aspirations. C’est pourquoi il est, selon moi, plus facile d’envisager la fin du monde que celle du capitalisme. On peut aller au cinéma et y admirer la fin du monde dans tout un tas de films apocalyptiques. Mais ce qu’on ne nous montre pas, ce sont des interactions différentes entre les humains et la nature, que certaines civilisations encore en activités pratiquent actuellement sur notre planète.

    Je vis aux Etats-Unis, et tous les matins mes enfants doivent prêter serment et répéter qu’ils vivent dans « une nation en Dieu » [NDLR : « One nation under God »]. Mais les Etats-Unis reconnaissent en réalité des centaines de nations indigènes, ce que l’on veut nous faire oublier ! Tous les jours, on nous apprend à oublier qu’il y existe d’autres façons de faire les choses, d’autres possibilités. Cela ne me surprend pas que certains estiment impossible de penser au-delà du capitalisme, même si les alternatives sont juste devant nous.

    Parmi ces alternatives, il y en a une qui ne trouve pas grâce à vos yeux : celle du progrès scientifique, incarnée en ce moment par certains entrepreneurs comme Elon Musk.

    Ce que je ne comprends pas, c’est que ceux que nous considérons comme nos sauveurs sont issus du passé. Beaucoup pensent qu’Elon Musk va sauver le monde, et que nous allons tous conduire des Tesla dans la joie. Mais si on regarde ce qui rend possible la fabrication des Tesla, on retrouve nos sept choses « cheap » ! Les travailleurs sont exploités, notamment ceux qui travaillent dans les mines pour extraire les métaux rares nécessaires aux batteries. Et Musk lui-même s’attache à éliminer les syndicats... Je suis inquiet du fait que l’on fonde nos espoirs sur ces messies.

    Des initiatives comme celle du calcul de son empreinte écologique ne trouvent pas non plus grâce à vous yeux. Pourquoi ?

    Parce qu’il s’agit d’un mélange parfait entre le cartésianisme et la pensée capitaliste. C’est une façon de mesurer l’impact que vous avez sur la planète en fonction de vos habitudes alimentaires ou de transport. À la fin du questionnaire, on vous livre une série de recommandations personnalisées, qui vous permettent de prendre des mesures pour réduire votre empreinte écologique. Qu’est-ce qu’il pourrait y avoir de mal à ça ? Evidemment, je suis d’accord avec le fait qu’il faudrait que l’on consomme moins, particulièrement dans les pays développés.

    Pourtant, présenter le capitalisme comme un choix de vie consiste à culpabiliser l’individu au lieu de condamner le système. C’est la même logique qui prévaut derrière la façon dont on victimise les individus en surpoids alors que leur condition n’a pas grand chose à voir avec leurs choix individuels, mais plutôt avec leurs conditions d’existence. On ne pourra pas non plus combattre le réchauffement climatique en recyclant nos déchets ! Du moins, pas uniquement. En mettant l’accent sur le recyclage, on sous-estime l’immensité du problème, mais aussi notre propre pouvoir. Parce que si vous voulez changer de système, ça ne passera pas par ce que vous mettez dans votre caddie, mais par le fait de s’organiser pour transformer la société. Et c’est l’unique façon dont une société peut évoluer. Personne n’est allé faire les courses de façon responsable pour mettre un terme à l’esclavage ! Personne n’est sorti de chez lui pour acheter de bons produits afin que les femmes obtiennent le droit de vote ! Tout cela dépasse le niveau des consommateurs. Il va falloir s’organiser pour la transformation, c’est la seule façon de combattre.

    C’est pour ça que le dernier mot de votre livre est « révolution » ?

    Si nous continuons comme ça, la planète sur laquelle nous vivons sera en grande partie inhabitable. Si je vous dis que j’ai l’idée révolutionnaire de transformer le monde pour le rendre inhabitable, vous me répondrez qu’il faudrait que j’évite de faire ça. Le problème, c’est que si je vous dis que j’ai l’idée révolutionnaire de se détourner du capitalisme pour vivre mieux qu’aujourd’hui, vous me diriez la même chose. On choisit sa révolution. Soit on essaye de maintenir les choses comme elles sont, avec leur cortège d’exploitation, de racisme et de sexisme, la sixième extinction de masse, et la transformation écologique pour prétendre que tout va bien se passer. Soit on accueille le changement à venir, et on tente de s’y connecter.

    Les systèmes sociaux meurent rapidement. Le féodalisme a par exemple disparu pendant une période de changement climatique et d’épidémies. Plusieurs expériences ont été tentées pour remplacer le féodalisme, et parmi elles, c’est le capitalisme qui a gagné. Ce que je veux dire, c’est que nous pouvons choisir le monde que nous voulons construire maintenant pour être capables de supporter l’après-capitalisme. On peut choisir sa révolution, mais la chose qu’on ne peut pas choisir, c’est de l’éviter. Le capitalisme nous rend aveugles à la révolution qu’il opère lui-même à la surface de la planète en ce moment.

    Donc, selon vous, il faudrait se tourner vers le concept d’écologie-monde pour reprendre espoir ?

    Une partie de ce que l’on voulait faire avec Comment notre monde est devenu cheap, c’était d’articuler théoriquement ce qui est déjà en train d’advenir. Je suis très inspiré par ce que met en place le mouvement paysan La Via Campesina. Ce mouvement international qui regroupe des petits paysans fait un travail incroyable, notamment en Amérique du Sud, en promouvant l’agroécologie.

    L’agro-écologie est un moyen de cultiver la terre qui est totalement à l’opposé de l’agriculture industrielle. Au lieu de transformer un champ en usine en annihilant toute la vie qui s’y trouve, vous travaillez avec la nature pour mettre en place une polyculture. Cela vous permet de lutter contre le réchauffement en capturant plus de carbone, et de vous prémunir contre ses effets en multipliant le type de récoltes. Enfin, vous vous organisez socialement pour soutenir le tout et gérer les ressources et leur distribution, ce qui ne peut se faire sans combattre le patriarcat. Voilà un exemple de mouvement fondé autour d’une lutte contre l’OMC et qui a évolué en une organisation qui combat les violences domestiques, le patriarcat et le réchauffement climatique. C’est un exemple concret, et presque magique, d’intersection entre les choses « cheap » que nous évoquons dans notre livre. Et tout cela est rendu possible parce que le mouvement est autonome et pense par lui-même, sans s’appuyer sur de grands espoirs, mais sur l’intelligence de chaque paysan.

    Votre livre compte 250 pages de constat, pour 10 pages de solution. Est-ce qu’il est vraiment si compliqué que ça d’accorder plus de place aux solutions ?

    Il y a déjà des organisations qui travaillent sur des solutions. Mais pour comprendre leur importance et pourquoi elles se dirigent toutes vers une rupture d’avec le capitalisme, on s’est dit qu’il était de notre devoir de regrouper un certain nombre d’idées qui parcourent le monde universitaire et le travail de nos camarades au sein des mouvements sociaux. Notre rôle me semble être de théoriser ce qui se passe déjà, et de nourrir nos camarades intellectuellement. Et ces sept choses « cheap » pourraient être une nouvelle manière d’appréhender nos systèmes alimentaires et tout ce que l’on décrit dans l’ouvrage, mais pas seulement. Le cadre théorique pourrait aussi s’appliquer à la finance, au patriarcat ou au racisme, et permettre aux mouvements en lutte de se rendre compte qu’il faut qu’ils se parlent beaucoup plus. Nous n’avions pas l’objectif de faire un catalogue de solutions, encore moins un programme politique : beaucoup d’acteurs engagés font déjà de la politique, et c’est vers eux qu’il faut se tourner si vous voulez changer les choses maintenant, sans attendre l’effondrement.

    https://usbeketrica.com/article/changer-de-systeme-ne-passera-pas-par-votre-caddie
    #intersectionnalité #mouvements_sociaux #post-capitalisme #capitalisme #alternatives #nature #responsabilité #résistance

    • Comment notre monde est devenu cheap

      « Cheap » ne veut pas simplement dire « bon marché ». Rendre une chose « #cheap » est une façon de donner une valeur marchande à tout, même à ce qui n’a pas de #prix. Ainsi en va-t-il d’un simple nugget de poulet. On ne l’achète que 50 centimes, alors qu’une organisation phénoménale a permis sa production : des animaux, des plantes pour les nourrir, des financements, de l’énergie, des travailleurs mal payés…
      Déjà, au XIVe siècle, la cité de Gênes, endettée auprès des banques, mettait en gage le Saint Graal. Christophe Colomb, découvrant l’Amérique, calculait ce que valent l’eau, les plantes, l’or… ou les Indiens. Au XIXe siècle, les colons britanniques interdisaient aux femmes de travailler pour les cantonner aux tâches domestiques gratuites. Jusqu’à la Grèce de 2015, qui remboursait ses dettes en soldant son système social et ses richesses naturelles.
      Le capitalisme a façonné notre monde : son histoire, d’or et de sang, est faite de conquêtes, d’oppression et de résistances. En la retraçant sous l’angle inédit de la « cheapisation », Raj Patel et Jason W. Moore offrent une autre lecture du monde. De cette vision globale des crises et des luttes pourrait alors naître une ambition folle : celle d’un monde plus juste.

      https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/documents-temoignages-et-essais-d-actualite/comment-notre-monde-est-devenu-cheap

      #livre

  • Comme dans son dernier rapport « L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde » la fao note que la prévalence de la sous alimentation a augmenté en Amérique du Sud,
    https://seenthis.net/messages/721332
    je mets ça là (et je m’aperçois que je ne l’avais pas encore mis sur seenthis :$ ).

    https://visionscarto.net/inegalites-foncieres-en-amerique

    #terres #foncier #accès_au_foncier #Amérique_du_Sud

  • Pourquoi George Soros et sa fondation quittent la Hongrie

    https://www.franceinter.fr/monde/pourquoi-george-soros-et-sa-fondation-quittent-la-hongrie

    George Soros, en 2017 à Bruxelles © AFP / Olivier Hoslet / POOL

    Le milliardaire américain d’origine hongroise George Soros a annoncé mardi qu’il suspendait les activités de sa fondation destinée à mener des programmes d’enseignement pour les réfugiés. La fondation déménage également ses locaux de Budapest à Berlin.

    La fondation de #Georges_Soros ne donnera plus de cours aux réfugiés hongrois : mardi, l’Université d’Europe centrale (CEU), implantée à Budapest, a annoncé qu’elle ne reconduisait pas ses modules d’enseignement destinés aux réfugiés, ni ses activités de bourses de recherche financées par l’UE sur les politiques migratoires.

    « Nous suspendons ces programmes dans l’attente d’une clarification de notre situation fiscale et juridique », explique un communiqué de l’organisation. En cause, une taxe de 25% sur les organisations qui « soutiennent l’immigration ». Adoptée en juin dans le cadre d’un ensemble de lois anti-immigration, elle entre en vigueur ce vendredi.

    #hongrie #berlin #réfugiés

    • @aude_v Soros est avant tout un pillard monstrueux à la tête d’un gang de financiers de haut vol, qui pour s’enrichir détruisent les systèmes sociaux de pays entiers (dont 50 % des habitant.e.s sont des femmes), n’oublions pas les enfants.
      .
      Ses ong servent avant tout ses intérêts, qui paye commande.

      On remarquera qu’elles ont réussi à faire élire Victor Orban.
      (Aux USA, Hillary Clinton a bien réussi à faire la courte échelle pour mettre Donald Trump au pouvoir).

      La société hongroise a toujours été tolérante pour ce qui est de l’homosexualité, voir les bains publics de Budapest.

      Dans les campagnes une pauvreté sans nom, pour ce pays qui n’arrive plus à produire lui même ses pommes de terres.

    • Comment penser que Soros investirai un centime, dans une ONG qui ne lui rapporterai pas beaucoup plus.

      Personnellement, après avoir lu pas mal de choses sur les ONG et leurs résultats, je pense qu’elles remplacent les missionnaires.
      Pour beaucoup, de belles et généreuse promesses, mais quand on regarde ce qu’elles font vraiment, et qui les finance, on y croit plus.
      Il y a de belles paroles, parfois des actes trés généreux, mais dans la réalité . . .

      Exemple d’acte généreux, pour les missionnaires : Ils ont sauvé pas mal d’indiens d’Amérique du Sud au moment de la colonisation espagnoles, Las Casas a fait ce qu’il a pu, pour eux, et l’intérêt de l’église catholique.
      A la même époque, l’Afrique Noire, une mine de bois d’ébène, complètement ignorée des missionnaires.

      WWF :
      https://seenthis.net/messages/718609
      https://seenthis.net/messages/602953
      https://seenthis.net/messages/571110

      Mais pas que : Amnesty International , Journée internationale des disparus.
      https://www.legrandsoir.info/courrier-au-service-de-presse-d-amnesty-international-section-francais
      . . . . .

      S’agissant de l’Amérique latine, on pourrait à juste titre s’étonner de l’absence de la #Colombie, mais, vu la modestie des chiffres, je ne vais pas pinailler ici sur les 45 000 victimes de cette pratique depuis 1985 (d’après la Unidad de Victimas), dont de nombreuses pendant la présence au pouvoir de la faction politique qui vient de revenir à la présidence en la personne de M. Ivan Duque.

      j’ai été très surpris par la prestation, ce matin 1er septembre, au journal de 8 heures de France Culture, présenté par Sophie Delton, de Mme Geneviève Garrigos, qui se présente comme la "porte-parole" d’AI. Sans référence particulière aux communiqués d’AI précédemment cités, elle s’est concentrée sur quatre pays, dont la Corée du Nord et la Syrie, mais a surtout passé la majeure partie de son intervention à dénoncer de façon extravagante « la politique de terreur imposée à l’opposition » à travers les « disparitions » au… Venezuela et au Nicaragua.
      . . . . .

      Par ailleurs, j’ai rencontré des volontaires ayant travaillé pour des ONG en Afrique, elles(ils) sont rentrés démolis par le comportement des dirigeants d’ONG.
      Marqué(e)s à vie.

      La plupart des ONG font un sale travail.

      à part cela Aude, merci pour le ton modéré de ton commentaire

    • Avec un peu de retard : Je voulais parler de mon expérience à la CEU, cette rentrée était chahutée et je n’ai pas eu le temps. Donc rapidement avant de revenir sur le sujet.

      J’ai travaillé sur des projets en coopération très étroite avec les département environnement et géographie de la CEU entre 1995 et 2002, en particulier avec un remarquable prof qui s’appelle Ruben Mnatsakanian. je voulais juste rappeler que la CEU a été un lieu de recherche et de réflexion important sur l’espace post soviétique et les pays ex-socialiste, une formidable opportunité pour des centaines voire des milliers d’étudiantes et d’étudiants d’Asie centrale, du Caucase, des pays de l’Est, d’Ukraine, de Russie, etc... qui sans les programmes de la CEU n’auraient jamais eu les moyens financier d’étudier dans leurs pays. La sélection des dossiers se faisait de manière très sérieuse et transparente. Ruben se déplaçait dans tous les pays pour mener les entretiens, longuement rencontrer les candidats, ensuite les décisions étaient prises de manière collégiales, après de longues discussions, jamais à la légère et surtout sans aucune considération pour les origines sociales ou la « richesse » supposées des candidats... La formation était excellente et je garde encore aujourd’hui - 20 ans après - de très bonnes relations de travail avec certain·es de ces étudiant·es. La nébuleuse des organisations et ong soutenues par Soros, c’est autre chose et je ne préjuge pas ici de ses intentions ou de ses crapuleries, j’ai juste expérimenté en live à quel point cette université a été importante pour toute une génération d’étudiant·es, et plus récemment de réfugiés et migrants qui avaient accès à l’enseignement supérieur.

      Le reste plus tard.

  • Dans les paradis fiscaux, « l’ampleur des flux financiers liés à la destruction environnementale est effarante » - Libération
    http://www.liberation.fr/planete/2018/08/22/dans-les-paradis-fiscaux-l-ampleur-des-flux-financiers-lies-a-la-destruct

    Dans quelle mesure les paradis fiscaux participent-ils à la destruction d’espaces naturels ? Plusieurs chercheurs du Centre sur la résilience de Stockholm, de l’Académie royale des sciences de Suède et de l’université d’Amsterdam, sous la direction de Victor Galaz, ont creusé le sujet pendant trois ans. Leurs résultats viennent d’être publiés dans la revue Nature Ecology and Evolution. Le biologiste français Jean-Baptiste Jouffray est un des coauteurs de l’étude.

    Comment les paradis fiscaux sont-ils liés aux activités destructrices pour l’environnement ?
    Nous nous sommes concentrés sur deux cas emblématiques que sont la déforestation de l’Amazonie brésilienne et la pêche illégale. En moyenne, 68 % des capitaux étrangers étudiés, qui ont été investis entre 2001 et 2011 dans des secteurs liés à la déforestation de l’Amazonie, industrie du soja et du bœuf, ont été transférés par le biais de paradis fiscaux. En ce qui concerne la pêche, 70 % des navires reconnus comme ayant été impliqués dans la pêche illicite, non déclarée et non réglementée sont, ou ont été, enregistrés dans des paradis fiscaux. En revanche, notre étude n’a pas réussi à établir de preuves directes de causalité entre une entreprise utilisant des paradis fiscaux et un cas précis de dégradation environnementale. Cela, à cause de l’opacité maintenue par les autorités ces lieux sur les montants, l’origine et la destination des flux financiers qu’ils gèrent.

    Avez-vous été étonné par les résultats de vos recherches ?
    Rien que dans ces deux cas, l’ampleur des flux financiers liés à la destruction environnementale est effarante. Elle prouve qu’il est nécessaire d’ajouter la dimension environnementale au débat sur les paradis fiscaux.

    • CR de la même étude par Le Monde (derrière #paywall)

      Une étude montre les liens entre paradis fiscaux et dégradation environnementale
      https://www.lemonde.fr/biodiversite/article/2018/08/13/une-etude-montre-les-liens-entre-paradis-fiscaux-et-degradation-environnemen

      Les « Panama Papers » et autres « Paradise Papers » – ces fuites de documents confidentiels qui, passés au crible par le Consortium international des journalistes d’investigation, ont, en 2016 et 2017, braqué les projecteurs sur le système tentaculaire des sociétés offshore et des paradis fiscaux – ont surtout été analysés sous l’angle économique, politique ou social. Mais leurs possibles implications environnementales sont restées dans l’ombre. C’est sur ce volet qu’une étude, publiée lundi 13 août dans la revue Nature Ecology & Evolution, apporte un éclairage inédit.

      Ce travail a été mené par des chercheurs de l’université de Stockholm (Suède), de l’Académie royale des sciences de Suède et de l’université d’Amsterdam (Pays-Bas), sous la direction de Victor Galaz, directeur adjoint du Stockholm Resilience Centre. Ils se sont intéressés à des activités économiques prédatrices de ressources naturelles. D’une part, la pêche industrielle qui, à l’échelle mondiale, épuise les stocks de poissons - dont ils ont ciblé le volet illégal -. D’autre part, les filières du soja et de la viande de bœuf qui, au Brésil, contribuent massivement à la déforestation de l’Amazonie.

      En consultant les données les plus récentes, datant de septembre 2017, de l’Organisation internationale de police criminelle (Interpol), ainsi que les registres d’organismes régionaux, ils ont établi que sur 209 navires impliqués dans des activités de pêche illicite, non déclarée et non réglementée (« illegal, unreported and unregulated fishing »), 70 % étaient enregistrés, ou l’avaient été, dans un pays répertorié comme un paradis fiscal. En tête de liste arrivent le Belize et la République du Panama, suivis de Saint-Vincent-et-les-Grenadines, du Costa Rica, des Seychelles et de la Dominique.

    • L’étude, dont seul le résumé est accessible
      Tax havens and global environmental degradation | Nature Ecology & Evolution
      https://www.nature.com/articles/s41559-018-0497-3


      Fig. 1 Fishing vessels and tax havens

      Abstract
      The release of classified documents in the past years have offered a rare glimpse into the opaque world of tax havens and their role in the global economy. Although the political, economic and social implications related to these financial secrecy jurisdictions are known, their role in supporting economic activities with potentially detrimental environmental consequences have until now been largely ignored. Here, we combine quantitative analysis with case descriptions to elaborate and quantify the connections between tax havens and the environment, both in global fisheries and the Brazilian Amazon. We show that while only 4% of all registered fishing vessels are currently flagged in a tax haven, 70% of the known vessels implicated in illegal, unreported and unregulated fishing are, or have been, flagged under a tax haven jurisdiction. We also find that between October 2000 and August 2011, 68% of all investigated foreign capital to nine focal companies in the soy and beef sectors in the Brazilian Amazon was transferred through one, or several, known tax havens. This represents as much as 90–100% of foreign capital for some companies investigated. We highlight key research challenges for the academic community that emerge from our findings and present a set of proposed actions for policy that would put tax havens on the global sustainability agenda.


      Fig. 2: Foreign capital and tax havens in the Amazon.

    • Une étude montre les liens entre paradis fiscaux et dégradation environnementale, Le Monde, suite

      Le nombre de bateaux concernés – 146 – peut paraître faible. Mais il reste vraisemblable que le gros de la pêche illégale échappe à la surveillance d’Interpol et que le chiffre réel se révèle donc très supérieur. En outre, les chercheurs soulignent que, parmi les près de 258 000 navires de pêche en situation régulière recensés, sur tous les océans du globe par la base de données de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), un peu plus de 4 % seulement sont sous pavillon d’un paradis fiscal. C’est donc la forte propension des armateurs de bateaux aux pratiques illicites à se faire enregistrer dans un Etat à la fiscalité opaque qui, à leurs yeux, pose question.

      S’agissant cette fois de la filière agro-industrielle brésilienne, les chercheurs ont épluché les données publiques de la Banque centrale du Brésil, sur la période d’octobre 2000 à août 2011, date à laquelle elles n’ont plus été accessibles. Ils se sont focalisés sur les neuf plus grandes multinationales intervenant dans le secteur du soja (cultivé dans ce pays sur 35 millions d’hectares) et de la viande bovine (dont le Brésil est le premier exportateur mondial, avec 23 millions de têtes abattues en 2017). Ces deux activités qui parfois gagnent des terrains au prix de brutalité et de destruction d’espaces forestiers, sont en partie liées, les tourteaux de soja servant à nourrir le cheptel.

      Lire aussi : La déforestation de l’Amérique du Sud nourrit les élevages européens

      Il apparaît que 68 % des capitaux étrangers investis dans ces sociétés entre 2000 et 2011, soit 18,4 milliards de dollars (16 milliards d’euros), ont été transférés par le biais d’un ou plusieurs paradis fiscaux, principalement les îles Caïman (Royaume-Uni), les Bahamas et les Antilles néerlandaises. L’article ne cite pas les entreprises concernées, les auteurs voulant pointer l’absence de transparence des réseaux de financement plutôt que montrer du doigt tel ou tel groupe agroalimentaire.

      Quelles conclusions tirer de cette étude ? « Il est impossible d’établir une relation de causalité directe entre paradis fiscaux et dégradation environnementale, conduisant dans un cas à plus de surpêche, dans l’autre à davantage de déforestation, commente Jean-Baptiste Jouffray, doctorant au Stockholm Resilience Centre et cosignataire de la publication. Nous mettons simplement en évidence, pour la première fois dans un article scientifique, un lien entre des pays où les pratiques fiscales sont frappées du sceau du secret et des activités économiques préjudiciables aux écosystèmes. »

      Ce travail, ajoute-t-il, est « un appel à une prise de conscience politique de la nécessité d’ajouter la dimension environnementale aux débats sur les paradis fiscaux ». Les capitaux transitant par ces pays favorisent-ils le prélèvement de ressources naturelles ? Aident-ils à contourner les législations environnementales ? Les pertes de recettes publiques dues à l’évasion fiscale amputent-elles la capacité des Etats à agir pour protéger la nature ? Ces mêmes pertes ne constituent-elles pas des subventions indirectes à des activités nocives pour l’environnement ?

      Autant de questions qui, pour les auteurs de l’étude, doivent être traitées « si l’on veut atteindre les objectifs de développement durables des Nations unies ». Paradis fiscal, enfer écologique ?

  • Zomia ou l’art de ne pas être gouverné
    https://www.philomag.com/les-livres/lessai-du-mois/zomia-ou-lart-de-ne-pas-etre-gouverne-6995

    Observez sur une carte cette grande zone montagneuse frontalière s’étirant des hautes vallées du Vietnam aux régions du nord-est de l’Inde, traversant le Cambodge, le Laos, la Thaïlande et la Birmanie et se prolongeant vers le Nord sur quatre provinces chinoises. Le territoire n’a d’unité ni administrative, ni ethnique, ni linguistique. Pourtant, cette étendue de 2,5 millions de kilomètres carrés a été identifiée en 2002 par l’historien Willem Van Schendel : c’est Zomia, une zone difficilement accessible, restée insoumise durant des siècles à toute forme d’autorité gouvernementale. Aux yeux de plusieurs anthropologues, Zomia incarne une ultime résistance à l’ordre géopolitique contemporain et permet de relancer le débat sur les normes qui régissent les collectivités humaines.

    Pour James C. Scott, qui travaille depuis les années 1980 sur les formes de résistance à la domination – notamment dans The Weapons of the Weak (Yale University Press, 1985, non traduit) qui prend pour sujet d’étude les paysans vietnamiens –, Zomia constitue un objet de pensée incontournable. Ayant abrité jusqu’à 100 millions de personnes issues de minorités ethniques et linguistiques variées, elle ne peut être appréhendée à partir des concepts de « frontières » ou de « zones de souveraineté ». Politiquement acéphale, elle semble avoir déjoué, depuis l’invention de l’État moderne et jusqu’à la première moitié du XXe siècle, toutes les logiques d’annexion et d’« enclosure » qui ont eu prise sur les populations de la plaine. On y pratique une agriculture nomade sur abattis-brûlis, on y cultive les avantages de l’oralité, en tenant toujours à distance un certain modèle de civilisation sédentaire ancré dans l’écriture et l’assujettissement à une autorité supérieure. Mais cette indiscipline a un prix : les populations zomianes sont considérées comme « parias », non encore civilisées. Pourtant, et c’est la thèse de James C. Scott, les Zomians sont moins des barbares que des fugitifs de la civilisation qui, « dans la longue durée, incarnent un rejet délibéré de l’État dans un monde d’États auquel ils sont adaptés tout en se tenant hors de leur atteinte ».

    Compilant une vaste documentation historique sur l’Asie du Sud-Est précoloniale et coloniale, Scott cite et prolonge les thèses de Pierre Clastres dans La Société contre l’État (Minuit, 1974) qui mettaient en évidence le refus de l’État des peuples autochtones dans l’Amérique du Sud d’après la Conquête. L’enjeu anthropologique est de taille, puisqu’il s’agit d’asseoir l’idée selon laquelle « vivre en l’absence de normes étatiques a été la norme de la condition humaine » : une norme à laquelle elle eût d’ailleurs pu se tenir, avec profit. Car le mode de vie des populations zomianes est au fond, affirme Scott de façon provocatrice, particulièrement adapté aux « post-sujets », « post-sédentaires », que nous sommes. Le drame étant que les jours de Zomia sont comptés, maintenant que les réseaux de communication et de télécommunications ont décuplé le pouvoir d’intrusion de l’État dans les zones autrefois inatteignables. Ces hautes terres abritaient peut-être une « humanité du futur »… mais elle s’est progressivement éteinte à partir de 1945. Et aujourd’hui, elle a en réalité disparu. Les détracteurs de Scott ont alors beau jeu de qualifier sa tentative d’« histoire postmoderne du nulle-part », on peut plutôt y lire les bases anthropologiques d’une utopie postétatique qui continue, depuis les années 1970, d’inspirer ses défenseurs.
    Agnès Gayraud

    #autonomie #communs #commune #communisme #société_contre_l'Etat #Zomia

  • La revue d’Amérique du Sud : Vénézuela, Paraguay, Colombie, Chili et Equateur
    https://lemediapresse.fr/international/la-revue-damerique-du-sud

    <b>Les récentes actualités venues d’Amérique du Sud.</b><p>La crise continue au Vénézuela, Maduro veut réformer le bolivar<p>Si l’inflation explose en Argentine, …

    https://i2.wp.com/lemediapresse.fr/wp-content/uploads/2018/08/32265542025_53e491563c_z.jpg?fit=640%2C360&ssl=1

  • Un prêtre pédophile a été recommandé par son diocèse pour un job à DisneyWorld | Slate.fr
    http://www.slate.fr/story/166052/un-pretre-pedophile-ete-recommande-par-son-diocese-pour-un-job-disneyworld

    Le procureur de l’État de Pennsylvanie aux États-Unis vient de publier un rapport de 884 pages sur la façon dont la hiérarchie de six diocèses catholiques a couvert plus de trois cent prêtres coupables d’agressions sexuelles et viols sur enfants. Parmi ces nombreuses histoires, plusieurs médias ont raconté l’absurde trajectoire d’Edward Ganster, un prêtre accusé d’abus sexuels qui avait malgré tout reçu une lettre de recommendation de la part de ses supérieurs pour travailler dans un parc d’attraction.

    Au début des années 1970, une mère s’était plainte au diocèse : Ganster aurait agressé sexuellement son fils de 13 ans lors d’un voyage. Le prêtre a alors été transféré dans une autre paroisse et lorsqu’il a voulu quitter la soutane pour se marier en 1990, il a demandé une lettre de recommandation pour pouvoir travailler à DisneyWorld en Floride.

    Selon le rapport du procureur, un de ses supérieurs lui a écrit ce message :

    « Je suis sûr que le diocèse pourra vous donner une référence positive en ce qui concerne vos années de travail ici en tant que prêtre. »

    Ganster a alors travaillé pendant des années à DisneyWorld en tant que conducteur de train, et après son départ du diocèse, il fut de nouveau accusé d’agressions sexuelles. En 2002, un ancien enfant de choeur a évoqué des attouchements, des coups et des violences quand il avait 14 ans, et une mère a contacté le diocèse pour dire qu’il avait abusé sexuellement de son fils de douze ans.

    « Bien qu’ils aient reçu deux plaintes et procuré du soutien psychologique à une des victimes, le diocèse n’a pas contacté le bureau du procureur de Northampton County avant 2007 », précise l’enquête.

    Ganster est décédé en 2014 à l’âge de 74 ans. Comme l’immense majorité des prêtres mentionnés dans le rapport, il n’aura donc jamais été inquiété par la justice.

    Dans presque chaque cas, les agressions sexuelles et viols sont prescrits : sur les plus de 300 prêtres cités, seuls deux vont être poursuivis.

    Les auteurs du rapport ont ainsi résumé la situation : « Les prêtres ont violé des petits garçons et des petites filles et les hommes de Dieu qui devaient les protéger n’ont non seulement rien fait ; ils ont tout caché. »

    Les enquêteurs ont recensé plus de mille victimes mais estiment que comme beaucoup sont restés silencieux, il y en a probablement eu beaucoup plus.

    La lettre de recommandation dont il est question ici, c’est pas seulement de la dissimulation comme le disent les auteur (·es ?) du rapport : c’est de la complicité active, le diocèse organise des viols en série en toute conscience aussi bien dans ses églises, écoles que chez Disney. Le catholicisme n’est pas une religion, c’est une organisation pédocriminelle internationale ( car si les curées ont violés autant en Pennsylvanie, j’ose pas imaginé ce qui reste dissimulé pour l’Amérique du sud, l’Afrique, l’Asie, l’Océanie et là nous ne parlons que des viols d’enfants, les viols de religieuses, séminaristes ne sont même pas évoqués).

    #catholicisme #viol #pédoviol #culture_du_viol #mafia #criminalité_organisée

  • Le FMI de retour en Argentine : « À l’horizon, une crise économique et sociale encore plus aiguë que la crise actuelle »
    http://www.cadtm.org/Le-FMI-de-retour-en-Argentine-A-l-horizon-une-crise-economique-et-sociale

    Après plus d’une décennie de « distanciation » officielle entre l’Argentine et le Fonds monétaire international (FMI), le gouvernement de Mauricio Macri vient de frapper à nouveau aux portes du gendarme financier de la planète. Le crédit de 50 milliards de dollars accordé par l’organisation au cours de la première semaine de juin constitue un record international et aura un impact direct sur la situation économique et sociale de ce pays d’Amérique du Sud. C’est ce que souligne l’historien et économiste belge Eric Toussaint, spécialiste reconnu dans ce domaine et porte-parole du Comité pour l’Abolition des #Dettes_Illégitimes (CADTM), basé à Bruxelles. Entretien.

    #Argentine #FMI

  • 1938 : le monde ferme ses portes aux réfugiés

    Des réfugiés qui fuient en masse le nazisme, des gouvernements qui leur barrent l’accès à leur territoire, des exilés contraints d’embarquer clandestinement sur des bateaux de fortune, une diplomatie prête à donner des gages aux pires dictatures et néanmoins impuissante, comme l’atteste l’échec prévisible de la conférence d’Évian en 1938 : les analogies sont décidément troublantes entre l’attitude des États à l’égard des Juifs dans les années 1930 et celle qu’ils adoptent aujourd’hui à l’égard des réfugiés.

    Les États européens, obsédés par le « risque migratoire », mettent depuis de longues années toute leur énergie à tenir à distance les flux de migrants, demandeurs d’asile inclus, et à leur interdire l’accès à leurs territoires. Cette tendance a été poussée à son paroxysme au moment de la « crise migratoire » de 2015, face à l’afflux de réfugiés venus de Syrie, d’Irak, d’Afghanistan ou d’Érythrée. Au point que plusieurs observateurs n’ont pu s’empêcher de faire le parallèle avec l’attitude qui fut celle des États, dans les années précédant la Seconde Guerre mondiale, à l’égard des Juifs fuyant le nazisme [1].

    Ce parallèle non seulement n’a rien de scabreux, mais il s’impose. Il n’a rien de scabreux car si les Juifs, à l’époque, sont persécutés, spoliés, humiliés, pourchassés, physiquement agressés, personne ne peut alors anticiper la « solution finale ». Il s’impose tant les analogies sont frappantes : la fermeture de plus en plus hermétique des frontières à mesure que la persécution s’aggrave et que les flux d’exilés augmentent ; des réfugiés contraints à embarquer clandestinement sur des bateaux de fortune avec l’espoir, souvent déçu, qu’on les laissera débarquer quelque part ; en guise de justification, la situation économique et le chômage, d’un côté, l’état de l’opinion dont il ne faut pas attiser les tendances xénophobes et antisémites, de l’autre ; le fantasme, hier, de la « cinquième colonne » – agitateurs communistes, espions nazis –, aujourd’hui de la menace terroriste ; et finalement une diplomatie qui n’hésite pas à pactiser avec les pires dictatures, hier pour tenter de sauver la paix (on sait ce qu’il en est advenu), aujourd’hui pour tenter d’endiguer les flux de réfugiés.

    L’évocation du passé donne, hélas, le sentiment que l’histoire bégaie : car la Realpolitik qui prenait hier le pas sur les préoccupations humanitaires continue aujourd’hui à dicter l’attitude des États, alors même qu’ils ont collectivement décidé d’accorder au droit d’asile une place éminente parmi les droits de l’Homme et se sont engagés à le respecter.

    Au lendemain de la Première Guerre mondiale, la communauté internationale, inquiète des risques de déstabilisation engendrés par les masses de réfugiés qui, par centaines de milliers, fuient les guerres civiles, les dictatures, les persécutions, décide de se saisir du problème.

    Mais l’action diplomatique en faveur des réfugiés reste subordonnée à la défense par les États de leurs intérêts propres et de leurs prérogatives souveraines. Entre 1922 et 1928, une multitude d’« arrangements » sont passés sous l’égide de la Société des Nations, visant à accorder un minimum de protection aux réfugiés. C’est notamment le fameux « passeport Nansen » qui leur confère, à eux qui ne sont plus reconnus ni protégés par leur pays d’origine, un minimum d’existence juridique. Mais la portée de ces textes, applicables au départ aux réfugiés russes, puis aux Arméniens, puis aux Assyro-Chaldéens, est très limitée, tant par la faiblesse des garanties qu’ils confèrent que par leur absence de caractère obligatoire. Avec l’aggravation de la situation économique consécutive à la crise de 1929, les États n’hésitent pas à refouler ou expulser les réfugiés, considérés comme un fardeau. À l’approche de la guerre, viendront s’ajouter à ces considérations économiques des considérations de police et de sécurité.

    Des arrangements sans contrainte

    C’est dans ce contexte que les États vont être confrontés à la question des réfugiés provenant d’Allemagne puis, après l’Anschluss, d’Autriche. La diplomatie s’active timidement : un « arrangement provisoire intergouvernemental concernant le statut des réfugiés venant d’Allemagne » est signé le 4 juillet 1936, dont les dispositions sont reprises dans la convention du 10 février 1938 : les États s’engagent à délivrer aux réfugiés un titre de voyage ou un document tenant lieu de passeport ; lorsqu’ils les ont autorisés à séjourner, ils ne peuvent les expulser ou les refouler qu’en cas de risque pour la sécurité nationale ou l’ordre public, et, en aucun cas, vers l’Allemagne sauf « s’ils ont de mauvaise foi refusé de prendre les dispositions nécessaires pour se rendre dans un autre territoire ». Mais la convention n’est signée que par sept pays : la Belgique, la Grande-Bretagne, le Danemark, l’Espagne, la France, la Norvège et les Pays-Bas, et elle n’aura guère le temps, de toute façon, de produire des effets avant le déclenchement de la guerre.

    Ayant juridiquement toute latitude pour agir à leur guise, les États n’ont aucun scrupule à fermer leurs frontières. Les États-Unis s’en tiennent à la politique adoptée depuis l’Immigration Act de 1924 et à un quota annuel de 27 370 immigrants pour l’Allemagne et l’Autriche. Après l’Anschluss, le ministre de l’intérieur britannique, s’adressant à la Chambre de communes, affirme que le pays maintient sa tradition d’asile, mais qu’il faut « éviter de donner l’impression que la porte est ouverte aux immigrants de toutes sortes. Car alors de prétendus émigrants se présenteraient dans les ports en si grand nombre qu’il serait impossible de les admettre tous ; les services d’immigration auraient de grandes difficultés à décider qui devrait être admis et d’inutiles épreuves seraient imposées à ceux qui effectueraient un infructueux périple à travers l’Europe [2] ». Pour les Britanniques, au demeurant, la question centrale reste celle de la Palestine : depuis l’arrivée de Hitler au pouvoir, l’immigration est passée de 9 500 personnes par an à 30 000 en 1933 et à près de 62 000 en 1935. Alors que ce territoire apparaît comme le seul lieu de refuge potentiel pour les Juifs, la Grande-Bretagne, confrontée à l’hostilité des Arabes, remet en question son engagement en faveur de l’établissement d’un Foyer national juif : le Livre blanc du printemps 1939 limite le quota annuel d’immigrants vers la Palestine à 10 000 personnes par an pour les cinq années suivantes. Des navires de la Royal Navy patrouillent pour empêcher les réfugiés d’accoster. S’ils n’ont pas de certificat ils sont refoulés ou bien internés à Chypre, sur l’île Maurice ou en Palestine même.

    En France, en 1933, les premiers réfugiés passent facilement la frontière. Mais, très vite, les pouvoirs publics s’inquiètent de cet afflux des exilés et, dès la fin de l’année, l’attitude change : nombre de candidats à l’entrée sont refoulés et ceux qui, ayant réussi à entrer, ne sont pas en règle sont expulsés. L’arrivée au pouvoir du Front populaire marque une accalmie temporaire, mais la situation des réfugiés, considérés comme une menace pour la sécurité, voire comme une porte d’entrée pour les espions et les agitateurs, se dégrade à nouveau sous le gouvernement Daladier. En aucun cas, dit le ministre de l’intérieur de l’époque ,« la France ne saurait consentir à ouvrir ses frontières inconditionnellement et sans limitation à des individus par le fait seul qu’ils se prévaudraient de leur qualité de réfugiés. En effet l’état de saturation auquel nous sommes arrivés en matière d’immigration étrangère ne nous permet plus d’adopter une politique aussi libérale [3] ».

    La Suisse entrouvre sa porte aux réfugiés allemands en 1933 – mais ne peuvent se revendiquer de cette qualité que les personnes menacées pour leurs activités politiques. Une directive du Département fédéral de justice et police dit très explicitement que seuls les « hauts fonctionnaires, les dirigeants des partis de gauche et les écrivains célèbres » doivent être considérés comme réfugiés [4]. Les Juifs, eux, sont considérés comme de simples étrangers en transit et se voient reconnaître au mieux un droit de résidence temporaire, sans possibilité de travailler. Après l’Anschluss, le gouvernement décide la fermeture des frontières à tous ceux qui ne sont pas formellement habilités à entrer et l’expulsion de ceux qui sont en situation irrégulière. Pour faciliter le travail des autorités suisses amenées à faire le tri parmi les ressortissants du Reich, une négociation s’engage avec les autorités nazies pour que soit apposé un cachet spécial sur les passeports des Juifs – un grand J rouge de trois centimètres de hauteur – qui permet de repérer ceux qui doivent demander une autorisation spéciale pour entrer dans le pays [5].

    « Un seul serait déjà trop »

    Il n’est guère étonnant, dans ces conditions, que la #conférence_d’Évian, réunie en juillet 1938 pour chercher des solutions concrètes au problème des réfugiés juifs allemands et autrichiens, se solde par un échec [6]. Face à la détérioration de la situation et à la pression exercée par une partie de l’opinion publique, mais désireux aussi d’éviter un brusque afflux de réfugiés aux États-Unis, Roosevelt a en effet pris l’initiative de réunir une conférence internationale qui se tient à Évian du 6 au 15 juillet.

    Les représentants des 32 États présents, tout en affirmant leur implication dans le règlement de la question des réfugiés, se retranchent derrière des considérations économiques et politiques pour justifier la fermeture de leurs pays à l’immigration et le refus d’accueillir des réfugiés juifs.

    Les pays d’Europe occidentale se disent tous « saturés » : la Grande-Bretagne, la France, la Belgique, le Danemark, la Suède, la Suisse se déclarent les uns après les autres dans l’incapacité d’accueillir des réfugiés et n’envisagent d’accorder que des visas de transit. Le représentant de l’Australie déclare sans complexe que : « N’ayant aucun réel problème racial en Australie, nous ne sommes pas désireux d’en importer en encourageant une large immigration étrangère. » Et le délégué canadien, interrogé sur le nombre de réfugiés que son gouvernement pourrait envisager d’accueillir, répond : « Un seul serait déjà trop. »

    Même les pays d’Amérique du Sud, terres traditionnelles d’immigration, font part de leurs réserves : les uns invoquent la crise économique, les autres craignent de déplaire à l’Allemagne à laquelle les lient des accords commerciaux. La Colombie dit pouvoir accepter des travailleurs agricoles, l’Uruguay également, à condition qu’ils possèdent quelques ressources. Seule la République dominicaine de Trujillo offre d’accueillir 100 000 réfugiés juifs autrichiens et allemands, pour des raisons qui ont peu à voir avec la compassion humanitaire : c’est une occasion de « blanchir » une population jugée trop noire ; et cette offre généreuse vise aussi à redresser l’image d’un pays ternie par le massacre, en octobre 1937, à l’instigation des autorités, de milliers de Haïtiens travaillant dans les plantations.

    La conférence d’Évian se conclut donc sur un constat d’impuissance de la communauté internationale. Ce qui permet au journal allemand Reichswart d’ironiser : « Juifs à céder à bas prix – Qui en veut ? Personne !? » Hitler en effet peut triompher : personne ne veut accueillir ses Juifs.

    Impuissante, cette diplomatie est également sans scrupule, prête à toutes les concessions face à Hitler si tel est le prix à payer pour sauver la paix. Les orateurs à la tribune se bornent à exprimer le vœu d’« obtenir la collaboration du pays d’origine », pays jamais nommé et jamais stigmatisé pour ses agissements ; à aucun moment il n’est fait ouvertement mention du fait que ces réfugiés sont juifs, pour ne pas fournir un argument supplémentaire à la campagne fasciste contre les démocraties « enjuivées ». Dans la résolution finale, purgée de toute appréciation morale sur les persécutions, les termes « réfugiés politiques » sont remplacés par « immigrants involontaires » pour éviter de froisser le Troisième Reich.

    Le seul résultat concret de la conférence est la création d’un Comité intergouvernemental d’aide aux réfugiés allemands et autrichiens qui aura pour mission d’entreprendre « des négociations en vue d’améliorer l’état des choses actuel et de substituer à un exode une émigration ordonnée ». Aux yeux des pays occidentaux, en effet, de la même façon que la voie de la paix doit être recherchée en discutant avec Hitler, le problème des réfugiés ne peut être résolu qu’en accord avec les nazis.

    Les « petits bateaux de la mort »

    Visas refusés, frontières closes : les réfugiés sont acculés, en désespoir de cause, à prendre la mer, le plus souvent clandestinement. À la veille de la guerre, des dizaines, des centaines de bateaux, parfois des paquebots de ligne, souvent des bâtiments de fortune ou de contrebande qui ont pris leurs passagers en charge frauduleusement, naviguent sur les océans à la recherche d’un port où ils seront autorisés à débarquer : le Cairo part le 22 avril 1939 de Hambourg pour Alexandrie ; l’Usaramo pour Shanghai ; l’Orbita pour le Panama en juin 1939 ; l’Orinoco, vers Cuba [7]

    D’autres restent bloqués pendant des semaines ou des mois dans les ports roumains de la mer Noire ou sur le Danube. D’autres encore errent en Méditerranée, avec l’espoir vain de pouvoir accoster en Palestine. La presse française se fait l’écho de ces « vaisseaux fantômes » voguant de port en port sans qu’on laisse leurs passagers débarquer, ne serait-ce qu’en transit, transportant par milliers « ces hommes, ces femmes, ces enfants dont personne ne veut », qui sillonnent les mers en se heurtant à l’inhospitalité des côtes [8].

    Même ceux qui ont des papiers d’immigration en règle ne sont pas assurés d’être admis, comme le montre l’histoire cruelle du Saint-Louis. Ce paquebot transatlantique quitte Hambourg le 13 mai 1939 en direction de La Havane. Ses 937 passagers, presque tous des Juifs fuyant le Troisième Reich, sont en possession de certificats de débarquement émis par le directeur général de l’immigration de Cuba. Mais, dans l’intervalle, le président cubain a invalidé ces certificats. On interdit donc aux passagers de débarquer. Le bateau repart, et lorsqu’il passe le long des côtes de Floride une demande est adressée au président des États-Unis afin qu’il leur accorde l’asile – elle ne reçoit pas de réponse. Le 6 juin 1939, le Saint Louis reprend sa route vers l’Europe. In extremis, avant que le bateau ne soit contraint de revenir en Allemagne, le Jewish Joint Commitee réussit à négocier avec les gouvernements européens une répartition des passagers entre la Grande-Bretagne, la France, la Belgique et les Pays-Bas qui n’acceptèrent de les accueillir qu’à condition qu’il ne s’agisse que d’un transit dans l’attente d’une émigration définitive vers une autre destination. Temporairement sauvés, une majorité d’entre eux connaîtra le sort réservé aux Juifs dans les pays occupés par l’Allemagne.

    Les embarquements clandestins se poursuivent une fois la guerre déclenchée, les réfugiés prenant des risques croissants pour tenter de rejoindre clandestinement la Palestine depuis les ports de la mer Noire, à travers le Bosphore, les Dardanelles et la mer Égée. Un gigantesque marché noir s’organise, avec la bénédiction des nazis qui, avant la programmation de la « solution finale », y voient une façon de débarrasser l’Europe de ses Juifs. Beaucoup de ces « bateaux cercueils », comme on les a appelés, font naufrage, d’autres sont victimes des mines ou des sous-marins allemands, et les épidémies déciment ceux qui ont réussi à survivre [9]. Lorsque, ayant surmonté tous ces obstacles, y compris percé le blocus britannique, ils arrivent à Haïfa ou Tel-Aviv, ils sont, dans le meilleur des cas, arrêtés et incarcérés, sinon refoulés et contraints de reprendre la route vers la Bulgarie ou la Roumanie.

    On voit ici, comme un clin d’œil de l’histoire, la place géographiquement stratégique, déjà à l’époque, de la Turquie, qui contrôle la route empruntée par les réfugiés obligés de traverser les détroits du Bosphore et des Dardanelles. La Turquie interdit l’accès à son territoire aux réfugiés qui ne détiennent pas de visa pour la Palestine et, sous la pression de la Grande-Bretagne, ne laisse pas les bateaux faire escale dans ses ports, ce qui provoquera la catastrophe du #Struma (voir encadré). Décidément, on a parfois l’impression que l’histoire bégaie.
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    Le Struma

    Le 12 décembre 1941, 767 réfugiés juifs originaires de Bucovine et de Bessarabie – où sévissent les Einsatzgruppen – embarquent sur le Struma, un navire bulgare vétuste, prévu pour une centaine de passagers. Le navire part du port roumain de Constanza, sur la mer Noire, en direction d’Istanbul où les réfugiés espèrent pouvoir déposer des demandes de visa pour la Palestine. Le 16 décembre le bateau arrive dans un port turc au nord du Bosphore, mais la Grande-Bretagne fait pression sur la Turquie pour qu’elle l’empêche de poursuivre sa route. Le Struma reste ainsi bloqué 70 jours, pendant l’hiver 1941-1942, sur le Bosphore. Les réfugiés souffrent de la faim, de l’entassement. Ils finissent par être ravitaillés grâce aux dons des associations juives et avec l’aide de la Croix-Rouge. Les autorités turques décident de le refouler vers la mer Noire et le 23 février 1942 le bateau reçoit l’ordre d’appareiller : ce sont finalement les garde-côtes turcs qui doivent remorquer le Struma, hors d’état de naviguer. Quelques heures plus tard, il est touché par erreur par une torpille soviétique et coule rapidement. Il n’y aura qu’un seul survivant.)


    https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2016-4-p-39.htm
    #fermeture_des_frontières #asile #migrations #réfugiés #juifs #histoire #Evian