• « L’algorithme de la #CAF conduit à un surcontrôle des populations les plus précaires » | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/lalgorithme-de-caf-conduit-a-un-surcontrole-populations-plus-pr/00109069

    Fin novembre et début décembre, l’association La Quadrature du Net et le journal Le Monde ont chacun fait paraître une enquête sur l’utilisation du data mining (l’exploration de données) par les caisses d’allocations familiales (CAF), pour détecter les indus et les fraudes. Les deux enquêtes montrent que ce système, qui permet de scanner des milliers de données de 32 millions de personnes (les allocataires et leurs proches) et sur la base duquel sont déclenchés les contrôles, cible les plus pauvres, notamment les mères isolées.

    L’algorithme utilisé attribue un score de risque aux allocataires allant de 0 à 1. Plus on est proche de 1, plus on est exposé à la probabilité d’un contrôle. Parmi les critères pénalisants, le fait d’avoir changé de loyer plus de quatre fois en un an et demi, d’avoir un enfant à charge de 19 ans ou plus, ou encore de déclarer chaque trimestre ses ressources pour percevoir l’allocation adulte handicapé (AAH).

    • on sait _qui_ à pondu ledit algorithme, sur ordre de qui, et selon les specification de qui ? ou c’est secret défense ? (voire, secret défonce)

    • #Notation des allocataires : fébrile, la CAF s’enferme dans l’#opacité

      Alors que la contestation monte (voir ici, ici, ici ou ici) concernant son algorithme de notation des allocataires à des fins de #contrôle_social, la CAF choisit de se réfugier dans l’opacité tout en adaptant, maladroitement, sa politique de communication. Suite à son refus de communiquer le code source de son algorithme, nous avons saisi la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA).

      Comme nous l’expliquions ici, la CAF utilise depuis 2012 un algorithme de #profilage attribuant à chaque allocataire une note ou « #score_de_risque ». Construite à partir des centaines de données dont la CAF dispose sur chaque allocataire, cette note est ensuite utilisée pour sélectionner celles et ceux qui seront contrôlé·es.

      Cet algorithme symbolise l’étendue des #dérives de l’utilisation des outils numériques au service de politiques de contrôle social portées par des logiques policières de suspicion généralisée, de #tri et d’#évaluation continue de chacun de nos faits et gestes.

      Ici, comme c’est généralement le cas par ailleurs, ce tri cible les plus précaires. Les rares informations disponibles à ce sujet laissent apparaître que parmi les critères dégradant la note d’un·e allocataire, et augmentant ses chances d’être contrôlé·e, on trouve pêle-mêle : le fait de disposer de faibles revenus, d’habiter dans un quartier défavorisé, d’être une mère célibataire ou encore d’être né·e hors de France.

      Pour en avoir le coeur net, nous avons donc demandé à la CAF de nous communiquer le #code source de son algorithme1. Et sa réponse est affligeante2.

      Sortir de la précarité pour “tromper l’algorithme”

      Si la CAF a bien accepté de nous communiquer le code de l’algorithme… ce n’est qu’après avoir masqué la quasi-totalité des noms des variables comme on peut le voir sur l’illustration de cet article, qui est une photo de ce que la CAF nous a répondu.

      En d’autres termes, le fichier fourni nous permet simplement d’apprendre combien de #critères sont utilisés pour le calcul de la note des allocataires. Rien de plus. Ce qui n’empêche pas la CAF de préciser dans son courrier qu’elle espère que sa communication nous « permettra de comprendre le modèle »3.

      Les responsables de la CAF ont toutefois tenu à justifier le caviardage du fichier. Ces dernier·es précisent que le #code_source a été « expurgé des mentions qui, si elles étaient communiquées, pourraient donner des indications aux fraudeurs pour tromper l’algorithme »4. Et pour être tout à fait honnête, nous n’étions pas préparé·es à cette réponse.

      La CAF croit-elle vraiment que les critères liés à la #précarité (situation professionnelle instable, faibles revenus, logement situé dans un quartier défavorisé…) pourraient être modifiés par la seule volonté de l’allocataire ? Qu’afin d’augmenter leur note et de « flouer » l’algorithme, des millions d’allocataires pourraient décider, d’un coup, de sortir de la pauvreté ?

      Ce raisonnement frise l’#absurdité. A vrai dire, il est méprisant et insultant pour celles et ceux vivant des situations difficiles.

      Pire, le secrétaire général de la CAF entretient publiquement la confusion entre #fraudes et #erreurs de déclarations involontaires, prenant ainsi le risque de stigmatiser les personnes ciblées par l’algorithme, et ce, dans le seul but de justifier l’opacité de son institution.

      En réponse à un journaliste de Radio France5 l’interrogeant sur la réponse de la CAF à notre demande, il l’expliquait en disant qu’« il y a un certain nombre de données dont on pense que, si elles sont connues, peuvent nourrir des stratégies de contournement de personnes dont le but c’est de frauder le système ». Et d’ajouter : « Il faut que l’on ait un coup d’avance ».

      Faut-il donc lui rappeler que l’algorithme de la CAF n’est pas entraîné à détecter les fraudes mais les erreurs de déclaration, par définition involontaires6. Et que sa réponse pourrait donc être reformulée ainsi : « Nous ne communiquerons pas le code de l’algorithme de peur que les allocataires arrêtent de faire des erreurs ».

      De notre point de vue, cette réponse révèle l’ampleur de l’embarras des responsables de la CAF vis-à-vis de leur algorithme. Ils et elles ont peut-être en tête le scandale entourant un algorithme, en tout point similaire, de notation des allocataires ayant été utilisé aux Pays-Bas et dont les suites ont amené à la démission du gouvernement7 ?

      #Déni_de_justice

      Pire, cette opacité est aussi appliquée, à l’échelle individuelle, aux allocataires ayant été séléctionné·es par l’algorithme pour être controlé·es et qui chercheraient à obtenir des informations sur la raison de ce contrôle. Et ce, alors même que la loi prévoit que tout individu ayant fait l’objet d’une décision prise sur le fondement d’un traitement algorithmique (ici le fait d’être contrôlé) a le droit de connaître les données utilisées ainsi que les #paramètres de cet algorithme8. Ce qui signifie que les personnes ayant fait l’objet d’un contrôle9 sont censées avoir un droit d’accès plus étendu qu’une association comme la Quadrature.

      Nous avons pu consulter la réponse à la demande d’informations réalisée par une personne ayant été contrôlée sur la base de sa note. Le courrier, signé par le délégué à la protection des données de la CNAF, se contente de renvoyer l’allocataire à la page “Internet et Libertés” de la CAF.

      Sur cette page sont présents deux documents relatifs à l’algorithme de notation : un communiqué de la CAF et l’avis de la CNIL associé10. Aucun ne fournit d’informations sur les paramètres utilisés par l’algorithme, ni sur leur impact sur le score de risque.

      Cette réponse est un déni de justice pour celles et ceux ayant fait l’objet d’un contrôle déclenché algorithmiquement, l’opacité entretenue par la CAF les empếchant de contester juridiquement le bien-fondé du contrôle dont ielles ont fait l’objet.
      La discrimination : un savoir-faire à protéger

      Nous avions aussi demandé la liste des variables utilisées pour l’entraînement du modèle, c’est à dire sa phase de création. Cette question est importante car elle permet de comprendre l’étendue des données utilisées par l’algorithme. Et donc le degré d’intrusion dans la vie privée des allocataires que la construction d’un tel modèle nécessite.

      En effet, en mettant régulièrement en avant dans sa communication que son algorithme n’utilise « que » quelques dizaines de variables11, la CAF fait mine d’ignorer qu’elles sont le fruit d’une sélection qui nécessite l’analyse d’un nombre bien plus grand de variables au préalable12.

      Et la justification apportée par les responsables de la CAF est, là aussi, déconcertante. Ces dernier·es avancent que la communication de ces variables n’est pas possible car elles constituent un « savoir-faire »13. La CAF souhaiterait-elle monétiser son algorithme et le revendre à d’autres administrations ? Penserait-elle pouvoir équiper les équipes de contrôleurs.ses des institutions sociales du monde entier de son algorithme assimilant les plus précaires à de potentiel·le·s fraudeurs ou fraudeuses ?

      A défaut de réponse, nous nous en remettons à ce que, techniquement, tout·e data-scientist ferait pour entraîner un modèle le plus « précis » possible. Il suffirait de partir de l’intégralité des variables à sa disposition et, par itérations successives, décider lesquelles garder pour le modèle final. Dans cette hypothèse, ce serait alors la quasi-totalité des variables détenues par la CAF sur chaque allocataire qui serait utilisée pour l’entraînement de son modèle.

      Ceci serait cohérent avec un document publié en 2013 dans lequel un statisticien de la CAF que « les statisticiens chargés de la modélisation disposaient d’environ un millier d’informations par allocataire contrôlé » et que « la base d’apprentissage contient toutes les données habituelles des fichiers statistiques »14.
      Vingt ans de développement… et aucun compte-rendu de réunions

      Quant à notre demande relative aux documents internes (notes, comptes-rendus, échanges…) concernant le développement de l’algorithme, la CAF nous a tout simplement répondu qu’en presque 20 ans de travail aucune réunion technique n’a fait l’objet de compte-rendu…15

      Pour être tout à fait honnête, c’est une première dans l’histoire de nos demandes CADA.
      Le retour de l’alibi technique

      A ceci s’ajoute, depuis le début de l’année, la mise en place de ce qui apparaît comme une véritable communication de crise par l’institution autour de son algorithme. En juin 2022, la CAF a notamment publié un communiqué intitulé « Contrôle et datamining » dans lequel elle tente de répondre aux critiques soulevées par son algorithme16.

      A sa lecture, on prend toute la mesure du rôle d’alibi technique à une politique de contrôle discriminatoire que joue l’algorithme, ce que nous dénoncions déjà ici.

      L’algorithme y est décrit comme étant un objet purement scientifique dont le caractère politique est nié. Il est ainsi expliqué que la note des allocataires est le fruit d’une « démarche scientifique d’étude statistique […] menée par des experts » se fondant sur des critères « scientifiquement pondérés » ayant été sélectionnés « sur seuls critères statistiques ». Le secrétaire général de la CAF ajoute17 de son côté que cet outil serait un « miroir des situations statistiques » servant à identifier des « environnements de risques ».

      Ce faisant, les responsables de la CAF cherchent à nier leur responsabilité (politique) dans la conduite, et la validation, d’une politique de contrôle discriminatoire. Nul part n’apparaît que que si les erreurs se concentrent sur les plus précaires, c’est tout simplement parce qu’au fil des ans se sont multipliées les règles et contraintes encadrant l’accès aux minima sociaux, et ce, dans le seul but de restreindre leur accessibilité18.

      On mesure enfin l’impact des logiques gestionnaires appliquées aux institutions sociales. Logiques réduisant des millions de vies et d’histoires, à de simples notions statistiques, déshumanisantes, froides et vides de sens.
      Communication mensongère

      La deuxième partie du document est consacrée à un « Vrai/Faux » portant sur l’algorithme où transpire la malhonnêteté intellectuelle.

      A l’affirmation « Les scores de risques les plus élevés concernent toujours les plus pauvres », la CAF répond Faux car « les scores de risques sont calculés pour tous les allocataires ». Ce qui n’a tout simplement aucun sens…

      A la question « Les contrôleurs sont payés aux résultats », la CAF répond que ce serait faux, bien qu’elle admette que l’Etat lui fixe bien un objectif à atteindre en termes de détection de fraude. Ici encore, l’institution joue avec les mots. S’il est vrai que les contrôleurs.ses n’ont pas de « prime sur leurs résultats », ils et elles touchent un intéressement, tout comme l’ensemble du personnel de la CAF, dont le montant dépend bien de l’atteinte de ces objectifs de contrôle19.

      A la question « Plus de 1000 données concernant les allocataires sont utilisées dans le modèle de datamining des CAF », la CAF répond que seules une quarantaine seraient utilisées. Elle détourne ainsi la question puisque – comme expliqué ci-dessus – elle omet de dire que ces quarante variables sont sélectionnées après une phase d’entraînement du modèle qui nécessite l’utilisation, et le traitement, de plus de mille variables par allocataire20.

      Enfin, aux questions « Les contrôleurs de la Caf ont accès à toutes les infos qu’ils souhaitent à l’insu des allocataires », et « Les allocations sont suspendues pendant le contrôle », la CAF répond que non car « aucune demande n’est faite à d’autres administrations, sans en avoir averti auparavant l’allocataire, aucune procédure vis-à-vis d’un tiers n’est engagée à l’insu de celui-ci. » Et ajoute que, lors d’un contrôle, « les allocations ne sont pas suspendues ».

      Sur ces deux derniers points, nous vous invitons à lire les témoignages collectés par le Défenseur des Droits, les collectifs « Stop Contrôles », « Changer de Cap » et différentes associations de lutte contre la précarité21 qui alertent depuis des années sur les suspensions abusives d’allocations pendant les contrôles et les pratiques invasives (consultation des comptes bancaires, relevés d’électricité, analyse de l’adresse IP etc…) des contrôleurs·ses de la CAF à l’insu des allocataires.
      Fraude à enjeux et lutte contre le non-recours : des contre-feux médiatiques

      A ceci s’ajoute diverses annonces de la CAF participant à nourrir une stratégie de diversion médiatique autour de son algorithme de notation.

      Dans son dernier rapport annuel sur la « lutte contre la fraude », nulle référence n’est faite à l’algorithme alors que celui-ci était mis à l’honneur, en première page, l’année précédente. La CAF précisant au passage qu’il était loué par la Cour des Comptes et l’Assemblée Nationale.

      A sa place, la CAF a préféré cette année mettre en avant son équipe de contrôleur.ses dédiée à la « lutte contre la fraude à enjeux »22, c’est à dire des fraudes organisées (usurpation d’identités, faux documents, fraude au RIB) à grande échelle. Soit 30 agentes et agents qui d’après les dires de la CAF sont, ni plus ni moins, chargé·es de « protéger le système de sécurité sociale français des risques de pillage » et qui font rentrer la CAF dans « une nouvelle dimension de la lutte contre la fraude »23.

      A titre de comparaison, nous tenons à rappeler que ce sont pas moins de 700 contrôleuses et contrôleurs qui, guidé·es par son algorithme discriminatoire, sont chargé·es de traquer les moindre erreurs de déclaration faites par les plus précaires.

      Deuxième angle d’attaque : la mise en avant de l’utilisation d’algorithmes de profilage à des fins de lutte contre le non-recours24. Comme si l’application des techniques de profilage à des fins « positives » pouvait justifier leur application à des fins répressives. Sur ce sujet, la CAF omet pourtant de dire le plus important : depuis maintenant plus de 10 ans, elle a systématiquement favorisé l’application de ces techniques à des fins de contrôle plutôt que de lutte contre le non-recours.

      Ses équipes de « data-scientist » regrettaient dès 2013 que les techniques de profilage des allocataires soient uniquement utilisées à des fins de contrôle et non de lutte contre le non recours25. Cette réalité est rappelée dans un rapport de l’Assemblée Nationale daté de 2016 qui précise que « l’extension explicite de l’usage du data mining à d’autres fins, notamment celle de lutte contre le non-recours, était envisageable dès l’origine, mais cette possibilité a été écartée, au moins dans les premières années d’utilisation de cet outil »26. Il aura fallu attendre 2017 pour que la CAF commence à mener des expérimentations, et il semblerait qu’aujourd’hui le profilage contre le non-recours est limité à la prime d’activité et l’allocation de soutien familial27.

      Le sociologue Vincent Dubois ajoute que cette situation « interroge sur la réalité des slogans institutionnels “tous les droits rien que les droits” qui en fait est beaucoup plus tournée vers l’identification des indus, frauduleux ou non, que vers les cas de non-recours qui sont en fait beaucoup plus nombreux »28.

      En tout état de cause, l’histoire politique de l’utilisation par la CAF des techniques de profilage à des fins de lutte contre le non-recours ne semble pas très glorieuse.

      Ce dernier point interroge aussi sur le fantasme entretenu autour de l’automatisation de l’état social pour répondre aux problèmes sociaux. A l’heure où le gouvernement lance l’expérimentation d’un « RSA sous conditions », la mise en avant de solutions techniques pour lutter contre le non-recours dépolitise la question de l’accès aux droits. Tout en taisant les problèmes que génèrent, pour des millions de personnes, la dématérialisation des services publics.

      Enfin, la CAF a annoncé en grande pompe la nomination d’une médiatrice nationale chargée, entre autres, des questions de données personnelles à la CNAF29 en juin 2022. Parmi ses missions : « la protection des données et de la sécurité des usagers dans le cadre des systèmes d’information. » Et le communiqué accompagnant sa nomination ajoute qu’elle « sera également la référente nationale déontologie ». Nous serions plus que ravi·es d’entendre son avis sur l’algorithme de notation de la CAF.
      Lutter au-delà de la transparence

      La transparence que nous exigeons auprès de la CAF ne doit pas masquer le fond du problème. En un sens, ce que nous savons déjà de l’algorithme de cette institution, sans même avoir eu accès à son code, nous suffit à nous y opposer.

      La transparence n’est donc pas une fin en soi : c’est un moyen que nous souhaitons mobiliser pour mettre en lumière, et critiquer, un discours politique cherchant à légitimer la volonté de contrôle d’un appareil étatique via l’entretien d’un discours de suspicion généralisée et la stigmatisation de certaines catégories de la population.

      Volonté de contrôle qui, hélas, profite aujourd’hui de la puissance des outils numériques et de l’exploitation de nos données personnelles afin de toujours plus nous évaluer et, ainsi, nous trier.

      A l’heure où un nombre toujours plus grand d’institutions, sociales et policières, mettent en place de telles solutions de surveillance algorithmique, nous continuerons de les documenter et de faire ce que nous pouvons, à notre niveau, pour les contrer.

      Au côté des collectifs Stop Contrôles, Changer de Cap et de toutes les associations et collectifs de lutte contre la précarité qui font face, depuis des années, aux dérives du tout numérique et au développement sans limite des politiques de contrôle social, nous espérons que vous serez nombreux.ses à nous rejoindre.

      Enfin, nous ne doutons pas que ce sentiment d’injustice est partagé par la plupart des employé·es de la CAF. C’est pourquoi nous tenons à encourager celles et ceux qui, révolté·es par ces pratiques, pourraient nous aider à les documenter. Vous pouvez nous contacter par mail, téléphone, en venant nous rendre visite ou déposer de manière anonyme des documents sur notre SecureDrop. A l’heure où les responsables de la CAF font le choix de l’opacité, nous avons plus que jamais besoin de vous.

      https://www.laquadrature.net/2022/12/23/notation-des-allocataires-febrile-la-caf-senferme-dans-lopacite
      déjà sur seenthis (via @colporteur) :
      https://seenthis.net/messages/984668

      #algorithme #discrimination #mères_isolées #risque

    • C’est la réponse qui a toujours été faite aux syndicats qui réclament depuis des années les barèmes et algo pour pouvoir contester dans le cadre des TRÈS nombreuses erreurs de calcul.

      « gna gna gna, vous allez tricher ! ».

      Marrant comme on accuse toujours l’autre de ses propres turpitudes.

      Oui, des fois, les gens pourraient refuser une miette de boulot de merde qui va faire sauter tous leurs droits de manière disproportionnée et les foutre encore plus dans la merde. Oui, des fois, les gens pourraient s’organiser pour ne pas se retrouver dans une trappe à contrôle ou une situation encore plus dégradée.

      Oui, t’imagine ? Les gens pourraient juste faire valoir leurs droits si souvent déniés sans même avoir à avancer un début de justification.

      Et ils pourraient se rendre compte que ce n’est pas l’algo, mais bien un agent malintentionné qui a niqué leur dossier.

    • y aurait pas moyen de « retourner » (comme une chaussette) leur truc de la caf ? Genre, une expérience de science participative :-) on pourrait : 1./ demander que le "score" soit communiqué à chaque administré (e.g. via CNIL), 2./ collecter score et infos perso sur la base du volontariat, éventuellement en anonymisant les données, et 3./ faire un modèle « externe » avec ces données, le publier, et enfin 4./ s’en servir pour identifier les cas de non-recours (et au moins les compter)

  • Où le #classement_de_Shanghaï mène-t-il l’#université française ?

    Le classement de #Shanghaï, dont les résultats sont publiés mardi 15 août, a façonné une idée jamais débattue de l’« #excellence ». Des universitaires appellent à définir « une vision du monde du savoir » propre au service public qu’est l’enseignement supérieur français.

    Des universités à la renommée mondiale qui attirent les meilleurs étudiants, les chercheurs les plus qualifiés et les partenaires financiers les plus magnanimes : depuis l’avènement des classements internationaux dans l’#enseignement_supérieur, il y a vingt ans, la quête d’une certaine idée de l’« excellence » a intégré le vocabulaire universitaire, jusqu’à se muer en un projet politique.

    En France, en août 2003, la première édition du classement de Shanghaï, qui publie mardi 15 août son édition 2023, a été un coup de tonnerre : ignorant les subtilités administratives hexagonales et la tripartition entre #universités, grandes écoles et organismes de recherche, le palmarès n’avait distingué dans son top 50 aucun des fleurons nationaux. Piqués au vif, les gouvernements successifs se sont engouffrés dans la brèche et ont cherché les outils pour se conformer aux #standards. En 2010, le président de la République, #Nicolas_Sarkozy, avait fixé à sa ministre de l’enseignement supérieur, #Valérie_Pécresse, un #objectif précis : placer deux établissements français dans les 20 premiers mondiaux et 10 parmi les 100 premiers du classement de Shanghaï.

    La loi relative aux libertés et responsabilités des universités, votée en 2007, portait alors ses premiers fruits, présentés en personne par Mme Pécresse, en juillet 2010, aux professeurs #Nian_Cai_Liu et #Ying_Cheng, les deux créateurs du classement. Les incitations aux #regroupements entre universités, grandes écoles et organismes de recherche ont fleuri sous différents noms au gré des appels à projets organisés par l’Etat pour distribuer d’importants investissements publics (#IDEX, #I-SITE, #Labex, #PRES, #Comue), jusqu’en 2018, avec le nouveau statut d’#établissement_public_expérimental (#EPE). Toutes ces tactiques politiques apparaissent comme autant de stigmates français du palmarès chinois.

    Ces grandes manœuvres ont été orchestrées sans qu’une question fondamentale soit jamais posée : quelle est la vision du monde de l’enseignement supérieur et de la recherche que véhicule le classement de Shanghaï ? Lorsqu’il a été conçu, à la demande du gouvernement chinois, le palmarès n’avait qu’un objectif : accélérer la #modernisation des universités du pays en y calquant les caractéristiques des grandes universités nord-américaines de l’#Ivy_League, Harvard en tête. On est donc très loin du #modèle_français, où, selon le #code_de_l’éducation, l’université participe d’un #service_public de l’enseignement supérieur.

    « Société de marché »

    Pour la philosophe Fabienne Brugère, la France continue, comme la Chine, de « rêver aux grandes universités américaines sans être capable d’inventer un modèle français avec une #vision du savoir et la perspective d’un bonheur public ». « N’est-il pas temps de donner une vision de l’université ?, s’interroge-t-elle dans la revue Esprit (« Quelle université voulons-nous ? », juillet-août 2023, 22 euros). J’aimerais proposer un regard décalé sur l’université, laisser de côté la question des alliances, des regroupements et des moyens, pour poser une condition de sa gouvernance : une #vision_du_monde_du_savoir. »

    Citant un texte du philosophe Jacques Derrida paru en 2001, deux ans avant le premier classement de Shanghaï, la professeure à Paris-VIII définit l’université comme « inconditionnelle, en ce qu’elle peut #repenser_le_monde, l’humanité, élaborer des #utopies et des #savoirs nouveaux ». Or, « vingt ans après, force est de constater que ce texte reste un objet non identifié, et que rien dans le paysage universitaire mondial ne ressemble à ce qu’il projette, regrette Fabienne Brugère. Les grandes universités américaines que nous admirons et dans lesquelles Derrida a enseigné sont habitées par la société de marché ».

    Ironie du sort, c’est justement l’argent qui « coule à flots » qui garantit dans ces établissements de l’hyperélite des qualités d’étude et de bon encadrement ainsi qu’une administration efficace… Autant de missions que le service public de l’université française peine tant à remplir. « La scholè, le regard scolastique, cette disposition à l’étude, ce temps privilégié et déconnecté où l’on apprend n’est possible que parce que la grande machine capitaliste la fait tenir », déplore Mme Brugère.

    En imposant arbitrairement ses critères – fondés essentiellement sur le nombre de #publications_scientifiques en langue anglaise, de prix Nobel et de médailles Fields –, le classement de Shanghaï a défini, hors de tout débat démocratique, une #vision_normative de ce qu’est une « bonne » université. La recherche qui y est conduite doit être efficace économiquement et permettre un #retour_sur_investissement. « Il ne peut donc y avoir ni usagers ni service public, ce qui constitue un #déni_de_réalité, en tout cas pour le cas français », relevait le sociologue Fabien Eloire dans un article consacré au palmarès, en 2010. Est-il « vraiment raisonnable et sérieux de chercher à modifier en profondeur le système universitaire français pour que quelques universités d’élite soient en mesure de monter dans ce classement ? », questionnait le professeur à l’université de Lille.

    Derrière cet effacement des #spécificités_nationales, « une nouvelle rhétorique institutionnelle » s’est mise en place autour de l’« #économie_de_la_connaissance ». « On ne parle plus de “l’#acquisition_du_savoir”, trop marquée par une certaine #gratuité, mais de “l’#acquisition_de_compétences”, efficaces, directement orientées, adaptatives, plus en phase avec le discours économique et managérial », concluait le chercheur.

    Un poids à relativiser

    A y regarder de plus près, Shanghaï et les autres classements internationaux influents que sont les palmarès britanniques #QS_World_University_Rankings (#QS) et #Times_Higher_Education (#THE) valorisent des pays dont les fleurons n’accueillent finalement qu’un effectif limité au regard de leur population étudiante et du nombre total d’habitants. Le poids réel des « #universités_de_prestige » doit donc être relativisé, y compris dans les pays arrivant systématiquement aux tout premiers rangs dans les classements.

    Pour en rendre compte, Le Monde a listé les 80 universités issues de 16 pays qui figuraient en 2022 parmi les 60 premières des classements QS, THE et Shanghaï. Grâce aux sites Internet des établissements et aux données de Campus France, le nombre total d’étudiants dans ces universités a été relevé, et mis en comparaison avec deux autres statistiques : la démographie étudiante et la démographie totale du pays.

    Le cas des Etats-Unis est éclairant : ils arrivent à la 10e position sur 16 pays, avec seulement 6,3 % des étudiants (1,2 million) dans les 33 universités classées, soit 0,36 % de la population américaine.

    Singapour se place en tête, qui totalise 28,5 % des étudiants inscrits (56 900 étudiants) dans les huit universités de l’hyperélite des classements, soit 0,9 % de sa population. Suivent Hongkong, avec 60 500 étudiants dans quatre universités (20,7 % des étudiants, 0,8 % de sa population), et la Suisse, avec 63 800 étudiants dans trois établissements (19,9 % des étudiants, 0,7 % de sa population).

    Avec 98 600 étudiants dans quatre universités classées (Paris-Saclay, PSL, Sorbonne Université, Institut polytechnique de Paris), la France compte 3,2 % des étudiants dans l’hyperélite universitaire mondiale, soit 0,1 % de la population totale.

    La Chine arrive dernière : 255 200 étudiants sont inscrits dans les cinq universités distinguées (Tsinghua, Peking, Zhejiang, Shanghai Jiao Tong et Fudan), ce qui représente 0,08 % de sa population étudiante et 0,018 % de sa population totale.

    https://www.lemonde.fr/campus/article/2023/08/14/ou-le-classement-de-shanghai-mene-t-il-l-universite-francaise_6185365_440146

    #compétences #critique

    • Classement de Shanghaï 2023 : penser l’enseignement supérieur en dehors des palmarès

      Depuis vingt ans, les responsables politiques français ont fait du « standard » de Shanghaï une clé de #réorganisation des établissements d’enseignement supérieur. Mais cet objectif d’inscription dans la #compétition_internationale ne peut tenir lieu de substitut à une #politique_universitaire.

      Comme tous les classements, celui dit « de Shanghaï », censé comparer le niveau des universités du monde entier, suscite des réactions contradictoires. Que les championnes françaises y soient médiocrement placées, et l’on y voit un signe de déclassement ; qu’elles y figurent en bonne place, et c’est le principe du classement qui vient à être critiqué. Le retour de l’université française Paris-Saclay dans le top 15 de ce palmarès de 1 000 établissements du monde entier, établi par un cabinet chinois de consultants et rendu public mardi 15 août, n’échappe pas à la règle. Au premier abord, c’est une bonne nouvelle pour l’enseignement supérieur français, Paris-Saclay se hissant, derrière l’américaine Harvard ou la britannique Cambridge, au rang de première université non anglo-saxonne.

      Pourtant, ce succès apparent pose davantage de questions qu’il n’apporte de réponses sur l’état réel de l’enseignement supérieur français. Certes, la montée en puissance du classement chinois, créé en 2003, a participé à l’indispensable prise de conscience de l’inscription du système hexagonal dans un environnement international concurrentiel. Mais les six critères qui président arbitrairement à ce « hit-parade » annuel, focalisés sur le nombre de prix Nobel et de publications dans le seul domaine des sciences « dures », mais qui ignorent étrangement la qualité de l’enseignement, le taux de réussite ou d’insertion professionnelle des étudiants, ont conforté, sous prétexte d’« excellence », une norme restrictive, au surplus indifférente au respect des libertés académiques, politique chinoise oblige.

      Que les responsables politiques français aient, depuis vingt ans, cédé à ce « standard » de Shanghaï au point d’en faire une clé de réorganisation des établissements d’enseignement supérieur ne laisse pas d’étonner. Le principe « grossir pour être visible » (dans les classements internationaux) a servi de maître mot, il est vrai avec un certain succès. Alors qu’aucun établissement français ne figurait dans les cinquante premières places en 2003, ils sont trois aujourd’hui. Paris-Saclay résulte en réalité de la fusion d’une université, de quatre grandes écoles et de sept organismes de recherche, soit 13 % de la recherche française.

      Mais cette politique volontariste de #fusions à marche forcée, soutenue par d’importants crédits, n’a fait qu’alourdir le fonctionnement des nouvelles entités. Surtout, cette focalisation sur la nécessité d’atteindre à tout prix une taille critique et de favoriser l’excellence n’a fait que masquer les #impensés qui pèsent sur l’enseignement supérieur français : comment améliorer la #qualité de l’enseignement et favoriser la réussite du plus grand nombre ? Quid du dualisme entre universités et grandes écoles ? Quelles sources de financement pour éviter la paupérisation des universités ? Comment éviter la fuite des chercheurs, aux conditions de travail de plus en plus difficiles ? Et, par-dessus tout : quel rôle dans la construction des savoirs dans un pays et un monde en pleine mutation ?

      A ces lourdes interrogations, l’#obsession du classement de Shanghaï, dont le rôle de promotion des standards chinois apparaît de plus en plus nettement, ne peut certainement pas répondre. Certes, l’enseignement supérieur doit être considéré en France, à l’instar d’autres pays, comme un puissant outil de #soft_power. Mais l’objectif d’inscription dans la compétition internationale ne peut tenir lieu de substitut à une politique universitaire absente des débats et des décisions, alors qu’elle devrait y figurer prioritairement.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/08/15/classement-de-shanghai-2023-penser-l-enseignement-superieur-en-dehors-des-pa

    • Au même temps, #Emmanuel_Macron...

      Avec 27 universités représentées, le classement de Shanghai met à l’honneur l’excellence française.

      Acteurs de l’enseignement et de la recherche : merci !

      Vous faites de la France une grande Nation de formation, de recherche et d’innovation. Nous continuerons à vous soutenir.


      https://twitter.com/EmmanuelMacron/status/1691339082905833473
      #Macron

    • Classement de Miamïam des universités françaises.

      Ayé. Comme chaque année le classement de Shangaï est paru. Et l’auto-satisfecit est de mise au sommet de l’état (Macron, Borne, et bien sûr Oui-Oui Retailleau). Imaginez un peu : 27 de nos établissements français (universités et grandes écoles) y figurent.

      Rappel pour les gens qui ne sont pas familiers de ces problématiques : le classement de Shangaï est un classement international très (mais vraiment très très très) sujet à caution, qui s’est imposé principalement grâce à une bonne stratégie marketing (et à un solide lobbying), et qui ne prend en compte que les publications scientifiques des enseignants-chercheurs et enseignantes-chercheuses de l’université : ce qui veut dire qu’il ne regarde pas “l’activité scientifique” dans sa globalité, et que surtout il n’en a rien à secouer de la partie “enseignement” ni, par exemple, du taux de réussite des étudiants et étudiantes. C’est donc une vision a minima hémiplégique de l’université. Il avait été créé par des chercheurs de l’université de Shangaï comme un Benchmark pour permettre aux université chinoises d’essayer de s’aligner sur le modèle de publication scientifique des universités américaines, donc dans un contexte très particulier et avec un objectif politique de soft power tout à fait explicite. Ces chercheurs ont maintenant créé leur boîte de consultants et se gavent en expliquant aux universités comment l’intégrer. L’un des co-fondateurs de ce classement explique notamment : “Avant de fusionner, des universités françaises nous ont demandé de faire une simulation de leur future place dans le classement“.

      Bref du quantitatif qui vise à souligner l’élitisme (pourquoi pas) et qui n’a pour objet que de le renforcer et se cognant ostensiblement de tout paramètre qualitatif a fortiori si ce qualitatif concerne les étudiant.e.s.

      Mais voilà. Chaque été c’est la même tannée et le même marronier. Et les mêmes naufrageurs de l’action publique qui se félicitent ou se navrent des résultats de la France dans ledit classement.

      Cette année c’est donc, champagne, 27 établissements français qui se retrouvent “classés”. Mal classés pour l’essentiel mais classés quand même : les 4 premiers (sur la jolie diapo du service comm du gouvernement) se classent entre la 16ème (Paris-Saclay) et la 78ème place (Paris Cité) et à partir de la 5ème place (sur la jolie diapo du service comm du gouvernement) on plonge dans les limbes (Aix-Marseille est au-delà de la 100ème place, Nantes au-delà de la 600ème). Alors pourquoi ce satisfecit du gouvernement ? [Mise à jour du 16 août] Auto-satisfecit d’ailleurs étonnant puisque si l’on accorde de la valeur à ces classements, on aurait du commencer par rappeler qu’il s’agit d’un recul : il y avait en effet 30 établissements classés il y a deux ans et 28 l’année dernière. Le classement 2023 est donc un recul. [/mise à jour du 16 août]

      Non pas parce que les chercheurs sont meilleurs, non pas parce que la qualité de la recherche est meilleure, non pas parce que les financements de la recherche sont plus importants et mieux dirigés, mais pour deux raisons principales.

      La première raison est que depuis plusieurs années on s’efforce d’accroître le “rendement” scientifique des personnels en vidant certaines universités de leurs activités et laboratoires de recherche (et en y supprimant des postes) pour le renforcer et le concentrer dans (très peu) d’autres universités. C’est le grand projet du libéralisme à la française qui traverse les présidences de Sarkozy à Macron en passant par Hollande : avoir d’un côté des université “low cost” dans lesquelles on entasserait les étudiant.e.s jusqu’à bac+3 et où on ferait le moins de recherche possible, et de l’autre côté des “universités de recherche et d’excellence” où on n’aurait pas grand chose à foutre de la plèbe étudiante et où on commencerait à leur trouver un vague intérêt uniquement à partir du Master et uniquement pour les meilleur.e.s et uniquement dans certains domaines (genre pas en histoire de l’art ni en études littéraires ni dans la plupart des sciences humaines et sociales).

      La seconde raison de ce “bon” résultat est que les universités se sont regroupées administrativement afin que les publications de leurs chercheurs et chercheuses soient mieux prises en compte dans le classement de Shangaï. Exemple : il y a quelques années, il y avait plusieurs sites universitaires dans les grandes villes. Chaque site était celui d’une discipline ou d’un regroupement de discipline. On avait à Toulouse, à Nantes et ailleurs la fac de droit, la fac de sciences, la fac de lettres, etc. Et les chercheurs et chercheuses de ces universités, quand ils publiaient des articles dans des revues scientifiques, “signaient” en s’affiliant à une institution qui était “la fac de sciences de Toulouse Paul Sabatier” ou “la fac de lettre de Toulouse le Mirail” ou “la fac de droit de Toulouse”. Et donc au lieu d’avoir une seule entité à laquelle rattacher les enseignants-chercheurs on en avait trois et on divisait d’autant les chances de “l’université de Toulouse” de monter dans le classement.

      Donc pour le dire rapidement (et sans pour autant remettre en cause l’excellence de la recherche française dans pas mal de disciplines, mais une excellence dans laquelle les politiques publiques de ce gouvernement comme des précédents ne sont pas pour grand-chose), la France gagne des places dans le classement de Shangaï d’une part parce qu’on s’est aligné sur les règles à la con dudit classement, et d’autre part parce qu’on a accepté de sacrifier des pans entiers de financements publics de la recherche dans certains secteurs (notamment en diminuant drastiquement le nombre de postes disponibles).

      Allez je vous offre une petite comparaison. Évaluer la qualité de l’université et de la recherche française à partir du classement de Shangaï c’est un peu comme si on prétendait évaluer la qualité de la gastronomie française à partir d’un référentiel établi par Mac Donald : on serait rapidement en capacité de comprendre comment faire pour gagner des places, mais c’est pas sûr qu’on mangerait mieux.

      Je vous propose donc un classement alternatif et complémentaire au classement de Shangaï : le classement de Miamïam. Bien plus révélateur de l’état actuel de l’université française.
      Classement de Miamïam.

      Ce classement est simple. Pour y figurer il faut juste organiser des distributions alimentaires sur son campus universitaire.

      Le résultat que je vous livre ici est là aussi tout à fait enthousiasmant [non] puisqu’à la différence du classement de Shangaï ce sont non pas 27 universités et établissements mais (au moins) 40 !!! L’excellence de la misère à la française.

      Quelques précisions :

      – ce classement n’est pas exhaustif (j’ai fait ça rapidement via des requêtes Google)
      – l’ordre des universités ne signifie rien, l’enjeu était juste de lister “l’offre” qu’elles proposaient sans prendre en compte l’ancienneté ou la fréquence de ces distributions ni le nombre d’étudiant.e.s touché.e.s
      - ce classement est très en dessous de la réalité : par exemple je n’ai inscrit qu’une seule fois l’université de Nantes alors que des distributions alimentaires sont aussi organisées sur son campus de la Roche sur Yon. Beaucoup des universités présentes dans ce classement organisent en fait des distributions alimentaires sur plusieurs de leurs campus et devraient donc y figurer 2, 3 ou 4 fois au moins.
      - je me suis autorisé, sans la solliciter, à utiliser comme crédit image la photo de Morgane Heuclin-Reffait pour France Info, j’espère qu’elle me le pardonnera.

      [Mise à jour du 16 Août]

      On invite aussi le gouvernement à regarder le classement du coût de la vie pour les étudiantes et étudiants : en constante augmentation, et atteignant une nouvelle fois, pour cette population déjà très précaire, des seuils d’alerte indignes d’un pays civilisé.

      Enfin on pourra, pour être complet dans la recension de l’abandon politique de l’université publique, signaler la stratégie de mise à mort délibérée par asphyxie conduite par les gouvernements successifs depuis plus de 15 ans. Extrait :

      “En dix ans, le nombre de recrutements d’enseignants-chercheurs titulaires a diminué de près de moitié, avec 1 935 ouvertures de poste en 2021, contre 3 613 en 2011. En 2022, on enregistre un léger sursaut, avec 2 199 postes de professeur d’université et de maître de conférences ouverts.

      La situation est d’autant plus paradoxale que les universités se vident de leurs enseignants-chercheurs chevronnés, avec un nombre de départs à la retraite en hausse de + 10,4 % en 2021 et de + 10,5 % en 2022, selon une note statistique du ministère publiée en juin. Un avant-goût de la décennie qui vient, marquée par des départs massifs de la génération du baby-boom : entre 2021 et 2029, le ministère prévoit une augmentation de 53 % en moyenne, et de 97 % en sciences – le bond le plus élevé.“

      https://affordance.framasoft.org/2023/08/classement-shangai-miam-miam

  • Et si on travaillait tous et toutes gratuitement ?, avec Maud Simonet
    https://www.arte.tv/fr/videos/103447-002-A/et-si-on-travaillait-tous-et-toutes-gratuitement

    Laura Raim décortique la notion de “travail gratuit” avec Maud Simonet. À partir des écrits féministes sur le travail domestique, cette spécialiste du bénévolat et directrice de recherches au CNRS dessine les contours d’une notion qui touche à nos convictions profondes. Pas facile d’entendre que ce que l’on vit comme un élan de solidarité peut relever de l’exploitation… Source : Les idées larges | ARTE

  • #Frédérique_Vidal annonce vouloir demander une #enquête au #CNRS sur l’#islamogauchisme à l’#université

    Sur le plateau de Jean-Pierre Elkabbach dimanche 14 février, la ministre de la recherche et de l’#enseignement_supérieur, Frédérique Vidal, a fustigé, dans un flou le plus total et pendant 4 minutes 30 secondes, des chercheurs et chercheuses soupçonné·e·s d’islamogauchisme et a annoncé la commande au CNRS d’une enquête « sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université de manière à ce qu’on puisse distinguer de ce qui relève de la #recherche_académique de ce qui relève justement du #militantisme et de l’#opinion. »

    L’entame du sujet annonçait déjà la couleur : « Moi, je pense que l’#islamo-gauchisme gangrène la société dans son ensemble et que l’université n’est pas imperméable et fait partie de la société » affirme Frédérique Vidal.

    Puis la ministre de la recherche continue tout de go, sans s’appuyer sur aucune étude scientifique ni même quoi que ce soit qui pourrait prouver ce qu’elle dit :

    « Ce qu’on observe à l’université, c’est que des gens peuvent utiliser leurs titres et l’aura qu’ils ont. Ils sont minoritaires et certains le font pour porter des #idées_radicales ou des #idées_militantes de l’islamogauchisme en regardant toujours tout par le prisme de leur volonté de #diviser, de #fracturer, de #désigner_l’ennemi, etc… »

    Mélange entre #biologie et #sociologie

    Pour se prévaloir implicitement de son titre d’enseignante-chercheuse, la ministre effectue un mélange erroné entre biologie et sociologie en affirmant :

    « En biologie, on sait depuis bien longtemps qu’il n’y a qu’une espèce humaine et qu’il n’y a pas de #race et vous voyez à quel point je suis tranquille sur ce sujet là. »

    Cette phrase est censée répondre à des chercheur·euse·s en #SHS qui ont fait le constat, non de l’existence de races humaines biologiques, mais de l’existence de #discriminations liées à des races perçues par la société.

    #Confusionnisme sur les #libertés_académiques

    La ministre continue ensuite un discours confusionniste en faisant croire que les chercheur·euse·s revendiquent le droit de chercher contre leurs collègues :

    « Dans les universités, il y a une réaction de tout le milieu académique qui revendique le #droit_de_chercher, d’approfondir les connaissances librement et c’est nécessaire »

    La plupart des chercheur·euse·s qui revendiquent ce droit, le font surtout en s’opposant à la droite sénatoriale qui voulait profiter de la Loi Recherche pour restreindre les libertés académiques (https://www.soundofscience.fr/2517) et à l’alliance LR/LREM lors de la commission paritaire de cette même loi qui a voulu pénaliser les mouvements étudiants (https://www.soundofscience.fr/2529), empêchée, au dernier moment, par le Conseil constitutionnel.

    La ministre Frédérique Vidal semble faire un virage à 180° par rapport à sa position définie dans sa tribune publiée en octobre dernier par l’Opinion et titrée « L’université n’est pas un lieu d’encouragement ou d’expression du #fanatisme » (https://www.lopinion.fr/edition/politique/l-universite-n-est-pas-lieu-d-encouragement-d-expression-fanatisme-227464). Cette #contradiction entre deux positions de la ministre à trois mois et demi d’intervalle explique peut-être le confusionnisme qu’elle instaure dans son discours.

    Alliance entre #Mao_Zedong et l’#Ayatollah_Khomeini

    Mais ce n’est pas fini. #Jean-Pierre_Elkabbach, avec l’aplomb que chacun lui connaît depuis des décennies, affirme tranquillement, toujours sans aucune démarche scientifique :

    « Il y a une sorte d’alliance, si je puis dire, entre #Mao Zedong et l’Ayatollah #Khomeini »

    Loin d’être choquée par une telle comparaison, Frédérique Vidal acquiesce avec un sourire :

    « Mais vous avez raison. Mais c’est bien pour ça qu’à chaque fois qu’un incident se produit, il est sanctionné, à chaque fois que quelque chose est empêché, c’est reprogrammé mais je crois que l’immense majorité des universitaires sont conscients de cela et luttent contre cela. »

    C’est dans ce contexte là, que la ministre déclare :

    « On ne peut pas interdire toute approche critique à l’université. Moi c’est ça que je vais évidemment défendre et c’est pour ça que je vais demander notamment au CNRS de faire une enquête sur l’ensemble des #courants_de_recherche sur ces sujets dans l’université de manière à ce qu’on puisse distinguer de ce qui relève de la #recherche_académique de ce qui relève justement du militantisme et de l’opinion. »

    La suite du passage n’est qu’accusations d’utilisations de titres universitaires non adéquates, ce que la ministre ne s’est pourtant pas privée de faire quelques minutes plus tôt et accusations de tentatives de #censure.

    La ministre finit sa diatribe en appelant à défendre un « #principe_de_la_République » jamais clairement défini et proclame un curieux triptyque « #Danger, #vigilance et #action » qui ne ressemble pas vraiment au Républicain « Liberté, égalité, fraternité ».

    https://www.soundofscience.fr/2648
    #Vidal #ESR #facs #France #séparatisme

    –---

    Fil de discussion sur ce fameux « séparatisme » :
    https://seenthis.net/messages/884291

    Et l’origine dans la bouche de #Emmanuel_Macron (juin 2020) et #Marion_Maréchal-Le_Pen (janvier 2020) :
    https://seenthis.net/messages/884291
    #Macron #Marion_Maréchal

    • Quand ta ministre te fout tellement la honte que tu dois lui dire gentiment :

      Du jamais vu : répondant à la ministre de l’enseignement supérieur, la Conférence des présidents d’université « fait part de sa stupeur face à une nouvelle polémique stérile » et invite « à sortir des représentations caricaturales et des arguties de café du commerce » !

    • Comme le faisait justement remarquer un syndicaliste (entendu à la radio) le terme « islamo-gauchisme » est construit sur le même modèle que le « judéo-bolchévisme » de l’entre deux guerre.
      Avec le résultat qu’on connait...

    • Je n’ai plus de ministre
      https://academia.hypotheses.org/31026

      Après le président de la République, après plusieurs autres ministres, c’est notre ministre de tutelle, Frédérique Vidal, qui a repris à son compte la rhétorique de l’« islamo gauchisme » en déclarant notamment « Moi, je pense que l’islamo-gauchisme gangrène la société dans son ensemble et que l’université n’est pas imperméable et fait partie de la société » et en annonçant commissionner une enquête du CNRS sur les pratiques universitaires.

      Ces déclarations sont extrêmement graves et forment une attaque frontale non seulement contre les libertés universitaires qui garantissent l’indépendance de la recherche au pouvoir politique, mais aussi contre toutes celles et ceux qui à l’université et ailleurs mettent leur énergie à rendre la société meilleure : plus juste, plus inclusive, moins discriminante, où tous et toutes ses membres ont place égale. L’« islamo gauchisme » est un mot dont le flou est une fonction. Côté pile, face une demande de définition (dont on notera l’absence chez madame la ministre) on trouvera un contour restreint, qui se veut repoussoir, et dont on aura bien du mal à trouver des signes tangible. Mais côté face, en utilisant le mot on convoque sans avoir besoin de l’expliciter un grand nombre d’idées et d’actions qui se retrouvent stigmatisées. Là où des chercheurs et chercheuses révèlent des discriminations et leur mécanisme de racialisation, c’est-à-dire d’assignation d’autrui à une race qui n’existe que dans l’esprit de ceux qui discriminent ; là où des militantes et militants dénoncent ces discriminations, les documentent, les exposent ; on les désigne comme nouveaux racistes ou « obsédés de la race ».

      Ainsi le gouvernement espère-t-il sans doute protéger son action des critiques virulentes qu’elle appelle. Déclare-t-on ne pas voir le problème si des femmes choisissent de s’habiller d’une façon ou d’une autre pour suivre leurs cours à l’université, y compris la tête couverte d’un foulard ? Islamo gauchisme. Déclare-t-on qu’il faut se préoccuper d’une très faible représentation des femmes et des personnes racisées aux postes titulaires de recherche et d’enseignement, alors que le jury d’admission du CNRS déclasse l’une de ces personnes trois fois en désavouant le jury d’admissibilité ? Islamo gauchisme. Dénonce-t-on la destruction illégale des tentes de migrants par les forces de l’ordre ? Islamo gauchisme.

      Madame la ministre, j’avais beaucoup à critiquer dans vos actions, vos inaction, vos discours et vos non-dits. Vous avez choisi d’achever de démontrer publiquement que vous n’êtes pas là pour servir les universités, leurs étudiantes et étudiants, leur personnel, mais pour servir votre carrière, quitte à l’adosser à un projet politique mortifère. Je ne vous reconnais aujourd’hui plus comme ma ministre, Madame Vidal. Je ne me sens plus lié par vos écrits. Vous avez rompu le lien de confiance qui doit lier une ministre aux agents et usagers de son ministère. Seule votre démission pourrait encore redonner son sens à la fonction que vous occupez sur le papier.

    • « Danger, vigilance et action ». La Ministre demande à l’Alliance Athena d’actionner le tamis

      Grâce à Martin Clavey, The Sound of Science, nous disposons du verbatim de l’ « interview » de Frédérique Vidal par Jean-Pierre Elkabach le 14 février 2021 sur CNews.

      Frédérique Vidal annonce qu’elle va demander « notamment au CNRS » de faire une enquête sur « l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets à l’université, de manière à ce qu’on puisse distinguer ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme et de l’opinion ».Elle précise aujourd’hui à AEF qu’elle en fait la demande officielle à l’Alliance Athena.Dirigée actuellement par Jean-François Balaudé, président de la commission des moyens de la CPU et président du Campus Condorcet ainsi que par Antoine Petit, président-directeur général du CNRS, et vice-président de l’Alliance depuis le 1er novembre 2016, ce consortium va être chargé de distinguer parmi les « opinions ».

      Dans son interview, Frédérique Vidal annonce son intention de demander une enquête sur « l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets à l’université, de manière à ce qu’on puisse distinguer ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme et de l’opinion ».

      « Ce qu’on peut observer, c’est qu’il y a des gens qui peuvent utiliser leurs titres et l’aura qu’ils ont. Ils sont minoritaires et certains le font pour porter des idées radicales ou militantes. En regardant toujours tout par le prisme de leur volonté de diviser, de fracturer, de désigner l’ennemi ».

      « Quand on s’en sert pour exprimer des opinions ou faire valoir des opinions, en niant le travail de recherche, c’est là qu’il faut le condamner.

      « Il faut être extrêmement ferme, il faut systématiquement parler et que l’université se réveille »

      « Disons-le, quand les gens ne font pas de sciences mais du scientisme », poursuit la Ministre qui a couvert au moins une grave affaire de fraude scientifique.


      *

      Alors que certains entendent distinguer les « sciences critiques » et les « sciences militantes » et que la Ministre commande à des anciens universitaires de trier entre le bon grain et l’ivraie, Academia invite donc ses lecteurs et ses lectrices à relire Max Weber1 dans la traduction précise d’Isabelle Kalinowki :

      De nos jours, il est fréquent que l’on parle d’une « sciences sans présupposés, écrit Max Weber. Une telle science existe-t-elle ? Tout dépend ce que l’on entend par là. Tout travail scientifique présuppose la validité des règles de la logique et de la méthode, ces fondements universels de notre orientation dans le monde. Ces présupposés-là sont les moins problématiques du moins pour la question particulière qui nous occupe. Mais on présuppose aussi que le résultat du travail scientifique est important au sens où il mérite d’être connu. Et c’est de là que découlent, à l’évidence, tous nos problèmes. Car ce présupposé, à son tour, ne peut être démontré par les moyens de la science. On ne peut qu’en interpréter le sens ultime, et il faut le refuser ou l’accepter selon les positions ultimes que l’on adopte à l’égard de la vie
      — Weber, 1917 [2005], p. 36

      Academia, pour sa part, a choisi contre une nouvelle forme de police politique, la protection des libertés académiques.

      https://academia.hypotheses.org/30958

    • #Diffamation à l’encontre d’une profession toute entière ? La Ministre doit partir. Communiqué de la LDH EHESS

      Malgré leur habitude des faux-semblants et du peu d’attention portée à leur profession, les enseignants-chercheurs et enseignantes-chercheures sont confronté.es aujourd’hui à une campagne de #dénigrement sans précédent, désignant en particulier par le terme aussi infâmant qu’imprécis « d’islamo-gauchisme » des établissements ou des disciplines dans leur entier.

      Il serait attendu d’une ministre qu’elle prenne quelque hauteur dans ce débat de plus en plus nauséabond, et qu’elle refuse de reprendre à son compte des notions aussi peu scientifiquement fondées. On attendrait que la responsable de l’enseignement supérieur et de la recherche, elle-même issue de ce milieu, relève avec gratitude la façon dont les enseignant.es universitaires ont en première ligne fait face à la détresse étudiante en cette période de pandémie ; ils n’ont pas démérité en tant que pédagogues, allant même au-delà dans leur rôle d’accompagnement d’étudiant.es par ailleurs largement oubliés.

      Mais, plutôt que de s’intéresser à la crise qui les touche, Mme Frédérique Vidal, sur les ondes d’une chaîne télévisuelle dont un des animateurs a été condamné pour injure et provocation à la haine, répond par l’affirmative lorsque M. Elkabbach décrit les universités françaises, dont elle a la charge, comme étant régies par une sorte d’alliance entre Mao Tsé-Toung et l’ayatollah Khomeini.

      Et elle enchaîne le lendemain en demandant à l’Alliance Athena (qui n’est pas une inspection mais une institution qui coordonne les sciences sociales) « d’enquêter » sur l’islamo-gauchisme et ses « courants » dans le milieu académique.

      Une accusation typique de l’extrême-droite est ainsi reprise une nouvelle fois par une ministre de la République, rassemblant dans une formule ignominieuse un groupe fantasmatique et fantasmé de pseudo-adversaires qui ne sont, en réalité jamais nommés, ou au prix d’approximations grossières amalgamant des concepts mal compris et de noms de collègues ne partageant parfois que peu de choses (si ce n’est les menaces parfois graves que ces accusations font tout à coup tomber sur eux).

      Bref, à ces accusations mensongères faisant courir des risques parfois graves à des fonctionnaires, leur ministre ne trouve à répondre que par de vagues admonestations décousues (selon lesquelles, par exemple, en tant que biologiste elle peut dire que « la race » n’existe pas), et par la réitération des accusations portées à leur encontre. Plus encore, elle en appelle à une sorte de police par et dans les institutions d’enseignement et de recherche, rejoignant de la sorte les interdictions de certaines thématiques (les études sur le genre) dans les universités hongroises, brésiliennes ou roumaines

      Elle se fait ainsi complice de faits de diffamation collective à l’encontre d’une profession toute entière, mais aussi d’une dévalorisation accrue des universités. Elle parvient ainsi, au-delà de ces dégâts dans l’opinion qui ne peuvent qu’accroître le désespoir des étudiantes et des étudiants dont les formations sont ainsi décrites, à confirmer sa décrédibilisation personnelle aux yeux des personnels de l’ESR.

      Un appel à la démission de Frédérique Vidal avait été porté en novembre 2020 par la CP-CNU, représentant l’ensemble des disciplines, après le vote de la loi LPR.

      Plus que jamais, au regard de ces nouvelles dérives dans un contexte de difficultés sans précédent pour l’université et la recherche, sa démission s’impose, tout comme l’abandon de cette prétendue « enquête » non seulement nauséabonde mais déshonorante au regard des difficultés sans précédent dans lesquelles se débat l’ESR. Oui, danger, vigilance et action mais à l’encontre de la Ministre.

      Qu’aucun.e collègue, quel que soit son statut, ne prête main forte à cette campagne de dénonciation.

      https://academia.hypotheses.org/31060

    • Vidal au stade critique. Communiqué de Sauvons l’université !, 17 février 2021

      Sauvons l’université ! avait été la première à monter au créneau lorsque Jean-Michel Blanquer, dans les pas d’Emmanuel Macron et de Marion Maréchal-Le Pen, avait tenu des propos diffamatoires devant les sénateurs et sénatrices. Academia reproduit le communiqué que l’association fait paraître ce jour sur leur site.

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      Ainsi, depuis des mois, par petites touches, se met en place un discours officiel anti-universitaire, sans que jamais la ministre de l’Enseignement supérieur qui devrait être le premier rempart des universitaires contre ces attaques n’ait eu un mot pour les défendre » disions-nous dans notre communiqué du 24 octobre pour dénoncer les propos de Jean-Michel Blanquer devant les sénateurs dans lesquels il dénonçait « des courants islamo-gauchistes très puissants dans les secteurs de l’enseignement supérieur qui commettent des dégâts sur les esprits ».

      Dans une tribune à L’Opinion deux jours plus tard la ministre de l’ESR semblait y répondre du bout des lèvres : « L’université n’est pas un lieu d’encouragement ou d’expression du fanatisme ». Bien.

      Mais depuis, la petite musique est devenue fanfare assourdissante : ainsi, deux députés LR, Julien Aubert et Damien Abad demandaient en novembre une mission d’information de l’Assemblée Nationale sur « les dérives idéologiques dans les établissements d’enseignement supérieur » ; ce même Julien Aubert publiait le 26 novembre 2020 les noms et les comptes Twitter de sept enseignants-chercheurs, nommément ciblés et livrés à la vindicte publique ; cette dénonciation calomnieuse s’ajoutait aux propos tenus par la rédaction du journal Valeurs Actuelles à l’encontre du Président nouvellement élu de l’université Sorbonne Paris Nord ; le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin (le 1er février 2021 sur France-Inter) parlait d’idéologie racialiste ; la députée LR Annie Genevard dans le débat sur l’interdiction du voile à l’université dans le cadre de la loi sur le séparatisme (le 3 février 2021) synthétisait tout cela en affirmant que « L’université est traversée par des mouvements puissants et destructeurs […] le décolonialisme, le racialisme, l’indigénisme et l’intersectionnalité ».

      Et le 14 février, la ministre Frédérique Vidal, muette sur l’abandon de l’université et de ses étudiants depuis le début de la pandémie, sonne l’hallali sur une chaîne ouvertement d’extrême droite :

      « Ce qu’on observe à l’université, c’est que des gens peuvent utiliser leurs titres et l’aura qu’ils ont. Ils sont minoritaires et certains le font pour porter des idées radicales ou des idées militantes de l’islamo-gauchisme en regardant toujours tout par le prisme de leur volonté de diviser, de fracturer, de désigner l’ennemi, etc… »

      Et de répondre dans un rire à une question toute en nuance de l’interviewer

      « Il y a une sorte d’alliance, si je puis dire, entre Mao Zedong et l’Ayatollah Khomeini ? » : « Mais vous avez raison ! »

      Tant de bêtise pourrait prêter à rire.

      Mais au milieu d’inepties qui ne témoignent que de sa confusion, Frédérique Vidal conclut, sans crainte de se contredire dans une même phrase :

      « On ne peut pas interdire toute approche critique à l’université. Moi c’est ça que je vais évidemment défendre et c’est pour ça que je vais demander notamment au CNRS de faire une enquête sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université de manière à ce qu’on puisse distinguer de ce qui relève de la recherche académique de ce qui relève justement du militantisme et de l’opinion ».

      Voilà le CNRS transformé en IGPN (Inspection Générale de la Pensée Nationaliste).

      La chasse aux sorcières est donc lancée, cette fois en haut lieu. Elle ne peut qu’encourager le harcèlement, déjà intense sur internet, et assorti à l’occasion de menaces de mort, envers des collègues accusés d’être des « islamogauchistes ». Elle s’inscrit dans une course à l’extrême-droite qui n’est pas isolée dans le gouvernement : il s’agit bien d’un choix politique concerté (voire d’une intervention sur commande ?).

      Retenons, cependant, une phrase de la ministre :

      « Il faut que le monde académique se réveille ».

      Oui, il est grand temps de nous réveiller. Toutes les instances, tous les échelons que comptent l’enseignement supérieur et la recherche doivent désormais ouvertement se prononcer et clamer haut et fort : nous ne pouvons plus reconnaître Frédérique Vidal comme notre ministre, nous refuserons de mettre en place des directives contraires aux principes fondamentaux de l’université.

      https://academia.hypotheses.org/31070

    • L’ « islamogauchisme » n’est pas une réalité scientifique. Communiqué du CNRS, 17 février 2021

      « L’islamogauchisme », slogan politique utilisé dans le débat public, ne correspond à aucune réalité scientifique. Ce terme aux contours mal définis, fait l’objet de nombreuses prises de positions publiques, tribunes ou pétitions, souvent passionnées. Le CNRS condamne avec fermeté celles et ceux qui tentent d’en profiter pour remettre en cause la liberté académique, indispensable à la démarche scientifique et à l’avancée des connaissances, ou stigmatiser certaines communautés scientifiques. Le CNRS condamne, en particulier, les tentatives de délégitimation de différents champs de la recherche, comme les études postcoloniales, les études intersectionnelles ou les travaux sur le terme de « race », ou tout autre champ de la connaissance.

      Concernant les questions sociales, le rôle du CNRS, et plus généralement de la recherche publique, est d’apporter un éclairage scientifique, une expertise collective, s’appuyant sur les résultats de recherches fondamentales, pour permettre à chacun et chacune de se faire une opinion ou de prendre une décision. Cet éclairage doit faire état d’éventuelles controverses scientifiques car elles sont utiles et permettent de progresser, lorsqu’elles sont conduites dans un esprit ouvert et respectueux.

      La polémique actuelle autour de l’ « islamogauchisme », et l’exploitation politique qui en est faite, est emblématique d’une regrettable instrumentalisation de la science. Elle n’est ni la première ni la dernière, elle concerne bien des secteurs au-delà des sciences humaines et des sciences sociales. Or, il y a des voies pour avancer autrement, au fil de l’approfondissement des recherches, de l’explicitation des méthodologies et de la mise à disposition des résultats de recherche. C’est là aussi la mission du CNRS.

      C’est dans cet esprit que le CNRS pourra participer à la production de l’étude souhaitée par la Ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation visant à apporter un éclairage scientifique sur les champs de recherche concernés. Ce travail s’inscrirait dans la continuité de travaux d’expertise déjà menés sur le modèle du rapport « Recherches sur les radicalisations, les formes de violence qui en résultent et la manière dont les sociétés les préviennent et s’en protègent » réalisé en 2016 par l’alliance Athena, qui regroupe l’ensemble des forces académiques en sciences humaines et sociales dans les universités, les écoles et les organismes de recherche, ou du rapport « Les sciences humaines et sociales face à la première vague de la pandémie de Covid-19 – Enjeux et formes de la recherche », réalisé par le CNRS en 2020.

      https://academia.hypotheses.org/31086

    • Non à la #chasse_aux_sorcières ! Communiqué de la #CP-CNU, 17 février 2021

      La CP-CNU demandait la #démission de Vidal dès le 6 novembre 2020 en ces termes

      « Madame Frédérique Vidal ne dispose plus de la #légitimité nécessaire pour parler au nom de la communauté universitaire et pour agir en faveur de l’Université.

      C’est pourquoi, Monsieur le Président de la République, nous vous posons la question de la pertinence du maintien en fonctions de Madame la Ministre dans la mesure où toute communication semble rompue entre elle et la communauté des enseignants-chercheurs. Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre respectueuse considération. »

      Les choses étant dites, elles n’ont pas été répété dans le communiqué de 17 février 2021

      https://academia.hypotheses.org/31089

    • Sortir toute armée de la cuisse de Jupiter. Communiqué de l’#Alliance_Athéna, 18 février 2021

      L’alliance thématique nationale des sciences humaines et sociales (#Athéna) est un lieu de concertation et de coopération stratégique entre les universités et les organismes de recherche. Elle a pour mission d’organiser le dialogue entre les acteurs majeurs de la recherche en sciences humaines et sociales, sur des questions stratégiques pour leur développement et leurs relations avec les autres grands domaines scientifiques. L’alliance porte les positions partagées qui émergent de ce dialogue auprès des instances de décision et de financement de la recherche, de niveau national et européen notamment. L’alliance Athéna consacre ainsi exclusivement ses réflexions aux questions de recherche avec pour objectif constant de servir le débat scientifique, de préserver les espaces de controverses et de favoriser la diversité des questions et des méthodes. A cet égard, il n’est pas du ressort de l’alliance Athéna de conduire des études qui ne reposeraient pas sur le respect des règles fondatrices de la pratique scientifique, qui conduiraient à remettre en question la pertinence ou la légitimité de certains champs de recherche, ou à mettre en doute l’intégrité scientifique de certains collègues.

      https://academia.hypotheses.org/31107

    • Heating Up Culture Wars, France to Scour Universities for Ideas That ‘Corrupt Society’

      The government announced an investigation into social science research, broadening attacks on what it sees as destabilizing American influences.

      Stepping up its attacks on social science theories that it says threaten France, the French government announced this week that it would launch an investigation into academic research that it says feeds “Islamo-leftist’’ tendencies that “corrupt society.’’

      News of the investigation immediately caused a fierce backlash among university presidents and scholars, deepening fears of a crackdown on academic freedom — especially on studies of race, gender, post-colonial studies and other fields that the French government says have been imported from American universities and contribute to undermining French society.

      While President Emmanuel Macron and some of his top ministers have spoken out forcefully against what they see as a destabilizing influence from American campuses in recent months, the announcement marked the first time that the government has moved to take action.

      It came as France’s lower house of Parliament passed a draft law against Islamism, an ideology it views as encouraging terrorist attacks, and as Mr. Macron tilts further to the right, anticipating nationalist challenges ahead of elections next year.

      Frédérique Vidal, the minister of higher education, said in Parliament on Tuesday that the state-run National Center for Scientific Research would oversee an investigation into the “totality of research underway in our country,’’ singling out post-colonialism.

      In an earlier television interview, Ms. Vidal said the investigation would focus on “Islamo-leftism’’ — a controversial term embraced by some of Mr. Macron’s leading ministers to accuse left-leaning intellectuals of justifying Islamism and even terrorism.

      “Islamo-leftism corrupts all of society and universities are not impervious,’’ Ms. Vidal said, adding that some scholars were advancing “radical” and “activist” ideas. Referring also to scholars of race and gender, Ms. Vidal accused them of “always looking at everything through the prism of their will to divide, to fracture, to pinpoint the enemy.’’

      France has since early last century defined itself as a secular state devoted to the ideal that all of its citizens are the same under the law, to the extent that the government keeps no statistics on ethnicity and religion.

      A newly diversifying society, and the lasting marginalization of immigrants mostly from its former colonies, has tested those precepts. Calls for greater awareness of discrimination have met opposition from a political establishment that often views them as an invitation to American multiculturalism and as a threat to France’s identity and social cohesion.

      In unusually blunt language, the academic world rejected the government’s accusations. The Conference of University Presidents on Tuesday dismissed “Islamo-leftism’’ as a “pseudo notion” popularized by the far right, chiding the government’s discourse as “talking rubbish.’’

      The National Center for Scientific Research, the state organization that the minister ordered to oversee the investigation, suggested on Wednesday that it would comply, but it said it “firmly condemned” attacks on academic freedom.

      The organization said it “especially condemned attempts to delegitimize different fields of research, like post-colonial studies, intersectional studies and research on race.’’

      Opposition by academics hardened on Thursday, when the association that would actually carry out the investigation, Athéna, put out a sharply worded statement saying that it was not its responsibility to conduct the inquiry.

      The seemingly esoteric fight over social science theories — which has made the front page of at least three of France’s major newspapers in recent days — points to a larger culture war in France that has been punctuated in the past year by mass protests over racism and police violence, competing visions of feminism, and explosive debates over Islam and Islamism.

      It also follows years of attacks, large and small, by Islamist terrorists, that have killed more than 250 French, including in recent months three people at a basilica in Nice and a teacher who was beheaded.

      While the culture war is being played out in the media and in politics, it has its roots in France’s universities. In recent years, a new, more diverse generation of social science scholars has embraced studies of race, gender and post-colonialism as tools to understand a nation that has often been averse to reflect on its history or on subjects like race and racism.

      They have clashed with an older generation of intellectuals who regard these social science theories as American imports — though many of the thinkers behind race, gender and post-colonialism are French or of other nationalities.

      Mr. Macron, who had shown little interest in the issues in the past, has won over many conservatives in recent months by coming down hard against what he has called “certain social science theories entirely imported from the United States.’’

      In a major speech on Islamism last fall, Mr. Macron talked of children or grandchildren of Arab and African immigrants “revisiting their identity through a post-colonial or anticolonial discourse’’ — falling into a trap set by people who use this discourse as a form of “self-hatred’’ nurtured against France.

      In recent months, Mr. Macron has moved further to the right as part of a strategy to draw support from his likely main challenger in next year’s presidential election, Marine Le Pen, the far-right leader. Polls show that Mr. Macron’s edge has shrunk over Ms. Le Pen, who was his main rival in the last election.

      Chloé Morin, a public opinion expert at the Fondation Jean-Jaurès, a Paris-based research group, said that Mr. Macron’s political base has completely shifted to the right and that his minister’s use of the expression Islamo-leftism “speaks to the right-wing electorate.”

      “It has perhaps become one of the most effective terms for discrediting an opponent,” Ms. Morin said.

      Last fall, Mr. Macron’s ministers adopted a favorite expression of the far right, “ensauvagement,’’ or “turning savage,’’ to decry supposedly out-of-control crime — even though the government’s own statistics showed that crime was actually flat or declining.

      Marwan Mohammed, a French sociologist and expert on Islamophobia, said that politicians have often used dog-whistle words, like “ensauvagement’’ or “Islamo-leftism,’’ to divide the electorate.

      “I think the government will be offering us these kinds of topics with a regular rhythm until next year’s presidential elections,’’ Mr. Mohammed said, adding that these heated cultural debates distracted attention from the government’s mishandling of the coronavirus epidemic, the economic crisis and even the epidemic-fueled crisis at the nation’s universities.

      The expression “Islamo-leftism” was first coined in the early 2000s by the French historian Pierre-André Taguieff to describe what he saw as a political alliance between far-left militants and Islamist radicals against the United States and Israel.

      More recently, it has been used by conservative and far-right figures — and now by some of Mr. Macron’s ministers — against those they accuse of being soft on Islamism and focusing instead on Islamophobia.

      Experts on Islamophobia examine how hostility toward Islam, rooted in France’s colonial experience, continues to shape the lives of French Muslims. Critics say their focus is a product of American-style, victim-based identity politics.

      Mr. Taguieff, a leading critic of American universities, said in a recent email that Islamophobia, along with the “totally artificial importation’’ in France of the “American-style Black question” sought to create the false narrative of “systemic racism’’ in France.

      Sarah Mazouz, a sociologist at the National Center for Scientific Research, said that the government’s attacks on these social theories “highlight the difficulty of the French state to think of itself as a state within a multicultural society.”

      She said the use of the expression “Islamo-leftism” was aimed at “delegitimizing” these new studies on race, gender and other subjects, “so that the debate does not take place.”

      https://www.nytimes.com/2021/02/18/world/europe/france-universities-culture-wars.html

    • L’ « islamogauchisme » — et le HCERES — au tapis. #Jean_Chambaz et #Pap_Ndiaye — et Thierry Coulhon — sur Radio France

      L’islamogauchisme, concept de Pierre-André Taguieff au début des années 2000 pour signaler des formes de dérives d’une extrême-gauche pro-palistinien tendant à des discours antisémites, se trouve désormais récupéré par l’extrême-droite à des fins d’anathème.Deux interventions matinales très claires de Jean Chamblaz, président de Sorbonne Université, et de Pap Ndiaye, professeur à Sciences po.

      A retrouver sur academia :

      https://academia.hypotheses.org/31126

    • #Pétition : #Vidal_démission !

      Le mardi 16 février, à l’Assemblée nationale, la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, Frédérique Vidal confirmait ce qu’elle avait annoncé deux jours plus tôt sur la chaîne Cnews : le lancement d’une « enquête » sur l’ « islamogauchisme » et le postcolonialisme à l’université, enquête qu’elle déclarait vouloir confier au CNRS à travers l’Alliance Athéna. Les raisons invoquées : protéger « des » universitaires se disant « empêchés par d’autres de mener leurs recherches », séparer « ce qui relève de la recherche académique de ce qui relève du militantisme et de l’opinion » ainsi que … « l’apparition au Capitole d’un drapeau confédéré ».

      Si le propos manque de cohérence, l’intention est dévastatrice : il s’agit de diffamer une profession et, au-delà, toute une communauté, à laquelle, en tant qu’universitaire, Frédérique Vidal appartient pourtant et qu’il lui appartient, en tant que ministre, de protéger. L’attaque ne se limite d’ailleurs pas à disqualifier puisqu’elle fait planer la menace d’une répression intellectuelle, et, comme dans la Hongrie d’Orban, le Brésil de Bolsonaro ou la Pologne de Duda, les études postcoloniales et décoloniales, les travaux portant sur les discriminations raciales, les études de genre et l’intersectionnalité sont précisément ciblés.

      Chercheur·es au CNRS, enseignant·es chercheur·es titulaires ou précaires, personnels d’appui et de soutien à la recherche (ITA, BIATSS), docteur·es et doctorant·es des universités, nous ne pouvons que déplorer l’indigence de Frédérique Vidal, ânonnant le répertoire de l’extrêmedroite sur un « islamo-gauchisme » imaginaire, déjà invoqué en octobre 2020 par le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer. Mais, plus encore, nous nous insurgeons contre l’indignité de ce qu’il faut bien qualifier de chasse aux sorcières. La violence du projet redouble la lâcheté d’une ministre restée silencieuse sur la détresse des étudiant·es pendant la pandémie comme elle avait été sourde à nos interpellations sur une LPR massivement rejetée par tout·es celles et ceux qui font la recherche, y contribuent à un titre ou un autre.

      La crise économique et sociale la plus grave depuis 1945 assombrit l’avenir des jeunes adultes, l’anxiété face à la pandémie fissure la solidarité entre les générations, la pauvreté étudiante éclate aux yeux de tous·tes comme une question sociale majeure, les universités – lieux de vie et de savoirs – sont fermées. Mais pour Frédérique Vidal, le problème urgent de l’enseignement supérieur et de la recherche, celui qui nécessite de diligenter une « enquête » et d’inquiéter les chercheur·es, c’est la « gangrène » de l’ « islamo-gauchisme » et du postcolonialisme.

      Amalgamant un slogan politique douteux et un champ de recherche internationalement reconnu, elle regrette l’impossibilité de « débats contradictoires ». Pourtant, et nous espérons que la ministre le sait, nos universités et nos laboratoires déploient de multiples instances collectives de production et de validation de la connaissance : c’est bien dans l’espace international du débat entre pair·es que la science s’élabore, dans les revues scientifiques, dans les colloques et les séminaires ouverts à tous·tes. Et ce sont les échos de ces débats publics qui résonnent dans nos amphithéâtres, comme dans les laboratoires.

      Contrairement à ce qu’affirme Frédérique Vidal, les universitaires, les chercheur·es et les personnels d’appui et de soutien à la recherche n’empêchent pas leurs pair.es de faire leurs recherches. Ce qui entrave notre travail, c’est l’insincérité de la LPR, c’est le sous-financement chronique de nos universités, le manque de recrutements pérennes, la pauvreté endémique de nos laboratoires, le mépris des gouvernements successifs pour nos activités
      d’enseignement, de recherche et d’appui et de soutien à la recherche, leur déconsidération pour des étudiant·es ; c’est l’irresponsabilité de notre ministre. Les conséquences de cet abandon devraient lui faire honte : signe parmi d’autres, mais particulièrement blessant, en janvier dernier, l’Institut Pasteur a dû abandonner son principal projet de vaccin.

      Notre ministre se saisit du thème complotiste « islamo-gauchisme » et nous désigne coupables de pourrir l’université. Elle veut diligenter une enquête, menace de nous diviser et de nous punir, veut faire régner le soupçon et la peur, et bafouer nos libertés académiques. Nous estimons une telle ministre indigne de nous représenter et nous demandons, avec force, sa démission.

      Vous pouvez signer la pétition ici : https://www.wesign.it/fr/justice/nous-universitaires-et-chercheurs-demandons-avec-force-la-demission-de-freder

      https://academia.hypotheses.org/31187

    • Islamo-gauchisme à l’université ? La proposition de Vidal fait bondir ces universitaires

      Sur CNews, la ministre a annoncé vouloir "demander notamment au CNRS" une enquête "sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université."

      “L’islamo-gauchisme gangrène les universités”. C’est ce titre du Figaro que le journaliste Jean-Pierre Elkabbach a présenté à Frédérique Vidal, invitée sur son plateau sur CNews dimanche 14 février, l’invitant à le commenter avec lui. La réponse de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche a provoqué la colère d’une partie des enseignants-chercheurs.

      “Je pense que l’islamo-gauchisme gangrène la société dans son ensemble, et que l’université n’est pas imperméable, l’université fait partie de la société”, a-t-elle affirmé.

      Et d’ajouter : “Ce que l’on observe, à l’université, c’est que des gens peuvent utiliser leurs titres et l’aura qu’ils ont. Ils sont minoritaires et certains le font pour porter des idées radicales ou des idées militantes de l’islamo-gauchisme en regardant toujours tout par le prisme de leur volonté de diviser, de fracturer, de désigner l’ennemi, etc…”
      “Une sorte d’alliance entre Mao Zedong et l’Ayatollah Khomeini”

      Des idées que semble alors partager Jean-Pierre Elkabbach, qui décrit les universitaires en question comme “une sorte d’alliance, si je puis dire, entre Mao Zedong et l’Ayatollah Khomeini.”

      “Mais vous avez raison, renchérit la ministre. Mais c’est bien pour ça qu’à chaque fois qu’un incident se produit, il est sanctionné, à chaque fois que quelque chose est empêché, c’est reprogrammé, mais je crois que l’immense majorité des universitaires sont conscients de cela et luttent contre cela.”

      À la suite de quoi, la ministre a annoncé sur le plateau de CNews qu’elle allait confier une enquête au CNRS “sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université.”

      Pour Christelle Rabier, maîtresse de conférence à l’EHESS, ce n’est pas un hasard si la ministre tient ces propos maintenant. “La semaine dernière, elle a été mise en cause au Sénat pour répondre face à la détresse étudiante, remarque-t-elle. Il y a 20% des étudiants qui ont recours à l’aide alimentaire, sans parler des suicides et de la détresse psychologique. Elle en est directement responsable.”
      Attaques contre les universitaires

      Les propos de la ministre ont provoqué la colère d’une partie des enseignants-chercheurs, même s’ils ne surprennent pas. “Nous sommes vraiment scandalisés, s’indigne une chercheuse du CNRS, qui préfère rester anonyme. La ministre s’en prend - une fois de plus - à la liberté académique en confondant approches scientifiques critiques et militantisme.”

      Après la Loi de programmation sur la recherche, très mal reçue, c’est pour eux une nouvelle attaque contre les universitaires, dans un contexte aggravé par la crise sanitaire. Le 6 novembre, la Commission permanente du Conseil national des universités (CP-CNU) avait demandé la démission de Frédérique Vidal.

      “On observe plusieurs formes d’attaques contre les universitaires, soutient Christelle Rabier. Les non-renouvellements et les suppressions de postes, des attaques systématiques de collègues sur leurs travaux, en particulier si ce sont des femmes et qu’elles traitent de questions qui pourraient remettre en cause l’ordre dominant.”
      L’utilisation du terme “islamo-gauchisme”

      Pour les enseignants-chercheurs, l’utilisation du terme “islamo-gauchisme” n’est pas anodin. “C’est un mot un peu aimant, qui rassemble toutes les détestations et qui ne veut absolument rien dire, estime Christelle Rabier. Et que cela vienne d’une ministre, qui n’a déjà plus de légitimité depuis plusieurs mois, c’est intolérable.”

      Pour François Burgat, directeur de recherches au CNRS, cette “appellation stigmatisante” a pour objectif de “discréditer les intellectuels (non musulmans) qui se solidarisaient ou qui refusaient de criminaliser les revendications des descendants des populations colonisées.”

      Le terme avait déjà été utilisé par Jean-Michel Blanquer le 22 octobre, qui affirmait :“Ce qu’on appelle l’islamo-gauchisme fait des ravages”, notamment ”à l’université.” Quelques jours plus tard, Frédérique Vidal avait réagi tardivement pour rappeler le principe des libertés académiques.

      “On peut constater depuis hier qu’elle a franchi un cran supplémentaire. C’est juste scandaleux”, s’indigne la chercheuse du CNRS.

      Dans un communiqué, la Conférence des présidents d’université (CPU) a fait part de “sa stupeur face à une nouvelle polémique stérile sur le sujet de l’“islamogauchisme” à l’université”.

      Elle appelle ”à élever le débat”. “Si le gouvernement a besoin d’analyses, de contradictions, de discours scientifiques étayés pour l’aider à sortir des représentations caricaturales et des arguties de café du commerce, les universités se tiennent à sa disposition”, a-t-elle proposé.


      https://twitter.com/CPUniversite/status/1361727549739515908

      “Une réalité hautement contestable”

      L’annonce d’une enquête au CNRS “sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université”, si elle n’est pas en soit répréhensible, pose plusieurs questions.

      “Le ‘cahier des charges’ de la demande qui lui est adressée fait réellement peur, estime François Burgat. La ministre s’abstrait purement et simplement de toute exigence scientifique.” Pour le chercheur, le postulat de la ministre, selon lequel “la société est gangrénée par l’islamo-gauchisme”, dont l’université, et une “réalité hautement contestable” qui ne repose sur “aucun corpus”.

      La chercheuse du CNRS qui préfère garder l’anonymat ajoute : “Si des cas particuliers sont litigieux au regard de la loi, qu’elle les cite et ouvre le débat. Sinon, qu’elle se taise.”

      Et d’ajouter : “Nous sommes des chercheurs, nous essayons de penser et analyser le monde, mobiliser des outils, et débattre de nos méthodes ou concepts d’analyse. Nous ne sommes pas au service d’un ministère et de ses obsessions politiques et calculs électoralistes.”

      https://www.huffingtonpost.fr/entry/la-proposition-de-vidal-sur-lislamo-gauchisme-fait-bondir-ces-univers

    • Frédérique Vidal veut demander au CNRS une enquête sur « l’islamo-gauchisme » à l’université

      La ministre de l’Enseignement supérieur souhaite ainsi faire le distinguo entre « recherche académique » et « militantisme ».

      Mobilisée sur la précarité étudiante liée à la crise sanitaire actuelle ou sur la multiplication des dénonciations d’agressions sexuelles dans les IEP avec le hashtag #SciencesPorc, Frédéric Vidal ouvre un nouveau front. Invitée ce dimanche sur le plateau de Jean-Pierre Elkabbach sur CNews, la ministre de l’Enseignement supérieur a annoncé vouloir « demander notamment au CNRS (Centre national de la recherche scientifique) de faire une enquête sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université. »

      Par « ces sujets », la ministre parle de « l’islamo-gauchisme », qui selon elle « gangrène la société dans son ensemble », et donc l’université également.

      Avec ces travaux, Frédérique Vidal souhaiterait ainsi « distinguer de ce qui relève de la recherche académique de ce qui relève justement du militantisme et de l’opinion », relate le site d’information scientifique Soundofscience, qui se fait l’écho de l’annonce.

      « Alliance » entre Mao et Khomeini

      « Ce qu’on observe à l’université, c’est que des gens peuvent utiliser leurs titres et l’aura qu’ils ont », affirme la ministre, malgré l’émoi provoqué dans le milieu universitaire par ces accusations, régulières ces derniers mois. « Ils sont minoritaires et certains le font pour porter des idées radicales ou des idées militantes de l’islamo-gauchisme en regardant toujours tout par le prisme de leur volonté de diviser, de fracturer, de désigner l’ennemi, etc… »

      En guise de conclusion, la ministre a de nouveau persisté et signé dans son idée, prenant au mot une affirmation de Jean-Pierre Elkabbach selon laquelle la situation à l’université pourrait ressembler à « une sorte d’alliance, si je puis dire, entre Mao Zedong et l’Ayatollah Khomeini. »

      « Mais vous avez raison. Mais c’est bien pour ça qu’à chaque fois qu’un incident se produit, il est sanctionné, à chaque fois que quelque chose est empêché, c’est reprogrammé, mais je crois que l’immense majorité des universitaires sont conscients de cela et luttent contre cela », termine-t-elle.

      Les universités déjà émues par des propos de Blanquer

      Ce n’est pas la première fois qu’un membre du gouvernement utilise ce terme. En octobre dernier, le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer avait à son tour dénoncé « l’islamo-gauchisme » qui fait selon lui « des ravages à l’université », prenant notamment pour cibles le syndicat étudiant Unef et La France Insoumise. « Notre société a été beaucoup trop perméable à des courants de pensée », avait-il alors ajouté au micro d’Europe 1.

      Face à cette accusation, la Conférence des présidents d’université (CPU) s’était émue et avait tenu à répondre au ministre.

      « Non, les universités ne sont pas des lieux où se construirait une ’idéologie’ qui mène au pire. Non, les universités ne sont pas des lieux d’expression ou d’encouragement du fanatisme. Non, les universités ne sauraient être tenues pour complices du terrorisme », était-il affirmé dans un communiqué.

      https://www.bfmtv.com/societe/education/frederique-vidal-veut-demander-au-cnrs-une-enquete-sur-l-islamo-gauchisme-a-l

    • Frédérique Vidal tombe dans la fange de l’extrême droite

      Invitée de CNews ce 14 février, Frédérique Vidal a emboité le pas aux dérives de Blanquer et Darmanin en reprenant la petite musique nauséabonde de « l’islamo-gauchisme » qui « gangrène la société dans son ensemble » et l’université en particulier. Un discours qui stigmatise tout ensemble les universitaires et les musulmans.

      Ce dimanche j’échangeais avec un étudiant qui, comme des milliers d’autres, tente de survivre à la désocialisation et aux cours à distance. Il ne va pas bien. Je lui ai proposé une conversation téléphonique. Le confinement, le sens de la vie, les doutes face à un projet professionnel... Mais ce qui le rend le plus anxieux, parmi toutes les difficultés qu’il tente d’affronter, c’est simplement le fait d’être musulman. Il m’a dit : « l’anxiété d’être musulman aujourd’hui ». Tout est là. Et je crois que c’est vraiment le résultat d’une politique. L’exploitation idéologique et sécuritaire du #terrorisme. La loi sur le « séparatisme » qui détricote nos libertés et grave dans le marbre la #stigmatisation des #musulmans. La politique guerrière de Macron au Sahel et le mépris, affiché ce jour, des pays africains. Tout ceci fait système. Et l’étudiant avec lequel je parle l’a très bien compris. L’étudiant musulman qui a eu peur en entendant Vidal, dimanche dernier. Et qui m’en a parlé en premier.

      J’ai donc écouté Frédérique Vidal répondre à Elkabbach, sur la chaîne qui est devenue le caniveau du journalisme d’extrême droite. Zemmour and co. Et une fois de plus j’ai eu #honte en écoutant « ma » ministre. Honte pour l’intelligence critique et les savoirs qu’elle devrait représenter. Honte de voir une « chercheuse », ancienne présidente d’université, asséner des #contre-vérités, insulter les universitaires et la pensée elle-même, se complaire dans la fange de l’extrême droite et rejoindre ainsi Blanquer et Darmanin dans le jeu dangereux de celui qui sera plus radical que Marine le Pen. En novembre 2020 la CP-CNU appelait à la démission de la ministre et écrivait ceci : « Madame Frédérique Vidal ne dispose plus de la légitimité nécessaire pour parler au nom de la communauté universitaire et pour agir en faveur de l’Université. » Aujourd’hui au nom de qui parle cette ministre ? Au nom du gouvernement et de Macron, ou au nom de Marine Le Pen ? De qui ou de quoi fait-elle le jeu ?

      On peut se faire une idée de la partie que Vidal a jouée en écoutant cet extrait mis en ligne par The Sound of Science, une vidéo devenue virale en quelques heures, Vidal devenue virale par sa haine des sciences humaines, de la recherche libre et des universitaires :

      https://twitter.com/SoundofScFr/status/1361390845111451650

      Petit retour en arrière. En octobre 2020 Frédérique Vidal avait été pressée par la CPU de recadrer Blanquer qui s’en était pris violemment aux universitaires, ravagés par « l’islamo-gauchisme », et accusés de « #complicité_intellectuelle avec le terrorisme ». La ministre avait pris position dans un journal à faible visibilité en affirmant dans une tribune, contre son collègue, que « l’université n’est pas un lieu d’expression ou d’encouragement du terrorisme ». La ministre défendait alors « la liberté d’expression et les libertés académiques » qui « sont indissociables ». De deux choses l’une : ou bien Vidal défend les libertés académiques, la liberté de recherche et la liberté d’expression des universitaires qui ont une valeur constitutionnelle, ou bien elle sacrifie ces trois libertés sur l’autel d’une attaque idéologique du libéralisme autoritaire contre l’université et la recherche. Comment comprendre cette contradiction ? Comment comprendre la violente #stigmatisation des islamo-gauchistes sur le plateau de C News quatre mois après la tribune de L’Opinion ? L’art macronien du « en même temps » ? Une immense #hypocrisie dans la tribune du mois d’octobre ? Un voile de fumée jeté sur un bilan désastreux ? La réponse à une commande politique de Macron ? Continuer la petite chanson « le RN est trop mou, LREM fera mieux dans la radicalité » ?

      Rien de tout ceci n’est exclu, mais je pense que la réponse est donnée par Vidal elle-même dans la suite de l’entretien. Très spontanément Vidal, pour remettre à leur place les méchants universitaires qui font des études de genre trop libres ou des études postcoloniales trop engagées, en appelle à l’évaluation-sanction par les pairs et pourquoi pas à la #délation et à la #condamnation : « C’est là qu’il faut être condamné … Allons-y, disons quand les gens ne font pas de #science, mais font du #scientisme » - où Vidal montre, au passage, qu’elle ne maitrise pas le concept de scientisme (à 43:20 ici). Et Vidal de diligenter une enquête du CNRS sur les disciplines suspectes. Comme si le CNRS était une section disciplinaire ou avait des pouvoirs d’enquête. Ce que la CPU elle-même dénonce en remettant vertement en place la ministre dans un communiqué qui appelle à "stopper la confusion et les polémiques stériles" et à cesser de "raconter n’importe quoi" (sic).

      A quoi assiste-on ? A une #dérive_autoritaire qui montre que la LPR et la chasse idéologique aux islamo-gauchistes forment un tout. Evaluer, sanctionner, séparer, diviser les universitaires pour les affaiblir. Les monter les uns contre les autres. Faire en sorte que l’institution soit elle-même l’agent de la chasse aux sorcières. Instiller partout la #concurrence, la #peur, la #suspicion et la #servitude_volontaire. Le premier séparateur des universitaires, c’est la LPR. Dans le viseur de Vidal : la limitation et la surveillance des libertés académiques. Macron, son gouvernement et LREM font le même travail avec toute la société. Dans leur viseur : la limitation et la surveillance des libertés publiques. Monter le plus grand nombre de citoyens contre les musulmans, monter les français contre eux-mêmes. Macron et son système, c’est une guerre sans fin, une guerre contre le peuple. Le #séparatisme permanent. Il est temps de nous unir contre lui. Il est temps de déradicaliser ce gouvernement.

      Contre le séparatisme, nous avons besoin d’une politique qui remettre de la lumière dans les regards tristes de nos amis musulmans. Contre la LPR, nous avons besoin d’une politique qui remettre de la lumière dans les regards tristes des universitaires. Contre la gestion calamiteuse de la crise sanitaire, nous avons besoin d’une politique qui remettre de la lumière dans les regards tristes des étudiants. Vite de la lumière, avant que ne retombe la longue nuit brune de l’histoire !

      #Pascal_Maillard

      https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/160221/frederique-vidal-tombe-dans-la-fange-de-l-extreme-droite

    • "Islamo-gauchisme" à l’université : 5 questions sur l’enquête demandée par Vidal

      La ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche a annoncé lundi 15 février qu’elle souhaitait enquêter sur « l’islamo-gauchisme » à l’université. Des propos qui ont indigné le monde universitaire.

      « Moi je pense que l’islamo-gauchisme gangrène la société dans son ensemble, et que l’université n’est pas imperméable, l’université fait partie de la société. » D’une phrase prononcée dimanche 14 février, Frédérique Vidal a provoqué une levée de bouclier du monde académique et de la gauche française.

      Invitée de CNews ce jour-là, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche était interrogée par Jean-Pierre Elkabbach sur l’islamo-gauchisme, terme décrit par le journaliste comme désignant « une sorte d’alliance (...) entre Mao Zedong et l’Ayatollah Khomeini ». C’est là que Frédérique Vidal a annoncé « demander notamment au CNRS de faire une enquête sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université ». Une séquence repérée par le site The Sound of Science.

      Le lendemain, la ministre a confirmé sa position devant l’Assemblée nationale. « Je vais demander à ce que l’on fasse un bilan des recherches qui se déroulent dans notre pays que ce soit les recherches sur le postcolonialisme… » a-t-elle répondu à la question de Bénédicte Taurine, députée de la France insoumise, sans finir son énumération. Mais quel est l’objet de cette enquête ?

      1. Qu’est-ce que l’"islamo-gauchisme" ?

      Le terme « islamo-gauchisme » est né sous la plume de l’écrivain #Pierre_André-Taguieff en 2000. Il le définit alors comme une association entre les mouvements de gauche et les mouvements pro-palestiniens. Cependant, comme l’explique le linguiste Albin Wagener à RTL.fr, ce terme a très vite été repris par l’extrême-droite pour désigner « deux ennemis : l’islam et la gauche ».

      Aujourd’hui, son utilisation s’est démocratisée au point de se faire une place dans les éléments de langage du gouvernement et de la gauche elle-même, dans la bouche de #Manuel_Valls. Ainsi, le terme controversé qualifié même de « faux concept » par le chercheur Pascal Boniface, désigne aujourd’hui une supposée collusion entre les mouvements islamistes et certains mouvements de gauche.

      Pour Philippe Marlière, chercheur et auteur d’une tribune publiée dans Mediapart au mois de décembre, la trajectoire de ce terme est inquiétante. ""L’islamo-gauchisme’ est un mot grossièrement codé qui désigne un ennemi (l’islamisme) et ses porteurs de valise (les intellectuels de gauche critiques), explique-t-il. Ce vocabulaire d’#extrême_droite crée et entretient un climat de #guerre_civile. Il ne nourrit pas le débat, il prend les personnes pour #cible."

      Le CNRS, lui, affirme dans un communiqué que le terme ne revêt « aucune réalité scientifique » quand la conférence des présidents d’université (CPU) parle de « pseudo-notion ».

      2. Qu’est-ce que le CNRS ?

      L’acronyme CNRS désigne le Centre national de la recherche scientifique. Placé sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche dirigé par Frédérique Vidal, il est l’organisme de référence de la recherche universitaire française. Plus particulièrement, l’enquête demandée par la ministre s’intéresse aux #sciences_sociales, c’est-à-dire des disciplines comme la sociologie, l’histoire ou la science politique.

      Dans ses propos devant l’Assemblée nationale, Frédérique Vidal cite ainsi l’alliance Athéna présidée par le CNRS en alternance avec la Conférence des Présidents d’Université (CPU). Sur son site, cette institution est décrite comme réunissant « les principaux acteurs de la recherche publique française en #sciences_humaines_et_sociales », plus communément désignées sous le sigle #SHS.

      3. Quel est le type de recherche visé ?

      Dans ses propos tenus sur CNews, Frédérique Vidal a justifié sa décision de mener une enquête sur « l’islamo-gauchisme » au sein de ces champs disciplinaires pour « distinguer de ce qui relève de la #recherche_académique de ce qui relève justement du #militantisme et de l’#opinion ».

      Le CNRS a répondu mercredi soir à la ministre de l’Enseignement supérieur dans un communiqué désapprobateur. « Le CNRS condamne, en particulier, les tentatives de #délégitimation de différents champs de la recherche, comme les études postcoloniales, les études intersectionnelles ou les travaux sur le terme de ’race’, ou tout autre champ de la connaissance », écrit le centre de recherche.

      Une réponse claire et nette aux nombreuses attaques ciblant ces champs disciplinaires qualifiés parfois de « racialistes » par leurs détracteurs qui se multiplient ces derniers mois. En octobre, Jean-Michel Blanquer avait par exemple explicitement cité « les ravages » de l’islamo-gauchisme comme ayant joué un rôle dans l’assassinat de #Samuel_Paty.

      « Il y a un combat à mener contre une matrice intellectuelle venue des universités américaines et des thèses intersectionnelles, qui veulent essentialiser les communautés et les identités, aux antipodes de notre modèle républicain qui, lui, postule l’égalité entre les êtres humains, indépendamment de leurs caractéristiques d’origine, de sexe, de religion, expliquait-il au Journal du Dimanche dans des propos décryptés par L’Obs. C’est le terreau d’une #fragmentation de notre société et d’une vision du monde qui converge avec les intérêts des islamistes. Cette réalité a gangrené notamment une partie non négligeable des sciences sociales françaises. »

      4. #Postcolonialisme, #intersectionnalité... De quoi parle-t-on ?

      Théorisée par la juriste américaine #Kimberlé_Crenshaw à la fin des années 1980, l’intersectionnalité permet d’étudier un phénomène sociologique en appliquant une réflexion multiple, au carrefour de plusieurs parts d’identité comme le genre, la classe et la race (au sens de race sociale perçue par la société, pas de la race biologique qui n’existe pas). Son objectif n’est donc pas d’essentialiser mais de prendre en compte différentes caractéristiques sociologiques pour mieux comprendre les dynamiques à l’œuvre dans les situations de discrimination. Par exemple, une femme noire ne vivra pas seulement d’un côté le sexisme et de l’autre le racisme, mais l’intersection des deux.

      Quant aux théories décoloniales et postcoloniales, elles permettent d’étudier la société contemporaine au regard des dynamiques historiques et du racisme qui découle de périodes telles que l’#esclavage et la #colonisation. Ce sont ce type de recherches qui révèlent les #inégalités sous toutes leurs formes (sociologiques, économiques, politiques, historiques...) qui sont visées lorsque les ministres parlent d’"islamo-gauchisme" à l’université.

      5. Comment le monde universitaire réagit-il ?

      Au-delà de condamner les propos de Frédérique Vidal, dans son communiqué, le CNRS regrette une « #instrumentalisation de la science » et rappelle qu’il existe des voies de « l’approfondissement des recherches, de l’explicitation des méthodologies et de la mise à disposition des résultats de recherche ». « C’est dans cet esprit que le CNRS pourra participer à la production de l’étude souhaitée par la ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation visant à apporter un éclairage scientifique sur les champs de recherche concernés », conclut l’organisme.

      La veille, la conférence des présidents d’université (CPU) publiait elle aussi un communiqué dans lequel elle s’étonnait de « l’instrumentalisation du CNRS dont les missions ne sont en aucun cas de produire des évaluations du travail des enseignants-chercheurs, ou encore d’éclaircir ce qui relève ’du militantisme ou de l’opinion’ ». « La CPU réclame, au minimum, des clarifications urgentes, tant sur les fondements idéologiques d’une telle enquête, que sur la forme, qui oppose CNRS et universités alors que la recherche est menée conjointement sur nos campus par les chercheurs et les enseignants-chercheurs. »

      Contacté par RTL.fr, le ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation n’a pour l’heure par répondu aux sollicitations.

      https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/islamo-gauchisme-a-l-universite-5-questions-sur-l-enquete-demandee-par-frederiqu

    • Les leçons de Vidal

      Avec ses sorties sur « l’islamo-gauchisme » cette semaine, la ministre déléguée à l’Enseignement supérieur fait surtout les affaires de ses collègues de l’Education et de l’Intérieur. Une femme se grille. Des hommes engrangent.

      La chose se répète souvent sous ce quinquennat. Une ministre femme, issue de la société civile (donc non-politique) qui monte en première ligne pour faire les affaires politiciennes de ses collègues ministres hommes (eux devenus professionnels de ce milieu). La sortie de Frédérique Vidal sur « l’islamo-gauchisme » est un nouvel exemple de ce constat. La ministre de l’Enseignement supérieur n’a pas « dérapé » sur CNews, dimanche, face à Jean-Pierre Elkabbach. Elle savait très bien ce qu’elle faisait. Sinon elle n’aurait pas réitéré ses propos au centre de l’hémicycle de l’Assemblée nationale, mardi après-midi, lors de la séance hebdomadaire des questions d’actualité au gouvernement.

      Alors qu’elle avait été muette sur le sujet, en octobre, lorsque deux de ses camarades au gouvernement, Jean-Michel Blanquer et Gérald Darmanin, avaient déjà balancé, en octobre à l’Assemblée, cette formule appartenant au champ lexical de l’extrême droite, la voilà qui les devance. Le ministre de l’Education et celui de l’Intérieur ont pourtant passé deux semaines sur les bancs lors du projet de loi « confortant les principes de la République » sans écart de langage. Ordre du Président de se tenir à carreaux sur ce texte censé réincarner « le rassemblement » de la majorité sur la laïcité. Foutaises. A peine les ministres avaient-ils récupéré leurs bons de sorties pour les médias que Vidal est partie à son tour en croisade contre les affreux « islamo-gauchistes » qui professeraient dans les amphis. Recadrée par le président de la République, éloignée un peu plus du monde universitaire et du monde étudiant… Mauvais résultat pour elle : la voici un peu plus isolée Rue Descartes. A qui profite donc cette séquence ? A Ses collègues Darmanin et Blanquer qui voient un de leurs marqueurs politiques progresser. Vidal, une femme, prend le bouillon médiatique et une humiliation présidentielle. Ses collègues, hommes, avaient été épargnés.

      Vidal n’est pas la première victime de cette stratégie du bélier. On rembobine. Mars 2019, en pleine « concertation » sur la réforme des retraites, la ministre de la Santé et des Solidarités d’alors, Agnès Buzyn, s’autorise une sortie inattendue sur un « allongement de la durée du travail ». « Je suis médecin, je vois que la durée de vie augmente d’année en année, expliquait Buzyn. Est-ce que, alors que le nombre d’actifs diminue, nous allons pouvoir maintenir sur les actifs le poids des retraites qui vont augmenter en nombre et en durée ? Nous savons que cet équilibre-là va être de plus en plus difficile à tenir. » Exactement la ligne portée en coulisses par le Premier ministre de l’époque, Edouard Philippe, et de ses deux camarades de l’ex-UMP installés à Bercy : Bruno Le Maire et (déjà) Gérald Darmanin. Lequel se presse pour saluer le « courage » de Buzyn.

      Comme pour Vidal, les politiques hommes avaient laissé une femme issue de la société civile monter au front médiatique pour pousser leurs propres billes. Obligée de rétropédaler (repousser l’âge de départ n’était pas dans le programme d’Emmanuel Macron et le haut-commissaire d’alors, Jean-Paul Delevoye, menaçait de démissionner), Buzyn s’était abîmée dans cette aventure politicienne. Cette dernière n’est plus au gouvernement. Le Maire et Darmanin plus que jamais.

      https://www.liberation.fr/politique/les-lecons-de-vidal-20210219_BI4BCKNDCNBXBDMT2TRO3BZPB4
      #genre #hommes #femmes #hommes_politiques #femmes_politiques

    • Frédérique Vidal, une ministre bisbilles en tête

      Déjà critiquée, entre autres, pour son management à l’université Sophia-Antipolis, la Niçoise s’est lancée dimanche, sans le soutien de l’Elysée, dans une offensive contre l’« islamo-gauchisme » dans la recherche, se mettant à dos une majorité d’enseignants.

      On ne l’attendait pas vraiment sur ce dossier. Frédérique Vidal, ministre de troisième rang en macronie, a surpris beaucoup de monde en appelant à lancer, dimanche sur CNews, une enquête sur l’« islamo-gauchisme » dans la recherche universitaire.

      Décrédibilisée dans les rangs de la recherche supérieure après avoir maintenu la ligne libérale de la loi de programmation de la recherche (LPR), fragilisée dans les universités après plusieurs cafouillages sur l’organisation en ce temps de crise sanitaire, critiquée pour son manque de réactions face au malaise étudiant qui a poussé certains au suicide, Frédérique Vidal n’a pourtant pas hésité à se mettre à dos une nouvelle fois une bonne partie des professionnels qui dépendent de son ministère.

      Au sein du gouvernement, l’axe Blanquer-Darmanin-Schiappa, porteur de ce débat droitier sur l’islam, a-t-il décidé de se servir d’elle comme bélier, après deux semaines sans grandes controverses sur le projet de loi de lutte contre les « séparatismes » ? Ou bien Vidal a-t-elle choisi ce registre en guise de diversion, alors que les polémiques sur la précarité étudiante ne s’apaisent pas ? En tout cas, on ne la suit pas côté Elysée. Le Président reste attaché à « l’indépendance des enseignants-chercheurs », a bien souligné le porte-parole, Gabriel Attal, mercredi à l’issue du Conseil des ministres. Un désaveu.

      « Elle a toujours eu de l’ambition »

      Dans le casting de début de quinquennat, Vidal faisait pourtant partie de ces ministres de la société civile censés ouvrir le monde politique au monde universitaire. Une présidente d’université pour s’occuper des universités, forcément ça avait du sens dans le « en même temps » macronien. Jusque-là, la Niçoise n’était jamais sortie du couloir qu’on lui avait assigné. A peine s’était-elle aventurée, en 2019 – soit bien avant la crise sanitaire, économique et sociale –, dans une poignée de réunions de ministres souhaitant incarner « l’aile gauche » de l’ex-gouvernement Philippe. L’idée était, à l’époque, de tenter de s’organiser pour peser davantage sur la ligne de l’exécutif, jugée trop… à droite.

      Et avant son arrivée au gouvernement, Frédérique Vidal n’avait aucun engagement politique. L’universitaire est passée des bancs de la fac, où elle étudiait la génétique, à la présidence de cette même université, en 2012. Une évolution fulgurante en moins de vingt-cinq ans. Sabine, aujourd’hui chercheuse syndiquée CGT Ferc Sup, était inscrite dans la même promo, « il y a un peu plus de vingt ans », en maîtrise de biochimie et en DEA de virologie. « C’est quelqu’un qui a toujours eu de l’ambition, dit-elle. Ça a été une bonne enseignante, mais elle a fait peu de recherche sur la durée car elle a très vite rejoint la direction de la formation. Elle est devenue doyenne de la fac de sciences, puis présidente. »

      « Phrases assassines »

      Les techniques managériales de Vidal marquent les esprits à l’université de Sophia-Antipolis. « C’est quelqu’un qui ne tolère pas le débat, ce qui est paradoxal quand on est universitaire, ni la contradiction, ce qui est un problème quand on est scientifique, estime Sabine. Elle a imprimé cette façon de diriger. »

      En novembre, le directeur général de la recherche et de l’innovation, Bernard Larrouturou, qui dépendait de son ministère, a claqué violemment la porte. Dans une lettre qu’avait révélée Libération, il dénonçait la gestion peu humaine du cabinet de Vidal.

      Sandra (1) parle de « tendances managériales à l’américaine » qui l’auraient poussée au burn-out. Cette technicienne audiovisuelle, ancienne déléguée syndicale à l’université, pointe une « infantilisation », avec un renforcement de la hiérarchie, et des « expériences assez douloureuses en conseil d’administration », avec des « phrases assassines » à chaque question ou opposition de sa part. « Mme Vidal est une vraie grande pédagogue, défend le docteur en génétique Erwan Paitel, son ancien bras droit à l’université, qui l’a rejointe au ministère. Elle sait gouverner au sens d’aller au bout de ses idées. »

      Mais, selon différents membres de l’université qui témoignent à Libération, « les sciences de l’éducation ont été mises plus bas que terre », « les sciences humaines étaient méprisées », « ça rigolait » à l’évocation des profs d’histoire. « Quand elle parle d’islamo-gauchisme, c’est juste un moyen de bâillonner le débat d’idées, estime Marc, syndiqué CGT Ferc Sup et travaillant dans un labo de maths à Nice. C’est une insulte pour notre intelligence et pour les victimes. On est à Nice, on a été touché par plusieurs attentats, c’est assez dégueulasse de jouer là-dessus. »

      (1) Cette personne a souhaité rester anonyme pour ne pas nuire à sa carrière.

      https://www.liberation.fr/societe/frederique-vidal-une-ministre-bisbilles-en-tete-20210217_G4WLKNLQGNGTZPOF

    • « Frédérique Vidal risque d’alimenter une #police_de_la_pensée qui serait dramatique »

      Le président de l’université Clermont-Auvergne, Mathias Bernard, revient sur la sortie de sa ministre de tutelle sur « l’islamo-gauchisme », qu’il juge « schématique » et « caricaturale ».

      En s’inquiétant du développement d’« idées militantes de l’islamo-gauchisme » dans les universités françaises au cours d’une interview à CNews dimanche, la ministre Frédérique Vidal a suscité de nombreuses critiques dans le monde de l’enseignement supérieur et de la recherche. Dans un communiqué, la Conférence des présidents d’universités a par exemple dénoncé une « nouvelle polémique stérile » et invité les politiques à ne pas « raconter n’importe quoi ». Président de l’université Clermont-Auvergne, l’historien Mathias Bernard revient sur cette sortie médiatique. Pour lui, les propos caricaturaux de la ministre instrumentalisent politiquement des études nécessaires au débat scientifique.

      Dans un communiqué, les présidents d’universités ont dit leur « stupeur » à la suite des propos de Frédérique Vidal. Pourquoi cette surprise ?

      Parce que cela ne correspond pas aux positions antérieures de la ministre. A l’automne, elle avait tenu des propos bien plus distanciés lorsque son collègue Jean-Michel Blanquer avait parlé d’islamo-gauchisme. A cela, il faut ajouter le contexte sanitaire : la priorité n’est pas de lancer un débat politicien, mais plutôt de répondre à la détresse des étudiants après un an de confinement. C’est un bel exemple du décalage entre les gouvernants et la réalité des opérateurs sur le terrain.

      Qu’est-ce qui invalide cette accusation d’« islamo-gauchisme » ?

      Depuis une quinzaine d’années, ce mot est instrumentalisé politiquement. Il ne sert pas à caractériser un ensemble de positions scientifiques, mais à les discréditer. Cette notion produit aussi un effet de généralisation : l’islamo-gauchisme gangrènerait l’université, comme on l’a vu écrit il y a quelques jours à la une du Figaro. Cette rhétorique de la contamination rappelle les discours antisémites des années 30 sur l’influence juive qui corromprait l’ensemble des corps sociaux. Dans mon université, il n’y a eu par exemple aucun incident, aucune étude ou manifestation scientifique susceptible de s’apparenter à une « menace islamo-gauchiste ». Cette généralisation crée une dramatisation, un climat anxiogène qui ne peut qu’alimenter le rejet.

      Quels sont les faits initiaux à partir desquels s’opère cette généralisation ?

      Il existe un militantisme intolérant qui, en empêchant par exemple la tenue de certaines conférences, pose problème à l’université, car celle-ci est par nature un lieu de dialogue. Mais il faut le distinguer des études en sciences sociales qui s’inscrivent dans l’héritage de la pensée postcoloniale et élaborent une pensée critique qui contribue au débat scientifique. Or, ce sont ces débats qui font progresser la science. Une prise de position rapide, schématique et caricaturale comme celle de Frédérique Vidal risque de jeter l’opprobre sur toute cette réflexion et d’alimenter une forme de police de la pensée qui serait dramatique. Cela donne l’impression que des chercheurs confondraient massivement militantisme et travail universitaire, ce qui n’est pas le cas. Et si des cas se présentaient, il existe des instances pour les traiter. Inutile d’instrumentaliser le CNRS, dont les chercheurs travaillent au quotidien avec les universités.

      Faut-il y voir une volonté de contrôle politique du travail universitaire ?

      Les contraintes inhérentes à une interview télévisée ont sans doute occasionné des maladresses. Mais si on regarde ces propos à l’aune du contexte plus global, marqué à la fois par une séquence très régalienne de la présidence Macron et par les débats sur la loi « séparatisme », il peut y avoir une volonté de distinguer deux types de recherche, l’une bonne et l’autre dangereuse. Un peu comme à l’époque de la guerre froide où l’on se méfiait de l’université marxiste. Cela explique une partie de la défiance actuelle du monde politique vis-à-vis de l’université, qui est constitutionnellement indépendante du point de vue scientifique.

      Le dialogue entre le monde de l’enseignement supérieur et de la recherche et la ministre est-il rompu ?
      En 2020, les débats sur la loi de programmation pluriannuelle de la recherche ont contribué à une rupture assez nette entre la ministre et une partie de la communauté universitaire. Mais il ne faut pas généraliser : les présidents d’université et les établissements continuent à travailler avec le ministère dans cette période difficile. Je suis certes critique sur cette sortie médiatique, je n’en suis pas moins reconnaissant à la ministre d’avoir défendu l’ouverture des universités alors que la situation sanitaire reste tendue.

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/frederique-vidal-risque-dalimenter-une-police-de-la-pensee-qui-serait-dra

    • #Thomas_Piketty : «Frédérique Vidal doit partir»

      Les déclarations sur l’« islamo-gauchisme » de la ministre de l’Enseignement supérieur montrent sa méconnaissance des sciences sociales, estime l’économiste. Elle livre à la vindicte populaire des chercheurs dont les savoirs sont pourtant essentiels.

      Une suspicion généralisée qui amènerait à un dialogue de sourds : l’économiste Thomas Piketty, connu pour ses recherches internationales sur les inégalités, estime que la demande d’enquête sur la présence de courants « islamo-gauchistes » à l’université, faite dimanche par la ministre Frédérique Vidal, est un non-sens.

      Jean-Michel Blanquer en octobre, Frédérique Vidal aujourd’hui. Pourquoi ces attaques contre le monde universitaire, et sur ce thème de l’islamo-gauchisme ?

      L’horreur des attentats de 2015-2016 et de la décapitation de Samuel Paty en 2020 fait que chacun cherche naturellement des explications, des coupables. Chez les plus désespérés, mais aussi parmi les plus cyniques, certains ont eu l’idée géniale de soupçonner de complicité jihadiste n’importe quel chercheur s’intéressant aux questions de discrimination, ou encore n’importe quel croyant musulman achetant du hallal ou portant des leggings sur la plage, un foulard dans la rue ou lors d’une sortie scolaire. Ces soupçons ignobles sont totalement à côté de la plaque, dans un contexte où le pays devrait être rassemblé derrière son système de justice, de police et de renseignement pour lutter contre l’ultraminorité terroriste. Cette logique de la suspicion généralisée ne peut conduire qu’à des raidissements et à des dialogues de sourds. Et pendant ce temps-là, personne ne parle des politiques antidiscriminatoires dont nous aurions tant besoin, et qui demandent des débats approfondis et apaisés, tant les enjeux sont nouveaux et ouverts.

      Pourquoi demandez-vous la démission de la ministre Frédérique Vidal ?

      Avec ses déclarations, Frédérique Vidal a démontré sa totale inculture et sa profonde ignorance de la recherche en sciences sociales. Elle livre à la vindicte populaire les personnes qui produisent et diffusent les savoirs dont nous avons tant besoin dans cette époque hyperviolente. Avec l’extrême droite aux portes du pouvoir dans plusieurs régions et au niveau national, c’est totalement irresponsable. Elle doit partir.

      Vous connaissez bien le monde de la recherche. Quelle est la réalité de ces « chercheurs minoritaires qui porteraient au sein de l’université des idées radicales et militantes de l’islamo-gauchisme » que dénonce la ministre ?

      Je ne connais aucun chercheur que l’on puisse soupçonner de près ou de loin de complaisance avec les jihadistes, ou dont les travaux auraient pu « armer idéologiquement le terrorisme », suivant l’expression désormais routinière au sommet de l’Etat. Et le terrorisme au Nigeria, au Sahel, en Irak, aux Philippines, c’est aussi de la faute des universitaires islamo-gauchistes français ou américains ? C’est ridicule et dangereux. Au lieu de mobiliser l’intelligence collective pour appréhender des processus sociohistoriques inédits et complexes, ce que font précisément les chercheurs en sciences sociales, on sombre dans la logique du bouc émissaire à courte vue.

      Pensez-vous qu’il y a un climat anti-intellectuels en France ?

      Les diatribes anti-intellectuels sous Sarkozy avaient marqué une première étape. Mais l’hystérie actuelle autour de l’accusation d’islamo-gauchisme nous fait franchir un nouveau seuil. Petit à petit, les responsables politiques français, du centre droit à l’extrême droite, se rapprochent sans le savoir de l’attitude des nationalistes hindous du Bharatiya Janata Party (BJP) qui, depuis dix ans, visent à asseoir leur domination politique en stigmatisant toujours davantage la minorité musulmane (14% de la population, soit 150 millions de personnes tout de même) et les intellectuels réputés islamo-gauchistes soupçonnés de les défendre. On l’ignore trop souvent en France, mais cette hargne des nationalistes hindous se nourrit elle aussi des attentats jihadistes commis sur le sol indien, comme ceux de Bombay en 2008 ou les attaques au Cachemire musulman début 2019. Là encore, je peux comprendre que le traumatisme des attentats conduit les uns et les autres à chercher des explications pour cette horreur nihiliste. Mais cela n’a aucun sens de soupçonner de complicité les 150 millions de musulmans indiens qui, comme en France, cherchent simplement à mener une vie ordinaire, à trouver un travail, un revenu, un logement, et ne se demandent pas chaque matin comment ils vont venir en aide à un terroriste. Les soupçons vis-à-vis des universitaires indiens, qui tentent de faire leur travail dans des conditions précaires, sont toutes aussi odieux. En Inde, le gouvernement BJP en est arrivé à fomenter des émeutes antimusulmans, à fermer des centres de recherche et à faire arrêter des intellectuels. On en est évidemment très loin en France, mais il est urgent de se mobiliser avant que les choses ne continuent à dégénérer pour les groupes les plus fragiles. Concrètement, les intellectuels français disposent encore de solides ressources pour se défendre, mais il n’en va pas de même pour les populations issues de l’immigration extra-européenne, qui font face dans notre pays à des discriminations sociales et professionnelles extrêmement lourdes et à une stigmatisation croissante.

      Vous qui travaillez avec des réseaux de recherches dans le monde entier, comment jugez-vous l’université française par rapport aux autres grandes universités internationales ? Y a-t-il une américanisation de la recherche ?

      L’idée d’une contamination des chercheurs français par leurs collègues américains ne correspond à aucune réalité. En pratique, le développement des études coloniales et postcoloniales, par exemple des travaux sur l’histoire des empires coloniaux et de l’esclavage, est une coproduction internationale. Cette évolution implique depuis longtemps des chercheurs basés en Europe, aux Etats-Unis, en Inde, au Brésil, etc. Elle est là pour durer, et c’est tant mieux. Le phénomène colonial s’étale de 1500, avec les débuts de l’expansion européenne, jusqu’aux années 60 avec les indépendances, voire jusqu’aux années 90 si l’on intègre le cas de l’apartheid sud-africain. A l’échelle de la longue durée, cette phase coloniale vient tout juste de se terminer. Ses conséquences sur les structures sociales ne vont pas disparaître en un claquement de doigts. Il a fallu quelques décennies pour que la recherche s’empare pleinement des thèmes coloniaux et postcoloniaux. Ce n’est pas près de changer, et c’est tant mieux.

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/thomas-piketty-frederique-vidal-doit-partir-20210217_22G6RI2Q4ZA6RID5XRX5
      #Piketty

    • «Islamo-gauchisme»: Vidal provoque la #consternation chez les chercheurs

      En annonçant commander au CNRS une enquête sur « l’islamo-gauchisme » à l’université, la ministre a suscité l’ire du monde de la recherche. Les présidents d’université dénoncent « une pseudo-notion qu’il conviendrait de laisser […] à l’extrême droite », le CNRS émet de profondes réserves.

      Particulièrement transparente ces derniers mois malgré la crise grave que connaît l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal embrase la communauté universitaire, abasourdie par son intention de commander « une enquête » au CNRS sur « l’islamo-gauchisme » à l’université.

      Tout est parti d’un entretien pour le moins sidérant accordé par la ministre, dimanche 14 février, à CNews, la chaîne préférée de l’extrême droite. Interrogée par Jean-Pierre Elkabbach sur la récente une du Figaro titrée « Comment l’islamo-gauchisme gangrène l’université », la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche a commencé par acquiescer à ce « constat ».

      « Ce qu’on observe à l’université, c’est que des gens peuvent utiliser leurs titres et l’aura qu’ils ont […]. Ils sont minoritaires et certains le font pour porter des idées radicales ou des idées militantes de l’islamo-gauchisme en regardant toujours tout par le prisme de leur volonté de diviser, de fracturer, de désigner l’ennemi », commence-t-elle par affirmer.

      « Vous ajoutez aussi les #indigénistes qui disent la race, le genre, la classe sociale… tout ça, ça forme un tout ? », la relance doctement Jean-Pierre Elkabbach.

      Nullement gênée par l’incroyable confusion de la question, la ministre acquiesce à nouveau. « Absolument. D’ailleurs en biologie cela fait bien longtemps qu’on sait qu’il n’y a qu’une espèce humaine et qu’il n’y a pas de race donc vous voyez à quel point je suis tranquille avec ce sujet-là », répond-elle, montrant combien les récents débats scientifiques sur la notion de « race » dans les sciences sociales lui ont totalement échappé.

      « Oui, vous, vous êtes tranquille, mais il y a des minorités et elles sont agissantes… », relance encore le journaliste en agitant les doigts – une gestuelle censée représenter une forme d’infiltration de ces « minorités » à l’université.

      « Il y a une sorte d’alliance entre Mao Zedong et l’ayatollah Khomeini ? », suggère encore un Jean-Pierre Elkabbach à qui le sujet tient manifestement à cœur.

      « Vous avez raison. Mais c’est pour cela qu’à chaque fois qu’un incident se produit, il est sanctionné, à chaque fois que quelque chose est empêché, c’est reprogrammé, mais je crois que l’immense majorité des universitaires sont conscients de cela et luttent contre cela », avance Frédérique Vidal, sans que le spectateur, à ce stade, sache très bien ce que « cela » désigne, perdu entre les différentes chimères de « l’islamo-maoïsme » et du « féminisme-racialiste »…

      « C’est pour cela que je vais demander, notamment au CNRS, de faire une enquête sur l’ensemble des courants de recherche, sur ces sujets, dans l’université, de manière à ce qu’on puisse distinguer ce qui relève de la recherche académique de ce qui relève du militantisme, de l’opinion », lance alors la ministre.

      Dans la communauté scientifique, l’annonce de la ministre a manifestement pris tout le monde de court. Interrogé mardi sur les contours de cette future mission d’enquête, le CNRS semblait bien en peine de fournir le moindre élément de réponse. « À ce stade, nous en discutons avec le cabinet de Frédérique Vidal pour préciser les attentes de la ministre », nous a-t-on d’abord répondu dans un embarras manifeste.

      Au cabinet de Frédérique Vidal, on semble tout autant dans le brouillard, quant aux « attentes de la ministre ». « Les objectifs de cette étude seront définis dans les prochains jours. Il s’agira de définir ce qui existe comme courants d’études en France, sur différents thèmes », nous répond-on finalement. Difficile de faire plus vague.

      S’agit-il de faire une typologie des « courants » de pensée plus ou moins suspects ainsi que, pourquoi pas, des listes d’enseignants participant à ces courants comme aux grandes heures du maccarthysme ?

      L’enquête, selon le ministère, sera « portée » par l’alliance Athena « qui regroupe les principaux acteurs de la recherche publique française et qui est présidée par #Antoine_Petit », c’est-à-dire le directeur du CNRS. Sauf que l’alliance Athena est encore dirigée pour un mois par #Jean-François_Balaudé, qui, comme l’a révélé Le Monde, n’a même pas été informé de ce projet.

      Traversant aujourd’hui une période particulièrement difficile en raison de la pandémie, avec des étudiants en grande détresse et un corps d’enseignants-chercheurs à bout de souffle, la communauté universitaire s’est littéralement embrasée ces dernières heures.

      Mercredi en fin de journée, le CNRS a finalement publié un communiqué cinglant, expliquant que « l’islamogauchisme » était un « #slogan_politique » qui « ne correspond à aucune réalité scientifique ». « L’#exploitation_politique qui en est faite est emblématique d’une regrettable instrumentalisation de la science ». L’organisme de recherche, qui précise qu’il mènera une enquête « visant à apporter un éclairage scientifique sur les champs de recherche concernés », a pris les devants en affirmant qu’il « condamne en particulier les tentatives de #délégitimation de différents champs de la recherche, comme les études postcoloniales, les études intersectionnelles ou les travaux sur le terme de "race", ou tout autre champ de la connaissance ».

      La conférence des présidents d’université, d’ordinaire très prudente, s’est fendue mardi en fin de journée d’un communiqué assassin faisant part de sa « stupeur » et réclamant des « clarifications urgentes » à leur ministre de tutelle. « L’islamo-gauchisme n’est pas un #concept. C’est une #pseudo-notion dont on chercherait en vain un commencement de définition scientifique, et qu’il conviendrait de laisser sinon aux animateurs de CNews, plus largement à l’extrême droite qui l’a popularisée », écrit ainsi l’organisation qui représente tous les présidents d’université.

      Le but de cette « enquête » confiée au CNRS est-il d’identifier des éléments potentiellement idéologiquement dangereux au sein de la communauté universitaire ? Sur ce point également, la Conférence des présidents d’université (CPU) tient à mettre les choses au point : « La CPU regrette la confusion entre ce qui relève de la liberté académique, la liberté de recherche dont l’évaluation par les pairs est garante, et ce qui relève d’éventuelles fautes et infractions, qui font l’objet si nécessaire d’enquêtes administratives », et qui sont confiées dans ce cas à l’Inspection générale de l’éducation.

      « La CPU s’étonne aussi de l’instrumentalisation du CNRS dont les missions ne sont en aucun cas de produire des évaluations du travail des enseignants-chercheurs, ou encore d’éclaircir ce qui relève “du militantisme ou de l’opinion”, cingle l’organisation. Si le gouvernement a besoin d’analyses, de contradictions, de discours scientifiques étayés pour l’aider à sortir des représentations caricaturales et des arguties de café du commerce, les universités se tiennent à sa disposition. Le débat politique n’est par principe pas un débat scientifique : il ne doit pas pour autant conduire à raconter n’importe quoi. »

      Sauf qu’en matière de « n’importe quoi », la CPU et le monde de la recherche plus généralement n’avaient, sans doute, pas encore tout entendu. Questionnée mardi par la députée Bénédicte Taurine (La France insoumise) sur sa volonté de créer une « police de la pensée », Frédérique Vidal a eu cette réponse étonnante : « Alors, oui, en sociologie on appelle ça mener une enquête. Oui, je vais demander à ce qu’on fasse un bilan de l’ensemble des recherches qui se déroulent actuellement dans notre pays… Sur le postcolonialisme… Mais moi, vous savez, j’ai été extrêmement choquée de voir apparaître au Capitole un drapeau confédéré et je pense qu’il est essentiel que les sciences sociales se penchent sur ces questions qui sont encore aujourd’hui d’actualité. »

      Un rapprochement entre études postcoloniales et drapeau confédéré, emblème aujourd’hui des suprémacistes blancs, que personne n’a compris… Et pourquoi citer désormais les #études_postcoloniales qui sont un domaine de recherche présent dans les universités du monde entier ?

      Beaucoup d’universitaires et de chercheurs indignés ont demandé, à l’instar de l’économiste Thomas Piketty ou de la philosophe #Camille_Froidevaux-Metterie, le départ de la ministre aujourd’hui désavouée par une grande partie de la communauté scientifique. « Avec Frédérique Vidal, le gouvernement Macron-Castex réalise le rêve de Darmanin : contourner Le Pen par sa droite… Cette ministre indigne doit partir », a déclaré Thomas Piketty sur Twitter, où le mot-dièse #VidalDemission a rencontré un grand succès.

      Une « chasse aux sorcières »

      Les chercheurs du CNRS que Mediapart a interrogés ont unanimement rejeté l’idée d’être « instrumentalisés » par l’improbable projet d’enquête de la ministre.

      Pour l’historienne Séverine Awenengo Dalberto, chargée de recherche au CNRS et membre de l’Institut des mondes africains, Frédérique Vidal doit effectivement démissionner. « C’est scandaleux et honteux de vouloir restreindre les libertés académiques, d’instrumentaliser la recherche en histoire et sciences sociales à des fins politiciennes, et surtout, dans le contexte pandémique actuel, de mépriser à ce point les étudiants et étudiantes en portant l’attention médiatique et parlementaire sur cette fausse question de l’islamo-gauchisme plutôt que sur la détresse et la précarité des jeunes », explique-t-elle. Cette historienne, spécialiste des questions coloniales, fustige une démarche visant, selon elle, « à banaliser un discours d’extrême droite et à alimenter les fractures qu’elle feint de dénoncer. Comment peut-elle sérieusement penser que travailler sur des discriminations raciales, sur les mécanismes et les effets des assignations identitaires chromatiques, c’est reconnaître l’existence de races biologiques ? »

      Comme elle, nombre de chercheurs insistent aussi sur l’#absurdité de faire diligenter cette enquête sur l’université par le CNRS, puisque nombre de laboratoires ont une double tutelle CNRS et université.

      Le spécialiste des mobilisations ouvrières Samuel Hayat, chargé de recherche au CNRS, décrit ainsi ses collègues « entre #sidération et #découragement ». « Cela s’inscrit dans la suite logique de la gestion autoritaire de l’enseignement supérieur et de la recherche par Frédérique Vidal », souligne-t-il, en référence à la loi de programmation sur la recherche passée au forceps. « C’est une offensive générale contre, en gros, le #discours_critique et la #pensée_critique », estime-t-il. « Pour Frédérique Vidal, l’université doit être dans “l’#excellence” et la #rentabilité mais l’idée qu’il y ait des pôles de résistances critiques aux politiques est insupportable », assure-t-il. Ce politiste souligne aussi combien cette « chasse aux sorcières » rappelle les politiques menées au Brésil, en Hongrie, aux États-Unis, en Turquie ou au Japon contre les libertés académiques.

      Si dans ces pays la bataille s’est principalement concentrée sur les études de #genre, accusées de détruire les fondements de la société, la lutte contre l’#islamisme offre, en France, l’excuse toute trouvée pour traquer les chercheurs « déviants ». « Comme ils ne vont pas trouver d’islamistes dans les universités, ils s’appuient sur un concept comme “l’islamo-gauchisme” qui ne veut rien dire mais qui permet d’amalgamer les savoirs critiques au terrorisme », affirme Samuel Hayat. « La cerise sur le gâteau est l’instrumentalisation du CNRS, qui est un établissement public de recherche qui détermine évidemment son agenda de recherche. Être traité comme une officine pour cerner un objet qui n’existe pas, c’est particulièrement insultant. Le CNRS doit réaffirmer qu’il n’est pas aux ordres des objectifs politiques du gouvernement. »

      Pour l’historienne Camille Lefebvre, directrice de recherche au CNRS et spécialiste de l’Afrique aux XVIIIe et XIXe siècles, cette annonce de Frédérique Vidal s’inscrit dans « un pur enjeu électoral consistant à placer la question de l’islam au cœur de la prochaine campagne présidentielle. Le problème c’est que c’est un #discours_performatif et qu’ils n’en mesurent pas les conséquences », souligne-t-elle, décrivant des discours stigmatisants « qui blessent une partie de la société française à qui l’on veut faire comprendre qu’elle doit rester à sa place ».

      Pionnier, avec #Marwan_Mohammed, de l’étude de l’islamophobie comme nouvelle forme de racisme, le sociologue #Abdellali_Hajjat (qui a quitté la France pour enseigner en Belgique devant le climat de plus en plus hostile à ces travaux dans l’Hexagone) estime que les déclarations de Frédérique Vidal sont « la énième étape d’un processus de #panique_morale d’une partie des #élites_françaises qui a commencé au moins en 2015-2016. Et cela marque le succès d’un intense #lobbying de la part des “#universalistes_chauvins”, tenants de la fausse opposition entre “universalistes” et “décoloniaux”, estime-t-il. La ministre dit qu’il s’agit de distinguer travail de recherche et militantisme… Il semble qu’il s’agit surtout de cibler les universitaires qui seraient “déviants” d’un point de vue politique et scientifique ».

      Selon lui, malgré l’ineptie du discours d’une ministre qui semble largement dépassée par la situation, et qui pourrait prêter à sourire, la situation est très alarmante. « Cette volonté d’#hégémonie, de #contrôle total sur la recherche rappelle les pratiques des régimes politiques contemporains les plus autoritaires », assène-t-il.

      « Je suis en colère car ce qui est en train de se passer est à la fois honteux et très inquiétant », affirme de son côté Audrey Célestine, maîtresse de conférences en sociologie politique et études américaines à l’Université de Lille et membre du conseil scientifique de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage. « Nous sommes dans une forme de #maccarthysme », assure-t-elle jugeant le niveau du débat public « atterrant ». « Lorsqu’on voit quelqu’un comme #Raphaël_Enthoven évoquer “la #peste_intersectionnelle”, on se dit qu’il y a une fierté à étaler dans ces débats son #ignorance crasse. Je suis pour le débat mais avec des gens qui lisent les travaux dont ils parlent », explique-t-elle. Comme pour tous les chercheurs interrogés, Frédérique Vidal a désormais perdu toute #crédibilité et ne peut plus rester ministre de tutelle.

      Après les premières déclarations de Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, sur « l’islamo-gauchisme » à l’université, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche avait semblé vouloir défendre les libertés académiques. « L’université n’est ni la matrice de l’extrémisme ni un lieu où l’on confondrait émancipation et endoctrinement », avait-elle rappelé à son collègue du gouvernement.

      Aujourd’hui, Frédérique Vidal semble appliquer avec zèle une feuille de route écrite par l’exécutif. Interrogé sur France Inter, le 1er février par Léa Salamé, sur la place des « indigénistes » et des « racialistes » à l’université – un questionnement qui en dit long sur la maîtrise du sujet –, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur, a ainsi expliqué que ces idéologies sont peut-être « majoritaires » à l’université : « C’est un drame pour la France et nous devons absolument débattre pied à pied, idée par idée cela », a détaillé ce matin-là – sans souci du mélange des genres – le « premier flic de France ».

      « C’est d’ailleurs ce qu’a souhaité le président de la République dans son discours des Mureaux », rappelait-il alors, en référence au discours du chef de l’État ciblant le « #séparatisme_islamiste ».

      Soutenu par le gouvernement, un amendement glissé au Sénat dans la loi de programmation sur la recherche avait déjà, en octobre dernier, tenté de soumettre les libertés académiques au « cadre des valeurs de la République ». Finalement rejeté, au vu de sa formulation floue, il révélait déjà combien l’exécutif se montrait soupçonneux à l’égard du monde universitaire.

      La tribune des cent universitaires publiée dans le Monde fin octobre, parmi lesquels Marcel Gauchet, Gilles Kepel, Pierre-André Taguieff ou Pierre Nora, dénonçant un « déni » face à l’islamisme et déplorant que « Les idéologies indigéniste, racialiste et « décoloniale » (transférées des campus nord-américains) » aient infiltré l’université « nourrissant une haine des « Blancs » et de la France » a sans doute fait son effet sur l’exécutif. Lequel n’a pas prêté grand crédit aux multiples contre-tribunes, sur le sujet, dont celle de deux mille chercheurs aussi publiée par le Monde, et pourtant signée par des chercheurs encore en prise, eux, avec la production en sciences sociales.

      Le président, passé de la lecture de Paul Ricœur à celle de Pierre-André Taguieff et sa dénonciation des « bonimenteurs du postcolonial », avait déjà affirmé en juin dernier devant des journalistes que « le monde universitaire a été coupable. Il a encouragé l’#ethnicisation de la question sociale en pensant que c’était un bon filon. Or, le débouché ne peut être que sécessionniste. Cela revient à casser la République en deux ».

      Aujourd’hui, sous les coups de boutoir d’un pouvoir obsédé par la mise au pas de la communauté universitaire, ce sont surtout les enseignants, les chercheurs et plus largement les libertés académiques qui sont menacés.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/170221/islamo-gauchisme-vidal-provoque-la-consternation-chez-les-chercheurs?ongle

    • Vidal au stade critique - Communiqué de SLU, 17 février 2021

      « Ainsi, depuis des mois, par petites touches, se met en place un discours officiel anti-universitaire, sans que jamais la ministre de l’Enseignement supérieur qui devrait être le premier rempart des universitaires contre ces attaques n’ait eu un mot pour les défendre » disions-nous dans notre communiqué du 24 octobre pour dénoncer les propos de Jean-Michel Blanquer devant les sénateurs dans lesquels il dénonçait « des courants islamo-gauchistes très puissants dans les secteurs de l’enseignement supérieur qui commettent des dégâts sur les esprits ».

      Dans une tribune à L’Opinion deux jours plus tard la ministre de l’ESR semblait y répondre du bout des lèvres : « L’université n’est pas un lieu d’encouragement ou d’expression du fanatisme ». Bien.

      Mais depuis, la petite musique est devenue fanfare assourdissante : ainsi, deux députés LR, Julien Aubert et Damien Abad demandaient en novembre une mission d’information de l’Assemblée Nationale sur « les dérives idéologiques dans les établissements d’enseignement supérieur » ; ce même Julien Aubert publiait le 26 novembre 2020 les noms et les comptes Twitter de sept enseignants-chercheurs, nommément ciblés et livrés à la vindicte publique ; cette dénonciation calomnieuse s’ajoutait aux propos tenus par la rédaction du journal Valeurs Actuelles à l’encontre du Président nouvellement élu de l’université Sorbonne Paris Nord ; le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin (le 1er février 2021 sur France-Inter) parlait d’idéologie racialiste ; la députée LR Annie Genevard dans le débat sur l’interdiction du voile à l’université dans le cadre de la loi sur le séparatisme (le 3 février 2021) synthétisait tout cela en affirmant que « L’université est traversée par des mouvements puissants et destructeurs […] le décolonialisme, le racialisme, l’indigénisme et l’intersectionnalité ».

      Et le 14 février, la ministre Frédérique Vidal, muette sur l’abandon de l’université et de ses étudiants depuis le début de la pandémie, sonne l’hallali sur une chaîne ouvertement d’extrême droite :

      « Ce qu’on observe à l’université, c’est que des gens peuvent utiliser leurs titres et l’aura qu’ils ont. Ils sont minoritaires et certains le font pour porter des idées radicales ou des idées militantes de l’islamo-gauchisme en regardant toujours tout par le prisme de leur volonté de diviser, de fracturer, de désigner l’ennemi, etc… »

      Et de répondre dans un rire à une question toute en nuance de l’interviewer « Il y a une sorte d’alliance, si je puis dire, entre Mao Zedong et l’Ayatollah Khomeini ? » : « Mais vous avez raison ! »

      Tant de bêtise pourrait prêter à rire.

      Mais au milieu d’inepties qui ne témoignent que de sa confusion, Frédérique Vidal conclut, sans crainte de se contredire dans une même phrase : « On ne peut pas interdire toute approche critique à l’université. Moi c’est ça que je vais évidemment défendre et c’est pour ça que je vais demander notamment au CNRS de faire une enquête sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université de manière à ce qu’on puisse distinguer de ce qui relève de la recherche académique de ce qui relève justement du militantisme et de l’opinion ».

      Voilà le CNRS transformé en IGPN (Inspection Générale de la Pensée Nationaliste).

      La chasse aux sorcières est donc lancée, cette fois en haut lieu. Elle ne peut qu’encourager le harcèlement, déjà intense sur internet, et assorti à l’occasion de menaces de mort, envers des collègues accusés d’être des « islamogauchistes ». Elle s’inscrit dans une course à l’extrême-droite qui n’est pas isolée dans le gouvernement : il s’agit bien d’un choix politique concerté (voire d’une intervention sur commande ?).

      Retenons, cependant, une phrase de la ministre : « Il faut que le monde académique se réveille ».

      Oui, il est grand temps de nous réveiller. Toutes les instances, tous les échelons que comptent l’enseignement supérieur et la recherche doivent désormais ouvertement se prononcer et clamer haut et fort : nous ne pouvons plus reconnaître Frédérique Vidal comme notre ministre, nous refuserons de mettre en place des directives contraires aux principes fondamentaux de l’université.

      http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article8893

    • Lettre à Frédérique Vidal

      Depuis vos dernières déclarations sur « l’islamo-gauchisme », je suis dans un cauchemar terrible. Votre discours réveille tout ce que j’ai vécu et tout ce que mes collègues en Turquie sont en train de vivre. Je vous demande de prêter attention à ma parole qui s’est forgée à travers une expérience très dure de la défense de la liberté de la recherche et de l’autonomie de la production scientifique.

      https://blogs.mediapart.fr/pinar-selek/blog/210221/lettre-frederique-vidal

    • Merci @marielle, je mets tout le contenu de la lettre de #Pinar_Selek sur ce fil :

      Lettre à Frédérique Vidal

      Depuis vos dernières déclarations sur « l’islamo-gauchisme », je suis dans un #cauchemar terrible. Votre discours réveille tout ce que j’ai vécu et tout ce que mes collègues en #Turquie sont en train de vivre. Je vous demande de prêter attention à ma parole qui s’est forgée à travers une expérience très dure de la défense de la liberté de la recherche et de l’#autonomie de la production scientifique.

      –—

      Madame Vidal,

      Vous vous souvenez de moi, l’enseignante-chercheure exilée que vous aviez accueillie, dans le cadre du Programme PAUSE, à l’Université Côte d’Azur, quand vous étiez sa présidente. Mais nous nous sommes rencontrées la première fois, le 30 septembre 2019, dans le cadre de la conférence de presse du Programme PAUSE ( Programme national d’Aide à l’Accueil en Urgence des Scientifiques en Exil). En tant que ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, vous souteniez ce programme. Je pense que vous le soutenez encore. Tant mieux : vous soutenez les enseignant.es-chercheur.es qui ont fui la répression politique dans leur pays et qui ont besoin d’un espace de liberté pour continuer à poser des questions et à conduire leurs recherches.

      Depuis vos dernières déclarations sur "l’islamo-gauchisme", je suis dans un cauchemar terrible. Votre discours réveille tout ce que j’ai vécu et tout ce que mes collègues en Turquie sont en train de vivre, sous l’islamo-fascisme. Je pense que tout.es les scientifiques exilé.es qui sont aujourd’hui accueilli.es par le Programme PAUSE sont entrés dans le même cauchemar, car elles-ils savent aussi très bien comment les libertés académiques se rétrécissent quand les pouvoirs politiques interviennent dans le champ scientifique avec la justification de la lutte contre le terrorisme. En général, c’est comme ça que ça se passe. En Turquie, en Chine, en Iran. Et aujourd’hui en France.

      J’ai envie de vous dire que si vous ne revenez pas publiquement sur vos propos ou si vous ne démissionnez pas, le cancer se diffusera et des scientifiques français.es prendront le chemin d’exil.

      Ne me dites pas qu’en France ce n’est pas possible. Si, Madame Vidal, si. Vous le savez mieux que moi : le pétainisme n’est pas si vieux que ça. Rappelez-vous dans les années 1940, il y avait beaucoup d’universitaires français exilés, refusant de se soumettre au fascisme.

      Vous vous souvenez peut-être, dans la conférence de presse de PAUSE, j’avais commencé mon intervention en disant ceci : « Pour vous épargner un récit victimisant et pour me distancier d’une vision intégrationniste imprégnée de colonialisme, j’avais pensé d’abord rappeler que chaque pays a besoin de passeurs des théories scientifiques. Surtout la France qui a de grandes difficultés de traduction. Elle a besoin de savant.es qui se sont formés dans d’autres pays. De plus, accueillir les scientifiques qui ne sont pas soumis à l’autorité ne peut être qu’une richesse pour ceux et celles qui les accueillent. » Je vous demande de prêter attention à ma parole qui s’est forgée à travers une expérience très dure de la défense de la liberté de la recherche et de l’autonomie de la production scientifique.

      Madame Vidal, essayez d’écrire des articles scientifiques, avec votre casquette universitaire, pour remettre en question les notions scientifiques et inscrivez-vous dans le débat collectif des chercheur.es, mais surtout cessez d’intervenir en mettant votre casquette politique !

      Sinon vous allez mettre la machine infernale en marche.

      Et la machine du pouvoir peut aller plus loin que vous ne l’imaginez.

      Pinar Selek

      https://blogs.mediapart.fr/pinar-selek/blog/210221/lettre-frederique-vidal

    • "Islamogauchisme" : Le piège de l’#Alt-right se referme sur la Macronie

      Mardi dernier, la Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) a exprimé son souhait de missionner le CNRS pour une « étude scientifique » sur “l’islamo-gauchisme” qui, d’après ses propos de dimanche (14/02/21) sur une chaîne TV privée, « gangrène la société dans son ensemble ». « L’université n’[y étant] pas imperméable », il s’agirait de définir « ce qui relève de la recherche et du militantisme ». La Conférence des Présidents d’Université a immédiatement exprimé sa stupeur devant de tels propos, tandis que le CNRS indiquait dans un communiqué de presse que « “L’islamogauchisme” , slogan politique utilisé dans le débat public, ne correspond à aucune réalité scientifique ».

      C’est la troisième fois en moins de six mois que l’expression “l’islamo-gauchisme” est employée par un ministre du gouvernement Castex, contribuant à inscrire ce terme comme dénomination légitime d’une catégorie sociale, malgré l’absence de réalité scientifique.

      Au-delà de la menace que fait peser la démarche de la Ministre sur les libertés académiques, qui a suscité de vives polémiques, nous montrons qu’elle s’inscrit dans une tendance d’autant plus inquiétante qu’elle semble relever d’un #aveuglement au niveau de la Présidence et du gouvernement.

      Afin de discerner ce qui relève du #militantisme ou de la #stratégie_politique dans la #popularisation de ce #néologisme, ainsi que l’impact que pourrait avoir sa #légitimation par de hauts responsables de la République, nous présentons ici une étude factuelle sur les contextes de son utilisation dans le paysage politique français sur les 5 dernières années.

      Nous nous appuierons sur le #Politoscope, un instrument du CNRS que nous avons développé à l’Institut des Systèmes Complexes de Paris IdF pour l’étude du #militantisme_politique en ligne. Il nous permet d’analyser à ce jour plus de 290 millions de messages à connotation politique entre plus de 11 millions de comptes #Twitter émis depuis 2016.

      Nous renvoyons le lecteur intéressé par l’origine de l’expression “islamo-gauchisme” à l’historique qui en avait été fait en octobre dernier lors des premières utilisations de ce terme, d’abord par le Ministre de l’Intérieur lors d’un échange à l’Assemblée Nationale, puis par le Ministre de l’Éducation Nationale, de la Jeunesse et des Sports en réaction à l’assassinat de Samuel Paty.

      Le point important pour notre propos est que nous avons affaire à un néologisme relativement ancien (une quinzaine d’années) qui a jusque-là été peu utilisé. Entre le 1er Août 2017 et le 30 décembre 2020, sur 230M de tweets analysés, le terme « islamogauchisme » ou ses variantes ont été promus dans des tweets originaux et relayés via retweets respectivement par 0,019% et 0,26% du total comptes Twitter analysés, au sein de « seulement » 73.806 messages (0,032% du total). Nous sommes donc sur une #terminologie, et a priori une catégorisation des groupes sociaux, très marginales[1].

      Comme le montrent les recherches en sociologie et psychologie sociale[2], ce type de dénomination émergente indique la volonté de créer une nouvelle catégorie dans l’#imaginaire_collectif, passage obligé pour faire accepter de nouveaux #récits_de_référence et pour façonner de manière durable de nouvelles #représentations, #croyances et #valeurs.

      S’agissant de la dénomination d’un #groupe_social, elle est l’instrument d’une démarcation entre le groupe social qui l’emploie et le groupe social réel ou fantasmé qu’elle est censée désigner. Si le CNRS s’est exprimé au plus haut niveau pour indiquer que l’« islamogauchisme » était plus un #fantasme qu’une réalité scientifique, nous posons ici la question de ce que cette expression révèle sur le ou les groupes sociaux qui l’emploient.

      Voici donc ce qui ressort de l’expression « islamogauchisme »[3] lorsque nous la passons au macroscope de nos méthodes d’analyse.

      Quels ont été les contextes d’usage de l’expression « islamo-gauchisme » ces dernières années ?

      Si l’expression« islamo-gauchisme » est très marginale dans la #twittersphère et dans le #langage_politique ordinaire, elle apparaît dans des contextes très précis en tant qu’instrument de #lutte_idéologique.

      Une première évaluation qualitative de ce fait peut être menée à partir des messages mentionnant cette expression. Nous reproduisons ci-dessous les tweets ayant touché le plus de comptes distincts ces cinq dernières années. Ils sont classés par ordre décroissant de leur impact.

      Il apparaît clairement sur cet échantillon, par ailleurs assez représentatif de l’ensemble, que « islamo-gauchisme » est employé dans un contexte d’hostilité entre communautés politiques et non de discours programmatique, prosélyte ou de débat politique. Une analyse plus complète du contenu de ces tweets hostiles montre que les notions les plus associées à « islamo-gauchisme » sont celles de #traître, d’#ennemi_de_la_république, d’#immoralité, de #honte, de #corruption ainsi que de #menace, d’#insécurité, de #danger, d’alliance avec l’ennemi et bien sûr de compromission avec l’#islamisme_radical.

      La principale communauté politique visée par ce terme (et qui s’en défend, d’où sa présence dans ce corpus de tweets) est la #France_Insoumise et la personnalité de #Jean-Luc_Mélenchon, mais occasionnellement, ce terme vise la communauté plus large des personnalités et militants de #gauche, comme le montre le tweet le plus relayé de tout notre corpus et adressé à #Benoît_Hamon.

      Nous sommes donc sur un terme utilisé pour ostraciser et dénigrer un groupe social particulier tout en en donnant pour l’opinion publique une image anxiogène et associée à un #danger_imminent. Son utilisation a pour but de polariser l’opinion publique autour de deux camps déclarés incompatibles entre lesquels il faudrait choisir : d’un côté les défenseurs du droit et des valeurs républicaines, de l’autre les traîtres aux valeurs françaises et alliés d’un ennemi sanguinaire. La construction même du terme reflète cette ambition. Dans un pays encore meurtris par les attentats du Bataclan, le préfixe « islamo- » est au mieux négatif voire désigne des personnes dangereuses pour l’ordre public, quant au suffixe « gauchisme », il est une forme péjorative pour désigner en vrac les #idéologies_de_gauche.

      Qui a fait la promotion de la notion « islamo-gauchisme » ces dernières années ?

      En y regardant de plus près, l’usage de l’expression « islamo-gauchisme » est un marqueur de types de comptes Twitter très précis. Voici les comptes qui ont le plus utilisé cette expression ces cinq dernières années, classés par nombre décroissant d’usages de cette expression :

      Table 1. Liste des comptes ayant le plus relayé le terme « islamo-gauchisme » depuis 2016 dans le Politoscope. La mention ‘suspendu’ indique des comptes suspendus par Twitter pour leur comportement violant ses règles d’utilisation. La mention ‘protégé’ indique des comptes qui ont choisi de rendre leurs messages confidentiels. La mention bot indique des comptes ouvertement pilotés par des robots informatiques.

      On remarque tout d’abord qu’il y a une forte majorité de #comptes_suspendus. D’après Twitter, la plupart des comptes suspendus sont des #spammeurs, ou tout simplement des #faux_comptes qui introduisent des risques de sécurité pour Twitter et ses utilisateurs. Un compte peut également être suspendu si son détenteur adopte un comportement abusif, comme envoyer des menaces à d’autres personnes ou se faire passer pour d’autres comptes, ou si Twitter pense qu’il a été piraté.

      Les cas de suspension de comptes sont très rares. L’une des plus importantes purges de comptes Twitter a visé récemment 70.000 comptes ayant incité à la violence dans les jours précédant le saccage du Capitole aux USA, ce qui ne représente que 0,023% de l’ensemble des comptes actifs. Avoir plus de la moitié de comptes suspendus parmi les plus prolixes sur l’« islamo-gauchisme » est donc une prouesse et un marqueur très significatif de comportements abusifs et malveillants.

      Dans le cas présent, les raisons de la suspension semblent être un comportement verbalement violent et peut-être même plus probablement un comportement de tromperie ou d’astroturfing typique des agissements d’une certaine frange de l’#extrême_droite : une démultiplication démesurée et généralement artificielle de l’activité d’un compte pour faire illusion sur le soutien réel d’une population à une idée. Cette hypothèse est confortée par la présence de deux ‘amplificateurs’ parmi cette short list, c’est à dire des comptes dont le nombre quotidien de tweets (plus de 60 par jour en moyenne) indique qu’ils sont probablement pilotés par des robots ou des salariés.

      La seconde chose que l’on peut remarquer est l’#orientation_politique des quelques comptes présents dans cette liste pour ceux qui sont encore actifs : ils sont tous idéologiquement d’extrême-droite.

      L’analyse de l’ensemble des 83.000 #tweets contenant « islamo-gauchisme » et de leur dynamique permet de préciser ce tableau.

      Les deux communautés politiques historiques qui ont été les plus actives sur ce thème sont le #Rassemblement_National et #Les_Républicains, mais avec des temporalités très différentes. Jusqu’au 1er tour de la présidentielle de 2017, Les Républicains, et principalement les sarkozystes, étaient les plus actifs sur le sujet. Ce point n’est pas une coïncidence puisque, comme nous l’avons démontré[4] la tactique consistant à dénigrer un adversaire en révélant sa soit-disant proximité avec l’islamisme radical avait déjà été utilisée au sein même de LR contre Alain Juppé, une première fois par les sarkozistes pendant la primaire de la droite de 2016 où il était grand favori, puis par les fillionnistes au moment du Peneloppe Gate, alors que la possibilité d’un retour de Juppé était évoquée.

      La tendance s’est inversée très exactement dans l’entre-deux tours et le #RN est alors devenu, et de loin, le courant politique qui a le plus fréquemment fait usage du terme « islamo-gauchisme ». Sur ces quatre dernières années, les militants d’extrême droite ont consacré plus de deux fois plus d’efforts à sa promotion que leurs homologues Républicains (rapporté à leur volume total de tweets).

      Cette inversion s’explique par la reconfiguration des forces politiques à l’issue de la présidentielle. Comme nous l’avons déjà décrit[5], pendant la majeure partie de la campagne présidentielle, Marine Le Pen étant pronostiquée au second tour, les autres candidats se sont affrontés entre-eux pour obtenir la place restante. #Mélenchon était donc l’un des principaux adversaires de Fillon. Mais dès la présidentielle terminée et l’effondrement du PS et de LR qui s’en sont suivis, LFI et le RN sont devenus les principaux partis d’opposition et se sont donc mis à s’affronter pour prendre la place de première force d’opposition. C’est dans ce cadre que le RN a tenté d’imposer sa vision de « islamo-gauchisme » afin de discréditer son principal opposant et servir par la même occasion son agenda politique anti-immigration.

      Le terme « islamo-gauchisme » est donc avant tout une #arme_idéologique utilisée dans un #discours_hostile pour discréditer une communauté politique indépendamment de la réalité qu’il est supposé désigner.

      Une #cartographie de l’ensemble des échanges Twitter avec identification des communautés politiques révèle d’ailleurs très bien cette organisation dichotomique des échanges autour de cette expression. La figure 2 montre deux blocs qui s’affrontent : d’un côté les communautés d’extrême-droite et LR qui utilisent ce terme de manière hostile pour dénigrer ou stigmatiser la communauté LFI, de l’autre LFI qui se défend. On remarquera par ailleurs que l’extrême droite est elle-même divisée en deux sous groupes : le RN et les courants patriotes/identitaires. Enfin, la figure 3 ci-dessous montre bien l’activité ancienne, persistante et massive de l’extrême-droite pointant l’intention de faire accepter une certaine représentation du monde par ce néologisme.


      Figure 2. Cartographie des communautés politiques mentionnant « islamo-gauchisme ». Chaque point est un compte Twitter, sa couleur indique son appartenance à un courant politique. A droite, les communautés d’extrême-droite et LR utilisant ce terme de manière hostile pour dénigrer ou stigmatiser la communauté LFI (à gauche) qui se défend. La taille des nœuds est fonction du nombre de leurs tweets mentionnant « islamo-gauchisme » mise à part celle des nœuds labellisés avec des comptes actifs dont la taille a été augmentée pour des questions de visualisation. Pour ces nœuds là uniquement, la couleur indique le nombre de tweets mentionnant « islamo-gauchisme », par ordre croissant du blanc au violet. On remarquera la présence marquée de comptes très impliqués dans ce type d’échanges et suspendus depuis par Twitter. Image : CNRS, #David_Chavalarias – CC BY-ND 4.0.


      Figure 3. Cartographie des communautés politiques mentionnant « islamo-gauchisme » avec indication de la longévité des comptes. La taille des nœuds est proportionnelle à l’intervalle de temps pendant lequel a été détectée une participation à la polémique « islamo-gauchisme ». Il apparaît clairement qu’il y a une activité ancienne, persistante et massive à l’extrême-droite. Image : CNRS, David Chavalarias – CC BY-ND 4.0.

      Pourquoi l’adoption du #vocabulaire de l’extrême droite est-elle un piège ?

      Si l’on résume les éléments factuels que nous venons de présenter :

      Bien que la science ne reconnaisse pas « islamo-gauchisme » comme une catégorie sociale légitime, plusieurs courants d’extrême-droite en font depuis longtemps la promotion,
      Cette promotion, qui s’inscrit dans des échanges hostiles et dépourvus d’éléments programmatiques, a des objectifs bien précis : 1) discréditer ses opposants de gauche, 2) convaincre l’#opinion_publique de l’existence d’une nouvelle catégorie d’acteurs : des ennemis intérieurs alliés aux forces obscures de l’islamisme radical. Ce faisant, elle crée une #atmosphère_anxiogène propice à l’adhésion à ses idées.

      Si, comme nous avons pu le mesurer, cet effort soutenu n’a pas eu d’effet notable sur l’écosystème politique jusqu’à récemment, les interventions successives de trois ministres de la République ont changé la donne. La dernière intervention de Frédérique Vidal lui a fourni une exposition inespérée.

      L’existence de groupes « islamo-gauchites » vient d’être défendue officiellement au plus haut niveau puisqu’il serait absurde de demander une enquête sur quelque chose à laquelle on apporte peu de crédit. Cette dénomination est donc légitimée par le gouvernement, avec en prime l’idée que de notre jeunesse serait menacée d’#endoctrinement.

      La réaction épidermique du milieu universitaire à ces interventions n’a fait qu’amplifier l’exposition à cette idée, même si c’était pour la démentir, laissant présager d’un #effet_boomerang. Nous voyons ainsi sur le détail de l’évolution de la popularité de ce terme (Figure 4) qu’il a été propulsé au centre des discussions de l’ensemble des communautés politiques à la suite de l’intervention de la ministre et qu’il a même atteint assez profondément “la mer”.

      « La mer » est le nom que nous avons donné à ce large ensemble de comptes qui ne sont pas suffisamment politisés pour être associés à un courant politique particulier mais qui échangent néanmoins des tweets politiques. Toucher “la mer” avec leurs idées est le graal pour les communautés politiques car c’est un réservoir important de nouvelles recrues. Ainsi, “la mer”, concentrant son attention sur ce concept d’« islamo-gauchisme », est amenée à problématiser les enjeux politiques à partir des idées de l’extrême-droite.

      D’après nos mesures, les ministres du gouvernement ont réussi à faire en quatre mois ce que l’extrême-droite a peiné à faire en plus de quatre années : depuis octobre, le nombre de tweets de “la mer” mentionnant « islamo-gauchisme » est supérieur au nombre total de mentions entre 2016 et octobre 2020. On peut parler de #performance.


      Figure 4. Détail de l’évolution du nombre cumulé de tweets émis par les principales communautés politiques avec la mention « islamo-gauchisme » ou ses variantes. Le volume de tweets de “la mer” apparaît en vert et peut être lu sur l’axe des ordonnées à droite. Image : CNRS, David Chavalarias – CC BY-ND 4.0.

      La porte ouverte à l’#alt-right

      Pour bien comprendre la faute politique que constitue la légitimation et l’appropriation d’un concept tel que « islamo-gauchisme » par un gouvernement, il faut se placer dans le contexte mondial de la montée de l’alt-right et des étapes qui permettent à cette idéologie de gangrener le pouvoir.

      Contrairement à “« islamo-gauchisme », l’alt-right est un mouvement idéologique bien réel, scientifiquement documenté[6], et revendiqué publiquement au sein d’espaces d’échanges en ligne tels que #4Chan et #8Chan.

      L’alt-right est l’idéologie dont l’ascension a accompagné la prise du pouvoir de Donald Trump. Ses partisans sont nationalistes et suprématistes, racistes et antisémites, complotistes, intolérants et d’une violence parfois teintée de néonazisme[7]. Ils s’organisent de manière décentralisée via les médias numériques et recrutent “parmi les identitaires blancs, éduqués ou non, qui se présentent comme victimes de la culture dominante” (Port-Levet, 2020). Ils utilisent la #désinformation comme principal moyen pour propager leur idéologie “qui se fonde sur la #confusion_idéologique et dont l’un des principaux objectifs est de troubler l’ordre politique pour accélérer le chaos”[8].

      On ne s’étonnera pas que l’alt-right conçoive l’Université comme un repère de gauchistes et que certains de ses partisans en aient fait leur principal champ de bataille[9].

      L’idéologie alt-right a déjà quelques belles victoires à son palmarès, dont les mandatures de Donald Trump aux États-Unis et de Bolsonaro au Brésil, pays dont on relèvera qu’il dispose du même mode de scrutin présidentiel que la France.

      Comme nous l’avons documenté[10], ses partisans sont convaincus que #Marine_Le_Pen est de leur côté (cf. Figure 5), ils l’ont d’ailleurs activement soutenu en 2017 en espérant lui donner le coup de pouce décisif qui la mènerait à la victoire. L’un de leurs forums post-premier tour, intitulé “#Final_Push_Edition”, commençait le 25 avril 2017 par la formule “Alright everyone, our golden queen has won the first round and must now face her final opponent Macron Antoinette.”[11]. S’en suivait une série d’échanges et de conseils sur la meilleure manière de manier la désinformation pour réorienter une partie de l’opinion française vers un vote Le Pen ou l’abstention.


      Figure 5. Meme propagé en 2017 par les partisans de l’alt-right montrant Marine Le Pen faisant le symbole « O-KKK » (en référence au Ku Klux Klan) qui signifie “White Power”, signe de ralliement des suprémacistes blancs. Ce signe peut être vu également sur de multiples photos de la prise du Capitole. La grenouille, “Pepe the frog”, est la mascotte du mouvement. Ce photo-montage est un message entre partisans de l’alt-right pour indiquer que Marine Le Pen défend leurs valeurs. Image : 4Chan – Meme Internet – auteur anonyme.

      Depuis, ce courant n’a cessé de se renforcer à travers le monde, bénéficiant de la bouffée d’oxygène apportée par la mandature #Trump. Avec la victoire de Biden, ils n’auront rien de mieux à faire ces prochains mois que de s’occuper à nouveau des élections présidentielles en Europe.

      Pour propager leur idéologie à grande échelle, les activistes de l’alt-right se doivent de conquérir l’#imaginaire_collectif avec leurs représentations du monde. Comme une araignée, ils nécrosent progressivement la #morale_collective et la confiance que les citoyens ont dans leurs institutions démocratiques jusqu’à leur faire perdre tout repère. L’espoir de ces activistes est qu’alors un coup de force coordonné, jouant sur les #émotions_négatives, leur permettra de faire basculer une élection.

      Le chemin de cette nécrose est connu et documenté par la recherche en psychologie sociale, sociologie et sciences politiques. Il a été emprunté par les partisans de #Donald_Trump et a mené à l’insurrection du Capitole. En avoir connaissance nous permet de constater que nous l’empruntons déjà et que la Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation vient, probablement à son insu, d’y jouer un rôle d’agent de la circulation très efficace.

      Il y a en effet un parallèle quasi parfait entre la stratégie de l’alt-right américaine et celle qui sous-tend la promotion de la notion d’« islamo-gauchisme ». Citons pour nous en convaincre quelques passages d’une excellente recherche sur ce mouvement aux États Unis. Elle se fonde sur une analyse qualitative du discours alt-right sur le forum “r/The_Donald” au sein de Reddit (McLamore and Uluğ, 2020) :

      […] La théorie des représentations sociales met en évidence la pensée dualiste et dichotomique qui distingue les catégories, c’est-à-dire les “bonnes personnes/mauvaises personnes”, les “amis/ennemis”, les “élites/nonelites”, la “majorité/minorité” (Markova, 2006 ; Staerklé, 2009 ; Staerklé, Clemence, & Spini, 2011) – et l’appartenance à ces #catégories_antagonistes est attribuée en fonction de la concordance ou de la discordance avec des #symboles, #valeurs ou caractéristiques qui sont socialement représentés (Staerklé, Clemence, & Spini, 2011)

      Les résultats indiquent que les billets[12] qui contiennent des représentations sociales ou des éléments narratifs sur r/The_Donald se concentrent largement sur les caractéristiques des libéraux/gauchistes/démocrates, y compris leurs idéologies, leurs motivations et leurs objectifs perçus, et représentent les partisans de Donald Trump et des conservateurs plus généralement par opposition à ces groupes.

      Dans les trois catégories principales les plus courantes, les billets ont pour fonction de rejeter les positions libérales et de délégitimer les opposants politiques au populisme d’extrême droite (par exemple, les libéraux, les gauchistes, les marxistes, les militants des minorités, les militants de l’immigration, les féministes, les militants queer, etc.) […]

      Ces représentations des libéraux interprètent les positions libérales comme peu sincères et/ou invalides, représentant l’opposition au #populisme d’extrême droite comme le produit d’un lavage de cerveau, et représentant les opposants au populisme d’extrême droite comme illégitimes dans leurs croyances. Ce faisant, ces représentations des libéraux fonctionnent non seulement pour rejeter les idées libérales, mais aussi pour positionner les partisans de Donald Trump et les libéraux comme des parties opposées au sein d’un récit. L’émergence de tels récits, qui représentent des groupes en tant que forces opposées ayant des buts et des objectifs incompatibles, tout en délégitimant ou en rejetant simultanément les buts et les objectifs du parti rival, est un élément essentiel de l’infrastructure sociopsychologique des conflits entre groupes (Bar-Tal, 2007 ; Bekerman & Zembylas, 2009 ; Salomon, 2004).

      Comme les représentations sociales fonctionnent comme les éléments constitutifs des récits (Liu & Hilton, 2005 ; Moscovici, 1968/2008), ces représentations des libéraux et du libéralisme contribuent à établir les bases d’une infrastructure sociopsychologique des conflits entre groupes. […]

      La #délégitimisation des musulmans et des immigrants renforce mutuellement la délégitimisation des libéraux sur r/The_Donald. En tant que tels, les libéraux ne sont pas seulement présentés comme une #menace_interne, intragroupe, par leur élitisme et leur censure perçus de la culture américaine traditionnelle, mais aussi comme facilitant ou permettant une #menace_externe, intergroupe, par leur association avec les immigrants et les musulmans, qui sont représentés sur r/The_Donald comme intrinsèquement dangereux. Ces deux processus pourraient faciliter le soutien à l’#escalade_de_la_violence, car des travaux antérieurs en psychologie sociale établissent un lien entre la menace perçue et le soutien à l’escalade du conflit et à la #violence future dans les conflits violents (Hirschberger, Pyszczynski, & Ein-Dor, 2015). Au sein de r/The_Donald, nos résultats qualitatifs suggèrent donc que les libéraux représentent à la fois une menace culturelle par leurs attaques (perçues) contre les valeurs traditionnelles de ces Redditeurs, mais aussi une menace physique tangible par leurs liens avec des groupes extérieurs qui sont représentés comme violents et dangereux. Ces perceptions de la menace, qui se chevauchent mais sont distinctes, suggèrent que, dans ces représentations, les libéraux peuvent représenter des menaces à la fois symboliques et réelles (voir Stephan & Stephan, 2000).

      Pris dans leur ensemble, les billets des principales catégories [de r/The_Donald] représentent les libéraux comme étant à la fois oppresseurs des Blancs américains et des traditions américaines, mais impuissants, s’appuyant sur la #conspiration et le #lavage_de_cerveau pour conserver leur position d’élite. […]

      Ces représentations pourraient, en théorie, évoquer une #mentalité_de_siège typique des victimes dans un conflit où elles perçoivent tout comme étant contre elles (voir Bar-Tal & Antebi, 1992). Avec cette mentalité, les personnes partageant les représentations sociales qui prévalent sur r/The_Donald peuvent se comporter comme si elles étaient assiégés parce qu’ils se perçoivent et se représentent comme tels.

      Dans sa prise de parole sur l’« islamo-gauchisme » à l’assemblée, la Ministre a justifié sa démarche en se disant “extrêmement choquée de voir au Capitole apparaître un drapeau confédéré et [qu’elle pensait] qu’il est essentiel que les sciences humaines et sociales se penchent sur ces questions qui sont encore d’actualité”. Aussitôt dit aussitôt fait, dirions-nous. Les sciences humaines et sociales se sont déjà penchées sur les dérives qui ont mené au Capitole et elles n’ont rien à voir avec l’« islamo-gauchisme ». Au contraire, comme le démontrent les extraits précédents, les événements du Capitole sont directement liés à la légitimation de termes tels que « islamo-gauchisme ».

      En résumé, la première étape pour ancrer l’#idéologie_alt-right et arriver à saboter une démocratie est de concrétiser dans l’imaginaire collectif la représentation d’un #ennemi_de_l’intérieur qui pilote nos élites et fait alliance avec des ennemis de l’extérieur (non-blancs). La notion d’« islamo-gauchisme » est en cela une #trouvaille_géniale qui véhicule en quelques lettres cette idée maîtresse. En France, l’alt-right n’aurait pu rêver mieux que l’intervention récente de la Ministre : l’« islamo-gauchisme » pourrait être en train de corrompre les têtes pensantes de nos Universités ; propos amplifié par le Ministre de l’Éducation Nationale qui le voit “« comme un #fait_social indubitable »[13]. La polémique nationale que cela a suscité est un service rendu inestimable.

      Le billard du chaos

      Le recours du gouvernement à la rhétorique de « islamo-gauchisme » révèle une perte inquiétante de repères. Après trois reprises par trois ministres différents et importants, la dernière étant assumée deux jours plus tard par une intervention à l’Assemblée Nationale puis une autre au JDD, une #stratégie_gouvernementale affleure qui révèle une certaine nervosité. Et si LREM n’était pas au deuxième tour de la présidentielle en 2022 ?

      Les mouvements sociaux de 2018, les gilets jaunes éborgnés, la pandémie qui n’en finit pas de finir, la crise économique sans précédent qui s’annonce, tout cela fait #désordre et n’a pas permis à Emmanuel Macron de développer pleinement son programme. Il y a de quoi s’inquiéter. Comme en 2017, les partis politiques semblent se résoudre à avoir Marine Le Pen au second tour, jeu dangereux étant donné les failles de notre système de vote[14]. Pour passer les deux tours, LREM devra donc éliminer LFI au premier tour, actuellement son opposant le plus structuré hormis le RN, puis battre le RN au deuxième tour. Accréditer l’existence d’un “islamo-gauchisme”, c’est à la fois affaiblir LFI en emboîtant le pas de l’extrême droite et montrer aux électeurs qui seraient tentés par le RN que, dans le domaine de la lutte contre l’islamisme radical, LREM peut tout à fait faire aussi bien, voire mieux, qu’une Marine Le Pen qualifiée de “molle” par Gérald Darmanin[15].

      Ce billard à trois bandes qui relève du “en même temps” est cependant extrêmement dangereux et a toutes les chances de devenir incontrôlable.

      Il n’y a pas de “en même temps” dans le monde manichéen de l’alt-right qui s’attaque aux personnalités avant de s’attaquer aux idées. Une fois les représentations ad-hoc adoptées, l’électeur préférera toujours l’original à la copie et l’anti-système au système. Le vainqueur de 2022 sera celui qui arrivera à contrôler le cadre dans lequel s’effectueront les raisonnements des électeurs, et si ce cadre contient en son centre le terme “islamo-gauchisme”, il est fort à parier que Macron pourra faire ses valises. Pour ne pas perdre en terrain ennemi, la meilleure stratégie est de ne pas s’y aventurer.

      Epilogue

      Pour revenir sur la question de l’indépendance des universitaires et des chercheurs qui a donné à cette polémique une couverture nationale, on remarquera qu’il y a là un exemple assez pur du mode opératoire de l’alt-right, que la Ministre, a priori à son insu, a accompagné. Comme le montre Simon Ridley (2020), l’alt-right n’est plus un activisme marginal, exercé sous couvert de la « liberté d’expression », mais un engagement dans des actions criminelles destinées à créer du #chaos et à renverser la réalité[16]. Un mode opératoire récurrent des partisans de l’alt-right est de créer un #ennemi_imaginaire contre lequel ils se positionnent en rempart, espérant ainsi créer la réaction hostile à leur encontre qui justifiera leurs actions, souvent violentes.

      L’alt-right cible de manière privilégiée la #jeunesse et les universités. L’idée qu’il puisse y avoir au sein de l’université des groupes tels que des “islamo-gauchistes” sert précisément à légitimer leur intervention dans ce milieu. On a donc ici un parfait renversement de valeurs : un groupe qui promeut des méthodes malhonnêtes et violentes essaie de faire croire à l’existence d’un pseudo-groupe pour apparaître comme un rempart salutaire.

      https://politoscope.org/2021/02/le-piege-de-lalt-right-se-referme-sur-la-macronie

    • #Blanquer voit l’"islamo-gauchisme" comme «un fait social indubitable»


      https://twitter.com/BFMTV/status/1363103524020760578

      Blanquer, je transcris ici ses propos:

      « Ce serait absurde de ne pas vouloir étudier un #fait_social. Il faut bien étudier dans ce cas là... si c’est une #illusion... il faut étudier l’illusion, et regarder si ça n’est une. Pour ma part je le vois comme un fait social indubitable, ça se voit par exemple dans les déclarations de certains politiques politiques. Quand vous avez Monsieur Mélanchon qui participe à une manifestation du CCIF où il y avait clairement des islamistes radicaux, Monsieur Mélanchon quand il fait cela tombe dans l’islamogauchisme sans aucun doute. Je veux bien après que des spécialistes de sciences politiques examinent ça, trouvent d’autres mots pour décrire le phénomène, chacun doit voir cela avec sérénité et objectivité »

    • Au soldat du déni Frédérique Vidal, la patrie résistante

      « Une diversion et un ballon d’essai » : c’est ce que j’ai répondu quand on m’a demandé mon avis sur le commentaire de Frédérique Vidal sur CNews. Mon métier d’historienne des sciences étant d’analyser des controverses, prenons le temps d’y réfléchir à l’aune des persistances dans l’attaque des libertés académiques. Le déni doit cesser, à nous de choisir si nous, service public de la République, résisterons.

      « Une diversion et un ballon d’essai » : c’est ce que j’ai répondu à la journaliste du Monde quand elle m’a demandé, mardi 16 février 2021, mon avis sur le commentaire de Frédérique Vidal sur CNews, repéré par Martin Clavey (The Sound of Science). J’ai aussi précisé que je n’avais pas écouté son discours. Que je ne pouvais plus lire, ni écouter Frédérique Vidal, ma ministre de tutelle depuis plus de trois mois — car il en allait de ma santé mentale.

      Mais il en va désormais de la sécurité de toute une profession.

      Mon métier d’historienne des sciences étant d’analyser des controverses, prenons le temps d’y réfléchir, à l’aune d’une connaissance approfondie acquise par la chronique quotidienne d’une grève universitaire sur academia.hypotheses.org et commençons par rappeler que l’Assemblée nationale vient d’adopter, en première lecture, un des projets de loi les plus racistes portés par un gouvernement depuis Vichy ; et un autre projet de loi « Sécurité globale » qui constitue, par ses termes, une atteinte majeure aux libertés publiques.
      Faire diversion

      Une diversion d’abord, bien réussie. Quelques jours plus tôt, Frédérique Vidal avait fait l’objet d’une sévère mise en cause publique au Sénat, à l’occasion d’un débat « Le fonctionnement des universités en temps de COVID et le malaise étudiant » à l’initiative de Monique de Marco groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, vice-présidente de la Commission Culture.

      Le réquisitoire était implacable : ces derniers mois, 20% des jeunes ont eu recours à l’aide alimentaire ; la moitié des étudiant·es disent avoir des difficultés à payer leurs repas et leur loyer, qui représente 70% de leur budget. Dans une enquête portant sur 70 000 étudiant·es, 43% déclaraient des troubles de santé mentale, comme de l’anxiété ou de la dépression.

      Face à cela, les mesures prises par le MESRI sont insuffisantes ou plutôt dérisoires, inégalitaires ; les services universitaires complètement débordés. Pierre Ouzoulias, à cette occasion, a d’ailleurs clairement établi l’importance du définancement du budget « Vie étudiante » : 35 millions d’euros de crédits du programme « Vie étudiante » supprimés en novembre 2019 ; 100 millions d’euros de crédits votés en 2018 et 2019, finalement non affectés.

      Les longues files devant les distributions alimentaires trouvent dans cette politique budgétaire continue leur origine : le gouvernement ; qui a préparé la catastrophe sociale, n’a pas cherché depuis le confinement à la contrecarrer.

      Sans budget supplémentaire, Frédérique Vidal réussit également à contrecarrer toute réflexion collective sur l’aménagement des examens et des concours, jusqu’à intervenir dans une procédure judiciaire au nom de la « qualité des diplômes ».

      Ces réflexions, que nous menons tous et toutes dans des collectifs restreints, sont indispensables pourtant pour limiter les inégalités, réduire le stress qui ont conduit des étudiant∙es à se suicider et surtout mieux concentrer nos efforts sur les contenus de formation, autrement plus indispensables pour la « génération sacrifiée » ; au-delà des inégalités, nous voyons se profiler déjà de graves conséquences psychopathologiques du confinement.

      Mais les étudiant∙es ne sont pas les seul∙es à faire les frais de cette politique dont la Ministre est la première VRP, sans les responsabilités qui vont avec : siège vacant depuis le début de son mandat au Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de son propre ministère ; des circulaires sans fondements, tendant uniquement à éloigner la communauté universitaire des campus.

      Pour couronner le tout, elle fait voter une loi de programmation de la recherche (LPR) —censée être une loi de finances,mais sans postes ni crédits supplémentaires — en pleine épidémie, qui s’emploie méthodiquement à attaquer l’indépendance de l’université et, en poursuivant l’expérience Parcoursup, à limiter sinon anéantir la formation universitaire supérieure publique.

      Une diversion donc, mais aussi un ballon d’essai.

      Il faut sans doute avoir suivi un an de préparation et de vote de la LPR, dans toutes ses étapes comme l’a fait le blog de veille Academia.hypotheses.org, pour comprendre que les récents propos de la Ministre sont l’exacte réplique de la demande faite par Julien Aubert et Damien Abad le 25 novembre dernier demandant la création d’une « mission d’information parlementaire sur les dérives idéologiques intellectuelles dans les milieux universitaires », où l’on repérait déjà l’anathème attrape-tout islamogauchistes.

      Pour ces compagnons de la première heure de Gérald Darmanin, il s’agissait tout à la fois de sauver le soldat Blanquer de la mission d’enquête parlementaire « Avenir lycéen » (diversion) et de préparer le terrain pour leur camarade Ministre, qui mitonnait déjà sa loi « Principes républicain » (ballon d’essai).

      Au lieu d’une agitation, il s’agissait ainsi d’une étape dans une séquence commencée avec les voeux de Marion Maréchal-Le Pen, dont les idées sont reprises par Emmanuel Macron le 10 juin, accusant des universitaires de « casser la République en deux » et continuée avec Jean-Michel Blanquer qui, le 28 octobre, met en cause les universitaires devant le Sénat, à qui la frange « Printemps républicain » des Républicains, emboîte le pas. À l’appui de leur démarche, une tribune d’universitaires est opportunément parue un mois plus tôt, invitant le pouvoir à organiser une police politique des universités.
      Le soldat du déni

      Quel ballon d’essai lance donc Frédérique Vidal qui persiste encore ce dimanche dans ce que les organismes scientifiques jugent au mieux absurde ?

      Pour le comprendre, il faut mettre en résonance deux choses : sa pratique législative, d’une part, dans son lien étroit avec l’Élysée ; les objectifs qu’elle s’était donnée avec la précédente loi, d’autre part.

      Du côté de la pratique législative, nous pouvons résumer son action comme mue par un « déni de démocratie permanent ».

      Avec Academia, à l’occasion d’une table-ronde qui s’est tenue entre les votes Assemblée et Sénat de la LPR, nous avons pu mesurer combien la ministre avait fait fi de toutes les avis et recommandations des instances consultatives, depuis la consultation des agents de l’ESR, des organismes, des organisations syndicales représentatives.

      Le plus flagrant est la mise sous le tapis de l’avis du Conseil Économique, Social et Environnemental, pourtant voté à l’unanimité, par la CGT et le Medef. La 3e Assemblée de la République avait en effet établi un constat initial assez proche du Ministère, mais en tirait des conclusions bien différentes : pour le CESE, il faut des milliards d’euros, tout de suite, des recrutements là encore massifs.

      Pour comprendre les vues diamétralement opposées, il suffit de comprendre qu’outre les avis obligatoires des instances, le gouvernement s’est dispensé d’une étude d’impact en bonne et due forme. Le projet politique n’a jamais été « analysons correctement les données du problème posé par l’ESR et tirons-en des conclusions », mais « mettons en œuvre notre plan, et établissons une stratégie et une communication pour la mener à bien ».

      Quelle était la stratégie ?

      Zéro budget, zéro création de postes, voire passe-passe budgétaire divers avant la fin du quinquennat. La stratégie de communication, digne d’un Ministère de la Vérité, a consisté à marteler « 25 milliards » sur tous les plateaux de télévision avant la fin du quinquennat Macron ; ou à parler de création de postes, quand il y multiplication de statuts précaires, mais pas de budget pour les financer non plus.

      La tactique consiste elle à opérer par coups de force à la fin du processus législatif, par le biais d’amendements votés par une « nuit noire » d’octobre : suppression de la qualification, en affaiblissant ainsi le Conseil national des universités, organe représentatif des universitaires ; création d’un délit pénal, aggravé en commission mixte paritaire en « délit d’atteinte à la tranquillité et au bon ordre des établissements », puni de 3 ans de prison et de 45 000€ d’amendes.

      Et pour parachever le dispositif, sans considération pour conflit d’intérêt, faire nommer le Conseiller présidentiel à la tête de ce qui doit devenir l’instrument de l’achèvement de la mise au pas des universités : le Haut Conseil à l’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur.

      En un mot, faire croire à une politique budgétaire favorable pour les universités alors qu’il s’agit de fragiliser encore leur capacité d’action, leur autonomie et leur rayonnement à l’international. Frédérique Vidal, en bon petit soldat de la macronie, fait un sans faute. Sur tout, sauf sur un point de détail, censuré par le Conseil constitutionnel comme « cavalier législatif » : le délit pénal.
      Abattre la résistance

      Pourquoi Frédérique Vidal sort-elle tout cela de son chapeau maintenant ?

      Que cherche-t-elle, à vouloir distinguer des déviances au sein de l’université ?

      Y a-t-il une volonté, sous prétexte de séparer le « savoir » des « opinions » de venir contrôler ce qui s’y dit et s’y fait ?

      Sur ce sujet, l’introduction d’un délit pénal d’un type nouveau représente un vrai danger, sous forme de première étape. Avec le projet de loi « Principes républicains », il s’agit donc d’ajouter un volet « universités » et de donner les moyens judiciaires à l’État macronien de faire plier ce qui représente un lieu historique de la formation critique des citoyens et des enseignant∙es des premiers cycles.

      Avec le délit pénal, c’est la fin des franchises académiques arrachées à l’exécutif au Moyen-Âge, et protégeant les campus universitaires des incursions non-autorisées du pouvoir exécutif.

      Déjà, on voit bien comment la fermeture des établissements d’enseignement supérieur depuis près d’un an semble moins résulter d’une gestion de l’épidémie que de buts politiques moins glorieux, comme celui de briser toute contestation. Les forces de police s’invitent désormais dans des espaces qui leur étaient interdits sans autorisation, comme jeudi dernier à Nanterre, lors d’un hommage à un étudiant qui s’était suicidé.

      Les agents publics de l’ESR, victimes d’injure, de diffamation, voire de menaces de mort, n’ont pas le soutien de leur hiérarchie dont bénéficient les agents de police, même en cas de fautes lourdes. La protection fonctionnelle, outil important des libertés académiques, ne constitue plus un bouclier pour préserver l’indépendance des agents publics.

      Il ne reste donc plus qu’une chose à faire pour compléter l’arsenal répressif, après avoir rogné les franchises universitaires et limité l’usage de la protection fonctionnelle : remettre le délit pénal « pour atteinte à la tranquillité et au bon ordre des établissements » — qualification tellement vague qu’un courriel professionnel pourrait suffire à faire entrer l’universitaire ou l’étudiante un peu critique dans le radar des délits.

      Pour cela, Frédérique Vidal peut compter sur les mêmes sénateurs qui l’ont aidée en octobre : le président de la commission culture, et le rapporteur pour avis du projet de loi « Principes républicains ». Ces parlementaires et ceux qui ont déjà voté leurs amendements l’ont déjà prouvé : ils haïssent l’université, n’envisagent pas une seconde que l’émancipation de son milieu social et la formation à l’esprit critique relèvent des missions de l’université.

      Pour ces esprits chagrins, il faut empêcher de nuire les étudiant∙es et ceux — ou plutôt celles — qui ne partagent pas leurs idées. Pour cela, tous les moyens seront bons : même un vote à 1h du matin, entre une poignée de sénateurs. Frédérique Vidal le sait. Mardi, devant l’Assemblée nationale, c’est un signal déjà envoyé aux sénateurs et aux sénatrices par Blanquer, agissant pour le compte du président de la République : les universitaires sont complices ; elles sont donc coupables. Empêchez-les de nuire, en les arrêtant et en les emprisonnant si besoin.

      De toute cette séquence commencée il y a un an, ce que je retiens, c’est que les institutions universitaires, qui ont jusqu’à présent fait confiance à leur tutelle ― de façon mesurée mais réelle ― doivent saisir que le danger est réel ; que le déni doit cesser.

      La Ministre encore en poste, pilotée de toutes les façons au plus haut sommet de l’État par l’Elysée et le HCERES n’a plus rien à perdre. Le président de feue la République entend assouvir son désir de faire taire toute opposition, surtout si elle émane des puissants mouvements civiques en branle depuis l’an passé qui exigent une société plus juste pour tous et toutes.

      Le déni doit cesser.

      Depuis la présidence Sarkozy et le vote de la loi dite « Libertés et responsabilités des universités », les gouvernements successifs s’en prennent frontalement aux universitaires et aux étudiant⋅es en sous-finançant délibérément le service public de l’enseignement supérieur et la recherche, en en limitant l’accès, en nous imposant ainsi des conditions de travail indignes, des rémunérations horaires inférieures au SMIC et désormais en affamant les étudiant∙es — conduisant l’ensemble de la communauté universitaire dans une situation de mépris et de souffrance intolérable.

      À la souffrance s’ajoute désormais une certaine folie induite par le double-discours gouvernemental, privilégiant la diversion à la saisie du problème de la pauvreté étudiante. Radicaliser le débat public en désignant un bouc émissaire pour engendrer une peur panique participe de la fabrication du déni des réalités sociales et politiques quotidiennes de nos concitoyennes et de nos concitoyens, des jeunes particulièrement et donne une réelle assise à un pouvoir autoritaire.

      Mais un autre déni doit cesser, si on entend encore appliquer les principes constitutionnels de la République : la réactivation d’un ordre colonial et patriarcal.

      À force de nier quotidiennement les droits humains élémentaires des réfugiés, d’organiser des contrôles au faciès dès l’adolescence, en stigmatisant au sein de l’institution scolaire les enfants et les mères, de ne pas sanctionner les comportements et des crimes racistes au sein des forces de police — capables, rappelons-le, de mettre à genoux des lycéens pendant de longues heures, rejouant ainsi une scène de guerre coloniale — l’État français entend reconstituer sur son sol même une classe de sous-citoyens et de sous-citoyennes, privées des droits communs.

      La dissolution d’une association de lutte contre les discriminations, au prétexte de « complicité » de faits non avérés, se comprend ainsi : il faut désormais abattre toutes les tentatives de résistance antiraciste, féministe et de défense des libertés publiques non comme des facteurs d’émancipation mais une opposition néfaste.

      Désormais, à lire la séquence qui a commencé sur CNews et qui a « persisté » dans le Journal du dimanche hier, c’est l’université dans son ensemble qui représente une telle force de résistance. À nous de choisir si nous, service public de la République, résisterons.

      Christelle Rabier, maîtresse de conférences, EHESS (Marseille)

      1- Voir par exemple : « Le Roy le veult ! » — Circulaire d’Anne-Sophie Barthez du 22 janvier 2021

      2- Expression reprise à Anthony Cortès (Marianne) https://www.marianne.net/societe/education/frederique-vidal-la-ministre-de-lenseignement-superieur-maitre-dans-lart-d

      3- Pour lire une analyse sur l’avis cf. https://academia.hypotheses.org/25936

      4- Seuls 500 millions sont mis sur la table– soit 10 fois poins que ce que le CESE jugeait urgent de budgeter. Pour information, le Crédit impôt recherche, important dispositif d’ “optimisation fiscale”ou refus d’impôt, représente plus de deux fois le budget annuel du CNRS, masse salariale incluse.

      5- Sur le traitement différentiel des agents entre fonctions publiques et l’usage de la protection fonctionnelle comme protection politique des affidés, voir les deux billets Protection fonctionnelle : cas d’école et Courrier à la ministre : Mesure de protection de la santé et de la sécurité d’une enseignante-chercheuse.

      6- Sur le déni du sexisme universitaire, à commencer par ’invisibilisation active du travail des femmes universitaires, conceptualisé en 1993 par Margaret W. Rossiter, comme “Effet Matilda” : Margaret W. Rossiter, « L’effet Matthieu Mathilda en sciences », Les cahiers du CEDREF [En ligne], 11 | 2003, mis en ligne le 16 février 2010, consulté le 22 février 2021. URL : http://journals.openedition.org/cedref/503 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cedref.503. Voire également Cardi Coline, Naudier Delphine, Pruvost Geneviève, « Les rapports sociaux de sexe à l’université : au cœur d’une triple dénégation », L’Homme & la Société, 2005/4 (n° 158), p. 49-73. DOI : 10.3917/lhs.158.0049. URL : https://www.cairn.info/revue-l-homme-et-la-societe-2005-4-page-49.htm - à l’origine de la naissance du collectif Clashes contre les violences sexistes et sexuelles à l’université.

      7- Sur ce sujet douloureux, voir Fassin Didier, 2011, La force de l’ordre : une anthropologie de la police des quartiers, Paris, Editions du Seuil ; Brahim Rachida, 2021, La race tue deux fois : une histoire des crimes racistes en France (1970-2000), Paris, Éditions Syllepse, ainsi que le documentaire de David Dufresne, Un Pays qui se tient sage, 2020.

      https://blogs.mediapart.fr/chrabier/blog/230221/au-soldat-du-deni-frederique-vidal-la-patrie-resistante

      #Christelle_Rabier

    • Note de solidarité à l’intention des chercheuses et chercheurs en poste en France

      Nous, chercheurs et chercheuses en poste en Allemagne, suivons avec inquiétude les derniers développements de la polémique en France autour du prétendu « islamo-gauchisme » dans les universités françaises ainsi que les attaques répétées faites aux recherches intersectionnelles et postcoloniales. Nous y voyons un effort ciblé pour réduire au silence certains champs de recherche qui, par leurs résultats scientifiques, remettent en question des privilèges et inégalités structurellement ancrés.

      Ce débat a des effets dévastateurs sur nos collègues dont on essaie de délégitimer le travail. Nous rejetons résolument les insinuations destinées à semer le doute sur leur intégrité scientifique. Nous voyons dans ces reproches un empiètement inacceptable sur la liberté de recherche et de l’enseignement académique. L’évaluation de la qualité académique d’une approche scientifique n’incombe pas aux ministres ou aux parlementaires, c’est une compétence primordiale de la communauté scientifique. Or, tout comme chercheuses et chercheurs font valoir les fruits de leurs recherches sur la scène publique sous forme d’un transfert des connaissances, leur travail régulier consiste également en l’évaluation des travaux de leurs pairs.

      Nous déplorons que cette polémique ait vu certains membres du gouvernement et de la majorité présidentielle apporter leur soutien à des positions et des stratégies rhétoriques jusqu’ici réservées à l’extrême droite. Nous constatons avec inquiétude ces évolutions, qui ouvrent la voie à une profonde remise en question des principes qui sous-tendent jusqu’à présent l’enseignement supérieur et la recherche.

      Le débat dépasse le seul cadre de la sphère académique française : il a une dimension européenne et mondiale. Il touche également aux valeurs communes de la coopération scientifique franco-allemande et internationale. Afin de pouvoir continuer notre travail au-delà des frontières tant disciplinaires que nationales, il est essentiel que nos collègues en France puissent poursuivre leurs recherches sans aucune intervention politique dans le choix de leurs approches théoriques, méthodologiques et empiriques. Notre échange d’idées ne saurait se faire si nos travaux étaient soumis à une conditionnalité politique.

      C’est pourquoi nous exprimons notre solidarité et notre soutien à nos collègues de toutes les disciplines qui refusent de telles tentatives d’intimidation. Nous lançons un appel solennel à Madame la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et à toutes les personnalités de l’échiquier politique qui alimentent cette polémique : nous vous demandons instamment de cesser les attaques et de revenir immédiatement à une situation de respect absolu de la liberté académique en France.

      [Nous suivons de très près les développements actuels de ce débat en France. La collecte des signatures est ouverte jusqu’au 25 février inclus. Si nous arrivons à atteindre un nombre significatif de signatures, nous transmettrons cette note aux médias français et allemands le 26 février.]
      * Solidaritätserklärung mit Forschenden in Frankreich *
      Wir, in Deutschland beschäftigte Forschende, verfolgen mit Sorge die andauernde Debatte in Frankreich um angebliche „islamisch-linke“ Strömungen an den französischen Universitäten und die wiederholten Angriffe auf intersektionale und postkoloniale Forschungsrichtungen. Wir sehen darin einen gezielten Versuch, bestimmte Forschungsfelder zum Verstummen zu bringen, welche auf Basis ihrer wissenschaftlichen Erkenntnisse zahlreiche lange bestehende Privilegien und strukturelle Ungleichheiten offenlegen.

      Diese Debatte hat eine verheerende Wirkung auf unsere Kolleg_innen, deren Arbeit man zu delegitimieren versucht. Wir weisen entschieden die Andeutungen zurück, mit denen die wissenschaftliche Integrität unserer Kolleg_innen in Zweifel gezogen werden soll. Die Bewertung der wissenschaftlichen Qualität eines Forschungsansatzes obliegt nicht den Ministerien oder Abgeordneten ; dies ist zuallererst die ureigene Kompetenz der wissenschaftlichen Community. Wenn Forschende die Ergebnisse ihrer Arbeit als Wissenstransfer in die Öffentlichkeit tragen, so ist auch dies ein integraler Bestandteil ihrer üblichen Tätigkeit.

      Wir missbilligen die Art und Weise, wie sich einige Mitglieder der Regierung und der parlamentarischen Regierungsmehrheit in der Debatte an Konzepte und rhetorische Strategien anlehnen, die bisher vor allem der extremen Rechten vorbehalten waren. Diese Entwicklung beunruhigt uns sehr, denn sie bereitet einer Entwicklung den Weg, welche letztendlich die Grundprinzipien unseres Wissenschafts- und Bildungssystem in Frage stellt.

      Die Debatte geht über das akademische Umfeld Frankreichs hinaus, sie hat eine europäische und weltweite Tragweite. Sie berührt auch die gemeinsamen Werte der deutsch-französischen und internationalen wissenschaftlichen Zusammenarbeit. Um unsere Arbeit über nationale wie fachliche Grenzen hinaus fortsetzen zu können, ist es unabdingbar, dass unsere Kolleg_innen in Frankreich ohne jede Einmischung der Politik in die Wahl ihrer theoretischen, methodischen oder empirischen Zugänge forschen können. Unser Ideenaustausch wäre erheblich gestört, wenn ihre Arbeit künftig einem politischen Vorbehalt unterläge.

      Unsere Solidarität und Unterstützung gilt deshalb allen Kolleg_innen in den Geistes-, Sozial- und Naturwissenschaften, welche derartige Einschüchterungsversuche ablehnen. Wir richten uns daher an die französische Wissenschaftsministerin sowie an alle anderen Personen des politischen Lebens, die sich hieran beteiligen : Wir fordern Sie mit Nachdruck dazu auf, diese Angriffe zu unterlassen und fortan die akademische Freiheit in Frankreich wieder vollumfänglich zu gewährleisten und zu respektieren.

      [Eine Zusammenfassung der Hintergründe zu dieser Thematik auf Deutsch finden Sie hier : https://www.sueddeutsche.de/meinung/frankreich-islamismus-hochschulen-1.5214459

      Wir verfolgen weiterhin aufmerksam den Fortgang der Debatte in Frankreich. Die Liste zur Mitunterzeichnung ist offen bis zum 25. Februar. Kommt eine signifikante Anzahl von Unterschriften zustande, übermitteln wir die Erklärung am 26. Februar den französischen und deutschen Medien zur Veröffentlichung.]
      * Appel initié par / Initiiert von *
      Dr. Philipp Krämer, Europa-Universität Viadrina, Frankfurt (Oder)
      Dr. Naomi Truan, Universität Leipzig
      * Signataires / Unterzeichnende *
      Merci d’indiquer votre nom complet, votre institution, et, si vous souhaitez être tenu·e informé·e, votre adresse email institutionnelle. Si vous avez des changements urgents à proposer, merci de nous les communiquer par e-mail jusqu’au 25 février au plus tard (voir adresses ci-dessus).

      Bitte vollständigen Namen und Institution angeben, sowie Ihre Mailadresse, falls Sie über den Stand der Dinge informiert werden möchten. Bei dringenden Formulierungsvorschlägen bitten wir bis spätestens 25. Februar um eine persönliche Nachricht per E-Mail (s. oben).

      Dipl. Frank.-Wiss. Magdalena von Sicard, Universität zu Köln
      Dr. Vladimir Bogoeski, University of Amsterdam / Centre Marc Bloch
      Dennis Dressel, M.A., Albert-Ludwigs-Universität Freiburg
      Dr. Aleksandra Salamurovic, Friedrich-Schiller-Universität Jena
      Ignacio Satti, M.A., Albert-Ludwigs-Universität Freiburg
      Dr. Florian Busch, Martin-Luther-Universität Halle-Wittenberg
      Dr. Benjamin Krämer, Ludwig-Maximilians-Universität München
      Edgar Baumgärtner, M.A., Europa-Universität Viadrina, Frankfurt (Oder)
      Oliver Niels Völkel, M.A., Freie Universität Berlin
      Dr. Dorothea Horst, Europa-Universität Viadrina, Frankfurt (Oder)
      Katharina Jobst, M.A., Paris Sorbonne Université
      Dr. Marie-Therese Mäder, Universität Bremen
      Lisa Brunke, M.A., Martin-Luther Universität Halle-Wittenberg
      Prof. Dr. Theresa Heyd, Universität Greifswald
      Elena Tüting, M.A., Universität Bremen
      Christoph T. Burmeister, M.A., Humboldt-Universität zu Berlin
      Dr. Marie Leroy, Goethe Universität Frankfurt
      Dr. Silva Ladewig, Europa-Universität Viadrina, Frankfurt (Oder)
      Hagen Steinhauer, M.A., Universität Bremen
      Prof. Dr. Jürgen Erfurt, Goethe-Universität Frankfurt am Main
      Prof. Dr. Britta Schneider, Europa-Universität Viadrina, Frankfurt (Oder)
      Dr. Andreas Frings, Johannes Gutenberg-Universität Mainz
      Anka Steffen, M.A., Europa-Universität Viadrina, Frankfurt (Oder)
      Prof. Dr. Sylvie Roelly, Universität Potsdam
      Kira van Bentum, M.A., Freie Universität Berlin
      Dr. Baptiste Gault, Max-Planck Institut für Eisenforschung, Düsseldorf
      PD Dr. Benoit Merle, Friedrich-Alexander Universität Erlangen-Nürnberg
      Lucie Lamy, M.A., Centre Marc Bloch / Université de Paris
      Annette Hilscher, M.A., Goethe-Universität Frankfurt am Main
      Dr. Giulio Mattioli, Technische Universität Dortmund
      Yasmin Afshar Fernandes Abdollahyan, M.A., Humboldt-Universität zu Berlin / Centre Marc Bloch
      Martin Konvička, M.A., Freie Universität Berlin
      Laura Bonn, M.A., Friedrich-Alexander-Universität Erlangen-Nürnberg
      Dr. habil. Béatrice von Hirschhausen, ULR Géographie-cités / Centre Marc Bloch
      Dr. Eva Schöck-Quinteros, Universität Bremen
      Mariia Mykhalonok, M.A., Europa-Universität Viadrina Frankfurt (Oder)
      Christopher Smith Ochoa, M.A., Universität Duisburg-Essen
      Dr. Zoé Kergomard, Deutsches Historisches Institut Paris
      Dr. habil. Nikola Tietze, WiKu Hamburg / Centre Marc Bloch
      PD Dr. Silke Horstkotte, Universität Leipzig
      Dr. Thomas Stockinger, G. W. Leibniz Bibliothek Hannover / Leibniz-Archiv
      Dr. Felix Hoffmann, TU Chemnitz
      Maximilian Frankowsky, M.A., Universität Leipzig
      Enora Palaric, M.A., Hertie School
      Amelie Harbisch, M.A, Freie Universität Berlin
      Dr. Johara Berriane, Centre Marc Bloch Berlin
      Prof. Dr. Andrea Geier, Universität Trier
      Dr. Andreas Bischof, TU Chemnitz
      Prof. Dr. Sabine Broeck, Universität Bremen
      Cristina Samper, M.A., Hertie School
      Patrick Bormann, M.A., Universität Bonn

      https://academia.hypotheses.org/31322
      #solidarité #solidarité_internationale

    • Frédérique Vidal. Frankreichs Ministerin für Hochschule und Forschung stürzt sich in ideologische Grabenkämpfe.

      „Islamo-Gauchisme“, Islamo-Linke - wer diesen Begriff verwendet, kann sich sicher sein, in Frankreich viel Aufmerksamkeit zu bekommen. Und so geht es nun auch der Ministerin für Hochschule und Forschung, Frédérique Vidal. Vergangene Woche sprach sie zunächst in einem Fernsehinterview davon, dass der „Islamo-Gauchisme“ die „Gesellschaft vergifte“ und damit auch die Universitäten. Vor der Nationalversammlung legte die Ministerin dann nach: Sie forderte eine Untersuchung, um zu klären, inwieweit der „Islamo-Gauchisme“ dazu führe, dass bestimmte Recherchen verhindert würden. Zudem solle untersucht werden, wo an den Universitäten „Meinungen und Aktivismus“ statt Wissenschaft gepflegt würden. Sie nannte auch direkt ein Forschungsfeld, dass ihr besonders untersuchungswürdig erschien - postkoloniale Studien.

      Mit ihrem Vorschlag hat Vidal nun große Teile derjenigen gegen sich aufgebracht, die sie als Hochschulministerin vertritt. 600 Forscher und Professoren, darunter auch der Ökonom Thomas Piketty, veröffentlichten am Freitag einen offenen Brief, in dem sie Vidals Rücktritt fordern. Vidal handele so wie „das Ungarn Orbáns, das Brasilien Bolsonaros oder das Polen Dudas“, also wie eine nationalistische Populistin. Sie greife diejenigen Institute an, in denen zu rassistischer Diskriminierung, zu Gender und zu den Folgen des Kolonialismus geforscht werde. Kritik an Vidal kam dabei nicht nur von Linken. Auch die französische Hochschulrektorenkonferenz sagte, sie sei „verblüfft“ über Vidals Idee. Das nationale Forschungsinstitut CNRS stellte klar, dass „Islamo-Gauchisme“ kein wissenschaftlicher Begriff sei und warnte davor, die Freiheit der Wissenschaft einzuschränken.

      Tatsächlich distanziert sich auch der Schöpfer des Begriffes, der Soziologe Pierre-André Taguieff, von seiner eigenen Wortfindung. Er habe 2002 mit „Islamo-Gauchisme“ eine Allianz zwischen einigen Linksextremen und muslimischen Fundamentalisten beschreiben wollen, durch die ein neuer Antisemitismus entstand. Seitdem hat sich das Wort zum Lieblingskampfbegriff der Rechten entwickelt, die Linken vorwirft, sich nur für die Diskriminierung von Muslimen zu interessieren, nicht jedoch für islamistischen Terror.

      Sonderlich präzise ist der Begriff des „Islamo-Gauchisme“ dabei nicht. Allein schon, weil er keine klare Grenze zwischen Muslimen und Islamisten zieht. In die Rhetorik der Regierung hat er dennoch Einzug gehalten. Vor Vidal verwendeten ihn bereits der Bildungs- und auch der Innenminister. Gerade Innenminister Gérald Darmanin gibt in Emmanuel Macrons Regierung die rechtskonservative Gallionsfigur. Die Angst vorm links-islamistischen Schulterschluss treibt vor allen Dingen konservative und rechte Wähler um. Laut einer aktuellen Ifop-Umfrage halten mehr als 70 Prozent der Le-Pen-Sympathisanten den „Islamo-Gauchisme“ für eine in Frankreich weit verbreitete Denkrichtung.

      Vidal reagiert auf die Kritik an ihren Äußerungen gelassen. In Interviews am Sonntag und Montag betonte sie jeweils zum einen, dass die „aktuelle Polemik“ den Blick auf die wirklichen Probleme, also auf die Not der Studenten in Corona-Zeiten, versperre. Zum anderen hielt sie daran fest, dass eine „Bestandsaufnahme“ zu linkem Aktivismus an den Universitäten nötig sei. Die 56-Jährige sieht sich dabei als Wissenschaftlerin, die „Rationalität zurückbringt“. Bevor Macron sie 2017 zur Wissenschaftsministerin machte, war die Biochemikerin Vidal Präsidentin der Universität von Nizza.

      Auch jenseits ideologischer Kämpfe stecken Frankreichs Universitäten in der Sinnkrise. Das Geburtsland des Impfpioniers Louis Pasteur hat bislang keinen Corona-Impfstoff entwickeln können. Wissenschaftler machen dafür auch die schlechte finanzielle Ausstattung der Labore verantwortlich. Diese Arbeitsbedingungen kennt Vidal gut. Vor ihrer Doktorarbeit forschte sie am Institut Pasteur.

      https://www.sueddeutsche.de/meinung/frankreich-islamismus-hochschulen-1.5214459

    • La ministre, la science et l’idéologie

      En demandant au CNRS une enquête sur l’« islamo-gauchisme » à l’université, ce sont les sciences sociales que vise Frédérique Vidal, sous prétexte qu’elles seraient gangrénées par des idéologies. Mais faut-il rappeler qu’il y a des sciences sociales parce qu’il y a des idéologies ? Et que, si les sciences sociales ne se réduisent pas à un écho des idéologies, elles n’auraient à vrai dire aucun sens si elle ne se rapportaient pas à elles. En effet, il y a des sciences sociales parce qu’il y a des problèmes sociaux, et que ceux-ci sont traversés par des positionnements idéologiques.

      https://aoc.media/analyse/2021/02/23/la-ministre-la-science-et-lideologie

      #paywall

    • « Islamo-gauchisme, le jeu dangereux de la macronie ». #André_Gunthert, sur Le Média, 23 février 2021

      Ça y est. La Macronie s’en va-t-en-guerre. Elle a décidé de lancer la bataille contre un concept à la fois fumeux et ambigu, l’islamogauchisme. Une bataille qui se mène sur un front particulier : nos universités publiques, qui seraient (et je caricature à peine) des foyers de sédition voués aux idées de Mao Tsé Toung et de l’ayatollah Khomeini. Mais au fait, c’est quoi ce mot, “islamogauchisme” ? D’où provient-il ? Pourquoi Frédérique Vidal, la ministre de l’Enseignement supérieur, prend le risque d’une confrontation avec le monde universitaire en le dégainant, et en annonçant une sorte d’audit idéologique des amphithéâtres ?

      Pour répondre à ces questions, j’ai invité André Gunthert, historien des cultures visuelles, enseignant-chercheur à l’Ecole des hautes études en sciences sociales. André Gunthert a publié il y a peu sur son site imagesociale.fr, un article très instructif dont le titre est “Islamogauchisme : un épouvantail en retard d’une crise”.

      https://www.youtube.com/watch?v=kqakmGVZEFM&feature=emb_logo

      https://academia.hypotheses.org/31324

    • Macron et la bête immonde

      Le #macronisme porte en lui la #guerre. Après la guerre aux Gilets jaunes réprimés dans une violence inouïe, après celle conduite contre nos libertés fondamentales avec la loi « sécurité globale », après la loi « séparatisme » qui légalise la guerre contre les musulmans et les minorités, Macron entend conduire à son terme la guerre contre l’Université et la chimère de l’islamo-gauchisme.

      "Existe-t-il une possibilité de diriger le développement psychique de l’homme de manière à le rendre mieux armé contre les psychoses de haine et de destruction ?"

      "Pourquoi la guerre ?" Lettre d’Albert Einstein à Sigmund Freud, le 30 juillet 1932

      L’entretien donné par Frédérique Vidal ce 20 février au Journal du Dimanche aura eu au moins deux vertus. En persistant dans sa #stigmatisation des universitaires et en maintenant sa demande d’enquête sur « l’islamo-gauchisme », la ministre aura élevé au carré l’indignation des chercheurs et renforcé leur unité : en trois jours à peine, la tribune du Monde demandant sa démission a recueilli 18 000 signatures (https://www.wesign.it/fr/science/nous-universitaires-et-chercheurs-demandons-avec-force-la-demission-de-freder) de personnels de l’université et de la recherche. Voir ici (https://universiteouverte.org/2021/02/22/la-ministre-vidal-doit-demissionner-plus-de-13-000-universitaires) le communiqué d’Université Ouverte et là (https://www.snesup.fr/article/frederique-vidal-doit-etre-remplacee-lenseignement-superieur-et-la-recherche-) la demande de démission d’un syndicat, parmi bien d’autres. Il est exceptionnel qu’une pétition dans le secteur de l’enseignement supérieur atteigne autant de signatures – 18 000 signatures correspond à 20 % des enseignants du supérieur. À titre de comparaison le « #Manifeste_des_100 » réactionnaires et laïcistes de la gauche égarée qui soutenaient Blanquer à l’automne dernier, apparait, avec ses 258 signataires, tout aussi inconsistant et marginal que le phénomène incriminé par Vidal, à savoir « l’islamo-gauchisme » à l’université. Dans son entretien au JDD, Vidal, après l’avoir fait descendre très bas, souhaite qu’on « relève le débat ». Elle voulait probablement dire « élever le débat ». Ce sont les universitaires qui souhaitent aujourd’hui que l’on « relève » la ministre de ses fonctions.

      La seconde vertu de l’entretien au JDD est d’asseoir une lecture politique de la séquence qui laisse peu de place à l’hypothèse de la #maladresse d’une ministre fatiguée et très impopulaire, qui ne saurait plus quoi faire pour masquer son #incurie et son #incompétence dans la gestion de la crise sanitaire à l’université. Il apparaît en effet que nous avons affaire à la construction délibérée d’une #séquence_politique dans laquelle Vidal est une pièce maîtresse dans un dispositif étroitement associé à la construction de la loi sur « les séparatismes » et à la loi « sécurité globale » (voir ici la très bonne analyse de Christelle Rabier : https://blogs.mediapart.fr/chrabier/blog/230221/au-soldat-du-deni-frederique-vidal-la-patrie-resistante). Il convient de raisonner en terme de #cohérence systémique et idéologique, et non selon le registre de la #pulsion ou de l’#improvisation. La séquence commence le 22 octobre avec la sortie de #Blanquer contre les universitaires islamo-gauchistes accusés de « #complicité_intellectuelle avec le #terrorisme » (ici chaque mot compte), accusation à laquelle Vidal répondra très mollement dans L’Opinion le 26 octobre (https://www.lopinion.fr/edition/politique/l-universite-n-est-pas-lieu-d-encouragement-d-expression-fanatisme-227464). La séquence se poursuit le 1er novembre avec le #Manifeste_des_100, co-produit par le cercle de « #Vigilance_Universités » (https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/31/une-centaine-d-universitaires-alertent-sur-l-islamisme-ce-qui-nous-menace-c-) dont la majorité des publications est également accueillie dans le journal libéral et pro-business de L’Opinion. Et nous assistons aujourd’hui au troisième acte avec l’attaque de Vidal contre l’institution qu’elle est censée représenter. Le quatrième acte sera probablement l’appui des réactionnaires/laïcistes à la demande d’enquête de Vidal. Et le cinquième la réalisation de l’enquête en question, même si on ne connaît pas encore l’instance qui trouvera les quelques volontaires pour la conduire.

      Les avantages de la séquence ont été soulignés à mainte reprises : le coup de politique politicienne vise à racoler toujours plus loin sur les terres du RN, à attaquer la gauche et à la diviser davantage – il n’est pas anodin que Vidal s’en soit prise nommément à Mélenchon – et à faire oublier l’état calamiteux dans lequel Vidal a mis l’université et la recherche, les personnels et les étudiant.es. Les conséquences, calamiteuses au plan éthique et politique, sont principalement les suivantes : la création d’une #polémique qui cherche à faire oublier que des étudiant.es se suicident ou meurent de faim ; la #validation, la #banalisation et le renforcement des thèses du RN ; la #légitimation du concept d’islamo-gauchisme auprès de l’opinion publique alors qu’il est une construction de l’extrême droite ; la porte ouverte à l’alt-right, dont l’un des schèmes de la pensée est que l’université serait un ramassis de gauchistes, ainsi que le rappelle justement David Chavalarias dans son étude (https://politoscope.org/2021/02/islamogauchisme-le-piege-de-lalt-right-se-referme-sur-la-macronie). Tout ceci est entendu, mais nous ne pouvons en rester à cette seule analyse. Car les armes utilisées par les néolibéraux pour faire la guerre aux biens communs, aux services publics, aux libertés fondamentales et à toutes les minorités, ces armes sont celles-là mêmes que les régimes les plus autoritaires utilisent systématiquement. On peut au moins commencer à le montrer.

      *

      Reprenons ! Le passage de la ministre sur CNews, le choix de cette chaine ainsi que l’adéquation des propos de Vidal à sa ligne éditoriale et idéologique qui est celle de l’extrême droite raciste et nationaliste, renforcent la lecture d’une #stratégie_politique élaborée en amont, nécessairement en lien avec le sommet de l’Etat, avec l’accord de #Macron et #Castex. Dès lors, la critique de Macron rapportée par Gabriel Attal doit être comprise comme une nouvelle tartuferie d’un pouvoir qui nous a habitués à toutes les comédies du « #en_même_temps », avec son lot de #mensonges, son #hypocrisie permanente et son #cynisme consommé. On trouvera une preuve évidente de la tartuferie de Macron dans le fait que dès le 2 octobre 2020, soit 20 jours avant la sortie de Blanquer, le président, lors de son discours des Mureaux sur le « #séparatisme_islamiste », a porté la charge contre les #intellectuels qui « sont hors de la République », contre certaines « #traditions_universitaires » et des « théories en sciences sociales totalement importées des États-Unis d’Amérique ». Des théories que Vidal, dans un #confusionnisme digne des complotistes les plus dérangés, n’hésitera pas à mettre en rapport avec la prise du Capitole et le drapeau des Confédérés… En d’autres temps, la séquence aurait pu provoquer le rire, tant la farce politique semble énorme, tant la bêtise est confondante. Mais, de la bêtise à la bête, il n’y a souvent qu’un pas. Car, si une analogie pouvait avoir du sens, il me semble que nous assistons à la pièce que #Brecht écrivit en 1941, La résistible Ascension d’Arturo Ui, dont l’épilogue est bien connu : « Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la #bête_immonde ». Je laisse chacune et chacun imaginer ce à quoi pourrait bien correspondre, aujourd’hui, le trust des choux-fleurs. Et retrouver qui fit l’éloge de Pétain en 2018. Sans mémoire et sans éthique, un homme politique porte en lui un #monstre.

      « La bête immonde » est donc à l’œuvre. Elle use de trois moyens, parmi bien d’autres : elle fait exister une chose qui n’a aucune réalité, elle crée des #boucs_émissaires et elle programme de les éradiquer de la société. Les deux premières étapes ont été méthodiquement appliquées. Si nous n’y prenons garde, la troisième pourrait être mise en œuvre rapidement. Elle a peut-être déjà commencé.

      Il en va du « séparatisme » comme de « l’islamo-gauchisme » : l’incrimination de « séparatisme » crée le « séparatisme », l’incrimination d’« islamo-gauchisme » crée « l’islamo-gauchisme » . En effet, il arrive que dans certains états autoritaires les lois fassent exister des choses qui n’existent pas, simplement en les nommant. En #Turquie on accuse des chercheur.e.s de terrorisme pour la conduite d’une enquête sociologique. C’est ce qui est arrivé à Pinar Selek. En France les propos et la communication de Blanquer, Vidal, Darmanin et Macron font exister l’islamo-gauchisme par le simple fait d’utiliser, de propager et de banaliser le concept : le donner en pâture aux médias qui s’en repaissent et à une opinion publique fragilisée en temps de pandémie, suffit à faire exister une chose qui n’a pourtant aucune réalité effective. C’est une #politique_du_performatif : je fais exister la chose en la nommant. La vérité et la force du concept seront proportionnels à sa #viduité, c’est-à-dire à son aptitude à être rempli par de l’impensé, du fantasmatique et de l’idéologie. Vidal elle-même concède dans le JDD que le concept n’a aucun fondement scientifique et correspond à « un #ressenti de nos concitoyens ». Une enquête sur un ressenti : Vidal ou l’art du #vide. Mais une stratégie qui marche à plein.

      Car l’invention du concept est pleine de sens. L’idéologie qui la sous-tend est toute entière dans la relation entre les deux concepts : elle est dans le tiret entre #islamisme et #gauchisme, l’association de la #gauche à l’#islam_politique et, par glissement, de la gauche au #terrorisme_islamiste. Et encore, pour finir, elle produit cette double équation : gauche = islamisme = terrorisme. Le #monstre_idéologique créé par Macron, Vidal and Co est le suivant : les universitaires sont des gauchistes, des islamistes et des terroristes. L’opinion a désormais ses boucs émissaires, désignés, dénoncés et bientôt nommés : les musulmans, les gauchistes et les universitaires. L’association des universitaires aux seconds et premiers construit un #schème_imaginaire de la #radicalisation et du danger. Ce n’est plus seulement de l’#anti-intellectualisme primaire, ce qui devrait en soi faire honte à une ministre le l’enseignement supérieur, mais une véritable #incitation_à_la_haine.

      Il sera donc non seulement légitime, mais urgent – troisième étape - de couper le membre gangréné que les « islamo-gauchistes » constituent au sein de l’université et qui risque de pourrir, tout comme l’islam menace de gangréner la totalité du corps social. Ce schème est au-delà de la droite extrême : il est proprement fasciste. Macron, qui souhaite "décapiter" Al-Qaïda au Sahel, met dans son langage la pratique des terroristes. On a souligné que l’incrimination d’islamo-gauchiste fonctionnait sur le modèle sémantique et historique de l’incrimination de #judéo-bolchévique. L’« islamo-gauchiste » ne devient-il pas le juif de l’université, le juif des années 30 ?

      Une dernière question : quel sens y a-t-il à ce que les musulmans et les universitaires « gauchistes » soient si étroitement associés ? Question sans réponse. Mais question essentielle. Il nous faudra y répondre avant que ce pouvoir sans nom ne passe vraiment à la troisième étape. Nous n’en sommes pas loin, si l’on veut bien considérer tout l’arsenal législatif que Macron et sa majorité mettent au service de la bête immonde, de "la bête qui monte, qui monte", et de la bête qui est déjà là, en eux.

      Un épilogue, en manière d’hommage à celles et ceux qui se sont battus et se battent encore, et se battront demain, sans fin. Les Gilets jaunes ont parfaitement saisi la nature du pouvoir politique auquel ils se confrontaient : la dimension militaire de la répression policière leur a permis de comprendre dans leur chair ce qu’il en était de la #violence pure de ce pouvoir. Ils l’ont exprimé dans une chanson qui a la force des chants populaires et révolutionnaires : « Macron nous fait la guerre, et sa police aussi ». Les universitaires sont en train de comprendre la vraie nature du pouvoir qui les opprime, qui tente de les diviser, et qui les affaiblit un peu plus chaque jour en détruisant leur outil de travail, leurs libertés et leur dignité. Macron devrait y prendre garde : quand on touche à la #dignité et à la #liberté d’une communauté, elle résiste. La #résistance est en route.

      #Pascal_Maillard

      L’expression « Nous sommes la bête qui monte, qui monte… » est de Jean-Marie Le Pen, le 3 mars 1984, à quelques mois des élections européennes.

      https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/230221/macron-et-la-bete-immonde
      #fascisme

    • TEMOS et les libertés académiques
      Texte approuvé par l’assemblée générale des membres de l’UMR réunie le 23 février 2021

      TEMOS UMR CNRS 9016 – 23 février 2021
      Réponse à Mme Vidal, pour la défense des libertés académiques à l’Université

      Les propos de Mme Vidal, ministre de l’ESR, tenus le 14 février 2021 et réitérés le 21 février, mettent en cause « l’islamo-gauchisme » qui, selon elle, « gangrène » l’université. La ministre entend diligenter une enquête sur cette question, qui serait conduite par le CNRS, chargé de produire un « bilan » des recherches menées dans les universités afin d’établir « ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme et de l’opinion ». Pour rappel, ces déclarations font suite à des propos similaires de M. Blanquer, ministre de l’EN, le 25 octobre 2020, qui, à la suite de l’assassinat du professeur Samuel Paty, dénonçait les « complicités intellectuelles » de certain·es chercheur·es universitaires qu’il désignait comme des « islamo-gauchistes ».
      Des déclarations qui vont à l’encontre de la méthode scientifique

      Il convient tout d’abord d’affirmer que, comme le souligne le CNRS dans un communiqué daté du 17 février 2021, le terme d’islamo-gauchisme « ne correspond à aucune réalité scientifique », mais relève d’une instrumentalisation politique. Il ne renvoie à aucun groupe précisément identifié qui le revendique, à aucune forme d’action collective en son nom, à aucun corps de doctrine clairement formulé comme tel qui pourraient être observés et analysés par les scientifiques. Aucune enquête sociologique, aucune observation empiriquement fondée ne permet de prétendre qu’il existe à l’Université un tel courant de pensée, à supposer que ce courant puisse être défini précisément. Le terme, mot-valise aux contours volontairement flous, n’a pour fonction que de fédérer ceux qui l’utilisent, en particulier dans les rangs de l’extrême droite. Y sont amalgamées pêle-mêle, les études postcoloniales, intersectionnelles, sur le genre et jusqu’à l’écriture inclusive… Ainsi, les prémices de la pensée de Mme Vidal relèvent tout simplement d’une contre-vérité, notamment mobilisée par des mouvements se donnant pour mission de répertorier et combattre les champs d’études précités.
      Des actes qui remettent en cause les libertés académiques

      Derrière les mots, Mme Vidal entend poser un certain nombre d’actes, dont la conduite d’une enquête sur ce supposé phénomène, présenté comme une menace pour la liberté des chercheur·es. Cette enquête aurait pour objectif d’ausculter les recherches universitaires, principalement en sciences sociales, selon leur accointance présumée avec les mouvements islamistes. Au-delà du caractère ubuesque d’une telle recherche voulue « rationnelle et scientifique » par la ministre bien que portant sur un objet dont elle reconnaît elle-même qu’il « n’a pas de définition scientifique », il apparaît, en première analyse, que ces investigations commanditées par le gouvernement remettent en cause le principe d’indépendance de la science et les libertés académiques, institutionnalisées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 20 janvier 1984 (décision n°83-165 DC). À cet égard, la CPU a condamné dans un communiqué du 16 février 2021 une « instrumentalisation du CNRS », dont la vocation n’est pas d’enquêter sur l’université, et encore moins « d’éclaircir ce qui relève ‘du militantisme ou de l’opinion’ ». En prétendant, habilement, garantir les libertés académiques, Mme Vidal les bafoue, au mépris de la loi constitutionnelle, et laisse présager des représailles contre une partie de la communauté scientifique (à quoi bon enquêter sur ce fléau, sinon ?).
      Une récupération politique contre un projet émancipateur

      En dehors de l’effet d’aubaine politique attribuable à l’actuel gouvernement qui voit venir de nouvelles échéances électorales, ces attaques s’inscrivent dans une généalogie des ingérences politiques à l’égard de l’Université en général et des sciences sociales en particulier. Ces propos relèvent d’une forme de panique morale, argutie contrefactuelle livrant à la vindicte de l’opinion publique des universitaires diabolisé·es, dans un contexte d’angoisse au sujet de la cohésion nationale. Elle est le fait d’entrepreneurs de morale dont le dessein politique discerne un danger dans le projet émancipateur des sciences sociales. En effet, ces dernières, à travers l’épistémologie « intersectionnelle » notamment, cherchent à agencer les concepts de classe, de genre et de race dans l’étude des fondements des inégalités. Leur ambition politique, en tant que savoirs situés, est de contribuer à la réduction des inégalités et des injustices qui traversent nos sociétés. Là où leurs pourfendeurs les accusent de faire le lit des « séparatismes », les sciences sociales entendent justement réfléchir à la construction des hiérarchies sociales qui justifient les discriminations, conduisant précisément à la mise à l’écart de certain·es citoyen·nes hors de la communauté politique.
      C’est en pratiquant une histoire sociale qui cherche à définir les inégalités que des membres de l’UMR TEMOS se sont trouvé·es confronté·es à des attaques, stigmatisé·es pour leurs recherches et ce qu’ils/elles sont. En novembre 2020, un colloque en ligne sur les 50 ans du Mouvement de Libération des Femmes a été piraté et interrompu par des cyberharceleurs néo-nazis. En février 2021, une enseignante-chercheuse, #Nahema_Hanafi, a été accusée par « l’Observatoire du décolonialisme et des idéologies identitaires » de faire « l’éloge de la cybercriminalité » pour avoir analysé les motivations énoncées par les cyber-escrocs ivoiriens, puis nommément exposée sur des sites d’extrême-droite. Les entraves, intimidations et instrumentalisations de ce type se sont multipliées ces dernières années. Les auteur·es de ces attaques sont justement ceux/celles qui se plaignent d’être soi-disant empêché·es dans leurs recherches par une prétendue mainmise des « islamo-gauchistes » sur l’Université. Mme Vidal, dont la fonction est précisément de protéger la communauté universitaire de ces ingérences extrémistes, prend le parti des agresseurs.

      En cela, il nous apparaît non seulement nécessaire de défendre le principe épistémologique d’indépendance de la science à l’égard des pouvoirs politiques, économiques ou religieux, condition d’une pratique scientifique objective, mais aussi de justifier le rôle politique de la science de participer à l’avènement d’un monde à la fois plus lucide et, de ce fait, plus juste.

      https://temos.cnrs.fr/actualite/temos-et-les-libertes-academiques

    • Islamo-gauchisme : une étude du CNRS pointe un « piège » pour le gouvernement

      Après les déclarations de Frédérique Vidal, une enquête du CNRS montre comment l’exécutif a offert une “exposition inespérée” à un néologisme promu par l’extrême droite.

      Aussi préoccupée par cette question que demandeuse d’une enquête en la matière, la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal devrait lire avec attention cette étude produite par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) sur l’emploi de l’expression “islamo-gauchisme”. Elle y constaterait, éléments objectifs à l’appui, qu’en réclamant un “bilan” sur “l’islamo-gauchisme” à l’université, elle a surtout contribué à populariser un néologisme, surtout utilisé sur Internet comme un “instrument de lutte idéologique” par l’extrême droite.

      Côté méthode, cette étude menée par le Politoscope du CNRS et rendue publique ce dimanche 21 février, a utilisé un outil permettant d’analyser “plus de 290 millions de messages à connotation politique émis depuis 2016 entre plus de 11 millions de comptes Twitter”. Un système permettant de cartographier avec précision les tweets mentionnant cette expression et d’étudier les communautés militantes qui l’utilisent, et de quelle façon.
      Surreprésentation de l’extrême droite

      “Le premier constat que l’on peut faire est que les comptes qui se sont le plus impliqués dans la promotion d’‘islamo-gauchisme’ depuis 2016 sont tous idéologiquement d’extrême droite. Le second constat est qu’il y a une forte majorité de comptes suspendus”, note David Chavalarias, directeur de recherche au CNRS et auteur de l’étude. Autre point soulevé par l’article, le caractère marginal de cette expression qui, entre le 1er août 2017 et le 30 décembre 2020, n’a concerné que 0,26% du total des comptes Twitter analysés.

      Au-delà des débats sur l’origine du terme et sur sa réalité scientifique, l’étude démontre que l’expression “islamo-gauchiste” est essentiellement utilisée pour dénigrer et/ou disqualifier un adversaire. Le néologisme est ainsi “employé dans un contexte d’hostilité entre communautés politiques et non de discours programmatique, prosélyte ou de débat politique. Une analyse plus complète du contenu de ces tweets hostiles montre que les notions les plus associées à ‘islamo-gauchisme’ sont celles de traître, d’ennemi de la République, d’immoralité, de honte, de corruption ainsi que de menace, d’insécurité, de danger, d’alliance avec l’ennemi et bien sûr de compromission avec l’islamisme radical”, énumère David Chavalarias.

      Un phénomène que l’on peut mettre en parallèle avec d’autres méthodes de disqualification prisées sur Twitter, comme celles d’affubler son adversaire politique d’un patronyme oriental pour souligner sa compromission avec l’islamisme.

      “Nous sommes donc sur un terme utilisé pour ostraciser et dénigrer un groupe social particulier tout en en donnant pour l’opinion publique une image anxiogène et associée à un danger imminent. Son utilisation a pour but de polariser l’opinion publique autour de deux camps déclarés incompatibles entre lesquels il faudrait choisir : d’un côté les défenseurs du droit et des valeurs républicaines, de l’autre les traîtres aux valeurs françaises et alliés d’un ennemi sanguinaire”, poursuit le chercheur, soulignant que la communauté politique la plus ciblée à travers ce terme est la France insoumise ainsi que celle de Benoît Hamon et de ses sympathisants.
      Une “exposition inespérée”

      L’étude souligne également que la multiplication des mentions du terme “islamo-gauchisme” sur le réseau social est fortement liée à une pratique bien connue de ceux qui suivent le militantisme en ligne : l’astroturfing. Une méthode prisée par l’extrême droite consistant à multiplier les comptes bidon dans le but d’accroître la visibilité d’une thématique ou d’une fake news.

      “Avoir plus de la moitié de comptes suspendus parmi les plus prolixes sur ‘l’islamo-gauchisme’ est donc une prouesse et un marqueur très significatif de comportements abusifs et malveillants”, souligne l’étude.

      Pour résumer, nous avons affaire à un terme qui est massivement utilisé comme un outil de dénigrement, dont la visibilité a été artificiellement augmentée sur Twitter et qui était jusqu’il y a peu un anathème marginal prisé par l’extrême droite. Or, cela n’a pas empêché le néologisme de se retrouver cité à trois reprises en moins de six mois par un ministre du gouvernement Castex.

      Et c’est en s’appropriant ce vocabulaire que le gouvernement est tombé dans un piège, selon l’étude. Car en l’adoptant et en focalisant l’attention sur le danger “islamo-gauchiste” qui guetterait les universités, le gouvernement a offert à ce terme polarisateur une “exposition inespérée”.

      Pour schématiser l’effet des polémiques sur la masse des messages étudiés, les chercheurs utilisent l’image de “la mer”, décrit comme un “ensemble de comptes qui ne sont pas suffisamment politisés pour être associés à un courant politique particulier mais qui échangent néanmoins des tweets politiques”. Résultat : “les ministres du gouvernement ont réussi à faire en quatre mois ce que l’extrême droite a peiné à faire en plus de quatre années : depuis octobre, le nombre de tweets de “la mer” mentionnant ‘islamo-gauchisme’ est supérieur au nombre total de mentions entre 2016 et octobre 2020”.

      Cette explosion de la visibilité de ce néologisme s’apparente à un jeu “extrêmement dangereux” pour le chercheur, dans la mesure où cette “mer” de comptes s’intéressant au débat public est dorénavant “amenée à problématiser les enjeux politiques à partir des idées de l’extrême droite”. D’autant que la France n’est pas un cas isolé concernant l’entrisme des concepts extrêmes dans le corps social, à l’image du travail de longue haleine abattue par l’alt-right américaine et dont la réalisation la plus emblématique à ce jour s’est concrétisée par l’invasion du Capitole.

      “Il n’y a pas de ‘en même temps’ dans le monde manichéen de l’alt-right qui s’attaque aux personnalités avant de s’attaquer aux idées”, conclut l’étude. Avant de prévenir un gouvernement qui se perçoit comme un rempart contre l’extrême droite : “pour ne pas perdre en terrain ennemi, la meilleure stratégie est de ne pas s’y aventurer”.

      https://www.huffingtonpost.fr/entry/une-etude-du-cnrs-sur-lexpression-islamo-gauchisme-pointe-le-piege-qu

    • Derrière « l’islamo-gauchisme » : les semaines à venir sont celles de tous les dangers

      Don’t feed the troll. Depuis des mois, des collègues bien intentionné·es et un brin condescendant·es soutiennent qu’il ne faut pas faire de publicité aux attaques en « islamo-gauchisme », en « militantisme » et autres « dérives idéologiques » qui fleurissent de toutes parts. « Ne tombez pas dans le piège de députés en mal de notoriété », « ne venez pas perturber avec vos histoires la sérénité de l’examen par le Conseil constitutionnel de la loi de programmation de la recherche », « ne déposez pas de plainte en diffamation », « ne jouez pas à vous faire peur » : il faudrait que, du côté de la rédaction d’Academia, l’on recense tous les bons conseils qu’ont bien voulu prodiguer des collègues, des chef·fes d’établissement et des parlementaires.

      Jusqu’il y a peu, certain·es semblaient même croire que cette stratégie de l’autruche pouvait être tenable. Ils et elles y croient peut-être encore, d’ailleurs, quand on voit à quel point, depuis quelques jours, la ministre Vidal sert de paratonnerre facile à la CPU et au CNRS, alors même que c’est le président de la République, ses principaux ministres, la quasi-intégralité de la droite parlementaire et une bonne partie des député·es de la majorité qui sont désormais convaincu·es que des militant·es grimé·es en scientifiques dévoient le service public de l’enseignement supérieur et de la recherche en « cassant la République en deux ». Nous sommes malheureusement déjà entré·es dans l’étape d’après, désormais, celle dont nous décrivions le processus il y a trois mois à partir de l’expérience de la dissolution du CCIF : ce qui est en jeu ces jours-ci, en effet, ce n’est plus le fait de savoir si des « dérives idéologiques » traversent l’ESR car cela, les principaux titulaires du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif en sont désormais convaincus. La seule chose sur laquelle on hésite encore au sommet de l’État, c’est sur la manière de mettre en forme, sur le plan juridique et administratif, les conséquences à tirer de cette nouvelle conviction partagée.

      Formaliser la défense de « l’université républicaine »

      Dans les couloirs du parlement et dans certains cabinets ministériels, en effet, d’âpres discussions sont en cours pour trouver les « bons » moyens de sauver « l’#universalisme_républicain » dans les universités. C’est à cet aune qu’il faut comprendre les dernières sorties de la ministre : ce qui est notable dans l’intervention de Frédérique Vidal sur CNews, ce n’est pas tant le fait qu’elle légitime de manière abjecte les attaques en « islamogauchisme » que le fait qu’elle ressente le besoin de défendre publiquement un traitement des « dérives idéologiques » dans l’ESR qui soit interne, c’est-à-dire qui se fasse par les instances de l’ESR elles-mêmes. Dans son passage sur CNews, autrement dit, Vidal ne s’adresse pas aux Français·es, ni à la communauté universitaire ; elle sait mieux que quiconque quelles sont les discussions en cours et cherche à peser sur les parlementaires et sur le gouvernement, pour imposer ce qui lui semble être le meilleur compromis entre la prétendue nécessité de sauver l’université des communautarismes et des militantismes qui l’assailliraient, d’une part, et l’obligation de respecter les libertés académiques, d’autre part.

      C’est pour cette raison que nous sommes déjà « à l’étape d’après » : les débats en cours, au sein des pouvoirs exécutif et législatif, ne sont plus désormais que des débats d’ingénierie juridique et administrative. Des débats de forme, autrement dit, car sur le fond, il existe, d’ores et déjà, un accord général sur le fait qu’il faut agir. Il faut agir, pensent-ils ou pensent-elles, car il faut apporter une réponse à « la question urgente des nouvelles formes de censure et d’intolérance qui se sont manifestées ces dernières années, ainsi que, plus largement, des rapports entre valeurs morales, engagement politique et activité scientifique », pour reprendre la formule employée dans un récent communiqué de l’association Qualité de la science française (QSF) qui est particulièrement représentatif de ce qui est devenu, au sein des cercles du pouvoir en France, la représentation très majoritaire des deux plaies qui submergeraient l’ESR, à savoir la censure et, « plus largement », le militantisme.

      Or, si la ministre a jugé utile de défendre publiquement, ces jours-ci, « sa » solution contre les « dérives idéologiques » dans l’ESR, c’est parce qu’elle sait que les discussions à ce propos sont en train de s’emballer. Le moment est charnière, en effet : nous sommes au tout début de l’examen, par le Sénat, du projet de loi confortant le respect des principes de la République – actuellement en commission, puis, à partir de la fin mars, en hémicycle – et la droite, qui y est majoritaire, est tentée d’introduire dans ce texte des dispositions sur l’ESR, comme elle a tenté de le faire à l’Assemblée. Non pas les dispositions grossières qu’ont pu proposer les député·es LR il y a quelques semaines1, mais des dispositions qui s’attaqueraient à ce qu’ils et elles conçoivent comme étant le fond du problème, à savoir – on ne se lasse pas de la formule de QSF – « la question urgente des nouvelles formes de censure et d’intolérance qui se sont manifestées ces dernières années, ainsi que, plus largement, des rapports entre valeurs morales, engagement politique et activité scientifique ».

      Les scenarii possibles

      Ce qui est presque amusant, c’est que pour répondre à une telle « question urgente », tout ce beau monde tâtonne. Juridiquement parlant, en effet, lutter contre les « dérives idéologiques » dans l’ESR est particulièrement complexe à mettre en forme, du fait de la protection constitutionnelle des libertés académiques. Academia a appris, par exemple, que le cabinet de Marlène Schiappa (en novembre dernier), puis les rapporteurs du projet de loi confortant le respect des principes de la République (ces dernières semaines), avaient sollicité Vigilance Universités à propos des mesures à prendre concernant l’ESR, mais que les membres de ce collectif – aujourd’hui débordé·es sur leur droite par l’Observatoire du décolonialisme – ont été incapables de se mettre d’accord sur la moindre proposition légistique concrète.

      Alors, comment va se mettre en forme, sur le plan juridique et administratif, la lutte contre les « dérives idéologiques » à l’université ? Il est peu probable que l’on pénalise certaines recherches et mette en prison les enseignant·es et chercheur·ses qui ne se conformeraient pas à ces interdictions. Il n’y a guère que Xavier-Laurent Salvador pour oser le proposer, il y a quelques jours sur Public Sénat, lorsqu’il comparait les études décoloniales avec le négationnisme pénalement réprimé :

      Les libertés académiques, « ce n’est pas un droit opposable à la loi. Lorsque Faurisson se lançait dans un enseignement négationniste, personne ne s’est posé la question de savoir si, oui ou non, cela relevait de sa liberté académique ».

      Non, les choses se passeront d’une manière un peu plus subtile, si l’on peut dire, et le scénario le plus probable qui se dessine désormais est le suivant, en deux pans : l’organisation d’un déni de la scientificité de certaines recherches et de certains enseignements, pour contrer le « militantisme » ; la mise en place d’un délit pénal spécial, pour contrer les « censures ».

      1) S’agissant du premier pan, la solution qui se prépare consiste non pas à pénaliser des recherches et des enseignements, mais à chercher à les exclure du champ académique, et donc du champ des libertés académiques. Un précédent papier d’Academia décrivait déjà cette dynamique, qui passe par une négation de scientificité, au travers du renvoi de certaines recherches et de certains enseignements au statut d’« opinions » ou d’« idéologies ». C’est très exactement ce que soutient la tribune d’un collectif de 130 universitaires parue dans Le Monde du 22 février :

      « Il y a bel et bien un problème dans l’enceinte universitaire, mais ce n’est pas tant celui de l’« islamo-gauchisme » que celui, plus généralement, du dévoiement militant de l’enseignement et de la recherche », qui produirait une « pseudo-science ».

      Sur ce point, on observe qu’un accord assez large est en train de se forger autour de cette option, qui présente le double avantage de préserver une régulation interne au champ académique – en conformité apparente avec les libertés académiques – tout en donnant un outil pour lutter contre la prétendue « expansion des militantismes dans l’université ». C’est cette stratégie que poursuivait Frédérique Vidal lorsqu’elle a annoncé une « enquête » du CNRS ou de l’Alliance Athena. C’est cette même stratégie que défendent les 130 universitaires de la tribune précitée, lorsqu’ils et elles en appellent au Hcéres pour lutter contre « la contamination du savoir par le militantisme ».

      L’idée de recourir au Hcéres est la plus inquiétante, car elle vient vérifier toutes les craintes que l’on pouvait avoir concernant l’usage politique croissant qui risque d’être fait de cette autorité, dont la majorité des membres, rappelons-le, est nommée par le pouvoir exécutif hors de toute proposition émanant des organismes de l’ESR (12 membres sur 23, auxquel·les il faut ajouter les deux représentants parlementaires). Il aura donc suffi de quelques mois après la nomination du conseiller d’Emmanuel Macron à la tête de cette autorité pour que nous arrivions déjà à une croisée de chemins : dès lors que les libertés académiques offrent aux enseignant·es et aux chercheur·ses une protection constitutionnelle – aussi imparfaite soit-elle – contre les immixtions extérieures, le HCERES se trouve structurellement condamné à être le réceptacle de toutes les pressions politiques sur les recherches et les enseignements menés. C’est la raison pour laquelle, rappelons-le aussi, la nomination de Thierry Coulhon représentait – et représente encore – la mère de toutes les batailles, justifiant le dépôt, début janvier, d’un recours en annulation devant le Conseil d’État, à propos duquel Academia fera prochainement un point d’étape.

      2) Ceci dit, à côté de cette instrumentalisation administrative des critères de la scientificité, il existe encore et toujours une vraie tentation d’investir le terrain pénal. À partir du moment où les titulaires des pouvoirs exécutif et législatif sont persuadés que l’ESR produit de la « censure », à partir du moment où une député de la majorité peut raconter en hémicycle, sans être démentie par quiconque, que « les partisans des thèses indigénistes, sur l’intersectionnalité » (?) « excluent tout autre débat » et que « c’est leur intolérance et une forme de totalitarisme intellectuel qu’il nous faut combattre » (Anne-Christine Lang, 3 février 2021), alors il est inévitable qu’un équivalent de l’amendement Lafon ou de l’amendement Benassaya soit de nouveau mis sur le tapis un de ces prochains jours.

      Car qui peut être pour les entraves aux débats universitaires ? Qui pourrait s’opposer à la pénalisation des entraves à l’exercice des missions de services public de l’enseignement supérieur ? On a déjà répondu plusieurs fois à ces questions sur Academia, encore récemment, si bien qu’on ne reviendra pas ici, une fois encore, sur les dangers immenses qui accompagnent les tentatives de ce type. Rappelons simplement, à titre général, que les deux tentatives ces quatre derniers mois d’introduire un délit nouveau en ce sens sont caractéristiques d’une véritable surenchère sécuritaire en cours, telle qu’on l’a connue dans d’autres domaines, mais qui, appliquée à l’université, se retournera contre les étudiantes et les étudiants en premier lieu, mais aussi contre l’université en général et contre les libertés académiques. C’est bien simple : le débat universitaire n’a en réalité pas besoin d’être protégé par un durcissement de l’arsenal répressif qui prétend faussement venir à son soutien, car les risques qui y sont associés sont bien supérieurs aux dangers auxquels il prétend répondre.

      De ce point de vue, d’ailleurs, il faut être bien aveugle à tout ce qui se joue aujourd’hui sur les terrains juridique et administratif, pour juger qu’il est opportun de comparer les atteintes aux libertés académiques actuellement en préparation, d’une part, avec la polémique qui a accompagné, sur les réseaux sociaux, la parution de l’essai Race et sciences sociales de Stéphane Beaud et Gérard Noiriel, d’autre part. Soutenir, comme le font d’excellent·es collègues dans une tribune publiée hier, que « beaucoup de chercheurs, a fortiori lorsqu’ils sont précaires, ont désormais peur de s’exprimer dans un débat où l’intensité de l’engagement se mesure à la véhémence de la critique et où l’attaque ad hominem tient lieu d’argument », et qualifier cette polémique de « menaces » pour les libertés académiques au même titre que toutes celles qui sont vraiment en cours, c’est alimenter directement le sentiment irrationnel d’insécurité concernant les débats dans l’ESR aujourd’hui. Et le faire dans le contexte législatif actuel, à quelques jours des débats sur le projet de loi confortant le respect des principes républicains, c’est proprement irresponsable : certain·s, au gouvernement et au parlement, n’attendent que cela pour en tirer des conséquences juridiques.

      https://academia.hypotheses.org/31344

    • Démission de Frédérique Vidal : la pression monte !
      https://universiteouverte.org/2021/02/24/demission-de-frederique-vidal-la-pression-monte

      "Nous en sommes là !!

      Libé met en Une la tribune de « Vigilance Université », collectif réactionnaire ami de « l’observatoire du décolonialisme », qui prétend que nous refuserions le « débat scientifique contradictoire » ! 1/10..."
      https://twitter.com/UnivOuverte/status/1364890298694983681

      " L’air de rien, les universalistes ont mis de l’eau dans leur vin, donnant raison à leurs critiques. Plus d’accusations sordides d’islamogauchisme, retour à la dénonciation d’une « cancel culture » fantasmée, qui permet de poser à la défense des libertés académiques …"

    • Une vague de pyromanie

      Une nouvelle polémique vient de naître chez nos voisins français, lancée dimanche sur CNews, la Foxnews hexagonale. L’islamo-gauchisme gangrène-t-il les universités ? Oui, estime la ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche qui entend confier au CNRS (!) une enquête sur la question. Mardi, à l’Assemblée, elle pointait aussi du doigt les études postcoloniales.

      La réponse a été cinglante : les présidents des universités réunis ont appelé la ministre à laisser l’islamo-gauchisme, cette « pseudo-notion », « aux animateurs de CNews » ou « à l’extrême droite qui l’a popularisée », tandis que le CNRS dénonçait « les tentatives de #délégitimation de différents champs de la recherche, comme les études intersectionnelles ou les travaux sur le terme de ‘race’ ».

      Tentative de #diversion d’une ministre peu présente sur les difficultés du corps enseignant en temps de pandémie ou celles des étudiant·e·s faisant entendre leur précarité fin janvier à Paris ? Forme de chasse aux sorcières, plutôt, nourrie à la fois par le contexte d’adoption de la loi sur le séparatisme et une présidentielle approchant à grands pas. On sait combien les chercheurs sur l’islam sont observés à la loupe, en particulier quand ils ne sont pas Gilles Kepel mais Olivier Roy ou François Burgat. Combien l’islamo-gauchisme est devenu soupçonnable – de collusion avec l’ennemi, l’islamisme radical – au point qu’un sociologue dénonce un « #néo-maccarthysme ».

      Citoyen·nes, député·es, associations : jusqu’ici, cette production sémantique aléatoire a servi à disqualifier (la gauche de) la gauche préoccupée de discriminations. Avec l’intervention de la ministre, elle étend son territoire à la recherche, qui régulièrement produit des analyses (sur les rapports sociaux de pouvoir, l’égalité des chances, la mémoire historique) contrant les puissantes manœuvres néolibérales destinées à défaire les fondements humanistes de notre démocratie. Et, à l’ère des fake news triomphantes, qui fournit des moyens de #résistance_intellectuelle. La suspicion exprimée par sa propre ministre de tutelle est de taille à ébranler profondément ceux-ci.

      Lors de leur récent face-à-face, Gérald Darmanin qualifiait Marine Le Pen de « molle » face au « péril islamique ». L’enjeu n’est donc pas seulement culturel, il est aussi politique : le « ni de droite ni de gauche » macronien de 2017 a vécu, et c’est la carte identitaire qui sera brandie pour la présidentielle de 2022. Quitte à prendre cinq millions de musulmans en tenailles d’une rhétorique boute-feu.

      https://lecourrier.ch/2021/02/18/une-vague-de-pyromanie

    • If You Thought the Culture War in the US and UK Was Dumb, Check Out France’s

      French politicians are proudly using a new term – originally coined by the far-right – to paint left-wing academics as sympathetic to Islamist terrorists.

      On the 17th of October, the day after French school teacher Samuel Paty was beheaded outside his school, threats from France’s far-right began to rain down on liberal academics across the country.

      Éric Fassin — a professor of sociology at the University of Paris 8 who had written a blog arguing the reaction to terror attacks “must at all costs avoid falling into their trap” of becoming a “conflict of civilisations” — became a lightning rod for their anger.

      “Traitor” wrote one far-right supporter on Twitter; “collaborator” added another. But one individual known in the neo-Nazi scene struck a more chilling tone with an overt death threat: “I’ve put you on my list of assholes to decapitate when it begins”.

      Fassin is among a group of French academics that supposedly embody the concept of “Islamo-gauchisme” (Islamo-leftism), a term suggesting an alliance between extremist Islamists and left-wing academics that had until recently only been used in neo-Nazi circles. The insult is levelled at those whose so-called “woke” theories point out the discrimination suffered by Muslims in France, where deep-set discrimination touches hiring, housing, policing and beyond — paralleling culture wars currently raging in the US and the UK.

      The term has found its way into the lexicon of prominent members of the French government. “Islamo-gauchisme is an ideology which, from time to time, leads to the worst,” Education Minister Jean-Michel Blanquer told French radio station Europe 1. Then Gérarld Darmanin, France’s right-leaning Minister of the Interior, used the term in the National Assembly, referring to “intellectual accomplices” in terrorist acts.

      On Sunday, events took a dramatic turn. Frédérique Vidal, the University Minister, went on TV channel CNews and denounced how Islamo-gauchisme “plagues society as a whole” and pledged to launch an investigation into academic research considered in breach, particularly postcolonial studies.

      “They are in the minority and some do it to carry radical ideas or militant ideas … always looking at everything through the prism of their desire to divide, to fracture,” she said, likening it to an alliance between Mao Zedong and Ayatollah Khomeini.

      The comments have sparked outrage. On Tuesday, France’s Conference of University Presidents called for the debate “to be elevated” and that the government should not talk “nonsense.” On Wednesday, the French National Centre for Scientific Research, who Vidal said should carry out the investigation, criticised the “political exploitation that is... emblematic of a regrettable instrumentalisation of science.” On Thursday, daily newspaper Libération dedicated its front page to the debacle, quipping that Vidal had “lost her faculties”.

      However, for Fassin, and numerous other academics across France, the efforts to target them are cause for serious concern and could pose a very real danger. “This is very worrying,” he told VICE World News. “This is a political attempt to control knowledge. One imagines that it will not succeed, but the effect sought is intimidation. Above all, it helps to justify repression.”

      Frédéric Sawicki, professor of political science at Paris 1 University Panthéon-Sorbonne, said he felt “targeted” by the move. “If you declare yourself hostile to the ban on the wearing of the veil or to the organisation of a mandatory minute of silence in schools after a terrorist attack,” he said. “You are therefore an accomplice and as a consequence, you become an ‘Islamo-left-winger’!”

      “I am outraged,” he added. “The French Republic, except during the period of the Vichy regime, has always protected academic freedom. The Minister should protect this freedom at the foundation of any democracy.”

      Eyebrows have also been raised at the timing of the move by Vidal, with protests in response to the widespread problem of sexual assault on campus and huge numbers of students forced into financial uncertainty during the pandemic – leading to snaking queues for the subsidised university canteens.

      “The minister’s words are just a political diversion to make us forget her catastrophic management of higher education and research,” said Léon Thébault, a student at SciencesPo University Paris. “If Frédérique Vidal put as much energy into fighting these problems as she does into the media show, we wouldn’t have any more students living in precarity. She is out of touch with universities and students.”

      Michel Deneken, president of the University of Strasbourg, said the underlying motives behind Vidal’s announcement are purely political. “The regional and presidential elections are on the horizon,” he said. “The government is using this as a way to capture the support of the right. [Right-wing daily newspaper] Le Figaro writes every day about Islamo-gauchisme every day now.”

      French Muslim campaign groups express little doubt that it is an attempt to flirt with the far-right. “One has the impression that every week they want to find a new reason to talk about Islam,” said Sefen Guez Guez, a lawyer for the Collective Against Islamophobia in France (CCIF).

      But the French government’s crackdown on campuses also extends to legislation to limit research that is deemed unacceptable. The Senate last month adopted a bill setting the research budget for French universities, and while it is yet to pass through the National Assembly, critics say will curtail student protests and put freedom of research at stake by requiring it to “align with the values of the republic.”

      Rim-Sarah Alouane, a French legal academic and PhD candidate in comparative law at the University Toulouse Capitole, said “the vast majority of people working in academia are shocked and terrified for the future of research in this country”. She added that French academia has been “falling apart” due to budget cuts and lack of recruitment.

      For Alouane, it’s the latest in a long line of tightening of civil freedoms, including the controversial separatism law – aimed at tackling the Islamist terrorism that has grown since 2015 but labelled Islamophobic by rights groups – that was passed by the National Assembly, and the Global Security law, which at the end of last year proposed banning the filming of police, despite several high-profile cases of police violence.

      “You need to integrate this kind of announcement into a broader scope which is the hyper securitisation of our society, that is processed by limiting civil liberties on the ground of national security and public order,” she said.

      It comes as part of a wider reckoning in France, with “woke” leftist theories on race, gender and post-colonialism said to be imported from the US and the UK the target of the government’s ire. “There’s a battle to wage against an intellectual matrix from American universities,’’ Blanquer said in October.

      Philippe Marlière, professor of French and European Politics at University College London, says that those Anglophone countries are themselves facing battles over freedom of speech, “wokeness” and so-called “cancel culture” at universities.

      “I think that there’s a bit of a deja-vu with what’s happening in the UK,” he said. “But the French situation is far worse. In the UK, the attacks remain quite implicit, but in France the government is trying to taint the personalities and reputations of academics. These are highly dangerous means that is the usual approach of the far right.”

      Marlière, who has himself been the target of far-right attacks – including in a recent article claiming he “has not ceased to work to promote racialist ideology” – warns there could be serious repercussions for this approach.

      “France is in complete denial when it comes to race,” he said. “Islamo-gauchisme is of course an insult. It’s almost a physical aggression because you put people at risk. What is remarkable is that it’s becoming more mainstream.”

      The Ministry of Higher Education, Research and Innovation did not respond to a request for comment. But government spokesman Gabriel Attal said on Wednesday that French President Emmanuel Macron has “an absolute attachment to the independence of teacher-researchers.”

      https://www.vice.com/en/article/jgq9m4/if-you-thought-the-culture-war-in-the-us-and-uk-was-dumb-check-out-frances

    • Aux sources de l’« islamo-gauchisme »

      Le philosophe #Pierre-André_Taguieff revient sur les origines d’un concept qu’il a contribué à forger. Selon lui, les usages polémiques discutables du terme ne doivent pas empêcher de reconnaître qu’il désigne un véritable problème : la #collusion entre des groupes d’extrême gauche et des #mouvances_islamistes de diverses orientations.

      En France, à entendre les clameurs qui montent de l’arène politico-médiatique, le nouveau grand clivage serait celui qui oppose les « islamo-gauchistes » aux « islamophobes ». Cependant, rares sont ceux qui s’assument soit en tant qu’« islamo-gauchistes », soit en tant qu’« islamophobes », sauf par provocation. L’« islamophobe » ou l’« islamo-gauchiste », c’est toujours l’autre. Ces termes d’usage polémique sont des hétéro-désignations. Mais il serait naïf de reprocher à des termes politiques d’être polémiques. En les employant, on vise à stigmatiser un individu ou un groupe, pour de bonnes ou de mauvaises raisons.

      Face aux « islamophobes » se tiendraient donc les « islamo-gauchistes », censés être islamophiles. Mais l’opposition est faussement claire. Il y a en effet de très nombreux citoyens français, de droite et de gauche, qui considèrent que l’islamisme, sous toutes ses formes, constitue une grave menace pour la cohésion nationale et l’exercice de nos libertés. Peuvent-ils être déclarés « islamophobes » ? C’est là, à l’évidence, un abus de langage et une confusion entretenue stratégiquement par les islamistes eux-mêmes. Ils sont en vérité « islamismophobes », et ils ont d’excellentes raisons de l’être, au vu des massacres commis par les jihadistes, du séparatisme prôné par les salafistes et des stratégies de conquête des Frères musulmans. Mais ils n’ont rien contre l’islam en tant que religion, susceptible d’être critiquée au même titre que toute religion. Quant aux « islamismophiles » d’extrême gauche, ils sont de deux types : il y a d’abord ceux qui, sur les réseaux sociaux, applaudissent les attaques jihadistes, ensuite ceux qui, intellectuels ou acteurs politiques, s’efforcent de justifier le comportement des islamistes en arguant que ces derniers ne font que réagir aux discriminations dont sont victimes les musulmans.

      À lire aussiEn finir avec l’« islamo-gauchisme » ?

      Il est de bonne méthode de revenir au moment de la formation de l’expression « islamo-gauchisme » en langue française. Il se trouve que, sur la question, j’ai joué un rôle, ce qui me permet d’intervenir en tant que témoin direct. C’est à partir de mes enquêtes, au début des années 2000 alors que débutait la seconde Intifada, sur des manifestations dites propalestiniennes où des activistes du Hamas, du Jihad islamique et du Hezbollah côtoyaient des militants gauchistes, notamment ceux de la LCR (devenue en 2009 le NPA), que j’ai commencé à employer l’expression « islamo-gauchisme », forgée par mes soins. Au cours de ces mobilisations, les « Allahou akbar » qui fusaient ne gênaient nullement les militants gauchistes présents, pas plus que les appels à la destruction d’Israël sur l’air de « sionistes = nazis ».
      Valeur descriptive

      L’expression « islamo-gauchisme » avait sous ma plume une valeur strictement descriptive, désignant une alliance militante de fait entre des milieux islamistes et des milieux d’extrême gauche, au nom de la cause palestinienne, érigée en nouvelle cause universelle. Elle intervenait dans ce qu’on appelle des « énoncés protocolaires » en logique. J’ai utilisé l’expression dans diverses conférences prononcées en 2002, ainsi que dans des articles portant sur ce que j’ai appelé la « nouvelle judéophobie », fondée sur un antisionisme radical dont l’objectif est l’élimination de l’Etat juif. Pour ne prendre qu’un exemple, dans mon article synthétique intitulé « L’émergence d’une judéophobie planétaire : islamisme, anti-impérialisme, antisionisme », publié dans la revue Outre-Terre, j’évoque la « mouvance islamo-gauchiste » en cours de formation.

      Il faut par ailleurs être d’une insigne mauvaise foi pour laisser entendre, comme le font certains aujourd’hui sur les réseaux sociaux, que je voulais par là assimiler insidieusement islam et islamisme, alors que tous mes écrits sur la question témoignent du contraire. Je n’allais pas forger, pour éviter de donner prise aux lectures malveillantes, une expression juste mais un peu lourde du type « islamismo-gauchisme », qui n’aurait d’ailleurs pas empêché des gens de mauvaise foi de s’indigner.
      « Judéo-bolchevisme »

      Que, mise à toutes les sauces, l’expression ait eu par la suite la fortune que l’on sait, je n’en suis pas responsable. Mais ses usages polémiques discutables ne doivent pas empêcher de reconnaître qu’elle désigne un véritable problème, qu’on peut ainsi formuler : comment expliquer et comprendre le dynamisme, depuis une trentaine d’années, des différentes formes prises par l’alliance ou la collusion entre des groupes d’extrême gauche se réclamant du marxisme (ou plutôt d’un marxisme) et des mouvances islamistes de diverses orientations (Frères musulmans, salafistes, jihadistes) ? Pourquoi cette imprégnation islamiste des mobilisations « révolutionnaires » ?

      Ecartons pour finir un argument fallacieux, souvent repris sur les réseaux sociaux, qui consiste à rapprocher, pour la disqualifier, l’expression « islamo-gauchisme » de l’expression « judéo-bolchevisme ». Lorsqu’elle s’est diffusée, au début des années 20, dans certains milieux anticommunistes et antisémites, l’expression « judéo-bolchevisme » signifiait que le bolchevisme était un phénomène juif et que les bolcheviks étaient en fait des Juifs (ou des « enjuivés »). Il n’en va pas du tout de même avec l’expression « islamo-gauchisme », qui ne signifie pas que le gauchisme est un phénomène musulman ni que les gauchistes sont en fait des islamistes. L’expression ne fait qu’enregistrer un ensemble de phénomènes observables, qui autorisent à rapprocher gauchistes et islamistes : des alliances stratégiques, des convergences idéologiques, des ennemis communs, des visées révolutionnaires partagées, etc.

      C’est ainsi qu’on observe, d’une part, que des militants marxistes-léninistes passés au terrorisme, tel Carlos, se sont rapprochés des milieux islamistes, jusqu’à se convertir à l’islam en version Al-Qaïda et à prôner un front islamo-révolutionnaire « contre les Juifs et les croisés ». Et que, d’autre part, des islamistes se sont ralliés au drapeau du tiers-mondisme, puis à celui de l’altermondialisme (tel Tariq Ramadan), avant de donner dans le postcolonialisme et le décolonialisme pour accuser les sociétés démocratiques occidentales de « racisme systémique ». C’est ainsi qu’un pseudo-antiracisme importé des campus étatsuniens, représentant une nouvelle forme de racialisme militant désignant « les blancs » comme les seuls racistes, est devenu à la fois un moyen d’intimidation et un puissant instrument de mobilisation, principalement d’une partie de la jeunesse.

      Les querelles de mots ne doivent pas nous empêcher de voir la dure réalité, surtout lorsqu’elle contredit nos attentes ou heurte nos partis pris.

      https://www.liberation.fr/debats/2020/10/26/aux-sources-de-l-islamo-gauchisme_1803530

    • Une quatrième raison de la nécessaire démission de Frédérique Vidal

      Dans la course à l’échalote identitaire qui met désormais en compétition le Rassemblement national, Les Républicains et La République en marche l’extrême-droite ne pouvait pas rester à la traîne. Sur l’un de ses sites un individu livre donc à la vindicte publique « 600 gauchistes complices de l’islam radicale qui pourrissent l’Université et la France ».

      Aux trois raisons qui d’emblée rendaient nécessaire la démission de Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, à la suite de ses déclarations sur CNews et dans le Journal du Dimanche et de sa décision de demander au CNRS d’enquêter sur la présence de l’ « islamo-gauchisme » au sein de l’Université, s’en ajoute maintenant une quatrième.

      Comme il fallait s’y attendre de premières listes de dénonciation circulent. Julien Aubert, député LR du Vaucluse, en avait pris l’initiative dès l’automne en stigmatisant nominativement des universitaires.

      Dans la course à l’échalote identitaire qui met désormais en compétition le Rassemblement national, Les Républicains et La République en marche l’extrême-droite ne pouvait pas rester à la traîne. Sur l’un de ses sites un individu livre donc à la vindicte publique « 600 gauchistes complices de l’islam radicale (sic) qui pourrissent l’Université et la France ».

      Il ne s’agit de nuls autres que les signataires de la pétition publiée par Le Monde et demandant la démission de la ministre. Tant qu’à faire il eût été plus honnête de parler des 17 000 « gauchistes complices de l’islam radicale, etc. » puisque la pétition a aujourd’hui recueilli ce nombre de signataires – et ceux-ci continuent d’affluer.

      La lecture de cette liste de « gauchistes complices de l’islam radicale, etc. » est en elle-même assez comique. S’y retrouvent pêle-mêle des universitaires dont la plupart n’ont jamais écrit une ligne sur l’islam, la décolonialité, les genres ou je ne sais quelle autre phobie du bloc identitaire dont se réclame désormais sans fard la macronie, mais protestent tout simplement contre l’atteinte ministérielle à la liberté académique. Il y a en elle un côté inventaire à la Prévert désopilant quand on connaît les personnes mises en cause.

      Une fois de plus il se vérifie que les obsédés de l’ « islamo-gauchisme » et autres fadaises identitaristes parlent de choses qu’ils ne connaissent précisément pas ni ne comprennent.

      C’est par exemple ce qui les a amenés à auditionner à l’Assemblée nationale, le 1er mars, Bernard Lugan, enseignant à l’Université nationale du Rwanda de 1972 à 1983, puis à l’Université Lyon-III de 1984 à 2009, négationniste du caractère prémédité du génocide des Tutsi en 1994, polygraphe apprécié de Saint-Cyr et des nostalgiques de l’apartheid pour son insistance sur l’explication ethniciste du politique en Afrique à défaut de l’être par la corporation des historiens africanistes patentés, pour qu’il livre son expertise sur… l’opération Barkhane, en dépit de son ignorance complète du Sahel.

      Alors que l’Université et le CNRS abritent, à défaut d’ « islamo-gauchistes », nombre d’excellents spécialistes de la région, toutes disciplines, toutes générations et, horresco referens, tous genres confondus, dont le député France insoumise Bastien Lachaud s’est fait un malin plaisir de rappeler quelques noms à la présidente de la commission de la Défense nationale et des forces armées.

      Nous en sommes là.

      L’#idéologisation du savoir vient bel et bien du gouvernement, à l’initiative du président de la République lui-même, dans le cadre de la stratégie de sa réélection en 2022, comme le soulignent un nombre croissant d’observateurs de la vie politique française. J’avais moi-même parlé de maccarthysme après les déclarations de Jean-Michel Blanquer, dans ma tribune du Monde du 31 octobre.

      Au train où nous allons il faudra bientôt parler de lyssenkisme.

      Quoi qu’il en soit, Frédérique Vidal, déjà désavouée par la Conférence des présidents d’Université, l’alliance Athéna et la direction du CNRS à la suite de ses déclarations délibérées et destinées à complaire à son maître présidentiel, va devoir désormais exercer sa tutelle ubuesque sur des institutions qui vont accorder (on ne peut imaginer qu’elles se dérobent) leur protection fonctionnelle à une partie de leur personnel livrée à la haine en ligne, au harcèlement moral, voire – qu’à Dieu ne plaise – à des agressions physiques commises par quelque tête brûlée, à la suite des déclarations irresponsables qu’elle a elle-même faites et réitérées.

      Choisira-t-elle d’attendre qu’un quelconque groupe Charles Martel casse la gueule de Christelle Rabier, Sophie Wanich, Eric Fassin, Samuel Hayat et autres « islamo-gauchistes » pour qu’elle tire les conséquences de son cynisme électoral ?

      Ce gouvernement commence à sérieusement puer les années trente…

      https://blogs.mediapart.fr/jean-francois-bayart/blog/030321/une-quatrieme-raison-de-la-necessaire-demission-de-frederique-vidal

    • Islamo-gauchisme : « Nous ne pouvons manquer de souligner la résonance avec les plus sombres moments de l’histoire française »

      Près de 200 universitaires du monde anglophone, parmi lesquels #Arjun_Appadurai, #Judith_Butler, #Frederick_Cooper et #Ann_Stoler, et plusieurs organisations universitaires dénoncent la « chasse aux sorcières » menée par la ministre Frédérique Vidal.

      –-

      Nous écrivons pour exprimer notre profonde consternation devant la récente requête de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Frédérique Vidal, demandant au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) de diligenter une enquête sur les agissements « islamo-gauchistes » dans les universités françaises.

      Nous regrettons qu’après le passage par le gouvernement français d’une loi sur le « séparatisme » ayant déjà accentué la stigmatisation de musulmans en France, ce soit désormais aux universitaires d’être accusés de polariser les débats publics. L’idée que l’on puisse surveiller des enseignants-chercheurs sous prétexte du « dévoiement militant de la recherche » est dans les faits une menace directe de censure qui nous inquiète à plus d’un titre.

      Tout d’abord, l’Etat n’a ni le droit ni la compétence pour censurer les travaux d’universitaires qui s’appuient sur leur expertise pour contribuer à l’avancée du savoir dans nos sociétés. C’est un précédent dangereux qui ne saurait être toléré dans une société démocratique.
      Fanon, Sartre, Bourdieu…

      L’argument selon lequel des universitaires, soi-disant « islamo-gauchistes », risquent de diviser la société est dans les faits un effort visant à diffamer nos collègues. Cette #attaque est de surcroît justifiée au nom de la protection de la République face à l’alliance supposée entre une partie de la gauche et un groupe religieux.

      Nous ne pouvons manquer de souligner la résonance avec les plus sombres moments de l’histoire française, et notamment avec un discours attaquant les « judéo-bolcheviques » qui déjà servait à créer l’#amalgame entre engagements politiques et religieux.

      Par ailleurs, les approches actuellement sous le feu de la critique ont été directement inspirées par quelques-unes des plus brillantes figures de la tradition philosophique, littéraire et sociologique française. En tant que chercheurs travaillant aux États-Unis et ailleurs, nous sommes redevables intellectuellement envers la France pour avoir contribué par ses universités à l’émergence de penseurs tels que #Frantz_Fanon, #Albert_Memmi, #Hélène_Cixous, #Aimé_Césaire, #Paulette_Nardal, #Jean-Paul_Sartre, #Pierre_Bourdieu, #Louis_Althusser, #Jacques_Derrida et #Michel_Foucault.

      La plupart de ces figures n’étaient pas seulement des penseurs, mais aussi des individus impliqués dans des #luttes_politiques prolongées pour rendre nos sociétés meilleures. Ces #intellectuels_engagés sont devenus les piliers des diverses approches qui sont désormais attaquées sous le nom de « #post-colonialisme. »

      Censure

      Qu’un pays qui a tant contribué à faire avancer la #pensée_critique tourne ainsi le dos à son #patrimoine_national n’est pas seulement alarmant, c’est aussi dénué de vision à long terme. Nous ne demandons pas que tout le monde embrasse ces approches et reconnaisse leurs mérites, mais simplement que les universitaires français puissent en débattre et les partager avec leurs étudiants, si tel est leur bon vouloir.

      Enfin, ceux qui gouvernent l’enseignement supérieur feraient mieux de chercher des solutions concrètes au problème de la #discrimination_raciale en France, plutôt que de se lancer dans une chasse aux sorcières contre des chercheurs. Las, plutôt que de soutenir des universitaires afin de faire avancer la lutte commune pour l’égalité, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche les menace de censure.

      Plutôt que de répondre à la souffrance des étudiants dans un contexte de pandémie globale, ou aux problèmes économiques auxquels est confrontée l’éducation publique, Frédérique Vidal et ses collègues désignent des enseignants comme la principale #menace pesant sur les universités françaises.

      De nombreux signataires de la présente tribune ont bénéficié de leurs échanges prolongés avec des universités françaises, que ce soit avec des individus ou au niveau institutionnel. Nous souhaitons que cette collaboration avec nos collègues français se poursuive dans un esprit de débat ouvert et libre. C’est pourquoi nous attirons à nouveau votre attention sur les graves #dangers que ces menaces de censure font peser sur la #liberté_académique.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/03/04/islamo-gauchisme-nous-ne-pouvons-manquer-de-souligner-la-resonance-avec-les-

      –—

      Liste des signataires :
      https://docs.google.com/document/d/1sAvvdgTRQgx-L5XaiX2e8g76Y1hjJkxDeBRudgq3Lrg/edit

    • L’université menacée par « l’islamo-gauchisme » ? Une cabale médiatique bien rodée

      Problème public numéro un à l’université ? Depuis les déclarations de la ministre Frédérique Vidal face à Jean-Pierre Elkabbach autour des « universités en proie à "l’islamo-gauchisme" » (un des thèmes de « l’interview-tribune » de CNews), et ses velléités de commander une enquête sur le prétendu phénomène dans les facultés françaises, le sujet est traité partout dans les grands médias. Enième illustration de la capacité de ces derniers à co-construire un problème public en grossissant et déformant les faits convoqués en plus de balayer les positions du CNRS d’un revers de main, l’épisode nous invite à nous repencher sur une précédente séquence, ayant largement labouré le terrain de la cabale politico-médiatique actuelle : le « Manifeste des 100 » publié dans Le Monde en octobre 2020, et pour ce qui concerne Acrimed, ses dites « preuves à l’appui », composées majoritairement d’articles de presse.

      « Comment l’islamo-gauchisme gangrène les universités » (Une du Figaro, 12/02), « alliance entre Mao Tsé-Toung et l’ayatollah Khomeini » (Jean-Pierre Elkabbach, CNews, 14/02), « peste intersectionnelle qui ronge les facs » (Raphaël Enthoven, Twitter, 16/02), « Nos facs sont-elles gangrénées par l’islamo-gauchisme ? » (« Grandes gueules, RMC, 17/02), « Islamisme à l’université : faut-il confier l’enquête au principal suspect ? » (Le Point, 17/02), « "Islamo-gauchisme" à l’université : comment Frédérique Vidal s’est piégée » (L’Express, 19/02), « Islamo-gauchisme : la ministre persiste » (en Une du JDD, 21/02), « Islamo-gauchisme dans les universités : "Il n’y a pas lieu de faire de polémique", selon Vidal » (en interview chez RTL, 22/02), « Islamo-gauchisme : il faut sauver la soldate Vidal » proclame Franz-Olivier Giesbert qui parle lui de « totalitarisme » (Le Point, 25/02), « Universités : les nouveaux fanatiques » (LCI, 27/02)… Une nouvelle séquence de chasse aux sorcières médiatique, coproduite avec une partie de la classe politique et du gouvernement (ministre de l’Enseignement supérieur en tête), s’est déroulée en ce mois de février 2021 sur les plateaux des chaînes d’info, dans les pages de certains quotidiens nationaux et d’une grande partie de la presse magazine, en passant par les comptes Twitter des éditocrates, gagnant une nouvelle fois l’ensemble du paysage médiatique.

      Si tous les médias ne versent pas dans le même degré d’outrances, et si certains (rares) ont même (enfin) l’idée d’inviter des chercheurs jusqu’alors inaudibles dans l’espace du débat autorisé, le sujet de « l’islamo-gauchisme » – et de sa prétendue omniprésence dans les universités françaises – occupe bel et bien le haut de l’agenda. La mécanique est alimentée par d’innombrables dépêches AFP, occupées à titrer sur la moindre « petite phrase » de responsable politique, par d’intarissables « débats » et par de multiples interviews, conduites par d’infatigables journalistes tribuns… sans compter les tribunes et pseudo « enquêtes », en passant par les instituts de sondage, qui ne résistent pas à entretenir la machine médiatique (savamment sollicités par les médias eux-mêmes) en fabriquant l’opinion qu’ils prétendent sonder [1].

      Les émissions de service public n’y coupent pas non plus : « Islamo-gauchisme : entre opportunisme politique et débat scientifique » titre la matinale de France Culture (23/02), « Enquête ouverte sur "l’islamo-gauchisme" à la fac » annonce « C à vous » (France 5, 17/02) dans une discussion avec… Gérald Darmanin ; « Islamo-gauchisme : fantasme ou réelle menace politique ? » demande encore « C ce soir » (France 5, 17/02) ; « Islamo-gauchisme : la polémique » titre à son tour « C l’hebdo » (20/02), « Islamo-gauchisme à l’université : fantasme ou réalité ? » radotent « Les Informés » (France Info, 18/02), « Islamo-gauchisme : Frédérique Vidal s’invite au cœur du débat politique » ose le 20h de France 2 (21/02). Revenant sur les propos de la ministre, France Inter en fait même son « mot de la semaine » (21/02), dont le « décryptage » est confié au fin analyste et expert Renaud Dély, éditorialiste sur France Info et Arte [2]. Et le 26 février, à peine deux minutes avant la fin de l’interview matinale, Nicolas Demorand (France Inter) demande à Gabriel Attal, porte-parole de LREM, s’il « estime que "l’islamo-gauchisme" gangrène l’université […], oui, non ? »

      Pendant ce temps, les problèmes structurels qui frappent de plein fouet l’université (manque de moyens et des postes pérennes, précarité voire détresse économique et morale des étudiants, etc.) sont relégués au second plan dans les grands médias, les angles morts révélés par ce genre d’obsessions éditoriales se multipliant. La loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR) par exemple, menée par le gouvernement actuel et encore combattue par « 114 universités et écoles, 330 labos, 30 collectifs de précaires, 157 revues, 16 sociétés savantes, 47 séminaires, 39 sections CNU et 11 sections CoNRS, 54 évaluateur·trices de l’HCERES… » [3], reste ainsi plus que jamais « d’actualité » dans les faits, quoique négligée et traitée de manière superficielle par une grande partie des médias dominants. Car rien n’y fait : déformant ou hypertrophiant certains "faits" d’actualité encore plus que d’ordinaire, la focale médiatique construit « l’islamo-gauchisme à l’université » et les théories intersectionnelles ou décoloniales comme un problème public de premier plan. Ainsi Le Figaro peut-il se fendre de trois Unes sur le sujet entre le 12 et le 26 février, et Le Point y consacrer pas moins de trois éditoriaux dans son numéro du 25 février, dont celui de BHL qui a tranché du haut de sa superbe : « Un spectre hante les universités et que ce soit celui de l’islamo-gauchisme n’est pas douteux. Que les universités […] ne puissent elles-mêmes s’y dérober et devenir je ne sais quels territoires perdus de la pensée critique me semble également l’évidence. »

      Un terrain médiatique labouré de longue date : le cas du « Manifeste des 100 »

      Il faut dire que ce discours contre l’université française (et les études post-coloniales en particulier) a gagné en amplitude depuis l’assassinat de Samuel Paty. En octobre 2020 s’étaient en effet déjà multipliés les tribunes alarmistes, les éditos survoltés et les Unes tapageuses. Et depuis, les stars de l’info n’ont de cesse d’entretenir le même climat anxiogène à coups de questions désinformées, comme ce 1er février où Léa Salamé interrogeait Gérald Darmanin :

      Si on parle de ce qui se passe dans nos universités françaises, ces idées racialistes, indigénistes, qui viennent des campus américains, cette idéologie... idée différentialiste, aujourd’hui, elle n’a pas gagné selon vous dans les universités françaises ? Vous n’avez pas l’impression qu’elle gagne du terrain chaque jour ?

      Les « polémiques » et « controverses » actuelles ne sauraient donc être abordées sans rappeler combien le terrain médiatique est labouré de longue date par des « entrepreneurs de cause », reçus à colonnes ouvertes et micros branchés.

      Revenons ainsi sur un cas emblématique. Le 31 octobre 2020, une centaine d’universitaires (auxquels se sont ajoutés cent-cinquante-huit nouveaux signataires) publiaient dans Le Monde une tribune en soutien à Jean-Michel Blanquer, lequel dénonçait au micro d’Europe 1 un « islamo-gauchisme » qui « fait des ravages à l’université » [4]. Les signataires reprenaient alors à leur compte ces graves accusations. Ils s’alarmaient en outre d’un « militantisme parfois violent » et d’un « déni » des universitaires (en général), et d’une « liberté de parole tend[ant] à [se] restreindre de manière drastique » à l’université. Que pointaient-ils du doigt ? « L’islamisme », et plus diversement « les idéologies indigéniste, racialiste et "décoloniale" (transférées des campus nord-américains) » qui nourriraient une « haine des "blancs" et de la France ». Des « idéologies » dont les signataires s’attachaient à montrer la matérialisation en-dehors de l’université, en pointant notamment « le port du voile […] qui se multiplie ces dernières années ». En conclusion, ils demandaient à la ministre Frédérique Vidal « de mettre en place des mesures de détection des dérives islamistes [à l’université], de prendre clairement position contre les idéologies qui les sous-tendent, et d’engager nos universités dans ce combat pour la laïcité et la République ».

      Des « preuves à l’appui » médiatiques

      L’histoire aurait pu en rester là : une prise de position dans les pages « idées » d’un grand quotidien, comme il y en a des dizaines chaque semaine. Mais les signataires du « Manifeste » sont allés plus loin, en créant un site internet sur lequel ils revendiquent — entre autres — de mobiliser des « preuves » à l’appui de leur propos. Ce qui était « opinion » deviendrait ainsi « faits », comme on peut le lire sur la page d’accueil du site : « […] Tous les éléments rassemblés sur ce site depuis la publication du Manifeste en témoignent : articles de presse, livres, témoignages, mais aussi exemples de connivences entre des islamistes patentés et certains universitaires et chercheurs militants. […] Parlons moins mais parlons vrai. Parlons des faits. »

      Or il s’avère que le corpus des « preuves » en question est presque exclusivement constitué d’articles et d’émissions publiés et diffusées majoritairement dans les grands médias : 47 articles, cinq livres, trois émissions de radio et un documentaire [5]. Ce qui ne pouvait manquer d’interpeller un observatoire des médias comme Acrimed [6]. « Parlons des faits. » Dont acte. Nous nous sommes donc attelés à analyser et objectiver le corpus fourni : les articles/émissions cités s’appuient-ils sur des données scientifiques, statistiques et sur un ensemble d’éléments à même d’étayer les accusations contre l’université française dans son ensemble ? Quel statut ont ces articles ? Sont-ce des enquêtes, des reportages ou des tribunes et des commentaires ? Quel est le statut de leurs auteurs ? Comment présentent-ils les travaux en sciences sociales incriminés ? Les relayent-ils seulement ? Etc.

      Le nombre important d’articles laissait penser que les universitaires s’étaient donné la peine de bien faire leur travail ; qu’ils avaient puisé dans un corpus hétérogène (où le commentaire se nourrit de l’enquête et des statistiques) et pluraliste (où les journaux d’opinion côtoient les journaux d’information et d’investigation). Et pourtant…

      Vous avez dit « preuves » ?

      Sauf erreur de notre part, il n’y a tout simplement aucune statistique ou étude empirique approfondie sur l’invasion des théories dites « indigénistes » ou « racialistes », encore moins sur les prétendues « connivences entre des islamistes patentés et certains universitaires et chercheurs militants », pas plus que sur la restriction « drastique » de « la liberté de parole » à l’université. Ces questions sont pourtant au centre du propos du « Manifeste ». Vous avez dit « preuves » ?

      Une absence d’autant plus problématique que les différents articles du corpus usent (et abusent) de qualificatifs soulignant la progression, en nombre et en intensité, de ce qui est présenté comme une « menace » ou un « danger ». Entre autres : « montée croissante des pensées racialiste, décolonialiste et indigéniste » qui « inquiète de nombreux étudiants et parlementaires » (Le Figaro, 10 janvier 2021) ; « le politiquement correct et l’affirmation du droit des minorités se sont largement répandus dans les facultés » (L’Opinion, 30 octobre 2019) ; « l’emprise croissante d’un dogme qui […] ignore la primauté du vécu personnel et dénie la spécificité de l’humain » (Le Monde, 25 septembre 2019) ; « En quelques années, les théories intersectionnelles se sont imposées dans les amphis des sciences sociales » (Marianne, 12 avril 2019) ; « l’influence grandissante de l’islamo-gauchisme sur la faculté » (Causeur, 20 novembre 2017)…

      Une menace grandissante sans statistique ? Et pour cause [7]…

      Mais cette absence de données chiffrées ne suffit évidemment pas à rejeter en bloc les « preuves à l’appui » du Manifeste. Une autre interrogation peut alors porter sur le nombre d’enquêtes et de reportages dans le corpus. Et force est de constater que le journalisme d’investigation n’y a pas bonne presse…

      Les tribunes ou formats apparentés (communiqués, éditos…) arrivent largement en tête : près de la moitié des articles (21 sur 47), auxquels il faut ajouter les interviews (8). Ils sont suivis des chroniques (ou d’articles non basés sur un reportage) signées de journalistes « maison » (13). En résumé, seuls cinq articles se basent sur une enquête. Et encore reste-t-il à souligner la déontologie pour le moins approximative qui les caractérise, notamment en termes de pratique du contradictoire et de pluralité des sources (voir en annexe 1, une courte analyse de l’une des enquêtes). Ces enquêtes se résument bien souvent à l’interview de quelques enseignants, étudiants et militants (dont on ne sait pas comment ils sont sélectionnés, ni à quel point ils sont représentatifs ou illustratifs de l’objet de l’article) et/ou à la retranscription de propos entendus durant un évènement. Le tout est rarement contextualisé et circonstancié. Quel statut accorder en effet à une invective lancée par un étudiant à un enseignant durant un cours ou un séminaire, ou à des tensions et conflits entre militants lors d’une réunion ? Dans quelle mesure peut-on parler d’une tendance régulière ou croissante à l’université, et si c’est bien le cas, dans quelles proportions ?

      Plus généralement, il est pour le moins significatif qu’aucun article scientifique publié dans une revue à comité de lecture (faisant appel à des pairs et à des relecteurs extérieurs pour évaluer l’article) ne vienne « appuyer » une tribune d’universitaires. Pour gage de sérieux scientifique, peut-être ses auteurs se contentent-ils des cinq livres référencés sur leur site, qui font la part belle à l’essai et qui ne s’éloignent guère de leur espace intellectuel de prédilection. L’un d’eux est ainsi écrit par un des premiers signataires du « Manifeste » (Pierre-André Taguieff, à l’origine du « concept » d’« islamo-gauchisme »), qui occupe également une bonne place dans les articles de presse « à l’appui » : une fois comme auteur, deux fois dans des entretiens donnés au Figaro et une fois avec un extrait de l’un de ses essais. Un deuxième ouvrage « preuve » (constitué, en guise d’enquête, de « témoignages et verbatim […] recueillis lors de colloques, de sessions universitaires ou de rassemblements associatifs ») est rédigé par Anne-Sophie Nogaret et Sami Biasoni. Tous deux écrivent pour Causeur. La première apparaît à plusieurs reprises dans les articles de presse du corpus. Et le second est, en plus de ses fonctions universitaires (chargé de cours à l’Essec, doctorant en philosophie à l’ENS), banquier d’investissement et conseiller politique LR… Les autres livres sont : un essai de Pascal Bruckner, que l’on ne présente plus (et qui a préfacé l’ouvrage d’Anne-Sophie Nogaret et Sami Biasoni…) ; un essai de Fatiha Boudjahlat, habituée des colonnes de Causeur et Valeurs actuelles ; un ouvrage du sociologue Manuel Boucher, dont une tribune publiée dans Marianne figure également dans le corpus, dans laquelle il s’en prend à Clémentine Autain (députée du groupe La France insoumise) qui serait dans « une logique munichoise servant les intérêts des extrémistes nationalistes ». Sic.

      Vase clos : des médias d’opinion (de droite) massivement mobilisés

      L’impression de vase clos se poursuit lorsque l’on regarde d’un peu plus près les médias mobilisés, ainsi que la circulation entre ses signataires et les intervenants des articles de presse. Sur les 50 auteurs des 47 articles, on dénombre 26 auteurs universitaires [8], parmi lesquels… 22 sont logiquement signataires du « Manifeste des 100 ». Ainsi, on ne s’étonne guère que plus de la moitié des articles (28) comporte au moins une référence à un signataire de la tribune, ou que leur auteur se retrouve dans une autre « preuve à l’appui ».

      Ensuite, il est à noter que près de la moitié des articles (20) proviennent de médias d’opinion, marqués à droite voire à l’extrême droite : Figarovox (5), Le Point (7), L’Opinion (3), Causeur (2), Atlantico (2), Le Figaro (1).

      En deuxième position du corpus figurent une diversité de sources intermédiaires (12 au total), que l’on ne peut soupçonner d’être en opposition à ce peloton de tête. On y trouve d’abord cinq articles de médias dédiés à l’information ou à la discussion « intellectuelle » : le « portail des livres et des idées » Nonfiction livre quatre contributions (en réalité une contribution en quatre parties, du même auteur : un sémanticien… François Rastier), la cinquième venant d’une revue électronique de philosophie « dévolue à la présentation et l’analyse des nouveautés éditoriales publiées en langue française » (Actu Philosophia). Quatre autres articles de cette deuxième catégorie viennent ensuite de médias qui se destinent à la réponse à l’actualité, à l’opinion ou à la demande politique : une plateforme se définissant comme un « organisateur de débats pressants » (Persuasion), une « agence intellectuelle » se disant « d’inspiration réformiste » (Telos), un observatoire du « conspirationnisme » (Conspiracy Watch) et un blog (Mezetulle). Les trois derniers sont signés du journal satirique Charlie Hebdo, par deux fois, et d’une association, la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (Licra).

      Enfin, une troisième et dernière catégorie est composée de médias classés « au centre » ou « à gauche » (15 au total) : Le Monde (5), Marianne (5), Libération (3), Télérama (1) et L’Obs (1).

      À propos de ce panorama, on remarquera que les médias les plus représentés contribuent activement depuis au moins une décennie à construire le « problème » de l’islam et de l’immigration dans le débat public, et à fustiger sans discontinuer les « obsédés de la race, du sexe, du genre, de l’identité », pour reprendre la formule placardée en Une de Marianne (avril 2019) : trois thématiques dont ces médias font régulièrement leurs choux gras, quand elles ne sont pas érigées en obsessions éditoriales [9]… En témoignait (encore) dernièrement la Une du Point [10] (14 janvier 2021), agitant comme des épouvantails les « déboulonneurs », « indigénistes », la « gauche racialiste » mais également « l’écriture inclusive ».

      Si d’autres médias et acteurs politiques (du côté de la gauche républicaine notamment) se sont appropriés ce sujet, une récente étude statistique de l’Ina [11] corrobore d’ailleurs le rôle joué par cette (petite) poignée d’entrepreneurs médiatiques – chroniqueurs ou titres de presse – dans la légitimation et la promulgation du pseudo « concept » d’« islamo-gauchisme » et partant, dans la banalisation de son usage dans le débat public :

      À compter de cet événement [l’attentat contre Charlie Hebdo], le terme [« islamo-gauchisme »] trouve ses entrepreneurs de cause : un petit nombre de journalistes le convoqueront désormais à l’envi, contribuant à en ritualiser l’usage. Ivan Rioufol, Gilles-William Goldnadel, surtout, mais aussi Éric Zemmour, Alexandre Devecchio, Étienne Gernelle et Michel Onfray à la fin de l’année 2015, forment ce personnel médiatique rassemblé autour d’un petit nombre de titres — Le Figaro, Le Point, Marianne.

      Autant dire qu’au total, ce corpus est l’incarnation d’une information et d’idées qui circulent en vase clos [12] : forte homogénéité des médias mobilisés qui répond à l’homogénéité toute aussi importante des auteurs des articles. En résumé, les opinions de ces universitaires (notamment les plus médiatiques d’entre eux) ne pouvaient que rencontrer celles des médias qui en assurent déjà la visibilité et la promotion…

      Un corpus qui révèle davantage les biais ordinaires du journalisme dominant que des « preuves » factuelles

      Sans même mentionner la part non négligeable de productions du corpus dans lesquelles on peine à trouver le moindre lien avec la problématique initiale (l’université) [13], il faut enfin souligner combien les différents articles de presse et émissions mis en avant sont avant tout des « preuves à l’appui » des travers ordinaires du journalisme dominant. Un journalisme notamment marqué par l’affranchissement quasi systématique du contradictoire, entre autres règles professionnelles de base : ainsi les termes du débat ne sont-ils quasiment jamais interrogés, les travaux universitaires incriminés rarement cités, et le pluralisme… piétiné (dans le cas des cinq enquêtes figurant dans le corpus).

      Et quand il ne s’agit pas de tribune (un format qui ne permet pas la contradiction), il n’est pas rare que les interviews soient d’une complaisance à l’égard des intervenants (voir deux exemples en annexe 2), n’ayant d’égal que la disqualification violente et arbitraire des chercheurs, étudiants et universitaires taxés contre leur gré [14] d’« indigénistes » ou d’ « identitaires ». Souvent en leur absence, et plus encore en leur présence : car lorsque ces derniers ont la rare occasion de présenter leur point de vue, on peut apprécier les conditions dans lesquelles ils sont reçus…

      Reportons-nous pour cela à l’une des trois émissions de France Culture citées « à l’appui » du Manifeste : « Signes des temps » (25 octobre 2020), consacrée à « la crise dans l’enseignement et crise de la gauche après l’assassinat de Samuel Paty ». Une émission bien connue d’Acrimed puisque nous l’épinglions déjà dans notre article consacré à la traque médiatique des « islamo-gauchistes », comme une illustration exemplaire d’ « interrogatoires journalistico-policiers en règle », durant laquelle Marc Weitzmann [15] est rapidement sorti de son rôle de présentateur pour endosser celui de procureur contre Mélanie Luce, présidente du syndicat étudiant Unef. En effet, si les trois autres intervenants avaient eu droit à des questions ouvertes les invitant à rebondir sur les termes de leurs propres écrits, Mélanie Luce s’est vue sommée de répondre à une série d’accusations. Le tout enrobé de sous-entendus, amalgames et suspicions à son encontre (voir en annexe 3).

      Ainsi la question du pluralisme dans les différentes productions médiatiques « à l’appui » se joue-t-elle autant dans l’absence – ou la disqualification immédiate – de contradicteurs que dans les cadrages à sens unique du débat. L’escroquerie des « preuves à l’appui » est de taille lorsque l’on constate que France Culture (dont trois émissions sont citées dans le corpus, et dans lesquelles on peut aisément repérer des nuances et contre-arguments au propos du « Manifeste »), a pourtant beaucoup produit sur la question. Notamment, une série documentaire de l’émission « LSD » en quatre épisodes (« Les débats de société à l’assaut de l’université », quatre heures au total), n’apparaît pas dans les « preuves à l’appui », alors qu’elle donne à voir ce que la pratique d’un (vrai) pluralisme, incluant donc les chercheurs concernés, apporte à la salubrité du débat public.

      *

      Ainsi les amalgames et les analyses fourre-tout (« islamisme », travaux « décoloniaux/racialistes », port du voile, etc.) cachent-ils donc très mal le caractère hautement politique du « Manifeste », appuyé par et sur une série d’articles loin d’être « factuels » ou « neutres ». Tous répondent en réalité d’un raisonnement circulaire, qui pourrait se résumer comme suit : « Il existe un danger "islamiste" et "racialiste" à l’université. La preuve ? Nous le dénonçons. »

      Le problème n’est pas tant que ce monde d’entre-soi puisse se satisfaire d’une circulation intellectuelle et médiatique en circuit fermé : ils ont évidemment le droit de penser ce qu’ils veulent, et de le dire publiquement ! C’est finalement le pluralisme des idées et des opinions dans les médias dominants qui est en jeu, et son déséquilibre structurel flagrant. De même que l’appauvrissement en continu du débat public. Il est ainsi pour le moins surprenant, de la part d’universitaires et chercheurs censés être au fait des courants de pensée et des discussions et controverses académiques nécessaires à la progression de la connaissance, de les voir rabattre un ensemble de recherches en sciences humaines et sociales à une « haine des "blancs" » ou à des traces suspectes d’« islamo-gauchisme »… Encore plus surprenant d’accuser des adversaires de faire œuvre d’idéologie et non de science, de sacrifier les idéaux de la recherche pure sur l’autel de leur militantisme – une conception en outre épistémologiquement douteuse de la « neutralité » absolue du savant – tout en déroulant d’un autre côté une litanie de jugements éminemment marqués idéologiquement, sans avoir recours au moindre travail scientifique rigoureux — ou en ignorant superbement les travaux existants. Le tout en recevant les soutiens d’Emmanuel Macron, en mobilisant les analyses d’une conseillère régionale du Val-d’Oise, ou encore en étant signataires de l’appel des 80 intellectuels contre le « décolonialisme » aux côtés d’Alain Finkielkraut et… Bernard de la Villardière.

      De tels discours bifaces et autres pétitions de convictions pourraient ainsi faire sourire s’ils ne s’inscrivaient pas dans une offensive politico-médiatique d’ampleur. Et dont les conséquences dépassent en réalité de loin le bavardage hors sol : ainsi des attaques concrètes contre la recherche, son autonomie et les libertés académiques voient-elles le jour, depuis la mission d’information sur les « dérives idéologiques à l’Université » réclamée par deux députés LR, jusqu’à l’enquête souhaitée au plus haut sommet de l’État par la ministre Frédérique Vidal [16]. Une croisade médiatico-politique, décuplée depuis les attentats de 2015, qui montre plus que jamais les dangers d’un fonctionnement médiatique donnant, à travers un ensemble de mécanismes, le primat à « l’opinion » sur l’information et la connaissance scientifique.

      https://www.acrimed.org/L-universite-menacee-par-l-islamo-gauchisme-Une

    • « L’éthique de la recherche, c’est la capacité à distinguer les enjeux, à ne pas glisser de la théorie vers l’idéologie »

      Face au mélange entre science et politique, au refus du #pluralisme, les chercheurs doivent pouvoir échanger de façon argumentée et réfutée, en s’employant à « éviter les #fractures et les #enclaves », explique le géographe Jacques Lévy dans une tribune au « Monde ».

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      Une des effets dommageables de la prise de position de Frédérique Vidal sur l’ « islamo-gauchisme » à l’université a été de permettre à ses détracteurs d’inverser son propos et de porter la charge sur les lanceurs d’alerte. Pourtant, il existe bien des motifs d’#inquiétude sur la relation entre la société et ses chercheurs, et pas seulement en sciences sociales. Pour y voir plus clair, distinguons trois plans : celui des théories, celui du mélange des genres et celui du pluralisme.

      Les théories qui cherchent à expliquer le monde sont nombreuses et tant mieux ! L’une d’elles se fonde sur une vision communautaire du social : elle se représente la société comme une constellation de groupes aux appartenances non choisies et irréversibles. La fameuse « #intersectionnalité » consiste en une #essentialisation des #identités, qu’on peut éventuellement croiser, mais sans les remettre en question. Cette école de pensée tente de sauver le #structuralisme_marxiste, dans lequel la communauté de #classe était centrale, en ajoutant de nouvelles « structures » à un édifice qui se lézarde, pris à contre-pied par l’irruption des #singularités_individuelles. On peut préférer, dans le sillage de Norbert Elias (1897-1990), le paradigme de la « société des individus », qui décrit un monde où les individus acteurs prospèrent de conserve avec une société postcommunautaire. La différence entre ces deux conceptions est patente, mais on ne peut s’en plaindre. Cela, c’est le débat, sain parce que libre et transparent, qui caractérise la démarche scientifique.

      Création de monstres

      Le danger apparaît avec le mélange des genres entre science et #politique. Roger Pielke (The Honest Broker, Cambridge University Press, 2007, non traduit) a montré, à propos des débats sur le climat, que lorsqu’un sujet est marqué à la fois par des controverses scientifiques et des oppositions politiques fortes, les deux dissensus peuvent s’épauler et créer des monstres : le militant choisit l’hypothèse qui l’arrange pour se parer de la #légitimité_scientifique, tandis que le chercheur se mue subrepticement en un politicien sans scrupule. Les chercheurs sont aussi des citoyens et ils ont bien le droit de l’être. Leurs expériences personnelles peuvent être des ressources pour la connaissance.

      Si la conscience que les registres ne doivent pas se fondre les uns dans les autres fait défaut, les savants se muent tout bonnement en #idéologues d’autant plus déplaisants qu’ils s’abritent derrière leur statut. On voit fleurir des #novlangues dignes du 1984 de George Orwell, lorsque, au nom de la science, l’ « antiracisme » couvre un nouveau type de racisme, ou lorsque la « démocratie éco logique » vise une dictature des écologistes intégristes. L’enquête qu’ont menée les chercheurs britannique et américain Helen Pluckrose et James Lindsay (Cynical Theories, Pitchstone Publishing, 2020, non traduit) montre que des revues universitaires prestigieuses acceptent aisément de publier des textes délirants dont on aimerait pouvoir rire mais qui sont animés par une idéologie de la haine intercommunautaire et n’hésitent pas à traiter de « négationniste » toute prise de position divergente.

      Le troisième plan est sans doute le plus grave. Il s’y déroule une attaque frontale contre la démarche scientifique et un refus du pluralisme des idées. De la « #positionalité » (l’autoanalyse par le chercheur de biais liés à sa position sociale) déjà ambiguë, on est passé à la #standpoint_theory, un oxymore qu’on peut traduire par la « théorie-point de vue », qui décrète que l’ « #objectivité_forte » ne peut être atteinte que si le chercheur s’appuie sur sa propre #expérience. Seules les femmes peuvent parler des femmes, seuls les Noirs peuvent parler des Noirs, et c’est ainsi que les women studies ou les black studies désignent, par défaut, à la fois l’objet d’études et l’identité du chercheur. Une épistémologie ubuesque dans laquelle l’histoire des temps reculés devient impossible même si l’on s’intéresse aux dominés et où le travail de terrain et l’observation participante sont bannis. C’est une technique pour discréditer les travaux qui dérangent, rappelant la stalinienne opposition entre « science bourgeoise » et « science prolétarienne .

      Un contrat exigeant signé avec la société

      Cette fois, c’est l’appartenance ou non à une communauté définie par un principe biologique, le sexe ou la race, qui arme les censeurs. La #cancel_culture, cette posture de l’annulation et de l’#annihilation, s’appuie sur la tradition puritaine américaine qui, en dénonçant des blasphèmes, cherche à intimider, parfois à brutaliser les récalcitrants.

      Il y a donc plusieurs dangers, qu’il ne faut pas confondre. C’est justement cela le principal risque : le #glissement, de la théorie vers l’idéologie et de la désinvolture vers la #négation_de_l'autre. L’#éthique de la recherche réside au contraire dans la capacité à distinguer les enjeux différents. Le contrat que les chercheurs signent avec la société en s’engageant à construire autant qu’il est possible, par leur observation et par leur raison, des #vérités_objectives est exigeant. Ceux qui le déchirent minent la confiance de nos concitoyens. Ce contrat est subtil et il ne peut être vérifié que dans la pratique incessante d’échanges argumentés et réfutés, dans le monde de la recherche, mais dans l’ensemble de la société qui, elle aussi, nous écoute, nous lit et nous évalue. Le #tournant_éthique que nous vivons se manifeste à chaque fois qu’on peut imaginer une proportionnalité entre #liberté et #responsabilité. Ce tournant concerne les puissants et les puissances, mais tout autant chaque individu.

      Face à une société états-unienne tristement clivée, l’Europe peut montrer l’exemple en s’employant à éviter les fractures et les enclaves de manière que tous puissent continuer à parler à tous. De ce nécessaire dialogue les sciences du social comme celles du monde biophysique ou les mathématiques ne peuvent s’affranchir.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/03/02/l-ethique-de-la-recherche-c-est-la-capacite-a-distinguer-les-enjeux-a-ne-pas
      #Jacques_Lévy

    • #Etienne_Balibar : « Le conflit fait partie des lieux du savoir »

      Alors que le gouvernement reproche aux universitaires leur militantisme, le philosophe s’interroge : quel rapport y a-t-il en sciences sociales entre la nécessité de prendre parti et celle du savoir pour le savoir ? L’université doit, plus que par le passé, ouvrir ses portes et ses oreilles à l’extérieur de la société.

      On peut trouver effarant (c’est mon cas) que les ministres de l’Education et de l’Enseignement supérieur, encouragés du sommet, soient allés ramasser dans un caniveau idéologique une épithète aux sinistres résonances pour lancer dans l’Université et au CNRS une campagne d’épuration.

      On peut s’inquiéter (c’est mon cas) de la vitesse avec laquelle s’accomplit le démantèlement de la recherche publique autonome, à travers l’austérité budgétaire et la généralisation des crédits ciblés (et contrôlés) « par objectifs ».

      On peut se désoler (c’est mon cas) de voir les porte-parole de la « qualité de la science française » vouloir interdire à nos étudiants de participer à de grands courants internationaux d’innovation et de pensée critique, censés attenter aux valeurs républicaines, nous enfermant ainsi dans le provincialisme et le chauvinisme.

      On peut – alors même qu’on défend, comme je le fais, la légitimité des études de « race », de « genre », de « classe », de « culture postcoloniale », ainsi que toutes leurs intersections – savoir mettre en garde contre les amalgames sans fondement historique et les interdits de parole sectaires aux marges de l’Université.

      On peut (ce qui est mon cas) regretter de voir des sociologues et historiens, qui avaient contribué par des travaux de référence à la critique des inégalités et des exclusions sociales ou nationales, rallier avec aigreur le camp du #conservatisme et du #corporatisme_intellectuels.

      Mais tout ceci ne fait pas avancer la question épistémologique : Quel rapport y a-t-il, dans le champ desdites sciences humaines et sociales, entre la nécessité de prendre parti, et celle du savoir pour le savoir (le seul qui mérite ce nom, en vérité) ? Voici que se pose à nouveau la question de Max Weber dans ses conférences de 1919 (1) : Quelle est la « vocation » de la science ? En quoi diffère-t-elle de la « vocation » de la politique ? Or la solution qu’il proposait alors : « #neutralité_axiologique », séparation des deux « éthiques » (de la #conviction et de la #responsabilité) s’est avérée impraticable.

      Je vois quatre raisons à cela. Elles dessinent comme une unité de contraires, dans laquelle nous avons à tracer notre route, sans céder sur aucune exigence.

      Non aux institutions de #monologue

      Premièrement, l’Université et ses centres de recherches ne peuvent plus être des institutions de monologue. Elles doivent, plus que par le passé, ouvrir leurs portes et leurs oreilles à l’extérieur de la société, ou mieux de la cité. Nul ne conteste qu’il faille étudier, transmettre des savoirs, s’exercer à l’argumentation rationnelle : tout cela se fait dans des salles de classe et de séminaires. Mais l’objet lui-même, dont on recherche l’intelligibilité, est par définition au-dehors et surtout il est irréductiblement conflictuel, car nous ne vivons pas (et ne vivrons pas de sitôt) dans une cité « harmonieuse ». Pour qu’il y ait chance de l’appréhender et de le comprendre, ce conflit ne doit pas seulement faire l’objet d’une enquête ou d’une analyse à distance. Il doit s’introduire dans les lieux du savoir à travers ses acteurs réels, à moins que les chercheurs eux-mêmes ne partent à l’aventure pour les retrouver (par exemple dans une « jungle » ou dans un « quartier »). Comme aurait pu le dire Foucault, il faut faire sortir (les enseignants, les étudiants, les chercheurs) et laisser entrer (les manifestants avec ou sans gilet, les « militants », c’est-à-dire les citoyens actifs). Il faut leur donner la parole dans les enceintes réservées au discours. On sait que c’est presque impossible, mais des protocoles doivent pouvoir être expérimentés pour cela.

      Avec le lieux entre l’idéologie. C’est une banalité. Le problème est que l’idéologie est toujours déjà dans la place sous une forme plus ou moins « dominante ». Poser que le socle indiscutable du savoir économique est l’anticipation rationnelle des opérateurs de marché, ou que la connaissance sociologique se rejoue indéfiniment entre l’individualisme méthodologique et la solidarité organique, ou que l’objet commun de la psychologie et de la pédagogie est l’adaptation, ou que le sens de la modernité historique est la sécularisation du religieux, ce ne sont pas que des postulats, ce sont des prises de parti qui s’étayent sur des rapports de pouvoir. Naturellement il y en a d’autres, plus ou moins reconnues suivant les époques. Une institution de savoir vivante, capable d’accueillir l’inconnu, devrait se fixer comme objectif (y compris dans les instances nationales d’évaluation) de débusquer systématiquement les paradigmes « incontestés » pour les remettre en discussion. Souvenons-nous de l’épisode désastreux qui a vu l’interdiction d’une section « Economie et société » au Conseil national des universités (CNU), et dont nous payons le prix à l’heure du « quoi qu’il en coûte » …

      Aiguiser la #conflictualité

      Mais le conflit des idéologies scientifiques (comme disait Canguilhem) et des idéologies de savants (comme disait Althusser) n’est peut-être pas le cœur du problème. On pourrait croire, une fois de plus, que la conflictualité n’est que dans l’objet, ou dans les « investissements » du savoir par les intérêts, les engagements de ses porteurs. Mais pas dans le concept, qui est le cœur même du savoir. Rien n’est plus faux. Le savoir parvient au concept non pas en se protégeant de la conflictualité mais en l’aiguisant, en l’intensifiant autour de grandes alternatives « ontologiques », forçant à choisir entre des conceptions incompatibles de la nature des choses ou des êtres. L’histoire de la vérité n’est pas dans la synthèse, même provisoire, mais dans l’ascension polémique, vers les points d’#hérésie de la #théorie. C’est l’évidence en économie, dans les sciences humaines, dans les sciences de l’environnement, et peut-être au-delà – par exemple en biologie dans la théorie de l’évolution.

      Enfin, plus profondément, il y a ceci que le savoir n’est pas sans sujet(s). Ceci n’est pas un défaut de la #connaissance_scientifique, c’est sa condition de possibilité, en tout cas dans toutes les sciences qui ont une dimension anthropologique (et peut-être dans d’autres). Pour connaître il faut « s’avancer » subjectivement dans le champ où on se trouve déjà situé, avec tout le bagage des caractères (comme disait Kant) qui nous font « ce que nous sommes » (par construction historique et sociale, bien évidemment), car il n’y a pas de subjectivité « transcendantale ». Mieux, il faut s’avancer vers le point de trouble dans l’identité où chaque sujet se loge tant bien que mal avec sa « différence », qu’il s’agisse de masculinité et de féminité (ou d’autre « sexe » encore), de blanchité et de noirceur (ou de quelque autre « couleur »), de compétence et d’incompétence intellectuelle, de croyance ou d’incroyance « religieuse », pour en faire un analyseur des effets de société qui nous enferment, nous orientent et nous repoussent. Car si nul (le) ne peut absolument choisir sa place dans la cité, en raison même des rapports de domination qui la traversent, aucune place n’est pourtant assignable une fois pour toutes. Faire ainsi de la différence anthropologique vécue et reconnue et de son incertitude propre l’instrument de dissection du corps politique que nous sommes collectivement, et faire de l’analyse des mécanismes qui la produisent et la reproduisent le moyen d’en relativiser les effets normatifs, ce n’est peut-être pas la voie royale de la science, mais c’en est certainement un passage obligé. On pense ici à ce que Sandra Harding appelle « l’#objectivité_forte », incluant la connaissance de son propre sujet. C’est dire à quel point les positivismes font fausse route.

      Des modèles coûts-bénéfices prévisionnels aux comités d’experts…

      Le chemin qui nous attend est donc très difficile. J’ai fait ma carrière de professeur dans une époque que, rétrospectivement, on pourrait être tenté de qualifier de « bénie ». Les conflits étaient très durs, mais les interdits professionnels de guerre froide n’avaient plus cours. La « valeur de la science » était peu contestée. Mai 68, qui avait voulu secouer l’académisme et faire exploser les frontières, laissait beaucoup de déceptions, mais nourrissait de sa ferveur et de ses fureurs nombre de « programmes », dans lesquels se formèrent les jeunes chercheurs d’aujourd’hui, dont la moitié végète d’un contrat court à un autre. Notre classe dirigeante n’est plus en effet une bourgeoisie au sens historique du terme : elle n’a ni projet d’hégémonie intellectuelle ni point d’honneur artistique. Il ne lui faut (du moins le croit-elle) que des modèles coûts-bénéfices prévisionnels, des programmes d’éducation « cognitifs » et des comités d’experts. C’est pourquoi, pandémie et révolution télématique aidant, elle prépare activement la liquidation des départements de sciences sociales et d’humanités, ou même de sciences théoriques. Qui veut noyer son chien l’accuse alors de la rage (« l’islamo-gauchisme », le « militantisme », « l’idéologie »). De toutes nos forces, comme intellectuels, comme citoyens, nous devons résister à ce démantèlement des outils du savoir et de la culture. Mais pour ce faire, nous devons aussi ouvrir les yeux sur les révolutions dont a besoin l’institution, et les mettre en discussion parmi nous sans pudeurs ni présupposés.

      (1) Max Weber, le Savant et le Politique, nouvelle traduction et introduction par Catherine Colliot-Thélène, éditions La Découverte, Paris 2003.

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/etienne-balibar-le-conflit-fait-partie-des-lieux-du-savoir-20210309_YFL47

      Et ici :
      https://seenthis.net/messages/905530

    • Attaques contre des universitaires : le SNESUP-FSU écrit à la ministre F. Vidal

      Publié le : 12/03/2021

      Paris, le 12 mars 2021

      Madame la Ministre,

      Le #SNESUP-FSU, attaché aux libertés académiques indispensables pour faire avancer les débats scientifiques suivant des démarches partagées, comme aux institutions garantissant ces libertés, déplore leur mise en cause dans des interventions médiatiques politiques qui ont abouti à fragiliser l’Université et à attiser les tensions de toutes parts.

      Vous avez exprimé récemment votre attachement sans faille à la protection de l’ensemble des enseignants-chercheurs et des agents du ministère.

      À notre connaissance, vos déclarations ont été très vite suivies de l’attribution de la protection fonctionnelle à des enseignants de l’IEP de Grenoble dont les noms ont été diffusés sur internet accompagnés de propos injurieux ou accusatoires.

      En parallèle un grand nombre d’enseignants du supérieur sont exposés de façon similaire depuis une quinzaine de jours sur un site web qui les accuse d’être « complices de l’Islam radicale » (sic) et de « pourrir l’université et la France ». Certains de nos collègues craignent en conséquence pour leur intégrité. Les organismes et les établissements disposent des éléments sur cette attaque calomnieuse. Un certain nombre ont informé leurs agents concernés de leur soutien et des démarches à suivre pour bénéficier de la protection prévue par l’article 11 de la loi 83-634, notamment pour la prise en charge de frais d’avocat ou pour des mesures spécifiques suite à des menaces. Mais les autres n’ont pas alerté leurs agents. Le retrait de la page diffamant les agents aurait été demandé à son auteur et à son hébergeur mais à ce jour les propos diffamatoires sont toujours visibles.

      Fin novembre un tweet du député Julien Aubert toujours accessible en ligne désignait déjà nommément sept collègues « coupables » d’« islamo-gauchisme ». D’après la question écrite n° 21254 d’un sénateur1 une maitresse de conférences ainsi visée a essuyé un refus d’octroi de la protection fonctionnelle de la part de la présidence de son établissement sur la base d’une consultation de vos services.

      Face à ces discordances, le SNESUP-FSU rappelle que le droit des agents à être défendu par l’administration n’est pas à géométrie variable. La loi prévoit l’obligation de les défendre indépendamment de l’origine des attaques. La circulaire du 2 novembre 2020 sur le renforcement de la protection des agents publics rappelle que la PF est une obligation pour l’employeur public pour ne pas laisser l’agent sans défense dans une situation pouvant se traduire par une atteinte grave à son intégrité. Elle indique qu’« en cas de diffamation, de menace ou d’injure véhiculée sur les réseaux sociaux visant nominativement un fonctionnaire ou un agent public, il est demandé à l’employeur d’y répondre de manière systématique », et elle poursuit par des actions concrètes à entreprendre.

      La circulaire enjoint chaque administration à communiquer largement à ses agents sur les dispositions prises – ce qui reste donc à concrétiser – et à mettre en place un dispositif permettant de recenser les attaques, les protections fonctionnelles accordées et refusées, et les mesures de protection mises en œuvre. Par conséquent le SNESUP-FSU souhaiterait avoir connaissance du dispositif mis en place, et du bilan des actions entreprises qui devait être transmis début 2021 au ministère chargé de la FP.

      La circulaire demande aux ministres de garantir la mobilisation à tous les niveaux de l’administration en ajoutant « nous vous demandons de vous assurer que les agents concernés bénéficient d’un soutien renforcé et systématique de leur employeur ». C’est pourquoi le SNESUP-FSU vous demande donc de vous assurer que c’est bien le cas pour les agents du ministère victimes des attaques précitées, qu’un bilan des mesures prises et des éventuels refus de protection soit établi et lui soit communiqué (ou diffusé).

      Nous attirons enfin votre attention sur la situation des étudiants, notamment les doctorants, qui se retrouveraient attaqués ou menacés dans le cadre de leur participation à des travaux de recherche ou de formation sous la responsabilité d’une administration. Il importe qu’ils sachent compter sur le soutien de celle-ci même en l’absence de lien contractuel. À cet effet, nous souhaiterions savoir la nature de la protection sur laquelle ils peuvent compter et les modalités pour en bénéficier.

      Nous vous prions de croire, Madame la Ministre, en l’assurance de notre haute considération.

      Anne ROGER - Christophe VOILLIOT
      Co-secrétaires généraux du SNESUP-FSU

      Philippe AUBRY
      Secrétaire général adjoint du SNESUP-FSU

      https://www.snesup.fr/article/attaques-contre-des-universitaires-le-snesup-fsu-ecrit-la-ministre-f-vidal

    • Au soldat du déni Frédérique Vidal, la patrie résistante

      « Une #diversion et un #ballon_d’essai » : c’est ce que j’ai répondu quand on m’a demandé mon avis sur le commentaire de F. Vidal sur CNews. Mon métier d’historienne des sciences étant d’analyser des controverses, prenons le temps de réfléchir à l’aune des persistances dans l’attaque contre les universités. Le #déni doit cesser : à nous de choisir si nous, service public de la République, résisterons.

      « Une diversion et un ballon d’essai » : c’est ce que j’ai répondu à la journaliste du Monde (https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/02/16/frederique-vidal-lance-une-enquete-sur-l-islamo-gauchisme-a-l-universite_607) quand elle m’a demandé, mardi 16 février 2021, mon avis sur le commentaire de Frédérique Vidal sur CNews, repéré par Martin Clavey (The Sound of Science). J’ai aussi précisé que je n’avais pas écouté son discours. Que je ne pouvais plus lire, ni écouter Frédérique Vidal, ma ministre de tutelle depuis plus de trois mois — car il en allait de ma santé mentale.

      Mais il en va désormais de la #sécurité de toute une profession.

      Mon métier d’historienne des sciences étant d’analyser des controverses, prenons le temps d’y réfléchir, à l’aune d’une connaissance approfondie acquise par la chronique quotidienne d’une grève universitaire sur academia.hypotheses.org (https://academia.hypotheses.org/newsletters) et commençons par rappeler que l’Assemblée nationale vient d’adopter, en première lecture, un des projets de loi les plus racistes (https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/02/16/frederique-vidal-lance-une-enquete-sur-l-islamo-gauchisme-a-l-universite_607) portés par un gouvernement depuis Vichy ; et un autre projet de loi « Sécurité globale » (https://academia.hypotheses.org/30630) qui constitue, par ses termes, une atteinte majeure aux #libertés_publiques.

      Faire diversion

      Une diversion d’abord, bien réussie. Quelques jours plus tôt, Frédérique Vidal avait fait l’objet d’une sévère mise en cause publique au Sénat (https://academia.hypotheses.org/30821), à l’occasion d’un débat « Le fonctionnement des universités en temps de COVID et le malaise étudiant » à l’initiative de Monique de Marco groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, vice-présidente de la Commission Culture.

      Le réquisitoire était implacable : ces derniers mois, 20% des jeunes ont eu recours à l’aide alimentaire ; la moitié des étudiant·es disent avoir des difficultés à payer leurs repas et leur loyer, qui représente 70% de leur budget. Dans une enquête portant sur 70 000 étudiant·es, 43% déclaraient des troubles de santé mentale, comme de l’anxiété ou de la dépression.

      Face à cela, les mesures prises par le MESRI sont insuffisantes ou plutôt dérisoires, inégalitaires ; les services universitaires complètement débordés. Pierre Ouzoulias, à cette occasion, a d’ailleurs clairement établi l’importance du #définancement du budget « #Vie_étudiante » : 35 millions d’euros de crédits du programme « Vie étudiante » supprimés en novembre 2019 ; 100 millions d’euros de crédits votés en 2018 et 2019, finalement non affectés.

      Les longues files devant les distributions alimentaires trouvent dans cette politique budgétaire continue leur origine : le gouvernement ; qui a préparé la catastrophe sociale, n’a pas cherché depuis le confinement à la contrecarrer.

      Sans budget supplémentaire, Frédérique Vidal réussit également à contrecarrer toute réflexion collective sur l’aménagement des examens et des concours, jusqu’à intervenir dans une procédure judiciaire au nom de la « qualité des diplômes ».

      Ces réflexions, que nous menons tous et toutes dans des collectifs restreints, sont indispensables pourtant pour limiter les inégalités, réduire le stress qui ont conduit des étudiant∙es à se suicider et surtout mieux concentrer nos efforts sur les contenus de formation, autrement plus indispensables pour la « génération sacrifiée » ; au-delà des inégalités, nous voyons se profiler déjà de graves conséquences psychopathologiques du confinement (https://www.elsevier.com/fr-fr/connect/psy/consequences-psychopathologiques-du-confinement).

      Mais les étudiant∙es ne sont pas les seul∙es à faire les frais de cette politique dont la Ministre est la première VRP, sans les responsabilités qui vont avec : siège vacant depuis le début de son mandat au Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de son propre ministère ; des circulaires sans fondements, tendant uniquement à éloigner la communauté universitaire des campus.

      Pour couronner le tout, elle fait voter une loi de programmation de la recherche (LPR) —censée être une loi de finances, mais sans postes ni crédits supplémentaires — en pleine épidémie, qui s’emploie méthodiquement à attaquer l’indépendance de l’université et, en poursuivant l’expérience Parcoursup, à limiter sinon anéantir la formation universitaire supérieure publique.

      Une diversion donc, mais aussi un ballon d’essai.

      Il faut sans doute avoir suivi un an de préparation et de vote de la LPR, dans toutes ses étapes comme l’a fait le blog de veille Academia.hypotheses.org, pour comprendre que les récents propos de la Ministre sont l’exacte réplique de la demande faite par Julien Aubert et Damien Abad le 25 novembre dernier demandant la création d’une « mission d’information parlementaire sur les dérives idéologiques intellectuelles dans les milieux universitaires », où l’on repérait déjà l’anathème attrape-tout islamogauchistes.

      Pour ces compagnons de la première heure de Gérald #Darmanin, il s’agissait tout à la fois de sauver le soldat #Blanquer de la mission d’enquête parlementaire « #Avenir_lycéen » (diversion) et de préparer le terrain pour leur camarade Ministre, qui mitonnait déjà sa loi « #Principes_républicain » (ballon d’essai).

      Au lieu d’une agitation, il s’agissait ainsi d’une étape dans une séquence commencée avec les voeux de #Marion_Maréchal-Le Pen (https://academia.hypotheses.org/27305), dont les idées sont reprises par #Emmanuel_Macron le 10 juin, accusant des universitaires de « casser la République en deux » (https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/10/il-ne-faut-pas-perdre-la-jeunesse-l-elysee-craint-un-vent-de-revolte_6042430) et continuée avec #Jean-Michel_Blanquer qui, le 28 octobre, met en cause les universitaires devant le Sénat (https://academia.hypotheses.org/27386), à qui la frange « Printemps républicain » des Républicains, emboîte le pas. À l’appui de leur démarche, une tribune d’universitaires (https://academia.hypotheses.org/27264) est opportunément parue un mois plus tôt, invitant le pouvoir à organiser une police politique des universités.

      Le soldat du déni

      Quel ballon d’essai lance donc Frédérique Vidal qui persiste encore ce dimanche (https://www.lejdd.fr/Politique/exclusif-vidal-persiste-sur-lislamo-gauchisme-je-veux-une-approche-rationnelle) dans ce que les organismes scientifiques jugent au mieux absurde ?

      Pour le comprendre, il faut mettre en résonance deux choses : sa pratique législative, d’une part, dans son lien étroit avec l’Élysée ; les objectifs qu’elle s’était donnée avec la précédente loi, d’autre part.

      Du côté de la pratique législative, nous pouvons résumer son action comme mue par un « #déni_de_démocratie permanent ».

      Avec Academia, à l’occasion d’une table-ronde (https://academia.hypotheses.org/26788) qui s’est tenue entre les votes Assemblée et Sénat de la LPR, nous avons pu mesurer combien la ministre avait fait fi de toutes les avis et recommandations des instances consultatives, depuis la consultation des agents de l’ESR, des organismes, des organisations syndicales représentatives.

      Le plus flagrant est la mise sous le tapis de l’avis du Conseil Économique, Social et Environnemental (https://www.lecese.fr/travaux-publies/contribution-du-cese-au-projet-de-loi-de-programmation-pluriannuelle-de-la-re), pourtant voté à l’unanimité, par la CGT et le Medef. La 3e Assemblée de la République avait en effet établi un constat initial assez proche du Ministère, mais en tirait des conclusions bien différentes : pour le CESE, il faut des milliards d’euros, tout de suite, des recrutements là encore massifs.

      Pour comprendre les vues diamétralement opposées, il suffit de comprendre qu’outre les avis obligatoires des instances, le gouvernement s’est dispensé d’une étude d’impact (https://academia.hypotheses.org/24589) en bonne et due forme. Le projet politique n’a jamais été « analysons correctement les données du problème posé par l’ESR et tirons-en des conclusions », mais « mettons en œuvre notre plan (https://academia.hypotheses.org/9135), et établissons une stratégie et une communication pour la mener à bien ».

      Quelle était la stratégie ?

      Zéro budget, zéro création de postes, voire passe-passe budgétaire divers avant la fin du quinquennat. La stratégie de communication, digne d’un Ministère de la Vérité, a consisté à marteler « 25 milliards » sur tous les plateaux de télévision avant la fin du quinquennat Macron ; ou à parler de création de postes, quand il y multiplication de statuts précaires, mais pas de budget pour les financer non plus.

      La tactique consiste elle à opérer par coups de force à la fin du processus législatif, par le biais d’amendements votés par une « #nuit_noire » d’octobre (https://academia.hypotheses.org/27401) : suppression de la qualification, en affaiblissant ainsi le Conseil national des universités, organe représentatif des universitaires ; création d’un délit pénal, aggravé en commission mixte paritaire en « délit d’atteinte à la tranquillité et au bon ordre des établissements », puni de 3 ans de prison et de 45 000€ d’amendes.

      Et pour parachever le dispositif, sans considération pour conflit d’intérêt, faire nommer le Conseiller présidentiel à la tête de ce qui doit devenir l’instrument de l’achèvement de la mise au pas des universités : le Haut Conseil à l’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur.

      En un mot, faire croire à une politique budgétaire favorable pour les universités alors qu’il s’agit de fragiliser encore leur capacité d’action, leur autonomie et leur rayonnement à l’international. Frédérique Vidal, en bon petit soldat de la macronie, fait un sans faute. Sur tout, sauf sur un point de détail, censuré (https://academia.hypotheses.org/29702) par le Conseil constitutionnel comme « cavalier législatif » : le délit pénal.

      Abattre la résistance

      Pourquoi Frédérique Vidal sort-elle tout cela de son chapeau maintenant ?

      Que cherche-t-elle, à vouloir distinguer des déviances au sein de l’université ?

      Y a-t-il une volonté, sous prétexte de séparer le « savoir » des « opinions » de venir contrôler ce qui s’y dit et s’y fait ?

      Sur ce sujet, l’introduction d’un #délit_pénal d’un type nouveau représente un vrai danger, sous forme de première étape. Avec le projet de loi « Principes républicains », il s’agit donc d’ajouter un volet « universités » et de donner les moyens judiciaires à l’État macronien de faire plier ce qui représente un lieu historique de la formation critique des citoyens et des enseignant∙es des premiers cycles.

      Avec le délit pénal, c’est la fin des #franchises_académiques arrachées à l’exécutif au Moyen-Âge, et protégeant les campus universitaires des incursions non-autorisées du pouvoir exécutif.

      Déjà, on voit bien comment la fermeture des établissements d’enseignement supérieur depuis près d’un an semble moins résulter d’une gestion de l’épidémie que de buts politiques moins glorieux, comme celui de briser toute contestation. Les forces de police s’invitent désormais dans des espaces qui leur étaient interdits sans autorisation, comme jeudi dernier à Nanterre (https://www.parisnanterre.fr/espace-presse/message-de-la-presidence-19-02-2021-1004292.kjsp), lors d’un hommage à un étudiant qui s’était suicidé. Pour ce qui touche à la formation des enseignantes et des enseignants, les menaces se font toujours plus pressantes : il n’est que de voir, après de longues années à retirer des heures de formation aux universitaires, la nouvelle expérimentation qui fait la « une » du site web du Ministère de l’Education Nationale : l’annonce qu’à titre expérimental, dans vingt-deux académies, on va retirer de l’université les étudiants et les étudiantes destinées à devenir professeur∙es des écoles, pour les former, pendant trois ans, dans des lycées, avec très peu de cours à l’université. En confiant leur formation à des professeur∙es du secondaire, beaucoup moins en phase avec la recherche critique faute de temps à y consacrer et à l’inverse beaucoup plus soumis aux pressions de leur ministère, qui s’exercent par toute une série de relais (rectorats, inspecteurs, conseillers pédagogiques), il s’agit ni plus ni moins de retirer aux universités l’influence qu’elles exercent sur les jeunes citoyennes et citoyens en formant leur esprit critique.

      Les agents publics de l’ESR, victimes d’injure, de diffamation, voire de menaces de mort, n’ont pas le soutien de leur hiérarchie dont bénéficient les agents de police, même en cas de fautes lourdes. La #protection_fonctionnelle, outil important des libertés académiques, ne constitue plus un bouclier pour préserver l’indépendance des agents publics.

      Il ne reste donc plus qu’une chose à faire pour compléter l’arsenal répressif, après avoir rogné les franchises universitaires et limité l’usage de la protection fonctionnelle : remettre le délit pénal « pour atteinte à la tranquillité et au bon ordre des établissements » (https://academia.hypotheses.org/28160) — qualification tellement vague qu’un courriel professionnel pourrait suffire à faire entrer l’universitaire ou l’étudiante un peu critique dans le radar des délits.

      Pour cela, Frédérique Vidal peut compter sur les mêmes sénateurs qui l’ont aidée en octobre : le président de la commission culture, et le rapporteur pour avis du projet de loi « Principes républicains ». Ces parlementaires et ceux qui ont déjà voté leurs amendements l’ont déjà prouvé : ils haïssent l’université, n’envisagent pas une seconde que l’émancipation de son milieu social et la formation à l’esprit critique relèvent des missions de l’université.

      Pour ces esprits chagrins, il faut empêcher de nuire les étudiant∙es et ceux — ou plutôt celles — qui ne partagent pas leurs idées. Pour cela, tous les moyens seront bons : même un vote à 1h du matin, entre une poignée de sénateurs. Frédérique Vidal le sait. Mardi, devant l’Assemblée nationale (https://www.soundofscience.fr/2671), c’est un signal déjà envoyé aux sénateurs et aux sénatrices par Blanquer, agissant pour le compte du président de la République : les universitaires sont complices (https://academia.hypotheses.org/29291) ; elles sont donc coupables. Empêchez-les de nuire, en les arrêtant et en les emprisonnant si besoin.

      De toute cette séquence commencée il y a un an, ce que je retiens, c’est que les institutions universitaires, qui ont jusqu’à présent fait confiance à leur tutelle ― de façon mesurée mais réelle ― doivent saisir que le danger est réel ; que le déni doit cesser.

      La Ministre encore en poste, pilotée de toutes les façons au plus haut sommet de l’État par l’Elysée et le HCERES n’a plus rien à perdre. Le président de feue la République entend assouvir son désir de faire taire toute opposition, surtout si elle émane des puissants mouvements civiques en branle depuis l’an passé qui exigent une société plus juste pour tous et toutes.

      Le déni doit cesser.

      Depuis la présidence #Sarkozy et le vote de la loi dite « #Libertés_et_responsabilités_des_universités », les gouvernements successifs s’en prennent frontalement aux universitaires et aux étudiant⋅es en sous-finançant délibérément le service public de l’enseignement supérieur et la recherche, en en limitant l’accès, en nous imposant ainsi des conditions de travail indignes, des rémunérations horaires inférieures au SMIC (https://connexion.liberation.fr/autorefresh?referer=https%3a%2f%2fwww.liberation.fr%2fchecknews) et désormais en affamant les étudiant∙es — conduisant l’ensemble de la communauté universitaire dans une situation de mépris et de souffrance intolérable.

      À la #souffrance s’ajoute désormais une certaine folie induite par le double-discours gouvernemental, privilégiant la #diversion à la saisie du problème de la #pauvreté_étudiante. Radicaliser le débat public en désignant un bouc émissaire pour engendrer une peur panique participe de la fabrication du déni des réalités sociales et politiques quotidiennes de nos concitoyennes et de nos concitoyens, des jeunes particulièrement et donne une réelle assise à un pouvoir autoritaire.

      Mais un autre déni doit cesser, si on entend encore appliquer les principes constitutionnels de la République : la réactivation d’un #ordre_colonial et patriarcal.

      À force de nier quotidiennement les droits humains élémentaires des réfugiés, d’organiser des contrôles au faciès dès l’adolescence, en humiliant les gens du voyage, en stigmatisant au sein de l’institution scolaire les enfants et les mères, de ne pas sanctionner les comportements et des crimes racistes au sein des forces de police — capables, rappelons-le, de mettre à genoux des lycéens pendant de longues heures, rejouant ainsi une scène de guerre coloniale — l’État français entend reconstituer sur son sol même une classe de sous-citoyens et de sous-citoyennes, privées des droits communs.

      La dissolution d’une association de lutte contre les discriminations, au prétexte de « complicité » de faits non avérés, se comprend ainsi : il faut désormais abattre toutes les tentatives de résistance antiraciste, féministe et de défense des libertés publiques non comme des facteurs d’émancipation mais une opposition néfaste.

      Désormais, à lire la séquence qui a commencé sur CNews et qui a « persisté » dans le Journal du dimanche hier, c’est l’université dans son ensemble qui représente une telle force de #résistance. À nous de choisir si nous, service public de la République, résisterons.

      Christelle Rabier, maîtresse de conférences, EHESS (Marseille)

      1- Voir par exemple : « Le Roy le veult ! » — Circulaire d’Anne-Sophie Barthez du 22 janvier 2021

      2- Expression reprise à Anthony Cortès (Marianne) https://www.marianne.net/societe/education/frederique-vidal-la-ministre-de-lenseignement-superieur-maitre-dans-lart-d

      3- Pour lire une analyse sur l’avis cf. https://academia.hypotheses.org/25936

      4- Seuls 500 millions sont mis sur la table– soit 10 fois poins que ce que le CESE jugeait urgent de budgeter. Pour information, le Crédit impôt recherche, important dispositif d’ “optimisation fiscale”ou refus d’impôt, représente plus de deux fois le budget annuel du CNRS, masse salariale incluse.

      5- Sur le traitement différentiel des agents entre fonctions publiques et l’usage de la protection fonctionnelle comme protection politique des affidés, voir les deux billets Protection fonctionnelle : cas d’école et Courrier à la ministre : Mesure de protection de la santé et de la sécurité d’une enseignante-chercheuse.

      6- Sur le déni du sexisme universitaire, à commencer par ’invisibilisation active du travail des femmes universitaires, conceptualisé en 1993 par Margaret W. Rossiter, comme “Effet Matilda” : Margaret W. Rossiter, « L’effet Matthieu Mathilda en sciences », Les cahiers du CEDREF [En ligne], 11 | 2003, mis en ligne le 16 février 2010, consulté le 22 février 2021. URL : http://journals.openedition.org/cedref/503 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cedref.503. Voire également Cardi Coline, Naudier Delphine, Pruvost Geneviève, « Les rapports sociaux de sexe à l’université : au cœur d’une triple dénégation », L’Homme & la Société, 2005/4 (n° 158), p. 49-73. DOI : 10.3917/lhs.158.0049. URL : https://www.cairn.info/revue-l-homme-et-la-societe-2005-4-page-49.htm - à l’origine de la naissance du collectif Clashes contre les violences sexistes et sexuelles à l’université.

      7- Sur ce sujet douloureux, voir Fassin Didier, 2011, La force de l’ordre : une anthropologie de la police des quartiers, Paris, Editions du Seuil ; Brahim Rachida, 2021, La race tue deux fois : une histoire des crimes racistes en France (1970-2000), Paris, Éditions Syllepse, ainsi que le documentaire de David Dufresne, Un Pays qui se tient sage, 2020.

      https://blogs.mediapart.fr/christelle-rabier/blog/230221/au-soldat-du-deni-frederique-vidal-la-patrie-resistante#at_medium=cu

      #ordre_patriarcal

    • Islamophobie ou islamo-gauchisme : l’indignation à géométrie variable de Frédérique Vidal

      La ministre de l’Enseignement supérieur défend promptement les universitaires accusés d’islamophobie quand elle tarde à apporter son soutien aux professeurs désignés comme « islamo-gauchistes ».

      Le gouvernement défend-il plus les enseignants-chercheurs qui vont dans son sens politique ? Depuis plusieurs semaines, des universitaires sont affichés publiquement, tantôt pour islamophobie, tantôt pour islamo-gauchisme. Force est de constater que la réponse du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche n’est pas égale face à ces prises à partie ad hominem.

      Quand deux enseignants-chercheurs de l’IEP de Grenoble, Klaus Kinzler et T., sont la cible d’un affichage sur les murs de l’établissement les traitant de « fascistes » et d’« islamophobie » le 4 mars, le communiqué de condamnation de l’acte par Frédérique Vidal ne se fait pas attendre plus de quatre jours. De même, la direction de l’IEP se range derrière ses personnels et saisit le procureur de la République.

      Par contre, quand #Pascal_Praud désigne la directrice du laboratoire Pacte prise dans la polémique de Sciences-Po Grenoble au sujet de Klaus Kinzler, Anne-Laure Amilhat Szary, comme « militante » et livre son nom dans son émission du 9 mars dernier, sa ministre de tutelle ne publie aucun communiqué, malgré la virulente campagne de calomnies qui a suivi par les propos de l’animateur de CNEWS. « Je me sens fortement soutenue par mes tutelles, l’université Grenoble Alpes, le CNRS et l’IEP, déclare la principale intéressée à Libération. Il faut laisser du temps à l’enquête et je le comprends, mais je reçois des menaces de mort depuis ce week-end et je suis préoccupée pour notre pays que l’on puisse jeter en pâture le nom d’une professeure des universités et celui de son laboratoire sans qu’il y ait d’intervention publique immédiate pour les défendre dans les médias. » Les messages sur les réseaux sociaux l’accusent en effet « d’#islamo-fascisme » et d’avoir lancé « une #fatwa » à l’encontre de ses deux collègues de l’IEP Grenoble, ce que les faits contredisent tout à fait.

      Cet embrasement sur le thème d’un supposé « islamo-gauchisme » au sein des universités françaises a été attisé par la ministre Frédérique Vidal elle-même. En février, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche annonçait, sur CNEWS déjà, son intention de commander « une enquête » au CNRS portant sur « l’islamo-gauchisme » dans les facs. Très vite, une pétition de chercheurs et universitaires va « demander avec force la démission de Frédérique Vidal ». Les 600 premiers signataires de cette pétition vont se retrouver affichés sur un site sous le titre « Liste des 600 gauchistes (et quelques autres) complices de l’islam radical qui pourrissent l’université et la France », sans que cela n’émeuve le ministère rue Descartes. Comme dans le cas de l’affaire de l’IEP de Grenoble, ce sont les tutelles qui vont faire le travail, accordant la #protection_fonctionnelle à leurs personnels pour prendre en charge les frais de justice, comme à l’université de Toulouse Jean-Jaurès. Le CNRS a aussi saisi le procureur de la République sur ces faits. Finalement, le 9 mars, lors d’une réunion du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser), Frédérique Vidal fera lire un message condamnant « l’attitude de certains sites et organisations politiques, adoptant la même attitude envers des universitaires au prétexte qu’ils ont participé à une pétition. Sur ce dernier point, je soutiens sans réserve le signalement effectué à l’initiative du CNRS ». Un soutien à bas bruit médiatique au nom d’une position de principe réitérée au Sénat le lendemain.


      https://twitter.com/VidalFrederique/status/1369667352497958917

      Franck Loureiro, secrétaire général adjoint du Sgen-CFDT, s’inquiète de cette dérive consistant à attaquer les chercheurs personnellement en raison de leur thème de recherche. « Cela demande une réaction forte du gouvernement. Il faut protéger les libertés académiques sans rentrer dans une forme de choix en fonction de la couleur politique des personnes », plaide-t-il avant de reconnaître que cette indignation sélective a été tant le fait « du gouvernement, de certains parlementaires que, parfois, de certains collègues ».

      https://www.liberation.fr/politique/islamophobie-ou-islamo-gauchisme-lindignation-a-geometrie-variable-de-fre

    • « Le Klu Klux Klan en aurait rêvé ! » Ce que les #paniques_morales sur les universités révèlent de la #propagande d’extrême-droite

      Les universités n’ont jamais eu bonne presse avec les journaux conservateurs. Espaces de contestation et de critique, particulièrement depuis la massification d’après-Seconde Guerre Mondiale et les mouvements sociaux de la fin des années 1960 et des années 1970, ces institutions se sont révélées, pour une part importante d’entre elles, très résistantes aux tentatives d’entrée et d’emprise du militantisme conservateur ou réactionnaire — même si quelques-unes d’entre-elles sont fameuses pour avoir accueilli des groupes et des intellectuels essentiels de la droite radicale. Il y aurait certainement une histoire à faire des paniques morales agitées concernant ces espaces, qui s’y prêtent bien, étant fréquentés par une partie bien définie de la population et relativement coupés du reste des sphères sociales, mais un tel effort dépasserait les ambitions de ce billet pour Academia.

      Une actualité insistante

      Une chose toutefois claire — et que j’ai discutée ailleurs (https://racismes.hypotheses.org/209) — est le fait que l’année 2019 voit en France une résurgence d’un tel cycle de #paniques, dont la fin de l’année 2020 et le début de l’année 2021 semblent être un pic : pas un jour ne passe ou presque sans qu’un article discutant, qui la mise en place d’une cérémonie de remise de diplômes réservée aux personnes LGBT dans une université états-unienne (https://www.lepoint.fr/monde/a-columbia-une-remise-de-diplomes-pour-chaque-minorite-18-03-2021-2418406_24) — où la pratique existe pourtant depuis plusieurs décennies —, qui un conflit mineur au sein d’une salle de classe quant aux conditions acceptables d’utilisation d’une injure raciste (https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2020/10/30/a-l-universite-d-ottawa-le-mot-qui-ne-doit-jamais-etre-prononce_6057913_4500) — particulièrement en ce qui concerne la lecture de textes employant ces termes — qui d’un débat concernant le programme à enseigner dans un cours (https://www.lefigaro.fr/vox/histoire/non-l-antiquite-n-etait-pas-raciste-20210311). Les personnes ayant tenté sans succès l’attention des médias sur la situation des universités, notamment concernant les ravages de l’austérité et de la précarité tant sur les usagers que les travailleurs de ces institutions, ressentiront sans doute une pointe de jalousie face à cet intense intérêt pour la question de la composition du syllabus du cours de littérature médiévale de l’université de Leicester (https://www.lepoint.fr/culture/cancelculture-quand-l-universite-de-leicester-decolonise-ses-programmes-24-0), par exemple, au moment même où l’avenir des départements de lettres est remis en cause en France (https://twitter.com/JulienGossa/status/1371816497274888197) car ils constitueraient un « aller simple pour le chômage ».

      Dans ce contexte médiatique survolté, l’association Qualité de la science française (https://www.qsf.fr/2021/03/16/le-climat-dintimidation-a-luniversite-ne-peut-pas-perdurer) s’interroge « sur la place à réserver au sein des universités à des manifestations consacrées à la défense ou à la promotion de certaines #valeurs (telles les « semaines de l’égalité ») ». Car, ajoute-elle, « Les valeurs sont par définition des objets polémiques ».

      C’est précisément ce qui va m’intéresser ici, à savoir la place que tient en particulier le thème de la « #ségrégation » dans le registre de la dénonciation des initiatives pro-diversité ou anti-racistes, spécifiquement dans les universités, tel qu’il se déploie dans ces paniques morales. Une interjection souvent entendue en ce sens se résume ainsi à « Le Klu Klux Klan en a rêvé, les universitaires l’ont fait ! » (https://twitter.com/Eric_Anceau/status/1372085529437745158), reprenant la vieille accusation bien connue de « #racialisme », selon laquelle dans une société largement post-raciste, les seules personnes faisant exister encore le racisme seraient d’une part quelques marginaux racistes en pleine débandade, et de l’autre un groupe bien plus dangereux, que seraient les antiracistes « obsédés de la race ».

      Cette accusation se retrouve sur le temps long dans la littérature conservatrice : dans son fameux Sanglot de l’Homme Blanc, l’essayiste #Pascal_Bruckner nous avertissait déjà de ce qu’il pensait être le risque de la valorisation de la diversité :

      "Perçue alors comme infériorité, la différence est vue désormais comme distance infranchissable. Poussée dans sa logique extrême, cet éloge de l’autarcie aboutit aux politiques discriminatoires de triste renom : qu’est-ce d’autre en effet que l’apartheid sud-africain, sinon le respect de la spécificité pris au pied de la lettre, jusqu’au point où l’autre est si distinct de moi qu’il n’a plus le droit de m’approcher ? On sait qu’à Pretoria la règle du « chacun chez soi et tout le monde sera content » est une religion d’État."

      Le fait que le texte en question ait été écrit une décennie avant l’abolition de l’apartheid permet de saluer toute la finesse de l’analyse. Mais il en ressort la présence durable d’une crainte, réelle ou feinte — et au vu des craintes face au cosmopolitisme ou au multiculturalisme que l’auteur énonce dans son texte par la suite, ce caractère feint est une hypothèse à prendre au sérieux — face au fait que le principal moteur d’une résurgence du racisme soit finalement les antiracistes eux-mêmes. Cela explique les exclamations paniquées devant la moindre initiative visant à transformer en dispositifs de politiques publiques des principes antiracistes : « Le KKK en aurait rêvé ! ».

      Il faut certes reconnaître la profonde méconnaissance de l’histoire des effets politiques du groupe terroriste états-unien, de son agenda, et de l’actualité de son militantisme et de celui d’organisations partageant ses idées qui suinte du discours de Pascal Bruckner. En effet, il sous-entend que le KKK n’existerait plus ou que ses idées ne pourraient être déduites que de débats de plusieurs décennies, quand non seulement l’organisation, en déclin, existe et parle encore, mais de surcroit des organisations partageant ses idées ont pignon sur rue. La plus célèbre — le #Council_of_Conservative_Citizens — organise des meetings publics, où elle invite des politiciens de premier plan, aux campagnes desquels elle participe, et publie des journaux : il est très facile de savoir ce que pense le mouvement ségrégationniste aux États-Unis, puisqu’il n’a pas disparu. Un élément néanmoins marquant, c’est la façon dont les expressions de choc moral et les cris d’orfraie de l’essayiste français se font de façon paradoxale l’écho d’éléments de propagande issus, précisément, de ces milieux radicaux.

      Inverser les valeurs

      On aurait tort d’ignorer, dans le discours de ces nouveaux prophètes réactionnaires, la tradition intellectuelle états-unienne suprémaciste blanche. Comme je viens de le préciser, il est en effet possible de lire et d’entendre des analyses d’intellectuels issus du mouvement suprématiste blanc états-unien, auquel se rattache le KKK, de façon régulière : le mouvement dispose depuis longtemps de ses presses, de ses think tanks, etc. Comme le rappelle le philosophe Jason Stanley dans son ouvrage How Fascism Works, l’extrême-droite états-unienne a depuis plusieurs décennies considéré la lutte contre l’institution universitaire comme une mission de premier plan. Le rôle de l’activiste #David_Horowitz, analysé par Stanley, peut être considéré central dans de telles attaques, notamment via son organisation, #Students_for_Academic_Freedom :

      "Le but de Students for Academic Freedom est de faire la promotion de l’embauche d’enseignants ayant un point de vue conservateur, un effort présenté comme une promotion de la « #diversité_intellectuelle et de la liberté académique dans les universités américaines », d’après la #Young_America_Foundation [autre organisation de droite proche de SAF]. Pendant les dernières décennies, #Horowitz a été une personnalité marginale dans la #droite_radicale états-unienne. Plus récemment, ses tactiques et objectifs, parfois sa #rhétorique, sont entrées dans le #langage_commun, où les attaques envers le « #politiquement_correct » sur les campus sont devenues banales."

      La stratégie de David Horowitz évoquée ici est définie par ce dernier dans une note stratégique qu’il a rédigée pour le Sénateur Républicain Jeff Sessions en 2012 : intitulée « Viser le cœur plutôt que la tête », la note développe une méthode consistant à faire haïr le camp adverse à l’électorat plutôt que de gager sur les atouts du programme que l’on défend. Pour Horowitz, le camp progressiste parvenant à se représenter comme ayant le surplomb moral, il fallait au contraire développer « une #campagne_émotionnelle qui mette nos agresseurs [les Démocrates] sur la défensive ; qui les attaque sur le même plan moral, leur attacher l’#image des méchants ».

      Il n’est dès lors pas étonnant que sur le long terme, les entreprises militantes que cet activiste a développées s’appuient sur une #inversion_des_valeurs. Comme le fait remarquer Jason Stanley, les propositions concrètes portées par les groupes du type de ceux soutenus par Horowitz n’est pas une extension des libertés, mais une réduction de celles-ci : « Les attaques depuis la droite montrent clairement le désir même de la droite de contrôler ce sur quoi on a le droit de travailler. Dans le genre classique de la propagande démagogique, la tactique consiste à attaquer des institutions représentant la #raison et le débat ouvert, au nom de ces mêmes idéaux ». Ce qui explique que les organisations soutenues par Horowitz, qui font toutes appel à la liberté et au débat dans leurs noms, publient également régulièrement des listes d’enseignants jugés déviants à remettre en cause : en 2016, #Turning_Point_USA, un groupe similaire, lançait la plateforme « #Professor_Watchlist » (https://academia.hypotheses.org/2684), qui visait à effectuer une liste de « #professeurs_dangereux ». Horowitz avait lui-même inauguré le modèle en publiant un ouvrage sur « les 101 professeurs les plus dangereux des États-Unis », puis en créant le répertoire « #Discover_the_Networks », suivant le même objectif.

      L’un des éléments les plus structurants du discours de la droite horowitzienne consiste très tôt à mettre en avant la façon dont l’antiracisme sur les campus universitaires reviendrait à réactiver une ligne de couleur par ailleurs effacée, particulièrement dans le cadre des débats sur les politiques d’affirmative action visant à accroître la diversité sur les campus : « Le KKK en rêvait ! », commence-t-on alors à s’émouvoir dans une droite qui, peu de temps avant, continuait dans certaines parties du pays à élire des représentants issus des rangs du même KKK, et qui prendrait bientôt l’habitude de recevoir des soutiens financiers de ses héritiers. Cette image d’une université qui, croyant bien faire, réactiverait des clichés et surtout développerait des pratiques incompréhensibles, devient en tant que telle un élément de propagande de cette même extrême-droite : dans un document d’ »analyse » pour un think tank suprématiste blanc, le « #Geopolitical_Studies_Institute », un auteur expliquait ainsi le mouvement #Black_Lives_Matter comme suit :

      "Nous avons remarqué que des jeunes gens éduqués – avec des diplômes supérieurs à la licence – sont surreprésentés parmi les militants #BLM. Une explication possible – outre le fait que les départements de lettres et de sciences sociales sont de plus en plus des machines à #endoctrinement gauchistes – est qu’il y a une relation positive entre le #neuroticisme [un trait de personnalité associé aux émotions fortes en psychologie] et le succès universitaire, particulièrement combiné à un haut niveau de conscience de soi (contrôle des impulsions et suivi des règles). C’est peut-être parce que l’#anxiété agit comme motivateur de la diligence ou parce que le neuroticisme implique un plus grand désir de connaître la nature du monde de façon certaine, et donc de croire que l’on peut y accéder via les études supérieures."

      Traduit en autre chose que le sabir pseudo-scientifique original, le raisonnement revient à dire qu’à la fois le désir de faire des études et la propension à participer à un mouvement social antiraciste n’est explicable ni par l’état de la société, ni par une position idéologique avec laquelle il est possible d’être en désaccord, mais qui se discute au moins, mais en réalité par une sorte de défaut fondamental de la personnalité des personnes qui s’y prêtent. L’auteur explique un peu plus haut qu’un tel phénomène aurait lieu du fait d’un changement évolutionnaire dans l’espèce humaine lié à l’#industrialisation, qui conduirait à la disparition des processus darwiniens naturels réduisant la prévalence de tels traits dans la population. On retrouve facilement les vieilles marottes eugénistes et spencériennes qui portent la droite radicale dans toute son histoire moderne.

      Une telle lecture psychologisante et médicalisante de « la religion de la justice sociale » est longtemps restée enfermée dans les champs de la pseudo-science raciale, mais trouve à la fin des années Obama une place accueillante sur la chaîne de télévision #Fox_News, où un segment quasi-quotidien, « La folie des campus », animé par le présentateur vedette #Tucker_Carlson, vient documenter quasi-quotidiennement des non-événements censés éclairer les #dérives_universitaires, montées de façon unilatérale autour d’une histoire simpliste dans laquelle les « antiracistes gauchistes extrémistes » sont toujours des « fous » et des « méchants », tandis que leurs « victimes » sont toujours de libres-penseurs modérés souhaitant seulement « discuter d’idées ». C’est à cette même époque que des intellectuels états-uniens proches de ces idées, auto-qualifiés du label peu flatteur mais ironiquement bien trouvé d’#Intellectual_Dark_Web prennent l’habitude de se qualifier de « #libéraux_classiques » (classical liberals), tout en travaillant comme l’illustrait le commentateur politique #Michael_Brooks dans son propre décorticage du mouvement, #Against_the_Web, à mettre à l’agenda des positions violemment réactionnaires et antiscienti (fiques renvoyant aux vieilles marottes de la « science raciale », et plus généralement du rappel à l’ordre :

      "Ils défendent tous l’ordre économiste capitaliste sur le plan domestique, et l’hégémonie impérialiste américaine internationalement. Ils se voient comme les défenseurs d’une construction floue (et franchement incohérente historiquement) qu’ils appellent « l’Occident ». Ils défendent tous ce qu’ils imaginent être « la biologie » contre les féministes, et au moins certains d’entre eux, comme #Sam_Harris – qui fait la promotion de #Charles_Murray, intellectuel odieusement d’extrême-droite et aux préjugés explicites – prennent une position similaire sur le sujet de la race. Plus encore, dans l’ensemble de ces sujets, l’#IDW promeut des perspectives qui naturalisent ou mythologisent des relations de pouvoir historiquement contingentes – entre patrons et travailleurs, hommes et femmes – ce sont des réactionnaires à l’ancienne."

      Pas étonnant dès lors que ces « progressistes classiques » soient rapidement devenus les progressistes préférés de la droite états-unienne, et commencent à devenir des lumières pour une partie de la droite européenne.

      Liaisons dangereuses

      Les représentations des paniques morales de 2021 sont directement tributaires de la littérature des « #progressistes_classistes ». Avec une précision millimétrique, les mêmes affaires sont traduites, diffusées, et discutées dans les mêmes termes, devenant l’un des produits les plus populaires d’exportation des États-Unis vers la France. La multiplication d’ »enquêtes » sur « la #folie_des_campus », accusant la « #génération_offensée » que seraient les jeunes et les « endoctrineurs » que seraient leurs enseignants de « créer de toutes pièces » un antiracisme « racialiste » qui se mettrait à agiter des polémiques « imaginaires », qui est désormais une obsession bien fixée d’une partie de la presse, n’est pas sans faire écho non seulement aux paniques qui agitaient la presse générale états-unienne il y a cinq ans. Les raisons en sont certainement nombreuses, et on ne peut pas entièrement ignorer le fait que, dans la machine du clickbait et de l’info en continu, des affaires qui ne nécessitent pas beaucoup d’enquête — et, disons-le, pas beaucoup de #déontologie non plus, comme l’a bien illustré la récente affaire de Sciences Po Grenoble dans laquelle la parole d’une partie au conflit a été érigée immédiatement en vérité face à laquelle aucune perspective dissonante ne devait être entendue, sont une bonne matière première. Cette même matière sert apparemment désormais des discours pour qui les fondements constitutionnels de la République Française — liberté, égalité, fraternité — poseraient problème, à l’université notamment.

      Enquêter à l’université, aller chercher les conditions de vie et de travail des gens qui y sont, comprendre l’imbroglio administratif qui conduit à la dégradation progressive de cette institution est fastidieux et fait peu vendre, par rapport au fait de multiplier des Unes sensationnalistes suivant une recette bien établie et facile à reproduire. Mais – et c’est particulièrement ironique face à l’accusation de ressembler au discours d’organisations terroristes comme le KKK – cette logique qu’elle provienne de contraintes, de conviction, ou de malveillance, conduit irrémédiablement à se calquer petit à petit sur les analyses et à l’agenda que, de longue date, le mouvement suprématiste blanc états-unien a mises en avant sur ces questions.

      https://academia.hypotheses.org/31676

    • Courrier de la ministre Vidal (22.03.2021) :

      A propos de la « #Liste des #600_gauchistes complices de l’islam radicale qui pourrissent l’université et la France » publiée sur le blog de #Philippe_Boyer :
      https://philippe-boyer.eu/liste-des-600-gauchistes-complices-de-lislam-radicale-qui-pourrissent

      Comme dit Claire Sécail sur twitter :

      « C’est aussi à la vitesse de réaction que l’on reconnait un foutage de gueule. »

      https://twitter.com/clairesecail/status/1374055660531429379

    • Derrière la polémique sur l’« islamo-gauchisme », la ministre Vidal isolée comme jamais

      Imaginée par une poignée de conseillers de Frédérique Vidal, la #polémique sur l’« islamo-gauchisme » a servi de paravent à une ministre isolée comme jamais du monde académique, des réalités étudiantes mais aussi de sa propre administration.

      Ses conseillers lui avaient promis de marquer, enfin, l’agenda politique. De ce point de vue, l’opération est réussie. Absente du débat public depuis le début de la crise sanitaire, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche Frédérique Vidal a provoqué un tollé en déclenchant, en pleine pandémie, un débat sur « l’islamo-gauchisme » dans les universités.

      L’instant d’une polémique – qui l’a soudainement amenée à défendre le contraire de ce qu’elle prétendait penser à l’automne –, la ministre a même réussi à reléguer au second plan les critiques sur son défaut de gestion de la crise. Oublié aussi son isolement du monde académique, des réalités étudiantes ainsi que de sa propre administration. Fin novembre, son ministère a été marqué par la démission fracassante du directeur général de la recherche et de l’innovation. Mais de cet événement aussi inédit que parlant sur l’état du ministère, il n’a pas été question sur les plateaux de télévision. De l’art de faire #diversion.

      En recommandant à leur patronne d’attaquer bille en tête la communauté universitaire, les quelques conseillers de Frédérique Vidal à la manœuvre n’avaient en revanche pas anticipé l’ampleur des protestations qui s’élèveraient contre elle.

      Les pétitions appelant sur tous les tons à sa démission se multiplient – celle issue d’une tribune publiée le 21 février 2021 dans Le Monde cumulant même, à ce jour, plus de 22 000 signatures individuelles d’universitaires. Consternés, des intellectuels du monde entier volent désormais au secours de leurs collègues français (lire cette tribune de L’Obs). Jamais une ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche n’avait autant fait l’unanimité contre elle. Signe que l’heure est grave, des organisations scientifiques d’habitude discrètes affichent désormais leur désaccord.

      Alors que Frédérique Vidal avait demandé, le mardi 16 février 2021, au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), « un bilan de l’ensemble des recherches », pour mieux séparer ce qui relèverait de la science et du militantisme, le CNRS a répondu que « l’islamogauchisme n’est pas une réalité scientifique ». L’organisme de recherche a condamné « les tentatives de #délégitimation de différents champs de la recherche ».

      Même la conférence des présidents d’université s’est exprimée en des termes peu habituels : « Si le gouvernement a besoin d’analyses, de contradictions, de discours scientifiques étayés pour l’aider à sortir des représentations caricaturales et des arguties de café du commerce, les universités se tiennent à sa disposition. Le débat politique n’est par principe pas un débat scientifique : il ne doit pas pour autant conduire à raconter n’importe quoi. »

      Du côté syndical aussi, le front est large. La FSU (Syndicat national des chercheurs scientifiques et Syndicat national de l’enseignement) et Sud (Recherche et Éducation) ont appelé au départ de la ministre. La CGT estime que « la ministre doit retirer ses déclarations et présenter ses excuses aux personnels, annuler ses velléités d’inspection politique de la recherche ». Et l’Unsa d’attaquer : « Cela fait des mois que les universitaires se dépensent sans compter pour assurer la continuité du service public de l’enseignement supérieur. La plupart sont épuisés. Est-ce pour renforcer l’attractivité du métier d’enseignant-chercheur que l’on stigmatise des pans entiers de la recherche ? »

      Avant même la polémique sur « l’islamo-gauchisme », la communauté universitaire s’était émue, cet automne, des attaques faites aux libertés académiques lors de l’examen puis du vote de la Loi de programmation de la recherche (LPR). Les premiers à avoir demandé la démission de Frédérique Vidal ont été les membres de la Commission permanente du conseil national des universités (CP-CNU), une instance aux deux tiers élus et se prononçant sur le recrutement et la carrière des enseignants-chercheurs.

      Déjà le 7 novembre 2020, ils estimaient que Frédérique Vidal devait quitter ses fonctions, dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron. La CP-CNU y déplorait le fait de ne jamais avoir été entendu lors de la préparation de la LPR. L’ultime affront, celui poussant cette instance à demander pour la première fois de son existence la démission d’un ministre, étant le vote au Sénat, tard dans la nuit du 28 au 29 octobre 2020 et avec le soutien du gouvernement, de deux amendements sulfureux.

      Le premier sanctionne de trois ans de prison l’occupation en réunion d’un bâtiment universitaire. Le second passe outre l’expertise du CNU pour la qualification des professeurs et marque le début de la même expérimentation pour les maîtres de conférences, remettant totalement en cause l’organisme qui délivre ladite qualification, le CNU.

      « En touchant à la question de l’autonomie de la production des savoirs vis-à-vis du pouvoir politique (quel qu’il soit) et aux libertés académiques, ainsi qu’au cadre national du recrutement des enseignants-chercheurs, ces amendements confirment le mépris dans lequel la communauté de l’enseignement supérieur et de la recherche est tenue depuis des mois en France », s’est alors alarmée l’organisation.

      Sylvie Bauer, présidente de la CP-CNU, se souvient de sa stupeur en découvrant la position du gouvernement : « À maintes reprises, le cabinet et la ministre nous avaient promis qu’ils ne toucheraient pas au CNU et au recrutement des enseignants chercheurs, ils ont menti. » Une manière de faire si brutale qu’elle a choqué jusqu’à Cédric Villani, ancien représentant des universitaires chez LREM. 

      Le député de l’Essonne a même voté contre la #LPR. Dans une lettre publiée au lendemain du vote, il dénonce la réforme, sur le fond comme sur la forme. Au sujet de la criminalisation de l’occupation des facs, il écrit : « En tant que député, je trouve inconcevable qu’une telle disposition soit prise sans débat à l’Assemblée ; en tant qu’universitaire, je ne puis voter pour une telle limitation de nos précieuses libertés académiques. »

      Depuis, la colère de la CP-CNU n’est pas redescendue. « La seule fois où j’ai vu Frédérique Vidal depuis 2017, c’était en mars 2020. Nous étions en pleine mobilisation contre la LPR. Elle nous a engueulés parce que des profs exerçaient leur droit de grève. Elle s’est plainte que personne ne la soutienne », se rappelle Sylvie Bauer. Un récit confirmé par Fabrice Planchon, vice-président de la CP-CNU. Un échange tendu puis un appel à démission plus tard, les liens entre le ministère et l’instance ont complètement été rompus.

      La CP-CNU n’est pas la seule instance à avoir gardé un amer souvenir des discussions autour de la LPR. Patrick Lemaire, biologiste et président du collège des sociétés savantes académiques de France, se souvient d’une curieuse « #garden_party » organisée à l’été 2020 dans les jardins du ministère en guise de « concertation ». « C’était un drôle de mélange. Frédérique Vidal était là, debout, usant de l’argument d’autorité pour nous convaincre du bien-fondé de sa loi. Quand on la contredisait, elle pouvait devenir plus constructive mais ne remettait jamais en question son projet. Elle ne voulait rien changer à son texte, mais mieux l’expliquer. »

      Un autre invité se souvient auprès de Mediapart d’un « one-women show d’une heure et demie », du buffet, du beau jardin et de l’impression de s’être rendu à une réunion pour rien : « Nous, on aurait préféré être assis, à une table, pouvoir échanger calmement, échanger des dossiers. Ça ne s’est pas fait mais ça voulait peut-être dire que, pour elle, il n’y avait déjà plus grand-chose à discuter. »

      Pour dénoncer les attaques faites aux libertés académiques et le manque de dialogue social avec le ministère, les syndicats ne s’adressent d’ailleurs plus à Frédérique Vidal mais passent directement par le premier ministre. Même chose pour les décisions pour lutter contre la précarité étudiante, qui sont annoncées depuis l’Élysée.

      Toutes les organisations de l’arc syndical ont écrit, au moins à trois reprises, à Matignon sur l’unique mois de novembre 2020. Le 5 novembre, contre la fermeture des établissements. Le 9 novembre, contre un amendement sénatorial durant l’examen de la LPR, depuis retoqué par la commission paritaire mixte, visant à inscrire dans la loi que « les libertés académiques s’exercent dans le respect des valeurs de la République ». Le 16 novembre, la CGT, la FSU, FO, la CFDT, le SNPTES, Sud et l’Unsa reprenaient la plume pour demander un rendez-vous urgent à Jean Castex après le vote au Sénat des deux amendements, « validés par Frédérique Vidal » sans « consultations préalables », sur l’occupation des facs et la qualification des professeurs.

      La démission fracassante d’un directeur d’administration

      Plus particulièrement, Anne Roger, co-secrétaire générale du SNESUP-FSU, décrit des relations avec la ministre totalement dégradées. « C’est simple, on n’a pas de discussion avec elle. Notre dernier rendez-vous avec le cabinet remonte à quatre mois, il n’y avait ni la ministre, ni le directeur, ni le directeur adjoint de son cabinet. C’était juste pour nous calmer », souffle la représentante syndicale. Selon elle, les rendez-vous sont « des grand-messes qui ne sont pas exactement le lieu du débat. Et à plusieurs reprises, lors de ces réunions, en multilatérales ou au CNESER (Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche), elle vient, fait son topo, écoute un peu puis part et laisse son cabinet gérer la fin de la réunion. En fait, l’important pour elle, c’est de dire, pas d’écouter. »

      Cette absence d’écoute est aussi ressentie par le Syndicat national des travailleurs de la recherche scientifique (SNTRS-CGT), qui vient d’ailleurs de remporter une bataille judiciaire contre le ministère. Le tribunal administratif de Paris a ordonné, le 8 mars, en référé, à Frédérique Vidal de convier le syndicat aux réunions de suivi du protocole d’accord relatif à l’amélioration des rémunérations et des carrières des agents du ministère jusqu’en 2027.

      Début 2021, la ministre avait unilatéralement décidé d’écarter des réunions de suivi la FERC-CGT (la fédération à laquelle est affilié le SNTRS-CGT), qui s’était opposé publiquement au protocole d’accord. Or, cette décision « porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté syndicale », a estimé le juge des référés.

      Devant le tribunal administratif, le représentant du ministère a soutenu que la FERC-CGT n’avait pas été lésé puisque aucune réunion n’avait jusqu’ici été organisée, ni même programmée, avec les autres organisations syndicales. Ce qui est faux, une première réunion du comité de suivi ayant même été organisée le 5 février, selon nos informations. Interrogé sur ce mensonge, le cabinet de la ministre nous a fait savoir qu’il ne souhaitait pas répondre (voir notre « Boîte noire »).

      Même impression de désinvolture au CHSCT du ministère. Alors qu’elle préside cette instance, Frédérique Vidal ne s’est jamais rendue à aucune des réunions. S’il est habituel que les ministres se fassent excuser, « vu la crise sanitaire, il aurait été logique qu’elle montre un peu d’intérêt… », grince une membre du CHSCT. Un avis de l’instance, en date du 6 novembre 2020, laisse transparaître un agacement général : « Les représentants du personnel du CHSCT MESR attendent que la ministre montre un intérêt à l’instance qu’elle préside, en y faisant acte de présence, ne serait-ce qu’une fois. »

      D’autant plus que le CHSCT semble être baladé, de réunions exceptionnelles en délais incompressibles, dans une urgence permanente. Tous les membres se souviendront de cette réunion du 18 décembre 2020 à 15 heures, dernier jour avant les vacances de Noël. Ils y ont été convoqués à la dernière minute, la veille à 17 heures. « Prendre son service dans cet état de stress et de panique constitue à l’évidence un danger grave et imminent pour tous les personnels, mais également et par voie de conséquence pour les étudiants », relève d’ailleurs l’avis du CHSCT.

      Lors de cette réunion fut discutée la mise en place d’une circulaire permettant le retour progressif des étudiants à l’université à partir du 4 janvier 2021, par groupe de dix. La circulaire, rendue publique le samedi 19 décembre, était censée être applicable dès la rentrée. Impossible, pourtant, pour la plupart des universités, de mettre en place de telles dispositions mal ficelées et diffusées pendant les vacances scolaires. Par ailleurs, la circulaire contrevenait à un décret qui n’a finalement été modifié que le 9 janvier 2021, cinq jours après le début de la soi-disant rentrée. « À chaque fois on râle, mais ça n’a aucun impact, souffle la membre du CHSCT. Même avec la crise, on pourrait mieux anticiper et réfléchir. »

      « Aux États-Unis, ils se sont organisés dès le mois de mai 2020 pour l’année universitaire 2020-2021, avec des cours en ligne, des programmes allégés. Nous aussi, on aurait pu le faire, mais Frédérique Vidal ne nous a pas écoutés », abonde Bruno Vallette.

      Ce mathématicien a bien connu Frédérique Vidal à l’université de Nice, où la ministre a passé l’intégralité de sa carrière : étudiante puis maître de conférences en 1994, professeure des universités en 2002 (elle n’a officiellement jamais encadré de thèse), directrice de l’UFR Sciences en 2009 et, enfin, présidente de l’université à partir de 2012, jusqu’à son entrée au gouvernement en 2017.

      Élu d’opposition (Snesup) au conseil d’administration, Bruno Vallette retient des mandats de Frédérique Vidal, arrivée à la présidence d’une université désorganisée et exsangue financièrement, une gestion « “en bonne mère de famille”, comme elle le disait elle-même, mais de manière autocratique, toute seule, au nom de l’efficacité ». « Elle sait mieux que les autres. Je trouve au ministère sa manière de fonctionner à l’université de Nice », insiste le professeur, désormais à l’université Paris-XIII.

      Son passage à la présidence de l’université de Nice n’a pas laissé un mauvais souvenir qu’à ses opposants. « Je n’avais aucun a priori négatif. Je savais qu’elle avait publié dans des revues prestigieuses et elle a, d’ailleurs, été accueillie de façon tout à fait conviviale », se rappelle Frédéric Torterat, l’un des maîtres de conférences rattachés à une équipe de recherche supprimée brutalement en 2017 sous la présidence de Frédérique Vidal. « On ne s’y attendait pas, j’ai dû partir à l’université de Montpellier, complète-t-il. On était 15 à 16 enseignants chercheurs et deux fois plus de doctorants et on a tous dû changer d’unité, et pour certains changer d’université. Elle ne nous a même pas prévenus, c’est assez irrespectueux. »

      Pour l’ancienne directrice de cette unité de recherche, « ce fut un traumatisme ». Nicole Biagioli, aujourd’hui professeure émérite à l’université de Nice, se rappelle de la manière avec laquelle son travail de plusieurs années a été anéanti : « Mme Vidal a fait voter par le conseil d’administration – sauf les élus FSU – la suppression de mon laboratoire en refusant de le faire évaluer scientifiquement, alors que tout était prêt pour la visite de l’HCERES (Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur). Je n’en ai jamais été avisée par Mme Vidal, c’est sa collègue en charge de la visite pour le HCERES qui m’a appris la suppression du laboratoire. Au niveau réglementaire, elle a le droit de le faire mais la moindre des choses aurait été de nous prévenir… » Un récit confirmé par Chantal Amade-Escot, déléguée scientifique pour les sciences de l’éducation auprès du HCERES de 2015 à 2018 et professeure émérite à l’université de Toulouse…

      Aujourd’hui, Nicole Biagioli estime que « Mme Vidal n’est ni formée ni intéressée par les langues, les lettres et les sciences humaines. Il y a chez elle une certaine forme de mépris pour ces matières ».

      Rue Descartes, où l’ambiance s’est alourdie au fur et à mesure de l’aggravation de la crise sanitaire, l’explosion a finalement eu lieu le 25 novembre 2020. #Bernard_Larrouturou, alors directeur général de la recherche et de l’innovation (DGRI), l’une des deux directions d’administration centrale, démissionne avec fracas.

      Il s’en explique à ses anciens collègues dans un courrier, sans mâcher ses mots. « Cette démission a été pour moi une décision difficile, et même douloureuse… Je ne m’y suis résolu que parce que l’isolement, entretenu par la direction du cabinet, par la ministre, avec laquelle les directeurs généraux n’ont eu aucun échange depuis plus de six mois, et les difficultés aiguës qui persistent depuis un an et demi en matière de relations de travail entre le cabinet et les services ont installé un véritable empêchement, voire une impossibilité, pour la conduite des actions que la DGRI doit porter », dénonce-t-il dans une lettre de trois pages, dont des premiers extraits avaient été dévoilés par Libération et que Mediapart publie ci-dessous en intégralité.

      Dans son courrier, qui est remonté jusqu’à l’Élysée, Bernard #Larrouturou déplore notamment l’isolement de la ministre avec ses équipes. Il y raconte, par exemple, comment « elle a traité avec mépris et humilié des personnes de la DGRI ou lorsqu’elle a exigé arbitrairement la mise à pied de tel cadre de nos équipes… ». Interrogé sur le contenu de cette missive accablante, Frédérique Vidal n’a pas répondu non plus.

      Des relations compliquées avec les parlementaires

      « Le rythme des cabinets a toujours été caractérisé par l’urgence mais, ce qu’il y a de nouveau depuis l’arrivée de Frédérique Vidal, c’est qu’il est de plus en plus fréquent que le cabinet court-circuite les directions et aille directement voir les agents, ça peut créer de grandes tensions », relève Sylvie Aebischer, responsable CGT Educ’action pour l’administration centrale qui compte plus de 3 300 agents.

      À l’hiver 2018, lors d’un CHSCT, des délégués du personnel et le médecin de prévention alertent sur la situation au sein du service de la stratégie des formations et de la vie étudiante. Un rapport est commandé à l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR). Ses résultats remis le 26 mars 2019, auxquels Mediapart a eu accès, font notamment état « de situations collectives de #souffrance_au_travail ». Les inspecteurs pointent du doigt une surcharge de travail, des conflits éthiques, « des relations au travail compliquées, avec des problèmes liés au soutien jugé parfois insuffisant de la hiérarchie, régulièrement encartée ou empêchée, parfois mis en fragilité par un pilotage peu clair ».

      L’une des douze recommandations de l’inspection était de formaliser les rapports avec le cabinet. Signée en juillet 2019, une charte prévoit depuis l’organisation de réunions régulières entre les directeurs d’administration et le cabinet pour fluidifier les relations. Une tentative qui se soldera par un échec, comme en témoigne la démission de Bernard Larrouturou l’année suivante.

      Au Parlement aussi, les relations avec la ministre sont tout sauf fluides. Au Sénat, une séquence reste gravée dans les mémoires. Le 7 avril 2020, Frédérique Vidal renvoie dans les cordes le sénateur communiste Pierre Ouzoulias qui lui demande pourquoi les biologistes de Marseille ne sont pas dotés d’un cryo-microscope électronique pour étudier le SARS-CoV-2.

      Ces biologistes n’ont qu’à se déplacer à Nice où se trouverait justement un « magnifique microscope » au sein du « Centre commun de microscopie appliquée (CCMA) », répond avec assurance la ministre. Frédérique Vidal, biochimiste de formation, rappelle qu’elle a fait toute sa carrière à Nice – « je connais donc bien le sujet », glisse-t-elle, avec certitude. Sauf que son explication est fausse : l’équipement niçois ne comporte aucun cry-microscope capable d’aider les biologistes à élucider la structure moléculaire du virus, relève le journaliste spécialisé Sylvestre Huet sur son blog.

      Frédérique Vidal « répond souvent avec beaucoup de désinvolture », regrette le député d’opposition Régis Juanico (Génération·s), membre de la commission des affaires culturelles de l’Assemblée. « Elle nous répond souvent avec suffisance en se référant à son passé de présidente d’université. Cela lui permet de disqualifier les élus qui ne seraient pas d’accord avec elle », ajoute-t-il. Le parlementaire relève aussi que la ministre « n’a jamais répondu » aux conclusions de son rapport parlementaire, co-rédigé avec Nathalie Sarles (LREM), sur Parcoursup.

      « En audition, on a le sentiment qu’elle ne se sent pas concernée », abonde la députée communiste Marie-George Buffet, membre de la même commission. Lors de l’audition du 10 novembre 2021, dans le cadre du rapport sur l’impact qu’a eu le Covid sur les jeunes et les enfants, l’élue de Seine-Saint-Denis a relevé que, « contrairement à d’autres ministres », Frédérique Vidal « répétait des éléments de langage sans répondre réellement ». « Est-ce qu’elle pensait que cette audition n’avait pas d’importance ? Est-ce que la problématique des étudiants ne l’intéresse pas ? », s’interroge la députée.

      Le député LREM Bruno Studer, qui préside la commission, voit les choses autrement : « Je lance régulièrement des missions d’information qui portent sur la recherche et à chaque fois le cabinet se met à disposition des parlementaires. La ministre vient régulièrement devant la commission », témoigne-t-il. Il précise que Frédérique Vidal « est une ministre technique, pas politique », raison pour laquelle elle n’aurait donc pas « tous les codes ».

      « Les choses se sont tendues ces dernières semaines avec ces histoires d’islamo-gauchisme », reconnaît le député de la majorité, en expliquant avoir lui-même été étonné par l’ouverture de cette séquence. « Je ne sais pas ce qu’il s’est passé. Ça m’a surpris de sa part et je lui ai dit, je suis plutôt en désaccord. Ce ne sera pas la première fois que je trouve que des ministres ont des expressions maladroites. »

      Plutôt qu’une expression « maladroite », la séquence sur l’islamo-gauchisme a été réfléchie sur un coin de table par une poignée de membres de l’entourage de la ministre, ainsi que nous l’ont indiqué plusieurs témoins. Cette orientation correspond aussi à la recomposition d’un cabinet, qui a connu un turn-over impressionnant ces dernières semaines. « Cette stratégie ne correspond pas à ce que Frédérique pense », veut croire un de ses proches.

      Plusieurs interlocuteurs datent une vraie rupture à partir du remplacement du directeur de cabinet de la ministre, le 4 mai 2020, par un ancien du cabinet de Manuel Valls à Matignon. La nouvelle conseillère presse de Frédérique Vidal est également la fondatrice des « #Jeunes_avec_Valls », micro-mouvement créé en décembre 2016 pour accompagner la candidature de l’ancien premier ministre à la primaire du PS.

      Beaucoup s’interrogent aussi sur la place croissante occupée par le conseiller spécial de la ministre, un certain #Graig_Monetti, qui cumule aussi avec les fonctions de chef de cabinet. Le trentenaire, qui connaît bien Frédérique Vidal depuis ses années étudiantes à l’université de Nice, où il a présidé l’antenne locale du syndicat étudiant de la Fage, a gravi un à un les échelons de son cabinet. En juin, il a aussi été élu adjoint au maire de Nice Christian Estrosi, avec une délégation à la jeunesse. Ce qui n’est pas sans créer une certaine confusion : on peine parfois à discerner au nom de qui (le ministère ou la mairie de Nice) il intervient dans certains dossiers universitaires.

      Selon un fin connaisseur de la rue Descartes, « Frédérique Vidal a écarté les autres et n’écoute plus que lui ». Cela n’a pas empêché l’actuel président de la Fage, Paul Mayaux, de prendre quelques distances avec le ministère.

      Son syndicat a même appelé à la mobilisation intersyndicale du 26 janvier 2021. « Ce n’est pas leur stratégie politique. Si même eux y vont, c’est un signe qu’il y a une absence totale d’écoute de la part du gouvernement », glisse une responsable syndicale étudiante sous le couvert de l’anonymat. Paul Mayaux confirme : « Effectivement, ce qui s’est passé le 26 janvier, ce ne sont pas des choses qui arrivent souvent. Il y a urgence et même si parfois le cabinet examine certaines de nos propositions, on n’a pas été entendus au bon moment sur la crise des étudiants. C’était trop tard et trop faible, même si on ne nie pas que quelques mesures ont été prises dans le bon sens. »

      En dehors des Jeunes avec Macron, logiquement du côté du gouvernement, les autres organisations de jeunesse sont nettement plus critiques. Frédérique Vidal est « méprisante » et « infantilisante » avec les étudiants, notamment dans son expression publique, dénonce Mélanie Luce, la présidente de l’Unef. Lors d’un énième retour symbolique à l’université, le lundi 11 janvier 2021, à Cergy-Université, la ministre glisse, selon Le Monde : « Le problème, c’est le brassage. Ce n’est pas le cours dans l’amphithéâtre mais l’étudiant qui prend un café à la pause, un bonbon qui traîne sur la table ou un sandwich avec les copains à la cafétéria. »

      « On ne demande pas juste sa démission, on veut un vrai changement politique », affirme Mélanie Luce dont l’organisation s’est opposée farouchement aux trois grandes réformes de Frédérique Vidal : Parcoursup, qui instaure la sélection à l’entrée de l’université, « Bienvenue en France », qui multiplie les frais d’inscription pour les étudiants étrangers, et la LPR, qui réforme en grande partie l’université et la recherche française.

      La crise du Covid et sa gestion chaotique par le ministère de l’enseignement supérieur puis la polémique autour de l’islamo-gauchisme ont été les attaques de trop. « Nous, notre priorité, c’est comment aider les étudiants à sortir de cette crise. On demande 1,5 milliard d’euros mais ça n’avance jamais. La solution pour sortir un peu la tête de l’eau, c’est d’augmenter les APL et les bourses du Crous, on le répète sans cesse mais on a l’impression de ne pas être entendus », souffle la présidente de l’Unef. En ce qui concerne les bourses, la refonte du système Crous promise par l’exécutif ne vient pas. Et pour les APL, une réforme a bien eu lieu, mais elle désavantage les jeunes travailleurs et les étudiants en apprentissage.

      « Des milliers d’étudiants font la file pour pouvoir manger. On attendait des aides qui soient à la hauteur de la crise, de la précarité et de la détresse psychologique qu’on voit tous les jours. À la place, on a eu une nouvelle polémique sur l’islamo-gauchisme. C’était tout, sauf ce qu’on attendait… », souffle Ulysse Guttmann-Faure, qui préside l’association Co’p1, fondée en octobre 2020 par six étudiants parisiens pour distribuer de la nourriture aux étudiants précaires.

      L’étudiant, dont l’association rassemble désormais 300 bénévoles, note qu’il « a fallu des mobilisations dans la rue et des suicides pour que la ministre nous entende ». « Et encore…, reprend-il, il y a eu de petites avancées, mais c’était trop tard et pas suffisant ». Les files d’attente, le soir, à la banque alimentaire ne désemplissent effectivement pas.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/220321/derriere-la-polemique-sur-l-islamo-gauchisme-la-ministre-vidal-isolee-comm

      Citation :

      Plutôt qu’une expression « maladroite », la séquence sur l’islamo-gauchisme a été réfléchie sur un coin de table par une poignée de membres de l’entourage de la ministre, ainsi que nous l’ont indiqué plusieurs témoins. Cette orientation correspond aussi à la recomposition d’un cabinet, qui a connu un turn-over impressionnant ces dernières semaines. « Cette stratégie ne correspond pas à ce que Frédérique pense », veut croire un de ses proches.

    • Communiqué de presse de l’#Action_française suite à leur action contre l’hôtel de région Occitanie (25.03.2021) (https://www.midilibre.fr/2021/03/25/toulouse-deux-membres-daction-francaise-tentent-de-sintroduire-au-sein-du-) :

      –-> où on peut voir, comme l’a identifié Pierre Plottu sur twitter, que « l’Action française a donc diffusé un communiqué pour revendiquer cette action.
      Il s’y appuie notamment sur les propos de votre collègue, Mme la ministre Vidal, sur un prétendu l’islamo-gauchisme qui gangrènerait les universités pour la justifier. »


      https://twitter.com/pierre_plottu/status/1375188878630477831

      Repris aussi sur le blog academia :
      https://academia.hypotheses.org/31962

    • « Combien d’attaques contre la science faudra-t-il pour briser le silence ? »

      Des procès en islamo-gauchisme à la disparition annoncée de l’Observatoire de la laïcité, les volontés de faire taire toute pensée critique se multiplient dangereusement, alertent Albert Ogien et Sandra Laugier.

      Il est des #silences qui sont plus accablants que des milliers de discours. Il y eut d’abord celui qui a entouré la publication de la liste rouge des enseignants-chercheurs « islamo-gauchistes », accusés de « gangréner » l’Université en faisant de la politique plutôt que de la science. Il y eut ensuite celui qui a accompagné le rejet de la candidature d’une personnalité scientifique de renom (#Nonna_Mayer) à la présidence de Sciences Po, après qu’elle a été publiquement réprouvée au nom de son engagement en faveur des exclus. Et puis est venu celui qui entoure la disparition annoncée de l’#Observatoire_de_la_laïcité, que la secrétaire d’Etat à la citoyenneté Marlène Schiappa présente comme une simple formalité, le mandat de sa direction arrivant à expiration. Et maintenant la course à l’échalote des sénateurs pour remporter le prix de l’amendement le plus sévère apporté à la loi confortant le respect des principes de la République. Bien sûr, quelques voix se sont élevées pour condamner chacune de ces attaques écœurantes contre le droit et la pensée, mais elles sont elles-mêmes déconsidérées ou ignorées, comme une discordance dans l’indifférence convenue et majoritaire des politiques, des médias et des intellectuels.

      Une étrange confrérie de traqueurs-censeurs

      Ces silences sont autant de reculs et d’abdications face à la #violence qu’exerce cette étrange confrérie de militants qui réunit des personnes venant d’horizons idéologiques différents et partageant une même volonté : disqualifier, rendre inaudibles, voire interdire les voix qui leur déplaisent et contestent leur autorité. Leur principale occupation et obsession consiste à dénicher et détruire la moindre intervention publique ou expression qui signale une compréhension des problèmes politiques et sociaux du présent ; notamment des revendications et souffrances des groupes de population qui subissent des inégalités, des discriminations, des dénis de citoyenneté, au nom d’une ascendance dont la légitimité reste suspecte – « les Noirs et les Arabes » pour parler clair. Et petit à petit, la #traque et l’#opprobre ont gagné d’autres thèmes présentés comme autant de manifestations de #dégénérescence : les études décoloniales, l’écriture inclusive, les études de genre, l’emploi du mot de « racisé », les réunions non-mixtes…

      Discréditer la recherche

      Cette inquisition permanente, inimaginable encore il y a quelques mois, a aujourd’hui une cible prioritaire : ceux et celles qui disposent de titres universitaires et d’une parole publique, et qu’elle accuse de minorer les graves menaces que ferait peser l’islamisme sur la paix civile et les libertés individuelles. Mais la lutte contre le terrorisme doit-elle se mener sur ce front ? En s’en prenant à la production de connaissance, elle s’avilit. Ses agents ne s’embarrassent plus d’aucune considération pour les torts infligés aux personnes ou aux organisations qu’ils livrent en bloc à la vindicte – ou aux injures sur des réseaux sociaux mobilisés à leur profit et dont la force de frappe est incommensurable à celle de la recherche.

      Leur but est que les travaux scientifiques soient discrédités sur un #soupçon, que les enseignements soient marginalisés avant si possible d’être interdits, avec toutes les conséquences de cette mise en cause sur les vies et carrières d’universitaires qui travaillent simplement à maintenir la recherche française au niveau des standards internationaux. C’est que, n’en déplaise à nos censeurs, les questions du #racisme_systémique, des violences faites aux femmes, du #sexisme et de l’#homophobie, mais aussi du désastre climatique et de la souffrance animale (questions qu’on croyait plus consensuelles mais depuis incluses, pour faire bon prix, dans le paquet) sont reconnues dans le monde académique global alors que de vieilles résistances font, en France, qu’elles restent polémiques.

      Une peur viscérale de l’islam

      Ce qui est étrange est que ce front des bien-pensants se construit sur une #peur viscérale de la religion musulmane, à laquelle il prête des propriétés qui en feraient l’ennemi irréductible de la modernité démocratique. Cette peur alimente la crainte fantasmatique de l’organisation d’une cinquième colonne qui occuperait déjà les « territoires perdus de la République », attendant son heure pour frapper et déloger les nationaux. Et chaque meurtre commis au nom de l’Etat islamique (quelle que soit la réalité de cette allégeance) est une occasion de raviver la suspicion. Dès lors, évoquer et analyser les #injustices, les #discriminations, l’#exclusion ou le #harcèlement_policier subis par « l’ennemi de l’intérieur » revient à pactiser ou trahir.

      Pour faire taire ceux et celles qui doutent sincèrement d’une telle menace de l’islam, une solution ne serait-elle pas de documenter, de quantifier et d’exposer publiquement le danger ? Cela ferait normalement tomber les réticences. Mais voilà : aucune information ne filtre qui permettrait de confirmer les craintes des apeurés. La seule indication qui vient périodiquement donner un peu de crédit à cette accusation est celle, livrée sans aucun détail, du nombre d’attentats qui auraient été déjoués par les services de renseignements sur le territoire français. Parfois, la mise en scène de l’arrestation d’un ou une « terroriste » dont, la plupart du temps, on est bien en peine de savoir exactement quel objectif il ou elle poursuivait.

      Nous sommes donc tous censés savoir que nous vivons dans un état d’alerte permanent sans en être vraiment alertés. Un peu comme nous traversons la crise sanitaire sans être jamais associés aux mesures prises par une poignée de « sachants » autoproclamés qui décident seuls de ce qui est bon pour en finir avec le Covid 19, avec le succès qu’on sait. Les avertis qui se sont arrogé le droit d’organiser la riposte se posent de même en surplomb de la République. Les premières victimes de ces sentinelles sont tous ces citoyens qui sont ramenés à une identité musulmane sans qu’on ne leur demande leur avis, sauf quand on les somme de prendre position contre les attentats (eux à la différence des autres, comme si c’était moins évident). On a beau jurer ne pas vouloir faire d’amalgame entre musulman et islamiste radical, le moindre signe d’appartenance à cette communauté est vu comme un péril pour la nation. Ce qui est choquant dans cette volonté d’ostraciser un groupe social est le fait qu’elle méprise totalement les sensibilités individuelles et gomme la diversité des croyances et des opinions qui s’y expriment.

      Extension du domaine de la #suspicion

      Et dans un saut épistémique propre à tous les régimes autoritaires et promoteurs de l’#ignorance, cette suspicion s’étend en deuxième lieu à tous ceux qui, dans les milieux de la recherche et de l’enseignement, s’efforcent de prendre la juste mesure du danger djihadiste et introduisent des distinctions et des clarifications qui en dressent un tableau réaliste. Un tel saut a été effectué par les gouvernements qui au Brésil, aux Etats-Unis, en Hongrie, en Pologne ou en Turquie ont allié la misogynie, l’homophobie, les discriminations ethniques et le climato-scepticisme de leurs politiques à la suppression des recherches sur les femmes, les sexualités, le racisme ou l’environnement ; par l’ex-président Trump, qui tout en multipliant les mesures discriminatoires et soutenant ouvertement les violences contre les Noirs a voulu faire réécrire les manuels scolaires pour y minorer l’histoire de l’esclavage ; et en France, par la violence inédite d’un gouvernement contre les universitaires qui observent les discriminations qui travaillent la société française.

      Ce saut est révélateur : il s’agit de décourager la #pensée_critique et l’#argumentation_rationnelle, immédiatement traînées dans la boue des réseaux et dans la mêlée des plateaux TV ou radio – où les quelques chercheurs qui se risquent encore à faire entendre des éléments de connaissance se retrouvent mis sur un pied d’égalité avec des idéologues ignorants du domaine. Cette situation honteuse, qui rappelle les mauvaises heures du maccarthysme, s’explique ici par une haine conjuguée des recherches et des objets/sujets de ces recherches. Ce phénomène est connu des spécialistes du genre. Il prend ces derniers temps l’allure ultra glauque d’un #assaut concerté mené par des ministres et des intellectuels alliés, par calcul politique incertain, pour faire taire toutes les voix, des plus vives au plus modérées, qui les rappellent aux exigences minimales de l’égalité. Voilà qui nous oblige à briser ce silence.

      https://www.nouvelobs.com/idees/20210415.OBS42801/combien-d-attaques-contre-la-science-faudra-t-il-pour-briser-le-silence.a

    • « Islamo-gauchisme » à l’université : « On ne peut pas nous accuser d’être des #militants »

      Face aux attaques contre les sciences humaines et sociales, accusées de diffuser un discours « islamo-gauchiste » à l’université, des universitaires angevines (Maine-et-Loire) sortent du bois et prennent la parole. Retour sur une polémique pas nouvelle, mais qui, depuis quelques mois, rebondit sur la scène politico-médiatique.

      Elles ont décidé de prendre la parole. Parce qu’elles ont des choses à dire et qu’elles en ont gros sur le cœur, surtout après les attaques visant #Nahema_Hanafi, leur collègue, maîtresse de conférences en histoire moderne et contemporain à l’Université d’Angers, après la publication de son ouvrage consacré aux « brouteurs ».

      Elles, ce sont ces universitaires angevines, dont le champ de recherches s’applique aux sciences humaines et sociales, confrontées aux attaques et aux accusations d’ « islamo-gauchisme » à l’université. De quoi parle-t-on ? Quel est le problème ? Décryptage.

      Pourquoi des responsables politiques visent-ils l’université ?

      La polémique concernant l’universitaire angevine Nahema Hanafi n’est pas tombée du ciel. Tout le monde garde en tête les déclarations de la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal. Dans un entretien sur CNews , le 14 février, elle a demandé une enquête sur « l’islamo-gauchisme » qui gangrènerait l’université.

      Avant de persister, tout en tentant de réduire la portée de son propos, puisqu’elle s’est montrée bien incapable de définir cette notion. Elle a été soutenue par certains de ses collègues. En réalité, elle avait été largement devancée par le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer. Pas plus précis, mais bien plus vindicatif contre les « ravages » à l’université.

      À chaque fois, ces sorties ont provoqué une levée de boucliers des chercheurs, en particulier du Centre national de la recherche scientifique, le CNRS.

      Cette attaque contre l’université est une antienne régulièrement reprise à droite comme à gauche, avec des relais forts comme le Printemps républicain dont le cofondateur, #Gilles_Clavreul, dénonce la pensée décoloniale. Idéologiquement proche de ce courant, qui défend une conception très restrictive de la laïcité, l’ancien Premier ministre socialiste #Manuel_Valls avait ouvert les hostilités au lendemain des attentats de novembre 2015 à Paris.

      Dans une première déclaration au Sénat, deux semaines après, il avait lancé : « J’en ai assez de ceux qui cherchent en permanence des excuses ou des explications culturelles ou sociologiques à ce qui s’est passé. » Quelques semaines plus tard, en janvier 2016, il avait poussé plus loin cette réflexion, lors d’un hommage aux victimes. « Il ne peut y avoir aucune explication qui vaille. Car expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser. »

      À l’origine de la récente polémique visant Nahema Hanafi et ses travaux, l’Observatoire du décolonialisme, fondé par des enseignants linguistes, historiens et médiévistes, creuse ce même sillon.

      Pourquoi la polémique touche- t-elle l’#Université_d’Angers ?

      Parce qu’un membre de cet Observatoire, #Hubert_Heckmann, maître de conférences en littérature du Moyen Âge à Rouen (Seine-Maritime) a publié, le 2 février, une tribune, sur le site internet de l’hebdomadaire Le Point , fustigeant le travail de Nahema Hanafi.

      Maîtresse de conférences en histoire moderne et contemporaine au sein de l’institution angevine, cette dernière est l’autrice d’un livre, L’arnaque à la nigériane, spams, rapports postcoloniaux et banditisme social , consacré aux « brouteurs », ces cyberescrocs spécialisés dans l’escroquerie à l’avance de frais.

      Pour Hubert Heckmann, l’universitaire angevine fait, dans son ouvrage, « en connaissance de cause, l’éloge d’un système criminel ». Des mots, comme un procès d’intention, qui ont trouvé un écho dans les milieux d’extrême droite.

      « L’article issu des travaux de l’Observatoire du décolonialisme et des théories identitaires », comme il est présenté, devient alors le terreau d’une haine sans filtre contre Nahema Hanafi. Une #haine déversée sur les réseaux sociaux et la section commentaires du site.

      La maîtresse de conférences encaisse, mais elle a décidé de porter plainte. Le parquet d’Angers a ouvert une enquête préliminaire. « Ces attaques ont suscité chez moi une vive émotion », exprime-t-elle.

      Bien sûr, il y a les insultes racistes, mais Nahema Hanafi s’alarme aussi de « voir attaqués, par des membres de l’université, des champs d’études et des méthodologies – celles des sciences sociales – pourtant essentiels à la compréhension de nos sociétés ».

      Qu’est-ce qu’on reproche aux sciences humaines et sociales ?

      Car, au fond, la question est là. Au-delà du « cas » Nahema Hanafi, tout un pan des recherches universitaires actuelles est actuellement remis en cause, autant par le monde politique que par le monde universitaire.

      Un opprobre grossi, déformé, récupéré, amplifié par la caisse de résonance des réseaux sociaux, et qui contribue, aujourd’hui, à un sentiment d’insécurité des enseignantes et enseignants investis dans ces recherches.

      « La période est tellement difficile pour nous que l’on se doit de faire attention aux paroles qui vont être portées publiquement, relève Marie Sonnette, enseignante-chercheuse en sociologie à l’Université d’Angers, qui travaille, notamment, sur les rapports de pouvoirs et de genre. Le moindre mot de travers peut nous porter préjudice. On se demande comment on va pouvoir continuer à faire notre métier. » Elle a d’ailleurs été contrainte de suspendre un temps son compte Twitter après des attaques groupées.

      Un métier qui, pour rappel, consiste à explorer et enseigner des disciplines liées à la réalité humaine, dans toute sa pluralité. Un métier qui, justement, en raison de cette pluralité, amène à investir des champs nouveaux, à l’aune de travaux, d’ici et d’ailleurs. Comme les études de genres, développées aux États-Unis.

      « Les sciences humaines et sociales aident à mieux comprendre le monde, plaide Chadia Arab, géographe à l’Université d’Angers et chargée de recherches au CNRS, qui travaille, notamment, sur les migrations et le genre. Elles servent aussi à expliquer les dysfonctionnements de ce monde, les inégalités produites par ce monde. Et je pense que c’est cela qui fait peur aux politiques. » Pas seulement les politiques…

      Ces recherches sont-elles le porte-voix d’un #militantisme ?

      Chadia Arab réfute ne serait-ce que l’idée. « Nous sommes tout le temps évalués, tout le temps éprouvés par la rigueur scientifique, il faut en tenir compte. On ne peut pas nous accuser d’être des militants en sciences sociales ni, pour aller vite, d’être des islamo-gauchistes. »

      Pour Katell Brestic, docteure en études germanophones à l’Université d’Angers, qui mène, notamment, des études postcoloniales et transnationales, c’est clair : « La valeur de nos recherches est scientifique, au même titre que celles d’un biologiste ou d’un généticien. Simplement, on ne travaille pas sur l’ADN avec des pipettes dans un laboratoire, mais sur d’autres formes de matériaux, qu’on analyse après, avec des grilles scientifiques précises. »

      Aujourd’hui, confrontées à un débat qui n’a plus rien d’apaisé, les universitaires angevines que nous avons interrogées sont inquiètes. Pour leurs champs de recherches, pour la liberté académique, pour l’avenir. Pour elles.

      « D’éminents confrères du monde entier ont récemment signé une tribune pour nous soutenir, souligne Marie Sonnette. Ils concluent en disant qu’ils seront prêts à accueillir les chercheurs qui ne pourront plus mener leurs recherches en France. Et ça, ça nous fait extrêmement peur. »

      https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/angers-49000/islamo-gauchisme-a-l-universite-on-ne-peut-pas-nous-accuser-d-etre-des-

    • Ecole de #Marion_Maréchal: anatomie d’un fiasco

      Lancé il y a trois ans, l’#Issep, qui se voulait le « Sciences-Po » de la droite de la droite, vivote. Loin de la communication à outrance, l’école recrute surtout parmi le microcosme des proches de l’ancienne députée frontiste.

      « Avez-vous déjà entendu parler de la “blanchité hégémonique” (les Blancs responsables de tous les malheurs du monde), du “racisme systémique” (l’État et la société française seraient intrinsèquement racistes) ou encore de la séparation du monde entre “dominants (blancs) et racisés” ? Sûrement trouvez-vous ces concepts délirants et dangereux. Eh bien sachez qu’aujourd’hui ces “thèses” sont très répandues voire enseignées dans de nombreuses écoles et universités du supérieur. »

      Dans un courrier de quatre pages envoyé le 16 avril à un fichier de 10 000 personnes, Marion Maréchal, qui entend bien profiter des polémiques sur « l’islamo-gauchisme » censé « gangrener » l’université, fait un vibrant appel aux dons pour son école de sciences politiques, l’Issep (Institut de sciences sociales, économiques et politiques), créée il y a trois ans à Lyon.

      « L’Issep est l’un des seuls remparts contre le terrorisme intellectuel qui sévit en France […] Si votre vœu le plus cher pour vos enfants ou petits-enfants est qu’ils fassent de belles études, il faut agir maintenant. Aussi modeste soit-il, votre geste peut changer l’avenir de notre cher pays », affirme l’ancienne députée FN.

      Elle décrit des facs où règnent des « commissaires du peuple d’un nouveau genre qui n’hésitent pas à utiliser la violence ou la menace » contre les mal-pensants. Pour achever de vaincre les dernières réticences, Marion Maréchal rappelle les déductions fiscales propres à ce type de dons.

      Initiés par le ministre de l’éducation nationale Jean-Michel Blanquer, au lendemain de l’assassinat de Samuel Paty, puis réactivés par la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche Frédérique Vidal, les débats autour de « l’islamo-gauchisme », les études de genre ou décoloniales à l’université semblent une formidable opportunité pour l’entreprise de la petite-fille de Jean-Marie Le Pen.

      Ces controverses, aussi artificielles soient-elles, offrent une soudaine légitimité au discours de l’extrême droite, qui n’a pendant longtemps pas dépassé ce cercle militant.

      « L’Issep étant né d’un constat négatif porté sur l’enseignement supérieur et en particulier les filières en sciences sociales – i.e. la baisse du niveau moyen des formations avec notamment l’abandon progressif des humanités et le militantisme associé, voire le sectarisme idéologique, qui sévissent trop souvent dans les établissements privés ou universitaires – les dérives et les violences du courant islamo-gauchiste ne font que conforter notre diagnostic et légitiment un peu plus notre existence, ce qui incite de nombreux Français à soutenir notre projet », assure d’ailleurs auprès de Mediapart Jacques de Guillebon, coprésident du conseil scientifique de l’Issep, également directeur de la rédaction du magazine L’Incorrect.

      Depuis son inauguration en juin 2018, l’Issep, qui se voulait une « vitrine » pour la « bataille culturelle » de la petite-fille de Jean-Marie Le Pen, aurait pu profiter d’un climat politique a priori favorable. Et pourtant, l’établissement, censé démontrer que l’ancienne députée du Vaucluse pouvait être une cheffe d’entreprise loin de la vie politique, vivote péniblement.

      Malgré un lancement sous une forêt de micros et de caméras, les débuts de « l’institut » ont été des plus laborieux. L’Issep n’a d’abord reçu l’agrément ministériel l’autorisant à s’afficher en tant qu’établissement privé du supérieur qu’en janvier 2019, plusieurs mois après son ouverture. En cause, un dossier administratif longtemps incomplet, l’école étant incapable de fournir au rectorat les informations administratives de base, comme l’avait raconté à l’époque une enquête de l’émission de télévision « Quotidien ».

      Dans la déclaration d’ouverture de l’Issep, transmise au rectorat de Lyon, Marion Maréchal promettait ainsi plus de 400 heures d’enseignement et une équipe d’une vingtaine de professeurs. Fin septembre, son dossier ne contenait plus que 90 heures de cours et apportait des informations lacunaires sur à peine six professeurs, comme l’avait révélé le magazine Challenges.

      Le « diplôme » de l’Issep n’a surtout aujourd’hui aucune valeur dans l’enseignement supérieur et n’offre aucune équivalence. Le tour de passe-passe, avancé lors de la création de l’école, consistant à nouer un partenariat avec une université européenne pour obtenir une équivalence de diplôme n’a pas marché.

      « Au-delà de la reconnaissance du diplôme, il est important d’avoir des partenaires de qualité afin de crédibiliser la pédagogie de notre école, répond l’Issep. Aujourd’hui, nous avons une antenne de l’Issep à Madrid, et des partenariats avec l’université de Saint-Pétersbourg en Russie et l’université du Saint-Esprit à Kaslik au Liban. » Ce qui signifie qu’aucune université européenne n’a souhaité associer son nom avec ce qui ressemble fort à une coquille vide.

      Celui qui a œuvré au partenariat entre l’Issep et l’université de Saint-Petersbourg, l’historien #Oleg_Sokolov, spécialiste de Napoléon, est aujourd’hui en prison depuis novembre 2019 après avoir tué et démembré son épouse de 24 ans, également son ancienne étudiante.

      Une affaire pour le moins embarrassante pour l’image de l’Issep, même si l’école n’y est évidemment pour rien. Le choix de s’adjoindre, cette année, les services du professeur de droit #Jean-Luc_Coronel_de_Boissezon, aujourd’hui renvoyé devant le tribunal correctionnel pour son implication, en mars 2018, dans une opération de l’extrême droite pour déloger des grévistes de la faculté de droit de Montpellier, pose par ailleurs question.

      Proches des identitaires, lui et son épouse, #Patricia_Margand, sont accusés d’avoir « activement participé à la mise en place » du commando, selon la juge d’instruction chargée du dossier, comme l’ont révélé Mediacités et Mediapart.

      « Nous avons fait le choix de lui confier un cours, parce que nous considérons cette histoire de l’université de Montpellier comme particulièrement injuste et politiquement orientée. C’est un professeur reconnu, qui a mené durant 30 ans une carrière irréprochable, et a toujours été apprécié par ses étudiants. Il a été la victime de bloqueurs d’extrême gauche outranciers et violents, laissés libres de leurs actions par un préfet qui n’a pas voulu prendre ses responsabilités », répond à ce propos Jacques de Guillebon.

      Le principal échec de l’école, qui n’a formé en trois ans que 230 étudiants, la majorité en formation continue (c’est-à-dire en suivant des cours quelques week-ends par an), est ailleurs. Il tient dans l’incapacité de recruter au-delà d’un tout petit cercle militant ou amical, comme a pu l’établir Mediapart. À chaque rentrée, Marion Maréchal est d’ailleurs obligée de battre le rappel pour trouver de nouvelles recrues.

      Un microcosme consanguin

      À cet égard, le pari de convaincre la bourgeoisie lyonnaise conservatrice d’inscrire ses enfants à l’Issep est un échec cuisant. « Nos étudiants ont des profils très variés, et la majorité n’a jamais eu d’engagement politique. Ils viennent de toute la France et de filières très diverses, allant de l’écogestion au droit, en passant par l’histoire ou des écoles d’ingénieur », affirme Jacques de Guillebon.

      Sauf que l’Issep, qui se targuait de concurrencer les instituts de sciences politiques, ne « forme » en réalité que des militants identitaires ou des proches de Marion Maréchal.

      Une certaine idée du « pluralisme » maintes fois mis en avant par la directrice de l’école, Marion Maréchal, qui n’a cessé de mettre en scène son retrait de la vie politique et sa distance avec le RN présidé par sa tante.

      L’examen de la liste que Mediapart s’est procurée des 35 étudiants inscrits en formation continue cette année – il existe deux promotions – est à ce titre édifiant.

      Un premier groupe d’élèves est constitué d’élus ou de membres du #RN de la région lyonnaise : #Enzo_Dubois est le référent #Génération_nation, la branche jeune du RN à Voiron ; #Antonia_Dufour est une ancienne conseillère départementale RN du canton de Monteux ; #Mathilde_Robert, qui milite au parti depuis ses 15 ans, était aussi candidate du RN aux municipales 2020 à Vienne (Isère) au côté d’#Adrien_Rubagotti, qui fait d’ailleurs, lui aussi, partie de la même promotion Issep.

      Le deuxième cercle est celui des militants de Génération identitaire (#GI), mouvement dissous en mars par le ministère de l’intérieur pour plusieurs motifs, dont la provocation à la « discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison » de leur origine, mais aussi pour présenter dans sa forme et son organisation « le caractère de groupes de combat ou de milices privées ».

      Sous son nom civil, #Anne-Thaïs_du_Tertre, on trouve la très médiatique #Thaïs_d’Escufon, porte-parole du groupuscule dissous et qui a fait parler d’elle pour avoir participé au happening identitaire – les militants de GI avaient déroulé en haut d’un immeuble une banderole contre « le racisme anti-Blanc » – en marge de la manifestation contre les violences policières place de la République, en juin 2020.

      Le président de GI, #Clément_Gandelin, dit « #Galant », fait aussi partie des « étudiants » de l’école de Marion Maréchal. Condamné en première instance à six mois de prison ferme, 2 000 euros d’amende et une privation de ses droits civiques pour une durée de cinq ans, dans l’affaire de l’opération anti-migrants à la frontière franco-italienne, en 2018, avant d’être relaxé par la cour d’appel de Grenoble, « Galant » avait déjà été condamné pour des faits de violence en marge d’une rencontre sportive.

      #Corentin_Merdy est lui aussi un militant bien connu de GI à Toulouse. Il a participé à l’action du groupe place de la République et a été interpellé au côté de Thaïs d’Escufon – une photo les immortalise ensemble dans le fourgon de police.

      Le troisième groupe est constitué de militants identitaires et de catholiques traditionalistes. On peut y classer #Alexis_Forget, qui tient la librairie identitaire #Les_Deux_Cités, à Nancy, et écrit régulièrement dans L’Incorrect, le journal de Jacques de Guillebon.

      La chroniqueuse à Sud Radio #Stella_Kamnga, qui se présente comme « citoyenne contre la désinformation » (et qu’on peut voir ici débattre à Sud Radio avec sa camarade de promotion Thaïs d’Escufon), fait elle aussi partie des étudiants de l’Issep cette année. L’engagement politique de certains, plus anonymes, se comprend assez rapidement en consultant leurs pages personnelles sur différents réseaux sociaux.

      Le dernier groupe, à l’intersection des groupes précédents, est constitué de « fille de », de « femme de » ou, pour un cas, de « mari de ». Il est intéressant en ce qu’il révèle l’étroitesse de la galaxie Marion Maréchal, en décalage total avec l’incroyable attention que lui accordent les médias depuis plusieurs années.

      La militante RN #Mathilde_Robert, précédemment citée, est ainsi non seulement l’épouse du conseiller régional RN #Thibaut_Monnier, grand ami de Marion Maréchal et cofondateur de l’Issep, mais elle est aussi la fille de #Sophie_Robert, candidate RN à la mairie de Saint-Étienne et vieille connaissance de la famille Le Pen. Cette dernière soutient tellement l’école que trois autres de ses filles sont dans la même formation. Une formation continue, qui leur permet de suivre de « vraies » études par ailleurs ou d’exercer un métier.

      #Anne-Sophie_Legauffre est, quant à elle, la compagne du conseiller régional #Antoine_Mellies, lui aussi proche parmi les proches de Marion Maréchal et qui a assuré lors du lancement de l’école les relations avec la presse.

      Autre étudiant en formation continue, #Benoît_Marion, imprimeur lyonnais de 43 ans, n’est autre que le mari d’#Agnès_Marion, candidate RN à la mairie de Lyon et qui gravite depuis des années dans la sphère des catholiques traditionalistes lyonnais proches de #Bruno_Gollnisch.

      Trois ans après sa création, l’Issep, qui affirme dans le courrier envoyé le 16 avril vouloir « former la jeunesse de notre pays, préparer l’élite de demain pour relever la France », forme donc surtout le microcosme consanguin des amis de Marion Maréchal. Une certaine idée de la relève.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/100521/ecole-de-marion-marechal-anatomie-d-un-fiasco#at_medium=custom7&at_campaig

  • Roland Dumas : « En 1995, les comptes de campagne de Balladur et Chirac étaient manifestement irréguliers » (article de 2015)
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2015/01/28/dumas-les-comptes-de-campagne-de-balladur-et-chirac-etaient-manifestement-ir

    L’ancien président du Conseil constitutionnel et ex-ministre socialiste Roland Dumas se dit « convaincu d’avoir sauvé la République » en ayant validé, en 1995, les comptes de campagne présidentielle « manifestement irréguliers » de Jacques Chirac, mais aussi d’Edouard Balladur.

    Si Roland Dumas, qui publie cette semaine ces carnets intimes, s’exprime pour la première fois publiquement sur cette affaire, Le Monde révèlait dès 2010 les dessous des tractations qui ont amené les « sages » du Conseil constitutionnel à valider les comptes, contre l’avis des rapporteurs. « Peut-on prendre le risque d’annuler l’élection présidentielle et de s’opposer, nous, Conseil constitutionnel, à des millions d’électeurs et ainsi remettre en cause la démocratie ? », aurait-il dit à l’époque devant les autres « sages », selon notre enquête.

  • Violence des Protectas au #Centre_Fédéral d’Asile de Giffers : Les requérant-e-s d’asile sont en danger…en #Suisse !

    Après les #violences des #Protectas contre les mineurs du Foyer de l’Etoile (GE), puis contre les réquérant-e-s du #CFA de Bâle, voici venu le tour des requérant-e-s du CFA de Giffers (FR) :

    Le 3 mai 2020, Ali, requérant camerounais, demande aux Protectas du CFA de Giffers, où il réside, de bien vouloir le laisser entrer rapidement (fouille obligatoire à l’entrée du CFA). Etant convalescent (COVID-19), il se sent faible et n’arrive plus à attendre que les Protectas aient terminé de discuter entre eux. Le ton s’enflamme immédiatement : deux Protectas le poussent violemment et le frappent. Ali se rend à l’hôpital : le constat fait état de multiples contusions. A son retour au centre vers 22h, les Protectas lui interdisent l’entrée : il doit dormir sur un banc à l’entrée.

    Ce même 3 mai 2020, Abdalim, requérant marocain, se voit intimer l’ordre de regagner sa chambre. N’ayant pas obtempéré suffisamment rapidement aux yeux du Protectas, celui-ci le pousse violemment contre une vitre, ce qui lui sectionne les tendons de la jambe. Il est hospitalisé puis opéré. Aujourd’hui encore, il marche difficilement avec des béquilles.

    Le 4 mai 2020, Mohamed, requérant algérien qui souffre d’épilepsie, subit lui aussi une agression de la part des Protectas. Ceux-ci veulent fouiller sa chambre et ils lui disent qu’elle est sale. Mohamed refuse. Deux Protectas l’agressent en l’empêchant de respirer. La situation provoque chez Mohamed une crise d’épilepsie et il est emmené à l’hôpital : le constat médical fait état d’une agression par étranglement avec une marque antérieure au niveau du cou.

    Aujourd’hui encore, Ali, Abdalim et Mohamed doivent chaque jour obtempérer aux ordres de leurs agresseurs : les Protectas incriminés travaillent toujours au CFA de Giffers !

    Ces violences ne sont pas des actes isolés. Le système des Centre Fédéraux d’Asile est fondé sur la répression et l’isolement. Les sommes allouées par la Confédération à la « sécurité » dans les CFA sont supérieures aux montants dédiés à l’encadrement social et sanitaire. Ce ne sont pas quelques heures de formation sur la thématique de l’asile qui vont transformer un agent de sécurité en travailleur social.

    Il y a urgence : les requérant-e-s d’asile qui viennent en Suisse pour y trouver refuge sont en DANGER dans les CFA ! Le système dit de sécurité, mis en place soi-disant pour les protéger, les met en réalité en danger.

    Pour Ali, Abdalim et Mohamed, nous demandons au Secrétariat d’Etat aux Migrations :

    Un déplacement URGENT dans un autre centre, hors de portée de leurs agresseurs et à proximité des transports publics ;
    Une suspension de leurs renvois en attendant le résultat des plaintes pénales déposées contre leurs agresseurs.

    Nous demandons aux autorités compétentes et avant qu’un drame ne se produise :

    L’ouverture des portes des CFA aux organisations et personnes de la société civile afin de rompre l’isolement et de cesser avec ces zones de non-droit ;
    L’engagement de travailleurs sociaux et soignants en nombre suffisant et ayant pour mission de SOUTENIR et de répondre aux besoins des requérant-e-s d’asile ;
    L’arrêt de toute collaboration avec des entreprises de sécurité privées de surcroit cotées en bourse (telles que Protectas, Securitas ou autre) dans le cadre des CFA et autres foyers.

    Face à la gravité de ces évènements, nous exigeons que Mario Gattiker, actuel directeur du Secrétariat d’Etat aux migrations et ancien directeur du service juridique de Caritas Suisse, réponde immédiatement aux questions suivantes :

    Est-ce que le personnel de sécurité responsable des maltraitances dénoncées est toujours en place ? Et si ou pourquoi ?
    Pourquoi la police n’a pas enquêté sur ces actes de violence ?
    Quel système de contrôle va mettre en place le SEM pour éviter ce genre de violences ?

    Solidarité Tattes et Droit de Rester Fribourg

    Reçu via la mailing-list Solidarité Tattes (https://solidaritetattes.ch), le 18.06.2020

    #centres_fédéraux #Giffers #Gouglera #Fribourg #asile #migrations #réfugiés

    Un centre géré par... #ORS of course !

    voir aussi la métaliste sur ORS :
    https://seenthis.net/messages/802341

    ping @cede @isskein

    • Le Courrier | Violences à #Chevrilles

      Trois requérants d’asile portent plainte contre les entreprises de sécurité mandatées par le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) et actives au centre fédéral d’asile de Chevrilles (#Giffers en allemand). Les trois plaignants accusent les agents de sécurité de violences physiques et d’agressions fréquentes envers les habitants du centre. Le Courrier relaie les témoignages d’Ali, Mohamed et Abdalim, victimes des violences dans le centre de Chevrilles, ainsi que ceux de deux agents de sécurité, qui déplorent leurs conditions de travail, qualifiées de “lamentables”, ainsi qu’une formation insuffisante du personnel de sécurité. Les agressions dans le centre de Chevrilles ont également été dénoncées par Solidarité Tattes et Droit De Rester Fribourg dans la newsletter publiée le 18 juin 2020 et relayée sur notre site. Ces trois plaintes surviennent en même temps que l’enquête de la WOZ et de la SRF sur les violences dans le centre fédéral d’asile de Bâle et dont nous nous faisions l’écho le 27 mai 2020.

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      Trois plaintes pénales ont été déposées contre des agents de sécurité mandatés par le Secrétariat d’Etat aux migrations à Chevrilles (FR). Des vigiles dénoncent une banalisation de la violence.

      Ils ont décidé de briser le silence assourdissant qui règne au lieu dit la Gouglera. Trois requérants d’asile ont porté plainte contre les entreprises de sécurité mandatées par le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) au Centre fédéral de Chevrilles (Giffers en allemand), situé en Haute-Singine (FR). Les trois hommes confient avoir été victimes de violences physiques de la part d’agents de sécurité. Blessés, ils ont été pris en charge par les urgences de l’hôpital de Fribourg, photos et constats médicaux à l’appui. Des employés de la sécurité font état d’une banalisation de la violence dans le centre.

      Le 4 mai, vers 17 h 15, Ali rentre à la Gouglera après s’être rendu à Fribourg. Lui qui a été atteint du Covid souffre encore de vertiges et souhaite se coucher. Il attend que le service de sécurité le fouille et effectue le protocole d’entrée dans le centre. D’après ses propos, les agents l’ignorent et le font attendre trente longues minutes. Malade, il s’impatiente, cogne contre la vitre et demande aux vigiles de faire leur travail. Vexés par cette interpellation, deux agents l’auraient poussé au sol et roué de coups.

      En sang devant le centre

      « Lorsque j’ai dit au personnel de sécurité de faire leur travail, ils ont réagi comme si je les avais insultés, raconte Ali. Je leur ai dit d’arrêter, que j’avais du mal à respirer. Ils ont répondu qu’ils n’en avaient rien à faire. » L’homme raconte avoir erré la tête en sang devant le bâtiment, Il aurait appelé la police qui lui aurait répondu qu’il devait négocier lui-même avec les vigiles son retour dans le centre.

      Grâce à l’aide d’un autre requérant, il parvient à prendre le bus pour Fribourg, mais perd connaissance avant d’arriver aux urgences. Des militaires l’escortent jusqu’à l’hôpital. Après quelques heures en observation, l’hôpital paie un taxi pour le ramener à la Gouglera. Aux portes du centre, il se serait vu refuser l’entrée et aurait passé la nuit sur un banc. « Pourquoi les autorités nous traitent-elles ainsi ? » s’interroge-t-il.

      Cette même journée du 4 mai, Mohamed affirme avoir aussi subi l’ire de vigiles. Il fait la sieste dans sa chambre lorsque deux agents lui demandent d’évacuer les lieux. L’un d’eux lui fait remarquer que sa chambre est sale, Mohamed décrit un ton agressif et injurieux. Il s’en plaint auprès du directeur du centre. Lorsqu’il sort de l’entretien, deux agents le prennent à part. L’un l’aurait attrapé à la gorge, tandis que l’autre lui aurait pris les pieds pour le sortir du bâtiment. Il est soudain pris d’une crise d’épilepsie.

      « Au lieu de me venir en aide, les agents ont ri. J’ai marché jusqu’à la route, mais j’ai perdu connaissance. Je me suis réveillé à l’hôpital. » Le constat médical mentionne une marque d’étranglement au niveau du cou. Selon la version des agents, Mohammed aurait été « agressé par un ami ». Celui-ci affirme pourtant que des témoins étaient présents. « Les agressions sont très fréquentes, personne n’ose rien dire. D’autres gens viendront après nous, je porte plainte pour que cela ne se reproduise plus. »

      Hospitalisé

      Abdalim marche difficilement avec des béquilles depuis sa sortie de l’hôpital le 7 mai. Il considère que des vigiles de Chevrilles ont « bousillé sa vie ». « Une bagarre a éclaté, moi je discutais tranquillement avec d’autres et on m’a demandé de rentrer dans ma chambre. » Abdalim ne s’est peut-être pas exécuté aussi rapidement que le souhaitait le personnel de sécurité. Il affirme avoir été violemment poussé contre une vitre, qui s’est brisée sous le choc et l’a grièvement blessé à la jambe.

      Le verre a sectionné plusieurs tendons, ce qui a nécessité une opération et une hospitalisation de cinq jours. « J’ai traversé 23 pays, tout ça pour perdre l’usage de ma jambe en Suisse », lance l’homme en colère. D’après les agents, il aurait perdu l’équilibre et serait tombé de lui-même sur la vitre.

      La police fribourgeoise affirme être intervenue une trentaine de fois au centre fédéral de Chevrilles en 2020. Depuis janvier 2019, quatre plaintes pénales ont été déposées pour des lésions corporelles simples. Les enquêtes sont en cours. D’après nos informations, le personnel impliqué dans ces agressions serait toujours en poste à Chevrilles. Contacté, le SEM affirme prendre la situation très au sérieux mais n’est pas autorisé à commenter les affaires en cours.

      La Gouglera n’est pas le seul centre d’asile concerné par la violence. Mi-mai, l’émission alémanique Rundschau et la Wochenzeitung dénoncent une violence structurelle au sein du centre fédéral d’asile de Bâle. Viviane Luisier, de l’association Solidarité Tattes, considère ces agressions comme l’une des conséquences de la nouvelle procédure d’asile. Elle dénonce la concentration des requérants dans des centres fédéraux. « Les réfugiés sont soumis à un régime carcéral, loin des centres urbains. Je crains que ces centres deviennent des zones de non-droit. »
      « Tolérance zéro »

      Les requérants d’asile ne sont pas seuls à juger la situation intolérable. Des employés des entreprises de sécurité mandatées par la Confédération, Securitas et Protectas, jugent également certains comportements inacceptables. Révoltés par l’attitude de certains de leurs collègues, deux ont décidé de témoigner anonymement.

      « Ce printemps, la situation est devenue très tendue. Certains agents sont allés trop loin », confie Julien*. « Le personnel de sécurité est très peu formé. Il faut de l’expérience pour immobiliser un individu. Les interventions dont je suis témoins sont très ‘sales’, elles peuvent souvent blesser les personnes que l’on cherche à immobiliser », relate Paul*. Il déplore aussi une attitude répressive. « Dans les scénarios d’exercice, les requérants d’asile sont présentés comme des gens violents en qui nous ne pouvons pas avoir confiance. »

      D’après les deux agents, le recours à la violence serait régulièrement valorisé au détriment du dialogue. « On nous demande d’appliquer la tolérance zéro, sans nous expliquer ce que cela signifie. Lorsque quelque chose ne va pas, on ne cherche pas à réfléchir, on tape dedans », constate Paul. Le SEM explique que le personnel a pour instruction de désamorcer verbalement les différends chaque fois que cela est possible. La contrainte est sensée n’être utilisé qu’en dernier recours. Pour Paul, cette théorie est peu mise en pratique. « Lors de notre formation, on nous a dit qu’il fallait recourir dans un premier temps à la stratégie de désescalade, mais il n’y a aucun protocole. »

      Le SEM affirme que le recours à des mesures coercitives non proportionnées n’est pas toléré et sanctionnée. Les vigiles peuvent se voir interdire de fournir des services au nom du SEM si des comportements illégaux ou intolérables sont identifiés. La responsabilité d’éventuelles autres sanctions revient aux entreprises de sécurité. « Lorsque les événements dérapent, les rapports sont rédigés par les agents eux-mêmes. Ils y mettent ce qu’ils veulent et sont couverts par la hiérarchie », commente Paul. Les deux vigiles affirment avoir été témoins de scènes lors desquelles certains de leurs collègues ont envenimé la situation, en provoquant les requérants d’asile. « On place des humains sous la surveillance d’enfants, c’est déplorable. » JJT

      Prénom fictif.
      « Nos conditions de travail sont lamentables »

      Maigre salaire, contrats à durée déterminée, horaires éreintants, planification tardive, le tableau que décrivent les agents de sécurité est peu reluisant. « Les journées de treize heures, les horaires qui fluctuent, les services de nuit qui s’enchaînent, ça fatigue et ça rend agressif, témoigne Julien. Depuis que je travaille dans le centre d’asile de Chevrilles, j’ai vu beaucoup de casse : des burn-out, des accidents, du harcèlement. La gestion du personnel est catastrophique. »

      Il affirme ne pas être serein, en raison du manque de matériel. « J’ai un collègue de 20 ans qui a travaillé sans gilet de protection. A plusieurs reprises, je n’ai pas eu de spray au poivre durant mes services et je n’avais pas de radio portative. » S’il n’excuse pas la violence, Julien pointe du doigt les entreprises de sécurité mandatées par la Confédération qui visent à maximiser les profits. « Nous ne sommes pas suffisamment formés pour gérer une telle pression. Il ne faut pas la même formation pour surveiller un parking que pour encadrer une population qui va du nourrisson à la grand-mère. », regrette-t-il.

      Une nouvelle convention de travail dans le domaine de la sécurité est entrée en vigueur le 1er juin. Si les salaires d’entrée ont été augmentés de 0,5 à 1% et le travail limité à deux cent dix heures par mois, ces améliorations restent très insuffisantes pour le syndicat Unia. « Les conditions de travail offertes par le SEM et le manque de formation sont extrêmement problématiques. Les adjudications des mandats de sécurité reposent essentiellement sur le prix, non sur la compétence et la formation des agents », regrette Arnaud Bouverat, secrétaire syndical.

      « Une formation solide constitue le seul rempart contre les violences. Economiser dans ce domaine n’est pas anodin : cela entraîne un danger pour la sécurité des habitants des centres et celle du personnel de sécurité » dénonce-t-il. JJT

      *Prénom fictif.

      https://asile.ch/2020/06/23/le-courrier-violences-a-chevrilles

    • Violences à #Chevrilles

      Trois #plaintes_pénales ont été déposées contre des agents de sécurité mandatés par le Secrétariat d’Etat aux migrations à Chevrilles (FR). Des vigiles dénoncent une banalisation de la violence.

      Ils ont décidé de briser le silence assourdissant qui règne au lieu dit la Gouglera. Trois requérants d’asile ont porté plainte contre les entreprises de sécurité mandatées par le #Secrétariat_d’Etat_aux_migrations (#SEM) au Centre fédéral de Chevrilles (Giffers en allemand), situé en #Haute-Singine (FR). Les trois hommes confient avoir été victimes de #violences_physiques de la part d’agents de sécurité. Blessés, ils ont été pris en charge par les urgences de l’hôpital de #Fribourg, photos et constats médicaux à l’appui. Des employés de la sécurité font état d’une banalisation de la #violence dans le centre.

      Le 4 mai, vers 17 h 15, Ali rentre à la Gouglera après s’être rendu à Fribourg. Lui qui a été atteint du #Covid-19 souffre encore de vertiges et souhaite se coucher. Il attend que le #service_de_sécurité le fouille et effectue le #protocole_d’entrée dans le centre. D’après ses propos, les agents l’ignorent et le font attendre trente longues minutes. Malade, il s’impatiente, cogne contre la vitre et demande aux vigiles de faire leur travail. Vexés par cette interpellation, deux agents l’auraient poussé au sol et roué de coups.

      En sang devant le centre

      « Lorsque j’ai dit au personnel de sécurité de faire leur travail, ils ont réagi comme si je les avais insultés, raconte Ali. Je leur ai dit d’arrêter, que j’avais du mal à respirer. Ils ont répondu qu’ils n’en avaient rien à faire. » L’homme raconte avoir erré la tête en sang devant le bâtiment, Il aurait appelé la #police qui lui aurait répondu qu’il devait négocier lui-même avec les #vigiles son retour dans le centre.

      Grâce à l’aide d’un autre requérant, il parvient à prendre le bus pour Fribourg, mais perd connaissance avant d’arriver aux urgences. Des militaires l’escortent jusqu’à l’#hôpital. Après quelques heures en observation, l’hôpital paie un taxi pour le ramener à la Gouglera. Aux portes du centre, il se serait vu refuser l’entrée et aurait passé la nuit sur un banc. « Pourquoi les autorités nous traitent-elles ainsi ? » s’interroge-t-il.

      Cette même journée du 4 mai, Mohamed affirme avoir aussi subi l’ire de vigiles. Il fait la sieste dans sa chambre lorsque deux agents lui demandent d’évacuer les lieux. L’un d’eux lui fait remarquer que sa chambre est sale, Mohamed décrit un ton agressif et injurieux. Il s’en plaint auprès du directeur du centre. Lorsqu’il sort de l’entretien, deux agents le prennent à part. L’un l’aurait attrapé à la gorge, tandis que l’autre lui aurait pris les pieds pour le sortir du bâtiment. Il est soudain pris d’une crise d’épilepsie.

      « Au lieu de me venir en aide, les agents ont ri. J’ai marché jusqu’à la route, mais j’ai perdu connaissance. Je me suis réveillé à l’hôpital. » Le constat médical mentionne une marque d’#étranglement au niveau du cou. Selon la version des agents, Mohammed aurait été « agressé par un ami ». Celui-ci affirme pourtant que des témoins étaient présents. « Les #agressions sont très fréquentes, personne n’ose rien dire. D’autres gens viendront après nous, je porte plainte pour que cela ne se reproduise plus. »

      Hospitalisé

      Abdalim marche difficilement avec des béquilles depuis sa sortie de l’hôpital le 7 mai. Il considère que des vigiles de Chevrilles ont « bousillé sa vie ». « Une bagarre a éclaté, moi je discutais tranquillement avec d’autres et on m’a demandé de rentrer dans ma chambre. » Abdalim ne s’est peut-être pas exécuté aussi rapidement que le souhaitait le personnel de sécurité. Il affirme avoir été violemment poussé contre une vitre, qui s’est brisée sous le choc et l’a grièvement blessé à la jambe.

      Le verre a sectionné plusieurs tendons, ce qui a nécessité une opération et une #hospitalisation de cinq jours. « J’ai traversé 23 pays, tout ça pour perdre l’usage de ma jambe en Suisse », lance l’homme en colère. D’après les agents, il aurait perdu l’équilibre et serait tombé de lui-même sur la vitre.

      La police fribourgeoise affirme être intervenue une trentaine de fois au centre fédéral de Chevrilles en 2020. Depuis janvier 2019, quatre plaintes pénales ont été déposées pour des #lésions_corporelles simples. Les enquêtes sont en cours. D’après nos informations, le personnel impliqué dans ces agressions serait toujours en poste à Chevrilles. Contacté, le SEM affirme prendre la situation très au sérieux mais n’est pas autorisé à commenter les affaires en cours.

      La Gouglera n’est pas le seul centre d’asile concerné par la violence. Mi-mai, l’émission alémanique Rundschau et la Wochenzeitung dénoncent une violence structurelle au sein du centre fédéral d’asile de Bâle. Viviane Luisier, de l’association Solidarité Tattes, considère ces agressions comme l’une des conséquences de la nouvelle procédure d’asile. Elle dénonce la concentration des requérants dans des centres fédéraux. « Les réfugiés sont soumis à un #régime_carcéral, loin des centres urbains. Je crains que ces centres deviennent des #zones_de_non-droit. »

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      « #Tolérance_zéro »

      Les requérants d’asile ne sont pas seuls à juger la situation intolérable. Des employés des entreprises de sécurité mandatées par la Confédération, #Securitas et #Protectas, jugent également certains comportements inacceptables. Révoltés par l’attitude de certains de leurs collègues, deux ont décidé de témoigner anonymement.

      « Ce printemps, la situation est devenue très tendue. Certains agents sont allés trop loin », confie Julien*. « Le personnel de sécurité est très peu formé. Il faut de l’expérience pour immobiliser un individu. Les interventions dont je suis témoins sont très ‘sales’, elles peuvent souvent blesser les personnes que l’on cherche à immobiliser », relate Paul*. Il déplore aussi une attitude répressive. « Dans les scénarios d’exercice, les requérants d’asile sont présentés comme des gens violents en qui nous ne pouvons pas avoir confiance. »

      D’après les deux agents, le recours à la violence serait régulièrement valorisé au détriment du dialogue. « On nous demande d’appliquer la tolérance zéro, sans nous expliquer ce que cela signifie. Lorsque quelque chose ne va pas, on ne cherche pas à réfléchir, on tape dedans », constate Paul. Le SEM explique que le personnel a pour instruction de désamorcer verbalement les différends chaque fois que cela est possible. La #contrainte est sensée n’être utilisé qu’en dernier recours. Pour Paul, cette théorie est peu mise en pratique. « Lors de notre formation, on nous a dit qu’il fallait recourir dans un premier temps à la stratégie de #désescalade, mais il n’y a aucun protocole. »

      Le SEM affirme que le recours à des #mesures_coercitives non proportionnées n’est pas toléré et sanctionnée. Les vigiles peuvent se voir interdire de fournir des services au nom du SEM si des comportements illégaux ou intolérables sont identifiés. La #responsabilité d’éventuelles autres sanctions revient aux entreprises de sécurité. « Lorsque les événements dérapent, les rapports sont rédigés par les agents eux-mêmes. Ils y mettent ce qu’ils veulent et sont couverts par la hiérarchie », commente Paul. Les deux vigiles affirment avoir été témoins de scènes lors desquelles certains de leurs collègues ont envenimé la situation, en provoquant les requérants d’asile. « On place des humains sous la surveillance d’enfants, c’est déplorable. » JJT

      Prénoms fictif.

      –—

      « Nos #conditions_de_travail sont lamentables »

      Maigre salaire, contrats à durée déterminée, horaires éreintants, planification tardive, le tableau que décrivent les agents de sécurité est peu reluisant. « Les journées de treize heures, les horaires qui fluctuent, les services de nuit qui s’enchaînent, ça fatigue et ça rend agressif, témoigne Julien. Depuis que je travaille dans le centre d’asile de Chevrilles, j’ai vu beaucoup de casse : des burn-out, des accidents, du harcèlement. La #gestion_du_personnel est catastrophique. »

      Il affirme ne pas être serein, en raison du manque de matériel. « J’ai un collègue de 20 ans qui a travaillé sans gilet de protection. A plusieurs reprises, je n’ai pas eu de spray au poivre durant mes services et je n’avais pas de radio portative. » S’il n’excuse pas la violence, Julien pointe du doigt les entreprises de sécurité mandatées par la Confédération qui visent à maximiser les profits. « Nous ne sommes pas suffisamment formés pour gérer une telle pression. Il ne faut pas la même formation pour surveiller un parking que pour encadrer une population qui va du nourrisson à la grand-mère. », regrette-t-il.

      Une nouvelle #convention_de_travail dans le domaine de la sécurité est entrée en vigueur le 1er juin. Si les #salaires d’entrée ont été augmentés de 0,5 à 1% et le travail limité à deux cent dix heures par mois, ces améliorations restent très insuffisantes pour le syndicat Unia. « Les conditions de travail offertes par le SEM et le manque de #formation sont extrêmement problématiques. Les adjudications des mandats de sécurité reposent essentiellement sur le prix, non sur la compétence et la formation des agents », regrette Arnaud Bouverat, secrétaire syndical.

      « Une formation solide constitue le seul rempart contre les violences. Economiser dans ce domaine n’est pas anodin : cela entraîne un danger pour la sécurité des habitants des centres et celle du personnel de sécurité » dénonce-t-il. JJT

      *Prénom fictif.

      https://lecourrier.ch/2020/06/18/malaise-a-chevrilles

    • Violence des protectas au Centre Fédéral de Chevrilles/Giffers : STOP au renvoi des victimes ! Non au déni de justice !

      Après les violences contre Ali, Abdalim et Mohamed, une nouvelle plainte pénale contre certains agents de sécurité du Centre Fédéral d’Asile de Giffers (Chevrilles) a été déposée par Bodo, également victime de violences physiques.

      À partir d’aujourd’hui, Ali, Abdalim, Mohamed et Bodo risquent d’être renvoyés de Suisse à tout moment, alors même que leurs plaintes pénales contre ces violences sont en cours !

      L’avocate des plaignants a pourtant demandé la suspension des renvois pendant la procédure pénale mais le Secrétariat d’Etat aux Migrations (SEM) a refusé cette demande. Selon le SEM, les plaignants pourront bénéficier d’une brève autorisation de séjour pour revenir en Suisse si cela est nécessaire dans le cadre de la procédure pénale.

      Ceci porte un nom : c’est un #déni_de_justice ! Les autorités ne peuvent garantir que les quatre hommes pourront revenir en Suisse pour participer en tant que plaignants à la procédure en cours. Le cours de la justice est donc entravé et ne peut se dérouler dans des conditions correctes.

      Ce déni de justice envers les requérants d’asile n’est pas nouveau : on le retrouve dans le cas des victimes de l’incendie du Foyer des Tattes, qui a eu lieu à Genève en 2014. Cing ans après les faits, la procédure n’est toujours pas terminée et les victimes, renvoyées pour la plupart aux quatre coins du globe, sont totalement hors de portée des autorités.

      Pour que la justice puisse suivre son cours, pour que les responsabilités puissent être établies, pour que la lumière soit faite sur les violences au CFA de Giffers (Chevrilles) :

      nous demandons aux autorités fédérales de suspendre immédiatement les renvois d’Ali, Abdalim, Mohamed et Bodo !

      Avant que d’autres violences ne se produisent, nous demandons également au Secrétariat d’État aux Migrations (SEM) :

      d’ouvrir les portes des CFA aux organisations et personnes de la société civile afin de rompre l’isolement et de mettre fin à ces zones de non-droit ;
      d’engager des travailleurs sociaux et soignants en nombre suffisant et ayant pour mission de SOUTENIR et de répondre aux besoins des requérant-e-s d’asile ;
      d’arrêter toute collaboration avec des entreprises de sécurité privées, (telles que Protectas, Securitas ou autre), dans le cadre des CFA et autres foyers de requérants, tant que les mandats d’engagement de ces entreprises ne sont pas sérieusement révisés, garantissant la sécurité des requérants.
      de mettre en place des formations complètes et obligatoires pour tout le personnel engagé, mettant l’accent sur l’encadrement social, l’intégration et le vivre-ensemble, et non sur la répression et l’isolement des requérants d’asile.

      Solidarité Tattes, Droit de rester Fribourg, ACAT-Suisse

      Reçu via la mailing-list de Solidarité Tattes, le 30.07.2020

    • Mesures de rétorsions, clinique psychiatrique et renvoi ! Visite aux requérants qui ont dénoncé les violences dans le Centre Fédéral d’Asile de Giffers

      Mercredi 16 septembre, 3 membres du comité de Solidarité Tattes sont allé-e-s à Fribourg pour faire suite aux échanges avec les 4 requérants d’asile hébergés au Centre Fédéral d’Asile (CFA) de Giffers, à Fribourg. Requérants qui ont été assez courageux pour porter plainte contre les agents de sécurité de ce centre qui les ont violentés à divers moments et à divers degrés, suffisamment pour les envoyer à l’hôpital. Bref : ce sont ces 4 requérants qui ont levé le voile sur ce qui peut se passer dans ce CFA, à l’insu des citoyen-enne-s suisses dont certain-e-s pensent que cette nouveauté (la création des CFA) allait simplifier les démarches pour les requérant-e-s et pour les autorités.

      Suite à la plainte déposée face à la justice par 4 requérants victimes d’agressions de la part des agents de sécurité, la vie dans le CFA ne s’est pas améliorée pour eux : les agents agresseurs sont restés en place encore plusieurs jours et semaines. Pour les 4 requérants, cela a signifié angoisse, stress, cauchemars et aussi humiliation. Deux d’entre eux ont été hospitalisés en clinique psychiatrique. De ces deux, l’un est sorti de la clinique et du CFA pour entrer en procédure nationale, enfin. C’est la seule bonne nouvelle que nous avons des 4 plaignants. Notre visite à Fribourg devait donc consister à voir les 3 requérants qui se trouvent encore dans le canton : l’un toujours en clinique psychiatrique, à qui nous avons rendu une visite de soutien, lui qui pense au suicide dès que le médecin lui parle de retourner au CFA ; et 2 autres, toujours hébergés au #CFA.

      De ces deux derniers, seul l’un d’eux est venu nous retrouver au buffet de la gare de Fribourg. Il nous a dit que les 2 agents agresseurs n’étaient plus au CFA de Giffers et que cela rendait la vie moins difficile. Mais aussi, il nous a donné un nombre d’exemples stupéfiant des règles à respecter dans ce centre et dont le but ne peut être que celui de tenir les requérant-e-s en respect, de leur rappeler qu’ils-elles n’ont aucun droit et qu’ils-elles doivent se taire, se faire oublier, disparaître. Par exemple :

      - Interdiction d’amener de la nourriture à l’intérieur du centre, ce qui pousse les requérants qui arrivent à s’acheter une friandise à la cacher dans les prés (!) et à la manger quand ils sont hors du centre !
      - Punition dès qu’on arrive 5 minutes en retard au repas ou à l’entrée du centre après une sortie dans les environs.
      - Fouilles corporelles à l’entrée et à la sortie du centre et fouilles fréquentes dans les chambres.
      – Pénalités infligées mais jamais notifiées par écrit. A la question : « Pourquoi avez-vous été puni dernièrement ? Pourquoi vous prélève-t-on fréquemment de l’argent sur les 21 fr par semaine auxquels vous avez droit, au point qu’il ne vous reste jamais rien ? », la réponse est : « Je ne sais pas ! ».

      Car les « pénalités » ne sont jamais assorties d’un papier qui dise la raison de la punition, la date où elle a lieu et qui l’inflige. Centre Fédéral d’Asile ? On nous parle d’un lieu fermé où règne l’arbitraire.

      Quant au second requérant plaignant toujours hébergé à au CFA de Giffers, il ne viendra pas à notre rencontre. Il n’a pas le droit de sortir du centre car il a ce jour-là un rendez-vous médical, puis il devra aller au SPOMI (l’office de la population fribourgeois). A notre retour à Genève, nous apprenons… qu’il a été arrêté et emmené à l’aéroport de Genève pour son renvoi en Allemagne ! Cette personne était NEM-Dublin-Allemagne et son délai se situait à la fin de l’année. Mais il a été renvoyé maintenant, alors que la procédure de sa plainte pénale est encore en cours. Nos démarches juridiques et politiques pour demander à M. Gattiker, directeur du SEM, de ne pas renvoyer cette personne alors que la procédure pénale n’est pas close, ont été totalement inutiles. Gattiker a été inflexible.

      De notre côté, nous sommes bien décidé-e-s à ne pas lâcher les 4 plaignants qui ont eu le courage de dénoncer les violences dans le CFA de Giffers et à ne pas lâcher non plus la mise au grand jour du fonctionnement inacceptable de ces zones de non-droit.

      Alors c’est simple et logique : si les CFA sont déjà pareillement iniques, le Centre de renvoi prévu pour Genève en bord de piste d’atterrissage pour rendre fous adultes, adolescents et enfants ne doit jamais voir le jour.

      Reçu via la mailing-list de Solidarité Tattes, le 22.09.2020

    • Le « #procès_de_Giffers », pour donner la parole à 4 requérants violentés

      Ce lundi 23 mai 2022 débute à Fribourg le « procès de Giffers ». En mai 2020, en plein premier confinement, 4 requérants d’asile hébergés au Centre Fédéral d’Asile (CFA) de Giffers portent plainte contre des violences subies à l’intérieur de ce centre.

      Rappel des faits

      Le 3 mai 2020, Ali, requérant camerounais, demande aux Protectas du CFA de Giffers, où il réside, de bien vouloir le laisser entrer rapidement (fouille obligatoire à l’entrée du CFA). Etant convalescent (COVID-19), il se sent faible et n’arrive plus à attendre que les Protectas aient terminé de discuter entre eux. Le ton s’enflamme immédiatement : deux Protectas le poussent violemment et le frappent. Ali se rend à l’hôpital : le constat fait état de multiples contusions. A son retour au centre vers 22h, les Protectas lui interdisent l’entrée : il doit dormir sur un banc à l’entrée.

      Ce même 3 mai 2020, Abdalim, requérant marocain, se voit intimer l’ordre de regagner sa chambre. N’ayant pas obtempéré suffisamment rapidement aux yeux du Protectas, celui-ci le pousse violemment contre une vitre, ce qui lui sectionne les tendons de la jambe. Il est hospitalisé puis opéré. Il doit ensuite marcher avec des béquilles pendant de long moins et souffre encore aujourd’hui de douleurs à la jambe.

      Le 4 mai 2020, Mohamed, requérant algérien qui souffre d’épilepsie, subit lui aussi une agression de la part des Protectas. Ceux-ci veulent fouiller sa chambre et ils lui disent qu’elle est sale. Mohamed refuse. Deux Protectas l’agressent en l’empêchant de respirer. La situation provoque chez Mohamed une crise d’épilepsie et il est emmené à l’hôpital : le constat médical fait état d’une agression par étranglement avec une marque antérieure au niveau du cou.

      Le dernier plaignant, Bodo, est un requérant ivoirien. Il s’est quant à lui fait violenter alors que les agents cherchaient à l’emmener de force à l’isolement. Son seul tort était de se soucier d’un rendez-vous médical qu’il ne voulait pas manquer, au risque de voir ce rendez-vous reporté plusieurs semaines après.

      Giffers, un cas isolé ?

      Mais Giffers n’est pas le seul CFA concerné. Les CFA de Bâle, Boudry, Altstätten et Vallorbe sont touchés par des faits similaires. Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle procédure d’asile et l’ouverture des CFA en 2019, de nombreux cas de violences ont été dénoncés et documentés par diverses associations. Certaines de ces violences ont largement été relayées par les médias.

      Courant 2021, Amnesty International a publié un rapport dénonçant les violations des droits humains ayant lieu dans les CFA. Émission phare de la RTS, Temps Présent a diffusé en février dernier une enquête faisant état de dysfonctionnements systémiques dans la gestion des CFA et de dérapages répétés de la sécurité. Les petites associations de défense des droits des personnes migrantes ont de leur côté joué un rôle déterminant, de par leur travail et connaissance du terrain, dans l’éclatement au grand jour de la triste réalité des CFA.

      Les CFA, un système diysfonctionnel

      En ce qui concerne le « procès de Giffers », les violences dénoncées illustrent tristement les conditions d’accueil dans les CFA. Et ces violences ne sont pas des actes isolés, puisque le système des CFA est fondé sur la répression et l’isolement.

      En effet, les sommes allouées par la Confédération à la « sécurité » dans les CFA sont supérieures aux montants dédiés à l’encadrement social et sanitaire. Ce ne sont pas quelques heures de formation sur la thématique de l’asile qui vont transformer un agent de sécurité en travailleur social. Les requérant-es d’asile ne sont pas libres de sortir et de rentrer au centre en dehors de certains horaires, ils sont soumis à des fouilles à leur retour au centre, ils n’ont pas le droit d’amener leur propre nourriture à l’intérieur du centre, etc. La gestion des CFA se fait dans un contexte de suspicion généralisée à l’égard des requérant-es. C’est par exemple au moment de se faire fouiller à son retour au centre qu’un des quatre plaignants qui passe en jugement dès aujourd’hui déclare s’être fait frapper.

      À relever : les faits qui seront jugés datent d’il y a deux ans. Depuis lors, 3 des 4 requérants ayant déposé plainte ont quitté la Suisse, car ils avaient reçu des décisions négatives concernant leur procédure d’asile. À l’évidence, l’accès à la justice est beaucoup plus limité pour des personnes requérantes que pour des personnes disposant d’un droit de séjour en Suisse. En l’absence de preuves (le SAS d’entrée du centre où ont eu lieu certains des faits qui seront jugés est pourtant équipé d’une caméra de surveillance), les requérants ayant eu le courage de porter plainte n’ont que peu de chances d’obtenir gain de cause dans leur cas précis.

      Alors un procès… pourquoi ? Ces 4 plaignants requérants et déboutés ont contribué à dévoiler au grand jour la réalité du système des CFA et des violences qui s’y déroulent habituellement dans le silence. C’est entre autre grâce à leur détermination que la société civile suisse a été mise au courant des traitements inhumains qui se déroulent dans notre pays. Même si les 4 plaignants, qui ne pourront pas tous être présents lors du procès, ne gagneront probablement rien à son issue, le « procès de Giffers » forcera l’attention publique à se tourner encore du côté des CFA.

      La Suisse accueille par milliers et dans la dignité les personnes fuyant le conflit russo-ukrainien. Un accueil humain est donc possible ! Espérons que ce procès servira à démontrer que les CFA induisent forcément des violences et qu’un accueil digne passe par la fermeture des centres fédéraux d’asile !

      Droit de Rester Fribourg & Solidarité Tattes

      Reçu via la mailing-list de Solidarité Tattes, le 17.05.2022

    • LE « PROCES DE GIFFERS » : RENVOYÉ !

      Il y a quelques jours, on vous annonçait l’ouverture du "procès de Giffers" agendé le lundi 23 mai à Fribourg. Ce procès devait donner la parole à Ali, Arkab, Mohammed et Bodo, les quatre personnes violentées par des agents de sécurité du Centre fédéral d’asile du même nom, en 2020. Ces quatre personnes requérantes d’asile avaient eu le courage de porter plainte pour les mauvais traitements qui leur avaient été infligés par les agents de sécurité, ce qui avait contribué à dévoiler les graves exactions commises dans les CFA partout en Suisse.

      Pourtant, le procès n’a pas pu avoir lieu, notamment parce que ni Ali ni Arkab ni Mohammed n’étaient présents. Pas étonnant : trois de ces personnes ont dû fuir les autorités suisses peu après le dépôt de leur plainte afin d’éviter un renvoi musclé ! Ils se sont donc retrouvés à la rue, dispersés dans différents pays d’Europe. Nous avions pourtant alerté le SEM en 2020 : il semblait évident que la menace de renvoi était une entrave à la justice. Mais le SEM nous avait répondu, à nous mais également aux conseillers nationaux les ayant alertés, que non, que ce n’était pas un problème, qu’un renvoi n’entravait en rien la justice et que le jour du procès ces personnes pourraient alors revenir en Suisse. L’avocate aussi avait demandé au SEM de suspendre les expulsions des requérants concernés, le temps de la procédure, mais en vain.

      Alors nous pouvons redire aujourd’hui que, oui, l’intimidation et le renvoi de 3 des requérants-victimes- plaignants vivant hors de Suisse est un obstacle à la justice. Tout d’abord parce que ces personnes vivent dans la rue et ne sont pas facilement atteignables, parce qu’elles n’ont pas toujours l’argent pour manger et à plus forte raison pour recharger leur téléphone, parce qu’elles préfèrent disparaître à tout jamais pour ne plus avoir à faire avec les autorités suisses.

      Pour les 2 hommes hors de Suisse encore en contact avec l’avocate (le 3ème ne répond plus), un sauf-conduit a été émis. Mais rien n’a été pris en charge en termes de frais de voyage et d’hébergement à Fribourg. Il s’agit pourtant de personnes indigentes et allophones, qui de toute manière n’auraient eu aucun espace ni moment pour préparer le procès avec leur avocate.

      Le 23 mai, l’avocate a eu toutefois la possibilité de dire que ses mandants n’avaient pas eu droit à un procès équitable, ni droit à une enquête sur les violations des droits humains qu’ils dénoncent. Ils n’ont pas été protégés par le SEM qui les a fait taire en les intimidant et les expulsant, avant même que l’autorité pénale ne les entende. Toute l’instruction s’est faite dans leur dos, sans qu’ils puissent assister ni aux auditions des témoins ni à celles de leurs accusateurs. En bref, l’autorité pénale a créé toutes les conditions pour faire voir dans cette procédure une affaire de droit commun, alors qu’on était confronté à la violence d’état.

      Le procès a donc été ajourné, il aura lieu en septembre ! On vous tiendra au courant de la suite.

      « Je ne savais pas que les humains pouvaient nous faire ça ».

      Citation d’un des 4 requérants plaignants ayant subi des violences par les Protectas de Giffers

      Reçu via la mailing-list de Solidarité Tattes, le 30.05.2022

    • Renvoi du « #procès de Giffers » : l’injustice suit son cours

      Les humiliations, les coups : de quoi déposer plainte. Les 4 requérants d’asile insultés et agressés par des agents de sécurité au centre fédéral d’asile de Giffers ont osé faire usage de leur droit en mai 2020. Un premier procès devait débuter le 23 mai 2022, mais il n’a pas eu lieu parce que… le procureur ne s’est pas présenté ! A relever que 3 des 4 plaignants non plus n’étaient pas là : expulsés ou disparus, avalés par le système d’asile. Le procès a alors été agendé pour septembre 2022, mais il n’aura finalement pas lieu parce que le tribunal vient de se rendre compte que l’instruction n’a pas été menée comme il se doit : les prévenus n’ont pas été entendus… Bref : le système judiciaire suisse n’a visiblement pas réussi à réaliser le B.A. BA de la procédure !

      En 2020, suite au dépôt de leur plainte, les 4 requérants d’asile étaient sûrs que justice leur serait rendue. Ils étaient sûrs que les violences qu’ils venaient de subir, ici en Suisse, étaient des faits exceptionnels que leur pays d’accueil n’allait pas excuser sans autres : les agents de sécurité incriminés allaient être jugés, punis, licenciés de leur travail. Le fait d’obtenir un dédommagement financier n’était pas dans leurs préoccupations ni dans leurs discussions, ils ne voulaient pas d’argent, ils voulaient la justice et ils étaient sûr de l’obtenir.

      Entre mai 2020 et septembre 2022, un des requérants a été expulsé, un autre n’a pas attendu d’être chassé manu militari pour partir. Un troisième, ayant compris au cours d’une discussion que la justice ne se prononcerait pas facilement en faveur des plaignants, a « disparu » également. Seul un des plaignants est encore atteignable à ce jour.

      Par deux fois, le « procès de Giffers » s’est agendé mais n’a pas eu lieu. Pendant ce temps, les plaignants vivent dans la rue hors de Suisse (« disparaître » signifie bien cela : sortir des radars de l’asile et dormir dans la rue, quelque part dans une ville européenne), leur droit fondamental n’est pas respecté, les violences exercées à leur encontre se perdent dans les sables, et si ce procès devait avoir lieu un jour, ce serait une triste farce qui énoncerait des noms, des responsabilités, des peines, des dédommagements pour des personnes qui sont inatteignables et ne le sauraient même pas. Sans parler du fait que les véritables coupables ne sont jamais pointés du doigt ! La violence inhérente au système d’asile, ce système orchestré par le SEM et les autorités suisse, mis en œuvre par l’Hospice général à Genève ou des sociétés privées dans les CFA, sortent de là sans une égratignure.

      Difficile de ne pas faire le rapprochement entre le « procès de Giffers » et le « procès des Tattes » à Genève : même lenteur pour organiser les audiences (il y a 8 ans que la catastrophe a eu lieu), même irrespect du droit des sinistrés (sur les 40 défenestrés, la plupart sont partis apeurés ou ont été expulsés). Un jugement a été rendu en 2021, il est remis en question par l’avocate chargée de l’affaire. Mais on peut relever déjà que ce premier jugement met la faute sur… l’homme décédé dans le feu, les irresponsables qui ne respectent pas les précautions anti-incendie, les indisciplinés qui ont sauté par la fenêtre !

      Des procédures qui traînent, des procès qui ne peuvent même pas avoir lieu et, surtout, les véritables coupables (ceux qui tirent les ficelles de ce système d’asile) jamais incriminés…
      Que ce soit cette année ou dans 10 ans, ce procès n’amènera qu’une seule preuve irréfutable : un-e requérant-e d’asile n’a aucun droit en Suisse, il ne peut pas se défendre et n’importe qui peut impunément l’insulter, le tabasser, le violenter.

      Reçu via la mailing-list de Solidarité Tattes, le 21 septembre 2022

  • Marie de Hennezel : « L’épidémie de Covid-19 porte à son paroxysme le déni de mort »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/05/04/marie-de-hennezel-l-epidemie-de-covid-19-porte-a-son-paroxysme-le-deni-de-mo

    Je ne remets aucunement en cause l’acharnement avec lequel médecins et soignants, au risque de leur propre vie, soignent des patients qui ont encore envie de vivre. Je remets en question la folie hygiéniste qui, sous prétexte de protéger des personnes âgées, arrivées dans la dernière trajectoire de leur vie, impose des situations proprement inhumaines. Cela a-t-il un sens de confiner une personne âgée, qui dans son for intérieur est relativement en paix avec l’idée de mourir, comme c’est le cas pour beaucoup ? De l’empêcher de vivre les dernières joies de sa vie, voir ses enfants, les embrasser, voir ses amis, continuer à échanger avec eux ? Leur demande-t-on leur avis, leur choix ? Demande-t-on aux proches ce qui est plus important pour eux : prendre le risque d’attraper le Covid-19 en prenant une dernière fois dans ses bras un parent aimé et lui dire au revoir ? Ou se protéger au risque d’une culpabilité qui les empoisonnera pour longtemps ?

    Ce déni de la mort est dramatique et le combat contre la mort est vain. Nous ne mesurons pas les souffrances qui naîtront de l’érosion de l’humain quand la distanciation sociale sera devenue la norme, comme des inégalités que cette peur de la mort aura induites, les désespoirs, les dépressions, les violences, les envies de suicide. Nous réaliserons après le confinement le mal qui aura été fait en privilégiant la vie au détriment de la personne.

    Car qu’est-ce qu’une personne ? Sinon un être humain qui, se sachant mortel, et méditant sur sa finitude, est renvoyé à l’essentiel, à ses priorités, à ses responsabilités familiales, aux vraies questions sur le sens de son existence.

    Heureusement, quand notre société aura atteint le pic du déni de la mort, s’amorcera un déclin. Nombreux sont ceux qui, déjà dans le silence de leur confinement, méditent aujourd’hui sur le sens et la valeur de leur existence, sur le genre de vie qu’ils ont vraiment envie de mener. Une vie de retour aux choses simples, une vie où le contact avec ceux que l’on aime compte plus que tout, où la contemplation du beau et de la nature participe à la joie de vivre.

    Une vie où l’on n’abandonne pas les plus vulnérables, où la solidarité humaine l’emporte. Une vie qui respecte les rites essentiels qui ponctuent l’existence et rassemble la communauté des vivants : la naissance, le mariage, la mort. Une vie où le devoir d’accompagnement de ceux qui vont mourir impose naturellement la présence, les mots d’adieu, bref d’entrer dans ce que le psychanalyste Michel de M’Uzan (1921-2018) appelait « l’orbite funèbre du mourant ».

    #mort #covid-19 #distanciation_sociale

  • A NOS CORPS DEFENDANTS - 2020 - 90 min - FR / ENG

    https://www.youtube.com/watch?v=zrHcc_rPacE

    Désarmons les
    –------------
    Durée : 90 min

    Année : 2019

    Réalisation : IanB

    Synopsis

    Ce film ne raconte pas une histoire. Il se veut une approche sensible et radicale des violences psychologiques et physiques infligées aux habitant·es des quartiers populaires par la police. Les récits prennent place dans la France des vingt dernières années, celle de l’après Sarkozy, et sont rapportés par les premier·e·s concerné·e·s : pas de sociologue, pas d’historien, pas de journalistes ni de storytelling. Juste la parole de celles et ceux qu’on voudrait voir silencieux·ses : Wassil Kraiker et ses parents Zohra et Abdelaziz, des jeunes d’Argenteuil, Amine Mansouri et son père Moustapha, Ali Alexis et son épouse, Ramata Dieng et Farid El Yamni…

    On y aborde la question de la domination, ou comment l’Etat traite les corps étrangers pour mieux les contrôler. Il est question de racisme, de torture et d’un combat vital pour la vérité. Les protagonistes de ce film n’avaient pas choisi de devenir un jour visibles, mais les violences systémiques en ont fait des combattant·e·s, à leurs corps défendants.

    Sur le réalisateur

    IanB est membre fondateur d’un collectif qui existe et se bat depuis 2012 contre les violences d’Etat, Désarmons-les ! Ce film, il l’a pensé à la fois comme une manière de clore un chapitre dans son combat personnel, une déclaration de guerre et un message sans concession à l’attention de celles et ceux qui oseraient encore nier le caractère systémique des violences policières.
    Contacts :

    Mail : ianb@riseup.net

    Twitter : @ianb_desarmons

    Site internet : https://volte-face.info/film-a-nos-corps-defendants

  • #Julie_BINDEL : « Pourquoi une femme oserait-elle signaler un viol après ce qui est arrivé à ma fille ? »
    https://tradfem.wordpress.com/2020/01/07/%e2%80%89pourquoi-une-femme-oserait-elle-signaler-un-viol-apres-c

    Le mois dernier, je me suis rendue à Chypre pour rencontrer l’adolescente britannique condamnée pour avoir fait de fausses allégations de viol.

    Lundi dernier, un tribunal local a déclaré cette jeune fille de 19 ans coupable de « méfait public » pour avoir apparemment inventé de toutes pièces l’allégation de son viol par 12 hommes israéliens alors qu’elle travaillait à Ayia Napa. Aujourd’hui, elle a été condamnée à quatre mois de prison avec sursis et serait sur le chemin du retour.

    Son épreuve a suscité l’indignation en Grande-Bretagne, le ministère des Affaires étrangères se disant « sérieusement préoccupé quant aux garanties d’un procès équitable dans cette affaire profondément pénible » où, selon les avocats de la jeune femme, des preuves médico-légales cruciales ont été soit non recueillies soit inexplicablement jugées irrecevables par le tribunal.

    Lorsque je les rencontre, l’adolescente et sa mère vivent dans un appartement loué dans un village de vacances qui, hors saison, ressemble à une ville fantôme. Les deux sont évidemment très proches et la mère me dit fièrement que sa fille est déterminée à se battre pour obtenir justice.

    Traduction : #Tradfem
    Version originale : https://www.telegraph.co.uk/women/life/mother-ayia-napa-teen-would-woman-dare-report-rape-has-happened
    #justice_patriarcale #viol #violences_masculines #déni_de_justice #Ayia_Napa #Chypre

  • Suivi de l’affaire Élisa Pilarski, jeune femme enceinte tuée par des chiens dans une forêt de l’Aisne
    https://www.cnews.fr/france/2019-11-18/aisne-une-femme-enceinte-meurt-dans-une-foret-apres-avoir-ete-mordue-par-des

    Avant de mourir, la femme enceinte, qui promenait son chien lorsque le drame est survenu, avait eu le temps de joindre par téléphone son conjoint du danger qu’elle encourait.

    Alors que de nouvelles analyses doivent être pratiquées ce lundi sur le corps de la trentenaire à la demande du procureur, l’hypothèse retenue relie sa mort à la présence de chiens de chasse à courre au même moment dans la forêt.

    #chasse #mort

    • Scandale : la dernière phrase de l’article a été supprimée sans mention. Donc exit la chasse à courre.

      D’ailleurs cette version régresse avec l’hypothèse qu’elle aurait été « attaquée par son propre chien », d’après Ouest-France (https://www.ouest-france.fr/hauts-de-france/aisne/aisne-une-femme-enceinte-retrouvee-morte-en-foret-des-morsures-de-chien) :

      Pour l’heure, les circonstances précises du décès ne sont pas connues et une autopsie doit avoir lieu ce lundi 18 novembre. Plusieurs pistes sont envisagées par les enquêteurs, précise L’Union. La jeune femme aurait pu être attaquée par un animal errant ou la meute d’un équipage de chasse à courre qui avait lieu au même moment. « Lorsqu’ils chassent, les chiens sont menés par leur instinct et la piste de l’animal. Ils ne se détournent pas pour attaquer une personne », s’est toutefois défendu Antoine Gallon, directeur de la communication de la société de vénerie qui fédère les équipages de chasse à courre.

      La victime aurait également pu être attaquée par son propre chien. « Aucune piste n’est retenue ou privilégiée pour le moment », a indiqué auprès du quotidien régional, Frédéric Trinh, le procureur de Soissons.

      Voici un article détaillé de LCI (https://www.lci.fr/police/fait-divers-saint-pierre-aigle-aisne-une-femme-enceinte-de-six-mois-morte-en-for) de ce matin (dont je viens de faire une capture) qui vous laisse juges de l’hypothèse de l’attaque par son propre chien :

      C’est son compagnon qui l’a retrouvée samedi après-midi sur le sentier forestier, mais il était trop tard. Un peu plus tôt samedi dernier, 16 novembre, ce dernier avait reçu un appel de sa moitié, âgée de 29 ans et enceinte de six mois, alors qu’elle promenait leur chien en forêt à Saint-Pierre-Aigle (Aisne). « J’ai peur, viens vite ! » aurait dit la jeune femme âgée de 29 ans à son petit-ami après avoir aperçu une meute de chiens .

      Arrivé sur le sentier vers 15 heures après avoir quitté en urgence son travail à Orly, ce dernier aurait été guidé par « les hurlements du chien, blessé , et recroquevillé sur le corps mutilé de la jeune femme », rapporte L’Union ce mardi. Ni lui, ni les secours intervenus peu après n’ont pu la sauver. Le bébé est lui aussi décédé.

      Une enquête a été ouverte par le parquet de Soissons pour déterminer les causes de la mort. Dès ce week-end, le procureur de la République, Frédéric Trinh, avait confié à la presse locale que la victime présentait de nombreuses traces de morsures, de chiens très probablement, qui seraient à l’origine de son décès.

      Les premiers résultats des examens pratiqués sur le corps de la jeune femme, qui seront connus ce mardi, sont très attendus. En effet, la question se pose de savoir quel animal les lui a faites. S’agit-il de l’American staff de son compagnon qu’elle promenait ce jour-là ? S’agit-il de chiens errants ? S’agit-il des chiens de l’équipage de chasse à courre « Le Rallye de la passion », qui se trouvait près du sentier ce jour-là ? Le procureur devrait s’exprimer sur le sujet en début d’après-midi.

    • Une autre hypothèse fait l’objet de sérieuses investigations : la tenue d’une chasse à courre à proximité des lieux de l’accident et dont les chiens pourraient être mis en cause. Organisée par l’équipage du Rallye La Passion, basé à Morsain, ses membres vont être interrogés par les gendarmes de Soissons bien que le lieutenant-colonel Jean-Charles Métras, commandant du groupement de gendarmerie de l’Aisne fasse partie de l’équipage en question . « Les effectifs locaux sont en soutien pour les constatations », avait assuré Frédéric Trinh en guise de réponse.

      https://www.lexpress.fr/actualite/societe/fait-divers/aisne-une-femme-enceinte-tuee-par-des-chiens-alors-qu-elle-se-baladait-en-f
      #caste #féminicide #gibier_humain #justice #impunité #privilège

      http://www.vuduchateau.com/actu-5415-bienvenue-jean-charles-metras-nouveau-commandant-de-groupemen

    • D’après les résultats d’autopsie réalisée à l’institut médico-légal de Saint-Quentin, elle est morte d’une « hémorragie consécutive à plusieurs morsures de chiens aux membres supérieurs et inférieurs ainsi qu’à la tête, certaines morsures étant ante mortem et d’autres post mortem », précise le procureur de Soissons, Frédéric Trinh.

      D’autres investigations ont lieu, notamment pour déterminer l’origine des morsures. Des prélèvements ont été effectués sur 93 chiens, ceux appartenant à la victime ainsi que des chiens ayant participé à une chasse à courre qui était organisée à proximité samedi. « Les analyses génétiques et la comparaison des prélèvements devraient permettre d’identifier le ou les chiens » qui ont mordu la victime.

      https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/aisne-une-jeune-femme-enceinte-retrouvee-morte-en-foret-apres-plusieurs

    • Des morsures à l’origine du décès. Il ne fait plus aucun doute que la femme de 29 ans retrouvée morte dans la forêt de Retz, entre Villers-Cotterêt et Soissons, dans l’Aisne, a bien été tuée par des chiens, révèle L’Union. L’autopsie, réalisée lundi, a montré que la mort était survenue entre 13 heures et 13h30, samedi.

      https://www.20minutes.fr/lille/2655043-20191119-aisne-femme-enceinte-retrouvee-morte-bien-tuee-chiens

      Par contre, pas de nouvelles de SON chien qui, selon un papier antérieur avait été blessé dans l’affaire (on suppose qu’elle n’a pas promené un chien escagassé dans la forêt et donc qu’il a pris cher en la défendant) et un glissement remarquable vers SES chiens…

      Et merci @mad_meg pour la news très intéressante de la participation à la chasse d’un haut gradé de la gendarmerie chargée de l’enquête… (une capture d’écran avec que l’info ne disparaisse malencontreusement ?).

    • La victime n’était vraiment pas du genre à avoir peur des chiens… mais vraiment pas https://www.facebook.com/elisa.pilarski.9/photos

      Samedi, Elisa Pilarski, 29 ans, se promenait avec son chien (un am staff de deux ans) dans la forêt de Retz, à Saint-Pierre-Aigle, au sud de l’Aisne. Enceinte de six mois, cette jeune femme s’est sentie menacée par la présence de plusieurs chiens qui aboyaient autour d’elle. Elle a alors appelé son compagnon. Au téléphone, elle lui a dit : « J’ai peur, viens vite ! Il y a plein de chiens qui aboient autour ». Celui-ci a alors quitté précipitament son lieu de travail, à Roissy, pour la rejoindre, à une heure de là. Ces deux passionnés de chiens s’étaient rencontrés lors de concours canins , précise L’Union. Sur la route, il a tenté en vain de la joindre à nouveau.

      Selon l’oncle de la jeune femme, contacté par L’Union, ce sont les hurlements du chien, blessé et recroquevillé contre le corps mutilé de la jeune femme, qui auraient guidé son maître jusqu’à elle. Elle se trouvait en lisière de bois, non loin de leur domicile.

      https://www.lavoixdunord.fr/667730/article/2019-11-19/femme-tuee-par-des-chiens-comment-son-compagnon-l-retrouvee-dans-la-for

      https://www.lavoixdunord.fr/667613/article/2019-11-19/la-jeune-femme-enceinte-trouvee-morte-dans-la-foret-bien-ete-tuee-par-d

    • Encore une autre version dans le journal du bled d’origine… peut-être la distance qui empêche de vérifier les infos avant de publier.

      C’est le compagnon de la jeune femme qui a fait la tragique découverte. En début d’après-midi, après une altercation avec un propriétaire de chien qui n’était pas muselé , la jeune femme l’avait appelé, inquiète. L’homme a aussitôt quitté son travail à Roissy pour la rejoindre. Ne la trouvant pas à leur domicile, c’est en suivant les cris du chien qu’elle promenait qu’il a découvert le corps sans vie de la jeune femme, couché sur le dos, et portant des traces de morsures en plusieurs endroits.

      https://www.larepubliquedespyrenees.fr/2019/11/18/une-bearnaise-tuee-par-des-chiens-en-foret-dans-l-aisne-une-

    • He left work at Charles de Gaulle airport, in Paris, and arrived at the scene 45 minutes later where he found her mutilated body.

      Ellul followed the howls of Curtis, who survived the attack, to find Ms Pilaski’s remains.

      Police say it is possible the woman was attacked by stray dogs or even her own animal, and have refused to rule out any possibilities.

      The Forest of Retz is one of France’s largest and covers about 13,000 hectares.

      https://www.dailymail.co.uk/news/article-7701537/Six-months-pregnant-woman-mauled-death-pack-dogs-walks-woods-France.htm

    • « Les investigations se poursuivent », a précisé le procureur de Soissons. Lundi, ce dernier avait renouvelé sa confiance aux enquêteurs de la gendarmerie, alors qu’était révélée par le quotidien l’Union la présence, lors de la chasse à courre, du lieutenant-colonel Jean-Charles Métras, le commandant du groupement de gendarmerie de l’Aisne.

      http://www.leparisien.fr/aisne-02/femme-enceinte-retrouvee-morte-dans-l-aisne-sur-la-piste-des-chiens-meurt

    • VRAI OU FAKE Femme enceinte tuée par des chiens dans l’Aisne : le commandant de gendarmerie faisait-il partie de l’équipage de chasse à courre ?
      https://www.francetvinfo.fr/vrai-ou-fake/femme-enceinte-tuee-par-des-chiens-dans-l-aisne-le-commandant-de-gendar

      Le procureur de la République de Soissons, Frédéric Trinh, confirme à franceinfo la « présence » du lieutenant-colonel Jean-Charles Métras parmi les chasseurs. Le magistrat assure en avoir été « immédiatement informé » et explique avoir pris des dispositions, afin de s’assurer que cela ne nuise pas à l’enquête. Cela « a justifié que je confie le traitement de la procédure à un service qui n’est pas placé sous son autorité, à savoir la section de recherche d’Amiens ».

      La gendarmerie nationale, interrogée par franceinfo, confirme les propos du procureur de la République de Soissons. Le lieutenant-colonel était bien « l’un des suiveurs de la chasse à courre », mais « cela ne gêne absolument pas l’enquête », compte tenu de la mesure prise « en lien avec le procureur », affirme la gendarmerie nationale.

    • Où était-il raconté que les cadeaux faits aux chasseurs par M ont évité qu’ils ne rejoignent les gilets jaunes ?
      Même les anglais ne font plus de chasse à cour. Il n’y a pratiquement plus que ces crétins de français à s’enorgueillir de torturer des animaux, en passant du taureau aux cerfs, sangliers, lapins, biches oiseaux et chiens. Un permis pour psychopathes fachos avinés et ivres de sang.
      3 morts et un blessé en deux jours la semaine dernière à cause de la chasse …
      https://seenthis.net/messages/811582

    • Jeudi soir, cette société de vénerie a affirmé de nouveau qu’aucun des chiens n’était impliqué. Elisa Pilarski « promenait son chien Curtis, un American Staff, un chien de combat (...), dont on ne peut imaginer qu’il ait laissé sa maîtresse se faire dévorer sans la défendre ! Or, des vétérinaires mandatés par les gendarmes ont inspecté les 62 chiens de l’équipage et aucun ne présentait de traces de morsure », a déclaré à l’AFP Antoine Gallon, directeur de la communication de la société de vénerie.

      Le docteur vétérinaire Antoine Bouvresse, que franceinfo a contacté, est sur la même ligne. « Les chiens utilisés dans ce type d’activité sont habitués à la présence humaine, c’est naturel pour eux, ils connaissent, assure le spécialiste du comportement canin. Ce sont des animaux qui ont une réputation inoffensive. » Ce que confirment des militants anti-chasse à courre eux-mêmes. « Si la meute est en cause, ce serait vraiment étonnant. Généralement, il est question de morsures sur des particuliers qui s’interposent », témoigne un membre d’AVA (Abolissons la vénerie aujourd’hui) dans les colonnes du Parisien.

      https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/femme-enceinte-tuee-par-des-chiens/femme-enceinte-tuee-dans-l-aisne-les-chiens-utilises-lors-des-chasses-a

      Donc, faut juste pas se promener avec un chien, sinon, c’est tranquille.

    • La gendarmerie dessaisie de l’enquête sur la mort d’Elisa Pilarski à Saint-Pierre-Aigle
      https://www.lunion.fr/id110506/article/2019-11-21/la-gendarmerie-dessaisie-de-lenquete-sur-la-mort-delisa-pilarski-sain-pierre

      Le procureur a finalement confié les investigations à un service de police. Probablement en raison de la présence au sein de l’équipage de chasse à courre du commandant de la gendarmerie de l’Aisne.

      La section de recherche de gendarmerie d’Amiens est dessaisie de l’enquête sur la mort d’Elisa Pilarski au profit du Service régional de police judiciaire de Creil (Oise).
      […]
      Probablement désireux de dissiper tous soupçons sur l’impartialité de l’enquête dans cette affaire très médiatisée, le magistrat a finalement confié les investigations à un service de police.

    • Or, des vétérinaires mandatés par les gendarmes ont inspecté les 62 chiens de l’équipage et aucun ne présentait de traces de morsure »,

      62 + 1 = 93 ....
      Il manque une trentaine de chiens, peut etre ceux qui comportent des morsures d’Am Staff

      "Des prélèvements ont été effectués sur 93 chiens, ceux appartenant à la victime ainsi que des chiens ayant participé à une chasse à courre qui était organisée à proximité.

      https://www.lexpress.fr/actualite/societe/fait-divers/aisne-une-femme-enceinte-tuee-par-des-chiens-alors-qu-elle-se-baladait-en-f

    • La société de vénerie a affirmé qu’aucun des chiens ayant participé samedi 16 novembre à une chasse à courre dans l’Aisne n’était impliqué dans la mort d’une femme, tuée par morsures de chiens, alors qu’elle promenait le sien.

      Elisa Pilarski « promenait son chien Curtis, un American Staff, un chien de combat (...), dont on ne peut imaginer qu’il ait laissé sa maîtresse se faire dévorer sans la défendre ! Or, des vétérinaires mandatés par les gendarmes ont inspecté les 62 chiens de l’équipage et aucun ne présentait de traces de morsure », a déclaré Antoine Gallon, directeur de la communication de la société de vénerie.

      Cette dernière fédère toutes les associations de chasse à courre françaises. Le maître d’équipage de cette chasse, Sébastien Van den Berghe, « possède 62 chiens, 21 étaient à la chasse, 41 n’y étaient pas. Tous ont été auscultés », a insisté M. Gallon, ce qui « disculpe totalement la chasse à courre », a-t-il affirmé.

      https://www.rtl.fr/actu/justice-faits-divers/femme-tuee-par-des-chiens-les-chiens-de-chasse-a-courre-hors-de-cause-7799526822

      21 à la chasse… ce qui contredit le témoignages qui parlent d’une trentaine, mais bon…

    • Ce drame met de nouveau la lumière sur le problème des attaques mortelles de chiens. « En France, il y a eu 33 décès par morsures de chien au cours des vingt dernières années. Les deux tiers concernaient des enfants de moins de 15 ans, 16 avaient moins de 5 ans », précise une étude publiée en 2011 par l’Institut de veille sanitaire (InVS). Pour cette étude, les auteurs ont analysé les morsures de chiens prises en charge aux urgences de huit hôpitaux français entre mai 2009 et juin 2010. « Les morsures étaient plus nombreuses et plus graves quand la victime connaissait le chien mordeur. Chez les adultes, les morsures survenaient souvent lorsque la victime cherchait à séparer des chiens qui se battaient, alors que chez les enfants, les morsures survenaient davantage lorsque le chien était dérangé », souligne l’étude.

      https://www.la-croix.com/France/Securite/Pourquoi-chiens-transforment-parfois-meurtriers-2019-11-21-1201061916

      Maintenant, la chasse a commencé après les faits…

      Selon lui, les 21 chiens chasseurs ne sont pas impliqués. « D’après le légiste, la mort de cette malheureuse dame serait survenue entre 13 heures et 13 h 30. Or, à ce moment-là, la chasse n’avait pas encore démarré. Une photo a été faite à 13 h 28 montrant les chiens sortant du camion », explique Antoine Gallon. « L’autre élément est que cette dame était accompagnée d’un Amstaff (American Staffordshire Terrier, NDLR), qui a été mordu plusieurs fois, ajoute-il. Il s’agit d’un chien de combat dont on ne peut pas imaginer qu’il se soit fait attaquer sans riposter et mordre le ou les chiens en face de lui. Or, les gendarmes ont constaté samedi soir qu’il n’y avait pas une seule morsure sur les 21 chiens de la chasse à courre. »

    • J’ai bien lu les articles où on t’explique que les propos du mari ont été mis en doute, mais qu’après vérification, il semble bien qu’il dise la vérité et qu’il ne s’agisse donc pas d’un meurtre de son fait.
      Je suis étonné qu’on ne t’ai pas encore expliqué que la thèse du suicide était envisagée.

    • Bonjour,
      J’ai plusieurs questions qui restent en suspens.

      Si aucun des 21 chiens qui participaient à la chasse, n’ont été mordus, peut-on penser, que le chien d’Elisa était muselé ? A t-on des précisions à ce sujet ?
      Ceci qui expliquerait d’une part, qu’il n’est pu se défendre et mordre mais aussi les multiples morsures qu’il présentait.

      Dans certains articles il est question de 93 chiens et dans d’autres de 62 chiens dont 21 participaient et 41 étaient restés au chenil.
      Qu’en est-il ? Est-il possible que d’autres chiens qui n’appartenaient pas à Rallye de la Passion, aient participé également à cette chasse ?

      Merci

    • Oui, quand sa nudité a été mentionnée la première fois, je me suis dit que comme chaque fois que l’on retrouve une femme morte violemment, la moindre des choses serait de sortir un kit de viol.

      Je m’interrogeais aussi sur l’excuse de la société de vénerie, sachant que sur son mur, Élisa parlait du fait que même si elle trouvait ça un peu injuste, elle ne sortait pas les chiens sans muselière… ce qui invalide la « preuve » de l’absence de morsures. Maintenant, on a retrouvé la muselière un peu plus loin…

    • Femme enceinte tuée par des chiens : l’indécence des chasseurs
      https://blogs.mediapart.fr/jerome-henriques/blog/041219/femme-enceinte-tuee-par-des-chiens-lindecence-des-chasseurs-0

      Une jeune femme partie promener son chien en forêt et qui est retrouvée morte. La présence d’une chasse à courre à proximité. Une enquête en cours. Et des chasseurs qui, en attendant, font preuve d’une indécence incroyable.

    • #en_marge de cette histoire

      Landes : une meute de chiens de chasse tue une chèvre domestique
      https://www.sudouest.fr/2019/12/18/une-meute-attaque-une-chevre-domestique-6971284-4585.php

      « Un incident rarissime. » C’est ainsi que le directeur de la Fédération de chasse, Régis Hargues, qualifie l’attaque, en marge d’une battue, qui a eu lieu sur la commune de Rivière, route des Clarions. « Une battue aux chevreuils avait lieu non loin de la maison, explique la propriétaire de l’animal. Nous avons, dans un pré clôturé et électrifié, une chèvre, une ponette et une jument. À un moment, ma voisine m’a alerté parce qu’elle avait vu des chiens traverser le pré, à la poursuite de chevreuils. Quand je suis allée voir, j’ai constaté qu’ils s’étaient attaqués à la chèvre, et malgré le vétérinaire, on n’a pas pu la sauver. La personne qui était responsable de la chasse a été très correcte, mais ce qui s’est passé m’interpelle : nous sommes une trentaine d’habitations dans ce secteur et avec les barthes qui sont noyées, le gibier se rapproche un peu plus des habitations. Comment un des chasseurs a pu perdre le contrôle de ses chiens  ? Comment faire pour que cela n’arrive pas à nouveau  ? »

      Bon, là, c’est la faute aux inondations…

    • Des nouvelles du chien

      Dans le cadre de la procédure judiciaire qui suit actuellement son cours, le chien Curtis a été placé par « réquisition judiciaire » aux soins du refuge animalier Clara de Beauvais. Sur sa page Facebook, Christophe, le compagnon d’Elisa et propriétaire du chien s’inquiète du sort de Curtis, il a d’ailleurs décidé d’engager un avocat spécialisé dans le droit animal. D’autres parts sur les réseaux sociaux, de nombreuses voix s’élèvent évoquant pour certain de « mauvais traitement » que subirait l’animal et d’autres évoquant un « comportement menaçant du chien » au refuge. Plusieurs pétitions et des cagnottes ont également été lancé en ligne, l’une d’elle intitulée « urgence vitale pour Curtis » qui doit être envoyée au Procureur de Soissons a recueilli près 13 000 signatures.

      https://www.lobservateurdebeauvais.fr/2020/01/09/mort-delisa-pilarski-le-refuge-clara-de-beauvais-assure-que-c

    • Des nouvelles de la meute

      La version de Jean-Michel Camus est toutefois contredite par un suiveur présent aussi ce jour-là. Selon ce dernier, le piqueux serait parti seul à bord du camion pour récupérer les chevaux à la ferme, le maître équipage quittant Faverolles avec les autres chasseurs vers 12h30.

      Sur place, le responsable de la meute, pris de nausée et de vomissements, renonçait à participer à cheval à la chasse et suivait la chasse à bord d’un véhicule. Au sein de l’équipage, ce dernier éduque et entraîne la meute. Valet de chiens à cheval, il la suit habituellement lors de la traque du chevreuil. Son rôle dans la chasse est indispensable.

      En ce jour important pour les chasseurs, pour ne pas gâcher la fête, le maître d’équipage remplaçait son salarié et décidait de prendre la responsabilité des chiens, enfermés dans le camion depuis midi. Si la chasse a débuté à 13h28, les a-t-on laissés si longtemps dans la fourgonnette ? Quelqu’un a-t-il pris l’initiative d’ouvrir les portes pour qu’ils se dégourdissent les pattes avant le début de la chasse et dans la confusion puisque le piqueux était défaillant ?

      https://www.sudinfo.be/id161994/article/2020-01-16/elisa-29-ans-et-enceinte-tuee-par-des-chiens-la-meute-de-la-chasse-courre

    • Des nouvelles du gendarme

      Arrivé dans l’Aisne en août 2017, Jean-Charles Métras devrait en effet s’en aller d’ici la fin du mois de janvier, quelques semaines après la polémique suscitée par sa présence parmi l’équipage de chasse à courre le jour du décès d’Élisa Pilarski.

      Un départ qui ne serait toutefois pas lié à l’affaire et s’expliquerait par des motifs d’ordre privé selon le haut gradé, dont les propos ont été rapportés par les journalistes de L’Union.

      « Après vingt années dans la gendarmerie, je vais vous dire au revoir. Pour des raisons personnelles, je quitte le département, je vais suivre mon épouse vers le privé », a précisé Jean-Charles Métras pendant la cérémonie traditionnelle en hommage à Sainte Geneviève – patronne des gendarmes – qui s’est déroulée dans la basilique Notre-Dame de Liesse le mardi 14 janvier.

      https://fr.theepochtimes.com/femme-enceinte-tuee-en-foret-le-commandant-du-groupement-de-gendar

    • En attendant de savoir si la meute de l’équipage du Rallye La Passion est dégagée ou non de toute responsabilité dans la mort d’Élisa Pilarski, chiens et cavaliers sont depuis le 16novembre « au repos forcé », selon Jean-Michel Camus. « C’est une consigne que nous a donnée la justice. Ils ont une cour fermée pour s’ébattre. »

      Les cavaliers sont enfermés dans une cour mais ils peuvent s’ébattre ? ^^ Ils relisent ce qu’ils écrivent parfois les journalistes ? :)

    • Des nouvelles de l’ex-gendarme

      Selon les informations exclusives de l’Union relayées par La Voix du Nord, Jean-Charles Metras va quitter le département et « suivre son épouse vers le privé ». Le militaire a été l’un des témoins clés dans l’affaire de la mort d’Élisa Pilarski. Ce dernier affirme qu’il suivait la chasse à courre « à pied et en voiture avec sa femme et ses quatre enfants », le 16 novembre. Une sortie en famille sur son temps libre, selon le commandant du Groupement de Gendarmerie de l’Aisne.

      Mais l’irruption du gradé dans ce dossier a provoqué de nombreux remous. Pendant plusieurs jours, le compagnon d’Élisa Pilarski, qui a retrouvé le corps de sa femme, a assuré que la première personne qu’il a croisée alors qu’il approchait du lieu du drame serait un cavalier. L’homme a cru reconnaître Jean-Charles Metras. Une affirmation que ce dernier réfute très fermement.

      https://www.lesoir.be/274167/article/2020-01-20/femme-tuee-par-des-chiens-en-france-un-patron-de-la-gendarmerie-quitte-ses

    • Mort d’Elisa : le comportement de Curtis, qui a mordu deux fois depuis le drame, en question

      Selon Marie, personne n’était au courant au refuge, avant un coup de téléphone du propriétaire de l’animal, qu’il s’agissait de Curtis et donc qu’il faisait l’objet d’une réquisition judiciaire. « Sinon, il aurait été placé dans un box pour mordeur et il n’y aurait pas eu d’accident, estime-t-elle. Il y a eu une faute quelque part. »

      http://www.leparisien.fr/faits-divers/mort-d-elisa-je-me-suis-dit-qu-il-allait-me-tuer-confie-la-benevole-mordu

      http://www.leparisien.fr/faits-divers/mort-d-elisa-son-chien-curtis-a-mordu-deux-fois-depuis-le-drame-23-01-202

    • Dernier post de Christophe sur FB, 2 février 2020

      « Cette journée du 16 novembre était peut être une journée comme les autres pour certains... mais pas pour nous. Ma Elisa a été sauvagement attaquée et dévorée par une meute de chiens en forêt de Retz. Mon coeur, mon amour, ils t’ont massacré.. qu’est ce que tu as du avoir peur, qu’est ce que tu as du souffrir..
      J’ai tourné dans ma tête tous les scénarios possibles, j’ai été aidé par un groupe de personnes composé de professionnels du chiens, vétérinaires, comportementalistes, professionnels du ring, de chasseurs, de témoignages nous avons reconstitué la scène sous des angles différents, en situations, réelles nous avons visionné pendant des heures des vidéos sur les réactions de personnes confrontées à des attaques de chiens, personnes voulant protéger un enfant ou leur compagnon à quatre pattes. Nous avons visionné des meutes de chiens de chasse sur leur proie, nous avons parlé de toi Elisa pendant des heures... Il fallait qu’ils comprennent qui tu étais...
      Après des semaines nous avons très certainement trouvé le scénario le plus probable.
      Tu m’as appelé à 13h19. Tu étais en panique, tu me disais je me fais mordre aux bras et aux jambes, je t’ai dis de lâcher Curtis. Et plus rien.
      Je sais que tu étais dans cette allée, où j’ai retrouvé ton blouson, ton gilet et ton écharpe. Tu avais Curtis en laisse avec son harnais et doublement muselé après ta frayeur que tu as eu avec le malinois. Tu ne l’as pas lâché. Ils en voulaient à Curtis et tu as du mettre des coups de pieds, te faire mordre aux jambes, tu as sorti ton blouson, ton gilet et ton écharpe pour les donner à tes agresseurs. As tu pris Curtis dans tes bras ? Tu étais enceinte de 6 mois, Curtis au moment des faits pesait environs 18kilos, tu l’as porté et a cherché le seul endroit où te protéger, où il y avait des arbres, c’était ce ravin. Tu n’as pas du le porter longtemps tes agresseurs te poursuivaient. Je suis sur que tu t’es couché sur Curtis. Tu as protégé ton visage, Enzo et Curtis.Tu as fait rampart avec ton corps contre tes agresseurs.
      Ils t’ont alors attrapé par ta chevelure, t’ont traîné avec acharnement, ça devait être d’une violence inouïe car ils t’ont totalement scalpé... Curtis a du se cacher, le vétérinaire qui l’a vu le jour même a constaté des griffures importantes au niveau des oreilles, je sais que tu attachais très bien les muselière..Il s’est blessé en essayant de se l’arracher. Curtis n’a pu mordre personne, et s’il n’avait pas eu sa muselière il ne serait plus là aujourd’hui, face à une meute il n’aurait jamais fait le poids.
      Quand je suis arrivé près des lieux, j’ai aperçu un petit groupe de chiens de chasse qui partaient. J’ai appelé Curtis qui m’a répondu en aboyant, c’est comme ça que je me suis rapproché du ravin dans lequel j’ai vu une meute d’une quinzaine ou vingtaine de chiens de chasse, silencieux autours de ce que je pensais être un tronc d’arbre. En me voyant, ils se sont lancés dans ma direction et sont partis.
      J’ai ensuite vu Curtis, il était pas très loin de toi. Ce que je pensais être un tronc d’arbre était en fait ton corps dévoré.. une vision d’horreur que je ne peux pas me sortir de la tête. Qu’on ne vienne pas me dire que mon chien est responsable de ce massacre. Même si aujourd’hui certains pensent avoir trouvé le coupable idéal. Qu’on ne vienne pas me dire que notre chien va très bien alors que son traumatisme n’a pas été pris en charge par des gens qualifiés. Tu as sacrifié ta vie Elisa et celle d’Enzo pour sauver ton chien et ça, je sais que c’était toi. Aujourdhui vous n’êtes plus là mais je me battrais jusqu’au bout pour trouver les coupables et proteger Curtis.
      Je sais que des gens savent forcément quelque chose si vous avez une âme, une conscience, vous pouvez contacter de façon anonyme mon avocat Maître Alexandre Novion.
      Je tiens à remercier tous les gens qui me soutienne dans ce cauchemar. »

      https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=148783936582483&id=112721460188731&__tn__=-R

    • Affaire Pilarski : les analyses ADN des chiens sont trop chères pour la justice
      https://www.lavoixdunord.fr/712844/article/2020-02-20/femme-enceinte-tuee-dans-une-foret-de-l-aisne-les-analyses-adn-des-chie

      ce jeudi matin, France Info croit savoir que ces prélèvements n’ont même pas été transmis à un laboratoire. « Le coût des analyses serait supérieur à 100 000 euros. Une facture jugée un peu excessive par la justice », assure la radio publique. Un deuxième devis aurait été donc été demandé à un laboratoire concurrent par le juge d’instruction en charge du dossier et les enquêteurs de la police judiciaire de Creil. « Je suis sidéré qu’on en soit au point mort, que ces examens ne soient pas en route (…) Oui c’est coûteux, mais rien ne vaut une vie », a réagi Me Alexandre Novion, l’avocat de Christophe Ellul sur France Info.

      #déni_de_justice

    • Affaire Pilarski : des analyses ADN « trop coûteuses » pour la justice
      https://www.lefigaro.fr/actualite-france/affaire-pilarski-des-analyses-adn-trop-couteuses-pour-la-justice-20200220

      Face au coût jugé trop élevé de la facture envoyée à la justice pour l’analyse ADN des chiens mis en cause, la juge d’instruction a demandé un nouveau devis à un second laboratoire. Sans garantie que le prix soit moins cher, et donc que la justice accepte, il faut s’attendre à ne pas connaître tout de suite la vérité sur l’affaire Pilarski.

      « Mon client n’arrive pas à comprendre pourquoi on ne met pas en place tous les moyens pour trouver la vérité ? Pourquoi cette lenteur et pourquoi entrer dans ce cycle d’immobilisme en ce qui concerne ces analyses ADN ? », s’indigne au Figaro Me Alexandre Novion, l’avocat de Christophe Ellul. « Il l’interprète comme une forme de retournement contre lui car cette annonce est à mettre en perspective avec cette sur focalisation sur son chien Curtis : on n’arrête pas de parler de ses morsures d’avant, d’après... Mon client le vit comme une stigmatisation en tant que victime », enchérit le défenseur du compagnon.
      67 chiens mis en cause, un second devis en cours

      Presque trois mois après le drame, l’énigme autour de la mort d’Elisa Pilarski reste donc totale. La jeune femme a vraisemblablement été tuée par un ou des chiens. La question est : le(s)quel(s) ? Le malinois rencontré par la victime lors de sa promenade a rapidement été écarté de la liste des suspects. Reste le chien du couple, Curtis, et les chiens présents lors de la chasse à courre. Au total, 67 chiens. Une information judiciaire avait alors été ouverte contre X pour « homicide involontaire par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement résultant de l’agression commise par des chiens ».
      À lire aussi : Mort d’Elisa Pilarski : le chef de la chasse à courre placé sous le statut de témoin assisté

      « On se réfugie derrière les expertises ADN. Or, qu’est-ce que démontrent ces analyses ? Simplement qu’il y a eu un contact entre tel ou tel chien et le corps d’Elisa Pilarski. C’est tout », tranche pour sa part Me Guillaume Demarcq, l’avocat du maître d’équipage de chasse à courre Sébastien Van Den Berghe. « Enfin, il est clair que ces analyses mettront en évidence l’ADN de son chien Curtis, puisqu’il se promenait avec Elisa ». Pour ce qui est des chiens de la chasse à courre, le pénaliste assure que, « s’ils ont eu un contact avec elle après sa mort, leur ADN aussi sera présent dans les résultats, ce n’est pas exclu, mais cela ne mettra pas les chiens de la chasse à courre en cause , il ne faut pas conférer à l’analyse ADN une valeur qu’elle n’a pas », souligne-t-il.

      C’est trop cher car de toute façon, même si on trouve l’ADN des chiens de chasse ca ne mettra pas en cause les chiens de chasse car ce sont des chiens électeurs de Macron et cela les autorise à bouffer les sans-dents.

      Autre truc étonnant, je croyait que les analyses étaient en cour depuis 3 mois et en fait on en est toujours au stade du devis. Devis unique qui a été demandé à un seul labo manifestement...

      Autre truc étonnant, comment se fait il qu’on ne mesure pas la taille des morsures sur le corps. Ca m’étonnerait que les morsures d’un A.Staff soient identiques à celles des chiens de chasse.

    • C’est trop cher car de toute façon, même si on trouve l’ADN des chiens de chasse ca ne mettra pas en cause les chiens de chasse car ce sont des chiens électeurs de Macron et cela les autorise à bouffer les sans-dents.

      C’est horrible mais c’est tellement vrai.
      La haute bourgeoisie française et ceux qui rêvent d’en être a toujours les mêmes réseaux d’avant la révolution, la transmission d’un héritage financier et patrimonial exponentiel qui leur assure l’impunité. Ce sont les mêmes familles qui s’attachent aux mêmes valeurs ancestrales de traditions de noblesse méprisante, comme ces parties de vénerie complétement débiles. C’est pas des déguisés qui partent en goguette, c’est des satanistes qui se regroupent en caste pour se repaitre de l’angoisse et voir couler le sang de leurs victimes animales.
      La #vénerie c’est vraiment un des rouages de l’aristofachie française à détruire.

    • Affaires Pilarski ou Polanski, c’est toujours #deux_poids_deux_mesures, « les jugements de cour » etc. et de la machine à attiser des haines plus ou moins bien dirigées de la part du populo qui sait bien qu’il peut servir de bouffe pour chiens dès que les intérêts des classes dominantes sont menacés.

      Dans un autre style : deux enquêtes de police qui n’arrivent pas à trouver le propriétaire d’une bagnole non-volée, bonhomme que sept témoins ont vu tenter de tuer quelqu’une, vous y croyez ?

    • Cette semaine, France Info avait en effet révélé que c’était le coût de ces analyses – autour de 200 000 euros -, qui avait conduit la justice à les différer. Au premier devis d’un laboratoire devait être privilégié celui d’un second, moins cher. C’est donc ce dernier qui vient vraisemblablement d’être choisi par la juge d’instruction, comme le mentionne le parquet. « Dans cette affaire notamment, les expertises ADN ne constituent pas le Graal absolu, prévenait toutefois Me Caty Richard, avocate de la maman et de l’oncle d’Elisa. Il n’est pas question de fantasmer que ces expertises répondront à toutes les questions posées par le drame. »

      En attendant que leurs conclusions soient enfin connues, le parquet a donc précisé quels enseignements la justice pouvait tirer de l’autopsie du corps d’Elisa, décrit comme atrocement mutilé lorsque son compagnon l’a trouvé, aux alentours de 15 heures le 16 novembre. Les caractéristiques suggèrent « l’action d’un, ou plus probablement de plusieurs chiens au regard de la répartition des plaies, de leurs différences de morphologies et de leurs profondeurs », précise cette fois le procureur de la République, lequel indique qu’il est impossible « de dénombrer les animaux en raison des nombreuses morsures intriquées dans une même zone. »

      Si il y a de très nombreuses morsures d’un nombre de chien important à quoi bon gaspiller 200.000€ pour connaitre l’ADN individuellement de chacun de ces multiples chiens. On va pas mettre en taule chaque chien individuellement en rapport au nombre des morsures qu’ils ont faites. Curtis n’est pas une meute de chien à lui tout seul, si plusieurs morsures de plusieurs chiens sont visibles c’est que la meute est impliqué. A la limite l’ADN pourrait montre qu’il manque une trentaine de chiens dans la meute, mais sinon je voie pas l’intérêt de ces testes hors de prix.
      http://www.leparisien.fr/faits-divers/affaire-pilarski-elisa-a-ete-tuee-par-un-ou-plus-probablement-plusieurs-c

    • Comment l’affaire Pilarski a emporté l’officier Jean-Charles Métras
      https://lessor.org/a-la-une/comment-laffaire-pilarski-a-emporte-lofficier-jean-charles-metras
      Donc, finalement, il n’a pas quitté la Gendarmerie pour raisons personnelles…

      L’officier brillant, passé par Saint-Cyr et l’école de Guerre, ancien attaché de sécurité intérieure à l’ambassade de France au Maroc, avait jusqu’ici de bons résultats à mettre en avant. Exemple avec le dispositif Diane, mis en place dans l’Aisne en 2019 par cet amateur de chasse. Signée entre préfecture, Gendarmerie et fédération locale de chasse, cette convention prévoyait un échange d’information pour lutter contre l’insécurité en milieu rural, “en ciblant en particulier les atteintes aux milieux naturels et à la biodiversité”, expliquait alors le groupement. Un partenariat monté en épingle après la mort atroce d’Elisa Pilarksi comme la preuve d’une connivence entre gendarmes et chasseurs.

      L’affaire repose la question des limites à respecter pour un responsable local. “Le poste de commandant de groupement est sensible, mais les officiers sont préparés à ces situations”, note un général en deuxième section. “Rien n’interdit cette participation à la chasse à courre, relève un autre ancien haut gradé. Un commandant n’est tenu qu’à l’observation de la loi”. Mais, ajoute-t-il, “même si on a le droit de le faire, il ne faut pas le faire”. Et cet officier général de confier ce jugement personnel : “Quand on est commandant de groupement, on ne suit pas une activité qui relève de la maltraitance”. La présence de l’officier interpelle d’autant plus que les pro et antichasse s’écharpent depuis quelques années aux abords des forêts. Apparaître auprès d’une partie dans ce type de conflit laisse ouverte la voie aux interrogations sur une supposée partialité.

    • Au moins à Saint-Pierre-et-Miquelon y’a pas trop de forêt … à moins qu’il préfère Clipperton ? y’a un vote pour le tribunal populaire ? Sainte Hélène ?
      #mutation_outremer (c’est là que S.Royal raconte que sont envoyés les criminels indésirables … sans passer devant la justice pour autant) #impunité #passe_passe

    • Note un point particulièrement grave, incidemment se mettent en place en 2019 des dispositifs chasseurs-gendarmes pour lutter contre l’insécurité …

      dispositif Diane, mis en place dans l’Aisne en 2019 par cet amateur de chasse. Signée entre préfecture, Gendarmerie et fédération locale de chasse, cette convention prévoyait un échange d’information pour lutter contre l’insécurité en milieu rural

    • Affaire Pilarski : de nouveaux éléments accablent le chien Curtis

      L’étau se resserre autour du chien de Christophe Ellul, le compagnon d’Elisa Pilarski : six mois avant le drame, la jeune femme aurait déjà été mordue par Curtis.
      Par Margaux d’Adhémar

      Elisa Pilarski est morte suite à des morsures d’un ou de plusieurs chiens dans la forêt de Retz, dans l’Aisne, en novembre 2019. Reste à savoir le(s)quel(s) : serait-ce les chiens de la société de vénerie ou Curtis, un des chiens de son compagnon Christophe Ellul ? Pour l’instant, le canidé du couple est dans la ligne de mire. A-t-il dévoré sa maîtresse ce samedi 16 novembre ?

      « Si Curtis était méchant ça se serait passé avant. Et je sais que Curtis est innocent », a répété dans la presse, le compagnon d’Elisa. Pourtant, selon des informations publiées par Oise Hebdo, il semblerait que Curtis ait déjà mordu sa maîtresse, quelques mois avant la tragédie et, pour étouffer l’affaire, Ellul aurait menti aux médecins.

      Le 14 mai 2019, Elisa Pilarski se présente aux urgences avec la main droite complètement enflée et des morsures impressionnantes de plusieurs centimètres au majeur, sur la partie intérieure et extérieure. Les médecins ont été obligés de pratiquer une incision dans la paume de sa main pour la désinfecter, la plaie étant tout particulièrement profonde. « C’est Curtis, il ne m’a pas loupée », aurait expliqué Elisa à sa mère alors qu’elle est de retour dans le Sud, dans la maison familiale. Si Christophe Ellul avait confirmé cette version aux enquêteurs, il réfute en revanche l’idée selon laquelle les blessures d’Elisa auraient été infligées par Curtis, allant jusqu’à publier sur les réseaux sociaux le certificat médical attribué à Elisa lors de sa sortie, attestant qu’elle a été victime d’une morsure de chat.

      Ellul serait allé jusqu’à mentir aux médecins, comme semble l’attester un échange de messages avec son épouse, dont il n’est pas divorcé, publiés dans Oise Hebdo : « J’ai menti, j’ai dit que le chat était vacciné. On doit appeler le centre anti-rage, l’infection est trop importante, elle doit rester 3 jours à l’hôpital ».

      Aujourd’hui, Curtis a été placé en statut de « saisie conservatoire » et se trouve actuellement en fourrière à Beauvais. Une bénévole au « refuge de Clara » a également fait les frais de son comportement agressif : Oise Hebdo a publié une image de la jambe ensanglantée de la jeune femme, avec trois entailles profondes de morsure au niveau du tibia. Résultat : douze points de suture.

      « Je ne sais pas combien de temps ça a duré. La seule chose dont je me souvienne, c’est d’avoir hurlé et de m’être dit qu’il allait me tuer. La douleur était vraiment intense », confiait-elle à nos confrères du Parisien. « C’était extrêmement violent car, à aucun moment, le chien n’a montré de signes qu’il allait attaquer. Il n’a par exemple pas grogné », raconte un des témoins de la scène.
      À lire aussi : Femme tuée par des chiens : le compagnon de la victime veut engager un avocat pour son animal

      L’animal s’était également montré violent lorsque son maître livrait son témoignage à la police, juste après la découverte du corps déchiqueté de sa compagne, rapporte Le Parisien. Son chien l’aurait mordu à la jambe et ce dernier se serait écrié « Il est fou ce chien il faut le piquer ! ».

      https://www.lefigaro.fr/actualite-france/affaire-pilarski-de-nouveaux-elements-accablent-le-chien-curtis-20200305

    • Elisa Pilarski a été tuée par le chien de son compagnon et non par un chien de chasse, annonce le parquet, AFP
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/11/03/elisa-pilarski-a-ete-tuee-par-le-chien-de-son-compagnon-et-non-par-un-chien-

      « Les opérations de recherche d’ADN et de comparaisons avec les traces retrouvées sur les prélèvements effectués sur les différents chiens » ont fait apparaitre que « l’ADN de la victime est présent à partir de traces de sang prélevées en différents points de la gueule et de la tête du chien Curtis », précise le communiqué du parquet. « Aucune trace d’ADN provenant des 33 chiens de meute prélevés n’a été retrouvée », ajoute-t-il. Par ailleurs, « aucune trace de morsure n’a été relevée que ce soit sur les chiens de chasse ou sur le chien Curtis , ce qui permet d’exclure un conflit direct entre la meute et ce dernier ».
      A la suite du drame, Christophe Ellul, le compagnon d’Elisa Pilarski avait mis en cause la meute de chasse, affirmant qu’Elisa l’avait appelé se disant « attaquée par plusieurs chiens ».

      Curtis a également été incriminé par le rapport de deux experts vétérinaires, portant sur son « origine et comportement » et « sur une analyse des morsures » relevées sur le corps, ajoute le parquet. L’animal, un « american pitbull terrier, provenant d’un élevage des Pays-Bas et introduit illégalement en France par son acquéreur » a « fait l’objet d’un dressage au mordant, forme d’apprentissage interdite en France et pouvant relever d’actes de maltraitance animale », et « de nature à abolir toute capacité de contrôle ou de discernement » chez l’animal, précise le communiqué.
      Elisa Pilarski, 29 ans, était partie se promener en forêt de Retz avec ce chien, qu’elle connaissait peu selon Me Cathy Richard, l’avocate de sa mère. Elle avait été découverte morte par son compagnon, victime d’après l’autopsie d’une « hémorragie consécutive à plusieurs morsures ».

      « Sur l’ADN, c’est un rapport que nous avons attendu très longtemps et ces longs délais sont pour moi suspects. J’attends plus d’informations sur la manière dont les experts ont travaillé et la méthodologie et je ne souhaite pour l’instant pas me prononcer », a réagi pour sa part l’avocat du compagnon, Me Alexandre Novion.

      Du danger d’#armes_par_destination heureusement plus rares que les voitures. Un chien qui mord, si on souhaite pas l’enfermer à vie, on le fait piquer. Je sais pas combien on gagne dans les concours canins. Moche de moche.

  • Le prix du gratuit (2/4) : Travail gratuit : la valeur de l’exploitation
    https://www.franceculture.fr/emissions/entendez-vous-leco/le-prix-du-gratuit-24-le-prix-de-la-democratie



    C’est maintenant, où il est question du #travail des #femmes, de sorcières (Sylvia Federici), de #féminisme

    Travail #domestique, #bénévolat, digital labor, stage, #service_civique, voilà autant de formes historiques et contemporaines du #travail_gratuit. Bien qu’originellement motivé par des valeurs d’amour ou d’engagement, ce travail ne signifierait-il pas aussi exploitation ?

    Maud Simonet
    chargée de recherche en sociologie au CNRSà l’IDHE.S et directrice adjointe à l’IDHE.S-Nanterre

  • Nouvelle procédure d’asile : les explications de Cynthia Gani.

    https://www.rts.ch/play/tv/19h30/video/nouvelle-procedure-dasile-les-explications-de-cynthia-gani-?id=9814114&station=a
    #restructuration #asile #procédure_d'asile #suisse #migrations #réfugiés #révision #accélération_des_procédures #loi #révision #loi_sur_l'asile #centre_fédéral #procédure_d'asile #droit_d'asile

    Dans le sujet de la RTS, on peut voir la nouvelle carte des centres (appelés avant #centres_d'enregistrement_et_de_procédure, #CEP, désormais appelés #centres_fédéraux) :
    En Suisse :


    En Suisse romande :

    #cartographie #visualisation

    On y apprend que le centre de #Boudry sera le centre principal pour le traitement des demandes d’asile (#centre_de_procédure). Les autres, #Chevrilles, #Vallorbe, #Le_Grand_Saconnex (#Genève), accueilleront les requérants d’asile en attente d’une réponse (#procédure_étendue, soit toutes celles et ceux qui probablement recevront une réponse positive...) ou en attente d’un renvoi (#déboutés). Dans le centre #Les_Verrières on trouvera les fameux (sic) #récalcitrants.

    Accélération des procédures = but de la réforme ?
    Depuis très longtemps, @vivre et quelques autres associations ont compris que c’était juste une belle histoire... et que la réalité était bien autre...

    Sur les « récalcitrants » :
    https://asile.ch/tag/recalcitrant

    v. ici, sur le site de @vivre, les articles avec le mot-clé « accélération des procédures » :
    https://asile.ch/tag/acceleration-des-procedures

    Et notamment cette analyse suite aux déclaration de Simonetta Sommaruga, conseillère fédérale (socialiste !) en charge du dossier « asile » :
    https://asile.ch/2016/03/23/cherchez-lerreur

    cc @isskein @i_s_

    • Femme isolée, âgée et malade : 90 jours au #centre_fédéral

      9 février 2018
      Rachel a dû faire ses trois mois au centre fédéral de #Vallorbe. Elle y aura passé toutes les fêtes de fin d’année alors que sa procédure d’asile était terminée depuis le 28 novembre lorsque le SEM a rendu une décision négative et de renvoi de Suisse. Elle est sans famille dans ce grand centre de vie collective où on mange à la cantine bruyante en faisant la queue son plateau à la main avec 150 autres personnes, essentiellement des hommes, et où on dort dans la promiscuité et le manque d’intimité dans des dortoirs collectifs sur des lits superposés étroits, collés deux à deux pour gagner de l’espace, plantés le long des murs en rang, autant que la pièce peut en contenir. « Les gens viennent et partent et moi je suis toujours là. Je suis fatiguée et angoissée. La nuit je ne dors pas. J’ai mal à la tête. J’ai des problèmes de haute tension, à 170, 140, 150… Je suis très angoissée par mon état, mais ils ne veulent pas que j’aille chez le médecin. J’ai vu seulement un gynécologue, une fois, pour un contrôle. Je supplie chaque jour pour aller voir un médecin. Ils me donnent du paracétamol et me disent d’attendre mon transfert. Cela fait trois mois que j’attends. Tous les jours je vais supplier Monsieur Olivier pour mon transfert, mais c’est toujours « plus tard, plus tard ». Il y a des jeunes qui sont restés deux mois, et moi, j’ai 55 ans, je suis toujours là… [pleurs] … [pleurs] … [pleurs] … J’ai besoin de voir une psychologue… Je suis à bout. »

      Les raisons pour lesquelles les gens, et particulièrement les personnes souffrantes ou socialement plus exposées, doivent rester pendant des semaines voire des mois dans un centre fédéral aménagé comme un hall de gare (mais sans les lumières des magasins) restent mystérieuses. Serait-ce pour favoriser les échanges interculturels entre les populations, pour la création d’un espace de vie communautaire solidaire, ou pour le développement des activités économiques locales par l’offre d’emplois de service d’intendance, de conseil en santé naturelle et d’agent de sécurité ? Impossible de comprendre. Il n’y a pas de raison autre que répressive en réalité, une volonté délibérée de garder les gens sous l’emprise de l’autorité, en situation semi-carcérale, dans la dépendance de survie et la soumission aux injonctions et autres règlements internes. C’est une volonté d’humiliation, c’est-à-dire d’écrasement de la liberté personnelle. Lorsque le quotidien est réglé par l’autorité, on perd sa qualité d’individu libre et autonome, c’est-à-dire sa dignité.

      À la question « pourquoi faut-il rester trois mois voire quatre mois dans un centre fédéral ? », le SEM répond : « c’est parce qu’il y a un recours contre notre décision négative ». Quel rapport ??! Ou bien : « C’est parce que c’est la loi. » Trop facile… Même pour la notification de la décision de renvoi, la présence au centre fédéral n’est pas nécessaire. Les gens la reçoivent sous forme de courrier remis à l’entrée sans aucune explication. Cela revient au même que de retirer l’enveloppe de la boîte aux lettres à son domicile. Il n’y a que les actes de saisie des empreintes digitales et d’audition des personnes en présence d’un interprète qui peuvent justifier l’obligation de maintenir les gens au centre fédéral. Ces actes sont généralement accomplis pendant la première semaine du séjour. Au-delà de 7 jours, la prolongation de l’assignation au centre dévalorise les personnes, les démoralise et les épuise.

      D’une manière générale, le critère de vulnérabilité des femmes isolées a disparu des préoccupations des autorités fédérales. Les autorités n’ignorent pourtant pas qu’elles proviennent de milieux sociopolitiques discriminants et que la plupart d’entre elles ont déjà été victimes d’abus et de violences.

      Rachel par exemple est une femme séparée d’un mari alcoolique et violent. Ce fait seul devait entraîner son attribution rapide à un canton. Il fallait ajouter à cela qu’elle a besoin de voir un médecin, qu’elle est une femme isolée alors que la population du centre est essentiellement masculine ce qui est inapproprié, et qu’elle est une femme d’un certain âge, qui a besoin d’intimité, de repos et de pouvoir cuisiner ses propres repas selon ses propres horaires. Les nuits dans les dortoirs collectifs et les repas de pâtes huileuses au thon ne sont pas appropriés non plus. Ce régime de vie en soi manque de respect à son égard. C’est sans compter les fouilles et les contrôles de documents par des agents de sécurité en uniforme à chaque sortie/entrée du centre, l’assignation à des tâches ménagères et les interdictions de sorties dont elles sont assorties, et les violences verbales ou physiques quotidiennes au vu et au su de tous. Les résidentes comme Rachel sont contraintes d’en être les témoins, simplement parce qu’elles sont là. Dans ce milieu très discipliné et contrôlé, où aucune activité n’est prévue autre que d’attendre pendant des jours et des jours, les bagarres sont fréquentes, entre les requérants d’asile, ou à l’entrée lorsque les agents de sécurité se disputent avec les jeunes hommes d’origine africaine, arabophone, afghane ou d’Europe de l’est, peu importe.

      D’une manière générale, les femmes, les enfants, les personnes âgées ou malades en pâtissent plus lourdement. Leur situation individuelle n’est pas prise en compte. Le SEM n’a qu’un seul objectif : faire sa loi, plier la population requérante d’asile à sa discipline, à ses instructions, à son ordre juridique, celui de l’autorité toute puissante. Les femmes ou les vieux n’ont qu’à s’adapter.

      http://droit-de-rester.blogspot.com/2018/02
      #témoignage #femmes

    • Asile : une décennie de remue-ménage

      Au terme d’un processus complexe entamé quelque dix ans plus tôt, la nouvelle la loi sur l’asile entrera en vigueur au printemps 2019. Chargé d’information sur l’asile au Centre social protestant à Genève, Aldo Brina a suivi pas à pas la mise en place de la réforme. L’occasion d’en rappeler les grandes lignes dans une perspective critique.

      Le 1er mars 2019 entrera en vigueur la nouvelle #procédure_d’asile, au terme d’une #restructuration menée depuis 2010 par la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga et son administration. Un projet mastodonte, divisé en plusieurs volets législatifs, étendu sur différentes lois et ordonnances. En raison de sa complexité et de la durée du processus, peu de personnes ont gardé une vision d’ensemble, en dehors de quelques fonctionnaires et une poignée de spécialistes. En entrant dans ce labyrinthe, il s’agit de garder le fil d’Ariane : le but premier de la procédure d’asile est l’octroi d’une protection aux personnes en danger dans leur pays.

      Accélération des #renvois

      Dans le nouveau système, l’enregistrement de la demande et l’instruction du dossier se fait en 31 jours, grâce à la concentration en un seul lieu des acteurs-clés de la procédure d’asile (fonctionnaires, juristes, interprètes, etc.) et grâce à la mise en place d’une procédure dite « cadencée » qui se tient à un rythme soutenu, pour ne pas dire effréné. En contrepartie de l’#accélération, chaque demandeur d’asile a droit à un conseil et à une représentation juridique, du moins jusqu’à ce
      que tombe la décision de première instance.
      #procédure_cadencée #accélération_des_procédures

      Selon les projections du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM), 60% des demandeurs d’asile feront l’objet d’une procédure dite accélérée et ne seront, dès lors, plus attribués à un canton. Les procédures accélérées sont prévues pour les cas jugés « clairs », qui ne nécessitent pas de mesures d’instruction approfondies. Elles aboutiront, dans la plupart des cas, à une décision négative. Le délai de #recours est réduit de 30 à 7 jours. Ces personnes resteront sous le contrôle de la Confédération.

      40% des demandes – les cas jugés les plus « complexes » – seront traitées en procédure dite étendue. Les requérants d’asile seront alors attribués à un canton, et la suite de la procédure se déroulera plus ou moins comme sous l’ancien droit. Le SEM se fixe un objectif de délai de traitement de ces demandes d’une année, mais il n’existe en réalité pas de délai contraignant. L’accélération pour ces cas, qui sont ceux les plus à même de conduire à une protection, n’est pas du tout garantie.

      Des #centres_fédéraux d’« asile », vraiment ?

      La nouvelle procédure est actuellement testée au centre de #Boudry, dans le canton de Neuchâtel. A l’occasion d’une journée « portes ouvertes », Mme Sommaruga annonce que 10% des procédures accélérées y débouchent sur une décision d’asile ou d’admission provisoire, et 90% sur des décisions négatives et des procédures de renvoi. Partant, ce sont surtout les procédures de renvoi qui sont accélérées. Cette orientation regrettable correspond néanmoins à l’ordre de priorité de traitement des demandes que s’est fixé le SEM depuis des années.

      L’un des volets marquants de la restructuration, c’est la concentration des requérants d’asile pour une durée prolongée dans des #centres_fédéraux_d’asile (#CFA). Jusqu’ici, les demandeurs d’asile y restaient au maximum 90 jours. Cette durée sera portée à 140 jours. Ceux qui auront vu leur demande être traitée en procédure accélérée et être frappée d’une décision négative, le plus souvent en vertu de l’application du Règlement européen Dublin, ne connaîtront plus que ces structures.

      Dans les centres fédéraux, la dimension sécuritaire prend le pas sur l’encadrement social. Il n’y est pas question d’accueil, mais de #contrôle. Les requérants d’asile n’ont pas le droit de sortir en dehors d’heures précises et sont fouillés systématiquement à chaque fois qu’ils entrent. Leurs droits sont limités, tant en matière de liberté de circuler, de vie privée et familiale, d’accès aux soins ou d’#intégration sociale. Cet univers clôturé et surveillé n’est adapté ni aux mineurs ni aux personnes traumatisées, que l’on retrouve par définition en nombre dans la procédure d’asile.
      #liberté_de_mouvement

      Le canton de Genève sera au cœur de ce dispositif orienté vers l’exécution des renvois. 160 places de détention administrative ont été construites à la #Brenaz II en prévision de la restructuration. Un projet complémentaire devrait en outre voir le jour au #Grand-Saconnex, sur une parcelle jouxtant l’aéroport. Il sera composé de 50 autres places de détention administrative, de nouveaux bureaux pour quelque 300 collaborateurs de la police internationale (police chargée, entre autres missions, de l’exécution des renvois), d’un centre de coopération douanière, et d’un centre fédéral d’« asile » de 260 places. Ce gigantesque complexe n’est pas encore construit et fait l’objet d’une contestation grandissante.

      Le rôle ambigu des #représentants_juridiques

      La mise en place d’une #protection_juridique, aussi partielle soit-elle, a favorisé l’adhésion à la restructuration de l’asile d’une partie de la gauche et des œuvres d’entraide. La revendication historique des milieux de défense du droit d’asile a-t-elle enfin été entendue ?

      Présentant le dispositif, la conseillère fédérale souligne que la protection juridique améliore la qualité des décisions, qu’« on a moins de recours, ce qui montre que quand une décision a été prise, elle est comprise et acceptée ». On attendrait donc du représentant juridique qu’il aide l’administration à instruire les dossiers, à participer à la production d’une décision de meilleure qualité, et qu’il fasse accepter aux requérants d’asile les décisions négatives les concernant.

      Cette conception est à mille lieues du rôle des représentants juridiques tels qu’ils travaillent depuis des décennies dans le domaine de l’asile. Les juristes des permanences existantes défendent les intérêts des demandeurs d’asile, sans se préoccuper de ceux de l’administration. En fait, cette orientation est contraire aux principes régissant le rôle des avocats dans tous les autres domaines du droit.

      Et du point de vue des requérants d’asile eux-mêmes ? Pour ceux-ci, qui ne connaissent pas nos procédures administratives et arrivent dans un centre fédéral comme sur une nouvelle planète, la distinction entre les fonctionnaires du SEM et les représentants juridiques sera-t-elle claire ? Comprennent-ils que les uns sont là pour décider de leur sort et que les autres défendent leurs intérêts ? C’est une question cruciale, tant, dans la procédure d’asile, les confidences intimes – tortures, mauvais traitements, violences sexuelles, orientation sexuelle ou conversion religieuse à haut risque – sont importantes et appellent à ce que s’établisse un lien de confiance entre le requérant d’asile et son mandataire. Un rapport d’évaluation mentionnait qu’« une minorité importante de requérants d’asile a ainsi évoqué le fait que les autorités et les représentants légaux travaillaient dans le même bâtiment et qu’ils se demandaient donc si ces derniers ne défendaient pas plutôt les intérêts de ces autorités ».

      Enfin, le rythme même de la procédure, accéléré à l’extrême, met en danger la protection juridique. Par définition, l’instruction d’une demande d’asile s’accommode mal de la précipitation, étant donné les enjeux en présence et la difficulté de faire la lumière sur des faits qui se sont déroulés à des milliers de kilomètres et qui touchent à la sphère intime des demandeurs d’asile. En juin 2018, l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés dénonce des dispositions qui « ne créent pas les conditions de base nécessaires à un déroulement des procédures équitable et conforme à l’Etat de droit »8.
      Vers moins de protection juridique ?

      En procédure accélérée, les mandataires d’office peuvent refuser de faire recours s’ils estiment que les chances de succès sont nulles. Les requérants d’asile se retrouvent alors obligés de se tourner vers d’autres acteurs pour se faire aider. Ainsi la moitié des recours au centre test de Zurich est déposée non pas par le juriste nommé d’office, mais par des mandataires externes, c’est-à-dire par des associations financées par leurs propres moyens. Quant à la procédure étendue, la représentation juridique y est limitée à la procédure de première instance. Les recours ne sont pas couverts de façon systématique, alors même que les cas sont jugés plus complexes.

      Ajoutons à ces limitations que l’activité d’une permanence juridique, au sens actuel du terme, ne se limite jamais à la procédure d’asile proprement dite. Les personnes en demande d’asile ont de nombreux problèmes juridiques ou sociaux qui nécessitent un conseil : inclusion d’un conjoint dans un statut, regroupement familial, réexamen suite à la survenue d’un fait nouveau, transformation de permis, changement de canton, demandes de visas humanitaires, problème d’hébergement ou d’assistance, etc. Aucune de ces démarches n’est couverte par la protection juridique subventionnée.

      Avec l’avènement de la restructuration, il a pourtant été annoncé haut et fort que chaque requérant d’asile aurait désormais droit à un représentant juridique (voire même à un « avocat », selon la propagande de l’UDC). C’est dans ce contexte que les permanences juridiques traditionnelles vont devoir continuer à trouver des financements indépendants, avec le risque de perdre en légitimité auprès de leurs soutiens, puisqu’existera désormais un système subventionné par l’Etat. Paradoxalement, il y a un risque que la mise en place d’une protection juridique subventionnée aboutisse globalement à moins de protection juridique.

      Malgré l’introduction d’une protection juridique, la répartition des taux entre différentes décisions – négatives, admission provisoire ou asile – ne semble pas devoir changer avec la restructuration. L’asile ne sera octroyé ni plus souvent, ni plus rapidement que jusqu’ici. La protection de personnes en danger, qui devrait constituer le cœur de notre politique d’asile, ne sera pas améliorée. On serait tenté de défier Mme Sommaruga de nous prouver le contraire, elle dont le remue-ménage aura surtout eu pour but de viser une diminution des coûts et de rendre notre pays moins attractif par l’accélération des renvois… mais étant donné les remaniements en vue au Conseil fédéral, la ministre socialiste sera-t-elle encore à la tête du DFJP dans quelques mois pour assurer le service après-vente ?

      https://lecourrier.ch/2018/11/18/asile-une-decennie-de-remue-menage

    • Ouverture d’un centre pour #requérants_récalcitrants

      L’établissement fédéral des Verrières, dans le canton de Neuchâtel, accueillera dès le 3 décembre des requérants d’asile au comportement inadéquat. C’est le premier centre de ce type, un deuxième étant prévu en Suisse alémanique.

      Le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) a présenté ce jeudi à Berne l’ouverture d’un centre spécifique fédéral, destiné aux requérants dont le comportement « insoumis » justifie leur mise à l’écart temporaire des centres d’asile fédéraux ordinaires. Il sera situé dans l’ancien centre sportif des Cernets, au-dessus de la commune des Verrières, à un jet de pierre de la frontière française. Des requérants d’asile au comportement inadéquat pourront y être transférés pour une durée maximale de 14 jours. Un site analogue sera prochainement mis en place en Suisse alémanique.

      La mesure est censée améliorer le fonctionnement des établissements ordinaires. « Lorsqu’une personne refuse, de manière répétée, de se plier aux règles de la maison et compromet la vie en communauté, elle le fait au détriment de tous les autres résidents », indique Pierre-Alain Ruffieux, responsable pour la Suisse romande de l’asile pour le SEM.

      Il cite par exemple des cas d’alcoolémie répétée et des personnes sous l’emprise de stupéfiants dérangeant la vie commune. D’autres cas, comme des vols ou l’introduction d’objets prohibés, pourront également aboutir à un transfert aux Verrières. Seuls des hommes adultes seront visés, puisque, selon la directrice de l’asile du SEM, Esther Maurer, tous les cas d’incivilité et de refus des règles observés jusqu’à présent concernent des hommes.

      « Ce ne sont pas des criminels »

      « Il est important de souligner qu’il ne s’agit pas de personnes criminelles ou commettant des infractions pénales », précise la fonctionnaire fédérale. Elle rappelle également que si une telle mesure contient bien une dimension disciplinaire, le centre des Verrières ne ressemble en rien à une prison : les requérants y resteront libres de leurs mouvements.

      Ils seront cela dit soumis à un règlement plus strict et encadré par plus de personnel. Le centre pourra à terme accueillir jusqu’à 60 personnes. Dans la première année, phase pilote, leur nombre se limitera à 20.

      L’annonce de l’ouverture du site en 2016 avait suscité des protestations parmi la population de la commune de 658 habitants, notamment lors d’une séance d’information avec le SEM, où le ton était monté. Cependant, le président des Verrières Jean-Bernard Wieland assure que la situation s’est apaisée et que la collaboration avec la Confédération et le canton s’est bien déroulée. « Certains termes négatifs comme « récalcitrants » ont suscité de l’inquiétude. Mais ceux qui vont venir ne sont pas des criminels ! Ce sera comme des problèmes de voisinage, tout le monde peut en avoir. »

      https://www.letemps.ch/suisse/ouverture-dun-centre-requerants-recalcitrants
      #récalcitrants #Varrières

    • Recours admis contre le SEM pour #déni_de_justice formel

      Le Tribunal administratif fédéral (TAF) a été saisi d’un recours au sujet d’entraves aux #droits_fondamentaux de requérants d’asile passés par le #centre_fédéral de #Boudry, là où se met en œuvre la nouvelle procédure d’asile. Lors de leur séjour dans le centre, les recourants ont fait l’objet d’un cumul de #sanctions – interdictions de sortie, privations d’argent de poche – et de #fouilles_corporelles systématiques. Leur mandataire, indépendante de la représentation juridique officielle du centre, a demandé au Secrétariat d’État aux migrations (SEM) de rendre une décision formelle justifiant ces sanctions. L’autorité s’y est refusée, se contentant de rappeler les comportements fautifs des requérants et les articles de la législation justifiant selon elle des sanctions sans décision formelle. La mandataire a donc déposé un #recours au TAF pour déni de justice formel.

      Dans son arrêt F-4132/2017 du 9 janvier 2019, le TAF estime qu’il ne peut pas se prononcer sur le fond du problème, le SEM n’ayant pas rendu de décision formelle. Sur la forme en revanche, les juges de Saint-Gall ont le devoir de se prononcer puisque les pratiques du SEM sont de nature à porter atteinte aux droits fondamentaux des recourants. Le TAF rappelle que les ordres donnés par le personnel du centre « sont susceptibles de porter atteinte à la personnalité et à la liberté du requérant ». L’instance judiciaire poursuit : « Il convient de permettre aux requérants d’asile qui estiment leurs droits fondamentaux lésés de faire valoir leurs griefs à l’encontre d’actes étatiques qui viennent de se produire (…) ». En conclusion « le SEM n’avait d’autre choix que de se saisir de la demande des recourants » (…) et « aurait dû rendre une décision formelle sujette à recours ». Le Tribunal relève au passage que la nouvelle législation, en l’occurrence l’ordonnance du DFJP, « tend à aller vers la consécration d’un droit à obtenir une décision formelle ».

      Même si le #TAF juge inutile que le SEM rende une décision dans le cas d’espèce, estimant que l’intérêt n’est plus actuel (les recourants ont depuis disparu), espérons que ce rappel à l’ordre incitera l’administration à rendre des décisions formelles lorsque les droits fondamentaux des demandeurs d’asile sont en jeu.

      https://odae-romand.ch/breve/recours-admis-contre-le-sem-pour-deni-de-justice-formel
      #justice

  • #Expanding_the_fortress

    La politique d’#externalisation_des_frontières de l’UE, ses bénéficiaires et ses conséquences pour les #droits_humains.

    Résumé du rapport

    La situation désespérée des 66 millions de personnes déplacées dans le monde ne semble troubler la conscience européenne que lorsqu’un drame a lieu à ses frontières et se retrouve sous le feu des projecteurs médiatiques. Un seul État européen – l’Allemagne – se place dans les dix premiers pays au monde en termes d’accueil des réfugiés : la grande majorité des personnes contraintes de migrer est accueillie par des États se classant parmi les plus pauvres au monde. Les migrations ne deviennent visibles aux yeux de l’Union européenne (UE) que lorsque les médias s’intéressent aux communautés frontalières de Calais, Lampedusa ou Lesbos et exposent le sort de personnes désespérées, fuyant la violence et qui finissent par mourir, être mises en détention ou se retrouver bloquées.

    Ces tragédies ne sont pas seulement une conséquence malheureuse des conflits et des guerres en cours dans différents endroits du monde. Elles sont aussi le résultat des politiques migratoires européennes mises en œuvre depuis les accords de Schengen de 1985. Ces politiques se sont concentrées sur le renforcement des frontières, le développement de méthodes sophistiquées de surveillance et de traque des personnes, ainsi que l’augmentation des déportations, tout en réduisant les possibilités de résidence légale malgré des besoins accrus. Cette approche a conduit un grand nombre de personnes fuyant la violence et les conflits et incapables d’entrer en Europe de manière légale à emprunter des routes toujours plus dangereuses.

    Ce qui est moins connu, c’est que les tragédies causées par cette politique européenne se jouent également bien au-delà de nos frontières, dans des pays aussi éloignés que le Sénégal ou l’Azerbaïdjan. Il s’agit d’un autre pilier de la gestion européenne des flux migratoires : l’externalisation des frontières. Depuis 1992, et plus encore depuis 2005, l’UE a mis en œuvre des politiques visant à externaliser les frontières du continent et empêcher les populations déplacées de parvenir à ses portes. Cela implique la conclusion d’accords avec les pays voisins de l’UE afin qu’ils reprennent les réfugiés déportés et adoptent, comme l’Europe, des mesures de contrôle des frontières, de surveillance accrue des personnes et de renforcement de leurs frontières. En d’autres termes, ces accords ont fait des pays voisins de l’UE ses nouveaux garde-frontières. Et parce qu’ils sont loin des frontières européennes et de l’attention médiatique, les impacts de ces politiques restent relativement invisibles aux yeux des citoyens européens.

    Ce rapport cherche à mettre en lumière les politiques qui fondent l’externalisation des frontières européennes et les accords conclus, mais aussi les multinationales et sociétés privées qui en bénéficient, et les conséquences pour les personnes déplacées ainsi que pour les pays et les populations qui les accueillent. Il est le troisième de la série Border Wars, qui vise à examiner les politiques frontalières européennes et à montrer comment les industries des secteurs de l’armement et de la sécurité ont contribué à façonner les politiques de sécurisation des frontières de l’Europe, puis en ont tiré les bénéfices en obtenant un nombre croissant de contrats dans le secteur.

    Ce rapport étudie l’augmentation significative du nombre de mesures et d’accords d’externalisation des frontières depuis 2005, le phénomène s’accélérant massivement depuis le sommet Europe-Afrique de La Valette en novembre 2015. Via une série de nouveaux instruments, tels que le Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique (EUTF), le Cadre pour les partenariats avec les pays tiers en matière de gestion des migrations et la Facilité en faveur des réfugiés en Turquie, l’UE et les États membres injectent des millions d’euros dans un ensemble de projets visant à prévenir la migration de certaines populations vers le territoire européen.

    Cela implique la collaboration avec des pays tiers en matière d’accueil des personnes déportées, de formation des forces de police et des garde-frontières ou le développement de systèmes biométriques complets, ainsi que des donations d’équipements incluant hélicoptères, bateaux et véhicules, mais aussi des équipements de surveillance et de contrôle. Si de nombreux projets sont coordonnés par la Commission européenne, un certain nombre d’États membres, tels que l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne, prennent également des initiatives individuelles plus poussées en finançant et en soutenant les efforts d’externalisation des frontières par le biais d’accords bilatéraux.

    Ce qui rend cette collaboration particulièrement problématique est le fait que de nombreux gouvernements qui en bénéficient sont profondément autoritaires, et que les financements sont souvent destinés aux organes de l’État les plus responsables des actes de répression et de violations des droits humains. L’UE fait valoir, à travers l’ensemble de ses politiques, une rhétorique consensuelle autour de l’importance des droits humains, de la démocratie et de l’état de droit ; il semble cependant qu’aucune limite ne soit posée lorsque l’Europe soutient des régimes dictatoriaux pour que ces derniers s’engagent à empêcher « l’immigration irrégulière » vers le sol européen. Le résultat concret se traduit par des accords et des financements conclus entre l’UE et des régimes aussi tristement célèbres que ceux du Tchad, du Niger, de Biélorussie, de Libye ou du Soudan.

    Les politiques européennes dans ce domaine ont des conséquences considérables pour les personnes déplacées, que le statut « illégal » rend déjà vulnérables et plus susceptibles de subir des violations de droits humains. Nombre d’entre elles finissent exploitées, avec des conditions de travail inacceptables, ou encore sont mises en détention ou directement déportées dans le pays qu’elles ont fui. Les femmes réfugiées sont particulièrement menacées par les violences basées sur le genre, les agressions et l’exploitation sexuelles.

    La violence et la répression que subissent les déplacés favorisent également l’immigration clandestine, reconfigurant les activités des passeurs et renforçant le pouvoir des réseaux criminels. De fait, les personnes déplacées sont souvent forcées de se lancer sur des routes alternatives, plus dangereuses, et de s’en remettre à des trafiquants de moins en moins scrupuleux. En conséquence, le nombre de morts sur les routes migratoires s’élève de jour en jour.

    En outre, le renforcement des organes de sécurité de l’Etat dans l’ensemble des pays du MENA (Moyen Orient Afrique du Nord), du Maghreb, du Sahel et de la Corne de l’Afrique constitue une menace directe contre les droits humains et la responsabilité démocratique dans ces zones, notamment en détournant des ressources essentielles qui pourraient suppress être destinées à des mesures économiques ou sociales. En effet, ce rapport montre que l’obsession européenne à prévenir les flux migratoires réduit non seulement les ressources disponibles, mais dénature également les échanges, l’aide et les relations internationales entre l’Europe et ces régions. Comme l’ont signalé de nombreux experts, ce phénomène crée un terreau favorable à toujours plus d’instabilité et d’insécurité, et a pour conséquence de pousser toujours plus de personnes à prendre la route de l’exil.

    Un secteur économique a cependant grandement tiré parti des programmes d’externalisation des frontières de l’UE. En effet, comme l’ont montré les premiers rapports Border Wars, les secteurs de l’industrie militaire et de sécurité ont été les principaux bénéficiaires des contrats de fourniture d’équipements et de services pour la sécurité frontalière. Les entreprises de ces secteurs travaillent en partenariat avec un certain nombre d’institutions intergouvernementales et (semi) publiques qui ont connu une croissance significative ces dernières années, à mesure qu’étaient mise en oeuvre des dizaines de projets portant sur la sécurité et le contrôle des frontières dans des pays tiers.
    Le rapport révèle que :

    La grande majorité des 35 pays considérés comme prioritaires par l’UE pour l’externalisation de ses frontières sont gouvernés par des régimes autoritaires, connus pour leurs violation des droits humains et avec des indicateurs de développement humain faibles.
    48% d’entre eux (17) ont un gouvernement autoritaire, et seulement quatre d’entre eux sont considérés comme démocratiques (mais toujours imparfaits)
    448% d’entre eux (17) sont listés comme « non-libres », et seulement trois sont listés comme « libres » ; 34% d’entre eux (12) présentent des risques extrêmes en matière de droits humains et les 23 autres présentent des risques élevés.
    51% d’entre eux (18) sont caractérisés par un « faible développement humain », seulement huit ont un haut niveau de développement humain.
    Plus de 70% d’entre eux (25) se situent dans le dernier tiers des pays du monde en termes de bien-être des femmes (inclusion, justice et sécurité)

    Les États européens continuent à vendre des armes à ces pays, et cela en dépit du fait que ces ventes alimentent les conflits, les actes de violence et de répression, et de ce fait contribuent à l’augmentation du nombre de réfugiés. La valeur totale des licences d’exportations d’armes délivrées par les États membres de l’UE à ces 35 pays sur la décennie 2007-2016 dépasse les 122 milliards d’euros. Parmi eux, 20% (7) sont sous le joug d’un embargo sur les ventes d’armes demandé par l’UE et/ou les Nations Unies, mais la plupart reçoivent toujours des armes de certains États membres, ainsi qu’un soutien à leurs forces armées et de sécurité dans le cadre des efforts liés aux politiques migratoires.

    Les dépenses de l’UE en matière de sécurité des frontières dans les pays tiers ont considérablement augmenté. Bien qu’il soit difficile de trouver des chiffres globaux, il existe de plus en plus d’instruments de financement pour les projets liés aux migrations, la sécurité et les migrations provient de plus en plus d’instruments, la sécurité et les migrations irrégulières étant les principales priorités. Ces fonds proviennent aussi de l’aide au développement. Plus de 80% du budget de l’EUTF vient du Fonds européen de développement et d’autres fonds d’aide au développement et d’aide humanitaire.

    L’augmentation des dépenses en matière de sécurité des frontières a bénéficié à un large éventail d’entreprises, en particulier des fabricants d’armes et des sociétés de sécurité biométrique. Le géant de l’armement français Thales, qui est également un exportateur incontournable d’armes dans la région, est par exemple un fournisseur reconnu de matériel militaire et de sécurité pour la sécurisation des frontières et de systèmes et équipements biométriques. D’autres fournisseurs importants de systèmes biométriques incluent Véridos, OT Morpho et Gemalto (qui sera bientôt racheté par Thales). L’Allemagne et l’Italie financent également leurs propres groupes d’armement – Hensoldt, Airbus et Rheinmetall pour l’Allemagne et Leonardo et Intermarine pour l’Italie – afin de soutenir des programmes de sécurisation des frontières dans un certain nombre de pays du MENA, en particulier l’Égypte, la Tunisie et la Libye. En Turquie, d’importants contrats de sécurisation des frontières ont été remportés par les groupes de défense turcs, notamment Aselsan et Otokar, qui utilisent les ressources pour subventionner leurs propres efforts de défense, également à l’origine des attaques controversées de la Turquie contre les communautés kurdes.

    Un certain nombre d’entreprises semi-publiques et d’organisations internationales ont également conclu des contrats de conseil, de formation et de gestion de projets en matière de sécurité des frontières. On y trouve la société para-gouvernementale française Civipol, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Centre international pour le développement des politiques migratoires (ICMPD). Les groupes Thales, Airbus et Safran sont présents au capital de Civipol, qui a rédigé en 2003, à titre de consultant pour la Commission Européenne, un document très influent établissant les fondations pour les mesures actuelles d’externalisation des frontières, dont elle bénéficie aujourd’hui.

    Les financements et les dons en matière d’équipements militaires et de sécurité ainsi que la pression accrue sur les pays tiers pour qu’ils renforcent leurs capacités de sécurité aux frontières ont fait croître le marché de la sécurité en Afrique. Le groupe de lobbying Association européenne des industries aérospatiales et défense (ASD) a récemment concentré ses efforts sur l’externalisation des frontières de l’UE. De grands groupes d’armement tels qu’Airbus et Thales lorgnent également sur les marchés africains et du Moyen-Orient, en croissance.

    Les décisions et la mise en œuvre de l’externalisation des frontières au niveau de l’Union européenne ont été caractérisées par une rapidité d’exécution inhabituelle, hors du contrôle démocratique exercé par le Parlement européen. De nombreux accords importants avec des pays tiers, parmi lesquels les pactes « Migration Compact » signés dans le Cadre pour les partenariats et l’Accord UE- Turquie, ont été conclus sans ou à l’écart de tout contrôle parlementaire.

    Le renforcement et la militarisation de la sécurité des frontières ont conduit à une augmentation du nombre de morts parmi les personnes déplacées. En général, les mesures visant à bloquer une route particulière de migration poussent les personnes vers des routes plus dangereuses. En 2017, on a dénombré 1 mort pour 57 migrants traversant la Méditerranée ; en 2015, ce chiffre était de 1 pour 267. Cette statistique reflète le fait qu’en 2017, les personnes déplacées (pourtant moins nombreuses qu’en 2015), principalement originaires d’Afrique de l’Ouest et de pays subsahariens, ont préféré la route plus longue et plus dangereuse de la Méditerranée Centrale plutôt que la route entre la Turquie et la Grèce empruntée en 2015 par des migrants (principalement Syriens). On estime que le nombre de migrants morts dans le désert est au moins le double de ceux qui ont péri en Méditerranée, bien qu’aucun chiffre officiel ne soit conservé ou disponible.

    On assiste à une augmentation des forces militaires et de sécurité européennes dans les pays tiers pour la sécurité aux frontières. L’arrêt des flux migratoires est devenu une priorité des missions de Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) au Mali et au Niger, tandis que des États membres tels que la France ou l’Italie ont également décidé de déployer des troupes au Niger ou en Libye.

    Frontex, l’Agence européenne de garde-frontières et garde-côtes, collabore de plus en plus avec les pays tiers. Elle a entamé des négociations avec des pays voisins de l’UE pour mener des opérations conjointes sur leurs territoires. La coopération en matière de déportation est déjà largement implantée. De 2010 à 2016, Frontex a coordonné 400 vols de retours conjoints avec des pays tiers, dont 153 en 2016. Depuis 2014, certains de ces vols ont été appelés « opérations de retour conjoint », l’avion et les escortes navigantes provenant des pays de destination. Les États membres invitent de plus en plus fréquemment des délégations de pays tiers à identifier les personnes « déportables » sur la base de l’évaluation de nationalité. Dans plusieurs cas, ces identifications ont conduit à l’arrestation et à la torture des personnes déportées.

    Ce rapport examine ces impacts en cherchant à établir comment ces politiques ont été mises en œuvre en Turquie, en Libye, en Égypte, au Soudan, au Niger, en Mauritanie et au Mali. Dans tous ces pays, pour parvenir à la conclusion de ces accords, l’UE a dû fermer les yeux ou limiter ses critiques sur les violations des droits humains.

    En Turquie, l’UE a adopté un modèle proche de celui de l’Australie, externalisant l’ensemble du traitement des personnes déplacées en dehors de ses frontières, et manquant ainsi à des obligations fondamentales établies par le droit international, telles que le principe de non-refoulement, le principe de non-discrimination (l’accord concerne exclusivement les populations syriennes) et le principe d’accès à l’asile.

    En Libye, la guerre civile et l’instabilité du pays n’ont pas empêché l’UE ni certains de ses États membres, comme l’Italie, de verser des fonds destinés aux équipements et aux systèmes de gestion des frontières, à la formation des garde-côtes et au financement des centres de détention – et ce bien qu’il ait été rapporté que des garde-côtes avaient ouvert le feu sur des bateaux de migrants ou que des centres de détentions étaient gérés par des milices comme des camps de prisonniers.

    En Égypte, la coopération frontalière avec le gouvernement allemand s’est intensifiée malgré la croissante consolidation du pouvoir militaire dans le pays. L’Allemagne finance les équipements et la formation régulière de la police aux frontières égyptienne. Les personnes déplacées se trouvent régulièrement piégées dans le pays, dans l’impossibilité de se rendre en Libye du fait de l’insécurité qui y règne, et subissent les tirs des gardes-côtes égyptiens s’ils décident de prendre la route maritime.

    Au Soudan, le soutien à la gestion des frontières fourni par l’UE n’a pas seulement conduit à suppress sortir un régime dictatorial de son isolement sur la scène internationale, mais a également renforcé les Forces de soutien rapide, constituées de combattants de la milice Janjawid, considérée comme responsables de violations de droits humains au Darfour.

    La situation au Niger, un des pays les plus pauvres au monde, montre bien le coût de la politique de contrôle des migrations subi par les économies locales. La répression en cours à Agadez a considérablement affaibli l’économie locale et poussé la migration dans la clandestinité, rendant la route plus dangereuse pour les migrants et renforçant le pouvoir des gangs de passeurs armés. De même au Mali, l’imposition des mesures d’externalisation des frontières par l’UE dans un pays tout juste sorti d’une guerre civile menace de raviver les tensions et de réveiller le conflit.

    L’ensemble des cas étudiés met en lumière une politique de l’UE via-à-vis de ses voisins obsessionnellement focalisée sur les contrôles migratoires, quel que soit le coût pour les pays concernés ou les populations déplacées. C’est une vision étroite et finalement vouée à l’échec de la sécurité, car elle ne s’attaque pas aux causes profondes qui poussent les gens à migrer : les conflits, la violence, le sous-développement économique et l’incapacité des États à gérer correctement ces situations. Au lieu de cela, en renforçant les forces militaires et de sécurité dans la région, ces politiques prennent le risque d’exacerber la répression, de limiter la responsabilité démocratique et d’attiser des conflits qui pousseront plus de personnes à quitter leurs pays. Il est temps de changer de cap. Plutôt que d’externaliser les frontières et les murs, nous devrions externaliser la vraie solidarité et le respect des droits de l’homme.


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    pour télécharger le #rapport :
    https://www.tni.org/files/publication-downloads/expanding_the_fortress_-_1.6_may_11.pdf

    cc @reka @albertocampiphoto @daphne @marty

    • Esternalizzare le frontiere europee significa militarizzare

      Come dimostra il recente rapporto del Transnational Institut, «Espandendo la Fortezza», la crescita della spesa per il controllo delle frontiere esterne avvantaggia produttori di armi e società di sicurezza biometrica. Molte delle loro proposte sono poi apparse nell’Agenda europea sotto forma di decisioni politiche. Sara Prestianni analizza le conseguenze militari dell’esternalizzazione delle frontiere europee.

      http://openmigration.org/analisi/esternalizzare-le-frontiere-europee-significa-militarizzare

    • 3 liens vers des articles/reportages de #Gabriele_Del_Grande, un des premiers journalistes à avoir visité les centres en Libye.

      C’était 2008-2009
      Libia: siamo entrati a #Misratah. Ecco la verità sui 600 detenuti eritrei

      Di notte, quando cessano il vociare dei prigionieri e gli strilli della polizia, dal cortile del carcere si sente il rumore del mare. Sono le onde del Mediterraneo, che schiumano sulla spiaggia, a un centinaio di metri dal muro di cinta del campo di detenzione. Siamo a Misratah, 210 km a est di Tripoli, in Libia. E i detenuti sono tutti richiedenti asilo politico eritrei, arrestati al largo di Lampedusa o nei quartieri degli immigrati a Tripoli. Vittime collaterali della cooperazione italo libica contro l’immigrazione. Sono più di 600 persone, tra cui 58 donne e diversi bambini e neonati. Sono in carcere da più di due anni, ma nessuno di loro è stato processato. Dormono in camere senza finestre di 4 metri per 5, fino a 20 persone, buttati per terra su stuoini e materassini di gommapiuma. Di giorno si riuniscono nel cortile di 20 metri per 20 su cui si affacciano le camere, sotto lo sguardo vigile della polizia. Sono ragazzi tra i 20 e i 30 anni. La loro colpa? Aver tentato di raggiungere l’Europa per chiedere asilo.

      Da anni la diaspora eritrea passa da Lampedusa. Dall’aprile del 2005 almeno 6.000 profughi della ex colonia italiana sono approdati sulle coste siciliane, in fuga dalla dittatura di Isaias Afewerki. La situazione a Asmara continua a essere critica. Amnesty International denuncia continui arresti e vessazioni di oppositori e giornalisti. E la tensione con l’Etiopia resta alta, cosicché almeno 320.000 ragazzi e ragazze sono costretti al servizio militare, a tempo indeterminato, in un paese che conta solo 4,7 milioni di abitanti. Molti disertano e scappano per rifarsi una vita. La maggior parte dei profughi si ferma in Sudan: oltre 130.000 persone. Tuttavia ogni anno migliaia di uomini e donne attraversano il deserto del Sahara per raggiungere la Libia e da lì imbarcarsi clandestinamente per l’Italia.

      La prima volta che sentii parlare di Misratah fu nella primavera del 2007, durante un incontro a Roma con il direttore dell’Alto commissariato dei rifugiati a Tripoli, Mohamed al Wash. Pochi mesi dopo, nel luglio del 2007, insieme alla associazione eritrea Agenzia Habeshia, riuscimmo a stabilire un contatto telefonico con un gruppo di prigionieri eritrei che erano riusciti a introdurre un telefono cellulare nel campo. Si lamentavano delle condizioni di sovraffollamento, della scarsa igiene dei bagni, e delle precarie condizioni di salute, specie di donne incinte e neonati. E accusavano gli agenti di polizia di avere molestato sessualmente alcune donne durante le prime settimane di detenzione. Amnesty International si espresse più volte per bloccare il loro rimpatrio. E il 18 settembre 2007 la diaspora eritrea organizzò manifestazioni nelle principali capitali europee.

      Il direttore del centro, colonnello ‘Ali Abu ‘Ud, conosce i report internazionali su Misratah, ma respinge le accuse al mittente: “Tutto quello che dicono è falso” dice sicuro di sé seduto alla scrivania, in giacca e cravatta, dietro un mazzo di fiori finti, nel suo ufficio al primo piano. Dalla finestra si vede il cortile dove sono radunati oltre 200 detenuti. Abu ‘Ud ha visitato nel luglio 2008 alcuni centri di prima accoglienza italiani, insieme a una delegazione libica. Parla di Misratah come di un albergo a cinque stelle comparato agli altri centri libici. E probabilmente ha ragione. Il che è tutto un dire. Dopo una lunga insistenza, insieme a un collega della radio tedesca, Roman Herzog, siamo autorizzati a parlare con i rifugiati eritrei. Scendiamo nel cortile. Ci dividiamo. Intervisto F., 28 anni, da 24 mesi chiuso qua dentro. Mentre lui parla mi accorgo che non lo sto ascoltando, in verità provo a mettermi nei suoi panni. Abbiamo grossomodo la stessa età, ma lui i migliori anni della vita li sta buttando via in un carcere, senza un motivo apparente.

      Dall’altro lato del cortile, Roman è riuscito a parlare per qualche minuto con un rifugiato sottraendosi al controllo degli agenti della sicurezza che vigilano sul nostro lavoro e riprendono con una telecamera le nostre attività. Si chiama S.. Parla liberamente: “Fratello, siamo in una pessima situazione, siamo torturati, mentalmente e fisicamente. Siamo qui da due anni e non conosciamo quale sarà il nostro futuro. Puoi vederlo da solo, guarda!” Intanto l’interprete li ha raggiunti e traduce tutto al direttore del campo, che interrompe l’intervista e chiede a S. se per caso non vuole ritornare in Eritrea. Lui risponde di no, intanto Roman lo invita ad allontanarsi a passo svelto e a dire tutto quello che può prima che il direttore li interrompa di nuovo. “Siamo qui da più di due anni, senza nessuna speranza. Siamo tutti eritrei. Io sono venuto in Libia nel 2005. Cerchiamo asilo politico, a causa della situazione nel nostro paese. Ma il mondo non si interessa a noi. Non è facile stare due anni in prigione, senza nessuna comodità. Siamo in prigione, non vediamo mai l’esterno. Tutti noi abbiamo bisogno della libertà, ecco di cosa abbiamo bisogno”.

      La polizia si avvicina nuovamente, Roman chiede a S. di mostrargli la sua stanza. Zigzagando tra la folla nel cortile entrano nel corridoio su cui danno la vista quattro stanze. All’interno, 18 ragazzi siedono su coperte e materassini di gommapiuma stesi sul pavimento. La stanza misura quattro metri per cinque. Al centro, una pentola gorgoglia sopra un fornellino da campeggio. Non ci sono finestre. “Siamo in troppi qui, è sovraffollato – dice S. – non vediamo la luce del sole e non c’è ricambio d’aria. Con il caldo d’estate la gente si ammala. E anche di inverno, fa molto freddo di notte, la gente si ammala”. Siamo a fine novembre, e i ragazzi indossano ciabatte da mare e leggeri pullover. La stanza accanto è più grande, ci sono solo donne e bambini, ma sono almeno il doppio.

      A quel punto gli uomini della sicurezza interrompono l’intervista e portano Roman fuori dal cortile, dove gli presentano un rifugiato scelto dal direttore... “Sono anche io un prigioniero” gli dice. Ma lui preferisce parlare con J.. Ha 34 anni e dice di essere stato in 13 prigioni diverse in Libia: “Alcuni di noi sono qui da quattro anni. Personalmente sono a Misratah da tre anni. Siamo nella peggiore delle situazioni. Non abbiamo commesso reati, stiamo solo chiedendo asilo politico. E non ci viene concesso. Diteci almeno perchè? Visto che nessuno ci informa. Che cosa sta succedendo là fuori? Diteci che cosa sarà di noi! Nemmeno l’Acnur. Non ci dicono mai niente. Non ho più speranza, quando ci vado a parlare nemmeno mi ascoltano. Pesavo 60 kg quando sono entrato, adesso ne peso 48, immagina perchè..”

      Il colonnello Abu ‘Ud segue la conversazione grazie alla traduzione in arabo dell’interprete, finché non riesce più a trattenersi. “Vuoi ritornare in Eritrea?” chiede a J. interrompendo bruscamente l’intervista. “Preferisco morire – gli risponde – tutti preferirebbero morire. “Se vuoi andare in Eritrea ti rimpatriamo in un solo giorno” minaccia il direttore. “Ci vietano di parlare con te” dice J. a Roman. Il direttore diventa furioso. Gli grida in faccia “Dite loro che li rimpatrieremo tutti!”. Poi si avvicina a Roman e con un urlo secco ordina: “Finito!”. Roman cerca di protestare, “abbiamo finito” gli ripette Abu ‘Ud mentre gli agenti lo tirano per le braccia verso l’uscita. Intanto il colonnello sale sui gradini e si rivolge a gran voce a tutti i rifugiati che nel frattempo si sono avvicinati per vedere cosa stia accadendo. “Se vi sentite maltrattati qui, organizzeremo il vostro rimpatrio immediatamente. Avete già rifiutato di ritornare nel vostro paese, ecco perchè siete in questo posto. Ma ognuno di voi è libero di ritornare in Eritrea! Chi vuole andare in Eritrea?” chiede alla folla. “Nessuno!” gli fanno eco i presenti. Scende e grida al mio collega “Hai visto! Adesso abbiamo veramente finito”.

      Saliamo di nuovo nell’ufficio del colonnello, che con toni molto nervosi cerca di convincerci del suo impegno. Per ben due volte l’ambasciata eritrea ha inviato dei funzionari per identificare i prigionieri. Ma i rifugiati hanno sempre rifiutato di incontrarli. Hanno addirittura organizzato uno sciopero della fame. Comprensibile, visto che rischiano di essere perseguitati in patria. La Libia dovrebbe averlo capito da un pezzo, visto che il 27 agosto 2004 uno dei voli di rimpatrio per l’Eritrea partiti da Tripoli venne addirittura dirottato in Sudan dagli stessi passeggeri. Ma il concetto di asilo politico sfugge alle autorità libiche. Eritrei o nigeriani, vogliono tutti andare in Europa. E visto che l’Europa chiede di controllare la frontiera, l’unica soluzione sono le deportazioni. E per chi non collabora con le ambasciate – come i rifugiati eritrei - la detenzione diventa a tempo indeterminato. Così per tornare in libertà non rimangono che due possibilità. Avere la fortuna di rientrare nei programmi di reinsediamento all’estero dell’Alto commissariato dei rifugiati (Acnur), oppure provare a scappare.

      Haron ha 36 anni. A casa ha lasciato una moglie e due bambini. Dall’Eritrea è scappato dopo 12 anni di servizio militare non retribuito. Dopo due anni di detenzione a Misratah, la Svezia ha accettato la sua richiesta di reinsediamento. E’ partito tre giorni dopo la nostra visita, il 27 novembre 2008, con un gruppo di altri 26 rifugiati eritrei del campo di Misratah, tra cui molte donne. I posti lasciati vuoti saranno presto riempiti con i nuovi arrestati. Già la settimana scorsa sono arrivate otto donne. I reinsediamenti sono le uniche carte che l’Acnur riesce a giocare, da un anno a questa parte, in Libia. Le prime 34 donne eritree lasciarono il campo di Misratah nel novembre del 2007 e furono accolte dall’Italia, a Cantalice, un piccolo comune nella campagna di Rieti. Per l’Italia fu il primo reinsediamento ufficiale di rifugiati dai tempi della crisi cilena del 1973. Ma l’operazione venne censurata dagli uffici stampa del Ministero dell’Interno, per non sollevare polemiche tra i leghisti. Insieme alle donne arrivarono 5 uomini e una bambina nata pochi giorni prima.

      Da allora, circa 200 rifugiati sono stati trasferiti da Misratah in vari paesi. Oltre all’Italia (70), anche in Romania (39), Svezia (27), Canada (17), Norvegia (9) e Svizzera (5). A snocciolarmi i dati è Osama Sadiq. E’ il coordinatore dei progetti della International organisation for peace care and relief (Iopcr). Una importante ong libica, che si dichiara non governativa, ma che tanto indipendente non deve essere, visto che ha al suo interno ex funzionari del ministero dell’interno e della sicurezza. E che è talmente influente, che l’Acnur riesce a entrare a Misratah soltanto sotto la sua copertura. Proprio così. In un paese dove transitano ogni anno migliaia di rifugiati eritrei, ma anche sudanesi, somali ed etiopi, l’Acnur conta meno di una ong. Non ha nemmeno un accordo di sede. E non riesce a spendere una parola a livello internazionale per la liberazione dei 600 prigionieri di Misratah. Probabilmente a dettare la linea politica dell’Acnur in Libia sono fragili equilibri diplomatici da non rompere per non rischiare di farsi cacciare da un Paese che non ha nemmeno mai firmato la Convenzione di Ginevra. Eppure la Libia sta conoscendo una importante fase di apertura. E il governo lavora a una nuova legge sull’immigrazione che però – secondo chi ha letto la bozza - non contiene nessun riferimento alla protezione dei rifugiati.

      Per quelli che non rientrano nei progetti di reinsediamento dell’Acnur, non rimane che l’ennesima fuga. Koubros è uno di loro. Lo incontriamo sulle scale della chiesa di San Francesco, nel quartiere Dhahra di Tripoli, dopo la messa del venerdì mattina. Un gruppo di eritrei è in fila per lo sportello sociale della Caritas, dove lavora l’infaticabile suor Sherly. A Misratah ha passato un anno. Era stato arrestato a Tripoli durante una retata nel quartiere di Abu Selim. E’ scappato durante un ricovero in ospedale. Poi però è stato di nuovo arrestato e portato al carcere di Tuaisha, vicino all’aeroporto di Tripoli. Dove è riuscito a corrompere un poliziotto facendosi inviare 300 dollari dagli amici eritrei in città. Siede vicino a Tadrous. Anche lui eritreo, anche lui disertore in fuga dal suo paese. E’ uscito due settimane fa dal carcere di Surman. Era stato condannato a cinque mesi di galera dopo essere stato trovato in mare con altri 90 passeggeri, a Zuwarah. In carcere si è preso la scabbia. Gli chiediamo di accompagnarci nel quartiere di Gurgi, dove vivono gli eritrei pronti a partire per l’Italia. Dice che è pericoloso. Gli eritrei vivono nascosti. La nostra presenza potrebbe allertare la polizia e provocare una retata. Y. però la pensa diversamente, vive in una zona diversa. Lo seguiamo.

      Scendiamo in una traversa sterrata di Shar‘a Ahad ‘Ashara, l’undicesima strada, a Gurgi. Qui vivono molti immigrati africani. L’appartamento è di proprietà di una famiglia chadiana, che ha affittato a sette eritrei le due piccole stanze sul terrazzo. Ci togliamo le scarpe per entrare. I pavimenti sono coperti di tappeti e coperte. Ci dormono in cinque ragazzi. La televisione, collegata alla grande parabola montata sul terrazzo, manda in onda videoclip in tigrigno di cantanti eritrei. E’ un posto sicuro, dicono, perchè l’ingresso della casa passa dall’appartamento della famiglia chadiana, che è a posto coi documenti. Si sono trasferiti qui da poco, dopo le ultime retate a Shar‘a ‘Ashara. Adesso quando sentono la sirena della polizia non ci fanno più caso. Prima si correvano a nascondere. Ci offrono cioccolata, una salsa di patate e pomodoro con del pane, 7-Up e succo di pera.

      Continuiamo a parlare delle loro esperienze nelle carceri libiche. Ognuno di loro è stato arrestato almeno una volta. E tutti sono usciti grazie alla corruzione. Basta pagare la polizia, da 200 a 500 dollari, per scappare o per non essere arrestati. I soldi arrivano con Western Union, grazie a una rete di solidarietà tra gli eritrei della diaspora, in Europa e in America.

      Anche Robel è stato a Misratah. C’ha passato un anno. Ci mostra il certificato di richiedente asilo rilasciato dall’Acnur. Scade l’11 maggio 2009. Ma con quello non si sente al sicuro. “Un mio amico è stato arrestato lo stesso, glielo hanno strappato sotto gli occhi”. Durante la detenzione, ha scritto un appello alla comunità internazionale, con un gruppo di sei studenti eritrei.

      Sul muro, accanto al poster di Gesù, c’è una foto in bianco e nero di una bambina di pochi anni, con su scritto il suo nome, Delina, con il pennarello. L’ho riconosciuta. E’ la stessa bambina che giocava sulle scale della chiesa con Tadrous. Anche lei dovrà rischiare la vita in mare. “L’importante è arrivare nelle acque internazionali”, dice Y.. Gli intermediari eritrei (dallala) che organizzano i viaggi, hanno diverse reputazioni. Ci sono intermediari spregiudicati e altri di cui ci si può fidare. Ma il rischio rimane. Non posso non pensarci, mentre sull’aereo di ritorno per Malta, comodamente seduto e un po’ annoiato, sfoglio la mia agenda con i numeri di telefono e le email dei ragazzi eritrei conosciuti a Tripoli. Prima della mia partenza per la Libia, un amico etiope mi aveva dato il numero di telefono di un suo compagno di viaggio, ancora a Tripoli, un certo Gibril. Ho provato a chiamarlo per tutto il tempo, ma il numero era spento. Nell’orecchio mi risuona ancora l’incomprensibile messaggio vocale in arabo. Speriamo che sia arrivato in Italia, o piuttosto a Misratah. E non in fondo al mare.


      https://fortresseurope.blogspot.com/2006/01/libia-siamo-entrati-misratah-ecco-la.html

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      Frontiera Sahara. I campi di detenzione nel deserto libico
      SEBHA - “Con noi c’era un bambino di quattro anni con la madre, durante tutto il viaggio mi sono domandato: come si può mandare una madre con un bambino di quattro anni insieme ad altre cento persone stipate come animali in un camion come quelli per la frutta, dove non c’è aria e dove stavamo stretti stretti, senza spazio per muoversi, per 21 ore di viaggio, dove le persone urinavano e defecavano davanti a tutti perché non c’era altra possibilità? Abbiamo viaggiato dalle 16:00 alle 13:00 del giorno dopo. Durante il giorno ogni volta che l’autista faceva una sosta per mangiare noi rimanevamo chiusi dentro il rimorchio sotto il sole. Mancava l’aria e tutti si alzavano in preda al panico perché non si respirava e volevamo scendere. Guardare il bambino ci faceva coraggio. Quando il camion si fermava lo prendevamo e lo mettevamo vicino al finestrino. Si chiamava Adam. Il camion si è fermato almeno tre volte nel deserto per far mangiare gli autisti e per la preghiera... Verso l’una siamo arrivati a Kufrah… Quando sono sceso ho rubato il burro con il pane che tenevano appeso fuori dal container. Non avevamo mangiato per tutto il viaggio, eravamo 110 persone, compreso Adam di quattro anni e sua madre”. [1]

      Menghistu non è l’unico a essere stato chiuso dentro un container e deportato. In Libia è la prassi. I container servono a smistare nei vari campi di detenzione i migranti arrestati sulle rotte per Lampedusa. Ne esistono di tre tipi. Il più piccolo è un pick-up furgonato. Quello medio è l’equivalente di un camioncino. E quello più grande è un vero e proprio container, blu, con tre feritoie per lato, trainato da un auto rimorchio. Quando un rifugiato eritreo, nella primavera del 2006, me ne parlò per la prima volta, stentai a crederlo. L’immagine di centinaia di uomini, donne e bambini rinchiusi dentro una scatola di ferro per essere concentrati in dei campi di detenzione e da lì deportati, mi rievocava i fantasmi della seconda guerra mondiale. Mi sembrava troppo. Ma la figura del container ritornava, come un marchio di autenticità, in tutte le storie di rifugiati transitati dalla Libia che avevo intervistato dopo di lui. Finché quei camion ho avuto modo di vederli con i miei occhi.

      A Sebha ce n’è uno per ogni tipo. Siamo alle porte del grande deserto libico, nella capitale della storica regione del Fezzan. Da qui, fino al secolo scorso passavano le carovane che attraversavano il Sahara. Oggi alle carovane si sono sostituiti gli immigrati. Il colonnello Zarruq è il direttore del nuovo centro di detenzione della città. È stato inaugurato lo scorso 20 agosto. I tre capannoni si intravedono oltre il muro di cinta. Ognuno ha quattro camerate, in tutto il centro possono essere detenute fino a 1.000 persone. Nel parcheggio sterrato, è parcheggiato un camion con uno dei container utilizzati per lo smistamento degli immigrati detenuti. Con una pacca sulle spalle, il direttore mi invita a salire sulla motrice. Un Iveco Trakker 420, a sei ruote. Mi indica il tachimetro: 41.377 km. Nuovo di pacca. È rientrato ieri sera da Qatrun, a quattro ore di deserto da qui. A bordo c’erano 100 prigionieri, arrestati alla frontiera con il Niger. Entriamo nel container, dalle scale posteriori. L’ambiente è claustrofobico anche senza nessuno. Difficile immaginarsi cosa possa diventare con 100 o 200 persone ammassate una sull’altra in questa scatola di ferro. I raggi del sole filtrati dalla polvere illuminano le taniche di plastica vuote, a terra, sotto le panche di ferro. Su una c’è scritto Gambia.

      L’acqua è il bagaglio essenziale per i migranti che attraversano il deserto. Ognuno prima di partire si porta dietro una o due taniche. Le riveste di juta per proteggerle dal sole e ci scrive su il proprio nome per riconoscerle una volta appese ai lati dei camion. Nelle traversate del Sahara la vita è appesa a un filo. Se il motore va in panne, se il camion si insabbia, o l’autista decide di abbandonare i passeggeri, è finita. Nel raggio di centinaia di chilometri non c’è altro che sabbia. Muoiono a decine ogni mese, ma le notizie filtrano difficilmente. Sulla stampa internazionale abbiamo censito almeno 1.621 vittime in tutto il Sahara. Ma stando alle testimonianze dei sopravvissuti, ogni viaggio conta i suoi morti. E ogni viaggio conta i suoi attacchi da parte di bande armate in Niger e Algeria.

      Tra i cento migranti arrivati a Sebha nel container di ieri c’è anche una famiglia di Sikasso, in Mali. Padre, madre e bambino. Arrestati tre giorni prima, a Ghat, alla frontiera con l’Algeria. Li incontriamo nell’ufficio del direttore. Il piccolino ha otto anni, faceva la terza elementare. Il padre lo stringe affettuosamente tra le forti braccia, mentre racconta in arabo, al nostro interprete, che lui in Europa non ci voleva andare. Che era venuto a Sebha perché aveva già lavorato qui nel 2002, con una compagnia tedesca. Hanno con sé i passaporti, ma senza il visto libico. Nel campo sono chiusi in celle separate. Il bimbo sta con la madre. I loro nomi compaiono sulle liste dei prossimi aerei pronti a partire. Nei primi undici mesi dell’anno, soltanto da Sebha, hanno deportato più di 9.000 persone, soprattutto nigeriani, maliani, nigerini, ghanesi, senegalesi e burkinabé. Solo a novembre i rimpatri sono stati 1.120. Zarruq mi mostra l’elenco dei voli: 467 nigeriani deportati il 2 settembre, 420 maliani a metà novembre. Le ambasciate mandano qui i loro funzionari per identificare i propri cittadini, e poi si provvede al rimpatrio. Kabbiun e Ajouas hanno già incontrato l’ambasciata nigeriana. I piedi di Kabbiun sono scalzi. Lo hanno arrestato a Ghat, le scarpe le ha lasciate in mezzo al deserto. Ajouas invece viveva a Tripoli da sei anni. Nessuno di loro ha visto un giudice o un avvocato. Avviene tutto senza convalida e senza nessuna possibilità di presentare ricorso e tantomeno di chiedere asilo politico.

      È il caso di Patrick. Viene dalla Repubblica democratica del Congo, recentemente tornata alle cronache per la crisi nella regione del Kivu. È stato arrestato un mese fa a Tripoli, mentre cercava lavoro alla giornata sotto i cavalcavia di Suq Thalatha. Possiamo parlare liberamente in francese, perché l’interprete non lo conosce. Mi porge un foglio spiegazzato dalla tasca. È il suo certificato di richiedente asilo politico. Rilasciato dall’Alto commissariato delle Nazioni Unite per i Rifugiati (Acnur) a Tripoli, il nove ottobre 2007. Qua dentro è carta straccia. Come gli altri detenuti, Patrick non ha diritto di telefonare a nessuno, nemmeno all’Acnur. Se non trova prima i soldi per corrompere qualche poliziotto, anche lui, prima o poi, sarà deportato. E come lui i suoi compagni di cella. Sono camerate di otto metri per otto. I detenuti sono buttati per terra su stuoini e cartoni. La luce entra dalle vetrate in cima alle alte pareti. Ogni camerata è riempita con 60-70 persone. Stanno chiusi tutto il giorno, escono solo per i pasti, in un locale adibito a mensa, accanto a un piccolo chiosco dove i detenuti possono comprare bibite, dolci o medicine, sempre all’interno del muro di cinta.

      Le compagnie aeree che si occupano delle deportazioni sono libiche: Ifriqiya e Buraq Air. I soldi pure, garantisce il direttore. Ma è difficile credergli. Dopotutto il rapporto della Commissione europea del dicembre 2004 parlava già allora di 47 voli di rimpatrio finanziati dall’Italia. Zarruq scuote il capo. Dice che da Roma hanno avuto soltanto due fuoristrada per il pattugliamento, con il progetto Across Sahara. E il nuovo centro di detenzione? Ha finanziato tutto la Libia, insiste. Ammette però che l’Italia si era impegnata a costruire un nuovo centro, e che la a sha‘abiyah, la municipalità, aveva anche predisposto un terreno. Ma poi non se ne è fatto niente. Intanto però il vecchio campo è stato restaurato e ampliato, grazie anche ai lavori forzati degli immigrati detenuti. Questo Zarruq non me lo può dire, ma sono voci che corrono tra i rimpatriati, dall’altro lato della frontiera, a Agadez, in Niger. Ad ogni modo, insiste, oggi tutti i rimpatri avvengono in aereo, anche quelli verso il Niger: Sono passati i tempi dei cosiddetti “rimpatri volontari”, quando, nel 2004, oltre 18.000 nigerini e non solo vennero caricati sui camion e abbandonati alla frontiera in pieno deserto, con le decine di vittime che ne seguirono a causa degli incidenti.

      Ma Zarruq non ha intenzione di parlare di questo. E nemmeno il luogo tenente Ghrera. È lui il responsabile delle pattuglie nel Sahara. L’Italia e l’Europa si sono impegnate a finanziare alla Libia un sistema di controllo elettronico delle frontiere terrestri, firmato FinMeccanica. Lui alla sola idea sorride. Lavora nel deserto da 35 anni. Conosce bene il terreno. Per darci un’idea ci accompagna a Zellaf, 20 km a sud di Sebha. Ancora non siamo nel grande Sahara. Eppure davanti a noi non si vede che sabbia. I due fuoristrada, dopo una corsa a cento km all’ora sulle dune, fermano i motori. Ghrera e l’altro autista, ‘Ali, si lavano le mani nella sabbia. E si inginocchiano verso est. Dopo la preghiera, si riavvicinano. Controllare le rotte nel Sahara è impossibile, dice. Sono 5.000 km di deserto. Un’area troppo vasta e un terreno troppo accidentato Gli 89 autisti – quasi tutti libici – arrestati nei primi undici mesi del 2008 sono un’inezia rispetto alle migliaia di persone che attraversano il Sahara ogni anno. Alle missioni di pattugliamento partecipano gruppi di 10 fuoristrada. Stanno fuori per cinque giorni, ci spiega. Poi sorride. Ha trovato una bottiglia vuota di Gin, per terra. L’alcol in Libia è illegale. E infatti sulla bottiglia c’è scritto fabriqué au Niger, prodotto in Niger. Ghrera lancia la bottiglia nella sabbia, poco lontano. Non dice niente. I traffici non riguardano solo gli immigrati. Ci sono l’alcol, le sigarette, la droga, le armi. Prima di riaccendere il motore ribadisce il concetto: anche con il doppio delle pattuglie, il deserto rimane una porta aperta.

      Il centro di detenzione di Sebha non è l’unico campo di detenzione al sud. Ce ne sono almeno altri cinque. Quelli di Shati, Qatrun, Ghat e Brak, nel sud ovest del paese, fanno capo a Sebha, nel senso che gli immigrati arrestati in queste località vengono poi smistati a Sebha dentro i container. L’altro campo si trova 800 km a sud est, a Kufrah, e lì vengono detenuti i rifugiati eritrei e etiopi in arrivo dal Sudan. È il carcere che gode della peggiore fama, tra gli stessi libici.

      Mohamed Tarnish è il presidente dell’Organizzazione per i diritti umani, una ong libica finanziata dalla Fondazione di Saif al Islam Gheddafi, il primogenito del colonnello. Ci incontriamo al Caffè Sarayah, a due passi dalla Piazza Verde, a Tripoli. La sua organizzazione, sotto la guida del suo predecessore, Jum‘a Atigha, ha ottenuto il rilascio di circa 1.000 prigionieri politici e si è battuta per il miglioramento delle condizioni delle carceri libiche. Da un paio d’anni hanno accesso anche ai centri di detenzione degli immigrati. Ne hanno visitati sette. Ha la bocca cucita, davanti a noi c’è un funzionario dell’agenzia per la stampa estera del governo libico. Ma riesce comunque a farci capire che il centro di Kufrah è il peggiore. Le condizioni del vecchio fabbricato, il sovraffollamento, la scadenza del cibo e l’assenza di assistenza sanitaria.

      Per capire il significato delle allusioni di Tarnish, rileggo le interviste fatte ai rifugiati eritrei ed etiopi nel 2007.“Dormivamo in 78 in una cella di sei metri per otto” - “Dormivamo per terra, la testa accanto ai piedi dei vicini” - “Ci tenevano alla fame. Un piatto di riso lo potevamo dividere anche in otto persone” - “Di notte mi portavano in cortile. Mi chiedevano di fare le flessioni. Quando non ce la facevo più mi riempivano di calci e maledivano me e la mia religione cristiana” – “Usavamo un solo bagno in 60, nella cella c’era un odore perenne di scarico. Era impossibile lavarsi” - “C’erano pidocchi e pulci dappertutto, nel materasso, nei vestiti, nei capelli” - “I poliziotti entravano nella stanza, prendevano una donna e la violentavano in gruppo davanti a tutti”. È il ritratto di un girone infernale. Ma anche di un luogo di affari. Sì perché da un paio d’anni la polizia è solita vendere i detenuti agli stessi intermediari che poi li porteranno sul Mediterraneo. Il prezzo di un uomo si aggira sui 30 dinari, circa 18 euro.

      Non sono stato autorizzato a visitare il centro di Kufrah e non ho potuto verificare di persona. Tuttavia il fatto che le versioni dei tanti rifugiati con cui ho parlato coincidano nel disegnare un luogo di abusi, violenze e torture, mi fa pensare che sia tutto vero. Nel 2004 la Commissione europea riferiva che l’Italia stava finanziando il centro di detenzione di Kufrah. Nel 2007 il governo Prodi smentiva la notizia, dicendo che si trattava di un centro di assistenza sanitaria. Poco importa. Dal 2003, Italia e Unione Europea finanziano operazioni di contrasto dell’immigrazione in Libia. La domanda è la seguente: perché fingono tutti di non sapere?

      Nel 2005, il prefetto Mario Mori, ex direttore del Sisde, informava il Copaco: “I clandestini [in Libia, ndr.] vengono accalappiati come cani... e liberati in centri... dove i sorveglianti per entrare devono mettere i fazzoletti intorno alla bocca per gli odori nauseabondi”. Ma i funzionari della polizia italiana sapevano già tutto. Già perché dal 2004 alcuni agenti fanno attività di formazione in Libia. E alcuni funzionari del ministero dell’Interno, hanno visitato in più occasioni i centri di detenzione libici, Kufrah compreso, limitandosi a non rilasciare dichiarazioni. E l’ipocrita Unione Europea? Il rapporto della Commissione europea del 2004, definisce le condizioni dei campi di detenzione libici “difficili” ma in fin dei conti “accettabili alla luce del contesto generale”. Tre anni dopo, nel maggio 2007, una delegazione di Frontex visitò il sud della Libia, compreso il carcere di Kufrah, per gettare le basi di una futura cooperazione. Indovinate cosa scrisse? “Abbiamo apprezzato tanto la diversità quanto la vastità del deserto”. Sulle condizioni del centro di detenzione però preferì sorvolare. Una dimenticanza?

      [1] Testimonianza raccolta dalla scuola di italiano Asinitas, Roma, 2007


      https://fortresseurope.blogspot.com/2006/01/frontiera-sahara-i-campi-di-detenzione.html

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      Guantanamo Libia. Il nuovo gendarme delle frontiere italiane

      La porta di ferro è chiusa a doppia mandata. Dalla piccola feritoia si affacciano i volti di due ragazzi africani e un di egiziano. L’odore acre che esce dalla cella mi brucia le narici. Chiedo ai tre di spostarsi. La vista si apre su due stanze di tre metri per quattro. Incrocio gli sguardi di una trentina di persone. Ammassati uno sull’altro. A terra vedo degli stuoini e qualche lercio materassino in gommapiuma. Sui muri qualcuno ha scritto Guantanamo. Ma non siamo nella base americana. Siamo a Zlitan, in Libia. E i detenuti non sono presunti terroristi, ma immigrati arrestati a sud di Lampedusa e lasciati marcire in carceri fatiscenti finanziate in parte dall’Italia e dall’Unione europea.

      I prigionieri si accalcano contro la porta della cella. Non ricevono visite da mesi. Alcuni alzano la voce: “Aiutateci!”. Un ragazzo allunga la mano oltre quelli della prima fila e mi porge un pezzettino di cartone. C’è scritto sopra un numero di telefono, a penna. Il prefisso è quello del Gambia. Lo metto in tasca prima che la polizia se ne accorga. Il ragazzo si chiama Outhman. Mi chiede di dire a sua madre che è ancora vivo. È in carcere da cinque mesi. Fabrice invece non esce da questa cella da nove mesi. Entrambi sono stati arrestati durante le retate nei quartieri degli immigrati a Tripoli. Da anni la polizia libica è impegnata in simili operazioni. Da quando nel 2003 l’Italia siglò con Gheddafi un accordo di collaborazione per il contrasto dell’immigrazione, e spedì oltremare motovedette, fuoristrada e sacchi da morto, insieme ai soldi necessari a pagare voli di rimpatrio e tre campi di detenzione. Da allora decine di migliaia di immigrati e rifugiati ogni anno sono arrestati dalla polizia libica e detenuti nei circa 20 centri fatiscenti sparsi per il paese, in attesa del rimpatrio. Insieme a un collega tedesco, siamo i primi giornalisti autorizzati a visitare questi centri.

      “La gente soffre! Il cibo è pessimo, l’acqua è sporca. Ci sono donne malate e altre incinte”. Gift ha 29 anni. Viene dalla Nigeria. Indossa ancora il vestito che aveva quando l’arrestarono tre mesi fa, ormai ridotto a uno straccio sporco e consumato. Stava passeggiando con il marito. Non avevano documenti e furono arrestati. Non lo vede da allora, lui nel frattempo è stato rimpatriato. Dice di avere lasciato i due figli a Tripoli. Di loro non ha più notizie. Viveva in Libia da tre anni. Lavorava come parrucchiera e non aveva nessuna intenzione di attraversare il Canale di Sicilia. Come molti degli immigrati detenuti dai nuovi gendarmi della frontiera italiana.

      All’Europa invece aveva pensato Y.. C’aveva pensato e come. Disertore dell’esercito eritreo, per chiedere asilo politico, si era imbarcato due mesi fa per Lampedusa. Ma è stato fermato in mare. Dai libici. Da quel giorno è rinchiuso a Zlitan. Anche lui senza nessuna convalida dello stato d’arresto. Prima di farlo entrare nello studio del direttore, un poliziotto gli sussurra qualcosa all’orecchio. Lui fa cenno di sì col capo. Quando gli chiediamo delle condizioni del centro, risponde “Everything is good”. Va tutto bene. È spaventato a morte. Sa che ogni risposta sbagliata gli può costare un pestaggio. Il direttore del campo, Ahmed Salim, sorride compiaciuto delle risposte e ci assicura che non sarà deportato. Nel giro di qualche settimana sarà trasferito al centro di detenzione di Misratah, 210 km a est di Tripoli, dove sono concentrati i prigionieri di nazionalità eritrea.

      Nella provincia esistono altri tre centri di detenzione per stranieri, a Khums, Garabulli e Bin Ulid. Ma sono strutture più piccole e i detenuti vengono poi tradotti nel campo di Zlitan, che può rinchiudere fino a 325 persone, in attesa del loro rimpatrio. Ma quanti sono i centri di detenzione in tutta la Libia? Sulla base delle testimonianze raccolte in questi anni, ne abbiamo contati 28, perlopiù concentrati sulla costa. Ne esistono di tre tipi. Ci sono dei veri e propri centri di raccolta, come quelli di Sebha, Zlitan, Zawiyah, Kufrah e Misratah, dove vengono concentrati i migranti e i rifugiati arrestati durante le retate o alla frontiera. Poi ci sono strutture più piccole, come quelle di Qatrun, Brak, Shati, Ghat, Khums… dove gli stranieri sono detenuti per un breve periodo prima di essere inviati nei centri di raccolta. E poi ci sono le prigioni: Jadida, Fellah, Twaisha, Ain Zarah… Prigioni comuni, nelle quali intere sezioni sono dedicate alla detenzione degli stranieri senza documenti. Anche nelle prigioni, le condizioni di detenzione sono pessime. Scabbia, parassiti e infezioni sono il minimo che ci si possa prendere. Molte donne sono colpite da infezioni vaginali. E non mancano i decessi, dovuti perlopiù all’assenza di assistenza sanitaria o a ricoveri ospedalieri troppo tardivi. Il nome più ricorrente nei racconti dei migranti è quello del carcere di Fellah, a Tripoli, che però è stato recentemente demolito per far spazio a un grande cantiere edilizio, in linea con il restyling di tutta la città. La sua funzione è stata sostituita dal Twaisha, un’altra prigione vicino all’aeroporto.

      Koubros è riuscito a scappare da Twaisha poche settimane fa. È un rifugiato eritreo di 27 anni. Viveva in Sudan, ma dopo che un amico eritreo è stato rimpatriato da Khartoum, non si è più sentito al sicuro e ha pensato all’Europa. Da Twaisha è uscito sulle stampelle. Non poteva pagare la cifra che gli aveva chiesto un poliziotto ubriaco. Allora l’hanno portato fuori dalla cella e preso a manganellate. È uscito grazie a una colletta tra i prigionieri eritrei. Per corrompere una delle guardie carcerarie sono bastati 300 dollari. Lo incontro davanti alla chiesa di San Francesco, a Tripoli. Come ogni venerdì, una cinquantina di migranti africani aspetta l’apertura dello sportello sociale della Caritas. Tadrous è uno di loro. È stato rilasciato lo scorso sei ottobre dal carcere di Surman. È uno dei pochi ad essere stato giudicato da una corte. La sua storia mi interessa. Era il giugno del 2008. Si erano imbarcati da Zuwarah, in 90. Ma dopo poche ore decisero di invertire la rotta, perché il mare era in tempesta. E tornarono indietro. Appena toccata terra furono arrestati e portati nella prigione di Surman. Il giudice li condannò a 5 mesi di carcere per emigrazione illegale. Finiti i quali è stato rilasciato. Gli chiedo se gli fu dato un avvocato d’ufficio. Sorride scuotendo la testa. La risposta è negativa.

      Niente di strano, sostiene l’avvocato Abdussalam Edgaimish. La legge libica non prevede il gratuito patrocinio per reati passibili di pene inferiori a tre anni. Edgaimish è il direttore dell’ordine degli avvocati di Tripoli. Ci riceve nel suo studio in via primo settembre. Ci spiega che tutte le pratiche di arresto e detenzione sono svolte come procedure amministrative, senza nessuna convalida del giudice. Senza nessuna base legale dunque, ma solo sull’onda dell’emergenza. Anche in Libia una persona non potrebbe essere privata della libertà senza un mandato d’arresto. Ma questa è la teoria. La pratica invece è quella delle retate casa per casa nei sobborghi di Tripoli.

      “I migranti sono vittime di una cospirazione tra le due rive del Mediterraneo. L’Europa vede soltanto un problema di sicurezza, nessuno vuole parlare dei loro diritti”. Anche Jumaa Atigha è un avvocato di Tripoli. Nella parete del suo ufficio è appesa una Laurea in Diritto penale dell’Università La Sapienza, di Roma, conferita nel 1983. Dal 1999 ha presieduto l’Organizzazione per i diritti umani della Fondazione guidata dal primogenito di Gheddafi, Saif al Islam. Lo scorso anno si è dimesso. Dal 2003 ha condotto una campagna che ha portato alla liberazione di 1.000 prigionieri politici. Ci descrive un paese in rapido cambiamento, ma ancora lontano da una situazione ideale sul fronte delle libertà individuali e politiche. In Libia non c’è nessuna legge sull’asilo, ci conferma, ma in compenso una commissione si sta occupando di scrivere un nuova legge sull’immigrazione.

      Atigha conosce personalmente le condizioni di detenzione in Libia. Dal 1991 al 1998 è stato incarcerato, senza processo, come prigioniero politico. Ci dice che la tortura è comunemente praticata dalla polizia libica. “Dal 2003 abbiamo fatto una campagna contro la tortura nelle carceri. Abbiamo organizzato conferenze, visitato le prigioni, fatto dei corsi agli ufficiali di polizia. La mancanza di consapevolezza fa sì che la polizia pratichi la tortura pensando così di servire la giustizia”.

      Mustafa O. Attir la pensa allo stesso modo. Insegna sociologia all’Università El Fatah di Tripoli. “Non è un problema di razzismo. I libici sono gentili con gli stranieri. È un problema di polizia”. Attir sa quello che dice. È entrato nelle carceri libiche come ricercatore nel 1972, nel 1984 e nel 1986. Gli agenti di polizia non hanno istruzione - sostiene -, e sono educati al concetto di punizione.

      Le sue parole mi fanno ripensare ai parrucchieri ghanesi nella medina, ai sarti chadiani, ai negozianti sudanesi, ai camerieri egiziani, alle donne delle pulizie marocchine e agli spazzini africani che armati di scope di bambù ogni notte ripuliscono le vie dei mercati della capitale. Mentre gli eritrei si nascondono nei sobborghi di Gurji e Krimia, migliaia di immigrati africani vivono e lavorano, in condizioni di sfruttamento, ma con relativa tranquillità. Sicuramente per sudanesi e chadiani è tutto più facile. Parlano arabo e sono musulmani. La loro presenza in Libia è decennale e quindi tollerata. Lo stesso per egiziani e marocchini. Al contrario eritrei ed etiopi sono qui esclusivamente per il passaggio in Europa. Spesso non parlano arabo. Spesso sono cristiani. E i loro nonni combattevano contro i libici a fianco delle truppe coloniali italiane. E poi si sa che hanno spesso in tasca i soldi per la traversata. Per cui diventano facile mira di piccoli delinquenti e poliziotti corrotti. Per i nigeriani, e più in generale i sub-sahariani anglofoni, è ancora diverso. Che siano diretti in Europa oppure no, il loro destino in Libia si scontra sistematicamente contro il pregiudizio che si è venuto a creare contro i nigeriani, sulla scia di qualche fatto di cronaca nera. Sono accusati di portare droga, alcol e prostituzione, di essere autori di rapine e omicidi, e di diffondere il virus dell’Hiv.

      Il professor Attir, nel 2007, ha organizzato tre seminari sul tema dell’immigrazione nei paesi arabi. In Libia è uno dei massimi esperti. Ed è pronto a smentire la cifre che circolano in Europa. “Due milioni di immigrati in Libia pronti a partire per l’Italia? Non è vero”. In realtà non esistono statistiche di nessun tipo. Ma solo stime. Che però – secondo Attir – non sono attendibili. Basta dare un occhio in giro. La popolazione libica è di cinque milioni e mezzo di persone. Gli stranieri non possono ragionevolmente essere più di un milione, compresi gli immigrati arabi egiziani, tunisini, algerini e marocchini. La maggior parte di loro non ha mai pensato all’Europa. E la Libia ha bisogno di loro, perché è un paese sottopopolato e perché i libici non vogliono più fare lavori pesanti e mal retribuiti. Attir è consapevole delle pressioni che l’Europa sta facendo sulla Libia perché sigilli le sue frontiere. Ma sa che “non c’è modo per farlo”.

      La Libia ha circa 1.800 km di costa, in buona parte disabitati. Il colonnello Khaled Musa, capo delle pattuglie anti immigrazione a Zuwarah, non sa che farsene delle sei motovedette promesse dall’Italia. Potrebbero servire a pattugliare meglio il tratto di mare tra la frontiera tunisina, Ras Jdayr, e Sabratah, ammette. Ma sono solo 100 km. Il 6% della costa libica. E le partenze si sono già spostate sul litorale a est di Tripoli, tra Khums e Zlitan, a più di 200 km da Zuwarah. Il dipartimento anti immigrazione di Zuwarah è nato nel 2005. Il numero di migranti arrestati è sceso da 5.963 nel 2005 a soli 1.132 nel 2007. Per il capo del dipartimento investigazioni, Sala el Ahrali, i dati indicano il successo delle misure repressive. Molti degli organizzatori dei viaggi sono stati arrestati, questo sarebbe il motivo per cui le partenze si sono ridotte. E la costa è più controllata. Ogni dieci chilometri è installata una tenda, in mezzo alla spiaggia. Serve da appoggio ai fuoristrada della polizia, che da due anni pattugliano la litoranea, appoggiati da quattro motovedette della marina. Il tratto di costa attualmente pattugliato è di una cinquantina di chilometri. Parte da Farwah, a una decina di chilometri dalla frontiera tunisina, e finisce 15 km a est di Zuwarah, a Mellitah, nei pressi dell’imponente impianto di trattamento del gas di proprietà dell’Eni e della libica National Oil Company.

      E proprio da Mellitah parte il #Greenstream, il gasdotto sottomarino più lungo del Mediterraneo. Collega la Libia a Gela, in Sicilia. Ironia della sorte, corre lungo la stessa rotta che porta i migranti a Lampedusa. Come dire che mentre sulla superficie del mare l’Europa dispiega le sue forze militari per bloccare il transito degli esseri umani, otto miliardi di metri cubi di gas ogni anno scorrono silenziosi nei 520 km di condotta posata sui fondali di quello stesso mare, in mezzo alle ossa delle migliaia di uomini e donne morti nella traversata del Canale di Sicilia. Un’immagine che sintetizza perfettamente le relazioni degli ultimi cinque anni tra Roma e Tripoli, condotte all’insegna dello slogan “più petrolio e meno immigrati”.

      https://fortresseurope.blogspot.com/2006/01/guantanamo-libia-il-nuovo-gendarme.html
      #gazoduc

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      Liens qu’il a mis aujourd’hui sur FB pour accompagner ce message:

      Non conosco nessuno dell’equipaggio di #Lifeline, la nave della ONG accusata dal ministro Salvini di aver agito fuorilegge soccorrendo 239 passeggeri in difficoltà in acque libiche. Purtroppo però conosco bene le carceri libiche. Fui il primo giornalista italiano a visitarle nel 2008 insieme al collega e amico Roman Herzog. Abusi, pestaggi, violenze sulle donne erano la norma già allora. Gli unici che si salvavano erano quelli che riuscivano a farsi mandare abbastanza soldi dai familiari in Europa con cui corrompevano facilmente le guardie colluse con le mafie del contrabbando per farsi rilasciare e tentare di nuovo la traversata. Gli altri, dopo mesi di prigione in condizioni inumane venivano rimpatriati sui voli dell’OIM oppure, molto più spesso, stipati come vuoti a rendere dentro i container dei camion che prendevano la via del deserto, per decine di ore, mentre sotto il sole le lamiere di ferro diventavano un forno, per essere infine abbandonati alla frontiera sud con il Niger e il Sudan, in una terra di nessuno. E quanti ne sono morti anche lì, in mezzo al Sahara. Con molti giornalisti e documentaristi abbiamo denunciato questa situazione fin dal 2007. Da quando Prodi e Amato negoziarono gli accordi di respingimento con Gheddafi a quando Berlusconi e Maroni li misero in pratica nel 2009. Da allora sembra non essere cambiato molto. E allora, pur non conoscendoli, mi azzardo a pensare che l’equipaggio della #Lifeline abbia disobbedito all’ordine di consegnare i passeggeri alla guardia costiera libica temendo per il destino di quegli uomini, di quelle donne e di quei bambini, immaginando il triste destino che li attendeva nelle prigioni oltremare.

      Dopodiché se il comportamento della #Lifeline costituisca un reato lo deciderà un giudice anche alla luce di queste considerazioni. Perché quello che il ministro Salvini si dimentica di ricordare è che la Libia non è Malta, non è la Spagna, non è la Francia. La Libia di oggi non è un paese sicuro.

      Ciononostante, attenzione, gli sbarchi devono cessare. Ma come si fa?

      Si aprono vie legali. Perché, ministro, da contribuenti italiani non vogliamo finanziare altre prigioni in Libia. Vogliamo finanziare asili nido, scuole, parchi, ospedali. Non vogliamo continuare a finanziare le milizie colluse con le stesse mafie del contrabbando che dite di voler combattere.

      Per sconfiggere quelle mafie, azzerare gli sbarchi e porre fine alle tragedie delle traversate c’è un unico modo: legalizzare l’emigrazione Africa-Europa. Perché fin quando quell’emigrazione sarà illegale, ci sarà qualche mafia pronta a lucrarci. Oggi i libici, domani gli egiziani o i tunisini. Il mare è grande e incontrollabile.

      La soluzione sarebbe così semplice che è incredibile credere che i vostri consiglieri non ve l’abbiano prospettata. Andate in Europa e chiedete a gran voce che le ambasciate UE in Africa riaprano i canali legali dei visti che hanno progressivamente chiuso in questi ultimi vent’anni, spingendo centinaia di migliaia di giovani nelle mani del contrabbando libico a cui abbiamo concesso il monopolio della mobilità sud-nord in questo mare.

      Calcolate quante persone ogni anno attraversano il mare per rimanere bloccati in Italia, senza documenti e senza lavoro. Calcolate quanti sono e rilasciate lo stesso numero di visti per ricerca di lavoro. Affinché quelle stesse persone possano comodamente imbarcarsi in aereo, con in tasca un passaporto e un visto europeo liberi di circolare in tutta Europa, ricongiungersi con i propri familiari e cercare lavoro là dove il lavoro c’è, in quel centro e nord Europa che in questi anni ha importato milioni di lavoratori dall’est mentre noi a sud predicavamo il blocco navale e continuavamo a contare i morti.

      In caso contrario, signor ministro, siate più chiari. Dite semplicemente che di negri in Europa non volete vederne. Né per le vie legali né per quelle illegali.

      https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=2121309374549318&id=100000108285082

    • La zona SAR libica non esiste. Il grande inganno nel rimbalzo dei soccorsi

      "Una zona SAR libica ad oggi non esiste”, spiega Fulvio Vassallo Paleologo, avvocato, esperto di immigrazione, membro del direttivo di Osservatorio Solidarietà. “E non esiste in quanto il governo di Tripoli non ha soddisfatto i requisiti imposti dall’IMO (Organizzazione marittima internazionale) per il riconoscimento delle zone SAR”, aggiunge l’avvocato.

      I requisiti consistono nell’accordo tra lo Stato che si pone come responsabile delle operazioni di salvataggio in una propria area di mare l’Organizzazione marittima internazionale (IMO). A quel punto i dati della zona SAR devono essere inseriti in un database ufficiale e pubblico, il GISIS. A marzo, in seguito al caso Open Arms, Famiglia Cristiana aveva fatto una verifica con l’IMO e la risposta ricevuta era stata: “La Libia non ha inviato le sue informazioni”.

      “Quasi tutte le operazioni di soccorso in acque internazionali nelle ultime settimane sono state coordinate dal Comando della Guardia costiera italiana proprio perché la Libia non esiste come paese unitario e non ha un Comando centrale unificato”, aggiunge Vassallo Paleologo.

      “Ma tutto è cambiato dal caso Aquarius”. Infatti da alcuni giorni anche sul sito dell’IMO compare il riferimento alla zona SAR libica “ma continua a non esistere uno stato unitario e anche le guardie costiere delle diverse città rispondono a milizie diverse“, avverte l’avvocato. “Alla fine il risultato è che il trasferimento di competenze ai libici e l’allontanamento delle Ong produce un ritardo nei soccorsi, un amento delle vittime e delle persone riportate nei centri di detenzione in Libia dove continuano gli abusi”.

      Esiste invece una zona SAR maltese. Ma Malta ha dichiarato unilateralmente la sua zona di ricerca e soccorso, un’area molto ampia che però non è riconosciuta dalle autorità marittime internazionali poiché il Governo de la Valletta non ha mai sottoscritto alcune modifiche della convenzione di Amburgo del 1979 e della convenzione #Solas introdotte nel 2004. Queste norme prevedono che lo sbarco avvenga nel paese che ha coordinato i soccorsi, e da sempre in quel tratto di mare i soccorsi sono stati coordinati dall’Italia. Quindi, in base al diritto internazionale e alla prassi i soccorsi coordinati dall’Italia hanno sempre indicato un porto di sbarco italiano.

      http://osservatoriosolidarieta.org/la-zona-sar-libica-non-esiste-il-grande-inganno-nel-rimbalz
      #Malte #SAR

    • Conséquences pour les droits de l’homme de la « dimension extérieure » de la politique d’asile et de migration de l’Union européenne : loin des yeux, loin des droits ?

      Les objectifs de la délégation des procédures de migration aux pays en dehors des frontières de l’Union européenne sont, entre autres, d’alléger la pression migratoire des États membres aux frontières de l’UE et de réduire le besoin des migrants d’entreprendre des voyages terrestres et maritimes potentiellement mortels. La réinstallation dans toute l’Europe devrait ensuite faciliter un afflux plus régulier sur le continent. Cependant, le transfert des responsabilités et l’engagement de pays tiers dans le renforcement de contrôles aux frontières de l’UE comportent de sérieux risques pour les droits de l’homme. Il augmente le risque que les migrants soient « bloqués » dans les pays de transit par la réadmission et le recours accru à des mesures punitives et restrictives telles que le refoulement, la rétention arbitraire et les mauvais traitements. C’est également un moyen pour de nombreux États membres de l’Union européenne de prendre leurs distances par rapport à la question de l’assistance et de l’intégration des réfugiés, qui est source de divisions politiques.

      Ce #rapport exhorte les États membres à œuvrer ensemble pour que le recours accru à des politiques de dissuasion ne porte pas atteinte au devoir des États européens de respecter et de défendre les droits de l’homme à l’échelle mondiale et à s’abstenir d’externaliser le contrôle des migrations vers les pays où la législation, les politiques et les pratiques ne respectent pas les normes de la Convention européenne des droits de l’homme et de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés.

      http://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-XML2HTML-fr.asp?fileid=24808&lang=fr

    • Sahel, la France en guerre ?

      Au Mali, alors que la campagne pour les élections présidentielles du 29 juillet bat son plein, l’insécurité liée au terrorisme grandit. La France a-t-elle encore un rôle a jouer ? Elle a depuis 2013 une forte présence militaire entre le Sahel et le Sahara, mais quelle place tient-elle dans la guerre contre le terrorisme ?

      Sahel, la France en guerre ? Par David Dominé-Cohn ntoine de Saint-Exupéry dans Terre des hommes (1939) dresse le portrait des officiers français des compagnies méharistes au Sahara. Développées à partir de 1897 par le commandant Laperrine, ces unités d’infanterie, relevant pour partie de la Légion étrangère, apparentées aussi aux spahis, ont effectué un travail de police et de contrôle des populations des oasis. Chez l’écrivain, le capitaine Bonnafous exerce son autorité, fascinante pour l’observateur occidental, dans un mélange d’héroïsme, d’humanité et d’extrême violence : « À cause de Bonnafous chaque pas vers le sud devient un pas riche de gloire »… et d’insurrections des populations locales.

      Les grandes formes historiques semblent se reproduire dans le désert. Depuis 2013, la France entretient une présence militaire entre le Sahel et le Sahara : 4500 hommes au printemps 2018. Avec 500 opérations en trois ans et demi, l’objectif affiché est d’abord de maintenir la pression sur les groupes terroristes et d’apporter un soutien à la population locale. Les attaques terroristes sur place sont l’occasion de s’interroger sur l’espace du Sahara et du Sahel comme étant redevenu un espace majeur d’action militaire de la France. Témoignant dans le livre de David Revault d’Allones, Les guerres du président (2015), Sacha Mandel, plume de Jean-Yves Le Drian, revendique le terme de guerre pour ce qui a causé, pour la France 22 morts et des dizaines de blessés et des centaines morts et de blessés pour les adversaires. Or peut-on faire la guerre au terrorisme ?

      Faire la « guerre au #Mali » puis faire la guerre au #terrorisme

      L’intervention française au Mali avec l’opération Serval commence le 11 janvier 2013 pour soutenir l’État malien dans la reprise des villes du pays contrôlées par une alliance entre le MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad) touareg, qui réclame le développement et l’indépendance du Nord du pays, l’Azawad, et des mouvements islamistes comme Ansar Dine et le MUJAO (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) et d’autres issus de la guerre civile algérienne des années 1990 comme AQMI. Les opérations militaires françaises, appuyées par les forces des États voisins, visent d’abord à sécuriser Bamako, comme l’affirme le président Hollande le 15 janvier aux Émirats Arabes Unis. La boucle du fleuve Niger est reprise entre le 22 et le 28 janvier, la ville de Gao le 25. Le 27 janvier par une opération aéroportée de la Légion, Tombouctou est contrôlée, puis Kidal le 30. En février et mars les forces avancent vers le nord, vers Tesslit et Tigharghâr, pendant que Gao connaît un regain de violence et d’actes terroristes kamikazes comme dans la nuit du 9 au 10 février. Un effort important est fait pour séparer les mouvements de l’Azawad des islamistes. Ainsi, le général tchadien Mahamat Idriss Déby Itno déclare le 11 janvier à RFI que ses troupes, qui occupent la ville, entretiennent de bonnes relations avec le MNLA. Le 2 février, dans un discours à Bamako, François Hollande considère l’action française comme inachevée et se donne comme objectif l’éradication du terrorisme. Les opérations antiterroristes scandent toute la seconde moitié de l’année 2013 et le début de 2014. Le 1er août 2014, l’opération Serval et l’opération Épervier au Tchad sont regroupées dans l’opération Barkhane qui porte sur l’ensemble de la bande sahélo-saharienne. Michel Galy (La guerre au Mali. Comprendre la crise au Sahel et au Sahara. Enjeux et zones d’ombre, 2013) rappelle que l’intervention française s’inscrit à la fois dans une forme de tradition française et dans un contexte général de transformation de la région. Au-delà de la remise en cause du mode de gouvernement du président Amadou Toumani Touré, les différents mouvements indépendantistes ou djihadistes s’inscrivent dans des enjeux régionaux où pèsent certains voisins du Maghreb, les puissances d’Afrique de l’Ouest et de toutes les grandes puissances mondiales occidentales ou orientales. Elles sont attentives au développement des mouvements terroristes se revendiquant de l’islam mais aussi à une région de plus en plus stratégique, jeune, au sous-sol très riche et qui sera un foyer de peuplement du XXI siècle.

      De la ligne de front à une ligne de postes

      Barkhane est devenue une opération de surveillance anti-terroriste d’un territoire immense à partir de postes avancés en liaison avec les forces locales. Le 18 avril 2018, Michel Cambon, président de la commission sénatoriale des affaires étrangères, de la défense et des forces armées souligne que dans ce cadre, la stratégie française est celle de « coups de poing » menées par des forces spéciales basées à Ouagadougou grâce au dispositif Sabre. Celui-ci est ancien, plus ancien que Barkhane et Serval. Dans le livre blanc de défense et de sécurité nationale en 2008, la désignation de l’arc de crises, allant de l’Océan atlantique à l’Océan indien entraîne la mise en place d’un plan Sahel qui comporte un large volet anti-terroriste. Comme le souligne Jean- Christophe Notin (La guerre de la France au Mali, 2014), la composante essentielle de ce volet est le prépositionnement d’unités dites Sabre de forces spéciales. Elles ont joué un rôle au début de Serval dans la protection des sites nucléaires du Niger et ont participé aux opérations Serval et Barkhane. Le soutien à la lutte anti-terroriste est un moyen majeur d’influence des grandes puissances en Afrique. Les États-Unis sont ainsi très présents depuis 2007 via leur commandement pour l’Afrique (Africom) ; la qualification de terroriste permet à chacun de se trouver un ennemi commun. Le passage d’une logique d’action militaire de reprise d’un territoire à une action de surveillance, de police et de contre-terrorisme se traduit par de nouveaux besoins en matériel, comme le souligne le sénateur Cambon : « les hélicoptères lourds, les véhicules de type quad/pickup pour la mobilité, les ISMI catcher pour l’écoute des GSM, la biométrie, la capacité « drones » ». Il conclue son rapport par « un message assez clair et assez pessimiste » : une opération militaire ne réglera pas un problème politique.

      Le terrorisme persiste largement dans la région. Le Groupement de Soutien à l’Islam et aux Musulmans, qui fédère plusieurs groupes djihadistes, dont Ansar Dine, des katibats d’al-Qaïda au Maghreb islamique et d’al-Mourabitoune, lance régulièrement des attaques contre les forces dans la région. Le 2 mars 2018, deux attaques à Ouagadougou au Burkina Faso ont fait 8 morts et une soixantaine de blessés. Le 14 avril, le GSIM a lancé une attaque « complexe » avec une quinzaine d’attaquants à Tombouctou contre la force Barkhane et la Mission des Nations unies au Mali. Le groupe a revendiqué son action comme une réponse à des raids aériens. Le 5 juillet, Emmanuel Macron évoque un redéploiement du dispositif français. Le bureau pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel de l’ONU soulignait dans un rapport du 29 juin la montée en capacité des mouvements terroristes autant que le possible resserrement des liens entre les différents mouvements djihadistes violents avec une extension de leurs zones d’activité. La réduction des adversaires à des mouvements avant tout terroristes mais mobiles et circulant dans un large territoire a conduit à un renouvellement des logiques d’action : le droit de poursuite au-delà de la frontière est nécessaire. Créé en février 2014, le G5 regroupe le Mali, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad. Il vise le développement régional et la lutte contre le terrorisme. Cependant l’objectif d’une force commune actée en novembre 2015 peine à se réaliser et il a fallu attendre juin 2017 pour que l’ONU salue sa mise en place. Les financements sont aujourd’hui très insuffisants par rapport aux immenses besoins nés des contraintes du territoire. La France occupe donc de fait un rôle central dans la réalisation d’opérations de contreterrorisme par sa capacité très supérieure dans les domaines du renseignement, de la mobilité et de la frappe. Dans un milieu désertique, un espace que l’on traverse, l’action militaire est une action de contrôle de flux qui entraîne soit l’enlisement, soit des reconfigurations politiques, militaires et institutionnelles profondes. La criminalisation des personnes circulant dans de tels espaces est une stratégie classique de contrôle. Pour Hélène Claudot-Hawad (Galy, La guerre au Mali, 2013), la question Touareg a été construite tout au long de la colonisation : à partir des années 1910, l’administration française déploie un projet de tribalisation dans le but de contrôler des groupes et des circulations dans la bande sahélo-saharienne. La question des Touaregs est restée problématique pour les pouvoirs issus de la décolonisation. A l’aube de la décennie 2000 les tensions sont fortes d’autant plus que les organisations régionales de contrebande rejoignent une partie des mouvements islamistes.

      L’envers de la lutte contre les pirates du désert

      Le G5 Sahel se veut l’instrument d’une action régionale centrée sur la lutte anti-terroriste. Le terroriste y est celui qui circule impunément et qui devient ce que Daniel Heller-Roazen a vu dans la figure ancienne du pirate : l’ennemi de tous (L’ennemi de tous. Le pirate contre les nations, 2010, édition originale anglaise 2009). Le pirate brouille la limite entre criminalité et politique : « la piraterie entraine une transformation du concept de guerre. » C’est dans cette perspective qu’on peut lire le rapport du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Droits de l’Homme qui dénombre au Mali 1200 violations entre janvier 2016 et juin 2017 faisant 2700 victimes dont 441 morts. Si plus de 70% des violations sont le fait d’acteurs non étatiques on peut, par exemple, s’interroger sur le statut des 150 arrestations administratives faites par les forces de Barkhane. Les « neutralisations » des terroristes, leur mort pendant des combats ou suite à des frappes aériennes, posent également question. Le respect des Droits de l’Homme est en jeu, mais aussi le cadre juridique dans lequel interviennent les troupes françaises. En arrière plan, le rapport de l’ONU pointe que 20% des violations sont le fait des forces de sécurité maliennes. A l’horizon de ce rapport qui suit plusieurs autres avant lui, par exemple celui en mai 2017 de la FIDH « Mali : Terrorisme et impunité font chanceler un accord de paix fragile » souligne les impasses d’une approche centrée sur l’anti-terrorisme et qui ne vise pas un processus politique global dans la région. De ce fait, interroger l’action française au Sahel c’est aussi nous interroger sur le rapport au territoire des autres, particulièrement des pays en développement, le rapport aux flux dans un contexte d’urgence migratoire. Cela questionne les actions militaires futures. Ces engagements sont usants pour les hommes et les matériels et constituent un poids considérable sur notre appareil militaire. Les opérations de lutte contre le terrorisme sont légitimes dans la mesure où la terreur et les actes criminels ne sauraient être tolérés. Il faut mesurer le dilemme moral qui pèse sur tout gouvernant à la tête d’une puissance militaire capable d’une opération pour faire cesser ce qui constitue à un moment donné un scandale moral. Mais il faut admettre que ce qui constitue un scandale moral aujourd’hui s’inscrit dans des problématiques plus vastes et plus anciennes. Oublier que le terrorisme et les terroristes sont les manifestations de problèmes plus larges qu’eux-mêmes, c’est accepter de croire qu’il est possible aujourd’hui, en démocratie de faire la guerre à un mode d’action et à des idées et de gagner. L’aveuglement de certaines grandes puissances face à ces enjeux tient souvent du refoulement de problèmes qui leurs sont propres. Dans un coin du parc Montsouris à Paris, un obélisque commémore le colonel Flatters et ses compagnons tués par des Touaregs en 1881 à Bir el-Garama en tentant de rejoindre le Soudan français par le Sahara. Son expédition était l’aboutissement d’un projet porté depuis 1879 par la commission supérieure du Transsaharien visant à la création d’un chemin de fer allant de l’Algérie à Dakar via le Mali dans une double perspective de contrôle des circulations sahélo-sahariennes et donc des populations y vivant mais aussi des ressources présentes dans la région et pouvant présenter un intérêt colonial. L’échec de la mission Flatters n’a pas limité ces entreprises puisque le contrôle de ces espaces de désert a été un axe politique majeur des autorités coloniales de l’Algérie comme de l’Afrique occidentale française.

      https://aoc.media/analyse/2018/07/11/sahel-france-guerre

      signalé par @isskein via la mailing-list Migreurop

    • États africains, portiers de l’Europe

      À coups de milliards versés par l’Union européenne, les États africains deviennent les nouveaux gardes-frontières du Vieux Continent. Cette vaste enquête menée dans douze pays explore les rouages et les conséquences humaines de cette politique européenne controversée, dont les exilés paient le prix fort.

      L’Espagne a été la première à franchir le pas : face à l’afflux de migrants sur les côtes des #Canaries, le pays a décidé de subventionner plusieurs pays d’#Afrique_de_l’Ouest afin qu’ils se chargent d’arrêter à leurs frontières les candidats à l’exil. L’#Union_européenne a emboîté le pas à l’Espagne, en conditionnant l’#aide_au_développement à destination d’une vingtaine de pays africains à un renforcement de ces contrôles. Policiers et militaires européens sont parallèlement envoyés sur place pour aider à briser les routes migratoires. L’UE n’hésite d’ailleurs pas à faire de dictatures comme l’#Érythrée et le #Soudan ses « partenaires » dans la chasse aux migrants. Les véritables gagnants de ces interventions à grande échelle sont les entreprises d’armement et de sécurité européennes, dans lesquelles sont réinvesties les subventions versées. Au fil d’une vaste enquête dans douze pays, Jan M. Schäfer explore les rouages et les conséquences humaines de cette politique européenne controversée, dont les exilés paient le prix fort.

      https://www.arte.tv/fr/videos/078195-000-A/etats-africains-portiers-de-l-europe
      #film #documentaire
      #business #armes #armement

      Le documentaire n’est plus disponible sur arte, mais peut être visionné sur Youtube, voici quelques liens actuellement valides :
      https://www.youtube.com/watch?v=IUSIi-qP2pY


      https://www.youtube.com/watch?v=o0nf5c4FOPo

      https://www.youtube.com/watch?v=Hu7VvY5fs7Y

    • La relation dangereuse entre migration, développement et #sécurité pour externaliser les frontières en Afrique

      L’ARCI, dans le cadre du projet de monitorat de l’externalisation des politiques européennes et italiennes sur les migrations – parallèlement à son travail de communication constant sur l’évolution des accords multilatéraux et bilatéraux avec les pays d’origine et de transit, a produit ce document d’analyse pour alerter la société civile et les gouvernements sur les dérives possibles de ces stratégies qui conduisent à des violations systématiques des droits fondamentaux et des Conventions internationales


      https://www.arci.it/documento/la-relation-dangereuse-entre-migration-developpement-et-securite-pour-externali
      #rapport #Soudan #Niger #Tunisie

      In English :
      https://www.arci.it/documento/the-dangerous-link-between-migration-development-and-security-for-the-externali

    • Giochi pericolosi: delocalizzare in Africa le frontiere Ue

      Più di 25mila persone riportate nell’inferno e 600 morti nel solo mese di maggio 2018. L’esternalizzazione delle frontiere – ovvero la collaborazione con i Paesi di origine e transito per espellere facilmente i migranti o bloccarli prima dell’arrivo – nuoce gravemente alle vite dei migranti ma anche ai diritti dei cittadini dei Paesi in cui sono state delocalizzate le frontiere della Fortezza Europa e non fa certo bene alle “democrazie” che vogliono rendere invisibili i profughi messi in fuga dalle loro stesse politiche commerciali. «Esternalizzare significa spingere le responsabilità giuridiche e politiche dei nostri Paesi più a sud nella cartina del mondo, alla ricerca di una totale impunità o nel tentativo di farla ricadere su altri Paesi». A tre anni dal vertice della Valletta dove furono sancite le linee guida dell’esternalizzazione, l’Arci fa un bilancio dell’impressionante subappalto europeo a regimi come quelli nigerino, sudanese, tunisino (sono più famosi gli accordi con Libia, Egitto e Turchia) per richiamare l’attenzione di società civile e governi sugli effetti negativi di queste strategie e le loro implicazioni in merito alle violazioni sistematiche dei diritti fondamentali di migranti e popolazioni interessate. Si tratta di “La pericolosa relazione tra migrazione, sviluppo e sicurezza per esternalizzare le frontiere in Africa“, un documento d’analisi curato da Sara Prestianni dell’ufficio Immigrazione dell’Arci nell’ambito del progetto di monitoraggio Externalisation Policies Watch che ha previsto missioni sul campo tra il dicembre 2016 e luglio 2018.

      Tanto è devastante per i diritti umani, quanto fa bene ai bilanci dell’industria militare del Nord del mondo e al destino politico dei governi populisti e xenofobi che, «con la guerra ai migranti, alimentano l’immaginario di un nemico da combattere alle nostre porte, e che con la loro presenza nel continente africano si giocano la partita dell’influenza territoriale». “Aiutarli a casa loro” significa fornire carri armati ed elicotteri, sistemi biometrici e satellitari, eserciti e truppe: il rapporto segnala come il processo di esternalizzazione del controllo della frontiera europea in Africa sembra evolversi verso una predominanza della dimensione militare e della sicurezza. EucapSahel, missione “civile” per “modernizzare” le forze dell’ordine di Niger e Mali, da forza antiterrorismo è diventata centrale nella politica di gestione delle frontiere – poi ci sono le missioni militari italiane in Libia e Niger, quindi la forza congiunta G5 Sahel che – oltre ad un contributo di 100 milioni di euro – si è vista attribuire ulteriori 500 milioni di euro nel summit del marzo 2018. Si tratta di cifre ingenti che potrebbero essere usate per una reale politica di cooperazione allo sviluppo o di integrazione, come ha detto proprio a Left Selly Kane, responsabile Immigrazione della Cgil nazionale.

      La militarizzazione dell’esternalizzazione, però, non solo serve a bloccare gli arrivi in Europa ma coincide con gli interessi dell’industria italiana della sicurezza e con la concorrenza interna all’Ue per una presenza geostrategica in quelle aree. La trasformazione di Frontex nell’European Border and Coastguard Agency è solo una delle tante proposte “suggerite” dalle lobby militar-industriali alla Commissione europea. Avverte il rapporto Arci (dal quale attingiamo con ampi stralci): «L’attuazione del processo di esternalizzazione deve essere osservato anche come esempio di riduzione dello spazio democratico all’interno dell’Europa stessa e degli Stati membri. Per molte delle attività e dei fondi attribuiti per l’attuazione di tali politiche è stato aggirato il controllo democratico del Parlamento europeo cosi come, a livello italiano, si è evitata la ratificazione degli Accordi Bilaterali da parte delle Camere, in flagrante violazione dell’Art 80 della Costituzione».

      Che poi «le procedure di selezione e monitoraggio dei progetti finanziati dal Trust Fund risultino «non trasparenti e i processi di valutazione privi di coerenza» (come denunciato nel rapporto Concord) non sembra scuotere la coscienza dei governi europei avvezzi a scandali di vario tipo. Per questo il rapporto sottolinea «il compito fondamentale delle associazioni della società civile di analizzare queste politiche, riportando le responsabilità giuridiche e politiche ai diretti responsabili».

      L’analisi dell’uso dei fondi europei e italiani per attività di controllo delle frontiere – anche grazie alla retorica “aiutiamoli a casa loro” – evidenzia una parte dei progetti finanziati con l’Eutf (Centro operativo Regionale di supporto al processo di Khartoum e all’Iniziativa nel Corno d’Africa) prevede la formazione di forze di polizia e guardie di frontiera, la diffusione del sistema biometrico per la tracciabilità delle persone e la “donazione” di elicotteri, veicoli e navi di pattuglia, apparecchiature di sorveglianza e monitoraggio, «aprendo cosi alla relazione sempre più strutturata tra migrazione, sviluppo e sicurezza». L’obiettivo dell’istituzione del Fondo fiduciario era quello di ottenere maggior collaborazione da parte dei governi locali nel controllo dei flussi attraverso il finanziamento di programmi di sviluppo (sia nei Paesi di origine che di transito) e mediante il rafforzamento delle forze di polizia lungo le rotte. Una strategia europea «drammaticamente efficace»: nel 2017 il numero di ingressi irregolari in Europa è diminuito del 67%. Una diminuzione che si accompagna ad una pesante riduzione del rispetto dei diritti sia dei migranti, in mare e in terra, che della popolazione di molti dei Paesi africani coinvolti. Italia e Ue hanno calpestato tanto le Convenzioni internazionali di cui sono firmatarie che i diritti fondamentali, tra cui il diritto alla vita. La chiusura della rotta del Mediterraneo ha portato l’Italia, grazie al contributo europeo, a subappaltare le operazioni di salvataggio alla Guardia costiera libica, pur cosciente, come evidenziato dalla decisione del Consiglio di sicurezza dell’Onu, del profondo legame di questo corpo con le milizie, nonché delle violenze perpetrate sia in mare che sulla terraferma. La campagna denigratoria delle Ong che salvano vite in mare è funzionale alle politiche di esternalizzazione delle frontiere.

      Se i migranti vengono esposti a rischi sempre maggiori non se la passano meglio i cittadini dei Paesi di transito contro i quali vengono adoperati gli “aiuti a casa loro” gentilmente forniti dall’Europa. Una dinamica visibile sia nel Mediterraneo orientale, fra Turchia e Siria (l’Ue è particolarmente affabile di fronte alla deriva dittatoriale di Erdogan suo partner nel blocco di profughi afgani e siriani), sia sulla rotta del Mediterraneo Centrale. Armarsi per diventare il gendarme d’Europa è una scusa per rafforzare l’arsenale nazionale, spesso a discapito dei loro stessi cittadini. Un accordo tra Italia ed Egitto del settembre 2017, nell’ambito del progetto Itepa, prevede l’istituzione di un centro di formazione per alti funzionari di polizia incaricati della gestione delle frontiere e dell’immigrazione dai Paesi africani presso l’Accademia di polizia egiziana. Con buona pace della battaglia per verità e giustizia per Giulio Regeni.

      Ricapitolando: i governi Ue hanno firmato accordi per legittimare i governi di tali Paesi chiudendo un occhio sulle violazioni dei diritti umani e finanziando e formando aguzzini già abbondantemente specializzati nella repressione e negli abusi dei diritti umani.

      Il Sudan è al centro dello scacchiere delle rotte migratorie, luogo di transito obbligato per i migliaia di rifugiati del Corno d’Africa ma anche paese di origine. La collaborazione della Fortezza Europa con Al Bashir «è uno strumento di repressione dei rifugiati obbligati a transitare da quel paese per fuggire, ma anche per i cittadini sudanesi in Europa, a rischio di sistematica e delle popolazioni rimaste nel paese che, con il ruolo rafforzato del dittatore sudanese, rischiano un ulteriore aumento della repressione». Un attivista incontrato durante la missione effettuata da Arci a Khartoum nel dicembre del 2016 spiega: «Non ci sarà mai giustizia per il Darfour fino a quando i vostri Stati considereranno Al Bashir un interlocutore credibile per il controllo dei migranti invece di chiudere ogni dialogo con lui. Per Al Bashir l’esternalizzazione delle frontiere è un modo per far vacillare l’embargo economico e politico imposto dopo i molteplici mandati di arresto emessi dalla Corte penale internazionale per crimini di guerra e contro l’umanità.

      Nel 2016 il dittatore sudanese ha dispiegato una nuova forza paramilitare – i Rapid support forces (Rsf) – alla frontiera nord con la Libia per il controllo dei migranti in uscita. Tra le fila dei RSF ci sono molti capi della milizia Jan Jaweed, tra le forze che più si sono sporcate le mani di sangue per l’eccidio nel Darfour e ora riciclati dallo stesso Al Bashir. Dalla fine del 2017 è stato annunciato il dispiegamento dei RSF anche nella regione di Kassala, nella zona di confine con l’Eritrea. «Di fatto la presenza di questi miliziani non fa altro che aumentare il numero d’interlocutori a cui i migranti sono obbligati a pagare tangenti e le violenze che sono costretti a subire». Refugees Deeply denuncia come personaggi chiave del regime sono i principali complici del traffico di migranti. Coloro che fingono davanti ai funzionari europei di controllare le frontiere sono di fatto coloro che gestiscono il passaggio. Una formula che l’Europa già conosceva all’epoca di Gheddafi che chiudeva e apriva le frontiere libiche «lucrando sulla vita di chi cercava di trovare rifugio, in nome della collaborazione con la UE». A Khartoum il clima di terrore che vivono i rifugiati eritrei è palpabile, vivono nascosti per evitare di essere arrestatie sanzionati o dalla polizia “dell’ordine pubblico” (di matrice islamica) che in tribunali speciali giudica comportamenti considerati illegali, o per aver violato il Sudan’s Passport and Immigration Act per cui incombono multe fino a360$. Il contributo europeo in Sudan per il controllo della migrazione ammonta a 200 milioni di euro. Nei campi avvengono continue incursioni da parte di sicari del regime di Afewerky o di trafficanti che rapiscono gli eritrei obbligandoli poi a telefonare alla famiglia in Europa, promettendola liberazione solo in cambio di soldi e progetti (come BMM e ROCK) consentono al regime sudanese di aggirare l’embargo di armi.

      Il report è un pozzo di informazioni. Per esempio quella dell’accordo di polizia firmato il 3 agosto del 2016 dal capo della nostra Polizia Gabrielli con il suo omologo sudanese che ha permesso di attuare il charter Torino-Khartoum del 24 agosto carico di sudanesi, molti provenienti dal Darfour, arrestati in retate a Ventimiglia. Le autorità italiane sarebbero rimaste totalmente impunite per questa violazione dei diritti umani se non fosse per l’importante azione di Asgi e Arci che, in collaborazione con i parlamentari europei della GUE, hanno incontrato alcuni dei sudanesi espulsi da Torino portando il loro caso davanti alla Corte Europea dei Diritti dell’Uomo. Le polizie di Francia e Belgio si comportano proprio come quella italiana.

      Il Niger è il principale beneficiario del Fondo Fiduciario Europeo per l’Africa – quasi 200 milioni di progetti finanziati ad oggi a cui si aggiunge la recente promessa di ulteriori 500 milioni nella regione del Sahel – e del nostrano Fondo Africa – 50 milioni di euro in cambio dei quali il Niger si impegna a creare nuove unità specializzare necessarie al controllo dei confini e nuovi posti di frontiera – così come dei fondi allo sviluppo: è ormai la frontiera sud dell’Europa, «il laboratorio più avanzato della politica di esternalizzazione». La criminalizzazione del “traffico illecito dei migranti” sancito nel 2015 obbliga a nascondersi chi tenta di andare verso l’Algeria o la Libia e in alcuni casi di imbarcarsi poi verso Italia e Spagna. I ghetti si spostano sempre più alla periferia della città, le partenze si fanno di notte e alla spicciolata. I costi del viaggio aumentano. Un ex passeur, citato nello studio, dice: «Se prima andare in Libia costava 150mila FCFA e in Algeria 75mila, ora, con l’aumento dei controlli ed il rischio i farsi arrestare, i prezzi sono saliti: 400mila per la Libia e 150mila per l’Algeria». L’Algeria ha risposto con sistematiche e violentissime retate di migranti ed il loro abbandono alla sua frontiera sud senza distinzioni in base allo status dei migranti. Il Teneré, come il Mediterraneo, si sta trasformando in un deserto di morte. Ma come spiega in un’inchiesta Giacomo Zandonini, in Libia, nonostante la criminalizzazione, si è continuato a entrare.

      L’Ue, con il Fondo Fiduciario, ha cercato di proporre delle alternative di riconversione per spingere i passeurs a lasciare l’attività, ma a una cifra che risulta ridicola a fronte dei milioni di FCFA che un passeur poteva guadagnare trasportando uomini e donne nel deserto.

      In Niger, uno dei Paesi più poveri al mondo seppure ricco di materie prime qualiuranio, oro e petrolio, si fronteggiano anche gli interessi italiani contro quelli francesi. Bazoum, ministro dell’interno nigerino sta negando all’Italia l’accesso dei suoi militari nel nord del paese. Annunciata prima come operazione Deserto Rosso, poi rinnegata, la missione militare italiana in Niger è stata infine ripresentata al voto al Parlamento a Camere sciolte nel febbraio 2018, con un budget di 30 milioni di euro per 9 mesi di presenza di 400 uomini nel nord del paese. Riproposta dalla neo ministra Trenta con riferimento ad un eventuale appoggio agli americani che proprio ad Agadez stanno costruendo un enorme base per i droni armati. Lo stop alla presenza armata italiana è probabilmente legata ad una opposizione francese che non cede tanto facilmente la roccaforte di Madama, al confine con la Libia.

      Infine la Tunisia, collaboratore dell’Ue nel ruolo di intercettazione dei migranti partiti dalle coste della vicina Libia e perciò rifornita di mezzi navali. Un contributo del Fondo Africa, istituito nel 2017, per un totale di 12 milioni di euro, è transitato dal MAECI al Dipartimento di Sicurezza del Ministero degli Interni alla voce “Migliorare la gestione delle frontiere e dell’immigrazione, inclusi la lotta al traffico di migranti e le attività di ricerca e soccorso”. La Commissione ha annunciato lo stanziamento di ulteriori 55 milioni di euro in Marocco e Tunisia in un programma che sarà gestito dal Ministero degli Interni Italiano e ICMPD (InternationalCentre for Migration Policy Development). Se la Tunisia dimostra un alto grado di collaborazione nelle attività di monitoraggio delle proprie coste e di identificazione dei suoi cittadini in vista dell’espulsione, sembra però rigettare l’idea di costruzione di punti di sbarco dei migranti partiti dalla Libia sul suo territorio. Asgi, Arci e l’associazione tunisina FTDES, nel maggio 2018, hanno monitorato le procedure di espulsione dei cittadini tunisini dall’aeroporto di Palermo. Numerose le violazioni dei diritti di cui sono stati vittime durante la loro permanenza in Italia, ed in particolare detenzione illegale senza convalida del giudice all’interno di una struttura – l’hotspot – che manca di base giuridica nella legislazione italiana, nonché spesso vittime di trattamenti degradanti. I tunisini lamentano la presenza di sonniferi nel cibo e l’inganno usato per l’espulsione, facendo credere loro che dopo il trasferimento a Palermo sarebbero stati poi liberati. Lo stesso Garante Nazionale dei diritti delle persone detenute o private della libertà personale, a seguito del monitoraggio effettuato sulle operazioni di rimpatrio, esprime viva preoccupazione per la «pratica di non avvisare gli interessati per tempo dell’imminente rimpatrio, e cioè con un anticipo utile a verificare eventuali aggiornamenti della propria posizione giuridica, prepararsi non solo materialmente ma anche psicologicamente alla partenza e avvisare i familiari del proprio ritorno in patria». A nessuno è stato permesso difare richiesta d’asilo in una logica assurda per cui l’Italia considera i tunisini provenienti da un paese sicuro, in contrasto con la convenzione di Ginevra per cui lo studio di ogni caso deve essere fatto sulla base della singola storia personale e non sulla base del paese di origine. Con i polsi bloccati da fascette di plastica, i tunisini sono scortati da due poliziotti ciascuno fino all’aeroporto di Enfidha, più discreto di quello di Tunisi. Spesso picchiati e insultati, vengono poi rilasciati, senza neanche un centesimo in tasca. Molti sono al secondo, terzo viaggio.

      https://left.it/2018/08/07/giochi-pericolosi-delocalizzare-in-africa-le-frontiere-ue

    • Europe Is Making Its Migration Problem Worse. The Dangers of Aiding Autocrats

      Three years after the apex of the European refugee crisis, the European Union’s immigration and refugee policy is still in utter disarray. In July, Greek officials warned that they were unable to cope with the tens of thousands of migrants held on islands in the Aegean Sea. Italy’s new right-wing government has taken to turning rescue ships with hundreds of refugees away from its ports, leaving them adrift in the Mediterranean in search of a friendly harbor. Spain offered to take in one of the ships stuck in limbo, but soon thereafter turned away a second one.

      Behind the scenes, however, European leaders have been working in concert to prevent a new upsurge in arrivals, especially from sub-Saharan Africa. Their strategy: helping would-be migrants before they ever set out for Europe by pumping money and technical aid into the states along Africa’s main migrant corridors. The idea, as an agreement hashed out at a summit in Brussels this June put it, is to generate “substantial socio-economic transformation” so people no longer want to leave for a better life. Yet the EU’s plans ignore the fact that economic development in low-income countries does not reduce migration; it encourages it. Faced with this reality, the EU will increasingly have to rely on payoffs to smugglers, autocratic regimes, and militias to curb the flow of migrants—worsening the instability that has pushed many to leave in the first place.

      https://www.foreignaffairs.com/articles/africa/2018-09-05/europe-making-its-migration-problem-worse?cid=soc-tw-rdr

    • À QUI VA LA FORTUNE DÉPENSÉE POUR LUTTER CONTRE L’IMMIGRATION ?

      La politique migratoire européenne, de plus en plus restrictive, est une aubaine pour de nombreuses sociétés privées. En effet, les Etats européens sous-traitent des pans entiers de la gestion des migrations : surveillance des frontières, construction, entretien, surveillance et gestion de murs et de centres de rétention, délivrance des visas, livraison de repas, etc. Tous les éléments de cette politique coûteuse, inefficace et criminelle, profitent à de grandes entreprises, comme #Bouygues ou #Sodexo, pour ne citer que deux exemples français.

      Les migrations font partie de l’histoire de l’humanité mais les frontières n’ont jamais été aussi fermées qu’aujourd’hui. Les conventions issues des politiques migratoires actuelles ont divisé les migrants en différentes catégories (politiques, économiques, climatiques...) en fonction de la supposée légitimité ou non d’avoir accès au droit d’asile ou à séjourner sur un territoire étranger. « Le migrant économique », qui se déplace pour fuir la misère engendrée par les politiques liées au remboursement de la dette, est la catégorie qui bénéficie du moins de droits et son accès aux territoires extérieurs varie en fonction des besoins de main-d’œuvre ou des politiques de fermetures aux frontières.

      Ainsi, parmi les millions de personnes qui fuient leurs conditions de vie indécentes, celles qui migrent pour des raisons économiques seraient des migrants illégitimes ? Tout comme celles à qui on n’accorde pas le statut de réfugié politique mettant leur vie en péril ? Confrontés à une crise migratoire ou une crise de l’accueil ? Ces flux migratoires liés aux situations économiques sont en grande partie le résultat des politiques d’austérité et d’endettement insoutenables imposés par les Institutions financières internationales et les pays industrialisés du Nord aux pays appauvris du Sud, et par les pays du centre – dont ceux de l’Europe – aux pays de la périphérie. Ces politiques ont eu comme effet d’amplifier le phénomène de la pauvreté, de généraliser la précarité et, par conséquent, des situations d’exils. Les situations qui encouragent l’exode de populations pauvres sont la conséquence d’enjeux géostratégiques liés aux ressources et donc aux richesses, ou sont provoqués par l’hémorragie de capitaux pour honorer le service d’une dette bien souvent entachée d’illégitimité.

      Malmenés par la guerre ou la misère, les candidats à l’exil se retrouvent sur des routes rendues de plus en plus périlleuses par les politiques de gestion de l’immigration irrégulière. En plus d’être extrêmement coûteuses pour les populations qui en supportent les coûts, ces politiques criminalisent les migrants et les forcent à emprunter des voies de plus en plus dangereuses, comme les traversées en mer sur de frêles embarcations et à devoir s’adresser à la mafia des passeurs. Elles sont criminelles, coûteuses et inefficaces. Les murs n’ont jamais résolu de conflits et ne bénéficient qu’aux firmes qui les conçoivent, les construisent et les contrôlent.

      Loin d’adopter une politique d’accueil aux réfugiés conformément au droit international tel que stipulé par la Convention de Genève, les États adoptent des politiques sécuritaires qui bafouent le droit fondamental de liberté de circulation inscrit dans l’article 13 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme |1|. Alors que de nouveaux traités de libre-commerce ne cessent de prôner la libre-circulation des marchandises et des capitaux, les candidats à l’exil font face à des « agences de sécurité » lourdement armées et équipées par les grands industriels qui enfreignent le droit de circulation des laissés-pour-compte. Le fond de la Méditerranée est transformé en véritable fosse commune |2|, les frontières se referment et des murs sont érigés un peu partout sur la planète. Une fois passée la frontière, s’ils ne sont pas déportés vers leur pays d’origine, les migrants s’entassent dans des camps inhumains ou sont enfermés dans des centres de détention |3| qui leur sont dédiés, tels les 260 que l’on compte au sein de l’UE en 2015 |4|. Seule une faible proportion d’entre eux, suivant un fastidieux parcours bureaucratique, parvient à obtenir un droit à l’asile distribué avec parcimonie.

      A quel point les politiques migratoires européennes sont-elles dictées par l’activité de lobbying des entreprises privées de l’armement et de la sécurité ? Avec ces politiques sécuritaires, les migrants sont considérés non plus comme des personnes mais comme des numéros remplissant des quotas arbitraires pour honorer des courbes statistiques irrationnelles satisfaisant bien plus les cours de la Bourse que le bien-être collectif et les valeurs de partage et de solidarité.

      Qu’importent les conditions de travail des employés et les conditions d’accueil des migrants au mépris de leurs droits et de la dignité humaine, de plus en plus d’entreprises privées nationales ou multinationales profitent d’un business en pleine expansion aux dépens de la justice sociale et des budgets de nos États.

      Frontex, une agence européenne coûteuse, puissante, opaque et sans contrôle démocratique

      L’Europe a créé l’espace Schengen en 1985, elle l’a communautarisé en 1997 avec le traité d’Amsterdam. L’objectif annoncé était de créer un espace de « liberté, de sécurité et de justice » au sein de l’Union européenne (UE). Dans les faits, la liberté de circulation au sein de l’Europe a avancé à deux vitesses en fonction des pays et a principalement concerné les marchandises. Au fur-et-à-mesure, l’UE s’est coordonnée pour contrôler ses frontières extérieures en tentant d’appliquer une politique commune et un « soutien » aux pays ayant une frontière extérieure propice à l’entrée de migrants comme la Grèce, l’Espagne ou encore l’Italie. Depuis 2005, L’UE s’est dotée d’un arsenal militaire, l’agence Frontex, pour la gestion de la coopération aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne. Cette agence est la plus financée des agences de l’UE à l’heure où des efforts budgétaires sont imposés dans tous les secteurs.

      Cette agence possède des avions, des hélicoptères, des navires, des unités de radars, des détecteurs de vision nocturne mobiles, des outils aériens, des détecteurs de battement cardiaque... Frontex organise des vols de déportations, des opérations conjointes aux frontières terrestres, maritimes et aériennes |5|, la formation des gardes-frontières, le partage d’informations et de systèmes d’informations notamment via son système EUROSUR, qui a pour objectif la mise en commun de tous les systèmes de surveillance et de détections des pays membres de l’UE, etc. Son budget annuel n’a cessé d’augmenter jusqu’à ce jour : de 19 millions d’euros en 2006, il est passé à 238,7 millions en 2016 ! Les moyens militaires qui lui sont dévolus et son autonomie par rapport aux États membres ne cessent de croître.

      Depuis fin 2015, la tendance vers une ingérence de la Commission européenne dans les États membres s’accentue : La Commission européenne élargit le mandat de Frontex, elle devient « le corps européen de garde-frontières et de garde-côtes ». Cette nouvelle agence peut dorénavant agir dans le processus d’acquisition d’équipement des États membres. Elle a notamment la possibilité d’intervention directe dans un État membre sans son consentement par simple décision de la Commission européenne. Elle a par exemple la possibilité de faire des « opérations de retour conjoint » de sa propre initiative |6|, l’objectif étant de sous-traiter à l’agence le renvoi forcé des personnes indésirables, à moindre coût mais au détriment du respect des droits humains.

      Migreurop et Statewatch, deux ONG qui défendent les droits des migrants, ont dénoncé une zone de flou entourant l’agence Frontex qui ne permet pas de faire respecter les droits humains fondamentaux : une responsabilité diluée entre l’agence et les États, une violation du droit d’asile et un risque de traitement inhumains et dégradants. La priorité du sauvetage en mer, normalement reconnue à Frontex, passe en second plan face au contrôle militarisé. En novembre 2014, l’Italie illustre dramatiquement cette situation en mettant fin à Mare Nostrum, opération de sauvetage de la marine italienne qui a sauvé des dizaines de milliers de vies en mer. L’opération Triton mise en place par Frontex l’a remplacée avec un budget trois fois moindre, une portée géographique plus limitée et surtout avec un changement de perspective orienté sur le renforcement des frontières plutôt que les missions de recherche et sauvetage en mer |7|.

      Plus Frontex est subventionnée, plus elle délègue à des entreprises privées. Via l’argent public qu’elle perçoit, l’agence s’adresse à des entreprises privées pour la surveillance aériennes mais aussi pour la technologie de pointe (drones, appareils de visions nocturnes…). De nombreuses multinationales se retrouvent à assumer les « services » qui étaient auparavant assumés par les États et pour des questions de rentabilité propre au secteur privé, les coûts augmentent. Le contrôle aux frontières est devenu un business florissant.

      Le complexe militaro-industriel de l’immigration irrégulière un business florissant qui grève les caisses des États

      La dangerosité accrue des parcours profite aux passeurs et aux réseaux criminels auxquels les migrants sont obligés de faire appel, alors que ces mêmes politiques de gestion des flux migratoires disent les combattre. Mais, d’autres secteurs d’activité moins médiatisés tirent un avantage financier bien plus important de l’immigration irrégulière, tellement important qu’on peut se demander s’ils ne font pas tout pour l’encourager ! Pour les gestionnaires des centres de détentions pour migrants ; les sociétés qui y assurent la livraison des repas, la sécurité ou le nettoyage ; les entreprises qui fournissent gardes et escortes de celles et ceux que l’on expulse ; les fabricants d’armes et l’industrie aéronautique ; la technologie de pointe pour la surveillance des frontières ou les sous-traitants pour la délivrance des visas, la crise des migrants constitue une véritable aubaine, voire un filon en or.

      Cette proportion non négligeable de services autrefois du ressort exclusif de l’État est maintenant gérée par de grands groupes privés qui – pour des raisons d’image notamment – s’abritent derrière une kyrielle de sous-traitants. Cette privatisation rampante grève encore plus les caisses des pouvoirs publics, favorise l’opacité et dilue les responsabilités en cas d’incident au cours des interventions, mettant les États à l’abri de violations de la loi, pourtant fréquentes |8|.

      Instrumentalisation de l’aide publique au développement

      L’Union européenne utilise les financements de l’#Aide_publique_au_développement (#APD) pour contrôler les flux migratoires, comme avec le #Centre_d’Information_et_de_Gestion_des_Migrations (#CIGEM) inauguré en octobre 2008 à Bamako au Mali par exemple4. Ainsi, le 10e #Fonds_européen_de_développement (#FED) finance, en #Mauritanie, la formation de la police aux frontières. Pour atteindre les objectifs qu’ils se sont eux mêmes fixés (allouer 0,7 % du revenu national brut à l’APD), certains États membres de l’UE comptabilisent dans l’APD des dépenses qui n’en sont clairement pas. Malgré les réticences des États membres à harmoniser leurs politiques migratoires internes, ils arrivent à se coordonner pour leur gestion extérieure.

      « Crise migratoire » ou « crise de l’accueil » ? L’Europe externalise ses frontières

      À la croisée des chemins entre l’Europe et l’Asie, la Turquie et la Grèce sont des pays de transit pour de nombreux migrants et réfugiés faisant face aux conflits chroniques et à l’instabilité politique et économique du Moyen-Orient. Après avoir ouvert ses frontières en 2015, dans un contexte de crise, l’UE se rétracte, dépourvue d’une réflexion à long terme sur sa politique d’accueil.

      Ainsi, sans grande opposition du gouvernement Tsipras, l’UE signe avec le gouvernement turc un accord visant à contrôler et filtrer l’immigration. L’accord qui entre en vigueur le 20 mars 2016, prévoit de renvoyer en Turquie tout nouveau migrant, réfugiés syriens compris, arrivé en Grèce. Et pour chaque Syrien renvoyé, l’UE réinstallera en Europe, un autre Syrien séjournant en territoire turc. On pourrait croire à un vulgaire arrangement comptable, il n’en est rien. Le rapport est clairement déséquilibré. L’UE a spécifié un quota maximum de 72 000 syriens réinstallés alors que plus d’1 millions ont été refoulés du territoire européen. Par ces échanges déshumanisés, l’UE se donne la liberté de choisir ses immigrés en fonction de ses intérêts économiques. En échange, l’UE promet 6 milliards d’euros à la Turquie, dit vouloir relancer les négociations d’adhésion du pays à l’Union et accélère le processus de libéralisation des visas pour les citoyens turcs. De plus, Ankara s’engage à enrayer le flux migratoire vers l’Europe. En conséquence de quoi, l’argent donné sert bien plus à ériger des murs qu’à accueillir. Déjà, béton, barbelés et militaires s’installent à la frontière turco-syrienne pour consolider l’Europe forteresse.

      D’autres accords ont déjà été conclus en ce sens mais aucun n’avait atteint de tels montants, ni ne comportait de tels enjeux. Le fait qu’il soit conclu directement par l’UE marque également le début d’une nouvelle ère. L’institution eurocrate négocie maintenant au nom et en amont de ses États membres, se substituant aux politiques nationales en termes d’affaires étrangères.Avec cet accord, l’UE se targue de respecter le droit international. Mais autant la Déclaration universelle des droits de l’homme que la Convention de Genève sur les réfugiées stipulent qu’une expulsion ne peut se faire que vers un pays considéré comme sûr. Or, on ne peut décemment pas, à la signature de l’accord, considérer la Turquie comme une terre sûre et accueillante pour les migrants. Le président Erdoğan a en effet entamé une purge sans précédent et se révèle encore plus répressif envers ses opposants politiques, depuis qu’il sait l’Europe dépendante et conciliante. Et il ne suffit pas de fustiger le gouvernement turc. Au cœur même de l’Europe, les murs s’érigent et les politiques autoritaires et xénophobes refont surface.
      Privatisation de la « gestion » des migrations

      Une telle gestion de l’immigration grève les recettes des États pour, in fine, bénéficier aux sociétés privées et leurs actionnaires aux dépens de la satisfaction des services publics essentiels aux populations concernées. Le lobbying de ces sociétés s’inscrit dans une surenchère militariste qui profite aux grandes entreprises du secteur. Au lieu d’investir dans des infrastructures d’accueil dignes et dans la gestion des conflits dont les pays industrialisés sont en grande partie responsables, l’orientation politique de nos dirigeants va dans le sens d’un accroissement des budgets liés à la sécurité et aux polices aux frontières.

      Les flux migratoires constituent non seulement une source de revenus pour les passeurs, mais également, dans des proportions bien plus importantes, un juteux business pour les grandes entreprises, qui rappelons-le, s’arrangent pour payer le moins d’impôt sur leurs bénéfices et accroître les dividendes de leurs actionnaires. Le marché de la sécurisation des frontières, estimé à quelques 15 milliards d’euros en 2015, est en pleine croissance et devrait augmenter à plus de 29 milliards d’euros par an en 2022 |9|.

      Dans un contexte de crise migratoire aiguë, de contrôles exacerbés, de détentions et déportations en forte augmentation, une multitude de sociétés privées se sont trouvé un juteux créneau pour amasser des profits.

      Concrètement, de plus en plus de sociétés privées bénéficient de la sous-traitance de la délivrance des visas (un marché entre autres dominé par les entreprises #VFS et #TLS_Contact), et facturent aux administrations publiques la saisie des données personnelles, la prise des empreintes digitales, des photos numérisées... Comme on pouvait s’y attendre, le recours au privé a fait monter les prix des visas et le coût supplémentaire est supporté par les requérants. Mais les demandes introduites pour obtenir visas ou permis de séjour ne sont pas à la portée de tout le monde et beaucoup se retrouvent apatrides ou sans-papiers, indésirables au regard de la loi.

      La gestion des centres de détention pour migrants où sont placés les sans-papiers en attente d’expulsion est, elle aussi, sous-traitée à des entreprises privées. Ce transfert vers la sphère privée renforce le monopole des trois ou quatre multinationales qui, à l’échelle mondiale, se partagent le marché de la détention. Ainsi, près de la moitié des 11 centres de détention pour migrants du Royaume-Uni sont gérés par des groupes privés. Ces entreprises ont tout intérêt à augmenter la durée d’incarcération et font du lobbying en ce sens, non sans résultats. Ainsi, les sociétés de sécurité privées prospèrent à mesure que le nombre de migrants augmente |10|. En outre, l’hébergement d’urgence est devenu un secteur lucratif pour les sociétés privées qui perçoivent des fonds de certains États comme l’Italie, aux dépens d’associations humanitaires qui traditionnellement prennent en charge les réfugiés.

      En Belgique, entre 2008 et 2012, le budget consacré aux rapatriements forcés - frais de renvois, sans même compter les séjours en centre fermé des quelque 8 000 détenus chaque année - est passé de 5,8 millions d’euros à 8,07 millions d’euros |11|.

      La société française Sodexo a vu les détentions de migrants comme une opportunité d’extension de ses activités dans les prisons. L’empire du béton et des médias français Bouygues est chargé de la construction des centres de détention pour migrants dans le cadre de contrats de #partenariats_publics-privés (#PPP) |12| et l’entreprise de nettoyage #Onet y propose ses services. Au Royaume-Uni, des multinationales de la sécurité telles #G4S (anciennement Group 4 Securitor) |13|, Serco ou #Geo, ont pris leur essor grâce au boom des privatisations. Aux États-Unis, #CCA et GEO sont les principales entreprises qui conçoivent, construisent, financent et exploitent les centres de détention et #Sodexho_Marriott est le premier fournisseur de services alimentaire de ces établissements.

      Certaines sociétés en profitent même pour faire travailler leurs détenus en attente de leur expulsion. Ainsi, au centre de Yarl’s Wood géré par l’entreprise #Serco au Royaume-Uni, le service à la cantine ou le nettoyage des locaux est effectué par des femmes détenues contre une rémunération 23 fois moindre que le salaire pratiqué à l’extérieur pour ce type de tâche (50 pence de l’heure en 2011, soit 58 centimes d’euros). Le groupe GEO, qui en 2003 a obtenu la gestion du camp de Guantanamo « offre » à ses occupants aux centres de Harmondsworth près de l’aéroport d’Heathrow et de Dungavel en Écosse, des « opportunités de travail rémunéré » pour des services allant de la peinture au nettoyage |14|. Ces entreprises ne lésinent pas sur l’opportunité d’exploiter une main d’œuvre très bon marché et sans droits.

      L’immigration rapporte plus qu’elle ne coûte

      Les quelques migrants qui finalement parviennent à destination se mettent alors à la recherche d’un emploi et le pays d’accueil profite d’une main-d’œuvre bon marché dont il s’épargne les frais de formation payée par le pays d’origine |15|. Une telle main-d’œuvre, flexible et exploitable à merci, comble un besoin dont les économies des pays industrialisés ne peuvent se passer si facilement.

      Loin de constituer une menace et contrairement à une idée fausse, les migrations ont généralement un impact positif sur les économies des pays d’accueil. Sur un plan purement économique, d’après l’OCDE, un immigré rapporte en moyenne 3 500 euros de rentrées fiscales annuelles au pays qui l’accueille |16|. Les sans-papiers qui travaillent ont des fiches de paies, souvent au nom de tierce personne et cotisent à une couverture sociale dont ils ne peuvent bénéficier.

      En définitive, s’installe le doute quant aux résultats attendus d’une telle stratégie de gestion des flux de déplacements humains. La politique anti-migratoire mise en œuvre tue, l’Europe compte les morts mais continue à dresser ses barricades. Pourtant les migrations ne sont pas un problème, un fléau en tant que tel contre lequel il faut lutter. Les migrations sont la conséquence des conflits, des persécutions, des catastrophes environnementales, des injustices sociales et économiques dans le monde. Et c’est à ces causes-là qu’il faut s’attaquer, si l’on veut mener une politique migratoire réellement juste et humaine.

      https://www.lautrequotidien.fr/articles/lesprofiteurs
      #privatisation #Frontex

    • Border-induced displacement: The ethical and legal implications of distance-creation through externalization

      Introduction: The role of #distance

      The externalization of European border control can be defined as the range of processes whereby European actors and Member States complement policies to control migration across their territorial boundaries with initiatives that realize such control extra-territorially and through other countries and organs rather than their own. The phenomenon has multiple dimensions. The spatial dimension captures the remoteness of the geographical distance that is interposed between the locus of power and the locus of surveillance. But there is also a relational dimension, regarding the multiplicity of actors engaged in the venture through bilateral and multilateral interactions, usually through coercive dynamics of conditional reward, incentive, or penalization. And there are functional and instrumental dimensions too, concerning the cost-effectiveness of distance-creation (in both ethical and legal grounds) vis-à-vis the (unwanted) migrant, who, removed from sight, is no longer considered of concern to the supervising State,[1] and the range of externalizing policy devices at the service of externalising agents in terms of purpose, format, delivery, and ultimate control.[2] European borders thus (re-)emerge as ubiquitous, multi-modal and translational systems of coercion – as an interconnected network of ‘little Guantánamos’.[3] This, in turn, creates a distance, both physically and ethically, that is utilized to shift away concomitant responsibilities.[4]
      Distance, as the next sections will demonstrate, plays a crucial role as a mechanism not only of dispersion of legal duties, blurring the lines of causation and making attribution of wrongful conduct a difficult task, but also as an artefact of oppression and displacement in itself. It does not prevent (unwanted) migration but rather makes it unviable through legally sanctioned, safe channels, diverting it through ever more perilous routes. The immediate effect of this distance that externalization engenders is at least threefold. First, it leads to the disempowerment of migrants, who are left with no options for safe and legal escape, being instead coerced into dangerous courses operated by smugglers. Second, it legitimizes the actors enforcing externalized control on behalf, and for the benefit, of the European Union and its Member States. Repressive forces in third countries gain standing as valid interlocutors for cooperation, as a result; their democratic and human rights credentials becoming secondary, if at all relevant, as the Libyan case illustrates below. Third, legal alternatives, like the relaxation of controls or the creation of safe and regular pathways, are rejected; perceived as an illogical concession to the failure of the externalization project.
      The final outcome, and what constitutes the focus of this contribution, is the ‘border-induced displacement’ effect,[5] resulting from the combination of the processes of extraterritorialisation and externalization taken together. Border-induced displacement is not equivalent to the original reasons forcing people into exile, but rather functions as a second-order type of (re-)displacement, produced precisely via (the violence implicated in) border control. This then leads to forms of ‘engineered regionalism’, that is, politics re-producing displacement in certain areas closest to the origin of flows.[6] ‘Safe third country’ rules and practices are the main vehicle of this development, discernible also within the EU, where the Dublin System has ‘rulified’ an asymmetric allocation of responsibility for asylum claims to peripheral countries situated at the external common frontiers of the Union, like Spain, Italy and Greece.[7] In the case of externalization, border-induced displacement is then imposed upon already-displaced persons by non-European actors implementing the EU’s pre-emptive control agenda, reinforcing prevailing patterns of exploitation and existing hierarchies of exclusion and subordination.
      The ethical and legal consequences of ‘distance-creation’ are what we turn to analyse in the remainder of this article. Section 2 pays attention to the assumptions and ethical and political-economic dimensions behind this strategy, discussing exit control, coercion, and the democratic legitimization of unelected actors enforcing the EU border within third countries. Section 3 investigates the legal impact of externalization and extraterritorialization, centring on the apparent accountability gaps that it generates, contesting the legality of responsibility dispersion mechanisms. The overall conclusion we reach is that the ‘rulification’ of externalization at EU level does not render it ethically and legally tenable under international law. The ‘lawification’ at EU level of practices inconsistent with human rights is insufficient to render them compatible with international legal standards.
      2. Ethical distance-creation: Examining attempts to justify externalization and border-induced displacement

      Although immigration ethics has thrived as a discipline since its late arrival in the 1980s, debates on border control between cosmopolitanism and liberal nationalism have often remained at an ideational level and generally based on liberal democratic foundations,[8] thus overlooking the composite ways through which border control is realized and experienced on the ground. This includes practices of externalization and extra-territorialization. Often, the assumptions guiding ethical debates on border control have reproduced a territorially trapped gaze, circumscribed by methodological nationalism,[9] which, through a set of idealized premises, reduces the complex and transnational dynamics of displacement and border control to a phenomenon of mis-placement between territorially bordered societies.[10] Such reduction is marred by what can be called reactive and regionalist postulations. These view border control, first, as a manifestation of State agency, and, second, as only a response to migration flows. Third, they naturalize the containment of displacement within certain regions, perceiving the phenomenon as geographically and morally distant from Europe.
      But immigration ethics is far from alone in reproducing methodological nationalism and reactive and regionalist conjectures, as these mirror prevailing paradigms about the relationship between displacement and borders.[11] However, it is instructive, nonetheless, to examine European externalization by applying existing ethical debates about the democratic legitimacy, coercion, and rights of border control to the issue of externalization.[12]
      2.1. The democratic legitimacy question

      One fundamental debate has concerned the democratic legitimacy of border control as such. Assuming that freedom and democracy are instrumentally valuable for securing individual autonomy, a principled concern is that the coercive aspects of border control amount to violations of autonomy when they happen without the consent of those exposed to them. In order for border control to be legitimate from a liberal democratic perspective, it would have to be justifiable to non-members – however the demos may initially be defined – through a deliberative process.[13] Yet, proponents of border control might argue that access to asylum procedures can resolve this concern, if asylum applications are seen as granting such deliberative voice to them. Although this debate has only concerned an undifferentiated notion of border control, we can extend it to the politics of externalization, if we imagine proponents to argue that, if externalized control is able to respect individual autonomy, it might also be deemed democratically legitimate.[14] The strength of such an argument will then depend on the meaning and function of externalization.
      European externalization processes occur when European Member States, through bi-, multi- or supranational venues, complement policies of controlling cross-border migration into their territories with pre-emptive initiatives realizing such control extra-territorially and/or through sub-contracting to actors and agencies other than their own.[15] Externalization has been discussed in terms of policy transfer, issue-linkages, and ripple effects,[16] but, crucially, its dynamics apply also to intra-European relations. For many years, the Dublin system has served to transfer the border control burdens of North-Western Member States to South-Eastern ones, causing heated discussions about lacking solidarity,[17] similar to those between European and non-European countries.[18]
      Justifications offered for externalization oscillate between grammars of securitized control and humanitarian care.[19] For instance, the June 2018 proposal by the EU ministers about ‘controlled centres’ and ‘regional disembarkation platforms’, whereto ‘boat migrants’ can be deported, is framed as an innovative idea allowing Member States both to ‘stem illegal migration’ and simultaneously save vulnerable migrants by breaking the ‘business model’ of smugglers and traffickers purportedly in accordance with human rights and the rule of law.[20]
      Yet, the 2018 externalization proposal is not as innovative as it may seem. Between the 1980s and mid-2000s, five very similar – and similarly controversial – externalization proposals were put forth by the British, Danish, Dutch, and German governments and by the European Commission. And they all revolved around externalized centres in Eastern Europe and North Africa whereto EU Member States would send asylum seekers or interdicted ‘boat migrants’. The terminologies varied from ‘regional protection areas’ by the British, ‘processing centres’ by the Danes, ‘reception centres’ by the Dutch, ‘EU reception centres’ by the German, and ‘Regional Protection Programmes’ (RPPs) by the European Commission.[21] All but the RPP proposal focused on administrative deportation from European territory, so that, as put by the Blair government, ‘refoulement should be possible and the notion of an asylum seeker in[land] should die’.[22] By 2005, the German proposal had dropped any talk of extraterritorial asylum processing and moved on to identifying Libya as a promising collaborator for pre-emptive containment.[23] In light of the concurrent dysfunctional intra-European dynamics of the Dublin system, the proposals between 1986 and 2018 illustrate how the externalization logic has long been invoked as a magic remedy to the Dublin ills, always couched in crisis-laden and emergency-driven rhetoric, while also holding out vague promises of protection.
      Externalization can be criticized for co-opting protection in favour of methods of ‘consensual containment’ that re-produce displacement in regions neighbouring the EU.[24] For instance, especially since 2017, Italy and the EU have pursued a policy of transferring search and rescue to the so-called Libyan Coast Guard (LYCG), thereby effectively turning missions into operations of exit control. It is due to their material contribution and close involvement in the internal command-and-control structure of the Libyan forces that the LYCG performed 19,452 pull-backs in 2017.[25] Political discourses on externalization can, however, be seen as arguing that this kind of regionalist engineering creates ‘protection elsewhere’ based on three claims, popular in ethical discussions on border control within liberal national regimes. In the following, we analyse them through standing ethical debates about coercion and prevention, peoples’ rights to enter and exit territories, and democratic legitimacy.
      2.2. Coercion: From ‘protection elsewhere’ to ‘protection nowhere’

      First comes the claim that border control, and thus also its externalized manifestations, is not illegitimately coercive, because it is only preventive. Here, coercion has been referred to as when individuals are forced to do a specific thing, while prevention is taken to mean when they are forced not to do a specific thing.[26] Second comes the aforementioned argument that border control can be legitimate when agreed upon democratically.[27] Third follows the statement of an entry/exit-asymmetry signifying that people’s rights against one State not to prevent them from exiting its territory is held to be morally paramount, but that it does not entail an equally forceful obligation on any other State to let them enter their territory.[28]
      Combining these claims, we then arrive at a ‘protection elsewhere’ argument maintaining that externalization is legitimate, since agreed to by all governments involved, and because it preserves displaced persons’ rights through extraterritorial asylum processing. Even if the policy may block their movement, this argument goes, it only prevents them from entering European territory, while still allowing them to find protection elsewhere, after having exited their own country. The zero-sum game effect that the generalisation of this policy would generate goes unaverted – if all countries did the same there would be ‘protection nowhere’.[29]
      But this argument is categorically flawed. Its definitions of coercion and prevention are problematic and rest upon a disconnect between abstract assumptions about border control guiding liberal nationalistic immigration ethics and the actual reality of displacement and European border surveillance, discounting its concrete effects on the ground. EU externalization practices yield extremely coercive checks amounting to violent regimes of exit control, also contravening the legally-sanctioned right – assumed in debates on immigration ethics – to leave one’s own country.[30] That is, even if one, for the sake of argument, assumes the right to exit to hold more value than that of entry – since at international law one is universally applicable while the other is only opposable to one’s own country[31] – actual externalization practices still violate not just the latter, but also the former.[32] The containment of migrants in Libyan detention structures, for instance, reveals an abusive regime that bars access to asylum. Amnesty International has counted twenty reports from reliable monitors, including UN and EU sources, attesting to this reality.[33] The abject brutality facing displaced persons, contained and circulated through externalization, can only be labelled non-coercive prevention from a Eurocentric, and extremely abstract vantage point. In truth, they cause suffering on such a scale that they may amount to atrocity crimes, according to the ICC Prosecutor,[34] and, as the UN High Commissioner for Human Rights has put it, they constitute ‘an outrage to the conscience of humanity’ – at least as far as the situation in Libya is concerned.[35] Collaborative border infrastructures are endowed with the power to coerce at a distance, with externalization leading to practices of ‘remote control’ that extraterritorially negate access to the European asylum systems to those (theoretically) entitled to international protection,[36] literally ‘trapping’ migrants in a constant ‘cycle of abuse’.[37]
      Nevertheless, even if the ethical ‘protection elsewhere’ argument must be rejected as an invalid justification for current European externalization policies the reasons for it are instructive. Seeing how externalization produces highly coercive collaborative regimes of exit control makes clear the problematic ramifications of the reactive and regionalist assumptions on which it rests. Conventional views on international relations and forced migration see the displacement to which borders respond as induced by conflicts or developmental or environmental factors.[38] Yet, while attention to the causes of displacement is important, this model embraces borders as only reactive to – rather than also constitutive of – displacement. But this is wrong. A range of border practices and infrastructures, performed at or beyond the physical frontiers of the EU, such as interdiction, detention, and deportation, do not just react to, but also in themselves cause displacement, by diverting flows towards increasingly dangerous routes and by multiplying death ratios at sea and at border zones.[39] This ‘border-induced displacement’, therefore, challenges the regionalist and reactive premise that the production of forced migration is primarily a problem created outside European territory and agency and contests the structural incorporation of (foreseeably lethal) coercion as a legitimate mechanism of border control.
      EU-Libyan relations, since the 2000s, illustrate how externalization has built the infrastructures enabling this kind of coercive re-displacement. This problematizes prevailing assumptions still dominating immigration ethics and politics, namely that the agency of border control consists of States’ discretion over movement across their territorial borders. Externalization underscores the need to consider more composite notions of agency – and thus responsibility – decoupled from national territories, and spanning several governments, organisations as well as non-state actors.
      The decades-long European-Libyan collaboration on border control is a case in point. After the European Commission decided to lift its arms embargo against Libya in 2004, two ‘technical missions’ followed. The first, in 2004, was meant to ‘identify concrete measures for possible balanced EU-Libyan cooperation particularly on illegal immigration’ and the second, in 2007, to develop ‘an operational and technical partnership’ for extraterritorial border control.[40] The case of Libya is but one example of how European externalization policies have facilitated the transformation of European border control into a flourishing market of violent deterrence and containment,[41] with little to do with a rights-based protection paradigm, and also how third countries’ control apparatuses have become a lucrative export venture for the arms-, security-, and IT-industries of the EU Member States.[42]
      2.3. Trading in rights for border control

      Companies like Spanish Indra, British BAE Systems, Italian Leonardo, French Thales and Ocea, Dutch Damen, German Rheinmetall and Airbus all compete for contracts to expand the capacity for surveillance and control of not just Libya, but also other Eastern European, North African and Middle Eastern countries collaborating on EU externalization. In 2012, an industrial consulting actor valued the global border industry at €25.8 billion, projecting an increase to €56 billion by 2022.[43] And European sales of patrol boats, jeeps, planes, drones, satellites, helicopters, radar systems and whole surveillance mechanisms for border control purposes were part of the EU export licenses worth €82 billion to the Middle East and North Africa between 2005–2014.[44] This political economy of externalization also applies to the industries of EU partner countries. For instance, in 2016, the EU channelled more than €83 million to contracts with Turkish Aselsan and Otokar to provide heavily armoured vehicles placed, respectively, at the Greek-Turkish border and the newly constructed 911 kilometre border-wall between Turkey and Syria.[45]
      The dynamics reshaping third-country border infrastructures elucidate how borders can function as engines of, rather than just responses to, displacement. This means that arguments for externalization appealing to democratic legitimacy face more problems than merely the barring of access to asylum procedures: First, because when EU Member States use their political-economic leverage to make externalization deals with non-EU countries, they are effectively asking them to replace their own public interest with the EU preference of avoiding asylum seeker flows towards the Member States. Second, because several examples, like the EU collaboration with Libyan actors, including militias and former traffickers, as further discussed in the next section, illustrate how the EU’s externalization partners very often lack democratic legitimacy.[46] EU border externalization entrenches forms of undemocratic governance in third countries, empowering undemocratic actors, transforming their relative weight within domestic structures, and weakening democratic channels of scrutiny, accountability, and power control. Externalization thereby risks creating a vicious cycle, where the influx of arms and funds to those actors willing to enact the European containment agenda grants them political validity, which is then used to undermine not only migrant rights, but also to repress domestic opposition and dissidence and thus destabilize internal democratisation processes. The short-term European goal of preventing asylum seeker flows thereby risks compromising the stated long-term goal of tackling the root causes of displacement,[47] which is sacrificed in the altar of externalised ‘integrated border management’.[48]
      3. Legal distance-creation: The juridical implications of externalization and border-induced displacement

      Externalization has not only been encapsulated in political and policy arguments and practices, but has also been embedded in law through the ‘protection elsewhere’ model. The ‘protection elsewhere’ model ultimately rests on the assumption that refugees and migrants are best served ‘at home’, whether it be in their countries of origin or in the neighbouring region (but away from the EU at any rate). ‘Onward movements’ defy this logic and are thus seriously penalized. Responsibility for reception and asylum has accordingly been delegated (or redirected) to countries proximate to the source of flows, via targeted rules on ‘safe third countries’ and readmission agreements that legalise the practice. But, as stated above, this (re-)allocation of protection duties to peripheral States is also part and parcel of the Common European Asylum System within the EU. The Dublin Regulation enshrines and ‘rulifies’ this vision for the Member States, allowing non-external border countries to deflect responsibility in a legal manner.
      Against this background, EU countries feel legitimized to claim their own irresponsibility vis-à-vis non-Member States,[49] projecting the model onto their external relations and imposing compliance with EU control rules as a matter of course. Fatalities at sea and elsewhere are then presented as the result of disorder and illegality; something avoidable if only (EU) rules were observed and effectively enforced by non-EU partners. The structural conditions imposed by the externalization apparatus, and the injustice that ensues, are usually disregarded or downplayed as unintended collateral damage. The fact that illegality is the only way out of a situation of want or persecution, and that smuggling is the only remaining vehicle to reach safety, is routinely silenced. It is the smugglers who profit of the precarious situation of ‘boat migrants’ – the argument goes. So, the eradication of smuggling and a return to (EU) law and order is portrayed as the solution. The option to relax border control rules and adapt them to the imperatives of human dignity, decriminalising the irregular movement of forced migrants, is not even contemplated. That would be perceived as an illogical concession; a descent into chaos and the negation of the rule of (EU) law. This EU-centric conception of the law is what sustains the externalization edifice and nurtures the collaboration with third countries.
      At the legal-strategic level, externalization politics are accompanied by at least two degrees of ‘irresponsibilitization’, enshrined in, and sanctioned by, EU law: responsibility diffusion and responsibility denial. ‘Diffusion’ refers to the relational dimension of externalization, to situations of multi-actor alliance where the causation chain and attribution operation become unclear, with different agents and organs of different States contributing to a particular (unlawful) result. By contrast, ‘denial’ captures scenarios of outright disclaiming of responsibility, where this is said to belong to a different actor altogether, according to the (usually EU-based) rules in place (or their self-serving interpretation).
      3.1. Responsibility diffusion

      The creation of physical distance, via exit control, disembarkation platforms, holding sites, or reception camps abroad, contributes to ‘irresponsibilitization’ through diffusion. None of the proposals put forth so far clarifies exactly who should be considered responsible for those intercepted in, and repatriated to, Libya or any alternative location hosting the centres. The overall supposition appears to be that EU Member States would ultimately escape the task.[50] But there is some residual notion that European countries could not completely ‘circumvent’ their obligations[51] – albeit without elaboration, even the Legal Service of the European Parliament concedes that migrants sent to disembarkation platforms located outside the territory of the Member States ‘should benefit from the guarantees provided for in the 1951 Geneva Convention […] and in the European Convention of Human Rights’, including the principle of non-refoulement.[52]
      Actually, under international law, ‘no State can avoid responsibility by outsourcing or contracting out its obligations’.[53] Cooperation with third countries does not exonerate EU Member States from their non-refoulement and related duties – both under general customary law and as per the relevant international Conventions.[54] According to the Strasbourg Court, ‘[w]here States establish […] international agreements to pursue cooperation in certain fields of activity’, whatever their legal nature, validity, and intent,[55] ‘there may be implications for the protection of fundamental rights’. With this in mind, it would be ‘incompatible with the purpose and object of the [European Convention of Human Rights][56] if Contracting States were thereby absolved from their responsibility under the Convention in relation to the field of activity covered by such [agreements]’.[57] As a result, ‘[i]n so far as any liability under the Convention is or may be incurred, it is liability incurred by the Contracting State […]’.[58] Despite its cooperation with Libya or any other third country, the independent responsibility of each EU Member State participating in the scheme of externalized migration controls subsists, ‘where the person[s] in question […] risk suffering a flagrant denial of the guarantees and rights secured to [them] under the Convention’.[59]
      Nor would Member States be able to evade responsibility by transferring functions to the UNHCR or the IOM – whatever their support and potential separate liability.[60] ‘Absolving Contracting States completely from their Convention responsibility in the areas covered by such a transfer would [again] be incompatible with the purpose and object of the Convention’, as Strasbourg clarifies. The final effect would be for ‘the guarantees of the Convention [to] be limited or excluded at will thereby depriving it of its peremptory character and undermining the practical and effective nature of its safeguards’,[61] negating the basic premise of the pacta sunt servanda principle.[62] And the same is true in regard to other instruments of international human rights law.
      Even though several actors combine to produce re-displacement, individual responsibility for its effects cannot be deflected. The principle is well established in international law. Article 47 of the ILC Articles on Responsibility of States for International Wrongful Acts (ARSIWA) contemplates precisely the scenario where several States participate in the same internationally wrongful act, stipulating that in such cases ‘the responsibility of each State may be invoked in relation to that act’.[63] Each State retains responsibility and, according to the ILC Commentary, ‘is separately responsible for the conduct attributable to it’. The fact that one or more additional States also contribute to the same act in no way reduces the responsibility of each single country.[64] So, any orders or transfers performed, or orchestrated by, EU Member States will engage their responsibility for any resulting breaches of their international commitments.
      Neither the ‘disembarkation platforms’ proposal, nor any other of the similar initiatives emerged since the 1980s explored above specifies where exactly those repatriated or ‘pulled back’, whether to Libya or other third countries, would be accommodated.[65] It is conceivable that proponents envisage offshore reception centres to be closed, since the ultimate aim is to contain and deter irregular movement.[66] This then entails large-scale, and potentially long-term, detention, in breach of Article 5 ECHR guarantees,[67] which have been recognised to apply extraterritorially, extending to cases of deprivation of liberty abroad.[68] Yet, the border-induced displacement effects of externalization practices, like involuntary retention in international waters, forcible transfer to warships, coercive escorting or imposing of a certain course, constitute restrictions of physical freedom and need to accommodate the legal safeguards of the Convention.[69]
      It is not known whether the ‘disembarkation platforms’ proposal foresees transfers to the country concerned to be automatic. Should that be the case, EU Member States risk incurring direct and indirect violations of the prohibition of collective expulsion and the (non-derogable/non-limitable) protection against refoulement. Regarding the latter, the Strasbourg Court attaches paramount importance to country information contained in reports from independent sources,[70] so that when reliable accounts of the circumstances prevailing in the receiving State make it ‘sufficiently real and probable’ that the general situation entails a ‘real risk’ of ill treatment in the sense of Article 3 ECHR, a refoulement presumption is activated and removal cannot be performed.[71] What is more, on account of the absolute character of Article 3, Contracting Parties must undertake the relevant investigation proprio motu and abstain from actions/omissions that put individuals at risk. As the Court asserted in Hirsi, ‘it [is] for the national authorities, faced with a situation in which human rights [are] systematically violated […] to find out about the treatment to which the applicants would be exposed after their return’.[72] So, the Member States concerned are to comply with their non-refoulement obligations proactively, regardless of whether the persons in question seek protection or specifically alert of the dangers faced upon return. The fact that potential applicants fail to request asylum or to formally oppose their removal does not absolve Contracting Parties of their Convention duties,[73] and especially their positive due diligence obligations.
      This includes the requirement to provide access to adequate procedures.[74] Member States must offer a real opportunity for individuals to submit and defend their claims,[75] including an ‘effective remedy’.[76] This requires that the remedy in question be able to ‘prevent the execution of measures that are contrary to the Convention and whose effects are potentially irreversible’. Therefore, ‘it is inconsistent with Article 13 [ECHR] for such measures to be executed before the national authorities [of the Member State concerned] have examined whether they are compatible with the Convention’.[77] In these cases, appeals must have ‘automatic suspensive effect’.[78] And screening on board interdicting vessels or somewhere else offshore cannot satisfy these requirements.[79] Procedural responsibilities, just like substantive guarantees, cannot be deflected, postponed, or negated. The ultimate guarantors of ECHR safeguards are the Contracting Parties, which must ‘secure to everyone within their jurisdiction the rights and freedoms defined in [the] Convention’.[80]
      Due diligence commands the dual duty to refrain from any conduct that may result in arbitrary violations as well as the obligation to enact laws and policies that effectively protect individuals against abuse. Following the Human Rights Committee’s recent General Comment on the Right to Life, by analogy, State Parties are required to ‘organise all State organs and governance structures through which public authority is exercised in a manner consistent with the need to respect and ensure [human rights]’. This includes a duty of ‘continuous supervision’ in order to ‘prevent, investigate, punish and remedy’ any harm.[81] As a result, actions such as the ‘sale […] of […] weapons’, and presumably other similar law enforcement and border control equipment, must be preceded by a conscientious examination of its foreseeable impact on human rights.[82] As members of the international community and as subjects of customary law, States must take into account
      ‘their responsibility […] to protect lives and to oppose widespread or systematic attacks on [human rights]’[83] – like those sustained by migrants in Libya.[84] And, in particular, States have an obligation under general international law ‘not to aid or assist activities undertaken by other States and non-State actors that violate [human rights]’.[85]

      All these reasons should lead to the rejection of ‘disembarkation platforms’ and similar initiatives as ‘externalization fantasyland’.[86] EU Member States should not invest in a formula that promotes cooperation with human rights perpetrators and impedes the fulfilment of their pre-contracted obligations – such a course would hardly qualify as a good faith implementation of their binding commitments.[87] Instead, domestic systems of territorial protection should be reinforced, including the necessary intra-EU solidarity and responsibility-sharing mechanisms to make them effective.[88] Physical distance-creation, through off-shoring and outsourcing, does not translate into an erasure or diminution of legal duties. EU rules on ‘safe third countries’ and readmission cannot (unilaterally) undo international standards.[89]
      3.2. Responsibility denial

      Besides tools of responsibility deflection, mechanisms of outright denial of obligations are equally challenging. Usually, the capacitation of third countries’ control infrastructures, mimicking the Schengen ‘integrated border management’ system,[90] is framed as unproblematic. The transfer of funds, know-how, and equipment, as in the cases referred to in the previous section, are considered to emanate from a spirit of solidarity with non-EU partners and to be fully in line with the relevant criteria. The ethical distance between the EU or Member State gifting assets, ceding resources, or providing training and any potential human rights violations that may ensue is taken to preclude liability. There is no intent – no dolus specialis – intervening in the operation. Thus, the denial of responsibility on the European side for the atrocities in Libya, the abuses in Turkey, or the fatalities at sea associated with border-induced displacement, commonly recurs.[91]
      Yet, international law paints a more complex picture.[92] If one considers that it is ‘thanks’[93] to Italy, for instance, that the LYCG continues to exist in any functional form in the post-Kaddafi period,[94] an outright denial of responsibility becomes difficult.[95]
      Especially since the signature of the Memorandum of Understanding between Italy and the Libyan Government of National Accord in February 2017,[96] the delivery of training, equipment, and assets (including the four main patrol vessels employed by the LYCG) has intensified. Italy has created a dedicated ‘Africa Fund’, € 2.5 million of which has been allocated to the maintenance of LYCG boats and the training of their crews.[97] The EU, too, has committed € 46 million to prop up Libyan interdiction capacity.[98] It has been calculated that the total combined investment by Italy and the EU will be € 285 million by 2023,[99] with the EU alone providing € 282 million – most of which via programmes administered, coordinated, or supervised by Italy.[100] In addition, an extension of the Mare Sicuro Operation, named NAURAS,[101] was approved by the Italian Parliament in August 2017, consisting of four ships, four helicopters, and 600 servicemen, of which 70 per cent are deployed at sea, with the other 30 per cent stationed in Tripoli harbour. Their key mission, as declared by the Italian Navy itself, is to ‘establish [the] operational condition[s] for LN/LNCG [i.e. Libyan Navy and LYCG] assets and develop C2 [ie command-and-control] capabilities’. Meanwhile, an ‘ITN [ie Italian Navy] naval asset in Tripoli Harbour [is] acting as LNCC [ie Libyan Navy Communication Centre] and logistic assistance/support hub’, thus assuming the function of a floating maritime rescue coordination centre.[102]
      The nature of the LYCG as a proxy for Italian interdiction has furthermore been confirmed by the judge of Catania adjudicating on the related case concerning the rescue ship Open Arms of the NGO Proactiva. In his decision, the judge takes as proven the crucial role played by Italy in leading LYCG operations. The judge goes so far as to affirm that the interventions of Libyan patrol vessels happen ‘under the aegis of the Italian Navy’ and that the coordination of rescue missions is ‘essentially entrusted to the Italian Navy, with its own naval assets and with those provided to the Libyans’.[103] This corroborates the ‘high degree of integration’ between the two,[104] and the ‘effective control’ exercised by Italy over LYCG operations, making ensuing violations attributable to it.[105]
      The subsequent abuse of those pulled back to Tripoli happens despite Italy’s knowledge of the desperate situation facing migrants in Libya, including widespread and systematic torture, rape, inhuman and degrading treatment, and enslavement. The Deputy Minister for Foreign Affairs himself admitted that ‘taking [migrants] back to Libya, at this moment, means taking them back to hell’.[106] Nonetheless, the interdiction by proxy policy of Italy continues.[107] Amnesty International estimates that there are over 10,000 persons currently held in official detention centres in Libya – all of which funded through EU/Italian money. And, virtually all of them have been brought there as a result of their interdiction at sea by the EU/Italian-equipped and -trained LYCG.[108] Consequently, the combination of control exercised – though ‘contactless’[109] – and the knowledge of the circumstances migrants face should be understood to render Italy answerable for the resulting human rights violations, even if the LYCG is used as a surrogate.
      As per Article 8 ARSIWA, ‘[t]he conduct of a person or group of persons [such as the LYCG] shall be considered an act of a State [i.e. Italy in this case]’, when the group in question ‘is in fact acting on the instructions of, or under the direction or control of, that State in carrying out the conduct’. Taking the Italian Navy and the Judge of Catania’s assertions at face value, the LYCG are to be considered ‘auxiliaries’ of the Italian border machinery deployed extraterritorially, ‘instructed to carry out particular [interdiction] missions abroad’. The Italian Navy conducts the specific operations through its NAURAS effectives exercising coordination as well as command-and-control functions, meaning that the (wrongful) conduct of the LYCG shall be considered ‘an integral part of the operations’ aimed at impeding departures across the Central Mediterranean and thus be attributed to Italy.[110] It is the Italian authorities that locate targets, relay maritime coordinates, and equip and mandate the LYCG to proceed to the interdiction of migrant boats.[111] It is Italy that ‘directs’ the operations in a way that ‘does not encompass mere incitement or suggestion but rather connotes actual direction of an operative kind’.[112] Italian intervention is a sine qua non for the ‘pull-backs’ at sea to materialise, which could not be carried out autonomously by the LYCG.[113] Italy exercises ‘such a degree of control […] as to justify treating the [LYCG] as acting on its behalf’.[114]
      Italy’s involvement in Libyan search and rescue (or rather, interdiction) operations, in different ways and throughout time, rather than just an instance of complicity,[115] engaging indirect responsibility, can thus be characterised as a breach entailing direct responsibility, consisting of a ‘composite act’. Article 15 ARSIWA establishes that an international obligation (of non-refoulement, for instance, and of non-arbitrary interference with the right to leave) may indeed be violated via ‘a series of actions or omissions defined in aggregate as wrongful’. The financing or training of the LYCG alone may be harmless and perfectly licit, but, when taken together and alongside the infiltration of the command-and-control chain of the LYCG by the Italian Navy, the whole, in light of the final outcome of pull-backs, becomes an illicit under international law.
      Italian jurisdiction may indeed be engaged not only in relation to action occurring within its territory and in other areas subject to its ‘effective control’, but, as the Human Rights Committee has stated, also regarding conduct ‘having a direct and reasonably foreseeable impact on the right[s] […] of individuals [abroad]’.[116] The obligation to respect and protect human rights extends beyond territorial domain to all persons subject to its jurisdiction, that is, to ‘all persons over whose enjoyment of the right[s] [concerned] it exercises power’, including ‘persons located outside any territory effectively controlled by the State, whose [rights are] nonetheless impacted by its military and other activities’ – the transfer of money, equipment and enforcement capacity thus acquiring a significance of its own as a possible trigger of independent responsibility for wrongful conduct.[117] Not only the aiding and abetting of human rights violations is of relevance, whatever the form the assistance provided to the LYCG may take (whether commercial, financial, political, or logistical), but also actions (or omissions) that impede the effective enjoyment of human rights – counting the right to leave any country, to seek protection from harm, and to non-refoulement – matter too, from a legal perspective.[118] Following the Legal Service of the European Parliament in the context of its viability analysis of ‘disembarkation platforms’, engagement in any formal or informal arrangement with third countries – including Libya – to finance or contribute to the functioning of externalized structures of migration control ‘have to respect the prescriptions of the relevant provisions of international law’[119] – presumably including those under the ECHR, the ICCPR and general customary norms.[120] Failure to do so flouts the obligations concerned. Direct perpetration of an international wrong is not a pre-requisite for legal responsibility. Indirect contraventions – including via proxy – incur liability as well.[121]
      Distance-creation, through the ‘rulification’ of ‘irresponsibility’ in legal texts or self-seeking effectuations, does not do away with international obligations, nor does it legitimize the suffering it provokes. The EU and its Member States must come to recognise the predictable effect and implications of their externalization agenda. And, alongside the UN Special Rapporteur on Torture, acknowledge that, as currently designed, their ‘migration policies can amount to ill-treatment’.[122] Actually, ‘[t]he primary cause for the massive abuse suffered by migrants […] is neither migration itself, nor organised crime […] but the growing tendency of States to base their official migration policies and practices on deterrence, criminalisation and discrimination’.[123] It is this distinct strategy that causes border-induced displacement, breaches human rights obligations and triggers international legal responsibility.[124]
      4. Conclusion: ‘Rulification’ as the co-option of protection

      ‘Rulification’ does not represent a paradigm shift in European politics, but rather an up-scaling of the logic observable also in proposals pursued from the 1980s and onwards and which have led to the integration of the concepts of ‘first country of arrival’, ‘safe third country’ and maritime interdiction within the legal architecture of the common borders and asylum acquis, the primary purpose of which has been the avoidance of asylum seekers on EU territory. It is the abuse and exploitation entrenched within externalization strategies that engenders border-induced displacement in Europe’s border-region. With EU Member States viewing the opening up of legal escape routes as an irrational concession, the side-effects of externalization are exacerbated as the systemic logic of asymmetric, diffused, and denied responsibility for displaced persons is reproduced further and further away from Europe, and closer and closer to the repressive regimes people attempt to escape from.
      The reactionary and regionalist assumptions underpinning externalization arguments and practices tell a securitized tale of displacements constantly generated and managed far removed from European territory and agency. However, distance-creation strategies, whether ethical, spatial, or legal, belong to the category of ‘policies based on deterrence, militarization and extraterritoriality’, denounced by UN Special Rapporteurs and others, ‘which implicitly or explicitly tolerate [and perpetuate] the risk of migrant deaths as part of an effective control of entry’.[125] As the previous sections demonstrate, the structural nature of externalization problematizes traditional assumptions and debates in immigration ethics and politics. It traps migrants in a ‘vicious circle’ of more control, more danger, and more displacement, where they must rely on facilitators to escape life-threatening perils.[126]
      But smuggling and trafficking is the consequence, rather than the cause, of suffering. Suffering is embedded in the externalization system by design through the vehicle of ‘rulification’, which serves to launder the pernicious (and perfectly foreseeable) impact of extra-territorialised/externalised coercion into ‘law-ified’ (and purportedly unintended) side effects. At the same time, the European transfer of equipment and capacity for control outwards also risks undermining processes of accountability and democratic legitimacy in regions bordering Europe. And the ‘rulification’ of border-induced displacement does not make these implications any more palatable. In the words of UN Special Rapporteur Agnès Callamard, it is simply ‘not acceptable’ to deter entry by endangering life.[127] The fallacy of coercion-based protection needs to give way to an ethically grounded and legally sustainable rights-honouring paradigm. This is not to contest the legal existence of borders or their enforcement, but to challenge the legitimacy of mechanisms through which they are presently enacted in a manner incompatible with the most basic requirements of international law.

      http://www.qil-qdi.org/border-induced-displacement-the-ethical-and-legal-implications-of-distance-
      #responsabilité #déni_de_responsabilité #protection

  • Dannemarie : la justice ordonne le retrait immédiat des silhouettes féminines - France 3 Grand Est
    http://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/dannemarie-justice-ordonne-retrait-immediat-silhouettes

    Le tribunal administratif de Strasbourg a rendu sa décision ce mercredi après-midi : la commune haut-rhinoise dispose de huit jours pour retirer les 125 panneaux, dont les 65 silhouettes féminines, installés début juin.

    Par Auberie Perreaut Publié le 09/08/2017 à 17:45 Mis à jour le 11/08/2017 à 10:09


    « Nous sommes ravies ! Les associations féministes se félicitent de cette décision car c’est une avancée effective dans la protection des femmes », a réagit Me Lorraine Questiaux, avocate des Effronté-e-s.


    Le tribunal administratif de Strasbourg a rendu une ordonnance ce mercredi après-midi. La municipalité dispose de huit jours pour retirer les 125 panneaux de ses rues, dont les 65 silhouettes féminines qui ont fait polémique, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

    L’association féministe avait saisi le Tribunal Administratif par référé-liberté pour obtenir le retrait immédiat des panneaux jugés « sexistes », installés en juin par la mairie de Dannemarie dans le cadre de l’"Année de la Femme".

    #La_Fâme #femmes #sexisme #représentation

    • Sexisme dans l’espace public : les silhouettes de Dannemarie devant le Conseil d’Etat - Libération
      http://www.liberation.fr/france/2017/08/29/sexisme-dans-l-espace-public-les-silhouettes-de-dannemarie-devant-le-cons

      Un mouvement, « Touche pas à ma silhouette » (sic), a même été lancé, accompagné d’une pétition. Les panneaux trônent désormais dans les jardins ou sont accrochés aux balcons et aux fenêtres des maisons. Dans un reportage de l’AFP, une habitante raconte en avoir récupéré deux et les avoir exposés dans son jardin « pour soutenir la mairie » et « dénoncer une atteinte » à la liberté d’expression.

      La première adjointe Dominique Stroh, ancienne fleuriste et créatrice des pancartes controversées, a expliqué de son côté avoir cherché des visuels à découper et à peindre sur internet, en tapant les mots-clés « dessin », « silhouette » et « femme ». Pas étonnant qu’elle n’ait trouvé que des résultats stéréotypés, pour les Effrontées : « Du fait de la société machiste où nous vivons, nous ne tombons pas sur les mêmes silhouettes selon si on tape "silhouette femme" (effets de hanche systématiques, sexualisation) ou "silhouette homme" dans la barre d’un moteur de recherche. Il aurait fallu s’en émouvoir, plutôt que de s’en servir ! »

    • Silhouettes de femmes à Dannemarie : le Conseil d’Etat rejette l’atteinte à la dignité
      http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/09/01/silhouettes-de-femmes-a-dannemarie-le-conseil-d-etat-rejette-l-atteinte-a-la

      C’est un revers pour les associations féministes. Le Conseil d’Etat a estimé, vendredi 1er septembre, que l’exposition de silhouettes féminines en contreplaqué dans la commune de Dannemarie, dans le Haut-Rhin, ne portait pas une « atteinte grave » à la dignité humaine, comme le dénonçait le collectif féministe Les Effronté·e·s.

      « Même si les panneaux peuvent être perçus comme véhiculant des stéréotypes dévalorisants pour les femmes, ou, pour quelques-uns d’entre eux, comme témoignant d’un goût douteux voire comme étant inutilement provocateurs, leur installation ne peut être regardée comme portant une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la dignité humaine. »

      Or, il aurait fallu pour la plus haute juridiction administrative constater une telle atteinte pour ordonner le retrait en urgence de l’installation, conformément aux règles de la procédure du « référé-liberté » engagée par le collectif féministe. Quant au principe de l’égalité des femmes et des hommes, également invoqué par Les Effronté·e·s, il ne peut justifier un retrait forcé de l’installation, a précisé le Conseil d’Etat.

      En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/09/01/silhouettes-de-femmes-a-dannemarie-le-conseil-d-etat-rejette-l-atteinte-a-la

    • Dannemarie : comment le fantasme masculin de « la femme s’impose publiquement | « Singulier masculin
      https://singuliermasculin.wordpress.com/2017/09/01/dannemarie-comment-le-fantasme-masculin-de-la-femme-sim

      (Suite du feuilleton ce 1/9, selon le journal Notre Temps :

      « Même si les panneaux peuvent être perçus comme véhiculant des stéréotypes dévalorisants pour les femmes, ou, pour quelques-uns d’entre eux, comme témoignant d’un goût douteux voire comme étant inutilement provocateurs, leur installation ne peut être regardée comme portant une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la dignité humaine », a estimé la plus haute juridiction administrative.

      Or, il lui aurait fallu constater une telle atteinte pour ordonner le retrait en urgence de l’installation, conformément aux règles de la procédure bien particulière du « référé-liberté » engagée par le collectif féministe.

      Le juge de Strasbourg avait porté le principe de l’égalité des femmes et des hommes au rang des « libertés fondamentales », celles qui, comme la liberté d’expression par exemple, méritent que l’on saisisse en urgence la justice administrative.

      Pour le Conseil d’État, c’est aller trop loin : « en l’absence d’intention de discriminer de la part de la commune ou de restriction à une liberté fondamentale, la méconnaissance alléguée de l’égalité entre les hommes et les femmes ne constitue pas une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale . »

      Oui @aude_v pour le conseil d’état, la méconnaissance de l’égalité c’est pas grave, c’est pas une atteinte à la liberté des hommes alors y s’en tamponne.
      J’attends impatiemment l’année de l’homme à Dannemarie quant les rues seront décorée de silhouettes qui font le pendant de celles de 2017 : prostitueurs le futal sur les chevilles et mecs qui glandent devant des boutiques de mode en attendant madame qui fait son shopping.
      Il semble aussi que l’affaire ne sois pas close, là si j’ai compris c’est juste un recours et y a des choses à faire après.

    • Il y a encore du chemin à faire pour la compréhension de l’atteinte à la dignité des femmes, le #déni_de_sexisme subsiste ici à un tel niveau d’énormité que ses tenants sont réellement à considérer comme des personnes profondément diminuées psychiquement.

      Il est toujours explicite de comparer la notion de sexisme avec celle du racisme, imaginez un instant que les silhouettes aient été celles de noirs représentés en situation d’esclavage, on perçoit rapidement que de telles représentations soient impossibles, mais pour les femmes, ce n’est toujours pas le cas.

      L’évidente impossibilité qui empêche de répéter des erreurs et permet d’évoluer ensemble ne semble pas atteindre son objectif quand il s’agit des femmes.

      https://effrontees.wordpress.com/2017/08/24/affaire-dannemarie-devant-le-conseil-detat
      Le maire dans tout son misérable cynisme a demandé aux habitants d’exposer les silhouettes pourrites …

    • Il y a fort à parier que vous n’avez pas entendu parler de ces affaires dans les médias nationaux, hormis un entrefilet sur un site quand l’affaire permet un titre racoleur comme « il tue sa femme à coups de casseroles ». Une simple anecdote. Il faut sortir ces affaires de la case « faits divers ». Un meurtre antisémite, raciste ou homophobe n’est pas un fait divers. Ce qui nous induit en erreur en l’occurrence, c’est qu’il y a une relation particulière entre la victime et l’assassin. Ces hommes ne tuent pas toutes les femmes. Ils tuent les leurs. Mais ils les tuent parce que ce sont des femmes et qu’ils sont des hommes. Autrement dit parce qu’ils croient encore à la possession des unes par les autres. Donc ils refusent à ces femmes leurs droits d’êtres humains libres. En cela, ils rejoignent les crimes de discrimination. Tous disent la supériorité de quelques uns.

      Ce n’est pas de l’actualité régionale, c’est un problème national. Ces affaires devraient donc être relayées dans les médias nationaux. Choisir de ne pas traiter ces féminicides, c’est choisir une vision du monde. C’est dire que les violences faites aux femmes sont un sujet négligeable. Pour que cela devienne le problème de tous, les médias ont également une responsabilité. Ils doivent s’emparer du sujet. Ne plus parler de « mourir sous les coups » mais d’être tuées. C’est dans cette optique que le terme « féminicide » est de plus en plus employé. Pénalement, le fait de tuer sa conjointe est déjà une circonstance aggravante depuis 1994. En fait, l’introduction de ce terme sert avant tout à faire prendre conscience de la violence structurelle dont les femmes sont victimes. Parce que c’est une certaine vision de la femme, une vision machiste et misogyne qui est derrière ces gestes. Pour combattre une violence, il faut pouvoir la nommer.

    • En réalité, ce n’est pas une gifle ou un coup de pied qui aurait malencontreusement entraîné la mort. L’homicide involontaire est l’exception, il représente moins de 10% des cas. Bien sûr, avant la mise à mort, il y a souvent eu des violences mais ces femmes ne meurent pas de coups. Elles meurent parce qu’on a décidé de les tuer. Dans plus de 90% des cas, il y a volonté de tuer. Pénalement ce sont des meurtres - parfois même avec préméditation, ce qu’englobe l’assassinat. En France en 2017, on tue sa femme en général de deux façons : on la plante au couteau ou on lui tire dessus avec une arme à feu, souvent un fusil de chasse.

      Jean-Pierre, 58 ans, a choisi un autre mode : il a attendu que son ex compagne, Nicole, 47 ans, sorte d’une supérette et il lui a foncé dessus en voiture. Le mari de Doris, 60 ans, a choisi la batte de base-ball. Après 33 ans de mariage, il la soupçonnait d’infidélité. C’était en janvier dernier. En mars, Frédéric, 86 ans, atteint d’Alzheimer a tué Marcelle, 90 ans, à coups de casserole. Il a déclaré « elle a ce qu’elle mérite. Je l’ai fracassée ». Le 12 juin dernier, c’était l’anniversaire d’Émilie, 34 ans. Son mari dont elle venait de se séparer, Guillaume, 37 ans, mécanicien, lui a ligoté les chevilles et les poignets sur les rails d’un TGV Paris/Nantes. D’après l’autopsie, elle était vivante au moment du passage du train. En mai, avec le calvaire de Marion, 41 ans, j’ai découvert la qualification légale de « viol ayant entraîné la mort ».

    • @dudh48 c’est faux, il y a un très grand nombre de personnes impliquées dans l’éducation de chaque enfant. Sans compter que les femmes elles-mêmes sont éduquées depuis l’enfance à subir ce genre de choses et à trouver ça « normal ». Donc bah oui clairement, la solution c’est des changements radicaux dans l’éducation de tous et toutes (et surtout des garçons).

      On sait par l’anthropologie qu’il existe et a existé d’autres sociétés sans culture du viol et moins voire pas patriarcales. Sans dire qu’il n’y a pas d’autres soucis mais juste déjà ça montre que ça existe, et que donc ce n’est pas un truc inhérent, obligatoire.

      Si tu es un homme, tu peux commencer par ne pas être comme ça, et à éduquer les jeunes garçons de ton entourage à ne pas être comme ça, même si toi tu n’as pas d’enfants (les neveux, les enfants des amis, etc).

    • @philippe_de_jonckheere , je ne trouve rien de mieux à dire que de remettre ici la citation que tu as choisie : Choisir de ne pas traiter ces féminicides, c’est choisir une vision du monde.
      Et si le constat de @dudh48 :

      ce sont majoritairement les femmes qui s’occupent de l’éducation de leurs bourreaux.

      est globalement vrai, il faut aider à une prise de conscience orientée vers l’éducation des garçons, venant des adultes éclairés, hommes ou femmes.

    • L’homme (avec un petit h et un pénis de taille variable) est une pourriture : c’est lui qui vole, viole, tape, tue, refuse de laver ses slips et préférerait crever plutôt que de vivre dans un monde où des bonniches ont le droit de devenir PDG. Voici la « version officielle » de notre histoire. L’histoire humaine est, dit-on, l’histoire d’une domination masculine, faite par et pour des hommes prêts à tout pour tenir les faibles femmes à leur botte.
      Sauf que cette histoire est fausse. Du moins en partie.

      Je me demande quelle partie de sa phrase d’intro est fausse du coup ...

    • @rastapopoulos

      la solution c’est des changements radicaux dans l’éducation de tous et toutes (et surtout des garçons).

      Il me semble que surtout les garçons passe à côté d’un truc que je combats dans l’éducation de mes trois filles (disons encore deux en activité) : la répartition genrée des tâches par exemple (je déteste le bricolage mais je manque rarement une occasion d’impliquer mes filles dans l’apprentissage du maniement de certains outils, notamment mécaniques, et il est consternant de voir comment elles sont résistantes à cela, de peur d’être différentes de leurs camarades. De même il me semble qu’un bon éveil à des mécanismes plus intellectuels cette fois-ci qui vise à instruire tout ce petite monde (filles et garçons, indifféremment) à propos des impensés sexistes n’est lui pas non plus réservé aux seuls garçons.

      Enfin j’ajoute que la lecture de Beauté Fatale de @mona est obligatoire pour les enfants des deux sexes.

      Mais je comprends ce que tu veux dire par surtout les garçons

    • On parle de mise à mort des femmes par les hommes qui sont leurs conjoint et pas de trucs pseudo métaphysiques sur le sens de la vie et les gros malheurs des looser au masculin ! Je t’en ficherait des accidents de la vie et de recyclage quant on parle de mecs qui butent les femmes. C’est quoi le rapport ?

      @dudh48 quant tu dit ceci

      ce sont majoritairement les femmes qui s’occupent de l’éducation de leurs bourreaux.

      En fait tu dit que l’oppression des femmes c’est de la faute des femmes puisque ce sont elles qui éduquent et pas celle des hommes. Les pauvres choux si c’est des bitards criminels c’est la faute de leurs mamans... Ca saoul ce stéréotype c’est hyper macho et c’est franchement mal venu ici alors qu’on parle de FEMINICIDE. L’éducation des enfants est faite par toute la société et à ne s’arrête pas a l’enfance. Par exemple pour toi @dudh48 il est encor temps d’apprendre que tes considerations hyper généralistes et vagues sur la vie, la mort au masculin, sont tres sexistes et n’ont rien a faire ici.

      C’est irritant de voire que vous parlez pas de la violence masculine et des femmes assassinées, la discutions deviens un flatte-scrotum pour savoir qui est le bon pere qui éduque ces filles à ne pas se faire tuer par leurs amoureux ou de la branlette de phallosophe sur les looser ces pauvres couilles accidentées et les méchantes mères responsables du sexisme...

      L’éducation des hommes à la violence et au mepris des femmes elles vien aussi de vous, ici, qui au lieu de réfléchir a la responsabilité des hommes dans l’exécution des femmes, vous servez du sujet pour vous faire moussé l’ego.

    • Je rebondis sur les propos de @rastapopoulos qui disait que :

      la solution c’est des changements radicaux dans l’éducation de tous et toutes (et surtout des garçons).

      et je me rappelle qu’en 2014, il y eut des initiatives institutionnelles prise par certain-es enseignant-es avec l’ABC de l’égalité. Mais par manque de courage politique, ladite institution a préféré céder au chantage du lobby réactionnaire de la « Marche pour tous ».
      En matière d’éducation et de changement des mentalités, rien n’est jamais acquis et tout est à construire ou reconstruire. Ne pas baisser les bras ni baisser sa garde.

      Ne plus parler de « mourir sous les coups » mais d’être tuées. C’est dans cette optique que le terme « féminicide » est de plus en plus employé. Pénalement, le fait de tuer sa conjointe est déjà une circonstance aggravante depuis 1994. En fait, l’introduction de ce terme sert avant tout à faire prendre conscience de la violence structurelle dont les femmes sont victimes. Parce que c’est une certaine vision de la femme, une vision machiste et misogyne qui est derrière ces gestes. Pour combattre une violence, il faut pouvoir la nommer

      Et c’est bien sur cette démarche qu’on doit se mobiliser.

    • @mad_meg je suis tout à fait d’accord et je ne comprends pas trop pourquoi ça s’est mis à parler d’égalité des tâches etc. Dans mon premier message je parlais bien d’éducation autour des problèmes de violence, d’où mon « surtout pour les garçons ». Car pour l’égalité là oui il faut éduquer tous les enfants à tout faire, mais pour la violence, c’est surtout ceux (masculin car majoritaire, ya toujours des exceptions blabla on s’en fout) qui sont ou seront responsables des violences qu’il faut éduquer à ne pas l’être. Même si on peut apprendre aux petites filles à manger plus, être plus musclées et savoir se défendre, ce n’est qu’une mauvaise conséquence, ce n’est pas en priorité aux victimes ou futures victimes à apprendre à éviter la violence, c’est aux coupables ou futurs coupables d’apprendre à ne pas être violents comme ça.

      Il n’y a rien de naturel, c’est un processus social, que les garçons apprennent depuis tout petit (cf la remarque anthropologique). Non l’homme n’est pas un loup pour l’homme ni pour la femme « de tout temps et en tout lieu », cela dépend des sociétés, donc des éducations.

      À dire que c’est « naturel », bah forcément alors « c’est comme ça », on ne peut rien faire et on ne fait rien, comme un gros nul, et on suit les préceptes de Dame Nature. C’est marrant comme les gens suivent « la nature » quand ça les arrange et pour d’autres sujets là disent qu’on est des humains, qu’on est différent, etc.

    • @aude_v Peggy SASTRE écrit pour Slate, L’Obs et des livres. J’étoile rarement les billets issus de ces publications, voir jamais.
      Le paragraphe de présentation, à la suite de celui relevé par @nicolasm :

      Si les hommes ont le pouvoir, c’est parce que les femmes l’ont bien voulu, tout au long des 99,98 % de l’histoire de notre espèce. Et ces millions d’années qui nous ont vus devenir lentement ce que nous sommes, elles les ont passés à frétiller du derche au moindre indice de force, de puissance et de brutalité. Pourquoi ? Parce lorsque votre organisme renferme des ovaires et un utérus, que votre reproduction vous fait courir un danger vital aussi extrême qu’indispensable, et que vous vivez dans un environnement hostile, de tels attributs sont encore les meilleurs pour vous protéger, vous et le fruit de vos entrailles, et vous aider à transmettre vos gènes aux générations suivantes.

      Ce docteur en philosophie des sciences, nous éclaire d’une lumière radicalement nouvelle dans notre paysage intellectuel, si les 250 pages de son bouquin sont à l’avenant de cette présentation, il doit briller aussi fort que les périodiques qui la publie.
      Salutaire coup de gueule de @mad_meg

      Ce n’est pas parce qu’on vit en 2017 que Saint-Macron, le Jésus français va sauver le monde. Il n’est que Jésus et c’est un fils très obéissant envers Dieu le père (François Hollande) et le Saint-Esprit (la mafia de la finance et du grand patronat). La sainte trinité veut juste restaurer l’esclavage. Que les esclaves soit homme ou femme lui importe peu, tant qu’ils travaillent et ferment leur gueule.

      @dudh48 tu as oublié de placer « le fruit de nos entrailles » dans tes #élucubrations.

    • @rastapopoulos

      je ne comprends pas trop pourquoi ça s’est mis à parler d’égalité des tâches etc. Dans mon premier message je parlais bien d’éducation autour des problèmes de violence, d’où mon « surtout pour les garçons ».

      Oui, tu as raison, la présence dans mon esprit de deux conversations, celle-ci et une autre à la maison, m’a fait faire une sortie de route. Mille pardons pour ma contribution au désordre de cette discussion qui a effectivement le défaut du désordre et de partir dans des directions pas toutes fécondes.

    • @rastapopoulos c’etait pas à toi que je pensait en fait, mon coup de gueule etait pour @dudh48 et @philippe_de_jonckheere qui s’est reconnu.

      Je suis d’accord avec le fait d’éduquer spécifiquement les garçons et les hommes à la réduction de leur violence, de leur egoisme, de leur autosatisfaction, de leur egocentrisme. Je pense qu’il faut que les hommes et les garçons perdent de leur assurance, de leur confiance en eux en tant qu’hommes. Il faut que les hommes aient peur de dire des biteries aux femmes ou a propos des femmes et tout particulièrement avec les féministes vu que les hommes se sentent toujours pertinent pour nous faire la leçon comme ici sur la vie, la mort, la loose, la place des femmes dans la responsabilité du sexisme...
      Alors petit conseil en particulier @dudh48 qui est nouveau et qui connais pas encore les féministes d’ici et qui connais pas nom plus mon grand dévouement dans le pétage de bonbons. Le rôle des hommes vis à vis du sexisme c’est de s’adresser aux autres hommes (et pas pour s’envoyer des lauriers !) et de pointé les responsabilité des hommes (et aussi les votres comme ici ce mansplanning que tu nous inflige @dudh48 ), pas de faire la leçon aux femmes ou de chercher les responsabilité des femmes.
      Il y a plein de tags très bien achalandés que je te conseil de fouillé @dudh48 si le sujet des violences faites aux femmes t’intéresse. #domination_masculine #culture_du_viol #fraternité #mégèrisme #violences_masculine #condition_masculine #mâle-alphisme #male_gaze #male_entitlment #sexisme #misogynie et #féminisme #historicisation #effacement_des_femmes #féminicide #virilo-carnisme ... et ne rate pas non plus #alliés #pro_féministes et toutes les discutions sur la place des hommes dans le féminisme qui sont nombreuses sur @seenthis
      Bonne lecture

    • @dudh48 je ne te connais pas. T’as vécu ! t’as donné ta part et tu es épuisé ! pauvre chaton ! ici t’es pas sur twitter ou snapchat ou que sais-je encore ? je ne sentais pas ce fil dès le départ et là tu dérapes mon gars ! tu n’insultes pas @mad_meg de cette façon et personne d’autre d’ailleurs ; de quel droit ?
      Il y a 3 heures, « la grande prêtresse » , te donnais des pistes à suivre et bon nombre de tags . Ta réponse est impulsive et complètement déplacé. Je suis au regret de te dire que je ne te suit plus sur @seenthis et que je suis à 2 doigts de te bloquer, connard. Tu seras le second avec @francoiscarmignola1 une enclume celui-la !
      non seulement tu es parano mais tu m’as tout l’air d’un tocard de première ! m’étonnes pas que tu milites pour la france insoumise.

    • Voila un bel exemple de réaction d’un certains type d’homme quand des femmes, feministes de surcroît, osent leur dire qu’ils racontent n’importe quoi : insultes, victimisation, détournement du sujet, rabaissement de l’interlocutrice... Le tout en trente petites lignes.
      Joli combo @dudh48 !

    • merde ! ton cas est plus grave que je ne pensais @dudh48
      tu as raté l’occasion d’avoir une discussion constructive avec @mad_meg je ne suis pas son disciple mais j’ai échangé précédemment avec elle, entre autre, sur le féminisme et j’en suis toujours ressorti enrichi.
      Adieu @dud48

    • Grande prêtresse virago en chasse c’est sympas. Je brûlerait quelques frivolitées sur l’autel d’Artemis en pensent à toi @dudh48

      Pour revenir à la discutions d’origine, réduire l’éducation aux seuls enfants je trouve cela un peu réducteur et assez pratique pour que les adultes ne s’éduquent pas. Changer de mentalité ca se fait tout au long de la vie et je désespère pas de voire les pépés et mémés apprendre des choses. Par exemple avec rezo.net puis seenthis je me suis beaucoup éduqué et j’imagine que je ne suis pas là seule et j’espère que ca va continuer et que même @dudh48 y arrivera.
      Le truc aussi pour les enfants et la réduction de la question de l’éducation aux enfants, c’est que perso je suis bientôt morte, c’est à dire dans 20-30ans si je suis optimiste. Et j’ai pas d’enfants et je porte pas spécialement d’espoir en l’humanité au prétexte qu’elle soit jeune. Du coup si je doit subir sans rien pouvoir y changer le sexisme des adultes, sous le prétexte fumeux qu’illes seraient immunisé·e·s à l’éducation ca me déprime trop.

      Par rapport à la violence masculine, la question de l’education me fait pensé aussi au travail d’éducation des hommes violents, on fait ca aux usa et en espagne. Je reviens si je trouve de la documentation là dessus. Ca me semble bien plus utile que l’incarceration avec d’autre machos dans un univers hypermacho du concour de bite permanant qu’est la prison. Et ces programmes ne sont envisageables que si on pense que l’éducation c’est pas que pour les mouflets et leurs mômans.
      Sinon par rapport à la violence, ca semble beaucoup être des exécution pour cause de rupture. Ces hommes refusent toute autonomie à la femme qu’ils disaient aimer. Au passage j’ai ce texte qui peu donner des pistes intéressantes
      https://www.cairn.info/revue-nouvelles-questions-feministes-2002-2-page-8.htm

      ps- Merci à mes fidèl·l·es sectatrices et sectateurs pour votre soutiens ! ;P

    • Bon sang, ça fait même sortir Mona de sa réserve... si longue ! :-D

      Soutien à tou•te•s, l’éducation du troll sera longue ;-) A la première réponse un peu ferme, il n’hésite pas à montrer sa virilité et à insulter la femme qui lui tient tête... quelle sera la suite ? En fait, ce n’est même pas un troll, c’est peut être juste génétique ; un homme reste un homme, tout ça... ? :-D

    • Je prône la destruction de l’humanité puisqu’elle s’avère être une espèce nuisible.

      quelle confusion @dudh48 après une telle déclaration je doute que tu aies beaucoup d’interlocuteurs.ices ici ! ceci n’est pas de l’insoumission mais du nihilisme même si certains adeptes de cette doctrine me semble plus avertis que toi, triste sire !

    • Merci @mad_meg et merci à tout·es les participant·es de #seenthis qui ensemble élaborent régulièrement depuis plusieurs années un discours politique vivant qui a fait avancer ma pensée sur le féminisme et mon rapport au monde en temps que femme. La pertinence de nos confrontations face à la difficile capacité de chacun·e a accepter les critiques ou à faire tomber nos propres barrières éducatives sont toujours d’une grande richesse.
      Déconstruire sans cesse les discours essentialistes, racistes et dominateurs reste une gageure face à l’arrogance du conservatisme.
      Cela permet de se sentir moins seul·e et de s’appuyer sur cette belle pensée commune lorsqu’il faut rapidement reconnaitre et agir contre cette oppression.

    • Si vous saviez comme j’aime les femmes, comme je tremble quand l’une d’elles souffre, comme j’ai envie de l’étreindre entre mes bras, comme je voudrais avoir des seins pour qu’elle puisse y reposer sa tête et me confier son chagrin.

      Les tueurs de femmes peuvent tenir le même discours que toi. Les pères incestueux aussi ainsi que les violeurs. Ils disent tuer par amour. L’amour des hommes c’est ce qui tue et viol les filles et les femmes en masse, c’est ce dont parle l’article. Venir laver tes propos misogynes et ton comportement sexiste dans ton prétendu l’amourrr de nos nibards et la jouissance que nos chagrins te procure ca ne fonctionne pas.

      Sur le sujet j’ai trouvé ceci : Au nom de l’amour : les violences dans le couple
      https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2007-8-page-34.htm

      Il y avait un texte super sur le blog « Comment ne pas être féministe ? » mais le blog a disparu #tristesse

      @aude_v @touti et tou·te·s merci pour vos messages de soutiens. Afin de pouvoir poursuivre sur le sujet des violences masculines dans le couple j’ai ouvert une nouvelle discussion ; https://seenthis.net/messages/609847

    • Non @dudh48, ce n’est pas comme ça qu’on fait des excuses.
      Tu n’as pas non plus droit à aller te cacher derrière le nihilisme, ton arrogance prouve bien l’impasse de tes propos. Apprends à élaborer ta pensée et reviens nous voir quand tu auras grandi.

    • Un autre point commun à nombre de ces affaires c’est le suicide du meurtrier.

      L’auteure n’insiste pas trop là-dessus, pourtant c’est révélateur de la perversité des ressorts de la violence masculine et du déni des hommes autoproclamés féministes qui reproduisent de bonne foi la domination masculine, souvent en évoquant d’une manière ou d’une autre la « tendresse », la « passion » ou l’« amour ». Hors-sujet.

      FAITES-VOUS SOIGNER !

      (à cette échelle de nuisance il ne s’agit plus seulement de pathologie individuelle)

      À ce propos, je crois, sur la violence masculine cf. ce strip :

      « Un sentiment sauvage apparaît, comment allez-vous le gérer ? »

      (compléter le 2, « je monte un fight club », avec « je la menace / je la frappe / je la tue »)

      La réponse 3 « j’en parle à mes proches, je crois que j’ai peur de l’abandon », présentée de façon légère, parait facile, encore faut-il avoir le courage de l’assumer dans une société patriarcale hétéronormée viriliste. Courage infiniment moins coûteux que celui d’une femme qui décide de s’émanciper.

      https://lemecxpliqueur.wordpress.com/2017/04/14/parlons-de-nos-sentiments

    • Au sujet des hommes qui prétendent être dominé par leur femme et disent vivre en régime matriarcale j’ai trouvé ce texte ;

      Non, la Germaine n’est pas une preuve qu’on vit dans un matriarcat
      La femme qui gère et mène son foyer subit une charge mentale, et c’est pas l’fun

      http://urbania.ca/249506/non-la-germaine-nest-pas-une-preuve-quon-vit-dans-un-matriarcat

      Il y a aussi le myth de la bretagne matriarcale, très présent chez les machos bretons. Il y a des variantes. J’ai croisé de nombreux hommes qui se prétendent féministes parceque leur grand-mère n’était pas totalement une serpillière H24 7/7j. Dès qu’une femme n’est pas un paillasson paf c’est le matriarcat ! Et ces pauvre hommes vivent dans le matriarcat depuis que mémé les a forcé à finir leur soupe.

    • Je la reposte ici :

      @dudh48 Je trouve embarrassants les gens qui n’arrivent pas à admettre qu’ils se sont peut-être viandés dans les grandes largeurs dans une discussion, qu’ils ont manqué de respect envers les autres intervenants et qu’il n’y a rien de déshonorant à tenter d’appréhender le point de vue d’autrui, d’évoluer avec l’autre et éventuellement s’excuser d’avoir eu un comportement ou des propos inappropriés, plutôt que d’imposer ses idées à tout prix, dans une posture arrogante et donc hermétique à la simple idée de débat contradictoire.

      Voilà, voilà !

    • Par rapport au nouveaux paternage, à l’education et cette dérésponsabilisation des hommes dans leur domination et culpabilisation des pères. Je remet le lien :

      https://www.cairn.info/revue-nouvelles-questions-feministes-2002-2-page-8.htm#no6

      En même temps, des théories féministes sur l’identité de genre se développaient sur la base de la théorie psychanalytique de la relation objectale ; elles soutenaient que les mères étaient seules responsables de la domination masculine à cause de leur manière d’éduquer les enfants (Dinnerstein, 1976 ; Chodorow, 1978) [6][6] La base de cette théorie est la suivante : « Les femmes.... Certaines critiques de ces théories féministes des relations objectales considéraient les hommes plus comme des victimes que comme des agents de la domination patriarcale et blâmaient en premier lieu les femmes puisqu’elles élèvent seules les enfants et détiennent le pouvoir émotionnel (Segal, 1987 ; Brittan, 1989 ; Connell, 1987 ; Cornwall et Lindisfarne, 1994). Par ailleurs, il faut relever que l’idée selon laquelle l’augmentation de l’investissement affectif des hommes auprès des enfants correspond à une diminution de l’autorité patriarcale dans les familles est contestée par les récentes études historiques, basées sur du matériel autobiographique, des pratiques de « paternage » au XIXe siècle (Tosch, 1996, 1999 ; Davidoff et al., 1999). Par exemple, Tosch a montré, dans son étude sur les pères de classe moyenne et sur la construction de l’identité masculine dans la première moitié du XIXe siècle, que ces pères étaient souvent très impliqués dans la « relation affective » avec leur enfant, mais que cette éducation « virile » était uniquement liée aux valeurs d’autorité morale paternelle et cherchait surtout à transmettre aux fils les caractéristiques « masculines ». Tosch soutient que, en dépit des variations historiques des rôles paternels, la règle du père perdure, car l’autorité paternelle demeure liée aux idées d’estime de soi, de statut et d’identité masculine.

      et

      Des groupes tels que les Families need fathers prétendent que les femmes sont responsables de ces inégalités évidentes dans la division sexuelle du travail, car elles exercent le « pouvoir domestique » à la maison et refusent de le partager avec les hommes. Certaines féministes libérales ont repris ce concept de « pouvoir » domestique : elles soutiennent que, puisque les femmes sont supposées devoir élever les enfants, cela leur donne un pouvoir « caché ». C’est leur responsabilité d’encourager les compétences masculines (Backett, 1987). Les féministes du New Labour ont aussi adopté ce discours culpabilisant les femmes, qui influence les politiques sociales récentes et considère les mères comme un obstacle majeur à l’augmentation de la participation des hommes à l’éducation des enfants (Williams, 1998).
      21

      Ces discours accompagnent une focalisation accrue sur la valeur genrée différente de l’investissement des pères, qui consolide les arguments soutenant que les enfants ont besoin de leurs pères. Le fait que les pères s’occupent moins de leurs enfants n’a ainsi plus d’importance, puisque leur contribution au développement de l’enfant repose sur les valeurs morales et masculines (supérieures) qu’ils apportent à la relation père-enfant (Williams, 1998). Par exemple, Burges et al. (1997) démontrent que « le manque de preuves de l’investissement paternel dépend de la nature des soins paternels plutôt que de leur absence ». D’autres chercheurs, aux États-Unis, Hawkins et Dollahite (1995), affirment que les « pères ne sont pas des mères et ne doivent pas essayer de l’être ». Ils considèrent que l’activité paternelle la plus importante est la « responsabilité éthique des hommes pour les générations futures », « leur travail de relation » et la « stimulation intellectuelle qu’ils procurent aux enfants à travers le jeu ».

      sur la violence masculine et le contexte des séparation

      La violence domestique, les enfants et le droit de visite
      32

      La violence masculine contre les femmes a été reconnue par le Home Office  [7][7] Le département du gouvernement anglais responsable... comme un problème vaste et considérable, et à partir du témoignage d’enquêtes locales (voir par exemple Mooney, 1993 ; Radford et Dominy, 1996), il semble qu’une femme sur quatre soit susceptible d’en faire l’expérience au cours de sa vie (Home Office, 1999). Ces enquêtes ont également révélé qu’un tiers au moins des femmes subissent des violences accrues après la séparation (voir aussi Mirlees-Black, 1995). On ne sait pas actuellement combien d’enfants vivent la violence domestique au quotidien ou sont affectés par ses conséquences dans le contexte postérieur à la séparation, mais l’enquête British Crime de 1996 a montré que la moitié des femmes qui subissaient des violences domestiques étaient des mères (Mirlees Black et Byron, 1999).

      Des études féministes concernant l’impact de la violence domestique sur les enfants sont venues s’inscrire en faux contre les idées reçues présentant les mères comme les plus susceptibles de maltraiter physiquement ces derniers dans ce contexte. Ces études ont révélé une corrélation élevée entre violence domestique et mauvais traitements physiques par le même auteur. Par exemple, en examinant 116 rapports hospitaliers sur des cas de mauvais traitements envers les enfants où la violence domestique était également présente, les chercheurs américains Stark et Flitcraft ont découvert que les pères violents étaient trois fois plus susceptibles d’être les principaux auteurs de maltraitance des enfants que les mères (Stark et Flitcraft, 1988). Une autre étude américaine (Bower et al., 1988) a révélé une corrélation élevée entre la gravité de la violence domestique et la gravité des mauvais traitements physiques infligés aux enfants par des pères, dans un échantillon spontané de 775 mères qui avaient subi des violences domestiques. Ces auteurs ont affirmé que les deux formes de violence visaient le « maintien de la dominance familiale » (Bower et al., 1988 : 166). Dans une moindre mesure, des études ont également examiné les connexions entre la violence domestique et les agressions sexuelles envers les enfants perpétrées par les pères. Hooper (1992), par exemple, dans une enquête à petite échelle sur les mères, a trouvé que cette violence était souvent utilisée pour les empêcher de percevoir l’agression sexuelle contre l’enfant, tandis que Hester et Pearson (1988), en examinant 44 dossiers d’enfants placés sous protection ont estimé que la violence domestique et l’agression sexuelle envers l’enfant par le même auteur étaient co-présentes dans la moitié des cas.

      je vais finir par le cité en integralité !

      Au vu des textes mentionnés ci-dessus, on comprend que beaucoup de recherches entreprises sur les pères se soient concentrées sur les plus ou moins prétendues contraintes imposées à leurs relations avec leur enfant, et en particulier sur le « paternage » en contexte de post-séparation et de post-divorce. Toutefois, dans ce domaine, les recherches ont mis en évidence des découvertes étonnamment cohérentes, même si ces recherches ont été menées à partir d’une pluralité de perspectives différentes, dont toutes n’étaient pas féministes. Par exemple, elles constatent que la préoccupation de la majorité des pères lors de la séparation n’est pas de satisfaire les besoins et les intérêts des enfants, mais la perception de leur propre perte en pouvoir direct et contrôle des femmes et des enfants, et ce, qu’il y ait ou non usage de violence domestique (Simpson et al., 1995 ; Arendell, 1995 ; Smart et Neale, 1999).
      39

      Smart et Neale ont interrogé aussi bien des mères que des pères dans leurs investigations sur le « parentage » après divorce et ils ont constaté que, en dépit de quelques exceptions individuelles, la majorité des hommes interrogés considèrent la décision des femmes de mettre fin à leur relation comme un coup porté à leur identité masculine, et que souvent ils cherchent, par réaction, à créer « le plus de grabuge possible », utilisant pour cela leurs relations avec les enfants. Or, loin de s’opposer à ces relations, les préoccupations des mères concernent généralement la non-fiabilité des engagements des pères quant à l’exercice du droit de visite et leurs capacités à prendre soin des enfants. Smart et Neale racontent également comment la plupart des pères considèrent tout effort pour normaliser les relations avec les enfants ou pour répondre au souci des mères concernant la qualité de ces relations, comme une limitation de leurs droits à la possession de l’enfant. Toutefois, la plupart des pères ne souhaitent pas avoir la responsabilité de s’occuper à plein temps des enfants mais veulent « voir les enfants lorsqu’ils en ont envie – ils ne veulent pas que les mères se plaignent s’ils les ramènent en retard, ou s’ils leur ont fait manger n’importe quoi, ils veulent davantage voir les enfants, mais seulement lorsque cela les arrange, et non lorsque cela arrange les mères » (Smart et Neale, 1999 : 146).
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      Les mères, de leur côté, voient les enfants et les pères comme détenteurs de droits, mais pas elles, et elles se perçoivent comme n’ayant à l’égard des enfants que des responsabilités. Cette étude a mis en lumière des différences genrées significatives quant à la manière dont les mères et les pères se perçoivent comme parents, les mères sentant qu’on attend d’elles qu’elles donnent la priorité aux besoins des enfants, se préoccupent de la qualité des soins et de l’attention apportés aux enfants lors des visites, tandis que les pères se soucient davantage de leurs propres droits de propriété sur les enfants et de l’effet de ces derniers sur leur propre statut masculin.
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      L’étude de Simpson et al. (1995) a débouché sur des constatations analogues, mais centrées sur le sentiment de perte éprouvé par les pères lors de la séparation et du divorce. Selon eux, ce qui préoccupe le plus les pères, c’est la perte non seulement d’un sentiment de pouvoir et de contrôle sur la famille, mais aussi de leur statut paternel et de leur influence sur les enfants. Pour prendre un exemple de préoccupation particulière, ils mentionnent le désir d’inculquer leurs propres valeurs aux enfants, et la crainte que ceux-ci n’adoptent les valeurs maternelles.

    • Une chose est remarquable : tandis qu’il était clair que les pères faisaient usage de violence à la fois contre les mères et les enfants, et que cela concernait le contrôle et l’autorité qu’ils exerçaient alors qu’ils vivaient encore en famille, nombre de ces pères s’affirmaient comme nouveaux pères qui s’impliquent régulièrement et s’occupent des enfants pendant que les mères travaillent, et un petit nombre d’entre eux affirmaient être ceux qui gagnent l’argent du ménage.

    • Condoléances pour ton père @vanderling

      @touti Je peu pas écouté l’interview mais je met ici la fin de la retranscription

      Et c’est là que je trouve les hommes lents : c’est-à-dire, à un moment donné, prenez la parole sur ce qui est votre problème. Les victimes souvent sont des femmes, d’accord, mais les agresseurs c’est vous, donc c’est à vous de prendre ça en charge. […] Ça devrait faire 15 ou 20 ans que je devrais voir les mecs réfléchir comme des fous pour changer. Mais je ne les vois pas.

    • Je m’en souviens de ton histoire de bretelles de sous-tifs @phalene . Tu ferais mieux de pas venir rajouté du déni à ton machisme. Dans cette histoire tu t’es ridiculisé tout seul en étant incapable de parler de la liberté des femmes sans venir nous infliger tes émotions érotiques d’hétéro. Le voile c’est pas à toi un mec blanc profitant des privilèges historiques de la colonisation et du patriarcat combiné de venir dire aux femmes ex-colonisées comment elles doivent s’habillées.
      C’est assez incroyable la force du déni masculin.

      Pour mémoire voici la discution en question :
      https://seenthis.net/messages/582085
      https://seenthis.net/messages/584293

      Pour la peine je vais ajouter #humaniste_nibardophile sur le lexique de mégèrisme
      @phalene et @dudh48 merci pour l’inspiration et le divertissement.

      edit : en fait humanisme priapique ca fonctionne pas mal aussi

    • ces mots de Virginie Despentes qui pointe la lenteur des hommes (en tant que groupe) à régler leur problème de violence

      Quand une femme est violente et qu’elle ne le reconnait pas, elle a raison d’exercer une violence symétrique ?
      C’est pour ça que la meute ne lui dit rien, voir l’encourage dans sa violence ?

    • Despentes ne parle pas de cas individuels. On peut toujours trouver des exceptions, dans TOUT il y a des exceptions, c’est pas pour ça que ça dit des choses sur la société dans sa globalité.

      La violence des femmes est clairement anecdotique, sur la société entière, et quand elle existe en plus c’est la majorité du temps en réaction/défense (les stats de meurtres de conjoints par des femmes montrent que la majorité était violentée, ce qui n’est jamais le cas dans l’autre sens).

      À l’intérieur de cette déjà minorité, on peut obligatoirement en trouver une minorité de la minorité où ce n’est pas le cas et où telle femme est totalement en tord, forcément : tout existe. Mais ça ne va pas dire beaucoup de choses sur l’état de notre société.

    • Et sinon à part ça, oui les femmes ont le droit mille fois d’exercer une violence symétrique pour se défendre et même en prévention, vu qu’elles savent clairement (et mieux que toi ou moi) ce qui les attend dans la majorité des cas, et ce qu’elles ont déjà enduré avant, de la part de personnes de la classe sociale des hommes. Elles vont pas tendre l’autre joue, c’est bien gentil de demander la non-violence toujours aux mêmes.

    • Ok, une façon comme un autre de botter en touche.
      Ce que tu rappelles est acquis pour moi, je me suis visiblement mal exprimé mais je n’ai pas « appris à élaborer ma pensée » comme dit plus haut.
      J’aurais dû bien préciser que je parlais de comportement de violence sur seenthis. Je parlais de la meute juste au dessus, ça me paraissait implicite, ça ne l’était pas.

    • c’est vrai qu’il y a un effet de meute comme tu dit mais c’est une violence VERBAL en réponse à des propos misogynes (Violence verbale aussi). Je comprend que pour toi la misogynie d’un @dudh48 ca ne te dérange aucunement et tu ne vie pas cela comme une agression, mais c’est de la violence verbale pour les femmes. Et personnellement je répond à la violence, je ne tend pas l’autre joue.

    • @nicod_ C’est pas une meute, c’est #seenthis pour moi, ou un cluster dans seenthis si certains ne s’y retrouvent pas (#seens8 :p)

      Franchement le gars qui s’épanche en disant bouhou l’humanité c’est pourri autant tous crever dans un fil sur le fait que les femmes meurent de manière systémique... ça mérite un retour de flammes ...

      Et @mad_meg n’est pas la dernière à reconnaître qu’elle s’est emportée sur un malentendu ou dans le genre, donc d’après les nombreux échanges que j’ai pu voir, sa méthode permet assez vite de gratter le vernis pour voir ce qu’il y a en dessous. Ça passe ou ça casse, ça demande juste un peu d’efforts et d’intelligence au gars qui se prend un coup de gueule dessus.

    • @nicod_ : le gars là, il cherche. Il impute des trucs qui n’existent pas, il continue d’insulter en s’adressant aux femmes qui lui ont répondu... à lui qui « défend les femmes par ses multiples engagements dans la vie réelle » (sur Internet)... mais peut tout à fait s’en violenter une ou deux sur les rézosocios, sans que ça ne le choque une seconde. Ni toi d’ailleurs. T’es dans l’métro, une personne agresse une autre personne, tout le métro réagit, c’est juste de l’effet de meute ? La « meute », là, tu trouves qu’elle a écharpée le pauvre ego blessé par l’horrible agression de mad_meg ? Y-a pas un petit peu d’échange et de discussion, et de pincettes même, pour ne pas le faire fuir trop vite ? :-)

    • @dudh48 Maintenant ça suffit. Tu ne peux pas insulter les personnes présentes ici depuis plusieurs années et qui font de cet endroit une richesse intellectuelle inestimable et collective. Ta provocation (pour appeler les choses comme ça, ce qui leur donne beaucoup de crédit) est pour le moins médiocre, en fait elle est même nulle. Retourne dans ta chambre d’adolescent (qui sent le tabac froid, la sueur et le sperme sec), ici c’est une conversation de grandes personnes. Tu en seras peut-être un plus tard. Encore qu’il soit permis d’en douter.

      cc @seenthis : cette personne sent très mauvais (et pas que le sperme sec)

    • Maintenant ça suffit. Tu ne peux pas insulter les personnes présentes ici depuis plusieurs années et qui font de cet endroit une richesse intellectuelle inestimable et collective .../...

      Et même si on n’est pas forcément d’accord, et que même on s’engueule, on argumente pour faire valoir son point de vue. Et lorsqu’on s’aperçoit qu’on a dit des conneries, on s’excuse et on réfléchit avant de continuer à s’enfoncer.

      Mais le bonhomme semble rétif à toute tentative qui lui permettrait d’améliorer sa personnalité : il préfère casser le nouveau jouet qu’il vient d’acquérir plutôt que d’en lire le mode d’emploi qui lui permettrait d’en profiter de la meilleure façon. Tant pis pour lui.

    • donc ta contribution au sujet c’est de nous dire que y a des choses plus grave, et que la violence machiste c’est à cause des comportement masochistes des femmes et de leur connerie de pas trouvé les moyens de s’en sortir.
      Bravo mec

    • Malheureusement pas, non...
       :-(

      C’est quelqu’un qui a posté sur FB...
      J’ai copié-collé le lien URL, mais il n’apparaît pas sur mon post seenthis...

    • Voici un exemple concret de #migrerrance induite par le système #Dublin (cas #Suisse)

      Le Collectif R dénonce un renvoi anormal

      Le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) n’est pas entré en matière et lui a envoyé une décision « Dublin III » de renvoi en Italie, comme le prévoient les accords du même nom.

      Il tente alors sa chance en Hollande pour échapper à un transfert forcé en Italie et se voit notifier la même conclusion. Retour en Suisse en avril 2016, nouvelle demande d’asile. Réponse du SEM : la décision de renvoi vers l’Italie demeure valable et le « délai de transfert », après lequel sa demande devra obligatoirement être examinée par la Suisse, court jusqu’au 8 mars 2017. « Jusque-là, note Pierre Kohler, du Collectif R, tout est normal. »

      En mars 2017, A., qui entre-temps s’est réfugié dans la clandestinité, relance logiquement le SEM pour une demande de réouverture de sa procédure d’asile. Son « délai de transfert » a expiré et il veut faire valoir son droit à faire examiner sa demande d’asile sur le fond par la Suisse. Quelle n’est pas sa surprise de se voir répondre que son délai de transfert court toujours en vertu d’un ancien protocole datant de Dublin II qui permet à un pays de « s’approprier » le délai de transfert notifié dans un autre pays, la Hollande en l’occurrence.

      ...

      En septembre dernier, le Service cantonal de la population, chargé de son renvoi, l’a « assigné à résidence » en vue de l’expulser vers l’Italie. A. doit donc retourner à la #clandestinité. S’il tient le coup jusqu’en décembre 2018, il aura été durant quarante-deux mois en attente d’un examen de sa demande d’asile.

      Pour le SAJE et le Collectif R, il y a « #déni_de_justice ». Les défenseurs des migrants dénoncent un système devenu « kafkaïen » et redoutent que cette pratique du SEM jugée anormale ne se généralise .

      https://www.24heures.ch/vaud-regions/collectif-r-denonce-renvoi-anormal/story/10204373
      #attente #limbe #assignation_à_résidence
      cc @isskein

  • Une mère #infanticide témoigne : « Pour moi, ce n’était pas un enfant » - Le Parisien
    http://www.leparisien.fr/faits-divers/une-mere-infanticide-temoigne-pour-moi-ce-n-etait-pas-un-enfant-31-05-201

    Avant de vivre ça, je me disais que ces femmes qui tuaient leurs enfants étaient des monstres, qu’elles étaient folles. Et qu’elles méritaient la prison. Et aujourd’hui, je me retrouve dans leur situation. Si je parle, c’est aussi pour dire ce qu’est le déni de grossesse. Mais c’est très, très dur de faire comprendre ma souffrance. Car beaucoup de gens ne comprennent pas.

    Une #contraception sûre, c’est plein de problème en moins…

    • Et comme aucune contraception n’est infaillible, une double contraception ne serait pas du luxe dans les couples hétéro qui ont une sexualité pénetrative. Les hommes hétéros doivent prendre leurs responsabilité dans la contraception. Ces mères infanticides en déni de grossesses ont bien été fécondés par des hommes parfaitement inconséquents.

      #contraception_masculine

    • Je suis d’accord avec la double contraception ! J’ai eu à entendre d’un cas de déni de grossesse cette semaine, l’enfant est avec sa mère, je vous rassure, mais c’est diabolique : elle prenait la pilule, ne pensait qu’à ses études et elle continuait à avoir des règles irrégulières, mais des règles. Quand elle a consulté pour troubles de santé, on lui a diagnostiqué 6 semaines d’aménorrhée -elle s’est dit c’est bon, je fais une IVG, sauf qu’en réalité elle était à 6 mois 1/2 de grossesse ! Elle a calé devant l’accouchement sous X (qui est un dispositif favorable aux femmes et à l’enfant à naître, une vraie loi féministe sauf que la pression sociale est terrible, mère c’est teeeellement beau, tu parles d’un piège sociétal !) et quelques mois après son Jules, père de l’enfant avec lequel elle n’était pas mariée, mais qui lui était réellement malade, s’est suicidé ! Un vrai plaidoyer pour la ligature dé-fi-ni-ti-ve des trompes ! Ou alors ne coucher qu’avec un mec qui présente un certificat de vasectomie en bonne et due forme. Ce sont les femmes qui paient tout le temps les pots cassés, c’est immonde.

  • Data scolaire : Des industriels et des syndicats saisissent le ministre contre la directive GAFAM (Le Café Pédagogique)
    http://www.cafepedagogique.net/LEXPRESSO/Pages/2017/05/19052017Article636307783633880791.aspx

    L’Ecole a-t-elle vraiment le droit de fournir les données des élèves aux grands groupes d’Internet , le GAFAM (Google Apple Facebook Amazon Microsoft) ? La question se pose après la révélation par le Café pédagogique, le 16 mai, d’un courrier du Directeur du numérique pour l’éducation, Mathieu Jeandron, invitant les responsables académiques à fournir aux GAFAM les annuaires des établissements. Des industriels, investis dans les ENT demandent des comptes dans un courrier que le Café pédagogique s’est procuré. Le Snes Fsu et la Cgt Education saisissent le nouveau ministre de ce qu’ils considèrent comme un « revirement lourd de conséquences ».

    #éducation #données_personnelles #GAFAM

  • #Appel_à_don : L’homme qui se cache au grand jour – un reportage de #Julie_Bindel

    C’est l’histoire d’un homme soupçonné de trafic de nouveau-nés, de proxénétisme, de kidnapping et d’escroquerie à grande échelle : John Davies.

    C’est aussi l’histoire d’un universitaire reconnu à travers le monde, d’un missionnaire, d’un philanthrope au cœur d’or et d’un spécialiste de la lutte contre la traite des femmes et des enfants.

    Laquelle de ces deux descriptions est la bonne ?

    Après une enquête menée sur près de 20 ans, Julie Bindel connaît la réponse. Mais la croirez-vous ? Ou préférez-vous plutôt le récit colporté par Davies et ses partisans depuis que les rumeurs ont commencé à circuler, dans les années 80 ?

    Les premiers 18 mois de cette longue et intense enquête ont été autofinancés par Julie. Elle doit maintenant lever les coûts de production pour en faire une série en dix podcasts.

    Le coût estimé par épisode est d’environ £ 1 000.

    Dés que les deux premiers épisodes seront financés, l’équipe commencera à les produire.

    Traduction : #Tradfem
    Version originale : https://www.byline.com/project/68

    #traite_des_femmes, #traite_de_bébés, #molestation_d’enfants, #fraude_caritative, #déni_de_traite, #collusion_universitaire, #exploitation_sexuelle_et_proxénétisme, #Europe_de_l’est, #Hongrie, #John_Davies

  • Arguments désespérés en défense de François Fillon : une anthologie - regards.fr
    http://www.regards.fr/web/article/arguments-desesperes-en-defense-de-francois-fillon-une-anthologie

    « On peut avoir de jeunes étudiants qui se tournent vers leur père en disant : "Toi qui peux tout, tu peux peut-être nous aider à travailler". Ce sont des choses qui arrivent dans toutes les bonnes familles », a déclaré Gérard Longuet, compréhensif. Voici un surprenant retour de l’excuse sociologique au sein de la droite.

    #no_comment

    • Pénélope Fillon ne comprend rien à ce qui lui arrive, et elle n’y est même probablement pour rien.

      En fait, c’est François Fillon qui a donné la réponse dès le début devant les médias, le 25 janvier 2017 : « Alors, parce que c’est mon épouse, elle n’aurait pas le droit de travailler ? Imaginez un instant qu’un homme politique dise d’une femme, comme le fait cet article, qu’elle ne sait faire que des confitures, toutes les féministes hurleraient. »

      Lors du sinistre « meeting » de La Villette, il l’a traînée là par la main, même si les menottes étaient transparentes.
      Elle était visiblement comme droguée, comme ailleurs.
      Elle a eu sa haie d’honneur, ses applaudissements, et même son bouquet, entourée/cernée qu’elle était des affidé(e)s/inféodé(e)s de cette clique qui sait, qui cautionne, qui en profite.

      Elle était assise, puis elle a mis du temps à se lever, mais puisqu’il le fallait…
      Ensuite, des gros plans ont été faits.
      François lui pose la main sur l’épaule, puis sur le bras, puis lui prend la main gauche. Lui a un regard bizarre.
      Bruno Retailleau, son premier couteau, est à sa droite, au cas où elle bougerait : la tenaille, l’étau.

      Elle était visiblement tétanisée, dans un vrai cauchemar.
      Je suis maintenant certain qu’elle ne savait rien de tout cela.

      Que son politicard de mari est un putain de « Manipulateur Pervers Narcissique », mais extrême, hors limites.
      Et que son fantasme, c’est Marianne, la France, et sa population, femmes, hommes et enfants confondus, tous passifs dans les sévices annoncés dans son « programme ».
      Ses papouilles et violences de premier ministre sous Sarkozy n’étaient probablement pas suffisantes pour l’assouvir, non, il veut les mains libres, tous les pouvoirs, pour exercer ses déviances et ne satisfaire, bien sûr, que lui-même et ses complices de perversion.

      Quant à Pénélope, elle rêve probablement de retourner à ses confitures, mais en est-elle encore capable ?

      https://www.grincant.com/2017/02/03/fillon-mpn-extreme

    • Argument "Les heures les plus sombres de l’histoire"

      « J’ai connu un régime en Europe centrale dans lequel, à partir du moment où on était l’enfant de quelqu’un de diplômé, on n’avait pas le droit d’aller à l’université : c’était le régime de Ceausescu. » Michèle Alliot-Marie atteint ainsi une version du point Godwin que l’on pourrait rebaptiser point Staline. Un instant, on crut que François Fillon allait évoquer le pacte germano-soviétique : « Cette opération ne vient pas de chez nous, pas de notre camp. Cette affaire vient du pouvoir. Ils font prendre à notre pays un énorme risque, celui de voir les extrémismes arriver ».

      #deni_de_réalité

    • Le spectacle donné lors des derniers jours aura donc été total, et la défense de François Fillon n’aura fait que le trahir un peu plus. C’est-à-dire trahir une conception de la vie publique qui fait de la France la risée de la plupart des autres démocraties – où un retrait immédiat et des excuses constitueraient la seule option envisageable, indépendamment de la « légalité » des faits.

      Le pire est probablement que l’intéressé doit se sentir réellement innocent et injustement attaqué : c’est dire l’ampleur du désastre démocratique actuel. On peut aussi voir dans cette affaire le signe qu’une époque s’achève – sans être sûr que la suivante sera meilleure.

      voir aussi :

      Affaire Fillon : les accusations du “Canard enchaîné” menacent la démocratie
      http://television.telerama.fr/television/affaire-fillon-les-accusations-du-canard-enchaine-menacent-la-de

  • Un policier municipal jugé pour violences volontaires avec arme
    http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2017/01/17/un-policier-municipal-juge-pour-violences-volontaires-avec-arme_5063898_1653

    Est-ce par l’opération du Saint-Esprit que M. Alexandre T. s’est retrouvé avec une « plaie ouverte profonde de 1,5 centimètre » au niveau de l’anus ? C’est la question que s’est posée son avocate et c’est celle qui a semblé occuper les débats pendant trois heures, lundi 16 janvier, au tribunal de grande instance de Bobigny (Seine-Saint-Denis).

    Un policier municipal de Drancy, Arnaud P., comparaissait à l’audience pour violences volontaires avec arme. Mais il s’est évertué à dire qu’il « n’y avait pas eu d’incident ». Ce 29 octobre 2015, pourtant, du sang a été retrouvé dans la Peugeot 307 de l’équipage de police, ainsi que sur le caleçon d’Alexandre T.. Vers 4 heures du matin, un médecin a constaté la blessure du jeune homme de 28 ans et lui a délivré dix jours d’interruption totale de travail. Son ADN a même été retrouvé à l’extrémité du bâton télescopique de défense utilisé par le policier.

    Pourtant, l’agent « ne [se] l’explique pas ». A la barre, il dit des « peut-être » et des « je ne sais pas » quand le procureur adjoint, puis la présidente du tribunal, puis l’avocate de la victime essayent de reconstituer le cours de la soirée.

    #violences_policères #viol #culture_du_viol #déni_de_viol #police

    L’article n’utilise même pas le mot viol. Pourtant « Son ADN a même été retrouvé à l’extrémité du bâton télescopique de défense utilisé par le policier. »

  • Christine Lagarde, directrice du FMI, coupable de négligence mais dispensée de peine
    http://www.wsws.org/fr/articles/2016/dec2016/fmil-d21.shtml

    Cette décision souligne l’#impunité judiciaire dont jouissent les principaux dirigeants des grandes structures appuyés, comme l’est Lagarde, par les principales puissances impérialistes en Amérique du Nord et en Europe. Elle contraste également fortement avec le limogeage de Strauss-Kahn en 2011, au milieu d’un #scandale sexuel monté de toute pièce impliquant une femme de chambre d’hôtel à New York qui a été attisé par des responsables des gouvernements américain et de Sarkozy.
    Malgré le #détournement massif de fonds publics dans le scandale Tapie-Crédit Lyonnais, le pouvoir judiciaire et le gouvernement PS de France à l’époque ont soutenu Lagarde. Ceci est surtout dû au vaste #pouvoir exercé par Lagarde, ancienne avocate d’entreprise à Chicago, qui est la directrice générale du FMI depuis la démission de Dominique Strauss-Kahn en 2011.
    Fait remarquable, le procureur général Jean-Claude Marin a dénoncé son propre réquisitoire contre Lagarde, affirmant que « les charges propres à fonder une #condamnation pénale » de Christine Lagarde n’étaient « pas réunies ». « Les audiences n’ont pas conforté une accusation bien faible, voire incantatoire ».
    Au cours du procès, Lagarde a maintenu son innocence en s’appuyant sur des affirmations absurdes selon lesquelles, malgré son expertise financière, elle avait été manipulée par des fonctionnaires de rang inférieur et ne comprenait pas le fonctionnement du Ministère des finances français. Elle a également affirmé qu’elle n’avait pas vu 22 notes qui lui avaient été envoyées par des fonctionnaires du ministère des Finances sur l’affaire Tapie-Crédit Lyonnais, ni les révélations sur le scandale dans l’hebdomadaire Le Canard Enchaîné.
    La défense de Lagarde n’a manifestement pas convaincu les juges de la CJR, qui ont statué contre Lagarde malgré les conseils du procureur. À un moment donné, la juge présidente de la CJR Martine Ract Madoux a dit avec sarcasme : « Vous avez dit que vous n’avez pas lu ces notes, que vous les avez découvertes plus tard. Vous avez dû être malheureuse en les lisant ».
    « Un ministre des #finances est souvent malheureux », répondit Lagarde.
    Elle n’a même pas pris la peine d’attendre à Paris pour l’annonce de la décision, mais est partie, après avoir témoigné, pour retourner au siège du FMI à Washington.
    Le fait de ne pas imposer de peines malgré la condamnation de Lagarde, signifie que la CJR a cédé aux pressions politiques de la part de responsables et des médias à travers l’Europe pour la maintenir en place comme directrice générale du FMI – poste traditionnellement détenu par un Européen et souvent par un Français.
    Après la condamnation de Lagarde, le gouvernement PS français a salué les services publics de Lagarde. « Christine Lagarde exerce son mandat au FMI avec succès et le gouvernement maintient toute sa confiance en sa capacité à y exercer ses responsabilités », a déclaré le ministre de l’économie Michel Sapin.

  • On the Invisibility of Middle-Aged Women | Literary Hub
    http://lithub.com/on-the-invisibility-of-middle-aged-women

    The interesting thing is that middle-aged women on the search for essence and their license to live can come off as quite provocative characters. Some people regard them as lacking self control—or even worse; they are conceived of as “self absorbed.” A middle-aged woman who’s not preoccupied with handling herself or taking care of someone else is a dangerous, erratic being. What is she up to? And what’s the point of her being up to anything? She has no children, she has no family, the only thing she has is her own life and what good will that do anyone when she’s no longer a star attorney at 10 Downing Street, or when she doesn’t have a rehearsal space where she can compose her music, or when she’s in the process of turning into spring itself: Overflowing, no longer firm and contained, but escalating, growing wild.

    • Je sais que ce phénomène existe, d’ailleurs c’est pareil pour les hommes, surtout quand ton identité n’est pas définie par un rôle traditionnel.

      Quand on était jeunes on disait en riant qu’il fallait devenir riche parce les femmes ça ne voulait des vieux que quand ils étaient riches. Aves l’expérience des années l’image du monde a changée, pourtant ...

      Je crois qu’il y a une facon de vivre qui te permet d’échapper à ce problème.

      L’article parle des bourgeoises « no longer a star attorney at 10 Downing Street » et du monde conservateur qui les entoure. Alors il faut d’abord dire adieu au connards. Malheureusement tu n’a plus personne d’autre une fois que tu as réussi à grimper jusque là (si tu ne faisais pas partie de cette classe de nantis dès le départ). Tant pis pour toi, fallait choisir un itinéraire professionnel hors du monde des cyniques ennemis du peuple.

      Ensuite il faut accepter de viellir. Personne n’y échappe et tu ne trouveras pas de consolation auprès des stars qui ont l’air d’avoir trente ans alors qu’elles en ont soixante.

      Après il serait bien de reconnaître que ton corps et ton esprit, ton « âme » si tu veux, ne sont pas deux choses différentes mais deux expressions de l’unique personne que tu es.

      Si après avoir développé toutes ces réflexíon tu as le bonheur de ne pas être obligé de bosser jusqu’à ce que mort s’en suive, tu commenceras peut-être à t’engager pour une cause qui te rapprocheras de gens biens.

      Avec le temps tu te sentiras mieux et tu aura retrouvé l’euphorie et l’état d’esprit qui te font rayonner au grand plaisir de tous les gens que tu rencontres.

      Maintenant tu t’en fous des jeunes ploucs qui abandonnent la conversation avec toi dès qu’il voient entrer une paire de nichons en dessous de trente ans, ils ne t’arrivent pas à la cheville.

      Je me permets ces remarques parce que je viens de tomber sur la biographie d’une auteure complètement étrangère aux crises existentielles des bourgeoises.

      Elfriede Brüning s’est engangée contre le fascisme depuis les années 1920. Malgré le manque de soutien officiel pour son projet elle écrit sur les familles dysfonctionnelles en RDA et continue à publier et présenter son oeuvre jusqu’à l’age de 99 ans.

      Vu le puritanisme des communistes « orthodoxes » je ne sais pas comment elle a pu vivre ses relations avec les hommes, mais je le découvrirai peut-être à travers son oeuvre. Une chose est sûre, Elfriede Brüning n’était jamais invisible à l’exception de l’époque quand elle était obligée de se cacher de la Gestapo.

      https://de.wikipedia.org/wiki/Elfriede_Br%C3%BCning
      https://en.wikipedia.org/wiki/Elfriede_Br%C3%BCning

      #DDR #femmes #résistance #communistes

    • Tu es mal placé @klaus en tant qu’homme cis, pour faire la leçon à des femmes sur leur ressentie. Le coup de « les hommes aussi sont invisibles à 40-50 ans... » ca ne passe pas. Je veux bien que le contexte soit ici très bourgeois, mais tu ne peu pas savoir si c’est différent pour les femmes d’autres milieux sociaux. Les violences contre les femmes sont présentes dans tous les milieux et c’est pas en allant fréquenté des communistes qu’on est préservé de la domination masculine.
      #mansplanning

    • @mad_meg Ce n’est pas tant d’une question de femmes dont je parle mais d’une question de classes sociales. Dans le texte, trollesque, je l’avoue, il n’est d’ailleurs pas question de morale du tout. Pourtant il y a une réflexion morale derrière ce petit texte. Tous les hommes (et les femmes, bien entendu) naissent et demeurent libres et égaux en droits et il est notre devoir de rappeller à l’ordre ceux et celles qui se permettent d’enfreindre à cette loi.

      Il est vrai que les sociétés ont été contrôlés par des hommes depuis la disparition quasi totale du matriarcat et que les violences contre les femmes existent à tous les niveaux sociaux, mais ce n’est pas le sujet du texte.

      Pour moi il est évident que les relations de classe ont plus d’incidence sur ta place dans le monde que ta qualité d’homo sapiens masculin ou féminin. D’une perspective individuelle on risque d’avoir une impression différente, mais je pense que cette vision limitée se dissipe quand on souffle le brouillard idéologique et dépasse les visions primaires.

      Je vois ton point de vue et je ne me substituerais jamais à ta manière de te ressentir toi même (tout comme je n’accepte pas qu’on m’impose une vue particulière de mon corps à moi), mais je revendique pour moi le droit d’utiliser la dérision, l’arme la plus paisible parmi les instruments de la lutte des classes. Se moquer des bourgeois, qui sont dans le cas présent des bourgeoises, est une chose nécessaire.

      Si tu as envie de prendre mon texte au sérieux, alors qu’il n’est qu’une parodie anodine, tu vas constater que je m’abstiens explicitement de toute opinion sur la condition individuelle d’une femme. Je construis un discours autour de clichés pour attirer l’attention à l’arrogance de la position de classe que prend l’auteure dans le texte qu’on a lu. Il est possible que je n’aie pas été assez bon auteur, que je sois responsable d’un malentendu. Si c’est le cas je m’en excuse.

      Une chose est sûre, la condition sociale imprègne tout aspect de la vie, alors il est logique et inévitable qu’au-delà des nuances individuelles les femmes de classes différentes ressentent différemment la sexualité, l’age, le travail enfin toute la vie. Il n’y a pas de « communauté des femmes » qui dépasse et transcend l’identité de classe. Le prétendre signifie abuser des similarités évidentes que partagent toutes les femmes pour empêcher le prolétariat féminin de prendre conscience de sa situation de classe et d’agir en conséqence.

      Le principe est le même pour les hommes (on essaie de nous empêcher de développe une conscience de classe) mais dans le détail il y a plein de différences entre hommes et femmes. La question est donc plus compliquée, surtout quand on cherche à comprendre par où l’oppression s’infiltre dans nos vies et nos esprits, quelles sont les notions et comportements fausses et néfastes dont il faut se libérer afin de pouvoir mobiliser nos forces pour faire tomber les murs qui nous séparent.

      Bref, l’antagonisme de classe existe mais il n’y a pas d’antagonisme qui oppose les hommes et les femmes.

       :-)

    • Non il n’y a pas de problème logique. tu compare des cas individiuels comme si les moyennes se retrouvaient dans 100% des situations.
      Il y a des noirs plus riches que moi et pourtant ca ne veux pas dire que je suis dominée en tant que blanche ou qu’il y a une domination des noirs sur les blancs.

      Ton Robert Chomeur sans alloc’ il est privilégié par rapport à Roberta, chomeuse sans alloc’. Ton Robert il est privilégié par rapport à des femmes du même milieu que lui, il est privilégie par rapport à son épouse, ses filles. Ton robert dans certaines situation il peut parfaitement profité de son privilége masculin pour agressé sexuellement des bourgeoises et il sera tout à fait possible qu’il domine ces femmes.
      Je te conseil la lecture de ce texte de Delphy qui semble avoir été ecrit sur mesure pour cette discussion ; http://lmsi.net/Quand-la-haine-des-femmes-se