• Anselm Jappe - Sous le soleil noir du capital - Canal Sud
    https://www.canalsud.net/anselm-jappe-sous-le-soleil-noir-du-capital

    Rencontre avec Anselm Jappe autour de son livre Sous le soleil noir du capital, Chroniques d’une ère de ténèbres, paru aux éditions Crise et critique. La rencontre est modérée par Clément Holms.

    Le 15 février 2022 à la libraire Terra Nova

    Le capitalisme, ce n’est pas uniquement « les capitalistes » : c’est avant tout une totalité sociale, l’ensemble des relations, déterminées par le capital et sa logique propre, qui structurent la vie moderne. Aussi doit-il être analysé et combattu dans sa totalité. La critique de la valeur, depuis plus de trente ans, s’emploie ainsi à montrer que le projet de l’émancipation sociale n’a rien à voir avec une gauche alter-capitaliste et alter-étatiste qui n’a finalement cherché aménager le désastre.
    Les essais réunis dans ce livre étayent cette critique radicale par l’examen d’un certain nombre de questions d’actualité : la littérature, la simplicité volontaire, le culte du Marquis de Sade, les musées, l’art contemporain, l’architecture, l’anticapitalisme tronqué, le romantisme révolutionnaire, l’importance de William Morris, le mythe du bandit de Lacenaire à Jacques Mesrine. Autant de thèmes qui permettent à Anselm Jappe de rappeler les fondements de la critique de la valeur, et de redéfinir des concepts essentiels tels que l’aliénation, la réification et le fétichisme en confrontant leur sens chez Marx, Lukács et Adorno.

    https://www.canalsud.net/IMG/mp3/radiolivres_jappes_150222_terranovatoulouse_radiodif.mp3

    #audio #radio #Canal_Sud #Anselm_Jappe #critique_de_la_valeur #wertkritik #capitalisme #travail

  • Société du travail et gouffre énergétique, par Sandrine Aumercier
    http://www.palim-psao.fr/2022/03/societe-du-travail-et-gouffre-energetique-par-sandrine-aumercier.html

    Mais comment se fait-il qu’une société plus techniquement avancée que l’Europe au Moyen Âge, telle la Chine, n’ait pas initié de révolution industrielle ? Les historiens débattent depuis longtemps pour expliquer ce phénomène, mais rares sont ceux qui font remarquer que cette question ethnocentrique suppose de faire de l’histoire européenne la mesure de toutes les autres, qui sont alors interprétées comme déficitaires [4]. L´Europe est en fait le lieu d’apparition contingent d’une forme sociale sans précédent, ce qui ne veut pas dire qu’elle était inéluctable. Elle ne diffère pas des autres par sa moralité ou son immoralité (la majorité des autres sociétés étant également dominatrices, exploiteuses et inégalitaires), ni par une ingéniosité exceptionnelle (puisque bien des techniques que l’Europe croit avoir inventées sont en fait attestées ailleurs), mais par rapport aux buts collectifs qu’elle s’est donnés. La multiplication abstraite de l’argent devient le moteur de la vie sociale, chose impossible sans l’instauration du travail comme médiation universelle, agrégeant des quantités toujours plus importantes de forces productives en vue de créer de la valeur. Ce processus se déroule sur un marché de concurrence auquel plus personne ne peut échapper une fois que le capitalisme est développé ; chacun se trouve alors dans la position des coureurs athlétiques présentée au début : chacun est obligé de courir et de glorifier cette course, le plus souvent sans savoir pourquoi.

    #Sandrine_Aumercier #critique_de_la_valeur #wertkritik #énergie #capitalisme

    • C’est pourtant ce que propose la totalité du spectre politique et idéologique actuel : libéraux techno-optimistes, écologistes socio-démocrates, ou écosocialistes néo-léninistes convertis aux « énergies renouvelables ». Même si peu en conviennent, tous ont déjà indirectement adopté le fonds de commerce du transhumanisme libertarien, qui est la reprogrammation intégrale du monde physique dans l’espoir de maîtriser l’entropie de la civilisation dite thermo-industrielle. Or les impasses de cette civilisation sont insurmontables sans une « rupture ontologique » (#Robert_Kurz) avec ses catégories fondamentales.

      Il fallait vraiment un Robert Kurz pour nous appeler à une « rupture ontologique » avec le technocapitalisme :

      Dans l’utopie capitaliste une fois réalisée, le fait de faire valoir les émotions et nécessités humaines les plus élémentaires, ainsi que la raison pragmatique primaire, dans le rapport avec le monde sensible perceptible [sic !], furent aussi nommés : utopie . [...] Pour ne citer que quelques exemples : il est devenu [...] utopique également de « travailler » moins que les paysans du Moyen Age en utilisant des réseaux et robots microélectroniques qui réalisent la plus grande économie de travail de tous les temps.

      Extrait du livre de Robert Kurz, Lire Marx. Les textes les plus importants de Karl Marx pour le XXIe siècle, La Balustrade, 2002, pp. 363-371 (publié en Allemagne en 2000).

      http://www.palim-psao.fr/article-criteres-de-depassement-du-capitalisme-par-robert-kurz-69203406.h

      Kolossale #cuistrerie !!!

  • La convivialité selon Ivan Illich
    https://topophile.net/savoir/la-convivialite-selon-ivan-illich

    La convivialité est sur toutes les lèvres et dans tous les vœux. Tout le monde pense la connaître. Et pourtant, ce goût, ce caractère, cet état est bien plus subversif qu’il n’y paraît. Thierry Paquot explore cette notion ô combien existentielle, de Brillat-Savarin à Ivan Illich. À la différence de la commensalité, « La convivialité n’homogénéise... Voir l’article

    • La radicalité du changement qu’exige la société conviviale effraie certainement de nombreuses personnes attirées par une alternative « douce », se contentant d’une ambiance « bon enfant » et hésitant à rompre définitivement avec le monde enchanté de la marchandise. Il y a donc deux convivialités, l’une qui se veut « sympathique » et l’autre, plus exigeante, qui réclame un « art de vivre » caractérisé par la survie, l’équité et l’autonomie créatrice, trois attitudes qui, réunies, dépassent largement ce que chacune promet. Là, le « monopole radical » (l’école pour apprendre, l’hôpital pour se soigner, les transports publics pour se déplacer…) et les « professions mutilantes » s’effacent, laissant la place à l’auto-organisation décentralisée de petits groupes.

      […]

      Il annonce d’emblée qu’il a choisi le terme de « convivialité » en opposition à celui de « productivité ». « Je veux dire par là, précise-t-il, des rapports autonomes et créateurs entre les personnes d’une part et des rapports entre les personnes et leur environnement d’autre part. Ceci s’oppose à la réponse conditionnée et efficace des personnes aux exigences de leur entourage et de leur cadre de vie. Je considère que la convivialité, c’est la liberté individuelle réalisée dans une interdépendance mutuelle et personnelle, et ayant, comme telle, une valeur éthique intrinsèque. Je crois que sans convivialité la vie perd son sens et les hommes dépérissent. »

      […]

      « J’entends par convivialité l’inverse de la productivité industrielle. Chacun de nous se définit par sa relation à autrui et au milieu et par la structure profonde des outils qu’il utilise. Ces outils peuvent se ranger en une série continue avec, aux deux extrêmes, l’outil dominant et l’outil convivial. Le passage de la productivité à la convivialité est le passage de la répétition du manque à la spontanéité du don. » Ivan Illich dénonce également celles et ceux qui, sans récuser la productivité, en appellent à des droits des consommateurs, qui à ses yeux, sont des droits à détruire l’environnement et surtout à s’autodétruire.

      […]

      « En 1971, quand j’ai commencé à écrire La Convivialité et à parler de seuils multidimensionnels au-delà desquels l’humain s’efforce de devenir destructeur du mode de vie, je me suis effondré. C’était la première fois de ma vie que je me trouvais dans cet état que l’on appelle ‘dépression’. Je ne crois pas que j’aurais continué à écrire si j’avais tenu un fils de ma propre chair dans mes bras. (…) Je pense qu’il est indispensable, pour pouvoir penser et réfléchir, pour avoir des idées claires et précises et les exprimer avec des mots significatifs et sensuels, de savoir que nous n’avons pas de futur. »

      Cette conscience de l’impossibilité d’orienter le cours des choses, du fait de la toute-puissance du « système technique », explique l’absence de « mesures politiques » que beaucoup de ses lecteurs attendaient. L’ampleur de ce qu’il découvre le désole : l’être humain n’aurait-il plus d’autonomie ? Serait-il condamné à obéir volontairement à des institutions qui le dépossèdent de toute initiative émancipatrice ? Il admet ne pas rejoindre « ceux qui dansent la danse de la pluie », ces écologistes qui croient en « la responsabilité », tel Hans Jonas, qu’Ivan Illich traite d’« illusionniste ».

      La question « Que faire ? », lui semble déplacée : « Nous sommes foncièrement impuissants et nous ne discutons que parce que nous essayons de trouver des moyens de renforcer nos amitiés naissantes avec des personnes qui pourraient, avec nous, comprendre leur propre impuissance et l’impuissance collective. »

      […]

      C’est dans de nouveaux entretiens en 1997 et 1999 qu’Ivan Illich confirme à David Cayley le passage à l’échelle mondiale de « l’âge des outils » à « l’âge des systèmes » vers 1980. Or, ses premiers écrits étaient antérieurs à ce passage. Ils décrivaient des situations technologiques nées principalement en Occident à partir du XIIe siècle. Après avoir examiné les « outils » (entendus comme des « moyens » pour des « fins » précises) et découvert que certains devenaient « contre-productifs » passés un certain seuil, Illich avait étudié leurs effets matériels, puis, plus tardivement leurs effets symboliques, jusqu’au moment où il comprit que les « outils » étaient dépossédés de leur intention humaine par leur entrée dans un système qui, de fait, les subordonnait à une autre logique.

      […]

      Néanmoins, ils expriment bien le désarroi dans lequel se trouve alors Ivan Illich qui n’imaginait pas vivre ce moment au cours duquel les systèmes techniques viendraient submerger l’univers des « outils » (institutions comprises) et entraver toutes possibilités d’autonomie. En effet, les systèmes techniques, qui semblent œuvrer pour eux-mêmes, ne laissent guère de marge de manœuvre à celles et ceux qui veulent s’en émanciper ou en inverser les buts…

      […]

      On peut regretter une telle approche individuelle de la lutte contre le système technique, mais Ivan Illich, ne se sentait pas de poids pour le combattre. Il ne voyait que des actions modestes, clairsemées, sporadiques, effectuées par des petits groupes, qui en un lieu circonscrit, inscriraient leurs pas dans leurs biographies, c’est la définition qu’il donne de l’art d’habiter. Ces tentatives d’autogestion, de décentralisation, de coopération, dans tous les domaines de la vie quotidienne de chacune et chacun, leur permettront d’échapper à la tyrannie des systèmes techniques, à l’appauvrissement de leur monde en procurant la satisfaction de vivre convivialement à quelques-uns. Pendant ce temps, les énormes systèmes techniques démesurés tomberont en panne, dysfonctionneront, les modes de vie qu’ils ont conditionnés ne satisferont personne et seront contestés, des guerres pour l’obtention de ressources non renouvelables feront d’irréparables dégâts, des pandémies seront impossibles à endiguer et des famines naîtront de la raréfaction de l’eau, de la surpopulation, de la déforestation et des canicules, etc.

      #Ivan_Illich #philosophie #convivialité #anti-industriel #critique_techno #écologie #autonomie #système_technicien #institutions

  • Publicité automobile : les mentions écologiques vont-elles changer les comportements ?
    http://carfree.fr/index.php/2022/03/04/publicite-automobile-les-mentions-ecologiques-vont-elles-changer-les-comport

    À compter du 1er mars prochain, les #publicités pour les voitures auront l’obligation de faire mention d’un message en faveur d’alternatives parmi les trois suivants : « Pour les trajets courts, privilégiez la Lire la suite...

    #Fin_de_l'automobile #critique #dépendance #psychologie #sociologie

  • Dwight Macdonald, La Bombe, 1945
    https://sniadecki.wordpress.com/2022/02/21/macdonald-bombe-fr

    1. Les notions de « guerre » et de « progrès » sont désormais dépassées.
    2. L’absurdité de la guerre moderne est désormais évidente. Ne doit-on pas en conclure, avec Simone Weil, que c’est la dimension technique, et non plus politique, de la guerre qui représente le mal absolu ?
    3. La bombe est le pur produit du type de société que nous avons créé. Elle incarne l’American Way of Life exactement au même titre que le réfrigérateur, le banana split et la voiture à boîte automatique.
    4. Ceux qui usent d’un tel pouvoir de destruction se retranchent du reste de l’humanité.
    5. Nous devons briser l’État avant qu’il ne nous brise.

    #Dwight_Macdonald #bombe_atomique #Hiroshima #États-Unis #guerre #science #progrès #way_of_life #critique_techno

  • Les biais de confirmation sont de puissants moteurs du #complotisme | Slate.fr
    http://www.slate.fr/story/223149/biais-confirmation-cognitifs-complotisme-cerveau-anti-vaccins

    « C’est fascinant de voir à quel point notre subjectivité nous aveugle… Les biais cognitifs sont des mécanismes de pensée qui raccourcissent notre réflexion, par gain de temps, quand on est confrontés à des situations qui se ressemblent, et expliquent les amalgames qu’on va effectuer. Il est intéressant de noter que notre cerveau y a recours pour conserver son énergie. Clairement, il est beaucoup plus simple de ne jamais remettre ses idées en cause, et de les considérer comme vérités. Tous ces mécanismes se jouent lorsqu’on est sûr de quelque chose et, comme par magie, nous allons surestimer tout ce qui va confirmer notre théorie et sous-estimer tout ce pourrait l’infirmer. » — (...)

    #critiquedelinfo #neuroscience #psychologie

  • Mon pays à l’ère nucléaire
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?article1639

    La commission européenne qui est toute-puissante, vient par un pur acte de langage, mais hautement performatif, de transformer l’énergie nucléaire en énergie « verte » et « durable ». Une toute-puissance et une performativité que l’on n’avait pas vues à l’œuvre depuis la profération divine « - que la lumière soit ! » - à laquelle, nul n’est tenu de croire. Le public a appris à cette occasion l’existence et le sens du mot « taxonomie » qui désigne « la science des lois de la classification ». Des lois évidemment évolutives, en fonction des évolutions de ceux qui les formulent. Penser/classer a condensé Georges Pérec dans un bref essai (1985). La Commission européenne ayant le pouvoir de classer, a également celui de faire penser selon ses lois. C’est du moins son but comme le montre Debord dans ses Commentaires (...)

    #Documents
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/provence_nucle_aire.pdf

  • Voitures et cigarettes
    http://carfree.fr/index.php/2022/02/02/voitures-et-cigarettes

    Une boîte métallique coûteuse et hautement sophistiquée et quelques feuilles séchées enveloppées dans du papier blanc. À première vue, elles n’ont pas grand-chose en commun. Mais quand on réfléchit à Lire la suite...

    #Uncategorized #critique #dépendance #drogue #industrie #marketing #psychologie #publicité #société

  • Pourquoi les automobilistes détestent les voitures
    http://carfree.fr/index.php/2022/01/31/pourquoi-les-automobilistes-detestent-les-voitures

    Quand j’étais petit, nous avions un charmant voisin aux cheveux blancs qui était toujours joyeux et amusant avec nous, les #enfants. Appelons-le Robert, car c’était son prénom. Mon école se Lire la suite...

    #Fin_de_l'automobile #Insécurité_routière #agressivité #critique #société #témoignage #violence #volkswagen

  • Tri de l’information et #enseignement de l’esprit critique : une carte pour s’y retrouver – Le Cortecs
    https://cortecs.org/secondaire/tri-de-linformation-et-enseignement-de-lesprit-critique-une-carte-pour-sy-r

    Julien Machet est professeur de Sciences Physiques et Chimiques dans l’académie de Lyon. Travaillant en collaboration avec le CORTECS et notamment notre collègue Denis Caroti depuis plusieurs années, il forme également les enseignants sur la thématique « Analyse de l’information et esprit critique ». Par ailleurs, il développe dans ses cours un enseignement de l’esprit critique incorporé à ses contenus disciplinaires. Julien a ainsi créé une carte conceptuelle à destination des élèves (et des enseignants), permettant de visualiser rapidement les outils méthodologiques d’analyse de l’information. Il nous présente ici la genèse de cette carte, ses objectifs ainsi que son contenu et ses réflexions sur ce sujet. Bien entendu, cet outil mérite d’être encore amélioré et adapté, mais c’est une base utile, fruit (...)

    #critiquedelinfo

  • Homéopathie, biodynamie... Comment les zététiciens bataillent contre les pseudosciences - L’Express
    https://www.lexpress.fr/actualite/sciences/homeopathie-biodynamie-comment-les-zeteticiens-bataillent-contre-les-pseudo

    Sur Internet, des croisés de la rationalité luttent contre #fakenews et charlataneries en prônant l’esprit critique. Quitte à se faire accuser d’être des suppôts de l’industrie. — Permalien

    #critiquedelinfo #science

  • L’absence de consensus sur la véracité des faits met en danger la santé publique (carte blanche) - Belgique - LeVif
    https://www.levif.be/actualite/belgique/l-absence-de-consensus-sur-la-veracite-des-faits-met-en-danger-la-sante-publique-carte-blanche/article-opinion-1517881.html

    Une société sans consensus sur ce qui est vrai est-elle possible ? Cette question se pose depuis le début de la pandémie de SARS-CoV-2 qui s’est caractérisée par une véritable « infodémie », une épidémie de fausses informations, parfois relayées par les décideurs politiques eux-mêmes. En santé publique, cette infodémie a fait presque autant de dégâts que les infections par le virus lui-même, estiment plusieurs chercheurs.

    -- Permalien

    #complotisme #science #médias #désinformation #critiquedelinfo

  • Deux mots des morts - sur le Manifeste conspirationniste
    http://mathieupottebonneville.fr/2022/01/26/1717

    22 janvier. – Page 1 on peut lire : « La mise en scène d’une meurtrière pandémie mondiale, « pire que la grippe espagnole de 1918 », était bien une mise en scène. Les documents l’attestant ont fuité depuis lors ; on le verra plus loin. Toutes les terrifiantes modélisations étaient fausses.«  . Suit une allusion au refus gouvernemental de considérer d’autre traitement que biotechnologiques (on croit reconnaître, perdu dans une allusion suffisamment faux-cul pour être inattaquable, le profil de médaille de Didier Raoult). On se pince, on tâche de se rassurer, évidemment ça ne durera pas, c’est une préface clickbait, l’ordinaire protestation amphigourique et générale dans le style grand siècle prendra le relais, mêlant rappel des infamies d’époque à l’air d’en savoir long, mais tout de même : on en sera passé par là, par la double négation consistant à réduire la pandémie à une mise en scène et à s’en détourner sitôt qu’elle aura joué son rôle de captatio benevolentiae, parce que compte moins au fond la vie et la mort des figurants de cette mise en scène (on songe aux brésiliens, aux tunisiens, aux 120000 disparus d’ici) que leur aptitude à servir de marchepied pour pérorer à leur place.

    Qu’une part de la gauche soit incapable de penser ensemble la pleine réalité de la crise sanitaire et la critique circonstanciée des effets d’aubaine autoritaires qu’elle représente ne fait pas honneur à son intelligence du présent.

    Que le torchon histrionique dont même le Comité invisible s’est vite démarqué ne se perçoive pas comme ce qu’il est, objectivement eugéniste (s’énoncant au nom de « tout ce qui ose encore respirer, les jeunes les pauvres, les dansants, les insouciants, les irréguliers ») n’étonne guère.
    Qu’il ait trouvé à se loger chez un grand éditeur est tout simplement consternant.
    25 janvier. — « Mais tu ne peux pas critiquer le livre en ayant lu seulement ces vingt-cinq premières pages ! »

    Il me semblait, à moi, que vingt-cinq suffisaient, que s’infuser dans la foulée trois cent cinquante pages de l’habituelle tambouille n’était pas indispensable, mais bon : puisqu’il fallait j’ai lu, du coup.

    Pas encore lu

    https://seenthis.net/messages/944728

    #conspirationnisme #covido-négationnistes

    • Le style conspirationniste
      https://www.en-attendant-nadeau.fr/2022/01/26/manifeste-style-conspirationniste

      Un tableau apocalyptique et halluciné du monde entier, mais aussi des âmes, dont l’objectif semble de provoquer une peur panique. On entend souvent que notre époque est livrée au complotisme. Si cela est le cas, voici le livre qu’elle mérite. Mais comment ce Manifeste conspirationniste fonctionne-t-il

    • Sur la soie des mers
      @Acrimonia1

      J’ai pu jeter un premier oeil sur le Manifeste Conspirationniste, en attendant plus exhaustif, déjà on y apprend que le Covid est une « divine surprise » (le choix de reprendre des mots de Maurras, le choc des photos : essentiellement des mêmes même pas drôles de conspi minables)Et puis, en accord avec la matrice complotiste telle que Vidal Naquet la décrit dans Les assassins de la mémoire : au fil des pages, la pandémie n’existe pas, le virus n’est rien et il a été fabriqué dans une optique contre insurrectionnelle dans les pires labo des technosciencesL’incohérence n’est pas un problème, ça doit être ça « rendre la vérité maniable comme une arme selon le conseil de Brecht » qui comme Kafka, Deleuze, Foucault et tous les poètes du XIXème siècle était conspis comme chacun peut le découvrir dans ce livre plein de scoops...et puis la planche de salut pourrie qui aurait pu éviter de couler complètement, le complot c’est l’Etat et la conspiration c’est la révolution, se retrouve plombée dès le début par un brouillage sciemment orchestré des deux termes, finalement interchangeables et équivalents

    • Les philosophes sont en guerre !

      – Philippe Corcuff attaque Pierre Tenne.

      Extrême droite : l’élégance méconnaissante de Pierre Tenne dans En attendant Nadeau !
      https://blogs.mediapart.fr/philippe-corcuff/blog/030621/extreme-droite-l-elegance-meconnaissante-de-pierre-tenne-dans-en-att

      – Pierre Tenne critique Lordon.

      Pour une nouvelle théorie de la valeur
      https://www.en-attendant-nadeau.fr/2018/11/06/nouvelle-theorie-valeur-lordon

      J’attends avec impatience Lordon critiquant le grand penseur Mathieu Potte-Bonneville ! :)))

      #Critique-de-la-critique #gauche-intellectuelle

      La pandémie de Covid-19, une extraordinaire matière à penser qui bouleverse la philosophie politique
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/06/05/la-pandemie-de-covid-19-une-extraordinaire-matiere-a-penser-qui-bouleverse-l

      Enquête - Si elle a accentué les clivages chez les intellectuels critiques, la crise sanitaire due au coronavirus a aussi révélé le tournant écopolitique de la pensée française et l’émergence d’une nouvelle génération de théoriciens.

      Ainsi un virus mondialisé aura-t-il mis à l’arrêt le monde entier. Le local aura affecté le global et précipité l’avènement de sociétés sans contact où prime la distanciation sociale. La sidération aura provoqué, au cœur même des démocraties, une myriade d’états d’urgence sanitaire et de lois d’exception. Le grand confinement aura succédé à l’ère du consentement. Et, tel un voile non plus islamique mais hygiénique, le port du masque se sera imposé en Occident.

      Malgré le retour du tragique et la débâcle économique, en dépit de l’atmosphère de libération liée au déconfinement des populations, cette crise sanitaire est aussi une extraordinaire matière à penser. Pourtant, tous les intellectuels ne sont pas parvenus à passer du réflexe à la réflexion. Car beaucoup ont trouvé dans cette pandémie une façon assez convenue de confirmer leurs idées, théories, opinions ou points de vue.

      Ainsi a-t-on vu se déployer une critique attendue du « bougisme », du « mondialisme » et de la « société liquide ». De même a-t-on assisté au grand concert des causalités uniques, comme la « nature » (malmenée, donc vengeresse), la « souveraineté » (oubliée, donc impérieuse) ou le « capitalisme » (débusqué jusque dans les marchés traditionnels chinois). Sans oublier les solutions attenantes, comme le nationalisme (étatique et sanitaire), les barrières (hygiéniques et douanières, mais également identitaires), les frontières (nationales, mais aussi psychosociales), la révolte (nationale-populiste), la révolution (sociale-populaire), ou bien encore l’insurrection (qui viendrait enfin).

      Dans ce processus d’autoconfirmation qui affecte le monde politique et intellectuel, « chacun déroule son programme spécifique en y voyant à la fois l’explication (je vous l’avais bien dit) et la solution (la mienne) : l’écologie pour les écolos, le féminisme pour les féministes, le libéralisme pour les libéraux, la nation pour les nationalistes », analyse le sociologue Didier Lapeyronnie. A tel point que certains observateurs, comme Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération, y ont vu les signes d’une « pensée confinée ».

      La pensée confinée, c’est la pensée confirmée par les événements. Elle est indissociable de l’idéologie qui soumet la réalité à la logique d’une idée. Il n’est pas jusqu’à la focalisation quasi immédiate de la presse et de l’intelligentsia sur « le monde d’après » qui ne soit pas le signe d’une difficulté, voire d’une incapacité à penser l’événement. Car penser l’événement, c’est être capable de saisir le surgissement de l’inédit par la réforme de son entendement.

    • Et pour les Fans un colloque :
      https://alter.univ-pau.fr/fr/activites-scientifiques/manifestations-scientifiques/colloques/colloque-creer-le-present-imaginer-l-avenir.html
      Le présent au prisme de la pandémie de covid-19 : contours d’une communauté d’époque.

      Cela a beaucoup été dit, la pandémie que nous traversons est sans doute, à bien des égards, un extraordinaire révélateur des faiblesses et des misères de nos sociétés européennes et mondialisées. Osons qu’elle figure également de manière plus radicale (et avec une force certaine) toute l’angoisse de notre temps, celle d’un présent forclos (« tout est pareil en pire », « demain sera pire qu’hier »), où le désastre en cours est désormais (aussi) rendu sensible dans les images des rues désertes, des agoras vidées de leurs forces vives, et des morts qui s’amoncellent, et finissent par faire partie du décor (« l’ordre ordinaire de la mort ordinaire », écrit J. Andras). On pourrait dire qu’on ne glisse plus à la surface des choses, et que, comme par un approfondissement du regard, ce qui se donne à ressentir dans ce moment si oppressant (et oppressif) de réclusion, d’égarements et de souffrances accrues, donne peut-être la mesure de l’épuisement et de l’asphyxie contemporaines. Deux métaphores qui ont ces derniers temps retrouvé une force sensible inouïe, et suffiraient presque à tracer les contours d’une sorte d’exigence commune de la pensée, ou d’une communauté d’époque, dans l’urgence et l’élan retrouvé « d’ouvrir et de déployer des possibilités de vie nouvelles » : ce qui est aussi le cœur du sursaut éthique tel que le définit Paul Audi (dans l’immanence absolue de la subjectivité) et qu’on retrouve au fondement de sa puissante « esth/éthique » de la création qui replace l’activité créatrice au centre de la vie, où doit se jouer l’accroissement de nos puissances d’agir. Un formidable enjeu éthique pour la philosophie et la littérature contemporaines dont le rapport au monde (et à l’agir) se pose et s’éprouve aujourd’hui dans des termes nouveaux, où de « nouvelles urgences catégoriques » (F. Lordon) imposent aussi des formes, des poétiques, des pensées et des propositions nouvelles : de nouvelles dissidences dont le présent appel se donne pour tâche d’explorer la puissance de questionnement, d’intervention et de reconfiguration utopique (ou hétérotopique) du partage du sensible.

    • Quand l’extrême gauche comprend que le conspirationnisme est la nouvelle intelligence politique

      Ils ont fini par se rendre à l’évidence que ce que le Système interdit est la bonne voie, mais ils y ont mis le temps. Voici que l’extrême gauche française, incarnée non par le ridicule Besancenot, mais par Julien Coupat et ses amis, admet le conspirationnisme, au sens que lui donne le Système, c’est-à-dire la pensée politique interdite, la pensée politique profonde, celle qui s’enfonce au cœur du Système pour le comprendre et en dévoiler la stratégie. Une pensée 3D que L’Express, logiquement, en bon chien de garde, dénonce, en citant avec ironie la 4e de couverture du livre de la bande à Coupat :

      Une couverture noire, un titre choc, un éditeur prestigieux, une quatrième de couverture dont la grandiloquence prête à sourire ("Nous vaincrons parce que nous sommes plus profonds"), mais des auteurs masqués. Défendant une vision complotiste qui se veut de gauche, le Manifeste conspirationniste doit paraître le 21 janvier aux éditions du Seuil.

      Ça leur prête peut-être à sourire, mais en vérité, ça les inquiète, parce que la gauche, en 40 ans, avait été dévitalisée et transformée en gauchisme, cette manière d’être contre le Système, en apparence, tout en étant pour, au fond. C’est ce qui a piégé des millions d’électeurs des classes populaires, et aussi de la classe moyenne, qui se réveillent aujourd’hui, parce qu’ils sont en train de tout perdre : et leurs leaders, et leurs partis, et leurs syndicats, bref, leurs défenseurs. Et leur niveau de vie, accessoirement.

      Le peuple est orphelin, et c’est sa chance historique, celle de se créer de nouveaux leaders, de nouvelles organisations.

      Le constat que font Coupat et ses amis, nous l’avons fait dès le début de l’ épidémie de psychose , parce qu’il s’agissait de cela. Avec une arrière-pensée de re-domination politique.

      « Nous sommes conspirationnistes, comme tous les gens sensés désormais. Depuis deux ans que l’on nous balade et que nous nous renseignons, nous avons tout le recul nécessaire pour départager “le vrai du faux”. Les ridicules auto-attestations que l’on a prétendu nous faire remplir avaient bel et bien pour but de nous faire consentir à notre propre enfermement et de faire de nous nos propres geôliers. Leurs concepteurs s’en félicitent à présent. La mise en scène d’une meurtrière pandémie mondiale, “pire que la grippe espagnole de 1918”, était bien une mise en scène » peut-on lire en préambule. »_

      L’extrême gauche a mis deux ans à se réveiller, quand même, abusée qu’elle a été par les agents du Système, rompus à toutes les stratégies d’étouffement et de récupération, voir la fin gauchiste des Gilets jaunes .

      L’Express poursuit sa dénonciation en opposant au constat lucide les presque 6 millions de morts du covid... Et si on parlait des millions de morts du tabac ou de l’alcool dans le monde ? Ils sont 8 millions chaque année à crever de la cigarette, mais le narratif ne suit pas, évidemment. Les morts, les malades, l’oligarchie n’en a rien à foutre. La preuve, la bande néolibérale qui a mis la main sur l’État, en pleine pandémie supposée, supprime lits et effectifs !

      « L’acharnement furieux à balayer tout traitement qui n’impliquerait pas d’expérimenter des biotechnologies sur des populations entières, réduites à l’état de cobaye, avait quelque chose de suspect. Une campagne de vaccination organisée par le cabinet McKinsey et un “pass sanitaire” plus loin, la brutalisation du débat public prend tout son sens. C’est sans doute la première épidémie mortelle dont il faut convaincre les gens qu’elle existe. »
      Les 5,5 millions officiellement morts du Covid (selon l’Organisation mondiale de la santé, le bilan pourrait être deux ou trois fois plus élevé) ? Une manipulation statistique destinée à accélérer l’agenda néolibéral , si l’on croit cet ouvrage.

      Mais non, il n’y a pas d’agenda, voyons... L’extrême gauche, qui a été roulée dans la farine depuis la fin des années 70, et précisément par la rouerie d’un Mitterrand, qui s’en est attaché les services, pour mieux en faire la collaboratrice – voire la putain ou le flic – du virage néolibéral, c’est à la fois Besancenot, les antifas, et Julien Coupat. Il y a donc plusieurs pièces dans la maison du seigneur gauchiste, et elles ne se valent pas toutes. On met de côté Poutou, qui est un clown. Seule Nathalie Arthaud s’en sort, parce que la base conceptuelle léniniste tient la route, même si elle jure avec la France d’aujourd’hui. Une révolution bolchevique en 2022 est une option peu crédible. Mais si le capitalisme financier va trop loin...

      L’Express tente tant bien que mal de limiter la casse, mais la lucidité finit aussi par monter aux cerveaux des gauchistes, du moins de ceux qui sont encore en état de marche, parce que la réalité devient trop évidente ! Quant au contre-complotisme, il en est réduit à nier les évidences, nier le réel, ce qui est le plus sûr moyen de couler idéologiquement, voir l’autodestruction de la gauche dite de gouvernement. Il ne reste alors plus que la force et la répression pour imposer ses idées malfaisantes.

      Le texte recycle des éléments qui font fureur dans la complosphère. En 2019, le Centre Johns Hopkins, financé par la fondation Bill et Melinda Gates ou le forum économique de Davos, a organisé l’Event 201, un exercice de simulation d’une pandémie de coronavirus. Ce serait là une des « preuves » que l’élite avait bien planifié cette crise sanitaire. Selon les auteurs, le timing de la pandémie ne devrait d’ailleurs rien au hasard. Au vu des mouvements sociaux de 2019 à Hongkong, au Liban, en Catalogne, en Chili ou en Colombie, les « puissances organisées » ayant « intérêt au maintien de l’ordre mondial » auraient voulu « siffler la fin de la récréation ». Et pour littéralement confiner les populations, rien de mieux donc que de créer la frayeur à travers un coronavirus.

      On peut donc écrire que le complotisme intelligent de la droite nationale, ou même d’E&R, a contaminé la partie la plus sérieuse, celle qui réfléchit sans œillères, de l’extrême gauche, et elle est compatible, sur cette base d’accord, avec le populisme intellectuellement avancé, dont nous sommes. Naturellement, la bande à Coupat n’adhérera pas à E&R, mais des programmes communs se profilent, dans une France dystopique, certes morcelée, et à dessein, mais qui se reconstitue, qui se ressoude face à l’adversité. C’est la réconciliation du national et du social. Et l’on voit se dessiner des passerelles entre les deux extrêmes, mais c’est encore une terminologie-Système. En vérité, les pensées avancées sont toujours extrêmes.

      edit le sigle le répète, c’est la boutique du dangereux crétin enrichi Alain S0R@L

    • Tu ne dis pas d’où vient ta citation @colporteur (même sans lien pour pas faire de pub).

      Et puisqu’on me faisait reproche de dénoncer d’abord, dans cette affaire, l’absence de toute mention des morts et la déréalisation radicale de l’épidémie sous son interprétation politique, comme on en était restés là bah je les ai cherchés, les morts. […] J’ai même cherché, tenez, leurs occurrences dans le texte. Où t’as mis le corps, c’est toujours une question intéressante à poser. […]

      – Il est fait mention des morts du fait de la vaccination, aux 18e et 19e siècle, en bref des morts du vaccin (pages 202 et 204)

      – Il est fait mention de deux morts par administration d’anthrax, en bref des morts d’autre chose (page 53)

      – Il est fait mention de la surestimation du nombre de morts par les modèles projectifs, en bref des morts en moins (page 135, page 245)

      – Il est fait mention de l’usage de la psychologie sociale pour manipuler les consciences dans la représentation des morts, en bref des morts hallucinés (page 143)

      – Il est fait mention des vieux en EHPAD morts… de solitude (page 243)

      – Il est fait mention (c’est sans doute ma mention préférée) des « morts-vivants » page 211, en bref des morts pas morts, je vous donne le contexte : « l’Occident a fini par adopter une existence crépusculaire et à étendre indéfiniment les états de morts-vivants – malades à vie, immunodéprimés en sursis de cancer…« . (Les personnes immunodéprimées ou porteuses d’une maladie chronique apprécieront cette délicate énumération, où vibre un discret hommage à ce que le regretté Louis Pauwels appelait il y a longtemps le « sida mental » ; mais juger le livre eugéniste était, parait-il, excessif et la formule « la biopolitique, tyrannie de la faiblesse« , page 217, s’est sûrement glissée dans un chapitre par hasard)

      – Il est enfin, in extremis, fait mention des « morts que nous n’avons pas pu enterrer« . C’est, comme un remords, à la page 306 d’un ouvrage qui en compte 316. Mais on ne saura pas de quoi ils sont morts, les morts. Faut pas exagérer.

      J’arrête là la collecte de ce qu’il me semble difficile de ne pas lire comme un travail méthodique d’effacement

    • Pourquoi le Seuil publie-t-il un brûlot conspirationniste attribué à Julien Coupat ?

      Olivier Tesquet

      Le Seuil publie ce vendredi un pavé anonyme, vraisemblablement écrit par l’ancien meneur du groupe de Tarnac, qui légitime la paranoïa et alimente le risque confusionniste... Une “proposition politique originale”, défend la maison d’édition.

      C’est le mal du siècle autant que l’anathème de l’époque. Et voilà que certains en font une profession de foi. Ce vendredi, les éditions du Seuil publient un curieux « manifeste conspirationniste », épais et anonyme, couverture noire, lettrage blanc, postulat crépusculaire : « Dans un monde de paranoïaques, ce sont les paranoïaques qui ont raison. » En pleine crise de la vérité, qui peut ainsi sciemment choisir de se parer des atours du pyromane et convaincre une maison sérieuse de fournir la mèche ? Le Comité invisible, affirme L’Express. Nos sources précisent : après L’Insurrection qui vient (2007), À nos amis (2014) et Maintenant (2017), ce nouveau brûlot serait bien l’œuvre de « la même nébuleuse ingouvernable. » Et surtout de Julien Coupat, dont le nom reste lié à « l’affaire de Tarnac », sabotages de lignes de TGV en 2008 qui avaient donné lieu à un feuilleton judiciaire et politique très médiatisé. Désormais débarrassé de l’étiquette de « terroriste » à la suite d’une décision de la Cour de cassation, il reprend donc du service – sans le canal historique de son collectif autonome, qui s’est désolidarisé avant même la sortie du pamphlet – pour tenter d’imposer son magistère en complotisme à la gauche de la gauche.

      Ces trois cent soixante-dix-neuf pages verbeuses et contrariantes sont difficiles à restituer. Elles convoquent un cortège de prestigieux macchabées : Brecht (« La vérité doit être maniable comme une arme »), Machiavel (« Le mal doit se faire tout à la fois, afin que ceux à qui on le fait n’aient pas le temps de le savourer »), Kafka (« Nous vivons tous comme si nous étions des despotes »), Dick (« En toute franchise, nous estimons qu’il ne peut rien exister de plus dangereux qu’une société dans laquelle les psychopathes prédominent »). Mais aussi Foucault, Marx, Nietzsche, Freud, Adorno, Deleuze, Rimbaud, Baudelaire, Artaud, Pynchon ou Hegel, afin de démontrer que « les grands auteurs qui font chic dans les bibliothèques de livres jamais ouverts sont tous uniformément conspirationnistes. »
      La pandémie, vaste entreprise de manipulation ?

      L’état d’urgence sanitaire, les mesures de police, l’irrationalité de certaines décisions politiques, la corrosion des libertés publiques, tout ceci doit être rigoureusement ausculté. Mais Coupat va beaucoup plus loin. Il adopte une position authentiquement antivax, tantôt feutrée – il s’agirait de « se soustraire au parc humain » –, tantôt frontale – « La campagne mondiale de vaccination générale ne correspond à aucune rationalité médicale. Les “vaccins” dominants sont plus néfastes que le virus pour la plupart des gens, et n’immunisent pas contre la maladie en tant que telle. »

      Dans ce qui ressemble parfois à l’addendum étouffe-chrétien du capitalisme de surveillance décrit par Shoshana Zuboff, Coupat prend pour argent comptant les élucubrations des sciences comportementales, disqualifie tous les « fact-checkeurs » de la Terre – « qui veillent au sommeil prescrit » – et préconise un « great reset véritable », en référence à une théorie du complot popularisée par le documentaire Hold-Up. Il assure encore que « le désastre fait partie du plan » et que la crise sanitaire est « une expérience de management par l’incertitude. » Passant sous silence la réalité statistique de l’épidémie, il la réduit à une vaste entreprise de manipulation imprégnée d’exercices militaires, de programmes clandestins et de guerre froide, matrice de tous les maux. À le lire, nous serions toujours en plein dedans, comme prisonniers d’une opération pensée par la CIA...
      “Un livre qui va faire date, parce qu’il propose d’autres perspectives pour penser ce qui nous arrive.” Hugues Jallon, patron du Seuil

      Au téléphone, Hugues Jallon, le patron du Seuil, en est persuadé : « C’est un livre qui va faire date, tout simplement parce qu’il propose d’autres perspectives pour penser ce qui nous arrive. » Séduit par « une proposition politique originale, passionnante, intellectuellement structurée, même [s’il est] en désaccord avec certaines analyses », il a été convaincu par le pedigree des auteurs (sans révéler leur identité) et quelques échanges liminaires sur une messagerie privée. Aurait-il accepté de le publier sans savoir qui l’écrivait ? « Probablement pas. » Son titre ? « Une provocation à l’intelligence. »
      Se venger, mais de qui ?

      Le risque de procès en confusionnisme ? « Il existe. » Car au-delà du fond, il y a la forme. Ce manifeste ambitionne une offensive, Molotov à la main, pour reprendre à l’extrême droite un territoire du langage qu’elle a annexé de longue date. Peut-on se battre avec les mots de l’ennemi ? « L’extrême droite s’est bien appropriée celui de révolution, objecte-t-on au Seuil. Pourquoi ça ne fonctionnerait pas dans l’autre sens ? » L’argumentaire distribué à la presse insiste : le conspirationnisme serait « un réveil politique qu’il serait suicidaire de laisser » aux identitaires, à Zemmour ou à Le Pen. À l’entrée du dernier chapitre, le ton se fait volontiers imprécateur. « Nous voulons nous venger », peut-on lire en toutes lettres. Mais de qui, quand les complotistes voient le mal partout ?

      https://www.telerama.fr/livre/pourquoi-le-seuil-publie-t-il-un-brulot-conspirationniste-attribue-a-julien

    • 26 janvier. On m’apprend que le site Egalité et réconciliation, fédérant comme on sait les amis d’Alain Soral, a publié une critique louangeuse de l’ouvrage, suggérant que ce dernier laisse entrevoir un programme commun, et saluant la réconciliation du social et du national.

      Comme disait l’autre : It escalated quickly.

      Mathieu Potte-Bonneville

      merci @sombre

    • Mais non, il n’y a pas d’agenda, voyons... L’extrême gauche, qui a été roulée dans la farine depuis la fin des années 70, et précisément par la rouerie d’un Mitterrand, qui s’en est attaché les services, pour mieux en faire la collaboratrice – voire la putain ou le flic – du virage néolibéral, c’est à la fois Besancenot, les antifas, et Julien Coupat. Il y a donc plusieurs pièces dans la maison du seigneur gauchiste, et elles ne se valent pas toutes. On met de côté Poutou, qui est un clown. Seule Nathalie Arthaud s’en sort, parce que la base conceptuelle léniniste tient la route...

      Je m’en doutais, ces paroles ne pouvaient venir que du site Egalité et Réconcilation d’extrême droite, fondé par Soral !

      C’est Très Malin, faire un copier-collé du texte intégral de ces salopards de soraliens sans citer sa source, à la suite de celui de Potte-Bonneville pour pouvoir mieux discriminer l’extrême gauche afin de l’associer carrément à l’extrême droite.
      Merci @colporteur et Mathieu Potte-Bonneville !

    • Tu le fais exprès ou quoi @marielle ? C’est justement le problème que ce livre soit récupéré aussi vite par E&R en même pas une semaine, d’où le « It escalated quickly », c’est justement pour ça qu’il faut se poser la question du contenu si en si peu de temps ça peut être récupéré (ce n’est absolument pas le cas de plein d’autres textes).

      Par ailleurs, @colporteur a fait exprès de pas mettre lien pour pas leur faire de la pub et du trafic internet, donc peux tu supprimer au plus vite ce lien d’ici ?

    • J’ai retiré le lien @rastapopoulos mais j’aurais préféré que @colporteur donne clairement, dès le départ à la suite de son post ( comme vous le demandez souvent !) la source du texte d’Egalité et Réconciliation.
      S’il l’avait fait je ne m’y serais pas moi même connectée après avoir effectué des recherches.
      Le fait de l’avoir retranscrit dans sa totalité c’est lui donner une visibilité qu’il ne mérite pas.

      Pour revenir au sujet du livre moi j’aime bien cette définition du conspirationnisme :

      Le conspirationnisme procède de l’anxiété de l’individu impuissant confronté à l’appareil gigantesque de la société technologique.
      Il ne sert donc à rien de balayer le conspirationnisme comme faux, grotesque ou blâmable ; il faut s’adresser à l’anxiété d’où il sourd en produisant de l’intelligibilité historique et indiquer la voie d’une sortie de l’impuissance.

      La vérité est qu’il y a dans le conspirationnisme une recherche éperdue de vérité, un refus de continuer à vivre en esclave travaillant et consommant aveuglément, un désir de trouver un plan commun en sécession avec l’ordre existant, un sentiment inné des machinations à l’oeuvre, une sensibilité au sort que cette société réserve à l’enfance, au caractère proprement diabolique du pouvoir et de l’accumulation de richesse, mais surtout un réveil politique qu’il serait suicidaire de laisser à l’extrême-droite.

      Si vous êtes incapables de comprendre ceci c’est que vous êtes aussi dans une forme de déni.

      Et je termine sur une note positive en reprenant les mots d’ Hervé Kempf (Reporterre), ce que veut dire en fait con-spirer, c’est respirer ensemble, c’est entrer en plein dans la politique.

    • ce que veut dire en fait con-spirer, c’est respirer ensemble, c’est entrer en plein dans la politique

      Ce jeu de mot de Kempf digne de Lacan...

      Toujours pas lu le bouquin mais je pense que ces recensions vont m’en dissuader, ça confirme en tout cas, pour l’instant, le moment fasciste que je pressentais.

    • "cospirare vuol dire respirare insieme" est ici repris à radio Alice
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Radio_Alice

      Bologna 1977 : comunicazione e movimento
      https://www.radioalice.org/index.php?option=com_content&view=category&layout=blog&id=13&Itemid=129

      12 marzo 1977 Lo Sgombero di Radio Alice
      https://www.youtube.com/watch?v=3aFdAxSiZxc

      le « moment fasciste » vient de loin et attrape sur son chemin tout ce qu’il peut de divers héritages critiques

    • Mais encore une fois ça part dans tous les sens sans clarifier le départ : être conspirateur et conspirationniste c’est pas la même chose. Ceux qui « respirent ensemble » ce sont les conspirateurs. Être conspirationniste peut vouloir dire deux choses : c’est pas un acte (conspirer), c’est une idéologie, et la majorité du temps, ça désigne ceux qui voient des conspirations partout chez les autres, ça n’a donc rien à voir avec conspirer soi-même. Mais ça peut aussi désigner une idéologie qui voudrait qu’on se mette tous à conspirer (contre les pouvoirs). Ce qui n’a rien à voir non plus, mais qui peut parfaitement s’additionner à la première idéologie (trouver trop de conspiration partout ailleurs, même où il n’y en a pas ET vouloir qu’on se mette tous à conspirer).

      C’est donc totalement confus si on ne clarifie pas de quoi on parle à propos de telles ou telles personnes.

    • un seen qui avait toute sa place ici s’est évaporé...

      Il y a un lien intrinsèque entre cette espèce de nullité de la politique, ce devenir nul de la politique et cette insignifiance dans les autres domaines, dans les arts, dans la philosophie ou dans la littérature. C’est cela l’esprit du temps. Tout conspire à étendre l’insignifiance.

      Contre le conformisme généralisé - Stopper la montée de l’#insignifiance, Castoriadis
      https://www.monde-diplomatique.fr/1998/08/CASTORIADIS/3964

      ce manifeste con., c’est le monde d’après.

      mise en place de 4000 copies, les ventes démarrent bien, parait-il (pour feuilleter, on trouve un pdf)

      #zeitgeist

    • le « moment fasciste » vient de loin et attrape sur son chemin tout ce qu’il peut de divers héritages critiques

      +

      être conspirateur et conspirationniste c’est pas la même chose

      =

      les conspirationnistes sont des aspirateurs ? :-)

  • Oui, des gauchistes et même des anarchistes tombent dans un complotisme facile, ce qui n’est finalement pas nouveau, mais des gauchistes et même des anarchistes trainent dans un anticomplotisme ridicule où devient taboue la critique des technologies vaccinales, de la 5G et des lobbys pharmaceutiques ce qui fait aussi le jeu du gouvernement et du Capital. Il faut aller au bout du processus consistant à mettre dos à dos complotistes et anticomplotistes – devenus irrationnels à force de rationalité. Dans le cas où c’est la peur du virus et de la maladie qui parle chez nos ami.e.s et qui est seule légitime, ce qu’il y a de particulièrement dangereux c’est que le pouvoir et ses solutions biopolitiques peuvent apparaître comme désirables. Non seulement les mesures gouvernementales ont été massivement acceptées mais également désirées jusque chez les radicaux et les anti-système.

    https://lundi.am/Toujours-sur-la-catastrophe-et-comment-en-sortir

    #covid #anticomplotisme

    • N’oublions pas que la convergence objective entre la droite « libérale », qui a toujours été séduite par la vision anglo-saxonne d’un Etat minimal réduit à ses fonctions régaliennes, et une gauche « libertaire » qui rejette toute institution répressive est une réalité.


    • « J’ai lu l’article Sur la catastrophe en cours et comment en sortir, et j’étais trop content de lire un truc sur tout ça, parce que dans nos collectifs, c’est le déni de la situation qui prévaut et l’évitement des débats ! Il faut foutre un coup de pied dans la fourmilière. Après j’étais pas d’accord avec tout, et j’ai eu grave envie d’y répondre, ça a pris la forme d’un article qui est à la fois une réponse et une continuité, qui participe à la réflexion en cours, mais je sais pas... en tout cas ça donne envie de lancer une vraie réflexion collective : quelles positions radicales dans ce bordel ? »

      Un tel texte est nécessaire et désirable car depuis deux ans nous flottons dans une confusion et une stupeur qui suspend les mouvements de la réflexion. Recouvert par la fureur des médias, pris au piège dans les dualismes et les mots de l’ennemi, notre pensée stagne et ne parvient plus à trouver les chemins du dépassement. Dans une telle période historique des franchissements « ne pas savoir » est sûrement une marque de bon sens, mais dernièrement les affects entourant la question de la catastrophe, des vaccins, étaient tellement intenses et virulents que des formes de déni et d’évitement des débats ont pu avoir lieu, il est temps d’y mettre fin. Ouvrir les questions que posent l’époque, nourrir les conflits, déplacer les certitudes, mettre à l’épreuve les théories, voilà ce à quoi nous aimerions participer, voilà la recherche d’une théorie radicale : comment s’en sortir.

      Premier point : les complotistes et les anti-complotistes font dispositif, ces deux postures trempent dans l’impuissance et la dénonciation. Mais d’une certaine manière, la posture complotiste est déjà connue et bien documentée ; c’est le complot des anticomplotistes qui passe pour un phénomène exotique. Cette nouvelle raison d’être de la #gauche_bourgeoise, nouveau détour dans la mésaventure de la #pensée-critique, prend peut-être son essor avec l’hystérie anti-Trump. Cela n’est pas assez souligné dans le premier texte, mais l’anticomplotiste est un ennemi de premier ordre, l’évolution monstrueuse du flic-citoyen trop heureux de montrer son pass sanitaire comme preuve de sa bonne moralité. Et puis oui : les complots existent. Le piège grossier de l’attaque sémantique anticomplotiste est évidement de nous cantonner à une #critique-réformiste où l’on ne pourrait plus dénoncer les complots bien réels et historiques des dominants dans leur systématicité et dans leur existence terrestre.

      Bien que les rapports sociaux soient complexes et que la domination est toujours structurelle, il est vital pour les révolutionnaires de pouvoir la contester dans ses incarnations humaines et pas seulement dans le ciel des structures sinon le camp des révolutionnaires se limite aux seules personnes ayant suffisamment de conscience politique et se condamne à un avant-gardisme néfaste. « Quiconque attend une #révolution-pure ne vivra jamais assez longtemps pour la voir », ce n’est pas un spontanéiste qui parle mais bien Lénine lui-même à propos de la révolution de 1905 : « il y avait des masses aux préjugés les plus barbares, luttant pour des objectifs les plus vagues et les plus fantastiques, il y avait de groupuscules qui recevaient de l’argent japonais, il y avait des spéculateurs et des aventuriers, etc. […] sans cette participation, la lutte des masse n’est pas possible. Et tout aussi inévitablement, ils apporteront au mouvement leurs fantaisies réactionnaires, leurs faiblesses et leur erreurs. Mais objectivement ils s’attaqueront au Capital. »

      La période est révélatrice : les anticomplotistes préférant ne pas se compromettre avec de mauvais alliés en viennent à se cantonner dans la critique des structures et passent à côté de tous les sursauts de résistance des populations. Ces deux dernières années on a vu l’ultragauche déserter la critique des mesures sanitaires et autoritaires en laissant le champ entier de la défense des libertés aux droites.

      Finalement, l’ennemi ultime est peut-être un rapport social, mais ce rapport s’incarne dans des institutions, des habitudes, des objets, voire des personnes. Il ne suffit pas de dénoncer la police et imaginer comment s’en passer, il faut aussi parfois lui jeter des pavés, alors même qu’existe le risque de la fétichiser et de rester bloqué dans une lutte contre la répression. De la même façon, il ne faut pas caricaturer le pouvoir au point de croire en sa toute puissance et de devoir inventer des forces surnaturelles pour l’expliquer, mais il faut bien donner des responsables concrets et dénoncer les chiens de garde du rapport social : pour Stengers, par exemple, il est important de rendre les petites mains capitalistes responsables du capitalisme, s’en prendre à elles et pas seulement dénoncer « le système ».

      Il y a une tendance humaniste dans la gauche à considérer qu’il n’y a pas de véritables ennemis. Le fait de nommer des ennemis est certes une mauvaise habitude mais « une mauvaise habitude de révolutionnaire » où la politique redevient cette capacité à « reconstituer de nouvelles communautés antagonistes, des lignes de partage, des divisions sans possibilité de synthèse : #destitution ». Donc d’un côté la dénonciation des structures « qui ne descendent pas dans la rue » et de l’autre « le camp des amis de la politique antagoniste ».

      Un grosse erreur, la stupeur mise de côté, fut de ne pas parvenir à se saisir de tous les enjeux quotidiens pour ancrer notre position destituante : pendant deux ans, il n’exista que très peu de discours radicaux sur la catastrophe capables de s’ancrer dans ce que nous vivions pourtant tous – au moins partiellement – comme une rupture de l’ordre et de la réalité capitaliste.

      Deuxième point : la peur n’est pas à fuir, il faut partir d’elle. Nous le saurons pour la prochaine, dans la catastrophe la peur est une émotion partagée et qui partage : que ce soit la #peur-du-virus ou la #peur-de-la-gestion-biopolitique qui domine, notre réaction ne sera pas la même et on se trouvera pris au piège à des endroits différent des dualismes : pro et anti. La peur est généralement cachée, infusant inconsciemment dans les débats – surtout chez les rationalistes. La peur est à la fois ce par quoi on nous gouverne et ce par quoi, si elle est mise en commun et dépassée, on se révolte. Mais la peur est un affect qui pousse à s’organiser si et seulement si on la dépasse collectivement, dans le cas contraire elle n’est qu’une fuite qui mène dans les bras « du premier charlatan ou sauveur auto-proclamé », qu’il soit officiel ou officieux, que ce soit la tisane au miel ou le vaccin magique.

    • Une part du mouvement antivax, certains complotistes, comme d’autres fascistes, surfent sur la peur en roue libre, peur de la science, des autres, du savoir, de la vérité, du virus, qui peut aussi se convertir en peur irrationnelle des étrangers ou du vaccin. Mais la peur est commune à tous, c’est aussi le provax convaincu, militant de « la suspension critique » qui parfois sans le dire, charrie sa peur de la maladie, du virus et qu’il reporte sur les pauvres, les marginaux, ceux qui ne comprennent rien etc.

      La peur paranoïaque est le dénominateur commun de l’époque, il se trouve aussi du côté de ceux qui ont peur de la maladie parce qu’ils ont peur de la mort – peur de la vie qui englobe fatalement la mort et la maladie. On peut certes vouloir être soigné par un robot ultra technologique mais on peut aussi préférer mourir comme Illich. La question n’est pas de savoir ce qui est mieux, ce serait stupide puisque derrière nos préoccupations théoriques, ce sont nos affects qui agissent et qu’on se fout pas mal de savoir comment chacun s’arrange individuellement avec les chantages de l’Empire ...

      ... Si nous sommes assez honnêtes c’est bien là où nous en sommes : à devoir construire une connaissance approchée de la catastrophe en cours. Et dans ces temps de redéfinition une question que l’on se pose est celle que toute politique suppose : quels ennemis, quels amis ? Au delà des choix individuels de se faire ou non vacciner : avec qui pouvons nous construire une santé communiste ?

      [ Cette construction ] pose d’ores et déjà un certain nombre de questions :

      -- Il est inacceptable que le monde de l’économie poursuive son exploitation en temps de pandémie mondiale alors même qu’il en est à l’origine. Comment en témoigner ?

      -- Il est assez évident que la crise du coronavirus est une répétition générale de la fin du monde, que les catastrophes vont continuer à s’enchaîner, la question étant comment tenir une position communiste dans cette époque, en quoi la pandémie aura-t-elle ou pas remis en question les théories de la destitution et ses présupposés ?

      -- Que veut dire matériellement, économiquement et énergétiquement cette ultime alliance technocratique opportuniste de la crise : sommes nous en train d’assister à une transformation profonde du capitalisme ? Quels en sont les contradictions et les faiblesses ?

      -- Stratégiquement, faut-il appuyer la gravité de la pandémie en démontrant les manques de l’État – au risque d’être dans une demande d’État contre-productive et pris au piège dans les règles du jeu sémantique des dirigeants – ou bien refuser la Pandémie comme nouveau paradigme et, sans nier l’existence d’une épidémie de covid 19, s’opposer à l’instrumentalisation par l’État de la crise sanitaire ?

      Rendons cette réflexion collective, car nous aurons besoin de toutes les ressources radicales pour parvenir à une théorie digne de l’époque.

    • Ce texte mérite d’être mis en valeur beaucoup mieux que vous ne l’avez fait, cf le messages/944728 (message un peu fourretout, avec des commentaires du type : En ce 24 janvier, l’organe du Horsolistan persiste dans le n’imp )
      Je suis en train de tenter de « l’analyser » sans prétention :) et de le comprendre en profondeur si on peut dire, d’essayer de faire le tri, et de le taguer.
      Il me semble que Cristina del Biaggio procède très souvent de cette façon en raison de sa profession et j’aimerais pour une fois avoir la liberté de faire de même sans avoir à subir les remarques de la « modération » @rastapopoulos :)

      Maintenant si cela dérange @deun je supprime tout.

  • Les voitures sont-elles vraiment notre plus grande erreur ?
    http://carfree.fr/index.php/2022/01/24/les-voitures-sont-elles-vraiment-notre-plus-grande-erreur

    Bien sûr. Mais permettez-moi de nuancer un peu. Je ne parle pas de la plus grande erreur de l’homme. Et je ne considère pas les faiblesses humaines ou les faiblesses Lire la suite...

    #Argumentaires #Destruction_de_la_planète #Etalement_urbain #Fin_de_l'automobile #Fin_des_autoroutes #Fin_du_pétrole #Insécurité_routière #Pollution_automobile #critique #société #temps

  • Compter, gérer, exploiter (avec Matthieu Amiech) - Floraisons
    https://floraisons.blog/compter-gerer-exploiter

    Compter, gérer, exploiter, ainsi va la mégamachine bureaucratique.

    Pourquoi résister à l’informatisation du monde ? Comment l’économie règne aujourd’hui sur nos vies ? Pourquoi les écologistes doivent critiquer radicalement la technologie et la société industrielle de masse ? Comment s’en défaire ?

    Ce sont les questions que nous sommes allés poser à Matthieu Amiech, une des plumes de Marcuse, le groupe qui a signé le livre La Liberté dans le coma en 2013. Il participe également aux éditions La lenteur et au groupe Écran total. On a déjà pu écouter Matthieu dans le podcast Contre le totalitarisme numérique.

    https://d3ctxlq1ktw2nl.cloudfront.net/staging/2021-9-16/98c6fec3-84b6-a59c-827e-ab727774fc1d.mp3

    #Matthieu_Amiech #interview #audio #podcast #floraisons #critique_techno #gestion #informatique #informatisation #internet #technocratie #anti-industriel #écologie #Groupe_Marcuse #Éditions_La_lenteur

  • Réduire le temps de travail : l’évidence abandonnée | Manuel Rolland
    http://cqfd-journal.org/Reduire-le-temps-de-travail-l

    C’est une bataille que la gauche semble avoir délaissée. Comme s’il était désormais vain, voire honteux, de réclamer moins de labeur pour plus de bonheur. Et pourtant, la réduction du temps de travail, au cœur des luttes sociales des siècles précédents, est une solution de bon sens. Retour sur l’histoire d’une idée. Source : CQFD

  • Aix-« en-Provence » : un technosite de la société industrielle
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?article1623

    Aix-en-Provence continue, paraît-il, d’être « la ville préférée des Français » - enfin – des lecteurs de L’Express et du Nouvel Obs - ingénieurs, cadres et CSP+ - lors de leurs sondages annuels. Ils voudraient tous emménager dans la première au palmarès des « villes où il fait bon vivre » (et sinon, à Bordeaux ou à Montpellier). Tous, sauf notre ami Jacques Rossi qui y réside depuis son enfance, voici quatre ou cinq dizaines d’années, sans avoir grande affection, ni intérêt, pour son lieu de résidence familial. C’est normal. Les « socio-professionnels supérieurs » d’Ailleurs-en-France sont victimes d’une persistance rétinienne ; le syndrome de Cézanne ou de la Sainte-Victoire. Ils s’imaginent la vie dans une toile impressionniste (Arles de van Gogh, Giverny de Monet, Tahiti de…). Ce serait si chic. Si classe. Et puis en-Provence. Persistance mémorielle et syndrome de Mistral, Daudet, Pagnol, Giono, dont les proxénètes de l’immobilier et du tourisme ont su faire de l’argent. Aix, Aquae Sextiae, les Eaux de Sextius (-122 av. J.C.), n’est « en-Provence » que depuis le décret du président Paul Doumer du 2 février 1932, pris à la demande du conseil municipal.

    L’indifférence de Jacques à son lieu de résidence est celle des résidents de tous ces lieux devenus indifférents. Il a fallu insister pour qu’il s’informe – et nous informe – de l’affaire des éoliennes censées détruire la crête de la Sainte-Victoire, afin de produire de « l’énergie propre ». Un lieu impersonnel suscite peu de remarques personnelles, à moins de défi et d’effort délibéré. Son enquête l’a pourtant ramené avant – et même avant son enfance, à Cézanne et Zola, qui a peu fait pour le tourisme local et qu’on ne classe jamais parmi les écrivains provençaux. Elle l’a également mené dans le « bassin de vie » local où il a découvert ce que nous avons découvert dans la cuvette grenopolitaine, les mêmes entreprises, les mêmes techno-industries – le CEA, STMicroelectronics, le nucléaire, les semi-conducteurs - la même classe technocratique ayant aménagé les lieux de manière fonctionnelle et conforme à ses intérêts.
    De villes que Stendhal, Zola et Cézanne avaient toutes raisons de haïr et mépriser, il ne reste plus guère que des marques publicitaires, Aix (en Provence), Grenoble. Elles sont devenues ce que leurs bourgeois d’alors voulaient qu’elles deviennent, des métropoles où il fait bon vivre pour les technocrates et lecteurs de L’Obs. C’était d’ailleurs ces bourgeois, devenus industriels, que vomissaient nos artistes ; et non pas le peuple des faubourgs ; ni les pierres et les paysages, détruits depuis et dont ils nous ont sauvé le souvenir.

    Que nous reste-t-il à sauver ? Notre santé mentale ; la certitude que deux et deux font quatre et que nous avons bien vu ce que nous avons vu. Et pour cela, il nous faut enquêter ; comparer sans relâche la ville et la vie d’avant à celles d’aujourd’hui pour tenir à jour le bilan de nos gains et de nos pertes. Ce bilan est ici esquissé pour un technosite local d’un système général.

    (Pour lire le texte, ouvrir le document ci-dessous.)

    #Nécrotechnologies
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/aix-en-provence.pdf

  • La primauté absurde de l’automobile
    http://carfree.fr/index.php/2021/12/14/la-primaute-absurde-de-lautomobile

    Compte tenu du nombre phénoménal de décès, de la #pollution galopante et des coûts exorbitants liés à l’automobile, il n’y a pas de meilleur mot pour caractériser la domination de Lire la suite...

    #Destruction_de_la_planète #Fin_de_l'automobile #Insécurité_routière #Pollution_automobile #Réchauffement_climatique #climat #critique #culture #énergie #histoire #mort #santé #société #usa

  • Critique du travail et émancipation sociale. Réplique aux critiques du Manifeste contre le travail | Krisis
    https://www.krisis.org/2004/critique-du-travail-et-emancipation-sociale
    et aussi sur
    http://www.palim-psao.fr/2017/07/critique-du-travail-et-emancipation-sociale.repliques-aux-critiques-du-ma

    Publié il y a cinq ans, le Manifeste contre le travail se démarque des autres publications de Krisis. Conformément à son caractère de pamphlet, il introduit dans le débat public, sous une forme concise et polémique, les positions théoriques centrales développées au fil des ans dans la revue. Cela n’a pas été sans un certain succès. Aucune autre publication de Krisis n’a eu, et ce par-delà le monde germanophone, autant d’échos et par là même autant de critiques. À ce propos, il est frappant de constater qu’en dépit des particularités propres aux différents pays et aux différentes sensibilités de la Gauche, les critiques se recoupent largement. La critique formulée dans le Manifeste touche donc, semble-t-il, à quelque chose de commun à tous ces discours, quelque chose comme une base commune qui va tellement de soi qu’elle n’est même plus perçue consciemment.

    À cet égard, les quatre critiques faites au Manifeste – celles de Jaime Semprun, de Charles Reeve, de Luca Santini et des Éditions Rouge & Noir (par la suite ERN) – et republiées dans la dernière livraison de Krisis peuvent être considérées comme exemplaires. Si différent que soit leur point de départ, elles tournent autour des mêmes interrogations et se focalisent sur les mêmes points (1). Aussi ne faut-il pas voir dans le présent texte une réponse directe à ces quatre critiques, il revêt un caractère plus général.

    #critique_de_la_valeur #wertkritik #Krisis #Nerbert_Trenkle #débat #capitalisme #controverse #travail #critique_du_travail #Jaime_Semprun #Luca_Santini #Charles_Reeve

    • Notamment dans la réponse à Semprun : #cuistrerie

      « Une société libérée devra examiner à chaque fois concrètement la technologie et la science que le capitalisme a engendrées sous une forme fétichiste et largement destructive pour savoir si, et dans quelle mesure, elles pourront ou non être transformées et développées pour le bien de tous. […] Donner à ce propos a priori des critères généraux est impossible. […] Ce sera alors en fonction de divers critères qualitatifs, sensibles et esthétiques qu’ils décideront ce qu’ils acceptent et ce qu’ils refusent. » — Trenkle.

      Notre théoricien sait-il qu’il vient-là de formuler le programme que la revue Encyclopédie des Nuisances s’était précisément proposée d’entreprendre 20 ans auparavant ?

      « Nous nous attacherons à explorer méthodiquement le possible refoulé en faisant l’#inventaire exact de ce qui, dans les immenses moyens accumulés, pourrait servir à une vie plus libre, et de ce qui ne pourra jamais servir qu’à la perpétuation de l’oppression. »
      Revue Encyclopédie des Nuisances n°1,
      Discours préliminaire, novembre 1984.

      Seulement, les « encyclopédistes » n’ont pas attendu les bras croisés qu’une société libre advienne pour juger sur pièces, et justement « en fonction de divers critères qualitatifs, sensibles et esthétiques », la production marchande et industrielle. Et le « critère général » à l’aune duquel ils ont formulés ce jugement « a priori impossible », n’est autre que « le projet d’#émancipation totale né avec les luttes du prolétariat du XIXe siècle » que notre théoricien a semble-t-il totalement perdu de vue, hypnotisé par la cohérence formelle de sa théorie.

      Cela même #Sandrine_Aumercier ne l’a pas vu... Il est vrai que c’est un peu gênant.

  • L’opportunisme pandémique du néolibéralisme

    https://www.lamuledupape.com/2021/12/06/lopportunisme-pandemique-du-neoliberalisme-vu-par-celia-izoard

    Lors de la dernière Fête du Vent organisée par l’Amassada à la fin du mois d’août 2021, #Celia_Izoard a donné une conférence consacrée à la gestion sanitaire de la pandémie de #Covid-19 en France, et plus largement, à l’impact des intérêts capitalistes sur les politiques de #santé_publique.

    Celia Izoard introduit son propos en remontant à l’époque de l’incendie de l’usine #Lubrizol à Rouen, le 26 septembre 2019. 10 000 tonnes de produits chimiques partent en fumée : reprotoxiques, mutagènes, cancérigènes… La population locale constate des effets directs sur la santé : crises d’asthme violentes, vomissements et diarrhée, pertes de capacité respiratoire qui perdurent…
    « Ce qui est frappant, dès le départ dans cette catastrophe, c’est que très rapidement la préfecture a déclaré qu’il n’y avait pas de toxicité aiguë, en jouant délibérément sur les mots : pas de toxicité aiguë, ça veut juste dire qu’on ne va pas mourir tout de suite en respirant cet air. »
    Les angles morts de la santé publique
    Celia Izoard se lance dans une série d’enquêtes, et constate qu’il y a toute une catégorie de la population qu’on a obligé à travailler ce jour-là, malgré les nuages de fumée très dense. Les services de communication de la préfecture opposent toujours la même réponse à la journaliste : « Mais voyez-vous, l’air était complètement respirable ce jour-là. » La situation, mise en parallèle avec la crise sanitaire dans lequel le monde est plongé depuis début 2020, interroge lourdement sur la vocation de l’État à protéger la santé des citoyen•nes.
    « À ce moment-là, j’ai commencé à m’intéresser au cancer, pour plusieurs raisons. La première, c’est que je me demandais si on pourrait montrer un jour que l’incendie de Lubrizol a eu un impact. Pour l’instant, la version officielle c’est que non, on ne peut rien prouver, rien montrer. La seconde, c’est que comme dans d’autres endroits en France, près de Rouen, il y a des parents et plus particulièrement des mères de familles dont les enfant sont atteints de cancer et qui constatent des taux anormaux de cancers de l’enfant dans leur entourage – ce qu’on appelle un cluster. Elles alertent Santé Publique France, qui vient faire une enquête. Le plus souvent, l’agence de santé constate la surincidence de cancers, mais ne conclut pas sur une cause quelconque, alors que les parents suspectent les pollutions des usines ou des exploitations agricoles environnantes. »
    Dans ce cadre d’enquête, Celia Izoard travaille sur l’épidémiologie et sur le #cancer, son lien avec l’environnement, et sur la manière dont on produit les chiffres officiels. La journaliste est très étonnée de s’apercevoir que les pouvoirs publics, notamment l’agence Santé Publique France, n’a pas du tout les moyens de savoir combien il y a de cas de cancers en région parisienne ou autour de Rouen, là où se trouve une grande partie de l’industrie pétrolière et chimique française. Les registres du cancer ne sont en effet établis que dans 22 départements en France et ne concernent que 22 % de la population. Ils sont faits de manière assez arbitraire en fonction des registres préexistants, parmi lesquels figurent par exemple le Tarn ou d’autres zones pas forcément connues pour leurs forts risques environnementaux.
    « C’est très étonnant quand on se souvient du fait que le cancer fait 150 000 morts par an, qu’il y a 350 000 nouveaux cas chaque année, et que pour certaines catégories de cancers, l’augmentation est très importante et devrait constituer un signal. »
    Pour exemple avec les cancers de la thyroïde, en augmentation de 4,4% par an, ce qui est très important.
    « Il y a vraiment ce qu’on appelle une science « non produite » autour de ces questions. Et je suis très étonnée du discours officiel de ces institutions, à la fois Santé Publique France et le Circa (Centre International de Recherche sur le Cancer), qui ont une politique de santé publique fondée sur les comportements individuels : alerter la population sur le fait qu’il faut avoir une bonne alimentation, faire du sport, ne pas fumer, ne pas boire, etc. »
    Selon Celia Izoard, certains textes tendent même à dissuader les gens de penser que le cancer pourrait être lié à des facteurs environnementaux.
    Dans un article consacré à la pétrochimie et à l’incendie de Lubrizol pour la Revue Z, la journaliste reproduit un tableau du Circa dans lequel sont découpés les facteurs de risque pour le cancer : tabac, alcool, alimentation, expositions professionnelles, pollution de l’air extérieur… Les substances chimiques de l’environnement y sont classées comme dernier facteur de risques, avec seulement 0,1% des cas. Pour Celia Izoard, on a là un découpage d’une incroyable mauvaise foi, car on pourrait très bien considérer que les substances chimiques de l’environnement peuvent être liées à des expositions personnelles comme l’alimentation.
    « Ce découpage n’est pas honnête intellectuellement. J’en arrive à la conclusion qu’il y a une volonté délibérée de la part des pouvoirs publics de ne pas incriminer l’industrie et de ne pas produire de données là-dessus. »
    Lors de son enquête, Celia Izoard essaie de téléphoner à Santé Publique France afin d’obtenir un entretien, dans le but de confronter l’institution à ses conclusions. Mais l’agence oppose une fin de non-recevoir :
    « On est désolé, c’est pas contre vous, mais il n’y a personne pour vous répondre parce qu’il y a un nouveau virus, et tout le monde est là dessus. »
    On est en janvier 2020, et l’État ne peut répondre à une journaliste à propos des cancers en France, en raison d’un nouveau virus. Une non-réponse qui en dit long sur les moyens mis en place pour la santé publique.
    L’État et la pandémie
    Le cancer fait plus de 150 000 morts en France chaque année. Celia Izoard compare la différence de traitement du cancer par les autorités publiques avec le cas des infections de rougeole, pour laquelle existe un vaccin, mais non obligatoire jusqu’à récemment. Elle constate que l’État opère un pilotage très serré du contrôle de cette maladie.
    « Quand il y a des cas de rougeole, on peut être appelé, on demande quels sont les cas contacts, etc. La rougeole faisant à peu près huit morts par an, je m’interroge alors sur ce décalage avec la manière dont le cancer est pris au sérieux dans la recherche de ses causes. »
    Entre Lubrizol et l’épidémie de Covid, à ce moment la journaliste fait partie du camp des perplexes, à cause de la différence de réaction des pouvoirs publics, de l’État, face à ces deux événements catastrophiques.
    « D’un côté, une forme de déni caractéristique des catastrophes industrielles : « non ce n’est rien, il ne se passe pas grand chose », Emmanuel Macron fait un scandale car on a osé comparer Lubrizol à AZF, deux catastrophes chimiques pourtant comparable. »
    Avec le Covid, très rapidement des mesures d’exception sont prises, et semblent à beaucoup de personnes assez disproportionnées par rapport au danger. Après une première phase de déni, les médias se montrent très alarmistes, suivant les impulsions du gouvernement.
    Celia Izoard s’interroge. Et émet une première hypothèse, « très faible », pour comprendre la réaction des États qui sont désormais prêts, pour protéger la population, à bouleverser fondamentalement le système social et modifier radicalement les modes de vie en inversant les règles du droit.
    « C’est l’idée qu’il y a une sorte de peur atavique vis à vis des maladies infectieuses et contagieuses, qui serait un reste historique lié à la peste et aux grandes épidémies. »
    Par ailleurs, on accepterait certaines maladies, le cancer notamment, comme étant la rançon du progrès, bien qu’on ne présente pas celui-ci de manière objective et qu’on occulte les pollutions diverses qu’il engendre. On n’accepterait pas le retour des maladies infectieuses car elles représentent une dimension rétrograde : « l’âge moderne n’est pas censé tolérer ce genre d’événements. »
    En deuxième idée, la journaliste émet la pensée suivante : il ne faut pas confondre santé publique et santé de l’ordre public.
    « C’est à dire que la principale menace dans cette situation de pandémie, c’est la menace pour l’État lui-même. »
    Le degré de contrainte exercé par le gouvernement français sur la population serait ainsi lié à la fragilité de ses infrastructures de base. Au cours des trente dernières années, 160 000 lits d’hôpitaux ont été supprimés. On a un risque de débordement réel.
    « On ne peut pas entasser des cadavres comme on compte les décès de mort lente du cancer, ce n’est pas du tout le même phénomène visuel d’un point de vue de ce que l’on appelle une crise . »
    En mettant en place des mesures draconiennes, l’État se protègerait ainsi lui-même. C’est moins la préservation de la santé publique qui serait recherchée que celle de la continuité du pouvoir.
    « La différence de l’enjeu entre l’incendie de Lubrizol à Rouen et la pandémie de Covid, même si les phénomènes ne sont pas comparables dans leurs proportions, c’est la distinction entre la santé publique et la santé de l’ordre public. »
    Pour Celia Izoard, l’illustration la plus frappante en est le fait que des centaines de postes de vigiles ont été créés pour contrôler les passes sanitaires à l’entrée des hôpitaux, alors même qu’on est en déficit de soignant•es depuis des années.
    « La santé ne paraît pas être la priorité, ou d’une manière extrêmement spécifique et discutable, dans les mesures qui sont prises. »
    Dans sa réaction primitive, l’État cherche donc rapidement à se protéger d’un procès en imprévoyance, qui romprait le pacte qui le lie aux citoyen•nes qu’il est censé protéger. Il faut éviter de subir de plein fouet l’effet de la baisse drastique des moyens de la santé publique et de l’inaction face aux maladies chroniques, qui forment des comorbidités très importantes dans le cadre du Covid. Les discours politiques prennent soin de retourner l’accusation contre la population (on se souviendra par exemple de la déclaration du préfet de Paris Didier Lallement :
    « Ceux qui sont aujourd’hui hospitalisés, ceux qu’on trouve dans les réanimations, ce sont ceux qui au départ du confinement ne l’ont pas respecté. »
    En somme, si la situation est dramatique, c’est parce que les citoyen•nes ne se plient pas aux mesures sanitaires ou ne se font pas vacciner.
    L’opportunisme néolibéral piloté par le gouvernement
    Le troisième axe de réflexion suivi par Celia Izoard intègre les enjeux du capitalisme moderne.
    « L’État protège les empires industriels, et son rôle depuis la révolution industrielle est de piloter la modernisation. C’est à dire, développer les forces productives et, depuis un certain temps, mettre en place l’orthodoxie néolibérale. »
    L’État va donc développer des politiques de santé publique convergentes avec cet objectif. Dans le cas de Lubrizol et des accidents industriels, on comprend donc que les politiques menées ne peuvent viser à démanteler l’industrie pétrochimique, pourtant l’un des principaux vecteurs de ce type de pollution. Le rôle de l’État est donc de répondre à tout événement en plaçant avantageusement ses alliés, typiquement les grands groupes industriels ou les entreprises prometteuses.
    Pour Celia Izoard, les politiques de santé publique menées face à l’épidémie de Covid19 répondent très clairement à ces critères : « on a un soutien très fort à la télémédecine et à l’e-santé, le déploiement d’un gouvernement algorithmique et d’un vaccin biotechnologique. » On nage en plein NBIC (Nano Bio Info Cogno), cette convergence des technosciences très en vue qui tire la croissance économique.
    « D’une certaine manière, la pandémie est une opportunité dont s’est saisie l’État pour accélérer la société du Big Data et ouvrir de gigantesques marchés par la contrainte légale sur les individus. Le passe sanitaire est un formidable couteau suisse dont vont pouvoir émerger tout un tas de nouvelles start-ups et de nouveaux usages, qui ont tous pour point commun d’être liés à l’intelligence artificielle, à la donnée et à la numérisation des activités. »
    La journaliste en veut pour preuve le Ségur de la Santé à l’automne dernier, lequel a débloqué une enveloppe de 8 milliards d’investissements pour le secteur. On y trouve une augmentation de 180€ de salaire pour certaines catégories de soignant•es, mais le quart de l’enveloppe est dévolu au développement de la télémédecine, à la numérisation et à la collecte de données.
    « Entre la clinique et la télémédecine, nous avons deux visions du soin diamétralement opposées. D’un côté une médecine liée aux pratiques incarnées par des humains, qui nécessite d’embaucher. Et de l’autre côté, une médecine des nouvelles technologies fondée sur l’automatisation : la e-Santé. »
    Ainsi, c’est dans ce sens là qu’il faudrait comprendre la négligence absolue de l’État en matière de soutien aux moyens humains pour faire face à la pandémie.
    « Il y a vraiment un passage d’un système à l’autre, avec l’idée d’un système de santé où les humains, les soignant•es ont beaucoup moins de place, et où on va pouvoir marchandiser la santé en faisant travailler des tas de boîtes pour collecter des données, piloter les appareils de télémédecine, déployer la 5G et mettre en place des systèmes de capture et de surveillance épidémiologique etc. »
    Cette nouvelle médecine, sa e-Santé, ses robots et ses capteurs, sont considérés comme prioritaires dans la course des nations autour de la révolution technologique que représente l’intelligence artificielle. La réaction de l’État est donc inscrite au coeur d’une guerre économique : « data is the new oil ».
    « Le but de notre gouvernement est de créer des géants nationaux dans ce domaine et d’ouvrir des marchés. Et ça, on ne peut le faire sans une collecte massive de données de santé. »
    « Cédric Villani, dans le rapport sur l’intelligence artificielle qu’il a dirigé, le précise : le rôle de l’État aujourd’hui, c’est de lancer des grands projets qui permettent une collecte massive de données de qualité, dans les domaines prioritaires, la santé et l’éducation notamment. »
    Dans les discours politiques tenus dès les premiers temps de la pandémie, on comprend à cette lumière la mise en avant d’un monde d’après auquel s’opposerait l’archaïsme de celui d’avant. Et ce monde d’après, c’est celui dont ont besoin un certain nombre d’États pour maintenir leurs intérêts industriels.
    La formule d’Emmanuel Macron : « Nous sommes en guerre », elle fait sens. Oui, nous sommes en guerre, c’est la guerre économique. Ce qui explique aussi la violence du débat intellectuel et la violence avec laquelle tous ceux qui sont considérés comme « covido-sceptiques » ou susceptibles de tenir des propos covido-sceptiques, ou qui pourraient, de manière épidémique, être cas contact avec d’autres personnes ayant produit de tels discours, sont évincés du débat de manière hystérique et inédite.
    Le Covid s’est ainsi présenté comme une opportunité extraordinaire pour accélérer drastiquement cette transformation #numérique de la santé et de la société en général. Dès la fin 2019, l’Agence européenne de la santé lance un appel d’offres pour créer une e-carte de vaccination, dédiée à limiter les risques pandémiques en Europe. Cet appel d’offres est remporté début 2020 par quatre entreprises françaises, dont le spécialiste de la transformation numérique, l’entreprise Jouve. C’est ce consortium qui met très rapidement en place le passeport sanitaire européen. Dans le domaine de la collecte massive de données de santé, et de manière plus générale, du Big Data et de l’intelligence artificielle, « la France a beaucoup de pions à placer. »
    La course mondialisée
    Un autre élément important vient étayer la réflexion de Celia Izoard :
    « Aujourd’hui le modèle en matière de monde d’après, de société pilotée par ce genre de technologies – de manière très antagoniste avec nos traditions politiques -, ce sont les pays asiatiques : la Chine, la Corée du Sud, Singapour, Taiwan… Ce n’est pas un hasard si très rapidement, il est dit dans les plus hautes instances, qu’il va falloir imiter ces pays. »
    Ainsi de l’Institut Montaigne, l’un des principaux responsables de la mise en place des doctrines néolibérales en France, qui publie un rapport dès avril 2020 sur la réponse des pays asiatiques à la pandémie, vantant les systèmes mis en place. Au moment de la publication de ce rapport, ce n’est pas l’efficacité de ces mesures qui est mise en avant : non seulement il est encore trop tôt pour mesurer leurs effets, mais une partie des pays cités sont aussi des îles et ne connaissent donc pas les mêmes enjeux de gestion de la pandémie. Sans parler de la Chine dont les chiffres ne sont pas fiables. On ne cesse depuis de vanter ces systèmes, voire de les appliquer. « C’est un enjeu industriel majeur, il faut donc pousser dans ce sens. »
    En juin 2021, trois sénateurs français rédigent le rapport Crise sanitaire et outils numériques , dans lequel ils se livrent au même exercice, passant en revue les réponses des pays asiatiques. Le discours, en substance, est le suivant : plein de verrous ont sauté, les gens sont plus prêts à accepter les mesures, le passe sanitaire se met en place, mais ça ne va pas assez loin du tout. Il faut faire sauter d’autres obstacles politiques rapidement. Les sénateurs mettent en cause le rôle de la CNIL, terrible obstacle par sa lecture beaucoup trop traditionaliste des droits et libertés. Le modèle chinois est porté aux nues : des caméras biométriques à reconnaissance faciale permettent de scruter les interactions sociales, de rattraper ceux devant être placés en quarantaine, des caméras thermiques mesurent leur température, et un équivalent du passe sanitaire est mis en place dès mars 2020, au moment où le confinement est décrété en France. Ce passe numérique est développé par de très grandes entreprises liées au gouvernement chinois. Alibaba et Tencent développent les fameuses applis et services de réseaux sociaux utilisés par la quasi-totalité de la population en Chine. Un contact tracing est inclus dans ces applis, tout le monde y est donc soumis de fait.
    En Corée du Sud, des quarantaines obligatoires sont décidées, avec un contact tracing très intrusif. On utilise toutes les données disponibles : relevés bancaires, factures téléphoniques, géolocalisation… Lorsqu’on est placé en quarantaine, une application de géolocalisation alerte les forces de l’ordre si celle-ci n’est pas respectée ou si le smartphone est éteint pendant plus de quinze minutes. À Singapour, on a aussi une quarantaine géolocalisée couplée à une vidéosurveillance analysant les interactions des individus dans l’espace public, ainsi qu’une application « Trace Together », qui permet à l’administration de surveiller nominativement toutes les interactions en fonction de la localisation du téléphone. Dès mars 2020, un passe sanitaire est mis en place, « Safe Entry », pour contrôler les accès aux espaces publics. C’est un passe nominatif, et les données sont directement transmises aux autorités. C’est ce genre de mesures qui est clairement visé par les sénateurs ou par l’institut Montaigne, et qui dessinent l’accélération de l’hypercapitalisme contemporain.

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