• Réforme du RSA : la menace de « marginaliser des publics déjà vulnérables » | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/120125/reforme-du-rsa-la-menace-de-marginaliser-des-publics-deja-vulnerables

    Si l’objectif, c’est de sortir ces familles de la pauvreté grâce à l’emploi, cela ne fonctionne pas. C’était d’ailleurs une des conclusions d’une étude de 2018. Reste à s’interroger sur comment substituer ces dispositifs.

    À ce stade, nous avons plusieurs niveaux de réponse possibles. Pour ce public, pour les bénéficiaires de minima sociaux en général, sous forme de rustine ou de réforme plus structurelle. Si on veut continuer ces approches d’accompagnement, il semble qu’il faille aussi les accompagner de transferts monétaires généreux.
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    © Photo École d’économie de Paris

    Mais on peut aussi imaginer des approches différentes, avec moins de contraintes, plus d’opportunités et des ressources suffisantes. Ce serait une révolution structurelle et cela permettrait de renoncer à une tradition d’infantilisation très ancrée dans les pouvoirs publics, comme si les personnes pauvres étaient inaptes à vivre leur vie et qu’il faudrait à ce titre les chapeauter. Et alléger les contraintes financières permet de sécuriser les personnes. La pauvreté reste une charge mentale considérable pour celles et ceux qui la subissent.

  • Les quatre impasses du RSA sous conditions, désormais généralisé | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/quatre-impasses-rsa-conditions-desormais-generalise/00113598
    https://www.alternatives-economiques.fr/sites/default/files/public/styles/for_social_networks/public/field/image/080_hl_mcohen_2319969.webp?orig=jpg&itok=ufKEkF2U

    Depuis le 1er janvier, tous les allocataires du revenu de solidarité active doivent effectuer quinze heures d’activité par semaine. Une mesure généralisée alors que son expérimentation est critiquée par plusieurs rapports.

    #RSA #paywall...

    • Le 1er janvier est souvent synonyme de changements : bonnes résolutions, potentielles revalorisations salariales… et entrée en vigueur de nouvelles réglementations.

      Dans cette dernière catégorie, ce début d’année 2025 marque le coup d’envoi de la généralisation du RSA (revenu de solidarité active) dit « rénové ». Concrètement, dans le cadre de la #loi_plein-emploi, il a été acté que pour bénéficier de cette aide (635,71 euros par mois pour une personne seule, dit-elle faussement : c’est 563e en fait), les individus _(wesh !)_doivent désormais réaliser au moins quinze heures d’activités par semaine.

      Problème, les critiques s’accumulent contre cette conditionnalité. Et elles ne sont pas gratuites puisqu’elles se basent sur l’expérimentation qui a été menée ces derniers mois dans plusieurs territoires. Pour rappel, dès 2023, des bassins de vie situés dans 18 départements ont testé le dispositif. Avant un élargissement à 47 départements à partir du 1er mars 2024.

      Comme nous l’avions dévoilé dans un article précédent, un rapport, réalisé en juillet par deux cabinets mais initialement non publié, avait mis en lumière de nombreuses limites de l’expérimentation du RSA rénové (faible retour à un travail durable, manque de moyens financiers pour le suivi, référentiel peu clair pour les quinze heures d’activités hebdomadaires…).

      Dans un autre document, publié fin octobre, les associations ATD Quart Monde, Secours catholique et Aequitaz alertaient à leur tour sur les risques que présente la réforme. En se basant sur les témoignages de professionnels de l’insertion et des allocataires du RSA ainsi qu’une veille documentaire réalisée à partir des chiffres de #France_Travail, des préfectures et d’enquêtes journalistiques, les associations ont identifié de nombreuses limites, qui avaient d’ailleurs été largement anticipées par des expertes et experts du sujet.

      1/ Travail gratuit et substitution

      Premier danger, la transformation potentielle des heures d’activité en pur travail gratuit. « Ce risque n’est pas nouveau, explique Maud Simonet, directrice de recherche en sociologie au CNRS. On l’a constaté à chaque mise en place de logiques de contreparties, notamment aux Etats-Unis1. On le décèle en France aussi, surtout dans un contexte de restrictions des ressources pour les services publics. »

      Le rapport d’Aequitaz - ATD Quart Monde - Secours catholique abonde en ce sens, en s’appuyant sur ce qui s’est passé dans certains territoires pendant l’expérimentation. A Villers-en-Vexin (Eure) par exemple, le maire de la ville, « [n’ayant] pas les moyens d’embaucher du personnel » pour entretenir le cimetière communal, a fait travailler quatre bénéficiaires du RSA, indique le rapport.
      En Mayenne, les associations observent que le département a mis en place un « volontariat reconnu [...] puisqu’il faut faire des heures ». Concrètement, les allocataires sont invités à réaliser des heures de bénévolat au sein d’associations en contrepartie d’une attestation d’expérience de compétences.

      « En le présentant comme un dispositif, parmi d’autres, de son offre d’insertion, le département participe d’une dévalorisation du secteur de l’insertion, assuré par des professionnels formés et qualifiés », commentent les auteurs de l’étude.
      Les associations craignent donc un détournement du projet d’insertion des privés d’emploi, puisqu’en l’occurrence, il n’est pas question de les embaucher après une activité professionnelle telle que l’entretien du cimetière de la ville. Sans compter, bien sûr, la concurrence que ces heures d’activité font aux emplois réels.

      « Aujourd’hui, rien ne permet de limiter le risque de substitution de ces activités à de véritables emplois », soulignent les associations.
      En d’autres termes, pourquoi payer un salarié pour ce travail alors que des allocataires le font gratuitement ?

      2/ Un accompagnement infantilisant, dicté par un algorithme

      Un autre danger, pointé dans le rapport des trois associations, concerne l’accompagnement des allocataires. Lors de l’expérimentation, l’orientation des personnes au RSA se basait sur un prédiagnostic réalisé par #traitement_algorithmique. Voilà qui pose plusieurs questions :
      « Quels sont les critères appliqués par l’algorithme ? Comment ont-ils été définis ? Et qui a élaboré cet #algorithme ? », s’interrogent les associations.
      Les doutes sont d’autant plus légitimes que de récentes enquêtes, réalisées notamment par l’association La Quadrature du Net, ont mis en lumière des biais discriminants et un surcontrôle lorsque des prestations sociales s’appuient sur un algorithme.

      Cela participe à une « déshumanisation de l’accompagnement social », selon les associations. Qui ajoutent que « l’automatisation de l’orientation des allocataires du RSA vers un organisme référent augmente le risque que les personnes soient orientées dans un parcours qui ne soit pas adapté à leur situation ».
      C’est aussi ce que craint la fédération des organismes sociaux, fédération syndicale CGT qui regroupe des professionnels du secteur. Elle dénonce ainsi des « outils facilitant la #contrainte et se substituant à un réel accompagnement en présentiel, régulier, avec un conseiller ».

      3/ Davantage de #non-recours

      « Déjà, nous, bénéficiaires du RSA, c’est déjà pas facile, parce qu’on se sent fliqué. On essaye de faire au mieux, on donne au mieux, on fait nos démarches… Donc, on va aller où, là ? », s’interroge un allocataire dans le rapport Aequitaz - ATD Quart Monde - Secours catholique.
      Il résume une autre crainte relayée par le rapport : devoir justifier de quinze heures d’activités, c’est devoir davantage rendre compte, avec le risque que les personnels qui accompagnent les bénéficiaires les infantilisent.

      Une inquiétude d’autant plus légitime que si les quinze heures d’activité ne sont pas faites, ou mal faites, les allocataires encourent des risques de #sanctions, voire de #radiations. Interrogé par l’association des journalistes de l’information sociale (Ajis) fin novembre, Thibaut Guilluy, directeur général de France Travail, a lui-même redit que les #contrôles allaient se poursuivre.

      D’ici 2025 , ses équipes devront effectuer 600 000 contrôles. Un chiffre qui s’élèvera à 1,5 million d’ici 2027. Cette stratégie n’est hélas pas surprenante dans un contexte où les services publics de l’emploi sont affaiblis par les coupes budgétaires (des suppressions de postes ont ainsi été annoncées à France Travail). Dans l’Eure, le département a « clairement annoncé son objectif de baisser de 3 000 le nombre d’allocataires du RSA d’ici 2028 », notent les associations dans leur rapport.

      Davantage de contrôles, cela veut dire potentiellement plus de radiations. Et donc des économies pour ceux qui versent l’#allocation (les départements) et une moindre charge de travail pour ceux qui ont perdu des moyens (France Travail). Pour les associations, la baisse du nombre d’allocataires constitue clairement un « levier pour dégager des moyens financiers afin de maintenir de bons ratios d’accompagnement ».
      Mais cette politique du chiffre a des effets économiques et sociaux néfastes. Plusieurs études ont ainsi montré que les contreparties demandées à des allocataires augmentent le taux de #non-recours aux prestations sociales. Dans le cas du RSA, il atteignait déjà 30 % avant la réforme. Sa généralisation a toutes les chances d’exacerber la situation :
      _« Le Secours catholique le constate dans ses statistiques avec une hausse, en un an, de 10,8 % du non-recours au RSA dans les départements qui expérimentent la réforme , quand il recule au contraire de 0,8 % dans les autres départements sur la même période »_, peut-on lire dans le rapport.
      A terme, le découragement des bénéficiaires peut mener à une détérioration de leur situation (insécurité alimentaire, perte de logement), ajoutent les associations.

      4/ …mais pas forcément plus d’emplois durables (ça alors !)

      Tous ces risques en valent-ils la chandelle ? Après tout, on pourrait estimer que la fin (obtenir un emploi durable) justifie les moyens. Hélas, même sur ce point, le bât blesse.
      Comme l’avait déjà établi un autre rapport et comme le confirme le document publié par Aequitaz, le Secours catholique et ATD Quart Monde, les résultats ne sont pas bons. Les contrats signés par les allocataires dans le cadre de la réforme sont « essentiellement des contrats de moins de six mois dans des secteurs en tension aux conditions de travail difficiles », notent ainsi les associations.
      Le taux moyen d’accès à l’#emploi durable pour les allocataires, six mois après leur entrée dans le parcours, est d’environ 17 %, selon France Travail. Ce chiffre varie certes un peu d’un territoire à l’autre (22 % dans la Somme, 13 % dans les Vosges ou dans les Pyrénées-Atlantiques). Mais les résultats ne sont vraiment probants nulle part.
      Ces chiffres ne sont malheureusement pas très surprenants, dans la mesure où le risque de radiation peut pousser les bénéficiaires à se tourner vers des emplois précaires ou qui ne leur correspondent pas.

      En somme, concluent les associations, « pousser les personnes à enchaîner des petits boulots de subsistance qui ne respectent ni le métier, ni le projet professionnel, ni le temps de travail souhaité, ni le niveau de qualification de la personne, est un immense gâchis humain en plus d’être inefficace en matière de lutte contre la pauvreté ».
      Un constat qui confirme ce que d’autres chercheurs avaient déjà établi pour les mesures de contrôle imposées aux demandeurs d’emploi.

      #département #infantilisation

    • Un rapport non divulgué dresse un bilan mitigé de la réforme du RSA, Alternatives (mais) économiques, 14 OCTOBRE 2024https://www.alternatives-economiques.fr/un-rapport-na-ete-rendu-public-dresse-un-bilan-mitige-de-reforme/00112703
      https://archive.ph/VrWJO#selection-1555.1-2463.0

      Selon un rapport auquel nous avons eu accès, le gouvernement surestime les résultats de l’expérimentation de la réforme du RSA qui sera conditionné à 15 heures d’activité partout en France dès 2025.
      Par Audrey Fisné-Koch

      Pour les bénéficiaires de minima sociaux, le changement de gouvernement n’aura rien changé. La stratégie en matière d’insertion de Michel Barnier s’inscrit dans la continuité de son prédécesseur. Dès son discours de politique générale, le Premier ministre a confirmé que la réforme du revenu de solidarité active (RSA) entrerait bel et bien en vigueur en 2025, partout sur le territoire.

      Pour rappel, la #loi_plein-emploi de 2023 avait acté l’obligation pour les bénéficiaires du RSA de s’inscrire à France Travail (ex-Pôle emploi) et de signer un contrat qui les engage à effectuer 15 heures d’activité par semaine en contrepartie du versement de leur allocation. La philosophie derrière ce procédé ? Ce revenu « ne doit pas être uniquement un filet de sécurité »_1, résume Michel Barnier.
      Mais avant que cette réforme ne soit généralisée, elle a été expérimentée dans 47 territoires.
      « Là où la réforme du RSA a été engagée, ça marche, comme à Marseille où, après six mois d’accompagnement, une personne sur trois est sortie du RSA », s’est félicité le chef du gouvernement. Comme Gabriel Attal avant lui, il semblerait néanmoins que Michel Barnier ait une fâcheuse tendance à embellir la réalité.

      Un bilan de l’expérimentation a bel et bien été mené, mais ce rapport n’a pas été rendu public. Cette évaluation qualitative sur douze mois a été conduite par deux cabinets et s’appuie sur des centaines d’entretiens avec des professionnels, représentants d’institutions et allocataires.

      Or, ce document daté du mois de juillet, auquel nous avons pu avoir accès, pointe plusieurs limites de « l’accompagnement rénové »_ mis en œuvre par la réforme. Et en cas de généralisation du RSA conditionné, ces problèmes ne devraient pas être réglés…

      1/ Un bilan mitigé sur les heures d’activité

      Les 15 heures d’activité obligatoires constituent la première source d’inquiétude chez le personnel accompagnant les bénéficiaires du RSA. Non seulement le rapport souligne que l’accompagnement mis en place, du fait de sa personnalisation, est chronophage, mais également qu’il ne s’appuie pas sur un référentiel clair.

      Comme nous l’expliquions déjà pour les contrats d’engagement jeune (#CEJ), qui ont servi de modèle à la réforme du RSA, les activités prises en compte peuvent parfois ne pas être utiles aux personnes suivies et leurs durées peuvent être surévaluées. Ce que nous expliquait déjà une conseillère en mission locale pour le CEJ :
      « L’inscription sur les listes électorales, une consultation médicale, la pratique du sport ou d’une activité culturelle, ça compte pour deux heures d’activités. La réalisation du CV ou une leçon de conduite pour le permis ? Là, on est sur trois heures. »

      Les bénéficiaires interrogés dans le rapport reconnaissent les bienfaits de certains ateliers pour reprendre confiance en eux, mais les professionnels qui les accompagnent craignent que ces heures d’activité ne se transforment en indicateurs de performances. C’est-à-dire que les conseillers eux-mêmes se retrouvent évalués en fonction des 15 heures d’activité, les poussant à en proposer certaines qui ne serviraient pas aux allocataires.
      En d’autres termes, les conseillers ont peur que cette #contrepartie ne devienne une fin en soi, et non plus un moyen de remobilisation ou d’insertion pour les bénéficiaires du RSA.

      2/ La crainte d’un manque de moyens

      Une autre inquiétude qui transparaît dans le rapport concerne les moyens accordés pour « l’accompagnement rénové » : dans le cadre de l’expérimentation, des financements fléchés (815 000 euros en moyenne pour chacun des huit territoires étudiés dans le document) ont permis un suivi plus poussé des allocataires.
      Les conseillers ont également vu leur « portefeuille » d’allocataires réduit pour l’expérimentation.
      Or, ces modalités plus confortables ne devraient pas être les mêmes l’an prochain, quand le RSA conditionné sera étendu à toute la France.

      « Pour rappel, le budget 2024 prévoyait de financer la réforme du RSA avec la suppression de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) et les coupes de l’assurance chômage », précise Anne Eydoux, économiste au Cnam (Lise et CEET).

      Mais la ministre du Travail a redit que l’ASS ne serait pas supprimée et les négociations doivent reprendre entre les partenaires sociaux sur l’assurance chômage. On peut bien sûr se réjouir que la réforme de Gabriel Attal, qui réduisait les droits des chômeurs, ait été mise au placard et que la suppression de l’ASS, qui aurait pénalisé les plus modestes, ne se fera pas. Néanmoins, « la question des moyens est cruciale dans la mise en place de la réforme du RSA. On ne sait plus comment elle sera financée », reprend la chercheuse.

      Dans le projet de loi de finances 2025, on apprend que « France Travail bénéficiera d’une stabilisation de la subvention pour charge de service public à 1,35 milliard d’euros et d’un accroissement de + 0,16 milliard d’euros de la contribution de l’Unédic, lui assurant les moyens de mettre en œuvre la réforme ». Mais des doutes persistent, écrits noir sur blanc dans le rapport du mois de juillet :
      « Comme pour France Travail, les départements n’envisagent pas la perspective d’une généralisation sans augmentation des financements. »
      Il faut dire qu’« avec la réforme, l’opérateur devra accompagner 1,2 million de personnes contre 40 000 aujourd’hui, détaille Guillaume Allègre, économiste à l’OFCE. Je ne suis pas sûr que la promesse qu’il y ait davantage d’accompagnement puisse être tenue ».
      D’autant que le ministère du Travail a indiqué la suppression de 500 postes à France Travail en 2025. Faire plus, avec moins, voilà une équation bien difficile…

      3/ Des résultats fragiles pour le retour au travail

      Concernant l’insertion, enfin, les chiffres que présente le rapport d’évaluation sont à lire avec précaution. Au total, 42 % des bénéficiaires du RSA qui ont participé à l’expérimentation ont accédé à un emploi dans les six premiers mois suivant leur entrée en parcours, dont 16 % ont accédé à des « contrats durables » (CDI ou CDD de six mois ou plus), et 13 % à un emploi de moins d’un mois, soit des emplois précaires ou très précaires.

      Des chiffres « prometteurs » selon France Travail, car ils représentent effectivement un taux plutôt élevé d’accès à l’emploi. Même s’il n’est pas évident de les comparer avec la situation qui prévalait avant la réforme, puisque l’inscription à France Travail n’était pas obligatoire pour les bénéficiaires du RSA. Selon la Dares, en 2022, c’était le cas de six allocataires sur dix. Et parmi eux, un tiers de ces inscrits a été salarié au cours de l’année écoulée.
      Mais avant de sabler le champagne, plusieurs nuances sont à prendre en considération.
      « Du fait de participer à l’expérimentation, les travailleurs sociaux et les bénéficiaires ont pu se montrer plus motivés [en sciences sociales, on parle de l’effet Hawthorne, NDLR]. Cela peut avoir des résultats lors de l’expérimentation et disparaître lors d’une éventuelle généralisation », explique Guillaume Allègre.

      Par ailleurs, l’expérimentation a pu créer des effets de déplacement, c’est-à-dire le fait que des bénéficiaires du RSA accèdent à un emploi au détriment d’autres individus qui auraient eu le poste, en l’absence du dispositif. Or, « si on généralise l’accompagnement des allocataires du RSA, ils vont tous se faire concurrence pour un même volume d’emplois », alerte Anne Eydoux. Et le bilan en termes d’emplois pourrait être moins encourageant.

      Le rapport indique en outre que 82 % des bénéficiaires présentent au moins un frein périphérique à l’emploi, souvent deux (43 % liés à la mobilité, 29 % à un état de santé, 25 % à des contraintes familiales, 20 % au logement). Et conditionner le RSA n’apparaît pas comme une solution face à ces difficultés. « Ce sont des contraintes qu’il faut absolument résoudre en amont », résume Force ouvrière.
      Malgré ces réserves, le gouvernement n’a pas prévu d’attendre les évaluations finales pour généraliser le RSA sous conditions. Ce qui n’étonne pas Anne Eydoux :
      _« C’était déjà le cas avec l’entrée en vigueur du RSA après tout. Le gouvernement avait décidé de le généraliser avant la fin des expérimentations, les résultats avaient été instrumentalisés et finalement, l’évaluation du dispositif généralisé a montré qu’il n’y avait aucun impact sur le taux de retour à l’emploi. »_
      Les réformes se multiplient, mais les erreurs se répètent…

  • #200_milliards : le #coût exorbitant des #aides_publiques aux #entreprises

    65 millions d’euros. C’est le pactole d’aides publiques dont s’est gavé le groupe #Michelin en quelques années. Une addition très salée pour le contribuable et encore plus difficile à avaler au regard de la suppression de 1400 emplois décidées par le groupe. Après s’être rendu aux côtés des salariés, aux usines de Cholet et de Vannes, les insoumis ont pris le taureau par les cornes. Les députés LFI ont annoncé le dépôt d’une commission d’enquête sur les aides publiques distribuées aux entreprises. Toutes sont versées sans contrepartie.

    Près de 200 milliards d’euros. C’est le montant des aides publiques versées aux grandes entreprises privées sans aucune contrepartie. Ce montant a été révélé par une étude de l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires) et du Clersé (groupe de chercheurs de l’université de Lille) (https://ires.fr/publications/cgt/un-capitalisme-sous-perfusion-mesure-theories-et-effets-macroeconomiques-des-ai). Il s’agit du premier #budget de l’État : plus de 30 % de son budget total, et deux fois plus que le budget de l’Éducation nationale.

    Cet « #argent_magique », Emmanuel Macron et ses gouvernements successifs n’en parlent jamais. Au total, ces aides sont pourtant chiffrées à 200 milliards par année, soit plus de trois fois le montant des saignées budgétaires annoncées.

    #Subventions_directes, #niches_fiscales et sociales en tout genre ou encore aides régionales et européennes, ces 200 milliards prennent de diverses formes, mais ont une même finalité : partir en poussière chez des #intérêts_privés, plutôt qu’au service de la collectivité. Notre article.

    D’où viennent ces 200 milliards ?

    Le gâteau des aides aux entreprises a considérablement grossi ces dernières années : l’État accorde 3 fois plus d’aides au #secteur_privé qu’en 1999. Et ce gâteau se découpe en plusieurs parts. Le magazine Frustration fournit un graphique de la répartition de ces aides. C’est environ 20% de #subventions directes de l’État ou des collectivités, 40% d’#exonérations de #cotisations_sociales, et 40% de niches fiscales et #baisses_d’impôts.

    Ces milliards d’aides ne tombent pas du ciel. Ils résultent très nettement des politiques des gouvernements libéraux depuis les années 2000. En particulier, des politiques d’#Emmanuel_Macron depuis 2017 et même avant, à la tête de l’Économie de #François_Hollande. Avant lui, les politiques de réduction des #cotisations_patronales des entreprises ont pavé le chemin sous #Nicolas_Sarkozy. Ensuite, le grand bond en arrière : la mise en place du #Crédit_d’Impôt_Compétitivité_Recherche (#CICE), qui a coûté à l’État plus de 100 milliards depuis 2013.

    Sa suppression permettrait de rapporter 10 milliards d’euros, a minima. La baisse pérenne des #cotisations_sociales est venue remplacer le CICE en 2019 par Macron, pour le même effet. D’autres dispositifs encore : le #Crédit_impôt_recherche (#CIR : sa suppression pour les #grandes_entreprises rapporterait 1.3 milliard), ou encore le #Pacte_de_Responsabilité (un ensemble de différents crédits d’impôts mis en place en bloc par François Hollande).

    Sous Macron, ces dispositifs perdurent et s’étendent. Ils cohabitent surtout avec d’autres milliards tendus par Macron aux entreprises. Par exemple, Macron a décidé seul de supprimer la #cotisation_sur_la_valeur_ajoutée_des_entreprises (#CVAE), qui bénéficiait aux collectivités territoriales, et de les rendre dépendantes aux recettes de la #TVA, l’impôt le plus injuste. Ce nouveau cadeau aux grandes entreprises coûte cette année 12 milliards d’euros, et coûtera 15 milliards en 2027.

    D’innombrables #niches sont encore en vigueur : la niche « #Copé » (5 milliards d’euros) ou les niches fiscales défavorables au climat (19 milliards d’euros selon l’Institut d’étude pour le climat) pour ne citer qu’elles.
    200 milliards pour licencier ?
    https://twitter.com/L_insoumission/status/1856285914999234680

    Problème majeur : ces milliards d’aides aux entreprises se font sans #contrepartie aucune. Bien souvent, elles permettent et encouragent même les attaques sociales des entreprises envers leurs salariés : baisses des salaires, licenciements, délocalisations, etc. Un exemple récent : l’entreprise #Forvia (ex-Forecia), fabricant français d’équipements automobiles. Depuis son lancement dans la filière de l’hydrogène, elle a touché 600 millions de subventions – et ce, hors CICE. Pourtant, le 19 février 2024, le directeur annonce d’une pierre deux coups le retour des bénéfices pour 2023 et la suppression progressive de 10.000 emplois pour les quatre prochaines années.

    Douche froide pour les salariés, dont l’entreprise annonce le même jour des bénéfices records et un grand plan de licenciement qui ne dit pas son nom. L’Insoumission s’est entretenue avec des travailleurs de Forvia mobilisés contre la décision de leur direction. Ils dénoncent d’une même voix l’hypocrisie de leur direction mais aussi de la puissance publique :

    « On leur a donné 600 millions d’argent de l’Etat. Non seulement ils n’ont pas créé d’emplois mais en plus ils en suppriment. Ils touchent de l’agent pour virer les travailleurs, aussi simple que ça. C’était 600 millions pour un seul site de 300 salariés : ça fait 2 millions par salarié, et ils se permettent de fermer des sites. Juste pour leur marge. Et honnêtement, on a même l’impression que c’est nous qui payons le #licenciement de nos collègues, puisqu’on va travailler plus pour compenser leur départ.« 

    Résultat direct et rationnel de l’absence de conditionnement social (et écologique) de ces aides publiques, les entreprises font ce qu’elles veulent de cet argent. Et Forvia est loin d’être la seule à profiter des aides d’entreprises pour augmenter ses marges au détriment des salariés, comme le soulignait l’étude de l’Ires. En 2019, le groupe Michelin s’était déjà par exemple servi d’un crédit d’impôt (CICE) de 65 milliards d’euros pour délocaliser sa production en Pologne, en Roumanie et en Espagne.

    Et ces quelques exemples ne sont très certainement que l’arbre qui cache la forêt, au vu de l’ampleur des sommes engagées. D’une manière générale : beaucoup d’#argent_public pour les actionnaires, qui aurait pu être consacré aux grands chantiers de politiques publiques. Combien d’écoles, d’hôpitaux, de lignes ferroviaires auraient pu être construits avec ces 200 milliards ? Combien de personnels soignants, de professeurs et d’AESH dans les écoles auraient pu être rémunérés ?

    Pour continuer d’arroser les entreprises, le Gouvernement fait les poches aux français

    Alors que le chantage à la dette et à la compression des dépenses repart de plus belle avec l’annonce des 5.5% de PIB de déficit, la responsabilité de ces 200 milliards d’aides est immense. Le Gouvernement détourne les yeux de cette responsabilité et préfère concentrer ses attaques ciblées sur les dépenses sociales et les services publics. Les conséquences de ce récit politique sont déjà à l’oeuvre : moins 10 milliards d’euros passés par décret en février, multiples réformes de l’assurance-chômage, etc. Et d’autres coupes sont à venir pour atteindre les 3% de déficit d’ici 2027, jusqu’à 80 milliards d’euros de coupe selon Bruno Le Maire.

    Selon les mots de l’étude de l’Ires, « un État-providence caché en faveur des entreprises » se développe à l’heure où le Gouvernement détricote l’Etat-providence social. Romaric Godin résume la situation dans un article sur le chantage à la dette pour Mediapart : « L’épouvantail de la dette a pour fonction de démanteler ce qui reste de l’État social pour préserver les transferts vers le secteur privé et soutenir sa rentabilité face à une croissance stagnante.« 

    Plus encore, pour Benjamin Lemoine, sociologue et auteur de l’ouvrage L’Ordre de la dette (2022) : « Le maintien de l’ordre de la dette demande un dosage incessant entre le soutien au capital privé et une capacité à assurer sans chocs politiques le service de la dette, et depuis des années cette capacité repose entièrement sur le sacrifice de l’État social.« 

    Derrière le refus du Gouvernement de s’attaquer aux aides aux entreprises, c’est donc tout un modèle économique qui ne veut être remis en cause par les macronistes. Le #capitalisme français repose tout entier sur ce système de soutien public au capital. 200 milliards, cela commence à faire cher le fonctionnement de l’#économie.

    #Conditionnement des aides, suppression des niches fiscales inutiles : les recettes fiscales existent

    Un autre modèle est pourtant possible. Toutes les études sur les aides aux entreprises parlent d’une même voix : il faut conditionner les aides. Elles rejoignent ainsi les revendications de la France Insoumise depuis des années. La suppression du CICE est au programme de l’Avenir en Commun dès l’élection présidentielle de 2017. De même pour le CIR, et toutes les niches « anti-sociales et anti-écologiques ». La France Insoumise a ainsi publié ce 28 mars ses « 10 mesures d’urgence pour faire face à l’austérité » dans un document intitulé « Moins de dépenses fiscales, plus de recettes fiscales !« .

    Au programme : rétablir l’ISF (+15 milliards), taxer les superprofits (+15 milliards), supprimer le CICE (+10 milliards), supprimer le CIR (+1.3 milliards), supprimer les niches fiscales les plus polluantes (+6 milliards), rétablir la CVAE (+15 milliards), mettre en place une imposition universelle sur les entreprises (+42 milliards), renforcer la taxe sur les transactions financières (+10.8 milliards) et mettre fin à la flat tax (+1 milliards). Un large panel qui vise à montrer une chose : « Les seules dépenses à réduire sont celles en faveur des plus riches » écrit la France Insoumise, pour qui les 200 milliards d’aides seraient un bon premier ciblage.

    Une chose est certaine : il existe, effectivement, de nombreux postes de dépenses sur lesquels le Gouvernement pourrait se pencher pour réduire le déficit public. Conditionner les aides aux entreprises paraît être une étape essentielle.

    https://linsoumission.fr/2024/11/12/200-milliards-aides-aux-entreprises
    #France #finances

  • RSA conditionné : avant sa généralisation, le non-recours progresse dans les territoires pilotes - Rapports de Force
    https://rapportsdeforce.fr/classes-en-lutte/rsa-conditionne-avant-sa-generalisation-le-non-recours-progresse-dan

    Le taux de #non-recours au #RSA a augmenté de 10,8 % en un an dans les zones qui expérimentent la réforme, selon un rapport du Secours Catholique, alors qu’ailleurs ce taux de non-recours recule très légèrement.

    Ça alors !

    #miettes #revenu #contrepartie #contrôle_social

    • « On est passé de l’accompagnement social au contrôle social », le département du Nord durcit les règles pour les allocataires du RSA
      https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/nord-0/on-est-passe-de-l-accompagnement-social-au-controle-soc

      La lutte contre les profiteurs supposés du RSA, Christian Poiret en a fait une croisade. Le 18 novembre dernier, en séance plénière du Conseil départemental du Nord, le président Divers droite n’a pas mâché ses mots : "les départements, il faut qu’ils arrêtent de payer des personnes qui ne veulent pas travailler", a-t-il asséné à son auditoire.

      Et de décliner le durcissement des #sanctions. Depuis la fin octobre dans le Nord, l’allocataire voit son revenu de solidarité active amputé de 80% s’il ne se présente pas à un rendez-vous, contre une ponction de 100 € auparavant. 50% en moins s’il s’agit d’une famille. ....

      ... Christian Poiret a aussi écrit au Président de la République pour aller plus loin, ne plus rembourser un allocataire qui revient dans le circuit après une suspension, comme le veut la pratique actuelle.
      Face aux élus, le président a aussi repris l’idée bien connue du bénéficiaire qui profite. "Dites à une personne qui se lève le matin, qui gagne 1 200 €, que son voisin qui a la possibilité de travailler, par exemple il était auto-entrepreneur, touche toujours le RSA. Celui qui se lève le matin, il souhaite l’équité par rapport à celui qui touche un max, et qui utilise le système." ....

      Aujourd’hui, le département du Nord, chargé du financement du RSA via la Caisse d’allocations familiales, donne le chiffre de 90 000 foyers allocataires, et se félicite d’en compter 16 000 de moins qu’en 2016.
      . 53 % sont des personnes isolées
      . 35% des familles monoparentales
      . 21% ont moins de 30 ans
      Un document interne remis aux instances sociales de la collectivité fait pourtant état de 105 731 allocataires du RSA au 11 octobre 2024.

      La différence tient peut-être au nombre de personnes qui sont encore dans le dispositif, mais qui ont vu leurs #droits_suspendus. Plus de 12 000, selon une source interne au département.

      C’est le cas d’Ivan*, qui a souhaité rester anonyme par peur de "représailles". Ce trentenaire rencontré à Lille, a vu une première fois son RSA coupé au printemps dernier, pendant 4 mois.

      "Je n’ai reçu aucun courrier, et d’un coup je me suis fait couper net le RSA. Parce que j’avais dépassé la date pour renouveler mon CER, mon contrat d’engagement réciproque. C’est un contrat qu’on fait avec l’assistante sociale tous les six mois. Plutôt que de m’envoyer un courrier pour me dire « attention votre CER n’est pas à jour », direct ça a été la coupure", déplore-t-il.

      Sans ressources, la situation d’Ivan dégénère rapidement. En septembre, son RSA est rétabli, mais entre-temps, son compte bancaire a été clôturé, et les galères arrivant rarement seules, sa carte d’identité a expiré. Nouvelle coupure du RSA en octobre. Ivan reprend rendez-vous à la Maison Nord Emploi qui le suit.

      "Le coach emploi m’a dit, on verra pour votre RSA quand vous aurez refait vos papiers. Je lui ai dit que cela prenait au moins deux mois. Il m’a répondu que ce n’était pas son problème, qu’il n’était pas là pour faire du social. Résultat, j’ai perdu mon logement."

      Le jour de notre rencontre, Ivan venait de faire une domiciliation au Secours populaire, dans l’espoir de pouvoir rouvrir ses droits.

    • ... un système de double sanction parfois demandée à des travailleurs sociaux.
      "On nous a rapporté que sur la commune de Tourcoing, dont la vice-présidente du Département à l’insertion Doriane Bécue est aussi la maire, des consignes ont été données au personnel du #CCAS de ne pas attribuer de secours alimentaires quand un allocataire du RSA se présente privé de son #revenu parce que sanctionné. C’est quelque chose de notre point de vue totalement insoutenable", s’indigne Olivier Treneul.

    • À Quimper, la Confédération paysanne appelle à la mobilisation contre « le RSA conditionné », vendredi 20 décembre
      https://www.letelegramme.fr/finistere/quimper-29000/a-quimper-la-confederation-paysanne-appelle-a-la-mobilisation-contre-le

      La Confédération paysanne du Finistère demande donc au conseil départemental « qu’il considère et respecte le travail agricole en tant que travail humain essentiel ; que les agriculteurs soient exonérés du dispositif RSA conditionné ; qu’il joue son rôle d’accompagnement social des personnes, de façon humaine ».

      Aveyron : la Confédération Paysanne envahit le Conseil Départemental contre le conditionnement du RSA
      https://lepoing.net/aveyron-la-confederation-paysanne-envahit-le-conseil-departemental-contre-l

    • [VIDÉO] Action en solidarité avec les allocataires du RSA… Poiret pète les plombs, Syndicat SUD des personnels du Département du Nord
      https://www.suddepartementnord.org/2024/12/19/video-action-en-solidarite-avec-les-allocataires-du-rsa-poiret-p

      Ce mercredi 18 décembre, les services de la DGA retour à l’emploi réunissaient, comme tous les mois, une très mal nommée « équipe plurisciplinaire » dite EP.

      Ces réunions mensuelles, et même plus maintenant, ont pour objectif d’infliger de lourdes sanctions financières aux allocataires du RSA jugés récalcitrants à la remise forcée à l’#emploi (vous en bas de ce post le reportage et l’article de France3 qui résume tous les enjeux).

      InforméEs de la date et du lieu, quasi tenus secrets, de cette EP, nous avons décidé d’accueillir C Poiret qui y assistait en personne. Et tranquillement, à quelques-uns et quelques-unes nous avons brandi, devant la salle, des pancartes pour l’interpeller.

      Pour vous en rendre compte nous avions décidé de filmer l’arrivée de C Poiret… Qu’est qu’on n’avait pas fait là !!!!!

      Hors de lui il s’est littéralement jeté sur l’un d’entre nous, l’agrippant fermement au bras et en tentant de lui arracher le téléphone.

      Un truc de dingue, il l’a poursuivi dans le couloir du 7ème étage du NF en hurlant et il a fallu que l’une d’entre nous s’interpose, qu’il a d’ailleurs aussi attrapée au bras et menacée du doigt, pour que cette scène totalement surréaliste prenne fin.

      Violence contre les allocataires du RSA dec24

      https://www.youtube.com/watch?v=MqLKK0SvtWA

      Bon, nous on a pris le parti de la dérision……. Mais si on y réfléchit bien, c’est quand même super grave ce qui s’est passé ! Le président du conseil départemental s’en prend physiquement à 2 représentantEs du personnel juste avant de s’en prendre aux allocataires du RSA. En fait personne n’est à l’abri des débordements incontrôlés et incontrôlables de ce décideur public.

      #revenu_garanti

    • La gauche de droite se la joue cool pendant que Delga relaie le député de l’Eure Philippe Brun qui annonce vouloir ... reconquérir l’électorat populaire.

      En Gironde, on appliquera la loi Plein emploi au minimum
      https://blogs.alternatives-economiques.fr/abherve/2024/12/10/en-gironde-on-appliquera-la-loi-plein-emploi-au-minim

      Sophie Piquemal, vice-présidente PS du conseil départemental en charge de l’insertion confirme le positionnement antérieur de son président, Jean-Luc Gleize « Considérer le RSA et l’insertion uniquement sous l’angle de la sanction, c’est méconnaître la réalité et la complexité des parcours de vie ... » (voir Réactions après le vote par l’Assemblée du projet de loi Plein emploi : deux présidents PS de conseils départementaux affirment que les quinze heures hebdomadaires sont « de la poudre aux yeux »), en déclarant « Être au RSA, ce n’est pas un projet de vie ! Conditionner cette allocation à 15 heures d’activité hebdomadaire, même si on nous dit que la durée sera modulable, nous paraît toujours peu pertinent », tout en devant appliquer la loi.

      Cette application se fondera sur

      « une acception large » de la liste des activités conditionnées au versement du RSA, incluant tout ce qui rompt l’isolement : se rendre à la banque alimentaire, suivre une activité dans un centre social, aller à un cours de FLE
      une exemption « utilisée à plein » pour l’allocataire confronté à des problèmes de santé, d’invalidité ou de garde d’enfant
      le traitement adapté des travailleurs indépendants et des exploitants agricoles.
      la reconduction du dispositif PLACE, spécifique pour les allocataires du RSA intermittents du spectacle.

      Le conseil départemental de la Nièvre ne s’estime pas prêt pour appliquer au 1 er janvier 2025 la réforme du RSA
      https://blogs.alternatives-economiques.fr/abherve/2024/12/09/le-conseil-departemental-de-la-nievre-ne-s-estime-pas

      Thierry Guyot, conseiller départemental délégué à l’insertion, explique le refus pour les raisons suivantes

      . le manque de moyens mis à disposition de nos travailleurs sociaux
      . la logique de contrôle qui ne correspond pas à notre idée de l’accompagnement
      . l’idée que tout le monde peut accéder à l’emploi alors que nous ne le pensons pas
      . la mise en place d’un mécanisme de radiation de masse qui n’est pas judicieux
      . la difficulté de sortir du RSA liée au fait que les contrats de travail sont majoritairement très courts et ne permettent pas d’accéder à des indemnités chômage

    • FR3 Nord, ils font un bon papier, avec un titre débile : au RMI comme dans le RSA, qui fut fait pour ça, il y a toujours eu plus de contrôle que d’accompagnement.
      La classique erreur factuelle sur le montant où on omet le forfait logement, ils l’évitent, mais arrivent à un montant de RSA surévalué. Non le RSA c’est pas "590€ si l’allocataire perçoit une aide au logement" mais 635,71 € (montant forfaitaire pour une personne) - 0 € (si pas d’autres ressources) - 76,29 € (forfait logement pour une personne) = 563,42€ "
      https://www.caf.fr/allocataires/aides-et-demarches/droits-et-prestations/vie-professionnelle/le-revenu-de-solidarite-active-rsa

      1 euro par jour en moins, ce n’est rien, juste l’équivalent d’une baguette pourrie de supermarché ou d’une fraction de repas.

    • Même @frustration1 cite le montant très théorique de 637 e à propos du RSA https://bsky.app/profile/frustrationmag.bsky.social/post/3lf2skt22n22a
      dans l’ignorance absolue du concret c’est à dire du forfait logement qui est retranché et réduit de 72 euros par mois, soit 2,4 euros jours, le fric réellement perçu au maximum par un allocataire RSA. (et surtout ne posez pas de question à LFI sur ce sujet).
      Ça veut bien verser une larme sur les pauvres, juste, ça n’en sait rien.

      #gauche_de_merde

  • #Total, #L’Oréal... quand des #multinationales dictent leur loi à l’enseignement supérieur

    « Libération » s’est procuré des contrats de #mécénat liant entreprises et universités : clause de non-dénigrement, possibilité pour les grands groupes d’influer sur le choix des conférences et des thèses… Une association de jeunes ingénieurs lance un appel à la #transparence.

    Pour se mettre en jambes à la rentrée, des étudiants de l’Ecole des mines de Nancy partent en excursion pour réaliser une carte géologique. Apprendre à identifier les roches sédimentaires, les plis, les failles. Savoir en rendre compte de manière concise. Afin de financer l’exercice, l’école publique a signé une convention de mécénat. En l’occurrence, la multinationale Total leur a fait un virement de 2 000 euros. Sauf qu’en échange, « l’institut s’abstiendra de faire toute #communication directe ou indirecte, écrite ou orale, susceptible de porter atteinte à l’image et la notoriété de #TotalEnergies ». Une #clause_de_non-dénigrement donc, que n’importe quel service juridique jugera classique dans un contrat. A un détail près : il engage là un établissement public visant à former les ingénieurs de demain. « Ces #clauses sont rédigées de manière à ce qu’elles n’entravent ni notre #liberté_d’expression ni notre capacité à mener des débats ouverts et critiques » , réagit François Rousseau, le directeur de l’#Ecole_des_mines de Nancy, indiquant qu’en l’espèce les 2 000 euros représentaient moins de 10 % du coût global de l’action menée.

    Autre exemple, à l’#université_Paris_Sciences_et_Lettres (#PSL). Cette fois, c’est L’Oréal qui participe à la création d’une « #chaire_Beauté(s) », pour faire « émerger des points de vue inattendus sur la notion de #beauté ». Avec 1,2 million d’euros sur la table quand même, versé par le géant des cosmétiques entre 2018 et 2022. « L’Oréal a été l’une des premières entreprises avec qui la #Fondation_PSL est entrée en relation », explique aujourd’hui l’université, se félicitant des #thèses qui ont ainsi été financées. Elle l’assure : « Les seules #contreparties résident dans l’affichage d’un logo [...] et des invitations à des événements. Autant le mécène est intéressé par l’opération qu’il soutient et il est logique qu’il soit tenu au courant de ses avancées et de ses résultats, autant il n’intervient pas dans le projet de recherche ou de formation. Les choses sont claires de part et d’autre. » Sollicité, L’Oréal n’a pas donné suite. Libération a pu consulter ce contrat, resté jusqu’ici confidentiel : il stipule expressément que « la convention ne doit pas être divulguée ». A la lecture, on comprend vite pourquoi. Une clause de #non-dénigrement engage là aussi l’université : « PSL s’interdit de tenir des propos négatifs et/ou de dénigrer l’entreprise, ses membres, ses produits et ses employés. » Mais cela va beaucoup plus loin : il est stipulé que L’Oréal participe à la sélection des doctorants, à l’évaluation de leurs travaux et au choix des lauréats des #prix_de_thèse. L’entreprise a aussi toute sa place dans l’élaboration des cycles de conférence : « Des cadres de l’entreprise pourront être amenés à participer aux #conférences et aux événements de la chaire. »

    Deux cas isolés ? Ou la pratique est-elle généralisée ? Matthieu Lequesne, 30 ans, polytechnicien, s’est mis en mode guerrier : il veut savoir. « L’information est un enjeu stratégique pour engager un débat de qualité. »Avec des amis, pour la plupart ingénieurs et passés par de grandes écoles comme lui, il a monté #Acadamia, l’Association pour l’accès citoyen aux documents administratifs dans le milieu académique et culturel. Leur appel, lancé ce mercredi 16 octobre, a le mérite de la concision : « On veut voir les contrats. »Au-delà du débat sociétal qu’ils espèrent engager, ils comptent rameuter des soutiens, notamment financiers pour mener le combat devant la justice administrative. Quand on le rencontre, #Matthieu_Lequesne s’exprime de manière posée, avec ses idées listées sur une feuille de papier pliée en deux. Soucieux d’éviter les caricatures. « Dès que l’on porte un regard sur ce sujet, le débat se polarise. Comme s’il n’y avait que deux positions : les pour et les opposants à tout lien entreprise-école. C’est binaire et absurde. Il existe plein de bonnes manières de collaborer, là n’est pas le sujet. Il faut pouvoir en débattre au cas par cas. Et pour cela, connaître les clauses. »

    Aucune obligation de transparence

    Car ces #conventions de mécénat, tout comme les contrats de #sponsoring ou les #conventions_partenariales sont rarement – sinon jamais – accessibles sur les sites internet des établissements publics. Seuls les membres des conseils d’administration peuvent les consulter, à condition d’en faire la demande. Il n’existe aucune obligation de transparence. Interrogé par Libération, le ministère de l’Enseignement supérieur n’a pas été en mesure de fournir le nombre (ni même un ordre de grandeur) des contrats liant #entreprises et universités. Impossible de la même façon de savoir quelle part représentent aujourd’hui les fonds privés dans le budget des universités. A titre d’exemple, PSL indique qu’une « dizaine de conventions ont été signées »ces cinq dernières années, pour une « dizaine de millions d’euros ». Le ministère élude : « Une mission d’inspection sur le modèle économique des universités est en cours », qui permettra peut-être d’y voir plus clair. En 2007, la #loi_Pécresse sur l’#autonomie_des_universités avait élargi – et fortement encouragé – le recours à des #fonds_privés. Mais sans aucune règle, ni même un guide de bonnes pratiques, comme il existe dans le domaine de la culture.

    L’une des premières bagarres emblématiques sur le sujet remonte à 2020. A l’époque, TotalEnergies s’apprête à construire 10 000 mètres carrés de labo de recherche sur le campus de #Polytechnique (le projet a depuis été abandonné). Un petit nombre d’anciens élèves monte alors au front, et demande à l’école les termes des contrats passés avec la major du pétrole et du gaz, qui engrangera en 2023 quelque 20 milliards de bénéfices net. D’autant que #Patrick_Pouyanné, le PDG de TotalEnergies, siège au conseil d’administration de Polytechnique – l’enquête ouverte par le parquet financier a été classée sans suite cet été. Dans leur combat, les anciens élèves s’interrogent sur cette #chaire « pour une énergie responsable », financée par TotalEnergies depuis 2018. Leurs questions sont simples. Quel est le montant des sommes engagées par le groupe ? Quelles sont les conditions d’attribution pour vérifier si l’argent est fléché ou dilué dans le budget général de l’école ? Et les contreparties ? L’entreprise est-elle consultée sur le contenu des cours, le choix des intervenants ou des sujets de thèse ? Une clause de non-dénigrement de la multinationale a-t-elle été négociée par Polytechnique devant les hauts fonctionnaires en devenir ?

    Le secret des affaires

    Quatre ans après, toujours pas de réponse. L’affaire a été portée devant le tribunal administratif de Versailles, qui leur a donné raison en octobre 2023 : ces contrats de mécénat sont des documents administratifs, et donc communicables. Mais la direction de Polytechnique a refusé de plier : invoquant le #secret_des_affaires, l’école publique a saisi le Conseil d’Etat. Sur le moment, les anciens élèves ont accusé le coup – la plus haute juridiction administrative, c’est aussi des frais élevés d’avocats et de nouveaux mois d’attente. « Mais on se devait d’aller jusqu’au bout, insiste Denis Merigoux, trésorier de la nouvelle association Acadamia. Cette décision fera jurisprudence, la question sera tranchée pour l’avenir. C’est le sens de notre combat aujourd’hui. »

    S’ils l’emportent, les universités ne pourront plus se réfugier derrière le secret des affaires, argument fétiche utilisé par les entreprises pour ne pas communiquer les termes du contrat. L’un des principaux jokers à la loi de 1978 imposant la communication de tout document administratif, produit par des organismes publics ou des entreprises privées dans le cadre d’une mission de service public.

    Cette histoire des liens entre Polytechnique et Total les a aussi convaincus de l’importance de mener une action structurée. Les alertes, assurent-ils, viennent d’un peu partout, d’étudiants et de chercheurs dans des situations très diverses. A l’université Paul-Sabatier de Toulouse, par exemple, des promos se retrouvent depuis deux ans avec des profs mis à disposition « à titre gracieux » par TotalEnergies pour leur enseigner les « enjeux de la transition énergétique ».Bien sûr, ils s’occupent aussi de la notation, et « offre[nt] des stages », selon le contrat que Libération a consulté. « Ce partenariat, d’une durée de trois ans, n’implique pas de financement et vise à compléter l’enseignement universitaire par une mise en application pratique des notions théoriques, sans concurrence avec le corps professoral. Les supports de cours sont transmis aux étudiants, contribuant ainsi à leur orientation professionnelle future »,défend le géant de l’industrie fossile qui précise que « l’association #Total_Professeurs_Associés (#TPA), composée de membres actifs ou retraités de la compagnie, intervient bénévolement dans ces cours ».

    « Aujourd’hui, elles agissent de facto comme des #sociétés-écrans »

    En réalité, la question va au-delà des contrats de mécénat passés directement entre école et entreprises. Plus opaque encore : le rôle joué par les #fondations. C’est une autre joyeuseté des changements législatifs menés par Pécresse en 2007 : « Avec la nouvelle loi sur l’autonomie des universités, la création de fondations sera encouragée fiscalement, simplifiée administrativement et soutenue politiquement,se réjouissait à l’époque la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche lors de la remise des prix de la fondation HEC. J’ai d’ailleurs envoyé une lettre aux chefs d’entreprise les invitant à investir dans des projets de fondation universitaire. » Depuis, il en existe une panoplie : les fondations universitaires, partenariales, de coopération scientifique. Chacune avec leurs spécificités, mais un point commun : elles rendent encore plus brumeuses les rentrées de fonds privés dans les universités.

    « Aujourd’hui, elles agissent de facto comme des sociétés-écrans », expose Matthieu Lequesne. L’argent privé rentre par la fondation, puis est reversé sous forme de #subvention à l’université, sans en connaître la source et encore moins les contreparties accordées. Ces fondations sont gouvernées par « un conseil de gestion composé de représentants de l’établissement, des fondateurs, de personnalités qualifiées et, le cas échéant, de donateurs » , selon la loi. Exit donc les représentants élus d’enseignants ou d’étudiants, qui pourraient servir de vigie. C’est tout l’enjeu de l’appel à la mobilisation lancée par l’association : obtenir les moyens d’un contrôle démocratique.

    https://www.liberation.fr/societe/education/total-loreal-quand-des-multinationales-dictent-leur-loi-a-lenseignement-s
    #ESR #université #enseignement_supérieur #lobby #lobbying #influence

    • « Il est logique de reconnaître aux Maires la possibilité d’exiger des devoirs en contrepartie de droits, le respect de son pays et des morts pour la France en fait partie. »

      Le front de l’air est vraiment putride.
      Bientot le RSA conditionné à la présence lors des commemoration de Pétain et Maurras. La CAF à condition de dire notre fierté pour Depardieu....
      Bientôt tu pourra crever la dalle si t’es pas Charlie

    • Le tribunal administratif de Toulon a (...) validé le 26 janvier 2024, cette décision du maire, adoptée en septembre 2022, par la majorité des élus de #droite. Cette mesure avait été cependant contestée par la suite par la préfecture qui dénonçait : "une ingérence dans les libertés d’association et de conscience".

      Le tribunal administratif de Toulon a estimé que cette dernière favorisait "l’engagement des associations lors d’événements ayant un intérêt public local" sans enfreindre "le principe de neutralité".

      #Associations #subventions

      Droits et devoirs : la rupture Macron
      https://www.mediapart.fr/journal/france/250322/droits-et-devoirs-la-rupture-macron

      Pour le président-candidat, « les devoirs valent avant les droits ». Cette logique, qui va à l’encontre des principes fondamentaux de l’État social et l’#État_de_droit, irrigue l’ensemble de son projet de réélection. En distinguant les bons et les mauvais citoyens.
      Romaric Godin et Ellen Salvi
      25 mars 2022


      EmmanuelEmmanuel Macron a rarement parlé de « droits » sans y accoler le mot « devoirs ». En 2017 déjà, il présentait les contours de sa future réforme de l’assurance-chômage, en expliquant vouloir « un système exigeant de droits et de devoirs ». Deux ans plus tard, au démarrage du « grand débat national », pensé comme une campagne de mi-mandat pour endiguer la crise des « gilets jaunes », il déplorait l’usage de l’expression « cahier de doléances », lui préférant celle de « cahiers de droits et de devoirs » [le droit de se plaindre, et surtout le devoir de la fermer et d’obéir, ndc]..
      À l’époque, le chef de l’État prenait encore soin, au moins dans son expression, de maintenir un semblant d’équilibre. Mais celui-ci a volé en éclats au printemps 2021, en marge d’un déplacement à Nevers (Nièvre). Interpellé par un homme sans papiers, le président de la République avait déclaré : « Vous avez des devoirs, avant d’avoir des droits. On n’arrive pas en disant : “On doit être considéré, on a des droits.” » Avant d’ajouter, sans l’ombre d’une ambiguïté : « Les choses ne sont pas données. »

      Jeudi 17 mars, le président-candidat a de nouveau invoqué la question des devoirs en abordant le volet régalien de son projet. Rappelant son engagement à accueillir des familles ukrainiennes fuyant la guerre, il a immédiatement prévenu vouloir « changer les modes d’accès aux titres de séjour » et notamment les titres de séjour longs, qui seront désormais accordés « dans des conditions beaucoup plus restrictives ». Parce que non, définitivement, « les choses ne sont pas données ».
      Cette rhétorique du donnant-donnant irrigue aujourd’hui l’ensemble du programme d’Emmanuel Macron. Elle s’impose ainsi dans le volet économique de celui-ci. La mesure la plus représentative en la matière étant sans doute la mise sous condition de travail ou de formation du revenu de solidarité active (#RSA). Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a d’ailleurs explicitement indiqué que cette proposition s’inscrivait dans cette « logique de droits et devoirs » proposée par le candidat.
      Une logique, ou plus exactement une précédence, que le chef de l’État a lentement installée, l’étendant des sans-papiers à tous les citoyens et citoyennes. « Être #citoyen, ce n’est pas demander toujours des droits supplémentaires, c’est veiller d’abord à tenir ses devoirs à l’égard de la nation », avait-il lancé en août 2021. « Être un citoyen libre et toujours être un citoyen responsable pour soi et pour autrui ; les devoirs valent avant les droits », insistait-il en décembre, à destination des personnes non vaccinées.

      Une vision digne de l’Ancien Régime

      Emmanuel Macron a balayé, en l’espace de quelques mois, l’héritage émancipateur de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Pour les rédacteurs de cette dernière, rappelait l’avocat Henri Leclerc dans ce texte, « les droits qu’ils énoncent sont affaire de principe, ils découlent de la nature de l’homme, et c’est pourquoi ils sont imprescriptibles ; les devoirs eux sont les conséquences du contrat social qui détermine les bornes de la liberté, par la loi, expression de la volonté générale ».
      « Ce sont les sociétés totalitaires qui reposent d’abord sur l’#obéissance à des impératifs non négociables qui, en fait, ne sont pas des devoirs auxquels chacun devrait subordonner librement ses actes, écrivait-il en guise de conclusion. Les sociétés démocratiques reposent sur l’existence de droits égaux de citoyens libres qui constituent le peuple d’où émane la souveraineté. Chacun y a des devoirs qui, sans qu’il soit nécessaire de les préciser autrement, répondent à ses droits universels. »
      Début 2022, face aux critiques – Jean-Luc Mélenchon avait notamment tweeté : « Les devoirs avant les droits, c’est la monarchie féodale et ses sujets. Le respect des droits créant le devoir, c’est la République et la citoyenneté » –, Gabriel Attal avait assuré un nouveau service après-vente. Dans Le Parisien, le porte-parole du gouvernement avait expliqué vouloir « poursuivre la redéfinition de notre contrat social, avec des devoirs qui passent avant les droits, du respect de l’autorité aux prestations sociales ».

      La conception conservatrice du « bon sens »

      Cette « redéfinition de notre contrat social » se traduit par plusieurs mesures du projet présidentiel : le RSA donc, mais aussi l’augmentation des salaires du corps enseignant contre de nouvelles tâches – « C’est difficile de dire : on va mieux payer tout le monde, y compris celles et ceux qui ne sont pas prêts à davantage s’engager ou à faire plus d’efforts », a justifié Emmanuel Macron [avant d’introduire la notion de #salaire_au_mérite dans la fonction publique, ndc]–, ou même la réforme des retraites qui soumet ce droit devenu fondamental à des exigences économiques et financières.
      Cette vision s’appuie sur une conception conservatrice du « bon sens », qui conditionne l’accès aux droits liés aux prestations sociales à certains comportements méritants. Elle va à l’encontre total des principes qui fondent l’État social. Ce dernier, tel qu’il a été conçu en France par le Conseil national de la Résistance, repose en effet sur l’idée que le capitalisme fait porter sur les travailleurs et travailleuses un certain nombre de risques contre lesquels il faut se prémunir.

      Ce ne sont pas alors d’hypothétiques « devoirs » qui fondent les droits, c’est le statut même du salarié, qui est en première ligne de la production de valeur et qui en essuie les modalités par les conditions de travail, le chômage, la pénibilité, la faiblesse de la rémunération. Des conditions à l’accès aux droits furent toutefois posées d’emblée, l’État social relevant d’un compromis avec les forces économiques qui ne pouvaient accepter que le risque du chômage, et sa force disciplinaire centrale, ne disparaisse totalement.
      Mais ces conditions ne peuvent prendre la forme de devoirs économiques, qui relèvent, eux, d’une logique différente. Cette logique prévoit des contreparties concrètes aux aides sociales ou à la rémunération décente de certains fonctionnaires. Et ce, alors même que chacun, y compris Emmanuel Macron, convient de la dévalorisation du métier d’enseignant. Elle conduit à modifier profondément la conception de l’aide sociale et du traitement des fonctionnaires. À trois niveaux.
      Le premier est celui de la définition même des « devoirs ». Devoirs envers qui ou envers quoi ? Répondre à cette question, c’est révéler les fondements philosophiques conservateurs du macronisme. Un bénéficiaire du RSA aurait des devoirs envers un État et une société qui lui demandent de vivre avec un peu plus de 500 euros par mois ? Il aurait en quelque sorte des « contreparties » à payer à sa propre survie.
      Si ces contreparties prenaient la forme d’un travail pour le secteur privé, celui-ci deviendrait la source du paiement de l’allocation. C’est alors tout le centre de gravité de l’État social qui évoluerait, passant du travail au capital. En créant la richesse et en payant l’allocation, les entreprises seraient en droit de demander, en contrepartie, du travail aux allocataires au RSA, lesquels deviendraient forcément des « chômeurs volontaires » puisque le travail serait disponible.

      Les allocataires du RSA devront choisir leur camp

      Ce chômage volontaire serait une forme de comportement antisocial qui ferait perdre à la société sa seule véritable richesse : celle de produire du profit. On perçoit, dès lors, le retournement. La notion de « devoirs » place l’allocataire du RSA dans le rôle de #coupable, là où le RMI, certes imaginé par Michel Rocard dans une logique d’insertion assez ambiguë, avait été pensé pour compléter l’assurance-chômage, qui laissait de côté de plus en plus de personnes touchées par le chômage de longue durée.

      Ce retournement a une fonction simple : #discipliner le monde du travail par trois mouvements. Le premier, c’est celui qui veut lui faire croire qu’il doit tout au capital et qu’il doit donc accepter ses règles. Le second conduit à une forme de #criminalisation de la #pauvreté qui renforce la peur de cette dernière au sein du salariat – un usage central au XIXe siècle. Le dernier divise le monde du travail entre les « bons » citoyens qui seraient insérés et les « mauvais » qui seraient parasitaires.
      C’est le retour, déjà visible avec les « gilets jaunes », à l’idée que déployait Adolphe Thiers dans son discours du 24 mai 1850, en distinguant la « vile multitude » et le « vrai peuple », « le pauvre qui travaille » et le « vagabond ». Bientôt, les allocataires du RSA devront choisir leur camp. Ce qui mène à la deuxième rupture de cette logique de « devoirs ». Le devoir suprême, selon le projet d’Emmanuel Macron, est de travailler. Autrement dit de produire de la valeur pour le capital.

      Individualisation croissante

      C’est le non-dit de ces discours où se retrouvent la « valeur #travail », les « devoirs générateurs de droits » et le « #mérite ». Désormais, ce qui produit des droits, c’est une capacité concrète à produire cette valeur. Il y a, dans cette démarche, une logique marchande, là où l’État social traditionnel voyait dans la protection sociale une fenêtre de démarchandisation – c’est parce qu’on devenait improductif qu’on devait être protégé. À présent, chacun, y compris les plus fragiles, doit faire preuve de sa capacité constante de production pour justifier son droit à survivre.

      Cette #marchandisation va de pair avec une individualisation croissante. Dans le modèle traditionnel, la pensée est systémique : le capitalisme produit des risques sociaux globaux dont il faut protéger tous les travailleurs et travailleuses. Dans le modèle des contreparties, chacun est mis face à l’injonction de devoir justifier individuellement ses droits par une mise à l’épreuve du marché qui est le juge de paix final. On comprend dès lors pourquoi Christophe Castaner prétend que l’allocation sans contrepartie est « la réponse des lâches ».
      Car ce choix laisserait les individus sans obligations devant le marché. Or, pour les partisans d’Emmanuel Macron, comme pour Friedrich Hayek, la seule façon de reconnaître un mérite, c’est de se confronter au marché qui donne à chacun ce à quoi il a droit. La vraie justice est donc celle qui permet d’être compétitif. C’est la vision qu’a d’ailleurs défendue le président-candidat le 22 mars, sur France Bleu, en expliquant que la « vraie inégalité » résidait dans « les inégalités de départ ». L’inégalité de résultat, elle, n’est pas remise en cause. [voir L’égalité des chances contre l’égalité http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4443]

      Le dernier point d’inflexion concerne l’État. Dans la logique initiale de la Sécurité sociale, la protection contre les risques induits par le capitalisme excluait l’État. De 1946 à 1967, seuls les salariés géraient la Sécu. Pour une raison simple : toutes et tous étaient les victimes du système économique et les bénéficiaires de l’assurance contre ces risques. Le patronat cotisait en tant qu’origine des risques, mais ne pouvait décider des protections contre ceux qu’il causait. Ce système a été progressivement détruit, notamment en s’étatisant.
      Le phénomène fut loin d’être anecdotique puisqu’il a modifié le modèle initial et changé la nature profonde de l’État : désormais, le monde du travail est redevable à celui-ci et au patronat de ses allocations. Ces deux entités – qui en réalité n’en forment qu’une – exigent des contreparties aux allocataires pour compenser le prix de leur prise en charge. L’État étant lui-même soumis à des choix de rentabilité, l’allocataire doit devenir davantage rentable. Dans cet état d’esprit, cette « #rentabilité » est synonyme « d’#intérêt_général ».
      Les propositions sur le RSA et le corps enseignant entrent dans la même logique. Emmanuel Macron agit en capitaliste pur. Derrière sa rhétorique des droits et des devoirs se profilent les vieilles lunes néolibérales : marchandisation avancée de la société, discipline du monde du travail et, enfin, idée selon laquelle l’État serait une entreprise comme les autres. Le rideau de fumée de la morale, tiré par un candidat qui ose parler de « dignité », cache mal le conservatisme social de son système de pensée.

      Romaric Godin et Ellen Salvi

      #subventions #associations #contrepartie #droits #devoirs #égalité #inégalité

  • RSA : « Vivre avec 600 euros n’étant pas une contrainte suffisante, il faudra désormais être stagiaire d’Etat pour les percevoir »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/03/rsa-vivre-avec-600-euros-n-etant-pas-une-contrainte-suffisante-il-faudra-des

    Raphaël Amselem, chargé d’études pour GenerationLibre, spécialiste des finances publiques, et Lucien Guyon, journaliste chez « Blast », dénoncent, dans une tribune au « Monde », la notion de devoir que le gouvernement veut associer au RSA, qui constitue un droit à la dignité humaine et ne saurait par conséquent souffrir de contrepartie.

    Le revenu de solidarité active (RSA) porte un nom bien administratif pour désigner une aide essentielle, allouée aux personnes sans moyens, afin qu’elles puissent se vêtir, un peu, se nourrir, comme elles peuvent, et se loger, difficilement. Autrement dit, il reconnaît par une maigre compensation financière que le corps social doit s’assurer de la dignité de chacun de ses membres.

    Le gouvernement discute actuellement d’un projet de loi qui devrait conditionner le versement du RSA à un « accompagnement intensif » de quinze à vingt heures par semaine composé, pour le dire simplement, de réunions et d’observations en entreprise. Partant du principe que la dignité se mesure au mérite, le gouvernement choisit, dans le cas d’une telle loi, d’ indexer le droit de survivre à une activité factice, non rémunérée et déléguant toujours davantage le destin des pauvres aux mécanismes iniques de l’administration.

    Vivre avec 600 euros n’étant pas une contrainte suffisante, il faudra désormais être stagiaire d’Etat pour les percevoir. Le droit à la dignité consacre, sans dérogations, que l’être humain, au moment où il est, ne peut être privé de subsistance. L’acquisition du savoir, la vie intime, l’éducation, le travail, la famille, la santé, autrement dit tout rapport au monde, se constituent à travers la reconnaissance de l’Autre. L’homme est social d’emblée. La dignité, conçue dans ce cadre, institue un réseau de respect dont il convient de garantir les conditions d’existence.

    Chaque membre du corps social doit voir sa subsistance garantie

    Paul Ricœur (1913-2005) a écrit dans l’introduction aux Fondements philosophiques des droits de l’homme (1988) : « A toute époque et dans toute culture, une plainte, un cri, un proverbe, une chanson, un conte, un traité de sagesse ont dit le message : si le concept de droits de l’homme n’est pas universel, il n’y en a pas moins, chez tous les hommes, dans toutes les cultures, le besoin, l’attente, le sens de ces droits. L’exigence a toujours été que “quelque chose est dû à l’être humain du seul fait qu’il est humain”. »

    Le droit à la dignité prend ainsi sa source dans l’impératif du soin de l’altérité. L’individualité, en ce sens, n’est rendue possible que par l’obligation de reconnaître à l’autre ce que lui-même me reconnaît. Cette correspondance, au fondement de toute civilité, passe par l’observation et la pratique d’un principe simple : chaque membre du corps social doit voir sa subsistance garantie.

    Le RSA coûte 15 milliards d’euros, 6 % du budget de la Sécurité sociale. Ce poste de dépenses, c’est 600 euros par personne. Et si tant est que l’argument financier soit central dans ce débat, l’économiste Marc de Basquiat notait qu’une telle réforme pourrait induire la création de 50 000 postes, soit un coût supplémentaire de 1 milliard d’euros. La jargonnante prosodie qui accompagne ce projet, traversée par les « dispositifs personnalisés », les « parcours de réinsertion », la « socialisation par le travail », noie sa violence dans un langage technique informe.

    Un régime individuel réglementé à outrance

    Le ministre du travail, Olivier Dussopt, disait, le 23 mai 2023, sur Franceinfo, que les allocataires déclinant les offres d’accompagnement seraient « suspendus ». Ce qui signifie, pour le dire sans politesse lexicale, que des humains se verront retirer leur unique ressource à la discrétion d’une instance administrative. Le reste de ce programme punitif prend les allures d’un régime individuel – encore un – réglementé à outrance.

    Miracle d’inventivité, le gouvernement a inventé le service national universel (SNU) du pauvre ! Qui touchera le RSA sera désormais administré comme un irresponsable a priori, incapable de s’émanciper d’une situation de dénuement sans l’aide éclairée d’un corps technocratique soi-disant à sa mesure, à sa portée, et capable de qualifier le bon, le juste et le souhaitable pour lui.

    Puis, nous la connaissons déjà bien, l’administration française ! Il faut imaginer l’ordinaire allocataire du RSA – 600 euros, pour le redire – à qui on demande de se déplacer à 10 kilomètres de chez lui, pour s’immerger dans une « journée entreprise » censée modifier le cours de son existence ! Il y verra ce qu’est le vrai monde, où des gens missionnent d’autres gens, où des personnes écrivent des notes, où des comptables comptent, où des patrons patronnent, où des livreurs livrent : une révolution !

    La violence sociale va de pair avec la violence administrative

    Des perspectives à venir pour celui qui pensait qu’être comptable, ça n’était pas compter, qu’être patron, ça n’était pas diriger, et qu’être livreur, ça n’était pas livrer. Ce déboussolement organisé aura sans doute une influence vivifiante dans son « parcours de réinsertion », de sorte qu’il se lèvera, le lendemain, en se disant : « C’est donc ça, une épiphanie ! »

    C’est ce manque éclatant de confiance dans la part de la société civile la plus démunie, au point d’en faire l’objet d’un contrôle bureaucratique, qui scandalise, alors que les plus pauvres sont souvent les « premiers de cordée » devant les retors de l’administration, ses impondérables lourdeurs, ses voies labyrinthiques (parfois impénétrables) et son formalisme excessif. Un tiers des bénéficiaires potentiels du RSA renoncent ainsi à le réclamer.

    La violence sociale va de pair avec la violence administrative. L’assurance du droit à la dignité est consubstantielle à la philosophie libérale. De John Locke (1632-1704) à Raymond Aron (1905-1983), de Cesare Beccaria (1738-1794) à John Rawls (1921-2002), les principes du libéralisme politique ont été exposés en ces termes : l’Etat n’a pas un droit sur les individus équivalent aux droits qu’il assure.

    Ce mythe qui prétend que tout droit serait la conversion d’un devoir amène de graves fautes politiques. La garantie des droits fondamentaux doit être gratuite, spontanée, pour elle-même, par elle-même, et au fondement de l’action publique. Nul ne saurait être redevable en dignité. Une mesure qui conditionne la survie est une mesure qui oublie que des gens survivent.

    Rafaël Amselem (chargé d’études au sein du club de réflexions libéral GenerationLibre) et Lucien Guyon(journaliste pour le site de presse en ligne et la Web-TV « Blast »)

    #guerre_aux_pauvres #droits_fondamentaux #RSA #travail #accompagnement_intensif #mérite #contrepartie #contrainte #sanction #droit_au_revenu #revenu_minimum #contrôle #violence_sociale #violence_administrative

    • RSA : « Et si le gouvernement prenait vraiment les choses au sérieux ? », Jean-Claude Barbier
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/01/rsa-et-si-le-gouvernement-prenait-vraiment-les-choses-au-serieux_6175733_323
      La querelle sur l’activité obligatoire des allocataires des minima sociaux date d’avant le RMI de 1988, ancêtre du RSA, rappelle dans une tribune au « Monde » le sociologue Jean-Claude Barbier.

      Quelles sont les différentes options qui pourraient tracer les pistes d’une possible réforme du revenu de solidarité active (RSA), voulue par le gouvernement ? Elles sont au nombre de quatre et sont bien antérieures à la réforme envisagée aujourd’hui. Il y a d’abord ce que l’on peut qualifier de « méthode Raymond Barre ». Elle remonte à l’époque où l’ancien premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing et candidat à l’élection présidentielle de 1988 demandait l’assistance « absolue » uniquement pour les vieillards et les personnes handicapées ne pouvant pas du tout travailler.

      Puis il y a la « méthode Nixon », étendue par Clinton en 1996 : obliger pour une allocation de misère – pas même un emploi – à travailler dans les parcs publics. Elle a été surnommée « workfare ». Ensuite, l’insertion, originalité française, la « méthode Jean-Michel Belorgey » (du nom du député socialiste auteur et pilote de la loi revenu minimum d’insertion (RMI) promulguée le 1er décembre 1988), qui combine allocation et accompagnement effectif des personnes par les travailleurs sociaux.

      Laissons de côté l’actuelle tentation démagogique qui agite aujourd’hui les députés Renaissance et LR comme elle agita Clinton, et intéressons-nous à la quatrième solution, celle de la « dignité humaine » (Menschenwürde), principe constitutionnel allemand. La Cour de Karlsruhe a en effet exigé en 2019 du gouvernement fédéral qu’il respecte le minimum d’existence (digne) fixé par la Constitution en euros, applicable même après d’éventuelles diminutions pour sanctions.

      Rompre avec « l’esprit de radinerie »

      Si un gouvernement français prenait vraiment les choses au sérieux, il devrait d’abord rompre avec « l’esprit de radinerie » qui marque l’assistance aux pauvres depuis son invention en Angleterre élisabéthaine au XVIe siècle. Jamais depuis cette époque les gouvernements n’ont accordé un financement suffisant pour aider les personnes pauvres à sortir de la misère.

      Si en effet les sommes dépensées paraissent énormes, elles ne représentent, y compris l’indemnisation du chômage, que 8 % des dépenses de protection sociale, contre 80 % pour la santé et les retraites. Près des deux tiers de ceux et celles qui perçoivent les minima sociaux sont en dessous du seuil de pauvreté en France (y compris les enfants).
      Une réponse sérieuse devrait donc être celle d’un financement décent mais conséquent, et d’une action d’accompagnement elle aussi conséquente, comme elle existe par exemple au Danemark (à l’exception des immigrants désormais discriminés dans ce pays). Le RMI n’a jamais bien fonctionné en termes de suivi efficace pour le retour ou l’accès à un emploi.

      Renforcer les sanctions reste une mesure marginale

      En 2022, la Cour des comptes a noté que les dépenses des départements ne sont compensées en longue durée qu’à près de 60 %, ce qui veut dire qu’ils n’ont tout simplement pas les moyens de financer l’insertion. Au Danemark, les collectivités territoriales lèvent leurs propres impôts, et sont au contraire suffisamment dotées.
      Mieux, elles sont engagées à gérer efficacement leurs dépenses par des contrats avec l’Etat central qui les incitent à bien le faire. Il est tout à fait possible de dépenser à la fois à bon escient et avec rigueur. Et cela serait une belle réforme à entreprendre pour le ministre français des finances…

      Car renforcer les sanctions reste une mesure marginale ou inopérante. Les économistes savent que les sanctions sont d’une efficacité toute relative : elles motivent à la recherche d’emploi quand approche la fin du droit à l’indemnisation, mais elles incitent à prendre des emplois médiocres.

      Trouver des emplois de qualité et non des ombres d’emploi

      En outre, elles peuvent aussi inciter au non-recours (« Droits et devoirs du RSA : l’impact des contrôles sur la participation des bénéficiaires », Sylvain Chareyron, Rémi Le Gall, Yannick L’Horty, Revue économique n °5/73, 2022). Or, le non-recours au RSA est évalué à un tiers des personnes éligibles. Le problème à résoudre est par conséquent de placer en emploi ou en formation pendant plusieurs mois des centaines de milliers de personnes en difficulté.

      Il s’agit de trouver des emplois de qualité et non des ombres d’emploi, comme le redoute l’ancien commissaire au RSA Martin Hirsch. Les personnes pauvres craignent en effet des emplois de seconde zone, selon l’avis du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale https://www.cnle.gouv.fr/l-avis-accompagnement-vers-l-1672.html (CNLE) sur l’accompagnement et l’insertion.

      Dans le rapport qui envisage la réforme du RSA, l’administration annonce l’objectif d’un conseiller Pôle emploi et d’un travailleur social pour 50 personnes, afin d’obtenir un « accompagnement global » adéquat pour des candidats très éloignés de l’emploi. Or, le régime normal, dit « de suivi », à Pôle emploi est de un pour 363, le régime « guidé » de un pour 211) et régime « renforcé » de un pour 97, selon les chiffres de la Cour des comptes. Un pas immense reste à franchir.

      Le service de l’emploi et de l’insertion est en outre confronté à trois populations hétérogènes : les jeunes ayant de grosses difficultés (à qui Le RSA est refusé, jusqu’à l’âge arbitraire de 25 ans), les chômeurs et les titulaires des minima sociaux, et parmi eux ceux qui ont des problèmes de santé (et ils sont nombreux). Chacun de ces groupes a besoin de services adaptés, qui ne peuvent être automatisés.

      L’essence de l’esprit de solidarité

      Par exemple, il faut des allocations aux jeunes sans emploi ni formation : ils sont plus d’un million, mais moins de 300 000 ont droit au soutien d’un contrat engagement jeune. L’idée d’un accompagnement renforcé accordé à un million de titulaires du RSA (avec un conseiller pour 50 allocataires) coûterait annuellement de 1,4 milliard d’euros, affirme l’IFRAP, un groupe de réflexion ultra-libéral.

      Or, la qualité de l’accompagnement conditionne la réussite : c’est précisément son absence qui explique les mauvais résultats de l’insertion, comme l’affirme la Cour des comptes à juste titre. Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Danemark dépense trois fois plus proportionnellement que la France pour les « mesures actives » de l’emploi (c’est-à-dire les mesures de formation, d’accompagnement, d’insertion…. hors allocations), ce qui explique leur succès relatif dans notre pays.

      Or le Danemark est, comme la France, critiqué comme champion européen des dépenses sociales. Mais il n’y a rien sans rien ! Et de toute façon, l’insertion sociale et professionnelle est sans cesse à remettre sur l’ouvrage, avec des taux d’accès à l’emploi souvent décevants. Il ne faut pourtant pas renoncer, car il s’agit ici de l’essence de l’esprit de solidarité.

      Jean-Claude Barbier(sociologue CNRS au Centre d’économie de la Sorbonne /Paris 1 Panthéon Sorbonne)*

    • La réforme du RSA suscite inquiétudes et scepticisme
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/05/04/la-reforme-du-rsa-suscite-inquietudes-et-scepticisme_6172003_823448.html

      Le gouvernement s’inspire notamment du contrat d’engagement jeune (#CEJ), mis en place en mars 2022. Un dispositif réservé aux 16-25 ans et aux moins de 30 ans en situation de handicap qui ne sont ni en études, ni en activité, ni en formation, et qui peinent à accéder à un emploi durable. Ces derniers s’inscrivent dans un parcours d’accompagnement de quinze à vingt heures hebdomadaires en échange d’une #allocation de 530 euros.

      Voilà le tarif : 530e par mois
      Toujours aussi drôle de voir les articles de gauche, et les critiques libérales (comme ci-dessus) qui disent 600 euros pour le RSA individuel alors que dans les faits c’est 534,82 (dans plus de 90% des cas, et ce depuis 1988, un « forfait logement » de 12% est retranché du montant maximum théorique).

      edit trouvé le reste dont

      (...)Des mesures coercitives qui suscitent, là encore, le scepticisme. « Les sanctions annoncées posent une vraie question opérationnelle, considère Antoine Foucher, du cabinet Quintet. Comment va-t-on, même partiellement, même provisoirement, diminuer le RSA des allocataires récalcitrants ? » Ces derniers « sont déjà très contrôlés, avec pas mal de sanctions », ajoute Michaël Zemmour, qui cite notamment « la mise sous surveillance » de leurs comptes en banque.

      Discours « démagogiques »
      Si les collectivités locales expriment ces craintes c’est aussi parce qu’elles pensent qu’une sorte de double discours existe au sein du gouvernement. « Nous sommes rassurés sur les conditions de l’expérimentation, mais inquiets concernant le contenu de la loi », lance Bruno Bernard. Le président écologiste de la métropole de Lyon dénonce les discours « démagogiques » du président de la République et du ministre des comptes publics, Gabriel Attal. Lors d’un déplacement dans l’Hérault, le 25 avril, ce dernier a opposé « les classes moyennes », « ceux qui comptent pour l’essentiel sur leur travail pour vivre, pas sur les aides sociales ni sur un gros patrimoine », aux opposants à la réforme des retraites qui accueillent les déplacements de ministres avec des casseroles.

      Cette opposition entre les actifs et ceux qui bénéficient des minima sociaux avait déjà utilisée par Emmanuel Macron, lors de son entretien télévisé, le 22 mars. « Beaucoup de travailleurs disent “vous nous demandez des efforts mais il y a des gens qui ne travaillent jamais” », avait déclaré le locataire de l’Elysée pour justifier le conditionnement du RSA. (...)

      Une rhétorique qui trouve un écho dans la population et qui peut en partie expliquer la difficulté que peuvent avoir les opposants à mobiliser largement. « L’idée s’est imposée dans l’opinion publique [que nous fabriquons] qu’il y a trop de gens qui vivent de la solidarité nationale, analyse le directeur général délégué d’Ipsos, Brice Teinturier. Une forme de consensus sur le sujet s’est installé, donc une telle réforme du RSA ne sera pas vraiment contestée par les Français. » Un climat politique issu de vingt ans de discours sur le supposé « assistanat » auquel vient s’ajouter un contexte économique favorable.
      Compte tenu des difficultés de recrutements rencontrées par les employeurs dans de très nombreux secteurs, ceux qui ne travaillent pas sont considérés comme profitant du système. Plusieurs études montrent qu’il y a surtout beaucoup de personnes qui peuvent prétendre au RSA et qui n’en bénéficient pas. « En 2018, un tiers (34 %) des foyers éligibles au RSA serait non recourant chaque trimestre, et un sur cinq (20 %) le serait de façon pérenne trois trimestres consécutifs », rappelle la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques.
      Dans son entretien avec les lecteurs du Parisien, le 23 avril, Emmanuel Macron s’appuie pourtant sur ceux qui « abusent » du RSA pour défendre la réforme. Un sentiment renforcé par la sensation qu’ont les actifs, et surtout les travailleurs dit de première et deuxième lignes, que leur travail est dévalorisé et ne paie pas assez. « La précarisation du monde du travail renforce le ressentiment de ceux qui ont l’impression de se lever tôt pour un travail difficile et mal payé envers ceux qui bénéficient des minima sociaux sans travailler », signale Brice Teinturier.

      https://justpaste.it/5oq7c

    • Cela me fait penser à ce passage du Capital de Marx, chapitre 27 – L’expropriation de la population campagnarde – évoquant « la loi sur les pauvres » au XVIe siècle.

      Le protestantisme est essentiellement une religion bourgeoise. Pour en faite ressortir « l’esprit » un seul exemple suffira. C’était encore au temps d’Élisabeth : quelques propriétaires fonciers et quelques riches fermiers de l’Angleterre méridionale se réunirent en conciliabule pour approfondir la loi sur les pauvres récemment promulguée. Puis ils résumèrent le résultat de leurs études communes dans un écrit,contenant dix questions raisonnées, qu’ils soumirent ensuite à l’avis d’un célèbre jurisconsulte d’alors, le sergent Snigge, élevé au rang de juge sous le règne de Jacques-Ier. En voici un extrait :

      « Neuvième question : Quelques-uns des riches fermiers de la paroisse ont projeté un plan fort sage au moyen duquel on peut éviter toute espèce de trouble dans l’exécution de la loi. Ils proposent de faire bâtir dans la paroisse une prison. Tout pauvre qui ne voudra pas s’y laisser enfermer se verra refuser l’assistance. On fera ensuite savoir dans les environs que, si quelque individu désire louer les pauvres de cette paroisse, il aura à remettre, à un terme fixé d’avance, des propositions cachetées indiquant le plus bas prix auquel il voudra nous en débarrasser. Les auteurs de ce plan supposent qu’il y a dans les comtés voisins des gens qui n’ont aucune envie de travailler, et qui sont sans fortune ou sans crédit pour se procurer soit ferme, soit vaisseau, afin de pouvoir vivre sans travail. Ces gens-là seraient tout disposés à faire à la paroisse des propositions très-avantageuses. Si çà et là des pauvres venaient à mourir sous la garde du contractant, la faute en retomberait sur lui, la paroisse ayant rempli à l’égard de ces pauvres tous ses devoirs. Nous craignons pourtant que la loi dont il s’agit ne permette pas des mesures de prudence de ce genre. Mais il vous faut savoir que le reste des freeholders (francs tenanciers) de ce comté et des comtés voisins se joindra à nous pour engager leurs représentants à la chambre des communes à proposer une loi qui permette d’emprisonner les pauvres et de les contraindre au travail, afin que tout individu qui se refuse à l’emprisonnement perde son droit à l’assistance. Ceci, nous l’espérons, va empêcher les misérables d ’avoir besoin d’être assistés . (a) »

      (a) R. Blakey : The History of political, literature from the earliest times. Lond., 1855, vol. II, p. 83, 84

    • oui, si ce n’est qu’on est passé des #workhouse à la « société de travail » (comme Jospin l’a excellemment formulé en 1998) sur un soubassement matériel et social tout autre que les dimensions communautaires détruites par la dynamique du capital : le salaire et le salaire social (j’entends par là autre chose que Friot ; toutes les formes de salaire socialisé, hors emploi, dont le RSA). là l’enjeu du contrôle, c’est de déterminer par la loi, la jurisprudence, les pratiques de guichet, les gesticulations agressives, etc., l’étiage de la disponibilité à l’emploi (la conditionnalité de fait), quitte à multiplier les simulacres (plutôt que les murs) où s’épuise le temps des prolos (la disponibilité à l’emploi avec ses jeux imposés, du théâtre)

      des éléments sur ce théâtre, d’il y a 12 ans (...)
      https://seenthis.net/messages/46203

    • là l’enjeu du contrôle, c’est de déterminer par la loi, la jurisprudence, les pratiques de guichet, les gesticulations agressives, etc., l’étiage de la disponibilité à l’emploi (la conditionnalité de fait), quitte à multiplier les simulacres (plutôt que les murs) où s’épuise le temps des prolos (la disponibilité à l’emploi avec ses jeux imposés, du théâtre)

      Effectivement, « de l’autre côté » des allocataires du RSA on trouve des personnes qui occupent des emplois d’insertion, qui ne correspondent à guère autre chose que des missions de contrôle social et de gestion administrative de la précarité (dont un certain nombre sont d’ailleurs d’anciens « bénéficiaires » du RSA).

      C’est à ce genre d’aberration auquel conduit la défense aveugle des emplois pour les emplois, au lieu de celle des ressources. J’utilise à dessein le mot « ressources » pour évoquer - indépendamment des différentes formes qu’elles peuvent prendre (salaire, minima, pension de retraite, revenu, apprentis, stage, emplois aidés, etc.) - l’accès inconditionnel à des moyens d’existence qui ne soient jamais inférieurs au SMIC (même si le SMIC est un salaire bas, ce sera toujours mieux que ce que donne la liste des emplois bilboques).

      Quand à savoir s’il s’agit ou d’un « salaire socialisé » ou d’un « revenu garanti », à la limite, cela ne me semble pas vraiment déterminant (ce genre de questions aurait même plutôt tendance à me gonfler). Si on trouve un autre mot que « ressources » qui exprime le même sens que celui que je viens de proposer, je suis preneur.

      L’autre raison pour laquelle, de façon plus générale, je pense qu’il est essentiel de déconnecter la question des emplois et d’insister sur celle des ressources dans la lutte sociale (notamment dans la lutte syndicale - ce qui n’est vraiment pas gagné) c’est qu’à cause de la « défenses de l’emploi » on en vient à justifier le développement des pires aberrations industrielles qui nous conduisent droit dans le mur sur le plan social, politique et écologique.

      Il faut arrêter de justifier les choix politiques et sociaux sur les emplois mais, par contre, la défense des fondamentaux de la justice économique doit rester une priorité afin qu’aucune décision économique ou politique (plan sociaux, taxe carbone, etc.) se fasse au détriment des conditions d’existence matérielles de la classe ouvrière (pour faire simple).

      Et puis, après, vient la question du travail, mais là, de mon point de vue, c’est encore une autre problématique.

    • RSA : « La règle des 15 à 20 heures d’activité obligatoires est irréalisable, et le pouvoir le sait très bien », Yves Faucoup, Ancien directeur d’un centre de formation de travailleurs sociaux à Toulouse
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/26/rsa-la-regle-des-15-a-20-heures-d-activite-obligatoires-est-irrealisable-et-

      Ancien cadre dans le travail social, Yves Faucoup dénonce, dans une tribune au « Monde », la réforme du revenu de solidarité active projetée par le gouvernement au nom d’une « mise au travail » dont il ne donne pas les moyens.

      France Travail, remplaçant de Pôle emploi, aura entre autres pour mission de veiller à ce que les attributaires du revenu de solidarité active (RSA) soient inscrits au chômage et établissent un contrat d’engagement.
      A terme, il s’agirait officiellement d’imposer quinze à vingt heures hebdomadaires d’activité à celles et ceux qui perçoivent le RSA. Certains commentateurs considèrent que le président de la République et la première ministre se seraient partagé les rôles : à lui la version dure, de droite, à la Sarkozy (« droits et devoirs »), à elle la version plus humaine, de gauche (« accompagnement et insertion »).
      Depuis bientôt trente-cinq ans (loi sur le revenu minimum d’insertion, décembre 1988), le principe du revenu minimum consiste en France à garantir à une personne sans ressources une allocation différentielle de faible niveau. Elle est fixée en effet à la moitié du seuil de pauvreté pour une personne seule, soit 534 euros mensuels (et non pas 608 euros comme si souvent colporté, en oubliant de déduire le forfait logement).

      Un accompagnement social et professionnel
      Il s’agit de lui permettre de survivre, bien loin des « moyens convenables d’existence » prévus par la Constitution ! Il n’a jamais été non plus expliqué clairement pourquoi le RSA est fixé à 60 % de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) ou de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA ou minimum vieillesse), autres minima sociaux.
      En contrepartie de cette allocation, un engagement d’activité (emploi, bénévolat, formation, création d’entreprise, soins) est signé par la personne en fonction de sa situation (car elle n’est pas toujours en capacité physique ou psychique d’assumer un travail). Cet engagement suppose un accompagnement social et professionnel. C’est du moins ce qu’indiquent les textes en vigueur depuis trente-cinq ans, sauf que les sommes qui y sont consacrées sont passées de 20 % du montant des allocations dans les années 1990 à 7 % aujourd’hui.

      Le RSA mis en avant par Nicolas Sarkozy avait pour but, tout comme la réforme annoncée par Emmanuel Macron, de « mettre les gens au travail », un discours autoritaire destiné à siphonner des voix à droite. Mais cela a été un fiasco, à part le renforcement de l’implication de Pôle emploi. En réalité, la mise en œuvre du RSA a entraîné des pertes majeures pour l’efficacité des accompagnements.
      L’intéressement à une reprise d’activité existait déjà, il aurait suffi de l’améliorer. Le RSA activité a été une erreur : les ayants droit ne l’ont pas ou peu demandé, redoutant la stigmatisation du minimum social entretenue par les idéologues de la droite dure, à l’instar de Laurent Wauquiez. Il a d’ailleurs été remplacé plus efficacement par la prime d’activité, ce que de nombreux spécialistes de la question réclamaient depuis longtemps.

      Le risque de l’affichage
      Le débat public sur le RSA est simpliste, parce qu’il entend régler le problème selon le principe des vases communicants : il y a des emplois non pourvus, donc ils peuvent être attribués à des gens au RSA. Alors que tous les professionnels du secteur savent que si l’on veut être efficace, il faut des moyens en matière d’accompagnement.
      Si le chef de l’Etat en était persuadé, il n’aurait pas attendu six ans pour se préoccuper de l’efficacité du dispositif – ce qui ne laisse d’ailleurs rien augurer de bon sur la mise en œuvre effective de la réforme. Car le risque est de rester dans l’affichage : non seulement pour passer le plus vite possible à autre chose après la promulgation de la loi sur les retraites, mais aussi pour faire de la communication politique à destination d’une classe moyenne prétendument excédée en se servant de la précarité. Comme Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle de 2012 dans sa lettre aux Français : « Nous avons consacré des milliards à maintenir des gens dans l’assistanat (…), nous l’avons payé d’une défaite financière. »
      En coulisse, les professionnels de l’accompagnement social suivent vaguement ces débats avec un triste sourire : ils savent que le rapport du haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises, Thibaut Guilluy, n’a pas fait l’objet d’une véritable concertation (une seule réunion pour toute l’Occitanie) ; et si beaucoup de ses propositions sont intéressantes, elles sont présentées à tort comme des innovations alors qu’elles n’inventent rien. Les nombreuses pistes existent déjà, elles sont appliquées, tentées ou explorées sur les territoires où les autorités départementales ont mis le paquet, et bien moins là où les moyens manquent.
      Négocié et non imposé
      Elisabeth Borne, en déplacement sur l’île de La Réunion, a parlé de « sanctions » si les attributaires du RSA ne respectent pas l’engagement. Juste pour montrer ses muscles, car la suspension du revenu minimum existe depuis toujours, si la personne ne prend pas contact avec le service d’accompagnement ou ne respecte pas l’engagement qu’elle a pris.

      Sauf que la première ministre a ajouté que dans la mesure où « on aura accompli, de notre côté, notre part de responsabilité », la sanction tombera si le bénéficiaire du RSA, lui, ne suit pas « le parcours qu’on lui a proposé ». Or jusqu’à ce jour, il est entendu, et d’ailleurs bien plus efficace, que le parcours soit négocié avec l’intéressé et non imposé. Il y a là un risque énorme d’un dispositif autoritaire voué à l’échec, car les professionnels de l’accompagnement résisteront et les allocataires aussi.

      1,8 million de foyers perçoivent le RSA : la règle des quinze à vingt heures d’activité obligatoires est irréalisable, et le pouvoir le sait très bien. S’il l’agite comme un hochet dans l’espoir d’en tirer profit auprès de « ceux qui travaillent », il ne semble pas qu’il ait l’intention de l’inscrire précisément dans la loi.
      Ce recul est plutôt une bonne chose, mais qu’en sera-t-il des promesses qu’il a faites sur les moyens d’accompagnement social et professionnel et de formation, indispensables pour aider vraiment les citoyens qui galèrent à tenter d’accéder à une véritable insertion ?

  • Bruno #Le_Maire, héraut d’un #système en #faillite | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/210323/bruno-le-maire-heraut-d-un-systeme-en-faillite

    Passons aussi sur sa réaction au texte de Nicolas Mathieu publié sur Mediapart, qui dénonçait en écrivain la violence du gouvernement et la rage qu’elle provoque dans la population. Notre #ministre-publié-chez-Gallimard a rejeté ce texte avec dédain, le jugeant « injuste », « insultant », « méprisant ». Car, prétend-il, lui aussi connaît les « petites gens » et, d’ailleurs, « c’est pour eux » qu’il défend une réforme des retraites qui va les faire #travailler_davantage et les soumettre encore plus à la #pression du monde du travail.

    Sans doute, ce doit être aussi « pour eux » que les règles de l’assurance-chômage ont été durcies et qu’il a promis récemment des coupes dans les dépenses sociales. De sorte que la façon qu’a notre ministre-poète de défendre les gens qu’il aime tant semble surtout passer par la matraque, au propre comme au figuré.

    En réalité, l’entretien lui-même venait confirmer le texte de Nicolas Mathieu : un enfermement de classe dans un argumentaire moisi auquel plus personne ne croit n’a d’autre réalité concrète que celle de la guerre sociale que mène cette majorité.

    Bruno Le Maire aime le peuple comme l’aimait Adolphe #Thiers : soumis et obéissant à ses hiérarchies. « Du moins, pendant ce temps, il n’écrit pas », a répondu avec malice Nicolas Mathieu à cette déplorable saillie ministérielle.

    Passons enfin sur le discours lénifiant concernant la « solidité » des #banques françaises alors que se dessine la tourmente d’une crise financière généralisée dans laquelle les monstres que sont les banques françaises ne sauraient être entièrement à l’abri.

    Plus que jamais, Bruno Le Maire est un #comique malgré lui : au moment où il donne avec aplomb ces assurances, la #Banque_centrale_européenne elle-même a dû se fendre de deux communiqués officiels pour assurer au système financier qu’elle se portera à son secours en cas de besoin. Ce genre de textes ne se lance pas au hasard. D’ailleurs, les titres des grandes banques françaises n’ont pas été épargnées par les marchés, loin de là. Mais l’hôte de Bercy dessine de sa plume alerte un autre monde, bien loin des contingences de celui où nous autres sommes contraints à errer.

    L’acmé de cette #déconnexion est sans doute atteinte lorsque notre ministre proclame haut et fort que « l’argent gratuit, c’est fini ». Le mot peut sembler anodin mais il révèle en réalité l’inconsistance complète de l’analyse de celui qui est censé tenir les finances du pays.

    Bruno Le Maire, qui sait se montrer si dur avec les chômeurs ou les grévistes, n’a jamais demandé aucune #contrepartie_aux_entreprises.

  • Le premier mandat n’était qu’un amuse-bouche pour les personnels de l’éducation. Vous allez adorer le plat de résistance ! 🙄

    Présidentielle 2022 : Macron s’attaque au temps de travail des enseignants
    https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/presidentielle-2022-macron-sattaque-au-temps-de-travail-des-enseignants-137

    « Il faut revaloriser les salaires, certes, mais surtout repenser la fonction » des enseignants, affirme le chef de l’Etat dans son interview au « Parisien ». « Le sujet, c’est le temps scolaire et la liberté qu’on peut donner à certaines écoles de bâtir leur propre projet pédagogique selon leur territoire. »

    C’est d’une certaine manière la première proposition de campagne pour l’école du quasi-candidat à l’élection présidentielle . Et elle va faire débat. Dans son interview au « Parisien », Emmanuel Macron lie l’augmentation du salaire des enseignants - qu’il faut « améliorer » - au « temps de l’enseignement » qui « n’est pas satisfaisant par rapport au nombre d’enseignants embauchés ».

    Le chef de l’Etat fait explicitement référence à une note de la Cour des comptes publiée mi-décembre . Les magistrats financiers y recommandent de réorganiser le système scolaire autour des chefs d’établissement et d’intégrer une forme de rémunération au mérite des enseignants dont le temps de travail serait annualisé.

    « Repenser la fonction »

    Le système actuel est « trop rigide », estime Emmanuel Macron qui veut, « comme pour les soignants, […] redonner du sens sur le terrain ». « Il faut revaloriser les salaires , certes, mais surtout repenser la fonction, poursuit-il. Le sujet, c’est le temps scolaire et la liberté qu’on peut donner à certaines écoles de bâtir leur propre projet pédagogique selon leur territoire. »

    C’est le projet d’« #école-du-futur » , avec une certaine autonomie de recrutement du chef d’établissement, qu’Emmanuel Macron a commencé à dessiner à Marseille en septembre dernier. Le chef de l’Etat avait d’ailleurs indiqué que l’expérimentation marseillaise pourrait être « généralisée » si les résultats étaient « concluants ».

    « L’idée, qui pourrait être une grande réconciliation avec les enseignants, serait de mieux valoriser le temps extrascolaire qui pourrait être aussi bien de la formation que des réunions entre enseignants, voire du périscolaire », décrypte le député LREM Sacha Houlié, impliqué sur les questions d’éducation dans le cadre de la préparation de la campagne.

    Ce qui suppose de modifier les obligations de service des enseignants, un sujet hautement sensible pour les syndicats. Sacha Houlié décline cette revalorisation annoncée en « trois leviers » : d’abord, « prendre en compte ce qui est déjà fait et le valoriser pour augmenter le salaire » - c’est l’augmentation de base, en quelque sorte ; ensuite, « diversifier les tâches complémentaires qui peuvent porter sur le périscolaire ou la formation durant les vacances scolaires » ; enfin, la rémunération pourrait être encore « améliorée » pour ceux qui prendraient en charge certaines missions « comme le remplacement ». Cela se ferait « d’abord par expérimentation sur la base du volontariat »....

    #contreparties #obligations-de-service

  • La nomination de Brigitte Klinkert à l’insertion inquiète une partie des associations d’aide aux précaires
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/07/08/remaniement-la-nomination-de-brigitte-klinkert-a-l-insertion-inquiete-une-pa

    Le conseil départemental du Haut-Rhin où siégeait la nouvelle ministre a fait voter en 2016 un dispositif conditionnant le versement du RSA à la réalisation de sept heures de bénévolat par semaine.
    Par Bertrand Bissuel

    Sitôt désignée, sitôt mise en doute. L’entrée au gouvernement de Brigitte Klinkert est regardée avec appréhension par des responsables associatifs. Ils pointent du doigt les antécédents de la nouvelle ministre déléguée à l’#insertion. Au cœur des griefs, l’un des volets de l’action sociale du conseil départemental du Haut-Rhin, dont elle est la présidente (divers droite).

    En 2016, cette collectivité territoriale, pilotée par la droite, avait déclenché une vive controverse en adoptant une délibération qui conditionnait le versement du revenu de solidarité active (#RSA) à la réalisation de sept heures de bénévolat hebdomadaire. A l’époque, Mme Klinkert n’était pas à la tête de l’assemblée départementale – le poste étant occupé par Eric Straumann (LR) –, mais elle y siégeait déjà.

    La décision du département avait été critiquée par les associations d’aide aux plus démunis. Portée devant le juge administratif, l’affaire était remontée jusqu’au Conseil d’Etat. Celui-ci avait validé le principe du dispositif, en faisant valoir que des actions de bénévolat pouvaient être demandées aux bénéficiaires du RSA. Mais il y avait mis des conditions : une telle mesure s’applique aux personnes « disponibles pour occuper un emploi » ; elle doit concourir à une meilleure insertion professionnelle, tout en étant cadrée par un contrat liant l’allocataire à la collectivité. Au fil du temps, les élus haut-rhinois avaient amendé le mécanisme, en le basant sur le volontariat – et non plus sur la contrainte.

    « Stigmatisation »

    Même si elle n’a pas été l’instigatrice de cette politique, Mme Klinkert en est coresponsable, car « elle était membre de la majorité départementale » en 2016, souligne Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité. « Sa nomination est une réelle inquiétude pour les associations de lutte contre l’exclusion, poursuit-il. Le risque est de voir resurgir les contreparties obligatoires aux allocations et la #stigmatisation des personnes toujours accusées de ne pas faire d’efforts pour s’en sortir. »

    Ex-président de l’association alsacienne Espoir et personnalité toujours très impliquée dans le soutien aux publics fragiles, Bernard Rodenstein pose un autre regard sur Mme Klinkert : c’est une « humaniste », affirme-t-il, qui « cherche à arrondir les angles » et dont les valeurs sont éloignées du discours consistant à dicter des devoirs aux bénéficiaires de minimums sociaux. M. Rodenstein se sent d’autant plus à l’aise pour le dire qu’il avait vertement critiqué l’initiative du département du Haut-Rhin en 2016.

    Dans l’entourage de la ministre déléguée, on fait valoir que Mme Klinkert n’a pas été nommée pour généraliser le dispositif instauré dans le Haut-Rhin. Il serait par ailleurs « réducteur », ajoute-t-on, de juger l’action de cette collectivité et de Mme Klinkert à la seule aune de la mesure votée en 2016 – et modifiée depuis.

    #droits_sociaux #conditionnalité #contrepartie #bénévolat_obligatoire #travail

  • #Philanthropie : Le #capital se fout de la #charité - #DATAGUEULE 93 - DataGueule
    https://peertube.datagueule.tv/videos/watch/554be54b-fd91-4e89-bddf-119813b64e73

    Ah les belles fortunes de ce monde et leur immense générosité ! L’éducation, l’art, la faim dans le monde : rien n’est trop beau, rien n’est trop grand. À condition d’y gagner en visibilité… Et de pouvoir faire une belle opération fiscale au passage. Et si parfois, ces opérations sentent bon le #conflit_d’intérêt, il ne faudrait tout de même pas cracher dans la soupe. La #générosité ça ne se discute pas. Mais au fait, elle vient d’où cette richesse ?

    #fiscalité #défiscalisation #trust #social-washing #image #philantrocapitalisme #bill_gates #mécénat_d'entreprise #fondation_louis_vuitton #contreparties #loi_Aillagon #niche_fiscale

  • Comme si la réforme des #retraites et les annonces autour de la #LPPR n’étaient pas suffisants... voilà que sort du chapeau ministeriel le #pacte_productif

    LPPR : le Pacte de productivité, jumeau maléfique de la Loi de programmation pluri-annuelle de la recherche ?

    « Il y aura des textes forts politiquement, des textes qui viendront avec le « Pacte Productif », par exemple sur la réforme de la recherche et de l’#enseignement_supérieur » – Emmanuel #Macron, Président de la république,11 février 2020 (https://twitter.com/ebothorel/status/1227334119132143617)

    Annoncé en avril 2019, le Pacte productif ambitionne de construire « un nouveau modèle français respectueux de l’environnement pour atteindre le #plein_emploi ». Pour ce faire, il s’intéresse de près au #financement de la #recherche mais aussi à l’#enseignement.

    L’orientation des moyens de la #recherche_publique vers un #développement_industriel précis

    « La loi de programmation de la recherche devrait être l’occasion de réfléchir à une augmentation des moyens consacrés à des #programmes_de_recherche publique en #contrepartie de leur orientation vers un développement industriel précis. » – Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, 15 octobre 2019 (https://www.economie.gouv.fr/pacte-productif/discours-de-bruno-le-maire-ministre-de-leconomie-et-des-finances)

    L’idée est donc de concentrer les moyens de la recherche sur des « #chaînes_de_valeur_stratégiques » définies par « la qualité de la #base_industrielle en #France, la situation du #marché et les #performances de notre recherche ». En clair, il s’agit de concentrer les moyens sur l’#innovation à certains secteurs rentables décidés par le haut, au détriment de la recherche en général dont les thématiques sont décidées par le bas.

    L’inquiétante disparition de la recherche

    La consultation sur le Pacte productif 2025 (Synthèse des contributions, France Stratégie : https://www.economie.gouv.fr/files/files/ESPACE-EVENEMENTIEL/Pacte_Productif/Pacte_Productif_Synth%C3%A8se_des_Contributions.pdf) s’est articulée en 6 thématiques. La thématique portée par Mme Vidal est celle de l’innovation, et la recherche n’apparaît pas malgré sa pertinence dans le sujet, ne manquant pas de faire écho à la suppression initiale.

    Plusieurs propositions sont faites dans la thématique innovation, toutes allant dans le sens d’un contrôle accru du #secteur_privé sur le secteur public, telles que :

    « le doublement de l’assiette qui existe pour la #R&D sous-traitée aux #organismes_publics_agréés » pour le #crédit_d’impôt_en_faveur_de_la_recherche (#CIR) : c’est-à-dire l’augmentation du contrôle des #entreprises sur le #financement_public de la recherche publique ; ou
    « encourager les chercheurs du public à s’investir dans le monde de l’entreprise ou en #partenariat avec lui, notamment en majorant la pondération des activités de #création_d’entreprise, de #consultance ou de dépôt de #brevets d’invention, dans l’ensemble des critères retenus pour la #progression_de_carrière » : c’est-à-dire affaiblir les #libertés_académiques en incitant les chercheurs publics à un rapprochement avec le privé.

    Autre témoin inquiétant : alors que les rapports de la LPPR prennent la peine de traiter le cas des Lettres, Langues, Arts et Sciences Humaines et Sociales (LLASHS) à part puisqu’ils n’entrent pas dans le plan global, le Pacte productivité ne prend pas cette peine et les ignore complètement.

    MESRI vs. Bercy : un arbitrage perdu qui pourrait avoir de lourdes conséquences

    Globalement, il ressort de l’idée générale du Pacte productif de financer l’innovation, et donc essentiellement le secteur privé, avec les moyens de la recherche publique, y compris de la « #recherche_d’excellence ». Cela traduirait d’un arbitrage perdu entre le Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de le l’innovation de Mme Vidal et le Ministère de l’économie et des finances de M. Le Maire, qui pourrait bien représenter une #menace réelle et critique sur l’appareil de recherche public français.

    Si la LPPR est « une loi financière » comme l’annonce Mme Vidal, alors un arbitrage perdu avec Bercy pourrait avoir des conséquences beaucoup plus profondes que simplement budgétaires.

    http://blog.educpros.fr/julien-gossa/2020/02/20/lppr-le-pacte-de-productivite-jumeau-malefique-de-la-loi-de-programmat

    #pacte_productivité #ESR #liberté_académique

    –---

    Sur les réformes dans l’ESR en France :
    https://seenthis.net/messages/820330

    • Discours de Bruno #Le_Maire , ministre de l’Economie et des Finances

      Mesdames et Messieurs les ministres,
      Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs,

      Il nous faut bâtir un agenda des transitions à horizon 2025 pour donner une visibilité à chacun.
      Nous avons besoin d’une stratégie collective pour la nation, un pacte productif permettant d’atteindre le plein emploi en 2025"

      Voilà la commande qui a été passée par le président de la République aux membres du Gouvernement en avril à l’occasion de la restitution du Grand débat national.

      Depuis 6 mois, nous travaillons, avec les membres du Gouvernement, les fédérations professionnelles, les organisations syndicales, les chambres de commerce et les chambres de métiers, pour bâtir ce pacte productif.

      Je tiens à remercier tous ceux qui, depuis 6 mois, ont participé à ce travail : mes collègues ministres, les responsables syndicaux, les 2 000 chefs d’entreprises qui se sont exprimés grâce aux consultations des chambres de commerce et des chambres de métiers, les 74 organisations professionnelles et collectivités qui ont participé. Grâce à eux, nous avons pu faire un diagnostic précis de la situation économique de la France et en tirer des orientations pour les années à venir, avec un objectif : concilier puissance économique et protection de la planète, pour que la France reste une grande puissance au 21è siècle.

      1. Il est d’autant plus nécessaire de donner de la lisibilité à nos choix économiques que nous sommes confrontés à une double révolution technologique et environnementale.

      1ère révolution : la révolution technologique

      L’intelligence artificielle est la rupture technologique du 21è siècle. Elle va transformer tous les métiers et tous les secteurs.

      Elle peut apporter le meilleur : créer des centaines de milliers d’emplois ou combattre des maladies incurables.

      Comme elle peut apporter le pire : détruire des milliers d’emplois ou aliéner nos libertés.

      Une seule certitude, cette révolution technologique changera l’ordre des puissances. La Chine est déjà le premier investisseur mondial en matière d’intelligence artificielle. L’atelier du monde est en train de devenir le cerveau de la planète.

      2è révolution : la révolution environnementale

      Nous prenons conscience que notre planète peut devenir invivable pour l’homme. Nous réalisons que le progrès mal maîtrisé peut être une régression.

      Le politique doit désormais réconcilier progrès technologiques et protection de notre planète. Le pacte productif doit être un pacte environnemental. Un pacte passé avec les salariés, avec les entrepreneurs mais aussi un pacte passé avec notre planète.

      2. Face à cette double révolution, comment la France se positionne-t-elle ?

      Elle a des atouts considérables. Elle a des laboratoires de recherche exceptionnels : le CNRS, l’INRIA, le CEA. Elle a des infrastructures de grande qualité. Elle a des services publics irréprochables. Elle a une énergie nucléaire qui est un atout majeur pour faire face à la lutte contre le réchauffement climatique et à la réduction des émissions de CO2.

      Elle réussit dans une conjoncture internationale difficile. La croissance française s’établira à 1,4 % en 2019 et 1,3 % en 2020. Ce sont des niveaux de croissance supérieurs à la moyenne de la zone euro.

      Mais nous avons toujours trois faiblesses structurelles majeures.

      notre fiscalité de production reste trop élevée par rapport à nos partenaires européens. Elle est

      7 fois plus élevée qu’en Allemagne et 2 fois plus élevée que la moyenne de la zone euro ;

      notre spécialisation sur des produits et des services de moyenne gamme est mauvaise. Elle ne crée pas suffisamment de valeur pour les industriels et pour les producteurs agricoles. Elle nous ferme des marchés ;
      Le nombre d’heures travaillées est plus faible que chez nos partenaires européens. Si bien que nous nous sommes appauvris relativement aux États du G7 au cours des dernières années. Notre PIB a augmenté mais la richesse par habitant a augmenté moins vite que dans les autres grandes nations industrialisées du G7.

      3. Ces faiblesses structurelles expliquent en grande partie la désindustrialisation de la France depuis 10 ans. Elles nous menacent de déclassement économique.

      La part de l’industrie dans le PIB est passée de 17 % à 12 % en France en 20 ans. Elle s’est maintenue à 23 % en Allemagne, à près de 18 % en Italie et à 14 % en Espagne. 100 usines par an ont été fermées depuis 10 ans, 1 million d’emplois industriels ont été supprimés. Ces chiffres sont sans appel.

      Nous nous en sortons dans trois secteurs : l’aéronautique, le luxe, les vins et spiritueux. Mais on ne bâtit pas une force industrielle sur trois secteurs, qui plus est, trois secteurs qui sont les mêmes depuis 20 ans.

      Certains secteurs se sont fragilisés : je pense à l’agroalimentaire ou à l’industrie pharmaceutique. Enfin, d’autres secteurs n’ont trouvé leur salut qu’en délocalisant leur production. Je pense, par exemple, à l’industrie automobile. La production automobile française est passée d’un excédent commercial de 13 milliards d’euros en 2004 à un déficit de 12 milliards d’euros en 2018. Dans le même temps, l’excédent commercial allemand a progressé de 70 à 122 milliards d’euros.

      En résumé : la France a fait le choix de la consommation plutôt que le choix de la production. Elle a fait le choix de la redistribution plutôt que de la création de richesses. Elle a accepté les délocalisations plutôt que de valoriser nos technologies, nos savoir-faire et notre intelligence collective.

      Les conséquences de ces choix économiques, nous les connaissons : le chômage reste élevé, des centaines de milliers d’emplois restent non pourvus, les inégalités territoriales menacent l’unité de la nation française.

      4. Pourtant, les résultats que nous avons obtenus depuis plus de deux ans montrent que ce risque de déclassement n’est pas une fatalité. Nous pouvons inverser la tendance. Nous avons commencé à le faire. Le Pacte productif doit permettre d’aller plus loin dans la transformation économique du pays et d’ouvrir le deuxième temps de la transformation économique du quinquennat.

      Cela suppose de faire les choix politiques clairs devant et avec nos compatriotes.

      1er choix : rester une nation de production. C’est un choix qui ne va pas de soi. Nous pourrions très bien faire le choix d’une économie de services : devenir la plateforme financière

      et le pays des services en Europe. C’est le choix qu’ont fait les Britanniques avec Margaret Thatcher dans les années 1980 en libéralisant les marchés financiers et la bourse londonienne. Ce n’est pas le choix que nous faisons. La France ne serait pas la France sans production industrielle et sans production agricole. Elle ne serait pas davantage la France si nous abandonnions certains territoires et si nous concentrions la production de richesses dans les seules métropoles. Le pacte productif doit aussi être un pacte territorial.

      2è choix : réussir dans les échanges internationaux. Je ne crois pas au repli sur soi. Je crois dans les vertus du libre-échange sur la base du principe de réciprocité. L’économie française sera plus forte si nos entreprises exportent davantage.
      3è choix : rester une des nations technologiquement les plus avancées. Nous voulons préserver notre indépendance technologique par rapport à la Chine et aux des États-Unis en matière d’intelligence artificielle ou de stockage d’énergie. Nous voulons rester dans la course à l’innovation pour maîtriser les innovations futures et préserver notre souveraineté politique. Il n’y aura plus au 21è siècle de souveraineté politique sans souveraineté technologique.

      Sur la base de ces choix, nous vous présentons 5 orientations stratégiques pour la production française dans les années à venir.
      1ère orientation : atteindre une économie zéro carbone en 2050

      Nous nous sommes fixés comme objectif dans le Plan climat zéro émission nette de CO2 en 2050. Cet objectif est accessible mais il implique d’être cohérent.

      La cohérence est de ne pas augmenter notre empreinte carbone, c’est-à-dire les biens et les services carbonés que nous consommons, quand nous baissons nos propres émissions de CO2.

      C’est pourtant la situation actuelle. Nos émissions nationales ont baissé de près 20 % en 20 ans tandis que nos émissions liées à nos importations ont doublé. Au final, notre empreinte carbone globale a augmenté de 10 %.

      Nous fixons des contraintes environnementales à notre industrie, elle perd en compétitivité, elle délocalise sa production. Et nous continuons à consommer ailleurs les mêmes produits carbonés. C’est inefficace pour notre économie et ce n’est pas cohérent avec nos objectifs environnementaux.

      Nous devons gagner en cohérence et faire que toutes les politiques publiques décarbonent notre production et notre consommation.

      Cela suppose de mettre en place le plus rapidement possible des réponses européennes : une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne est nécessaire. Sans elle, toutes les politiques publiques européennes seront dépourvues d’efficacité.

      Cela suppose également de mettre en place une taxation européenne des moyens de transport les plus polluants. Il est incompréhensible que des objectifs d’émissions carbone aient été fixés pour nos voitures et qu’aucun objectif n’ait été fixé pour les avions ou les bateaux. Nous proposons de travailler à une taxation européenne du carburant des avions et des bateaux.

      Cela suppose aussi de dégager les financements nécessaires. La Banque européenne d’investissement pourrait devenir une banque verte, avec au moins la moitié des encours dédiée à la transition énergétique

      Cela suppose, enfin, de montrer la voie en matière de finance verte en créant une taxonomie européenne qui permette de distinguer en toute transparence les investissements verts des autres investissements. Le nucléaire doit être maintenu dans cette taxonomie européenne et être considéré comme une énergie indispensable à la lutte contre le réchauffement climatique. Nous en débattrons avec nos partenaires allemands, mais le GIEC et de nombreux scientifiques sont formels sur la nécessité de recourir au nucléaire pour lutter contre le réchauffement climatique.

      La puissance publique nationale doit aussi s’engager pour atteindre cette économie zéro carbone en 2050.

      Nous avons déjà établi, avec Gérald Darmanin, un budget vert pour l’Etat. 20 milliards d’investissement sont dédiés à la transition écologique au cours du quinquennat. L’enveloppe dédiée au bonus automobile et à la prime à la conversion augmentera de 50 % cette année. Le crédit d’impôt pour la transition écologique sera transformé en aide directe et concentré pour aider les ménages les plus modestes.

      Cette politique publique nationale exige également, comme l’a indiqué le président de la République à l’Assemblée générale des Nations Unies, que l’État cesse de financer des projets qui contribuent à la croissance des émissions de CO2 en dehors de nos frontières. Nous engagerons donc une revue globale précise des garanties du trésor à l’exportation. Nous communiquerons les résultats de cette revue au premier trimestre 2020. Nous en tirerons les conséquences avec un objectif : réduire l’empreinte carbone des garanties du trésor. Nous engageons déjà cette politique dans le PLF 2020 en interdisant toute garantie du trésor pour les projets charbon.

      2è orientation : anticiper les besoins de compétences et former pour 2025.

      La France n’a pas connu le plein emploi depuis 50 ans. Nous n’avons pas réussi à atteindre le plein emploi pour deux raisons : nous avons mal formé et nous avons un coût du travail trop élevé. Nous avons réduit ce coût du travail grâce aux allègements de charges, nous ne reviendrons pas dessus.

      Mais le prix du plein emploi ne peut pas être et ne sera pas le dumping salarial. Nous voulons élever les compétences plutôt que baisser les salaires. En cela, nous nous inscrivons en rupture claire avec les politiques de minijobs ou de contrat « zéro heure » qui ne correspondent pas à notre vision du capitalisme responsable.

      Nous voulons mettre en place une gestion prévisionnelle des compétences à l’échelle nationale pour la première fois en France : comprendre nos besoins et notre offre de compétences en France et région par région.

      Cette gestion prévisionnelle nous permettra de concevoir les formations initiales en secondaire et en universitaire et de fixer des objectifs pour 2025. 80 000 emplois sont aujourd’hui vacants dans le secteur du numérique et ce nombre va aller croissant si nous n’agissons pas. Nous devons augmenter massivement le nombre de techniciens, d’ingénieurs, de docteurs formés pour demain. Nous avons pour objectif de doubler le nombre d’étudiants formés en IA.

      Cette gestion permettra aussi de créer les formations continues et les accompagnements pour requalifier les emplois menacés par la robotisation ou la numérisation de notre économie.

      Cette politique doit nous amener à diviser par deux le nombre d’emplois non pourvus en le ramenant de 200 000 à 100 000. Elle pourra être complétée, comme le Premier ministre l’a indiqué à la représentation nationale, par une immigration de travail choisie pouvant inclure des quotas par branche professionnelle.

      Nous sommes prêts à ouvrir ces travaux avec les organisations syndicales et les représentants des salariés et des entreprises.

      3è orientation : devenir une économie de rupture technologique

      La France est une économie de l’innovation : nous avons les chercheurs, les ingénieurs, un écosystème de start-up. Mais la France n’est pas une économie de rupture technologique. Nous suivons les innovations américaines ou chinoises plutôt que de montrer la voie. Pour inverser la tendance, nous devons travailler dans trois directions : les financements, la recherche et les chaînes de valeur technologiques.

      Nous avons besoin de plus de financements. Sur les 100 plus grandes entreprises numériques cotées en 2018, 49 sont américaines, 14 sont chinoises et 2 entreprises seulement sont françaises. Ce n’est pas une question de talent ou de créativité, c’est une question de manque de financement.

      Le PIA III arrive à son terme, c’est l’occasion de lancer une nouvelle vague d’investissement d’avenir, une vague plus ambitieuse. Comment faire ? Quelle enveloppe dédier ? Quel véhicule utiliser ? Pourquoi ne pas utiliser le fonds d’innovation de rupture ?

      La structure est en place. Elle garantit un financement sûr et régulier de l’innovation. Nous pourrions rassembler dans le même fonds un possible nouveau PIA et le fonds pour l’innovation de rupture, pour disposer d’un rendement sûr et plus élevé chaque année.

      Par ailleurs, nos pépites technologiques ne trouvent pas les financements nécessaires pour devenir des géants mondiaux. Elles lèvent 5, 10, 15 millions d’euros mais ne trouvent pas des tickets de 50 ou 100 millions.

      Résultat : elles se font racheter par des entreprises américaines qui récupèrent le siège, les emplois et la propriété intellectuelle. Le contribuable français n’a pas vocation à financer des startup qui finissent ensuite dans les mains de grandes entreprises américaines.

      Nous avons fait une première étape pour augmenter les financements sur le marché français : des investisseurs institutionnels se sont engagés à investir 5 milliards. Nous pourrions maintenant nous fixer cet objectif : 20 milliards d’euros de levées de fonds publics et privés pour le financement des entreprises innovantes à échéance 2025.

      Enfin, nous avons besoin de plus de protections. Nos start-up se font racheter parce qu’elles manquent de financement, mais aussi parfois parce qu’elles manquent de protection. C’est pourquoi nous avons renforcé les décrets IEF dans la loi PACTE.

      Nous proposons de renforcer encore ces protections : le seuil de prise de participation dans une entreprise stratégique déclenchant le contrôle pourrait être abaissé de 33,3 % à 25 %. Le champ des secteurs protégés pourrait être élargi aux médias et à la sécurité alimentaire.

      Sur la politique de recherche

      Nous avons une recherche publique d’excellence et une industrie de haute technologie. Mais recherche et industrie ne travaillent pas ensemble. Il existe encore un mur entre la recherche publique et son développement industriel. Nous devons casser ce mur. Nous avons commencé à le faire dans PACTE, nous devons aller plus loin.

      La loi de programmation de la recherche devrait être l’occasion de réfléchir à une augmentation des moyens consacrés à des programmes de recherche publique en contrepartie de leur orientation vers un développement industriel précis.

      Enfin, nous devons développer une stratégie claire de chaînes de valeur technologiques.

      Nous l’avons fait pour la nanoélectronique. C’est un succès. STMicroelectronics ou SOITEC maintiennent en France et en Europe une production de semi-conducteurs qui auraient été totalement délocalisée en Asie si l’Etat n’était pas intervenu.

      Nous le faisons aussi sur les batteries électriques. Nous produirons dès 2022 des batteries électriques en France et Allemagne car nos deux Etats sont intervenus pour conserver une industrie automobile européenne puissante et souveraine.

      Mais dans quelles chaînes de valeurs investir ? Quelles technologies assureront notre croissance et notre souveraineté ? Et comment les choisir ?

      Nous devons croiser trois critères : la qualité de la base industrielle en France, la situation du marché et les performances de notre recherche. Sur la base de ces critères, nous avons identifié des chaînes de valeur qui pourraient être immédiatement renforcées pour 2025 et considérées comme des chaînes de valeur stratégiques.

      Je pense par exemple aux nouvelles thérapies et à la médecine personnalisée, à la chaîne de traction électrique, au-delà des batteries, ou encore aux technologies avancées de recyclage, qui permettent de fabriquer des matières premières recyclées aussi qualitatives que des matières vierges.

      D’autres chaînes de valeur moins matures aujourd’hui seront absolument incontournables à horizon 2030. Là aussi, nous devons développer une stratégie complète pour préparer l’avenir. Je pense par exemple à l’hydrogène pour la mobilité, à l’internet des objets industriels ou encore à de nouveaux agro-équipements, permettant de réduire massivement l’usage de pesticides

      Nous ne décrétons pas que ce sont les seules chaînes de valeur stratégiques, nous lançons le débat. Nous devons maintenant utiliser les mois qui viennent pour les confronter à des experts, des scientifiques, des économistes et des industriels.

      4è orientation : être compétitif pour produire en France

      Si nous voulons rapatrier les capacités de production en France, nous devons retrouver une compétitivité fiscale.

      L’enjeu des impôts de production n’est pas de faire un cadeau aux entrepreneurs, c’est de rapatrier la production dans nos territoires. Pour cela, nous avons besoin d’une baisse massive, régulière et définitive.

      Cela implique de faire un choix politique collectif : avec les présidents de Régions, de départements, avec les maires, avec les industriels et avec l’ensemble des Français.

      Cela suppose de prendre le temps de débattre ensemble pour répondre aux vraies questions : quel impôt baisser ? A quelle vitesse les baisser ? Comment les baisser suffisamment pour relancer la production sans couper les ressources des collectivités ?

      Nous pouvons être audacieux et imaginer des solutions nouvelles :

      une priorité à la suppression de la C3S ;
      une trajectoire de baisse claire sur plusieurs années ;
      une possibilité pour les régions de faire de baisser la CVAE comme le propose le Premier ministre ;
      une déduction fiscale pour les entreprises qui investiraient dans la transition énergétique et digitale.

      Autant de pistes de réflexion que je livre au débat. Je propose de les étudier avec les partenaires sociaux, avec l’Association des maires de France et dans le cadre du conseil Etat-Régions. Donnons-nous 6 mois pour aboutir.

      5è orientation : engager un nouvel acte de décentralisation en matière de développement économique

      Un pas a déjà été fait sur la politique d’innovation lors de la phase IV des pôles de compétitivité. La gestion des pôles sera transférée aux régions et les appels à projets seront désormais gérés par les régions.

      Nous pouvons aller plus loin en matière fiscale. Les régions pourraient définir des stratégies de compétitivité territoriale avec de nouvelles compétences fiscales et sociales.

      En matière industrielle : un conseil Etat-région pourrait être mis en place pour partager les orientations des politiques industrielles nationales et régionales.

      Voilà nos 5 orientations, elles ne sont pas inscrites dans le marbre. Elles ont vocation à être débattues. Nous devons maintenant concerter, consulter et évaluer. C’est la méthode du pacte productif.

      La concertation est ouverte avec les collectivités, avec les maires de France, avec les responsables syndicaux et les chefs d’entreprise.
      Une consultation publique est lancée ce matin. Chaque Français pourra réagir à ces orientations sur un site internet dédié au pacte productif.
      Enfin, une évaluation des chaînes de valeurs stratégiques sera demandée au conseil de l’innovation. Pour faire cette évaluation, il sera renforcé par des économistes, des chefs d’entreprise, des associations, des scientifiques, des syndicats.

      Cette méthode permettra au président de la République de présenter aux Français la stratégie collective dont nous avons besoin pour atteindre le plein emploi en 2025.

      Elle pourra conduire si nécessaire à une loi PACTE 2 à l’automne 2020 et des dispositions fiscales dans le PLF 2021.

      Je vous remercie.

      https://www.economie.gouv.fr/pacte-productif/discours-de-bruno-le-maire-ministre-de-leconomie-et-des-finances

  • Aides sociales : « Ne luttons pas davantage contre les pauvres que contre la pauvreté », Axelle Brodiez-Dolino, chercheuse au Centre Norbert-Elias (EHESS, universités d’Avignon et d’Aix-Marseille)
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/19/aides-sociales-ne-luttons-pas-davantage-contre-les-pauvres-que-contre-la-pau

    L’historienne Axelle Brodiez-Dolino revient aux racines du discours, récemment remis en avant par Edouard Philippe, sur la « contrepartie » aux aides sociales.

    Tribune. Alors que les « gilets jaunes » focalisent l’attention sur les couches populaires laborieuses, le premier ministre vient de faire diversion, dans le cadre du grand débat national, le vendredi 15 février, en exhumant l’idée de contreparties aux aides sociales. Flattant implicitement ceux qui n’y recourent pas, tout en répondant à son électorat. S’il reconnaît le sujet comme « explosif », c’est qu’il fait référence au concept du #workfare anglo-américain, rarement loué comme un modèle enviable ; et que, (re)lancé en 2011 par Laurent Wauquiez puis Nicolas Sarkozy, puis adopté dans le Haut-Rhin, il a suscité des levées de boucliers.

    Car il englobe deux préoccupations. L’une, économique : faire que chacun, surtout s’il reçoit de la collectivité plus qu’il ne semble apporter, contribue ostensiblement. L’autre, morale : imposer le maintien d’une saine occupation, contre l’oisiveté et les activités illicites suspectées chez les #allocataires.

    Loin d’être nouvelle, l’idée était déjà soulevée par le Comité de mendicité en 1790 : « Si celui qui existe a le droit de dire à la société “Faites-moi vivre”, la société a également le droit de lui répondre “Donne-moi ton travail”. » Elle était au cœur du « grand renfermement », dans les « hôpitaux généraux » (XVIIe-XVIIIe siècles) puis les « dépôts de mendicité » (XVIIIe-XIXe siècles), ainsi qu’en Angleterre et aux Etats-Unis dans les workhouses. Le pauvre « valide », en âge et en état de travailler, bénéficiait, si l’on ose dire, du gîte et du couvert au sein d’un système #disciplinaire carcéral fondé sur la #mise_au_travail. Ce système, que les pouvoirs publics se sont maintes fois évertués à réactiver, a de l’avis général (contemporains de l’époque comme historiens d’aujourd’hui), fait la preuve de sa totale inefficacité. Au point qu’il a fini par être, au début du XXe siècle, discrètement abandonné.

    Un principe récusé par les lois sociales

    Hors son échec historique, ce principe est discutable. Il ne relève pas du hasard que sa disparition coïncide avec l’apparition des lois sociales : en forgeant des #droits, la IIIe République a récusé la #contrepartie. Elle a, avec le solidarisme, renversé l’idée de dette, qui n’était plus celle de l’individu envers la société, mais de la société envers l’individu pour lui assurer sa subsistance.

    « Le “devoir de travailler” n’a de sens qu’avec son corolaire, le “droit d’obtenir un emploi” »

    Du début du XXe siècle à 1988, un droit a donc été un pur droit. Les préambules des Constitutions des IVe et Ve Républiques ont toutefois été prudents : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi (…). Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. »

    C’est ce qui a légitimé, dans la loi de 1988 sur le #RMI, l’imposition d’une contrepartie : le contrat d’insertion. Lequel puisait à la pratique alors novatrice d’ATD Quart monde de rééquilibrer le rapport d’assistance en mettant sur un pied d’égalité les contractants. Le « contrat-projet » du rapport Wresinski s’est mué en contrat d’insertion du RMI.

    Mais c’est aussi là qu’il a été dévoyé, vidé des deux grandes caractéristiques du contrat : librement consenti, et équilibré entre les deux parties. On ajoutera que le « devoir de travailler » n’a de sens qu’avec son corolaire, le « droit d’obtenir un emploi » – qui n’existe toujours pas aujourd’hui.

    Déséquilibre entre offre et demande d’emploi

    Car le problème français n’est pas d’occuper les #chômeurs. Il est celui d’un déséquilibre abyssal entre offre et demande d’#emploi : au minimum, un ratio de 1 à 10 ; et qui serait plutôt situé entre 1 à 17 et 1 à 42 (selon le rapport 2017 du Secours catholique). On peut toujours « traverser la rue », selon la formule d’Emmanuel Macron, mais la demande reste très supérieure à l’offre. La France recourt en outre largement à l’emploi précaire et aux contrats très courts, paupérisants, désincitatifs et coûteux (transports, gardes d’enfants, etc.). S’y ajoutent la désadéquation entre formations et emplois disponibles, ainsi qu’entre lieux d’emplois et lieux de vie. Si, comme le dit le premier ministre, « on veut qu’il y ait un avantage objectif à retourner à l’activité », mieux vaudrait aborder le problème sous ces angles-là.
    Mettre en regard, de façon simpliste, chômage et emplois non pourvus, c’est faire fi de ces chantiers politiques et imputer le paradoxe à des chômeurs qui feraient la fine bouche devant les emplois proposés ; donc rendre les plus démunis responsables. Car fondamentalement, le recours aux aides sociales découle du découragement face aux échecs répétés à s’insérer de façon durable et décente sur le marché du travail.

    La ministre des solidarités et de la santé Agnès Buzyn veut inscrire la « stratégie pauvreté » annoncée en septembre 2018 « dans la fidélité aux valeurs profondes qui ont construit notre république sociale ». Mais ne choisissons pas la filiation de la Ire République, qui luttait davantage contre les pauvres que contre la pauvreté, mais celle des républiques suivantes. Le slogan de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron est beau : « Faire plus pour ceux qui ont moins. » Ne le dévoyons pas, à peine engendré, en « demandant plus à ceux qui ont moins ».

    #guerre_aux_pauvres

  • Grande-Bretagne/UE : Les allocations dont Cameron veut priver les travailleurs européens - Libération
    http://www.liberation.fr/planete/2016/02/14/grande-bretagneue-les-allocations-dont-cameron-veut-priver-les-travailleu

    La requête la plus polémique présentée par le Royaume-Uni dans le cadre des renégociations avec ses partenaires européens consiste à vouloir priver pendant quatre ans les >#immigrants européens de « in-work benefits », des aides sociales perçues par les travailleurs pauvres.

    La particularité du système social britannique est de conditionner une grande partie des #allocations à l’#emploi, et ce dans le but d’encourager l’emploi, même mal payé, en complétant les revenus des #travailleurs_pauvres.

    Appelées « crédits d’impôt » (tax credit), ces aides sont versées chaque semaine ou chaque mois aux personnes éligibles travaillant au moins 16 heures par semaine (pour ceux qui ont des enfants, sont handicapés ou ont plus de 60 ans) et au moins 30 heures par semaine (pour les 25-59 ans sans enfant).

    Le gouvernement conservateur voudrait également que les travailleurs européens ne puissent pas recevoir d’#allocations_familiales (surtout si leurs enfants sont restés dans le pays d’où ils viennent) et qu’ils n’aient pas accès aux #logements_sociaux, là encore pendant quatre ans.

    « Nous voulons en finir avec l’idée qu’on peut obtenir quelque chose sans #contrepartie », a expliqué le Premier ministre britannique David Cameron fin janvier.

    Selon un rapport du gouvernement publié en novembre, entre 37% et 45% des citoyens de l’Espace économique européen (pays de l’Union européenne plus la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein) arrivés au Royaume-Uni entre mars 2009 et mars 2013 ont reçu des allocations.

    Ces chiffres sont contestés par certains experts, qui pointent par ailleurs que c’est la perspective d’un emploi et non celle de percevoir des allocations sociales qui motive la venue d’Européens au Royaume-Uni.

    De nombreuses études montrent en outre que les immigrants en provenance de l’UE sont des contributeurs nets à l’économie britannique. Ils ont ainsi rapporté 20 milliards de livres (27 milliards d’euros) au Trésor britannique lors de la dernière décennie, selon un rapport de University College London (UCL).

    #préférence_nationale

  • Intermittents du spectacle : Ségolène Royal suggère de leur demander « des tâches » - RTL.fr
    http://www.rtl.fr/actualites/info/politique/article/intermittents-du-spectacle-segolene-royal-suggere-de-leur-demander-des-taches-77

    Ségolène Royal, présidente (#PS) de Poitou-Charentes, a suggéré jeudi 27 février de « demander des tâches » aux #intermittents du spectacle, en contrepartie de leur indemnisation #chômage. Interrogée par i>TELE sur le régime spécial de ces travailleurs intermittents que le #Medef veut fondre dans le régime général, l’ex-candidate à la présidentielle a répondu : « la culture n’est pas déficitaire, elle rapporte énormément à un pays comme la France ». Donc « on sauve les intermittents, mais peut-être qu’on peut leur demander des tâches ».

    « Faisons du gagnant-gagnant », a proposé Ségolène Royal. « Il y a une soif de culture dans les écoles, les collèges, les lycées. Pourquoi est-ce que les intermittents, en #contrepartie de leur #indemnisation, n’interviendraient pas dans le système scolaire » ou « dans les maisons de retraite », pour "répondre à la « démocratisation d’accès à la culture ? »

    En 2007, elle était - comme d’autres #socialistes - favorable au projet de #RSA de Sarkozy.

    Une analyse critique du RSA en décembre 2008, peu après son instauration : Nous sommes tous des irréguliers de ce système absurde et mortifère
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4124

    Pour le rendre plus « efficace pour l’emploi ». Le PS prévoit de « #réformer » ce minima cette année….

    #archives_en_ligne

  • Pacte de responsabilité : Montebourg réclame 2 millions d’emplois en contrepartie
    http://www.lemonde.fr/politique/article/2014/01/16/montebourg-qualifie-le-gouvernement-de-social-patriote_4349401_823448.html

    Le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, est intervenu dans le débat qui s’est ouvert après les annonces de François Hollande, en estimant que le pacte de responsabilité devait être compensé par la création par les entreprises de 1,8 million d’emplois sur les cinq prochaines années.

    « Pour ramener le taux de chômage à 7 % d’ici à 2018 [le niveau de l’Allemagne et des Etats-Unis], il faudrait créer 1,8 million d’emplois au cours des cinq prochaines années. Est-ce que nous pouvons, avec les propositions de baisse de charges faites par le président de la République, y arriver ? Nous le croyons. »

    Le Medef avait jugé possible de créer un million d’emplois en échange d’une baisse de 100 milliards d’euros des prélèvements sur les entreprises, moitié sur le coût du travail et moitié sur la fiscalité. Mais l’organisation patronale refuse « des engagements juridiques écrits » d’embauches, et se contente d’avancer le chiffre de un million d’emplois créés, un chiffre jugé insuffisant par M. Montebourg.

    « La nation aujourd’hui, dans le Pacte de responsabilité, exige un échange de concessions réciproques », a ajouté M. Montebourg. « Il est nécessaire que les entreprises qui vont se sentir soutenues et épaulées par la nation toute entière acceptent de s’engager vers des embauches substantielles ».

    #économie
    #Pacte-de-responsabilité
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    #embauches
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    #coût-du-travail
    #fiscalité