• Je ne sais pas où vous serez demain, film de #Emmanuel_Roy

    Reem est médecin généraliste au #Centre_de_Rétention_Administrative de #Marseille. Des hommes se succèdent devant elle. Leur vie est suspendue et personne ne peut prédire où ils seront envoyés demain. Auprès d’eux, Reem tente malgré tout de tenir une ligne de soin, de respect et d’écoute.

    https://www.youtube.com/watch?v=jjMg5cO1V6E

    #CRA #détention_administrative #rétention #migrations #sans-papiers #France #film #documentaire #film_documentaire #renvois #expulsions

  • Où le #classement_de_Shanghaï mène-t-il l’#université française ?

    Le classement de #Shanghaï, dont les résultats sont publiés mardi 15 août, a façonné une idée jamais débattue de l’« #excellence ». Des universitaires appellent à définir « une vision du monde du savoir » propre au service public qu’est l’enseignement supérieur français.

    Des universités à la renommée mondiale qui attirent les meilleurs étudiants, les chercheurs les plus qualifiés et les partenaires financiers les plus magnanimes : depuis l’avènement des classements internationaux dans l’#enseignement_supérieur, il y a vingt ans, la quête d’une certaine idée de l’« excellence » a intégré le vocabulaire universitaire, jusqu’à se muer en un projet politique.

    En France, en août 2003, la première édition du classement de Shanghaï, qui publie mardi 15 août son édition 2023, a été un coup de tonnerre : ignorant les subtilités administratives hexagonales et la tripartition entre #universités, grandes écoles et organismes de recherche, le palmarès n’avait distingué dans son top 50 aucun des fleurons nationaux. Piqués au vif, les gouvernements successifs se sont engouffrés dans la brèche et ont cherché les outils pour se conformer aux #standards. En 2010, le président de la République, #Nicolas_Sarkozy, avait fixé à sa ministre de l’enseignement supérieur, #Valérie_Pécresse, un #objectif précis : placer deux établissements français dans les 20 premiers mondiaux et 10 parmi les 100 premiers du classement de Shanghaï.

    La loi relative aux libertés et responsabilités des universités, votée en 2007, portait alors ses premiers fruits, présentés en personne par Mme Pécresse, en juillet 2010, aux professeurs #Nian_Cai_Liu et #Ying_Cheng, les deux créateurs du classement. Les incitations aux #regroupements entre universités, grandes écoles et organismes de recherche ont fleuri sous différents noms au gré des appels à projets organisés par l’Etat pour distribuer d’importants investissements publics (#IDEX, #I-SITE, #Labex, #PRES, #Comue), jusqu’en 2018, avec le nouveau statut d’#établissement_public_expérimental (#EPE). Toutes ces tactiques politiques apparaissent comme autant de stigmates français du palmarès chinois.

    Ces grandes manœuvres ont été orchestrées sans qu’une question fondamentale soit jamais posée : quelle est la vision du monde de l’enseignement supérieur et de la recherche que véhicule le classement de Shanghaï ? Lorsqu’il a été conçu, à la demande du gouvernement chinois, le palmarès n’avait qu’un objectif : accélérer la #modernisation des universités du pays en y calquant les caractéristiques des grandes universités nord-américaines de l’#Ivy_League, Harvard en tête. On est donc très loin du #modèle_français, où, selon le #code_de_l’éducation, l’université participe d’un #service_public de l’enseignement supérieur.

    « Société de marché »

    Pour la philosophe Fabienne Brugère, la France continue, comme la Chine, de « rêver aux grandes universités américaines sans être capable d’inventer un modèle français avec une #vision du savoir et la perspective d’un bonheur public ». « N’est-il pas temps de donner une vision de l’université ?, s’interroge-t-elle dans la revue Esprit (« Quelle université voulons-nous ? », juillet-août 2023, 22 euros). J’aimerais proposer un regard décalé sur l’université, laisser de côté la question des alliances, des regroupements et des moyens, pour poser une condition de sa gouvernance : une #vision_du_monde_du_savoir. »

    Citant un texte du philosophe Jacques Derrida paru en 2001, deux ans avant le premier classement de Shanghaï, la professeure à Paris-VIII définit l’université comme « inconditionnelle, en ce qu’elle peut #repenser_le_monde, l’humanité, élaborer des #utopies et des #savoirs nouveaux ». Or, « vingt ans après, force est de constater que ce texte reste un objet non identifié, et que rien dans le paysage universitaire mondial ne ressemble à ce qu’il projette, regrette Fabienne Brugère. Les grandes universités américaines que nous admirons et dans lesquelles Derrida a enseigné sont habitées par la société de marché ».

    Ironie du sort, c’est justement l’argent qui « coule à flots » qui garantit dans ces établissements de l’hyperélite des qualités d’étude et de bon encadrement ainsi qu’une administration efficace… Autant de missions que le service public de l’université française peine tant à remplir. « La scholè, le regard scolastique, cette disposition à l’étude, ce temps privilégié et déconnecté où l’on apprend n’est possible que parce que la grande machine capitaliste la fait tenir », déplore Mme Brugère.

    En imposant arbitrairement ses critères – fondés essentiellement sur le nombre de #publications_scientifiques en langue anglaise, de prix Nobel et de médailles Fields –, le classement de Shanghaï a défini, hors de tout débat démocratique, une #vision_normative de ce qu’est une « bonne » université. La recherche qui y est conduite doit être efficace économiquement et permettre un #retour_sur_investissement. « Il ne peut donc y avoir ni usagers ni service public, ce qui constitue un #déni_de_réalité, en tout cas pour le cas français », relevait le sociologue Fabien Eloire dans un article consacré au palmarès, en 2010. Est-il « vraiment raisonnable et sérieux de chercher à modifier en profondeur le système universitaire français pour que quelques universités d’élite soient en mesure de monter dans ce classement ? », questionnait le professeur à l’université de Lille.

    Derrière cet effacement des #spécificités_nationales, « une nouvelle rhétorique institutionnelle » s’est mise en place autour de l’« #économie_de_la_connaissance ». « On ne parle plus de “l’#acquisition_du_savoir”, trop marquée par une certaine #gratuité, mais de “l’#acquisition_de_compétences”, efficaces, directement orientées, adaptatives, plus en phase avec le discours économique et managérial », concluait le chercheur.

    Un poids à relativiser

    A y regarder de plus près, Shanghaï et les autres classements internationaux influents que sont les palmarès britanniques #QS_World_University_Rankings (#QS) et #Times_Higher_Education (#THE) valorisent des pays dont les fleurons n’accueillent finalement qu’un effectif limité au regard de leur population étudiante et du nombre total d’habitants. Le poids réel des « #universités_de_prestige » doit donc être relativisé, y compris dans les pays arrivant systématiquement aux tout premiers rangs dans les classements.

    Pour en rendre compte, Le Monde a listé les 80 universités issues de 16 pays qui figuraient en 2022 parmi les 60 premières des classements QS, THE et Shanghaï. Grâce aux sites Internet des établissements et aux données de Campus France, le nombre total d’étudiants dans ces universités a été relevé, et mis en comparaison avec deux autres statistiques : la démographie étudiante et la démographie totale du pays.

    Le cas des Etats-Unis est éclairant : ils arrivent à la 10e position sur 16 pays, avec seulement 6,3 % des étudiants (1,2 million) dans les 33 universités classées, soit 0,36 % de la population américaine.

    Singapour se place en tête, qui totalise 28,5 % des étudiants inscrits (56 900 étudiants) dans les huit universités de l’hyperélite des classements, soit 0,9 % de sa population. Suivent Hongkong, avec 60 500 étudiants dans quatre universités (20,7 % des étudiants, 0,8 % de sa population), et la Suisse, avec 63 800 étudiants dans trois établissements (19,9 % des étudiants, 0,7 % de sa population).

    Avec 98 600 étudiants dans quatre universités classées (Paris-Saclay, PSL, Sorbonne Université, Institut polytechnique de Paris), la France compte 3,2 % des étudiants dans l’hyperélite universitaire mondiale, soit 0,1 % de la population totale.

    La Chine arrive dernière : 255 200 étudiants sont inscrits dans les cinq universités distinguées (Tsinghua, Peking, Zhejiang, Shanghai Jiao Tong et Fudan), ce qui représente 0,08 % de sa population étudiante et 0,018 % de sa population totale.

    https://www.lemonde.fr/campus/article/2023/08/14/ou-le-classement-de-shanghai-mene-t-il-l-universite-francaise_6185365_440146

    #compétences #critique

    • Classement de Shanghaï 2023 : penser l’enseignement supérieur en dehors des palmarès

      Depuis vingt ans, les responsables politiques français ont fait du « standard » de Shanghaï une clé de #réorganisation des établissements d’enseignement supérieur. Mais cet objectif d’inscription dans la #compétition_internationale ne peut tenir lieu de substitut à une #politique_universitaire.

      Comme tous les classements, celui dit « de Shanghaï », censé comparer le niveau des universités du monde entier, suscite des réactions contradictoires. Que les championnes françaises y soient médiocrement placées, et l’on y voit un signe de déclassement ; qu’elles y figurent en bonne place, et c’est le principe du classement qui vient à être critiqué. Le retour de l’université française Paris-Saclay dans le top 15 de ce palmarès de 1 000 établissements du monde entier, établi par un cabinet chinois de consultants et rendu public mardi 15 août, n’échappe pas à la règle. Au premier abord, c’est une bonne nouvelle pour l’enseignement supérieur français, Paris-Saclay se hissant, derrière l’américaine Harvard ou la britannique Cambridge, au rang de première université non anglo-saxonne.

      Pourtant, ce succès apparent pose davantage de questions qu’il n’apporte de réponses sur l’état réel de l’enseignement supérieur français. Certes, la montée en puissance du classement chinois, créé en 2003, a participé à l’indispensable prise de conscience de l’inscription du système hexagonal dans un environnement international concurrentiel. Mais les six critères qui président arbitrairement à ce « hit-parade » annuel, focalisés sur le nombre de prix Nobel et de publications dans le seul domaine des sciences « dures », mais qui ignorent étrangement la qualité de l’enseignement, le taux de réussite ou d’insertion professionnelle des étudiants, ont conforté, sous prétexte d’« excellence », une norme restrictive, au surplus indifférente au respect des libertés académiques, politique chinoise oblige.

      Que les responsables politiques français aient, depuis vingt ans, cédé à ce « standard » de Shanghaï au point d’en faire une clé de réorganisation des établissements d’enseignement supérieur ne laisse pas d’étonner. Le principe « grossir pour être visible » (dans les classements internationaux) a servi de maître mot, il est vrai avec un certain succès. Alors qu’aucun établissement français ne figurait dans les cinquante premières places en 2003, ils sont trois aujourd’hui. Paris-Saclay résulte en réalité de la fusion d’une université, de quatre grandes écoles et de sept organismes de recherche, soit 13 % de la recherche française.

      Mais cette politique volontariste de #fusions à marche forcée, soutenue par d’importants crédits, n’a fait qu’alourdir le fonctionnement des nouvelles entités. Surtout, cette focalisation sur la nécessité d’atteindre à tout prix une taille critique et de favoriser l’excellence n’a fait que masquer les #impensés qui pèsent sur l’enseignement supérieur français : comment améliorer la #qualité de l’enseignement et favoriser la réussite du plus grand nombre ? Quid du dualisme entre universités et grandes écoles ? Quelles sources de financement pour éviter la paupérisation des universités ? Comment éviter la fuite des chercheurs, aux conditions de travail de plus en plus difficiles ? Et, par-dessus tout : quel rôle dans la construction des savoirs dans un pays et un monde en pleine mutation ?

      A ces lourdes interrogations, l’#obsession du classement de Shanghaï, dont le rôle de promotion des standards chinois apparaît de plus en plus nettement, ne peut certainement pas répondre. Certes, l’enseignement supérieur doit être considéré en France, à l’instar d’autres pays, comme un puissant outil de #soft_power. Mais l’objectif d’inscription dans la compétition internationale ne peut tenir lieu de substitut à une politique universitaire absente des débats et des décisions, alors qu’elle devrait y figurer prioritairement.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/08/15/classement-de-shanghai-2023-penser-l-enseignement-superieur-en-dehors-des-pa

    • Au même temps, #Emmanuel_Macron...

      Avec 27 universités représentées, le classement de Shanghai met à l’honneur l’excellence française.

      Acteurs de l’enseignement et de la recherche : merci !

      Vous faites de la France une grande Nation de formation, de recherche et d’innovation. Nous continuerons à vous soutenir.


      https://twitter.com/EmmanuelMacron/status/1691339082905833473
      #Macron

    • Classement de Miamïam des universités françaises.

      Ayé. Comme chaque année le classement de Shangaï est paru. Et l’auto-satisfecit est de mise au sommet de l’état (Macron, Borne, et bien sûr Oui-Oui Retailleau). Imaginez un peu : 27 de nos établissements français (universités et grandes écoles) y figurent.

      Rappel pour les gens qui ne sont pas familiers de ces problématiques : le classement de Shangaï est un classement international très (mais vraiment très très très) sujet à caution, qui s’est imposé principalement grâce à une bonne stratégie marketing (et à un solide lobbying), et qui ne prend en compte que les publications scientifiques des enseignants-chercheurs et enseignantes-chercheuses de l’université : ce qui veut dire qu’il ne regarde pas “l’activité scientifique” dans sa globalité, et que surtout il n’en a rien à secouer de la partie “enseignement” ni, par exemple, du taux de réussite des étudiants et étudiantes. C’est donc une vision a minima hémiplégique de l’université. Il avait été créé par des chercheurs de l’université de Shangaï comme un Benchmark pour permettre aux université chinoises d’essayer de s’aligner sur le modèle de publication scientifique des universités américaines, donc dans un contexte très particulier et avec un objectif politique de soft power tout à fait explicite. Ces chercheurs ont maintenant créé leur boîte de consultants et se gavent en expliquant aux universités comment l’intégrer. L’un des co-fondateurs de ce classement explique notamment : “Avant de fusionner, des universités françaises nous ont demandé de faire une simulation de leur future place dans le classement“.

      Bref du quantitatif qui vise à souligner l’élitisme (pourquoi pas) et qui n’a pour objet que de le renforcer et se cognant ostensiblement de tout paramètre qualitatif a fortiori si ce qualitatif concerne les étudiant.e.s.

      Mais voilà. Chaque été c’est la même tannée et le même marronier. Et les mêmes naufrageurs de l’action publique qui se félicitent ou se navrent des résultats de la France dans ledit classement.

      Cette année c’est donc, champagne, 27 établissements français qui se retrouvent “classés”. Mal classés pour l’essentiel mais classés quand même : les 4 premiers (sur la jolie diapo du service comm du gouvernement) se classent entre la 16ème (Paris-Saclay) et la 78ème place (Paris Cité) et à partir de la 5ème place (sur la jolie diapo du service comm du gouvernement) on plonge dans les limbes (Aix-Marseille est au-delà de la 100ème place, Nantes au-delà de la 600ème). Alors pourquoi ce satisfecit du gouvernement ? [Mise à jour du 16 août] Auto-satisfecit d’ailleurs étonnant puisque si l’on accorde de la valeur à ces classements, on aurait du commencer par rappeler qu’il s’agit d’un recul : il y avait en effet 30 établissements classés il y a deux ans et 28 l’année dernière. Le classement 2023 est donc un recul. [/mise à jour du 16 août]

      Non pas parce que les chercheurs sont meilleurs, non pas parce que la qualité de la recherche est meilleure, non pas parce que les financements de la recherche sont plus importants et mieux dirigés, mais pour deux raisons principales.

      La première raison est que depuis plusieurs années on s’efforce d’accroître le “rendement” scientifique des personnels en vidant certaines universités de leurs activités et laboratoires de recherche (et en y supprimant des postes) pour le renforcer et le concentrer dans (très peu) d’autres universités. C’est le grand projet du libéralisme à la française qui traverse les présidences de Sarkozy à Macron en passant par Hollande : avoir d’un côté des université “low cost” dans lesquelles on entasserait les étudiant.e.s jusqu’à bac+3 et où on ferait le moins de recherche possible, et de l’autre côté des “universités de recherche et d’excellence” où on n’aurait pas grand chose à foutre de la plèbe étudiante et où on commencerait à leur trouver un vague intérêt uniquement à partir du Master et uniquement pour les meilleur.e.s et uniquement dans certains domaines (genre pas en histoire de l’art ni en études littéraires ni dans la plupart des sciences humaines et sociales).

      La seconde raison de ce “bon” résultat est que les universités se sont regroupées administrativement afin que les publications de leurs chercheurs et chercheuses soient mieux prises en compte dans le classement de Shangaï. Exemple : il y a quelques années, il y avait plusieurs sites universitaires dans les grandes villes. Chaque site était celui d’une discipline ou d’un regroupement de discipline. On avait à Toulouse, à Nantes et ailleurs la fac de droit, la fac de sciences, la fac de lettres, etc. Et les chercheurs et chercheuses de ces universités, quand ils publiaient des articles dans des revues scientifiques, “signaient” en s’affiliant à une institution qui était “la fac de sciences de Toulouse Paul Sabatier” ou “la fac de lettre de Toulouse le Mirail” ou “la fac de droit de Toulouse”. Et donc au lieu d’avoir une seule entité à laquelle rattacher les enseignants-chercheurs on en avait trois et on divisait d’autant les chances de “l’université de Toulouse” de monter dans le classement.

      Donc pour le dire rapidement (et sans pour autant remettre en cause l’excellence de la recherche française dans pas mal de disciplines, mais une excellence dans laquelle les politiques publiques de ce gouvernement comme des précédents ne sont pas pour grand-chose), la France gagne des places dans le classement de Shangaï d’une part parce qu’on s’est aligné sur les règles à la con dudit classement, et d’autre part parce qu’on a accepté de sacrifier des pans entiers de financements publics de la recherche dans certains secteurs (notamment en diminuant drastiquement le nombre de postes disponibles).

      Allez je vous offre une petite comparaison. Évaluer la qualité de l’université et de la recherche française à partir du classement de Shangaï c’est un peu comme si on prétendait évaluer la qualité de la gastronomie française à partir d’un référentiel établi par Mac Donald : on serait rapidement en capacité de comprendre comment faire pour gagner des places, mais c’est pas sûr qu’on mangerait mieux.

      Je vous propose donc un classement alternatif et complémentaire au classement de Shangaï : le classement de Miamïam. Bien plus révélateur de l’état actuel de l’université française.
      Classement de Miamïam.

      Ce classement est simple. Pour y figurer il faut juste organiser des distributions alimentaires sur son campus universitaire.

      Le résultat que je vous livre ici est là aussi tout à fait enthousiasmant [non] puisqu’à la différence du classement de Shangaï ce sont non pas 27 universités et établissements mais (au moins) 40 !!! L’excellence de la misère à la française.

      Quelques précisions :

      – ce classement n’est pas exhaustif (j’ai fait ça rapidement via des requêtes Google)
      – l’ordre des universités ne signifie rien, l’enjeu était juste de lister “l’offre” qu’elles proposaient sans prendre en compte l’ancienneté ou la fréquence de ces distributions ni le nombre d’étudiant.e.s touché.e.s
      - ce classement est très en dessous de la réalité : par exemple je n’ai inscrit qu’une seule fois l’université de Nantes alors que des distributions alimentaires sont aussi organisées sur son campus de la Roche sur Yon. Beaucoup des universités présentes dans ce classement organisent en fait des distributions alimentaires sur plusieurs de leurs campus et devraient donc y figurer 2, 3 ou 4 fois au moins.
      - je me suis autorisé, sans la solliciter, à utiliser comme crédit image la photo de Morgane Heuclin-Reffait pour France Info, j’espère qu’elle me le pardonnera.

      [Mise à jour du 16 Août]

      On invite aussi le gouvernement à regarder le classement du coût de la vie pour les étudiantes et étudiants : en constante augmentation, et atteignant une nouvelle fois, pour cette population déjà très précaire, des seuils d’alerte indignes d’un pays civilisé.

      Enfin on pourra, pour être complet dans la recension de l’abandon politique de l’université publique, signaler la stratégie de mise à mort délibérée par asphyxie conduite par les gouvernements successifs depuis plus de 15 ans. Extrait :

      “En dix ans, le nombre de recrutements d’enseignants-chercheurs titulaires a diminué de près de moitié, avec 1 935 ouvertures de poste en 2021, contre 3 613 en 2011. En 2022, on enregistre un léger sursaut, avec 2 199 postes de professeur d’université et de maître de conférences ouverts.

      La situation est d’autant plus paradoxale que les universités se vident de leurs enseignants-chercheurs chevronnés, avec un nombre de départs à la retraite en hausse de + 10,4 % en 2021 et de + 10,5 % en 2022, selon une note statistique du ministère publiée en juin. Un avant-goût de la décennie qui vient, marquée par des départs massifs de la génération du baby-boom : entre 2021 et 2029, le ministère prévoit une augmentation de 53 % en moyenne, et de 97 % en sciences – le bond le plus élevé.“

      https://affordance.framasoft.org/2023/08/classement-shangai-miam-miam

  • Au Royaume-Uni, controverses et impuissance face aux migrants qui traversent la Manche
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/08/14/au-royaume-uni-controverses-et-impuissance-face-aux-migrants-qui-traversent-

    Au Royaume-Uni, controverses et impuissance face aux migrants qui traversent la Manche
    Alors que six Afghans sont morts, samedi, dans le naufrage de leur embarcation, le gouvernement britannique durcit son accueil et tient un discours très ferme.
    Par Eric Albert(Londres, correspondance)
    La deuxième semaine d’août avait été décrétée « small boats week » par le gouvernement britannique, qui voulait démontrer ses efforts pour mettre fin aux traversées de migrants en bateaux pneumatiques à travers la Manche. Elle a tourné au fiasco. Elle a commencé mardi 8 août avec les provocations du vice-président du Parti conservateur, Lee Anderson, qui a déclaré que les migrants pouvaient « foutre le camp en France » s’ils n’aimaient pas les conditions offertes au Royaume-Uni. Elle s’est terminée samedi 12 août par le naufrage au large de Sangatte (Pas-de-Calais), dans la Manche, d’un bateau transportant 65 migrants. Six Afghans sont morts noyés. Entre les deux, profitant du beau temps, 1 600 migrants sont arrivés sur les côtes anglaises entre le 10 et le 12 août, un record pour cette année, faisant franchir la barre symbolique des 100 000 migrants ayant traversé la Manche depuis 2018. « La semaine des small boats a été un désastre pour les tories », estime Stephen Kinnock, député travailliste, spécialiste des questions migratoires.
    Depuis 2014, le port de Calais et l’entrée de l’Eurotunnel sont progressivement devenus inaccessibles. Sous la pression des autorités britanniques, la France a multiplié les patrouilles et installé des barbelés, des caméras infrarouges, des caméras de surveillance, des détecteurs de CO₂… Le passage des migrants s’est déporté vers la traversée en mer, généralement à bord de gros bateaux pneumatiques. Ils étaient 300 à le faire en 2018, 2 000 en 2019, 8 500 en 2020, 28 500 en 2021 et 45 700 en 2022. Cette année, près de 16 700 ont déjà été détectés, un nombre en baisse d’environ 15 % par rapport à l’an dernier à la même période. La majorité vient de pays en guerre (Afghanistan, Syrie, Irak…), mais d’étranges filières apparaissent parfois : pendant l’été 2022, les Albanais ont brièvement représenté plus du tiers des arrivants.
    Cet afflux très spectaculaire, avec ses drames réguliers, provoque une crise politique latente au Royaume-Uni. Parmi les cinq priorités qu’il affiche pour son mandat, le premier ministre, Rishi Sunak, a promis d’« arrêter les bateaux ». Il compte pour cela sur une politique très dure. Il a fait adopter une nouvelle loi, approuvée définitivement par le Parlement le 20 juillet, qui interdit toute demande d’asile aux personnes entrées illégalement au Royaume-Uni. « Si les gens savent que, s’ils viennent ici illégalement, ils ne pourront pas rester, alors ils ne viendront plus », assurait M. Sunak en juin. Son gouvernement affirme que toute personne entrée illégalement sera « renvoyée rapidement, soit vers son pays d’origine, soit vers un pays tiers ».
    Au cœur de ce dispositif se trouve un accord avec le Rwanda, où les migrants doivent théoriquement être envoyés et où leur dossier doit être traité. Annoncé en grande pompe en avril 2022, l’accord avec Kigali est cependant bloqué par la justice britannique. En juin, la Haute Cour a rappelé qu’une expulsion ne peut avoir lieu que vers « un pays sûr » et elle a estimé que ce n’était pas le cas du Rwanda. Le gouvernement a fait appel, la Cour suprême doit trancher à l’automne. En attendant, les autorités britanniques espéraient malgré tout envoyer quelques signaux forts la semaine dernière. Une barge pouvant loger 500 migrants, le Bibby Stockholm, a été installée dans un port du Dorset, dans le sud de l’Angleterre. Ce mastodonte de trois étages devait recevoir les demandeurs d’asile récemment arrivés. L’endroit, décrit comme « spartiate » par le gouvernement britannique, est censé prouver qu’aucun traitement de faveur n’est réservé aux migrants. Las, l’affaire a rapidement tourné court : seuls 39 migrants ont eu le temps de s’y installer, avant qu’une alerte à la légionellose n’oblige à l’évacuer.
    De toute façon, l’impact de la barge ne peut être que « symbolique », explique au Times Peter Walsh, de l’Observatoire des migrations, basé à l’université d’Oxford. Elle peut abriter 500 personnes, alors qu’il y a actuellement 50 000 demandeurs d’asile installés dans des hôtels à travers le Royaume-Uni, ce qui coûte 6 millions de livres par jour (7 millions d’euros). « La barge est une façon d’envoyer un message au public britannique, pour lui dire que ses inquiétudes sont prises au sérieux », poursuit M. Walsh. Face à ce constat d’impuissance des autorités, les élus britanniques pointent souvent du doigt la responsabilité des autorités françaises, accusées de laisser passer les bateaux. « Sans les Français qui interceptent et arrêtent ces bateaux, on a un problème », estime Tim Loughton, un député conservateur. Son collègue Iain Duncan Smith dénonce même la « folie » des gardes-côtes français, dont les navires, selon lui, escorteraient les bateaux de migrants jusqu’aux eaux britanniques. « Cela leur donne une incitation à tenter la traversée », affirme-t-il au journal dominical Mail on Sunday.
    De fait, Londres et Paris coopèrent sur le sujet depuis des années. L’an dernier, les autorités françaises ont intercepté 33 000 tentatives de traversée. En mars, lors d’un sommet franco-britannique, l’accord a été renforcé, toujours selon le même schéma : les Britanniques paient, les Français font la police. Le gouvernement britannique a versé 232 millions de livres (270 millions d’euros) depuis 2014 ; pour les trois prochaines années, la somme doit atteindre 476 millions de livres (550 millions d’euros).
    Comme toujours dans ce débat, les autorités britanniques oublient une mise en perspective. Le Royaume-Uni est l’un des pays qui reçoit le moins de demandes d’asile : 89 000 en 2022, environ le même nombre qu’en Italie (84 000), mais nettement moins qu’en Espagne (118 000), en France (156 000) ou en Allemagne (244 000) : « 8 % des demandes d’asile [à travers l’Europe] ont été déposées au Royaume-Uni », note l’Observatoire des migrations. L’opposition travailliste en appelle à la fin des gesticulations politiques. « Il faut arrêter avec ces fausses annonces qui font les gros titres, alors que les gens meurent en mer », estime M. Kinnock. L’association Care4Calais estime que la seule solution est que le gouvernement britannique offre une voie d’accès légale aux demandeurs d’asile, pour qu’ils puissent poser leur dossier sans risquer leur vie en traversant la Manche. Mais, dans le climat politique actuel, personne, au gouvernement britannique, ne veut en entendre parler.

    #Covid-19#migrant#migration#grandebretagne#france#manche#traversee#mortalite#demandeasile#politiquemigratoire#rwanda#naufrage#postcovid#sante

  • Un mur flottant équipé de « scies circulaires » à la frontière américano-mexicaine
    https://observers.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20230811-un-mur-flottant-%C3%A9quip%C3%A9-de-scies-circulaires-%


    Finalement, on n’a plus besoin des nazis comme figure universelle de la #dégueulasserie #barbare humaine ordinaire.

    Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux le 8 août 2023 permettent d’observer de plus près la barrière frontalière flottante installée par le gouverneur du Texas, Greg Abbott, et destinée à empêcher les migrants clandestins d’entrer aux États-Unis. Ces installations controversées, près desquelles un corps a récemment été retrouvé, sont équipées de disques métalliques pointus fabriqués par Cochrane Global.

  • Serge Abad-Gallardo, ex franc-maçon converti : « La franc-maçonnerie est luciférienne » (Laportelatine.org)
    https://www.crashdebug.fr/serge-abad-gallardo-ex-franc-macon-converti-la-franc-maconnerie-est-lucif

    Je suis désolé, mais comme c’est d’actualité avec toutes les horreurs que l’ont voie et pour comprendre ce qui se passe, et pourquoi ils veulent détruire la France, et tout ce qui à un rapport au Christiannisme, surtout si ça a un rayonnement international.... (Notre-Dame)

    Une femme violée et perforée avec un balais à #Cherbourg ? Macron s’en fiche.Ce tyran n’a rien d’humain. #DESTITUTION ! https://t.co/u9JzEe9BXP — David van Hemelryck 🕊#D (@David_vanH) August 12, 2023

    Cela permet de comprendre à quel point le plan d’Albert Pike prend corps sous nos yeux. Et devant tant de fatalité vous vous êtes peut-être interrogé, et peut-être vous êtes vous demander si nous n’aviez pas un rôle à jouer ? Aussi vous savez nous aussi on découvre des éléments au fil du temps, et on vous avait relayé que les francs-maçons (...)

  • In Italia si torna in miniera? Lo scottante tema del titanio nel #Parco_del_Beigua

    In un’intervista il ministro parla dell’estrazione dei minerali in Italia.

    Minerali rari che provengono dalla terra, essenziali per costruire batterie e immagazzinare l’energia prodotta da fonti rinnovabili: così il ministro delle Imprese e del Made in Italy, #Adolfo_Urso, come riporta un’intervista rilasciata oggi a Il Foglio, ha aperto una serie di tavoli per discutere della bozza del regolamento presentato dall’Unione Europea con l’obiettivo di ridurre la dipendenza di materie prime da un singolo paese oltre il livello del 65 per cento. Come? Con l’estrazione e la produzione, lo smaltimento e il riciclo, utilizzando il Fondo europeo per gli investimenti strategici.

    Il ministro in sostanza spiega che l’Italia ha le carte per giocare una partita importante: insomma, le batterie nascono dalle miniere e - per non dover dipendere dalla Cina - la direzione è quella di tornare a scavare, anche sfidando i cosiddetti «Nimby» (not in my backyard). Sempre l’articolo riporta che delle 34 materie prime definite «critiche», l’Italia ne possiede 15, di cui 8 estraibili in pochi anni con le tecnologie moderne. È possibile già mappare una serie di regioni ricche di minerali interessanti: la Liguria ad esempio ha il rame, ma non solo. Come spiega anche Il Foglio e come più volte riportato anche da GenovaToday, sotto il terreno del Parco del Beigua è stimato che si trovi uno dei più grandi giacimenti di titanio a livello mondiale.

    Ed è un tema scottante anche se non riguarda propriamente la costruzione di batterie perché è dagli anni ’70 che si parla di questo territorio, da quando gli occhi delle compagnie estrattive si sono posate sul suo giacimento (qui la storia). Nonostante la ferma opposizione dei Comuni e dell’ente parco (riconosciuto Unesco Global Geopark), è da anni che la Cet, Compagnia Europea per il Titanio, chiede di poter scavare. Lo scorso maggio, il Tar ha confermato il divieto di effettuare ricerche minerarie nell’area ma la Cet ha presentato ricorso al Consiglio di Stato.

    E dunque ogni volta che si parla di materie prime e miniere, sindaci, cittadini e associazioni ambientaliste del territorio fanno un «salto sulla sedia» e cercano di tenere alta l’attenzione per non trasformare una vasta area naturale in una miniera con tutti i disagi che l’operazione comporterebbe dal punto di vista ambientale e turistico. Ma, nonostante il giacimento record, anche Il Foglio ribadisce che la zona è stata inserita in un parco nazionale protetto e l’idea di accedervi, dunque, è quanto meno irrealistica.

    https://www.genovatoday.it/green/miniera-titanio-parco-beigua.html

    #montagne #Ligurie #extractivisme #matières_premières #terres_rares #titane #Italie #Beigua #dépendance #Fonds_européen_pour_les_investissements_stratégiques #batteries #mines #matières_premières_critiques #résistance #Compagnia_Europea_per_il_Titanio (#CET)

    • Ricerca titanio del Beigua, Tar accoglie ricorso ambientalisti

      Vittoria delle associazioni ambientaliste (LAC, WWF, LIPU) costituite in giudizio contro Regione Liguria e la società Cet, per evitare il potenziale rischio di una devastante maxi-cava


      Nessuno andrà alla ricerca di titanio nel parco del Beigua.

      Lo ha deciso il Tribunale amministrativo regionale della Liguria accogliendo il ricorso degli ambientalisti. Con la sentenza, depositata venerdì 27 maggio, il tar ha dunque confermato il divieto di ricerche minerarie nell’area del monte Tarinè respingendo il ricorso della società Cet che voleva effettuare campionamento anche dentro l’area protetta del Parco.

      I giudici amministrativi inoltre hanno censurato la parte del decreto del dirigente regionale alle attività estrattive della Regione Liguria, emesso nel febbraio 2021, relativa al permesso di ricerca mineraria in aree esterne (Monte Antenna) del comprensorio del Parco Beigua, nei comuni di Urbe e Sassello, perché comunque facenti parte di una ZSC (zone speciale di conservazione) ricompresa nell’elenco comunitario delle cosiddette aree “Natura 2000”.

      Le associazioni ambientaliste Lac, Wwf e Lipu, patrocinate dallo studio legale Linzola di Milano, sottolineano come «la pretestuosa, ennesima campagna di pseudo ’ricerca’ pare avesse come unico obiettivo quello di perseverare nella vecchia richiesta di concessione mineraria che, quando in futuro ritenuta economicamente sostenibile, non potrebbe che sfociare che in una distruzione dell’area interessata, mediante utilizzo di esplosivi per estrarre in cava , macinare e separare con flottazione ed acidi un 6% di rutilo, con immense quantità di scarti e grandi necessità di prelievi idrici dal bacino del torrente Orba».

      «Schizofrenico - a detta degli ambientalisti - il comportamento della Regione Liguria che, al netto delle fasulle dichiarazioni di contrarietà dei partiti di maggioranza ad una cava di Rutilo sui monti Antenna e Tarinè, ha negato i permessi di ricerca dentro il parco regionale del Beigua, ma li ha consentiti in alcune aree adiacenti senza mai interpellare i proprietari dei terreni».

      Per le associazioni ambientaliste si è così evitata la devastatizione di centinaia di ettari di terreno da attività di cava a cielo aperto e in aree ad alto valore naturalistico e paesistico; salvaguardate anche lo spreco di grandi consumi di acqua e derivazioni dei torrenti Orba e Orbarina, e loro inquinamento ed indisponibilità di acqua potabile per i comuni piemontesi a valle; una mega discariche a cielo aperto per contenere oltre il 90% di rocce macinate di scarto, la cui lavorazione ne avrebbe aumentato il volume e reso i suoli instabili; transiti per decine di migliaia di passaggi di camion, a fronte di compensazioni economiche inesistenti, in quanto non previsti dalla legislazione mineraria; danni per la salute dei cittadini a causa della presenza nelle rocce di asbesto blu.

      https://www.genovatoday.it/cronaca/beigua-tar-titanio-ricorso-ambientalisti.html
      #justice #recours

    • Titanio nel parco Beigua, Grammatico (Legambiente): «Grande preoccupazione per salute e ambiente»

      «La Regione Liguria concede per tre anni alla Cet, la Compagnia Europea per il Titanio, il permesso di ricerca: la riteniamo una scelta sbagliata»

      «Legambiente Liguria esprime grande preoccupazione dopo avere appreso che con il decreto numero 1211-2021 la Regione Liguria concede per tre anni alla Cet, la Compagnia Europea per il Titanio, il permesso di ricerca, che ha la finalità di portare all’apertura della miniera nel comprensorio del Beigua»: così si esprime Legambiente Liguria in un comunicato.

      Torna dunque alla ribalta una questione annosa che da molto tempo sta facendo discutere, ovvero quella dell’estrazione del titanio nell’area del Parco del Beigua, uno dei più grandi giacimenti a livello mondiale. Si stima che, specie sotto il monte Tariné, si trovino 400 milioni di tonnellate di titanio, metallo prezioso su cui le compagnie estrattive hanno messo gli occhi da più di 40 anni, trovando la resistenza di cittadini e dell’ente parco (l’area è protetta ed è riconosciuta anche come Geoparco Unesco). Dall’altra parte, il Cet aveva proposto più volte alla Regione diritti di estrazione milionari.

      «Riteniamo questa una scelta sbagliata - dichiara Santo Grammatico, presidente di Legambiente Liguria, riferendosi al permesso di ricerca concesso alla Cet - anche se limitata ai 229 ettari (su 458 interessati complessivamente) che si trovano ai margini del confine del Parco del Beigua, perché è evidente che tutti gli impatti negativi dell’apertura di attività minerarie ricadrebbero nell’area Parco. Con la scusa della ricerca scientifica si verifica un precedente pericoloso, preludio ad una attività insostenibile per impatto ambientale e lontana dai desideri di sviluppo delle comunità locali che da anni si oppongono a qualsiasi ipotesi di apertura di attività estrattive. Legambiente è vicina ai cittadini che vivono e operano nel Parco del Beigua valutando anche le modalità e le sedi opportune per opporsi a questo decreto».
      L’unico parco ligure riconosciuto Unesco Global Geopark

      L’associazione ambientalista ricorda che il gruppo montuoso del Beigua, diventato Parco nel 1995, Geoparco europeo e mondiale nel 2005 e nel 2015 è stato riconosciuto Unesco Global Geopark ed è l’unico parco ligure a potersi fregiare di tale riconoscimento. «Inoltre in questi anni l’Ente Parco ha portato avanti un lavoro su un modello di sviluppo basato su agricoltura sostenibile, manutenzione dei boschi, turismo di qualità e consorzi sempre più attenti alla filiera corta - aggiunge Grammatico - anche per questo ribadiamo la nostra contrarietà al progetto che devasterebbe un’area protetta di inestimabile valore per biodiversità e valori ecologici e paesaggistici oltre che mettere a repentaglio la salute di chi vive nel territorio. Da un punto di vista sanitario, diversi studi hanno inoltre evidenziato come nel minerale grezzo nella composizione delle rocce del giacimento risulta la presenza di un anfibolo del gruppo degli asbesti in una percentuale pari a circa il 10/15% che ha tendenza a separarsi sotto forma di fibra e minutissimi aghi ed è notoriamente dannoso per la salute».
      Rossetti (Pd): «Chi tocca il Beigua se ne assume le responsabilità»

      In giornata arriva anche il commento del consigliere regionale Pippo Rossetti (Pd): «Sconcerto e preoccupazione per la delibera che consente alla Compagnia Europa del Titanio di perforare aree del Parco del Beigua allo scopo di aprire una miniera per la raccolta del titanio. Mi chiedo se l’assessore Scajola sa cosa succede. Tre mesi fa, a novembre, ai colleghi Candia e Pastorino ha risposto in Consiglio che non c’era alcuna richiesta e che comunque la Giunta sarebbe stata contraria. Dopo trenta anni di tentativi inutili da parte della Compagnia, la Giunta Toti da il suo consenso! Unico Geopark della Liguria vengono cosi contraddette tutte le politiche economico turistiche ambientali del territorio. Toti finge di non sapere che perforazioni ed estrazioni in quel luogo sono pericoli per la salute degli abitanti, perché in quelle rocce ci sono fibre che inducono all’asbestosi. Chiedo che Asl 2 , Arpal e Uffici Regionali vengano immediatamente a riferire in Commissione e l’assessore Scajola a spiegarci come mai in tre mesi la Giunta ha cambiato idea, sperando che non si nasconda dietro ai pareri tecnici degli uffici, alibi che vale come il due di picche. Chiedo che immediatamente tutti gli atti e il verbale della Conferenza dei Servizi vengano resi pubblici. Ognuno potrà assumersi le sue responsabilità».
      La Regione: «Nessuna autorizzazione ad attività estrattiva»

      «Non è stata fatta alcuna delibera di giunta autorizzativa per la raccolta del titanio nell’area del Beigua - replica l’assessore regionale Marco Scajola -. Il consigliere Rossetti confonde, strumentalizza e non sa di cosa parla. Gli uffici tecnici competenti hanno permesso, nel pieno rispetto delle norme, uno studio non invasivo che non interessa l’area del parco del Beigua. Non vi sarà alcuna attività di cava: lo studio verrà condotto senza alcun prelievo né alcun intervento sul territorio. Degli oltre 450 ettari richiesti ne sono stati concessi poco più di 200, escludendo l’area del parco naturale regionale del Beigua. Questo è stato fatto nonostante ci fossero pareri favorevoli ad autorizzare attività di studio in tutta l’area, anche del parco, da parte della Provincia di Savona, dell’Arpal e dell’Asl competente. Lo stesso Ministero dell’Ambiente ha confermato che l’attività di studio non dev’essere soggetta a VIA, proprio in virtù delle modalità non invasive che verranno impiegate. Nessuna autorizzazione quindi da parte della Giunta: chi afferma il contrario afferma il falso, senza conoscere minimamente l’argomento».

      https://www.genovatoday.it/attualita/titanio-parco-beigua-cosa-succede.html

    • Titanio nel Beigua, la Cet fa ricorso al Consiglio di Stato per effettuare le ricerche minerarie

      La questione dell’ipotetica miniera di titanio nell’area del Geoparco Unesco va avanti dagli anni ’70

      Era solo questione di tempo e a fine anno la Cet - Compagnia Europea per il Titanio - è tornata alla carica, presentando ricorso al Consiglio di Stato contro la sentenza del Tar Liguria dello scorso maggio, che di fatto ha confermato il divieto di effettuare ricerche minerarie nell’area del monte Tarinè.

      Siamo nel cuore del Parco del Beigua (unico parco ligure riconosciuto Unesco Global Geopark) che comprende un’area da anni finita nell’occhio del ciclone poiché cela uno dei più grandi giacimenti di titanio - elemento molto ricercato - a livello mondiale. Si stima che, specie sotto il monte Tariné, si trovino 400 milioni di tonnellate di titanio, metallo prezioso su cui le compagnie estrattive hanno messo gli occhi da più di 40 anni, trovando la resistenza di cittadini e dell’ente parco all’idea di aprire un’enorme miniera proprio nel verde. Dall’altra parte, la Cet aveva proposto più volte alla Regione diritti di estrazione milionari.
      La sentenza del Tar contestata

      La Cet ha presentato ricorso contro la sentenza del Tar del 27 maggio, chiedendo l’annullamento di diversi documenti. Tornando indietro nel tempo, nel 2015 la Cet aveva chiesto il rilaascio di un permesso di ricerca mineraria sul monte Tarinè per un periodo di tre anni. La Regione Liguria aveva dichiarato che l’istanza era inammissibile perché contrastante con il piano del Parco Naturale Regionale del Beigua che vieta di asportare rocce, minerali e fossili, fatti salvi i prelievi per ricerche scientifiche.

      Il ricorso proposto della Cet - interessata a svolgere ricerche sul giacimento di titanio - contro il provvedimento era già stato respinto dal Tar nel 2020 (con un’altra sentenza impugnata): “La sottoposizione dell’area sulla quale si dovrebbe svolgere la ricerca mineraria a molteplici vincoli sia paesaggistici che ambientali - avevano scritto i giudici - è di tale pervasività che non residua nessuno spazio per intraprendere un’attività di ricerca che non essendo compiuta da un istituto scientifico ma da un’azienda estrattiva avrebbe avuto, come fine ultimo, l’estrazione di minerali attività certamente vietata dalle norme a tutela del Parco Regionale del Beigua che costituisce, per circa il 50% l’area interessata alla concessione”.

      L’ente parco aveva successivamente approvato un regolamento che subordina le attività di ricerca al rilascio di un’autorizzazione dello stesso parco, stabilendo che comunque non sono ammesse le ricerche attinenti svolte da soggetti che non abbiano come scopo la promozione di attività di studio. Ritenendo che queste ultime previsioni fossero lesive dei suoi interessi, la Cet aveva impugnato il regolamento del Parco del Beigua, ma il Tar nel maggio 2022 aveva dichiarato il ricorso inammissibile. Adesso si andrà avanti con il Consiglio di Stato.
      Buschiazzo: «Vorremmo impiegare le nostre risorse per lo sviluppo del territorio, non per difenderci»

      La vicenda giudiziaria si trascina appunto dal 2015 e, come chiarisce il presidente del Parco del Beigua Daniele Buschiazzo, che ha divulgato la notizia del ricorso al Consiglio di Stato della Tar, la questione «continua a impegnare ingenti risorse del Parco del Beigua. Risorse che vorremmo impiegare per favorire lo sviluppo turistico del territorio, ma che dobbiamo invece usare per proteggerne l’elevata qualità ambientale dell’area e di conseguenza la qualità di vita delle persone che ci vivono. Non a caso qui insistono un’area protetta, la più grande della Liguria, un Geoparco riconosciuto dall’Unesco e diverse Zsc – zone speciali di conservazione».

      Sicuramente il ricorso al Consiglio di Stato non giunge inatteso: «Il Parco del Beigua e tutte le sue comunità - continua Buschiazzo - faranno valere le proprie ragioni come hanno sempre fatto. Ci aspettiamo che si costruisca anche la Regione Liguria assieme a noi».
      Un territorio sotto la spada di Damocle dal 1976

      Il territorio riconosciuto dall’Unesco è di fatto sotto la «spada di Damocle» dal 1976, da quando gli occhi delle compagnie si sono posate sul suo giacimento.

      «Sarebbe bene una volta per tutte mettere la parola fine su questa vicenda che ci fa disperdere risorse che potrebbero essere utili per il nostro territorio. Tanto più in un momento in cui la zona infetta dalla peste suina è estesa su tutto il parco da ormai un anno, creando notevoli problemi a tutte quelle attività che contribuiscono a mantenere il nostro territorio» conclude Buschiazzo.
      La preoccupazione di Legambiente

      «La Cet ribadisce, con questo ennesimo atto contro lo sviluppo sostenibile del territorio, la propria essenza - dichiara Santo Grammatico, presidente Legambiente Liguria -. Non ha alcun interesse nella ricerca scientifica ma lo ha solo di mero sfruttamento minerario per una delle zone geologicamente più pregevole della Liguria, tutelata da un parco regionale e riconosciuta dall’Unesco. Spiace constatare, a valle del ricorso dell’azienda al Consiglio di Stato, contro la sentenza del Tar Liguria che impedisce la ricerca nell’area Parco e nelle Zone Speciali di Conservazione, che non si sia definitivamente risolta la questione sul piano politico. La Regione Liguria con il Decreto 1211 del febbraio 2021 ha concesso alla Cet, per tre anni la possibilità di effettuare ricerche minerarie anche in zone limitrofe all’area tutelata, aprendo di fatto un conflitto sociale, economico e ambientale a danno degli enti e della comunità locale».

      «Saremo sempre insieme e al fianco delle Comunità e dei Parchi che si oppongono a uno sviluppo predatorio del nostro territorio» conclude il presidente dell’associazione ambientalista.

      https://www.genovatoday.it/cronaca/titanio-beigua-ricorso-cet-consiglio-stato.html

  • #Matières_premières_critiques : garantir des #chaînes_d'approvisionnement sûres et durables pour l’avenir écologique et numérique de l’UE

    La Commission propose un ensemble complet de mesures afin de garantir l’accès de l’UE à un approvisionnement sûr, diversifié, abordable et durable en matières premières critiques. Les matières premières critiques sont indispensables pour un large éventail de secteurs stratégiques, notamment l’industrie « zéro net », l’industrie numérique, l’aérospatial et la défense.

    Alors que la demande de matières premières critiques devrait augmenter de manière drastique, l’Europe dépend fortement des importations, souvent en provenance de fournisseurs d’un pays tiers en situation de quasi-monopole. L’UE doit atténuer les risques pour les chaînes d’approvisionnement liées à ces dépendances stratégiques afin de renforcer sa résilience économique. Les pénuries constatées au lendemain de la pandémie de COVID-19 et la crise énergétique qui a suivi l’invasion de l’Ukraine par la Russie témoignent de ces dépendances et peuvent mettre en péril les efforts que l’UE déploie pour atteindre ses objectifs climatiques et numériques.

    Le règlement et la communication sur les matières premières critiques adoptés aujourd’hui tirent parti des atouts et des possibilités du marché unique et des partenariats extérieurs de l’UE pour diversifier les chaînes d’approvisionnement de l’UE en matières premières critiques et renforcer leur résilience. La législation sur les matières premières critiques améliore également la capacité de l’UE à surveiller les risques de perturbations et à les atténuer, et renforce la circularité et la durabilité.

    La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’est exprimée en ces termes : « Cette législation nous rapprochera de nos ambitions en matière climatique. Elle améliorera significativement le raffinage, la transformation et le recyclage des matières premières ici en Europe. Les matières premières sont indispensables à la fabrication de technologies clés pour notre double transition, telles que la production d’énergie éolienne, le stockage de l’hydrogène ou les batteries. Nous renforçons notre coopération avec des partenaires commerciaux fiables à l’échelle mondiale afin de réduire les dépendances actuelles de l’UE à l’égard d’un seul ou de quelques pays. Il est dans notre intérêt mutuel d’augmenter la production de manière durable et, dans le même temps, de garantir le niveau le plus élevé de diversification des chaînes d’approvisionnement pour nos entreprises européennes. »

    Avec la réforme de l’organisation du marché de l’électricité et le règlement pour une industrie « zéro net », les mesures sur les matières premières critiques annoncées aujourd’hui créent un environnement réglementaire favorable aux industries « zéro net » et à la compétitivité de l’industrie européenne, comme annoncé dans le plan industriel du pacte vert.

    Mesures intérieures

    La législation sur les matières premières critiques dotera l’UE des outils permettant de lui garantir l’accès à un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques, principalement par les moyens suivants :

    Définir des priorités d’action claires : en plus de mettre à jour la liste des matières premières critiques, la législation dresse une liste de matières premières stratégiques, qui sont essentielles pour les technologies importantes pour les ambitions écologiques et numériques de l’Europe ainsi que pour les applications spatiales et de défense, mais dont l’approvisionnement futur n’est pas sûr. Le règlement intègre en même temps, dans le droit de l’UE, la liste des matières premières critiques et celle des matières premières stratégiques. Il fixe des valeurs de référence claires en ce qui concerne les capacités intérieures tout au long de la chaîne d’approvisionnement en matières premières stratégiques pour diversifier l’approvisionnement de l’UE à l’horizon 2030 :

    - l’extraction dans l’UE doit permettre de produire au moins 10 % de sa consommation annuelle,
    - la transformation opérée dans l’UE doit permettre de produire au moins 40 % de sa consommation annuelle,
    - le recyclage effectué dans l’UE doit permettre de produire au moins 15 % de sa consommation annuelle,
    - pas plus de 65 % de la consommation annuelle de l’Union de chaque matière première stratégique à n’importe quel stade de transformation pertinent ne doit provenir d’un seul pays tiers.

    Créer des chaînes d’approvisionnement européennes sûres et résilientes en matières premières critiques : la législation réduira la charge administrative et simplifiera les procédures d’autorisation pour les projets relatifs aux matières premières critiques dans l’UE. En outre, les projets stratégiques sélectionnés bénéficieront d’un soutien pour l’accès au financement et les délais d’autorisation seront raccourcis (24 mois pour les permis d’extraction et 12 mois pour les permis de traitement et de recyclage). Les États membres devront également élaborer des programmes nationaux d’exploration des ressources géologiques.

    Veiller à ce que l’UE soit en mesure d’atténuer les risques liés à l’approvisionnement : pour garantir la résilience des chaînes d’approvisionnement, la législation prévoit un suivi des chaînes d’approvisionnement en matières premières critiques et la coordination des stocks de matières premières stratégiques entre les États membres. Certaines grandes entreprises devront réaliser un audit de leurs chaînes d’approvisionnement en matières premières stratégiques, comportant un test de résistance à l’échelle de l’entreprise.

    Investir dans la recherche, l’innovation et les compétences : la Commission renforcera l’adoption et le déploiement de technologies de pointe dans le domaine des matières premières critiques. En outre, la mise en place d’un partenariat à grande échelle pour les compétences relatives aux matières premières critiques et d’une académie des matières premières promouvra les compétences pertinentes pour la main-d’œuvre travaillant dans les chaînes d’approvisionnement en matières premières critiques. Sur le plan extérieur, la stratégie « Global Gateway » servira de vecteur pour aider les pays partenaires à développer leurs compétences et leurs propres capacités d’extraction et de traitement.

    Protéger l’environnement en améliorant la circularité et la durabilité des matières premières critiques : l’amélioration de la sécurité et du caractère abordable de l’approvisionnement en matières premières critiques doit aller de pair avec l’intensification des efforts visant à atténuer toute incidence négative, tant au sein de l’UE que dans les pays tiers, en ce qui concerne les droits du travail, les droits humains et la protection de l’environnement. Les efforts visant à développer les chaînes de valeur des matières premières critiques de manière plus durable contribueront également à promouvoir le développement économique dans les pays tiers ainsi que la gouvernance en matière de durabilité, les droits humains, la résolution des conflits et la stabilité régionale.

    Les États membres devront adopter et mettre en œuvre des mesures nationales visant à améliorer la collecte des déchets riches en matières premières critiques et à garantir leur recyclage en matières premières critiques secondaires. Les États membres et les opérateurs privés devront étudier les possibilités de récupération des matières premières critiques provenant des déchets d’extraction des activités minières actuelles mais aussi des déchets provenant des anciens sites miniers. Les produits contenant des aimants permanents devront satisfaire aux exigences en matière de circularité et être accompagnés d’informations sur leur recyclabilité et leur teneur en matières recyclées.

    Engagement international

    Diversifier les importations de matières premières critiques dans l’Union : l’Union ne couvrira jamais ses propres besoins en matières premières et continuera de dépendre des importations pour la majeure partie de sa consommation. Le commerce international est donc essentiel pour soutenir la production mondiale et assurer la diversification de l’approvisionnement. L’UE devra renforcer son engagement mondial avec des partenaires fiables afin de mettre en place des investissements et de les diversifier, de promouvoir la stabilité du commerce international et de renforcer la sécurité juridique pour les investisseurs. Elle recherchera en particulier des partenariats mutuellement bénéfiques avec les marchés émergents et les économies en développement, notamment dans le cadre de sa stratégie « Global Gateway ».

    Elle intensifiera ses actions commerciales, notamment en créant un club des matières premières critiques pour tous les pays partageant les mêmes valeurs et désireux d’améliorer les chaînes d’approvisionnement mondiales, en renforçant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en élargissant son réseau d’accords de facilitation des investissements durables et d’accords de libre-échange et en insistant davantage sur l’application de la législation afin de lutter contre les pratiques commerciales déloyales.

    L’UE poursuivra le développement des partenariats stratégiques : elle collaborera avec des partenaires fiables pour favoriser leur propre développement économique de manière durable par la création de chaînes de valeur dans leur propre pays, tout en promouvant des chaînes de valeur sûres, résilientes, abordables et suffisamment diversifiées pour l’UE.

    Prochaines étapes

    Le règlement proposé sera examiné et approuvé par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne avant son adoption et son entrée en vigueur.

    Contexte

    Cette initiative se compose d’un règlement et d’une communication. Le règlement établit un cadre réglementaire pour soutenir le développement des capacités intérieures et renforcer la durabilité et la circularité des chaînes d’approvisionnement en matières premières critiques dans l’Union. La communication propose des mesures visant à soutenir la diversification des chaînes d’approvisionnement grâce à de nouveaux partenariats internationaux qui se renforcent mutuellement. L’accent est également mis sur la maximisation de la contribution des accords commerciaux de l’UE, en pleine complémentarité avec la stratégie « Global Gateway ».

    La législation sur les matières premières critiques a été annoncée par la présidente von der Leyen lors de son discours sur l’état de l’Union de 2022, dans lequel elle a appelé à s’attaquer à la dépendance de l’UE à l’égard des importations de matières premières critiques, en sécurisant un approvisionnement intérieur diversifié et durable en ce qui concerne ces matières. Elle fait suite à la déclaration de Versailles de 2022 adoptée par le Conseil européen, qui soulignait l’importance stratégique des matières premières critiques pour garantir l’autonomie stratégique de l’Union et la souveraineté européenne. Elle répond également aux conclusions de la conférence sur l’avenir de l’Europe et à la résolution du Parlement européen de novembre 2021 sur une stratégie européenne pour les matières premières critiques.

    Les mesures sont appuyées sur l’évaluation de la criticité de 2023, le rapport de prospective axé sur les technologies stratégiques et les actions lancées dans le cadre du plan d’action de 2020 sur les matières premières critiques. La proposition présentée aujourd’hui s’appuie sur les travaux scientifiques du Centre commun de recherche (JRC) de la Commission. Parallèlement à son rapport de prospective, le JRC a remanié le système d’information sur les matières premières, qui apporte des connaissances sur les matières premières tant primaires (extraites/récoltées) que secondaires (par exemple issues du recyclage). L’outil fournit des informations sur des matériaux et des pays spécifiques ainsi que sur différents secteurs et technologies, et comprend des analyses de l’offre et de la demande actuelles et futures.

    La législation sur les matières premières critiques est présentée parallèlement à celle pour une industrie « zéro net », qui vise à accroître la production européenne de technologies clés neutres en carbone ou « zéro net », afin de garantir des chaînes d’approvisionnement sûres, durables et compétitives en matière d’énergie propre en vue d’atteindre les ambitions climatiques et énergétiques de l’UE.

    https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_23_1661
    #matières_premières #apprivoisement #UE #EU #Union_européenne #relocalisation #diversification #zéro_net #dépendance #alternative #risque #pénurie #ici_en_Europe #batteries #raffinage #transformation #recyclage #plan_industriel_du_pacte_vert #matières_premières_stratégiques #extraction #extractivisme #règlement #déclaration_de_Versailles #Critical_Raw_Materials #European_Critical_Raw_Materials_Act

    –—

    ajouté à la métaliste sur l’#extraction de #terres_rares dans les #Alpes :
    https://seenthis.net/messages/1013289

  • Entre désillusions et intégration, le sort contrasté des migrants venus travailler au Japon
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/08/10/entre-desillusions-et-integration-le-sort-contraste-des-migrants-venus-trava

    Entre désillusions et intégration, le sort contrasté des migrants venus travailler au Japon
    Par Bruno Philip (Tokyo, Fukuoka, (Envoyé spécial))
    Le nombre des travailleurs étrangers ne cesse d’augmenter dans l’Archipel, qui a un besoin croissant de main-d’œuvre. La satisfaction affichée par les mieux intégrés ne cache pas les espoirs déçus de nombre d’ouvriers.
    Ngo Gia Khanh est un solide gaillard de 22 ans aux cheveux ras, dont le regard un peu inquiet semble témoigner du parcours en dents de scie qui a été le sien depuis son départ du Vietnam, voici un an. Quand il a suivi la filière dite des « stagiaires techniques » permettant à des travailleurs étrangers sans qualification d’être embauchés dans des entreprises japonaises, il n’avait certes pas imaginé ce qui l’attendait. Natif de la province septentrionale de Quang Ninh, située dans le nord du Vietnam, le jeune homme avait deux objectifs, l’un étant le corollaire de l’autre : « Apprendre le japonais et faire carrière ici, au Japon. » Alors il est parti pour Hanoï, la capitale, où il a entrepris d’apprendre des rudiments de japonais. Puis des intermédiaires locaux l’ont mis en relation avec les organismes nippons chargés d’organiser le séjour au Japon des « stagiaires ». Et de leur trouver du travail. Au printemps 2022, il a fini par arriver à Tokyo.
    Khanh a rapidement dû déchanter (...)
    Le crépuscule démographique du Japon force les entreprises locales à recourir à de plus en plus de main-d’œuvre venue d’ailleurs, notamment dans les secteurs de la construction, des chantiers navals et des services hospitaliers. A la fin du siècle dernier, près de 90 millions de Japonais avaient entre 15 et 65 ans. En 2040, la même tranche d’âge devrait se réduire à 60 millions d’individus. Conséquence, selon un rapport publié par l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA), l’archipel aura besoin de 4,2 millions de travailleurs étrangers d’ici à 2030, et de 6,7 millions d’ici à 2040... Le Japon incarne l’un de ces rêves d’ailleurs et de promesses de lendemains souriants pour des jeunes sans emploi issus des milieux modestes des pays d’Asie du Sud et du Sud-Est. Mais cette filière dite des « stagiaires », réservoir de main-d’œuvre bon marché pour les entreprises qu’a connues Ngo Gia Khanh, est de plus en plus controversée : elle favorise les abus de pouvoir des patrons à l’égard d’ouvriers étrangers confrontés, entre autres difficultés, aux codes culturels complexes d’un univers nippon volontiers replié sur lui-même et, pour l’essentiel, resté ethniquement homogène : le nombre de résidents étrangers dépasse à peine les 2 % d’une population de 125 millions d’habitants. En théorie, cette filière devait permettre à des ouvriers peu ou pas du tout qualifiés d’acquérir des compétences qu’ils pourraient mettre à profit une fois rentrés dans leurs pays d’origine. Or la réalité est tout autre : « Ce programme de [stages techniques] est de longue date connu pour être un moyen d’exploiter les ouvriers », dénonçait en avril, dans un cinglant éditorial, le grand quotidien de centre gauche Asahi shimbun. Environ 340 000 travailleurs aujourd’hui employés au Japon ont suivi cette filière.
    Cette dernière est désormais si décriée qu’un panel d’experts mandatés par le gouvernement a recommandé au mois de mai qu’elle soit tout bonnement supprimée et remplacée par un système « réformé », plus respectueux « des droits de l’Homme », selon les termes du rapport. L’une des suggestions de ce panel propose que des « stagiaires » ayant acquis un certain niveau de maîtrise de leurs spécialités puissent accéder à la catégorie des « travailleurs qualifiés ». Ces derniers bénéficient d’emplois mieux payés et plus stables. Pour l’instant, on en est loin : « Environ 50 stagiaires viennent chaque mois se plaindre chez nous de leurs conditions de travail », s’émeut Yoshimizu Jiho, la fondatrice de l’Association de support mutuel Japon-Vietnam, qui a pour but d’aider des travailleurs vietnamiens.
    Une cueilleuse de fraises du département de Tochigi (centre du pays) narre de son côté une histoire encore plus tragique que celle du jeune Vietnamien : « Le contremaître m’a violée, je suis tombée enceinte, j’ai avorté », raconte, peinant à trouver ses mots, Sophan Ean, 21 ans, originaire de Battambang, ville du Nord-Ouest cambodgien. Aujourd’hui hébergée dans un refuge géré par une autre ONG, le Réseau de solidarité avec les migrants au Japon, son avenir reste précaire. « Je ne peux pas rentrer au pays, je me suis endettée auprès des intermédiaires khmers qui m’ont aiguillée sur la filière et, de toute façon, je ne trouverai pas un travail aussi bien payé au Cambodge », dit-elle. Sophan continue donc de cueillir les fraises dans la même entreprise. Et tant pis, comme elle l’avoue, si son violeur de contremaître s’obstine à essayer de la « séduire » à nouveau.
    Les questions migratoires ne sont pas encore devenues des motifs de querelle au Japon, en dépit des efforts des milieux d’extrême droite pour agiter les dangers d’une immigration excessive. En 2022, selon les statistiques du ministère du travail, le nombre de travailleurs étrangers, toutes filières confondues, s’élevait à 1,8 million de personnes. Mais le nombre de migrants a doublé depuis 2014 et quadruplé depuis 2008. La plupart d’entre eux sont vietnamiens, chinois, philippins et indonésiens.
    Sushil Paudel, 33 ans, originaire du Népal, dans son restaurant indien Himalaya, à Fukuoka (Japon), le 9 juin 2023. « On ne peut pas dire qu’un sentiment antimigrants ait émergé dans l’opinion publique », souligne le sociologue Naoto Higuchi, de l’université Waseda, de Tokyo. Jusqu’à présent, précise-t-il, les « gouvernements successifs du Japon ont pris soin de ne pas politiser cette question ». Même si celle-ci risque d’être de plus en plus à l’ordre du jour. Dans le même temps, en raison de la chute du yen, le Japon n’est plus aussi attractif que par le passé, ce qui pourrait à terme provoquer une chute de l’immigration, générant des problèmes inverses de ceux redoutés par l’extrême droite.
    Fukuoka, à cinq heures de Tokyo en Shinkansen – le TGV nippon –, grande agglomération située sur la côte ouest de l’île méridionale de Kyushu, brille ce soir-là de tous les feux d’un extraordinaire bouillonnement urbain. Empilements de cubes de béton alignés de part et d’autre de la rivière Naka, la ville, forte d’une population d’un million six cent mille âmes, est un chef-lieu régional mais aussi une importante destination « migratoire » de l’Archipel. « Il y a ici une dizaine de milliers de migrants venus du Népal », explique Sushil Paudel, 33 ans. Ce jeune Népalais originaire de Pokhara, une ville située au pied de l’Himalaya, a trouvé ses marques au Kyushu. Son récit est aux antipodes de celui des malheureux « stagiaires » rencontrés à Tokyo : Sushil est un homme heureux, rien ne le ferait partir du Japon. (...) D’autant que, « contrairement aux Coréens, aux Chinois et même aux Vietnamiens, qui ne sont guère appréciés des Japonais, les Népalais sont bien vus », veut croire Sushil. Ajoutant avec un brin d’ironie : « Tant qu’on n’est pas trop nombreux… » Le jeune Népalais n’est visiblement pas le seul à apprécier son exil. Zahid Abdullah, un Bangladais de 31 ans, sur place depuis six ans, a bataillé ferme pour décrocher son actuel travail de vendeur de voitures. Mais il a aujourd’hui le sentiment d’être respecté et se réjouit que les clients le félicitent pour son niveau de japonais. Dans la petite mosquée au discret minaret de la banlieue de Fukuoka, où le jeune Bangladais vient faire sa prière du soir en compagnie d’autres musulmans, originaires d’Indonésie, du Pakistan, du Ghana, d’Egypte, il reconnaît que son salaire ne lui permet pas encore d’« économiser grand-chose » ; mais il ajoute : « Jamais je n’aurais imaginé, quand j’étais encore au pays, faire un travail que j’aime autant. »Lui aussi originaire du Bangladesh, Rafiqul Islam Maruf, 56 ans, est arrivé pour la première fois au Japon en 1993 avec une bourse gouvernementale dans l’intention d’y finir son doctorat en informatique. Même s’il a vécu ici par intermittence, ce professeur de télémédecine a toutes les raisons de se féliciter des dix-sept ans passés dans l’Archipel. Marié à une Japonaise, père de deux enfants, il se souvient avoir été « le premier étudiant bangladais de la faculté d’ingénierie » où il étudiait alors. Plusieurs entreprises l’ont ensuite courtisé pour le dissuader de rentrer dans son pays natal, preuve d’un besoin croissant d’ingénieurs étrangers et signe de la politique japonaise d’immigration choisie. Rafiqul Islam Maruf songe malgré tout à retourner au Bangladesh dans quelques années, même s’il se dit satisfait d’une existence incomparable avec celle qu’il aurait eue s’il était resté dans son pays.

    #Covid-19#migrant#migration#japon#demographie#travailleurmigrant#politiquemigratoire#vieillissement#economie#postcovid

  • #Francesco_Sebregondi : « On ne peut pas dissocier les violences policières de la question du racisme »

    Après avoir travaillé pour #Forensic_Architecture sur les morts d’#Adama_Traoré et de #Zineb_Redouane, l’architecte #Francesco_Sebregondi a créé INDEX, pour enquêter sur les #violences_d’État et en particulier sur les violences policières en #France et depuis la France. Publié plusieurs semaines avant la mort de Nahel M., cet entretien mérite d’être relu attentivement. Rediffusion d’un entretien du 22 avril 2023

    C’est en 2010 que l’architecte, chercheur et activiste Eyal Weizman crée au Goldsmiths College de Londres un groupe de recherche pluridisciplinaire qui fera date : Forensic Architecture. L’Architecture forensique avait déjà fait l’objet d’un entretien dans AOC.

    Cette méthode bien particulière avait été créée à l’origine pour enquêter sur les crimes de guerre et les violations des droits humains en utilisant les outils de l’architecture. Depuis, le groupe a essaimé dans différentes parties du monde, créant #Investigative_Commons, une communauté de pratiques rassemblant des agences d’investigation, des activistes, des journalistes, des institutions culturelles, des scientifiques et artistes (la réalisatrice Laura Poitras en fait partie), etc. Fondé par l’architecte Francesco Sebregondi à Paris en 2020, #INDEX est l’une d’entre elles. Entre agence d’expertise indépendante et média d’investigation, INDEX enquête sur les violences d’État et en particulier sur les violences policières en France et depuis la France. Alors que les violences se multiplient dans le cadre des mouvements sociaux, comment « faire en sorte que l’État même s’équipe de mécanismes qui limitent les excès qui lui sont inhérents » ? Si la vérité est en ruines, comment la rétablir ? OR

    Vous avez monté l’agence d’investigation INDEX après avoir longtemps travaillé avec Forensic Architecture. Racontez-nous…
    Forensic Architecture est né en 2010 à Goldsmiths à Londres. À l’origine, c’était un projet de recherche assez expérimental, pionnier dans son genre, qui cherchait à utiliser les outils de l’architecture pour enquêter sur les violations des #droits_humains et en particulier du droit de la guerre. La période était charnière : avec l’émergence des réseaux sociaux et des smartphones, les images prises par des témoins étaient diffusées très rapidement sur des réseaux souvent anonymes. La quantité d’#images et de #documentation_visuelle disponible commençait à augmenter de manière exponentielle et la démocratisation de l’accès à l’#imagerie_satellitaire permettait de suivre d’un point de vue désincarné l’évolution d’un territoire et les #traces qui s’y inscrivaient. La notion de #trace est importante car c’est ce qui nous relie à la tradition de l’enquête appliquée plus spécifiquement au champ spatial. Les traces que la #guerre laisse dans l’#environnement_urbain sont autant de points de départ pour reconstruire les événements. On applique à ces traces une série de techniques d’analyse architecturale et spatiale qui nous permettent de remonter à l’événement. Les traces sont aussi dans les documents numériques, les images et les vidéos. Une large partie de notre travail est une forme d’archéologie des pixels qui va chercher dans la matérialité même des documents numériques. On peut reconstituer les événements passés, par exemple redéployer une scène en volume, à partir de ses traces numériques en image.

    Quels en ont été les champs d’application ?
    À partir du travail sur les conflits armés, au sein de Forensic Architecture, on a développé une série de techniques et de recherches qui s’appliquent à une variété d’autres domaines. On commençait à travailler sur les violences aux frontières avec le projet de Lorenzo Pezzani et Charles Zeller sur les bateaux de migrants laissés sans assistance aux frontières méditerranéennes de l’Europe, à des cas de #violences_environnementales ou à des cas de violences policières… L’origine de notre approche dans l’enquête sur des crimes de guerre faisait qu’on avait tendance à porter un regard, depuis notre base à Londres, vers les frontières conflictuelles du monde Occidental. On s’est alors rendus compte que les violences d’État qui avaient lieu dans des contextes plus proches de nous, que ce soit en Grande-Bretagne, aux États-Unis ou en Grèce, pouvaient bénéficier d’un éclairage qui mobiliserait les mêmes techniques et approches qu’on avait à l’origine développées pour des situations de conflits armés. Tout cela est en lien assez direct avec la militarisation de la #police un peu partout dans le Nord global, le contexte occidental, que ce soit au niveau des #armes utilisées qu’au niveau des #stratégies employées pour maintenir l’ordre.

    La France vous a ensuite semblé être un pays depuis lequel enquêter ?
    Je suis revenu vivre en France en 2018 en plein milieu de la crise sociale autour du mouvement des Gilets jaunes et de son intense répression policière. Dès ce moment-là, il m’a semblé important d’essayer d’employer nos techniques d’enquête par l’espace et les images pour éclairer ce qui était en train de se passer. On en parlait aussi beaucoup. En 2020, j’ai dirigé les enquêtes sur la mort d’Adama Traoré et de Zineb Redouane pour le compte de Forensic Architecture depuis la France avec une équipe principalement française. C’était une période d’incubation d’INDEX en quelque sorte. Ces enquêtes ont initié notre travail sur le contexte français en rassemblant des moyens et une équipe locale.
    On est aujourd’hui dans un rapport de filiation assez clair avec Forensic Architecture même si INDEX est structurellement autonome. Les deux organisations sont très étroitement liées et entretiennent des relations d’échange, de partage de ressources, etc. Tout comme Forensic Architecture, INDEX est l’une des organisations du réseau international Investigative Commons qui fédère une douzaine de structures d’investigation indépendantes dans différents pays et qui travaillent à l’emploi des techniques d’enquêtes en sources ouvertes dans des contextes locaux.

    Il existe donc d’autres structures comme INDEX ?
    Elles sont en train d’émerger. On est dans cette phase charnière très intéressante. On passe d’une organisation reconnue comme pionnière dans l’innovation et les nouvelles techniques d’enquête à tout un champ de pratiques qui a encore beaucoup de marge de développement et qui, en se frottant à des contextes locaux ou spécifiques, vient éprouver sa capacité à interpeller l’opinion, à faire changer certaines pratiques, à demander de la transparence et des comptes aux autorités qui se rendent responsables de certaines violences.

    On utilise depuis toujours le terme d’enquête dans les sciences humaines et sociales mais l’on voit aujourd’hui que les architectes, les artistes s’en emparent, dans des contextes tous très différents. Qu’est-ce que l’enquête pour INDEX ?
    On emploie le terme d’#enquête dans un sens peut-être plus littéral que son usage en sciences humaines ou en recherche car il est question de faire la lumière sur les circonstances d’un incident et d’établir des rapports de causalité dans leur déroulement, si ce n’est de responsabilité. Il y a aussi cette idée de suivre une trace. On travaille vraiment essentiellement sur une matière factuelle. L’enquête, c’est une pratique qui permet de faire émerger une relation, un #récit qui unit une série de traces dans un ensemble cohérent et convaincant. Dans notre travail, il y a aussi la notion d’#expertise. Le nom INDEX est une contraction de « independant expertise ». C’est aussi une référence à la racine latine d’indice. Nous cherchons à nous réapproprier la notion d’expertise, trop souvent dévoyée, en particulier dans les affaires de violences d’État sur lesquelles on travaille.

    Vos enquêtes s’appuient beaucoup sur les travaux d’Hannah Arendt et notamment sur Vérité et politique qui date de 1964.
    On s’appuie beaucoup sur la distinction que Hannah Arendt fait entre #vérité_de_fait et #vérité_de_raison, en expliquant que les vérités de fait sont des propositions qui s’appuient sur l’extérieur, vérifiables, et dont la valeur de vérité n’est possible qu’en relation avec d’autres propositions et d’autres éléments, en particuliers matériels. La vérité de raison, elle, fait appel à un système de pensée auquel on doit adhérer. C’est à partir de cette distinction qu’Arendt déploie les raisons pour lesquelles #vérité et #politique sont toujours en tension et comment la pratique du politique doit s’appuyer sur une série de vérités de raison, sur l’adhésion d’un peuple à une série de principes que le pouvoir en place est censé incarner. Ainsi, le pouvoir, dépendant de cette adhésion, doit tenir à distance les éléments factuels qui viendraient remettre en cause ces principes. C’est ce qu’on essaye de déjouer en remettant au centre des discussions, au cœur du débat et de l’espace public des vérités de fait, même quand elles sont en friction avec des « #vérités_officielles ».
    Du temps d’Hannah Arendt, le politique avait encore les moyens d’empêcher la vérité par le régime du secret. C’est beaucoup moins le cas dans les conditions médiatiques contemporaines : le problème du secret tend à céder le pas au problème inverse, celui de l’excès d’informations. Dans cet excès, les faits et la vérité peuvent se noyer et venir à manquer. On entend alors parler de faits alternatifs, on entre dans la post-vérité, qui est en fait une négation pure et simple de la dimension sociale et partagée de la vérité. Si on veut résister à ce processus, si on veut réaffirmer l’exigence de vérité comme un #bien_commun essentiel à toute société, alors, face à ces défis nouveaux, on doit faire évoluer son approche et ses pratiques. Beaucoup des techniques développées d’abord avec Forensic Architecture et maintenant avec INDEX cherchent à développer une culture de l’enquête et de la #vérification. Ce sont des moyens éprouvés pour mettre la mise en relation de cette masse critique de données pour faire émerger du sens, de manière inclusive et participative autant que possible.

    L’#architecture_forensique, même si elle est pluridisciplinaire, s’appuie sur des méthodes d’architecture. En quoi est-ce particulièrement pertinent aujourd’hui ?
    L’une des techniques qui est devenue la plus essentielle dans les enquêtes que l’on produit est l’utilisation d’un modèle 3D pour resituer des images et des vidéos d’un événement afin de les recouper entre elles. Aujourd’hui, il y a souvent une masse d’images disponibles d’un événement. Leur intérêt documentaire réside moins dans l’individualité d’une image que sur la trame de relations entre les différentes images. C’est la #spatialisation et la #modélisation en 3D de ces différentes prises de vue qui nous permet d’établir avec précision la trame des images qui résulte de cet événement. Nous utilisons les outils de l’architecture à des fins de reconstitution et de reconstruction plus que de projection, que ce soit d’un bâtiment, d’un événement, etc.

    Parce qu’il faut bien rappeler que vos enquêtes sont toujours basées sur les lieux.
    L’environnement urbain est le repère clé qui nous permet de resituer l’endroit où des images ont été prises. Des détails de l’environnement urbain aussi courants qu’un passage piéton, un banc public, un kiosque à journaux ou un abribus nous permettent de donner une échelle pour reconstituer en trois dimensions où et comment une certaine scène s’est déroulée. Nous ne considérons pas l’architecture comme la pratique responsable de la production de l’environnement bâti mais comme un champ de connaissance dont la particularité est de mettre en lien une variété de domaines de pensées et de savoirs entre eux. Lorsqu’on mobilise l’architecture à des fins d’enquête, on essaye de faire dialoguer entre elles toute une série de disciplines. Nos équipes mêmes sont très interdisciplinaires. On fait travailler des vidéastes, des ingénieurs des matériaux, des juristes… le tout pour faire émerger une trame narrative qui soit convaincante et qui permette de resituer ce qui s’est passé autour de l’évènement sous enquête.

    L’historienne Samia Henni qui enseigne à Cornell University aux États-Unis, et qui se considère « historienne des environnements bâtis, détruits et imaginés », dit qu’apprendre l’histoire des destructions est aussi important que celles des constructions, en raison notamment du nombre de situations de conflits et de guerres sur la planète. Quand on fait du projet d’architecture, on se projette en général dans l’avenir. En ce qui vous concerne, vous remodélisez et reconstituez des événements passés, souvent disparus. Qu’est-ce que ce rapport au temps inversé change en termes de représentations ?
    Je ne suis pas sûr que le rapport au temps soit inversé. Je pense que dans la pratique de l’enquête, c’est toujours l’avenir qui est en jeu. C’est justement en allant chercher dans des événements passés, en cherchant la manière précise dont ils se sont déroulés et la spécificité d’une reconstitution que l’on essaye de dégager les aspects structurels et systémiques qui ont provoqué cet incident. En ce sens, ça nous rapproche peut-être de l’idée d’#accident de Virilio, qui est tout sauf imprévisible.
    L’enjeu concerne l’avenir. Il s’agit de montrer comment certains incidents ont pu se dérouler afin d’interpeller, de demander des comptes aux responsables de ces incidents et de faire en sorte que les conditions de production de cette #violence soient remises en question pour qu’elle ne se reproduise pas. Il s’agit toujours de changer les conditions futures dans lesquelles nous serons amenés à vivre ensemble, à habiter, etc. En cela je ne pense pas que la flèche du temps soit inversée, j’ai l’impression que c’est très proche d’une pratique du projet architectural assez classique.

    Vous utilisez souvent le terme de « violences d’État ». Dans une tribune de Libération intitulée « Nommer la violence d’État » en 2020, encore d’actualité ces temps-ci, l’anthropologue, sociologue et médecin Didier Fassin revenait sur la rhétorique du gouvernement et son refus de nommer les violences policières. Selon lui, « ne pas nommer les violences policières participe précisément de la violence de l’État. » Il y aurait donc une double violence. Cette semaine, l’avocat Arié Alimi en parlait aussi dans les colonnes d’AOC. Qu’en pensez-vous ?
    Je partage tout à fait l’analyse de Didier Fassin sur le fait que les violences d’État s’opèrent sur deux plans. Il y a d’une part la violence des actes et ensuite la violence du #déni des actes. Cela fait le lien avec l’appareil conceptuel développé par Hannah Arendt dans Vérité et politique. Nier est nécessaire pour garantir une forme de pouvoir qui serait remise en question par des faits qui dérangent. Cela dit, il est important de constamment travailler les conditions qui permettent ou non de nommer et surtout de justifier l’emploi de ces termes.

    Vous utilisez le terme de « violences d’État » mais aussi de « violences policières » de votre côté…
    Avec INDEX, on emploie le terme de « violences d’État » parce qu’on pense qu’il existe une forme de continuum de violence qui s’opère entre violences policières et judiciaires, le déni officiel et l’#impunité de fait étant des conditions qui garantissent la reproduction des violences d’État. Donc même si ce terme a tendance à être perçu comme particulièrement subversif – dès qu’on le prononce, on tend à être étiqueté comme militant, voire anarchiste –, on ne remet pas forcément en question tout le système d’opération du pouvoir qu’on appelle l’État dès lors qu’on dénonce ses violences. On peut évoquer Montesquieu : « Le #pouvoir arrête le pouvoir ». Comment faire en sorte que l’État même s’équipe de mécanismes qui limitent les excès qui lui sont inhérents ? Il s’agit a minima d’interpeller l’#opinion_publique sur les pratiques de l’État qui dépassent le cadre légal ; mais aussi, on l’espère, d’alimenter la réflexion collective sur ce qui est acceptable au sein de nos sociétés, au-delà la question de la légalité.

    Ce que je voulais dire c’est que Forensic Architecture utilise le terme de « violences d’État » ou de « crimes » dans un sens plus large. Sur le site d’INDEX, on trouve le terme de « violences policières » qui donne une information sur le cadre précis de vos enquêtes.
    On essaye d’être le maillon d’une chaîne. Aujourd’hui, on se présente comme une ONG d’investigation qui enquête sur les violences policières en France. Il s’agit d’être très précis sur le cadre de notre travail, local, qui s’occupe d’un champ bien défini, dans un contexte particulier. Cela reflète notre démarche : on est une petite structure, avec peu de moyens. En se spécialisant, on peut faire la lumière sur une série d’incidents, malheureusement récurrents, mais en travaillant au cœur d’un réseau déjà constitué et actif en France qui se confronte depuis plusieurs décennies aux violences d’État et aux violences policières plus particulièrement. En se localisant et étant spécifique, INDEX permet un travail de collaboration et d’échanges beaucoup plus pérenne et durable avec toute une série d’acteurs et d’actrices d’un réseau mobilisé autour d’un problème aussi majeur que l’usage illégitime de la force et de la violence par l’État. Limiter le cadre de notre exercice est une façon d’éprouver la capacité de nos techniques d’enquête et d’intervention publique à véritablement amorcer un changement dans les faits.

    On a parfois l’impression que la production des observateurs étrangers est plus forte, depuis l’extérieur. Quand la presse ou les observateurs étrangers s’emparent du sujet, ils prennent tout de suite une autre ampleur. Qu’en pensez-vous ?
    C’est sûr que la possibilité de projeter une perspective internationale sur un incident est puissante – je pense par exemple à la couverture du désastre du #maintien_de_l’ordre lors de la finale de la Ligue des champions 2022 au Stade de France qui a causé plus d’embarras aux représentants du gouvernement que si le scandale s’était limité à la presse française –, mais en même temps je ne pense pas qu’il y ait véritablement un gain à long terme dans une stratégie qui viserait à créer un scandale à l’échelle internationale. Avec INDEX, avoir une action répétée, constituer une archive d’enquêtes où chacune se renforce et montre le caractère structurel et systématique de l’exercice d’une violence permet aussi de sortir du discours de l’#exception, de la #bavure, du #dérapage. Avec un travail au long cours, on peut montrer comment un #problème_structurel se déploie. Travailler sur un tel sujet localement pose des problèmes, on a des difficultés à se financer comme organisation. Il est toujours plus facile de trouver des financements quand on travaille sur des violations des droits humains ou des libertés fondamentales à l’étranger que lorsqu’on essaye de le faire sur place, « à la maison ». Cela dit, on espère que cette stratégie portera ses fruits à long terme.

    Vous avez travaillé avec plusieurs médias français : Le Monde, Libération, Disclose. Comment s’est passé ce travail en commun ?
    Notre pratique est déjà inter et pluridisciplinaire. Avec Forensic Architecture, on a souvent travaillé avec des journalistes, en tant que chercheurs on est habitués à documenter de façon très précise les éléments sur lesquels on enquête puis à les mettre en commun. Donc tout s’est bien passé. Le travail très spécifique qu’on apporte sur l’analyse des images, la modélisation, la spatialisation, permet parfois de fournir des conclusions et d’apporter des éléments que l’investigation plus classique ne permet pas.

    Ce ne sont pas des compétences dont ces médias disposent en interne ?
    Non mais cela ne m’étonnerait pas que ça se développe. On l’a vu avec le New York Times. Les premières collaborations avec Forensic Architecture autour de 2014 ont contribué à donner naissance à un département qui s’appelle Visual Investigations qui fait maintenant ce travail en interne de façon très riche et très convaincante. Ce sera peut-être aussi l’avenir des rédactions françaises.

    C’est le cas du Monde qui a maintenant une « cellule d’enquête vidéo ».
    Cela concerne peut-être une question plus générale : ce qui constitue la valeur de vérité aujourd’hui. Les institutions qui étaient traditionnellement les garantes de vérité publique sont largement remises en cause, elles n’ont plus le même poids, le même rôle déterminant qu’il y a cinquante ans. Les médias eux-mêmes cherchent de nouvelles façons de convaincre leurs lecteurs et lectrices de la précision, de la rigueur et de la dimension factuelle de l’information qu’ils publient. Aller chercher l’apport documentaire des images et en augmenter la capacité de preuve et de description à travers les techniques qu’on emploie s’inscrit très bien dans cette exigence renouvelée et dans ce nouveau standard de vérification des faits qui commence à s’imposer et à circuler. Pour que les lecteurs leur renouvellent leur confiance, les médias doivent aujourd’hui s’efforcer de convaincre qu’ils constituent une source d’informations fiables et surtout factuelles.

    J’aimerais que l’on parle du contexte très actuel de ces dernières semaines en France. Depuis le mouvement contre la réforme des retraites, que constatez-vous ?
    On est dans une situation où les violences policières sont d’un coup beaucoup plus visibles. C’est toujours un peu pareil : les violences policières reviennent au cœur de l’actualité politique et médiatique au moment où elles ont lieu dans des situations de maintien de l’ordre, dans des manifestations… En fait, quand elles ne touchent plus seulement des populations racisées et qu’elles ne se limitent plus aux quartiers populaires.

    C’est ce que disait Didier Fassin dans le texte dont nous parlions à l’instant…
    Voilà. On ne parle vraiment de violences policières que quand elles touchent un nombre important de personnes blanches. Pendant la séquence des Gilets jaunes, c’était la même dynamique. C’est à ce moment-là qu’une large proportion de la population française a découvert les violences policières et les armes dites « non létales », mais de fait mutilantes, qui sont pourtant quotidiennement utilisées dans les #quartiers_populaires depuis des décennies. Je pense qu’il y a un problème dans cette forme de mobilisation épisodique contre les violences policières parce qu’elle risque aussi, par manque de questionnements des privilèges qui la sous-tendent, de reproduire passivement des dimensions de ces mêmes violences. Je pense qu’au fond, on ne peut pas dissocier les violences policières de la question du racisme en France.
    Il me semble aussi qu’il faut savoir saisir la séquence présente où circulent énormément d’images très parlantes, évidentes, choquantes de violences policières disproportionnées, autour desquelles tout semblant de cadre légal a sauté, afin de justement souligner le continuum de cette violence, à rebours de son interprétation comme « flambée », comme exception liée au mouvement social en cours uniquement. Les enquêtes qu’on a publiées jusqu’ici ont pour la plupart porté sur des formes de violences policières banalisées dans les quartiers populaires : tirs sur des véhicules en mouvement, situations dites de « refus d’obtempérer », usages de LBD par la BAC dans une forme de répression du quotidien et pas d’un mouvement social en particulier. Les séquences que l’on vit actuellement doivent nous interpeller mais aussi nous permettre de faire le lien avec la dimension continue, structurelle et discriminatoire de la violence d’État. On ne peut pas d’un coup faire sauter la dimension discriminatoire des violences policières et des violences d’État au moment où ses modes opératoires, qui sont régulièrement testés et mis au point contre des populations racisées, s’abattent soudainement sur une population plus large.

    Vous parlez des #violences_systémiques qui existent, à une autre échelle…
    Oui. On l’a au départ vu avec les Gilets jaunes lorsque les groupes #BAC ont été mobilisés. Ces groupes sont entraînés quotidiennement à faire de la #répression dans les quartiers populaires. C’est là-bas qu’ils ont développé leurs savoirs et leurs pratiques particulières, très au contact, très agressives. C’est à cause de cet exercice quotidien et normalisé des violences dans les quartiers populaires que ces unités font parler d’elles quand elles sont déployées dans le maintien de l’ordre lors des manifestations. On le voit encore aujourd’hui lors de la mobilisation autour de la réforme des retraites, en particulier le soir. Ces situations évoluent quotidiennement donc je n’ai pas toutes les dernières données mais la mobilisation massive des effectifs de police – en plus de la #BRAV-M [Brigades de répression des actions violentes motorisées] on a ajouté les groupes BAC –, poursuivent dans la logique dite du « contact » qui fait souvent beaucoup de blessés avec les armes utilisées.

    Avez-vous été sollicités ces temps-ci pour des cas en particulier ?
    Il y aura tout un travail à faire à froid, à partir de la quantité d’images qui ont émergé de la répression et en particulier des manifestations spontanées. Aujourd’hui, les enjeux ne me semblent pas concerner la reconstitution précise d’un incident mais plutôt le traitement et la confrontation de ces pratiques dont la documentation montre le caractère systémique et hors du cadre légal de l’emploi de la force. Cela dit, on suit de près les blessures, dont certaines apparemment mutilantes, relatives à l’usage de certaines armes dites « non létales » et en particulier de #grenades qui auraient causé une mutilation ici, un éborgnement là… Les données précises émergent au compte-goutte…
    On a beaucoup entendu parler des #grenades_offensives pendant le mouvement des Gilets jaunes. Le ministère de l’Intérieur et le gouvernement ont beaucoup communiqué sur le fait que des leçons avaient été tirées depuis, que certaines des grenades le plus souvent responsables ou impliquées dans des cas de mutilation avaient été interdites et que l’arsenal avait changé. En fait, elles ont été remplacées par des grenades aux effets quasi-équivalents. Aujourd’hui, avec l’escalade du mouvement social et de contestation, les mêmes stratégies de maintien de l’ordre sont déployées : le recours massif à des armes de l’arsenal policier. Le modèle de grenade explosive ou de #désencerclement employé dans le maintien de l’ordre a changé entre 2018 et 2023 mais il semblerait que les #blessures et les #mutilations qui s’ensuivent perdurent.

    À la suite des événements de Sainte-Soline, beaucoup d’appels à témoins et à documents visuels ont circulé sur les réseaux sociaux. Il semblerait que ce soit de plus en plus fréquent.
    Il y a une prise de conscience collective d’un potentiel – si ce n’est d’un pouvoir – de l’image et de la documentation. Filmer et documenter est vraiment devenu un réflexe partagé dans des situations de tension. J’ai l’impression qu’on est devenus collectivement conscients de l’importance de pouvoir documenter au cas où quelque chose se passerait. Lors de la proposition de loi relative à la sécurité globale, on a observé qu’il y avait un véritable enjeu de pouvoir autour de ces images, de leur circulation et de leur interprétation. Le projet de loi visait à durcir l’encadrement pénal de la capture d’image de la police en action. Aujourd’hui, en voyant le niveau de violence déployée alors que les policiers sont sous les caméras, on peut vraiment se demander ce qu’il se passerait dans la rue, autour des manifestations et du mouvement social en cours si cette loi était passée, s’il était illégal de tourner des images de la police.
    En tant que praticiens de l’enquête en source ouverte, on essaye de s’articuler à ce mouvement spontané et collectif au sein de la société civile, d’utiliser les outils qu’on a dans la poche, à savoir notre smartphone, pour documenter de façon massive et pluri-perspective et voir ce qu’on peut en faire, ensemble. Notre champ de pratique n’existe que grâce à ce mouvement. La #capture_d’images et l’engagement des #témoins qui se mettent souvent en danger à travers la prise d’images est préalable. Notre travail s’inscrit dans une démarche qui cherche à en augmenter la capacité documentaire, descriptive et probatoire – jusqu’à la #preuve_judiciaire –, par rapport à la négociation d’une vérité de fait autour de ces évènements.

    Le mouvement « La Vérité pour Adama », créé par sa sœur suite à la mort d’Adama Traoré en 2016, a pris beaucoup d’ampleur au fil du temps, engageant beaucoup de monde sur l’affaire. Vous-mêmes y avez travaillé…
    La recherche de la justice dans cette appellation qui est devenue courante parmi les différents comités constitués autour de victimes est intéressante car elle met en tension les termes de vérité et de justice et qu’elle appelle, implicitement, à une autre forme de justice que celle de la #justice_institutionnelle.
    Notre enquête sur la mort d’Adama Traoré a été réalisée en partenariat avec Le Monde. À la base, c’était un travail journalistique. Il ne s’agit pas d’une commande du comité et nous n’avons pas été en lien. Ce n’est d’ailleurs jamais le cas au moment de l’enquête. Bien qu’en tant qu’organisation, INDEX soit solidaire du mouvement de contestation des abus du pouvoir policier, des violences d’État illégitimes, etc., on est bien conscients qu’afin de mobiliser efficacement notre savoir et notre expertise, il faut aussi entretenir une certaine distance avec les « parties » – au sens judiciaire –, qui sont les premières concernées dans ces affaires, afin que notre impartialité ne soit pas remise en cause. On se concentre sur la reconstitution des faits et pas à véhiculer un certain récit des faits.

    Le comité « La Vérité pour Adama » avait commencé à enquêter lui-même…
    Bien sûr. Et ce n’est pas le seul. Ce qui est très intéressant autour des #comités_Vérité_et_Justice qui émergent dans les quartiers populaires autour de victimes de violences policières, c’est qu’un véritable savoir se constitue. C’est un #savoir autonome, qu’on peut dans de nombreux cas considérer comme une expertise, et qui émerge en réponse au déni d’information des expertises et des enquêtes officielles. C’est parce que ces familles sont face à un mur qu’elles s’improvisent expertes, mais de manière très développée, en mettant en lien toute une série de personnes et de savoirs pour refuser le statu quo d’une enquête qui n’aboutit à rien et d’un non-lieu prononcé en justice. Pour nous, c’est une source d’inspiration. On vient prolonger cet effort initial fourni par les premiers et premières concernées, d’apporter, d’enquêter et d’expertiser eux-mêmes les données disponibles.

    Y a-t-il encore une différence entre images amateures et images professionnelles ? Tout le monde capte des images avec son téléphone et en même temps ce n’est pas parce que les journalistes portent un brassard estampillé « presse » qu’ils et elles ne sont pas non plus victimes de violences. Certain·es ont par exemple dit que le journaliste embarqué Rémy Buisine avait inventé un format journalistique en immersion, plus proche de son auditoire. Par rapport aux médias, est-ce que quelque chose a changé ?
    Je ne voudrais pas forcément l’isoler. Rémy Buisine a été particulièrement actif pendant le mouvement des Gilets jaunes mais il y avait aussi beaucoup d’autres journalistes en immersion. La condition technique et médiatique contemporaine permet ce genre de reportage embarqué qui s’inspire aussi du modèle des reporters sur les lignes de front. C’est intéressant de voir qu’à travers la militarisation du maintien de l’ordre, des modèles de journalisme embarqués dans un camp ou dans l’autre d’un conflit armé se reproduisent aujourd’hui.

    Avec la dimension du direct en plus…
    Au-delà de ce que ça change du point de vue de la forme du reportage, ce qui pose encore plus question concerne la porosité qui s’est établie entre les consommateurs et les producteurs d’images. On est dans une situation où les mêmes personnes qui reçoivent les flux de données et d’images sont celles qui sont actives dans leur production. Un flou s’opère dans les mécanismes de communication entre les pôles de production et de réception. Cela ouvre une perspective vers de formes nouvelles de circulation de l’information, de formes beaucoup plus inclusives et participatives. C’est déjà le cas. On est encore dans une phase un peu éparse dans laquelle une culture doit encore se construire sur la manière dont on peut interpréter collectivement des images produites collectivement.

    https://aoc.media/entretien/2023/08/11/francesco-sebregondi-on-ne-peut-pas-dissocier-les-violences-policieres-de-la-

    #racisme #violences_policières

    ping @karine4

    • INDEX

      INDEX est une ONG d’investigation indépendante, à but non-lucratif, créée en France en 2020.

      Nous enquêtons et produisons des rapports d’expertise sur des faits allégués de violence, de violations des libertés fondamentales ou des droits humains.

      Nos enquêtes réunissent un réseau indépendant de journalistes, de chercheur·es, de vidéastes, d’ingénieur·es, d’architectes, ou de juristes.

      Nos domaines d’expertise comprennent l’investigation en sources ouvertes, l’analyse audiovisuelle et la reconstitution numérique en 3D.

      https://www.index.ngo

  • #Niger coup: increasing instability, forced displacement & irregular migration across the #Sahel

    Niger coup: increasing instability, forced displacement & irregular migration across the Sahel, amidst billions of EU Trust Fund for Stability investments.

    On July 26, a military coup took place in Niger, when the democratically elected president was deposed and the commander of the presidential guard declared himself the leader. A nationwide curfew was announced and borders were closed. The military junta justified its actions claiming it was in response to the continuing deterioration of the security situation. On August 10, the leaders of the coup declared a new government, naming 21 ministers, including several generals, but with civilian economist Ali Mahaman Lamine Zeine as the new prime minister.

    This was the latest in a series of seven military coups in West and Central Africa since 2020, including in neighbouring Mali and Burkina Faso. In Mali, a coup within a coup took place in May 2021, when the junta leader of the 2020 coup stripped the president and prime minister of their powers and declared himself president. Burkina Faso suffered two military coups in 2022; in September 2022, the head of an artillery unit of the armed forces ousted the previous junta leader who had led a coup in January 2022, and declared himself president of Burkina Faso.

    To add to further potential instability and escalation in the region, the military governments of Burkina Faso and Mali quickly warned – in response to remarks by ECOWAS – that any military intervention against last week’s coup leaders in Niger would be considered a “declaration of war” against their nations. The coup leaders ignored an August 6 deadline by ECOWAS to relinquish power and release the detained elected president. At the August 10 ECOWAS emergency summit in Abuja, West African heads of state repeated that all options remain on the table to restore constitutional order in Niger and ordered the activation of its standby force.
    Niger, Mali, Burkina Faso: military coups in the three major recipients of the EU Trust Fund for Stability and addressing the root causes of irregular migration and displaced persons in the Sahel

    Interestingly, Niger, Mali and Burkina Faso have been prime target countries in the European Union’s efforts to increase stability in the region and address the root causes of irregular migration and displacement.

    In 2015, the European Union established the “EU Emergency Trust Fund for stability and addressing root causes of irregular migration and displaced persons in Africa”. Of a total fund of 5 billion EUR, the Sahel and Lake Chad is the biggest funding window, with 2.2 billion EUR committed between the start of the programme and the end of December 2022, across 214 projects.

    The three biggest recipient countries in the Sahel and Lake Chad region are indeed Niger (294 million), Mali (288 million) and Burkina Faso (190 million), in addition to 600 million for regional projects. Among the four various strategic objectives, overall the largest share of the budget (34%) went to security and governance activities (the other strategic priorities are economic opportunities, strengthening resilience and improved migration management). The security and governance objective has been the main priority in Mali (49% of all EUTF funding), Niger (42%) and Burkina Faso (69%) (as well as in Nigeria and Mauritania).

    However, the most recent EUTF monitoring report on the Sahel window offers a sobering read on the state of stability and security in these three countries. In summary:

    “In Burkina Faso, 2022 was marked by political instability and deepening insecurity. Burkina Faso has suffered from attacks from armed groups. The conflict has sparked an unprecedented humanitarian crisis. Burkina Faso is facing the worst food crisis in a decade”.

    In Mali, “the political process remains at risk considering the country’s worsening security situation and strained diplomatic relations. In an increasingly insecure environment, 8.8 million people were in need of humanitarian assistance in January 2023. In 2022, 1,378 events of violence were reported, causing 4,862 fatalities, a 31% and 155% increase, respectively, compared to 2021”.

    In Niger, it was estimated the country would “face an unprecedented food crisis during the 2022 lean season, resulting from conflict, drought, and high food prices. The humanitarian crisis is strongly driven by insecurity. The number of internal displacements and refugees in Niger kept rising.” These conclusions on Niger date from before the July 2023 coup.

    The report also concluded that 2022 was the “most violent and deadliest year on record for the countries of the Sahel and Lake Chad window, driven by the profound and continuing security crises in Nigeria, Mali, and Burkina Faso. Fatalities recorded in the ACLED database in Mali (4,867) and Burkina Faso (4,266) were the highest ever recorded, more than doubling (144% and 119%, respectively) compared to the average for 2020-2021.” Meanwhile, UNICEF reported 11,100 schools are closed due to conflict or threats made against teachers and students. The number of attacks on schools in West and Central Africa more than doubled between 2019 and 2020.

    In other words: despite billions of funding towards stability and addressing the root causes of irregular migration and displacement, we are seeing increasing instability, conditions in these countries actually driving more displacement and no lasting drop in irregular migration.
    Increasing forced displacement and irregular migration

    Indeed, as of July 2023, UNHCR reports a total of almost 3.2 million Internally Displaced Persons (IDPs) in the Sahel, compared to just under 50,000 when the EUTF was established in 2015. Similarly, UNHCR reports almost 1.5 million refugees and asylum seekers in the Sahel, compared to over 200,000 when the EUTF was established in 2015.

    Irregular migration across the Mediterranean between North Africa and Europe is also on the rise again. According to ISPI, the latest surge in irregular arrivals that Italy is experiencing (136,000 migrants disembarked in Italy in the twelve-month period between June 2022 and May 2023) is almost comparable, in magnitude, to the period of high arrivals in 2014-2017, when on average 155,000 migrants landed each year, which was one of the major drivers for establishing the EUTF. Between 2014 and 2017 close to 80% of all irregular arrivals along the Central Mediterranean route were citizens from sub-Saharan Africa. While figures for 2020-2022 show that the share of arrivals from sub-Saharan Africa fell – suggesting that the efforts to reduce migration may have had an impact – the trend has now reversed again. In the first five months of 2023, sub-Saharan Africans make up more than half of all arrivals again.
    Instability, displacement and irregular migration: because, despite, or regardless of billions of investments in stability and addressing root causes?

    Of course, despite all of the above, we cannot simply conclude the EUTF actually contributed to instability, more displacement and more irregular migration. We cannot even conclude that it failed to have much positive effect, as it not possible to establish causality and we do not have a counterfactual. Perhaps the situation in the Sahel would have been even worse without these massive investments. Surely, the billions of euros the EUTF spend on the Sahel have contributed to successful projects with a positive impact on people’s lives. However, we can conclude that despite these massive investments, the region is more unstable and insecure and faces much more forced displacement than when the EUTF investments started.

    As outlined in an earlier Op-Ed in 2020, the ‘root causes’ approach to migration is both dishonest and ineffective. One of the warnings referred to in that Op-Ed came from a 2019 report by the UK Foreign Affairs Committee concluding that the “EU’s migration work in the Sahel and Sub-Saharan Africa risks exacerbating existing security problems, fuelling human rights abuses, and endorsing authoritarian regimes. Preventing local populations from crossing borders may help cut the numbers arriving in Europe in the short term, but in the long term it risks damaging economies and creating instability—which in itself can trigger displacement”. This warning seems to be more valid then ever when looking at the current situation across the Sahel.

    In response to the latest coup in Niger, the EU announced immediate cessation of budget support and indefinite suspension of all cooperation actions in the domain of security. Similarly, France suspended all development aid and budget support with immediate effect. However, Niger has been a prime partner of the EU in fighting the jihadist insurgency in the Sahel and in curbing irregular migration to Europe. Niger’s new military leaders – when looking at the EU’s dealings with third countries to address irregular migration, most recently with Tunisia and Egypt, as well as earlier deals with Morocco and Turkey – are aware of the importance of migration cooperation with third countries for the EU. As such, they may use these issues as leverage in negotiations and to force acceptance of the new regime. It remains to be seen to what extent – and for how long – the EU will be able to maintain its current stance, and resist the pressure to engage with the new regime and resume cooperation, given the political importance that the EU and its member states accord to stemming irregular migration.
    Changing course, or not?

    The bigger question remains: it is becoming increasingly clear the current approach of addressing so-called root causes and trying to create stability to reduce migration and forced displacement is not really working. Now that we have seen military coups in all three major recipient countries of EUTF funding in the Sahel, will there be a significant change in the EU’s external migration policy approach in Africa and the Sahel going forward? Or will the current approach prevail, doing the same thing over and over again and expecting different results? What is ultimately needed is a more humane, rational, coherent and comprehensive approach to migration governance, which not only takes into account all aspects of migration (including visa policies, returns, labour migration, etc.), but goes beyond migration and migration-related objectives, and takes into account other policy areas, including trade, agriculture, arms and commodities exports, peace building and conflict resolution. When we are discussing the root causes of migration, we need honest debate and actions that include the real and very serious causes of migration and displacement.

    https://mixedmigration.org/articles/niger-coup-instability-displacement-migration

    #coup_d'Etat #migrations #politiques_migratoires #instabilité_politique #externalisation #EU_Emergency_Trust_Fund #Trust_Fund #Mali #Burkina_Faso #causes_profondes #root_causes #EUTF #insécurité #déplacés_internes #sécheresse

    ping @_kg_

  • Le plastique ne se recycle pas
    https://lesjours.fr/obsessions/les-plastiqueurs/ep6-recyclage

    Les promesses n’engagent que ceux qui les croient. C’est le calcul qu’a fait l’industrie du plastique dès les années 1980, en décidant de promouvoir le recyclage de son matériau fétiche. À première vue, l’idée semble séduisante, brillante même. Qui ne voudrait pas croire au recyclage ? Un processus vertueux visant à faire disparaître les déchets plastiques que nous générons pour en faire de nouveaux emballages ou de nouveaux canards de bain. Avec cette alléchante promesse : la fin du plastique dans les océans et une boucle infinie qui permettrait de ne plus jamais produire de plastique vierge. Attendez… « Ne plus jamais produire de plastique vierge » ? À moins d’être suicidaire, comment l’industrie du plastique pourrait-elle soutenir un processus qui signerait sa mort ?

    La réponse se trouve dans l’excellent documentaire Plastic Wars, diffusé ce printemps et réalisé conjointement par NPR et PBS, la radio et la chaîne de télévision publiques américaines. Dans cette enquête de la journaliste Laura Sullivan, trois anciens responsables de l’industrie admettent pour la première fois à visage découvert que la promotion du recyclage ne faisait que répondre à une stratégie pour verdir l’image du plastique auprès des consommateurs et les déculpabiliser dans leurs achats.

  • La betterave, la gauche, le peuple - et nous Chez Renard - Tomjo

    Le 12 janvier 2023, la coopérative sucrière #Tereos est condamnée à une amende record d’un demi-million d’euros pour l’ #écocide de l’Escaut en 2020 [1]. Que ce soit au moment de la catastrophe, lors de l’audience en décembre 2022, ou du délibéré quelques semaines plus tard, on n’a vu ni le député local ni le maire exiger des comptes du deuxième groupe sucrier mondial devant une foule vengeresse. Non plus qu’on n’a entendu le « député reporter » #François_Ruffin, dans sa cuisine ou aux portes de l’usine, dénoncer les méfaits du sucre sur la #santé et de Tereos sur la vie. On n’a pas vu le ministre de l’industrie Renaud Lescure taper du poing en sous-préfecture, ni #Xavier_Bertrand, président du Conseil régional, défiler dans les rues. Le président des Hauts-de-France préférant manifester à Paris le 7 février 2023, juché sur les tracteurs des betteraviers pour défendre l’épandage de #néonicotinoïdes : « Il n’est pas question de faire les mêmes conneries sur l’agriculture que sur le nucléaire ! »

    
À l’inverse, aucun élu n’a manqué pour défendre l’usine à l’annonce de la fermeture de la sucrerie d’Escaudoeuvres le 7 mars suivant. A entendre nos représentants du peuple, non seulement celle-ci ferait la prospérité des gens du Nord, mais elle participerait d’un patrimoine digne d’être défendu – demandez à la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles), appelée à la rescousse de l’usine pendant les procès pour relancer le mythe de la betterave sucrière, impériale et napoléonienne. Seul Renart s’échine à briser le silence d’une région, de ses habitants et # ses élus, sur leurs méfaits.

    #Pollution historique, amende record. Le 9 avril 2020, un bassin de décantation de la #sucrerie d’Escaudoeuvres déverse 100 000 m3 d’eau contaminée dans l’Escaut. Le préfet n’ayant pas prévenu les autorités belges, la pollution a tout loisir de passer les écluses, descendre la rivière, et supprimer toute trace de vie sur plus de 70km, poissons, batraciens, libellules. Les autorités belges et des associations françaises attentent un procès à Tereos. Trois ans plus tard, le 12 janvier 2023, le juge inflige neuf millions d’euros de dommages et intérêts pour restauration de la rivière, et une amende de 500 000 euros – laissant l’État français, lui aussi muet depuis le début, sauf de toute responsabilité pour sa négligence. L’avocat des betteraviers se réjouit que le montant soit « très inférieur aux demandes qui ont été faites [2]. » C’est tout de même plus que la dernière grande catastrophe écologique survenue en France, le naufrage de l’Erika en 1999, qui avait valu à Total une amende de 375 000 euros, soit 424 000 euros d’aujourd’hui.

    Les 123 salariés et les habitants d’Escaudœuvres s’apprêtaient à célébrer les 150 ans de leur sucrerie quand Tereos annonce sa fermeture le 7 mars, à peine deux mois après le délibéré. Ces élus qui n’avaient rien dit, et rien à dire, sur la catastrophe de Tereos, se précipitent pour dénoncer sa fermeture [3]. Parmi les trémolos, ceux du député Guy Bricout et du maire Thierry Bouteman :

    Cambrai, terre agro-alimentaire depuis 150 ans : c’est notre passé, c’est notre présent, et nous croyons que c’est notre avenir. Nous demandons l’arrêt de tout processus qui conduirait à la fermeture de notre sucrerie à Escaudœuvres. Il faut être déconnecté, ou perdre confiance, pour prendre une telle décision. Je ne les crois pas déconnectés, je crois qu’ils ont perdu confiance. Pas nous. Pas les sucriers, pas les saisonniers, pas les intérimaires, pas les sous-traitants depuis 150 ans. Pas les élus, pas les habitants.

    En écho, le ministre délégué à l’industrie #Renaud_Lescure se déplace quelques jours plus tard pour déclarer que « l’industrie, c’est une arme anti-colère, l’industrie c’est une arme d’espoir. » Il annonce trois millions d’euros pour un « rebond industriel dans le Cambrésis ». Puis c’est au sénateur communiste Eric Bocquet de rappeler combien « la sucrerie, c’est l’ADN de la commune » (bonjour le diabète), une « véritable institution dans l’arrondissement de Cambrai », dont l’« histoire » et la « richesse » rendent sa fermeture « particulièrement violente » [4].
    
Chacun sa partition, mais le premier arrivé devant l’usine pour donner le ton, c’est l’« insoumis » amiénois François Ruffin : la betterave à sucre serait selon notre « député reporter », comme il se présente, une « production industrielle qui appartient à notre patrimoine » national, un fruit de « l’intelligence humaine » inventé pendant le blocus continental entre 1806 et 1815, justifiant par là que « l’État intervienne dans l’économie, construise des filières dans la durée, et fasse que les vies, les usines, l’économie ne dépendent pas seulement des cours de bourse. » 

    Si les cours de bourse ne doivent pas décider de la fermeture d’une usine (dont le groupe Tereos empoche cette année des profits records : 6,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires sur 2022/2023, +29 % en un an), au nom de quoi doit-elle tourner ? Son utilité sociale ? Son histoire centenaire ?

    Le « député-reporter » attaque son discours-reportage par la glorification de l’épopée scientifique du sucre. Nous, on commencerait plutôt par toutes ces maladies de l’ #agro-industrie, et du sucre en particulier, qui représentent désormais la première cause de mortalité dans le monde. Savez-vous, lecteur, qu’entre le #diabète, l’ #obésité, les maladies cardiovasculaires et l’ #hypertension artérielle, la bouffe tue désormais plus que la faim ! Vu la progression actuelle du diabète (+ 4,5 % par an en France par exemple), la revue scientifique The Lancet prédit 1,3 milliard de malades du sucre en 2050 dans le monde - presque 10 % de la population mondiale [5] ! Du sucre, on en trouve partout, dans les sodas bien sûr, mais aussi dans les chips, les pizzas, le pain de mie, le pesto, et toutes les pâtées préparées. Le sucre, c’est la drogue de l’industrie alimentaire.
    
Accordons à Ruffin qu’avec une telle entrée en matière – « Vous êtes la première cause de mortalité dans le monde » –, l’accueil eut été réservé. Mieux vaut seriner combien la betterave, comme toute autre nuisance industrielle, est objet de fierté dans une région de labeur et pour un peuple courageux. Ce que Ruffin rabâche depuis dix ans [6]. Ce qu’il est venu rabâcher sur les lieux mêmes d’une catastrophe historique qui élimina toute trace de vie sur 70 km, des poissons aux batraciens :

    Les salariés me disent combien ils aiment leur travail, combien ils aiment le sucre. Je pense que cet amour du métier, quand on est prof, soignant ou dans l’industrie... faut pas croire que le travail ce soit seulement un salaire. C’est aussi un amour de son métier. Les gens me disent : "Tereos, c’est notre famille, c’est notre maison, on y est bien, on est prêts à passer quatre noëls d’affilée sans voir nos enfants. Mon gamin il a quatre ans et je n’ai pas passé un seul noël avec lui. On est prêts à faire 190 heures par mois pour faire le boulot".

    Accordons encore que douze heures de turbin, que l’on soit salarié d’une sucrerie ou esclave d’un champ de canne à sucre, finissent en effet par créer des liens fraternels, mais ne peut-on jamais dans ce Nord funèbre tisser de liens fraternels ailleurs que dans les tranchées, au fond des mines, ou sur une ligne de production ? Sommes-nous à jamais enfermés dans un roman de Zola ou de Van der Meersch ?
    
Il en a fallu des mensonges, des récits grandioses et des mythes fondateurs, répétés de gauche à droite, par les patrons et parfois par les ouvriers, pour excuser les saloperies dont on se rend coupable ou consentir à son exploitation. Demandez aux combattants de la « Bataille du charbon », quand les mines nationalisées, gérées par un accord gaullo-communiste, restauraient le salaire à la tâche, augmentaient les cadences, les taux de silicose et de mortalité, en échange de congés payés [7]. Est-ce là votre « progrès » ?

    Aujourd’hui, Ruffin et ses pareils, qui n’ont pas perdu leurs quatre derniers noëls dans la mélasse, entendent utiliser « l’histoire grandiose du sucre de betterave » afin de justifier le sauvetage de l’industrie betteravière. Mais c’est un mythe que l’invention du sucre de betterave par Benjamin Delessert, et la création d’une filière sucrière par un Plan d’investissements de Napoléon. Une mystification que Le Betteravier français propage à l’envi pour justifier l’œuvre supérieure de la corporation devant ses calomniateurs écologistes [8], que Le Monde répète pour magnifier le Génie technoscientifique [9], ainsi que Fakir, le journal de François Ruffin, pour célébrer le volontarisme étatique [10].
Reprenons donc depuis le début la véritable histoire du sucre de betterave, bien plus passionnante que la fausse.

    Arnaque impériale chez les sucriers lillois
    Ou le mythe de la betterave napoléonienne

    Suivant la version courante, le prix du sucre sur le continent aurait été multiplié par dix à la suite du blocus continental décrété en 1806 contre l’Angleterre par Napoléon. La canne à sucre, cultivée par des esclaves, arrivait jusqu’alors des Antilles, avant d’être raffinée en métropole. Il aurait fallu trouver d’urgence une solution à la pénurie. Sur les conseils du célèbre chimiste Jean-Antoine Chaptal, #Napoléon signe le 25 mars 1811 un décret d’encouragement de la betterave à sucre : il réserve 32 000 hectares de culture à la betterave, dont 4 000 dans le nord de la France et en Wallonie (alors française), et promet un prix d’un million de francs à qui ramènerait le premier pain de sucre.
    
Vient ensuite la scène légendaire. Le 2 janvier 1812, Chaptal court chez l’empereur. Un industriel versé dans la science, Benjamin Delessert, aurait relevé le challenge dans son usine de Passy. L’empereur et le chimiste se seraient hâtés pour admirer les pains de sucre et, dans son enthousiasme, Napoléon aurait décroché sa propre croix de la Légion d’honneur pour en décorer Delessert.
Moralité : dans l’adversité de la guerre et de la pénurie, l’œuvre conjuguée d’un chef d’État volontaire (Napoléon), d’un scientifique compétent (Chaptal) et d’un industriel ingénieux (Delessert), nous aurait offert le premier pain de sucre de betterave – et l’abondance à portée de main.
A peu près tout est faux. En rétablissant certains faits, en observant les autres d’un autre point de vue, on découvre en réalité une sombre affaire de #vol_industriel et de #copinage au plus haut de l’État, suivie d’une lamentable défaite commerciale.


    Napoléon 1er, protecteur de l’agriculture et de l’industrie, Bronze, Henri Lemaire, 1854, Palais des Beaux-arts de Lille.

    Premier mythe : l’urgence du blocus. Dans un article assez complet sur le sucre de betterave, l’historien Ludovic Laloux est formel :
    Prévaut souvent l’idée que le blocus britannique instauré en 1806 aurait empêché de débarquer du sucre dans les ports français et, en réaction, donné l’idée à Napoléon d’encourager la production de sucre à partir de la betterave. Or, la première intervention de l’Empereur en ce sens date de 1811. En fait, dès 1791, la situation saccharifère s’avère plus complexe en Europe avec un effondrement des approvisionnements en sucre de canne [11].

    Pourquoi cet effondrement ?
Dans les remous de la Révolution française, les esclaves de Saint-Domingue s’insurgent fin août 1791 et obtiennent leur affranchissement. La main d’œuvre se rebiffe. Le prix du sucre explose. Il faut s’imaginer Saint-Domingue comme une île-usine, et même la première du monde. 500 000 esclaves produisent à la veille de l’insurrection 80 000 tonnes de canne à sucre par an (à titre de comparaison, 600 000 esclaves travaillent alors dans les colonies américaines) [12]. Une « crise du sucre » éclate immanquablement à Paris en janvier 1792. Les femmes attaquent les commerces, les hommes la police, puis on réclame du pain. Rien d’original. On peut recommencer la scène autant que vous voulez, avec du Nutella ou des paquets de cigarettes.
    
Mais le blocus ? En 1810, quatre ans après son instauration, dans une lettre à son frère Louis-Napoléon, l’empereur doit admettre l’efficacité de la contrebande : « C’est une erreur de croire que la France souffre de l’état actuel. Les denrées coloniales sont en si grande quantité qu’elle ne peut pas en manquer de longtemps, et le sirop de raisin et le miel suppléent partout au sucre [13]. » Le blocus n’inquiète en rien l’empereur.

    Deuxième mythe : l’invention du sucre de betterave. A partir des découvertes du chimiste Andreas Marggraf, son maître, le chimiste prussien Franz Achard, fils de huguenots du Dauphiné et membre de l’Académie royale des sciences, plante ses premières betteraves à sucre en 1796. Le roi Frédéric-Guillaume III lui accorde un terrain et des subsides pour une première raffinerie en 1801. L’Allemagne est la plus avancée dans le sucre local. Son procédé inquiète le gouvernement anglais, producteur et importateur de sucre de canne, qui se lance dans une manœuvre de déstabilisation industrielle. Il tente de soudoyer Achard, contre 50 000 écus d’abord puis 200 000 ensuite, afin que ce dernier publie un article scientifique dénigrant ses propres recherches. L’honnête Achard refuse et il revient au chimiste anglais Humphry Davy d’expliquer combien la betterave sera à jamais impropre à la consommation.

    La « désinformation » paraît fonctionner. En France, l’Académie des sciences sabote ses propres recherches sur la betterave, et Parmentier, le célèbre pharmacien picard qui fit le succès de la pomme de terre, milite encore en 1805 en faveur d’un sucre extrait du raisin.

    Les précurseurs français du sucre de betterave ne sont pas à l’Académie, ni dans les salons impériaux, mais à Lille, à Douai et en Alsace. Leurs Sociétés d’agriculture connaissent depuis longtemps la betterave fourragère et suivent de près les progrès du raffinage de la betterave réalisés en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne. Le scientifique François Thierry expose ses recherches dans La Feuille de Lille en avril 1810, et récolte ses premiers pains de sucre à l’automne. Expérience concluante au point que le préfet du Nord envoie des échantillons au ministre de l’Intérieur Montalivet le 7 novembre, et cette lettre à M. Thierry : « Votre sucre a la couleur, le grain, le brillant, j’ose dire même la saveur de celui des colonies [14]. » Le ministre Montalivet envoie à son tour remerciements et gratification au Lillois.

    Quelques jours plus tard, le 19 novembre, un pharmacien peu scrupuleux présente devant l’Académie des sciences de Paris deux pains de sucre sortis mystérieusement du laboratoire du chimiste Jean-Pierre Barruel, chercheur à l’École de médecine de Paris. L’affaire est bidon et Barruel confondu en « charlatanisme » par ses pairs [15]. Elle prouve cependant que les milieux scientifiques parisiens s’intéressent à la betterave sucrière.
Au même moment, les commerçants lillois Crespel, Dellisse et Parsy améliorent les procédés d’Achard, d’abord en séparant le sucre de la mélasse grâce à une presse à vis, puis en utilisant le charbon animal (de l’os calciné) pour blanchir le sucre [16]. Ils remettent leur premier pain de sucre en décembre 1810 au maire de Lille, M. Brigode, puis installent leur sucrerie rue de l’Arc, dans le Vieux-Lille. En février 1811, un pharmacien lillois du nom de Drapiez parvient également à tirer deux pains de sucre de qualité.

    Le 10 janvier, le ministre Montalivet vante auprès de l’empereur les progrès du sucre de betterave… dans les pays germaniques, sans mentionner les Lillois. Quand deux mois plus tard, Napoléon (aidé de Chaptal) publie son fameux décret à un million de francs, il sait qu’à Lille on fabrique des pains de sucre de qualité commercialisable.

    Troisième mythe : l’empereur visionnaire. Pour saisir l’entourloupe, il faut s’attarder sur la culture de la betterave. La betterave se plante fin mars. Un campagne de production suivant un décret signé le 25 du même mois n’a donc aucune chance de réussir. Il aurait fallu de surcroît disposer d’un stock de graines que la France ne possède pas : la betterave est bisannuelle, elle fleurit une année, et ne donne des graines que l’année suivante.
Aussi, connaissant la nature assez peu aventureuse des paysans, il est compréhensible que ceux-ci s’abstiennent de cultiver en grande quantité, et du jour au lendemain, une espèce inconnue. Enfin, le peu de betteraves récoltées à l’automne 1811 s’entasse devant des raffineries inexistantes ou des raffineurs encore incompétents.
    
Bref, la planification de la betterave à sucre ressemble davantage à un caprice d’empereur qu’à une décision mûrement établie par un technocrate visionnaire. Dans son rapport du 30 décembre 1811, Montalivet doit masquer le fiasco. C’est alors que Napoléon se tourne vers #Chaptal pour sa politique sucrière.

    Quatrième mythe : l’épisode de l’intrépide Benjamin Delessert. Jean-Antoine Chaptal est en 1811 un chimiste réputé, professeur à l’école Polytechnique, membre de l’Académie française, mais aussi l’ancien ministre de l’Intérieur de Napoléon de 1801 à 1804 – auteur de cette loi qui instaura le département, l’arrondissement, le canton, et la commune. Chaptal est enfin un industriel d’acide sulfurique, et le propriétaire depuis 1806 de terres et d’une raffinerie de betterave à sucre dans l’Indre-et-Loire. C’est en bref, au sens le plus actuel du mot un technocrate polyvalent. Tout à la fois scientifique, politique et entrepreneur, jouant successivement et simultanément de ces diverses compétences.
    
Un autre historien résume la politique betteravière française : « Non seulement il [Chaptal] est à l’origine de tous les décrets qui lui ont donné naissance mais encore il l’a pratiquée lui-même à Chanteloup, sur ses propres terres, dès 1806 [17]. » Un banal conflit d’intérêts.
Chaptal a pour ami proche Benjamin Delessert, riche banquier issu d’une riche famille suisse et calviniste de banquiers, propriétaire d’une usine textile à Passy. Sa mère était amie avec Benjamin Franklin, et lui-même rencontra Adam Smith et James Watt pendant son voyage d’études en Écosse. Delessert fut maire du 3ème arrondissement de Paris en 1800 et avait déjà monté une raffinerie de sucre de canne en 1801 alors que son cousin Armand œuvrait lui-même dans le raffinage, à Nantes, avec Louis Say (future #Béghin-Say, future Tereos). En 1801, Delessert avait aidé Chaptal, alors ministre de l’Intérieur, à monter sa Société d’encouragement pour l’industrie nationale, puis avait été nommé Régent de la Banque de France en 1802. Voilà le C.V. de nos deux combinards quand l’empereur s’apprête à soutenir la production betteravière de son premier décret.

    A la fin de l’année 1811, la raffinerie du Vieux-Lille a déjà produit 500 kilos de sucre, et elle en produira 10 000 l’année suivante. Ainsi…

    Lorsqu’en 1812, Derosne [un chimiste proche de l’Empereur] et Chaptal arrivèrent à Lille avec mission d’y installer une sucrerie, leur surprise fut extrême en apprenant, dès leur arrivée, que le problème était résolu et que la petite fabrique de Crespel et Parsy fonctionnait depuis près de deux années. Ils s’en retournèrent à Paris, mais il ne paraît pas qu’ils aient averti Napoléon de ce qu’ils avaient vu, car les industriels lillois n’entendirent point parler de la récompense promise. Celle-ci fut décernée, la même année, à B. Delessert qui, occupé des mêmes recherches, obtint, mais deux ans plus tard, les mêmes résultats que Crespel et Parsy. […] Il est bon de constater qu’au moment même où Delessert était supposé découvrir le moyen de tirer du sucre de la betterave en 1812, Crespel et Parsy livraient déjà régulièrement leurs produits, à raison de 10 000 kilogrammes par an, à la consommation, précise un Dictionnaire encyclopédique et biographique de l’Industrie et des arts industriels de 1883 [18].

    Quand Napoléon débarque chez Delessert, celui-ci vient d’extraire 74kg de sucre à partir de cinq tonnes de betteraves, soit la quantité produite un an auparavant par les Lillois. Le duo Chaptal-Delessert semble bien avoir intrigué pour se réserver le million à investir dans le sucre. En 1812, Chaptal double ses terres de betterave, qui passent à cinquante hectares. Il y récolte vingt tonnes par hectare, emploie seize personnes, et prétend utiliser le procédé inventé par Delessert.
Delessert quant à lui ajoute le sucre de betterave à ses multiples affaires. Il fondera en 1818 la Caisse d’Épargne et – comme cette histoire est décidément riche de ricochets ! – notre populaire Livret A.

    Cinquième et dernier mythe : le Plan qui créa la filière. Le 15 janvier 1812, Napoléon signe un second décret qui cette fois réserve 100 000 hectares de terres à la betterave, offre 500 licences de raffinage, et crée quatre raffineries impériales. La France doit trouver 500 tonnes de graines qu’elle n’a pas, et les paysans sont d’autant plus réticents que la campagne précédente fut désastreuse. Seuls 13 000 hectares sont plantés. La récolte atteint péniblement 1,5t de sucre, 27 % de plus que l’année précédente.
    
L’impérial fiasco de Napoléon cesse là. La guerre l’appelle, il perd et abdique au printemps 1814. Les rois Bourbons installent leur Restauration. Fin du blocus. La politique betteravière française est enterrée. Les faillites se multiplient. Seul le Nord continue de planter de la betterave sucrière, et le Lillois Crespel, parti à Douai, demeure longtemps l’unique fabricant de sucre de betterave de France. Il résiste tant et si bien au « lobby » du sucre colonial qu’un boulevard porte aujourd’hui son nom à Arras, où trône sa statue. Le mythe napoléonien est quant à lui bien plus répandu. On doit au patronat lillois, en 1854, un bronze de Napoléon premier du nom, aux pieds duquel sont gravés les décrets relatifs à la betterave, ainsi qu’une grosse betterave. La statue est restée jusqu’en 1976 au milieu de la Vieille Bourse, sur la Grand’Place de Lille, avant d’être remisée dans la rotonde Napoléon du Palais des Beaux-Arts.

    Si l’invention du sucre de betterave par Napoléon est devenue un mythe au XIX° siècle, il s’agit d’abord d’un mythe patronal.

    On peine à le saisir, mais la « question des sucres » est pendant la première moitié du XIX° siècle un sujet politique des plus épineux. Le roi Louis-Philippe taxe le « sucre indigène » en 1838 et va jusqu’à menacer d’interdiction le commerce de betterave. La bataille est commerciale autant qu’idéologique. Avec la canne à sucre, les armateurs, les ports et les propriétaires coloniaux défendent les rentes de leur vieille économie agraire/féodale, et donc la monarchie. Avec le « sucre indigène » extrait de la betterave, les industriels défendent une nouvelle économie plus dynamique, plus scientifique, plus moderne, et donc un système politique bourgeois. Contre les monarchistes, les rentiers, les esclavagistes, et les Anglais : la betterave !

    Louis-Napoléon publie en 1842, depuis sa geôle picarde du fort du Ham, une Analyse de la question des sucres [19]. Faut-il favoriser le travail des esclaves ou celui des ouvriers français libres ? « Il est impossible d’arrêter la marche de la civilisation, répond le futur empereur, et de dire aux hommes de couleur qui vivent sous la domination française : ‘’Vous ne serez jamais libres.’’ » Vive la betterave.

    Alors que la production française ne passe que de 4 000 tonnes de sucre en 1814 à 10 000 en 1830, la production décolle avec l’arrivée de Louis-Napoléon sur le trône. De 26 000 tonnes en 1841, elle passe à 92 000 tonnes en 1850, monte à 381 000 à la fin de l’empire en 1870, pour atteindre le million en 1900, avant que la guerre 14-18 ne détruise 75 % des sucreries, concentrées dans le nord de la France [20].
Si l’actuelle union sacrée de la betterave devait déposer une gerbe aux pieds d’un empereur, c’est à ceux de Louis-Napoléon III qu’il faudrait la déposer, tant la production betteravière explose sous le second empire.
    Les promesses de paradis terrestre à Escaudœuvres et dans le monde
    En septembre 2022, deux ans après la catastrophe, et à quelques semaines du procès, la Direction régionale des affaires culturelles (la DRAC) envoie ses artistes en résidence dans le Cambrésis pendant six mois pour « une série d’actions permettant aux habitants une meilleure appréhension et compréhension de la sucrerie d’Escaudœuvres et de son ‘’écosystème’’ dans le cadre des 150 ans ». 

    Que peut-on attendre d’un « laboratoire original d’action culturelle patrimoniale » en lien « avec la sucrerie et les tissus agricole et économique », sinon une couche de caramel sur un tas d’ordures [21] ?
Des questions se posent, trop simples sans doute pour les esprits raffinés. En un siècle et demi, la sucrerie a-t-elle fait d’Escaudœuvres un pays de Cocagne pour habitants comblés ? Vivait-on mieux dans la région, ou moins bien, avant la monoculture de la betterave ? Quel bilan tirer de l’industrie alimentaire pour le canton, pour la région et pour le monde ?

    Imaginons que vous rejoigniez Cambrai en voiture depuis Amiens : que vous preniez l’autoroute à Péronne ou la nationale par Albert, vous traversez la même désolante plaine agro-industrielle, une terre lourde désertifiée aux herbicides en hiver, rythmée non par des haies mais par des éoliennes. Certains villages de ce coin perdu de la Somme semblent ne devoir leur survie qu’à quelques propriétaires d’exploitations, dont on compte le nombre d’hectares en centaines. A peine les villages autour de Pozières accueillent des touristes anglais, canadiens et australiens, dans leur Musée de la guerre 14 et leurs innombrables cimetières militaires. On conseille la visite pendant les neuf mois d’hiver. Notre tableau n’est certes pas bucolique, mais les offices du tourisme ne participent pas non plus aux concours du plus beau village de France.

    Arrivés sur place, Escaudœuvres n’est séparée de Cambrai que par la zone commerciale, aujourd’hui le premier employeur de la ville, avec ses restaurants de « bouffe rapide » et sucrée bourrés les mercredis et week-ends. Escaudœuvres est une zone-village sans attrait, s’étirant le long de la départementale 630, qui elle-même longe l’Escaut, qui lui-même s’en va mourir en Mer du nord sous le toponyme flamand de Schelde. La sucrerie fut longtemps le cœur battant du village, qui vit au rythme des récoltes depuis 150 automnes. Mais à côté de la sucrerie et de la zone commerciale, Escaudœuvres est également connue pour sa fonderie Penarroya-Metalleurop qui rejetait avant sa fermeture en 1998 une tonne de plomb dans l’air tous les ans. Une digue, encore une digue, avait cédé en 1976, décimant les troupeaux alentours et interdisant la consommation des légumes« Pollution par le plomb près de Cambrai », [22]. Pour tout souvenir indélébile de l’épopée métallurgique, les riverains sont depuis le début du mois de juillet 2023 invités à un dépistage de plombémie dans le sang [23]. La fonderie est devenue une usine de « recyclage » de batteries de voitures électriques. Si la filière est d’avenir, elle en aura toujours moins que le saturnisme, la maladie du plomb.

    La Sucrerie centrale de Cambrai fut fondée en 1872 par l’inventeur de la râpe à betterave, l’ingénieur des Arts et Métiers Jules Linard [24]. Son invention lui offre un avantage compétitif sérieux. La sucrerie d’Escaudoeuvres est réputée la plus grande du monde avant sa destruction en 1914. Reconstruite et modernisée grâce aux indemnités des dommages de guerre, elle est rachetée par Ferdinand Béghin en 1972, alors patron du sucre et de la presse de droite. Un C.V. s’impose :
La famille Béghin raffine du sucre depuis que Ferdinand 1er (1840-1895) s’est vu léguer la raffinerie de Thumeries en 1868, dans le Pas-de-Calais. Ses fils Henri (1873-1945) et Joseph (1871-1938) font prospérer l’entreprise : ils rachètent plusieurs sucreries dans la région, et construisent à Corbehem en 1926 leur propre papeterie-cartonnerie, pour assurer eux-mêmes l’emballage. 

    Ce faisant, pourquoi ne pas fabriquer aussi des journaux ?, leur suggère le patron roubaisien du textile et des médias Jean Prouvost (1885-1978). Banco : voilà un marché porteur. Le groupe #Béghin prend la moitié de Paris-Soir, de Marie Claire et de Match vers 1936-1938, si bien qu’il doit acheter 34 000 hectares de forêt en Finlande pour couvrir ses besoins de papier. 

    Pendant ce temps, le village de Thumeries est devenu une « ville-usine », une coopérative géante dominée par la main paternelle des Béghin. Entre leurs cinq châteaux, ils construisent les logements de leurs ouvriers, mais aussi leur stade de foot, leur gymnase leur piscine, leur club de basket, et rénovent encore leur église après les bombardements de 1940. Les Béghin emploient, logent, distraient leur main d’œuvre, qui les gratifie du poste de maire à plusieurs reprises. L’enfermement industriel si répandu dans les corons.

    La papeterie-cartonnerie de Corbehem, où l’on fabrique le papier magazine satiné, surclasse la concurrence, et Ferdinand le jeune (1902-1994) investit à son tour dans l’édition. Il prend en 1950 le contrôle de Paris-Match, Le Figaro et Télé 7-jours, en même temps qu’il devient leader du marché des mouchoirs, papiers toilette, et serviettes hygiéniques (Lotus, Vania, Okay). Sucre et papier, de la bouche au c… cabinet.
    
Bref, Ferdinand Béghin s’associe à la famille Say en 1972 pour créer le groupe Béghin-Say. Mais les investissements hasardeux s’enchaînent, le groupe familial se délite, et finit racheté par son banquier historique Jean-Marc Vernes – intime de Serge Dassault et de Robert Hersant, argentier de la presse de droite et du RPR, trafiquant en tous genres, et notamment d’influence.

    Les grandes manœuvres capitalistes se poursuivent. Béghin-Say passe sous la coupe du chimiste italien Ferruzzi en 1986, puis de l’autre groupe chimique italien, Montedison, en 1992. L’entreprise s’installe au Brésil en 2000 alors que les betteraviers réorganisent, en 2003, leur activité sucrière sous la forme coopérative et sous le nom de Tereos. Investie dans la canne à sucre, la coopérative peut prendre part à la déforestation de l’Amazonie, à la culture de canne transgénique [25], à la perpétuation de l’esclavage [26]. Tereos est aujourd’hui le deuxième producteur mondial de sucre, présent sur les cinq continents, en République tchèque, à La Réunion, en Indonésie, au Kenya, en Inde, pour produire du sucre et des dérivés comme le glucose, l’amidon, l’éthanol, etc.

    Dans les Hauts-de-France, près de la moitié des agriculteurs produisent de la betterave à sucre, qui rapporte à elle seule 350 millions d’euros à la région tous les ans. Cette manne sucrière alimente ensuite la filière régionale des chocolateries, sucreries et sodas, fournissant par exemple Coca-Cola à Dunkerque à raison de 42 morceaux de sucre par bouteille de deux litres, mais aussi les usines Cémoi (Dunkerque et Villeneuve d’Ascq), Häagen-Dazs (Arras), Nestlé (Nesquik, Chocapic, Lion, Kitkat, près de Saint-Quentin), et encore Ferrero (Nutella, Kinder, à Arlon en Belgique) – une filière aussi prospère que des salmonelles dans des œufs Kinder. Coïncidence ou non : l’obésité touche presque un quart de la population des Hauts-de-France (22 %), soit cinq points de plus que la moyenne nationale. Le haut du podium.

    Revenons à Escaudœuvres et longeons le canal un instant. D’un côté les poules d’eau font connaissance, de l’autre les bassins de rétention de l’usine s’étendent sur deux kilomètres derrière les talus. Ce sont les bassins de rétention éventrés en mai 2020. Et si ça pue autant la pourriture pourrie, « c’est à cause des bassins, nous confirme un promeneur. Et encore, c’est pire pendant les 120 jours de la campagne ! »
    
Lui prétend s’être habitué – mais on s’habitue à tout. Notre promeneur est « né à Escaudœuvres en face de la sucrerie ». Étudiant en chimie, il attendait une réponse de Tereos pour un stage, réponse qui ne viendra plus. Il désigne les cuves rutilantes « qui n’ont peut-être jamais servi », et la nouvelle chaudière à gaz en remplacement de celle à charbon : 24 millions d’investissements en 2021 « pour que ça ferme », conclut-il dépité. Mais il a son explication :

    Tout ça, c’est à cause des écolos, pour faire bonne figure. Ça a été décidé là-haut. On est le seul pays à interdire les néonicotinoïdes. D’un côté ça va faire tomber la production, et la sucrerie ne sera plus rentable ; de l’autre la France va acheter du sucre aux pays qui peuvent encore utiliser des pesticides, et on sera encore moins rentables.

    Ce sont les mots de l’industriel, du syndicat de la betterave, et des gens du coin – qu’il s’agit de vérifier : la Cour de justice européenne n’accorde ni à la Belgique ni à l’Allemagne ni à la Pologne de dérogation sur les néonicotinoïdes. En revanche l’importation de sucre aux néonicotinoïdes hors de l’UE semble en effet autorisée, et des discussions seraient en cours au Parlement pour aligner les réglementations.

    Quoi qu’il en soit : que l’on considère l’interdiction des néonicotinoïdes, ces « tueurs d’abeilles », comme une victoire ou une défaite, cette histoire aux mille rebondissements tend à masquer tout le reste des produits « phytos » qui entrent dans la production de sucre, d’alcool, de carburant ( #bioéthanol ), et de gel hydroalcoolique produits à partir de la betterave. Or, les trois départements qui en France consomment le plus de produits cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques - ces substances dites « CMR » parmi les plus meurtrières du catalogue -, sont la Somme, le Pas-de-Calais et le Nord. En cause : la pomme de terre, la plus consommatrice, et la betterave, juste derrière.
    
Quant aux herbicides, le Ministère nous informe que « L’Oise tout comme l’Aisne, la Marne et la Somme sont les quatre premiers départements en terme de superficie de culture de betteraves. Or, [...] la culture de betteraves reçoit un nombre moyen de traitements en herbicides très élevé par rapport à d’autres cultures (13,7 contre 2,9 sur le blé tendre par exemple) [27]. »

    Le plus épandu est le fameux #glyphosate, que les coopérateurs de la betterave défendent avec acharnement. Tout comme ils défendaient dernièrement le s-métolachlore, un herbicide si persistant dans les nappes phréatiques qu’il devrait interdire de consommation l’eau des deux tiers des robinets de la région, logiquement la plus touchée [28], 11 avril 2023.]]. À peine son interdiction évoquée par l’Agence sanitaire nationale (ANSES) que la Confédération générale de la Betterave, le syndicat de la corporation, s’insurgeait contre la « longue liste des moyens de productions retirés progressivement aux agriculteurs, obérant ainsi leur capacité à exercer leur rôle premier : nourrir les populations [29]. » Le ministre de l’agriculture Marc Fresnau leur a déjà garanti plusieurs années de S-metolachlore.

    Cette interdiction des néonicotinoïdes révèle le bourbier où pataugent les scientifiques, les journalistes scientifiques, comme les associations environnementales : l’interdiction des néonicotinoïdes, votée à l’Assemblée nationale le 15 mars 2016, n’est effective que depuis janvier 2023... sous pression de Bruxelles ; et après les dérogations successives du ministre actuel de l’agriculture et de la précédente ministre de l’environnement Barbara Pompili (une autre Amiénoise). Cette interdiction fut arrachée après plus de dix années de voltes-faces politiques, de pseudo-controverses scientifiques, de coups de pression des syndicats agricoles, et de menaces sur l’emploi.

    Si pour chaque molécule, le spectacle médiatique et parlementaire doit mettre en scène ses expertises et contre-expertises, discutailler les protocoles et les résultats, la sixième grande extinction nous aura fauché que l’expertocratie bruxelloise n’aura pas encore tranché le cas du glyphosate. D’ailleurs cette digue de papier qu’on appelle « Droit de l’environnement », comme d’autres digues, n’empêche pas Tereos, au Brésil par exemple, de poursuivre ses épandages aériens d’Actara 750 SG, un insecticide interdit depuis 2019 [30]. Le sucre industriel est essentiellement catastrophique, de sa culture à sa transformation jusqu’à sa consommation.

    Poser les questions de nos besoins en sucre, de l’automobile à betterave, de l’utilité de Tereos pour les Hauts-de-France et de la filière agro-alimentaire pour l’Humanité, et plus généralement encore du modèle industriel qui domine la région et le monde depuis deux cents ans, nous feraient sans doute gagner du temps. Mais ce qui nous ferait gagner du temps, leur ferait perdre de l’argent. Encore une fois, leurs profits et nos emplois valent plus que nos vies.

    L’industrie – mines, filatures, chemins de fer, hauts fourneaux, sucreries –, s’est développée tout au long du XIX° dans un acte de foi promettant l’avènement du paradis terrestre. Acte de foi répété aussi bien par les économistes libéraux que communistes, par les partisans du roi que par ceux de l’empire ou de la république. Deux-cents ans plus tard, avec des taux de chômage, de pollution, et de maladies associées parmi les plus hauts du pays, le paradis terrestre s’avère être un enfer – et nous devrons encore gérer des déchets mortellement radioactifs, ceux de Gravelines par exemple, pendant des milliers d’années.

    Voilà ce que nul élu local – et surtout pas François Ruffin –, parfaitement informé des nuisances de la société industrielle, ne peut ignorer. Voilà pourtant ce que le candidat à la prochaine élection présidentielle, « biolchevique » revendiqué et partisan de l’alliance « rouge/verte », entre « sociaux-démocrates » et écologistes, ouvriers et petits-bourgeois, a pris soin de dissimuler à ses lecteurs et électeurs depuis vingt-cinq ans. A tort d’ailleurs, toutes ces choses vont sans dire chez les gens du Nord comme chez ceux du Sud. Tout ce qui leur importe c’est la pâtée, bien sucrée, et des écrans pour se distraire en digérant. Le pouvoir et l’élu qui peuvent tenir cette double-promesse n’auront jamais de problème avec sa population et ses électeurs.
    Tomjo
    Notes
    [1] « Nos betteraviers sont des tueurs », Chez Renart, 13 janvier 2023.
    [2] France Bleu Nord, 12 janvier 2023.
    [3] « De l’Escaut à l’Amazonie : Beghin-Say ou la catastrophe permanente », Chez Renart, 10 mai 2020.
    [4] ericbocquet.fr
    [5] Le Monde, 24 juin 2023.
    [6] Cf. Métro, Boulot, Chimio, Collectif, Le monde à l’envers, 2012. Cancer français : la récidive. A propos d’Ecopla et de l’aluminium, Pièces et main d’œuvre, 2016. D’Amiens nord à Blanquefort, délivrons les ouvriers, fermons les usines, Tomjo, Pièces et main d’œuvre, 2017.
    [7] Cf. le film Morts à 100 % : post-scriptum, de Tomjo et Modeste Richard, 45 mn, 2017. Ou encore La foi des charbonniers, les mineurs dans la Bataille du charbon, 1945-1947, Evelyne Desbois, Yves Jeanneau et Bruno Mattéi, Maison des sciences de l’homme, 1986.
    [8] « Quand Napoléon engageait la bataille du sucre », 31 janvier 2023.
    [9] « La Bataille du sucre », Le Monde, 10 septembre 2007.
    [10] Fakir, mai-juin 2023.
    [11] « La bataille du sucre ou la défaite méconnue de Napoléon Ier », Ludovic Laloux, Artefact, 2018.
    [12] « Histoire : les Antilles françaises, le sucre et la traite des esclaves », Futura sciences, 10 janv. 2019.
    [13] Cité par Ludovic Laloux, art. cit.
    [14] Idem.
    [15] Lettre d’Andriel et Wolft au ministre de l’Intérieur, 18 juillet 1813, citée par Laloux, art. cit.
    [16] L’Industrie sucrière indigène et son véritable fondateur, Pierre Aymar-Bression, 1864.
    [17] « Le sucre de betterave et l’essor de son industrie : Des premiers travaux jusqu’à la fin de la guerre de 1914-1918 », Denis Brançon, Claude Viel, Revue d’histoire de la pharmacie, n°322, 1999.
    [18] Dictionnaire encyclopédique et biographique de l’Industrie et des arts industriels, Vol. 3, art. « Louis Crespel », Eugène-Oscar Lami, 1883. On peut lire aussi L’Industrie sucrière indigène et son véritable fondateur, op. cit.
    [19] A retrouver ici.
    [20] « Le sucre de betterave et l’essor de son industrie... », art. cit.
    [21] Appel à candidature « Une sucrerie, un territoire », culture.gouv.fr, 29 juillet 2022.
    [22] Le Monde, 25 mars 1977.
    [23] La Voix du nord, 12 juillet 2023.
    [24] Jules Linard (1832-1882), multi-propriétaire de sucreries, est l’inventeur de la râpe à betterave, toujours utilisée aujourd’hui, pour laquelle il fut récompensé lors de l’Exposition universelle de 1878.
    [25] « De l’Escaut à l’Amazonie... », art. cit.
    [26] « Des plantations brésiliennes accusées de travail forcé fournissent l’Europe en sucre », Le Monde, 31 déc. 2022.
    [27] « État des lieux des ventes et des achats de produits phytopharmaceutiques en France en 2020 », mars 2022.
    [28] « Eau du robinet : les Hauts-de-France est la région où les concentrations de pesticides sont les plus élevées », [[France bleu Nord
    [29] cgb-france.fr, 16 février 2023.
    [30] « Au Brésil, les géants du sucre responsables d’une pluie toxique », Mediapart, 25 avril 2023.

    Source : https://renart.info/?La-betterave-la-gauche-le-peuple-et-nous

  • La betterave, la gauche, le peuple - et nous
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?article1863

    Le 12 janvier 2023, la coopérative sucrière Tereos est condamnée à une amende record d’un demi-million d’euros pour l’écocide de l’Escaut en 2020 (voir ici). Que ce soit au moment de la catastrophe, lors de l’audience en décembre 2022, ou du délibéré quelques semaines plus tard, on n’a vu ni le député local ni le maire exiger des comptes du deuxième groupe sucrier mondial devant une foule vengeresse. Non plus qu’on n’a entendu le « député reporter » François Ruffin, dans sa cuisine ou aux portes de l’usine, dénoncer les méfaits du sucre sur la santé et de Tereos sur la vie. On n’a pas vu le ministre de l’industrie Renaud Lescure taper du poing en sous-préfecture, ni Xavier Bertrand, président du Conseil régional, défiler dans les rues. Le président des Hauts-de-France préférant manifester à Paris le 7 (...)

    https://chez.renart.info/?Nos-betteraviers-sont-des-tueurs #Nécrotechnologies
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/la_betterave_et_nous.pdf

  • Guerre en #Ukraine : « On aura une immigration de grande qualité dont on pourra tirer profit »

    Le président de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale, #Jean-Louis_Bourlanges, a évoqué dans « Europe Matin » vendredi la « vague migratoire » qui se prépare en Europe, après l’invasion militaire russe en Ukraine. « Ce sera sans doute une immigration de grande qualité », prévient toutefois le député MoDem.

    C’est l’une des conséquences majeures de l’invasion militaire russe en Ukraine. Des milliers d’Ukrainiens vont fuir leur pays pour échapper aux combats. Jeudi, près de 100.000 d’entre eux avaient déjà quitté leur foyer, selon l’ONU. Invité d’Europe Matin vendredi, le président de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale, Jean-Louis Bourlanges, a dit s’attendre « à des mouvements » de population, sans en connaître l’ampleur. « Il faut prévoir (le flux migratoire). Ce sera sans doute une immigration de grande qualité », a évoqué le député MoDem au micro de Lionel Gougelot.

    Pourquoi Poutine a intérêt à pousser à l’immigration

    Pour Jean-Louis Bourlanges, les Ukrainiens qui s’apprêtent à quitter leur pays seront « des intellectuels, et pas seulement, mais on aura une immigration de grande qualité dont on pourra tirer profit », a-t-il ajouté. En revanche, le député a estimé que cela allait dans le sens du président russe. « Pour des raisons politiques très claires, monsieur Poutine aura intérêt à ce qu’il y ait ces mouvements pour deux raisons », a affirmé Jean-Louis Bourlanges.

    D’abord, « pour se débarrasser d’opposants potentiels dans son pays. S’ils sont à l’extérieur, ils ne le gêneront pas », analyse le président de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale. « Et pour nous embarrasser nous-même », a-t-il ajouté, « exactement comme a fait Loukachenko à la frontière de la Biélorussie et de la Pologne. » "Nos amis polonais s’apprêtent à recevoir des flots massifs", a souligné Jean-Louis Bourlanges.

    https://www.europe1.fr/politique/guerre-en-ukraine-on-aura-une-immigration-de-grande-qualite-dont-on-pourra-t

    #classification #tri #réfugiés #asile #migrations #Urkaine #réfugiés_ukrainiens #bon_réfugié #mauvais_réfugié
    #à_vomir #racisme

    –-

    Les formes de #racisme qui montrent leur visage en lien avec la #guerre en #Ukraine... en 2 fils de discussion sur seenthis :
    https://seenthis.net/messages/951232

    ping @isskein @karine4

    • « Il y a un geste humanitaire évident parce que la nature des réfugiés n’est pas contestable, on voit bien ce qu’ils fuient.
      Ensuite parce que ce sont des européens de culture.
      Et puis nous ne sommes pas face à des migrants qui vont passer dans une logique d’immigration »


      https://twitter.com/caissesdegreve/status/1497579243944878082

      Commentaire de Louis Witter sur twitter :

      Ce genre de waf waf de la casse automobile remonteront au créneau quand on verra ces mêmes exilés à Calais.

      https://twitter.com/LouisWitter/status/1497685913429815299

      #réfugiés_européens #européens_de_culture #culture #vrais_réfugiés

    • For Ukraine’s Refugees, Europe Opens Doors That Were Shut to Others

      Thousands of Ukrainians will end up in countries led by nationalist governments that have been reluctant to welcome refugees in the past.

      Russia’s invasion of Ukraine has pushed tens of thousands of people out of their homes and fleeing across borders to escape violence. But unlike the refugees who have flooded Europe in crises over the past decade, they are being welcomed.

      Countries that have for years resisted taking in refugees from wars in Syria, Iraq and Afghanistan are now opening their doors to Ukrainians as Russian forces carry out a nationwide military assault. Perhaps 100,000 Ukrainians already have left their homes, according to United Nations estimates, and at least half of them have crowded onto trains, jammed highways or walked to get across their country’s borders in what officials warn could become the world’s next refugee crisis.

      U.N. and American officials described their concerted diplomatic push for Ukraine’s neighbors and other European nations to respond to the outpouring of need. President Biden “is certainly prepared” to accept refugees from Ukraine, Jen Psaki, the White House press secretary, said on Thursday, but she noted that the majority of them would probably choose to remain in Europe so they could more easily return home once the fighting ended.

      “Heartfelt thanks to the governments and people of countries keeping their borders open and welcoming refugees,” said Filippo Grandi, the head of the U.N. refugee agency. He warned that “many more” Ukrainians were moving toward the borders.

      That means thousands will end up in countries led by nationalist governments that in past crises have been reluctant to welcome refugees or even blocked them.

      In Poland, government officials assisted by American soldiers and diplomats have set up processing centers for Ukrainians. “Anyone fleeing from bombs, from Russian rifles, can count on the support of the Polish state,” the Polish interior minister, Mariusz Kaminski, told reporters on Thursday. His government is spending hundreds of millions of dollars on a border wall, a project it began after refugees and migrants from the Middle East tried to reach the country last year but ended up marooned in neighboring Belarus.

      The military in Hungary is allowing in Ukrainians through sections of the border that had been closed. Hungary’s hard-line prime minister, Viktor Orban, has previously called refugees a threat to his country, and his government has been accused of caging and starving them.

      Farther West, Chancellor Karl Nehammer of Austria said that “of course we will take in refugees if necessary” in light of the crisis in Ukraine. As recently as last fall, when he was serving as interior minister, Mr. Nehammer sought to block some Afghans seeking refuge after the Taliban overthrew the government in Kabul.
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      “It’s different in Ukraine than in countries like Afghanistan,” he was quoted as saying during an interview on a national TV program. “We’re talking about neighborhood help.”

      Mr. Nehammer also said the number of Ukrainians seeking help was expected to be relatively small. At least 1.3 million people — mostly from Syria, Iraq and Afghanistan — applied for asylum in Europe in 2015 during what was widely regarded as the worst refugee crisis since World War II, stretching national budgets and creating a backlash of political nativism in countries across the continent.

      Some estimates project that at least one million refugees will flee Ukraine because of the Russian invasion. Linda Thomas-Greenfield, the U.S. ambassador to the United Nations, said this past week that the fighting could uproot as many as five million people, “putting pressure on Ukraine’s neighbors.”

      Diplomats and experts said European states that are willing to take in Ukrainians might be trying, in part, to highlight Russian aggressions against civilians by offering a humanitarian response. “If you think of causing the refugee crisis as one of Putin’s tools to destabilize the West, then a calm, efficient, orderly response is a really good rebuke to that,” said Serena Parekh, a professor at Northeastern University in Boston and the director of its politics, philosophy and economics program.

      “On the other hand,” said Ms. Parekh, who has written extensively about refugees, “it’s hard not to see that Ukrainians are white, mostly Christian and Europeans. And so in a sense, the xenophobia that’s really arisen in the last 10 years, particularly after 2015, is not at play in this crisis in the way that it has been for refugees coming from the Middle East and from Africa.”

      The Biden administration is also facing calls to take in Ukrainian refugees, much in the way it gave residency or humanitarian parole to more than 75,000 Afghans when the Taliban seized power in August.

      It is unlikely, at the moment at least, that the United States would offer a humanitarian parole program for Ukrainians that goes above what is currently allowed for the total number of refugee admissions for the current fiscal year. That number is capped at 125,000 this year — including 10,000 refugees from Europe and Central Asia. The guidelines set aside another 10,000 slots for refugees from any part of the world, as regional emergencies warrant.

      Ms. Psaki did not comment when asked by a reporter whether the administration would offer temporary residency protections, a program known as T.P.S., to Ukrainian students, workers and others who are in the United States to ensure they are not deported when their legal visas expire.

      “The war in Ukraine is exactly the type of crisis T.P.S. was created for — to allow people to live and work in the United States when they are unable to return home safely,” Senator Bob Menendez, Democrat of New Jersey and the chairman of the Foreign Relations Committee, said on Thursday night.

      Ms. Psaki said the United States had sent an estimated $52 million in humanitarian aid to Ukraine over the last year to help people, mostly in the eastern Donbas region, where the current war began as a slow-burn conflict between Ukraine’s military and Russian-backed separatists in 2014. Nearly 1.5 million people had been forced from their homes by the fighting even before the invasion this past week.

      Additionally, the U.S. Agency for International Development sent a team of disaster experts to Poland in the past week to assess demand for aid to the region — including water, food, shelter, medicine and other supplies — and to coordinate its delivery. Hours after the invasion began, the United Nations announced it would divert $20 million in emergency funds for humanitarian assistance to Ukrainians, mostly to the Donbas region.

      A European diplomat who is closely watching the refugee flow from Ukraine said neighboring nations might also feel the pull of history in welcoming people in danger as a direct result of Russia’s aggressions. A Soviet crackdown on a Hungarian uprising in 1956, for example, resulted in 200,000 refugees, most of whom fled to Austria before they were settled in dozens of countries across Europe. Between 80,000 and 100,000 people — and perhaps even more than that — left what was then Czechoslovakia to escape a Soviet invasion in 1968 that was launched to silence pro-democracy Prague Spring protests.

      In both cases, the United States sent aid to help European countries settle refugees and, in the Hungarian crisis, “in a matter of months, there were no more refugees — they had been found a permanent home,” Ms. Parekh said.

      That was largely the result of the United States working with European states to resettle the Hungarians, she said, calling the effort “an exception, historically.”

      “It was a similar thing — people fleeing our Russian enemy — that motivated us,” she said.

      https://www.nytimes.com/2022/02/26/us/politics/ukraine-europe-refugees.html?smid=tw-share

      #fermeture_des_frontières #ouverture_des_frontières #frontières

    • Deserving and undeserving refugees ...

      On February 24, 2022, Russia invaded Ukraine. Appearing on television from an undisclosed location, Ukraine’s president, Volodymyr Zelenskyy, warned the world that Vladimir Putin was attacking not only his country, but waging “a war against Europe.”

      Following the all-out invasion of Ukraine by land, air and sea, Ukrainians began fleeing their homes in the eastern part of the country. Most were headed to other parts of Ukraine, while others began to trickle across international borders into Poland and other Central European countries. It is hard to predict how many of the 44 million Ukrainians will seek refugee outside the borders of their country.

      When refugees flee, we watch who offers safe haven and assistance.

      Hours after the Russian attack on Ukraine, the Bureau for Foreigners’ Affairs in the Polish Ministry of Interior set up a website, in Polish and in Ukrainian, offering information on available assistance to Ukrainian refugees. The website provides legal information on how to launch an asylum claim and regularize one’s stay in Poland. It also provides scannable QR codes for eight reception centers near crossing points on the 500-kilometer Polish-Ukrainian border. Adam Niedzielski, the Polish Health Minister, said Poland will set up a special medical train to ferry injured people to 120 Polish hospitals. “We think that at this moment it would be possible to accept several thousand patients — wounded in military actions,” he told Politico.

      Poland has even made an exception for Ukrainians evacuating with their pets. The Chief Veterinarian of Poland has eased restrictions on dogs and cats crossing the Polish border.

      Don’t get me wrong, I think Ukrainians (and their pets) should receive as much assistance as they need, but the irony of this immediate offer to help, extended by the Polish government and the rest of the Visegrád 4, is not lost on me.

      The Ukrainian refugees are white, European, and Christian. They are the “deserving refugees.”

      Slovakia’s Prime Minister explicitly stated that everyone fleeing the war deserves help according to international law. The Visegrád group’s position was quite different following the “refugee crisis” of 2015.

      The Polish government led by the nationalist Law and Justice (PiS) party refused to take part in the EU efforts to relocate and resettle asylum seekers arriving in other member countries. Hungary recruited border hunters and erected barbed wire fence along its border with Serbia. On September 16, 2016, the V4 issued a joint statement expressing concern about the decreasing sense of security resulting from the arrival of Muslim refugees from war-torn Syria; vowing to cooperate with third countries to protect borders, and calling for “flexible solidarity.”

      I am glad that Poland, my country of birth, wants to extend a helping hand to Ukrainians fleeing war and accept as many as one million refugees if necessary.

      At the same time, I cannot forget the Afghans and Syrians at the Polish-Belarusian border, dying in the cold winter forest in an attempt to cross into Poland to launch an asylum claim. They are kept at arm’s length. Because they are Muslim, the Polish government sees them as a security threat. Citing danger to Polish citizens living in the borderlands, on September 2, 2021, the President of Poland declared a state of emergency in 15 localities in the Podlasie Province and 68 localities in the Lublin Province.

      These brown and non-Christian asylum seekers are apparently not the deserving ones.

      https://www.elzbietagozdziak.com/post/deserving-and-undeserving-refugees

    • Propositions d’accorder une #protection_temporaire aux réfugiés urkainiens de la part des pays de l’UE :

      While a proposal to activate the 2001 #Temporary_Protection_Directive for Ukrainians fleeing the country was “broadly welcomed” by the ministers during their extraordinary meeting on Sunday (27 February), a formal decision will only be made on Thursday, EU Home Affairs and Migration Commissioner Ylva Johansson said after the talks.
      The exceptional measure, which has never been activated before, is meant to deal with situations where the standard asylum system risks being overburdened due to a mass influx of refugees.

      https://seenthis.net/messages/951046

    • [Thread] Here is a collection of most racist coverage of #Russia's attack on #Ukraine. We are being told who deserves war, missiles, & who looks like a good refugee.
      This only serves to mislead viewers & decontextualise conflicts. Hypocrisy & its randomness..

      https://twitter.com/saracreta/status/1498072483819307011

    • Réfugiés ukrainiens : l’indignité derrière la solidarité

      Pour justifier leur soudain élan d’humanité, certains éditorialistes et responsables politiques n’ont rien trouvé de mieux que de distinguer les bons et les mauvais réfugiés. Ils convoquent leur « ressemblance » avec les Ukrainiens, mais n’expriment rien d’autre que leur racisme.

      Pour justifier leur soudain élan d’humanité, certains éditorialistes et responsables politiques n’ont rien trouvé de mieux que de distinguer les bons et les mauvais réfugiés. Ils convoquent leur « ressemblance » avec les Ukrainiens, mais n’expriment rien d’autre que leur racisme.

      « L’hypocrisie, toujours la même. » Cédric Herrou n’a pas caché son écœurement en découvrant le message posté, samedi dernier, par le maire de Breil-sur-Roya (Alpes-Maritimes) en solidarité avec la population ukrainienne. « Le même maire qui a fait sa campagne électorale contre l’accueil que nous avions fait pour d’autres populations victimes de guerres. Seule différence, ces populations étaient noires », a réagi l’agriculteur, l’un des symboles de l’aide aux migrants, grâce auquel la valeur constitutionnelle du principe de fraternité a été consacrée en 2018.

      Un principe qui se rappelle depuis quelques jours au souvenir de nombreuses personnes qui semblaient l’avoir oublié, trop occupées qu’elles étaient à se faire une place dans un débat public gangréné par le racisme et la xénophobie. Il y a deux semaines, lorsque la guerre russe était un spectre lointain et que la campagne présidentielle s’accrochait aux seules antiennes d’extrême droite, rares étaient celles à souligner que la solidarité n’est pas une insulte et qu’elle ne constitue aucun danger.

      Les mêmes qui jonglaient avec les fantasmes du « grand remplacement » et agitaient les questions migratoires au rythme des peurs françaises expliquent aujourd’hui que l’accueil des réfugiés ukrainiens en France est un principe qui ne se discute pas. À l’exception d’Éric Zemmour, dont la nature profonde – au sens caverneux du terme – ne fait plus aucun mystère, la plupart des candidat·es à la présidentielle se sont prononcé·es en faveur de cet accueil, à quelques nuances près sur ses conditions.

      Mais parce que le climat politique ne serait pas le même sans ce petit relent nauséabond qui empoisonne toute discussion, des responsables politiques et des éditorialistes se sont fourvoyés dans des explications consternantes, distinguant les réfugiés de l’Est de ceux qui viennent du Sud et du Moyen-Orient. Ceux auxquels ils arrivent à s’identifier et les autres. Ceux qui méritent d’être aidés et les autres. Les bons et les mauvais réfugiés, en somme.

      Ainsi a-t-on entendu un éditorialiste de BFMTV expliquer que cette fois-ci, « il y a un geste humanitaire immédiat, évident [...] parce que ce sont des Européens de culture » et qu’« on est avec une population qui est très proche, très voisine », quand un autre soulignait qu’« on ne parle pas là de Syriens qui fuient les bombardements du régime syrien [mais] d’Européens qui partent dans leurs voitures qui ressemblent à nos voitures, qui prennent la route et qui essaient de sauver leur vie, quoi ! »

      Dès le 25 février, sur Europe 1, le député MoDem Jean-Louis Bourlanges, qui n’occupe rien de moins que la présidence de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, avait quant à lui indiqué qu’il fallait « prévoir un flux migratoire ». Mais attention : « ce sera sans doute une immigration de grande qualité », avait-il pris soin de préciser, évoquant « des intellectuels, et pas seulement ». Bref, « une immigration de grande qualité dont on pourra tirer profit ».

      Ces propos ont suscité de vives réactions que l’éditorialiste de BFMTV et l’élu centriste ont balayées avec la mauvaise foi des faux crédules mais vrais politiciens, le premier les renvoyant à « la gauche “wokiste” » – un désormais classique du genre –, le deuxième à « l’extrême gauche » – plus classique encore, éculé même. « Il faut avoir un esprit particulièrement tordu pour y voir une offense à l’égard de quiconque », a ajouté Jean-Louis Bourlanges, aux confins du « on ne peut plus rien dire ».

      C’est vrai enfin, s’indignerait-on aux « Grandes Gueules », « c’est pas du racisme, c’est la loi de la proximité ». D’ailleurs, le même type de commentaire a fleuri dans des médias étrangers, tels CBS News, Al Jazzeera, la BBC ou The Telegraph, comme autant de « sous-entendus orientalistes et racistes » condamnés par l’Association des journalistes arabes et du Moyen-Orient (Ameja). Preuve, s’il en fallait, que le racisme – pardon, « la loi de proximité » – n’est pas une exception française.

      Suivant la directive d’Emmanuel Macron qui a confirmé que « la France prendra sa part » dans l’accueil des réfugiés ukrainiens, le gouvernement multiplie lui aussi les communications depuis quelques jours, le plus souvent par la voix du ministre de l’intérieur. Ces réfugiés « sont les bienvenus en France » a ainsi déclaré Gérald Darmanin lundi, avant d’appeler « tous les élus […] à mettre en place un dispositif d’accueil » et à « remonter, les associations, les lieux d’hébergement au préfet ».

      Dans le même élan de solidarité, la SNCF a annoncé que les réfugiés ukrainiens pourraient désormais « circuler gratuitement en France à bord des TGV et Intercités ». « Belle initiative de la SNCF mais je rêve d’une solidarité internationale étendue à TOUS les réfugiés, qu’ils fuient la guerre en Ukraine ou des conflits armés en Afrique ou encore au Moyen-Orient. Les réfugiés ont été et sont encore trop souvent refoulés et maltraités », a réagi la présidente d’Amnesty International France, Cécile Coudriou.

      Car au risque de sombrer dans le « wokisme » – ça ne veut rien dire, mais c’est le propre des appellations fourre-tout –, on ne peut s’empêcher de noter que ces initiatives, plus que nécessaires, tranchent singulièrement avec les politiques à l’œuvre depuis des années au détriment des exilé·es : l’absence de dispositif d’accueil digne de ce nom ; le harcèlement quasi quotidien de la part des forces de l’ordre, qui lacèrent des tentes, s’emparent des quelques biens, empêchent les distributions de nourriture ; le renforcement permanent des mesures répressives…

      Or comme l’écrivait récemment la sociologue et écrivaine Kaoutar Harchi, « un accueil digne, une aide sans condition, un accès immédiat à des repas, à des soins, à des logements, un soutien psychologique, devraient être accordés à toute personne qui est en France et qui souffre. Mais c’est sans compter le racisme qui distribue l’humanité et l’inhumanité ». C’est bien lui qui se profile aujourd’hui derrière la solidarité retrouvée de certain·es.

      Le 16 août 2021, alors que les images d’Afghans s’accrochant au fuselage d’avions pour fuir l’avancée des talibans faisaient le tour du monde, Emmanuel Macron déclarait : « L’Afghanistan aura aussi besoin dans les temps qui viennent de ses forces vives et l’Europe ne peut pas à elle seule assumer les conséquences de la situation actuelle. Nous devons anticiper et nous protéger contre les flux migratoires irréguliers importants. » Imagine-t-on cette phrase prononcée dans le contexte actuel ? La réponse est évidemment non. Et son corollaire fait honte.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/010322/refugies-ukrainiens-l-indignite-derriere-la-solidarite

    • They are ‘civilised’ and ‘look like us’: the racist coverage of Ukraine

      Are Ukrainians more deserving of sympathy than Afghans and Iraqis? Many seem to think so

      While on air, CBS News senior foreign correspondent Charlie D’Agata stated last week that Ukraine “isn’t a place, with all due respect, like Iraq or Afghanistan, that has seen conflict raging for decades. This is a relatively civilized, relatively European – I have to choose those words carefully, too – city, one where you wouldn’t expect that, or hope that it’s going to happen”.

      If this is D’Agata choosing his words carefully, I shudder to think about his impromptu utterances. After all, by describing Ukraine as “civilized”, isn’t he really telling us that Ukrainians, unlike Afghans and Iraqis, are more deserving of our sympathy than Iraqis or Afghans?

      Righteous outrage immediately mounted online, as it should have in this case, and the veteran correspondent quickly apologized, but since Russia began its large-scale invasion on 24 February, D’Agata has hardly been the only journalist to see the plight of Ukrainians in decidedly chauvinistic terms.

      The BBC interviewed a former deputy prosecutor general of Ukraine, who told the network: “It’s very emotional for me because I see European people with blue eyes and blond hair … being killed every day.” Rather than question or challenge the comment, the BBC host flatly replied, “I understand and respect the emotion.” On France’s BFM TV, journalist Phillipe Corbé stated this about Ukraine: “We’re not talking here about Syrians fleeing the bombing of the Syrian regime backed by Putin. We’re talking about Europeans leaving in cars that look like ours to save their lives.”

      In other words, not only do Ukrainians look like “us”; even their cars look like “our” cars. And that trite observation is seriously being trotted out as a reason for why we should care about Ukrainians.

      There’s more, unfortunately. An ITV journalist reporting from Poland said: “Now the unthinkable has happened to them. And this is not a developing, third world nation. This is Europe!” As if war is always and forever an ordinary routine limited to developing, third world nations. (By the way, there’s also been a hot war in Ukraine since 2014. Also, the first world war and second world war.) Referring to refugee seekers, an Al Jazeera anchor chimed in with this: “Looking at them, the way they are dressed, these are prosperous … I’m loath to use the expression … middle-class people. These are not obviously refugees looking to get away from areas in the Middle East that are still in a big state of war. These are not people trying to get away from areas in North Africa. They look like any.” Apparently looking “middle class” equals “the European family living next door”.

      And writing in the Telegraph, Daniel Hannan explained: “They seem so like us. That is what makes it so shocking. Ukraine is a European country. Its people watch Netflix and have Instagram accounts, vote in free elections and read uncensored newspapers. War is no longer something visited upon impoverished and remote populations.”

      What all these petty, superficial differences – from owning cars and clothes to having Netflix and Instagram accounts – add up to is not real human solidarity for an oppressed people. In fact, it’s the opposite. It’s tribalism. These comments point to a pernicious racism that permeates today’s war coverage and seeps into its fabric like a stain that won’t go away. The implication is clear: war is a natural state for people of color, while white people naturally gravitate toward peace.

      It’s not just me who found these clips disturbing. The US-based Arab and Middle Eastern Journalists Association was also deeply troubled by the coverage, recently issuing a statement on the matter: “Ameja condemns and categorically rejects orientalist and racist implications that any population or country is ‘uncivilized’ or bears economic factors that make it worthy of conflict,” reads the statement. “This type of commentary reflects the pervasive mentality in western journalism of normalizing tragedy in parts of the world such as the Middle East, Africa, south Asia, and Latin America.” Such coverage, the report correctly noted, “dehumanizes and renders their experience with war as somehow normal and expected”.

      More troubling still is that this kind of slanted and racist media coverage extends beyond our screens and newspapers and easily bleeds and blends into our politics. Consider how Ukraine’s neighbors are now opening their doors to refugee flows, after demonizing and abusing refugees, especially Muslim and African refugees, for years. “Anyone fleeing from bombs, from Russian rifles, can count on the support of the Polish state,” the Polish interior minister, Mariusz Kaminski, recently stated. Meanwhile, however, Nigeria has complained that African students are being obstructed within Ukraine from reaching Polish border crossings; some have also encountered problems on the Polish side of the frontier.

      In Austria, Chancellor Karl Nehammer stated that “of course we will take in refugees, if necessary”. Meanwhile, just last fall and in his then-role as interior minister, Nehammer was known as a hardliner against resettling Afghan refugees in Austria and as a politician who insisted on Austria’s right to forcibly deport rejected Afghan asylum seekers, even if that meant returning them to the Taliban. “It’s different in Ukraine than in countries like Afghanistan,” he told Austrian TV. “We’re talking about neighborhood help.”

      Yes, that makes sense, you might say. Neighbor helping neighbor. But what these journalists and politicians all seem to want to miss is that the very concept of providing refuge is not and should not be based on factors such as physical proximity or skin color, and for a very good reason. If our sympathy is activated only for welcoming people who look like us or pray like us, then we are doomed to replicate the very sort of narrow, ignorant nationalism that war promotes in the first place.

      The idea of granting asylum, of providing someone with a life free from political persecution, must never be founded on anything but helping innocent people who need protection. That’s where the core principle of asylum is located. Today, Ukrainians are living under a credible threat of violence and death coming directly from Russia’s criminal invasion, and we absolutely should be providing Ukrainians with life-saving security wherever and whenever we can. (Though let’s also recognize that it’s always easier to provide asylum to people who are victims of another’s aggression rather than of our own policies.)

      But if we decide to help Ukrainians in their desperate time of need because they happen to look like “us” or dress like “us” or pray like “us,” or if we reserve our help exclusively for them while denying the same help to others, then we have not only chosen the wrong reasons to support another human being. We have also, and I’m choosing these words carefully, shown ourselves as giving up on civilization and opting for barbarism instead.

      https://www.theguardian.com/commentisfree/2022/mar/02/civilised-european-look-like-us-racist-coverage-ukraine?CMP=Share_iOSAp

    • Guerre en Ukraine : « Nos » réfugiés d’abord ?

      Il est humainement inacceptable que l’Europe et la Belgique fassent une distinction entre des réfugiés qui fuient la guerre depuis un pays du continent européen et les autres.

      Bonne nouvelle : le secrétaire d’Etat à l’Asile et à la Migration Sammy Mahdi met tout en œuvre pour accueillir dans notre pays le plus grand nombre possible de personnes fuyant l’Ukraine. Elles peuvent compter sur une protection automatique d’un an, extensible à trois ans si nécessaire. Cet accord (européen) inconditionnel, sans procédure d’asile, est unique et sans précédent. Mais sur quoi se base-t-il ?

      « Nous avons le devoir moral d’aider et de faire preuve de solidarité », a déclaré le secrétaire d’État dans De Zevende Dag. « Nous ne devons pas tarder à mettre à disposition un refuge sûr. »

      Un demi-million d’Ukrainiens ont déjà fui le pays vers l’Europe, et six à sept millions d’autres pourraient suivre. Une telle réponse humaine et directe aux personnes qui fuient la guerre doit être saluée. Les personnes dont la vie est menacée par la guerre méritent un refuge sûr ailleurs, un statut légal et une aide de base pour survivre. En cela, l’hospitalité de Mahdi suit l’esprit de la Convention des Nations unies sur les réfugiés de 1951 et du Protocole de New York de 1967. C’est un geste logique et humain.
      Frontières sacrées

      Toutefois, le contraste est troublant avec la réaction européenne envers tant d’autres personnes démunies qui ont dû quitter des zones de conflit turbulentes et qui sont « accueillies » à nos frontières extérieures par de hauts murs, des barbelés et une surveillance numérique dans laquelle l’UE investit des milliards. Les mêmes ministres européens de la Migration qui accueillent aujourd’hui les Ukrainiens/nes à bras ouverts se tenaient à la frontière entre la Lituanie et la Biélorussie en janvier dernier, en contemplant le nouveau parapet de la forteresse Europe.

      Un mur similaire est actuellement en cours de construction entre la Pologne et la Biélorussie, pour un coût de 350 millions d’euros : 5,5 m de haut, 186 km de long. Sur Facebook, le Premier ministre polonais a posté : « La frontière polonaise n’est pas seulement une ligne sur une carte. La frontière est sainte – le sang polonais a été versé pour elle ! »

      C’est précisément sur cette frontière sacrée qu’au moins 19 personnes ont été retrouvées mortes (gelées) depuis le début des travaux : des personnes originaires du Yémen, d’Irak et du Nigeria.

      Apparemment, la souffrance est mesurable sur une échelle. Apparemment, comme l’écrit la philosophe Judith Butler, certaines vies méritent d’être pleurées tandis que d’autres peuvent être traquées, illégalisées, exploitées sur le marché du travail et laissées à la merci de la politique belge d’asile et de migration. Comme si un habitant de Kaboul avait moins de raisons humaines de fuir qu’un habitant de Kiev ? Comme si notre « devoir moral d’aider » était aussi un interrupteur que l’on peut allumer et éteindre à volonté ? Alors que sous l’ancien secrétaire d’État Theo Francken, un projet de loi autorisait la police à faire une simple descente chez tous ceux qui accueillent des personnes déplacées, le hashtag #PlekVrij (#EspaceLibre) appelle désormais les citoyens/nes à libérer des chambres pour les familles ukrainiennes. Il n’y a pas plus schizophrène que cela dans l’État belge.

      Trouvez les dix différences

      Une mère réfugiée avec son enfant et une mère réfugiée avec son enfant : cherchez les dix différences. La principale différence est claire : si la mère porte un foulard ou si l’enfant est moins blanc, on aurait moins envie de les laisser entrer. Plusieurs Ukrainiens/n.s et résidents/es en Ukraine noirs témoignent aujourd’hui sur les médias sociaux de la façon dont ils ont été arrêtés/es à la frontière polonaise, volés/es et abandonnés/es à leur sort. La conclusion évidente va à l’encontre de toute convention internationale : notre politique d’asile européenne et belge est discriminatoire sur la base de la couleur et de la religion. Nos réfugiés à nous passent avant tout le monde.

      La décision véhémente de Mahdi rappelle presque l’« opération de sauvetage » controversée et très sélective de 1.500 chrétiens syriens menée par Francken en 2015. En même temps, les Afghans/nes n’ont pas pu compter sur la solidarité de Mahdi sur Twitter lors de la prise du pouvoir par les talibans l’année dernière. À l’époque, il avait écrit, avec cinq collègues de l’UE, une autre lettre à la Commission européenne pour demander que les rapatriements forcés vers l’Afghanistan ne cessent pas : « L’arrêt des retours forcés envoie un mauvais signal et incite probablement encore plus de citoyens/nes afghans/nes à quitter leur foyer. »

      Ceux qui insinuent que fuir la guerre en Ukraine est en effet « quelque chose de différent » que de fuir un conflit armé en Afghanistan, doivent enfin invoquer le type de solidarité populaire historique que beaucoup méprisent aujourd’hui chez Poutine. Il s’agit d’une distinction peu différente de l’aryanisme latent dont un procureur ukrainien s’est fait l’écho sur la BBC : « Cette guerre est très émotionnelle pour moi parce que je vois maintenant des Européens aux yeux bleus et aux cheveux blonds se faire tuer. » (1) Dans l’Europe de 2022, même dans la mort, tout le monde n’est pas égal.

      Pensez aux 23.000 personnes qui sont mortes en Méditerranée depuis 2014 à cause du régime frontalier européen. Le nationalisme de la Russie et le continentisme de l’UE ont peut-être des visages différents, mais des conséquences mortelles similaires.
      #InMyName

      Par conséquent, la préoccupation actuelle pour l’Ukraine ne devrait pas être une exception, mais devrait devenir la norme pour tous ceux qui sont contraints de quitter leur patrie. Tant que cette égalité n’est pas atteinte, le régime d’accueil spécial de l’Europe n’indique pas l’hospitalité, mais la suprématie blanche. Une fois de plus, ce statut spécial pour les Ukrainiens/nes confirme ce que 160 avocats/es belges spécialisés/es dans le droit de l’immigration ont dénoncé dans une lettre ouverte parue dans La Libre en décembre : notre politique de régularisation n’est que du vent.

      Devrons-nous donc espérer qu’à chaque crise, le secrétaire d’État se comporte en héros : « tel ou tel groupe a désormais droit à notre accueil temporaire et exceptionnel » ?

      Non, nous avons besoin de cadres juridiques équitables pour le long terme. Ce que l’État belge offre aujourd’hui, à juste titre, aux citoyens/nes ukrainiens/nes devrait s’appliquer à tout le monde : attention, confiance fondamentale, action rapide, absence d’ambiguïté. Si nous pouvons prendre en charge des millions de victimes de Poutine, nous devrions également être en mesure de garantir un avenir à quelques dizaines de milliers de concitoyens/nes sans papiers en Belgique. On dirait qu’il y a un #EspaceLibre.

      https://www.lesoir.be/427956/article/2022-03-04/guerre-en-ukraine-nos-refugies-dabord
      #Belgique

    • Le vrai ou faux : les réfugiés ukrainiens sont-ils mieux accueillis que d’autres ?

      En plus d’une exemption de procédure, les réfugiés venant d’Ukraine bénéficient d’un effort d’accueil en décalage par rapport aux standards européens.
      Depuis des semaines, la Belgique laisse chaque jour une partie des demandeurs d’asile sur le carreau, sans prise en charge, renvoyant les déçus vers les réseaux d’accueil de sans-abrisme, voire les squats et la rue. L’Etat est en faute, il a été condamné pour cela. Mais le secrétaire d’Etat et son administration n’ont cessé d’assurer faire leur possible pour aménager de nouvelles places, ne pouvant cependant couvrir les besoins. Avec le déclenchement de la guerre en Ukraine et le mouvement de solidarité face aux déjà deux millions de réfugiés boutés hors du pays, 24.000 places d’accueil ont été mises à disposition en quelques jours par les communes et les particuliers pour accueillir les réfugiés en Belgique. Le système est encore boiteux, mais la mobilisation est là. Les élus tonnent au Parlement et sur les réseaux sociaux : il n’est pas question de laisser un Ukrainien sans toit. Et Theo Francken (N-VA) de surenchérir : un toit ne suffit pas, il faut penser à l’accompagnement psychologique des personnes traumatisées par la guerre. Voilà des années pourtant que les associations alertent sur l’indigence de la prise en charge psychologique des réfugiés, sans trouver d’écho.

      L’Union européenne est-elle en train de formaliser un double standard pour les réfugiés, avec des Ukrainiens bénéficiant d’un statut automatique et des Erythréens, Syriens, Afghans soumis à une procédure d’asile longue et souvent douloureuse ? Oui. Y a-t-il lieu de s’en offusquer ? Tout dépend de ce dont on parle.

      L’activation de la protection temporaire qui octroie automatiquement une série de droits aux ressortissants ukrainiens ayant quitté le pays depuis le début du conflit a été unanimement saluée, tout comme l’élan de solidarité qui l’accompagne dans les pays européens. La question qui se pose depuis est plutôt de savoir pourquoi elle n’avait jamais été appliquée jusqu’à maintenant ? Qu’il s’agisse des déplacements de populations provoqués par les printemps arabes (en Tunisie, en Libye) ou la guerre en Syrie, les occasions n’ont pas manqué depuis sa création en 2001.

      Meltem Ineli Ciger a passé près de sept ans de sa vie à étudier la question. Pour sa thèse, à l’université de Bristol, puis à l’occasion de diverses publications jusqu’en 2018. De quoi construire une solide analyse expliquant pourquoi la directive est de facto inapplicable : maladresse dans la définition des termes et conditions, mécanisme d’activation trop complexe, défaut de solidarité structurel… Il n’aura fallu que quelques jours pour envoyer son travail à la poubelle (ou pas loin). « Comme j’ai pu avoir tort », relève non sans humour et amertume la juriste turque dans une note de blog du réseau Odysseus, spécialisé dans le droit européen de la migration. « Les événements de ces deux dernières semaines montrent une chose : les raisons que j’avais identifiées au fil des ans se réduisent à une réflexion : la directive protection temporaire n’a pas été implémentée avant 2022 parce que la Commission et le Conseil n’avaient simplement pas la volonté politique de le faire. »

      Un flux massif et inédit

      La chercheuse, aujourd’hui professeur assistante à l’université Suleyman Demirel, en Turquie, a donc revu sa copie, dressant des constats que rejoignent les différents experts contactés.

      D’abord, le caractère massif et inédit des flux de réfugiés ukrainiens. Même si les grands mouvements d’asile de 2015-2016 ont amené plus de 2 millions de personnes dans l’Union européenne, les flux se sont répartis sur deux ans. Et les Syriens, qui auraient pu prétendre à une protection automatique, ne représentaient qu’un gros quart des demandeurs. Une pression jugée absorbable par le système classique d’asile. Ici, deux millions de personnes ont traversé les frontières en 12 jours. Impossible de mener des évaluations individuelles détaillées sans provoquer des engorgements dramatiques, que ce soit à la frontière ou dans les pays d’arrivée où le système d’asile est parfois déjà en état de saturation (comme en Belgique). Surtout qu’il n’y a pas de débat quant à savoir les personnes déplacées ont besoin de protection.

      L’autre facteur, c’est la crainte de l’appel d’air, qui a jusque-là systématiquement retenu les Etats membres. « L’enjeu, c’est l’hinterland », souligne Jean-Louis De Brouwer (Institut Egmont), qui a participé à la création de la directive. « Quand il y a la crise en Syrie ou en Afghanistan, les réfugiés vont traverser de vastes territoires qui peuvent être des pays de premier accueil. La réaction systématique et immédiate de l’Union européenne, c’est de dire : on va aider les pays limitrophes. La crainte étant qu’en activant un statut perçu comme potentiellement trop généreux tout le monde veuille venir en Europe. » Une forme de solidarité a minima qui s’accompagne d’un travail de sécurisation de la frontière via des accords avec des pays tiers d’accueil ou de transit (comme la Turquie, le Niger ou la Libye), des entraves (barbelés, murs), voire des opérations de refoulement illégales. « Ici, il n’est pas question d’appel d’air : quand les réfugiés franchissent la frontière, ils sont sur le territoire européen. »
      Une empathie sélective

      Enfin, les Ukrainiens sont européens (eux). Les médias n’ont pas tardé à rapporter les dérapages d’hommes politiques ou journalistes qualifiant cette population réfugiée d’inhabituelle car « éduquée » et issue de régions « civilisées », signes d’une empathie sélective reposant parfois sur des biais douteux. Sans parler des discriminations des étudiants étrangers, notamment nigérians, bloqués à la frontière polonaise.

      Une des rares modifications apportée par les Etats membres à la proposition de la Commission pour activer la directive a été d’exclure du mécanisme les ressortissants de pays tiers sans résidence permanente (les étudiants et les demandeurs d’asile par exemple). Et parce que les Ukrainiens sont européens, les Etats membres ont totalement renversé les paradigmes cadrant normalement les questions d’asile : les réfugiés sont ici invités à s’installer dans le pays de leur choix. La solidarité européenne se construira à partir de cette répartition spontanée et non en vertu de règles définissant des pays (frontaliers) responsables. Si cette approche résulte d’un certain pragmatisme (les Ukrainiens n’ont pas d’obligation de visa et peuvent se déplacer librement pendant 90 jours), elle est encouragée et présentée très positivement par la Commission. A 180 degrés des discours portés ces dernières années concernant les demandeurs d’asile, bloqués par le carcan d’une procédure Dublin (*) que tout le monde reconnaît pourtant comme inefficace et coûteuse.

      A vrai dire, l’enjeu du double standard devrait peser surtout dans les mois qui viennent, à supposer que le conflit en Ukraine se poursuive. La protection temporaire et le statut de réfugié ouvrent des droits assez similaires (séjour, accès au marché du travail, aux droits sociaux…). Il s’agira donc de voir si les dispositifs déployer pour aider et accueillir les Ukrainiens – pour l’accès au logement, au travail, à l’apprentissage de la langue – sans laisser sur la touche les autres réfugiés, voire les populations européennes précarisées

      https://www.lesoir.be/428815/article/2022-03-08/le-vrai-ou-faux-les-refugies-ukrainiens-sont-ils-mieux-accueillis-que-dautres

      #double_standard #empathie_sélective

    • #Grèce : Πραγματική προσφυγική πολιτική μόνο για Ουκρανούς
      –->

      Une véritable politique des réfugiés uniquement pour les Ukrainiens

      Πολλοί από τους χιλιάδες Ουκρανούς πρόσφυγες που έφτασαν στην Ελλάδα δεν έχουν χαρτιά, αλλά κανείς δεν διανοήθηκε να τους πει « παράνομους » ή « λαθραίους », να τους χαρακτηρίσει « υγειονομική απειλή » λόγω της πανδημίας, να μιλήσει για απειλή στην εδαφική ακεραιότητα, να υπαινιχθεί αλλοίωση του εθνικού μας πολιτισμού, να επισημάνει ανυπέρβλητες γλωσσικές και πολιτισμικές διαφορές που εμποδίζουν την ένταξή τους στην ελληνική κοινωνία, να εκφράσει φόβο για αύξηση της εγκληματικότητας ή να υπαινιχθεί ότι θα μας πάρουν τις δουλειές.

      Μέσα σε μια νύχτα τα κλειστά σύνορα άνοιξαν και δημιουργήθηκε ασφαλής και νόμιμη διαδρομή μέσω του Προμαχώνα, όπου οι πρόσφυγες υποβάλλουν αίτημα για ταξιδιωτικά έγγραφα. Το υπουργείο Μετανάστευσης και Ασύλου διαθέτει άμεσα χώρο στέγασης και σίτιση και ο κ. Μηταράκης, που μέχρι πρόσφατα ανακοίνωνε κλείσιμο δομών και εξώσεις, τώρα επιθεωρεί δομές της βόρειας Ελλάδας που ξαναγεμίζουν. Η υπηρεσία Ασύλου, κλειστή από τον Νοέμβριο για χιλιάδες νεοεισερχόμενους πρόσφυγες της ενδοχώρας που δεν μπορούν να ζητήσουν άσυλο, ανοίγει ξαφνικά για να δεχτεί τα αιτήματα των Ουκρανών για προσωρινή προστασία.

      Οι αρχές προαναγγέλλουν άμεση έκδοση ΑΜΚΑ και ΑΦΜ και γρήγορη πρόσβαση στην αγορά εργασίας, ενώ το υπουργείο Παιδείας απλοποιεί την εγγραφή των Ουκρανών προσφυγόπουλων στα σχολεία, που έχει ήδη αρχίσει. Μέσα σε λίγες μέρες το κράτος μοιάζει ξαφνικά με καλολαδωμένη μηχανή που λύνει προβλήματα αντί να βάζει εμπόδια. Η νέα κανονικότητα που δημιουργεί στο προσφυγικό η ρωσική εισβολή στην Ουκρανία είναι επιθυμητή και καλοδεχούμενη. Αναδεικνύει όμως τη βαθιά υποκρισία της ευρωπαϊκής και ελληνικής αντιπροσφυγικής πολιτικής των τελευταίων χρόνων, που εξακολουθεί να θεωρείται κανονικότητα για τους πρόσφυγες της Μέσης Ανατολής, της Ασίας και της Αφρικής, είναι όμως πια απογυμνωμένη από προφάσεις, ψέματα και φαιδρά επιχειρήματα και φαίνεται καθαρά το αποκρουστικό πρόσωπο του ρατσισμού.

      https://www.efsyn.gr/stiles/ano-kato/335992_pragmatiki-prosfygiki-politiki-mono-gia-oykranoys

      commentaire de Vicky Skoumbi via la mailing-list de Migreurop :

      Miracle : L’accueil digne des réfugiés devient possible, même en Grèce, dans un laps de temps record ! Pourvu que ceux-ci sont blonds aux yeux bleus et qu’ils ne menacent pas le « mode de vie européen »...Quant aux autres, qu’ils crèvent frigorifiés sur un îlot d’Evros ou sous les flots

    • #Emmanuel_Macron :

      « Quand on a peur des phénomènes migratoires, je pense qu’il faut là aussi défendre notre ADN, c’est-à-dire notre devoir d’accueillir celles et ceux qui fuient un pays en guerre comme les Ukrainiennes et les Ukrainiens aujourd’hui, mais en même temps de savoir lutter contre l’immigration clandestine [ie non européenne - NdR]. C’est par cette clarté et cette exigence que, je pense, on peut répondre aux peurs et en même temps tenir une réponse républicaine »

      https://seenthis.net/messages/955991

    • Gli studenti ucraini arrivati in Italia dopo l’invasione potranno essere ammessi alle classi successive anche in mancanza dei requisiti necessari ed essere esonerati dagli esami di Stato

      Il ministro dell’Istruzione, Patrizio Bianchi, ha firmato un’ordinanza che prevede che gli studenti ucraini arrivati in Italia a seguito dell’invasione dell’Ucraina potranno essere ammessi alle classi successive anche in mancanza dei requisiti necessari e, se necessario, esonerati dagli esami di Stato. L’ordinanza riguarda i soli studenti ucraini iscritti alle scuole elementari, medie e superiori italiane a partire dallo scorso 24 febbraio, data d’inizio dell’invasione ucraina.

      Per gli studenti iscritti alle scuole superiori l’ordinanza prevede che, in mancanza dei requisiti necessari, si potrà essere ammessi all’anno successivo ma dovrà essere redatto un piano didattico individuale per raggiungere i livelli di apprendimento richiesti. Il piano dovrà essere predisposto tenendo conto dell’impatto psicologico della guerra e delle difficoltà che comporta l’apprendimento in un paese straniero.

      Per quanto riguarda gli esami di Stato, invece, l’ordinanza prevede la possibilità di esonero per gli studenti che si trovino nelle classi «terminali» (cioè terza media e quinta superiore) e non abbiano raggiunto i livelli linguistici e le competenze disciplinari necessarie a sostenerli: in questo caso, il consiglio di classe rilascerà un attestato di credito formativo, che nel caso degli studenti di terza media sarà sufficiente per iscriversi alle superiori, e nel caso degli studenti di quinta superiore per frequentare nuovamente la quinta.

      https://www.ilpost.it/2022/06/07/studenti-ucraini-ordinanza-ministero-istruzione

      #étudiants #étudiants_ukrainiens #Italie