• « L’expression de “privilège blanc” n’est pas dénuée de pertinence pour penser le contexte français », Claire Cosquer
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/06/16/l-expression-de-privilege-blanc-n-est-pas-denuee-de-pertinence-pour-penser-l

    La sociologue Claire Cosquer pense que le « privilège blanc », est inséparable du racisme, aux Etats-Unis comme en France.

    Tribune. Le racisme peut-il exister sans faire de « privilégiés » ? Le racisme est un système de hiérarchies sociales entre les personnes, positionnées selon la façon dont elles sont perçues et rattachées à une supposée hérédité. Il se traduit concrètement par un système d’avantages et de désavantages, formant un immense iceberg dont les discriminations, la violence physique et verbale à caractère racial ne sont que la partie émergée.

    L’expression « privilège blanc », propulsée de nouveau sur le devant de la scène médiatique par les manifestations récentes contre le racisme et les violences policières, désigne l’ensemble des avantages sociaux dont bénéficient les personnes qui ne sont pas les cibles du racisme. Elle souligne que le racisme relève d’un rapport social, c’est-à-dire d’une relation entre groupes sociaux : là où certains sont désavantagés, d’autres sont au contraire avantagés par les hiérarchies sociales. L’existence d’inégalités suppose donc, en toute logique, l’existence de privilèges. Dès lors, dire que le « privilège blanc » n’existe pas en France revient de façon rigoureusement identique à affirmer que le racisme n’existe pas en France. Prétendre que seul le second existe traduit soit une lecture très partiale de l’expression « privilège blanc », par exemple en la réduisant à un privilège en droit, soit une compréhension très restrictive du racisme, soit les deux.

    Trouvant son origine dans les luttes des militants antiracistes et anticolonialistes, l’expression de « privilège blanc » a été popularisée par le texte de la chercheuse étatsunienne Peggy McIntosh White Privilege. Unpacking the Invisible Knapsack, publié en 1989. McIntosh y énumère des « petites choses du quotidien » qui relèvent de l’évidence pour une personne blanche mais peuvent être problématiques, sinon impossibles, pour les autres : allumer la télévision et y voir des personnes auxquelles il est facile de s’identifier, déménager sans se soucier de l’accueil dans un nouveau quartier, ne pas avoir à éduquer ses enfants en leur apprenant à se protéger du racisme…

    Division raciale du monde

    Apparue outre-Atlantique, l’expression de « privilège blanc » n’est pas dénuée de pertinence pour penser le contexte français. Certes, les Etats-Unis et la France ont des histoires différentes. Les Etats-Unis forment une colonie de peuplement structurée sur son sol même par l’esclavage, où la ségrégation raciale n’a été abolie en droit qu’en 1968. Mais la France, détentrice de l’un des plus grands empires coloniaux au monde, dont l’« outre-mer » représente aujourd’hui les dernières miettes, a aussi construit sa richesse sur la division raciale du monde et des échanges.

    Napoléon, héros national acclamé, a rétabli l’esclavage en 1802 et une statue de Jean-Baptiste Colbert, auteur du Code noir, trône devant le Palais-Bourbon. L’encodage racial du patrimoine national n’est pas qu’un héritage symbolique rappelant une inégalité révolue : les violences policières, les discriminations à l’embauche, au logement ou devant la justice sont les expressions les mieux connues du racisme. Elles suffisent à définir un « privilège blanc » à la française : subir moins de contrôles policiers, par ailleurs moins violents, ne pas se voir refuser un emploi ou un logement en raison de sa couleur de peau ou de son origine, réelle ou supposée.

    Ces privilèges reposent, en France comme aux Etats-Unis, sur un continuum du racisme qui relève aussi de ces « petites choses du quotidien », des avantages parfois peu perceptibles qui vont des sous-vêtements couleur « chair » conçus pour des peaux peu pigmentées au fait de n’être que très rarement la seule personne blanche dans la salle.

    Domination et habitus

    L’expression « privilège blanc » a certes des limites. Elle tend à consolider une image très statique des positions sociales : on serait ainsi ce que l’on détient, en matière de ressources, de capitaux et d’avantages, moins ce que l’on fait et ce que l’on reproduit, d’une façon consciente ou inconsciente. L’approche en matière de privilèges est à bien des égards moins riche que l’approche en matière de domination. A titre de comparaison, on peut plus ou moins rapidement faire le tour des « privilèges » de classe en les définissant par les revenus, les patrimoines, les statuts socioprofessionnels.

    L’approche en matière de domination amène à explorer un niveau beaucoup plus fin des hiérarchies sociales : la notion devenue célèbre d’habitus, forgée par Pierre Bourdieu, permet de mettre en évidence que les inégalités de classe se reproduisent aussi au travers de pratiques, de goûts ou encore de comportements différenciés et inégalement valorisés. Les sciences sociales investissent aujourd’hui ce concept d’habitus, parmi d’autres outils analytiques, pour comprendre comment les inégalités raciales perdurent bien après leur abolition en droit. L’expression de « privilège blanc », finalement assez peu employée en sciences sociales, se révèle moins exigeante que les concepts de domination blanche ou d’habitus blanc, qui cristallisent les pistes de recherche les plus dynamiques.

    Loin de culpabiliser les personnes blanches, l’expression de « privilège blanc » permet plutôt de reconnaître à peu de frais certains avantages, sans engager d’introspection potentiellement plus douloureuse sur les comportements et les modes de pensée qui maintiennent le racisme contemporain. Si elle est imparfaite, elle contribue cependant à la compréhension du racisme comme une relation inégale entre groupes sociaux, là où le discours public est volontiers d’ordre humanitaire, identifiant des victimes et des discriminations mais passant sous silence les bénéfices et les bénéficiaires. Les réactions particulièrement défensives qu’elle suscite, méconnaissant souvent sa définition même, illustrent une réticence aiguë à penser les deux côtés de cette relation inégale.

    https://seenthis.net/messages/861042

    #privilège_blanc #racisme #rapports_sociaux #domination #domination_blanche #individualisation

  • « Checker les privilèges » ou renverser l’ordre ? | Kaoutar Harchi
    https://www.revue-ballast.fr/checker-les-privileges-ou-renverser-lordre

    « Check Your Privilege » : le mot d’ordre est désormais fameux. On trouve même, sur Internet, des tests visant à calculer son niveau précis de privilège — en fonction des remarques que l’on reçoit sur son accent, du logement que l’on occupe, des tentatives de suicide que l’on a ou non commises ou encore de l’existence d’un lieu de culte honorant sa religion dans la ville que l’on habite. On dénombre ainsi un « privilège masculin », un « privilège hétérosexuel », un « privilège de classe », un « beauty privilege » ou bien un « privilège blanc ». C’est ce dernier, mobilisé aux États-Unis depuis les années 1970, qui retient ici l’attention de la sociologue et écrivaine Kaoutar Harchi. Si l’on ne saurait nier, avance-t-elle, toute pertinence théorique à ce concept, son succès académique et militant fait question : il (...)

    • [ce concept] dépolitise les luttes pour l’égalité et se conforme aux attendus de l’individualisme libéral. Car c’est la structure de l’ordre dominant (capitaliste, raciste, sexiste) qu’il s’agit bien plutôt de penser — autrement dit, de démanteler. [...]

      Le concept de « privilège blanc » s’est imposé, via la constitution des « Whiteness Studies » https://fr.wikipedia.org/wiki/Blanchité aux États-Unis au début des années 1980, comme un outil opératoire de désignation des rapports de pouvoir que le déni des inégalités raciales occultait alors. C’est que ce concept a pour force de briser ce que Roland Barthes, à propos du rapport social de classe, a désigné par l’expression d’« ex-nomination » : soit cette aspiration de la bourgeoisie à se percevoir et à être perçue comme société anonyme . Et le philosophe de préciser : « Comme fait économique, la bourgeoisie est nommée sans difficulté : le capitalisme se professe. Comme fait politique, elle se reconnaît mal : il n’y a pas de parti bourgeois à la Chambre. Comme fait idéologique, elle disparaît complètement : la bourgeoisie a effacé son nom en passant du réel à sa représentation, de l’homme économique à l’homme mental : elle s’arrange des faits, mais ne compose pas avec les valeurs, elle fait subir à son statut une véritable opération d’ex-nomination ; la bourgeoisie se définit comme la classe sociale qui ne veut pas être nommée2 ». Rapporté au rapport social de race, l’ex-nomination est cette pratique symbolique et matérielle de production d’une identité blanche innommée, réclamant pour elle tous les noms et se rêvant, de là, universelle : une identité que le concept de « privilège blanc » nomme, tout à coup, c’est-à-dire définit, particularise et met in fine à nu. Le concept voyage durant les années 2000 : il quitte l’îlot académique et s’ancre au sein des mondes militants, finissant par atteindre les rives françaises3.

      « Renoncer » : un idéal individuel

      Mais nommer ne suffit pas. Et, à y regarder de plus près, le succès de ce concept, aisément mobilisable sous régime libéral, ne nous aide pas à travailler collectivement au renversement de l’ordre social. En 2016, déjà, la féministe Mirah Curzer publiait l’article « Let’s Stop Talking So Much About Privilege ». https://medium.com/human-development-project/let-s-stop-talking-so-much-about-privilege-8f9fe543c57e Elle y développait l’idée selon laquelle la focalisation, bien que légitime, des débats autour du « privilège blanc » réduisait mécaniquement les possibilités de développer une approche en termes de droits. En ce sens, le risque est grand de lutter — et de se donner à voir comme luttant — pour moins de privilèges alors qu’un enjeu politique bien plus radical consisterait à lutter, matériellement et symboliquement, pour l’accès de tous et de toutes à la justice sociale. Un critique plus frontale encore a été formulée un an plus tard par Arielle Iniko Newton, essayiste et co-organisatrice de Movement for Black Lives, dans l’article : « Why Privilege Is Counter-Productive Social Justice Jargon ». https://blackyouthproject.com/privilege-counter-productive-social-justice-jargon Elle lance : « Le privilège est une notion limitante qui accorde la priorité aux comportements individuels au détriment des failles du système, et suggère que changer nos comportements serait une manière suffisante d’éradiquer l’oppression. […] Personne ne peut abandonner ses privilèges mais nous pouvons faire en sorte que l’oppression soit remise en cause. » Ainsi, Arielle Iniko Newton plaide pour une reconsidération révolutionnaire des forces sociales historiques qui structurent, de part en part, le suprématisme blanc — appelant, par suite, à sa destruction totale.

      https://seenthis.net/messages/861443
      #privilège #privilège_blanc #racisme #rapports_sociaux #domination #domination_blanche #individualisation #individualisme

    • Réponse aux attaques conjointes de fdesouche, de la LICRA et du Ministère de l’Éducation Nationale contre Sud Éducation 93 - article publié le 20 novembre 2017

      Après deux journées d’études sur l’intersectionnalité interdites aux enseignant-es à Créteil en mai dernier, après un colloque sur l’islamophobie censuré à Lyon en septembre, c’est au tour d’un stage organisé par Sud Éducation 93 de susciter la vindicte de la fachosphère.

      Depuis dimanche 19 novembre au soir, le syndicat Sud Éducation 93 est victime d’insultes de la part de plusieurs groupes très actifs sur les réseaux sociaux et connus pour leurs positions d’extrême droite, suite aux critiques diffamatoires contre un stage de formation syndicale sur l’antiracisme à l’attention des personnels d’éducation les 18 et 19 décembre.

      Cette campagne se traduit par des messages mensongers, de haine et d’attaques sur les réseaux sociaux. De plus, le syndicat Sud Éducation 93 subit depuis lundi matin un grand nombre d’appels téléphoniques déversant des insultes.

      Le stage est annoncé sur notre site depuis le 19 octobre sans avoir suscité la moindre réaction. Or, il aura fallu attendre dimanche 19 novembre dans l’après midi, et un article paru sur le compte Facebook de « FdeSouche », pour que quelques heures après la LICRA, puis le lendemain le ministre reprennent ces propos.

      Nous souhaitons souligner et dénoncer la coïncidence des agendas des réseaux d’extrême droite et de notre ministère.

      Les attaques portent sur un « tri des origines » qui serait fait sur les participants du stage. Sud Éducation 93 condamne fermement ces propos et compte porter plainte pour diffamation contre tous les sites et individus qui propageraient ces propos. Un dépôt de plainte est par ailleurs en cours concernant les insultes téléphoniques reçues à ce jour.

      Les questions abordées par le stage sont des questions essentielles dans l’enseignement aujourd’hui. Il est inutile de nier des questions que les enseignant-es vivent au jour le jour. Le combat contre le racisme est au cœur de la société multiculturelle mais aussi au cœur des programmes scolaires, notamment ceux d’EMC. Ce stage entend donner des temps et des moyens de réflexions sur ces questions cruciales.

      Nous apprécierions qu’au lieu de calquer son agenda sur celui de « FdeSouche » notre ministre, et les organisations qui se réclament de l’égalité républicaine, s’intéressent aux manques de moyens dont souffrent l’École et nos élèves. La liste est non exhaustive : manque de postes à tous les niveaux (agent-es, AED, enseignant-es, personnel-les administratif), professeur-es non remplacé-es, manque de moyens dans les dotations pour les collèges, les lycées, les écoles, manque d’établissements dans le territoire, absence d’une véritable médecine scolaire, ...

      Nous rappelons enfin que tou-tes les personnel-les ont été invité-es à s’inscrire à ce stage (d’ailleurs complet).

      http://www.sudeducation93.org/Reponse-aux-attaques-conjointes-de.html

    • #blasphème #sens_commun #manif_pour_tous #racisme_d'Etat #racisme #non-mixité

      « On parle de “non-mixité raciale”, on parle de “blanchité”, on parle de “racisé” c’est-à-dire les mots les plus épouvantables du vocabulaire politique sont utilisés au nom soi-disant de l’antiracisme alors qu’en fait ils véhiculent évidemment un racisme », a critiqué M. Blanquer.

      #vocabulaire #langage #domination_blanche #épouvante

    • Blanquer attaque la fédération SUD éducation à l’assemblée nationale - Racisme d’État, personnes racisées, non-mixité, discriminations : mise au point [21 novembre]
      http://www.sudeducation.org/Blanquer-attaque-la-federation-SUD.html

      Nous avons pris connaissance de l’intention de M. Blanquer de porter plainte pour diffamation contre le syndicat SUD éducation 93 au motif que celui-ci utilise le terme de “racisme d’État”. Si le ministre veut attaquer en justice toutes les organisations qui utilisent ce terme, la fédération SUD éducation en fait partie. En effet, son dernier congrès, en 2015, s’est donné parmi ses objectifs de combattre le racisme d’État, outil de division des travailleurs et des travailleuses.

    • C’est pas une atteinte aux libertés syndicales ce que fait Blanquer ? Il me semble que le droit de se réunir est une liberté fondamentale. Comme la liberté de s’exprimer sur le racisme d’etat. Est-ce qu’un ministre peut porter plainte pour la diffamation d’une entité comme celle d’Etat ? Est-ce qu’on peut diffamé un Etat ? Si je dit que la langue française est sexiste est-ce qu’il va m’attaqué pour diffamation de la langue ? Ca fait un peu comme si il y avait atteinte à une marque et une mentalité de copyright. On a même plus le droit de choisir comment et avec qui se réunir ni de quoi on peut parler ni des mots qu’on veut utiliser et pas non plus de la manière de les accordés.

    • Jean-Michel Blanquer ne peut pas poursuivre un syndicat pour diffamation
      http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/11/23/jean-michel-blanquer-ne-peut-pas-poursuivre-un-syndicat-pour-diffamation_521

      Le droit français ne permet pas au ministre de l’éducation nationale de porter plainte contre SUD-Education 93. Il peut, en revanche, poursuivre son représentant.

      C’est assez incroyable qu’un ministre ne connaisse pas le B-A-ba du droit de la république qui lui paye son salaire pour la représenté.

      Jean-Michel Blanquer, en tant que personne physique, peut donc porter plainte contre une autre personne physique.

      L’article de monde est quand même un peu à la masse de pas rappeler que Blanquer n’est pas diffamé en tant que personne physique car Blanquer n’est pas l’Etat et la République incarné.

    • Du racisme aux politiques de racialisation
      Eric Fassin, Médiapart, le 18 novembre 2014
      https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/181114/du-racisme-aux-politiques-de-racialisation

      Les responsables nationaux, mais aussi locaux, prétendent certes répondre à une demande populaire, comme si le racisme d’État pouvait s’autoriser de celui qui est censé définir les « riverains ».

      Une plainte contre #Eric_Fassin ?

      #racialisation

    • Racisme d’Etat et libertés syndicales : Derrière l’écran de fumée… de réelles attaques !
      #Solidaires, le 22 novembre 2017
      https://www.solidaires.org/Racisme-d-Etat-et-libertes-syndicales-Derriere-l-ecran-de-fumee-de-reell

      Le Ministre de l’Education, JM Blanquer, s’en prend violemment depuis plusieurs jours au syndicat SUD Education 93, membre de la fédération SUD Education et de l’union départementale Solidaires 93.

      Tout est parti d’une dénonciation de racisme supposé d’un stage syndical (parce qu’il prévoit des ateliers réservés aux personnes victimes du racisme), dénonciation relayée très largement par l’extrême-droite puis par JM. Blanquer lundi. Le ministre s’est rendu compte de son erreur grossière et, de fait, a changé rapidement son discours plus tard dans la journée à l’Assemblée nationale : c’est désormais l’utilisation de la notion de « racisme d’Etat », abordée dans le stage, qu’il juge « diffamatoire » et au sujet de laquelle il a annoncé vouloir déposer une plainte pour ce motif.

      Mettons les choses au point, pour l’Union syndicale Solidaires :

      L’accusation de racisme à l’encontre de SUD Education 93 est ridicule et volontairement malveillante au vu des valeurs, des positions et combats portés par ce syndicat et ses militant-es : Solidaires lutte pour l’égalité entre tous et toutes, quelles que soient leurs origines, et combat le racisme et le fascisme, et SUD Education 93 ne déroge pas à ces principes. Il ne s’agit pas de partager tous les détails du contenu du stage mis en cause, mais on ne peut inverser ni la réalité ni l’engagement des personnels de l’Education nationale membres de Sud éducation 93 pour leurs élèves et les populations de Seine-Saint-Denis.

      L’Union syndicale Solidaires et certaines des structures qui la composent mettent en œuvre depuis des années en lien avec leur engagement dans le mouvement féministe des réunions séparées de femmes et elle ne partage pas l’idée qu’une telle pratique appliquée à des personnes victimes du racisme constituerait un scandale.

      Il s’agit d’un stage syndical : c’est aux syndicats de construire leurs formations en toute liberté. Il n’est pas question que l’extrême-droite ou des ministères s’immiscent dans les contenus des formations syndicales.

      Le racisme existe dans nos sociétés. Et le "racisme d’Etat" aussi. Ce n’est pas un slogan, c’est un concept utilisé et pensé par des chercheuses et chercheurs mais aussi par des dizaines de structures associatives, syndicales ou politiques. Une rapide interrogation sur un moteur de recherche sur internet permettra à JM Blanquer de s’en rendre compte. Des statistiques, études et recherches effectuées à la demande des ministères eux mêmes font état de situations de discrimination liées à l’origine réelle ou supposée, aux noms, quartiers, dans la société, dans l’emploi public, dans l’école... Nous refusons de mettre sous le tapis une situation qui concerne des millions de personnes dont une partie d’entre nous, au quotidien. Nous refusons de nous faire dicter ou imposer les termes du débat par celles et ceux qui participent à construire et entretenir les problèmes.

      Nous sommes face à une volonté de manipuler politiquement et médiatiquement un stage de quelques dizaines de personnes. Pendant ce temps, on ne parle pas des conséquences sociales des mesures prises par ce gouvernement, qui touchent fortement des départements comme la Seine-Saint-Denis et le quotidien de la population qui y vit. Derrière le rideau de fumée, on trouve des attaques contre les droits sociaux, la suppression des contrats aidés, la destruction des services publics, en particulier de l’Education, bref la destruction du tissu social qui alimente les haines et la xénophobie... Ce contre-feu gouvernemental cache mal la volonté de nier la situation de racisme vécue en particulier en Seine-Saint- Denis et ses aspects structurels.

      L’Union syndicale Solidaires apporte son soutien au syndicat SUD Education 93, à ses adhérent-es qui font face à un déchaînement d’une rare violence et aux menaces de la part l’extrême-droite. Nous ne doutons pas que ce gouvernement cherche aussi à limiter les libertés syndicales et d’expression, en particulier chez les fonctionnaires qui militent pour transformer la société.

      L’Union syndicale Solidaires continuera son combat pour les libertés individuelles et collectives, pour l’égalité de tou-tes, contre toutes les discriminations.

      #liberté_syndicale #syndicats #France

    • Suite :

      « Blanchité », « racisé », « racisme d’État » : M. Blanquer, ces concepts sont légitimes dans le débat public
      Mélusine, Libération, le 23 novembre 2017
      https://seenthis.net/messages/647064

      "Racisme d’Etat" : derrière l’expression taboue, une réalité discriminatoire
      Pierre Ropert, France Culture, le 24 novembre 2017
      https://seenthis.net/messages/647064

      On y cite #Michel_Foucault : une plainte à titre posthume contre lui aussi ?

      Chronique d’une année scolaire : quand le Ministre parle
      K. D., La Rotative, le 24 novembre 2017
      https://seenthis.net/messages/647120

    • Pour une mise en perpective du racisme d’État, une référence étonnamment non citée, sauf erreur de ma part, par tous les commentateurs alors même que c’est lune des analyses les plus fortes de cet enjeu : « Il faut défendre la société », Cours au Collège de France (1975-1976) de Michel Foucault, texte intégral en ligne
      https://monoskop.org/images/9/99/Foucault_Michel_Il_faut_defendre_la_societe.pdf

      (...) ce discours de la lutte des races – qui, au moment où il est apparu et a commencé à fonctionner au XVIIe siècle, était essentiellement un instrument de lutte pour des camps décentrés – va être recentré et devenir justement le discours du pouvoir, d’un pouvoir centré, centralisé et centralisateur ; le discours d’un combat qui est à mener non pas entre deux races, mais à partir d’une race donnée comme étant la vraie et la seule, celle qui détient le pouvoir et celle qui est titulaire de la norme, contre ceux qui dévient par rapport à cette norme, contre ceux qui constituent autant de dangers pour le patrimoine biologique. Et on va avoir, à ce moment-là, tous les discours biologico-racistes sur la dégénérescence, mais aussi toutes les institutions également qui, à l’intérieur du corps social, vont faire fonctionner le discours de la lutte des races comme principe d’élimination, de ségrégation et finalement de normalisation de la société. Dès lors, le discours dont je voudrais faire l’histoire abandonnera la formulation fondamentale de départ qui était celle-ci : « Nous avons à nous défendre contre nos ennemis parce qu’en fait les appareils de l’État, la loi, les structures du pouvoir, non seulement ne nous défendent pas contre nos ennemis, mais sont des instruments par lesquels nos ennemis nous poursuivent et nous assujettissent. » Ce discours va maintenant disparaître. Ce sera non pas : « Nous avons à nous défendre contre la société », mais : « Nous avons à défendre la société contre tous les périls biologiques de cette autre race, de cette sous-race, de cette contre- race que nous sommes en train, malgré nous, de constituer. » La thématique raciste va, à ce moment-là, non plus apparaître comme instrument de lutte d’un groupe social contre un autre, mais elle va servir à la stratégie globale des conservatismes sociaux. Apparaît à ce moment-là – ce qui est un paradoxe par rapport aux fins mêmes et à la forme première de ce discours dont je vous parlais – un racisme d’État : un racisme qu’une société va exercer sur elle-même, sur ses propres éléments, sur ses propres produits ; un racisme interne, celui de la purification permanente, qui sera l’une des dimensions fondamentales de la normalisation sociale. Cette année, je voudrais alors parcourir un petit peu l’histoire du discours de la lutte et de la guerre des races, à partir du XVIIe siècle, en la menant jusqu’à l’apparition du racisme d’État au début du XXe siècle.

      #racisme_d’État

      @rezo ?

    • Le droit français ne permet pas au ministre de l’éducation nationale de porter plainte contre SUD-Education 93. Il peut, en revanche, poursuivre son représentant. (...)
      En effet, aucune personne morale (entreprise, association, organisation, syndicat…) ne peut être attaquée pour diffamation ou injures (qu’elles soient publiques ou non).

      http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/11/23/jean-michel-blanquer-ne-peut-pas-poursuivre-un-syndicat-pour-diffamation_521
      Portés à montrer leur force face à toute opposition, ils ne se souviennent même pas qu’ils imposent à des structures collectives de désigner des responsables légaux individuels contre lesquels agir en justice.
      #hybris_de_gouvernement

    • « Nous en avons assez des tergiversations et des atermoiements de tous ces “responsables’’ élus par nous qui nous déclarent “irresponsables’’ (…). Nous en avons assez du racisme d’État qu’ils autorisent. » #Pierre_Bourdieu, Contre-feux, 1998

      Une plainte à titre posthume contre lui aussi ?

      Sur le racisme d’Etat : brèves remarques à l’attention de Jean-Michel Blanquer et de quelques autres
      Olivier Le Cour Grandmaison, Médiapart, le 27 novembre 2017
      https://seenthis.net/messages/647829

  • Praud, Rost et Evra : c’est pire que ce que vous pensiez
    http://contre-attaques.org/magazine/article/praud-rost-et

    Après quelques minutes d’introduction et de rires, le débat s’ouvre. Rost, présenté dès le début comme « l’avocat de la défense », va tenter de contextualiser, sans forcément l’excuser, le coup de pied asséné par Evra à un supporter de l’Olympique de Marseille. Pour lui, cet accès de violence doit se lire, entre autres, à la lumière d’une carrière marquée par l’expérience quotidienne du racisme et des insultes négrophobes. Mais sur le plateau, l’artiste n’aura pas le temps de développer cette thèse. À peine le mot “raciste” est-il prononcé que Pascal Praud, censé incarner la neutralité, entre dans une colère noire - enfin blanche, pour le coup.

    Cet extrait a fait le tour du web et a été largement commenté par de nombreux internautes et journalistes qui se sont focalisés sur la partie la plus spectaculaire de la “disjonction” du présentateur. Pascal Praud a “pété les plombs”, il a “hurlé”, a “agressé” un chroniqueur qui voulait simplement évoquer un contexte raciste. Oui, tout à fait, et en plus d’être souligné, cela devrait être vivement dénoncé. Mais la séquence prise dans son intégralité nous offre la possibilité d’aller bien au-delà et de décrypter les mécanismes de résistance, des plus subtils aux plus grossiers, qui se mettent en place à chaque fois que la question raciale est abordée ; des mécanismes favorisés par un dispositif médiatique qui étouffe les voix minoritaires. Pour cette seule émission, nous en avons relevés 7 !

    7 réactions typiques que provoque toute tentative de discussion sur le sujet.

    1. « Arrêtez de tout ramener au racisme, c’est obsessionnel chez vous. »