• « Affirmer que la #transition_énergétique est impossible, c’est le meilleur moyen de ne jamais l’engager »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/22/affirmer-que-la-transition-energetique-est-impossible-c-est-le-meilleur-moye

    Partant du double constat selon lequel il n’y a jamais eu, par le passé, de remplacement d’une source d’énergie par une autre ; et que les transformations énergétiques se sont toujours faites de manière additive (les énergies s’ajoutant les unes aux autres), certains historiens en déduisent, à tort selon nous, qu’il n’y aurait aucun horizon pour une sortie des fossiles. Cette sortie des fossiles (le « transitioning away from fossil fuels », dans le langage forgé à la COP28) serait donc condamnée par avance.

    Tel est le message récurrent de Jean-Baptiste Fressoz [chroniqueur au Monde] notamment, dans ses ouvrages ou tribunes, qui visent toutes à réfuter ce qu’il considère comme « la fausse promesse de la transition ».

    Or, ce déclinisme écologique est non seulement grandement infondé, mais également de nature à plomber les ambitions dans la lutte contre le changement climatique. Affirmer que la transition est impossible, c’est le meilleur moyen de ne jamais l’engager. A rebours de ce défaitisme, nous voulons ici affirmer, avec force, qu’il est possible de réussir cette transition.

    Certes, à l’exception des années de crise – financière en 2008-2009, sanitaire en 2020-2021 –, les émissions de CO2 n’ont jamais cessé d’augmenter, bien que sur un rythme ralenti, d’environ + 1 % annuel au cours des années 2010, contre + 3 % annuels dans les années 2000. Car, dans le même temps, la population mondiale continuait à augmenter, tout comme la satisfaction des besoins énergétiques d’une part croissante de cette population.

    Pourtant le désempilement des énergies a déjà lieu dans certaines régions du monde : c’est le cas en Europe, par exemple, qui a engagé sa transition énergétique. Parallèlement, des acteurs de plus en plus nombreux – Etats, entreprises, chercheurs, citoyens – intègrent aujourd’hui la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans leurs stratégies et comportements. L’ambition n’est pas encore assez affirmée, la mise en œuvre des transformations pas assez rapide et efficace, mais le mouvement est enclenché. Comment l’ignorer ?

    Sobriété, efficacité et investissements
    Le 11 janvier, Fatih Birol, directeur de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), indiquait que les capacités installées dans l’année en énergies renouvelables avaient augmenté de 50 % entre 2022 et 2023. Pour la part des renouvelables dans la production d’électricité, l’AIE attend le passage de 29 % à 42 % en 2028 (de 12 % à 25 % pour les seules énergies éolienne et solaire). Depuis 1975, le prix des panneaux photovoltaïques est passé de 100 dollars par watt à moins de 0,5 dollar par watt aujourd’hui, soit une réduction de 20 % du coût pour chaque doublement des capacités installées ; c’est la mesure du taux d’apprentissage de la technologie. Et alors que la question du stockage de l’électricité devient de plus en plus cruciale, on constate le même taux d’apprentissage pour les batteries : depuis 1992, chaque fois que double le nombre de batteries produites, leur coût diminue de 18 %.

    Il est clair que ces progrès spectaculaires ne contredisent pas la thèse de l’additivité des énergies : si depuis 2016 les investissements dans les énergies décarbonées dépassent largement les investissements dans les énergies fossiles, ces derniers ont à nouveau augmenté après la baisse de 2020. Et la sortie des fossiles ne se vérifiera vraiment que le jour où l’augmentation de la production d’énergie décarbonée sera supérieure en volume à celle de la consommation totale d’énergie.

    Pour atteindre cet objectif, sobriété et efficacité énergétique sont indispensables afin de maîtriser la croissance de la demande. Mais il est également évident que sobriété et efficacité ne suffiront pas. Pour atteindre le plafonnement des émissions avant 2030, il faudra décupler les investissements dans ces énergies décarbonées, et notamment dans les pays du Sud, afin de faire baisser le volume des énergies fossiles : c’est la condition sine qua non pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris. Nous sommes conscients qu’il s’agit d’un processus long et difficile, mais osons le dire : il n’y a pas d’autre solution, et nous pouvons y arriver.

    De nouvelles alliances s’imposent
    Serions-nous condamnés par l’histoire ? Faut-il prendre acte de notre impuissance supposée, ou poser un renversement complet du système comme condition préalable à la transition ? Dans les deux cas, cela serait très risqué, et franchement irresponsable.

    Car il n’y a pas de fatalité ! On trouve sur le site du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) une citation d’Albert Camus : « Pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prédire, mais de le faire. » C’est dans cette perspective que s’inscrivent tous les acteurs des COP et des négociations internationales – que certains stigmatisent comme un « grand cirque » –, pour qui « dire, c’est faire ».

    Evidemment, dire ne suffit pas, et il faut aussi mobiliser des moyens puissants, politiques et financiers. Il faut également affronter ceux – lobbys industriels et politiques – qui, par fatalisme ou par intérêt, freinent cette transformation. Enfin, comme le suggère le philosophe Pierre Charbonnier, la création de nouvelles alliances s’impose entre ceux qui ont compris que la transition servait leurs intérêts, et surtout ceux de leurs enfants.

    La démarche des sciences de la nature et de la physique consiste à s’appuyer sur des constats d’observation pour en tirer des lois immuables. Elle s’applique mal cependant aux sciences sociales. Mais ces obstacles ne doivent pas empêcher de penser l’avenir, à la manière de Gaston Berger, le père de la prospective, qui ne cessait de rappeler : « Demain ne sera pas comme hier. Il sera nouveau et il dépendra de nous. Il est moins à découvrir qu’à inventer. »

    Signataires : Anna Creti, économiste, chaire Economie du climat, université Paris-Dauphine ; Patrick Criqui, économiste, CNRS, université Grenoble-Alpes ; Michel Derdevet, président de Confrontations Europe, Sciences Po ; François Gemenne, politiste, HEC Paris ; Emmanuel Hache, économiste, IFP énergies nouvelles et Institut de relations internationales et stratégiques ; Carine Sebi, économiste, chaire Energy for Society, Grenoble Ecole de Management.

  • Médecins diplômés à l’étranger : le gouvernement prolonge les autorisations de travail des praticiens ayant échoué au concours
    https://www.lemonde.fr/sante/article/2024/01/22/medecins-diplomes-a-l-etranger-le-gouvernement-prolonge-leurs-autorisations-

    Médecins diplômés à l’étranger : le gouvernement prolonge les autorisations de travail des praticiens ayant échoué au concours
    Le Monde avec AFP
    Un peu de répit administratif pour les médecins qui ont un diplôme étranger et qui étaient menacés de perdre leur poste s’ils avaient échoué à un concours sélectif cette année. Le gouvernement a annoncé lundi 22 janvier prolonger leurs autorisations de travail et permettre aux lauréats du concours de rester dans leurs services actuels.
    Dans un communiqué, la ministre du travail, de la santé et des solidarités, Catherine Vautrin, explique vouloir, à la demande du président de la République, « sécuriser la situation des Padhue (praticiens à diplôme hors Union européenne), médecins devenus indispensables à notre système de santé ». Les médecins qui n’ont pas eu le concours « ne seront pas laissés sans solution : le gouvernement les autorisera à continuer de travailler durant les mois à venir », précise Catherine Vautrin.
    Ces praticiens, qui travaillent souvent depuis plusieurs années dans les établissements de santé français, étaient cette année contraints de réussir un concours appelé « épreuves de vérification des connaissances » (EVC), pour pouvoir continuer à exercer. Un régime dérogatoire qui permettait auparavant aux établissements d’embaucher des non-lauréats sous divers statuts précaires s’est « éteint » au 31 décembre 2023, rendant impossible leur maintien en poste.
    Le nombre limité de places à ce concours, avec 2 700 postes pour plusieurs milliers de candidats, dont certains le passent à l’étranger, avait laissé une grande partie d’entre eux sur le carreau. Certains se sont même retrouvés sans papiers, car leur carte de séjour est souvent conditionnée à leur travail. Les chefs de service et syndicats hospitaliers avaient aussi dénoncé la répartition territoriale prévue pour les lauréats du concours, dont l’affectation est faite par les services de l’Etat, estimant qu’elle allait priver de nombreux services d’une partie de leurs bras.
    La prolongation des autorisations de travail pour les médecins qui ont un diplôme étranger vaudra jusqu’à « la publication des textes d’application de la loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels [dite loi Valletoux], qui permettra la délivrance d’attestations provisoires d’exercice dans l’attente d’un nouveau passage des EVC en 2024 », précise la ministre.
    « La situation des près de 2 700 candidats lauréats » est elle aussi « clarifiée » : « pour garantir la continuité des soins et ne pas désorganiser les services (…), les lauréats exerçant déjà sur le territoire national seront maintenus dans leurs fonctions et structures actuelles », assure-t-elle. « Les autres lauréats choisiront leurs postes dans les prochaines semaines. »
    « Notre système de santé souffre d’un manque de moyens humains. Nous ne pouvons nous passer de ces milliers de femmes et d’hommes qui contribuent à assurer l’offre de soins », a déclaré Catherine Vautrin à l’Agence France-Presse. « Il était temps, c’est un premier élément de réponse à cette situation d’urgence qui était inacceptable », a réagi la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet. Mais des points « restent à régler », dont la durée « trop courte » des titres de séjour. Pour ceux qui se voient prolongés jusqu’aux EVC 2024, « si c’est pour refaire le même concours ça ne sert à rien », a-t-elle ajouté, estimant que ce concours est « trop académique » et « discriminant pour des médecins qui bossent soixante heures par semaine ».

    #Covid-19#migrant#migration#france#PADHUE#personnelmedical#immigration#systemedesante#economie#sante#santementale#regularisation

  • Ce que coûte vraiment l’aide médicale d’État

    En décembre 2023, le projet de loi « immigration » a finalement été adopté en excluant le volet dédié à l’aide Médicale d’État (AME). Mais la première ministre d’alors, Élisabeth Borne, avait promis, dans un courrier envoyé au président du Sénat, d’engager une réforme de l’AME au premier trimestre 2024. La question est de savoir si cet engagement est toujours d’actualité avec l’arrivée à Matignon d’un nouveau premier ministre, Gabriel Attal.

    Le projet de loi « immigration » illustre combien les idées défendues par l’extrême droite trouvent aujourd’hui une nouvelle audience jusque dans la majorité présidentielle.
    Un droit non automatique et complexe à obtenir

    L’AME permet aux sans-papiers de bénéficier d’une couverture des frais médicaux pendant un an renouvelable s’ils peuvent prouver leur présence en France depuis au moins 3 mois et si leurs ressources ne sont pas supérieures à 810 euros mensuels.

    L’AME ne concerne qu’une partie des migrants, les plus précaires par leur statut administratif et les plus pauvres. Il s’agit d’un droit quérable (il faut le demander), qui plus est particulièrement complexe à obtenir du fait de la lourdeur des démarches administratives pour des personnes en difficultés financières et linguistiques qui craignent d’être signalées aux autorités et expulsées.
    Remplacer l’AME par une aide médicale d’urgence présentée comme moins onéreuse

    Dans le projet de loi « immigration » qui a finalement été adopté en décembre 2023, il n’est plus fait état de l’AME. Mais une réforme de l’AME était intégrée dans une version précédente proposée par le Sénat. Elle visait à « transformer » l’AME en aide médicale d’urgence (AMU) pour la réserver aux soins vitaux. Reste à savoir si c’est sur cette base que pourrait être modifié ce dispositif en 2024.

    Si la réforme de l’AME devait suivre les préconisations du Sénat, les soins de premier recours ne seraient plus pris en charge par l’Assurance maladie et il faudrait attendre d’être à l’article de la mort pour pouvoir être soigné à l’hôpital. L’AMU existe déjà. Il ne s’agit donc pas de transformer l’AME en AMU mais tout simplement de supprimer l’AME.
    L’AME, c’est 0,5 % des dépenses annuelles de santé

    C’est un rapport parlementaire récent qui est à l’origine du projet de remplacement de l’AME par une AMU. Selon ce rapport, l’AMU ne coûterait que 70 millions d’euros contre 1,1 milliard d’euros pour l’AME de droit commun dont bénéficiaient 350 000 patients en 2021.

    Or l’AME en tant que telle ne représente qu’une goutte d’eau dans les dépenses de santé, soit 0,468 %. Ainsi on peut se demander si c’est vraiment son coût qui pose problème, ou si ce ne sont pas plutôt les patients concernés qui sont visés, c’est-à-dire les sans-papiers.

    Pour obtenir ce pourcentage de presque 0,5 %, les dépenses de 1,1 milliard d’euros correspondants à l’AME sont comparés à l’ensemble des dépenses de santé qui s’établissaient à 235,8 milliards d’euros pour l’année 2022.

    Le montant de 1,1 milliard est jugé trop élevé pour sauver des migrants. Mais à titre de comparaison, selon certaines estimations, les assurés paient, par exemple, 3 milliards d’euros par an en dépassements d’honoraires à l’hôpital ou chez le médecin de ville (on parle de « dépassements d’honoraires » quand les soins sont facturés à des tarifs qui dépassent ceux fixés par l’Assurance maladie).

    De plus, s’il faut attendre que les patients soient gravement malades pour les prendre en charge, la dépense de santé ne sera pas seulement différée, elle sera majorée. Les malades seront soignés dans des situations plus critiques qui nécessiteront des soins plus lourds donc plus coûteux. La collectivité a toujours intérêt à prendre en charge précocement les malades à la fois au nom de la santé publique mais aussi au nom des finances publiques.
    Le risque d’aggraver la surcharge des services dédiés aux plus précaires

    Il en va particulièrement des sans-papiers dont la vie en France est particulièrement difficile du fait de la précarité des revenus et du délabrement des logements qui accroissent substantiellement la probabilité d’être malade. On ne comprend pas bien ce que la collectivité a à gagner à laisser les problèmes de santé physique et mentale s’aggraver. La santé des uns dépend aussi de celle des autres.

    La transformation de l’AME en AMU ne supprimerait pas la maladie. Elle ne ferait qu’interdire la prise en charge des frais de santé si le pronostic vital n’est pas engagé. En supprimant l’AME, on organiserait le renoncement aux soins et on planifierait le retard de soin. Le risque serait d’aggraver le marasme de l’hôpital, épuisé par la crise Covid.

    On programmerait ainsi une surcharge insoutenable des Permanences d’accès aux soins de santé dédiées aux personnes démunies (PASS) et des Services d’accueil et d’urgences (SAU) déjà saturés. Cela planifierait aussi un surcroît de mortalité chez les migrants comme le montre le cas espagnol.
    Les sans-papiers avec AME ne vont pas davantage chez le médecin

    L’hôpital, et notamment ses services d’urgence, serait impacté par une suppression de l’AME du fait de l’arrivée des personnes malades dans des situations de santé plus dégradées. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue le fait que ce sont les soins de ville, les séances chez le généraliste, qui sont visés par cette mesure.

    l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé IRDES a comparé la consommation de soins en médecine de ville d’un échantillon de la population bénéficiaire de l’AME avec un échantillon de la population couverte par la Couverture maladie universelle complémentaire (la CMU-C, qui s’appelle aujourd’hui la Complémentaire santé solidaire, est destinée aux personnes à faibles revenus en situation régulière).

    La comparaison est menée avec les mêmes caractéristiques d’âge et de sexe, les mêmes critères de revenus pour être éligibles (moins de 810 euros mensuels) et sur un panier de soins à couverture identique, ce qui exclue de l’étude les soins dentaires et d’optique qui sont moins bien pris en charge par l’AME que par la CMU-C.

    Il en ressort que pour les deux populations, l’assurance santé permet surtout d’accéder aux généralistes avant d’arriver à l’hôpital ou aux urgences quand les choses sont aggravées, ce que précisément le projet de loi veut supprimer.

    Il n’y a pas de surcroît de consommation de soins par les sans-papiers. En d’autres termes, les sans-papiers qui bénéficient de l’AME ne se rendent pas plus chez le médecin que les personnes en situation régulière dont la situation de vie est comparable. Ce n’est pas le titre de séjour qui dicte la consommation mais l’état de santé.
    Près d’une personne éligible sur deux n’a pas l’AME

    Le mythe de « l’appel d’air » a pourtant la vie dure. Ce serait pour séjourner à l’hôpital Avicenne de Bobigny en Seine-Saint-Denis, ou ailleurs en France, que les migrants prendraient la mer sur des canots de fortune. Ils décideraient de traverser le désert libyen, d’affronter les passeurs et de risquer leur vie pour se précipiter gaiement aux guichets de l’administration française et affronter le labyrinthe administratif décuplé par la détérioration des services publics.

    La réalité est tout autre. Comment l’AME pourrait-elle décider des migrations alors que les migrants ne la demandent pas ? Alors même qu’ils tombent malades sur le sol français ? En effet, l’une des caractéristiques essentielles de l’AME est qu’elle fait l’objet d’un non recours exceptionnel de 49 %. Même après cinq années ou plus de résidence en France, 35 % des personnes sans titre de séjour n’ont pas l’AME.
    Le mythe de « l’appel d’air » battu en brèche par les études scientifiques

    La thèse du tourisme médical ou de l’appel d’air est absurde. Selon un rapport du Comede (2019), dans la plupart des cas (70 % pour l’ensemble des pathologies), les migrants découvrent leur maladie après leur arrivée en France. Rien dans les travaux scientifiques ne vient corroborer la thèse de l’appel d’air.

    Aucune étude n’a montré que les migrants venaient en France pour des raisons de santé. Au contraire, la santé est une raison secondaire. Aucune justification médicale ne vient soutenir la suppression de l’AME. Les médecins y voient au contraire une atteinte à ce qui fait la fierté de leur métier. Le débat sur l’AME est exemplaire de l’impuissance des scientifiques à ébranler les spéculations des dogmatiques.
    Les immigrés contribuent aux budgets sociaux

    Alors qu’il n’y a pas de spécificité de la santé des migrants, la prise en charge de leurs soins est systématiquement agitée en problème politique distinctif. Tout ça parce que derrière la dénonciation de l’AME, c’est l’immigration qui est attaquée en brandissant une AME fantasmée alimentée par de nombreuses désinformations listées par Médecins du monde.

    Les immigrés sont des contributeurs nets aux budgets sociaux (ils contribuent davantage qu’ils ne reçoivent de prestations sociales). Les immigrés actifs, âgés de 25 à 54 ans et représentant environ 50 % de la population immigrée en moyenne entre 2016 et 2022, ne génèrent initialement aucun coût en matière d’éducation ou de prestations sociales à leur arrivée en France.

    En bonne santé, en raison des exigences d’entrée strictes de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), ces travailleurs étrangers cotisent et ont un faible impact sur les dépenses des caisses de sécurité sociale. Les immigrés âgés de 55 ans et plus, représentant environ 30 % des immigrés en moyenne entre 2016 et 2022, contribuent de manière indirecte à alléger les dépenses de santé en France.
    L’AME : un problème d’intégration dans le système de santé, non d’immigration

    Les problèmes de l’AME ne sont pas ceux de l’immigration mais ceux de l’absence d’intégration. L’AME est un système administratif parallèle à la Sécurité sociale et un loupé de l’universalisation de la protection santé. Toute l’histoire de la sécurité sociale a consisté à permettre à tous les résidents de bénéficier de la même couverture de base.

    En isolant les sans-papiers des autres, il devient facile de les montrer du doigt pour laisser s’exprimer le ressentiment d’une partie de la population dont les frais de santé sont en augmentation, du fait des stratégies de privatisation de la santé.

    L’absence de régime commun permet de sortir les personnes sans titre de séjour de la société comme s’ils n’étaient pas des égaux ou des semblables. C’est au contraire la fusion de l’AME dans le régime général de Sécurité sociale qui garantira un droit inaliénable aux soins de santé, protégeant la dignité de tout être humain.

    https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/ce-que-coute-vraiment-l-aide-medicale-d-etat-988286.html

    #France #coût #économie #aide_médicale_d'Etat (#AME) #santé #migrations #asile #réfugiés #budget #aide_médicale_d'urgence (#AMU) #sans-papiers #appel_d'air #welfare_state

    via @karine4

    –—

    ajouté à la métaliste sur le lien entre #économie (et surtout l’#Etat_providence) et la #migration :
    https://seenthis.net/messages/971875

    • Le mythe de « l’appel d’air » battu en brèche par les études scientifiques
      La thèse du tourisme médical ou de l’appel d’air est absurde. Selon un rapport du Comede (2019), dans la plupart des cas (70 % pour l’ensemble des pathologies), les migrants découvrent leur maladie après leur arrivée en France. Rien dans les travaux scientifiques ne vient corroborer la thèse de l’appel d’air.
      Aucune étude n’a montré que les migrants venaient en France pour des raisons de santé. Au contraire, la santé est une raison secondaire. Aucune justification médicale ne vient soutenir la suppression de l’AME. Les médecins y voient au contraire une atteinte à ce qui fait la fierté de leur métier. Le débat sur l’AME est exemplaire de l’impuissance des scientifiques à ébranler les spéculations des dogmatiques.

      #appel_d'air

  • « La loi “asile et immigration” réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/19/la-loi-asile-et-immigration-reduit-les-personnes-etrangeres-au-statut-d-une-

    « La loi “asile et immigration” réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail »
    Johanna Dagorn Sociologue
    Corinne Luxembourg Géographe
    Mars 2020, 20 heures, les applaudissements aux balcons saluent l’engagement professionnel de femmes et d’hommes qui œuvrent pour que perdure la vie : soin, ravitaillement, hygiène, parfois même éducation… Le pays découvrait ces personnes indispensables à la solidité et au fonctionnement de notre société, à nos communs. Mais l’applaudimètre n’a pas signifié une reconnaissance sociale, et encore moins financière. Une fois cette parenthèse passée, le monde n’a pas changé : les invisibles ont été ramenés à leur ancienne invisibilité.
    Ces femmes et ces hommes nettoient les rues, les bureaux ou livrent des repas. Leur réalité est marquée par des horaires de travail fragmentés, rendant leur temps libre pratiquement inutilisable. Pour la plupart, ils appartiennent à ces minorités visibles, indépendamment de leur nationalité. En 2021, selon l’Insee, 14 % des immigrés en emploi ont le statut d’indépendant. Les jeunes hommes qui livrent des repas à domicile sont dans des conditions de travail extrêmement précaires. La contractualisation à travers des plates-formes électroniques et les discriminations à l’embauche les rendent particulièrement vulnérables.
    Les dangers de la circulation, les conditions météorologiques difficiles et la baisse de revenus de 10 % à 30 % actuellement constatée par les livreurs des plates-formes accentuent encore leur vulnérabilité. Les livreurs doivent couvrir des distances de plus en plus grandes pour tenter de maintenir leurs revenus. Dans ce contexte, le faible coût de livraison imposé par les plates-formes place les personnes consommatrices dans la position d’être servies presque instantanément, leur permettant d’employer de fait une domesticité systématiquement « invisibilisée ».
    Quant aux femmes, elles occupent une part significative des emplois liés au secteur des soins à la personne, le « care » : d’après une étude de la Dares, en 2021, 13 % des femmes immigrées en emploi travaillent comme agentes d’entretien. Ce chiffre est plus élevé que celui des femmes non immigrées en emploi, qui est de 6 %. Les femmes immigrées représentent par ailleurs 6 % des aides à domicile et aides ménagères et 9 % des aides-soignantes et assistantes maternelles.
    En utilisant comme base de l’octroi aux sans-papiers du titre de séjour « métiers en tension » la liste de ces métiers par région publiée au Journal officiel, la loi « asile et immigration » votée le 20 décembre 2023 réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail. Anonymes et réinvisibilisés, déchus de cette fugace reconnaissance nationale, ces femmes et ces hommes ne sont considérés que comme des bras et des corps dévolus à l’économie. Ils vivent de plus en plus souvent l’injonction à rejoindre un auto-entrepreneuriat aux allures de salariat déguisé pour les hommes, ou les métiers de service à la personne mal considérés et mal rémunérés pour les femmes immigrées, qui, au lieu de connaître le plafond de verre, butent sur un plancher collant.
    La loi « asile et immigration », si elle est promulguée, renforcera les inégalités sociales et discriminatoires entre les hommes, les femmes et les personnes désignées comme « éloignées de l’emploi » ou réduites à leur employabilité. Dans une logique adéquationniste, il reviendrait une nouvelle fois aux personnes les plus faibles de répondre aux exigences du marché. Au lieu de poser les bonnes questions, comme celle de la reconnaissance sociale et économique des métiers qui soutiennent nos sociétés, le « marché », soutenu par le législateur, va trier les « bons » et les « mauvais » immigrés, c’est-à-dire ceux qui s’adapteront ou non à cette logique adéquationniste. Cette approche, outre qu’elle pose des questions de justice sociale et économique, néglige une réflexion sur la véritable valeur de ces métiers pour nos sociétés.
    L’ambivalence de cette loi réside dans sa capacité à escamoter le besoin économique dans un tour de passe-passe idéologique tout en rendant visibles, mais sous un autre angle, ces personnes invisibles. Voilà les anciens « premiers de corvée » du Covid-19 à nouveau désignés comme la source principale des problèmes nationaux. Criminalisés par la loi « immigration », ils seront discriminés, au sens de la loi du 16 novembre 2001 sur les vingt-cinq critères de discrimination, puisque, au titre d’une origine nationale non communautaire, le droit pénal ne s’appliquera plus de la même façon sur le sol national.
    En pratique, cette loi interdira durant cinq ans l’obtention de prestations sociales, telles les allocations logement ou familiales. Elle établira des quotas annuels pour les entrées sur le territoire, durcira les conditions d’obtention du titre de séjour, exigera une caution pour les étudiants étrangers, donnant de fait la priorité aux étudiants ayant des ressources financières. De plus, elle vise à instaurer la primauté au droit du sang sur le droit du sol.
    Les législateurs ayant voté cette loi ont donc décidé de rendre ces personnes définitivement visibles d’un point de vue pénal. De plus, ils ont entaillé la lutte institutionnelle contre les discriminations en s’attaquant à l’un des critères de la loi de 2001. Cette approche soulève des préoccupations quant à l’équité et à la justice, remettant en question la protection des droits fondamentaux. Le vote de ce texte va au-delà d’un simple renforcement des frontières ethniques. Il représente une fissure dans le pacte républicain d’égalité.
    Johanna Dagorn est sociologue (université de Bordeaux) ; Corinne Luxembourg est géographe (université Sorbonne-Paris-Nord)

    #Covid-19#migrant#migration#france#loiimmigration#economie#maindoeuvre#discrimination#droit#travailleurmigrant#egalite

  • « Les réformes du droit du travail, au motif de le “simplifier”, le font disparaître », Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT ; Judith Krivine, présidente du Syndicat des avocats de France ; Kim Reuflet, présidente du Syndicat de la magistrature

    Depuis 2008, les différents gouvernements, unanimement, se sont appliqués à mener des réformes du #droit_du_travail qui, au motif de le « simplifier », le font disparaître. Encore en décembre 2023, le ministre de l’#économie annonçait qu’il fallait raccourcir à deux mois le délai de contestation d’un licenciement, car « il faut des mesures drastiques de simplification pour les entreprises ». Qu’un salarié dispose de droits et se défende lorsque ceux-ci sont bafoués est traité comme un facteur de « complexité », comme s’il s’agissait d’une formalité administrative !

    La vie des entreprises s’est déjà fortement « simplifiée » depuis 2008, ainsi qu’en témoigne la diminution continue du #contentieux_prud’homal. Différents rapports (notamment « Les affaires prud’homales dans la chaîne judiciaire de 2004 à 2018 », Evelyne Serverin, 2019) démontrent que les réformes successives ont déjà eu pour effet de décourager et d’entraver l’action des salariés devant la juridiction prud’homale .

    Le délai dont dispose un salarié pour contester son #licenciement est passé en quelques années de trente à cinq ans (2008), à deux ans (2013), puis à douze mois (2017). Avec cette réduction des prescriptions, associée à la mise en place de la #rupture_conventionnelle, en 2008, du barème plafonnant drastiquement l’#indemnisation des salariés licenciés abusivement, depuis 2017, et de la complexification de la procédure de saisine, en 2016, le nombre de saisines est passé de 176 687 en 2009 à 99 147 en 2018, puis à 88 958 en 2021. De 2009 à 2018, le contentieux a donc diminué de 44 % et a continué de diminuer de 10 % de 2018 à 2021. Et les femmes restent toujours minoritaires à faire respecter leurs droits vis-à-vis de leurs employeurs (40,3 % des saisines en 2018).

    Insécurité du chômage

    La baisse du contentieux affecte plus lourdement les #salariés non-cadres. Entre 2017 et 2021, le contentieux devant la section encadrement a diminué de 4 %, contre – 22 % et – 21 % devant les sections commerce et industrie (salariés non-cadres). Le contentieux s’est également concentré devant les conseils de prud’hommes des gros bassins d’emploi, marquant un recul de l’accès au juge dans les zones rurales. Les salariés les plus jeunes recourent également de moins en moins à la justice : les plus de 50 ans représentaient 32,5 % des demandeurs en 2018, contre 25,2 % en 2009.

    L’accès au juge est donc devenu un privilège. A l’égard des plus #pauvres, l’#employeur peut en revanche affirmer sa toute-puissance de manière discrétionnaire, sans contrôle ni sanction. Cette diminution du contentieux n’est pas un indicateur de bonne santé de la société, mais plutôt de la création de zones de non-droit au bénéfice de l’employeur. C’est ce que le gouvernement appelle « simplifier le droit du travail ».

    Le contentieux, en droit du travail, a toujours essentiellement été un contentieux autour de la rupture du contrat . Compte tenu du coût d’une procédure pour le justiciable, le salarié ne peut se permettre de saisir le juge uniquement pour faire respecter les conditions d’exécution de son contrat, d’autant qu’une telle saisine revient, dans la très grande majorité des cas, à provoquer son futur licenciement ou l’arrêt définitif de la relation de travail s’il est en emploi précaire. Pour toutes ces raisons, le salarié ne formule généralement les demandes au titre de l’exécution de son contrat que lorsqu’il conteste également la rupture de celui-ci.

    C’est donc le contentieux de la rupture du contrat de travail qui porte le peu de contentieux restant, et c’est celui que visent la réduction des #prescriptions et la mise en place des #barèmes. La sécurité juridique invoquée pour justifier leur instauration ne concerne que l’employeur : le salarié injustement licencié se voit plongé dans l’insécurité du chômage, son indemnisation à ce titre faisant elle-même l’objet de réductions continues dans le cadre de réformes successives.

    Conforter les intérêts des employeurs

    L’évocation d’une prescription à deux mois est symptomatique des réformes menées. Elle ferait passer le salarié d’espèce en voie de disparition devant les tribunaux à spécimen de la galerie des espèces disparues.

    Des délais réduits pour saisir, alors que les délais de jugement n’ont fait qu’augmenter et constituent un déni de justice. Alors que le salarié a vu ses délais pour agir se raccourcir et que le contentieux a diminué, il doit attendre toujours plus longtemps que son litige soit jugé. En 2021, la durée moyenne d’une affaire au fond devant la juridiction prud’homale était de 18,1 mois, durée portée à 35 mois en cas de départage. La durée moyenne en appel est passée de 13,7 mois en 2009 à 20,4 mois en 2018. Ces délais constituent déjà des dénis de justice, et l’Etat français est régulièrement condamné à ce titre par les juridictions européennes sans qu’il améliore les moyens donnés à la justice sociale.

    « Simplifier » le droit du travail revient, depuis 2008, à conforter les intérêts des employeurs en les mettant un peu plus à l’abri des conséquences de leurs fautes, sans l’ombre d’un souci du droit et de la réparation des injustices. C’est transformer l’accès à la justice en une course effrénée, pour la faire disparaître, et ne plus laisser l’arme du droit à la partie faible du contrat de travail pour pouvoir se défendre. La justice est le troisième pilier de notre démocratie, et l’exécutif s’acharne à le fragiliser par des réformes renforçant toujours l’impunité patronale.

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/19/sophie-binet-judith-krivine-et-kim-reuflet-les-reformes-du-droit-du-travail-

    #travail #droit

  • "Le but de la #conférence de #Macron ? Éviter un #gadin aux #européennes et #occulter les vrais sujets" / #Natacha_Polony

    "L’exercice de la conférence de presse permet de passer sur les problèmes comme l’eau sur les plumes du canard et on est très souvent aidé en cela par les questions des journalistes, note Natacha Polony, directrice de la rédaction de « Marianne ». Nouvelle illustration avec Emmanuel Macron, au cours de laquelle les sujets de fond, et notamment l’économie, auront été passés sous silence tandis qu’il s’agissait surtout, finalement, de couper l’herbe sous le pied du RN.

    C’est un poncif : il y a de l’acteur de théâtre chez Emmanuel Macron. Mais on a bien compris, devant sa conférence de presse à l’Élysée ce 16 janvier, qu’il y avait aussi de l’imitateur chez lui. Parce que les accents gaulliens dans la façon de pratiquer l’exercice avaient quelque chose d’un tout petit peu appuyé. Sur le fond, qu’a apporté cette conférence de presse ? (...)"

    #non_merci

    #France #économie #politique #communication #propagande #médias #démagogie #seenthis #vangauguin

    https://www.marianne.net/agora/les-signatures-de-marianne/natacha-polony-le-but-de-la-conference-de-macron-eviter-un-gadin-aux-europ

  • Au Royaume-Uni, la grande dépendance des universités à l’égard des étudiants étrangers
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/01/18/au-royaume-uni-la-grande-dependance-des-universites-a-l-egard-des-etudiants-

    Au Royaume-Uni, la grande dépendance des universités à l’égard des étudiants étrangers
    Par Eric Albert (Londres, correspondance)
    Le courriel envoyé courant décembre 2023 par l’un des dirigeants du département d’enseignement en informatique de l’université d’York, au Royaume-Uni, à ses collègues était direct : « En réponse aux problèmes financiers actuels, l’université a décidé de réduire les notes demandées aux étudiants étrangers pour [l’admission dans] tous les cursus. » En clair, cette université, qui fait pourtant partie du prestigieux Russell Group, rassemblant les vingt-quatre meilleurs établissements de l’éducation supérieure du Royaume-Uni, a décidé d’accepter des étudiants étrangers de moins bon niveau.
    Comme l’indique le message interne, révélé par le Financial Times, l’explication est purement financière : un étudiant britannique paie des frais universitaires de 9 250 livres sterling (près de 10 800 euros) par an, un niveau qui est encadré par l’Etat et gelé depuis 2012 ; ceux qui viennent de l’international paient deux à trois fois plus cher, sans aucune limite imposée par les autorités. Dans le même temps, l’Etat britannique a fortement réduit son budget consacré aux universités. Le financement public par étudiant est au plus bas depuis vingt-cinq ans. Les étudiants internationaux représentent donc la dernière manne disponible : ils apportent désormais 20 % des revenus des universités, un doublement en une décennie. « Il y a un besoin urgent d’un débat national sur le financement des universités, notamment l’équilibre entre les frais payés par les étudiants britanniques, les fonds publics, et les étudiants internationaux », souligne Charley Robinson, chargé de l’international à Universities UK, qui représente les universités britanniques.
    Dans ce contexte, le courriel interne de l’université d’York dit tout haut ce qui se murmure tout bas depuis quelques années : les universités britanniques, en grande difficulté financière, risquent de créer des diplômes à deux vitesses, avec des exigences plus élevées pour les Britanniques. En deux décennies, le nombre d’étudiants internationaux a plus que doublé au Royaume-Uni, à presque 700 000 aujourd’hui, soit le quart de tous les étudiants. Dans certaines universités, le pourcentage dépasse allègrement la moitié : London School of Economics (66 % d’étudiants étrangers), University of the Arts London (54 %), Imperial College London (53 %), University College London (UCL, 52 %)… Au niveau des masters, les deux tiers des étudiants sont désormais internationaux. Le premier contingent vient de Chine, représentant environ le quart des étudiants étrangers. Les Indiens et les Nigérians sont aussi en forte hausse. Seul le nombre d’Européens, qui doivent payer les frais internationaux depuis le Brexit (alors qu’ils étaient limités aux frais britanniques auparavant), est en forte baisse.
    Ce système tourné vers le recrutement international, qui est certes la preuve éclatante de l’attractivité des universités britanniques, n’est-il pas en train d’aller trop loin ? Jo Johnson, ancien secrétaire d’Etat à l’éducation supérieure (et frère de Boris Johnson), a récemment tiré la sonnette d’alarme : « la limite politique » se rapproche. Le gouvernement du premier ministre, Rishi Sunak, s’agace de voir ces étudiants grossir les statistiques de l’immigration, un sujet explosif outre-Manche. Quant aux universités elles-mêmes, avec des classes parfois entièrement composées d’étudiants étrangers, ne risquent-elles pas d’atteindre un certain déséquilibre ?
    Coventry est une ville britannique qui a été presque rasée pendant la seconde guerre mondiale, bombardée intensément par l’armée allemande à cause de ses usines d’aviation. Reconstruite à la va-vite dans les années 1950, dominée par la circulation automobile, elle porte encore les stigmates du conflit. Aujourd’hui, partout dans cette cité des Midlands, des bâtiments affichent en grandes lettres capitales : « Logements étudiants ». Des tours sont apparues, entièrement destinées aux étudiants étrangers. Le mal nommé « City Village » (une grande barre d’immeubles sans charme) en fait partie.
    (...) Nattya, un nom d’emprunt, est une étudiante thaïlandaise qui y loge. Son master en énergie renouvelable à l’université de Coventry compte trente-cinq étudiants : « Un seul est Britannique. » La majorité des autres vient d’Inde, à laquelle il faut ajouter quelques Nigérians et des Indonésiens. Tous ont payé autour de 20 000 livres sterling de frais, auxquels il faut ajouter le prix d’un an de vie au Royaume-Uni. « Au total, ça me coûte environ 2 millions de bahts [autour de 50 000 euros] », explique Nattya dans un anglais encore hésitant. Ses parents, qui possèdent une petite entreprise de vente de voitures d’occasion, se saignent pour lui offrir ces études, mais elle assure que l’investissement en vaut la peine, estimant pouvoir tripler son salaire en rentrant en Thaïlande. Mais pourquoi une université britannique ? « C’est moins cher que d’autres pays, notamment les Etats-Unis, et c’est plus facile d’y avoir une place. » Bonne étudiante sans être brillante à Bangkok, elle n’a eu qu’à soumettre ses notes ainsi qu’une lettre de motivation – et un gros chèque – pour être admise. Le master qui ne dure qu’un an, au lieu de deux années dans de nombreux autres pays, est aussi un atout considérable, réduisant les dépenses.
    L’université de Coventry, où elle étudie, fait partie de ces établissements moyens, au 571e rang mondial dans le classement QS, qui fait référence. Mais elle a poussé particulièrement loin la logique de l’internationalisation. En 2010, l’établissement a ouvert un campus de 4 500 étudiants… à Londres, à plus de 170 kilomètres de la ville des Midlands. « Il a été créé dans le but explicite d’attirer les étudiants internationaux qui voulaient un diplôme de Coventry, mais souhaitaient vivre l’expérience londonienne », explique Ian Dunn, le recteur. L’université a désormais quatre campus à Londres. Dans la même logique qu’une multinationale, elle a aussi ouvert des sites en Pologne, au Maroc, en Egypte… Chacun offre un « diplôme de l’université de Coventry », mais sans que les étudiants aient besoin de mettre les pieds au Royaume-Uni, et à des prix beaucoup plus raisonnables. Comme pour une franchise, l’université supervise et garantit la qualité de l’enseignement. « Il s’agit d’apporter l’éducation là où elle est nécessaire », explique M. Dunn. Il assure qu’il n’est pas question de baisser la qualité de l’enseignement ni les critères d’admission.
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Au Royaume-Uni, un système de sélection à l’université sans anicroche
    Reste que la logique de ce développement est financière. « Il est désormais douteux que la survie des universités britanniques soit possible sans les revenus des étudiants étrangers », estime Richard Wells, chargé de la stratégie internationale de l’université de Coventry. Dans son établissement, les étudiants étrangers rapportent 47 % des revenus.
    Cette dépendance est la conséquence d’une décision politique prise en 2012. La décennie précédente, le nombre d’étudiants avait fortement augmenté, tandis que les financements ne suivaient pas. Le gouvernement de David Cameron avait alors décidé de tripler les frais universitaires, alors limités à 3 000 livres sterling. La décision a provoqué une violente tempête politique et d’importantes manifestations. Depuis, aucun gouvernement n’ose toucher à la limite de 9 250 livres sterling par année universitaire pour les étudiants britanniques. En valeur réelle, ce gel depuis douze ans représente une baisse d’un tiers. « Ce n’est pas un secret, les étudiants internationaux fournissent des revenus vitaux », souligne Ben Moore, de Russell Group. Selon lui, un étudiant international « subventionne » un Britannique à hauteur de 2 500 livres sterling par an. Désormais, la pression financière s’immisce même dans les tout meilleurs établissements. A UCL (neuvième meilleur établissement mondial, selon le classement QS), un professeur, qui requiert l’anonymat, raconte les consignes venant de sa direction pour sélectionner les étudiants. « Pour chaque classe, on me donne un quota d’étudiants étrangers. A moi, ensuite, de trouver les élèves qui ont le niveau. » (...)
    Cette vague d’internationalisation serait-elle cependant sur le point de refluer ? Le gouvernement britannique, soucieux de réduire l’immigration, a augmenté le coût des visas en 2023 et vient d’imposer des restrictions pour limiter le regroupement familial des étudiants en master. Selon le site Studyportals, qui aide les candidats aux études à l’étranger à s’y retrouver, les demandes de renseignements chutent : − 48 % en provenance du Nigeria, − 34 % du Sri Lanka (ces deux pays sont par ailleurs touchés par des crises économiques), − 22 % des Emirats arabes unis… « Nous pensons que nous avons atteint un pic du nombre d’étudiants internationaux en 2023, et nous sommes de plus en plus inquiets pour le recrutement des étudiants en 2024 », explique Mme Robinson, d’Universities UK. Pour le gouvernement, cela représente un dilemme difficile : soit mieux financer les universités, quitte à augmenter les frais universitaires pour les Britanniques, soit faciliter les visas. Un choix entre deux bombes politiques qu’aucun des deux grands partis n’ose discuter ouvertement, à moins d’un an des élections législatives.

    #Covid-19#migration#migrant#grandebretagne#universite#etudiant#immigration#economie#visas#politiquemigratoire

  • Aux Pays-Bas, le dirigeant populiste Wilders reçoit l’appui inattendu d’un rapport suggérant de limiter l’immigration
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/18/aux-pays-bas-le-dirigeant-populiste-wilders-recoit-l-appui-inattendu-d-un-ra

    Aux Pays-Bas, le dirigeant populiste Wilders reçoit l’appui inattendu d’un rapport suggérant de limiter l’immigration
    Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, correspondant)
    Les Pays-Bas « débordent » : sur le réseau social X, le populiste néerlandais Geert Wilders a repris et adapté, lundi 15 janvier, le slogan de son prédécesseur Pim Fortuyn, qui, en 2002, avait lancé : « Les Pays-Bas sont pleins », et inauguré ainsi un débat qui perdure sur l’immigration et l’identité nationale. Un thème qui a d’ailleurs été au cœur des élections législatives du 22 novembre 2023, marquées par la victoire du dirigeant d’extrême droite et de son Parti pour la liberté (PVV), arrivé en tête avec 37 sièges sur les 150 de la Deuxième Chambre.
    Alors qu’il tente de former une coalition avec trois autres partis, M. Wilders a reçu, lundi 15 janvier, l’aide inattendue d’une instance indépendante, mandatée en 2022 par les députés pour étudier la situation démographique du royaume. La commission d’Etat pour les développements démographiques 2050 a rendu un rapport prônant « une augmentation limitée de la population » afin de préserver le bien-être du pays. Elle suggère essentiellement une forte limitation de l’immigration, avec notamment davantage de sélectivité pour la main-d’œuvre étrangère et un frein au regroupement familial. Le nombre des naissances ne joue pas dans l’accroissement de la population du pays : le taux de natalité était de 1,49 en 2022 (1,55 pour les mères d’origine étrangère).
    Le rapport estime aussi que les autorités devraient obtenir une dérogation aux règles européennes sur l’asile et la libre circulation des personnes, a fortiori si l’Union devait s’ouvrir à de nouveaux pays, comme l’Ukraine. Les Pays-Bas ont, depuis 2015, accueilli annuellement quelque 100 000 migrants avec, en 2022, un pic à 150 000 (outre 113 000 Ukrainiens). Si cette évolution devait se poursuivre, le pays, peuplé actuellement de 17,9 millions de personnes, pourrait en compter jusqu’à quelque 23 millions en 2050, prédit la commission, dirigée par Richard van Zwol, un membre du Conseil d’Etat.
    Dans ce scénario, le plus extrême des cinq retenus, 45 % de la population serait alors d’origine étrangère, contre 26 % si l’immigration était plus contrôlée. La commission suggère, en tout état de cause, une limitation à 40 000, ou 60 000 au maximum, du nombre d’étrangers admis chaque année. Selon les experts, le royaume ne devrait pas totaliser plus de 19 ou 20 millions d’habitants s’il veut s’épargner « pénurie, nuisances et exaspération ». Un nombre trop élevé de résidents entraînerait par ailleurs un accroissement des inégalités et des tensions, nuirait à la nécessaire confiance dans l’Etat et mettrait en danger le système de sécurité sociale, affirme le rapport. Il met aussi en exergue l’exiguïté du pays, qui est le plus densément peuplé d’Europe après Malte, avec 529 habitants par kilomètre carré. Les Pays-Bas connaissent, par ailleurs, un problème criant de manque de logements : il faudrait en construire 100 000 par an au cours de la prochaine décennie, et un afflux supplémentaire de population rendrait la situation plus critique encore.
    La limitation du nombre d’étrangers recueillerait, selon les auteurs de l’étude, l’approbation de 87 % des Néerlandais. Une aubaine pour Geert Wilders, qui espère toujours former une coalition avec le Mouvement agriculteur-citoyen de Caroline van der Plas, le Nouveau Contrat social de Pieter Omtzigt et le Parti populaire pour la liberté et la démocratie de Dilan Yesilgöz, la ministre démissionnaire de la justice. Les quatre dirigeants, retirés dans un domaine proche d’Hilversum, dans la province de Hollande septentrionale, poursuivent des débats difficiles, même si le chef du PVV a gelé ses propositions les plus extrêmes, comme l’interdiction du Coran, la fermeture des mosquées ou la sortie des Pays-Bas de l’Union européenne. Il a aussi accepté de soumettre le reste de son programme à un examen portant sur la légalité de celui-ci. Et la rumeur indique qu’il serait même prêt à confier le poste de chef du gouvernement à une autre personnalité.
    Rien n’est toutefois réglé. Sur l’immigration, par exemple, M. Omtzigt évoque un quota annuel de 50 000 personnes, tandis que le parti agrarien en tolérerait 15 000 au maximum. Mardi 16 janvier, M. Wilders a par ailleurs déclaré : « Nous avons un problème », dans une allusion à un vote intervenu la veille au Sénat. Les élus libéraux de la Première Chambre ont, contre l’avis de la direction de leur parti, approuvé un projet de répartition obligatoire des demandeurs d’asile dans toutes les communes du royaume. Un texte fermement combattu par les populistes et condamné par Mme Yesilgöz.
    L’épisode démontre que celle-ci, qui a succédé à Mark Rutte à la tête de la formation libérale, ne contrôle pas ses élus, par ailleurs divisés quant à une participation gouvernementale avec le PVV. Mme Yesilgöz entretient dès lors le flou : acceptera-t-elle un accord gouvernemental, fera-t-elle capoter les discussions, ou apportera-t-elle un soutien à la carte à une éventuelle coalition à trois ?
    La relance spectaculaire de la thématique migratoire inquiète, en tout cas, les milieux économiques, qui évoquent depuis des années un manque criant de main-d’œuvre, impossible à régler, selon les patrons, sans le recours à des travailleurs étrangers. La commission sur la démographie prône, pour l’avenir, l’acceptation d’étrangers disposant d’un niveau de formation élevé, mais ce sont les secteurs de la logistique, de la distribution ou du transport qui recherchent des collaborateurs, en général faiblement qualifiés. L’éducation et la santé recherchent toutefois également de nombreux travailleurs migrants.

    #Covid-19#migration#migrant#paysbas#immigration#natalite#densite#economie#maindoeuvre#migrationqualifiee#demographie#vieillissement#sante

  • „Die Deutschen sind arm und wütend“ : Mittlere Haushalte haben jetzt kaum mehr als die Griechen
    https://www.berliner-zeitung.de/wirtschaft-verantwortung/die-deutschen-sind-arm-und-wuetend-mittlere-haushalte-haben-jetzt-k

    L’Allemagn est riche, les Allemands sont pauvres. Dans l’EU la situation n’est pire qu’aux pays baltes et en Hongrie. A Berlin un quart des enfants sont pauvres. La situation s’est encore aggravé depuis les lockdowns contre le covid et le début du régime de sanctions contre la Russie.

    17.1.2024 von Liudmila Kotlyarova - Von Spanien und Italien abgehängt: In Deutschland herrscht extreme Ungleichheit, kaum besser als Griechenland, zeigt ein EZB-Vergleich. Wie ist das möglich?

    Deutschland war lange Zeit ein Leuchtturm des Wohlstands und der politischen Stabilität. Jetzt stagniert seine Wirtschaft, und es drohen die Verbitterung und Spaltung der Gesellschaft. Die Stimmung kippt.

    Die extrem ungleiche Verteilung des Wohlstands ist dabei eines der ältesten Probleme in Deutschland und der Grund, warum so viele Menschen sich hierzulande zunehmend verarmt fühlen. Oder, wie der Bloomberg-Kolumnist Chris Bryant neulich in einem Artikel resümiert: „Deutschland ist reich, aber die Deutschen sind arm und wütend.“
    Der Medianhaushalt in Deutschland hat ein Nettovermögen von 106.600 Euro – was bedeutet das?

    Zahlen bestätigen dieses Gefühl: Die obersten zehn Prozent der Haushalte verfügen laut der letzten Erhebung der Bundesbank aus dem Jahr 2021 über ein Nettovermögen von mindestens 725.000 Euro und kontrollieren mehr als die Hälfte des Vermögens des Landes, während die untersten 40 Prozent der Haushalte ein Nettovermögen von höchstens 44.000 Euro haben. Der mediane, also der mittlere Haushalt, hat dabei ein Vermögen von lediglich 106.600 Euro aufgebaut.

    Der Median zeigt das Vermögen der Mitte einer Gesellschaft. Er halbiert die Datenreihe, sodass eine Hälfte der Daten unterhalb und die andere Hälfte oberhalb des Medians liegt, und bietet in dem Fall ein klares Bild der Vermögensverteilung in Deutschland. Der Durchschnittswert dagegen erzeugt den Eindruck, dass es allen Menschen in Deutschland finanziell relativ gut geht. So verfügte ein Durchschnittshaushalt in Deutschland 2021 über ein Nettovermögen von rund 320.000 Euro, doch das bedeutet noch lange nicht, dass die meisten dieses Geld auch haben.
    Die traurige Wahrheit: Deutschland bei der Vermögensverteilung deutlich unter dem Medianwert der Eurozone

    Düsterer wird das Bild, wenn man die Zentralwerte in Deutschland mit denen in anderen EU-Ländern vergleicht. Plötzlich stellt sich heraus, dass der deutsche Medianhaushalt nur über ein wenig mehr Nettovermögen verfügt als der griechische Haushalt aus der Mitte: 106.206 Euro in Deutschland im zweiten Quartal 2023 gegen 97.749 Euro in Griechenland.

    Nur noch die mittleren Haushalte in Estland, Ungarn, Litauen und Lettland sind nach Angaben der Europäischen Zentralbank (EZB) schlechter aufgestellt – alle anderen ost- und südeuropäischen Länder dagegen viel besser als Deutschland. Zum Beispiel: In der Slowakei verfügt ein mittlerer Haushalt über ein Nettovermögen von 116.244, in Portugal über 126.605, in Slowenien über 154.025, in Italien über 161.062 und in Spanien über 197.236 Euro. Am reichsten sind die mittleren Haushalte in Luxemburg mit 734.745 Euro Nettovermögen. Deutschland liegt damit deutlich unter dem Median der Eurozone (etwa 150.000 Euro).

    Kein Wunder, dass wütende Landwirte in den vergangenen Tagen landesweit Straßen blockierten, aus Protest gegen Kürzungen der Agrarsubventionen. Aber viele wissen: Es ist nur der Anlass, denn es geht ihnen um das große Ganze. Die rechtspopulistische AfD versucht, diese Stimmungen für sich zu nutzen.
    Fakt ist: Die Inflation frisst die Reallöhne auf, die Armut steigt

    Auf der einen Seite bräuchten die Deutschen aufgrund hochwertiger öffentlicher Dienstleistungen nicht viel Geld, um komfortabel zu leben, argumentiert der Bloomberg-Autor. Kindertagesstätten seien in einigen Bundesländern kostenlos, ebenso wie staatliche Studiengebühren. In letzter Zeit hätten die Gewerkschaften Gehaltserhöhungen durchgesetzt, während Sparer höhere Zinsen auf Bankeinlagen erhielten; auch die Landwirte hätten höhere Gewinne erzielt.

    Auf der anderen Seite investiere nur noch etwa jeder sechste Deutsche an der Börse, und weniger als die Hälfte der Haushalte besitze ein Eigenheim und profitiere daher nicht von den steigenden Immobilienpreisen, schreibt Chris Bryant. Dazu kommt: Das mittlere Vermögen deutscher Mieterhaushalte beträgt laut der Bundesbank nur 16.000 Euro, und die steigenden Mieten tragen lediglich zur Verarmung der Mieterhaushalte bei.

    Die Zahlen der Bundesbank aus dem Jahr 2021 beinhalten zudem noch nicht die Entwicklung seit dem Ausbruch des Ukraine-Krieges. Die Inflation hat die Reallöhne und die Kaufkraft der Haushalte aufgefressen, und die Einkommensarmut hat in Deutschland deutlich zugenommen. Im Jahr 2022 lebten nach Angaben des Wirtschafts- und Sozialwissenschaftlichen Instituts der gewerkschaftsnahen Hans-Böckler-Stiftung fast 17 Prozent der Menschen in Deutschland in Armut, rund zehn Prozent sogar in ernster Armut. Die Zahl der sehr armen Menschen, die weniger als 50 Prozent des mittleren Einkommens zur Verfügung haben, ist demnach zwischen 2010 und 2019 um gut 40 Prozent gestiegen. Ein Viertel der Kinder in Berlin lebt in Armut.
    Bloomberg-Autor macht Vorschläge, wie man die AfD neutralisieren könnte

    Die Organisation für wirtschaftliche Zusammenarbeit und Entwicklung (OECD) und führende deutsche Ökonomen kritisieren seit langem das Steuersystem Deutschlands, weil die Belastung zu sehr auf die Löhne ausgerichtet sei und die Vermögens- und Erbschaftssteuern dagegen niedrig seien. So gibt es beispielsweise für Unternehmer pauschale Befreiungen von der Erbschaftssteuer, da sonst Arbeitsplätze und Investitionen gefährdet werden könnten.

    Diese Regeln seien viel zu bequem, und das Ergebnis ist, dass die Steuern auf große Erbschaften oft niedriger seien als auf kleinere Vermächtnisse, kritisiert der Bloomberg-Autor. Er schlägt vor: Langfristig müsste Europas größte Volkswirtschaft ihr Steuersystem, das gerade die Arbeit benachteiligt, reformieren und eine breitere Kapitalverteilung fördern. Er zeigt sich jedoch skeptisch, was weitere Reformen zur Verringerung der Ungleichheit in Deutschland angeht, auch wenn es an guten Ideen nicht mangelt.

    Die Ironie der zunehmenden Unterstützung der AfD besteht auch darin, dass viele ihrer einkommensschwachen Anhänger wenig von ihrem Programm profitieren würden, weil die Partei Vermögens- und Erbschaftssteuern ablehnt. Mehr Menschen an den Vorteilen des wirtschaftlichen Wohlstands teilhaben zu lassen, würde einen großen Beitrag dazu leisten, die Unterstützung für radikale politische Parteien zu mindern und die Wut abzumildern, die derzeit in Deutschland überkocht, schließt der Bloomberg-Autor.

    #Allemagne #pauvreté #patrimoine #économie

  • La CPME se félicite de voir le vol à l’étalage désormais sanctionnable d’une amende forfaitaire de 300 euros
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/09/05/la-cpme-se-felicite-de-voir-le-vol-a-l-etalage-desormais-sanctionnable-d-une


    Le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), François Asselin (à gauche), et le vice-président de la CPME chargé des affaires sociales (sic), Eric Chevee, à Paris, le 12 juillet 2023. BERTRAND GUAY / AFP

    Une circulaire du ministère de la #justice, publiée le 6 juillet, étend le champ d’application de la procédure de l’amende forfaitaire délictuelle en sanctionnant le vol simple « d’une chose dont la valeur n’excède pas 300 euros » .
    Par Aline Leclerc, 05 septembre 2023

    Publiée le 6 juillet, la circulaire du ministre de la justice était un peu passée inaperçue, jusqu’au coup de projecteur donné en cette rentrée par la Confédération des petites et moyennes #entreprises (#CPME) qui, dans un communiqué de presse, le 30 août, s’est réjouie d’avoir obtenu « gain de cause » sur la création d’une amende forfaitaire délictuelle de 300 euros pour sanctionner le vol « d’une chose dont la valeur n’excède pas 300 euros ».

    Le « #vol simple » – l’expression « #vol_à_l’étalage » n’existe pas en tant que telle dans le code pénal – est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

    L’#amende_forfaitaire_délictuelle (AFD) ouvre désormais la possibilité d’une procédure simplifiée, permettant au policier ou au gendarme qui constate l’infraction (après que le voleur a été attrapé par un vigile ou identifié par la vidéosurveillance) de prononcer directement une sanction pénale, sans juge ni procès, y compris en cas de récidive. Un peu comme la contravention délivrée à l’automobiliste qui vient de brûler un feu.

    Ceci, à condition que le voleur reconnaisse les faits et qu’il ait restitué la « chose » volée à la victime ou au commerçant s’il s’agit d’un vol à l’étalage.

    « Une mesure que nous demandions depuis longtemps »

    « C’est une mesure que nous demandions depuis longtemps, se félicite Xavier Douais, vice-président de la CPME, en charge du #commerce. Car dans les faits, on ne condamne pas à la prison pour un vol de tee-shirt ! Cela se termine souvent en simple rappel à la loi. Donc les commerçants sont découragés de porter plainte [il y en a eu tout de même 41 000 en 2022]. Maintenant, le voleur, même s’il restitue le bien, sera tout de même bien identifié par la #police. Cela me semble dissuasif. »

    Pour lui, c’est la hausse de 14,7 % des vols à l’étalage en 2022 par rapport à 2021, selon les chiffres du ministère de l’intérieur, qui a fini par convaincre le ministère de la justice. Certains y voyant un lien direct avec l’inflation et les difficultés de pouvoir d’achat. Un chiffre cependant en baisse de 17 % si l’on compare avec 2019, période pré-Covid-19 et pré-inflation, rappelait La Croix en mars.

    « L’objectif poursuivi est d’apporter une réponse pénale ferme et rapide au phénomène délinquant du vol à l’étalage, contentieux de masse, qui reçoit aujourd’hui une réponse pénale insatisfaisante », précise la doctrine d’emploi de la circulaire. Qui indique que les procureurs de la République peuvent définir « en fonction des spécificités locales » des seuils ou des objets à exclure du recours à l’amende forfaitaire délictuelle, comme « les denrées alimentaires ».

    La procédure de l’amende forfaitaire délictuelle voit donc son champ d’application étendu, alors que le 30 mai, dans une décision cadre, la Défenseure des droits demandait au contraire de « mettre fin » à son utilisation. Saisie « de nombreuses réclamations », elle dénonçait notamment « les risques d’arbitraire » et l’atteinte à des principes fondamentaux de la procédure pénale, comme « le droit de la #défense » et « l’individualisation des peines ».

    edit cet énième succès patronal aurait pu passer inaperçu si il n’avait pas été fièrement revendiqué.

    #économie #appropriation #délinquance_de_masse #alimentation #commerçants #droit_de_la_défense #guerre_aux_pauvres

  • Dépassement systématique de budget, militarisation de l’espace public, gentrification, greenwashing : une "encyclopédie des nuisances" des #JOP à travers le temps.
    Descriptions des fonctionnements occultes de la "machine olympique" et de sa gouvernance par le #CIO.

    Jules Boykoff : « Les JO, c’est l’économie du ruissellement inversé » - AOC media
    https://aoc.media/entretien/2024/01/12/jules-boykoff-les-jo-cest-leconomie-du-ruissellement-inverse

    Pourquoi les Jeux Olympiques sont-ils devenus une force économique avant d’être un événement sportif ? Ancien athlète, le politiste Jules Boykoff montre que des processus d’accumulation du capital considérables se mettent en place dès lors qu’une ville organise des Jeux Olympiques de grande ampleur. Leur coût est systématiquement sous-évalué, l’espace public est militarisé, les équilibres sociaux déstabilisés, et les écosystèmes menacés. Pourquoi les villes continuent-elles alors de les organiser ?

    https://justpaste.it/e9wny

  • Crash évité du vol Alaska Airlines : Boeing sous pression après la remise en cause de la fiabilité du 737 Max
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/01/08/crash-evite-du-vol-alaska-airlines-un-miracle-pour-les-passagers-une-catastr


    Le Boeing 737 Max 9 qui a effectué le vol 1282 d’Alaska Airlines, à Portland (Oregon), le 8 janvier 2024.
    NTSB / AFP

    Avec le nouvel accident qui a affecté l’avionneur américain, c’est sa capacité à produire vite et bien ses appareils qui est en doute. Lundi, United Airlines et Alaska Airlines ont annoncé avoir découvert des fragilités sur d’autres appareils.

    Un « bouchon de porte » (#door_plug) qui vient obstruer l’emplacement d’une porte de sortie de secours de l’avion non installée (elle est obligatoire dans des configurations de la cabine avec plus de passagers) qui s’est désolidarisé du fuselage dans la phase ascensionnelle du vol.

    Pas de passager au droit de la porte, mais un adolescent assis le rang précédent avec sa maman à sa droite.
    #737_Max

    • le témoignage de la maman

      When Alaska flight 1282 blew open, a mom went into ‘go mode’ to protect her son | The Seattle Times
      https://www.seattletimes.com/business/boeing-aerospace/when-hole-opened-on-alaska-flight-1282-a-mom-held-tight-to-her-son


      A passenger view of the door plug hole on an Alaska Airlines Boeing 737 MAX 9, flight 1282, which was forced to return to Portland airport on Friday....
      Courtesy Elizabeth Le via Instagram

      When the Boeing 737 MAX 9’s side blew out explosively on Alaska Airlines Flight 1282 Friday evening, a 15-year-old high school student was in the window seat in the row directly ahead, his shoulder beside the edge of the gaping hole.

      His mother, who was seated beside him, in the middle seat of row 25, described the moment as a very loud bang, like “a bomb exploding.”

      As the air in the passenger cabin rushed out, the Oregon woman turned and saw her son’s seat twisting backward toward the hole, his seat headrest ripped off and sucked into the void, her son’s arms jerked upward.

      “He and his seat were pulled back and towards the exterior of the plane in the direction of the hole,” she said. “I reached over and grabbed his body and pulled him towards me over the armrest.”

      To avoid being inundated with further media calls, the woman, who is in her 50s, a lawyer and a former journalist, asked to be identified only by her middle name, Faye.

      “I was probably as filled with adrenaline as I’ve ever been in my life,” Faye said.

    • le cas n’est pas isolé – on est chez Boeing… – les compagnies équipées d’appareils dans la même configuration découvrent qu’il y a un peu partout des boulons mais serrés

      Des vérifications sur des Boeing 737 MAX font apparaître des équipements mal fixés sur des appareils d’Alaska Airlines et United
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/01/08/un-avion-alaska-airlines-perd-une-porte-en-plein-vol-l-action-boeing-en-fort


      La compagnie Alaska Airlines a décidé de maintenir au sol ses 737 MAX 9 après l’envol spectaculaire d’une porte qui a provoqué, vendredi soir, l’atterrissage d’urgence de l’un de ses appareils aux Etats-Unis.
      HANDOUT / AFP

      Les compagnies aériennes américaines United Airlines et Alaska Airlines ont rapporté, lundi 8 janvier, avoir trouvé des éléments mal fixés lors de vérifications de leurs appareils Boeing 737 MAX 9, après qu’un avion de ce type a perdu une porte en plein vol vendredi.
      United, qui exploite la plus importante flotte de 737 MAX 9 du monde (79 appareils), a révélé avoir découvert des « boulons qui nécessitaient d’être resserrés » lors de vérifications sur les portes condamnées de ce modèle, les mêmes que celle qui a été arrachée lors du vol 1282 d’Alaska Airlines aux Etats-Unis, vendredi.
      « Depuis que nous avons entamé les inspections, samedi, nous avons fait des découvertes qui semblent liées à des problèmes d’installation du panneau obstruant les portes », a précisé United dans une déclaration transmise à l’Agence France-Presse. « Par exemple, des boulons qui nécessitaient d’être resserrés. » La condamnation de certaines portes est une configuration que propose Boeing à ses clients quand le nombre d’issues de secours existantes est déjà suffisant au regard du nombre de sièges dans l’appareil.
      Alaska Airlines a également annoncé avoir détecté des « équipements mal fixés » sur certains de ses appareils de ce type, à la suite d’inspections préliminaires. Ces découvertes interviennent après que l’agence américaine de l’aviation civile (FAA) a demandé des inspections sur 171 Boeing 737 MAX 9, qui sont maintenus au sol dans l’attente de ce passage en revue.
      Lundi, la compagnie Aeroméxico a déclaré être dans la « phase finale d’une inspection détaillée » et anticiper la remise en service de ses 19 MAX 9 « dans les prochains jours ».

    • dans les semaines qui précèdent, l’avion, pratiquement neuf, avait connu des incidents à répétition sur son système de pressurisation, peut-être liés à un jeu ou des vibrations de la fausse porte. Ce qui avait conduit la compagnie à ne pas utiliser l’avion sur des liaisons long-courrier (vers Hawaï).

      Alaska Airlines jet that had a cabin wall blowout made 3 recent Alaska-Hawaii flights - Alaska Public Media
      https://alaskapublic.org/2024/01/09/alaska-airlines-jet-that-had-a-cabin-wall-blowout-made-3-recent-alaska

      At the time of the blowout, the aircraft was just a few months old. Alaska Airline had restricted the jet from long flights over water after a warning light that could signal a pressurization problem lit up on three flights, on Dec. 7 and twice in January.

    • Le fabricant #Spirit_AeroSystems (qu’on a déjà croisé ici dans les épisodes de la saison précédente du feuilleton 737 Max) était – déjà – la cible de procès pour divers problèmes de qualité

      Boeing supplier that made Alaska Airlines door plug was warned of « defects » with other parts, lawsuit claims - CBS News
      https://www.cbsnews.com/news/boeing-loose-bolts-alaska-airlines-united-airlines-spirit-aerosystems-door-

      The manufacturer of the door plug that was blown out in mid-air during a Alaska Airlines flight on Friday was the focus of a class-action lawsuit filed less than a month earlier, with the complaint alleging that Spirit AeroSystems had experienced “sustained quality failures” in its products. 

      The complaint, initially filed in federal court in May and amended in December, was filed on behalf of investors in Spirit AeroSystems, which was originally a manufacturing unit of Boeing until it was spun off in 2005 (The company has no relationship with Spirit Airlines.) According to the suit, Spirit relies heavily on Boeing for orders and manufactures much of the aviation giant’s jet fuselages. 

      The lawsuit was earlier reported by the investigative publication The Lever.

      The midair incident involved a door plug, panels designed to fit into doors that typically aren’t needed on an aircraft, transforming them into windows. One of these plugs was sucked out of a Boeing 737 Max 9 flown by Alaska Airlines just minutes after the plane departed Oregon’s Portland International Airport on its way to Ontario, California. 

      Alaska and United Airlines — the only two U.S. carriers to fly the Boeing 737 Max 9 — have since said they have found loose bolts inside several other door plugs on the jets, which the Federal Aviation Administration has grounded.

      Boeing supplier that made Alaska Airlines door plug was warned of « defects » with other parts, lawsuit claims - CBS News
      https://www.cbsnews.com/news/boeing-loose-bolts-alaska-airlines-united-airlines-spirit-aerosystems-door-

      The manufacturer of the door plug that was blown out in mid-air during a Alaska Airlines flight on Friday was the focus of a class-action lawsuit filed less than a month earlier, with the complaint alleging that Spirit AeroSystems had experienced “sustained quality failures” in its products. 

      The complaint, initially filed in federal court in May and amended in December, was filed on behalf of investors in Spirit AeroSystems, which was originally a manufacturing unit of Boeing until it was spun off in 2005 (The company has no relationship with Spirit Airlines.) According to the suit, Spirit relies heavily on Boeing for orders and manufactures much of the aviation giant’s jet fuselages. 

      The lawsuit was earlier reported by the investigative publication The Lever.

      The midair incident involved a door plug, panels designed to fit into doors that typically aren’t needed on an aircraft, transforming them into windows. One of these plugs was sucked out of a Boeing 737 Max 9 flown by Alaska Airlines just minutes after the plane departed Oregon’s Portland International Airport on its way to Ontario, California. 

      Alaska and United Airlines — the only two U.S. carriers to fly the Boeing 737 Max 9 — have since said they have found loose bolts inside several other door plugs on the jets, which the Federal Aviation Administration has grounded.

    • L’expert : c’est normal, dans le secteur aéronautique, c’est plein de petits jeunes qui bossent comme des cochons.
      (traduction libre…)

      Quest Means Business sur X 
      https://twitter.com/questCNN/status/1744775723192119498

      “We have a relatively young workforce throughout the aerospace supply chain, and it is showing up in quality escapes that we experienced all throughout 2023.”

      Citi analyst Jason Gursky on the aviation industry following a Boeing plane’s mid-air fuselage blowout.

    • ça aurait peut-être coûte (un peu) plus cher d’utiliser une conception garantissant la sécurité (#safety_by_design). Ben oui, une pièce – introduite par l’intérieur – dont les bords débordent de l’ouverture dans le fuselage…

      Aviation experts raise questions about 737 Max ‘door plug’ design | CNN Business
      https://www.cnn.com/business/boeing-737-max/index.html

      In interviews with CNN, some experts argued that if that door plug were designed to be larger than the opening it covers and installed inside the plane, the force of the pressurized air in the passenger cabin would force the plug against the plane’s interior frame and a situation such as the one on the Alaska Airlines flight could have been avoided. However, such a design could have added costs and practical disadvantages, some said.

    • Chez Boeing, la finance contre les ingénieurs
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/11/chez-boeing-la-finance-contre-les-ingenieurs_6210186_3232.html

      Les nouveaux déboires des 737 MAX, déjà responsables de deux catastrophes en 2018 et 2019, illustrent la bascule de la culture d’entreprise intervenue au tournant du siècle chez l’avionneur américain.

      Après la catastrophe évitée à bord d’un #Boeing #737 MAX 9 d’Alaska Airlines, dont une partie du fuselage a été arrachée, vendredi 5 janvier, le PDG de l’avionneur américain, David Calhoun, a fait amende honorable devant les cadres de Boeing réunis, mardi 9 janvier, en urgence : « Nous allons aborder cela d’abord en reconnaissant notre erreur », a-t-il expliqué, ajoutant que les compagnies aériennes étaient « profondément ébranlées », mais qu’elles allaient conserver leur« confiance en [eux] tous ».

      Vraiment ? Après que les inspections d’autres appareils ont montré que les vis de la pièce qui bouche l’espace réservé à une possible porte de secours supplémentaire n’étaient pas bien serrées ? Après la catastrophe de deux 737 MAX en 2018 (Lion Air, Indonésie, 189 morts) et 2019 (Ethiopian Airlines, 157 morts), qui ont révélé des défauts de #conception et une volonté de dissimulation aux autorités de régulation américaines ?

      On peut prétendre, comme certains analystes financiers, qu’il s’agit d’un problème de contrôle qualité qui sera vite surmonté. En réalité, la confiance en Boeing est brisée. « Ils sont revenus cinq ans en arrière. Calhoun doit faire quelque chose de radical pour sortir de cela. C’est une entreprise qui semble se soucier des profits plus que de la sécurité », a accusé, le 9 janvier sur CNBC, Paul Argenti, professeur de communication d’entreprise à l’université Dartmouth (New Hampshire).

      Politique d’économies

      De fait, le logiciel de M. Calhoun et des équipes de Boeing est en cause. Le patron est un disciple de Jack Welch (1935-2020), qui, dirigeant de General Electric de 1981 à 2001, en avait fait l’entreprise la plus puissante du monde, privilégiant la rentabilité. Le conglomérat s’est effondré et a fini démantelé, tandis que Jack Welch est accusé d’avoir tué le capitalisme industriel américain. Ses héritiers, parmi lesquels M. Calhoun, sont aujourd’hui accusés de tuer Boeing, géant de l’aéronautique civile et militaire. Trop gros pour tomber, il aurait peut-être sombré s’il n’était pas stratégique et n’avait pas été sauvé par le refinancement avantageux des « années Covid ».

      Tout remonte à la bascule de la culture d’entreprise intervenue au tournant du siècle, avec la montée d’Airbus, que la firme n’avait jamais pris au sérieux, et la course aux #économies. Comme l’explique le journaliste Peter Robison dans son ouvrage Flying Blind (« voler à l’aveugle », Anchor Books, 2021, non traduit), le slogan de l’entreprise, « travailler ensemble », est devenu « davantage pour moins cher ». Boeing est passé d’une culture d’ingénieurs à une culture de financiers et de commerciaux. En dépit de ses déboires, il vaut plus qu’Airbus en Bourse.

      Le drame se noue en 2000, lors d’une grande #grève des 23 000 #ingénieurs de Seattle (Etat de Washington), qui conduit à un divorce entre les ingénieurs syndiqués et la direction. Cette dernière décide alors de déménager son siège à Chicago (Illinois), loin de ses centres de production.

      Il faut aussi faire des économies sur les nouveaux projets. Le lancement du Boeing 777 avait fait la fierté des équipes dans les années 1990. Pour son projet de 787 Dreamliner, la direction fixe un budget plus faible de 60 % que celui du 777. Boeing décide d’en délocaliser la production dans l’Etat non syndiqué de Caroline du Sud, avec des #salaires deux fois moindres, mais peine à former ses techniciens. En Europe, le droit du travail, qui complique les licenciements et renchérit la main-d’œuvre, force Airbus à monter en gamme et en automatisation.

      Multiples défaillances de production

      La demande de moyen-courriers s’envole, pour la plus grande joie d’Airbus, dont les A320 sont nettement moins chers que les 737 de Boeing. L’avionneur de Seattle subit alors plusieurs humiliations : en 2010, le patron de Ryanair, Michael O’Leary, propose d’acheter 300 Boeing 737 à un prix 20 % au-dessous du coût de revient de Boeing. Un an plus tard, American Airlines menace de préférer l’A320. La direction de Boeing décide non pas de concevoir un nouvel appareil, ce qui aurait coûté 25 milliards de dollars (près de 23 milliards d’euros), mais de moderniser ses 737, moyennant 2,5 milliards de dollars. Le projet est mal conçu : les moteurs plus gros, fixés plus en avant sous les ailes, déséquilibrent l’appareil. Plutôt qu’une correction très coûteuse de la conception de l’avion, on lui adjoint un logiciel pour le rééquilibrer.

      Boeing se heurte alors à une nouvelle exigence des compagnies aériennes low cost américaines : elles ne veulent pas que leurs pilotes aient à suivre de coûteuses formations et souhaitent qu’ils puissent passer, comme chez Airbus, d’un modèle à l’autre. Boeing prétend, contre l’évidence, que les pilotes n’ont pas besoin d’une #formation pour piloter les 737 MAX, ce qui sera fatal aux pilotes de Lion Air et d’Ethiopian Airlines.

      Pendant ce temps, l’entreprise rachète ses actions pour soutenir son cours de Bourse, paye royalement ses dirigeants et externalise tout ce qu’elle peut. Dès 2005, elle filialise sous le nom de Spirit AeroSystems son usine de Wichita (Kansas) afin de ne pas octroyer aux ouvriers de cet Etat rural les mêmes augmentations qu’à Seattle. Elle transforme aussi des coûts fixes en coûts variables, en externalisant la fourniture du fuselage. Cette filiale, aujourd’hui en quasi-perdition économique, multiplie les défaillances de production, alors que Boeing ne joue plus qu’un rôle de concepteur et d’assembleur.
      Boeing s’intéresse-t-il encore à l’aéronautique civile ? On peut en douter, tant il est biberonné à la commande militaire, surtout depuis qu’il a fusionné, en 1997, avec le canard boiteux McDonnell Douglas. Dès 2003, une étude avait révélé que, sur la valeur de l’action de 35 dollars, la partie civile ne valait que 3 dollars. Les contrats militaires, avec leurs avances, sont tellement plus confortables ! Le nouveau déménagement de son siège, en 2022, de Chicago à Washington, confirme que la direction a pour priorité les contacts avec le Pentagone et le lobbying politique. Loin, trop loin des ingénieurs.

    • Boeing to add further quality inspections for 737 MAX | Reuters
      https://www.reuters.com/business/aerospace-defense/boeing-add-further-quality-inspections-737-max-2024-01-15

      Boeing (BA.N) will add further quality inspections for the 737 MAX after a mid-air blowout of a cabin panel in an Alaska Airlines (ALK.N) MAX 9 earlier this month, the head of its commercial airplanes division said on Monday.

      The planemaker will also deploy a team to supplier Spirit AeroSystems (SPR.N) - which makes and installs the plug door involved in the incident - to check and approve Spirit’s work on the plugs before fuselages are sent to Boeing’s production facilities in Washington state, Stan Deal, president of Boeing Commercial Airplanes, said in a letter to Boeing employees.

      Où vont-ils chercher tout ça !?

    • et la FAA, aussi, prend de bonnes résolutions
      (c’est marrant – ou pas, comme disent certains par ici – je croyais me souvenir de bonnes résolutions du même tonneau de la même administration lors de l’affaire du MCAS)
      Alaska Airlines begins preliminary inspections on up to 20 Boeing 737-9 MAX | Reuters
      https://www.reuters.com/business/aerospace-defense/alaska-airlines-begins-preliminary-inspections-up-20-boeing-737-9-max-2024-

      Under more stringent supervision, the regulator will audit the Boeing 737 MAX 9 production line and suppliers and consider having an independent entity take over from Boeing certain aspects of certifying the safety of new aircraft that the FAA previously assigned to the planemaker.

      EDIT : 08/2019, les commentaires évoquent un régulateur laxiste…
      https://seenthis.net/messages/796072

      heureusement, chez nous, on est bons, parce que, dans le nucléaire, on fait le chemin inverse : absorption de l’IRSN par l’ASN pour former l’ASNR
      https://seenthis.net/messages/1036595

    • le téléphone passé à travers le hublot a été retrouvé à Vancouver et fonctionne encore après une chute de 5000 mètres…
      (pas le Vancouver canadien, mais le Vancouver états-unien, ville voisine de Portland d’où avait décollé l’avion)

      iPhone falls thousands of feet from Alaska Airlines jet and survives
      https://www.usatoday.com/story/news/nation/2024/01/09/iphone-boeing-737-max-9-jet-fall-physics-science/72156904007

      Even as serious questions emerged about why a door plug flew off one of Alaska Airlines’ new Boeing jets last week and forced an emergency landing, one question was on the mind of many cellphone users: How in the world did an iPhone reportedly fall 16,000 feet from the aircraft and survive intact?

      Social media channels were abuzz with discussion and speculation over how the phone could have still been operable and whether the phone’s survival might find its way into an advertising campaign. USA TODAY reached out to two scientists who explained how physics would have played a role. 

      David Rakestraw, a senior scientist at the Lawrence Livermore National Laboratory in California, works with students as part of the laboratory’s science and math education program. He often talks with students about cellphones, phone drop tests, and how students can do sophisticated experiments with their phones. 

      In this case, at least three things would have worked in the phone’s favor, Rakestraw explained. 

      First, phone manufacturers have been working to make phones stronger, given the number of tumbles our mobile devices take, from much shorter distances. Phone cases and screen protectors also help protect a phone when it falls, he said. And finally, where the phone landed might have made all the difference. 

      How was the cellphone found?
      A man in Vancouver, Washington, Sean Bates, posted on X that he found the iPhone in Portland on Sunday after the National Transportation Safety Board asked people in the area to search for any pieces that might have fallen from the jet.

      Bates told a local television station he found the phone alongside a road, under a bush. He said the phone was still in airplane mode, with a baggage receipt for the Alaska Airlines flight still on its screen.

  • Croissance russe : pourquoi les prévisionnistes se sont trompés pour 2022 et 2023, et pourquoi ils se tromperont encore pour 2024, par Jacques Sapir
    https://www.les-crises.fr/croissance-russe-pourquoi-les-previsionnistes-se-sont-trompes-pour-2022-e

    Depuis le début de l’application des sanctions occidentales contre la Russie fin février 2022, de nombreuses prévisions catastrophiques ont été faites sur l’économie russe. L’effet des sanctions, ou plus exactement des « mesures de coercition économique [1] », prises contre la Russie depuis le début du conflit en Ukraine, a été l’objet de nombreuses discussions[2]. Leur […]

    #Économie

  • « Faire appel à davantage de main-d’œuvre étrangère est devenu une nécessité vitale »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/08/faire-appel-a-davantage-de-main-d-uvre-etrangere-est-devenu-une-necessite-vi

    « Faire appel à davantage de main-d’œuvre étrangère est devenu une nécessité vitale »
    Gianmarco Monsellato
    Président de Deloitte France et Afrique francophone
    Alors que la loi française sur l’immigration adoptée le 19 décembre est très restrictive, l’avocat Gianmarco Monsellato explique, dans une tribune au « Monde », pourquoi la France a besoin des compétences étrangères pour préparer l’économie de demain.
    Les débats actuels l’illustrent : l’immigration tend à être abordée exclusivement à travers un prisme social et politique, et beaucoup trop peu à travers un prisme économique. Parasitées par les débats sécuritaires et identitaires, les discussions qui ont entouré l’examen puis le vote du projet de loi au Parlement n’ont pas fait toute sa place à une question pourtant centrale : comment former et attirer les talents qui occuperont les emplois que va créer l’économie de demain ?
    Nous nous trouvons face à un déficit de main-d’œuvre, sur fond de ralentissement démographique, avec une raréfaction de la ressource travail et une pénurie de compétences dont souffrent déjà les entreprises aujourd’hui. Une pénurie qui se constate à tous les niveaux : dans des grands groupes, mais plus largement sur l’ensemble du tissu économique.
    Une étude récente du Lab de Bpifrance sur la pénurie de talents dans les PME et les ETI (entreprises de taille intermédiaire) industrielles posait ainsi les bases d’un débat serein sur l’immigration économique, de manière globale et chiffrée, en montrant les besoins colossaux d’emplois à pourvoir (400 000 emplois supplémentaires d’ici à 2035 dans l’industrie).
    Faire appel à davantage de main-d’œuvre étrangère est devenu une nécessité vitale. On peut regretter que la discussion sur les fameux « métiers en tension » soit restée trop focalisée sur les emplois – souvent peu qualifiés – à pourvoir aujourd’hui. Mais les métiers en tension de demain, dont il faut se préoccuper vite, ce sont aussi tous ces emplois hautement qualifiés qui n’existent pas encore ! Ceux induits par les révolutions technologiques, par la mutation climatique, et ceux qui serviront à faire le lien entre toutes ces transitions, par leur capacité à synthétiser et mettre en perspective les nouvelles problématiques.
    Nous sommes d’ores et déjà entrés dans une compétition mondiale pour attirer ces talents. Or, force est de constater que notre système actuel n’y parvient pas suffisamment.Deux indicateurs éloquents pour s’en rendre compte : d’après le Conseil d’analyse économique, seulement 10 % de l’immigration en France est liée aux compétences – un chiffre bien inférieur à celui de nos voisins européens. Et sur l’index mondial de compétitivité des talents publiée par l’Insead, la France figure au 19e rang, loin derrière l’Allemagne. Il y a donc bien un sujet fondamental d’attractivité !
    La compétition est particulièrement marquée dans la tech. La transformation numérique et l’automatisation modifient la nature du travail, augmentant la demande pour des compétences en informatique, en analyse de données ou en intelligence artificielle. Il y a un écart entre les compétences enseignées et celles demandées par le marché du travail.
    L’immigration de main-d’œuvre qualifiée peut et doit aider à combler cet écart. En 2050, la moitié des jeunes diplômés seront originaires d’Afrique ; le niveau des étudiants africains en mathématiques est souvent supérieur à celui observé en France au lycée… Ignorer ce réservoir de talents serait une erreur stratégique majeure pour notre économie.
    L’enjeu devrait donc être de plus en plus de créer des régimes fiscaux et sociaux favorables, d’abaisser le coût du travail pour attirer cette main-d’œuvre étrangère. De nombreux pays l’ont fait. Les Etats-Unis, le Canada, l’Australie et l’Allemagne et même, récemment, le Japon, ont adopté des politiques ambitieuses en matière d’immigration. En France, ces politiques résolument volontaristes n’existent pas, ou peu. La question de l’immigration ne doit pas se limiter à un – légitime – débat politique. Elle est au cœur de la stratégie économique des Etats. Attirer des talents au-delà de ses frontières, c’est pour l’Europe une des conditions pour rester compétitive. L’apport des talents étrangers à l’économie française n’est pas seulement une question d’inclusion, c’est un levier de performance – et, in fine, une source de souveraineté.

    #Covid-19#migration#migrant#loiimmigration#migrationqualifiee#economie#talent#strategie#souverainete#inclusion#maindoeuvre#metierentension#france

  • Avec les datas des réseaux sociaux du Web, une nouvelle sociologie.
    http://www.argotheme.com/organecyberpresse/spip.php?article4560

    Les datas ont pris de la valeur avec l’informatique et plus amplement avec Internet. C’est une richesse qui s’avoue en informations utiles, pour savoir traiter avec l’humain, donc envers la société humaine entière. Elles sont davantage dans l’espace digital que l’internaute utilise aussi bien pour s’exprimer dans l’agora du Net. Accomplir des achats, rechercher des informations qui sont utiles ainsi que pour être présent et solidaire avec sa communauté, outre servir ses prochains ou bien sa patrie, le citoyen est en plus en ligne comme sur les plateaux médiatiques, les arènes politiques et les scènes d’art... Humanité

    / #Internet,_Web,_cyber-démocratie,_communication,_société,_médias, économie , #Data_-_Données, #Journalisme,_presse,_médias, Sciences & Savoir, facebook, twitter, (...)

    #Humanité #économie_ #Sciences_&_Savoir #facebook,_twitter,_google+

  • #Loi_immigration : l’accueil des étrangers n’est pas un fardeau mais une nécessité économique

    Contrairement aux discours répétés ad nauseam, le #coût des aides accordées aux immigrés, dont la jeunesse permet de compenser le vieillissement des Français, est extrêmement faible. Le #poids_financier de l’#immigration n’est qu’un #faux_problème brandi pour flatter les plus bas instincts.

    Quand les paroles ne sont plus audibles, écrasées par trop de contre-vérités et de mauvaise foi, il est bon parfois de se référer aux #chiffres. Alors que le débat sur la loi immigration va rebondir dans les semaines à venir, l’idée d’entendre à nouveau les sempiternels discours sur l’étranger qui coûte cher et prend nos emplois nous monte déjà au cerveau. Si l’on regarde concrètement ce qu’il en est, le coût de l’immigration en France, que certains présentent comme bien trop élevé, serait en réalité extrêmement faible selon les économistes. Pour l’OCDE, il est contenu entre -0,5% et +0,5% du PIB selon les pays d’Europe, soit un montant parfaitement supportable. Certes, les immigrés reçoivent davantage d’#aides que les autres (et encore, beaucoup d’entre elles ne sont pas réclamées) car ils sont pour la plupart dans une situation précaire, mais leur #jeunesse permet de compenser le vieillissement de la population française, et donc de booster l’économie.

    Eh oui, il est bien loin ce temps de l’après-guerre où les naissances explosaient : les bébés de cette période ont tous pris leur retraite ou sont en passe de le faire et, bientôt, il n’y aura plus assez de jeunes pour abonder les caisses de #retraite et d’#assurance_sociale. Sans compter que, vu l’allongement de la durée de vie, la question de la dépendance va requérir énormément de main-d’œuvre et, pour le coup, devenir un véritable poids financier. L’immigration, loin d’être un fardeau, est bien une #nécessité si l’on ne veut pas voir imploser notre modèle de société. Les Allemands, eux, l’assument haut et fort : ils ont besoin d’immigrés pour faire tourner le pays, comme l’a clamé le chancelier Olaf Scholz au dernier sommet économique de Davos. Le poids financier de l’immigration est donc un faux problème brandi par des politiques qui ne pensent qu’à flatter les plus bas instincts d’une population qui craint que l’avenir soit pire encore que le présent. On peut la comprendre, mais elle se trompe d’ennemi.

    https://www.liberation.fr/idees-et-debats/editorial/loi-immigration-laccueil-des-etrangers-nest-pas-un-fardeau-mais-une-neces
    #économie #démographie #France #migrations

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    voir aussi cette métaliste sur le lien entre #économie (et surtout l’#Etat_providence) et la #migration... des arguments pour détruire l’#idée_reçue : « Les migrants profitent (voire : viennent POUR profiter) du système social des pays européens »...
    https://seenthis.net/messages/971875

    ping @karine4

    • Sur les #prestations_sociales aux étrangers, la #contradiction d’#Emmanuel_Macron

      Le pouvoir exécutif vante une loi « immigration » qui concourt à une meilleure intégration des « travailleurs » et soutient « ceux qui travaillent ». Mais la restriction des droits sociaux pour les non-Européens fragilise le système de #protection_sociale.

      Depuis son adoption au Parlement, la loi relative à l’immigration est présentée par Emmanuel Macron et par le gouvernement comme fidèle à la doctrine du « #en_même_temps ». D’un côté, le texte prétend lutter « contre les #passeurs » et l’entrée illicite d’étrangers dans l’Hexagone. De l’autre, il viserait à « mieux intégrer ceux qui ont vocation à demeurer sur notre sol » : les « réfugiés, étudiants, chercheurs, travailleurs ». En s’exprimant ainsi dans ses vœux à la nation, le 31 décembre 2023, le président de la République a cherché à montrer que la #réforme, fruit d’un compromis avec les élus Les Républicains, et inspirée par endroits du logiciel du Rassemblement national, conciliait #fermeté et #humanisme.

      Mais cette volonté d’#équilibre est contredite par les mesures concernant les prestations sociales. En réalité, le texte pose de nouvelles règles qui durcissent les conditions d’accès à plusieurs droits pour les étrangers non ressortissants de l’Union européenne, en situation régulière, ce qui risque de plonger ces personnes dans le dénuement.

      Un premier régime est créé, qui prévoit que l’étranger devra soit avoir résidé en France depuis au moins cinq ans, soit « justifier d’une durée d’affiliation d’au moins trente mois au titre d’une activité professionnelle » – sachant que cela peut aussi inclure des périodes non travaillées (chômage, arrêt-maladie). Ce « #délai_de_carence » est une nouveauté pour les aides visées : #allocations_familiales, prestation d’accueil du jeune enfant, allocation de rentrée scolaire, complément familial, allocation personnalisée d’autonomie, etc.

      « #Régression considérable »

      Un deuxième régime est mis en place pour les #aides_personnelles_au_logement (#APL) : pour les toucher, l’étranger devra soit être titulaire d’un visa étudiant, soit être établi sur le territoire depuis au moins cinq ans, soit justifier d’une « durée d’affiliation d’au moins trois mois au titre d’une activité professionnelle ». Là aussi, il s’agit d’une innovation. Ces critères plus stricts, précise la loi, ne jouent cependant pas pour ceux qui ont obtenu le statut de réfugié ou détiennent la carte de résident.

      Le 19 décembre 2023, Olivier Dussopt, le ministre du travail, a réfuté la logique d’une #discrimination entre nationaux et étrangers, et fait valoir que le texte établissait une « #différence » entre ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent pas, « qu’on soit français ou qu’on soit étranger ». « Nous voulons que celles et ceux qui travaillent soient mieux accompagnés », a-t-il ajouté, en faisant allusion au délai de carence moins long pour les étrangers en emploi que pour les autres. Une présentation qui omet que le nouveau régime ne s’applique qu’aux résidents non européens, et laisse penser que certains étrangers mériteraient plus que d’autres d’être couverts par notre #Etat-providence.

      Alors que la loi est censée faciliter – sous certaines conditions – l’#intégration de ressortissants d’autres pays, des spécialistes de la protection sociale considèrent que les mesures sur les prestations tournent le dos à cet objectif. « Les délais de carence vont totalement à l’encontre de l’intégration que l’on prétend viser », estime Michel Borgetto, professeur émérite de l’université Paris Panthéon-Assas. Ils risquent, d’une part, de « précipiter dans la #précarité des personnes confrontées déjà à des #conditions_de_vie difficiles, ce qui aura pour effet d’accroître le nombre de #travailleurs_pauvres et de #mal-logés, voire de #sans-abri, relève-t-il. Ils sont, d’autre part, susceptibles de se révéler largement contre-productifs et terriblement néfastes, poursuit le spécialiste du droit de la #sécurité_sociale, dans la mesure où les étrangers en situation régulière se voient privés des aides et accompagnements nécessaires à leur insertion durable dans la société, dans les premiers mois ou années de leur vie en France. C’est-à-dire, en fait, au moment même où ils en ont précisément le plus besoin… »

      Maîtresse de conférences en droit social à l’université Lyon-II, Laure Camaji tient à rappeler que les prestations visées constituent des « #droits_universels, attribués depuis des décennies en raison de la résidence sur le territoire ». « Cela fait bien longtemps – depuis une loi de 1975 – que le droit aux #prestations_familiales n’est plus lié à l’exercice d’une #activité_professionnelle, souligne-t-elle. C’est un principe fondamental de notre système de sécurité sociale, un #acquis majeur qui forme le socle de notre #pacte_social, tout comme l’est l’#universalité de la #couverture_maladie, de la prise en charge du #handicap et de la #dépendance, du droit au logement et à l’#hébergement_d’urgence. »

      A ses yeux, le texte entraîne une « régression considérable » en instaurant une « #dualité de régimes entre les Français et les Européens d’un côté, les personnes non ressortissantes de l’Union de l’autre ». L’intégralité du système de protection sociale est fragilisée, « pour tous, quelle que soit la nationalité, l’origine, la situation familiale, puisque l’universalité n’est plus le principe », analyse-t-elle.

      Motivation « idéologique »

      Francis Kessler, maître de conférences à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, ne comprend pas « la logique à l’œuvre dans cette loi, sauf à considérer qu’il est illégitime de verser certaines prestations à une catégorie de la population, au motif qu’elle n’a pas la nationalité française, ou que les étrangers viennent en France pour toucher des aides – ce qu’aucune étude n’a démontré ». En réalité, complète-t-il, la seule motivation de cette loi est « idéologique » : « Elle repose très clairement sur une idée de “#préférence_nationale” et place notre pays sur une pente extrêmement dangereuse. »

      Toute la question, maintenant, est de savoir si les dispositions en cause seront validées par le #Conseil_constitutionnel. L’institution de la rue de Montpensier a été saisie par la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, ainsi que par des députés et sénateurs de gauche, notamment sur les restrictions des #aides_financières aux étrangers. Les parlementaires d’opposition ont mis en avant le fait que les délais de carence violaient – entre autres – le #principe_d’égalité. Plusieurs membres du gouvernement, dont la première ministre, Elisabeth Borne, ont reconnu que des articles du texte, comme celui sur les APL, pouvaient être jugés contraires à la Loi fondamentale. Le Conseil constitutionnel rendra sa décision avant la fin du mois de janvier.

      https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/01/05/sur-les-prestations-sociales-aux-etrangers-la-contradiction-d-emmanuel-macro
      #Macron #loi_immigration #accès_aux_droits

  • « On a désappris aux gens à faire durer les choses »

    Prendre soin des choses relève d’une activité souvent peu visible : la maintenance. Au nom de la croissance, cette pratique a été refoulée, racontent les sociologues Denis Pontille et Jérôme Denis.

    Réparer, recoudre, huiler, nettoyer, mettre à jour, aiguiser, inspecter… Toutes ces actions consistent à tenter de faire durer les objets avec lesquels nous vivons, de notre pull préféré aux aiguillages d’une ligne TGV. Toutes font partie d’un « art de la maintenance », remis sur le devant de la scène par les sociologues Jérôme Denis et David Pontille, rattachés au Centre de sociologie de l’innovation, dans leur ouvrage Le soin des choses, politique de la maintenance (éd. La Découverte). Ils nous invitent à repenser la relation au monde matériel qui nous entoure.

    Reporterre — Vous écrivez que « faire durer les choses est une opération presque subversive ». Pourquoi ?

    Jérôme Denis — Dans les configurations particulières que sont les pays riches et les zones riches de ces pays, une certaine forme de capitalisme s’est constituée autour d’une durée de vie restreinte des choses et d’une hyperconsommation. Face à cela, la maintenance, faire durer des choses, est une opération qui n’est pas révolutionnaire, mais qui met un grain de sable dans la machine.

    C’est différent de la réparation. Pourquoi ?

    David Pontille — La réparation est incluse dans la maintenance. Mais la réparation met en scène des héros et des héroïnes, des gens qui viennent « sauver » la situation, ou le monde, de la rupture, de la casse,de la panne, du désastre. Ils remettent la situation en ordre. Au contraire, la maintenance, ce sont des gestes pratiqués en continu, et c’est potentiellement tout le monde. Il n’y a pas de figures spécifiques qui viennent créer l’événement.

    À quel moment la maintenance a-t-elle été reléguée en arrière-plan ?

    Jérôme Denis — A un moment, dans les pays riches, s’est construit une lutte très explicite contre certaines pratiques de maintenance et de réparation ordinaire, quotidienne. Elles étaient populaires, domestiques ou à l’usine, en grande partie faites par les femmes. De l’économie, au sens « être économe ». Au tournant du XXᵉ siècle, un modèle économique s’est constitué contre ces pratiques. Il ne fallait pas que les gens fassent durer ce qu’ils consommaient. Il fallait qu’ils désapprennent, presque, à faire durer les choses. C’est allé jusqu’à des formes de stigmatisation publique. Des campagnes de communication aux États-Unis prétendaient qu’il était antinationaliste de faire des économies de bouts de chandelle, qu’il fallait absolument acheter parce que c’est un acte héroïque et patriotique.

    « Les personnes qui pratiquent la maintenance doivent produire leur invisibilité, comme les femmes de ménage dans les bureaux »

    Cela va avec l’invention du jetable. On n’est plus responsables, on n’a plus le fardeau de s’occuper de ce que l’on achète, d’y prêter attention. Après, il faut être très précis et ne pas oublier qu’aujourd’hui, dans n’importe quel quartier populaire, campagne, et dans pas mal de maisonnées, on trouve des traces de gens qui savent faire et font quand même, notamment parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement. Et on ne parle pas évidemment des pays du Sud.

    Pourquoi la maintenance a-t-elle été — au moins dans certains domaines — invisibilisée ?

    David Pontille — Au cœur de l’acte de maintenance, il y a l’idée de faire durer. Cela va à l’inverse des grands récits sur l’innovation, où il faut faire de la disruption, du nouveau, du créatif. Il y a aujourd’hui une survalorisation de l’acte créateur par rapport à l’acte reproducteur, de faire durer, de simplement poursuivre ce qui est déjà là. Cela va jusque dans la comptabilité, où c’est l’investissement qui est valorisé, qui crée la valeur, alors que les frais de fonctionnement sont considérés comme moins importants.

    Quelles conséquences sociales cela a-t-il sur ceux dont la maintenance est le métier ?

    Jérôme Denis — Une grande partie des activités de maintenance sont mal reconnues. Les personnes qui la pratiquent doivent produire leur invisibilité, comme les femmes de ménage dans les bureaux. Il y a des conséquences sur la reconnaissance de leur expertise, ce qui pose tout simplement des questions de rémunération. Comme on ne sait pas ce que rapporte la maintenance — c’est ce que disait Denis sur la comptabilité — on a du mal à la payer correctement.

    « Il faut prendre en compte le fait que si cette machine fonctionne bien, c’est grâce à des personnes qui l’entretiennent »

    La deuxième conséquence est que, comme à peu près n’importe quel travail productif, physique, la maintenance use. Il y a des troubles musculo-squelettiques, des expositions à des produits dangereux. Il faut prendre en compte le fait que si cette machine fonctionne bien dans cette usine, si cette infrastructure tient, c’est grâce à des personnes qui l’entretiennent. Et se demander quel est le coût financier et humain des travailleurs et travailleuses impliqués dans la maintenance.

    Quels sont les enjeux communs aux travailleuses du soin aux personnes et aux travailleurs de la maintenance ?

    Jérôme Denis — C’est le rapprochement que fait Mierle Laderman Ukeles [artiste américaine née en 1939, connue pour ses œuvres mettant en scène les tâches de maintenance et de nettoyage], qui est en couverture du livre. Cette artiste conceptuelle fait une connexion entre ce qu’elle fait à la maison et le travail des éboueurs de New York. Dans son Manifeste pour l’art de la maintenance, le care [soin] est un mot très important.

    « Le soin des choses et des personnes remet en cause le mythe de l’autonomie »

    Que ce soit pour le soin des personnes ou des choses, la fragilité est le point de départ, la condition commune. Les gens qui prennent soin des personnes sont des gens qui considèrent qu’il n’y a pas un état sain, puis des écarts à cet état sain. Tout le monde a des formes de vulnérabilité. Cela retourne l’idée du normal, de l’ordre : les mainteneurs et les mainteneuses prennent également la fragilité comme point de départ.

    L’autre point commun est la part d’invisibilité de ces personnes. Les deux activités — soin des choses et des personnes — remettent aussi en cause le mythe de l’autonomie, cette figure très libérale de l’individu qui fait ses choix en toute responsabilité, seul. Les théories féministes du soin redéfinissent l’autonomie et assument l’interdépendance, le fait qu’on a toujours besoin, à un moment donné dans notre vie, d’être pris en charge par d’autres.

    Et le dernier point commun, c’est l’ambivalence de ces activités et les jeux de pouvoir qui s’y jouent. Prendre soin, c’est potentiellement imposer des manières de faire. Qui prend soin de qui ? Jusqu’où ? Qui peut se permettre de ne jamais prendre soin et d’être insouciant ?

    Prendre soin des choses et des personnes peut-il nous apprendre à prendre soin de la nature ?

    Jérôme Denis — Oui, parce que les humains habitent le monde avec des choses. Dans le livre, on utilise les termes de « tact » et de « diplomatie matérielle », car quand on prend soin des choses, il y a cette idée de négociation. Jusqu’où peut-on se permettre d’aller pour faire durer, préserver, conserver, restaurer, entretenir ? C’est une question éminemment politique, mais aussi très philosophique. Et centrale dans la préservation environnementale.

    « Il faut se débarrasser du mythe de l’équilibre, de l’idée que les choses vont revenir à un état stable »

    Pour y répondre, on peut s’inspirer des formes de maintenance que l’on appelle modestes, qui assument qu’il faut faire, qu’il ne faut pas disparaître, mais qu’il ne faut pas être trop brutal. La conservation patrimoniale des monuments historiques est un excellent exemple. Alors que le modèle de Viollet-le-Duc était très immodeste, qu’il assumait des grandes transformations pour revenir à l’état « original » d’un monument, la profession s’est organisée depuis quelques années à l’échelle internationale autour du principe « d’intervention minimale » qui assume qu’il y a bien des interventions nécessaires pour la conservation, mais qui insiste aussi sur la nécessité de rester parcimonieux. Cela produit un rapport à l’environnement qui ressemble plus à ce que propose Aldo Leopold [1887-1948, considéré comme l’un des pères de la protection de l’environnement aux États-Unis], c’est-à-dire à une sorte de partenariat. Les humains sont à l’intérieur des écosystèmes, en essayant d’être le moins nuisibles possible, au nom d’une communauté de vie sur Terre.

    Et puis, on peut avoir tendance à imaginer que la maintenance ou le soin sont un statu quo. Certaines formes de maintenance essayent de fabriquer une immobilité. Ce que l’on montre, c’est que pour y arriver, il faut accepter les transformations. C’est typique de la signalétique du métro, que nous avons étudiée. C’est un dispositif destiné à être toujours présent, toujours en bon état. Pour assurer cela, il faut accepter d’en remplacer régulièrement des composants. Il y a là aussi une connexion avec la question de conservation environnementale. Il faut se débarrasser du mythe de l’équilibre, de l’idée que les choses vont revenir à un état stable, une fixité.

    https://reporterre.net/On-a-desappris-aux-gens-a-faire-durer-les-choses
    #objets #réparation #maintenance #capitalisme #consumérisme #hyperconsommation #économie #jetable #innovation #faire_durer #création #production #reproduction #investissement #fragilité #tact #diplomatie_matérielle #négociation

    • Le soin des choses. Politiques de la maintenance

      Qu’ont en commun une chaudière, une voiture, un panneau de signalétique, un smartphone, une cathédrale, une œuvre d’art, un satellite, un lave-linge, un pont, une horloge, un serveur informatique, le corps d’un illustre homme d’État, un tracteur ? Presque rien, si ce n’est qu’aucune de ces choses, petite ou grande, précieuse ou banale, ne perdure sans une forme d’entretien. Tout objet s’use, se dégrade, finit par se casser, voire par disparaître. Pour autant, mesure-t-on bien l’importance de la maintenance ? Contrepoint de l’obsession contemporaine pour l’innovation, moins spectaculaire que l’acte singulier de la réparation, cet art délicat de faire durer les choses n’est que très rarement porté à notre attention.
      Ce livre est une invitation à décentrer le regard en mettant au premier plan la maintenance et celles et ceux qui l’accomplissent. En suivant le fil de différentes histoires, ses auteurs décrivent les subtilités du « soin des choses » pour en souligner les enjeux éthiques et la portée politique. Parce que s’y cultive une attention sensible à la fragilité et que s’y invente au jour le jour une diplomatie matérielle qui résiste au rythme effréné de l’obsolescence programmée et de la surconsommation, la maintenance dessine les contours d’un monde à l’écart des prétentions de la toute-puissance des humains et de l’autonomie technologique. Un monde où se déploient des formes d’attachement aux choses bien moins triviales que l’on pourrait l’imaginer.

      https://www.editionsladecouverte.fr/le_soin_des_choses-9782348064838
      #livre

  • « La loi sur l’immigration est étriquée, erronée et dangereuse d’un point de vue économique »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/03/la-loi-sur-l-immigration-est-etriquee-erronee-et-dangereuse-d-un-point-de-vu

    « La loi sur l’immigration est étriquée, erronée et dangereuse d’un point de vue économique »
    Tribune Hillel Rapoport
    Professeur d’économie à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne
    Cela fait longtemps que le débat public sur l’immigration en France se focalise sur les questions sécuritaires et identitaires. Quand l’économie est abordée, c’est toujours en réaction à un agenda électoraliste et populiste : les immigrés prennent-ils le travail des Français et coûtent-ils plus qu’ils ne rapportent au budget de l’Etat ? Il est symptomatique que les deux seuls aspects véritablement économiques de la loi portent sur les métiers en tension et sur des conditions plus restrictives de versement de prestations sociales aux immigrés. Rien sur le long terme.
    Pourtant, d’un point de vue économique, l’immigration est à la fois la rançon de la réussite d’un pays et, dans un monde globalisé, une condition de sa croissance future. En eux-mêmes et par la diversité qu’ils apportent, les immigrés sont une source d’innovation, de création, d’entrepreneuriat et d’insertion dans l’économie mondiale. C’est évident pour l’immigration qualifiée.
    Aux Etats-Unis, les immigrés représentent un quart des entrepreneurs ou des innovateurs et plus du tiers des professeurs dans les universités les plus prestigieuses. La causalité est à double sens : la réussite et le rêve américain attirent les plus qualifiés, et les compétences ainsi que la diversité qu’ils apportent viennent nourrir le dynamisme, la productivité et la croissance de l’économie américaine.
    L’immigration moins qualifiée est également porteuse de bénéfices économiques. Au-delà des aspects démographiques de soutenabilité des systèmes de retraite, les immigrés sont largement complémentaires des travailleurs natifs. Le fait qu’ils « exercent les métiers dont les Français ne veulent pas », pour employer un poncif, n’en est pas moins vrai, et par ailleurs leur concentration dans les services à la personne permet de libérer du travail qualifié, notamment féminin.
    En définitive, l’immigration est un atout stratégique fondamental dans la compétition économique internationale ; s’en priver, c’est se tirer une balle dans le pied, et c’est exactement ce que fait la France depuis maintenant cinquante ans, à contre-courant de la plupart des autres pays de l’OCDE [Organisation de coopération et de développement économiques]. Plutôt que de renvoyer aux nombreuses études qui le démontrent, considérons l’échec douloureux et presque humiliant de la France dans la course à la production d’un vaccin contre le Covid-19.
    Nos champions nationaux se sont fait damer le pion par Pfizer, entreprise aussi multinationale que multiculturelle, dont la collaboration avec BioNTech, licorne allemande fondée par des chercheurs d’origine turque, a connu le succès que l’on sait ; et par Moderna, entreprise américaine créée dix ans auparavant par trois fondateurs dont un immigré libano-arménien et un Sino-Américain, établi en Suède, et dirigée par… un Français. Pourquoi la France a-t-elle échoué ? Il n’est pas exclu que ce soit la faute des immigrés… qu’on n’a pas su attirer, promouvoir, intégrer.
    Mais qui songerait à pointer l’absence de diversité de nos élites économiques, politiques et scientifiques (absence totale dans le cas du comité de direction de Sanofi France) ? L’étroitesse d’esprit qui nous empêche de voir ce que la diversité peut nous apporter nous rend myopes sur les questions d’immigration, au sens propre d’absence de vision de long terme.
    Le fait est que depuis cinquante ans la France s’est enfermée dans un cercle vicieux où l’arrêt de l’immigration de travail dès le milieu des années 1970 la condamne à ne subir (car c’est bien comme cela qu’elle le vit) qu’une immigration au nom du droit (familial et humanitaire) plutôt qu’au nom de l’économie, ce qui se traduit par une structure de l’immigration moins qualifiée et moins diversifiée que dans la plupart des autres pays de l’OCDE.Mais ce type d’immigration, peu qualifiée et peu diversifiée, est justement celui qui alimente les attitudes négatives vis-à-vis de l’immigration, mais aussi les crispations identitaires et économiques liées à la compétition réelle ou supposée pour les emplois, les logements et les aides sociales. Et pousse les opinions publiques à exiger encore moins d’immigration.
    Dans le même temps, les pays anglo-saxons mettent en œuvre des politiques volontaristes d’ouverture à l’immigration, qualifiée et non qualifiée, proposant un contre-modèle vertueux. Le principal dispositif, les « systèmes par points », attribue à chaque candidat à l’immigration un certain nombre de points en fonction de critères tels que l’âge, le niveau d’éducation, de maîtrise de la langue, la profession, etc., et définit un seuil total de points synonyme de visa d’immigration permanente.
    De tels systèmes ont été adoptés successivement par l’Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni, et aucun ne les a depuis abandonnés. Ces pays auraient-ils compris quelque chose qui nous échappe ? Ou sont-ils plus attractifs ? Il est exact que la France, qui proclame vouloir attirer les talents, souffre d’un déficit d’attractivité, ce que révèle par exemple son classement dans l’indice de compétitivité globale pour l’attraction des talents (19ᵉ sur 25) de l’Institut européen d’administration des affaires.
    La modélisation des déterminants des migrations internationales met en évidence tant le rôle des facteurs d’attraction – salaires, libertés publiques, mais aussi mieux-disant environnemental et sociétal sur des questions telles que l’ouverture à la diversité – que celui des facteurs de répulsion, dont la xénophobie et le populisme. De ce point de vue, la loi relative à l’immigration émet un signal désastreux. Elle relève sans doute avant tout d’un calcul politique, mais celui-ci est risqué et se double d’un calcul économique erroné et perdant.
    Hillel Rapoport est titulaire de la chaire Economie des migrations internationales à l’Ecole d’économie de Paris.

    #Covid-19#migrant#migration#france#loiimmigration#attractivite#economie#talents#competitivite#determinantmigration#metierentension#politiquesociale#xenophobie

  • Allemagne : l’immigration dope les chiffres de l’emploi - InfoMigrants
    https://www.rfi.fr/fr/europe/20240102-allemagne-l-immigration-dope-les-chiffres-de-l-emploi

    InfoMigrants : En Allemagne, le secteur de la gastronomie a connu une hausse de l’activité professionnelle.
    Par RFI Publié le : 03/01/2024
    Le marché du travail en Allemagne est en pleine forme : malgré un ralentissement de la croissance en 2023, il n’y a jamais eu autant d’actifs outre-Rhin. L’une des raisons : l’immigration.
    Avec notre correspondante à Berlin, Blandine Milcent
    C’est le scénario idéal décrit depuis des années pour tenter de contrer une démographie en berne : le marché du travail allemand a bénéficié l’an dernier d’une main-d’œuvre étrangère qui a boosté les emplois. Près de 46 millions de personnes avaient un travail l’an dernier en Allemagne, soit 330 000 de plus que l’année précédente. C’est un record depuis la réunification il y a plus de 30 ans.
    Par ailleurs, l’institut de la statistique note également « une participation plus importante de la population allemande au marché du travail », ce que confirme une hausse de l’activité professionnelle chez les femmes ou les personnes âgées.Sans surprise, le premier secteur économique à avoir généré des emplois supplémentaires est le secteur des services, dans la santé et l’éducation notamment, mais aussi dans le commerce et la gastronomie. On ne peut en conclure pour autant que l’Allemagne a gagné son pari démographique, au contraire : la pénurie de main-d’œuvre devrait se faire douloureusement sentir à partir de 2025, quand ceux que l’on appelle « les boomers » commenceront à partir à la retraite.

    #Covid-19#migrant#migration#allemagne#immigration#emploi#economie#demographie#vieillissement#sante#eductaion#service#marchedutravail

  • Terre : aux racines du capitalisme

    L’élément terre, dans son acception économique peut s’entendre de deux manières : la terre à exploiter, dont on peut tirer des ressources et du profit, et la Terre à préserver et à “sauver” d’un #capitalisme_prédateur qui l’épuise. L’idée de parler de capital Terre reprend deux notions incluses dans le terme Terre, à savoir comprendre la Terre à la fois comme notre planète et à la fois comme une ressource foncière. On ressent bien l’ambivalence dans l’expression capital Terre : la Terre est à la fois notre espace de vie, un espace commun et un bien précieux à préserver, mais elle est aussi une ressource dans laquelle puiser des richesses et dont on peut retirer des profits.
    Du 12ème au 19ème siècle : comment la croissance se fonde-t-elle sur le travail de la terre ?

    Selon Alessandro Stanziani, l’histoire économique de la terre comme capital commence au 12ème siècle, il précise "selon Fernand Braudel et Werner Sombart le capitalisme commence au 12ème siècle. Le capitalisme selon Braudel est identifié par le monopole, plutôt que la concurrence, et par la finance. Je complète cette définition avec la notion que les ressources sont uniquement à exploiter et non pas à préserver pour le futur et surtout que le travail doit être soumis à des contraintes sévères au long de plusieurs siècles. De ce point de vue-là, je n’associe pas, comme Marx, le travail et le capitalisme au travail salarié et au prolétaires, au contraire, j’associe les formes multiples du capitalisme aux formes différentes du travail contraint. D’où la possibilité d’inclure les régimes qui commencent au 12ème siècle sous le nom de capitalisme". Par ailleurs, du 12e au 19e, la hausse de la production agricole correspond à une augmentation des surfaces cultivées, en effet les déforestations n’ont cessé d’être présentes du néolithique au haut Moyen-Âge et elles s’accélèrent fortement entre le 8e et le 13e siècle. Cependant, même au 12ème siècle des contestations contre le déboisement et l’exploitation de la terre à des fins productives agraires existaient déjà, Alessandro Stanziani ajoute "les résistances sont importantes, plusieurs acteurs se rendent compte de la nécessité de préserver les forêts afin d’avoir de bonnes récoltes à côté, mais aussi pour des intérêts économiques, politiques et sociaux. Cette résistance est celle d’un capitalisme que j’appelle foncier, agraire et quasi industriel, qui va du 12ème au 19ème siècle".
    De 1870 à 1970 : vers un modèle productiviste et une surexploitation de l’élément terre

    Pendant ces décennies, l’exploitation des ressources de la terre et le système capitaliste connaissent des changements majeurs, marqués par une intensification remarquable. Alessandro Stanziani précise "dans l’agriculture et dans le pays du Nord, la mécanisation est très lente, mais on constate un changement significatif avec les semences. Après la crise de 29, aux Etats-Unis, on s’intéresse aux semences hybrides. Il y a des investissements massifs, on donne des semences hybrides aux fermiers américains et ensuite, on vend ces mêmes semences à l’Europe avec l’aide du plan Marshal et on impose aux agriculteurs européens d’avoir recours aux semences hybrides. L’avantage des semences hybrides, ce sont des rendements faramineux, ça commence par le maïs, la plante des plaines américaines, et de fait on arrive à nourrir de plus en plus de population à l’échelle mondiale. L’inconvénient c’est que les semences hybrides ont une durée de vie très courte, de un ou deux ans, pour qu’elles soient rentables il faut beaucoup de fertilisants chimiques. Les producteurs de semences produisent aussi le fertilisants chimiques, ils sont gagnants des deux côtés. Par ailleurs, ces producteurs ont le monopole et l’exclusivité de ce marché. Enfin, les rendements des hybrides commencent à décroître après 20 ans".
    De 1970 à 2050 : spéculer sur le capital Terre : la terre face à la libéralisation des marchés

    Les bouleversements majeurs ont lieu pendant les années 1970 : la fin du système de Bretton Woods, les chocs pétroliers, le déclin du keynésianisme et de l’État social en Occident et le début des réformes en Chine.
    Par ailleurs, la spéculation sur les produits agricoles s’élargit aux terres elles-mêmes : il ne s’agit pas seulement d’échanger des produits virtuels dont la plupart ne verront jamais le jour, mais de contrôler ces flux hypothétiques à l’échelle mondiale. Selon Alessandro Stanziani "avec le néolibéralisme des années 80 et surtout dans les années 1990, on assiste à la libéralisation totale des Bourses de marchandises, avec les spéculations sur les matières premières et sur le blé, et on arrive jusqu’aux crises de 2008/2010 et jusqu’au crise de nos jours sur la vie chère. C’est-à-dire que c’est une pénurie qui est provoquée, non pas par de mauvaises récoltes, mais surtout par les spéculations".

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/entendez-vous-l-eco/terre-aux-racines-du-capitalisme-8719942

    #capitalisme #terre #agriculture #histoire #économie_capitaliste #terres #Alessandro_Stanziani #capital_terre #spéculation #exploitation #foncier #ressource_foncière #à_écouter #ressources_pédagogiques #croissance #déforestation #forêts #déboisement #mécanisation #semences #semences_hybrides #plan_Marshal #maïs #rendements #industrie_agro-alimentaire #fertilisants #néolibéralisme #blé #matières_premières #pénurie #podcast #audio

    • Capital Terre. Une histoire longue du monde d’après (XIIe-XXIe siècle)

      Et si le cœur du problème de la faim dans le monde n’était pas la hausse de la population mais plutôt les modalités de la production agricole et surtout de la distribution au profit des plus riches ? Dans cet essai engagé pour des sociétés plus solidaires et plus justes, qui retrace l’histoire longue du capitalisme, Alessandro Stanziani propose de renouer avec le contrat social cher à J.-J. Rousseau et de faire de la démocratie, de l’égalité sociale et de l’environnement les trois piliers du monde d’après. Défenseur d’une politique publique conciliant croissance économique et démographique, droits du travail, lutte contre les inégalités et protection de la planète, il plaide pour la fin des spéculations sur les denrées alimentaires, de l’accaparement des terres et de la propriété industrielle, en particulier sur les semences, véritable « patrimoine de l’humanité », et prône une refonte plus égalitaire de la fiscalité et des finances publiques.
      Une pensée économique globale, qui se préoccupe autant de l’avenir de l’Asie et de l’Afrique que de celui de l’Europe, par un brillant historien reconnu à l’international et fort de décennies de recherches sur le terrain dans le monde entier.

      https://www.payot-rivages.fr/payot/livre/capital-terre-9782228929257
      #livre

  • L’homme d’#affaires le plus riche d’#Afrique a perdu plusieurs milliards de dollars en 2023

    Comme quoi la taille de la #teub et la taille du #cerveau n’ont rien à voir...

     :-D :-D :-D

    #économie #politique #finance #Monde #mondialisation #piège_à_cons #société #alternatives #seenthis #vangauguin #t_as_pas_cent_balles

    « Le milliardaire nigérian #Aliko_Dangote a vu sa #fortune chuter de 3,6 milliards de dollars au cours des 12 mois écoulés, selon l’indice Bloomberg Billionaires.
    Le coût des actifs d’Aliko Dangote, fondateur et propriétaire du groupe éponyme, a enregistré une baisse 3,6 milliards de dollars depuis le début de l’année, relate Bloomberg dans son classement des milliardaires Billionaires Index.
    Malgré une forte reprise l’année précédente, en 2023, la valeur nette du milliardaire nigérian a baissé de 18,7 milliards de dollars (à la date du 31 décembre 2022) à 15,1 milliards au 31 décembre 2023. (...) »

    https://fr.sputniknews.africa/20231231/lhomme-daffaires-le-plus-riche-dafrique-a-perdu-plusieurs-milliar

  • « Le régime d’immigration français, prisonnier du passé, tourne le dos à ses intérêts »
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/12/30/le-regime-d-immigration-francais-prisonnier-du-passe-tourne-le-dos-a-ses-int

    « Le régime d’immigration français, prisonnier du passé, tourne le dos à ses intérêts »
    L’économiste El Mouhoub Mouhoud, président de l’université Paris Dauphine-PSL, estime, dans un entretien au « Monde », que la France « n’a pas été capable de faire la transition vers une politique ouverte et positive de l’immigration ».
    Le Parlement a adopté définitivement, mardi 19 décembre, la loi sur l’immigration. La veille, El Mouhoub Mouhoud, membre du cercle des économistes, spécialiste des migrations internationales et de la mondialisation, a signé la lettre ouverte des dirigeants de grandes écoles et d’universités du pays pour déplorer le durcissement à l’égard des étudiants internationaux.
    Vous appelez à un discours global sur l’immigration et pas seulement orienté vers les plus qualifiés. Quels peuvent être les effets économiques de la loi votée ?
    –On assiste à un recul inquiétant des arguments rationnels sur le sujet. J’ai signé l’appel des présidents d’universités car envoyer des signaux négatifs aux étudiants internationaux, c’est se couper de la possibilité de puiser dans les compétences mondiales, pour un gain économique nul. Jusqu’ici, le discours politique français dominant visait à disjoindre les mauvaises migrations des bonnes : d’un côté les migrants non qualifiés, irréguliers ou issus du regroupement familial ; de l’autre, les talents qu’on disait encore vouloir attirer ou garder. Cela n’a pas marché : en dépit des progrès des entrées liées aux « passeports talents », l’attractivité de la France en matière de compétences mondiales reste en deçà des grands pays industrialisés.Faire l’hypothèse qu’on peut tenir un discours de rejet de l’immigration tout en restant attractif pour les talents est illusoire. Plus les compétences sont élevées, plus les migrants choisissent leur pays d’accueil et sont sensibles aux discours politiques sur le sujet. La loi remet en cause des mécanismes d’intégration qui faisaient consensus, avec des effets qui seront négatifs.
    La droite craignait que les régularisations ne créent un appel d’air incitatif. Qu’en est-il ?
    –Pas un seul papier sérieux d’économiste ou de démographe ne confirme cette idée. Les flux d’immigration à l’échelle mondiale sont déterminés par des facteurs structurels comme la mondialisation des échanges, les écarts démographiques, les crises géopolitiques et humanitaires ou les chocs technologiques.Depuis une dizaine d’années, les délocalisations vers les pays à bas salaires ralentissent, tandis que les Etats promeuvent les relocalisations et la réindustrialisation. Plus une entreprise relocalise, plus elle va chercher des territoires à fort avantage technologique et de recherche et développement, plus elle va avoir besoin de compétences. La réindustrialisation est étroitement liée aux politiques de formation, mais aussi à l’attractivité des étudiants internationaux et de migrations qualifiées. Les pays qui tirent leur épingle du jeu sont ceux qui parviennent à puiser dans le stock mondial de connaissance. Et cela passe largement par l’attraction et la rétention des étudiants internationaux. Plus de 60 % des diplômés étrangers restent au Canada, aux Etats-Unis, en Allemagne, pour y être employés. La France se distingue par un taux de rétention environ deux fois plus faible.
    Le gouvernement considère que, à 7 % de chômage, il faut d’abord ramener une partie des actifs vers le marché du travail et miser sur la formation. Qu’en pensez-vous ?
    –Cela ne suffit pas. Les migrations internationales ne peuvent certes pas régler les problèmes du marché du travail à long terme, mais les politiques de formation prennent du temps. Or les secteurs qui sont dans la compétition mondiale ont des besoins de court terme. Si vous ne puisez pas dans les talents, à long terme vous êtes perdants, y compris dans les processus de formation, car les avantages comparatifs ne sont pas statiques, ils bougent en permanence.L’intelligence artificielle générative est par exemple un défi majeur qui va transformer la plupart des métiers et des secteurs. Le sous-estimer, c’est comme sous-estimer les effets du réchauffement climatique. Or la France n’offre pas assez de formations et devra davantage puiser dans les compétences mondiales. La politique d’attractivité des migrants et la politique de formation ne s’excluent pas mutuellement.
    Peut-on résoudre les pénuries de main-d’œuvre dans les métiers en tension en augmentant les salaires ?
    –La dépendance à l’immigration dans les métiers les moins qualifiés n’est pas seulement liée aux problématiques salariales. C’est une vulgate néolibérale, ainsi qu’une vieille idée faussement marxiste. La complémentarité entre immigrés et autochtones est une réalité à l’intérieur même des catégories socioprofessionnelles. Certaines tâches extrêmement pénibles, par exemple dans le BTP, n’attireront pas les autochtones même en augmentant les salaires de 15 %.
    Les travaux montrent que les effets de substitution ne jouent que pour des tâches peu qualifiées et automatisables. Par ailleurs, les entreprises ne peuvent pas décréter du jour au lendemain qu’elles augmentent les salaires de 15 %, cela prend du temps. Il ne s’agit évidemment pas d’ouvrir les frontières tous azimuts. Mais ce « débat » cache une obsession liée aux impacts sécuritaires et culturels de l’immigration, perçus comme néfastes à la société.
    Emmanuel Macron a mené une politique très offensive sur l’attractivité de la France depuis 2017. S’est-elle traduite dans les flux migratoires ?
    – Quand Donald Trump s’est retiré de la COP21 et a restreint l’immigration à partir de 2017, le président Macron avait lancé un appel pour attirer en France les chercheurs étrangers, notamment américains, dans le but de sauver le climat. Il y avait cette idée d’une France en mode start-up qui pouvait être fécondée par les talents internationaux. On ne la retrouve pas dans cette loi sur l’immigration. Emmanuel Macron a toutefois reconnu que la caution pour les étudiants internationaux était une erreur et qu’elle aurait des effets dissuasifs. Certaines entreprises satisfont leurs besoins de main-d’œuvre en recourant à l’immigration irrégulière dans des secteurs en tension. Soit les chefs d’entreprise ont besoin de régulariser et c’était l’occasion de le dire, ce que certains ont fait. Soit ils ont une préférence pour l’immigration irrégulière, qui les arrange, ou du fait de la forte pression sur les prix. Quand les difficultés de recrutement seront telles que la production sera gênée, le discours changera. Et on reverra peut-être des patrons de PME manifester avec leurs salariés.
    Qu’est-ce qui singularise la France en matière d’immigration ?
    – La France n’a pas une culture de l’immigration qualifiée, bien payée, raisonnée. Du fait de son histoire coloniale, elle a eu tendance à privilégier l’immigration peu qualifiée, comme elle importait les matières premières. Elle a du coup un « stock global » d’immigrés peu qualifiés. Mais depuis les années 1990-2000, ceux qui arrivent sont en moyenne plus diplômés que les autochtones.
    Le régime d’immigration français, parce qu’il est prisonnier du passé, y compris en matière de représentations liées à la colonisation, tourne le dos à ses intérêts. Il n’a pas été capable de faire la transition vers une politique ouverte et positive de l’immigration à l’échelle mondiale. La France a une représentation de l’immigration réduite à ses deux extrêmes : les stars du football et les délinquants, ignorant tous ceux qui se sont intégrés par l’école et qui sont très nombreux. Ce qui la caractérise aussi, c’est sa préférence pour une régulation du marché du travail par l’immigration irrégulière. Tout le monde était d’accord pour régulariser dans les métiers en tension. Mais c’est bien utile de pouvoir utiliser de la main-d’œuvre immigrée dont on peut se défaire facilement. Elsa Conesa

    #Covid-19#migration#migrant#france#loiimmigration#economie#migrationqualifiee#marchedutravail#immigrationirreguliere#maindoeuvre#patronat#colonial

  • Everything politicians tell you about immigration is wrong. This is how it actually works | Hein de Haas | The Guardian
    https://www.theguardian.com/commentisfree/2023/dec/29/politicians-immigration-wrong-cheap-labour
    https://i.guim.co.uk/img/media/6e53b5beb207e5e821a2c7f58bdb45714b46e31e/0_0_2560_1536/master/2560.jpg?width=1200&height=630&quality=85&auto=format&fit=crop&overlay-ali

    Everything politicians tell you about immigration is wrong. This is how it actually works
    Hein de Haas
    We seem to be living in times of unprecedented mass migration. Images of people from Africa crammed into unseaworthy boats desperately trying to cross the Mediterranean, asylum seekers crossing the Channel into Britain, and “caravans” of migrants trying to reach the Mexico-US border all seem to confirm fears that global migration is spinning out of control. A toxic combination of poverty, inequality, violence, oppression, climate breakdown and population growth appear to be pushing growing numbers of people from Africa, Asia and Latin America to embark upon desperate journeys to reach the shores of the wealthy west.
    All of this results in the popular idea of a “migration crisis” that will require drastic countermeasures to prevent massive waves of people arriving in the future, apparently exceeding the absorption capacity of western societies and economies. Despite this, however, there is no scientific evidence to sustain the claim that global migration is accelerating. International migrants account for about 3% of the world population, and this percentage has remained remarkably stable over the past half a century. Likewise, refugee migration is much more limited than political rhetoric and media images suggest. About 10% of all international migrants are refugees, representing 0.3% of the world population. While refugee flows fluctuate strongly with levels of conflict, there is no evidence of a long-term increasing trend. About 80-85% of refugees remain in regions of origin, and that share has also remained rather stable over the past decades. And there is no evidence that illegal migration is spinning out of control – in fact, the large majority of migrants who move from the global south to the global north continue to move legally. For instance, nine out of 10 Africans move to Europe legally, with passports and papers in hand.
    The evidence also turns common understandings of the causes of migration on its head. The conventional view is that south-to-north migration is in essence the outgrowth of poverty, inequality and violence in origin countries – hence the popular idea that poverty reduction and development are the only long-term solutions to migration. However, this assumption is undermined by evidence showing that migration rises as poor countries become richer. This is because increasing levels of income and education, alongside infrastructure improvements, raise people’s capabilities and aspirations to migrate. Instead of the stereotypical “desperate flight from misery”, in reality migration is generally an investment in the long-term wellbeing of families and requires significant resources. Poverty actually deprives people of the resources required to move over long distances, let alone to cross continents.
    This is also one of the many reasons why, contrary to common assumptions, climate breakdown is unlikely to trigger mass movements of “climate refugees”. Research on the effects of droughts and flooding shows that most people will stay close to home. In fact, the most vulnerable people are most likely to get trapped, unable to move out at all. It is no coincidence that most migrants come from middle-income countries such as India and Mexico. The paradox is that any form of development in the poorest countries of the world – such as in sub-Saharan Africa – is therefore likely to increase their future emigration potential. Still, despite global averages remaining stable, it is difficult to deny that legal immigration to the US, Britain and western Europe has been growing over the past decades. The frequent discontent this has caused has gone along with repeated calls for less, more controlled or more selective immigration. But border crackdowns have clearly failed to achieve these objectives or have even made problems worse because they were not based on an understanding of how migration really works. The main reason is that these policies ignored the most important root cause of migration: persistent labour demand.
    The misleading assertion that poverty causes migration conceals the fact that labour demand has been the main driver of growing immigration to western countries since the 1990s. More widespread education, women’s emancipation and population ageing have led to labour shortages; these have fuelled a growing demand for migrant workers in sectors such as agriculture, construction, cleaning, hospitality, transport and food processing, as supplies of local workers willing and able to do such jobs have increasingly run dry. Without such chronic labour shortages, most migrants wouldn’t have come. But this hasn’t been a natural process. It is instead one that has been encouraged by decades of policies geared towards economic and labour market liberalisation, which have fuelled the growth of precarious jobs that local workers won’t take. Politicians from left to right know this reality, but they don’t dare admit it out of fear of being seen as “soft on immigration”. They choose instead to talk tough and revert to acts of political showmanship that create an appearance of control, but that in effect function as a smokescreen to conceal the true nature of immigration policy. Under this current arrangement, more and more migrants are allowed in, and the employment of undocumented workers is widely tolerated as they fill in crucial labour shortages.
    Politicians have turned a blind eye as proven by almost laughably low levels of workplace enforcement. To break away from this legacy of failed policies, politicians need to gather the courage to tell an honest story about migration: that it is a phenomenon that benefits some people more than others; that it can have downsides for some, but cannot be thought or wished away; and that there are no simple solutions for complex problems. Fundamental choices have to be made. For example, do we want to live in a society in which more and more work – transport, construction, cleaning, care of elderly people and children, food provision – is outsourced to a new class of servants made up mainly of migrant workers? Do we want a large agricultural sector that partly relies on subsidies and is dependent on migrants for the necessary labour? The present reality shows that we cannot divorce debates about immigration from broader debates about inequality, labour, social justice and, most importantly, the kind of society we want to live in.
    Hein de Haas is professor of sociology at the University of Amsterdam, and the author of How Migration Really Works

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