• Le Service d’Ordre de la CGT protège le MEDEF a coups de bâtons - Marseille Infos Autonomes
    https://mars-infos.org/le-service-d-ordre-de-la-cgt-6904

    Ce jeudi 16 mars, après le rassemblement devant la préfecture, le cortège s’est mis en marche. Une fois arrivé devant la porte du MEDEF, au niveau du carroussel du Vieux-Port, un groupe de quatre personnes a tenté de la forcer. Pas besoin de chercher bien loin pourquoi le MEDEF constitue l’ennemi direct de ce mouvement. Pas de vigiles, pas de flicaille. A la hauteur de leur réputation de gros bras ecervelés, c’est une vingtaine de membre du SO de la CGT, poussés par leur directeur local Olivier Mateux, qui s’est empressé de faire rentrer dans le rang les quelques aventureux qui n’ont pas demandé l’autorisation des organisations croulantes. Il n’y a eu aucun échange, aucun préalable juste des coups et le passage à tabac d’une camarade à six contre une.

    Ca n’était pas une première pour Olivier Mateux et ses nervis. 2016 et les passages à tabac de toute personne tentant de dépasser le cadre, puis le passage à tabac d’un camarade s’étant rendu à leur local.

    Matraquage, tabassage au sol, voilà ce que la direction de la CGT marseillaise a à dire à celles et ceux qui entendent véritablement porter des coups aux responsables du désastre anthropologique qu’est le capitalisme. Ca y’est on a vraiment les crocs, plus de retraite à 64, ni 62 ni 60, on ne veut plus travailler, on ne veut plus de ce monde.

    Heureusement, une centaine de mètres plus loin la CGT a tenté de dissoudre le rassemblement sous les huées de la foule, qui une fois débarrassée des nervis autoritaires, a pu prendre le chemin de la rue Saint-Féréol et la dégommer comme il se doit, comme elle devrait l’être tous les jours.

    #SO #CGT #Olivier_Mateu

    • LA HAINE
      Mouvement contre la réforme des retraites : tentative d’état des lieux
      https://lundi.am/La-Haine

      L’intersyndicale garde cette ligne. Elle s’est ainsi refusée à s’engouffrer dans la brèche du 49.3, repoussant son retour dans la rue à la semaine suivante. Elle a renoncé à intensifier les blocages le lendemain et à remettre une pièce dans l’appel à la grève - malgré les 150 millions d’euros de caisse de grève que planque au chaud la CFDT. Il ne sert à rien de s’acharner sur ce vieil éléphant mourant qu’est l’intersyndicale, il suffit de l’écouter, ces derniers jours, assumer son rôle pacificateur :

      « Je condamne fermement toutes les atteintes aux personnes et les actes violents et symboliquement violents. Ce qui s’est passé à Dijon est inacceptable », Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT. [ Des mannequins à l’effigie de Macron, Borne, Véran et Dussopt sont brûlés place de la République à #Dijon par des syndicalistes #CFDT]

      « Attention ! Il faut bien faire la distinction entre les débordements hier soir, que nous dénonçons tous au sein de l’intersyndicale, et les actions de blocage organisées depuis ce vendredi matin », Simon Duteil, co-délégué général de Solidaires. [alors qu’aujourd’hui même des cheminots ont mis hors d’usage des freins de trains à Versailles pour les bloquer]

      « On combat la radicalisation des mouvements », Frédéric Ben, chargé du gaz à la CGT Energie.

      « Nous voulons réaliser des actions visibles pour faire monter la pression jusqu’au 23 mars, date de la neuvième journée de mobilisation. La violence, nous devons la canaliser », un secrétaire confédéral de la CGT.

      SPECTRES BIS

      Les bâtards le savent bien, ce qu’ils ont craint dans la quasi insurrection de 2018, ce n’est pas tant un sujet social - quoiqu’en dise la plus mauvaise sociologie gauchiste - ni même un package de pratiques. Ce fut une ingouvernabilité, assez déterminée et assez diffuse. Une déferlante de détestation de l’univers néo-libéral. Trop imprévisible, trop audacieuse, trop remontée : trop alien à ce monde-ci.

      Ce potentiel n’appartient à personne. Ceux et celles qui étaient ces dernières nuits dans la rue l’ont touché du doigt. On ne ressuscite pas une insurrection ratée. Mais on peut se ressaisir de certains réflexes d’alors (comme celui de viser les lieux de pouvoir, ou encore de faire fi des parcours déclarés), assumer certaines conclusions stratégiques. (...)

      #retraites #syndicat #démocratie #ingouvernables #lieux_de_pouvoir

  • #Rosa_Luxemburg #luxemburgisme #CommunismeRévolutionnaire #socialisme #Liberté #démocratie #gouvernement #anticapitalisme...

    Rosa Luxemburg et le socialisme démocratique - Socialisme libertaire

    Rosa Luxemburg, théoricienne et révolutionnaire, participe aux débats majeurs du mouvement ouvrier. Elle ouvre une voie qui relie socialisme et démocratie. 
    La théorie révolutionnaire peut permettre de penser les nouvelles formes de lutte et leurs perspectives. De nombreux débats ont déjà agité l’histoire du mouvement ouvrier. La réflexion sur la démocratie demeure indispensable pour saisir les enjeux politiques qui traversent encore les luttes sociales. Rosa Luxemburg apparaît comme la figure incontournable de ce débat. Elle tente de concilier socialisme et démocratie, égalité et liberté (...)

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    ▶️ https://www.socialisme-libertaire.fr/2018/08/rosa-luxemburg-et-le-socialisme-democratique.html

  • 5 mars 1953 : la mort de Staline, pas du stalinisme
    https://journal.lutte-ouvriere.org/2023/03/08/5-mars-1953-la-mort-de-staline-pas-du-stalinisme_540011.html

    Il y a 70 ans mourait Staline. De Hitler à Franco, de Horthy à Salazar, Mussolini et tant d’autres, le 20e siècle abonda en dictateurs écrasant les peuples. Il faut pourtant faire une place à part à #Staline car il dirigea un régime se disant socialiste alors que sa dictature porta, plus qu’aucune autre, des coups terribles au mouvement ouvrier et à son avant-garde révolutionnaire, en #URSS et partout dans le monde.

    Sous Staline, ce fut « minuit dans le siècle » : la trahison des révolutions dans les autres pays, la liquidation du #Parti_bolchevique, la terreur à grande échelle comme moyen de gouverner. Comment cela a-t-il pu arriver quelques années à peine après la #révolution_d’Octobre qui, en instaurant la démocratie des soviets, voulait ouvrir la voie au socialisme mondial ?

    Le « socialisme dans un seul pays » ?

    Si le jeune État soviétique finit par triompher de 4 ans d’une guerre civile effroyable imposée par les Blancs et les armées impérialistes, le pays en sortit exsangue, son économie ravagée et sa population épuisée. Le reflux de la vague révolutionnaire en Europe laissait l’URSS isolée, handicapée par son immense arriération sociale héritée du #tsarisme. Pire : alors que les ouvriers les plus conscients, survivants de la guerre civile, étaient absorbés par les besoins du nouveau pouvoir, la classe ouvrière, déjà très minoritaire avant-guerre, n’était plus en mesure de diriger son État.

    Cela renforça une couche sociale spécialisée dans la gestion de l’État, une bureaucratie que la #classe_ouvrière n’avait plus la force de se soumettre. Lénine avait tenté d’enrayer ce phénomène qui prenait des proportions monstrueuses, mais la mort mit fin à ses efforts. Des dirigeants et militants bolcheviques, qui s’étaient regroupés autour de #Trotsky fin 1923, allaient mener ce combat contre la #dégénérescence de l’État ouvrier et du Parti communiste lui-même.

    Dans la lutte que certains dirigeants avaient engagée pour succéder à #Lénine, la fraction du Parti communiste que Staline représentait au sommet du pouvoir s’appuyait sur les bureaucrates contre les révolutionnaires. Et une foule de cadres petits et grands de l’appareil dirigeant finirent par se reconnaître dans la fraction stalinienne. Prônant le « socialisme dans un seul pays », une aberration pour tout marxiste, Staline levait un drapeau contre Trotsky, resté fidèle à la théorie de la #révolution_permanente, qui avait été au cœur de la politique de Lénine et des #bolcheviks. Il indiquait aussi aux bureaucrates et à la bourgeoisie mondiale qu’avec lui c’en serait fini de la révolution dans tous les pays.

    Sous Staline, les #camps_de_concentration se remplirent de millions de travailleurs forcés : des opposants, réels ou prétendus tels, mais surtout un nombre effroyable d’ouvriers et de kolkhoziens condamnés pour des peccadilles, voire sans raison.

    En même temps, le régime vantait sa Constitution de 1936 comme « la plus démocratique du monde ». Alors que la politique stalinienne avait permis à #Hitler d’accéder au pouvoir en ­Allemagne et qu’ensuite elle avait étranglé la révolution en Espagne, la propagande chantait Staline comme « le défenseur des travailleurs », « l’ami des peuples ». Les Partis de l’Internationale communiste, dont le parti français, applaudissaient aux procès de Moscou, présentant l’URSS comme le paradis des travailleurs.

    Terreur bureaucratique et ordre impérialiste

    La #Deuxième_Guerre_mondiale fut une tragédie pour l’URSS et son peuple. La bureaucratie n’aspirant qu’à profiter en paix de sa position privilégiée, Staline avait cru échapper à la guerre en faisant les yeux doux aux démocraties occidentales, puis à l’Allemagne nazie. Confiant dans son pacte avec Hitler, Staline avait laissé l’#Armée_rouge sans préparation, après avoir décimé ses officiers. L’armée allemande atteignit Moscou et Leningrad en quelques semaines. Finalement, l’URSS put résister à Hitler, et à l’incapacité de la #bureaucratie à assurer sa défense, grâce à l’héroïsme de sa population, au front comme à l’arrière. Elle le paya de 20 millions de morts et d’immenses destructions.

    #Churchill et #Roosevelt ayant associé Staline à leur repartage du monde, celui-ci se chargea de défendre l’ordre mondial, d’empêcher que les peuples se lancent à l’assaut du pouvoir comme en 1917-1923. Il le fit dans l’Europe de l’Est que son armée occupait, et dans les autres pays en mettant les Partis communistes au service de la bourgeoisie, au nom de la « reconstruction nationale ».

    Cela accompli, l’impérialisme n’avait plus autant besoin de Staline. La guerre froide s’engagea, marquée par la constitution de l’#OTAN, une alliance militaire occidentale dirigée contre l’URSS. Face à cette menace, Staline chercha à s’assurer la loyauté des « #pays_de_l’Est » en affermissant son contrôle militaro-­policier, et par une série de procès contre leurs dirigeants.

    En URSS, Staline, qui craignait que la population relève la tête, accentua la #répression. Il fit envoyer en camps un million de soldats, ex-prisonniers en Allemagne, qu’il accusa de s’être laissé capturer. Il fit déporter des peuples entiers, sous l’accusation d’avoir trahi. Puis, il lança une affaire aux relents antisémites, un prétendu « #complot_des_blouses_blanches », prélude à une nouvelle #purge des milieux dirigeants.

    Le #stalinisme après Staline

    Aucun membre du Bureau politique ne pouvait se croire à l’abri. Aussi le 28 février 1953, quand Staline eut une attaque, ses lieutenants le laissèrent agoniser, le temps d’organiser des obsèques grandioses, et surtout sa succession. #Béria, chef de la police politique, donc le plus dangereux des prétendants, fit l’unanimité à ses dépens : il fut arrêté, puis exécuté, avec ses adjoints. #Khrouchtchev, chef du parti, fut le plus habile. Devenu successeur en titre de Staline, il l’accusa en 1956, au 20e congrès du parti, sinon de toutes les tares du régime, en tout cas d’avoir fait exécuter de nombreux « bons staliniens », disait-il en s’adressant aux #bureaucrates.

    Ce que l’on qualifia de « #déstalinisation » n’était guère plus que la promesse faite aux bureaucrates qu’ils pourraient jouir de leurs privilèges sans plus craindre pour leur vie.

    Le régime souleva un peu le couvercle de la #censure, surtout littéraire, un « #dégel » qui permit à l’intelligentsia de voir en Khrouchtchev un libéral. Mais le régime n’avait, sur le fond, rien perdu de son caractère parasitaire, réactionnaire, policier et violemment antiouvrier.

    Il le prouva dès juin 1953, en lançant ses tanks contre les ouvriers de Berlin-Est en grève. Puis il réprima dans la foulée les soulèvements des ouvriers tchèques de ­Plzen, polonais de Poznan et, en octobre-décembre 1956, Khrouchtchev dut s’y reprendre à deux fois pour faire écraser par ses chars la révolution des #conseils_ouvriers de #Hongrie.

    #pacte_germano-soviétique #impérialisme #éphéméride #révolution_russe #marxisme #léninisme #trotskisme #trotskysme #goulag #démocraties_populaires

  • "Le coup d’État fasciste en Allemagne" (24 mars 1933)

    Thèses du courant trotskyste majoritaire dans la prison de Verkhnéouralsk (publiées dans Le Bolchevik-léniniste n° 2, 1933)

    Un texte fondamental paru dans Les Cahiers de Verkhnéouralsk (Les bons caractères, pp. 163-206, 2021).

    https://les-passages.ghost.io/le-coup-detat1-fasciste-en-allemagne-le-bolchevik-leniniste-ndeg-

    1 – Le coup d’État contre-révolutionnaire qui a lieu en Allemagne, la contre-révolution de mars, est un événement de la plus haute importance historique… […]
    2 – La #crise_économique_mondiale a profondément ébranlé les fondements de la société capitaliste. Même un Léviathan impérialiste comme les États-Unis tressaille sous ses coups… […]
    3 – Les impérialismes français, britannique, américain n’avaient qu’un seul moyen de préserver l’équilibre interne de Weimar et de Versailles en Allemagne et en Europe : annuler ou reporter la dette de l’Allemagne et lui consentir de nouveaux crédits… […]
    4 – Ce qui créait les conditions d’une montée impétueuse du fascisme dans les esprits, c’était donc l’impasse économique dans laquelle la situation du capitalisme d’après-guerre avait conduit l’Allemagne, la crise économique profonde et le système de #Versailles, dans un contexte de faiblesse de l’avant-garde prolétarienne… […]
    5 – En fin de compte, la contre-révolution de mars signifie la liquidation des vestiges de la révolution du 9 novembre [1918] et du système de Weimar. Mais cela signifie-t-il aussi en même temps le retour au pouvoir des forces sociales et politiques qui gouvernaient l’Allemagne avant la révolution de Novembre, autrement dit une restauration au sens propre et concret ? […]
    6 – La victoire du fascisme allemand marque la fin de l’ère du pacifisme démocratique d’après-guerre et porte un coup dur, peut-être fatal, à la démocratie bourgeoise en tant que forme de domination bourgeoise la plus répandue dans les pays clés du capitalisme… […]
    7 – La contre-révolution de mars se fonde sur le croisement et l’imbrication des facteurs objectifs suivants… […]
    8 – Le fascisme allemand ne « s’implante » pas dans la #république_de_Weimar, il ne se dissout pas en elle, ne s’adapte pas « au cadre et aux formes de la #démocratie_bourgeoise », il les démolit et les envoie au rebut par un coup d’État réalisé en alliance avec les junkers du parti « national », que dirige le président de la République… […]
    9 – Les forces motrices de la contre-révolution de mars sont les cercles les plus réactionnaires et les plus chauvins du capitalisme monopoliste en Allemagne, de l’#impérialisme_allemand qui, à travers son parti fasciste, a transformé en un soutien social la petite bourgeoisie et les travailleurs déclassés… […]
    10 – Il est difficile de déterminer avec précision l’équilibre actuel des forces de classe en Allemagne. Le #coup_d’État est toujours en cours et le rapport des forces change donc d’heure en heure. Une chose est certaine : c’est une classe ouvrière désorientée et divisée qui, avant le coup d’État et depuis, s’est trouvée confrontée et continue de l’être au front uni et consolidé de la réaction… […]
    11 – La fin de l’Allemagne de #Weimar et l’effondrement de l’équilibre européen signifient la mort de la #social-démocratie allemande et le début de la fin pour le réformisme… […]
    12 – Au fil des ans, l’#opposition léniniste a observé avec inquiétude comment se développaient les événements en Allemagne, expliquant constamment l’ampleur qu’ils prenaient et leur très grande importance historique. Elle a constamment et sans relâche signalé quel danger, pour l’ensemble du #mouvement_ouvrier mondial, mûrissait en Allemagne sous la forme du fascisme… […]
    13 – La facilité avec laquelle la #contre-révolution a accompli son coup d’État, la bureaucratie de l’IC l’expliquera, demain bien sûr, par la « passivité » du prolétariat « qui n’a pas voulu accepter » le combat, et non par le fait que ni le Komintern ni la direction du #KPD (sans même parler de la IIe Internationale et du #SPD) n’ont aucunement préparé le prolétariat à résister, n’ont pas opposé de résistance au coup d’État et n’ont pas appelé la classe ouvrière à le faire…
    14 – Même nous, #bolcheviks-léninistes de Russie, avons sous-estimé toute la profondeur de la #dégénérescence de la direction du #Komintern et des partis communistes des principaux pays capitalistes… […]
    15 – La #bureaucratie_stalinienne a fait des avances à Hitler pendant trois ans, le considérant comme le futur maître de l’Allemagne. Par toutes ses actions et celles du Komintern, elle l’a aidé à aller au pouvoir. Elle a mis le pied de #Hitler à l’étrier, comme elle l’avait fait autrefois pour #Tchang_Kaï-chek… […]
    16 – La victoire du fascisme donne-t-elle un répit supplémentaire au capitalisme ? Bien que notre époque soit et reste celle des révolutions prolétariennes, bien que la victoire du fascisme exacerbe à l’extrême les contradictions de classes et interétatiques, la victoire de Hitler n’en renforce pas moins temporairement la domination politique de la bourgeoisie, repoussant quelque peu les dates de la révolution prolétarienne… […]
    17 – Comment, hors d’#Allemagne, y a-t-il le plus de chances que se réorganisent les forces résultant du coup d’État fasciste ?.. […]
    18 – Par ses trahisons en chaîne, le stalinisme a affaibli et désorganisé le prolétariat mondial, dont le soutien a préservé jusqu’à maintenant les vestiges du système d’Octobre… […]
    19 – La victoire du fascisme allemand non seulement ne signifie pas une stabilisation du capitalisme, mais elle porte au contraire toutes ses contradictions à un nouveau niveau, plus élevé… […]
    21 – Le #réformisme s’est épanoui sur la base de la démocratie bourgeoise. La crise de cette dernière a été une crise de la social-démocratie… […]
    22 – Le fascisme se renforce au pouvoir et devient de plus en plus fort d’heure en heure. La #terreur des gardes blancs a déjà commencé… […]
    23 – Le #fascisme est un méandre de l’histoire, une anicroche historique dans la progression générale de la #lutte_de_classe et de la #révolution_prolétarienne mondiale. Mais notre tâche n’est pas de rassurer les masses… […]

    #nazisme #stalinisme #trotskysme #trotskisme #trotsky #militants_trotskystes #isolateur #prison #Sibérie #Verkhnéouralsk #traité_de_versailles

  • Nouvelle ère du fascisme et société sans avenir : À propos du livre La démocratie dévore ses enfants, de Robert Kurz, par Maurilio Botelho - Critique de la valeur-dissociation. Repenser une théorie critique du capitalisme
    http://www.palim-psao.fr/2023/03/nouvelle-ere-du-fascisme-et-societe-sans-avenir-a-propos-du-livre-la-demo

    Paru en 1993 sous la forme d’un long article, La démocratie dévore ses enfants anticipe à bien des égards le débat actuel sur le radicalisme de droite et la « mort de la démocratie ». La persistance du débat est un symptôme significatif. Si l’on affirme de toutes parts que « les institutions démocratiques fonctionnent », pourquoi le fascisme revient-il à l’ordre du jour dans les médias, dans les discussions intellectuelles et dans les manifestations de rue ?

    […]

    Mais la formulation de Kurz a encore un autre angle qui la rend extrêmement actuelle pour expliquer la montée de l’extrême droite au sein des démocraties occidentales : le nouveau radicalisme de droite n’a plus rien à voir avec le fascisme dans sa manifestation historique de l’entre-deux-guerres, si ce n’est en termes symboliques et idéologiques secondaires ; c’est un phénomène non plus de progression mais de dissolution de la démocratie de marché. En tant que moment spécifique d’un continuum qui a aplani le terrain pour le développement de la démocratie dans les pays en retard de modernisation, le fascisme et le national-socialisme ne peuvent se répéter historiquement : « la machine meurtrière nazie semblait hypermoderne et en avance sur son temps » (p. 39). En revanche, l’irruption massive de gangs d’extrême droite enragés, de skinheads, de milices, de suprémacistes blancs et de néonazis sont des phénomènes propres à l’effondrement de l’économie capitaliste à partir des années 1970 et qui ont d’abord touché les pays de la périphérie ou de la semi-périphérie. L’explosion de l’extrémisme de droite au centre du capitalisme correspond donc à l’approfondissement de la crise structurelle du capitalisme.

    #Robert_Kurz #capitalisme #fascisme #démocratie_de_marché

  • Gary Lineker dénonce un projet de loi #immigration en le comparant à « l’Allemagne nazie » - L’Équipe
    https://www.lequipe.fr/Medias/Actualites/Gary-lineker-denonce-un-projet-de-loi-immigration-en-le-comparant-a-l-allemagne-nazie/1384866

    L’ancien joueur des Three Lions, personnalité phare de la BBC, Gary Lineker n’a pas mâché ses mots pour dénoncer le projet de loi sur l’immigration illégale de la ministre de l’Intérieur britannique Stella Bravermann. « C’est juste une politique absolument cruelle dirigée contre les personnes les plus vulnérables dans un langage qui n’est pas différent de celui utilisé par l’Allemagne dans les années 30 », a-t-il écrit sur son compte Twitter mardi 7 mars.

    Le projet de loi contre l’immigration illégale présenté par le gouvernement britannique prévoit d’empêcher les migrants arrivant par la Manche de demander l’asile et de les expulser « en quelques semaines ». Pour promouvoir ce projet, la ministre s’est notamment mise en scène dans une vidéo où elle explique : « L’année dernière, plus de 45 000 personnes ont fait un voyage dangereux, inutile et illégal à travers la Manche. Notre système d’asile a été submergé. Nous dépensons désormais 7 millions de livres par jour en hôtel. » Elle assure que l’arrêt des traversés est l’une de ses priorités.

    Les termes employés par l’ancien attaquant ont offusqué Downing Street, qui les juge « inacceptables. » La BBC, qui a des directives strictes en matière d’impartialité a annoncé qu’une « conversation franche » allait être tenue avec le présentateur de la télévision publique. Lineker ne semble pas vouloir se taire et a fait savoir, mercredi 8 mars, qu’il allait « continuer de s’exprimer pour ces pauvres âmes qui n’ont pas de voix. »

    #Grande_Bretagne

  • #capitalisme #patronat #bourgeoisie #démocratie #domination #électoralisme #politiciens #partispolitiques #étatisme
    #anarchisme #abstentionnisme #autogestion #anticapitalisme #antiétatisme #émancipation

    ★ DE LA DÉMOCRATIE CAPITALISTE... - Socialisme libertaire

    Depuis l’avènement du capitalisme, le patronat à toujours agi dans l’ombre des partis politiques. Il se contentait de donner ses directives à ses sectateurs, les serviteurs que sont les hommes politiques.

    Il laissait ainsi croire au peuple qu’il n’était pour rien dans les décisions que les politicards prenaient. Il se donnait une sorte de virginité ! L’organisation du fonctionnement de la société capitaliste a évolué au fil des siècles mais elle s’est toujours faite en binôme (...)

    ▶️ Lire le texte complet…

    ▶️ https://www.socialisme-libertaire.fr/2017/06/de-la-democratie-capitaliste.html

  • #démocratie #anarchisme #émancipation...

    ★ LA DÉMOCRATIE EST LA PRÉHISTOIRE DE L’ANARCHIE... - Socialisme libertaire

    ★ Entretien (2013) avec Yannis Youlountas, philosophe libertaire, poète, écrivain et cinéaste franco-grec.

    (...) Oui, la démocratie est la préhistoire de l’anarchie. La démocratie sous toutes ses formes, variantes et déclinaisons. C’est un balbutiement, un germe, un mythe. Mais on est encore loin du compte. La démocratie annonce un objectif d’égalité qu’elle est incapable d’atteindre. Depuis 2500 ans, elle ne parvient pas à lâcher la branche qui la sépare de la plaine où l’être humain se redressera politiquement pour vivre et penser la société debout, à l’égal d’autrui. La démocratie reste à l’orée du bois, au rai de lumière, au chaud dans le décorum à peine modifié de l’Ancien Régime. On est encore loin de la liberté véritable, de l’égalité réelle et de la fraternité universelle. Et ce, parce qu’il reste une chaîne à briser, un cordon ombilical à couper, une branche à lâcher pour marcher ensemble debout. C’est le pouvoir. Tant que le système politique ne sera pas débarrassé de ce fléau, il continuera à singer les mêmes grimaces au-dessus des foules infantilisées et instrumentalisées. Nous sommes encore à l’âge de pierre de la politique, mais rien n’est terminé (...)

    ▶️ Lire le texte complet…

    ▶️ https://www.socialisme-libertaire.fr/2016/03/la-democratie-est-la-prehistoire-de-l-anarchie.html

  • #capitalisme #bourgeoisie #démocratie #politiciens #électoralisme #parlementarisme...
    #émancipation #Anarchisme #abstention #autogestion

    ★ NOUS BÂTIRONS NOTRE ÉMANCIPATION SUR LES RUINES DE LEURS PARLEMENTS - Socialisme libertaire

    « Ils disent nous représenter mais connaissent quoi de nos existences ?
    Sont-ils déjà venus dans nos rues, histoire de voir ce qui se passe ?
    À moi seul, je te représente plus que ton député,
    tes sénateurs, ministres et autres fils de…
     »

    Fonky Family – Dans la légende

    La démocratie parlementaire – ce système qui, via un ensemble d’institutions de « représentation » verticale, capte la souveraineté populaire pour nous déposséder de notre capacité à décider collectivement de nos vies – est moribonde. Du moins sous nos latitudes, où une majorité des individus autorisés à voter rechignent, depuis plusieurs années, à se rendre aux urnes pour porter au pouvoir une des crapules qui disent nous représenter (...)

    ▶️ Lire le texte complet…

    ▶️ https://www.socialisme-libertaire.fr/2016/03/nous-batirons-notre-emancipation-sur-les-ruines-de-leurs-parle

  • La Commune de Paris et ses enseignements pour aujourd’hui https://mensuel.lutte-ouvriere.org//2021/03/07/la-commune-de-paris-et-ses-enseignements-pour-aujourdhui_155 | #archiveLO (#archiveLO, 2 mars 2021)

    #Commune_de_paris #1871 #éphéméride

    – La Commune de Paris (18 mars-28 mai 1871)
    – Commémorer la Commune… pour mieux en trahir les idéaux
    – Des enseignements dévoyés
    – Les travailleurs apprennent de leurs expériences
    #Démocratie_prolétarienne et #démocratie_bourgeoise
    – «  L’Internationale sera le genre humain  »
    – La nécessité d’un #parti_révolutionnaire

    En septembre 1870, par l’intermédiaire des militants, très minoritaires, qui se réclamaient de ses idées, Marx avait avant tout conseillé aux travailleurs de la capitale de «  procéder méthodiquement à leur propre organisation de classe  ». Ils n’en eurent pas le temps et certains n’en comprirent pas la nécessité. Avec la Commune de Paris, le #prolétariat se retrouva donc au pouvoir sans avoir pu s’organiser en conséquence ni avoir eu la possibilité de trancher entre les différents courants politiques qui existaient en son sein  : #communistes, #anarchistes, partisans de #Proudhon ou de #Blanqui notamment.

    Les tâtonnements, voire les fautes des dirigeants de la Commune en matière financière comme dans le domaine militaire, la difficulté de concevoir et de mettre en œuvre une politique en direction de la #paysannerie pauvre, ne purent être surmontés en raison de l’absence d’un véritable parti. Il manqua une #organisation et des dirigeants concentrant l’expérience du #mouvement_ouvrier et qui auraient pu se lier aux masses dans la période précédente. Ils ne purent pas davantage écarter certains patriotes se réclamant du socialisme qui, comme l’écrit #Trotsky, «  n’avaient en fait aucune confiance  » en la classe ouvrière et, pire, qui «  ébranlaient la foi du prolétariat en lui-même  ».

    C’était déjà la conclusion tirée par les plus conscients des militants révolutionnaires de cette époque. #Marx, #Engels, bien sûr, mais aussi le Hongrois #Léo_Frankel, militant de l’#Association_internationale_des_travailleurs et qui avait été un des dirigeants de la Commune. Il écrivit peu après son écrasement  : «  Afin de réaliser cet objectif [la prise du pouvoir], les ouvriers se doivent de créer un parti autonome s’opposant à tous les autres partis, “unique moyen” pour liquider le règne des autres classes.  » Frankel sera l’un des fondateurs du Parti général des ouvriers de Hongrie en 1880.

    Ce sont les deux révolutions russes de 1905 et de 1917 qui tranchèrent définitivement cette question. Pour que la formidable pression révolutionnaire s’exerce pleinement, et contrairement à ce qu’affirmait le courant anarchiste, il fallait une organisation centralisée, soudée, dont les militants étaient en contact permanent avec les entreprises et avec les soldats du front et de l’arrière. Un parti à même d’adapter sa politique aux flux et aux reflux de la révolution et d’impulser ainsi une politique jetant les bases d’une société communiste  : ce fut la tâche du #Parti_bolchevique.

    #anarchisme

  • L’enquête publique : instrument de légitimation du développement à tout prix
    https://metropolitiques.eu/L-enquete-publique-instrument-de-legitimation-du-developpement-a-tou

    À quoi servent les enquêtes publiques, ces procédures administratives de validation du développement économique ? Dans Inutilité publique, l’historien Frédéric Graber critique ce rituel de légitimation au fonctionnement peu démocratique. Dans Inutilité publique. #histoire d’une culture politique française, l’historien Frédéric Graber pointe l’obstination aveugle des gouvernements successifs du pays, depuis l’Ancien Régime, à favoriser le développement économique sous la forme de projets de construction #Commentaires

    / #aménagement, #projet_urbain, #État, #démocratie, #enquête, histoire

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_tonnelat4.pdf

  • La concentration des médias contre la démocratie
    https://laviedesidees.fr/La-concentration-des-medias-contre-la-democratie.html

    Le contrôle des médias par quelques grands groupes est un danger pour le pluralisme de l’information et, par conséquent, pour la #démocratie. Des mesures anti-concentration fortes et un cadre règlementaire repensé doivent absolument défendre ce pluralisme. Un esclandre télévisuel – qui a vu Cyril Hanouna, présentateur d’une émission populaire diffusée sur C8, insulter le député Louis Boyard, qui avait critiqué le propriétaire de la chaîne – a rappelé, si besoin était, l’importance et la nature profondément (...) #Essais

    / Société, #media, démocratie, #information

    #Société
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20230214_medias.docx

  • Présidentielle au Nigeria : que le plus riche gagne ! - AOC media
    https://aoc.media/analyse/2023/02/22/presidentielle-au-nigeria-que-le-plus-riche-gagne

    Par Sophie Bouillon. Le Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique, élira dans quelques jours son prochain président dans l’un scrutin des plus incertains et volatiles de son histoire. Une bataille sans merci se joue entre trois candidats principaux, dans un contexte de grave crise sécuritaire, d’une économie à genoux, d’âpres divisions ethniques et religieuses, mais surtout de corruption massive et endémique… qui redessine intégralement les « règles » de la démocratie.

    #Afrique #Nigeria #Démocratie #Corruption #Elections

  • Avec la #CCD et Alain Matheron, vive le béton et la spéculation à #Die !
    https://ricochets.cc/Avec-la-CCD-et-Alain-Matheron-vive-le-beton-et-la-speculation-a-Die.html

    Une bonne cinquantaine de personnes étaient à Recoubeau-Jansac pour redire leur désaccord profond à Alain Matheron et aux autres élus CCD qui veulent détruire 5ha supplémentaires de terres agricoles à Die. C’était jeudi 23 février lors d’une réunion du conseil communautaire de la Communauté de communes du diois (CCD). Moins de bitume, plus de légumes ! Munis d’une banderole « Moins de bitume, plus de légumes » et de pancartes, les défenseurs en colère des terres agricoles et autres paysans ont accueilli les (...) #Les_Articles

    / Die, CCD, #Agriculture, #Le_monde_de_L'Economie, #Démocratie_locale

    https://mediascitoyens-diois.info/recoubeau-jansac-restitution-du-diagnostic-alimentaire-du-ter

  • In Chicago, a Socialist Teacher Takes on the Entrenched Political Machine
    https://jacobin.com/2023/02/chicago-11th-ward-alderman-election-ambria-taylor-dsa

    Die Probleme der kleinen Leute sind überall die gleichen: Besser Schulen, bezahlbare Wohnungen, funktionierende öffentliche Einrichtungen und Transportmittel und die Beseitigung von Gewalt und Verbrechen. Der Süden von Chicago ist wie eine viel härtere Ausgabe der härtesten Ecken von Berlin Neukölln.

    In der Southside ist die Wahlkampagne einer Sozialistin Teil der Bewegung für einen gemeinsamen Kapf der Einwohner um eine Stadtverwaltung ohne die traditionelle Korruption und Vetternwirtschaft. Bis heute wird die Stadt wie der Erbhof einer Bügermeisterdynastie verwaltet. Damit soll jetzt Schluß sein.

    24.2.2023 by Caleb Horton - An interview with Ambria Taylor

    Chicago’s 11th Ward is the heart of the old “Chicago machine,” one of the largest, longest-running, and most powerful political forces in US history. For most of the twentieth century, the Chicago machine organized the political, economic, and social order of America’s second city. Patronage rewards like plum city jobs were awarded to lieutenants who could best turn out the vote for the Democratic Party, which in turn provided funds, connections, and gifts to the ruling Daley family and their inner circle.

    Mayor Richard J. Daley, often called “the last big city boss,” ruled Chicago from 1955 until his death in 1976. Daley spearheaded infrastructure and urban renewal projects that physically segregated white and black parts of the city with expressways and housing blocks and drove black displacement from desirable areas. He tangled with Martin Luther King Jr over school and housing desegregation, sicced the cops on antiwar protestors at the 1968 Democratic National Convention, and gave “shoot to kill” orders during the uprisings following King’s assassination.

    The Chicago machine’s glory days are past, but the legacy of the Daleys lives on. Relatives and friends of Mayor Daley still hold office throughout Chicago, and his nephew, Patrick Daley-Thompson, had a strong hold over City Council as the 11th Ward alderman until July 2022, when he was convicted of tax fraud and lying to federal bank regulators and forced to resign.

    Although the Daley family has lost direct control over the 11th Ward, their presence is still felt in the neighborhood of Bridgeport. While racial segregation is not explicitly enforced, the neighborhood still has a reputation among many older black residents as a “no-go zone,” and throughout the 2020 protests over the murder of George Floyd, white gangs roamed the streets with weapons questioning anyone who looked “out of place” — a callback to the racist mob violence perpetrated by the Hamburg Athletic Club, of which a teenage Daley was a member a whole century prior.

    So what is Ambria Taylor, a socialist public school teacher, doing running for office in the backyard of this entrenched political fiefdom? Jacobin contributor Caleb Horton sat down with Taylor to discuss why she chose to run at this time and in this place, and how she is building a movement that can overturn the power of one of the nation’s most notorious political dynasties.

    Taylor launched her campaign in October 2021, when Daley-Thompson was still in office. After a few months of campaigning, the 11th Ward began to undergo major changes. First Daley-Thompson was arrested and then convicted of fraud, and then the ten-year ward remap took place, removing parts of the old 11th Ward and adding parts of Chinatown and McKinley Park.

    In just a few short months, Taylor was facing a newly-appointed incumbent, a new map, and six other candidates for alderman. Taylor is the only progressive in the race.

    Caleb Horton

    Why did you decide to run for office?

    Ambria Taylor

    Growing up, I experienced poverty and homelessness in rural Illinois. I moved to Chicago when I was seventeen to escape that. I slept on my brother’s floor, shared an air mattress with my mom.

    Chicago saved my life in a lot of ways. Urban areas have public transportation, they have dense development where you can walk to get what you need, where you can get to a job without a car. Public goods help people survive.

    Experiencing all that defined me. It’s why I’m so committed to protecting public goods like affordable public transportation and affordable housing. It’s why I’m a socialist. It’s why I got my master’s degree and became a teacher.

    I had a chance to grow up and live a decent life thanks to the strong public goods and services available in Chicago, but unfortunately that’s all been under attack due to neoliberalism, the hollowing out of the public sphere, and the assaults on unions.

    That’s why I’m running. We deserve a city that works for everyone like it worked for me. We deserve a city that, in the richest country in the history of the world, provides for the people who live here and make it run. And here in Chicago we have been building the movement for the city we deserve through making the ward office a space for people who are marginalized to build power.

    Caleb Horton

    What do you want to do when you’re in office?

    Ambria Taylor

    In Chicago the local ward office has a lot of local power. The alderman is kind of like a mini-mayor of their district. They have power to make proposals for spending taxpayer money, and they each get a budget of discretionary funds of about $1.5 million annually for ward projects.

    Aldermen have influence in the committee that oversees Tax Increment Financing (TIF) districts. On TIFs, we gave $5 million in taxpayer money to Pepsi and $1.5 million to Vienna Beef.

    We shouldn’t be taking money away from our schools to fund giveaways to megacorporations, period. But if we’re going to have TIFs, residents should have democratic input into how those funds are spent. We have dozens of empty storefronts in what should be our commercial hubs — why not fund small businesses providing needed services and quality of life to residents?

    My dream is to, for one thing, involve the public in development decisions. But most of all, I want to ensure that money goes to things that benefit residents. Things they can see and experience, like cleaning alleys or tree trimming or sidewalk maintenance. In this ward, there’s a history of “the deal is made, and then they have a public meeting about it.” I want things to be the other way around.

    I’m excited for the potential of what we could do here if there’s a ward office that’s open and collaborative and is genuinely trying to do things that benefit the most vulnerable.

    Caleb Horton

    Could you talk a little bit about the ward’s political history, and why it has been such an “insiders’ club” of decision makers?

    Ambria Taylor

    We are on the Near South Side of Chicago. This ward now includes Bridgeport, Chinatown, and parts of a few neighborhoods called Canaryville, Armor Square, and McKinley Park.

    The Daley family is from this area. The home that’s been in the family for generations is here. The family has been powerful here for a really long time. They were also involved in various clubs and associations, like the Hamburg Athletic Club that took part in the racist white riots in 1919.

    The 11th Ward is well known for being an enclave of extremely aggressive anti-black racism. In the 1990s there was a young black boy who dared cross over here from Bronzeville to put air in his bicycle tires from a place that had free air, and he was put into a coma by teenage boys.

    One of those boys was well connected to the Mafia here. Potential witnesses for the trial who knew this boy and were present when it happened weren’t willing to come forward. This happened in the 1990s. Think about how old the fourteen-, fifteen-, sixteen-year-old boys would be now. Many people who are influential now were alive during that time and were wrapped up in that culture. This was considered a sundown town, and to some people still is.

    Things are changing rapidly. People move to the suburbs, new people move in, things change over time. There still is a vocal conservative contingent here, but this is also a place where Bernie Sanders won the Democratic primary two times. Because of where we stand at this moment amid all those contradictions, we have the chance to make monumental change.

    There’s always been dissatisfaction with the machine, but we’ve started to cohere that dissatisfaction and the latent progressive energy into an organized base. We’ve brought together a base of people around progressive issues that many have said couldn’t exist here. We’re proving them wrong and proving the narrative about this part of the city wrong.

    As socialists, narratives are often used against us. It’s that narrative of what’s possible. The “Oh, we love Bernie, but he could never win. . . .” We say that a better world is possible. And what we’re seeing on the doors is that people are very excited to see a democratic socialist on the ballot. As far as I know, I’m the only person in the city running for office who has “socialist” on their literature. That’s big whether or not we win.

    Caleb Horton

    In what ways is this a movement campaign?

    Ambria Taylor

    We launched this campaign very early. We launched in October 2021 with an election at the end of February 2023. We did this because we needed time to organize.

    We started by holding community meetings for months. We brought communities together to articulate their desires for the city — like for streets and sanitation, public safety, the environment — and made those our platform planks.

    We engaged people with what they want to see happen in the ward: “How do you want an alderman to be working toward making those things happen? Let’s talk about how the city council works. Let’s talk about how the ward office operates and what budget it has.”

    Our residents have an appetite to get into the nitty-gritty about what an alderman can actually do to make progress on the things they want to see in this community and for Chicago. They want to take ownership over their own affairs.

    This is what political education can look like in the context of an aldermanic race. The people ask questions, articulate their needs, and we try to put that through the lens of what we can do as an aldermanic office and as organized communities.

    One thing we’ve found impactful is coming together for creative events. For instance, we had a huge block party with the owner and staff of a business called Haus of Melanin. This is a black-owned beauty bar that was vandalized twice in the months after they started up. A hair salon for black people? You can see why that might piss racists off.

    So we stepped in and built a relationship with them. We threw this huge block party, bringing a bunch of people together to say, “We’re going to celebrate that there are going to be black people in this neighborhood. There are going to be black-owned businesses that cater to black people.” And a lot of people came out in this neighborhood to say, “We support this business, we love that it’s here, and nobody is going to scare our neighbors away.”

    The business owner had talked about leaving. She had stylists leave because of the vandalism that happened. Haus of Melanin might have been chased out if the community didn’t turn out to say that these racists don’t represent us and we’re not going to take it. All of that is what a movement campaign looks like.

    Caleb Horton

    This is the city’s first Asian-majority ward, and the current alderperson is the city’s first Chinese American alderperson. Some people have said that this is an office that should go to an Asian American or a Chinese American person — that you as a white person shouldn’t be running for this office. How do you respond to that?

    Ambria Taylor

    We do remaps based on the census every ten years or so, and there was a big push to remap the 11th Ward to include Chinatown. Before the remap, the 11th Ward was 40 percent Asian, mostly Chinese. I think the biggest thing this remap did is unite a center politically that is already mapped culturally.

    The incumbent I’m running against was appointed by an unpopular mayor and is backed by the Daley family. Her father worked for Mayor Richard M. Daley. Richard M. Daley and John Daley sent out a letter backing our current alderman.

    It’s really exciting for this Asian-majority ward to have the opportunity to elect a representative they trust will fight for their interests.

    My team has worked hard to do everything on the campaign the way we plan to run our ward office. We have made the campaign a space to build power for people who are marginalized. We have a huge campaign team that includes canvassers who speak Mandarin, Cantonese, and Taishanese. Just today we used all three languages while we were at the doors.

    We make sure that people who are multilingual are present at our community meetings. Also every single piece of lit we’ve printed has been translated into three languages: English, Simplified Chinese, and Spanish.

    This election is not just about the candidate as a representative, but about electing someone who is going to focus on issues that matter to the people of this ward. This is bigger than one person, and we have been able to build a lot of meaningful connections.

    For example, we’ve made deep connections with Chinese-language newspapers, and that relationship is going to go a long way. We’ve had Chinese-language newspapers commenting on union rallies I was going to, my Democratic Socialists of America (DSA) endorsement, and so on, and we want to continue to nurture that relationship.

    Caleb Horton

    How has your experience as a Chicago Public Schools teacher influenced your politics?

    Ambria Taylor

    Teaching in Chicago Public Schools was really hard. I kind of expected that, but you have to live it for it to truly sink in.

    After a year of student teaching, I started my first lead teaching position in the 2019–2020 year. A month and a half later, we went on strike for almost two weeks. We came back to the classroom, and just as I was trying to get back into the swing of things, COVID hit.

    I became a remote teacher of middle schoolers, and things were really difficult. We had to eventually juggle hybrid learning and lack of staff. I became the union delegate for our school and experienced horrible retaliation from my principal. But through that, I learned to organize people in my building around workplace issues even if they had different politics than me.

    I saw how the workplace can unite us — it gives you something to convene around, and it’s hard to have anything interfere with that because your reality is informing it all. Public education is in a lot of trouble, and I firsthand experienced these schools unraveling at the seams.

    The city allocates money to bullshit while lead paint flakes off the walls and our buildings fall apart. As teachers, we face the struggle of trying to get through the day while kids are being put in the auditorium a few classes at a time because there is not enough staff to supervise them.

    That influenced me because a huge part of my campaign as a socialist is to fight against neoliberalism, austerity, and private interests’ attempt to narrow what the public sector does by choking these various public services and then saying, “It doesn’t work!”

    What is happening with Chicago Public Schools is happening everywhere — at the Chicago Public Library, in our transit system. My dream is being part of a movement that will help save our public sector.

    Caleb Horton

    The Chicago political machine faced an unsuccessful challenger in the 11th Ward four years ago. What makes your campaign different?

    Ambria Taylor

    There have been other challengers to the machine politicians in the 11th Ward. Usually it’s a person who has a few volunteers, and they raise less than $5,000. We’ve been able to raise over $90,000, and we have had over a hundred people volunteer for us. That’s something that challengers haven’t been able to muster up, and understandably so — it’s not an easy thing to do.

    The people of the ward want to support this kind of effort, and despite their modest fundraising, we’ve seen previous small campaigns still give the machine a run for its money. We had a guy take Patrick Daley to a runoff election, and he raised less than $5,000. What that shows is that a strong campaign stands a chance, and we’ve made a strong effort here.

    Caleb Horton

    What are the biggest issues facing the 11th Ward?

    Ambria Taylor

    Environmental issues are huge here. Our air quality is eight to nine times worse than northern parts of the city. Our city is very segregated. The further north you get the whiter it gets, and you will notice that the South Side has way worse air quality and way more heavy — or “dirty” — industry that pollutes our air and our soil.

    We used to have a Department of Environment that ticketed polluters that were breaking the rules and causing toxic contamination. That department is gone now, and the ticketing has gone down. When ticketing does happen, it happens on the North Side.

    So there is a lot we can do here, like reestablishing the Department of Environment and working with the Illinois Environmental Protection Agency to make sure that the polluters in this area are being held to the standards they should be held to; also, when it comes to developments, saying, “No, I will not support new dirty industry coming to this region which is already severely overburdened.”

    Caleb Horton

    Public safety has come up a lot this election. What do you believe the 11th Ward could be doing about this?

    Ambria Taylor

    Public safety has become a major talking point this year. That’s not to say that everything is safe and everything is fine: we have carjackings, shootings, and assaults. People experiencing violence is unacceptable.

    However, a lot of people have given in to saying, “I’m the alderman and I love the police.” What that does is absolve our leadership of any responsibility. We’ve had police officers responding to forty thousand mental health calls a year. There’s been a big movement in Chicago to shift things like mental health and domestic violence calls to other city workers instead of the police.

    What we’ve seen is poverty and austerity are on the rise, and when you have high poverty, you have high crime. We need resources for young people, better social services, housing, and mental health care. A lot of people who we’ve canvassed agree that police are not enough and we need to address violence holistically.

    Caleb Horton

    What about affordable housing? Where do you stand on that?

    Ambria Taylor

    Here in the 11th Ward, there has been a push for affordable housing, but it’s really hit or miss as far as enforcement goes. Also, when it comes to affordability, we need to be stricter on how we define it. Right now, developments can say there are affordable units in a building even if they are not truly affordable and are just a little cheaper than other units in the building.

    We want affordable housing, and we want to hold developers’ feet to the fire as far as prices go. Having a resident-led ward gives us the opportunity to ask developers, “What do you plan to charge for the units?” and get them to commit to something truly affordable for people to live in.

    We must also expand public housing. Chicago has lots of money for it, yet we’re selling land that belongs to the housing authority off to private interests. That needs to stop. I’m interested in partnering with residents who live in public housing to make sure it improves and expands.

    I also support just cause for evictions and lifting the ban on rent control in Illinois. We have a ban on passing rent control — we can’t even introduce a bill on it. I very much support the effort to overturn that.

    Caleb Horton

    What are your plans for this progressive base that you’re building?

    Ambria Taylor

    From here on out, if I’m the next alderman, we will continue to organize through the ward office and institute participatory budgeting and resident-led zoning and development boards. We will make serious changes to how the ward office is engaging with the people who live here.

    And if we don’t win, we have movement institutions: we have the 11th Ward Independent Political Organization, we have DSA. We need to make sure we’re actually organizing people into groups where we can continue to grow what we’re doing. I’m really interested in where we are going to take this.
    –-----
    Filed Under
    #United_States #Politics #Cities #racism #democratic_socialists_of_america #Chicago_City_Council

    A Live Chat with Ambria Taylor, 11th Ward Alderperson Candidate!
    https://www.youtube.com/watch?v=P9VYjSzwN_Q

    6 Candidates Are Challenging Ald. Nicole Lee In 11th Ward Race
    https://blockclubchicago.org/2023/01/11/six-candidates-are-challenging-ald-nicole-lee-in-the-11th-ward

    Two teachers, a veteran police officer, a firefighter and an attorney are among the challengers looking to unseat Lee, who was appointed to the City Council seat in 2022.

    Ambria Taylor | Chicago News | WTTW
    https://news.wttw.com/elections/voters-guide/2023/Ambria-Taylor

    Chicago DSA Endorses Ambria Taylor and Warren Williams
    https://midwestsocialist.com/2023/01/11/chicago-dsa-endorses-ambria-taylor-and-warren-williams-post-petiti

    #USA #Chicago #southside #Rassismus #Armut #Gewalt #Korruption #Sicherheit #Politik #Organizing

  • Le procès d’Assange pourrait entraîner la suppression du Premier amendement, selon des avocats
    https://www.les-crises.fr/le-proces-d-assange-pourrait-entrainer-la-suppression-du-premier-amendeme

    Des avocats, journalistes et défenseurs des droits humains de premier plan affirment que le procès d’Assange représente une grave menace pour le journalisme. Source : Truthout, Marjorie Cohn Traduit par les lecteurs du site Les-Crises Le lanceur d’alerte des Pentagon Papers, Daniel Ellsberg, a rejoint d’autres journalistes, avocats et défenseurs des droits humains de premier […]

    #Démocratie

  • Le 23 février 1917 – le 8 mars de notre calendrier –, la Révolution russe commençait

    Le texte du meeting #LO du 20 octobre 2017 consacré à la Révolution russe :
    https://www.lutte-ouvriere.org/sites/default/files/documents/centenaire-revolution-russe.pdf #conférenceLO

    Sommaire (Cercle Léon Trotsky n°150) :

    Introduction d’#Arlette_Laguiller

    La #Révolution_russe : la classe ouvrière au pouvoir

    La #révolution, un élan révolutionnaire du prolétariat : février
    – Les #soviets, les #comités_d’usine

    La révolution transforme les hommes qui la font
    – Une #classe_ouvrière russe opprimée...
    – ... transformée par les événements révolutionnaires

    Le problème du pouvoir et la nécessité du parti
    – La prise du pouvoir par les travailleurs nécessite une conscience élevée et un parti

    L’expérience de huit mois : il faut prendre tout le pouvoir

    La #révolution_d’Octobre n’a rien d’un coup d’État

    Les premiers décrets du pouvoir soviétique

    Le #Parti_bolchevique : une confiance indéfectible dans la capacité de la classe ouvrière à exercer le pouvoir

    Nous nous réclamons de l’action menée par le Parti bolchevique

    La violence fait partie des révolutions

    #Démocratie_ouvrière/#démocratie_bourgeoise

    Les raisons de la #dégénérescence

    « Il y a eu beaucoup de révolutions, aucune n’a marché ! », nous dit-on

    Nous voulons construire un parti révolutionnaire prolétarien
    – Construire ce parti : une tâche difficile

    #bureaucratie #stalinisme #lénine #léninisme #trotsky #trotskisme #marxisme #lutte_de_classe #russie #révolution_sociale #révolution_ouvrière #révolution_bourgeoise #répression #parti_révolutionnaire #communisme_révolutionnaire #Lutte_Ouvrière

  • A gauche, les impasses de la société techno-industrielle restent en partie les angles morts de la planification écologique
    https://ricochets.cc/A-gauche-les-impasses-de-la-societe-techno-industrielle-restent-en-partie-

    A gauche et ailleurs, la planification revient au goût du jour. Mais la planification écologique est-elle possible ?, souhaitable ? Voici un bon article qui replace les velléités de néo-planifications dans l’histoire et dans leurs impasses structurelles. Planification écologique : frein d’urgence ou administration de la catastrophe ? Les plans de sauvetage ne manquent pas de surgir face à l’emballement des catastrophes et des inégalités. S’ensuit une renaissance de l’idée de « planification » pour (...) #Les_Articles

    / #Résistances_au_capitalisme_et_à_la_civilisation_industrielle, #Autonomie_et_autogestion, Démocratie directe, communes (...)

    #Démocratie_directe,_communes_libres...
    https://www.terrestres.org/2023/01/31/planification-ecologique-frein-durgence-ou-administration-de-la-catastro ?
    https://www.terrestres.org/2023/01/31/planification-ecologique-frein-durgence-ou-administration-de-la-catastro

  • Le président tunisien prône des « #mesures_urgentes » contre l’immigration subsaharienne

    Lors d’une réunion, mardi, du Conseil de sécurité nationale, le président tunisien, #Kaïs_Saïed, a tenu un discours très dur au sujet de « #hordes des #migrants_clandestins » en provenance d’Afrique subsaharienne, dont la présence est selon lui source de « #violence, de #crimes et d’#actes_inacceptables », insistant sur « la nécessité de mettre rapidement fin » à cette immigration.

    Il a en outre soutenu que cette immigration clandestine relevait d’une « entreprise criminelle ourdie à l’orée de ce siècle pour changer la composition démographique de la Tunisie », afin de la transformer en un pays « africain seulement » et estomper son caractère « arabo-musulman ».

    Il a appelé les autorités à agir « à tous les niveaux, diplomatiques sécuritaires et militaires » pour faire face à cette immigration et à « une application stricte de la loi sur le statut des étrangers en Tunisie et sur le franchissement illégal des frontières ». « Ceux qui sont à l’origine de ce phénomène font de la traite d’êtres humains tout en prétendant défendre les droits humains », a-t-il encore dit, selon le communiqué de la présidence.

    « Discours haineux »

    Cette charge de Kaïs Saïed contre les migrants subsahariens survient quelques jours après qu’une vingtaine d’ONG tunisiennes ont dénoncé jeudi la montée d’un « #discours_haineux » et du racisme à leur égard. Selon ces organisations « l’État tunisien fait la sourde oreille sur la montée du discours haineux et raciste sur les réseaux sociaux et dans certains médias ». Ce discours « est même porté par certains partis politiques, qui mènent des actions de propagande sur le terrain, facilitées par les autorités régionales », ont-elles ajouté.

    Dénonçant « les violations des droits humains » dont sont victimes les migrants, les ONG ont appelé les autorités tunisiennes « à lutter contre les discours de #haine, la #discrimination et le #racisme envers eux et à intervenir en cas d’urgence pour garantir la dignité et les droits des migrants ».

    La Tunisie, dont certaines portions de littoral se trouvent à moins de 150 kilomètres de l’île italienne de Lampedusa, enregistre très régulièrement des tentatives de départ de migrants, en grande partie des Africains subsahariens, vers l’Italie.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/47002/le-president-tunisien-prone-des-mesures-urgentes-contre-limmigration-s
    #Tunisie #migrations #migrants_sub-sahariens #anti-migrants #grand_remplacement #démographie

    ping @_kg_

    • Dans un contexte tendu, certains Tunisiens viennent en aide aux migrants subsahariens

      Après les propos du président Kaïs Saïed, les autorités ont averti : toute personne qui hébergerait des personnes étrangères sans carte de résidence ou déclaration au commissariat violerait la loi. L’avertissement vaut aussi pour les employeurs qui font appel à des travailleurs étrangers non déclarés. Ainsi, de nombreux migrants subsahariens en situation irrégulière se retrouvent expulsés et sans travail du jour au lendemain. Des Tunisiens tentent de les aider en organisant des collectes.

      Samia, dont le prénom a été changé pour préserver son anonymat, est en train de charger une voiture de vêtements et repas, résultats de collectes auprès de Tunisiens, solidaires avec les Subsahariens mis à la rue ces derniers jours.

      « Pour les personnes mises à la rue, malheureusement, il faut des repas prêts. Pour les personnes qui sont chez elles, de la viande des pâtes, du riz, des féculents… Des choses pour tenir, surtout qu’il fait un peu froid. Et puis, du lait pour les bébés, des couches et des lingettes, des produits d’hygiène intime… »

      Un geste de solidarité qui passe par le bouche-à-oreille et les réseaux sociaux, afin d’aider à la fois les migrants en attente d’un rapatriement chez eux et ceux qui restent cloîtrés sans pouvoir aller au travail.

      « La situation, elle, est très alarmante. Elle est très alarmante et elle peut dégénérer rapidement. Alors, j’entends et je comprends très bien que les gens sont contraints d’appliquer la loi. Mais c’est un peu court comme analyse. On peut donner un peu de temps aux personnes pour s’organiser. On peut leur donner une trêve parce qu’il fait froid, et on ne peut pas jeter des familles à la rue. Ça, c’est vraiment affligeant, parce qu’il y a des bébés en très bas âge qui sont à la rue avec les températures qu’il fait », poursuit Samia.

      Elle et son association aident une centaine de personnes, dont des migrants en sit-in depuis deux jours, devant l’organisation internationale pour les migrations.

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      L’analyse de l’historienne Sophie Bessis

      RFI : Comment le pays en est arrivé là ?

      Sophie Bessis : « La première chose, c’est, pour remonter loin dans l’histoire, il y a quand même une vieille tradition raciste anti-Noir en Tunisie qui n’a pas disparu, même si dans les années 1960 et 1970, le panafricanisme qui était à l’honneur avait un petit mis sous boisseau cette vieille tradition qui vient d’une tradition esclavagiste et du fait que les populations noires nationales ont toujours été marginalisées. La Tunisie est en crise actuellement. La recherche de bouc-émissaire est toujours un compagnon d’une population en crise. Nous avons en Tunisie un parti nationaliste, il faudrait se poser la question sur ce qu’il représente et pourquoi. Et la question la plus importante est pourquoi les plus hautes autorités de l’État ont repris cette rhétorique qui est d’un racisme absolument primaire. Ce sont les stéréotypes racistes les plus éculés que l’on retrouve dans toutes les extrêmes droites du monde. »

      À quel point l’externalisation de la sécurité des frontières européennes a-t-elle joué dans le discours des autorités ?

      Il y a une progression des droites européennes qui est tout à fait alarmante en ce qui concerne la question migratoire et il y a une influence réelle disons et les moyens de pression des pays européens sur des pays comme la Tunisie dont vous connaissez l’ampleur de la crise économique, monétaire, financière et sociale donc il n’est pas impossible du tout qu’une partie de cette chasse anti-migrants soient dues aussi à ces pressions anti-européennes. En revanche, là où il faut se poser une question, c’est pourquoi cette violence ? Parce que malheureusement, la politique anti-migrants est devenue quelque chose de banale dans le monde d’aujourd’hui, mais la violence à la fois de la parole publique et la violence des gens contre les Subsahariens oblige aujourd’hui à se poser des questions, sur l’État de la société tunisienne et de son appareil dirigeant.

      L’Union africaine a réagi, qualifiant les propos du président de « choquants » et appelant au calme, mais quel impact pourrait avoir ces déclarations sur la diplomatie tunisienne en Afrique ?

      Il y a une boussole qui a été perdue, il y a une boussole qui est cassée aujourd’hui en Tunisie et j’espère que les pairs africains de la Tunisie et en particulier les pays dont sont originaires une bonne partie des migrants Subsahariens, sera plus ferme à l’égard de la Tunisie.

      https://www.rfi.fr/fr/afrique/20230228-dans-un-contexte-tendu-certains-tunisiens-viennent-en-aide-aux-migrants

    • Étudiant congolais en Tunisie : « Je ne sors plus, je reste confiné chez moi »

      Marc* a 22 ans et vit en Tunisie depuis un an. Muni d’un visa étudiant, ce jeune homme congolais s’est installé à Tunis dans l’espoir de finaliser son cursus universitaire avant de rentrer dans son pays d’origine. Mais depuis le discours anti-migrants du président tunisien, Marc ne sort plus de chez lui de peur de se faire agresser ou embarquer par la police.

      Le 21 février, le président tunisien Kaïs Saïed n’a pas mâché ses mots à l’égard des quelque 21 000 Africains subsahariens vivant en Tunisie. Les accusant d’être source de « violence, de crimes et d’actes inacceptables », le chef de l’État a évoqué la mise en place de « mesures urgentes » pour lutter contre ces « clandestins ». Depuis, dans ce pays frappé par une grave crise économique, un vent de panique souffle parmi les personnes noires - tunisiennes comme immigrées, avec ou sans papiers. Ces derniers jours, les cas de personnes victimes d’attaques verbales et physiques, expulsées manu militari de leur appartement ou arrêtées arbitrairement dans la rue par les forces de l’ordre, se sont multipliées.

      Marc est, pour l’heure, épargné. Étudiant depuis un an à Tunis, installé dans un quartier résidentiel de la capitale et muni d’un titre de séjour étudiant, Marc n’est pas un « clandestin ». Pourtant, son statut ne le protège pas des agressions.
      « Je suis à l’abri chez moi, mais jusqu’à quand ? »

      "Je ne sors plus de chez moi. Je reste confiné. Ces derniers jours, je ne vais plus en cours. J’ai trop peur. Dans la rue, on entend souvent les mêmes phrases : ’Rentrez chez vous ! Rentrez chez vous !’. Comment voulez-vous que j’arrive à l’arrêt de bus ou au métro [au tramway, ndlr] pour aller étudier ? J’ai peur de me faire agresser verbalement ou physiquement sur le trajet.

      J’ai entendu parler de camarades expulsés de chez eux, juste à cause de leur couleur de peau. Certains étaient en règle, d’autres non. Ce n’est pas un papier administratif, mon statut d’étudiant, qui va me protéger. Moi, pour l’instant, on ne me jette pas dehors. Je vis en colocation avec trois autres étudiants congolais. Je suis à l’abri, mais jusqu’à quand ?

      Des dizaines de Subsahariens, dont des familles avec enfants, campent actuellement devant les ambassades de leur pays. Certains y ont trouvé refuge après avoir été chassés de chez eux. Selon les chiffres cités par les ONG, plus 20 000 ressortissants d’Afrique subsaharienne vivent en Tunisie, soit moins de 0,2% de la population totale.

      Il y a eu des attaques à l’arme blanche aussi. Un de mes amis a reçu un coup de couteau alors qu’il sortait d’une épicerie.

      Le discours du président a eu un retentissement terrible. Il y a toujours eu du racisme en Tunisie. Il y a toujours eu des arrestations, il y a toujours eu des contrôles dans la rue de manière arbitraire, mais c’était moins violent. Par exemple, moi, avant, les autorités pouvaient m’arrêter dans la rue, des agents contrôlaient mon identité sur place et ils me laissaient repartir cinq minutes après.
      « On ne prend plus les transports en commun, on prend des taxis »

      Désormais, on arrête les gens et on les embarque directement au poste de police, on peut les mettre en cellule plusieurs jours sans raison. Pour la première fois, il y a quelques jours, des agents m’ont arrêté dans la rue, ils n’ont pas voulu me laisser aller en cours, alors que je leur montrais mes papiers en règle. Ils m’ont embarqué au poste. J’ai eu tellement peur. Ils ont vérifié mon passeport, ma carte d’étudiant et ils m’ont laissé repartir. J’ai eu de la chance.

      Pour d’autres Noirs, ça se passe moins bien. Ils peuvent rester 3, 4, 5 jours au poste.

      Pour vous dire la vérité, pour aller travailler ou aller étudier, les ressortissants noirs ne marchent plus sur les trottoirs, ne prennent plus les transports en commun. Ils prennent des taxis.

      Cette situation a poussé des centaines de personnes à vouloir rentrer dans leurs pays. L’ambassade de Côte d’Ivoire a lancé une campagne de recensement de ses ressortissants souhaitant rentrer au pays. L’ambassade du Mali propose également à ses ressortissants de s’inscrire pour un « retour volontaire ». L’ambassade du Cameroun a, elle aussi, indiqué, dans un communiqué, que ses ressortissants pouvaient se « rapprocher de la chancellerie pour tout besoin d’information ou procédure dans le cadre d’un retour volontaire ». Marc souhaite, lui aussi, rentrer dans son pays.

      J’ai tellement peur que j’ai contacté les agents de l’OIM (Organisation internationale pour les migrations) pour qu’ils m’aident à rentrer chez moi [via le programme de ’retours volontaires’, ndlr], mais pour l’instant personne ne m’a répondu. Je ne comprends pas… En cette période difficile, on devrait avoir le soutien des instances internationales. Mais on n’a rien. C’est le silence radio."

      Si certains migrants ont réussi à rentrer chez eux via leurs ambassades ces dernières heures, des dizaines d’autres errent entre les bureaux du Haut commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) et ceux de l’OIM, à Tunis. Beaucoup sont de Sierra Leone, de Guinée Conakry, du Cameroun, du Tchad ou du Soudan, des pays parfois sans ambassade dans la capitale tunisienne. Arrivés illégalement, ils se sont retrouvés, après les propos de Kaïs Saïed, soudainement à la rue et privés des emplois informels grâce auxquels ils survivaient.

      *Le prénom a été changé

      https://www.infomigrants.net/fr/post/47231/etudiant-congolais-en-tunisie--je-ne-sors-plus-je-reste-confine-chez-m

    • Racisme en Tunisie. « Le président a éveillé un monstre »

      Depuis quelques jours, la Tunisie est le théâtre d’une furieuse poussée de racisme contre les populations subsahariennes, déclenchée notamment par les récentes déclarations du président Kaïs Saïed. Du sud du pays à la capitale, Tunis, la crainte d’une escalade est grande.

      « Regarde ce qu’ils nous font, c’est terrible ! Comme si on n’était pas vraiment des hommes. » Sur l’écran du smartphone que me tend l’homme qui s’indigne ainsi, Adewale, deux hommes à la peau noire recroquevillés sur un canapé sont menacés par des assaillants encapuchonnés, armés de ce qui ressemble à des couteaux. Les victimes roulent des yeux terrifiés et psalmodient des suppliques. En réponse, leurs agresseurs hurlent, miment des coups. Puis la vidéo TikTok s’arrête et laisse place à une autre : elle montre des hommes et des femmes qui marchent dans la rue en criant des slogans, la mine hostile. « Ça ce sont des gens qui manifestaient contre la présence des Subsahariens dans le pays. Je ne comprends pas pourquoi ils nous détestent tant. »

      Adewale parle d’une voix lasse. Il l’a dit plusieurs fois pendant l’entretien : il n’en peut plus. De sa situation bloquée. De sa vie fracturée. De l’atmosphère viciée de ces derniers jours. Ce jeune Nigérian né à Benin City a beau avoir tout juste 30 ans, il a déjà derrière lui tout un passé de drames. Plus tôt, il m’avait raconté les larmes aux yeux comment sa femme est morte lors d’une tentative de fuir la Libye et de rejoindre l’Europe en bateau. Diminuée par les mauvais traitements endurés en Libye, malade, elle est décédée après un jour de traversée. « C’était le 27 mai 2017, je ne l’oublierai jamais », répète-t-il. Il explique avoir dû faire croire qu’elle s’était assoupie sur ses genoux pour éviter que son corps ne soit jeté à la mer par les autres voyageurs.

      Lui a été récupéré deux jours plus tard par un navire de gardes-côtes tunisiens alors qu’il dérivait au large de Sfax avec ses compagnons d’infortune. Depuis, il survit dans ce pays, obsédé par la perte de sa compagne dont il visite et fleurit régulièrement la tombe. Impossible pour lui de rentrer au Nigeria : la famille de sa compagne décédée le tient pour responsable et lui aurait signifié son arrêt de mort.

      À plusieurs reprises, Adewale me montre des photos personnelles pour mieux illustrer son propos. Défilent des portraits de sa défunte femme souriante, barrés d’un grand « RIP » coloré, suivis de clichés de sa tombe en béton ornée de fleurs. Puis ce sont des images où on le voit travailler sur un chantier de Zarzis, la ville où il réside désormais. Adewale me prend à témoin : c’est un bon travailleur, un ouvrier du bâtiment acharné, levé à l’aube, qui accepte de bosser au noir pour un salaire de misère. Depuis six ans qu’il réside en Tunisie, il n’a pas démérité. Comme tous ses camarades, ajoute-t-il. Alors aujourd’hui il tombe des nues : « Il y a peu de temps, j’ai été agressé dans la rue, à côté de chez moi. Un homme m’a donné un coup de poing dans l’estomac en me disant de rentrer dans mon pays. Tu imagines ? Dans ces cas-là, il ne faut surtout pas répondre sinon tout le monde se rue sur toi. C’est pour ça que je n’ai pas réagi. Mais je ne comprends pas cette haine. »

      Une version arabe du « #grand_remplacement »

      Zarzis n’est pourtant pas l’épicentre des violences racistes qui se déchaînent en Tunisie depuis plusieurs jours. Située dans le sud-est de la Tunisie, à moins de 100 kilomètres de la frontière libyenne, cette ville côtière d’environ 70 000 habitants est réputée plutôt « ouverte », avec une communauté de pêcheurs qui se sont parfois distingués par leur aide apportée aux embarcations de personnes exilées en détresse. Elle abrite aussi depuis peu un cimetière verdoyant nommé « Jardin d’Afrique », ou « Paradis d’Afrique », inauguré en 2021, qui se veut le symbole du respect accordé aux dépouilles des personnes décédées en mer.

      Mais à Zarzis comme ailleurs en Tunisie, la situation est tendue. Le déclencheur ? Un discours du président Kaïs Saïed le mardi 21 février 2023 lors d’une réunion du Conseil de sécurité nationale, qui a déchaîné ou réveillé chez certains une forme de racisme latent. Entre deux saillies sur les « violences, [...] crimes et actes inacceptables » prétendument commis par les « hordes » de personnes exilées clandestines, celui qui, depuis juillet 2021, s’est arrogé tous les pouvoirs, a déclaré que la migration correspondait à une « entreprise criminelle [...] visant à changer la composition démographique de la Tunisie ». L’objectif du complot ? En faire un pays « africain seulement » afin de dénaturer son fond identitaire « arabo-musulman ». Une traduction en arabe de la théorie du « grand remplacement » prônée en France par Renaud Camus, Éric Zemmour et leurs émules. Rodant déjà sur les réseaux sociaux, et portées par le Parti nationaliste tunisien, un mouvement relativement confidentiel jusqu’à ce début d’année, ces thèses ont soudain jailli au grand jour, entraînant une vague de violences qui s’est ressentie jusqu’à Zarzis.

      Adewale raconte ainsi qu’il se fait régulièrement insulter, qu’il ne peut plus se rendre au travail, et que plusieurs de ses amis subsahariens ont été mis à la porte de chez eux par leurs bailleurs pour la seule raison qu’ils étaient noirs. Il ajoute que lui a de chance : le sien est venu toquer à sa porte pour lui dire de le prévenir s’il avait des problèmes. Il n’empêche : il se terre chez lui. Et de dégainer encore une fois son smartphone pour me montrer une énième vidéo TikTok, ce réseau social devenu avec Facebook le vecteur principal du racisme – mais aussi la première source d’information des exilés. « Ça c’était à Sfax hier, explique Adewale, des jeunes ont attaqué un immeuble où vivaient des Subsahariens, et tout le monde a été mis dehors. » Sur l’écran, des hommes, des femmes et des enfants sont assis sur le trottoir avec leurs affaires, l’air désemparé. « Il y a des gens terribles ici », ajoute Adewale.

      « Une forme de psychose qui s’installe »

      Rencontrés à Zarzis, Samuel et Jalil vivent eux aussi dans la peur depuis le discours du 21 février. Ils ne sont pas d’origine subsaharienne, mais ils craignent que les temps à venir soient dramatiques pour les personnes exilées vivant en ville : « On conseille aux migrants qu’on suit de ne pas sortir, ou alors seulement au petit matin, pour aller faire les courses, parce qu’on ne sait pas comment ça peut tourner », explique Jalil. Il ne cache pas craindre une criminalisation de leur activité : « Les policiers savent qu’on assiste les personnes en transit ici. Dans le climat politique actuel, il y a forcément une forme de psychose qui s’installe. »

      L’entretien avec ces deux militants locaux a été fixé par WhatsApp, après vérification de ma situation : est-ce que les autorités savent que je suis journaliste ? Non ? J’en suis bien sûr ? Rendez-vous est finalement donné dans une sorte de villa touristique baroque, à quelques kilomètres du centre-ville. « C’est un peu notre cachette », dit Jalil, souriant de ce terme incongru. Tous deux expliquent en s’excusant que la situation politique les force à prendre des précautions dont ils préféreraient se passer. Âgés d’une quarantaine d’années, Samuel et Jalil s’emploient depuis des années à assister les nombreuses personnes exilées qui atterrissent dans la ville. Ils ont constaté que, bien avant l’envolée raciste du président, les personnes subsahariennes se voyaient déjà appliquer un traitement différencié : « On les accompagne s’ils doivent aller à l’hôpital, car sinon on ne les prend pas en charge. Et quand ils se font agresser, ce n’est même pas la peine pour eux de se rendre à la police, car elle n’enregistrera pas leur plainte. »

      C’est par le biais de ces deux militants que je rencontre leurs amis Yacine et Nathan. Le premier vient du Mali, le second de Côte d’Ivoire. Tous les deux sont passés par la Libye, qu’ils décrivent comme un enfer, entre sévices physiques et travail forcé. Interrogés sur la période passée là-bas, ils éclatent d’un rire nerveux. « C’est notre manière d’évacuer ces moments, explique Yacine. Personne ne peut comprendre l’horreur de ce pays pour un Noir s’il ne l’a pas vécu. »

      Quand ils ont finalement réussi à prendre la mer, après de longs mois d’errance et de labeur, ils ont été récupérés par un navire des gardes-côtes tunisiens, qui les a déposés à Zarzis. Ils ont ensuite été convoyés à Médenine puis à Djerba, où ils ont travaillé dans le bâtiment. De retour à Zarzis, ils ne pensent qu’à une chose : prendre la mer pour l’Europe. Et tant pis si pour cela ils doivent tenter la traversée sur un « iron boat », ces bateaux de métal conçus à la va-vite et qui ont sur certains rivages remplacé les navires en bois ou en résine – une évolution des conditions de navigation qui a provoqué de nombreux drames, ces embarcations de fortune prenant l’eau à la moindre vague.
      Des centaines de morts dans l’indifférence

      Plus de 580 personnes sont mortes en 2022 après avoir pris la mer depuis la Tunisie, dans l’indifférence de la communauté internationale. Pour Yacine et Nathan, qui ont déjà tenté la traversée depuis la Tunisie trois fois – pour se voir à chaque fois ramenés à quai par les gendarmes tunisiens des mers –, il existerait cependant des moyens concrets pour assurer une traversée plus sûre : « Il suffit de bien s’organiser, d’utiliser des applications pour connaître la météo dans les trois jours qui arrivent, et de regarder la hauteur des vagues. Après, tu te confies à Dieu. » Davantage que les éléments, ils craignent les hommes : « Le vrai problème, ce sont les gardes-côtes, qui se montrent violents et dangereux, au point de parfois faire couler les bateaux ».

      À Zarzis, une ville endeuillée par le terrible naufrage du 21 septembre 2022 au cours duquel 18 Tunisiens se sont noyés dans des circonstances troubles semblant impliquer les gardes-côtes, la question ne laisse pas la population insensible. De nombreuses manifestations ont eu lieu, notamment pour exiger des enquêtes sur les circonstances du drame. Début septembre a également été organisée une « commémorAction » réunissant Tunisiens et familles de disparus venus de divers pays africains. Mais dans le contexte actuel, la critique des politiques migratoires se retourne parfois contre les migrants, explique Jalil : « Certains disent que les jeunes Tunisiens sont morts à cause des Subsahariens, parce que le comportement violent des gardes-côtes serait dû à la volonté d’endiguer avant tout le départ des personnes noires. »

      Après plusieurs années passées en Tunisie, Yacine et Nathan assurent que le racisme était déjà sensible avant le discours du président. Refoulements à l’hôpital, loyers plus chers, charges d’électricité gonflées et travail sous-payé les poussent à considérer qu’eux et leurs camarades seraient en fait de pures aubaines pour ce pays. Pas dupes, ils font mine de s’étonner d’un traitement différencié avec des étrangers plus clairs de peau : « On s’est rendu compte que certains étrangers n’étaient pas concernés par les insultes et les mauvais traitements, notamment les Syriens, les Bangladais ou les Marocains. Peut-être que c’est la couleur de peau qui fait la différence ? Il faut dire qu’on est plus visuels ! »

      « Ici, c’est chez nous »

      Si l’ironie est de mise, la gravité aussi. Car les deux amis s’accordent à dire que le discours de Kaïs Saïed a jeté de l’huile sur le feu. Selon Nathan, « jouer sur la haine peut être très efficace, il suffit de voir ce qui se passe sur les réseaux sociaux ». Il s’inquiète logiquement du ralliement d’une partie de la population à cette croisade numérique. S’il a l’habitude de craindre la police, ne pas pouvoir marcher dans la rue ou se rendre à la boutique pour faire ses courses lui semble bien plus grave. Quant aux débordements, ils sont déjà là, s’indigne Yacine :

      Depuis le discours du président, on entend des insultes tout le temps. On te dit : « Ici, c’est chez nous. » Ça peut aussi passer par des petits gestes, quelqu’un à l’arrière d’un taxi qui s’étale de tout son long et ne te laisse qu’un bout de banquette, sans que tu puisses rien dire. Et parfois c’est grave : il y a quelques mois, un jeune Guinéen a été lapidé pour avoir changé une chaîne de télé dans un café. Des jeunes Tunisiens l’ont attendu à l’extérieur. Il a perdu un œil. J’ai peur que ce genre d’événements se reproduise bien plus souvent.

      Aux environs de Zarzis et dans la ville même, la plupart des personnes subsahariennes sont clandestines, n’ont aucune intention de rester en Tunisie et ont les yeux rivés sur la mer – à l’image d’Adewale, de Yacine et de Nathan. Pour beaucoup de celles et ceux passés par la Libye, ils n’ont de toute façon plus de papiers d’identité, les divers exploiteurs de misère croisés dans ce pays les leur ont confisqués. Mais les 21 000 ressortissants de pays subsahariens qui vivent en Tunisie sont tous plus ou moins logés à la même enseigne, qu’ils soient « légaux » ou « illégaux ».

      À Sfax, deuxième ville du pays secouée par plusieurs nuits de violences racistes dont le bilan est encore incertain, la tension imprègne les rues. Interrogés sur les derniers événements, certains Tunisiens déplorent les violences qu’ils attribuent à des jeunes écervelés agissant en bandes. « Ce sont des crétins qui se montent la tête sur Internet », estime un vieil homme rencontré à la terrasse d’un café. Mais d’autres assument un discours dont il ressort qu’il n’y a pas de fumée sans feu et que les victimes l’ont sans doute un peu cherché.

      Quant aux principaux concernés qui osent sortir de chez eux, certains ne croient plus vraiment au dialogue. À l’extérieur de la casbah de Sfax, en bordure de la large avenue des Martyrs, quelques exilés ont dressé les étals d’un petit marché africain – épices, fruits et légumes du pays. Interrogé, un jeune homme aux yeux tristes confie avoir « très peur des jours qui arrivent ». Il me renvoie vers un trio de femmes, apparemment chargées des communications. Tout en remballant leurs sacs de provisions, elles assurent ne pas vouloir témoigner : « On ne veut plus parler, on a trop parlé ! Et ça ne change rien ! C’est de pire en pire ! »

      « Les Noirs n’ont plus de valeur ici ! »

      Devant l’ambassade de Côte d’Ivoire à Tunis, par contre, les langues se délient. Cela fait quelques jours que le lieu excentré en banlieue est un point de rassemblement pour les Ivoiriens désemparés. Certaines familles dorment même sous des tentes, dressées sur un terre-plein à proximité du bâtiment, après qu’elles ont été expulsées de leur habitation. Tous ici affirment être arrivés par avion en Tunisie, donc par la voie légale. Leur désenchantement est immense.

      Parmi la grosse cinquantaine de présents, certains sont venus tenter de faire avancer leur situation administrative – qu’il s’agisse de rester dans le pays ou de le quitter. Beaucoup s’indignent de la question des « pénalités » que le gouvernement tunisien entend faire payer aux personnes désirant rentrer chez elles – et qui, selon la durée du séjour, peuvent atteindre de fortes sommes. Les autorités marchent sur la tête, s’accordent-ils : elles veulent qu’ils partent mais font tout pour que ce ne soit pas possible…

      Au-delà des épineuses questions administratives, les discours tenus ici sont unanimes : le racisme a explosé dans des proportions effrayantes. Prendre les transports en commun revient ainsi à s’exposer à de forts risques d’agression. Les témoignages s’enchaînent. « Moi je suis terrée chez moi depuis bientôt une semaine. C’est la première fois que je sors », dit l’une. « Des jeunes ont cassé ma porte en pleine nuit pour m’expulser de chez moi », s’émeut un autre, qui montre les contusions sur son visage et sur son cou en expliquant avoir été frappé. « J’étais dans le métro avec mes deux enfants quand des jeunes nous ont crié : “Rentrez chez vous, les singes !” », déplore une mère de famille, le petit dernier agrippé à son dos.

      Alors que plusieurs d’entre eux évoquent les rafles policières menées jusqu’à la sortie des crèches et la situation des personnes maintenues en prison, l’un d’eux sort un smartphone pour montrer les images passablement floues d’un homme noir insulté et frappé par ce qui ressemble à des policiers – « ils le torturent ». Puis c’est une autre où des Tunisiens crient « on n’est pas des Africains ! ». Enfin, une dernière qui déclenche des cris outrés quand l’orateur déclare : « Les Noirs n’ont plus de valeur ici ! »
      « Le feu vert à tous les débordements racistes »

      Face à ce déferlement de haine en ligne, les réactions sont contrastées. Un homme me déclare que le jour où il rentrera au pays il s’en prendra aux riches Tunisiens installés en Côte d’Ivoire – œil pour œil. Mais d’autres insistent pour imputer la responsabilité des violences à une minorité haineuse. « Beaucoup de Tunisiens m’ont aidé depuis que je suis arrivé », tient à témoigner Ismaël, jeune étudiant en informatique. Il parle d’une voix posée, évoque en souriant les délires administratifs qu’il a rencontrés jusqu’ici pour tenter de régulariser sa situation. Comme d’autres, il tempère, tente d’entrevoir une porte de sortie pour continuer à vivre dans ce pays qu’il dit aimer. Puis il se ravise : « En fait, je ne sais plus trop quoi penser. Le président a éveillé un monstre, et les derniers jours ont fait trop mal. »

      Une certitude : en pleine dérive autoritaire, le régime de Kaïs Saïed a libéré un fléau qui laissera des traces. « Il a donné le feu vert à tous les débordements racistes, qu’ils soient l’œuvre de la population ou des forces armées », explique un opposant tunisien, vétéran du renversement de Zine El-Abidine Ben Ali, en 2011, qui parle de « fascisme » pour désigner le pouvoir en place. « C’est un basculement très dangereux, contre lequel il va falloir lutter de toutes nos forces. »

      Inquiets, quelques centaines de manifestants se sont donné rendez-vous le 25 février pour dénoncer les discours et les violences racistes dans les rues de Tunis. Une initiative qui ne pèse pour l’instant pas lourd face à l’alliance de la parole présidentielle et des emballements racistes sur les réseaux sociaux.

      https://afriquexxi.info/Racisme-en-Tunisie-Le-president-a-eveille-un-monstre

    • Tunisie : des centaines de ressortissants d’Afrique subsaharienne rapatriés vers le #Mali et la #Côte_d’Ivoire

      Le président de la République tunisienne, Kaïs Saïed, a affirmé, le 21 février, que la présence dans le pays de « hordes » d’immigrés clandestins provenant d’Afrique subsaharienne était source de « violence et de crimes ».

      Des migrants subsahariens en attente de prendre un vol de rapatriement vers leur pays d’origine, au consul du Mali à Tunis, le 4 mars 2023. FETHI BELAID / AFP

      Quelque 300 Maliens et Ivoiriens ont quitté la Tunisie, samedi 4 mars, à bord de deux avions rapatriant des ressortissants d’Afrique subsaharienne cherchant à fuir des agressions et des manifestations d’hostilité après une violente charge du président, Kaïs Saïed, contre les migrants en situation irrégulière.

      Le 21 février, M. Saïed a affirmé que la présence en Tunisie de « hordes » d’immigrés clandestins provenant d’Afrique subsaharienne était source de « violence et de crimes » et relevait d’une « entreprise criminelle » visant à « changer la composition démographique » du pays.

      Samedi, « on a fait embarquer 133 personnes » parmi lesquelles « 25 femmes et 9 enfants ainsi que 25 étudiants » dans l’avion qui a quitté la Tunisie vers 11 heures, a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) un diplomate malien. Deux heures plus tard, un autre appareil devant rapatrier 145 Ivoiriens a décollé de Tunis, selon l’ambassadeur ivoirien en Tunisie, Ibrahim Sy Savané.

      Discours « raciste et haineux »

      Le discours présidentiel, condamné par des ONG comme « raciste et haineux », a provoqué un tollé en Tunisie, où les personnes d’Afrique subsaharienne font état depuis d’une recrudescence des agressions les visant et se sont précipitées par dizaines à leurs ambassades pour être rapatriées.

      Devant l’ambassade du Mali, surchargés de valises et ballots, tous ont dit fuir un climat lourd de menaces. « Les Tunisiens ne nous aiment pas, donc on est obligés de partir, mais les Tunisiens qui sont chez nous doivent partir aussi », a dit à l’AFP Bagresou Sego, avant de grimper dans un bus affrété par l’ambassade pour l’aéroport.

      Arrivé il y a quatre ans, Abdrahmen Dombia a interrompu ses études de mastère en pleine année universitaire : « La situation est critique ici, je rentre parce que je ne suis pas en sécurité. » Baril, un « migrant légal », s’est dit inquiet pour ceux qui restent. « On demande au président, Kaïs Saïed, avec beaucoup de respect de penser à nos frères et de bien les traiter », explique-t-il.
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      Selon le gouvernement ivoirien, 1 300 ressortissants ont été recensés en Tunisie pour un retour volontaire. Il s’agit d’une part importante de la communauté ivoirienne, qui, avec environ 7 000 personnes, est la plus importante d’Afrique subsaharienne en Tunisie, à la faveur d’une exemption de visa à l’arrivée.

      Quelque trente étudiants ivoiriens, en situation régulière, font partie des rapatriés. « Ils ne se sentent pas à l’aise, certains ont été victimes d’actes racistes, certains sont en fin d’études, d’autres les ont interrompues », a précisé à l’AFP par téléphone depuis l’aéroport Michael Elie Bio Vamet, président de l’Association des étudiants ivoiriens en Tunisie. « Il y a des agressions presque tous les jours, des menaces, ou bien ils sont mis dehors par leurs bailleurs, ou agressés physiquement », a-t-il ajouté.

      « Déferlement de haine »

      Pour la plupart issus de familles aisées, des dizaines d’étudiants d’Afrique subsaharienne étaient inscrits dans des universités ou des centres de formation en Tunisie. Apeurés, beaucoup sont déjà repartis par leurs propres moyens, selon leurs représentants.

      L’Association des étudiants et stagiaires africains en Tunisie (AESAT) a documenté l’agression, le 26 février, de « quatre étudiantes ivoiriennes à la sortie de leur foyer universitaire » et d’« une étudiante gabonaise devant son domicile ». Dès le lendemain du discours de M. Saïed, l’AESAT avait donné comme consigne aux étudiants subsahariens « de rester chez eux » et de ne plus « aller en cours ». Cette directive a été prolongée au moins jusqu’au 6 mars.

      Des Guinéens rentrés par le tout premier vol de rapatriement mercredi ont témoigné auprès de l’AFP d’un « déferlement de haine » après le discours de M. Saïed.
      Lire aussi : Article réservé à nos abonnés En Tunisie, le tournant répressif du régime de Kaïs Saïed

      Bon nombre des 21 000 ressortissants d’Afrique subsaharienne recensés officiellement en Tunisie, pour la plupart en situation irrégulière, ont perdu du jour au lendemain leur travail et leur logement. Des dizaines ont été arrêtés lors de contrôles policiers, certains sont encore en détention. D’autres ont témoigné auprès d’ONG de l’existence de « milices »qui les pourchassent et les détroussent.

      Cette situation a provoqué l’afflux de centaines de personnes à leurs ambassades pour être rapatriées. D’autres, encore plus vulnérables car issues de pays sans ambassade à Tunis, ont rejoint un campement improvisé devant le siège de l’Office international pour les migrations (OIM), où elles dorment dans des conditions insalubres.

      Selon l’ambassadeur ivoirien, la Tunisie a promis de renoncer à réclamer aux personnes en situation irrégulière des pénalités (80 dinars, soit 25 euros par mois de séjour irrégulier) qui, pour certains, dépassaient 1 000 euros

      https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/03/04/des-centaines-de-ressortissants-d-afrique-subsaharienne-rapatries-de-tunisie
      #renvois #expulsions #rapatriement #retour_au_pays

    • La Tunisie rongée par les démons du racisme

      L’éruption d’hostilité aux Africains subsahariens encouragée par le président Kaïs Saïed s’ajoute à la régression autocratique et entache encore un peu plus l’image de la Tunisie à l’étranger.

      Il est bien loin, le temps où la Tunisie inspirait hors de ses frontières respect et admiration. Chaque semaine qui passe entache un peu plus l’image de ce pays qui brilla jadis d’une flamme singulière dans le monde arabo-musulman. Que reste-t-il du prestige que lui conférait son statut d’avant-garde en matière de libertés publiques, de pluralisme politique, de droits de femmes et de respect des minorités ? Le chef de l’Etat, Kaïs Saïed, qui s’est arrogé les pleins pouvoirs à la faveur d’un coup de force en juillet 2021, lui impose désormais un tournant répressif, conservateur et xénophobe des plus préoccupants. La Tunisie en devient méconnaissable.

      Dans cette affaire, tout est lié : le retour à l’autocratie va de pair avec la crispation identitaire, les deux se nourrissant d’un prétendu « complot » contre l’Etat et la patrie. L’une des illustrations les plus déprimantes de cette régression est la récente vague de racisme anti-Noirs qui secoue le pays. Dans la foulée de la déclaration du 21 février du président Saïed, qui a fustigé des « hordes de migrants clandestins » associées à ses yeux à un « plan criminel » visant à « modifier la composition démographique » du pays en rupture avec son « appartenance arabo-islamique », l’hostilité se déchaîne contre les étudiants et les immigrés issus de l’Afrique subsaharienne.

      Ces derniers sont chaque jour victimes d’agressions physiques et verbales à Tunis et dans d’autres centres urbains. Le discours conspirationniste du chef de l’Etat, aux accents de type « grand remplacement », a libéré un racisme enfoui au tréfonds de la société tunisienne, héritage de l’esclavage en Afrique du Nord, aux séquelles psychologiques durables.
      L’embarras prévaut

      L’éruption de cette xénophobie cautionnée au plus haut niveau de l’Etat a obscurci la perception de la Tunisie à l’étranger. M. Saïed a beau avoir tenté de nuancer ses propos en précisant qu’il visait les immigrants en situation irrégulière, le mal est fait. Ses brigades de fidèles, dont certains sont affiliés à un Parti nationaliste tunisien aux discours et aux méthodes dignes de l’extrême droite européenne, traquent les Subsahariens. Les Tunisiens les plus progressistes avouent leur « honte » et tentent d’organiser dans l’adversité un front « antifasciste ». La consternation règne aussi dans de nombreuses capitales du continent. L’Union africaine a « condamné » les « déclarations choquantes » du président Saïed.
      Lire aussi : Article réservé à nos abonnés « Le régime de Kaïs Saïed en Tunisie n’a pas changé de nature, mais de degré de répression »

      Dans les capitales européennes, c’est plutôt l’embarras qui prévaut. Si les chancelleries ne manquent pas d’exprimer occasionnellement leur « préoccupation » face au recul de l’Etat de droit en Tunisie, elles n’ont pas réagi à la charge présidentielle contre les migrants subsahariens. Et pour cause : M. Saïed répond plutôt positivement aux appels de l’Europe – au premier chef de l’Italie – à mieux verrouiller ses frontières maritimes afin d’endiguer les traversées de la Méditerranée.

      Le cadenassage de « l’Europe forteresse », qui contribue à fixer en Afrique du Nord des candidats à l’exil européen, n’est pas étranger aux tensions migratoires dont cette région est le théâtre. Cherche-t-on à ménager M. Saïed afin d’éviter qu’il « lève le pied » sur la surveillance de son littoral ? Si telle était l’arrière-pensée, elle ajouterait le cynisme à un dossier déjà suffisamment dramatique.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/03/04/la-tunisie-rongee-par-les-demons-du-racisme_6164127_3232.html

    • En Tunisie, le douloureux retour au pays des exilées subsahariennes

      Elles ont tout quitté pour venir en Tunisie, trouver un travail et subvenir aux besoins de leur famille dans leur pays. Souvent exploitées ou livrées à elles-mêmes durant leur parcours de vie en Tunisie, des femmes migrantes subsahariennes racontent comment elles ont quitté ou vont quitter le pays, après les propos du président Kaïs Saïed sur son intention de contrer le phénomène migratoire, source de violences et de crimes selon ses mots. Témoignages.

      À l’entrée de l’aéroport de Tunis Carthage, ce samedi 4 mars, l’aube commence à pointer et Mireille fait les cent pas. Emmitouflée dans une écharpe rouge pour se réchauffer, elle se confie : « J’ai vraiment hâte que tout ça se finisse. » Ivoirienne, elle attend, fébrile, avec une centaine d’autres de ses compatriotes en file indienne, valises à la main, le premier vol de rapatriement vers Abidjan, une opération lancée par l’ambassade peu après les propos polémiques de Kaïs Saïed du 21 février sur les migrants subsahariens.

      Dimanche soir, la Présidence de la République et celle du gouvernement tunisien ont tenté d’apaiser le ton tout en disant s’étonner de la « campagne liée au prétendu racisme en Tunisie » et rejette ces accusations. Mais elles ajoutent mettre en place des mesures pour les résidents subsahariens en Tunisie, notamment avec l’octroi de cartes de séjour d’un an pour les étudiants. Le gouvernement a également annoncé faciliter les départs volontaires pour ceux qui le souhaitent et un numéro vert pour signaler les violations de leurs droits.

      Après ses déclarations, qualifiées de « racistes » par de nombreuses associations, beaucoup de migrants ont été expulsés de chez eux par leur propriétaire, et ont perdu leur travail. Les agressions dans la rue se sont multipliées et les chancelleries de plusieurs pays ont décidé d’affréter des avions pour permettre des rapatriements à leurs ressortissants. Près de 2 000 Ivoiriens candidats au départ ont déjà été recensés en moins d’une semaine par l’ambassade et, chaque jour, la liste s’allonge. La Guinée a rapatrié une cinquantaine de ressortissants. Le Mali, 154.

      Depuis 2020, une étude de l’Observatoire national pour la lutte contre la violence à l’égard des femmes en partenariat avec le Fonds des Nations unies pour les questions de santé sexuelle et reproductive (UNFPA), note une « recrudescence » de la présence des femmes migrantes dans les centres d’accueil de femmes victimes de violences. « Les violences faites aux femmes migrantes sont difficilement condamnées et prises en charge par l’État en raison du statut irrégulier des femmes, de leur accès limité aux services en raison de la peur d’être dénoncées ou encore d’être expulsées du pays », peut-on lire dans le rapport.

      Aujourd’hui, le retour précipité au pays, le risque d’une expulsion brutale de leur logement ou d’une agression sont devenus une préoccupation quotidienne de la grande majorité des femmes subsahariennes en Tunisie, déjà souvent exposées à des violences et à la vulnérabilité économique. Mediapart a donné la parole à trois d’entre elles.
      Quatre ans en Tunisie et un traumatisme

      Mireille a été particulièrement choquée par ses derniers jours passés dans le pays. Cette coiffeuse de formation qui avait laissé, quatre ans plus tôt, ses trois enfants en Côte d’Ivoire pour tenter de soutenir financièrement sa famille, n’a vécu que des désillusions. « Dès que je suis arrivée, mes contacts sur place m’ont mise dans le circuit de femmes de ménage. Je gagnais 450 dinars par mois (135 euros) et je travaillais 12 heures par jour, j’ai eu sans arrêt des problèmes de santé à cause des produits nettoyants qu’on nous faisait utiliser et je ne sens plus mon dos », raconte-t-elle.

      Très vite, elle regrette d’être venue mais se rend compte que les pénalités pour avoir excédé sa durée de séjour dans le pays sont lourdes, 80 dinars par mois, à payer à la police des frontières. Ces pénalités sont plafonnées à 3 000 dinars (900 euros) depuis 2017. « Alors, comme d’autres, je me suis retrouvée coincée et j’ai continué de travailler pour tenter d’économiser et de payer mon retour », dit-elle.

      Dans une étude publiée en 2020 par l’ONG Terre d’asile en Tunisie sur le parcours des femmes migrantes, la précarité et la vulnérabilité de femmes comme Mireille étaient déjà dénoncées. L’une des conclusions de l’étude invitait l’État tunisien à « travailler au développement de conditions d’accueil pour les femmes migrantes qui leur permettraient de s’autonomiser, notamment au moyen de l’accès à un travail décent et à un séjour régulier, et d’accéder véritablement à leurs droits », peut-on lire dans la conclusion de l’étude basée sur les témoignages d’une vingtaine de femmes. « Cette autonomisation leur permettra d’être moins vulnérables aux violences, aux arnaques et à la précarité, tout en leur donnant toutes les chances de s’intégrer au sein de la société tunisienne. »

      Pour Mireille, l’intégration a fini en traumatisme. Deux jours après le communiqué de la présidence sur les Subsahariens, sa maison a été mise à sac par deux jeunes Tunisiens dans la nuit du 23 février. « J’étais en train de cuisiner et j’ai entendu des coups à la fenêtre, avec des hommes qui criaient des mots en arabe, au début je n’ai pas compris », raconte-t-elle. Puis elle entend en français : « Les Africains, sortez, on veut plus de vous. »

      Elle prend peur et appelle son employeur, une femme tunisienne avec qui elle s’entend bien. « Elle a tenté de m’aider, raconte-t-elle. Elle voulait que je m’échappe sur la route principale pour passer la nuit chez elle, mais les agresseurs étaient devant ma porte. Il n’y avait aucune échappatoire et mes voisins au-dessus m’ont crié qu’ils étaient armés. »

      La police, alertée aussi par les Subsahariens vivant au-dessus de chez Mireille, arrive sur les lieux mais près d’une heure plus tard. Les deux jeunes ont pu rentrer et saccager toutes les affaires de Mireille, lui voler également une somme de 6 000 dinars (1 800 euros), l’argent qu’elle avait économisé pour rentrer chez elle et pour l’envoyer à sa famille.

      Les migrants en situation irrégulière ne peuvent pas ouvrir de compte en banque et transférer de l’argent à leur famille. L’envoi d’argent se fait surtout par des connaissances qui font des allers-retours, et certains migrants sont obligés d’emmagasiner de l’argent en espèces chez eux, faute de mieux.

      Juste avant que les agresseurs enfoncent la porte, Mireille est hissée par ses voisins à l’aide d’un drap au premier étage de la résidence, en passant par une fenêtre de la cour intérieure qui ne donne pas sur la rue. Jointe au téléphone un jour après son arrivée à Abidjan, elle se rappelle avec émotion ce moment. « Je n’arrête pas de penser jusqu’à maintenant à ce qu’ils m’auraient fait s’ils m’avaient trouvée sur place », témoigne-t-elle d’une voix tremblante.

      Aujourd’hui, elle attend de pouvoir revoir ses enfants dans un centre à Abidjan où ont été dispatchés les premiers rapatriés. « Je ne les ai pas vus depuis quatre ans, le plus important pour moi, c’est de les retrouver, ensuite je réfléchirai à l’après », dit-elle. Elle est partie avec seulement quelques affaires achetées juste avant le départ grâce à des dons.
      L’attente d’un retour, après avoir tout perdu

      Les vidéos de l’incident ont fait le tour des réseaux sociaux et ont alerté sur la recrudescence des agressions envers les Noirs en Tunisie après les propos de Kaïs Saïed, poussant de nombreux migrants à se cloîtrer chez eux ou à tenter de partir au plus vite.

      Devant l’ambassade de Côte d’Ivoire le vendredi 3 mars, Fortune, 33 ans, attend encore d’être convoquée pour faire partie des prochains vols de rapatriement mais un document lui manque, l’extrait de naissance de son enfant, né en Tunisie en 2019. « Lors de sa naissance, je n’ai pas eu l’extrait de naissance, il fallait payer et je n’avais pas d’argent, et ensuite j’avais passé le délai donc j’ai déposé une demande à l’OIM [l’Organisation internationale pour les migrations qui dépend des Nations unies – ndlr] et jusqu’à présent je n’ai pas le document. »

      Elle ne peut pas laisser son fils sur place mais elle se préparait au départ bien avant les propos de Kaïs Saïed. « Dès mon départ vers la Tunisie en 2018, des amies m’avaient avertie du racisme et des mauvais traitements que subissent les Noirs, mais je voulais quand même essayer pour gagner un peu d’argent et financer mes études au pays », dit-elle.

      Elle explique avoir eu de bons employeurs en Tunisie mais, pour elle, les propos de Kaïs Saïed, sont inacceptables. « Il y a différentes manières de dire qu’il faut mieux gérer les flux migratoires irréguliers, je peux comprendre que ça gêne vu que nous sommes tous sans statut légal ici, mais là, dans ses déclarations, j’avais l’impression d’avoir été traité comme un animal », commente-t-elle.

      À ses côtés Naomi, 33 ans, ronge son frein, déprimée. Elle avait investi toutes les économies de son salaire de coiffeuse en Tunisie pour ouvrir son propre salon. Près de 7 000 dinars (2 100 euros) dépensés dans du matériel et une location. « Je comptais sur l’été et les mariages pour gagner de l’argent et l’envoyer au pays », dit-elle. Comme Fortune, elle a tout perdu, la propriétaire lui a demandé de fermer boutique et elle attend devant l’ambassade pour s’enregistrer et partir au plus vite.
      L’impossible régularisation

      Ces deux femmes ont reçu des délais très courts de leurs propriétaires pour quitter leur logement, car les autorités ont annoncé une application stricte de la loi. Un Tunisien ne peut pas louer à un étranger sans lui demander sa carte de résidence ou bien le déclarer dans un commissariat. Une situation d’urgence à laquelle s’ajoute la peur d’être agressée.

      « Là, dès que l’on sort de chez nous, on regarde derrière nous de peur qu’un gosse nous jette des pierres. Cela m’était déjà arrivé avant les propos de Kaïs Saïed mais, désormais, c’est devenu une menace quotidienne », explique Évelyne, 30 ans, qui avait ouvert une crèche dans le quartier de l’Ariana au nord de Tunis pour permettre aux familles subsahariennes qui travaillent de laisser leurs enfants en journée. « Bien sûr que ce n’était pas déclaré, mais comment voulez-vous qu’on fasse ?, demande Évelyne. On dépense de l’argent dans des procédures pour avoir des papiers, et jamais nous n’arrivons à obtenir la carte de résidence. Tout se fait au noir parce que nous n’avons pas d’autre choix, et pendant des années personne n’y a trouvé à redire. »

      La loi tunisienne met sous conditions l’embauche d’un étranger avec la préférence nationale et très peu de migrants arrivent à se régulariser, à l’exception des étudiants.
      Rester et vivre dans la rue, le nouveau fardeau d’Aïcha

      Alors que ces femmes attendent un retour imminent vers leur pays, d’autres n’ont pas d’autre choix que de rester, dans des conditions parfois plus que précaires. Aïcha, 23 ans et originaire de la Sierra Leone, campe avec une centaine d’autres migrants devant le siège de l’OIM depuis une semaine, après avoir été expulsée de son logement.

      Son voyage pour venir en Tunisie en août 2022 par voie terrestre a pris presque trois mois. Durant son périple, elle dit avoir égaré son passeport. « Donc au final, je n’ai jamais pu travailler ici, ou alors des petits jobs ponctuels. En plus je ne parle qu’anglais donc la barrière de la langue était problématique », explique-t-elle. Elle dit attendre que la situation se calme pour voir comment rester dans le pays.

      « Au pire des cas, je rentrerai, mais vraiment j’aimerais bien rester ici, c’est difficile de repartir après avoir tout laissé dans son pays. J’étais étudiante mais je voulais tenter ma chance ailleurs et beaucoup d’amis m’ont dit qu’en Tunisie il y aurait du travail et des conditions de vie meilleures que chez nous », dit-elle. Son rêve est de suivre une formation pour devenir journaliste.

      « Au pays, on voulait que je me marie avec un homme plus âgé, moi je voulais vraiment avoir une carrière et un avenir », poursuit-elle. Mais en attendant, elle vit dans la rue avec d’autres migrants, cherchant des cafés aux alentours qui acceptent qu’elle utilise leurs toilettes. « Jamais je n’aurais imaginé me retrouver dans une telle situation, j’espère que l’OIM va nous trouver une solution ou au moins un abri. » La Tunisie n’a pas de loi régissant les demandeurs d’asile donc de nombreux migrants dans le cas d’Aïcha ne peuvent se tourner que vers les représentants des Nations unies pour demander un statut de réfugié ou demandeur d’asile.

      Depuis le début de la crise déclenchée par le communiqué de la présidence, les associations et organisations internationales disent être submergées par les appels et situations d’urgence. Une chaîne de solidarité organisée par des Tunisiens a été mise en place sur les réseaux sociaux et via le bouche-à-oreille pour apporter des denrées alimentaires à ces migrants et tenter de trouver des logements provisoires pour certains. Mais ce réseau reste discret de peur de tomber dans le viseur des autorités.

      Face à l’ampleur de la crise, les autorités tunisiennes ont indiqué ce week-end, exonérer des pénalités de séjour les migrants en situation irrégulière souhaitant rentrer dans leur pays « assistés par une instance diplomatique, une organisation internationale ou onusienne », un système qui existe déjà depuis 2018 mais avec une clause d’interdiction de retour sur le territoire tunisien.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/050323/en-tunisie-le-douloureux-retour-au-pays-des-exilees-subsahariennes

    • On the racist events in Tunisia – Background and Overview

      Current Situation

      “For several months, a racist campaign against Sub-Saharans in Tunisia has been growing. The president himself subscribed to these racist and conspiracy theories and pointed the finger at the Sub-Saharans, accusing them of being ‚hordes‘ and that sub-Saharan immigration is a ‚criminal enterprise‘ whose goal would be to ‚change the demographic composition of Tunisia‘.“ In the press statement published on the 21 February 2023 following a National Security Council meeting, president Kais Saied resurrected many racist and xenophobic tropes used by other fascist movements. He „ordered security forces to take ‚urgent measures‘. … Many „of the estimated 21,000 sub-Saharan African people in Tunisia – most of whom are undocumented – lost their jobs and housing overnight.“ The Association of African Students and Interns in Tunisia highlights that there is an „ongoing systemic campaign of control and arrests targeting [Black immigration], independently from their status, who are not carrying their residency card with them.“ „In the first three weeks of February, at least 1,540 people were detained, mostly in Tunis and provinces near the Algerian border“.

      The situation has become increasingly violent in the last weeks. In addition to the government forces targeting Black people, „violent attacks perpetrated by citizens, who taunt their victims with racial slurs“ are taking place. Attacked people report about fleeing „pogroming mobs consisting of, they said, 20+ Tunisian young men. ‚We were absolutely running for our lives,‘ said Latisha, who screamed at their son to run faster.“ There are accounts about „[a]rmed mobs“ and rape ‚by these mobs’“. On social media torture videos circulate. „In the suburbs of Tunis, a group of Sub-Saharan Africans have been attacked by young Tunisians who have broken down their doors and set fire to their building. Houses were ransacked.“

      „Everyone who falls under the socially constructed category of ‘African’ – those with or without jobs, those with university classes to attend – are too scared to leave their homes because the racist violence has spread to every street in Tunisia.“ A law from 1968 that criminalizes assistance to „illegal residence“ in Tunisia, is now being applied. Patricia Gnahoré explains „that the evictions started around February 9, when alarmist messages began circulating on social networks: landlords would be facing fines and prison sentences if they housed undocumented Sub-Saharans“. While some people are being supported by friends and activists who try to organize support, many have no choice but to sleep outside, with more than 100 people camping at the International Organization for Migration and in front of different embassies.

      „Guinea [and Mali] and Cote d’Ivoire are repatriating their citizens from Tunisia.“ „However, many people living irregularly in Tunisia have accumulated large sums of outstanding fees over the years, too much for them to pay. While Tunisian authorities are themselves pushing migrants to leave, they still insist on cashing in on those who desperately want to.“

      The African Union highlights that they are in „deep shock and concern at the form and substance of the statement targeting fellow Africans, notwithstanding their legal status in the country.“ The events of the last days strongly impacted Tunisia’s image in the African continent and within the African Union. Furthermore, an AU pan-African conference scheduled for mid-March in Tunis has been postponed. Former Senegalese Prime Minister Aminata Touré even called for Tunisia’s AU membership to be suspended and for the country to be excluded from the Africa Cup.
      Solidarity

      Multiple protests have been taking place in Tunisia with demonstrators denouncing the racist and fascist violence. Already on February 25th „over 1,000 people marched through downtown Tunis to protest what they called Saied’s fascist overtures.“ „Henda Chennaoui, one of the principal figures in the country’s new Front Antifasciste … [highlights that this] ‚the first time in the history of the republic that the president used fascist and racist speech to discriminate against the most vulnerable and the marginalised.’“ Protests in front of Tunisian embassies are being organized around the world, such as in Paris, Berlin as well as Canada.

      In the Front antifasciste – Tunisie activists and associations gather to organize support for Black people in the country. „Tunisian and foreign volunteers brought donations of food, water and blankets, along with some tents to help those displaced. … [However,] associations collecting donations [for migrants] are receiving threats.“
      Political Level

      President Saied is distracting from the political and economic situation in the country. He was elected in Fall 2019 and his governing style has become increasingly authoritarian. „Over the last two weeks, a spate of high-profile arrests has rocked Tunisia, as over a dozen political figures, trade unionists and members of the media have been taken into custody on security or graft charges. Some have been dragged from their homes without warrants; others, put on trial before military courts, despite being civilians. Many are being held in what their lawyers say are inhumane conditions, crammed in cells with scores of prisoners and without beds.“ A terrorism law allows the authorities to hold people „for a maximum of 15 days without charge or consultation with a lawyer“.

      In addition, „Saied has neutered parliament and pushed through a new constitution that gives him near-unlimited control and makes it almost impossible to impeach him.“ This was preceded and enabled by a very volatile situation in the country, as „there was increasing fragmentation within the executive branch, among state institutions, within and between political parties, within civil society, and even between regions of the country.“ The political and economic instability in the country, resulted in wide-spread support of his presidency, which has increasingly shifted to repressive centralization of power.

      The statement and development are connecting to a growing populist discourse. „Saied’s crackdown on undocumented sub-Saharan immigrants has taken place in the context of the rise of the hitherto unknown Parti Nationaliste Tunisien, which has been pushing a racist agenda relentlessly since early February. The party has flooded social media with conspiracy theories and dubiously edited videos that have encouraged Tunisians to report on undocumented neighbours before they can ‚colonise‘ the country – the same conspiratorial language adopted by Saied.“
      Economic Level

      Tunisia „is struggling under crippling inflation and debt worth around 80 percent of its gross domestic product (GDP)“. In addition, there is a shortage of basic foods such as rice, which is putting a lot of pressure on the population. ‘Les Africains’ are used as a scapegoat for the lack of products such as rice. „The rice-crisis is not the first time that populations racialized as ‘African’ are blamed for a social and economic disaster in Tunisia, which in reality is a direct consequence of the state’s abandonment of marginalized communities and the pressures of global capitalism.“ However, since the racist tropes are connecting to a familiar discourse, the „crackdown on immigrants and Saied’s political opponents has … won him favour among many in his working-class political base, who have been at the sharp end of a dire economic crisis.“

      The current events seem to have triggered international responses since Italy now supports Tunisia as it „is seeking to obtain a loan from the IMF due to a severe economic crisis.“ This is being explicitly connected to Europe’s border interests (see section on Externalization & Immigration).

      Ultimately these actions are enhancing the dependencies to Europe and weaken pan-African ties. „Kaïs Saied’s economic incompetence – as well as the refusal of North African governments to prioritize regional and inner-African trade which would allow evading dictates from the Global North and its proxies such as the IMF more effectively – are now once more fueling dynamics that in fact counter pan-African cooperation.“ In fact, the „president’s comments could also have direct consequences for Tunisian companies, which have increasingly expanded into other African countries in recent years. Guinean media report that several wholesalers have suspended imports of Tunisian products. Senegalese and Ivoirian importers want to join the boycott.“

      In addition, according to Human Rights Watch „at least 40 students have been detained so far“. This will have a detrimental impact on the education market, since „[f]or Tunisian private universities, students from other African countries are an essential part of their business model.“

      These factors might have contributed to ​​​​​​the statement posted by the government on Facebook on March 5th, attempting to backpedal the racist campaign and highlighting their „astonishment“ about the violence in the last weeks. Apart from now emphasising „Tunisia’s African identity“ and the significance of the anti-discrimination law from 2018, it announces plans to enhance the legal security of African migrants in Tunisia. Whether and how the statement will be implemented remains to be seen, „It appears likely that Tunisia is now also facing a considerable radicalization of its migration policies. […] Saied’s future migration policies, however, are likely to go beyond the ongoing wave of arrests, and in a worst-case scenario, will go even far beyond.“
      Externalization & Immigration

      „While the European Union’s violent securitization apparatus is indeed responsible for the oppression and murder of sub-Saharan migrants (and Tunisians) in Tunisia, the Tunisian state also contributes to their oppression and murder.“ Many people try to travel to Europe via and from Tunisia. „Its proximity to the EU’s external border has made Tunisia a major hub for migrants. Italy’s coasts are only around 150 kilometers (90 miles) away. Tunisia relaxed visa requirements in 2015, allowing many sub-Saharan and North Africans migrants to move to the country and work. … Authorities frequently turned a blind eye to workers without permits who were saving for a journey to Europe.“ This renders Black migrants very vulnerable to exploitation as well as policy changes.

      Already prior to the current escalation Black people experienced discrimination; Shreya Parikh highlighted in August 2022 that „Sub-Saharan women and men who depend on the labour market have spoken to me of persistent exploitation and racialised violence (both verbal and physical) at workplace.“ This is enhanced and enabled by the uncertain legal situation. „In the case of Tunisia, an im/migration non-policy is deliberately maintained by institutional actors at different levels (border police, internal affairs ministry, private legal agencies promising paper-work) because, among others, it is a lucrative site for corruption.“ This affects mostly Black people. „Most sub-Saharan migrants (like Western European migrants) enter Tunisia as legal migrants because of 3-month visa-free policies; but the Tunisian state forces all migrants to become illegal by its refusal to deliver legal documentation. This means that Tunisia also has European migrants living ‘illegally.’ But in the social and political construction of the ‘illegal migrant,’ white bodies never fit. It is the Black and dark-skinned bodies that are assumed to be illegal and criminal, as is clear from arrests of sub-Saharan migrants who carry residence permits, as well as absence of arrests of European ‘illegal’ migrants.“

      The current developments have to be understood in the context of the externalization of the European border. The Tunisian Forum for Social and Economic Rights (FTDES) highlights that the „European border outsourcing policies have contributed for years to transform Tunisia into a key player in the surveillance of Mediterranean migration routes, including the interception of migrant boats outside territorial waters and their transfer to Tunisia. Discriminatory and restrictive policies in Algeria also contribute to pushing migrants to flee to Tunisia. These policies deepen the human tragedy of migrants in a Tunisia in political and socio-economic crisis.“ Sofian Philip Naceur analyses that „[a]s Saieds government continues to play along as the watchdog for the European border regime, though not without ostentatiously displaying its self-interest in migration control, the Italian government is suddenly soliciting financial support for Tunisia’s deeply troubled public coffers from the EU and the International Monetary Fund (IMF). Interesting timing.“

      So far, the President’s statement has only provoked supportive reactions from European politicians. The French far-right politician, Eric Zemmour, who is one of the most prominent supporters of the conspiracy theory of the „Great Replacement“, supported the statement on Twitter. And the Italian foreign minister Antonio Tajani expressed in a phone call with his Tunisian counterpart that „the Italian government is at the forefront of supporting Tunisia in its border control activities, in the fight against human trafficking, as well as in the creation of legal channels to Italy for Tunisian workers and in the creation of training opportunities as an alternative to migration“ without mentioning the current violence at all. Furthermore, Italy is sending 100 more pick-ups worth more than 3.6 million Euro to reinforce the Tunisian Ministry of the Interior in the fight against ‚irregular‘ immigration.

      Or how Le Monde summarizes: „[The chancelleries] have not reacted to the presidential charge against sub-Saharan migrants. And for good reason: Mr. Said is responding rather positively to calls from Europe – primarily Italy – to better lock its maritime borders in order to stem the flow of migrants across the Mediterranean.“

      https://migration-control.info/on-the-racist-events-in-tunisia-background-overview

      via @_kg_

    • Aggressioni razziste e arresti: così la Tunisia diventa un “hotspot informale” dell’Europa

      I discorsi d’odio del presidente tunisino Saied contro presunte “orde di subsahariani irregolari” che minaccerebbero l’identità “arabo-musulmana” del Paese hanno fatto esplodere la tensione accumulata negli ultimi mesi, tra inflazione e penuria di generi di prima necessità. La “Fortezza Europa”, intanto, gongola. Il reportage

      Ogni mattina a Nadège vengono dati dieci dinari per la spesa. Esce di casa, si incammina fino all’alimentari più vicino e compra il necessario per la famiglia per cui lavora. È l’unico momento in cui le è consentito uscire. Altrimenti, Nadège vive e lavora 24 ore su 24, sette giorni su sette, tra le mura della casa di due persone anziane in un quartiere benestante di Tunisi. La sua paga mensile come domestica è di settecento dinari (225 euro), che diventeranno ottocento (240 euro) se “lavorerà bene”.

      Nadège, assicura, è qui per questo: “Sono venuta in Tunisia per metter da parte qualche soldo da mandare ai miei figli, in Costa d’Avorio”, racconta. Suo cugino, però, lavora nei campi di pomodori in Calabria. Le ha consigliato di partire per l’Italia e cercare lavoro lì. “Il cambio euro-franco Cfa è più conveniente di quello dinaro tunisino-franco Cfa. Guadagnando qualche soldo in Europa posso far vivere degnamente i miei due figli, metter da parte qualcosa e poi tornare da loro una volta che ci saremo sistemati”, spiega la trentenne ivoriana. Tre anni fa, Nadège vendeva sigarette lungo la sterrata che dal suo villaggio portava a Abidjan, ma con i lavori del governo per asfaltare la strada, il suo gabbiotto è stato abbattuto e mai più ricostruito. E lei è rimasta senza nulla.

      Nel 2022 anche Nadège ha tentato di imbarcarsi per Lampedusa da una spiaggia del Sud tunisino. A metà strada, però, la guardia costiera ha intercettato la sua barca e l’ha riportata a riva, nel porto di Sfax. Ha perso tutti i soldi che aveva messo da parte e si è ritrovata punto a capo, in Tunisia, a cercar di nuovo lavoro.

      Come nel caso di buona parte dei cittadini subsahariani presenti nel Paese, molti dei quali -a differenza di Nadège- hanno rinunciato all’idea di imbarcarsi, nessuno le ha mai proposto un contratto. Una volta scaduti i tre mesi di visto, il limite massimo per rimanere in Tunisia, tanti di loro rimangono in situazione di irregolarità accumulando una multa per la permanenza oltre i limiti del visto che aumenta di mese in mese. Dopo anni a lavorare, spesso con paghe misere e giornaliere, molti subsahariani rimangono intrappolati nelle maglie della burocrazia tunisina e, pur volendo tentare di regolarizzarsi e ottenere un permesso di soggiorno per rimanere nel Paese, non ci riescono perché non sono in grado di pagare la multa per lo sforamento del visto, che raggiunge un massimo di 3.000 dinari, mille euro. Ecco come i subsahariani finiscono in una sorta di limbo, bloccati in Tunisia, senza poter raggiungere l’Europa, senza poter tornare indietro. Si ritrovano così a costituire la manodopera in nero di aziende tunisine o estere presenti nel Paese, o di famiglie benestanti, che sfruttano la loro posizione precaria di irregolari per sottopagarli.

      Da metà febbraio di quest’anno Nadège ha dovuto rinunciare anche alla spesa quotidiana per paura di uscire dal cortile di casa. Lei, senza documenti, è oggetto di una campagna d’odio che si diffonde a macchia d’olio in Tunisia. È il 21 febbraio quando, dopo giorni di arresti di esponenti dell’opposizione alle politiche di Kais Saied, un comunicato della presidenza tunisina fa il punto sulla “lotta all’immigrazione irregolare nel Paese”, tema che è stato al centro della visita in Tunisia dei ministeri degli Esteri Antonio Tajani e dell’Interno Matteo Piantedosi di fine gennaio.

      Secondo quel comunicato, la Tunisia sarebbe invasa da “orde di subsahariani irregolari” che minaccerebbero “demograficamente” il Paese e la sua identità “arabo-musulmana”. È stata la miccia che ha fatto esplodere la tensione accumulata negli ultimi mesi, tra inflazione galoppante, impoverimento generale della popolazione e penurie continue di generi di prima necessità. A diffondere queste teorie xenofobe da fine 2022 è il cosiddetto Partito nazionalista tunisino, un gruppo di nicchia riconosciuto nel 2018, che ha intensificato la propria campagna sui social network prendendosela con le persone nere presenti in Tunisia. Non solo potenziali persone migranti in situazione di irregolarità che vorrebbero tentare di imbarcarsi verso l’Italia (come dichiarato dalle autorità), ma anche richiedenti asilo e rifugiati, studenti e lavoratori residenti nel Paese, accusati di “rubare il lavoro”, riprendendo gli slogan classici delle destre europee, spesso usati contro i tunisini stessi.

      Da allora in Tunisia si sono moltiplicate non solo le aggressioni razziste, ma anche gli arresti di cittadini subsahariani senza alcun criterio. Secondo un comunicato della Lega tunisina dei diritti umani, per esempio, otto studenti subsahariani regolarmente residenti nel Paese e iscritti nelle università tunisine sarebbero trattenuti senza alcun motivo nel centro di El-Wuardia, un centro gestito dalle autorità tunisine, non regolamentato, dove è complicato monitorare chi entra e chi esce. L’Associazione degli stagisti ivoriani e l’Aesat, la principale organizzazione degli studenti subsahariani in Tunisia, hanno consigliato alle proprie comunità di non uscire.

      Almeno cinquecento subsahariani si troverebbero invece nella prigione di Bouchoucha (Tunisi), senza che si conoscano le accuse nei loro confronti. A seguito delle misure prese dalla presidenza, molti proprietari di alloggi affittati a cittadini subsahariani hanno chiesto loro di lasciare casa, così come diversi datori di lavoro li hanno licenziati da un giorno all’altro per timore di ritorsioni da parte della polizia nei loro confronti. Centinaia di persone si sono così ritrovate per strada, senza stipendio e senza assistenza, rischiando l’arresto arbitrario, esposti a violenze e aggressioni nelle grandi città.

      In centinaia stanno optando per il rimpatrio nel Paese d’origine chiedendo assistenza per il cosiddetto ritorno volontario, che spesso di volontario ha ben poco. “Torniamo indietro per paura”, è il ritornello che ripetono in molti. Le liste per le richieste dei ritorni volontari gestiti dall’Organizzazione internazionale per le migrazioni (Oim) erano già lunghe prima del 21 febbraio, tanto che decine di persone che si sono registrate mesi fa attendono in tende di fortuna costruite con sacchi di plastica lungo la via che porta alla sede dell’Oim, nel quartiere di Lac 1, dove hanno sede diverse organizzazioni internazionali.

      “Non ci è stato messo a disposizione un foyer per l’accoglienza”, si giustifica una fonte interna all’organizzazione puntando il dito contro le autorità tunisine. La tendopoli di Lac 1 era già stata smantellata dalle forze di polizia a giugno 2022 ma alle persone migranti non è stata data un’alternativa. Qualche settimana dopo, infatti, si è riformata poco lontano. Oggi si ingrandisce di giorno in giorno.

      È qui che da fine febbraio un gruppo di volontari si fa carico di fornire acqua e cibo alle duecento persone presenti, rimaste senza assistenza. L’Oim è l’unica alternativa per chi non dispone di documenti validi, chi si trova nell’impossibilità di pagare la multa di 3.000 dinari o chi non ha un’ambasciata in Tunisia a cui rivolgersi, come per esempio i cittadini della Sierra Leone, la cui rappresentanza è stata delegata all’ambasciata d’Egitto.

      Chi può, invece, ha tentato di chiedere aiuto alla propria ambasciata di riferimento, accampandosi di fronte all’entrata. Il primo marzo è atterrato in Tunisia il ministro degli Esteri della Guinea, che ha promesso ai propri cittadini di stanziare fondi per voli di rimpatrio. Il primo aereo a decollare è stato quello della Costa d’Avorio, partito sabato 4 marzo alle 7 del mattino dall’aeroporto di Tunisi con a bordo 145 persone.

      Era giugno 2018 quando la Commissione europea proponeva ad alcuni Paesi africani, tra cui la Tunisia, l’istituzione di piattaforme regionali di sbarco dove smistare, fuori dai confini europei, le richieste di asilo. La risposta all’epoca fu “No, non abbiamo né le capacità né i mezzi”, per citare l’ambasciatore tunisino a Bruxelles Tahar Chérif. Cinque anni più tardi, l’Ue sembra esser riuscita nella propria missione di trasformare la Tunisia in un informale hotspot europeo.

      https://altreconomia.it/aggressioni-razziste-e-arresti-cosi-la-tunisia-diventa-un-hotspot-infor

    • As the disturbing scenes in Tunisia show, anti-migrant sentiments have gone global

      President Saied is scapegoating his country’s small black migrant population to distract from political failings. Does this sound familiar?

      A little more than 10 years ago, calls for freedom and human rights in Tunisia triggered the Arab spring. Today, black migrants in the country are being attacked, spat at and evicted from their homes. The country’s racism crisis is so severe that hundreds of black migrants have been repatriated.

      It all happened quickly, triggered by a speech by the Tunisian president, Kais Saied, at the end of February. He urged security forces to take urgent measures against migrants from sub-Saharan Africa, who he claimed were moving to the country and creating an “unnatural” situation as part of a criminal plan designed to “change the demographic makeup” and turn Tunisia into “just another African country that doesn’t belong to the Arab and Islamic nations any more”. “Hordes of irregular migrants from sub-Saharan Africa” had come to Tunisia, he added, “with all the violence, crime and unacceptable practices that entails”.

      For scale, the black migrant population in Tunisia is about 21,000 out of a population of 12 million, and yet a sudden fixation with their presence has taken over. A general hysteria has unleashed a pogrom on a tiny migrant population whose members have little impact on the country’s economics or politics – reports from human rights organisations tell of night-time raids and daylight stabbings. Hundreds of migrants, now homeless, are encamped, cowering, outside the International Organization for Migration’s offices in Tunis as provocation against them continues to swirl.

      Josephus Thomas, a political refugee from Sierra Leone, spoke to me from the camp, where he is sheltering with his wife and child after they were evicted from their home and his life savings were stolen. They sleep in the cold rain, wash in a nearby park’s public toilet and sleep around a bonfire with one eye open in anticipation of night-time ambushes by Tunisian youths. So far, they have been attacked twice. “There are three pregnant women here, and one who miscarried as she was running for her life.” Due to the poor sanitation, “all the ladies are having infections”, he says. “Even those who have a UNHCR card”, who are formally recognised as legitimate refugees, are not receiving the help they are entitled to. “The system is not working.”

      Behind this manufactured crisis is economic failure and political dereliction. “The president of the country is basically crafting state policy based on conspiracy theories sloshing around dark corners of the internet basement,” Monica Marks, , a professor of Middle East studies and an expert on Tunisia, tells me. The gist of his speech was essentially the “great replacement” theory, but with a local twist. In this version of the myth, Europeans are using black people from sub-Saharan Africa to make Tunisia a black-inhabited settler colony.

      Confecting an immigration crisis is useful, not only as a distraction from Saied’s failures, but as a political strategy to hijack state and media institutions, and direct them away from meaningful political opposition or scrutiny.

      The speed with which the hysteria spread shows that these attitudes had been near the surface all along. Racism towards black Arabs and black sub-Saharan Africans is entrenched in the Arab world – a legacy of slavery and a fetishised Arab ethnic supremacy. In Arab north Africa, racism towards black people is complicated even further by a paranoia of proximity – being situated on the African continent means there is an extreme sensitivity to being considered African at all, or God forbid, black. In popular culture, racist tropes against other black Arabs or Africans are widespread, portraying them as thick, vulgar and unable to speak Arabic without a heavy accent.

      The movement of refugees from and through the global south has further inflamed bigotries and pushed governments, democratic or otherwise, towards extinguishing these people’s human rights. Local histories and international policies create a perfect storm in which it becomes acceptable to attack a migrant in their home because of “legitimate concerns” about economic insecurity and cultural dilution.

      Globally, there is a grim procession of countries that have made scapegoating disempowered outsiders a central plank of government policy. But there is a new and ruthless cruelty to it in the UK and Europe. The European Union tells the British prime minister, Rishi Sunak, that his small boat plans violate international law, but the EU has for years followed an inhumane migrant securitisation policy that captures and detains migrants heading to its shores in brutal prisons run by militias for profit. Among them are a “hellhole” in Libya and heavily funded joint ventures with the human rights-abusing dictatorship in Sudan.

      Only last week, in the middle of this storm, the Italian prime minister, Giorgia Meloni, had a warm call with her Tunisian counterpart, Najla Bouden Romdhane, on, among other topics, “the migration emergency and possible solutions, following an integrated approach”. This sort of bloodless talk of enforcement at all costs, Marks says, “speaks to the ease with which political elites, state officials, can render fascism part of the everyday political present”.

      So where do you turn if you are fleeing war, genocide and sexual violence? If you want to exercise a human right, agreed upon in principle more than 70 years ago, “to seek and enjoy in other countries asylum from persecution”? The answer is anywhere, because no hypothetical deterrent is more terrifying than an unsafe present.

      You will embark on an inhuman odyssey that might end with a midnight raid on your home in Tunis, a drowning in the Channel, or, if you’re lucky, a stay in Sunak and Macron’s newly agreed super-detention centres. People in jeopardy will move. That is certain. All that we guarantee through cynical deterrent policies is that we will make their already fraught journey even more dangerous.

      https://www.theguardian.com/commentisfree/2023/mar/13/tunisia-anti-migrant-sentiments-president-saied

    • Immigrés subsahariens, boucs émissaires pour faire oublier l’hémorragie maghrébine

      Les autorités tunisiennes mènent depuis début juillet une campagne contre les immigrés subsahariens accusés d’« envahir » le pays, allant jusqu’à les déporter en plein désert, à la frontière libyenne. Une politique répressive partagée par les pays voisins qui sert surtout à dissimuler l’émigration maghrébine massive et tout aussi « irrégulière », et à justifier le soutien des Européens.

      La #chasse_à_l’homme à laquelle font face les immigrés subsahariens en Tunisie, stigmatisés depuis le mois de février par le discours officiel, a une nouvelle fois mis en lumière le flux migratoire subsaharien vers ce pays du Maghreb, en plus d’ouvrir les vannes d’un discours raciste décomplexé. Une ville en particulier est devenue l’objet de tous les regards : Sfax, la capitale économique (270 km au sud de Tunis).

      Le président tunisien Kaïs Saïed s’est publiquement interrogé sur le « choix » fait par les immigrés subsahariens de se concentrer à Sfax, laissant flotter comme à son habitude l’impression d’un complot ourdi. En réalité et avant même de devenir une zone de départ vers l’Europe en raison de la proximité de celle-ci, l’explication se trouve dans le relatif dynamisme économique de la ville et le caractère de son tissu industriel constitué de petites entreprises familiales pour une part informelles, qui ont trouvé, dès le début de la décennie 2000, une opportunité de rentabilité dans l’emploi d’immigrés subsahariens moins chers, plus flexibles et employables occasionnellement. Au milieu de la décennie, la présence de ces travailleurs, devenue très visible, a bénéficié de la tolérance d’un État pourtant policier, mais surtout soucieux de la pérennité d’un secteur exportateur dont il a fait une de ses vitrines.
      L’arbre qui ne cache pas la forêt

      Or, focaliser sur la présence d’immigrés subsahariens pousse à occulter une autre réalité, dont l’évolution est autrement significative. Le paysage migratoire et social tunisien a connu une évolution radicale, et le nombre de Tunisiens ayant quitté illégalement le pays a explosé, les plaçant en tête des contingents vers l’Europe, aux côtés des Syriens et des Afghans comme l’attestent les dernières #statistiques. Proportionnellement à sa population, la Tunisie deviendrait ainsi, et de loin, le premier pays pourvoyeur de migrants « irréguliers », ce qui donne la mesure de la crise dans laquelle le pays est plongé. En effet, sur les deux principales routes migratoires, celle des Balkans et celle de Méditerranée centrale qui totalisent près de 80 % des flux avec près de 250 000 migrants irréguliers sur un total de 320 000, les Tunisiens se placent parmi les nationalités en tête. Avec les Syriens, les Afghans et les Turcs sur la première route et en seconde position après les Égyptiens et avant les Bengalais et les Syriens sur la deuxième.

      La situation n’est pas nouvelle. Durant les années 2000 — 2004 durant lesquelles les traversées « irrégulières » se sont multipliées, les Marocains à eux seuls étaient onze fois plus nombreux que tous les autres migrants africains réunis. Les Algériens, dix fois moins nombreux que leurs voisins, arrivaient en deuxième position. Lorsque la surveillance des côtes espagnoles s’est renforcée, les migrations « irrégulières » se sont rabattues vers le sud de l’Italie, mais cette répartition s’est maintenue. Ainsi en 2006 et en 2008, les deux années de pics de débarquement en Sicile, l’essentiel des migrants (près de 80 %) est constitué de Maghrébins (les Marocains à eux seuls représentant 40 %), suivis de Proche-Orientaux, alors que la part des subsahariens reste minime.

      La chose est encore plus vraie aujourd’hui. À l’échelle des trois pays du Maghreb, la migration « irrégulière » des nationaux dépasse de loin celle des Subsahariens, qui est pourtant mise en avant et surévaluée par les régimes, pour occulter celle de leurs citoyens et ce qu’elle dit de l’échec de leur politique. Ainsi, les Subsahariens, qui ne figurent au premier plan d’aucune des routes partant du Maghreb, que ce soit au départ de la Tunisie et de la Libye ou sur la route de Méditerranée occidentale (départ depuis l’Algérie et le Maroc), où l’essentiel des migrants est originaire de ces deux pays et de la Syrie. C’est seulement sur la route dite d’Afrique de l’Ouest (qui inclut des départs depuis la façade atlantique de la Mauritanie et du Sahara occidental) que les migrants subsahariens constituent d’importants effectifs, même s’ils restent moins nombreux que les Marocains.
      Négocier une rente géopolitique

      L’année 2022 est celle qui a connu la plus forte augmentation de migrants irréguliers vers l’Europe depuis 2016. Mais c’est aussi celle qui a vu les Tunisiens se placer dorénavant parmi les nationalités en tête de ce mouvement migratoire, alors même que la population tunisienne est bien moins importante que celle des autres nationalités, syrienne ou afghane, avec lesquelles elle partage ce sinistre record.

      Ce n’est donc pas un effet du hasard si le président tunisien s’est attaqué aux immigrés subsahariens au moment où son pays traverse une crise politique et économique qui amène les Tunisiens à quitter leur pays dans des proportions inédites. Il s’agit de dissimuler ainsi l’ampleur du désastre.

      De plus, en se présentant comme victimes, les dirigeants maghrébins font de la présence des immigrés subsahariens un moyen de pression pour négocier une rente géopolitique de protection de l’Europe et pour se prémunir contre les critiques.

      Reproduisant ce qu’avait fait vingt ans plus tôt le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi avec l’Italie pour négocier sa réintégration dans la communauté internationale, le Maroc en a fait un outil de sa guerre diplomatique contre l’Espagne, encourageant les départs vers la péninsule jusqu’à ce que Madrid finisse par s’aligner sur ses thèses concernant le Sahara occidental. Le raidissement ultranationaliste que connait le Maghreb, entre xénophobie d’État visant les migrants et surenchère populiste de défiance à l’égard de l’Europe, veut faire de la question migratoire un nouveau symbole de souverainisme, avec les Subsahariens comme victimes expiatoires.
      Déni de réalité

      Quand il leur faut justifier la répression de ces immigrés, les régimes maghrébins parlent de « flots », de « hordes » et d’« invasion ». Ils insistent complaisamment sur la mendicité, particulièrement celle des enfants. Une image qui parle à bon nombre de Maghrébins, car c’est la plus fréquemment visible, et cette mendicité, parfois harcelante, peut susciter de l’irritation et nourrir le discours raciste.

      Cette image-épouvantail cache la réalité d’une importante immigration de travail qui, en jouant sur les complémentarités, a su trouver des ancrages dans les économies locales, et permettre une sorte d’« intégration marginale » dans leurs structures. Plusieurs décennies avant que n’apparaisse l’immigration « irrégulière » vers l’Europe, elle était déjà présente et importante au Sahara et au Maghreb.

      Depuis les années 1970, l’immigration subsaharienne fournit l’écrasante majorité de la main-d’œuvre, tous secteurs confondus, dans les régions sahariennes maghrébines, peu peuplées alors, mais devenues cependant essentielles en raison de leurs richesses minières (pétrole, fer, phosphate, or, uranium) et de leur profondeur stratégique. Ces régions ont connu de ce fait un développement et une urbanisation exceptionnels impulsés par des États soucieux de quadriller des territoires devenus stratégiques et souvent objets de litiges. Cette émigration s’est étendue à tout le Sahel à mesure du développement et du désenclavement de ces régions sahariennes où ont fini par émerger d’importants pôles urbains et de développement, construits essentiellement par des Subsahariens. Ceux-ci y résident et, quand ils n’y sont pas majoritaires, forment de très fortes minorités qui font de ces villes sahariennes de véritables « tours de Babel » africaines.

      À partir de cette matrice saharienne, cette immigration s’est diffusée graduellement au nord, tout en demeurant prépondérante au Sahara, jusqu’aux villes littorales où elle s’est intégrée à tous les secteurs sans exception : des services à l’agriculture et à la domesticité, en passant par le bâtiment. Ce secteur est en effet en pleine expansion et connait une tension globale en main-d’œuvre qualifiée, en plus des pénuries ponctuelles ou locales au gré de la fluctuation des chantiers. Ses plus petites entreprises notamment ont recours aux Subsahariens, nombreux à avoir les qualifications requises. Même chose pour l’agriculture dont l’activité est pour une part saisonnière alors que les campagnes se vident, dans un Maghreb de plus en plus urbanisé.

      On retrouve dorénavant ces populations dans d’autres secteurs importants comme le tourisme au Maroc et en Tunisie où après les chantiers de construction touristiques, elles sont recrutées dans les travaux ponctuels d’entretien ou de service, ou pour effectuer des tâches pénibles et invisibles comme la plonge. Elles sont également présentes dans d’autres activités caractérisées par l’informel, la flexibilité et la précarité comme la domesticité et certaines activités artisanales ou de service.
      Ambivalence et duplicité

      Mais c’est par la duplicité que les pouvoirs maghrébins font face à cette migration de travail tolérée, voire sollicitée, mais jamais reconnue et maintenue dans un état de précarité favorisant sa réversibilité. C’est sur les hauteurs prisées d’Alger qu’on la retrouve. C’est là qu’elle construit les villas des nouveaux arrivants de la nomenklatura, mais c’est là aussi qu’on la rafle. C’est dans les familles maghrébines aisées qu’est employée la domestique noire africaine, choisie pour sa francophonie, marqueur culturel des élites dirigeantes. On la retrouve dans le bassin algéro-tunisien du bas Sahara là où se cultivent les précieuses dattes Deglet Nour, exportées par les puissants groupes agrolimentaires. Dans le cœur battant du tourisme marocain à Marrakech et ses arrière-pays et dans les périmètres irrigués marocains destinés à l’exportation. À Nouadhibou, cœur et capitale de l’économie mauritanienne où elle constitue un tiers de la population. Et au Sahara, obsession territoriale de tous les régimes maghrébins, dans ces pôles d’urbanisation et de développement conçus par chacun des pays maghrébins comme des postes avancés de leur nationalisme, mais qui, paradoxalement, doivent leur viabilité à une forte présence subsaharienne. En Libye, dont l’économie rentière dépend totalement de l’immigration, où les Subsahariens ont toujours été explicitement sollicités, mais pourtant en permanence stigmatisés et régulièrement refoulés.

      Enfin, parmi les milliers d’étudiants subsahariens captés par un marché de l’enseignement supérieur qui en a fait sa cible, notamment au Maroc et en Tunisie et qui, maitrisant mieux le français ou l’anglais, deviennent des recrues pour les services informatiques, la communication, la comptabilité du secteur privé national ou des multinationales et les centres d’appel.
      Un enjeu national

      Entre la reconnaissance de leur utilité et le refus d’admettre une installation durable de ces populations, les autorités maghrébines alternent des phases de tolérance et de répression, ou de maintien dans les espaces de marge, en l’occurrence au Sahara.

      La négation de la réalité de l’immigration subsaharienne par les pays maghrébins ne s’explique pas seulement par le refus de donner des droits juridiques et sociaux auxquels obligerait une reconnaissance, ni par les considérations économiques, d’autant que la vie économique et sociale reste régie par l’informel au Maghreb. Cette négation se légitime aussi du besoin de faire face à une volonté de l’Europe d’amener les pays du Maghreb à assumer, à sa place, les fonctions policières et humanitaires d’accueil et de régulation d’une part d’exilés dont ils ne sont pas toujours destinataires. Mais le véritable motif consiste à éviter de poser la question de la présence de ces migrants sur le terrain du droit. C’est encore plus vrai pour les réfugiés et les demandeurs d’asile. Reconnaître des droits aux réfugiés, mais surtout reconnaitre leur présence au nom des droits humains pose en soi la question de ces droits, souvent non reconnus dans le cadre national. Tous les pays maghrébins ont signé la convention de Genève et accueilli des antennes locales du Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies (UNHCR), mais aucun d’entre eux n’a voulu reconnaître en tant que tels des immigrés subsahariens qui ont pourtant obtenu le statut de réfugié auprès de ces antennes.

      En 2013, entre la pression d’une société civile galvanisée par le Mouvement du 20 février et le désir du Palais de projeter une influence en Afrique pour obtenir des soutiens à sa position sur le Sahara occidental, le Maroc avait promulgué une loi qui a permis temporairement de régulariser quelques dizaines de milliers de migrants. Elle devait aboutir à la promulgation d’un statut national du droit d’asile qui n’a finalement pas vu le jour. Un tel statut, fondé sur le principe de la protection contre la persécution de la liberté d’opinion, protègerait également les citoyens maghrébins eux-mêmes. Or, c’est l’absence d’un tel statut qui a permis à la Tunisie de livrer à l’Algérie l’opposant Slimane Bouhafs, malgré sa qualité de réfugié reconnue par l’antenne locale du HCR. C’est cette même lacune qui menace son compatriote, Zaki Hannache, de connaître le même sort.

      https://orientxxi.info/magazine/immigres-subsahariens-boucs-emissaires-pour-faire-oublier-l-hemorragie,6

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    • Tunisie : Pas un lieu sûr pour les migrants et réfugiés africains noirs

      Des forces de sécurité maltraitent des migrants ; l’Union européenne devrait suspendre son soutien au contrôle des migrations

      - La police, l’armée et la garde nationale tunisiennes, y compris les garde-côtes, ont commis de graves abus à l’encontre de migrants, de réfugiés et de demandeurs d’asile africains noirs.
      - Pour les Africains noirs, la Tunisie n’est ni un lieu sûr pour le débarquement de ressortissants de pays tiers interceptés ou sauvés en mer, ni un « pays tiers sûr » pour les transferts de demandeurs d’asile.
      - La Tunisie devrait mener des réformes de façon à respecter les droits humains et mettre fin à la discrimination raciale. L’Union européenne devrait suspendre le financement des forces de sécurité destiné au contrôle des migrations, et fixer des critères de référence en matière de droits humains auxquels conditionner son soutien futur.

      La police, l’armée et la garde nationale tunisiennes, y compris les garde-côtes, ont commis de graves abus à l’encontre de migrants, de réfugiés et de demandeurs d’asile africains noirs, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Parmi les abus documentés figurent des passages à tabac, le recours à une force excessive, certains cas de torture, des arrestations et détentions arbitraires, des expulsions collectives, des actions dangereuses en mer, des évictions forcées, ainsi que des vols d’argent et d’effets personnels.

      Pourtant, le 16 juillet, l’Union européenne (UE) a annoncé la signature d’un protocole d’accord avec la Tunisie, portant sur un nouveau « partenariat stratégique » et un financement allant jusqu’à un milliard d’euros, dont 105 millions d’euros sont destinés à « la gestion des frontières, [...] des opérations de recherche et sauvetage, […] la lutte contre le trafic de migrants et [...] la politique de retour ». Le Premier ministre néerlandais Mark Rutte a souligné que le partenariat porterait notamment sur « le renforcement des efforts visant à mettre un terme à la migration clandestine ». Le protocole d’accord, qui doit être formellement approuvé par les États membres de l’UE, ne prévoit aucune garantie sérieuse que les autorités tunisiennes empêcheront les violations des droits des migrants et des demandeurs d’asile, et que le soutien financier ou matériel de l’UE ne parviendra pas à des entités responsables de violations des droits humains.

      « Les autorités tunisiennes ont maltraité des étrangers africains noirs, alimenté des attitudes racistes et xénophobes, et renvoyé de force des personnes fuyant par bateau qui risquent de subir de graves préjudices en Tunisie », a déclaré Lauren Seibert, chercheuse au sein de la division Droits des réfugiés et migrants de Human Rights Watch. « En finançant les forces de sécurité qui commettent des abus lors de contrôles migratoires, l’UE partage la responsabilité de la souffrance des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile en Tunisie ».

      Au total, entre 2015 et 2022, l’UE a consacré à la Tunisie entre 93 et 178 millions d’euros pour des objectifs liés aux migrations, dont une partie a renforcé et équipé les forces de sécurité afin de prévenir les migrations irrégulières et d’arrêter les bateaux à destination de l’Europe. L’UE devrait suspendre le financement des forces de sécurité tunisiennes destiné au contrôle des migrations et soumettre tout nouveau soutien à des critères clairs en matière de droits humains, a déclaré Human Rights Watch. Les États membres de l’UE devraient suspendre leur soutien à la gestion des migrations et des frontières dans le cadre du protocole d’accord récemment signé avec la Tunisie, jusqu’à ce qu’une évaluation approfondie de son impact sur les droits humains soit réalisée.

      Outre les abus attestés des forces de sécurité, les autorités tunisiennes n’ont pas assuré de manière adéquate une protection, une justice ou un soutien aux nombreuses victimes d’évictions forcées et d’attaques racistes, et ont même parfois bloqué ces efforts. C’est pourquoi, pour les Africains noirs, la Tunisie n’est ni un lieu sûr pour le débarquement de ressortissants de pays tiers interceptées ou sauvées en mer, ni un « pays tiers sûr » pour les transferts de demandeurs d’asile.

      Depuis mars, Human Rights Watch a mené des entretiens téléphoniques et en personne avec 24 personnes — 22 hommes, ainsi qu’une femme et une fille — qui vivaient en Tunisie, dont 19 migrant·e·s, quatre demandeur·euse·s d’asile et un réfugié, originaires du Sénégal, du Mali, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée, de la Sierra Leone, du Cameroun et du Soudan. Dix-neuf personnes étaient entrées en Tunisie entre 2017 et 2022 : douze de manière irrégulière et sept de manière régulière. Pour cinq personnes interrogées, la date et le mode d’entrée n’étaient pas connus. Certaines des personnes interrogées ne sont pas nommées pour des raisons de sécurité ou à leur demande.

      Human Rights Watch a également mené des entretiens avec quatre représentants de groupes de la société civile en Tunisie — le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), Avocats sans frontières (ASF), EuroMed Rights et Alarm Phone, un réseau de lignes téléphoniques d’urgence —, ainsi qu’un volontaire qui a aidé des réfugiés à Tunis ; Elizia Volkmann, journaliste basée à Tunis ; et Monica Marks, professeure d’université et spécialiste de la Tunisie. Tous les sept avaient interrogé ou aidé des dizaines de migrants, de demandeurs d’asile et de réfugiés en Tunisie, et étaient informés des cas d’abus commis par la police ou les garde-côtes ou les avaient documentés.

      Parmi les migrants, demandeurs d’asile et réfugiés interrogés, neuf étaient rentrés dans leur pays à bord de vols de rapatriement d’urgence en mars, tandis que huit étaient restés à Tunis, la capitale tunisienne, ou à Sfax, une ville portuaire située au sud-est de Tunis. Sept d’entre eux faisaient partie des quelque 1 200 Africains noirs expulsés ou transférés de force par les forces de sécurité tunisiennes aux frontières terrestres avec la Libye et l’Algérie au début du mois de juillet.

      Au total, 22 personnes interrogées ont été victimes de violations de leurs droits humains commises par les autorités tunisiennes.

      Bien que les violations documentées aient eu lieu entre 2019 et 2023, elles se sont majoritairement produites après que le président Kais Saied, en février 2023, a ordonné aux forces de sécurité de réprimer la migration irrégulière, associant les migrants africains sans papiers à la criminalité et à un « complot » visant à modifier la structure démographique de la Tunisie. Le discours du président, qualifié de raciste par les experts des Nations Unies, a été suivi d’un déferlement de discours de haine, de discrimination et d’agressions.

      Quinze personnes interrogées ont déclaré avoir subi des violences de la part de la police, de l’armée ou de la garde nationale y compris des garde-côtes. Parmi ces personnes figurent un réfugié et un demandeur d’asile qui ont été battus et ont reçu des décharges électriques lors de leur détention par la police à Tunis. Cinq personnes ont déclaré que les autorités avaient confisqué leur argent ou leurs effets personnels et ne les leur avaient jamais rendus.

      Les sept personnes interrogées expulsées vers les zones frontalières en juillet ont déclaré que l’armée et la garde nationale les avaient laissées dans le désert avec des quantités insuffisantes de nourriture et d’eau. Si certaines ont été réinstallées en Tunisie une semaine plus tard par les autorités tunisiennes, d’autres avaient encore besoin d’aide ou étaient portés disparus.

      Au moins neuf personnes interrogées ont été arrêtées et détenues arbitrairement par la police à Tunis, Ariana et Sfax, apparemment au faciès, en raison de leur couleur de peau. Ces personnes ont déclaré que les policiers n’avaient pas vérifié leurs papiers avant de les arrêter et que, dans la plupart des cas, ils n’avaient pas procédé à une évaluation individuelle de leur statut légal et ne leur avaient pas permis de contester leur arrestation.

      Un Malien de 31 ans interrogé avait une carte de séjour valide lorsque la police l’a arrêté arbitrairement à la mi-2022 à Ariana. « Ils ne m’ont pas demandé si j’avais des documents ou non », a-t-il déclaré. « Mon ami a été arrêté avec moi [...], [c’est] un militaire guinéen venu en Tunisie pour se faire soigner. Il avait un passeport avec un cachet d’entrée [valide] ».

      Cinq personnes ont décrit des abus commis pendant ou après des interceptions et des sauvetages en mer près de Sfax, apparemment par la garde nationale maritime, également appelée garde côtière. Il s’agit notamment de passages à tabac, de vols, de l’abandon d’un bateau à la dérive sans moteur, du renversement d’un bateau, d’insultes et de crachats à l’encontre des survivants.

      Trois représentants de groupes de la société civile interrogés ont également décrit les pratiques de plus en plus problématiques des garde-côtes depuis 2022, notamment des passages à tabac, l’utilisation dangereuse de gaz lacrymogènes, des tirs en l’air, le fait de prendre ou d’endommager les moteurs des bateaux et de laisser les gens bloqués en mer, la création de vagues qui font chavirer les bateaux, des retards dans les sauvetages, et des vols d’argent et de téléphones.

      Human Rights Watch a écrit aux ministères tunisiens des Affaires étrangères et de l’Intérieur le 28 juin pour leur faire part des résultats de ses recherches et leur poser des questions, mais n’a reçu aucune réponse.

      Outre les abus des forces de sécurité, au moins 12 hommes interrogés ont déclaré avoir été victimes d’abus de la part de civils tunisiens : parmi eux, dix ont été agressés ou victimes de vols, et cinq ont été victimes d’évictions forcées par des propriétaires civils. Hormis deux de ces incidents, tous se sont produits après le discours de février du président Saeid.

      Dans les mois qui ont suivi ce discours, et dans le contexte de la détérioration de la situation économique de la Tunisie, de l’aggravation de la répression et de la violence xénophobe, et de l’augmentation des départs de bateaux et des décès en mer, plus d’une dizaine de responsables européens se sont rendues en Tunisie pour discuter d’économie, de sécurité et de migration avec des responsables politiques tunisiens. Le ministre de l’Intérieur allemand a évoqué l’importance des « droits humains des réfugiés » et la « création de voies d’immigration légales », mais peu d’autres ont mentionné publiquement les préoccupations en matière de droits humains. Le ministre de l’Intérieur français a déclaré que la France offrirait à la Tunisie 25,8 millions d’euros pour l’aider à « contenir le flux irrégulier de migrants ».

      Des millions d’euros de financements de l’UE et de financements bilatéraux — notamment de la part de l’Italie — ont déjà permis de soutenir, d’équiper et de former les garde-côtes tunisiens, les « forces de sécurité intérieure » et les « institutions de gestion des frontières terrestres ».

      L’« externalisation » des frontières, qui consiste à empêcher les arrivées irrégulières en confiant les contrôles migratoires à des pays tiers, est devenue un élément central de la réponse de l’UE aux migrations mixtes et a donné lieu à des violations flagrantes des droits humains. De plus, le soutien aux forces de sécurité qui commettent des abus ne fait qu’exacerber les violations des droits humains qui sont à l’origine des migrations.

      « L’UE et le gouvernement tunisien devraient réorienter fondamentalement leur manière d’aborder les défis migratoires », a déclaré Lauren Seibert. « Le contrôle des frontières ne justifie aucunement que les droits soient bafoués et les responsabilités en matière de protection internationale ignorées ».

      Contexte des migrations et de la situation des réfugiés en Tunisie

      La Tunisie est un pays d’origine, de destination et de transit pour les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile. Au premier semestre 2023, elle a dépassé la Libye comme point de départ des bateaux accostant en Italie. Selon l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), sur les 69 599 personnes arrivées en Italie entre le 1er janvier et le 9 juillet par la mer Méditerranée, 37 720 étaient parties de Tunisie, 28 558 de Libye, et les autres de Turquie et d’Algérie.

      Les pays d’origine les plus courants pour les personnes arrivant en Italie étaient, par ordre décroissant, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, la Guinée, le Pakistan, le Bangladesh, la Tunisie, la Syrie, le Burkina Faso, le Cameroun et le Mali. Le Cameroun, le Burkina Faso, le Mali et la Guinée ont été confrontés ces dernières années à des violations généralisées des droits humains liées à des conflits, à des coups d’État ou à des mesures de répression gouvernementales.

      Selon une estimation officielle datant de 2021, 21 000 étrangers originaires de pays africains non maghrébins se trouvent en Tunisie, dont la population est de 12 millions d’habitants. Depuis janvier, le pays a accueilli 9 000 réfugiés et demandeurs d’asile enregistrés. La Tunisie est un État partie aux Conventions des Nations Unies et de l’Afrique relatives au statut des réfugiés, et sa Constitution prévoit le droit à l’asile politique. Cependant, elle ne dispose pas d’une loi ou d’un système national d’asile. C’est le HCR qui effectue l’enregistrement des réfugiés et détermine leur statut.

      Bien que les normes internationales en matière de droits humains découragent la criminalisation de la migration irrégulière, les lois tunisiennes datant de 1968 et de 2004 criminalisent l’entrée, le séjour et la sortie irréguliers d’étrangers, ainsi que l’organisation ou l’aide à l’entrée ou à la sortie irrégulières, sanctionnées par des peines d’emprisonnement et des amendes. La Tunisie n’a pas de base légale explicite pour la détention administrative des immigrants, mais de nombreuses organisations ont documenté des cas de détention arbitraire de migrants africains. Pour plusieurs nationalités africaines, la Tunisie autorise les séjours de 90 jours sans visa avec tampon d’entrée, mais l’obtention d’une carte de séjour peut se révéler difficile.

      Selon le FTDES (un forum non gouvernemental), entre janvier et mai 2023, les autorités tunisiennes ont arrêté plus de 3 500 migrants pour « séjour irrégulier » et intercepté plus de 23 000 personnes tentant de quitter la Tunisie de manière irrégulière. Romdhane Ben Amor, porte-parole du FTDES, a déclaré à Human Rights Watch que la plupart des arrestations de migrants enregistrées ont eu lieu aux abords de la frontière algérienne, mais qu’après le discours du président, des centaines d’entre elles ont également eu lieu à Tunis, à Sfax et dans d’autres villes.

      Expulsions collectives aux frontières avec la Libye et l’Algérie

      Entre le 2 et le 5 juillet 2023, la police, la garde nationale et l’armée tunisiennes ont mené des raids à Sfax et dans ses environs, arrêtant arbitrairement des centaines d’étrangers africains noirs de nombreuses nationalités, en situation régulière ou irrégulière. La garde nationale et l’armée ont expulsé ou transféré de force, sans aucun respect des procédures légales, jusqu’à 1 200 personnes, réparties en plusieurs groupes, vers les frontières libyenne et algérienne.

      Selon cinq personnes interrogées qui ont été expulsées, les autorités ont conduit environ 600 à 700 personnes vers le sud jusqu’à la frontière libyenne, non loin de la ville de Ben Guerdane. Elles en ont conduit des centaines d’autres vers l’ouest, à divers endroits le long de la frontière algérienne, dans les gouvernorats de Tozeur, Gafsa et Kasserine, selon deux personnes expulsées, des représentants des Nations Unies, le FTDES et le réseau Alarm Phone.

      Parmi les centaines de personnes expulsées vers une zone éloignée et militarisée située à la frontière entre la Tunisie et la Libye, se trouvaient au moins 29 enfants et trois femmes enceintes. Au moins six d’entre elles étaient des demandeurs d’asile enregistrés auprès du HCR. Les personnes interrogées ont déclaré avoir été battues et agressées par des membres de la garde nationale ou des militaires pendant leur expulsion ; une jeune fille de 16 ans, notamment, a affirmé avoir été agressée sexuellement. Ces personnes ont ajouté que les agents de sécurité avaient jeté leur nourriture, détruit leurs téléphones et les avaient laissées dans une zone d’où, repoussées par les forces de sécurité des deux pays, elles ne pouvaient ni entrer en Libye ni retourner en Tunisie. Elles ont fourni les positions GPS des endroits où elles se trouvaient du 2 au 4 juillet, ainsi que des vidéos et des photos des personnes expulsées, de leurs blessures, des téléphones brisés, des passeports, des cartes consulaires et des cartes de demandeur d’asile.

      Le 7 juillet, Human Rights Watch a interrogé deux personnes qui avaient été expulsées ou transférées de force vers ou près de la frontière algérienne les 4 et 5 juillet. Elles se trouvaient dans deux groupes différents totalisant 15 personnes dont sept femmes — y compris deux femmes enceintes — et un enfant. Selon leurs dires, elles ont été transportées depuis Sfax dans des bus, forcées de marcher dans le désert sans nourriture ni eau suffisantes, et repoussées par les forces de sécurité algériennes et tunisiennes. Une demandeuse d’asile guinéenne a communiqué la position GPS de son groupe, dans le gouvernorat de Gafsa, tandis qu’un Ivoirien a partagé la position du sien, dans le gouvernorat de Kasserine. Ils ont également fourni des vidéos de leurs groupes marchant dans le désert.

      Dans une déclaration du 8 juillet, le président Saied a qualifié les accusations d’abus commis par les forces de sécurité à l’encontre des migrants de « mensonges » et de « fausses informations ». Le week-end du 8 juillet, les équipes du Croissant-Rouge tunisien ont fourni de la nourriture, de l’eau et une aide médicale à quelques migrants qui se trouvaient aux frontières de l’Algérie et de la Libye, ou à proximité. Il s’agit du seul groupe d’aide humanitaire que les autorités tunisiennes ont autorisé à pénétrer dans la zone frontalière avec la Libye.

      Le 10 juillet, les autorités tunisiennes ont finalement transféré plus de 600 personnes de la frontière libyenne vers des abris de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et d’autres installations à Ben Guerdane, Medenine et Tataouine, selon des représentants des Nations Unies et un Ivoirien qui se trouvait parmi les personnes emmenées à Medenine, qui a fourni sa localisation. Cependant, le 11 juillet, Human Rights Watch s’est entretenu avec deux migrants affirmant qu’ils faisaient partie d’un groupe de plus de cent personnes expulsées toujours bloquées à la frontière libyenne. Ils ont fourni des vidéos et leur localisation.
      Des migrant·e·s aux deux frontières ont déclaré à Human Rights Watch et à d’autres que plusieurs avaient péri ou avaient été tués à la suite d’une expulsion, bien que Human Rights Watch n’ait pas pu confirmer leurs récits de manière indépendante. Le 11 juillet, l’Agence France-Presse a indiqué que les corps de deux migrants avaient été retrouvés dans le désert près de la frontière entre la Tunisie et l’Algérie. Al Jazeera, qui s’est rendu à plusieurs reprises dans la zone frontalière entre la Tunisie et la Libye, a publié des images du 11 juillet montrant deux groupes de migrant·e·s africain·e·s toujours bloqué·e·s — plus de 150 personnes au total — et le corps d’un migrant décédé.

      La Tunisie est un État partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ; à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, qui interdit les expulsions collectives ; ainsi qu’aux Conventions des Nations Unies et de l’Afrique relatives au statut des réfugiés, à la Convention contre la torture et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui interdisent les retours forcés ou les expulsions vers des pays où les personnes risquent d’être torturées, de voir leur vie ou leur liberté menacées, ou de subir d’autres préjudices graves.

      Abus commis par la police

      Outre les personnes expulsées, onze personnes interrogées ont été victimes d’abus de la part de la police à Tunis, à Sfax, à Ariana et dans une ville proche de la frontière algérienne ; parmi celles-ci, au moins huit ont subi des violences. Deux ont déclaré que la police les avait expulsées de force de leur logement. Sept ont fait état d’insultes racistes de la part de la police et l’une d’entre elles a été menacée de mort.

      Sidy Mbaye, un Sénégalais de 25 ans rapatrié en mars, était entré en Tunisie de manière irrégulière en 2021 et travaillait comme vendeur ambulant. Il a décrit les abus commis par la police à Tunis :

      [Le 25 février], je suis allé en ville pour vendre des téléphones, des T-shirts et des tissus au marché [...]. Trois policiers se sont approchés de moi et m’ont demandé ma nationalité. Ils ont dit : « Tu as entendu ce que le président a dit ? Tu dois partir [...] ». Ils ne m’ont demandé aucun document. Ils ont pris toute ma marchandise [...]. J’ai [résisté] [...] ils m’ont durement battu, me donnant des coups de poing et me frappant avec des matraques. Du sang coulait de mon nez [...].

      Ils m’ont emmené au poste de police, m’ont mis dans une cellule et ont continué à me frapper et à m’insulter [...]. Ils ont dit quelque chose sur le fait que j’étais noir [...]. Ils ne m’ont toujours pas demandé de documents. J’y ai passé une journée. Je refusais de partir parce que je voulais récupérer mes affaires, mais j’ai fini par partir. Ils m’ont menacé et m’ont dit : « Si tu reviens et que tu vends encore ces choses, on va te tuer. Quittez le pays immédiatement ». [...] Là où je vivais avec cinq autres Sénégalais, le propriétaire était un policier [...] En revenant, nous avons trouvé nos affaires dehors.

      Papi Sakho, un Sénégalais de 29 ans qui est venu à Tunis de manière irrégulière pour travailler, a été victime de violences et d’une éviction forcée par la police avant d’être rapatrié, en mars :

      Fin février [...], cinq officiers de police sont venus [...]. Nous étions quatre en train de travailler au garage-lavage, moi, deux Gambiens et un Ivoirien. [...] Ils ne nous ont pas demandé nos papiers [...]. Ils nous criaient dessus, nous insultaient [...] Ils m’ont battu durement avec des matraques [...]. L’Ivoirien était blessé et saignait [...] ils ont fermé notre garage [...]. Et c’est nous qui lavions habituellement leurs voitures de police !

      La police nous a alors conduits à notre logement et a averti le propriétaire que nous n’avions plus le droit d’y rester. [...]. Ils ont pris nos bagages et les ont mis dehors [...]. Mon passeport est resté à l’intérieur. La police a pris mes deux téléphones [...]. Les autres m’ont dit que la police avait pris une partie de leur argent.

      Moussa Baldé, mécanicien sénégalais de 30 ans, a déclaré être arrivé en Tunisie en 2021 avec un visa de travail. Il s’est rendu à Tunis en février 2023 pour acheter des pièces détachées. « Un policier a arrêté mon taxi, m’a fait descendre et m’a poussé. Il m’a dit : “Tu es noir, tu n’as pas le droit d’être ici [...]”. Il ne m’a pas demandé mes papiers, il m’a juste indexé à cause de la couleur de ma peau. [Au poste de police,] deux policiers m’ont donné des coups de poing et m’ont frappé. Ils ne m’ont donné à manger qu’une seule fois pendant les deux jours [de détention], et j’ai dormi par terre ». La police ne lui a posé aucune question sur son statut juridique. « Ils m’ont dit : “Nous allons te libérer, mais tu dois quitter le pays” ».

      Abdoulaye Ba, 27 ans, également originaire du Sénégal, vivait à Tunis depuis 2022. En février 2023, la police est venue sur le chantier où il travaillait et a arrêté au moins dix travailleurs, certains avec papiers et certains sans papiers, originaires d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale :

      Il y avait des Tunisiens et des Marocains, mais ils n’ont arrêté que des personnes à la peau noire. Ils nous ont demandé de quel pays nous venions mais n’ont pas demandé nos papiers [...]. Nous avons résisté à l’arrestation et une partie de la ville est sortie [...] et nous jetait des pierres [...]. La police nous a frappés avec des matraques [...] Ils nous ont emmenés dans un poste de police à Tunis et nous ont détenus pendant cinq heures, sans demander à voir nos papiers [...]. Ils nous ont ensuite relâchés et nous ont demandé de quitter la Tunisie. [...] La police a également volé mon iPhone 12, et d’autres ont dit que la police avait pris leur argent.

      Un Malien de 24 ans sans papiers a déclaré qu’avant son rapatriement en mars, il travaillait dans un restaurant à Tunis. En février, la police l’a arrêté alors qu’il rentrait du travail avec un autre Malien, mais n’a procédé à aucune vérification légale. Il a raconté :

      Ils ne m’ont pas demandé mes papiers [...]. S’ils voient un Noir, ils le prennent et l’emmènent dans leur voiture. Pendant l’arrestation, des Tunisiens regardaient et criaient : « Vous, les Noirs, vous devez partir… ». La police a pris l’argent [de mon ami] [...], environ 600 dinars [...]. Ils nous ont gardés pendant quatre jours [au poste de police]. [...] Nous dormions par terre [...]. Ils ne nous donnaient que du pain et de l’eau deux fois par jour. [...] [...] Nous avons trouvé une centaine d’Africains [détenus] là-bas [...]. Ils nous considéraient comme si nous n’étions pas des humains.

      Un Camerounais de 24 ans vivant à Sfax sans papiers a déclaré qu’à plusieurs reprises, début 2023, la police avait fait des descentes dans la maison qu’il partageait avec plusieurs migrants et avait pris leurs téléphones et leur argent.

      Les abus commis par la police ne datent pas seulement de 2023. Un Malien de 31 ans a déclaré qu’en décembre 2021, un groupe de 6 à 8 policiers l’avait trouvé endormi dans une gare et l’avait agressé avant de l’arrêter pour entrée irrégulière, dans une ville proche de la frontière algérienne : « Ils m’ont frappé à plusieurs reprises avec leurs matraques, jusqu’à ce que je tombe, puis ils m’ont donné des coups de pied ».

      Un Malien de 32 ans, rapatrié en mars, a déclaré que la police de Sfax lui avait pris deux de ses téléphones à la mi-2022, en plus de l’argent que transportait son ami. « Les policiers, s’ils voient une personne noire avec un petit sac, ils fouillent le sac. Lorsqu’ils trouvent de l’argent [ou des objets de valeur], ils le prennent », a-t-il témoigné.

      Répression policière contre des réfugiés participant à des manifestations

      Après le discours du président Saeid un grand nombre de réfugiés, de demandeurs d’asile et d’autres personnes devenues sans abri à la suite d’évictions ou craignant pour leur sécurité ont campé devant les bureaux du HCR et de l’OIM au Lac 1, à Tunis. Parmi les personnes qui se trouvaient devant le HCR, certaines ont barricadé la zone et ont commencé à protester. Le 11 avril, après l’entrée de force de plusieurs personnes dans une partie des locaux du HCR, la police est arrivée pour disperser le camp. La police a fait usage de gaz lacrymogènes et de la force, et certaines personnes ont jeté des pierres sur des voitures ou la police.

      « En réaction, la police a fait un usage disproportionné de la violence [...], en particulier compte tenu du fait que des personnes vulnérables se trouvaient là, ainsi que des familles et des jeunes enfants », a déclaré Elizia Volkmann, une journaliste qui s’est rendue sur les lieux plus tard dans la journée. Human Rights Watch a écouté un entretien enregistré par Elizia Volkmann le 11 avril avec un témoin des événements, qui a déclaré avoir vu la police gifler une Soudanaise avant que la situation ne dégénère, et que la police avait battu les gens avec des bâtons et tiré « de nombreux coups de gaz lacrymogène ».

      Un demandeur d’asile soudanais, qui campait devant le bureau du HCR depuis novembre 2022, a déclaré à Human Rights Watch que lui et d’autres avaient barricadé la zone pour se protéger, et que le 10 avril, ils étaient entrés dans les locaux du HCR « pour boire de l’eau et utiliser les toilettes ». Selon ses dires, le 11 avril, « C’est la police qui a commencé les violences. Ils [...] sont venus et ont tiré des gaz [lacrymogènes] sur nous. Et c’était la première fois que les policiers nous jetaient des pierres — j’ai vu deux d’entre eux le faire ». Il a raconté avoir ensuite vu des personnes jeter à leur tour des pierres sur la police. Il a précisé qu’après avoir fui la zone, lui et d’autres ont été battus et arrêtés dans la rue par la police.

      La police a d’abord placé 80 à 100 personnes — dont des femmes et des enfants — en garde à vue au poste de police de Lac 1 et détruit le camp. Plus tard dans la journée, ils ont libéré le demandeur d’asile soudanais, entre autres, mais selon un représentant d’Avocats sans frontières (ASF), ils ont transféré 31 hommes à la prison de Mornaguia au titre de divers chefs d’accusation, notamment pour désobéissance et agression. ASF a fourni une assistance juridique aux accusés, qui ont été libérés fin avril, les charges ayant été abandonnées pour la moitié du groupe et l’autre moitié étant en attente d’une audience en septembre, a déclaré le représentant d’ASF.

      Un demandeur d’asile sierra-léonais, qui campait devant l’OIM et le HCR depuis son expulsion de son appartement en février, figurait parmi les personnes arrêtées. Human Rights Watch a examiné un document officiel confirmant sa libération de la prison de Mornaguia fin avril. Lors de la répression du camp le 11 avril, il a déclaré avoir « vu un [demandeur d’asile] libérien se faire battre par la police [...] il y avait tellement de sang ». Il affirme ne pas avoir participé à des actes de violence, mais a enregistré des vidéos et passé des appels téléphoniques. Il a raconté que la police l’avait attrapé, arrêté et torturé en détention :

      Dans le véhicule de police, un [agent] a commencé à m’étrangler pour me forcer à ouvrir mon téléphone. [...] Ils m’ont emmené au poste de police de Lac 1. Ils ont séparé trois d’entre nous, moi, un [demandeur d’asile] sierra-léonais et le Libérien [blessé] [...].

      [Ils] nous ont placé dans une pièce non ouverte au public, où ils nous ont torturés. Deux [agents en uniforme] ont utilisé [...] un bâton en bois [...] pour nous frapper à la tête, aux chevilles, là où se trouvent les os [...]. Deux [autres agents en uniforme] nous ont transmis des chocs électriques avec des appareils comme des tasers [...]. Un [homme en civil] [...] m’a dit en anglais : « Vous [...]dites que la Tunisie n’est pas sûre [...]. Vous êtes des putains d’immigrés et de réfugiés, vous voulez gâcher notre image » [...] ». Les autres policiers nous ont insultés en arabe [...]. Ils nous ont torturés [...] pendant environ 45 minutes.

      Un réfugié soudanais a également déclaré à Human Rights Watch avoir été battu et avoir reçu des chocs électriques au poste de police de Lac 1, avant d’être transféré à la prison de Mornaguia.

      Un Tunisois qui a aidé plusieurs hommes à obtenir une aide médicale après leur libération de la prison de Mornaguia en mai, a déclaré que deux réfugiés, un Érythréen et un Centrafricain, avaient fait état de l’usage d’armes électriques, telles que des tasers, par la police à leur encontre lors de leur arrestation. Selon ses dires, deux réfugiés érythréens lui avaient également raconté qu’au poste de Lac 1, « la police les [avait] battus [...] hors du champ de la caméra ».

      Le demandeur d’asile soudanais qui a été détenu puis relâché le même jour a déclaré avoir vu plusieurs détenus africains emmenés dans une autre pièce du commissariat et les avoir entendus pleurer de douleur ; plus tard, certains lui ont dit que la police avait utilisé des appareils pour leur administrer des chocs électriques. Les violences policières l’ont convaincu de quitter la Tunisie : « Je demande à des personnes que je connais de m’aider à traverser la mer, à m’éloigner de ce pays ».

      Abus des garde-côtes et interceptions en mer

      Sur les six personnes interrogées par Human Rights Watch qui avaient tenté une ou plusieurs traversées en bateau vers l’Europe, cinq avaient subi des retours forcés de leurs bateaux. De telles mesures de rétention ou de retour forcé des personnes, appelées « pullbacks » en anglais – des actions des autorités visant à empêcher les gens de quitter un pays en dehors des points de passage officiels de la frontière, y compris les retours forcés de bateaux en partance – peuvent constituer une atteinte au droit des personnes à demander l’asile et à quitter tout pays, qu’il s’agisse du leur ou d’un autre, et les piéger dans des situations abusives.

      Cinq personnes interrogées ont également décrit des abus commis par les autorités tunisiennes près de Sfax entre 2019 et 2023, pendant ou après des interceptions en mer (quatre personnes) ou des sauvetages (une personne).

      Salif Keita, un Malien de 28 ans rapatrié en mars, a déclaré avoir tenté une traversée en bateau depuis Sfax en 2019. « Les garde-côtes nationaux ont pris notre moteur et nous ont laissés bloqués en mer », a-t-il relaté. « Nous avons dû casser des morceaux de bois du bateau [...] pour revenir en pagayant ».

      Un Ivoirien de Sfax a tenté un voyage en mer en janvier 2022. Il a déclaré que les garde-côtes avaient intercepté le bateau et avaient frappé les passagers à coups de bâton. Pendant qu’il était en mer, il a également vu un bateau de migrants, qui transportait également des enfants, renversé par des vagues que provoquait un bateau des garde-côtes.

      Un Malien de 32 ans avait également tenté un voyage en mer. Il était entré régulièrement en Tunisie, mais son tampon d’entrée avait expiré. Ne pouvant obtenir de carte de séjour, il a embarqué en décembre 2021 près de Sfax, sur un bateau qui transportait une cinquantaine d’Africains de l’Ouest et du Centre. Les autorités les ont interceptés dans les 15 minutes qui ont suivi leur départ. Il a raconté : « Ils ont pris l’argent ou les téléphones des gens [...]. Ceux qui n’avaient ni l’un ni l’autre, ils ont frappés et insultés. J’ai même vu un [agent] frapper une des femmes [...]. Ils ont pris mon téléphone ».

      Un Camerounais de 24 ans a déclaré qu’en avril 2023, après le retournement de leur bateau près de Sfax, lui et d’autres personnes avaient été secourus par des garde-côtes qui, une fois à terre, s’étaient mis à les insulter, à leur cracher de dessus et à les battre avant de les relâcher.

      Moussa Kamara, un Malien de 28 ans vivant à Sfax, était entré en Tunisie en mai 2022. En décembre 2022, il a embarqué près de Sfax avec environ 25 Africain·e·s de l’Ouest. « Au bout de 30 minutes à peine, les garde-côtes sont arrivés [en positionnant leur bateau à côté du nôtre] et ont dit “Stop !”. Nous ne nous sommes pas arrêtés, alors l’un des gardes a commencé à nous frapper avec un bâton [...]. Ils ont frappé trois hommes, dont moi… Un de mes amis a été blessé ». Les autorités les ont emmenés à Sfax puis les ont relâchés.

      Après cette expérience, Kamara est resté en Tunisie, mais le discours du président Saied et ses conséquences l’ont fait changer d’avis : « J’ai décidé d’essayer encore [un voyage en mer]. Le président nous a dit de quitter le pays. Si je ne pars pas, je ne trouverai pas une maison ou un travail ».

      « Le président a créé un climat d’horreur pour les migrants en Tunisie, si bien que beaucoup se précipitent pour partir », a expliqué Ben Amor, du Forum tunisien, FTDES. « Ces derniers mois, les garde-côtes ont commencé à utiliser des gaz lacrymogènes pour obliger [les bateaux] à s’arrêter [...]. Ils se sont visés sur les migrants qui essaient de les filmer [...] ; ils confisquent les téléphones après chaque opération ».

      Une bénévole d’Alarm Phone à Tunis a déclaré que son équipe avait recueilli des témoignages similaires : « Depuis 2022, il y a des comportements récurrents des garde-côtes tunisiens en attaquant des bateaux[...] ; ils utilisent des bâtons pour frapper les gens, dans certains cas, des gaz lacrymogènes, [...] ils tirent en l’air ou en direction du moteur [...] et parfois [...] ils laissent les gens bloqués [en mer dans des bateaux hors d’usage] ». De nombreuses pratiques de ce type ont été citées dans une déclaration de décembre de plus de 50 groupes en Tunisie, et à nouveau en avril.

      Soutien au contrôle des migrations de l’Union européenne

      Entre 2015 et 2021, l’Union européenne a alloué 93,5 millions d’euros à la Tunisie sur son « Fonds d’affectation spéciale d’urgence pour l’Afrique » (EUTF), qui vise à lutter contre la migration irrégulière, les déplacements et l’instabilité. Ce montant comprend 37,6 millions d’euros destinés à la « gestion des frontières » et à la lutte contre le « trafic de migrants et la traite des êtres humains ». Un document de l’UE de février 2022 indiquait que le financement de la lutte contre le trafic et la traite de migrants « [prévoyait] l’équipement et la formation des agents des forces de sécurité intérieure, ainsi que de la douane tunisienne ».

      Ce document indiquait également que l’UE « désignerait » jusqu’à 85 millions d’euros en tant que somme à allouer à des projets liés à la migration en Tunisie en 2021 et 2022. Il ne précisait pas ce qui avait déjà été dépensé ; cependant, selon un document de l’UE de février 2021, « un programme de soutien très important, financé par l’UE et bénéficiant aux garde-côtes tunisiens, [était] en cours de mise en œuvre ». Sur les 85 millions d’euros, 55 millions auraient pu être alloués au soutien du contrôle des migrations en Tunisie, selon la répartition fournie dans le document de 2022, à savoir : 25 millions d’euros pour la gestion des frontières, y compris le soutien aux garde-côtes ; 6-10 millions d’euros pour le « gouvernance » des migrations et la protection ; 20-25 millions d’euros pour la migration légale et la mobilité du travail ; 12-20 millions d’euro pour la lutte contre le trafic et la traite de migrants ; et 5 millions d’euros pour des retours.

      Le document de 2022 détaille également le soutien bilatéral important apporté à la Tunisie par l’Italie, l’Espagne, la France, l’Allemagne et d’autres États membres de l’UE. En plus de son « fonds pour la coopération migratoire (environ 10 millions d’euros) », l’Italie a fourni des équipements (véhicules, bateaux, etc.) « pour une valeur totale de 138 millions d’euros depuis 2011 », ainsi qu’une « assistance technique liée au contrôle des frontières (2017-2018) [...] pour un total de 12 millions d’euros », qui comprenait un soutien à la police et à la garde nationale tunisiennes. L’Allemagne a également fourni des bateaux et des véhicules, et l’Espagne du matériel informatique.

      Le Programme plurinational 2021 - 2027 sur les migrations pour le voisinage méridional de l’UE, qui englobe la Tunisie, comporte des éléments positifs tels que le soutien à l’élaboration de politiques d’asile, des voies légales de migration et le dialogue avec la société civile, mais il met toujours l’accent sur le soutien aux « mesures répressives » et aux « autorités frontalières et garde-côtes » pour le contrôle des frontières. De plus, les indicateurs de projet sont problématiques, puisqu’ils confondent interceptions et sauvetages en mer (« nombre de migrants interceptés/secourus grâce à des opérations de recherche et de sauvetage en mer » et « sur terre »).

      Les responsables politiques européens ont proposé à plusieurs reprises divers partenariats migratoires à la Tunisie visant notamment à mettre en place des centres de traitement délocalisés et à conclure des accords avec des « pays tiers sûrs », ainsi que des accords susceptibles de permettre le retour des ressortissants de pays tiers ayant transité par la Tunisie.

      Le droit international reconnaît la possibilité de désigner un pays tiers sûr, ce qui permet aux pays d’accueil de transférer des demandeurs d’asile vers un pays de transit ou vers un autre pays qui est en mesure d’examiner équitablement leurs demandes de statut de réfugié et de les protéger de façon adéquate. Les lignes directrices du HCR énumèrent les conditions de ces transferts, y compris le respect des normes du droit des réfugiés et des droits humains et « la protection contre les menaces à leur sécurité physique ou à leur liberté ». La directive sur les procédures d’asile de l’UE exige que les États non-membres de l’UE remplissent des critères spécifiques pour être désignés comme « sûrs », notamment « l’absence de risque de préjudice grave ».

      Compte tenu des abus documentés commis par les forces de sécurité et des attaques xénophobes contre les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés en Tunisie, ainsi que de l’absence d’une loi nationale sur l’asile, il semble que la Tunisie ne réponde pas aux critères de l’UE définissant un pays tiers sûr. Les Africains noirs, en particulier, ne devraient pas être renvoyés ou transférés de force en Tunisie.

      Recommandations

      - Le Parlement européen, dans ses négociations avec le Conseil de l’UE sur le Pacte européen sur la migration et l’asile, devrait chercher à limiter l’utilisation discrétionnaire du concept de « pays tiers sûr » par les différents États membres de l’UE. Les institutions européennes et les États membres devraient convenir de critères clairs pour désigner un pays comme « pays tiers sûr » aux fins du retour ou du transfert de ressortissants de pays tiers, afin de garantir que les États membres de l’UE n’érodent pas les critères de protection dans leur application du concept, et déterminer publiquement si la Tunisie répond à ces critères, en tenant compte des agressions et des abus dont les Africains noirs sont continuellement la cible dans ce pays.
      - L’UE et les États membres concernés devraient suspendre le financement et les autres formes de soutien aux forces de sécurité tunisiennes destinées au contrôle des frontières et de l’immigration, et conditionner toute aide future à des critères vérifiables en matière de droits humains.
      – Le gouvernement tunisien devrait enquêter sur tous les abus signalés à l’encontre des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés commis par les autorités ou les civils ; veiller à ce que les responsables rendent des comptes, notamment par le biais d’actions en justice appropriées ; et mettre en œuvre des réformes et des systèmes de surveillance au sein de la police, de la garde nationale (y compris les garde-côtes) et de l’armée afin de garantir le respect des droits humains, de mettre fin à la discrimination raciale ou à la violence, et de s’abstenir d’attiser la haine raciale ou la discrimination à l’encontre des Africains noirs.

      https://www.hrw.org/fr/news/2023/07/19/tunisie-pas-un-lieu-sur-pour-les-migrants-et-refugies-africains-noirs

      #rapport #HRW #human_rights_watch

    • Von Angst getrieben

      Rassistische Ausschreitungen gegen Schwarze Menschen zwingen immer mehr auf die lebensgefährliche Reise über das Mittelmeer.

      Die Bedingungen, unter denen Schwarze Menschen in Tunesien leben, sind prekär. Insbesondere wenn sie in das Land migriert sind und dort illegalisiert leben, also ohne offiziellen Aufenthaltsstatus und damit meist ohne Zugang zu sozialen Dienstleistungen. Der zunehmend rassistische Diskurs im Land, lässt ihre Situation noch unsicherer werden. Im Herbst 2022 hatte die Nationalistische Partei Tunesiens ihre rassistischen Äußerungen in sozialen Medien massiv verstärkt. Auf ihrer Website spricht sie von „einer Millionen Migranten“ die sich im Land befänden und auf europäisches Geheiß hin vorhätten, das Land zu übernehmen. Die Partei und ihre Hetze spielten bis kürzlich in der politischen Landschaft Tunesiens keine große Rolle. Laut Angaben ihres Vorsitzenden Sofien Ben Sghaïer hat die 2018 gegründete Partei derzeit nur drei Mitglieder. Relevant wurde ihr politisches Denken erst, als es vom tunesischen Präsidenten Kaïs Saïed aufgegriffen und zur Regierungslinie erklärt wurde.

      Ein Verständnis dafür, wie dies geschehen konnte, ist möglich, wenn man die politisch-ökonomische Lage betrachtet, die sich seit Juli 2021 stark verändert hatte: Präsident Kaïs Saïed löste damals die Regierung und die Versammlung der Volksvertreter*innen per Staatsstreich auf. Die sozioökonomische Lage ist in Tunesien extrem angespannt. Der Staat steht angesichts gescheiterter Verhandlungen mit dem IWF vor dem Bankrott, die Inflation liegt bei 10 Prozent, die Arbeitslosigkeit bei 15 Prozent und die Jugendarbeitslosigkeit noch weit höher. In diesem Klima finden rassistische Thesen wie die der Nationalistischen Partei Tunesiens Anklang.

      Als der Anti-Schwarze Rassismus in Tunesien dann in Form einer Pressemitteilung von Präsident Saïed am 21. Februar 2023 aufgegriffen wurde – so sprach er von einem „Plan“, der aufgesetzt worden sei, um die „demographische Zusammensetzung Tunesiens zu verändern“ und rief zu „dringenden Maßnahmen“ auf, „um dieses Phänomen zu stoppen“ – eskalierte die Situation. In den Tagen nach der Erklärung griffen vor allem Gruppen marginalisierter junger Männer in verschiedenen Städten gezielt Schwarze Menschen an. Einige wurden schwer verletzt, als ihre Wohnungen oder Häuser angezündet wurden. Eine bis heute unbekannte Zahl von Menschen ist in diesen Tagen verschwunden. Schwarze Menschen verloren von heute auf morgen ihre Arbeit und wurden von ihren Vermieter*innen vor die Tür gesetzt. Viele verließen ihre Wohnungen über Tage nicht mehr, aus Angst, ebenfalls Opfer der Angriffe zu werden. Auch gültige Aufenthaltspapiere schützten Schwarze Menschen nicht vor der Gewalt, zahlreiche Menschen wurden unabhängig von ihrem Aufenthaltsstatus verhaftet, die Angst vor Polizeikontrollen und willkürlichen Festnahmen besteht bis heute.

      Aya Koffi* aus Côte d’Ivoire („Elfenbeinküste“), die seit mehreren Jahren in Tunesien lebt, hat die Angriffe in der Hauptstadt Tunis miterlebt: „Sie griffen die Häuser an, sie griffen die Familien an, sie griffen die Kindertagesstätten an, dort wo die Kinder der Schwarzen waren. Es gab Leute, die mit Babys im Gefängnis landeten, Kinder, die im Gefängnis landeten. Es gab Frauen, die vergewaltigt wurden. Die Tunesier haben die Häuser und Wohnungen der Schwarzen in Brand gesetzt. Jeder versteckte sich. Ich habe mich zwei Wochen lang zu Hause eingesperrt und keinen Fuß vor die Tür gesetzt, weil ich so viel Angst hatte.“
      Schiffsunglücke, Leichen am Strand und anonyme Grabsteine

      Aus Angst um ihr Leben und weil ihnen infolge der rassistischen Übergriffe jede Lebensgrundlage entzogen wurde, haben sich seit Februar 2023 viele illegalisierte und nach Tunesien migrierte Personen aus subsaharischen Ländern für eine Überquerung des Mittelmeers entschieden. Die italienische Insel Lampedusa ist von Teilen der tunesischen Küste nur 150 Kilometer entfernt. Vor allem aus der Hafenstadt Sfax haben die Abfahrten stark zugenommen – und mit ihnen die Todeszahlen. Seit Kaïs Saïed Erklärung sind mehrere Hundert Menschen nach einer Abfahrt von Tunesien im Mittelmeer ertrunken, viele weitere werden vermisst. Immer wieder werden Leichen aus dem Wasser geborgen oder an den Stränden angespült.

      Laut Faouzi Masmoudi, Sprecher des Gerichts in Sfax, hat das Universitätskrankenhaus der Stadt keine Kapazitäten mehr: Allein am 25 April wurden fast 200 Leichen in das Krankenhaus gebracht. Nur wenige Tote können identifiziert werden. Einige von ihnen sind auf dem christlichen Friedhof in Sfax begraben. Die meisten jedoch bleiben anonym: manche bekommen einen Grabstein, auf dem nur das Datum des Leichenfundes steht.

      Aya hat ein solches Schiffsunglück überlebt, ihr Mann kam dabei ums Leben. Eine Mitarbeiterin der Internationalen Organisation für Migration (IOM) bestätigte, dass der Körper ihres Mannes geborgen wurde. Doch trotz Nachfragen bei der IOM und der Botschaft der Côte d’Ivoire und trotz Protesten vor der Leichenhalle konnte Aya den Körper ihres Mannes nicht mehr sehen. Bis heute ist nicht klar, was mit ihm passiert ist. Kein Einzelfall. Aya erzählt von ihrer Nachbarsfamilie in Tunis: „Viele sind aus Angst, nicht mehr in Tunesien bleiben zu können, auf das Meer hinausgefahren. Ganze Familien sind bei Schiffbrüchen ums Leben gekommen. Die Tür meiner Nachbarin, mit der ich alle Freuden geteilt, mit der ich zusammen gegessen habe, bleibt verschlossen. Sie, ihr Mann und ihr Baby werden vermisst. Wir wissen, dass sie mit dem Boot aufgebrochen sind.“

      Infolge der rassistischen Ausschreitungen haben viele Menschen Wohnung und Einkommen verloren. Rund 250 Menschen, hauptsächlich aus subsaharischen Herkunftsländern, hatten deshalb ein Lager vor dem Gebäude des UN-Flüchtlingskommissariats UNHCR in der Hauptstadt Tunis aufgeschlagen. Sie nennen sich „Refugees in Tunisia“ und fordern bis heute ihre Evakuierung in ein sicheres Land. Am 11. April wurde das Protestcamp vor dem UNHCR-Gebäude gewaltvoll durch die tunesische Polizei geräumt und bis zu 150 Menschen festgenommen. Die Räumung wurde nach Angaben des tunesischen Innenministeriums durch das UNHCR-Büro selbst veranlasst. Dabei wurden mehrere Menschen, darunter auch Kinder, durch den Einsatz von Tränengas verletzt. 30 Personen wurden der „öffentlichen Unruhe“ beschuldigt und für mehrere Wochen inhaftiert. Die Festgenommenen berichteten von Schlägen und Folter mit Elektroschocks. Die meisten der Protestierenden harren seit der Räumung des UNHCR-Camps nun vor dem Gebäude der IOM aus, wo sie ohne Zugang zu Wasser und Sanitäranlagen weiterhin für ihre Evakuierung kämpfen.
      Europas Verantwortung

      Am 25. Juli 2022, ein Jahr nach dem Staatsstreich Präsident Kaïs Saïeds, wurde zwar eine neue Verfassung per Referendum bestätigt. Laut Expertise eines tunesischen Juristen mit Spezialisierung auf Menschenrechte, der aus Sicherheitsgründen anonym bleiben will, ähnelt die neue Konstitution im Bereich der kollektiven und individuellen Freiheiten formell der vorherigen, doch in der Praxis werden diese Rechte aktuell stark eingeschränkt: „Der Beweis dafür sind Oppositionelle und Journalist*innen, die derzeit im Gefängnis sitzen, und Menschenrechtsverletzungen im Zusammenhang mit sehr vulnerablen Personen, insbesondere Menschen die nach Tunesien migriert sind. Zusammenfassend kann man also sagen, dass es eine Beschränkung der Menschenrechte gibt.“

      Eine zentrale Rolle für die rassistische Eskalation spielen aber auch die EU und ihre Mitgliedstaaten. Als wichtigste Handelspartnerin beeinflusst die EU die Regierungen der Maghreb-Länder erheblich und nimmt besonders Einfluss auf die Gestaltung ihrer Migrationspolitiken. Bereits seit den 1990er Jahren liegt der Fokus auf Tunesien und seit 2011 übt die EU zunehmend Druck aus, um das Land noch stärker in das EU-Grenzregime zu integrieren und Migrationsbewegungen durch und aus Tunesien langfristig zu beenden. Im Rahmen immer wieder neu aufgelegter Programme wurden seitdem 3 Milliarden Euro gezahlt. Schwerpunkte sind unter anderem der Aufbau „engerer Beziehungen zwischen den beiden Ufern des Mittelmeers und die Steuerung von Migration und Mobilität“. Von 2014 bis 2020 wurden zum Beispiel 94 Millionen ausschließlich für migrationsbezogene Aktivitäten gezahlt, unter anderem für Tunesiens Grenzschutzsystem. Der aktuelle „EU Action Plan“ für das zentrale Mittelmeer aus dem Jahr 2022 nennt als drittes Ziel die „Stärkung der Kapazitäten Tunesiens, Ägyptens und Libyens insbesondere zur Entwicklung gemeinsamer gezielter Maßnahmen zur Verhinderung der irregulären Ausreise, zur Unterstützung eines wirksameren Grenz- und Migrationsmanagements und zur Stärkung der Such- und Rettungskapazitäten unter uneingeschränkter Achtung der Grundrechte und internationalen Verpflichtungen“.

      Von einer „Achtung der Grundrechte“ ist in der Realität wenig zu sehen. Stattdessen unterstützt die EU ein immer autoritäreres Regime, für das die Leben von Menschen, die über das Meer wollen, nichts zählen. Immer wieder sterben Menschen infolge sogenannter „Rettungsaktionen“. Bei diesen fährt die tunesische Küstenwache aus, um Boote zu „retten“, rammt diese jedoch oft, wodurch Menschen ins Meer fallen und ertrinken. Zudem gibt es vermehrt Berichte, denen zufolge Motoren von der Küstenwache konfisziert werden, die Boote mit den Menschen aber weitere Tage auf dem Wasser treiben gelassen werden, wodurch die Todeszahlen steigen. Zugleich sind rassistische Diskurse in Tunesien immer auch von Europa beeinflusst. Es wird wahrgenommen, wie Salvini, Meloni, Le Pen und auch Zemmour sprechen. „It was not Saïed who introduced anti-Black racism to Tunisia“, schreibt Haythem Guesmi, ein tunesischer Wissenschaftler und Schriftsteller in einem Artikel für Al Jazeera. Nicht nur das europäische Grenzregime wird externalisiert, sondern auch der rassistische Diskurs.

      https://www.medico.de/blog/von-angst-getrieben-19095

      #peur

  • Soudan. L’horizon incertain d’un accord politique
    https://orientxxi.info/magazine/soudan-l-horizon-incertain-d-un-accord-politique,6215

    Par Gwenaëlle Lenoir. Alors que la junte militaire soudanaise qui a accaparé tout le pouvoir en octobre 2021 fait face à de fortes sanctions et à une mobilisation populaire qui ne faiblit pas, les négociations pour une transition démocratique s’intensifient. Horizon atteignable ou mirage ?

    #Afrique #Soudan #Révolution #Démocratie

  • Il y a 175 ans, le 22 février 1848, la révolution

    ... en juin 1848, la classe ouvrière parisienne était écrasée par l’armée du général Cavaignac. Ainsi se terminait la période révolutionnaire ouverte quand, en #février_1848, une première #révolution avait chassé du pouvoir le roi Louis Philippe et mis fin à la #monarchie_de_Juillet. Avec la #Deuxième_République l’espoir d’un régime de #démocratie, de libertés et de justice sociale était alors né.

    Après les journées révolutionnaires de #juillet_1830, la monarchie de droit divin de Charles X avait été remplacée par la #monarchie_constitutionnelle de #Louis_Philippe. Mais ce changement n’en était pas un. Le #Parlement restait élu par seulement 250 000 électeurs parmi les plus riches du royaume. Face aux contestations, venant aussi bien des milieux bourgeois écartés du pouvoir que des masses populaires, le gouvernement répondait par la répression et les interdictions.

    L’opposition républicaine

    Au sein du Parlement, seuls quelques dizaines de députés, dont #Ledru-Rollin et #Lamartine, se déclaraient partisans de la république. La majorité des députés de l’opposition se contentaient de réclamer l’élargissement du droit de vote et quelques libertés supplémentaires dans le cadre de la monarchie. Au sein de la population, la crise économique de 1847 renforçait le mécontentement. Les mauvaises récoltes des deux années précédentes et la spéculation avaient renchéri le prix du pain. Dans plusieurs régions, des émeutes avaient éclaté.

    Aucune réunion politique n’étant tolérée, les députés de l’opposition organisèrent une campagne de banquets réclamant une démocratisation du régime. Les revendications exprimées lors des toasts devinrent de plus en plus radicales, jusqu’à mettre en avant la souveraineté du peuple, autrement dit le suffrage universel et la république.

    Les ouvriers imposent la république

    La campagne des banquets contribua à répandre une agitation politique dans les faubourgs populaires. Des travailleurs, des étudiants, de plus en plus exaspérés, se massaient autour des salles et reprenaient la revendication de la république, en y mettant cependant un contenu à eux. Pour les ouvriers, elle devait évidemment être sociale, garantir le droit au travail et des salaires permettant de vivre.

    Devant la radicalisation des banquets, le roi décida d’interdire celui organisé le #22_février_1848 dans la capitale. Il pensait disposer de la force et nomma Bugeaud à la tête des troupes rassemblées à Paris, un général déjà responsable de la répression des révoltes de 1834. Mais dans les heures qui virent la confrontation des troupes avec le petit peuple, l’indécision allait faire place à la fraternisation.

    Le 22 février, des groupes d’#ouvriers acclamaient les soldats, leur rappelant leur appartenance au peuple. Le 23, une #fusillade éclata. Cinquante-deux manifestants tombèrent. Le tocsin sonna dans plusieurs églises, appelant la population à s’armer et à se défendre. Les manifestants, majoritairement ouvriers, érigèrent des barricades, étalèrent sur le sol de la vaisselle cassée pour bloquer les cavaliers, pillèrent les armureries et obtinrent des armes venant des troupes. Devant l’insurrection, et constatant l’incapacité des troupes à en venir à bout, Louis Philippe dut abdiquer.

    Les députés républicains constituèrent immédiatement un #gouvernement_provisoire, puis se rendirent à l’Hôtel de Ville devant lequel la population s’était massée. Les nouveaux ministres cherchaient déjà les formules qui auraient pu leur éviter de trancher, sous la pression des masses, la question du futur régime. Celles-ci devenaient menaçantes et les barricades étant toujours hérissées, le poète Lamartine, républicain connu, ministre du nouveau gouvernement, dut se résoudre à proclamer la #république.

    Drapeau rouge ou drapeau tricolore

    Pour calmer les insurgés, Lamartine manœuvra en tenant des discours prônant la concorde entre les classes, s’opposant à la volonté exprimée par une partie des insurgés de faire du drapeau rouge le symbole de cette république nouvellement proclamée, il imposa le drapeau tricolore, auréolé selon lui de la « gloire et la liberté de la patrie », déclarant : « Je repousserai jusqu’à la mort ce drapeau de sang que vous nous rapportez . »

    Ce choix du drapeau avait un sens de classe. En défendant le drapeau tricolore, Lamartine défendait la république bourgeoise. Les ouvriers, eux, reconnaissaient dans le drapeau rouge le symbole de leurs luttes. Le discours de Lamartine était la première faille dans la fausse unanimité qui dominait cette révolution de février.

    La faille allait s’élargir dans les semaines et les mois suivants. Les ouvriers ne pouvaient accepter la confiscation de leur révolution par la bourgeoisie. Ils ne pouvaient renoncer à leur revendication principale, le droit au travail, et à leurs #aspirations_sociales.

    Dans l’affrontement de classe qui se préparait, la bourgeoisie disposait d’une longueur d’avance. La république qu’elle voulait était la sienne. Pour l’imposer il lui fallait désarmer les ouvriers et briser leur volonté de lutte.

    Pour en finir avec les travailleurs en armes, le gouvernement fit d’abord arrêter les chefs ouvriers Barbès et Blanqui après une manifestation qui avait envahi l’Assemblée. Le général Cavaignac reçut les pleins pouvoirs.

    La bourgeoisie prend l’offensive

    Le gouvernement provisoire prétendit s’attaquer à la misère en créant les #Ateliers_nationaux chargés des travaux publics, où les chômeurs trouvaient à s’embaucher. Mais, le 21 juin, les ouvriers de moins de 25 ans qui y travaillaient furent contraints de s’engager dans l’armée, et les plus âgés devaient se préparer à partir en province.

    Face à cette provocation gouvernementale, les ouvriers parisiens se soulevèrent aux cris de « La liberté ou la mort », dressèrent des barricades dans une grande partie de Paris. Puis quatre jours durant, du 23 au 26 juin, ils affrontèrent les armes à la main l’armée, les gardes mobiles et la garde nationale. La répression fit plus de 3 000 morts parmi les ouvriers.

    Écrasée, la classe ouvrière avait toutefois montré qu’elle n’était pas seulement la classe souffrante des nouveaux bagnes industriels dont la bourgeoisie commençait à couvrir l’Europe. Elle n’était plus non plus une simple masse de manœuvre que la bourgeoisie pouvait utiliser pour s’imposer au pouvoir. Pour les militants ouvriers de l’époque, et notamment pour #Marx et #Engels qui quelques jours avant la révolution de février avaient lancé le #Manifeste_du_parti_communiste, juin 1848 ouvrait une ère nouvelle. La classe ouvrière était désormais, et est restée, la seule classe véritablement révolutionnaire, la seule capable de transformer la société.

    https://journal.lutte-ouvriere.org/2018/06/27/juin-1848-la-republique-bourgeoise-ecrase-la-revolte-ouvrier

    #insurrection #éphéméride #karl_marx #friedrich_engels #répression #justice_sociale #émancipation #communisme

  • La guerre en Ukraine, une étape majeure dans l’escalade vers la troisième guerre mondiale
    https://mensuel.lutte-ouvriere.org//2022/12/10/la-guerre-en-ukraine-une-etape-majeure-dans-lescalade-vers-l

    Extrait :

    Prendre position sur la #guerre_en_Ukraine en faisant abstraction de l’emprise de l’impérialisme sur le monde, c’est se ranger dans le camp des puissances impérialistes. Lorsqu’il s’agit de tendances politiques qui se revendiquent du #marxisme, c’est un abandon.

    Les justifications avancées par ceux qui se rangent, ouvertement ou hypocritement, dans le camp des puissances impérialistes sont étonnamment semblables à celles avancées par leurs ancêtres ou prédécesseurs d’avant ou pendant la #Deuxième_Guerre_mondiale.

    La défense de la #démocratie  ?

    Poutine est un dictateur de la pire espèce, c’est-à-dire de l’espèce de #Staline, dont il se revendique pour rejeter Lénine. Mais l’argument est misérable lorsqu’on sait combien sont les dictatures suscitées, protégées, armées par l’impérialisme de la grande «  démocratie  » américaine, de par le monde.

    Le droit de la nation ukrainienne à disposer d’elle-même  ?

    Lors de l’agression de la monarchie des Habsbourg contre la Serbie – acte déclencheur de la Première Guerre mondiale –, on pouvait éprouver un sentiment de solidarité pour une petite nation pauvre dont la survie était menacée. Mais le droit à l’existence nationale de la Serbie est passé aux yeux des révolutionnaires de l’époque au second plan alors qu’il se plaçait dans le cadre d’un affrontement entre camps impérialistes.

    Poutine responsable d’une politique impérialiste  ?

    C’est incontestablement vrai, au sens générique du terme depuis la politique de la Rome antique pendant des siècles. Mais l’insistance à répéter le terme est faite surtout pour dissimuler que l’impérialisme d’aujourd’hui est avant tout un certain stade du capitalisme et qu’on ne peut mettre fin à sa politique guerrière qu’en détruisant ses racines capitalistes.

    C’est #Poutine qui a déclenché la guerre ?

    Argument lamentable, du même ordre que d’invoquer le coup de chasse-mouches du Dey d’Alger pour justifier la conquête de l’Algérie par la France.

    Pour des communistes révolutionnaires, la seule attitude possible doit être guidée par l’idée formulée à l’époque du premier conflit mondial par Karl Liebknecht  : «  L’ennemi principal est dans notre propre pays  » .

    Pour des militants communistes russes, cela implique l’opposition à la guerre menée par Poutine et le renversement de son régime prédateur pour le compte de la bureaucratie et des oligarques milliardaires.

    Fraternisation  ; s’adresser aux prolétaires d’Ukraine, au nom de l’identité de leurs intérêts avec ceux des prolétaires de Russie, tout en se revendiquant de la politique des bolcheviks de respecter le droit de l’#Ukraine à l’indépendance, si les travailleurs le souhaitent.

    Politique identique pour les militants ukrainiens  : refus de faire partie de l’union nationale et militer pour le renversement du régime en place qui s’appuie sur des cliques bureaucratiques et des oligarques, du même acabit que celles pour lesquelles on demande de mourir aux prolétaires russes mobilisés dans l’armée.

    #communisme_révolutionnaire #analyse_marxiste #impérialisme #oligarchie