• Frontex enquête sur des refoulements de migrants aux frontières de la Grèce

    L’agence européenne de surveillance des frontières a indiqué mardi avoir ouvert une enquête concernant des allégations de « pushbacks » de migrants aux frontières grecques. Athènes est accusée depuis des années de pratiquer des refoulements illégaux dans la région de l’Evros ou en mer Égée, ce que les autorités ont toujours nié.

    La Grèce est de nouveau pointée du doigt pour sa gestion de l’immigration à ses frontières. Mardi 8 avril, Frontex a annoncé avoir ouvert une enquête concernant des allégations de refoulement illégal de migrants aux frontières grecques.

    Les investigations portent sur la période allant de 2023 à début 2025, a précisé l’agence européenne de surveillance des frontières. Douze incidents graves présumés, dont neuf survenus en 2024, sont ainsi examinés par le Bureau des droits fondamentaux de l’organisation.

    « Chaque cas fait l’objet d’un examen approfondi », a déclaré mardi Chris Borowski, porte-parole de Frontex, ajoutant que l’agence avait récemment renforcé son mécanisme de plaine. « L’époque du soutien inconditionnel est révolue », a encore dit Borowski. « Frontex insiste désormais sur le respect des normes et attend des #mesures_correctives si nécessaire. »

    Frontex prévient les États membres de l’UE, dont la Grèce, que le fait de ne pas signaler les violations des droits pourrait désormais entraîner la #suspension du #cofinancement des opérations aux frontières.

    « Pratiques du passé »

    L’agence européenne a, elle aussi, été plusieurs fois critiquée pour son rôle dans le contrôle de l’immigration aux frontières grecques. En octobre 2022, un rapport de l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) se concentrait sur ses activités en Grèce du printemps à l’automne 2020. Il révélait que Frontex n’avait pas traité correctement des preuves de refoulements maritimes et terrestre, allant jusqu’à les dissimuler. Or, ces « puschbacks » sont contraires au #droit_international et européen, puisqu’ils empêchent tout examen d’une demande de protection.

    L’agence avait alors reconnu de « graves fautes de conduites » commises par les dirigeants de Frontex d’alors, et affirmait qu’il s’agissait de « pratiques du passé ». Le numéro un, Fabrice Leggeri, directeur général depuis 2015, avait démissionné fin avril 2022 face aux accusations relayées dans la presse.

    Athènes n’a pas encore réagi à cette nouvelle enquête menée par Frontex. Mais un responsable des gardes-côtes a défendu leurs opérations, affirmant à Reuters qu’ils agissaient « avec un sens aigu des responsabilités et dans le plein respect des vies humaines et des droits humains ».

    Au cours de la décennie écoulée, la Grèce n’a jamais reconnu l’existence de ces refoulements et a toujours nié les pratiquer. Elle a rappelé à plusieurs reprises que depuis 2015, les gardes-côtes grecs ont secouru plus de 250 000 personnes en mer Égée.

    #Condamnation de la #CEDH

    Mais en janvier dernier, Athènes a été épinglée par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) dans une affaire de « pushback ». Une première. La requérante, une Turque, avait été expulsée le jour-même de son arrivée en Grèce vers la Turquie - puis arrêtée et emprisonnée par les autorités turques. La CEDH a condamné la Grèce a lui verser 20 000 euros.

    Lors du verdict, la Cour a accusé la Grèce de se livrer à des « #refoulements_systématiques » de demandeurs d’asile vers la Turquie. Dans son #arrêt, « la Cour estime qu’elle dispose d’indices sérieux laissant présumer qu’il existait (en 2019) une pratique systématique de refoulements par les autorités grecques de ressortissants de pays tiers depuis la région d’Evros vers la Turquie ».

    Depuis des années, des rédactions internationales - dont InfoMigrants - récoltent de nombreux témoignages d’exilés victimes de ces expulsions illégales en Grèce, qu’elles se déroulent dans la région de l’Evros ou en mer Égée.

    En mai 2020, Samuel, un Africain avait filmé et raconté son refoulement. « Nous avons quitté les côtes turques vers 4h du matin le 30 avril depuis la ville d’Izmir. Nous étions une quarantaine dans l’embarcation dont des femmes et des enfants. Nous n’étions qu’à une vingtaine de kilomètres de l’île de Lesbos. Mais nous avons été repérés par la marine grecque car un jeune enfant a fait de la lumière avec le téléphone de son père. Il faisait encore nuit. »

    Et le jeune homme de continuer. « Les gardes-côtes sont alors montés sur de petits canots et sont venus à notre rencontre. Ils nous ont demandé de leur donner notre bidon d’essence. Puis, ils nous ont lancés une corde. Nous pensions qu’ils nous dirigeaient vers Lesbos mais en fait ils nous ont emmenés en plein milieu de la mer. Ils nous ont laissés là et sont repartis. »

    En 2021, InfoMigrants avait même rencontré un ex-policier grec aujourd’hui à la retraite qui a confirmé l’existence de « pushbacks » dans la rivière de l’Evros, entre la Turquie et la Grèce. « Les ’pushbacks’ existent, j’ai moi-même renvoyé 2 000 personnes vers la Turquie », avait-il déclaré sous couvert d’anonymat.

    En mai 2023, une vidéo accablante du New York Times montrait des gardes-côtes grecs remettre des migrants à l’eau, direction la Turquie.

    Pire encore, selon une enquête de la BBC menée en juin 2024, en trois ans, 43 exilés sont morts en mer Égée après avoir été refoulés par les autorités grecques. Selon le média britannique, neuf d’entre eux ont été directement jetés à l’eau par les gardes-côtes, et se sont noyés.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/63887/frontex-enquete-sur-des-refoulements-de-migrants-aux-frontieres-de-la-
    #Frontex #enquête #Grèce #frontières #refoulements #push-backs #migrations #réfugiés

  • #Sanctions américaines : des effets dévastateurs pour les peuples, mais pas sur les régimes
    https://lvsl.fr/sanctions-americaines-des-effets-devastateurs-pour-les-peuples-mais-pas-sur-les

    Touchant 27% des pays du monde, les sanctions économiques imposées par les #Etats-Unis sont devenues le moyen privilégié pour écraser leurs adversaires. Dénoncées par le droit #International, elles ont des impacts délétères sur les populations des Etats visés, plus que sur leurs régimes.

    #Cuba #Droit_International #finance #Iran #néocolonialisme #Russie #Sud_global #Union_Européenne #Venezuela

  • En #Suisse, les persécutions contre les #Yéniches étaient un #crime_contre_l’humanité

    Selon un avis de droit très attendu, la Confédération porte la #responsabilité d’un crime contre l’humanité à l’encontre des Tziganes. Malgré tout, les #placements_forcés, les #internements et les #stérilisations ne sont pas constitutifs d’un #génocide

    Les Yéniches attendaient ce moment depuis longtemps. Ce jeudi, pour la première fois, le gouvernement a reconnu un crime contre l’humanité à l’encontre des Tziganes suisses. Par la voix d’Elisabeth Baume-Schneider, manifestement très émue, il a réitéré ses #excuses envers les populations nomades. Selon elle, « c’est avec #douleur que le Conseil fédéral regarde le passé et les destins individuels mais aussi collectifs qui ont été brisés ». Yéniches et #Manouches ont été persécutés dans le pays tout au long du XXe siècle, et surtout entre 1926 et 1973. Durant cette période, à l’initiative du Conseil fédéral, la Fondation Pro Juventute a mené un programme d’#assimilation_forcée, intitulé « Œuvre des enfants de la grand-route ».

    Au total, près de 2000 #enfants ont été arrachés à leurs parents pour être placés dans des foyers ou des familles. Avec la bénédiction de l’ensemble de la société, et avec le soutien des autorités fédérales, cantonales et communales, mais aussi parfois des Eglises et des associations caritatives, de nombreux Yéniches ont été emprisonnés sans avoir commis de crime. D’autres ont été internés dans des hôpitaux psychiatriques. Quelques hommes et beaucoup de femmes ont même été stérilisés contre leur gré. Parmi les victimes figuraient aussi d’autres nomades qui étaient citoyens suisses, et notamment des Manouches. Pour Elisabeth Baume-Schneider, « les mots ne pourront pas réparer ce qu’ils ont vécu ».

    (#paywall)

    https://www.letemps.ch/suisse/les-persecutions-contre-les-yeniches-suisses-etaient-un-crime-contre-l-human
    #persécution #reconnaissance

    • Le Conseil fédéral reconnaît un crime contre l’humanité à l’encontre des Yéniches et des Manouches/Sintés et réitère ses excuses

      Lors de sa séance du 19 février 2025, le Conseil fédéral a pris connaissance d’un #avis_de_droit portant sur la persécution des Yéniches et des Manouches/Sintés réalisé sur mandat du Département fédéral de l’intérieur (DFI). Le gouvernement reconnaît que les actes perpétrés dans le cadre du programme « Œuvre des enfants de la grand-route » doivent être qualifiés de « crimes contre l’humanité » selon les critères du #droit_international_public actuel. Il tient à réitérer les excuses formulées en 2013 à l’égard des personnes et des communautés touchées pour les injustices commises. Le DFI déterminera en collaboration avec ces communautés s’il y a lieu, au-delà des mesures prises jusqu’ici, d’élargir le travail de mémoire déjà effectué.

      Jusqu’en 1981, une série de mesures de #coercition à des fins d’assistance et de placements extrafamiliaux ont frappé plus d’une centaine de milliers d’enfants et d’adultes sur le territoire suisse. Les victimes de ces actes sont des personnes issues de milieux défavorisés ou dont le mode de vie ne correspond pas aux normes sociales de l’époque. Parmi elles, on compte des individus qui pratiquent un mode de vie itinérant, par exemple les Yéniches et les Manouches/Sintés. Le principal artisan de ces enlèvements d’enfants est l’« Œuvre des enfants de la grand-route », un programme de la fondation Pro Juventute. Entre 1926 et 1973, les responsables de cette opération, avec l’aide des autorités, retirent à leurs parents environ 600 enfants yéniches pour les placer de force dans des foyers, des maisons de correction et des familles d’accueil, en violation des principes de l’État de droit. Des Manouches/Sintés font également partie des victimes. En outre, des adultes qui ont fait l’objet d’un placement extrafamilial pendant leur minorité sont mis sous tutelle ou placés dans des institutions, frappés d’une interdiction de mariage et, dans certains cas, stérilisés de force. Outre #Pro_Juventute, des organisations caritatives religieuses et des autorités ont également été actives, de sorte qu’on estime à environ 2000 le nombre de placements.

      Dans le courant des années 1970 et 1980, ces pratiques se heurtent de plus en plus souvent aux critiques de l’opinion publique. Des voix s’élèvent, les milieux politiques exigent qu’un travail de mémoire soit réalisé. En 1988 et 1992, le Parlement, sur la proposition du Conseil fédéral, accorde un total de 11 millions de francs pour la constitution d’un « fonds de #réparation destiné aux ‘#enfants_de_la_grand-route’ ». En 2013, le Conseil fédéral présente ses excuses à toutes les victimes de mesures de coercition à des fins d’assistance et de placements extrafamiliaux. Depuis, la Confédération a lancé et mis en œuvre différentes mesures visant à poursuivre le travail de mémoire et à dédommager les personnes lésées (voir encadré).

      Avis de droit

      Au mois de novembre 2021, l’Union des associations et représentants des nomades suisses (UARNS) demande à la Confédération de reconnaître qu’un génocide a été commis à l’encontre des Yéniches et des Manouches/Sintés suisses dans le cadre du programme « Œuvre des enfants de la grand-route ». Au mois de janvier 2024, l’association Radgenossenschaft der Landstrasse exige la reconnaissance d’un « génocide culturel ».

      Au vu de la gravité des accusations, le DFI décide de faire appel à un expert indépendant. Au mois de mars 2024, en concertation avec les auteurs des deux demandes, il charge le professeur Oliver Diggelmann (titulaire de la chaire de droit international public, droit européen, droit public et philosophie politique de l’Université de Zurich) de réaliser un avis de droit. Ce mandat a pour objectif de déterminer si, en vertu du droit international public, la Suisse porte la responsabilité d’un crime de « génocide » ou d’un « crime contre l’humanité » à l’encontre des Yéniches et des Manouches/Sintés.

      Il y a bien crime contre l’humanité, mais pas génocide

      La conclusion de l’avis de droit est que les enlèvements d’enfants ainsi que la volonté de briser les liens familiaux afin d’éliminer le mode de vie nomade et d’assimiler les Yéniches et les Manouches/Sintés doivent être qualifiés de « crimes contre l’humanité » selon les critères en vigueur du droit international public, au sens du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. D’après le droit actuel, l’État a été coresponsable des faits commis. La persécution des Yéniches et des Manouches/Sintés n’aurait pas été possible sans le concours des autorités à tous les niveaux de l’État (Confédération, cantons et communes). La Confédération a notamment entretenu des rapports étroits ‒ tant au niveau des personnes que sur le plan financier ‒ avec la fondation Pro Juventute, qui dirigeait le programme « Œuvre des enfants de la grand-route ». Cependant, bien que des faits constitutifs d’un « crime contre l’humanité » soient constatés, on n’est pas en présence, d’un point de vue juridique, d’un génocide (culturel). En effet, l’état de fait « génocide culturel » (anéantissement de l’existence culturelle) n’existe pas en droit international public. Selon l’avis de droit, il n’y a pas non plus « génocide » au sens le plus strict, puisqu’on n’observe pas l’« intention génocidaire » (intention d’anéantir physiquement ou biologiquement des êtres humains) nécessaire à l’établissement d’un tel crime.

      Le Conseil fédéral réitère ses excuses

      Le Conseil fédéral a pris aujourd’hui connaissance des résultats de l’avis de droit. Il a adressé une lettre à la communauté des Yéniches et des Manouches/Sintés, dans laquelle il réitère les excuses formulées par le gouvernement à l’égard des victimes de mesures de coercition à des fins d’assistance et de placements extrafamiliaux, et souligne que les Yéniches et les Manouches/Sintés font notamment partie de ces victimes. Par ailleurs, la cheffe du Département fédéral de l’intérieur, la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider, a personnellement exprimé aujourd’hui la compassion du Conseil fédéral à l’égard des représentants de la communauté des Yéniches et des Manouches/Sintés. Elle a aussi rappelé la nécessité de ne pas oublier les injustices commises. Dans ce contexte, le DFI, en dialogue avec les personnes concernées, déterminera d’ici fin 2025 s’il y a lieu, au-delà des mesures prises jusqu’ici, d’élargir le travail de mémoire déjà effectué.

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      Mesures déjà prises pour la réalisation d’un travail de mémoire relatif aux mesures de coercition à des fins d’assistance et aux placements extrafamiliaux (liste non exhaustive)
      – En 1983, la Confédération publie un rapport intitulé Les nomades en Suisse ‒ situation, problèmes, recommandations. En 1998, la Confédération commande une étude historique sur les actes commis dans le cadre du programme « Œuvre des enfants de la grand-route ».
      – Depuis 1986, la Confédération verse chaque année des contributions à l’association Radgenossenschaft der Landstrasse et, depuis 1997, également à la fondation Assurer l’avenir des gens du voyage suisses.
      – En 1988 et 1992, l’Assemblée fédérale, sur demande du Conseil fédéral, accorde un total de 11 millions de francs pour la constitution d’un fonds de réparation destiné aux victimes du programme « Œuvre des enfants de la grand-route ».
      – En 2013, le Conseil fédéral présente ses excuses à toutes les personnes ayant subi avant 1981 des mesures de coercition à des fins d’assistance ou des placements extrafamiliaux.
      – En 2014, la loi fédérale sur la réhabilitation des personnes placées par décision administrative entre en vigueur. En outre, un fonds d’aide immédiate est constitué.
      – En 2017, la loi fédérale sur les mesures de coercition à des fins d’assistance et les placements extrafamiliaux antérieurs à 1981 entre en vigueur. Cette loi prévoit notamment des contributions de solidarité à l’attention des personnes concernées (dont les Yéniches et les Manouches/Sintés), le conseil et le soutien des victimes ainsi qu’une étude scientifique.

      https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-104226.html

  • Les réfractaires à la guerre d’invasion en Ukraine
    https://www.obsarm.info/spip.php?article685

    Protester, déserter, passer la frontière, réciter des poèmes, jouer de la musique interdite, prononcer les mots interdits, écrire sur les billets de banque, coller des papillons sur les murs, accrocher des rubans sur les grilles, demander des comptes aux autorités, défendre les droits… En complément des chroniques publiées sur notre site depuis octobre 2022, cet ouvrage de Guy Dechesne recense les mille et une façons de défier le poutinisme dans une société soumise au knout. Disponible (…) #Ouvrages_et_rapports

    / #Antimilitarisme, #La_une, #Actions_contre_la_guerre, #Droit_international_humanitaire

  • L’Union européenne épinglée pour sa politique de « #dissuasion_mortelle » en matière d’immigration et d’asile

    Pour l’association #Human_Rights_Watch, qui vient de publier son #rapport annuel, le monde a échoué à faire respecter les droits humains en 2024. Y compris les démocraties.

    Le ton de Tirana Hassan est cinglant quand elle introduit le rapport annuel de l’association Human Rights Watch (HRW), dont elle est la directrice exécutive. « Les gouvernements du monde entier sont appelés à démontrer leur engagement en faveur des droits humains, de la démocratie et de l’action humanitaire. Nombreux sont ceux qui ont échoué à ce test. » Le verdict, sans appel, est annoncé d’emblée pour la centaine de pays analysés dans le compte rendu de 500 pages paru ce jeudi.

    « Les démocraties libérales ne sont pas toujours des défenseurs fiables des #droits_humains » (Tirana Hassan, directrice exécutive de Human Rights Watch)

    Les pays européens n’y échappent pas (la Belgique non plus, bien qu’aucun chapitre ne lui soit dédié). En effet, « l’année écoulée a une fois de plus mis en lumière une réalité souvent ignorée, poursuit Tirana Hassan. Les démocraties libérales ne sont pas toujours des défenseurs fiables des droits humains, que ce soit dans leur pays ou à l’étranger. » Beaucoup d’États membres sont pointés durement dans le rapport : France, Allemagne, Italie, Espagne, Grèce, Hongrie, Pologne…

    Une grande partie du chapitre sur l’#Union_européenne (#UE) se penche sur sa #politique_migratoire. « Il existe un fossé entre la #rhétorique de l’Union européenne sur les droits humains et les lois et #pratiques souvent inadéquates, et parfois abusives, des États membres », peut-on lire dans le rapport. L’année 2024 a en effet été marquée par l’entrée en vigueur du #Pacte_sur_la_migration_et_l'asile, qui sera pleinement applicable à partir de juin 2026. #HRW cible, entre autres, le mécanisme de #relocalisation – ou #délocalisation – dans un pays tiers des migrants pour soulager un État membre sous pression.

    #Traitement_inhumain des migrants

    Pour l’association, une telle mesure « encourage les États membres à renvoyer les personnes vers des pays de transit situés en dehors de l’UE, où elles risquent d’être victimes d’abus ou d’être refoulées en chaîne ». Le rapport explique que des « atrocités [sont] commises à grande échelle contre les migrants en Libye » (détentions arbitraires, torture, travail forcé), que les enfants réfugiés n’ont pas accès aux écoles publiques en Égypte et que des « expulsions collectives illégales et abusives de centaines de migrants » sont opérées par la Tunisie aux frontières algériennes et libyennes.

    HRW accuse l’UE de s’être « largement abstenue de dénoncer les violations des droits des migrants dans [ces] pays avec lesquels elle a conclu [des] #partenariats » pour contrôler le flux des migrants. Le tout avec la #complicité de #Frontex, l’Agence européenne de surveillance des frontières, qui est également épinglée dans le rapport. Cette dernière s’est félicitée mardi d’avoir enregistré une baisse de 38 % des franchissements irréguliers des frontières en 2024 (soit 239 000 entrées, le niveau le plus bas depuis 2021) « malgré une pression migratoire persistante ». HRW estime que c’est « avec le soutien des avions de Frontex » que l’Italie et Malte (pour ne citer que ces deux pays) ont réussi, en coopérant avec les forces libyennes, à intercepter et renvoyer des bateaux de migrants. En d’autres termes, à mettre en place une stratégie de #refoulement illégal, car contraire au droit international et à la convention de Genève relative au statut des réfugiés.

    « Dissuasion mortelle »

    Benjamin Ward, directeur européen de HRW, estime que « les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés sont confrontés à la #violence […] et même à la #mort en raison de l’accent mis par l’UE sur les politiques de dissuasion et d’#externalisation ». Le rapport dénonce une politique migratoire européenne « de plus en plus axée sur la dissuasion mortelle ». L’association s’inquiète du manque d’enquêtes appropriées et indépendantes sur la #non-assistance aux migrants en détresse, les #mauvais_traitements et les #abus constatés en #Méditerranée. Elle dénonce par exemple le verdict d’un tribunal grec qui, en mai dernier, a acquitté, pour défaut de compétence, neuf personnes accusées d’avoir provoqué en 2023 le naufrage d’un navire transportant 750 migrants, qui a pourtant fait des centaines de morts.

    Le 7 janvier, la Cour européenne des droits de l’Homme a condamné pour la première fois la Grèce à indemniser une demandeuse d’asile d’un refoulement illégal vers la Turquie

    Notons néanmoins que le 7 janvier, la #Cour_européenne_des_droits_de_l'Homme (#CEDH), elle, a condamné pour la première fois la Grèce à indemniser d’une somme de 20 000 euros une demandeuse d’asile d’un refoulement illégal vers la Turquie. La Hongrie a également été condamnée par la CEDH en juin, souligne le rapport. Elle était accusée d’avoir illégalement détenu et affamé des demandeurs d’asile, dont un enfant de cinq ans, en 2017 et 2019, dans la zone de transit mise en place à la frontière serbe. La #Cour_de_justice_de_l'Union européenne, pour sa part, l’a condamnée à payer une amende de 200 millions d’euros pour les restrictions qu’elle continue d’imposer au droit d’asile, devenu pratiquement impossible à obtenir à cause d’une loi de 2020.

    La #justice, solide rempart

    Les tribunaux italiens, eux aussi, remettent en question la gestion migratoire de Rome, qui externalise le contrôle des migrations vers la #Libye. HRW évoque par exemple la condamnation de deux capitaines, l’un par la Cour de cassation italienne (la plus haute juridiction pénale), l’autre par un tribunal civil de Rome, pour avoir chacun renvoyé une centaine de personnes en Libye. L’un d’eux doit, avec les autorités italiennes, octroyer une indemnisation financière aux victimes qui avaient porté l’affaire en justice.

    Les Nations unies se sont assurés que l’Italie va évacuer 1 500 personnes depuis la Libye d’ici à 2026

    Des juges italiens ont également estimé illégale la détention de deux groupes d’hommes secourus en mer par l’Italie et envoyés en Albanie. Depuis, ces hommes ont été transférés en Italie. L’Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) s’est également assurée que l’Italie va évacuer ou réinstaller 1 500 personnes, cette fois-ci depuis la Libye, d’ici à 2026.

    Protection des droits ici et ailleurs

    La justice ne laisse donc pas tout passer. Mais est-elle suffisante toute seule ? « Les dirigeants de l’UE doivent abandonner ces stratégies néfastes […] et créer des itinéraires sûrs et légaux pour les personnes en quête d’asile et de sécurité, insiste Benjamin Ward. À l’heure où une grande partie du monde est en crise, la nécessité d’un leadership fondé sur les droits humains en Europe est plus grande que jamais. »

    « Lorsque les droits sont protégés, l’humanité s’épanouit » (Tirana Hassan, directrice exécutive de Human Rights Watch)

    Face à ce constat affligeant, Iskra Kirova, directrice du plaidoyer auprès de la division européenne de HRW, appelle les citoyens européens à se rappeler de leurs valeurs, « à savoir la protection des droits humains et le #droit_international. Il existe de nombreuses informations erronées sur les personnes migrantes, colportées à des fins politiques pour susciter de la #peur. Nous ne devons pas nous laisser induire en erreur. Les personnes qui méritent une protection devraient se voir offrir cette option. C’est la seule chose humaine à faire. Je pense que la plupart des Européens seront d’accord avec cela ».

    Tirana Hassan conclut le message de HRW en affirmant que « la tâche qui nous attend est claire : les gouvernements ont la responsabilité de s’opposer aux efforts qui font reculer [les droits humains]. Lorsque les droits sont protégés, l’humanité s’épanouit ».

    https://www.lalibre.be/international/europe/2025/01/16/lunion-europeenne-epinglee-pour-sa-politique-de-dissuasion-mortelle-en-matie
    #dissuasion #mourir_aux_frontières #morts_aux_frontières #migrations #réfugiés #frontières #dissuasion_meurtrière

    ping @karine4

    • Union européenne. Événements de 2024

      Il existe un fossé entre le discours de l’Union européenne sur les droits humains et les lois et pratiques souvent inadéquates et parfois abusives de ses États membres. Ce fossé est particulièrement marqué s’agissant de politiques de migration et d’asile, de lutte contre le racisme et de protection de l’État de droit.
      Migrants, réfugiés et demandeurs d’asile

      La politique de l’UE en matière de migration et d’asile se concentre de plus en plus sur une dissuasion meurtrière, comme l’illustrent en 2024 de nouvelles règles qui portent gravement atteinte aux droits des migrants et des demandeurs d’asile arrivant aux frontières de l’UE ainsi que des mesures pour intensifier la délocalisation des responsabilités vers des pays extérieurs à l’UE.

      Le Pacte de l’UE sur la migration et l’asile, adopté en mai, comprend des dispositions qui, une fois mises en œuvre, restreindront considérablement les droits. Les nouvelles règles rendront plus difficile le dépôt d’une demande d’asile et permettront aux gouvernements de prendre plus facilement des décisions hâtives sur les demandes d’asile. Elles augmenteront également le nombre de personnes détenues aux frontières de l’UE. Les pays de l’UE pourront refuser le droit de demander l’asile dans des situations vaguement définies d’« afflux massif » ou d’« instrumentalisation » de la migration par des pays tiers. Ces changements encouragent les États membres de l’UE à renvoyer les personnes vers des pays de transit situés hors de l’UE, où elles risquent d’être victimes d’abus ou de refoulements en chaîne. Le pacte ne contribue guère à améliorer le partage des responsabilités entre les pays de l’UE. En octobre, 17 États membres de l’UE ont signé un document informel appelant à une nouvelle proposition législative visant à accroître les retours.

      En 2024, l’UE a annoncé de nouveaux partenariats migratoires avec l’Égypte et la Mauritanie et a augmenté le financement de la gestion des frontières pour ces deux pays ainsi que pour le Liban, faisant suite à un accord avec la Tunisie en 2023 et à un soutien continu au contrôle des migrations pour les autorités libyennes et marocaines, sans véritables garanties en matière de droits humains. L’UE a poursuivi ces partenariats malgré les atrocités généralisées contre les migrants et les réfugiés en Libye, ainsi que les abus et le manque de protection auxquels sont confrontés les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés au Liban, en Tunisie, en Égypte, en Mauritanie, et au Maroc. L’UE a largement omis de dénoncer les violations des droits des migrants dans les pays avec lesquels elle a conclu de tels partenariats.

      L’Italie et Malte, avec l’appui des avions de Frontex, ont continué de faciliter les interceptions d’embarcations transportant des migrants et des réfugiés par les forces libyennes, et leur renvoi, au risque de graves abus. Avec le soutien de la Commission européenne, la Tunisie a déclaré en juin une zone de Recherche et de Sauvetage, qui risque d’accroître les interceptions et les renvois vers des zones d’abus en Tunisie au lieu d’améliorer la protection de la vie et la sécurité en mer.

      L’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) a constaté que les violations généralisées des droits aux frontières de l’UE (absence d’assistance aux migrants en détresse, mauvais traitements et abus) ne font pas l’objet d’enquêtes appropriées. L’agence a appelé à une surveillance rigoureuse aux frontières et à des mécanismes de responsabilisation plus solides. La Médiatrice européenne a déclaré que Frontex avait besoin de directives claires pour évaluer les urgences maritimes et émettre des appels de détresse pour les bateaux en difficulté, et elle a appelé à la création d’une commission d’enquête indépendante sur les décès en mer Méditerranée. En octobre, des dirigeants de l’UE ont exprimé leur soutien à la Pologne après qu’elle a annoncé qu’elle suspendrait l’accès à l’asile à la frontière biélorusse, une décision qui pourrait enfreindre le droit international et européen.

      De nombreux pays de l’UE ont exprimé leur intérêt pour des mesures visant à délocaliser la responsabilité des demandeurs d’asile ou ont approuvé ces mesures. En octobre et novembre, l’Italie a transféré les deux premiers groupes vers l’Albanie dans le cadre d’un accord en vertu duquel les hommes originaires de pays considérés comme « sûrs » et secourus ou interceptés en mer par l’Italie sont emmenés en Albanie pour le traitement de leurs demandes d’asile. L’avenir de cet accord est incertain après qu’un tribunal italien a ordonné la libération des deux groupes parce que leurs pays d’origine ne peuvent pas être catégoriquement considérés comme sûrs et a renvoyé la question à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). La CJUE avait statué début octobre qu’un pays ne peut pas être considéré comme sûr s’il existe des exceptions.

      En septembre, le commissaire allemand aux migrations a suggéré que l’Allemagne pourrait envoyer certaines personnes au Rwanda, tandis que le ministre danois de l’immigration s’est rendu en Australie et à Nauru, également en septembre, pour en savoir plus sur la politique australienne abusive de traitement des demandes d’asile « offshore ». En mai, 15 États membres de l’UE ont demandé à la Commission européenne d’étudier les moyens de transférer le traitement des demandes d’asile hors de l’UE, notamment en facilitant l’envoi de personnes vers des « pays tiers sûrs ».

      Les statistiques révèlent un changement des routes migratoires, avec une augmentation significative des arrivées aux îles Canaries espagnoles ainsi qu’aux frontières terrestres de l’est de l’UE et une baisse des traversées en Méditerranée et dans les Balkans occidentaux. Au cours des neuf premiers mois de 2024, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a recensé au moins 1 452 personnes qui ont disparu ou sont décédées en mer Méditerranée et plus de 700 sur la route de l’Atlantique vers les Canaries.
      Discrimination et intolérance

      En 2024, les gouvernements européens ont exprimé leur inquiétude face à la montée des partis d’extrême droite — bien que les partis traditionnels ont imité leurs politiques et leur discours— ainsi qu’à l’augmentation des niveaux de discrimination raciale, de xénophobie et d’intolérance qui y est associée. L’environnement politique à l’approche des élections européennes de juin a vu une banalisation accrue des propos racistes, islamophobes, anti-migrants et d’extrême droite.

      Cela s’est produit alors que les conséquences de l’attaque menée par le Hamas en Israël le 7 octobre 2023 et les hostilités qui ont suivi entre Israël et les forces armées palestiniennes ont conduit à une « montée alarmante » en Europe de la haine contre les Juifs et contre les Musulmans et les personnes perçues comme telles.

      En juillet, l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) a publié sa troisième enquête sur la discrimination et les crimes haineux contre les Juifs dans l’UE, qui date d’avant le 7 octobre. Elle illustre les expériences et les perceptions des personnes juives concernant les « niveaux élevés d’antisémitisme » en Europe.

      En octobre, la FRA a publié « Être musulman dans l’UE », un rapport basé sur une enquête menée dans 13 pays de l’UE auprès des musulmans sur leur expérience de discrimination, notamment de crimes haineux et de mauvais traitements infligés par la police. Près de la moitié des personnes interrogées ont déclaré avoir été victimes de racisme.

      En 2024, le Parlement européen, le Conseil de l’Europe et sa Commission européenne contre le racisme et l’intolérance ont ajouté leur voix aux préoccupations internationales concernant la montée de la haine antisémite et antimusulmane. En octobre, le Conseil de l’UE a adopté une déclaration sur la promotion de la vie juive et la lutte contre l’antisémitisme, soulignant l’importance de l’éducation et de la protection des victimes de toutes les formes d’antisémitisme, de racisme et d’autres formes de haine.

      Le rapport annuel 2024 de la FRA a constaté que l’intolérance générale « s’accroît dans toute l’Europe, touchant de nombreux groupes, notamment les musulmans, les personnes d’origine africaine, les Roms et les migrants », notant que « la désinformation et les plateformes en ligne ont amplifié les comportements racistes et la polarisation des attitudes. » Une enquête de la FRA a révélé qu’une personne LGBT sur trois a indiqué avoir été victime de discrimination, tandis qu’ILGA-Europe a noté une hausse des discours anti-LGBT à l’approche des élections à travers l’Europe.

      L’UE continue de manquer d’une stratégie spécifique en matière d’égalité des âges pour lutter contre la discrimination fondée sur l’âge.

      En mars, le Conseil de l’Europe, qui regroupe tous les États de l’UE, a adopté une Stratégie pour l’égalité des genres pour 2024-2029, portant notamment sur la violence à l’égard des femmes et des filles, l’égalité d’accès à la justice et leur participation à la vie politique, publique, sociale et économique.

      En mai, l’Union européenne a adopté une directive sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. Cette directive prévoit des mesures visant à prévenir, protéger et améliorer l’accès à la justice des victimes de violences faites aux femmes, mais elle n’adopte pas de définition du viol fondée sur le consentement au niveau de l’Union européenne. Elle ne reconnaît pas non plus la stérilisation forcée comme un crime. La stérilisation forcée touche de manière disproportionnée les femmes et les filles handicapées et reste légale dans au moins 12 États membres de l’UE, dont la Bulgarie, le Danemark et le Portugal.

      En mai, le Conseil de l’Union européenne a adopté une nouvelle directive établissant des normes minimales pour améliorer la mise en œuvre par les États membres des lois anti-discrimination nationales et européennes.

      En septembre, la Commission européenne a présenté son rapport sur la mise en œuvre du Plan d’action de l’UE contre le racisme 2020-2025. Selon la Commission, 11 États membres de l’UE ont adopté des plans d’action nationaux spécifiques contre le racisme, mais des défis subsistent même dans ces États en raison du manque de fonds affectés à la mise en œuvre et de l’absence de ventilation des données par origine raciale et ethnique permettant d’éclairer les politiques.

      En juillet, Ursula von der Leyen, présidente reconduite de la Commission européenne, a annoncé qu’une nouvelle stratégie de lutte contre le racisme serait élaborée pour le mandat 2024-2029 de la Commission. En septembre, elle a également annoncé que les travaux sur l’égalité et la non-discrimination seraient intégrés au mandat du Commissaire chargé de la préparation et de la gestion des crises — un recul étant donné que l’égalité bénéficiait auparavant d’un commissaire dédié. En décembre, Ursula von der Leyen a reclassé les coordinateurs sur l’antisémitisme et la haine antimusulmane, en leur donnant un accès direct au bureau du président de la Commission, mais a négligé de faire de même pour le coordinateur de la lutte contre le racisme.
      Pauvreté et inégalité

      Les données de l’UE de juin 2024 ont montré que 94,6 millions de personnes (21,4 % de la population) étaient « menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale » en 2023, dont 29,3 millions ont connu de graves privations matérielles ou sociales. Les femmes restent touchées de manière disproportionnée.

      Les taux de pauvreté et d’exclusion sociale en Roumanie et en Bulgarie, les deux États de l’UE les plus touchés, ont dépassé 30 %, et ces taux sont restés supérieurs à 25 % en Grèce, en Espagne et en Lettonie, les trois autres États les plus touchés.

      En août, alors que les prix de l’énergie ont chuté, atténuant ainsi la crise du coût de la vie, l’inflation moyenne à l’échelle de l’UE est tombée à 2,2 %.

      Les gouvernements européens et les autorités intergouvernementales ont réitéré publiquement leur engagement en faveur d’une meilleure mise en œuvre et réalisation des « droits sociaux », notamment les droits protégés par la Charte sociale européenne du Conseil de l’Europe dans la déclaration de Vilnius en février, et les questions relevant du Socle européen des droits sociaux de l’UE dans la déclaration de La Hulpe en avril.

      Les résultats d’une enquête menée à l’échelle de l’UE et publiée en avril ont montré que 88 % des Européens considèrent que les droits sociaux, tels qu’un niveau de vie, des conditions de travail et des soins de santé adéquats, sont importants.

      En janvier, la Commission européenne a publié son cadre de suivi de la Garantie européenne pour l’enfance. Cet instrument politique européen de 2021, axé sur la lutte contre la pauvreté infantile, exige des États qu’ils garantissent d’ici 2030 un accès gratuit à l’éducation et à l’accueil de la petite enfance, à un repas sain gratuit chaque jour d’école, aux soins de santé et au logement pour tous les enfants confrontés à l’exclusion sociale ou à d’autres désavantages. Les organisations de défense des droits de l’enfant ont attiré l’attention sur l’ampleur du défi, ont noté une mise en œuvre et un suivi inégaux des plans nationaux par les gouvernements et ont appelé à une meilleure collecte de données.

      Une évaluation commandée par l’UNICEF en 2024 portant sur deux décennies de stratégies européennes d’inclusion des Roms et de droits de l’enfant a appelé les autorités de l’UE et les gouvernements nationaux à adapter la Garantie européenne pour l’enfance afin d’inclure des mesures urgentes et ciblées pour lutter contre la pauvreté des enfants roms.

      Un rapport de 2024 de la Commission européenne et du Comité de la protection sociale, un organe consultatif de l’UE, a attiré l’attention sur l’écart persistant entre les pensions de retraite des hommes et des femmes (26 % d’écart entre les revenus de retraite des hommes et des femmes en 2022), résultant des inégalités de rémunération et d’emploi, et du fait que les femmes sont plus susceptibles d’interrompre leur carrière ou de travailler à temps partiel, notamment pour s’occuper de leurs proches. Les organisations de la société civile ont appelé à des systèmes de crédits de retraite plus uniformes pour remédier aux disparités, attirant particulièrement l’attention sur les niveaux élevés de pauvreté chez les femmes de plus de 75 ans.

      En juillet, la Directive européenne sur le devoir de diligence des entreprises en matière de développement durable est entrée en vigueur, obligeant les grandes entreprises à prévenir les violations des droits humains et à y remédier dans leurs chaînes d’approvisionnement. En décembre, l’UE a publié une loi interdisant la vente dans l’UE de produits fabriqués par le travail forcé.
      État de droit

      Les institutions de l’Union européenne ont continué de se concentrer sur l’État de droit et les institutions démocratiques dans les États membres, notamment par la création d’un nouveau poste de Commissaire à la démocratie, à la justice et à l’État de droit, mais les mesures concrètes visant à répondre aux préoccupations les plus graves n’ont pas été à la hauteur.

      La Hongrie continue d’être soumise à un examen au titre de l’article 7 du Traité sur l’Union européenne (TEU), l’instrument du traité de l’UE qui permet de traiter les violations graves de l’État de droit par le dialogue et d’éventuelles sanctions. Le Conseil de l’UE a tenu sa septième audition sur la Hongrie, mais malgré des « insuffisances graves persistantes » dans la plupart des domaines soulevés dans l’action du Parlement européen de 2018 qui a déclenché la procédure, les États membres de l’UE n’ont pas émis de recommandations au gouvernement hongrois ni organisé de vote sur la question de savoir si la Hongrie risquait de violer gravement les valeurs de l’UE.

      En mars, le Parlement européen a intenté une action contre la Commission devant la Cour de justice de l’Union européenne, lui demandant de contrôler la légalité de la décision de la Commission de décembre 2023, selon laquelle la Hongrie avait satisfait aux critères liés à l’indépendance de la justice et pouvait accéder à 10,2 milliards d’euros de fonds de cohésion de l’UE. La CJUE n’avait pas encore statué au moment de la rédaction du présent rapport.

      En février, la Commission européenne a ouvert une procédure d’infraction et en octobre elle a renvoyé la Hongrie devant la CJUE au sujet de sa loi sur la défense de la souveraineté nationale (voir le chapitre sur la Hongrie) pour violation du droit de l’UE.

      La Commission européenne et plusieurs États membres ont annoncé en juillet un boycott partiel de la présidence hongroise du Conseil en raison du voyage du Premier ministre Viktor Orbán à Moscou pour rencontrer le président russe Vladimir Poutine, suspect faisant l’objet d’un mandat d’arrêt international de la CPI.

      En mai, la Commission européenne a décidé de mettre fin à la procédure de l’article 7 contre la Pologne, bien que son gouvernement nouvellement élu n’ait pas mis en œuvre toutes les réformes nécessaires. Cette décision précipitée s’appuyait principalement sur les « engagements » du gouvernement polonais, arrivé au pouvoir en décembre 2023.

      Dans une première résolution sur l’État de droit en Grèce, adoptée en février, le Parlement européen a fait part de ses inquiétudes concernant la liberté de la presse, les poursuites judiciaires abusives et la surveillance des journalistes, le traitement à l’encontre des migrants et les attaques contre les défenseurs des droits humains. La résolution demandait à la Commission d’évaluer le respect par la Grèce de ses obligations en matière de droits fondamentaux pour accéder aux fonds de l’UE.

      Le rapport annuel 2024 de l’UE sur l’État de droit a souligné le rôle essentiel des organisations de la société civile, mais n’a pas identifié l’intimidation et l’ingérence dans leur travail en France, en Grèce, en Italie, en Hongrie, en Allemagne et ailleurs comme une menace majeure. Dans un contexte de preuves croissantes de restrictions de l’espace civique, les autorités de certains pays européens semblent également restreindre de manière disproportionnée la liberté d’expression et de réunion des manifestants propalestiniens et des manifestants pour le climat.

      Les risques de stigmatisation des organisations de la société civile financées par des fonds étrangers se sont accrus avec l’adoption de nouvelles lois de type « influence étrangère » dans certains États membres de l’UE et alors que l’UE continuait de débattre d’une proposition de directive sur la transparence de la représentation d’intérêts pour le compte de pays tiers. Un avis rendu en septembre par des experts de l’ONU a déclaré que la directive de l’UE pourrait avoir un effet dissuasif sur la société civile et restreindre indûment les libertés d’expression, de réunion et d’association protégées par le droit international des droits humains.

      La loi européenne sur l’IA a été approuvée en mai 2024 et marque une avancée majeure dans la réglementation de l’IA et des technologies associées. Elle prévoit notamment l’interdiction de la notation sociale, des limitations sur les technologies de surveillance biométrique à distance et l’obligation d’évaluer les risques pour les droits humains en cas d’utilisations « à haut risque ». Cependant, elle comporte également d’importantes lacunes en matière de sécurité nationale, de maintien de l’ordre et de contrôle des frontières, et accorde la priorité aux risques de responsabilité des entreprises par rapport aux risques pour les droits humains. De nombreux membres du Parlement européen ont déclaré avoir été la cible de logiciels espions en 2024. L’UE n’a pas encore pris de mesures pour maitriser le développement, la vente et l’utilisation de cette technologie.

      https://www.hrw.org/fr/world-report/2025/country-chapters/european-union

  • « Un #échec moral et éthique total » : #Omer_Bartov, spécialiste de l’Holocauste, sur le #génocide israélien à #Gaza

    Depuis le 7 octobre 2023, l’assaut israélien sur Gaza a tué plus de 45 500 Palestiniens et en a blessé plus de 108 000. Dans le même temps, les autorités de Gaza continuent d’accuser Israël de bloquer délibérément les livraisons d’aide. Les organisations de défense des droits de l’homme condamnent Israël pour avoir attaqué des infrastructures palestiniennes vitales, notamment l’approvisionnement en eau et le système médical de Gaza. Tout cela a conduit le plus grand spécialiste mondial du génocide à déclarer qu’Israël mène une combinaison « d’actions génocidaires, de nettoyage ethnique et d’annexion de la bande de Gaza ». Omer Bartov, professeur israélo-américain d’études sur l’Holocauste et les génocides à l’université Brown, explique pourquoi il pense qu’Israël commet actuellement un génocide à Gaza. « Il y a eu en réalité une tentative systématique de rendre Gaza inhabitable, ainsi que de détruire toutes les institutions qui permettent à un groupe de se maintenir, non seulement physiquement mais aussi culturellement », déclare Bartov, qui prévient que l’impunité pour Israël mettrait en danger l’ensemble de l’édifice du droit international. « Il s’agit d’un échec moral et éthique total de la part des pays qui prétendent être les principaux protecteurs des droits civils, de la démocratie et des droits humains dans le monde. »

    Retranscription de l’émission du 30 décembre 2024

    (Il s’agit d’une transcription rapide. Le texte peut ne pas être dans sa forme finale.)

    NERMEEN SHAIKH : Ici Democracy Now !, democracynow.org, The War and Peace Report. Je suis Nermeen Shaikh.
    Alors que l’année 2024 touche à sa fin, de nouvelles informations émanant du ministère de la Santé de Gaza confirment que plus de 108 000 Palestiniens ont été blessés par les attaques d’Israël depuis le 7 octobre 2023, et que plus de 45 500 ont été tués – bien que l’on pense que le bilan réel soit bien plus élevé. Pendant ce temps, les autorités de Gaza continuent d’accuser Israël de bloquer délibérément les livraisons d’aide, et l’UNRWA a mis en garde contre une « famine imminente » à Gaza, où les habitants sont confrontés à une grave insécurité alimentaire.
    Des milliers d’Israéliens ont manifesté samedi contre le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu, exigeant la fin de la guerre à Gaza et un cessez-le-feu qui ramènerait les otages toujours détenus par le Hamas.
    Notre prochain invité affirme qu’Israël mène une combinaison d’« actions génocidaires, de nettoyage ethnique et d’annexion de la bande de Gaza ». Omer Bartov est professeur d’études sur l’Holocauste et les génocides à l’université Brown. C’est un universitaire israélo-américain qui a été décrit par le United States Holocaust Memorial Museum comme l’un des plus grands spécialistes mondiaux sur le sujet du génocide. Il s’est récemment rendu en Israël et en est revenu au début du mois.
    Professeur Bartov, bienvenue dans l’émission Democracy Now ! Pourriez-vous commencer par expliquer pourquoi vous pensez qu’un génocide est en train de se produire à Gaza ?

    OMER BARTOV : Oui. Merci de m’accueillir à nouveau. Je voudrais commencer par dire que j’ai écouté l’interview du Dr Abu-Sittah, et je voudrais juste exprimer ma gratitude pour tout le travail qu’il fait et tout ce qu’il a dit dans la partie précédente.
    J’ai commencé, comme vous le savez peut-être, en novembre 2023 déjà, j’ai publié un article d’opinion dans le New York Times dans lequel j’écrivais que je pensais que les FDI commettaient ce qui semblait être des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, mais que je n’étais pas encore convaincu que nous avions suffisamment de preuves qu’il s’agissait d’une action génocidaire. Mon point de vue a vraiment changé en mai 2024 avec la décision des FDI, malgré l’opposition des États-Unis, d’envahir Rafah, la dernière zone de la bande de Gaza qui n’avait pas été prise. Il y avait là environ un million de Palestiniens qui avaient déjà été déplacés à plusieurs reprises, et les FDI les ont déplacés une fois de plus vers la zone de la plage, la zone de Mawasi, sans aucune infrastructure appropriée, dans des villes de tentes le long de la plage, et ont ensuite procédé à la démolition d’une grande partie de Rafah.
    C’est à ce moment-là que j’ai commencé à examiner l’ensemble de l’opération, en commençant par les déclarations faites au tout début, les 7, 8 et 9 octobre, par les dirigeants israéliens, les dirigeants politiques et militaires dotés d’une autorité exécutive, qui disaient qu’ils voulaient raser Gaza, la détruire, que tous étaient impliqués, et ainsi de suite. Il est apparu à ce moment-là qu’il y avait en fait une tentative systématique de rendre Gaza inhabitable, ainsi que de détruire toutes les institutions qui permettent à un groupe de se maintenir, non seulement physiquement mais aussi culturellement, son identité, sa mémoire collective, ce qui impliquait une destruction systématique des universités, des écoles, des mosquées, des musées et, bien sûr, des logements et de l’infrastructure. Ainsi, on pouvait constater qu’il y avait ce qu’on appellerait un urbicide, une tentative de détruire les centres urbains, de les détruire physiquement ; un scolasticide – c’est-à-dire l’assassinat des membres des institutions éducatives, des écoles, des professeurs d’université, et ainsi de suite – de sorte que la population, ayant été déplacée de nombreuses fois et, comme vous l’avez entendu précédemment, un grand nombre d’entre eux ayant été tués, blessés et affaiblis, ne serait jamais en mesure de se reconstituer en tant que groupe dans cette région. Telle est l’idée générale.
    Au début du mois d’octobre de cette année – c’est-à-dire un an après le début de la guerre – les FDI ont lancé une opération dans la partie nord de Gaza, au nord de ce que l’on appelle le corridor de Netzarim, qui n’est plus vraiment un corridor – c’est une sorte de boîte d’environ huit kilomètres de large et huit kilomètres de long – pour vider entièrement la zone située au nord de ce corridor de sa population. C’est un plan qu’un général israélien à la retraite, Giora Eiland, vendait à la télévision israélienne depuis des mois. L’idée est de forcer toute la population à partir par une action militaire et par la famine, en privant la population de nourriture et d’eau. Et une grande partie de la population a effectivement été expulsée. Cette dernière attaque contre l’hôpital dont vous parliez tout à l’heure est une phase supplémentaire dans cette tentative de vider toute la région de sa population.
    Dans les médias israéliens, l’ancien chef d’état-major et ministre de la défense israélien, qui est lui-même un voyou politique, a qualifié cette opération de nettoyage ethnique. Mais le nettoyage ethnique signifie que vous déplacez des personnes d’un endroit où vous ne voulez pas d’elles, un groupe ethnique particulier, vers un autre endroit où elles peuvent être au moins à l’abri de ces attaques. Mais, bien sûr, à Gaza, lorsque vous déplacez des gens d’un endroit à un autre, vers des zones dites sûres, ils ne sont pas en sécurité, et ils sont de plus en plus et constamment victimes d’attaques. C’est ce qui fait que ce soi-disant nettoyage ethnique fait en réalité partie d’une opération génocidaire.
    Quant à l’annexion, ce que nous entendons souvent dans les médias israéliens, c’est qu’au moment où le tiers nord de Gaza est rasé et vidé de sa population, des groupes de colons attendent dans les coulisses, juste de l’autre côté de la barrière, pour s’installer et commencer à coloniser cette zone, dans l’optique de l’occuper entièrement. Et je ne vois pas – s’ils le font, une fois que l’armée les aura laissés entrer, je ne vois aucun mécanisme en Israël ou, à vrai dire, au niveau international, qui permettrait de les déloger de là. Ce serait donc le début d’une annexion et d’une colonisation rampantes de Gaza, qui se viderait de sa population palestinienne.

    NERMEEN SHAIKH : Eh bien, Professeur Bartov, je voudrais vous poser une question sur ceux qui facilitent ce génocide, comme vous le dites. Dans un article du Guardian de la semaine dernière intitulé « Un consensus émerge : Israël commet un génocide à Gaza. Où est l’action ? », l’éditorialiste Nesrine Malik condamne la complicité de l’Occident dans ce qui se passe à Gaza, écrivant, je cite, “Le danger maintenant est que les Palestiniens meurent deux fois, une fois dans la réalité physique et une deuxième fois dans une réalité morale où les puissants rabaissent les standards mêmes qui façonnent le monde tel que nous le connaissons. En refusant même d’accepter les désignations de génocide et de nettoyage ethnique, et encore moins d’agir en conséquence, les alliés d’Israël imposent au monde une adaptation après laquelle il devient simplement accepté que les droits ne sont pas accordés par l’humanité, mais par les entités qui décident qui est humain. » Voilà ce qu’écrit Nesrine Malik dans le Guardian. Professeur Bartov, pourriez-vous répondre à cela ? Et en particulier, un génocide, comme vous le dites, est en train de se produire à Gaza. Ce génocide ne serait pas possible sans la complicité et l’implication directe des puissances occidentales, en particulier des États-Unis. En ce sens, les États-Unis sont-ils également coupables, par association, de commettre un génocide ?

    OMER BARTOV : Oui, écoutez, je commencerai par dire que, d’abord et avant tout, la population qui est la plus responsable de ce qu’Israël fait en ce moment est la population d’Israël, et qu’il y a une profonde complicité de la population israélienne, y compris non seulement le gouvernement mais aussi les partis d’opposition en Israël qui soutiennent l’opération dans la bande de Gaza. Nous pouvons donc en parler.
    L’administration américaine, sous la direction de M. Biden, aurait pu mettre fin à cette guerre dès novembre ou décembre 2023, parce qu’Israël ne peut pas mener de telles opérations à une telle échelle sans l’aide constante des États-Unis, tout d’abord par la grande quantité de munitions qui sont envoyées à Israël quotidiennement, des obus de chars et d’artillerie, des roquettes d’interception. Tout cela est fourni à grande échelle par les États-Unis, pour un montant d’environ 20 milliards de dollars, payés par le contribuable américain. Si une administration américaine avait dit à M. Netanyahou en décembre 2023 : « Vous arrêtez tout, ou vous vous débrouillez tout seul « , il aurait dû arrêter, parce que cela aurait été tout simplement impossible. Mais cela n’a pas été fait.
    Le résultat en est évidemment, tout d’abord, la destruction massive de Gaza. Deuxièmement, cela signifie que tout l’édifice du droit international mis en place à la suite de la Seconde Guerre mondiale et de l’Holocauste pour empêcher qu’un génocide ne se reproduise, par l’intermédiaire du tribunal de Nuremberg, de la convention sur le génocide de 1948, des accords de Genève de 1949 et ainsi de suite, et maintenant du statut de Rome plus récemment – tout cet appareil s’est révélé vide de sens si un pays comme Israël, soutenu par ses alliés occidentaux, peut agir en toute impunité. Il en résulte que tous les autres États voyous du monde peuvent désormais se dire : « Si Israël peut s’en tirer, pourquoi ne le ferions-nous pas ? » En ce sens, il s’agit d’un échec moral et éthique total de la part des pays qui prétendent être les principaux protecteurs des droits civils, de la démocratie et des droits de l’homme dans le monde. Outre la catastrophe régionale qui se produit actuellement, cette situation a des ramifications beaucoup plus importantes pour l’avenir.

    NERMEEN SHAIKH : Et, Professeur Bartov, vous venez de mentionner que vous étiez en Israël au début du mois. Vous avez parlé à un grand nombre de personnes là-bas. Quel est leur – quel est votre sentiment sur la façon dont Gaza est perçue ? Les actions d’Israël à Gaza sont-elles aujourd’hui critiquées, de manière beaucoup plus large, qu’elles ne l’étaient, disons, au début de l’année, pendant l’été, lorsque vous étiez là-bas, ou l’année dernière ?

    OMER BARTOV : Oui, j’étais en Israël en juin 2024. À l’époque, lorsque je parlais avec des gens et que je mentionnais ce qui se passait à Gaza – et la plupart des gens avec qui je parle sont des libéraux de gauche – il y avait une énorme réticence à en parler. Les gens étaient complètement pris par le traumatisme et la douleur qui ont suivi l’attaque du Hamas du 7 octobre, qui a tué environ 900 civils, ainsi que plusieurs centaines de soldats.
    Lorsque j’ai visité Israël cette fois-ci, au début du mois, j’ai eu l’impression que davantage de personnes étaient au courant de ce qui se passait à Gaza – pas à cause de la télévision israélienne, qui bloque toujours entièrement, volontairement, tout véritable reportage en provenance de Gaza. Tous ces reportages sont filtrés par les informations fournies par l’armée. Mais il y a eu des reportages dans les journaux. Il y a eu beaucoup de reportages sur les réseaux sociaux. Je pense donc que davantage de personnes sont désormais conscientes de ce qui se passe là-bas.
    Mais comment réagissent-ils ? J’ai l’impression qu’il y a un sentiment croissant de résignation, de désespoir, d’impuissance dans ces cercles, dont on pourrait espérer qu’ils constituent la principale opposition aux politiques d’un gouvernement d’extrême-droite.

    NERMEEN SHAIKH : Professeur Bartov, je suis désolé que le temps nous soit compté. Nous allons devoir nous arrêter là. Professeur Bartov, Omer Bartov, professeur d’études sur l’Holocauste et les génocides à l’université Brown. C’est un universitaire israélo-américain qui a été décrit par le U.S. Holocaust Memorial Museum comme l’un des plus grands spécialistes mondiaux du génocide. Nous serons de retour dans une minute.

    https://agencemediapalestine.fr/blog/2024/12/31/un-echec-moral-et-ethique-total-omer-bartov-specialiste-de-lhol

    #échec_moral #échec_éthique #éthique #Israël #destruction #inhabilité #impunité #droit_international

    signalé aussi par @loutre :
    https://seenthis.net/messages/1090813

  • #Droit_international ?

    Le ministre de la Défense confirme qu’Israël a éliminé Ismaïl Haniyeh en juillet - The Times of Israël
    https://fr.timesofisrael.com/le-ministre-de-la-defense-confirme-quisrael-a-elimine-ismail-haniy

    S’exprimant lors d’un événement en l’honneur d’agents de sécurité, Israel Katz a menacé de décapiter la direction des rebelles Houthis, « tout comme [Israël] l’a fait pour Haniyeh, Sinwar et Nasrallah »

  • #Externalisation_de_l’asile : une coopération au mépris de la #protection_internationale et de l’#état_de_droit

    Les velléités anciennes des États européens d’externaliser le traitement des demandes d’asile se sont
    récemment concrétisées à travers les « #accords » #Royaume-Uni/#Rwanda et #Italie/#Albanie. Alors que l’initiative britannique a été abandonnée, celle de l’Italie est temporairement bloquée. Après l’annulation des deux premiers transferts d’exilés dans les camps en Albanie et dans l’attente de la décision de la Cour de cassation de Rome sur le recours du gouvernement italien, celui-ci a rappelé le personnel mobilisé sur place.

    Ces #expérimentations, que l’application du Pacte européen sur la migration et l’asile pourrait favoriser, se
    heurtent pour l’instant au droit. Malgré ces revers et leur coût exorbitant, elles suscitent un engouement décomplexé des responsables européens qui ne se cachent plus de vouloir repousser hors de leurs territoires les personnes en demande de protection internationale.

    La médiatisation et l’instrumentalisation de ces feuille- tons politico-juridiques normalisent les violations des droits des exilé·e·s, mais aussi du #droit_international qui les définit et de la hiérarchie des normes qui les garantit, face à une #souveraineté_nationale prétendument bafouée. De même, dans les pays « tiers » parfois autoritaires, les « #partenariats » migratoires conclus par l’Europe contribuent à délégitimer et irrégulariser les personnes exilées, au mépris des droits.

    L’absence de transparence et la rhétorique hypocrite, souvent humanitaire, accompagnant l’externalisation des politiques migratoires européennes ont pu donner l’illusion d’un rempart préservant le #droit_d’asile. Qu’elles concernent explicitement l’asile ou non, celles-ci engendrent pourtant non seulement l’érosion de la protection internationale, mais aussi le délitement de l’état de droit, en Europe comme au-delà.

    https://migreurop.org/article3304.html
    #externalisation #asile #migrations #réfugiés #Migreurop #pays_tiers

  • Google ads linking UNRWA with Hamas appear on Australian news websites as part of a global campaign - ABC News
    https://www.abc.net.au/news/2024-12-05/unrwa-hamas-google-ads-published-on-australian-news-sites/104685074

    A version of the anti-UNRWA Google ad as it appeared in an article in The Australian’s website on December 4, 2024. (Supplied: The Australian)

    #ignoble #google #MSM #droit_international

  • L’Art de la #Paix
    https://www.obsarm.info/spip.php?article672

    Beau titre. Et belle balade sur la planète paix. Clin d’œil évident au grand classique « L’Art de la guerre », de Sun Tzu. Bertrand Badie est un chroniqueur régulier sur France Culture, sur France Inter, pour la politique internationale. En ces jours guerriers, il est très appréciable qu’un chercheur s’intéresse à la paix, d’une manière approfondie. Le message d’ouverture du livre situe le propos : la paix, ce n’est pas simplement l’absence de guerre. La paix se construit, jour après jour, (…) #Fiches_de_lecture

    / #Droit_international_humanitaire, Paix, #La_deux, ONU / Organisation des Nations unies

    #ONU_/_Organisation_des_Nations_unies

  • La preuve en images ?

    En suivant le procès de #Mazan, je perçois un parallèle avec les meurtres de masse à #Gaza, en Cisjordanie et au Liban : dans les deux cas, nous assistons à un échec des idéaux de #justice que nos sociétés revendiquent, échec accentué par l’abondance d’#images incriminantes. Je tente ici d’examiner comment cette #crise_de_la_preuve se déroule sous nos yeux et le miroir qu’elle nous tend.

    Dans un texte publié cette semaine, Mona Chollet (https://www.la-meridienne.info/Le-genocide-invisible) écrit :

    « Le découpage minutieux par lequel les médias et les dirigeants occidentaux distinguent les victimes dignes d’être pleurées de celles qui ne méritent pas une seconde d’attention me fait penser à ces vieilles #photos de l’URSS sur lesquelles la #censure effaçait soigneusement les contours des dignitaires tombés en disgrâce. »

    Je n’aurais pas pu trouver meilleure introduction à mon propos.

    L’historienne de formation (et de l’URSS, justement) que je suis est forcément débordée par l’actualité : ayant exercé mes recherches dans un milieu par définition déserté par les preuves matérielles, j’ai étudié dans le sillage d’historiens comme Iouri Dmitriev et Dmitri Yurasov qui ont couru leur vie durant après des traces de massacres et leur dissimulation par les perpétrateurs (et les autorités), et me suis principalement employée à reconstituer des récits de violences de masse à partir d’éléments rares et lacunaires.

    Depuis plusieurs années, c’est l’inverse qui se produit : pour enquêter, on est au contraire contraint de fouiller dans la masse de documents disponibles en ligne et de constituer des outils à même d’isoler le signal du bruit, le vrai du manufacturé et l’aiguille de la botte de foin. Nous investissons donc des terrains où les #preuves abondent. Pour autant, force est de constater qu’elles ne sont pas nécessairement retenues contre les auteurs des #crimes. J’ai pour ma part le sentiment que nous vivons collectivement une inversion paradoxale du #rapport_à_la_preuve, par lequel des #preuves_visuelles accablantes accompagnent des #violences pourtant ignorées ou niées.

    Au cours de mes recherches ou en pratiquant l’#OSINT sur plusieurs épisodes de #violence ces dernières années, je suis travaillée par cette réflexion sur le #statut_de_l’image — notamment dans ce qu’elle change dans notre rapport à l’événement historique — et de la preuve ; l’affaiblissement paradoxal de la #charge_de_la_preuve par la pléthore d’images s’est vérifié tous les jours en Syrie, sur le front ukrainien, etc.

    En ce moment, deux événements d’ordres en apparence très différents alimentent en continu cette réflexion : les crimes de guerre conduits par l’armée israélienne, et le #procès_de_Mazan.

    PREUVES ET #DÉNI

    Dans ces deux contextes, les vidéos provoquent une crise collective de notre rapport aux images et de notre rapport à la justice, philosophiquement, socialement mais aussi et surtout, c’est en tout cas l’enjeu, dans le cadre très précis du #droit_international et du #droit_pénal français, respectivement. On assiste à la rupture avec un paradigme dans lequel l’#absence_de_preuve justifiait que soient laissés impunis des actes, qu’il s’agisse de #crimes_sexuels ou de #crimes_de_guerre, dont la matérialité était suspendue aux déclarations des victimes, victimes qui, faute de preuves, n’étaient pas ou rarement crues.

    Mais que se passe-t-il alors face à des faits amplement documentés ?

    Alors qu’on pourrait s’attendre à ce que la #vérité éclate au grand jour, on vérifie tous les jours que ce n’est pas le cas. Le sort fait aux images y est pour beaucoup : selon le narratif qu’elles peuvent appuyer, elles verront leur circulation entravée ou encouragée et leur contenu validé ou discrédité. C’est de cette façon que des images propres à susciter l’#indignation se heurtent paradoxalement à l’#indifférence voire au #doute, qui sont bien sûr de puissants facteurs de #démobilisation.

    Plusieurs dispositifs agissent dans ce sens, que renseigne abondamment une longue tradition de théorie de l’information et de critique des médias : d’une part, l’accès à l’information limité et cloisonné, de la bulle de filtres à la censure délibérée. D’autre part, face à l’impossibilité de contrôler le flux désormais intarissable des informations, se mettent en place des réponses cognitives telles que la #fatigue_de_compassion ou la #surcharge_cognitive, qui paralysent au lieu de mobiliser. Enfin, les médias d’#information_en_continu, la concentration des titres de presse et en général le fonctionnement des médias moderne est propice à l’#entropie, la #manipulation de l’information, la perméabilité à la #propagande. Face à ces phénomènes de d’#altération de l’information, l’émergence croissante de médias de #fact-checking ou de #debunk est salutaire mais à la fois insuffisante (c’est la fameuse loi dite de Brandolini) et sujette à caution, ces plateformes qui s’érigent en instances de neutralité devenant potentiellement des agents de contrôle de l’information.

    Je parle souvent de notre usage des #réseaux_sociaux en politique, et notamment le dispositif de #spectacle par lequel nous assistons en live sur nos téléphones à des massacres filmés, et l’#impuissance acquise à laquelle nous cela nous réduit, dans une sorte de #conscientisation_sans_action. L’idée que des images puisse provoquer une #prise_de_conscience en même temps qu’une #distance_émotionnelle est au coeur de la réflexion de #Susan_Sontag dans Regarding the Pain of Others, et plus récemment dans le livre de #Samah_Karaki L’Empathie est politique (https://www.editions-jclattes.fr/livre/lempathie-est-politique-9782709672504), paru au début de ce mois.

    Une forme de #militantisme_compassionnel consiste alors à liker, partager, s’indigner à longueur de stories (moi la première) en se raccrochant à l’idée de « faire quelque chose ». J’ai depuis appris qu’un mot existe en réalité depuis longtemps pour désigner ce phénomène : le #slacktivisme, autrement dit un #activisme_paresseux pratiqué depuis son canapé. Bien entendu, si ce qui se joue relevait de la seule paresse, cela ne vaudrait pas pour moi une minute de peine.

    Je voudrais revenir sur la nature et le rôle du « spectacle » en question, c’est-à-dire ce que nous regardons : les images, en quantité désormais infinies, et leur caractère de preuve.

    Si tout ce qui précède tend à montrer que la #démobilisation est un effet pervers de l’inflation des images, je pense qu’est également à l’œuvre un mécanisme délibéré de #disqualification de ces images. En effet, si l’#indifférence est une des conditions de l’#impunité, le #doute en est une autre et c’est ce qui m’intéresse plus particulièrement.

    DU DÉNI AU #NÉGATIONNISME

    Le procès Pélicot et les vidéos de Gaza présentent selon moi un point commun très fort et symptomatique de l’époque en ce qui concerne notre rapport aux images : dans ces deux cas de figure nous sommes en présence d’images qui se retrouvent au cœur du #débat_public.

    Ce sont notamment des contextes de production d’images par les auteurs mêmes des crimes, et dans les deux cas, la controverse repose sur l’idée que ces images ne constituent pas des preuves. Dominique Pélicot, qui a drogué son épouse afin que plusieurs dizaines d’inconnus puissent la violer à son insu pendant des années, a tout filmé ; c’est même cette collection visuelle monumentale qui a conduit à la mise en examen des accusés. On peut aussi relever que c’est déjà le fait de filmer ses victimes, en public cette fois (sous les jupes de clientes d’une grande surface), qui a attiré l’attention des autorités sur lui et mené à la découverte du reste. La documentation systématique de ses propres agissements constitue donc une part fondamentale desdits agissements (dans un but principalement pornographique en l’occurrence). À l’issue de la fouille de son matériel, cette archive devient logiquement une #pièce_à_conviction.

    Pourtant, depuis le début des audiences, s’est joué un retournement du rôle de ces images : les plaidoiries des avocats des accusés mobilisent massivement les vidéos incriminantes pour au contraire les dédouaner. Il a pu être ainsi avancé que ces images montraient en fait que la victime était consentante ; qu’elle faisait semblant de dormir ; que rien ne prouvait qu’elle n’avait pas sollicité ces actes.

    Dans le cas de Mazan, le paradoxe est consommé : sans ces vidéos, les accusés auraient probablement continué leur vie sans être inquiétés, mais sur ces vidéos se construit désormais un #récit_alternatif visant à les disculper.

    Depuis un an, une autre catégorie de vidéos sature nos écrans : les images en provenance de Gaza. Depuis un an Israël a imposé une interdiction stricte sur l’accès indépendant à Gaza pour les médias internationaux ; les vidéos qui nous parviennent sont donc nécessairement le fait d’individus impliqués dans les événements. Certaines sont filmées avec les téléphones des victimes ; d’autres sont, comme dans le cas de Dominique Pélicot, tournées par les auteurs des crimes : des soldats israéliens enregistrant des crimes de guerre en zone occupée, soit par souci nationaliste, soit par fanfaronnade individuelle pour se mettre en valeur sur Tiktok et Tinder. On note au passage qu’à Mazan comme à Gaza, la compilation des actes criminels par leurs auteurs dit quelque chose de leur #sentiment_d’impunité.

    Dans les deux cas de figure, un enjeu fondamental est donc l’existence d’une #documentation_visuelle d’actes qui dans d’autres contextes restent impunis, précisément faute de preuves.

    Tout l’argumentaire de notre idée de la justice est fondé sur la preuve, soit le fait que le flagrant délit ou la prise sur le fait rend les faits indéniables. C’est même ce qui justifie la #surveillance_de_masse.

    Ici, cet argumentaire se retrouve mis à mal et les images font l’objet d’une entreprise de #disqualification : les victimes sont des menteurs et les vidéos sont fake. Nous le savons bien : dans le monde « #post-vérité », les faits ne sont plus aussi têtus.
 Ainsi encore tout récemment des images des frappes qui ont ciblé les patients d’un hôpital en ruines à Deir al Balah et notamment vu périr dans les flammes le jeune Shaban al-Dalou sur plusieurs vidéos ont suscité une émotion virale. Mais très rapidement en réponse à ces images se met en place une rhétorique de #négation d’ordre conspirationniste : les vidéos seraient le fruit de « #Pallywood », invention raciste et révisionniste qui prétend que les Palestiniens disposent d’une industrie cinématographique dédiée à la production « hollywoodienne » de films victimaires. Ainsi l’épisode très choquant de la mort de #Shaban_al-Dalou a été remis en question en ciblant l’auteur d’une des vidéos de l’attaque de l’hôpital ; dans ces contenus, le jeune Gazaoui est présenté comme un « acteur » et accusé de créer de faux contenu destinés à attirer la compassion. Bien que les vidéos aient été vérifiées comme bien réelles et la conspiration Pallywood largement debunkée, et notamment sur l’épisode précis en question, les tweets relayant cette opération de propagande autant par les comptes officiels de l’état israélien que de l’influenceur d’extrême-droite et ex-policier Bruno Attal mais aussi la vice-Présidente du CRIF, n’ont pas, à ce jour, été supprimés.
    Ce #discrédit jeté sur la preuve peut sembler tellement grossier qu’on aurait du mal à le prendre au sérieux, mais il fonctionne très bien sur les spectateurs de bonne foi qui ne veulent pas croire aux images “choc” qui leur parviennent. Il a même pu être dit que ces images étaient "trop choquantes pour être réelles".

    Ainsi, en présence d’images, la négation doit simplement passer par d’autres canaux : ces images prouveraient en fait le contraire de ce qu’elles montrent explicitement ; seraient fausses ou trafiquées ; les victimes seraient en fait consentantes, ou ne seraient que des acteurs jouant la comédie.

    La #fictionnalisation des images documentaires participe donc de la mise en place d’un #déni_de_preuve. Priver les images de leur #charge_probatoire est alors un enjeu capital pour les perpétrateurs.

    VICTIME PARFAITE, PARFAIT COUPABLE

    Revenons sur Mazan.

    Gisèle Pélicot, soumise chimiquement par son mari et livrée à des centaines d’hommes pour qu’ils la violent pendant qu’elle était inconsciente, pourrait incarner l’archétype de la "bonne victime" de viol : les preuves sont accablantes, les faits indiscutables.

    Cette idée de "#bonne_victime" se retrouve chez Giulia Fois, qui évoque le viol dont elle a été victime comme un “bon viol”, expliquant qu’elle a été considérée comme une victime recevable parce que son viol a eu lieu dans un contexte conforme à l’idée qu’on veut se faire du viol à l’échelle de la société : un inconnu la nuit sur un parking sombre — cliché bien utile pour recouvrir complètement la réalité qui est toute autre : puisque 90% des #viols sont commis par un homme connu de la victime.

    Pourtant, Gisèle Pélicot se voit harcelée par les avocats de la défense qui s’acharnent à démontrer qu’elle aurait été consentante, et par là mettre en doute son statut même de victime. On le voit bien : l’image, soit le plus haut niveau de preuve, dans ce contexte, ne sert plus à rien. Si ce n’est éventuellement à se retourner contre les victimes : on est même allé chercher des photographies érotiques réalisées par la victime pour étayer le portrait d’une femme lascive et libertine, donc essentiellement une femme qui a bien cherché à se faire passer dessus et certainement pas une « bonne victime ».

    On voit donc la facilité avec laquelle, en dépit des preuves, la victime légitime peut être rétrogradée au statut d’irrecevable.

    Dans le même ordre d’idées, Mona Chollet, toujours dans son texte si bien nommé « le génocide invisible », relève ceci (et je souligne) :

    « Au fil des mois, déjà, on avait pu mesurer l’ampleur du “deux poids, deux mesures”. Les massacres, les viols : au vu de l’indignation générale soulevée, à juste titre, quand des Israélien·nes en ont été victimes, on avait pu en déduire, naïvement, que ces crimes étaient condamnables en eux-mêmes. Mais l’indifférence, voire l’approbation, rencontrées quand des Palestinien·nes en sont victimes à leur tour nous force à en déduire que ce qui est réellement terrifiant, ce n’est pas d’être violé·e, décapité·e, massacré·e : c’est de l’être par des Arabes ».

    La #recevabilité du #statut_de_victime légitime semble donc moins inféodée au faisceau de preuves dont on dispose qu’au statut de l’auteur des actes dont elle est victime. En gros : dis-moi qui t’a agressé·e, je te dirai si c’est vrai.

    En effet, la question de savoir qui est la "bonne victime" sert à détourner l’attention du véritable problème : celui des "#bons_coupables", ceux que la justice désigne comme des cibles légitimes — migrants, pauvres, minorités de race et de genre… (et il va de soi que ces coupables idéaux ne peuvent pas constituer à leur tour des victimes parfaites). Pour le dire simplement, le système protège les agresseurs quand ils correspondent à un certain profil.

    Nous avons à Mazan un procès accablant pour les auteurs (avec 10 ans de vidéos à charge) mais comme comme ce sont des coupables irréprochables — un « #bon_père_de_famille » et des « monsieur tout-le-monde » —, on est en train de nous expliquer que c’est plus compliqué que ça, qu’ils n’ont pas fait grand chose de mal, qu’ils ont souffert dans leur enfance et que Gisèle Pélicot a peut-être un peu cherché ce qui lui est arrivé. La médiatisation du procès de Mazan rompt l’illusion et montre au grand jour l’arbitraire de la séparation entre bons et mauvais hommes, et entre vrais et faux coupables.

    Le contraste est saisissant avec typiquement le battage médiatique tout récent autour de l’inculpé désigné sous la seule appellation de « Marocain sous OQTF » qui a tué la jeune Philippine, créant immédiatement une panique d’extrême-droite — extrême-droite qu’on a pas beaucoup vu s’émouvoir du procès Mazan.

    Il apparaît clairement qu’on ne prend fait et cause pour les victimes qu’en fonction de qui les agresse, en faisant en réalité peu de cas de ces victimes.

    CACHEZ CES VICTIMES QUI NE SAURAIENT EXISTER

    Dans ce contexte, le huis clos judiciaire joue d’ailleurs un rôle clé : il devient le pilier d’un système qui, sous couvert de protéger les victimes, protège en réalité les coupables. Le refus du #huis_clos par Gisèle Pélicot est un enjeu de société car il expose publiquement ce qui était auparavant relégué à l’imaginaire sordide des « affaires de mœurs » et recouvert d’un voile pudique.

    Dans le même ordre d’idées, les #smartphones utilisés par les populations ciblées ont en quelque sorte brisé le huis clos symbolique des scènes de crimes de guerre d’habitude considérés comme essentiellement incompréhensibles, exotiques, ambigus et frappés d’un flou artistique.

    En ce moment, le monde traverse donc une #médiatisation_des_violences qui fait vaciller les conceptions de la justice des gens qui y assistent. Si l’idée d’une #justice_à_deux_vitesses n’est certes pas nouvelle, les niveaux d’impunité et de cynisme déployés dans ces deux contextes ont suscité des indignations très larges.

    S’y pose à nouveaux frais la question centrale : qui a le droit d’exercer la #violence ?

    
Mythe fondateur de l’état de droit, le #monopole_de_la_violence_légitime réservé aux agents du pouvoir exécutif prouve jour après jour non seulement son échec à protéger les plus vulnérables, mais sa tendance croissante et de plus en plus manifeste à s’exercer contre eux, des violences policières aux persécutions institutionnelles contre les minorités. Je vois pour ma part dans l’acharnement à innocenter les violeurs de Mazan une extension tacite et conditionnelle de ce monopole de la violence à certaines catégories sociales (plutôt dominantes) pourvu qu’elles limitent leur action violente à certaines autres catégories (plutôt minoritaires).

    Les images de Gaza et de Mazan concourent au même mouvement de révélation à grande échelle de l’étendue de l’arnaque d’un régime profondément illégaliste, au sens foucaldien : la gestion de la légalité ou de l’illégalité de certains phénomènes en fonction de qui en sont les acteurs.

    S’y dévoile en fait la matrice d’un système fondé sur la #négation_des_victimes : face à l’impunité acquise de certains, selon une organisation finalement tout à fait suprémaciste, on le voit aujourd’hui : les preuves ne valent pas grand chose ; face à des perpétrateurs qui bénéficient à d’un totem d’#immunité, ou à minima de nombreux points d’avance, il n’y a pas de victime assez parfaite pour établir la #culpabilité de leur bourreau.

    Le #victim_blaming (terme qui désigne l’attribution d’un acte malveillant à la responsabilité de la victime) est en fait le mode par défaut du parcours de la victime vers la reconnaissance de son statut et l’éventuelle réparation du préjudice et participe d’une #impunité_institutionnelle. Le huis clos que les images viennent briser n’est pas seulement géographique, mais aussi moral et idéologique : il est celui d’une société internationale qui refuse de reconnaître la pleine humanité des victimes, car cela impliquerait de remettre en question les structures de pouvoir qui la sous-tendent.

    Si comme le veut l’adage le vieux monde peine à mourir, les monstres qui surgissent prennent pour l’instant la forme d’une ère post-factuelle où l’émotion et l’opinion remplacent les faits, et dans laquelle les spectateurs sont complices par leur inaction. Et si un nouveau monde tarde à apparaître c’est aussi parce l’#indifférence et le #déni prédominent et autorisent l’impunité à prospérer.

    J’ai l’optimisme de penser que l’indignation suscitée par décalage entre les déclarations des pouvoirs publics et les actes qui sont documentés ne n’est pas vouée à tourner dans une boucle stérile et fera à terme bouger les lignes. Je caresse même la chimère que par le spectacle qui se donne de cas d’impunité tellement patents, après l’indignation incrédule se produise un déclic des consciences même chez les gens les plus enclins à avoir confiance en la justice nationale et internationale. Le régime actuel de coexistence des #récits_dominants avec les images qui les contredisent est en train de creuser une faille qui expose les processus par lesquels les systèmes de justice et les systèmes d’information sont à la fois régis par les #rapports_de_pouvoir qui traversent nos sociétés et producteurs de #récits dominants. Chaque jour qui passe montre un peu davantage combien le roi est nu.

    Omar El Akkad tweetait il y a un an : “One day, when it’s safe, when there’s no personal downside to calling a thing what it is, when it’s too late to hold anyone accountable, everyone will have always been against this.” Ce tweet a été vu plus de 10 millions de fois. Pouvons-nous vraiment attendre que trois générations s’écoulent ?

    https://blogs.mediapart.fr/cerisuelo/blog/171024/la-preuve-en-images
    #viols_de_Mazan

  • Smotrich Has Completed Israel’s Annexation of the West Bank - Opinion - Haaretz.com
    https://archive.ph/2024.07.11-211245/https://www.haaretz.com/opinion/2024-07-11/ty-article-opinion/.premium/smotrich-has-completed-israels-annexation-of-the-west-bank/00000190-a32e-d852-abfb-e3bee2170000

    A few days ago, the constitutional revolution was completed, but no, not in Israel. Few were aware of it, but the Ben-Gvir-Smotrich-Netanyahu government has conspired to carry out two coups – one in Israel and the other in the West Bank.

    The first is aimed at eliminating the separation of powers and the independence of the judiciary and creating a dictatorship in Israel; the second seeks to annex the West Bank and perpetuate Jewish supremacy as a guiding principle there. In order to prevent the first from happening, hundreds of thousands of Israelis went to the streets. But no one did the same to stop the second – because what’s wrong with some more Jewish supremacy?

    The regime revolution in the West Bank is being conducted in accordance with the commitments Prime Minister Benjamin Netanyahu gave to Religious Zionism leader Bezalel Smotrich as part of the coalition agreement. Its essence is the transfer of all the governing powers in the West Bank, except those directly relating to security, from the army to an apparatus headed by Smotrich himself.
    At the end of May, it happened.

    Quietly, without any ceremonies or press announcements, Yehuda Fuchs, the head of the army’s Central Command (and the commander of Israeli forces in the West Bank), signed an order creating a new position in the army’s Civil Administration, “deputy head for civilian affairs” and the Civil Administration’s head signed a document delegating powers to the holder of the new office.

    But the “deputy” is in fact a civilian appointed by Smotrich and is in no way a deputy because he is not subordinate to the head of the Civil Administration. He needs no approval for his actions, is not required to consult with or report to him. He is subordinate alone to Smotrich.

    The order and the letter of delegation of powers transferred most – in fact almost all – of the powers held by the head of the Civil Administration to the new deputy. Land management, planning and construction, enforcement against unpermitted construction, supervision and management of local authorities, professional licensing, trade and economy, management of nature reserves and archaeological sites.

    Israeli settler terrorism is state terror against Palestinians
    Far-right minister Strock’s miracle is a catastrophe for sane Israelis

    Smotrich carried out an administrative enema (excuse the image) on the head of the Civil Administration, emptying him of all its powers, and transferring them to Smotrich himself via the deputy he himself has appointed.
    If we describe things in a pictorial way: Since the order was signed, an officer has been wandering around the division’s headquarters in Beit El boasting the title “head of the Civil Administration,” but given the changes, he is effectively unemployed and can devote his time to organizing cultural and leisure activities for his subordinates. Someone should tell him that he may be a “head,” but this head has no body.

    However, transferring authority from an officer who is subordinate to the IDF commander in the West Bank to a civilian who is subordinate to the outpost Smotrich has established in the defense ministry has significance that far transcends issues such as work shifts and schedules. This is a dramatic change in the governing apparatus of the occupied territory, from one managed by a military administration, subject to international law which requires that it look after the occupied population, to a territory directly managed by civilian administration officials and Israeli publicly-elected officials, whose loyalty and duty are by definition given to Israeli citizens in general, and to Israeli citizens living in this occupied territory in particular. In order to understand how dramatic this change is, one should realize what international law was trying to achieve when it determined that occupied territory should be managed by a military government.

    International law regulates a state of occupation as a temporary management of the territory by the occupier, and it categorically prohibits its unilateral annexation. This is not just another prohibition, but a key principle meant to cement the principle which precludes the use of force in international relations except in self-defense. If it is clear sovereignty cannot be acquired by force, there will be less motivation for embarking on a war of aggression. In other words, this prohibition on unilateral annexation of an occupied territory principle is at the core of the international rule-based order established after World War II, that in its heart lies the desire to eradicate wars. The purpose of determining that an occupied territory will be managed by a temporary military administration, and not directly by the occupying government, was to create a buffer between the citizens of the occupying country, who are its sovereign, and the ruling apparatus in the occupied territory.

    This order is based on the understanding that the military is less committed to political considerations, whereas the ministries of an elected government are by definition committed to pursue them. The transfer of administrative powers to public servants of the occupying government and to its elected officials creates a direct rule by the occupiers’ citizens over the occupied territory, thereby expanding the occupiers’ sovereignty into the occupied territory. In other words: annexation. This is what Smotrich has succeeded in doing. He has completely removed the army (including military legal counseling) from the decision-making process regarding anything not directly related to security in the West Bank, in practice imposing Israeli sovereignty over the area.

    And this will have disastrous implications for the rights of Palestinians. The few restrictions the army has somehow placed on the dispossession and violation of Palestinian rights will now be removed. Members of the Regavim NGO, the Kohelet Forum and the Honenu organization, whom Smotrich has appointed to all the relevant posts in the new civil administration of the West Bank, mainly as legal advisers, will remove the remaining restrictions. They will pounce on the proverbial poor man’s [Palestinian] sheep, slaughtering it, tearing off its meat and sucking its marrow. It’s already happening. New settlements will be erected; new neighborhoods will be built at a rate we haven’t seen yet; large swathes of land will be allocated to violent Israelis in order to set up farms on them; Palestinian structures built without permits will be demolished at a dizzying pace, while illegal construction by settlers will be legalized. Fearless and shameless apartheid. Apartheid as a work plan.

    The great shame lies in the fact that no one has stood up to object, not in Israel nor around the world. The same world that imposed heavy sanctions on Russia when it annexed in criminal fashion the Crimean Peninsula, and later territory it had conquered after invading Ukraine, has gone silent, not sounding a peep when it comes to Israel.

    Indeed, the world uses a different yardstick when it comes to Israel. But in contrast to the prattle of Israel’s public diplomacy, this is positive discrimination, exempting Israel from the law. The only thing the annexationist criminals must be saying to themselves now is: why did we wait for 57 years? It’s so easy.

    #droit_international #cisjordanie
    #sionisme

    • Pour l’ancien rapporteur spécial des Nations unies, la France a une certaine conception de la laïcité qui n’est pas partagée par tous.

      « Il y a eu une certaine évolution du concept de laïcité qui a dépassé la neutralité et qui a, maintenant, un impact et des conséquences sur certaines minorités religieuses, soutient-il. Avec les autres rapporteurs spéciaux et certaines ONG comme Amnistie internationale et Human Rights Watch, nous avons signalé que l’approche et l’interprétation de la laïcité de la France ne cadre pas et ne respecte pas ce qui est permis par le droit international. »

      La France a répondu aux préoccupations et à l’inquiétude de ces organismes, mais encore là, selon Fernand De Varennes, ses arguments ne sont pas valables selon le droit international.

      Ça devient une habitude que la France conchie le #droit_international

  • Israel’s Genocide of Palestinians in Gaza

    The prohibition of the crime of genocide is a peremptory norm of international law from which no derogation is permitted. In light of the extraordinary implications of a finding that Israel may be committing genocide against the Palestinian people in Gaza, the University Network for Human Rights, the International Human Rights Clinic at Boston University School of Law, the International Human Rights Clinic at Cornell Law School, the Centre for Human Rights at the University of Pretoria, and the Lowenstein Human Rights Project at Yale Law School have conducted a thorough legal analysis of Israel’s acts since October 7, 2023, as situated in their historical context.

    The Genocide in Gaza report concludes that Israel has violated its obligations under the Genocide Convention of 1948, setting forth the facts that establish the requisite mens rea associated with genocidal intent, and the acts that violate Articles II and III of the Convention. Our aim, as experts in human rights and humanitarian law, is to provide a rigorous academic analysis of Israel’s actions since October 7, 2023 in order to aid in ongoing assessments of the current situation through the lens of the law on genocide.

    Since October 7, 2023, tens of thousands of Palestinians in Gaza, including men, women, children, and elderly persons, have been killed or injured. Israel’s military operation has destroyed or damaged the great majority of homes in Gaza and has decimated civilian infrastructure, including hospitals, schools, universities, UN facilities, and cultural and religious heritage sites. An overwhelming majority of Gaza’s population has been forcibly displaced as a result of Israel’s military offensive, and civilians in Gaza face catastrophic levels of hunger and deprivation due to Israel’s restriction on, and failure to ensure, adequate access to basic essentials of life, including food, water, medicine, and fuel. Israel’s actions in Gaza have been accompanied by multiple expressions of genocidal intent by Israeli government leaders, including by Prime Minister Benjamin Netanyahu. This genocidal intent is further manifested in the nature and conduct of Israel’s military operations.

    The joint report draws from a diverse range of credible sources, including reports by United Nations and aid agencies, investigations by human rights organizations, media reports, and public statements and testimonies. In determining violations of the Genocide Convention, our analysis is guided by the established principles of international law, international jurisprudence, widespread state practice accepted as customary law, and the Convention’s drafting history. Additionally, our report draws on Gaza’s history leading to the present moment, in recognition that genocide rarely occurs as a single moment but is rather an unfolding result of processes and practices over time.

    Our analysis concludes that actions taken by Israel’s government and military in and regarding Gaza following the Hamas attacks of October 7, 2023, constitute breaches of the international law prohibitions on the commission of genocide. The report further argues that these violations give rise to concrete obligations to all other States, namely, to refrain from recognizing Israel’s breaches as legal or from taking any actions that may amount to complicity in these breaches, and to take positive steps to suppress, prevent, and punish the commission of further genocidal acts against the Palestinian people in Gaza.

    https://www.humanrightsnetwork.org/palestine

    #rapport #génocide #Gaza #Israël #Palestine #rapport #droit_international #analyse #University_Network_for_Human_Rights

  • L’Union européenne prêche la paix et vend la guerre : comment l’Europe arme les régimes meurtriers du Moyen-Orient
    https://www.obsarm.info/spip.php?article652

    Un nouveau rapport pointe du doigt comment le Fonds européen de défense subventionne sans aucun contrôle démocratique des entreprises agissant en violation totale de la Position commune de l’Union européenne sur les exportations d’armement. #Armements

    / Transferts / exportations, #Contrôle_des_exportations, #Guerres, #Droit_international_humanitaire, #La_une

    #Transferts_/_exportations
    https://www.obsarm.info/IMG/pdf/armes826fr.pdf

  • Plaidoirie magistrale de Monique Chemillier-Gendreau à la CIJ – Aurdip

    "La plaidoirie magistrale de la Professeure Monique Chemillier-Gendreau au nom de l’Organisation de la coopération islamique devant la Cour Internationale de Justice concernant les « Conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est »"

    https://aurdip.org/plaidoirie-magistrale-de-monique-chemillier-gendreau-a-la-cij

    #palestine #cij

  • France : second exportateur mondial d’armes ! Les autorités se dérobent à leurs obligations de contrôle démocratique et de transparence. Jusqu’à quand ?
    https://www.obsarm.info/spip.php?article644

    Selon le dernier communiqué du Sipri, la France s’élève au rang de deuxième exportateur d’armes au monde après les États-Unis. L’augmentation des exportations d’armes est faramineuse : plus de 47 % entre les périodes 2014-2018 et 2019-2023. Alors que la contestation monte contre les ventes d’armes et de composants à double usage à Israël et à la Russie, le gouvernement fait traîner la mise en place de la Commission parlementaire d’évaluation de la politique d’exportation d’armement. (...) #Armements

    / Transferts / exportations, #Contrôle_des_exportations, #Biens_à_double_usage, #Droit_international_humanitaire, #Actions_contre_la_guerre, La (...)

    #Transferts_/_exportations #La_une
    https://www.obsarm.info/IMG/pdf/cp_france_second_exportateur_2024-02-11.pdf

  • #Frontex, comment sont gardées les frontières de l’Union européenne ?

    L’ancien directeur #Fabrice_Leggeri a annoncé rejoindre la liste du #Rassemblement_national pour les élections européennes. L’occasion de se demander quel est le #mandat de Frontex, et quel droit régule cette agence chargée de contrôler les frontières européennes.

    Fabrice Leggeri, ancien patron de Frontex, l’agence européenne chargée d’assister les États membres dans la gestion et le contrôle des frontières extérieures de l’espace Schengen, rallie le Rassemblement national ainsi que la liste de Jordan Bardella pour les #élections_européennes de juin prochain. L’occasion de revenir sur les attributions de Frontex.

    L’obligation d’assistance

    Créée en 2004, Frontex fête ses vingt ans cette année. Deux décennies, au cours desquelles l’agence chargée d’assister les États membres dans la gestion et le contrôle de leurs frontières, a démultiplié tant ses effectifs que son budget et s’est progressivement imposée au cœur du débat migratoire européen. Ludivine Richefeu, maîtresse de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’université de Cergy-Pontoise, met en avant les exigences humanitaires et d’#assistance auxquelles l’organisation est soumise par le droit européen et international. “Frontex est une agence qui peut intervenir en amont, avant que les migrants soient dans le territoire européen, en apportant un soutien logistique et opérationnel aux États tiers. Par exemple en #Algérie, au #Maroc ou en #Tunisie en ce qui concerne les flux migratoires traversant les côtes maghrébines. Concrètement, le soutien se traduit par l’envoi de personnel Frontex, de #personnel_détaché des États membres ou encore de matériel. Lorsqu’une embarcation entre dans les eaux territoriales, le droit contraint l’agence à lui porter secours et à la rattacher à un port sûr. S’il y a des mineurs non accompagnés ou des femmes enceintes parmi les passagers, ils doivent obligatoirement être pris en charge. Juridiquement, le statut de réfugié est déclaratoire et n’est pas soumis à l’approbation des États membres. La personne est d’abord réfugiée en elle-même. Le #droit_international oblige les États à la prendre en charge pour ensuite examiner sa demande afin de la protéger des persécutions qu’elle risque ou subit dans son pays.”

    Une agence sous le feu des critiques

    Fabrice Leggeri, l’ancien directeur de Frontex entre 2015 et 2022 qui vient de rejoindre la liste du Rassemblement national pour les élections européennes, avait démissionné de son poste notamment à la suite d’accusations de refoulement illégaux de migrants. Ludivine Richefeu nous détaille cette pratique aussi appelée le "pushback" et ses origines. “Le refoulement a lieu lorsqu’une embarcation pénètre dans les eaux territoriales d’un État membre et qu’elle en est repoussée sans que les situations des passagers soient examinées et que l’assistance qui leur est due soit apportée. Des sources journalistiques et des rapports de l’#Office_Européen_Antifraude (#OLAF), nous détaillent ces pratiques. Concrètement, lorsque que l’embarcation est détectée, Frontex envoie les coordonnées aux équipes d’intervention des États membres qui repoussent le navire sous sa supervision. Pour ce faire, les équipes recourent à des menaces, à des formes coercitives et même parfois à l’usage d’armes.”

    Ces pratiques illégales s’inscrivent notamment dans l’élargissement des compétences de l’agence ces dernières années, rappelle la chercheuse. “Grâce à plusieurs règlements adoptés entre 2016 et 2019, Frontex a maintenant un rôle fondamental en matière de lutte contre la criminalité transfrontière et la migration irrégulière est intégrée à cet objectif de criminalité.”

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-question-du-jour/frontex-comment-sont-gardees-les-frontieres-de-l-union-europeenne-135792
    #frontières #migrations #réfugiés #audio #podcast #externalisation #contrôles_frontaliers #push-backs #refoulements

  • L’accusation de « génocide », une arme dans les grands conflits géopolitiques

    Alors que la Convention de 1948 contient l’engagement de prévenir et punir le crime de génocide, et donc l’obligation d’agir dès lors qu’un massacre à caractère génocidaire est identifié, ce risque a été souvent invoqué dès lors qu’il s’est agi de devoir justifier une intervention militaire.

    Bien sûr, la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye n’a pas rendu de jugement sur le fond ni accédé à la demande sud-africaine d’un cessez-le-feu immédiat à Gaza, où l’offensive israélienne, déclenchée à la suite des attaques du 7 octobre 2023, a fait plus de 26 000 morts (selon les bilans du ministère de la santé de la bande de #Gaza, administrée par le Hamas) et conduit au déplacement de 1,9 million de personnes, 80 % des habitants de l’enclave.

    Mais vendredi 26 janvier, en se déclarant compétente pour statuer sur des accusations d’acte de génocide, puis en demandant au gouvernement Nétanyahou d’« empêcher la commission de tout acte entrant dans le champ d’application » de la Convention sur le génocide à Gaza, les juges ont infligé à Israël un camouflet sans précédent.

    Même si le premier ministre israélien avait par avance dénié toute légitimité aux travaux de la CIJ, invoquant le « droit fondamental » d’Israël à se défendre, le coup est rude. Car cette décision ne peut qu’embarrasser les alliés les plus proches d’Israël, étant donné la force symbolique du crime de génocide, qui renvoie aux fondements mêmes du #droit_international.

    Adoptée au Palais de Chaillot, à Paris, par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1948, à l’unanimité, la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide est un texte fondamental de l’après-guerre, d’une importance comparable à la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée le lendemain au même endroit. Dans l’esprit des signataires, ces deux textes se complètent et se répondent : le premier affirme le droit à l’existence des groupes, tandis que le second grave dans le marbre les droits des individus.

    Forgé à partir de 1943 par le juriste américain Raphael Lemkin (1900-1959), le terme de « génocide » est défini comme l’ensemble des actes « commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ». Issu d’une famille juive galicienne ayant fui l’Europe après l’invasion de la Pologne, en 1939, Lemkin avait pleinement conscience de l’horreur de l’extermination des Juifs d’Europe, mise en œuvre par l’Allemagne nazie et ses alliés.

    Précédent arménien

    Mais, au moment où il s’est agi de définir conceptuellement le néologisme de « génocide », le juriste n’a pas uniquement les 6 millions de morts de la Shoah en tête. A de multiples reprises, celui-ci a réaffirmé l’importance du précédent arménien (plus de 1 million de personnes exterminées par les soldats ottomans en 1915-1916), et particulièrement d’un épisode qui avait profondément frappé les opinions publiques : le procès à Berlin, les 2 et 3 juin 1921, de Soghomon Tehlirian (1897-1960), un jeune survivant des massacres qui avait tué en pleine rue l’ancien grand vizir ottoman Talaat Pacha, considéré comme le grand architecte du génocide.

    Brillamment défendu par ses avocats, qui feront porter les débats sur l’horreur du crime commis en 1915 et l’impunité des bourreaux, Tehlirian est acquitté. Dans son autobiographie, Lemkin écrit : « Pourquoi un homme est-il puni quand il tue un autre homme ? Pourquoi le meurtre d’un million de personnes est un moindre crime que le meurtre d’un seul individu ? »

    Un demi-siècle plus tard, le grand historien Raul Hilberg, auteur de la monumentale Destruction des juifs d’Europe, considérait lui-même, dans l’ultime édition de son maître ouvrage (Folio histoire, 2006), que le génocide des Tutsis du Rwanda (800 000 morts d’avril à juillet 1994) relevait d’une logique génocidaire comparable à la Shoah. Pris ensemble, ces trois crimes de masse (ainsi que le massacre de Srebrenica en juillet 1995, lui aussi qualifié de « génocide » par la justice internationale) présentent des caractéristiques similaires : les discriminations et la persécution d’une minorité, la montée d’une rhétorique exterminatrice, et l’action d’un « Etat criminel ».

    Par la suite, les revendications autour d’autres grands drames du XXe siècle, comme l’Holodomor (la grande famine ukrainienne de 1932-1933), qualifié de génocide par le Parlement français en 2023, les exactions des Khmers rouges cambodgiens ou le massacre des Herero et des Nama de Namibie en 1904-1908 (50 à 80 % de la population assassinée par le colon allemand) ont également abouti à des reconnaissances internationales. Si bien qu’au fil du temps ce que l’avocat international Philippe Sands, auteur de Retour à Lemberg (paru en français chez Albin Michel en 2017), qualifie de « hiérarchie informelle » s’est imposé, faisant du génocide le « crime des crimes » et conduisant en retour à une multiplication des demandes de reconnaissance.

    Des démocraties réticentes

    Devenu un argument dans les grands conflits géopolitiques, le risque de génocide a souvent été invoqué dès lors qu’il s’est agi de devoir justifier une intervention militaire. C’est la crainte d’un génocide à Benghazi qui sera mise en avant par la France et le Royaume-Uni pour justifier l’intervention en Libye en 2011. Car, dans son article 1, la Convention de 1948 contient l’engagement de prévenir et punir ce crime, et donc l’obligation d’agir dès lors qu’un massacre à caractère génocidaire est identifié. Mais les démocraties occidentales, instruites par les échecs des dernières décennies, sont de plus en plus réticentes à l’idée d’interventions à l’étranger, fût-ce pour mettre fin à un génocide.

    En affirmant lancer sa guerre contre l’Ukraine dans le but de faire cesser un « génocide » dans le Donbass, le président russe Vladimir Poutine cherchait à la fois à galvaniser son opinion publique et à retourner contre l’Occident sa propre rhétorique. Cette fois-ci, devant la CIJ, l’Afrique du Sud poursuit d’autres objectifs : il s’agit à la fois de démontrer le deux poids, deux mesures des alliés d’Israël envers la Palestine et l’impuissance voulue de l’Occident, qui condamnerait la justice internationale à tourner indéfiniment à vide.

    Jérôme Gautheret (Rédacteur en chef au « Monde »)

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/29/l-accusation-de-genocide-une-arme-dans-les-grands-conflits-geopolitiques_621

    #génocide #CIJ #Israël

  • De plus en plus de voix soulignent que les pays qui ont coupé leur financement à l’UNRWA le lendemain même de l’ordonnance de la cour internationale sont certainement en train de participer elles-mêmes au crime de génocide.

    J’aurais même tendance à penser que c’est là la réponse des amis d’Israël à l’ordonnance de la cour. C’est plus qu’un « contrefeu » destiné à détourner l’attention : au contraire, c’est ce qu’en anglais on nomme « power move » (An aggressive action taken to demonstrate power and dominance.) Montrer que la décision de la cour non seulement n’aura aucun effet pratique pour les Palestiniens (les médias ne cessent déjà de répéter que l’ordonnance est inutile, parce qu’elle sera sans effet), mais qu’au contraire plus on ira dans sur cette voie (de la justice internationale) et plus les Palestiniens souffriront.

  • Craig Mokhiber sur X :
    https://twitter.com/CraigMokhiber/status/1750865846304416200

    The ICJ has ruled on provisional measures in the #Genocide case against Israel, which must immediately stop killing & harming people in #Gaza & inflicting destructive conditions on them, punish incitement, allow all humanitarian aid, save evidence & report next month. #Victory"

    Not a ceasefire exactly, but they are ordered to stop the acts that were complained about, killing, harming, destruction, etc. Tricky because Israel will likely continue but claim military necessity and lawful intent. The mandated report next month & court response will be crucial.

    But this is a massive victory. The court ruled that South Africa’s genocide claim is “plausible” at this stage and ordered Israel to stop all related acts and allow relief to the people of Gaza.

    Israel, accustomed to impunity, is unlikely to comply. Whether or not they report back to the court next month on measures, the Court will have to act again. And the Security Council can be called to act on non-compliance at any time. The complicit US will then likely veto action

    The General Assembly would then be convened to act. A strong resolution there could call for specific legal, economic, political, diplomatic, consular, organizational & other measures. And individual states and regional orgs should act as well, as a legal duty.

    In sum, while imperfect without a call for an unconditional ceasefire, the court’s order is a historic & powerful tool in the struggle against Israeli impunity, further empowering states, organizations & activists to step up pressure on the apartheid regime. Time for all to act.

    • On ne prend pas tant de pincettes avec les rogues states des divers axes maléfiques.

      C’est en somme, une forme d’indulgence, pour tout dire, parfaitement incompréhensible. Une sorte de dernière sommation, parce qu’on sait que vous êtes du bon côté, et que vous allez comprendre que bon, quoi, c’est juste un accident de parcours, et tout va aller mieux maintenant, on oublie tout mais arrêtez, s’il vous plaît, pardon.

      Et donc, on croit avoir vu qu’il y avait des potentialités de génocide, un petit peu comme quand on constate l’état de catastrophe naturelle, et qu’on est tous affligé en se demandant « pourquoi ici et maintenant ». On ne sait pas qui, quoi, mais on sait que bon, potentiellement, tous les palestiniens vont disparaître, et bon, on demande à Israël de faire quelque chose. Pourquoi Israël après tout ? Parce que bon, à priori, c’est le propriétaire des lieux, en quelque sorte. On dit parait-il la puissance occupante mais il faudrait demander à notre gvt si c’est le bon élément de langage autorisé pour qualifier cet état de fait. Et donc, on lui demande d’être le garant que cette situation apparente ne perdurera pas au delà d’un délai raisonnable.

      L’impression au final que le génocide est un petit peu comme une pandémie malheureuse, et qu’on aimerait bien que le laborantin fou du P4 voisin s’occupe de trouver une solution.

    • La version AFP
      https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/26/guerre-israel-hamas-la-cij-ordonne-a-israel-d-autoriser-l-acces-humanitaire-

      Le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, a, quant à lui, salué « un développement important » qui « isole Israël ». C’est « un avertissement important qu’aucun Etat n’est au-dessus de la loi », a réagi le ministre des affaires étrangères de l’Autorité palestinienne, Riyad Al-Maliki, dans un message vidéo. « Les Etats ont désormais l’obligation juridique claire de mettre fin à la guerre génocidaire d’Israël contre le peuple palestinien de Gaza », poursuit-il.

      Nulle mention des crimes de guerre et crimes contre l’humanité dans ces commentaires.

      APPLICATION DE LA CONVENTION POUR LA PRÉVENTION ET LA RÉPRESSION DU CRIME DE GÉNOCIDE DANS LA BANDE DE GAZA (AFRIQUE DU SUD c. ISRAËL) - CIJ
      https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20240126-ord-01-00-fr.pdf

      il est indiqué dans un communiqué à l’intention des médias publié le 10 novembre 2023 par le ministère sud-africain des relations internationales et de la coopération, le chef de cabinet du ministère s’est entretenu avec l’ambassadeur d’Israël auprès de l’Afrique du Sud le 9 novembre 2023 et l’a informé que celle-ci, même si elle « condamn[ait] les attaques menées par le Hamas contre des civils », considérait que la réponse d’Israël à l’attaque du 7 octobre 2023 était illicite et avait l’intention de déférer la situation en Palestine devant la Cour pénale internationale, en demandant que les dirigeants israéliens fassent l’objet d’enquêtes des chefs de #crimes_de_guerre, de #crimes_contre_l’humanité et de génocide.

      https://seenthis.net/messages/1038527

      #Israël #CIJ #droit_international

    • Oui, les mesures conservatoires, non contraignantes, sont insuffisantes et oui, comme dit ci-dessus (https://seenthis.net/messages/1038527#message1038544 ), inutiles, puisqu’Israël les appliquent déjà scrupuleusement sans qu’on ait eu besoin de le lui rappeler.

      Mais je te trouve bien sévère, @biggrizzly, puisqu’il est indéniablement positif que le « droit international » échappe (un répit ?…) au cimetière.
      cf. https://seenthis.net/messages/1038386

      Et, symboliquement, l’écrasante majorité (15 voix pour, 2 contre dont le juge ad hoc israélien) est une défaite juridique majeure pour Israël.

      On notera d’ailleurs que le juge israélien, Aharon Barak, vote pour les mesures 3 et 4 auxquelles seule Mme Sebutinde s’oppose. Qu’on en juge ;

      (3) L’État d’Israël doit prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir et punir l’incitation directe et publique à commettre le génocide à l’encontre des membres du groupe des Palestiniens de la bande de Gaza ;

      (4) L’État d’Israël doit prendre sans délai des mesures effectives pour permettre la fourniture des services de base et de l’aide humanitaire requis de toute urgence afin de remédier aux difficiles conditions d’existence auxquelles sont soumis les Palestiniens de la bande de Gaza ;

    • Disons que je suis sévère avec la façon dont notre communauté internationale va déblatérer, déblatère déjà, sur cette décision.

      Mais je ne vais pas plus en ajouter. Mes commentaires sont ridicules en comparaison des commentaires des premiers concernés.

      On avance, indéniablement, et lorsqu’une décision de cette importance est prise, la façon dont les acteurs réagissent est encore plus importante. Allons-nous vivre la mort de la CIJ, puis de l’ONU, comme on le suggère sur un autre fil ? Leur agonie est lente, mais pas forcément inéluctable. Si la communauté internationale réagit aussi fermement que pour la Russie, peut-être alors pourrons-nous espérer un monde meilleur, un jour.

    • Guerre Israël-Hamas : la CIJ ordonne à Israël d’autoriser l’accès humanitaire à Gaza et lui demande d’empêcher tout éventuel acte de « génocide »
      https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/26/guerre-israel-hamas-la-cij-ordonne-a-israel-d-autoriser-l-acces-humanitaire-

      La Cour internationale de justice ne se prononce pas sur la question de savoir si Israël commet ou non un génocide. Elle se prononce sur des ordonnances d’urgence avant d’examiner l’affaire sur le fond, un processus qui peut prendre des années.

      Le Monde fait partie des "réalistes". Il ne déblatère pas. Il te dit que tu peux te le carrer bien profond ton "génocide" avec des guillemets. Parce que tu vois, si tu ne l’avais pas encore compris, la CIJ elle n’a pas encore dit s’il y avait ou non génocide, ni si notre ministre des affaires étrangères est un guignol ou un crétin malveillant. Entre guillemets et c’est tout. Et si vous dites le contraire, c’est que vous êtes pro-russe...pardon, antisémite... faut suivre, et le Monde est là pour t’aider.

    • Je ne crois pas avoir suggéré que nous assistions nécessairement à la fin de cette fiction active qu’est le droit international. J’ai tout au plus publié une tribune qui soutient que ce n’est plus l’Occident qui est en mesure de l’invoquer mais, depuis l’attaque contre Gaza, un état du Sud, et que c’est un tournant.
      https://seenthis.net/messages/1036959
      J’ajouterais que si un droit international devait encore exister, il sera cette fois déterminé non seulement par le génocide nazi et la Deuxième Guerre mondiale, mais aussi par la guerre contre le terrorisme, à savoir nombre d’agressions armées occidentales depuis le Patriot act.
      Un droit international (si il en existe un) dont la constitution serait marquée au coin de rapports de forces multipolaires.

  • « Le cimetière du droit international que représente Gaza marque la fin d’un monde »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/25/le-cimetiere-du-droit-international-que-represente-gaza-marque-la-fin-d-un-m

    Dans le conflit israélo-palestinien, qui est marqué par la violence et le poids de considérations historiques, religieuses et géopolitiques, la voix du droit demeure encore largement inaudible. Dans un monde qui renoue dangereusement avec la pure logique de puissance, la rationalité juridique est pourtant plus légitime et nécessaire que jamais.

    La requête de l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de justice (#CIJ) [à La Haye, qui rendra sa décision le vendredi 26 janvier], qui accuse Israël de violer la Convention de 1948 sur la prévention et la répression du crime de génocide, représente, contrairement à ce qu’affirme le ministre des affaires étrangères français, Stéphane Séjourné, un rappel salutaire : ce conflit, en général, et la sécurité d’#Israël, en particulier, ne sauraient échapper aux prescriptions du droit international. L’exercice du droit à la légitime défense n’autorise pas la commission de crimes internationaux et Israël ne jouit pas de jure d’un quelconque régime d’exception.

    Plus largement, la plainte sud-africaine ouvre un chapitre exceptionnel dans le dossier juridique du #conflit_israélo-palestinien. Cette « exceptionnalité juridique » est liée à l’extrême gravité de l’accusation : dans sa requête de 84 pages et durant ses plaidoiries devant la Cour, l’Afrique du Sud démontre rigoureusement pourquoi, selon elle, Israël commet un « #génocide » – une notion particulièrement chargée qui revêt un sens juridique bien établi.

    Pretoria a notamment rappelé que plus de 23 000 #Palestiniens de #Gaza – dont une majorité de femmes et d’enfants – ont été tués, plus de 60 000 blessés, et que l’entièreté de la population gazaouie, privée d’eau, de nourriture, de médicaments et de logements, est soumise à des conditions d’existence susceptibles d’entraîner sa disparition – actes potentiellement constitutifs d’un génocide.

    Caractère plausible du risque

    Les avocats sud-africains ont en outre mis en exergue, à travers de nombreux discours de hauts responsables politiques et militaires israéliens déshumanisant la population gazaouie dans son ensemble, ce qu’ils considèrent être une intention génocidaire manifeste. Ces actes et ces discours doivent aussi, rappellent les avocats sud-africains, s’interpréter dans un continuum plus large d’exactions et de violations des droits des Palestiniens depuis plus de soixante-quinze ans – une période durant laquelle Israël a conduit une politique d’apartheid, a occupé et colonisé le territoire palestinien et a exercé un blocus total de la bande de Gaza en violation du droit international.

    Si Israël s’est efforcé de démontrer qu’il n’existe aucune intention génocidaire, et que ses opérations militaires à Gaza sont exclusivement destinées à défendre sa population contre la menace existentielle que représenterait le Hamas, l’insistance de ses dirigeants à nier l’existence d’un « peuple palestinien » et à vouloir poursuivre une guerre aux conséquences catastrophiques pour la population pourrait pousser la Cour à reconnaître le caractère plausible du risque de génocide et à ordonner des mesures conservatoires en accord avec sa jurisprudence récente concernant le Myanmar et l’Ukraine.

    A cette « exceptionnalité juridique », s’ajoute une « exceptionnalité politique » liée aux conséquences possibles de la décision de la CIJ. La reconnaissance d’un risque de génocide de la population gazaouie constituerait une onde de choc mondiale. Juridiquement, non seulement Israël pourrait être contraint de mettre un terme à ses opérations meurtrières dans la bande de Gaza, mais ses principaux alliés, notamment les Etats-Unis, devraient reconsidérer leur soutien inconditionnel à un Etat désormais suspecté de génocide. Le non-respect par Israël de la décision (obligatoire) de la Cour pourrait donner lieu à des sanctions internationales.

    Cette évolution marquerait un tournant politique majeur tant Israël bénéficie d’une impunité de facto, en dépit de sa violation manifeste du droit international. La colonisation de la Cisjordanie, le blocus total de la bande de Gaza et la privation du droit du peuple palestinien à disposer de lui-même ont été condamnés par de multiples résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale des Nations unies.

    Contestation de l’hégémonie occidentale

    Plusieurs rapports des commissions d’enquête des Nations unies ont en outre dénoncé les crimes internationaux commis par Israël à l’encontre de la population palestinienne, y compris des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. La décision de la CIJ, qui pourrait aussi inciter la Cour pénale internationale à agir avec plus de célérité, marquerait en ce sens un changement de paradigme majeur.
    Enfin, cette requête constitue une exceptionnalité « symbolique » et géopolitique en raison de l’identité des deux parties impliquées. Israël est censé offrir un Etat aux juifs victimes d’un antisémitisme séculaire dont la dimension criminelle a atteint un niveau paroxystique avec la Shoah, et l’Afrique du Sud de Nelson Mandela (1918-2013) a vaincu l’apartheid et son idéologie fondée sur le « suprémacisme blanc » et la ségrégation raciale.

    Aujourd’hui, la requête de l’Afrique du Sud porte en elle le bouleversement du monde en cours : le discours sur l’universalisme des #droits_humains et le respect du #droit_international n’est plus assumé et incarné par l’#Occident mais par une démocratie du Sud. En cela, la guerre à Gaza nourrit de manière décisive la contestation de l’hégémonie occidentale et de sa prétention au magistère moral.

    La duplicité de l’Occident dès lors qu’il s’agit de respect du droit international par Israël sape l’édifice rhétorique et juridique qu’il a lui-même forgé à la fin de la seconde guerre mondiale. Le cimetière du droit international que représente Gaza marque la fin d’un monde.

    Béligh Nabli est professeur des universités en droit public à l’UPEC-Paris XII, auteur de Relations internationales. Droit. Théorie. Pratique (Pedone, 2023).
    Johann Soufi est avocat spécialisé en droit international et chercheur associé au Centre Thucydide de l’université Paris-II-Panthéon-Assas.

  • KLAGESCHRIFT ZUR EINLEITUNG EINES VERFAHRENS VOR DEM IGH WEGEN VÖLKERMORD DURCH ISRAEL
    https://widerstaendig.de/klageschrift-suedafrikas

    Cette traduction allemande n’est qu’un produit d’un moteur de traduction automatique, mais elle accessible car en format HTML. Pour la citer il faudrait la vérifier auprès de l’original anglais référencé dans le texte.

    Klageschrift im englischen Originaltext
    https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20231228-app-01-00-en.pdf

    Übersetzung von DeepL mit einigen wenigen Korrekturen von RA B. Hopmann

    Inhalt:

    I. Einleitung

    II. Zuständigkeit

    III. Sachverhalt (Die Tatsachen)

    A. Einleitung

    B. Hintergrund

    C. Völkermörderische Handlungen gegen das palästinensische Volk

    D. Äußerungen völkermörderischer Absichten gegen das palästinensische Volk

    E. Anerkennung der völkermörderischen Absichten

    IV. Die Anspruchsgrundlagen Südafrikas

    V. Die Klageanträge

    VI. Antrag auf einstweilige Maßnahmen

    A. Zwingende Umstände erfordern vorläufige Maßnahmen

    B. Die prima-facie Zuständigkeit des Gerichts

    C. Die Rechte, deren Schutz begehrt wird, ihr plausibler Charakter und der Zusammenhang zwischen diesen Rechten und den beantragten Maßnahmen

    D. Die Gefahr eines irreparablen Nachteils und die Dringlichkeit

    E. Beantragte vorläufige Maßnahmen

    #Israël #Palestine #génocide #justice #droit_international

  • Réarmer, vous avez dit réarmer ?
    https://www.obsarm.info/spip.php?article635

    Pour ses vœux aux Français·es, le Président n’avait que ce seul mot à la bouche, le déclinant à toutes les sphères de la société : « réarmement économique » ; « réarmement de l’État et de nos services publics » ; « réarmement civique » ; « réarmement industriel, technologique et scientifique » « réarmement de la Nation » ; « réarmement de notre souveraineté européenne »… Le millésime 2024 selon Emmanuel Macron a décidément un goût bien amer. Loin de favoriser la paix, il mise sur la guerre pour renforcer l’économie et (...) #Revue_Damoclès

    / #Contrôle_des_exportations, Transferts / exportations, #Coopération_industrielle, #Armes_nucléaires, #Droit_international_humanitaire, #Guerres, #Actions_contre_la_guerre, #Israël, La (...)

    #Transferts_/_exportations #La_une