#déboulonnement

  • #Cancel_Culture : « ce n’est pas faire table rase du passé, c’est précisément l’inverse ! »

    Pourquoi déboulonner les statues dans l’espace public ? #Laure_Murat, professeure au département d’études françaises de l’Université de Californie nous explique les enjeux de la "Cancel culture".

    Il est beaucoup question de « Cancel culture » dans les débats contemporains. Edward Colston, marchand d’esclavage, décollé de son piédestal et jeté à l’eau à Bristol ; ou Leopold II, exploiteur du Congo, enlevé par une grue à Anvers. Les exemples sont nombreux, un peu partout dans le monde. Laure Murat, professeure au département de langues européennes et études transculturelles, vient de publier au Seuil le texte d’une conférence qui s’intitule « Qui annule quoi ? ». Que l’on soutienne ou que l’on dénonce les actions de la « Cancel culture » , celle-ci remobilise les citoyens sur des débats importants.

    La statuaire publique visée ?

    « Cancel culture » signifie culture de l’annulation, mais selon Laure Murat, cela ne veut pas dire grand-chose. On range sous ce vocable cyberharcèlement, déboulonnages de statues ou encore déchéance de cinéastes ; Laure Murat parle de « mot écran ».

    « Ce que j’ai voulu comprendre ce sont les raisons pour lesquelles un certain nombre de militants protestent sur des faits historique en déboulonnant des statues, supposément de grands hommes. Contrairement à ce que l’on entend beaucoup, à savoir que la « Cancel culture » serait une éradication de l’histoire, elle est un rappel de faits importants dans l’histoire qui résonnent dans notre culture aujourd’hui. »

    Selon Laure Murat, les déboulonnements de statues ont pris une ampleur mondiale considérable après la mort de Georges Floyd, afro-américain, mort sous le genou d’un policier blanc. Cet événement contemporain est un fait divers tragique qui a occasionné une vague de protestations très spécifiques pour rappeler qu’au cours de l’histoire il y a eu l’esclavage, la colonisation et la ségrégation aux Etats-Unis ; et qu’il existe un lien entre le passé et le présent. On peut donc se demander, d’après Laure Murat, si le racisme auquel on assiste aujourd’hui est une conséquence directe de l’esclavage et de la ségrégation.

    « Les militants disent, à juste titre, qu’on ne peut célébrer dans l’espace public une politique liée à un crime contre l’humanité alors qu’il y a toujours des crimes contre l’humanité quand il y a crime raciste. »

    Faut-il garder dans l’espace public des statues de personnalités ayant contribué à des crimes contre l’humanité ?

    L’histoire se fait autant en érigeant qu’en déboulonnant des statues. Laure Murat distingue l’histoire et les statues. Eriger une statue en hommage à une personnalité ou mettre une figure historique au Panthéon, ce n’est pas faire l’histoire, c’est une affaire de mémoire ; ce qui est d’ailleurs presque le contraire souligne Laure Murat. Célébrer par des statues, dans l’espace public, certaines personnalités qui ont contribué à un programme idéologique criminel, c’est laisser ces symboles dans l’espace public comme s’ils étaient ininterrogés .

    Les militants interrogent la nécessité de garder dans l’espace public des personnalités qui ont contribué à des crimes contre l’humanité.

    « Cela n’enlève rien à l’histoire. L’histoire se fait dans les manuels, dans les musées et on ne va pas effacer l’histoire de la colonisation, ce qui serait d’ailleurs une grossière erreur puisque cela enlèverait aux opprimés l’histoire de l’oppression. Il ne s’agit donc pas de faire table rase du passé. C’est précisément l’inverse. Il s’agit de dire que l’histoire est toujours présente et de se demander si on veut vraiment cautionner cette idéologie. »

    Peut-on concilier monumentalité et éphémère ?

    Dans son ouvrage « Qui annule quoi ? » Laure Murat se demande quelles seraient les solutions pour les statues qu’on érige aujourd’hui. Et comment faire pour qu’elles ne soient pas elles-mêmes mises à terre plus tard ? Elle évoque le fait de mettre en exergue l’éphémère plutôt que le pérenne.

    « On peut faire un parallèle avec la Révolution française. La Révolution française a supprimé tous les symboles de la tyrannie : les statues des rois, les symboles monarchiques. Mais les révolutionnaires se sont rendus compte qu’il y avait un effondrement du patrimoine qu’il fallait sauver. Sous la Révolution, on a eu cette invention géniale du musée. Aujourd’hui, que faudrait-il faire de toutes ces statues ? La destruction voudrait dire censure et je crois qu’éradiquer, supprimer n’est jamais une bonne solution. Néanmoins, je pense que ce n’est pas une bonne idée non plus de maintenir ces statues sur leur socle dans l’espace public. »

    Beaucoup d’idées fleurissent autour de cette question et les artistes contemporains s’y intéressent en proposant des solutions éphémères.

    « Laura Nsengiyumva, artiste contemporaine, a proposé d’exposer une statue en glace de Léopold II, qui a fondu pendant toute une nuit et tout un jour. Cela a permis aux spectateurs de se demander pourquoi Léopold II fond sous leurs yeux. Cette œuvre est une réflexion sur l’histoire, sur la disparition et sur l’écoulement du temps. Je pense que c’est une réflexion intéressante sur la monumentalité. Peut-on concilier monumentalité et éphémère ? »

    https://www.franceculture.fr/emissions/affaire-en-cours/affaire-en-cours-du-mercredi-12-janvier-2022


    #histoire #mémoire #monuments #toponymie_politique #statue #déboulonnement #espace_public

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  • Pourquoi Macdonald, pourquoi maintenant ?

    https://www.lapresse.ca/actualites/2020-08-30/pourquoi-macdonald-pourquoi-maintenant.php

    Le déboulonnement de la statue de John A. Macdonald, samedi, dans la foulée d’une manifestation sur la réduction du budget de la police à Montréal, a relancé le débat sur le mouvement de réappropriation de l’espace public qui prend de l’ampleur aux États-Unis et au Canada. Pour mieux comprendre ces enjeux, La Presse s’est entretenue avec Mathieu Arsenault, professeur au département d’histoire de l’Université de Montréal.

    #statues #déboulonnage