• Trigger warning : Ernest Hemingway devenu peu recommandable
    https://actualitte.com/article/112365/international/trigger-warning-ernest-hemingway-devenu-peu-recommandable

    Un éditeur qui « décline toute responsabilité » sur ce qu’il édite. Pas mal comme formule, digne du roi des faux-culs.

    Penguin Random House, étroitement liée à ce géant de la littérature du XXe siècle, a fléchi. Notre époque, encline à prévenir excessivement, voire à aseptiser les œuvres littéraires, affecte le grand Ernest : les romans et nouvelles du lauréat du prix Nobel 1954 sont en cours de réédition. Et le groupe, dans un effort bienveillant, a introduit les fameux “trigger warnings”.

    Ces avertissements destinés au lecteur ont pour but de signaler et de protéger les lecteurs jugés sensibles. Trop, du moins, pour ne pas anticiper leur confrontation avec le texte.

    Dans la dernière version du roman The Sun Also Rises (Le Soleil se lève aussi), le puissant groupe éditorial américain a inséré un avertissement : il décline toute responsabilité quant au contenu de l’ouvrage. Et plus encore, selon le Telegraph, il est fait mention d’un langage, d’attitudes décrites ou de représentations culturelles susceptibles de heurter.

    « La décision de l’éditeur de présenter [le texte] tel qu’il a été initialement publié ne vise pas à approuver les représentations culturelles ou le langage contenus ici. »

    – Message de Vintage dans The Sun Also Rises

    Pour Richard Bradford, auteur de la biographie The Man Who Wasn’t There (2018), ces remarques « seraient hilarantes si elles n’étaient pas alarmantes ». Certes, PRH réédite sans modifier le texte original — contrairement à ce qu’ont subi les livres d’Agatha Christie, Ian Fleming ou Roald Dahl. Mais la prudence excessive du groupe, qui prend ses distances avec l’écrivain, en devient presque pire que l’intervention dans les textes.

    « Ce serait compréhensible s’ils avaient publié une nouvelle traduction de Mein Kampf », reprend le professeur Bradford. Car le message qui passe, en fin de compte, se résume en quelques mots : attention, lecteur, tu t’apprêtes à parcourir ce livre... Pour l’enseignant, toute œuvre contiendra un passage problématique, dès lors qu’on en cherchera un. « Et chaque publication portera alors un avertissement similaire, l’équivalent de ces photos de poumons cancéreux qui ornent désormais les paquets de cigarettes », estime-t-il.

    Il conclut ainsi : « Les éditeurs et tout l’establishment littéraire semblent pétris d’un mélange de stupidité et de menace quant à ce que les lecteurs seraient autorisés à penser. »

    « The Sun Also Rises est considéré comme l’un des plus grands romans américains, mais a été critiqué pour ses tropes antisémites. »

    – Message de Vintage dans le recueil de nouvelles Men Without Women

    Alors, oui : Hemingway aimait l’alcool, et ce, jusqu’à son suicide en 1961. Il fut chasseur et participa à des safaris en Afrique, aussi bien que journaliste en couvrant la guerre civile en Espagne, ou encore pêcheur à Key West. Que la maison Vintage, à l’origine de cet avertissement pour la réédition du texte, ressente le besoin de ce message en dit long sur l’état d’anxiété ambiante dans l’industrie.

    L’éditeur n’a d’ailleurs pas confirmé que les prochaines publications comporteraient un pareil avis. D’autant que certains pointent que des adaptations télé ou ciné de The Old Man and The Sea, avaient reçu l’accord pour une diffusion tout public. Pourtant, note le Daily Mail, des étudiants en Histoire et Littérature de l’université des Highlands, sur le point d’étudier Hemingway, furent mis en garde.

    Mary Dearborn, qui publia Ernest Hemingway, A Biography, évoque un non-sens. « Ça me dépasse d’imaginer que l’on incite des étudiants à éviter ce livre ». Et de rappeler que « le monde demeure un endroit violent : prétendre le contraire est contre-productif ». Qu’Hemingway parle de chasse ou de pêche et le voici bientôt frappé du sceau de l’infamie, façon Caïn-caha ?

    #Edition #Hemingway

  • Marxisme noir, une plongée passionnante dans la tradition radicale noire
    https://www.revolutionpermanente.fr/Marxisme-noir-une-plongee-passionnante-dans-la-tradition-radica

    Il ne suffit pas d’utiliser les mêmes termes pour que le concept soit le même. Robinson, lui, concède également qu’il y a un caractère racial au capitalisme. Toutefois, selon lui le rapport entre racisme et capitalisme découle d’un « racialisme » antérieur au capitalisme. Ainsi, selon Robinson, au début du capitalisme, le racisme était déjà assez largement présent. Pour reprendre ce que j’écris dans la préface « Le racialisme, en tant que force matérielle présente dans les sociétés européennes précapitalistes, aurait donc donné dès le départ une orientation raciale au capitalisme. » (p. 17) Le caractère racial du capitalisme ne découlerait donc pas uniquement des rapports entre l’Europe et « son dehors », mais serait à trouver au sein même de cette Europe – dans les rapports entre l’Europe et ses « parias ». Cette approche permet à Robinson d’éviter de sombrer dans une approche trop mécaniste du développement capitaliste et du racisme (où les étapes historiques se succéderais de manière linéaire et simpliste).

    #livres #édition #communisme

  • Berlin, mars 2023 : journal de bord de la première visite d’études d’ECHO Network
    https://framablog.org/2023/06/20/berlin-mars-2023-journal-de-bord-de-la-premiere-visite-detudes-decho-netw

    Du 27 au 31 mars 2023, la première visite d’études du projet européen #ECHO_Network s’est tenue à Berlin. Ce compte rendu retrace cette semaine d’échanges sur la thématique « jeunes, réseaux sociaux et éducation #Politique », organisée par Willi Eichler Akademy. … Lire la suite­­

    #COIN_/_COIN_2023-2025_ #Dans_notre_archipel #Éducation #open_source

  • Les Allemands n’ont pas supporté que la France soit aussi compétitive sur le plan énergétique. Ils ont donc naturellement voulu détruire #EDF. (Henri Proglio)
    https://www.crashdebug.fr/les-allemands-nont-pas-supporte-que-la-france-soit-aussi-competitive-sur-

    On vous avait prévenu, mais voilà, comme ça c’est clair....

    Source : Twitter Informations complémentaires : Crashdebug.fr : Électricité : Ils se foutent (encore) de nos gueules (Canard Réfractaire) Crashdebug.fr : Le patron d’EDF explique qu’on lui a demandé de fermer des centrales ! Du coup il est incapable de fournir plus d’électricité !! (BB) Crashdebug.fr : Nicolas Dupont-Aignan - « CNR : Macron nous prend pour des cons ! » (Sud Radio) Crashdebug.fr : Le prix de gros de l’électricité en France pour 2023 vient de franchir le pallier de 1000 euros le MWh, soit plus de 10 fois plus qu’il y a un an (BB Crashdebug.fr : Coup de gueule d’un ingénieur EDF (Lesmoutonsenrages.fr) Crashdebug.fr : La révolution a commencé : 75.000 Britanniques vont cesser de payer leurs factures d’électricité en raison de (...)

    #Épinglé #Actualités_françaises #ROOT

  • L’omerta sur les abus sexuel dans l’Eglise commence à se briser en Amérique latine Carole Pirker/asch - RTS

    De récentes manifestations suite à des révélations pourraient marquer un tournant dans la crise des abus sexuels de l’Eglise catholique en Bolivie. La chappe de plomb commence aussi à se soulever au Brésil sur ces actes longtemps passés sous silence.

    En Amérique latine, l’indignation publique face aux abus sexuels a été très longtemps mise en sourdine, en partie parce que l’Eglise catholique reste l’une des institutions les plus puissantes du continent.


    Cela pourrait néanmoins changer. En Bolivie, un pays à 75% catholique, des centaines de personnes ont manifesté ces dernières semaines contre l’Eglise romaine pour dénoncer les abus commis par des prêtres ces dernières décennies, selon l’agence Religion News Service.

    Dissimulation active par l’Eglise
    L’affaire du prêtre espagnol Alfonso Pedraja, révélée par le quotidien El Pais, a mis le feu aux poudres. Dans son journal de bord, que les journalistes se sont procuré, il raconte avoir abusé au moins 85 jeunes garçons de l’école catholique de Cochabamba, au centre de la Bolivie, dans laquelle il a travaillé 17 ans.

    Son récit met aussi en avant la dissimulation active de ces pratiques par les chefs de l’Eglise, et ce durant des décennies. Tout cela a fait sauter la chape de plomb et ouvert les vannes de l’indignation et de la colère des Boliviens.

    Les survivants de ces abus ont aussi réagi en déposant plainte et le gouvernement a créé une commission pour enquêter et punir ces cas d’abus.

    Le Brésil aussi concerné
    La Bolivie n’est pas le seul pays concerné. Le Brésil, qui compte quelque 120 millions de catholiques, l’est aussi depuis la publication, fin mai, d’un livre sur la pédophilie dans l’Église. Il a révélé que 108 prêtres et dirigeants catholiques ont fait face à des poursuites judiciaires au Brésil depuis l’an 2000. Des chiffres largement en-deçà de la réalité, selon les deux journalistes brésiliens auteurs de l’enquête.

    Leur travail vise à corriger le manque d’attention porté à cette crise des abus qui dure depuis des décennies.

    Selon Religion News Service, les récents événements au Brésil et en Bolivie sont le signe d’une nouvelle prise en compte de ces réalités. En mai dernier, un frère dominicain a par exemple été arrêté à Sao Paulo pour avoir produit et stocké des photos pornographiques d’adolescents. Selon la police locale, l’ordre dominicain a collaboré avec elle et le religieux a été démis de ses fonctions sacerdotales.

    #Brésil #Bolivie #Amérique_latine #viols #culture_du_viol #enfants #abus #prêtres #église_catholique #violences_sexuelles #éducation_religieuse #domination #éducation #paroisses

  • Crise de foi (les abus sexuels dans l’Eglise) 2 témoignages Les pieds sur terre Reportage : Timothée de Rauglaudre , Réalisation : Somaya Dabbech , Mixage : Ludovic Auger

    Marie n’est jamais retournée dans une église depuis qu’elle a appris l’agression de sa sœur par un prêtre. Marion, elle, a longtemps essayé de concilier religion et engagement à gauche, jusqu’à découvrir les abus sexuels dans l’Eglise… Un récit signé Timothée de Rauglaudre

    https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/10078-14.06.2023-ITEMA_23410554-2023C6612S0165-21.mp3

    Marie , 33 ans, est issue d’une famille de quatre enfants. Ses parents sont catholiques pratiquants et très investis au sein de la vie de leur église. « Moi, j’étais très fière de ma famille. On pratiquait énormément, on allait à la messe tous les dimanches, on se confessait régulièrement et on était très proches des prêtres. » Marie
    « Parfois, j’avais l’impression que les prêtres étaient des gens de ma famille. Je jouais avec eux tout le temps. »

    Marie prend alors conscience de la crise des abus sexuels dans les églises en 2016. Pour sa famille, c’est le début d’un long cheminement vers de graves révélations… "Mon frère, ma sœur et moi, on voyait tous les trois des psys. On a été interpellés parce qu’ils nous ont dit qu’on avait des symptômes d’abus sexuels tous les trois. On est tombés des nues. On se demandait comment c’était possible dans une famille aussi parfaite que la nôtre…" parce qu’on se disait dans notre famille si parfaite qu’il ne peut pas y avoir eu de tels actes chez nous."

    Petit à petit la vérité refait surface et suite à des séances d’hypnose, le voile se lève. C’est le choc. Pour Marie tout s’effondre. Elle ne peut plus entrer dans une église. « Je commence petit à petit à aller beaucoup moins à la messe. Je navigue un peu entre les différentes paroisses parce que de toute façon, je ne supporte plus aucun prêtre. »

    Marion est élevée dans la foi et la pratique. Père diacre et mère responsable de l’aumônerie, elle reçoit une éducation religieuse dès le plus jeune âge. "J’ai été vraiment éduquée dans cette idée que Dieu est amour, que Dieu veut notre bien."

    Très vite elle se questionne et s’émancipe de cette éducation. Dans le cadre de ses études et de ses rencontres, elle s’interroge sur la religion tout en gardant la foi. "Quand je suis parti de chez mes parents pour aller faire mes études, j’ai arrêté d’aller à la messe. Ça m’a fait du bien de ne pas être obligée d’y aller tous les dimanches. Il y avait une dimension d’émancipation."

    Pourtant au fil du temps, de plus en plus d’aspects érode sa foi et elle finit par se libérer totalement de ce qui ressemblait à un carcan. Elle fait son « coming-out de sortie de la foi » ! « En fait, je crois même plus qu’il y a un Dieu. Ça m’a quitté. »

    « J’ai vraiment cette image où j’ai l’impression de voir la structure de pouvoir en face de moi, de voir une domination s’exercer et c’est insoutenable. Finalement de découvrir tout ça, m’a fait progressivement déconstruire mes croyances. Je me suis demandée en quoi je croyais réellement. »

    « Quand je dis que je ne suis plus catholique, on parle à la négative. On a perdu quelque chose et je trouve ça assez agaçant. J’aimerais trouver un mot pour le dire autrement parce que moi, je n’ai pas du tout l’impression d’avoir perdu quelque chose. En fait, j’ai l’impression que mon chemin continue. Moi, je n’ai jamais été aussi épanouie dans ma vie. J’ai l’impression de m’être libérée d’énormément d’injonctions, de normes que je trouvais extrêmement pesantes. »

    Merci à Marie et à Marion, ainsi qu’à Églantine du café associatif Le Simone, à Lyon.

    #viols #culture_du_viol #femmes #enfants #abus #prêtres #église_catholique #violences_sexuelles #France #éducation_religieuse #domination #éducation #paroisses #Radio #podcast

    Source : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/crise-de-foi-7196373

  • Avant qu’il ne passe à l’acte, l’errance du réfugié syrien à #Annecy

    L’assaillant de l’#attaque au couteau d’Annecy a été mis en examen pour « tentatives d’assassinats » et « rébellion avec armes ». Pour l’heure, ses motivations restent sans explication. Depuis quelques mois, ce réfugié syrien chrétien venu de Suède passait ses nuits dans une rue du centre-ville et ses journées près du lac. De nombreux témoins décrivent un homme marginalisé, « calme » et « discret ».

    Les caméras des chaînes de télévision ont défilé, au lendemain du drame, rue Royale à Annecy, attirant les regards des curieux venus se promener ou faire des achats. C’est ici, sous le porche d’un immeuble situé entre deux magasins de vêtements, que l’assaillant de l’attaque au couteau ayant blessé six personnes, dont quatre enfants en bas âge, jeudi au Pâquier, avait ses habitudes à la nuit tombée. Le jour de l’attaque, les forces de l’ordre sont venues en nombre pour interroger les commerçant·es et habitant·es du secteur.

    « On le voyait tous les soirs et il avait ses rituels, il venait à 19 heures à la fermeture », confie le responsable d’un magasin situé en face de l’immeuble. L’homme se couchait sur des cartons et disposait d’un sac de couchage, poursuit-il, mettait ses écouteurs dans les oreilles avant de s’endormir, assez tôt. Le commerçant se dit encore « choqué » de savoir qu’il a pu commettre une telle horreur la veille. « Il était très propre. Je n’ai jamais remarqué un comportement étrange. Je me suis demandé plusieurs fois comment il en était arrivé là car il avait l’air jeune. »

    En fin de matinée, Paul*, un habitant de l’immeuble, peine toujours à croire que le sans-abri de 32 ans qui dormait en bas de chez lui et avec lequel il avait des « échanges cordiaux » ait pu commettre l’innommable. Alors qu’il rentre à son domicile, il raconte l’avoir vu chaque soir sous ce porche, depuis l’hiver dernier. Il décrit un homme « assez poli et très discret », solitaire, souvent sur son téléphone. « Il était respectueux, ne laissait pas ses affaires traîner et gardait l’endroit propre. Je ne l’ai jamais vu alcoolisé ou drogué, il ne montrait aucun signe religieux. »

    Lorsqu’il lui arrivait de ressortir après 19 h 30 ou 20 heures, le réfugié syrien dormait déjà. « [Le matin], je pense qu’il partait assez tôt car il n’était plus là quand je partais au boulot. » Constatant qu’il ne venait là que pour dormir, Paul était persuadé qu’il était en parcours d’insertion, voire qu’il travaillait. « Il s’entretenait, aussi. Il se brossait les dents et recrachait l’eau dans la bouche d’égouts, se coupait les ongles… » Parmi tous les sans-abris présents dans le quartier, lui était « celui qui ne faisait pas de bruit ». Son acte en est d’autant plus incompréhensible. « On est complètement sous le choc, c’est glaçant », confie-t-il en précisant avoir un petit enfant.
    Repéré par de nombreux habitants

    L’un des voisins de Paul a tenté de créer du lien avec le réfugié syrien chrétien venu de Suède. Il savait qu’il avait une famille là-bas. « On savait qu’il était en demande d’asile. Mais si on laisse les gens sept mois à la rue, si on ne s’en occupe pas, c’est une machine à drames… Surtout pour des personnes ayant un passé en Syrie, qui viennent potentiellement avec des traumatismes », estime Paul sans pour autant justifier l’acte de l’assaillant.

    Thierry, un habitant d’Annecy, partage lui aussi son incompréhension face à l’horreur. Son père avait repéré l’homme depuis une dizaine de jours, sur le secteur du Pâquier en journée, tout comme les patrons de location de pédalos situés au bord du lac ou les vendeurs de glaces postés près du pont des Amours. « Mon père est cycliste et emprunte ce trajet un jour sur deux, il l’a vu à chaque fois. Il était assis sur un banc avec son sac, il regardait en direction du lac. Il se lavait dans le lac. » Encore en état de choc, ce dernier a préféré ne pas témoigner.

    Il aurait éprouvé une forme de culpabilité à n’avoir pas agi. Mais pour quoi faire ? Signaler un homme dont le comportement n’était pas problématique ? « Il s’est posé beaucoup de questions, s’étonnant d’être parfois arrêté et contrôlé à vélo et lui pas. » La folie humaine ne doit pas « nous diviser », ajoute Thierry, et un acte comme celui-ci ne doit pas remettre en cause « notre accueil des réfugiés ». Il suggère la création d’une brigade spécialisée au sein de la police municipale, qui serait chargée des personnes en situation de rue et irait à leur rencontre.

    « On ne peut pas attendre que ces gens viennent à nous puisqu’ils sont isolés. Leur état psychologique fait parfois qu’ils se replient sur eux-mêmes. Il faut des capacités d’écoute pour créer du lien », dit encore Thierry. Une tendance que confirme Bertrand de Fleurian, délégué départemental de l’Ordre de Malte et chef de maraudes à Annecy, qui a lui aussi repéré l’homme syrien lors de distributions au centre-ville. Ce dernier ne figurait pas parmi leurs « habitués », mais une aide lui avait été proposée lors de différentes maraudes.

    « Il ne voulait jamais rien, il répondait de manière calme et polie le soir bien qu’il dormait parfois. » Certains refusent le contact, soit parce qu’il y a un problème « psy », soit parce qu’ils reçoivent déjà de l’aide en journée. « Dans ces cas-là, poursuit Bertrand, on n’insiste pas, on repasse le lendemain. » A-t-il été pris par un coup de folie ?, s’interroge-t-il. « On pouvait difficilement s’attendre à un tel acte venant de ce profil. » D’autres associations venant en aide aux sans-abris, comme les Suspendus d’Annecy, n’ont pas croisé sa route.
    Précarité matérielle et déclassement social

    Pour l’heure, les raisons et la motivation de la terrible attaque de jeudi matin restent sans explication. Alors que sa garde à vue s’achevait samedi 10 juin, le réfugié syrien a été mis en examen pour « tentatives d’assassinats » et « rébellion avec armes » après avoir été déféré devant deux juges d’instruction, a annoncé la procureure de la République, Line Bonnet-Mathis. L’homme, qui a également été présenté à un juge des libertés et de la détention samedi matin, a été placé en détention provisoire.

    La garde à vue du réfugié syrien n’a pas permis d’en savoir davantage sur son mobile, l’intéressé se montrant très agité et peu coopératif avec les enquêteurs. On en sait toutefois un peu plus sur son parcours depuis le dépôt de sa demande d’asile en France, en novembre 2022.

    Reconnu réfugié en Suède depuis dix ans, où il a une femme et un enfant, il aurait quitté le pays après avoir essuyé deux refus pour une demande de naturalisation. Libre de circuler dans l’espace Schengen, il serait passé par l’Italie et la Suisse avant de gagner la France, et aurait déposé une nouvelle demande d’asile à Grenoble, bien qu’on en ignore encore le motif. « Il y a un côté un peu bizarre » à cela, a souligné le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, sur BFMTV. Le 4 juin, sa demande a été jugée irrecevable.

    Karine Gatelier, anthropologue chargée d’action recherche dans l’association Modus Operandi (Modop), tente de « comprendre pourquoi, à un moment donné, des personnes se saisissent de [la] violence ». Elle envisage qu’après dix ans en Suède, l’assaillant ait pu ensuite être projeté dans une précarité matérielle et un déclassement social très forts. Un phénomène courant pour les demandeurs et demandeuses d’asile.

    « On leur réserve une certaine misère », analyse celle qui est aussi bénévole auprès de l’association Accueil demandeurs d’asile (ADA) à Grenoble. « Cette misère ne correspond pas à la vie qu’ils et elles avaient au pays. On observe depuis plusieurs années que la santé mentale des personnes en demande d’asile se dégrade, des rapports d’associations en témoignent. Et le suivi est très insuffisant. »

    Non-hébergement, interdiction de travail, perte d’autonomie, allocation pour demandeur d’asile en deçà du seuil de pauvreté qui n’est pas toujours versée… Même avec une prise en charge, de nombreux acteurs pointent souvent une forme de « contrôle social », qui limite les mouvements et la prise de décision des demandeurs d’asile.

    Pour Nicolas*, un travailleur social dans la demande d’asile, les réfugiés survivent parfois à la rue après avoir vécu la route de l’exil, les violences physiques et sexuelles, la torture ou l’esclavagisme, charriant des séquelles non soignées, et font un « grand plongeon dans la précarité », confrontés à un système administratif particulièrement complexe. « On peut voir des cas de dépression chronique ou de décompensation. »

    Que la réponse à leur demande de protection soit positive ou négative, les réactions peuvent varier : « Je compare souvent ça à un examen, avec un enjeu encore plus fort. Après avoir tout donné, le corps relâche et n’a plus d’énergie. Et s’il y a des fragilités psychiques chez quelqu’un, c’est là qu’elles s’expriment. » En cas de rejet, détaille-t-il, il peut y avoir beaucoup d’incompréhension, un fort sentiment de rejet, un gros passage à vide ou une remise en question du parcours.

    Dans le cas du réfugié syrien ayant commis l’attaque au couteau, Nicolas estime que les mois passés en situation de rue ont pu avoir une incidence sur son état physique et mental. « Il n’est jamais rentré dans le dispositif national d’accueil, ce qui montre un déficit lié au nombre de places d’hébergement. Les hommes isolés sont davantage laissés à la rue. » Selon la mère de l’assaillant, qui s’est confiée à l’AFP, celui-ci souffrait d’une « grave dépression » et ses échecs pour obtenir un passeport suédois avaient aggravé son état. Au moment du drame, il n’était « ni sous l’emprise de stupéfiant ni sous l’emprise d’alcool », a indiqué la procureure d’Annecy.

    Cela étant dit, tous ceux qui obtiennent un hébergement n’iront pas « forcément bien », poursuit Nicolas. « Ça reste un élément favorisant pour qu’ils aillent mieux. Mais le morcellement du parcours, la pression du système d’asile, la rupture avec la communauté de vie ou la non-prise en compte de besoins essentiels sont autant de facteurs qui peuvent jouer. » Cela pourrait être le cas, songe-t-il, du réfugié soudanais ayant tué deux personnes en avril 2020 lors d’un attentat à Romans-sur-Isère – le mobile terroriste avait été retenu. « Il allait bien jusqu’à ce qu’il se retrouve isolé, loin de ses amis. Il voulait aussi que sa femme puisse le rejoindre mais la procédure était trop longue. »
    D’autres exilés en situation d’errance à Annecy

    Vendredi après-midi, avenue du Stand à Annecy, un groupe de quatre jeunes Afghans patientent devant les bureaux de la Structure de premier accueil des demandeurs d’asile (Spada), gérée par la Fédération des œuvres laïques, mandatée par l’État pour cette mission. Les portes restent closes et pourtant, personne ne bouge. Ils disent avoir appris à « attendre » ; ce mot qui revient sans cesse lorsqu’ils réclament leur droit à l’hébergement ou l’état d’avancement de leur dossier.

    Depuis jeudi et l’attaque au couteau, ils sont inquiets. « Ce qu’il a fait est si terrible, on a peur que les gens n’aiment plus les réfugiés à cause de ça. De tels actes vont rendre la vie des immigrés très difficile en France », soupire l’un d’eux. À 28 ans et après avoir fui l’Afghanistan, il reconnaît du bout des lèvres survivre dans la rue, dormant dans les parcs ou la gare à la nuit tombée. « Que peut-on faire ? » Sa demande d’asile est toujours en cours.

    « Moi, c’est pareil », lâche son voisin, honteux, plongeant ses grands yeux verts dans le vide. Un troisième a vu sa demande d’asile définitivement rejetée. « Pas de logement, pas de travail, pas d’allocation, pas de papiers », résume-t-il.

    Non loin de là, en fin d’après-midi, Erwin, Junior et leurs amis tuent le temps, près de leur tente, en face du canal. Ils auraient préféré, disent-ils, que l’assaillant vienne les attaquer eux plutôt que les enfants. « C’est une grande faiblesse de s’en prendre à des gamins. On ne cautionne pas ça. »

    La veille, une bénévole du quartier est venue les prévenir que des groupes d’extrême droite se réuniraient à Annecy dans la soirée. « Donc on dort dans notre tente la nuit et ils peuvent venir nous faire du mal, juste parce qu’ils généralisent et qu’ils sont racistes », déplore Erwin. L’un de leurs amis, qui se surnomme Tupac, déboule complètement ivre.

    « Tous les jeunes isolés ici deviennent des légumes parce que les autorités refusent de les aider », commente son voisin, originaire de Seine-Saint-Denis, qui a tout perdu après un divorce. « Aujourd’hui, quelqu’un arrive et va bien, demain il rigole tout seul dans la rue. » Pour Junior, ancien mineur non accompagné pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance qui leur rend visite régulièrement, les gens « pètent un câble » parce qu’ils sacrifient tout ce qu’ils ont pour fuir leur pays. « Ils viennent en Europe et espèrent y avoir une certaine vie, mais ils se retrouvent à la rue, sans travail. Ils ne s’attendent pas à ça. »

    Ilham, une ancienne bénévole de la Ligue des droits de l’homme (LDH) d’Annecy, confirme que « de nombreuses personnes » sont en situation d’errance dans la ville, y compris des femmes avec enfants contraintes de vivre dans la rue. Elle est le contact de référence pour les demandeurs et demandeuses d’asile et réfugié·es, et bien qu’elle ait cessé ses activités auprès de la LDH, beaucoup de jeunes continuent de l’appeler en cas d’ennui. Elle confirme un déficit de places d’hébergement et de prise en charge pour ce public.

    Près de la gare en fin de journée, des réfugiés soudanais et érythréens partagent le même sentiment. Arrivé à Paris en 2018, Muhammad* a vécu dans la rue avant d’être réorienté par la préfecture vers la Haute-Savoie. Il explique avoir dû affronter le racisme. « Je demandais aux gens en anglais de m’aider, ils s’éloignaient de moi comme s’ils avaient peur. Leur chien avait plus de valeur que moi. »

    Il rencontre une assistante sociale qui mélange les papiers des uns et des autres parce qu’elle les confond. « J’ai mis quatre ans à avoir mes papiers. Et dès le départ, ils ont fait une erreur sur mon âge, me donnant dix ans de moins, ce qui m’a posé des problèmes pour tout. »

    Mais surtout, il désespère de ne pas pouvoir subvenir aux besoins de sa femme et de son fils coincés en Égypte, faute d’autorisation de travail jusqu’à l’obtention de son statut de réfugié. « Ça m’a rongé l’esprit. Tu ajoutes à ça le stress et le racisme, il y a de quoi te rendre fou. » Il dit avoir appris le français seul – « qu’est-ce qu’on peut faire avec 50 heures dispensées par l’Office français de l’immigration et de l’intégration ? » – et travailler là où il le peut : BTP, peinture, restauration… Aujourd’hui, le trentenaire fait aussi du bénévolat auprès de la LDH et d’une association qui vient en aide aux personnes âgées.

    Repenser à tout ce qu’il a traversé lui « serre le cœur », dit-il en arabe. Il espère pouvoir avancer sereinement, mais ne cache pas cette forme de ressentiment à l’égard d’un État qui a tout fait pour lui faire comprendre qu’il n’était pas le bienvenue. « On est venus légalement ici. Il y a des lois. S’ils ne veulent plus de ces lois, qu’ils les retirent, et on partira. »

    Muhammad dit avoir tout quitté – une belle villa, un hôtel dont il était propriétaire, un travail et des proches – pour fuir un dictateur et recouvrer la liberté qu’il chérissait tant. « Liberté, égalité, fraternité ; c’est uniquement sur le papier », regrette-t-il. Il ignore pourquoi l’auteur de l’attaque au couteau a agi ainsi. Lui et ses amis ne l’avaient jamais croisé. Mais, insiste-t-il, « il faut s’occuper des gens ».

    https://www.mediapart.fr/journal/france/100623/avant-qu-il-ne-passe-l-acte-l-errance-du-refugie-syrien-annecy

    #réfugiés #asile #migrations #marginalisation #précarisation #SDF #migrerrance #attaque_au_couteau #déclassement_social #précarité_matérielle #violence #misère #santé_mentale

    • Drame d’Annecy : une ville face au venin de la #xénophobie

      L’attaque de six personnes, dont quatre enfants, par un réfugié syrien à Annecy a libéré la parole raciste. Ciblée, la Ligue des droits de l’homme est contrainte d’annuler son prochain événement. Le maire écologiste #François_Astorg, également menacé parce que métis, annonce à Mediapart qu’il a porté plainte.

      Trois jours après le drame, Annecy a vécu, dimanche 11 juin, son moment « cathartique », résume son maire écologiste François Astorg. À l’appel de la municipalité, plusieurs milliers de personnes, dont beaucoup de familles, se sont rassemblées dans le calme sur l’esplanade du Pâquier, à quelques encablures du parc de jeu où un réfugié syrien de 31 ans, qui vivait seul et dans la rue depuis plusieurs mois, a blessé six personnes le 8 juin.

      Ses victimes – quatre enfants en bas âge et deux septuagénaires, de quatre nationalités différentes – sont toujours hospitalisées, mais leur pronostic vital n’est plus engagé. L’assaillant, qui n’a fourni aucune explication à son geste à ce jour, a lui été mis en examen samedi pour « tentatives d’assassinat » et « rébellion avec armes », et placé en détention provisoire.

      « On avait besoin de se retrouver, de mettre les mots sur ce qui s’est passé, de se parler, et aussi d’affirmer la ligne dans laquelle on compte avancer demain », synthétise François Astorg, après avoir proclamé un discours sobre et fortement applaudi. Sur scène, le maire était entouré de représentants des autorités civiles et militaires, mais aussi de personnels municipaux et d’anonymes intervenus sur les lieux du drame.

      Après avoir dénoncé la « barbarie » et la « lâcheté » de l’acte « inqualifiable » commis jeudi, l’élu s’est adressé à la foule : « Votre inquiétude, je la ressens, je la partage […], mais il n’y a pas d’autre réponse que la #communion, la #solidarité et l’#espoir. Pas d’autre choix que de bâtir plutôt qu’haïr. » Il a aussi invité la population à ce que la « vie reprenne ses droits ». Le festival international du film d’animation, événement culturel majeur dont la séance inaugurale a été décalée de quelques heures, va justement ouvrir ses portes dès lundi sur le site du Pâquier.

      Depuis jeudi, la ville était suspendue au sort des victimes, dont l’état de santé s’est amélioré au fil des jours, mais aussi imprégnée d’une atmosphère inhabituelle dans cet écrin calme et bourgeois de 135 000 habitant·es. François Astorg lui-même, élu en 2020 à la tête d’une alliance baroque entre Europe Écologie-Les Verts (EELV) et La République en marche (LREM), a été la cible d’attaques racistes auxquelles il n’avait jamais été confronté depuis son accession à la mairie.

      La raison ? Il est métis – sa mère est sénégalaise – et défend des positions – pourtant consensuelles – rappelant qu’Annecy est une terre d’accueil. Suffisant pour déchaîner la fachosphère, qui l’insulte et l’intimide massivement depuis trois jours. « J’ai vu ces attaques, mais le plus dur, cela reste ce qu’il s’est passé avec les enfants. D’avoir vu ces gamins dans le parc … Ça, c’est le plus prenant », recentre François Astorg, encore ému par la scène à laquelle il a été confronté en se rendant sur place juste après l’attaque.

      Le maire s’avoue toutefois « dégoûté » par les menaces qu’il reçoit depuis. « Je ne vais pas dire que j’ai l’habitude du racisme, mais quand même… Cela me rappelle quand j’étais à Paris, pendant les années Pasqua », ajoute l’élu, né il y a soixante-deux ans en Seine-Saint-Denis. Craignant une agression physique, il a porté plainte contre plusieurs auteurs de menaces en ligne. « La police a ouvert une enquête. » Sa fille est aussi été injuriée sur les réseaux sociaux. « Ma fille, ça, ça me… », lâche François Astorg, la gorge nouée, sans finir sa phrase.

      La présidente de l’agglomération violemment prise à partie

      Les attaques contre le maire et sa famille ont provoqué des débats, jusqu’au sein de sa propre majorité municipale. Faut-il y répondre à chaud, au risque d’amplifier les menaces ? Ou alors passer à autre chose, au risque de les banaliser ?

      La présidente de l’agglomération, l’ancienne députée LREM Frédérique Lardet, alliée de François Astorg, admet s’interroger sur le sujet. « On sait qu’il y a un soutien en interne, il n’y a pas de sujet là-dessus. Mais on s’est posé la question vendredi soir de ce qu’il fallait faire publiquement, en se disant qu’il fallait aussi faire attention aux réseaux sociaux, à ne pas justement alimenter les propos racistes », indique-t-elle à Mediapart.

      Elle aussi a d’ailleurs été violemment prise à partie après l’attaque. Son tort ? Avoir annoncé qu’il s’agissait d’un « acte isolé », et être une femme. « J’ai immédiatement reçu des tas d’insultes, témoigne-t-elle. Des “grosse salope”, “grosse pute”. Mon collaborateur m’a dit : “Il faut retirer le message [sur ses réseaux sociaux]”. Je lui ai répondu : “Non, ce qu’il faut retirer, ce sont les insultes.” » Depuis, l’élue dit faire « très attention à [elle] » : « Je regarde autour de moi, je vérifie que je ferme bien la porte chez moi. Cela ne m’était jamais arrivé avant, même quand j’étais députée. Je n’avais jamais eu peur. »

      Frédérique Lardet, « Annécienne pure souche » de 56 ans, reconnaît aussi avoir beaucoup hésité à intervenir dans les médias après l’attaque. « Pour moi, c’était trop intrusif, et j’avais peur que l’on pense que je voulais utiliser la situation à mon profit. » Mais rapidement, « on m’a donné un coup de pied aux fesses », indique la présidente de l’agglomération : « Il y avait une dissonance complète entre ce que l’on vivait et ce brouhaha dans les médias et sur les réseaux sociaux, avec des partis politiques qui dès la première heure se sont jetés comme des corbeaux sur ce drame. »

      « Je me suis dit que mon rôle était de remettre les choses en place », précise encore Frédérique Lardet. Depuis, la présidente de l’agglomération reconnaît être « perdue » face à un drame pour lequel elle estime qu’il est à ce stade complexe de tirer des conclusions. « En tant qu’élus, on n’a pas toujours les réponses non plus, justifie-t-elle. Je sais bien que ce n’est pas toujours entendable pour pas mal de personnes, mais c’est la réalité. »

      Les besoins de réponse simple et immédiate, associé à un discours de haine, Sabine*, Annécienne de 31 ans, en a été témoin dès les premiers moments après l’annonce du drame. Cette travailleuse sociale, qui effectuait des maraudes auprès de réfugié·es isolé·es il y a quelques années, se trouvait dans un bus de la ville quand l’information a commencé à circuler.

      « Il y avait plein d’ados qui regardaient les vidéos. Et au milieu, des adultes qui ne se connaissaient pas mais qui disaient fort : “Jusqu’où ça va aller ?!’’, “Jusqu’où on va les laisser ?!” » Un autre élément l’a stupéfaite : « On ne savait pas que le gars n’était pas musulman, mais dans les discussions, il l’était forcément. C’était automatique, on ne se pose même pas la question. » Sabine observe alors la scène : « Je me suis dit : “Là, maintenant, dans ce bus, on est en train de créer du racisme de toutes pièces…” »

      Deux heures plus tard, elle se retrouve dans une salle d’attente d’un cabinet médical. « Deux femmes, la soixantaine, partent dans un monologue sur l’immigration et sur le fait que le réfugié n’avait rien à faire là… J’ai eu beau dire que ça n’avait rien à voir, elles n’ont pas compris, elles ne s’imaginaient même pas que je ne puisse pas être d’accord. »

      D’après Sabine, « personne ne [lui] aurait parlé comme ça avant ». Ces dernières années, avec l’élection d’un écologiste dans un territoire historiquement à droite, elle « avai[t] même l’impression qu’on prenait le chemin inverse ici, d’autant que c’est une ville avec une grande mixité ». « Là, une brèche a été ouverte, je pense que ça va être très compliqué ensuite », craint-elle, en anticipant des conséquences néfastes pour les réfugié·es.

      Cette inquiétude est renforcée par le traitement médiatique de l’affaire. « Après l’attaque d’Annecy : le droit d’asile en question », titrait en une, dimanche, Le JDD (groupe Lagardère, bientôt absorbé par le groupe Vivendi de Bolloré), interview de l’ancien ministre de l’intérieur (1997-2000) Jean-Pierre Chevènement à la clé.

      « Pour moi, c’est vingt ans de travail qui s’écroulent », tranche également Yves La Barbera, 70 ans. Ce retraité, ancien directeur de la MJC (maison des jeunes et de la culture) d’un quartier d’Annecy, est toujours engagé dans la vie culturelle de la cité. « On travaille au cœur d’un quartier, on œuvre pour le vivre ensemble, on avance pas à pas, on réussit… Et puis, avec un drame comme ça, c’est le repli. Tout le monde a peur, c’est dramatique », déplore-t-il.
      Un climat inquiétant

      En relevant que l’extrême droite « fait 20 % [aux élections] dans des quartiers difficiles », Yves La Barbera sent qu’un « certain racisme s’est installé » ces dernières années. « Cet événement ne va faire que l’exacerber », considère-t-il, en se fiant aux réactions depuis jeudi. « Même des gens que je côtoie ont besoin de se défouler. Cela ne va pas se calmer tout de suite, c’est un traumatisme qui va s’installer. »

      Plus inquiétante encore, selon lui, est l’apparition de manifestant·es identitaires ces derniers temps. Après une première manifestation non déclarée le 18 mai — une première dans la ville —, des néonazis se sont également mobilisés, dès le soir de l’attaque. Les militants gravitent autour du « syndicat des fleuristes », à Annecy (en référence à la fleur de lys royaliste), mais aussi d’Edelweiss (Chambéry), comme l’a révélé Street Press, ou de groupuscules genevois ou lyonnais.

      Deux femmes du collectif d’extrême droite Nemesis se sont rendues à Annecy pour afficher dans l’aire de jeu, dès jeudi après-midi, des pancartes, dont l’une disait : « Ouvrir les frontières, c’est fermer nos cercueils. » Le soir, près de 50 personnes ont pris part à une manifestation identitaire.

      Yves La Barbera avoue son incrédulité face à ce phénomène : « Qu’est-ce que ça veut dire tout ça à Annecy ? C’est une ville tranquille. J’espère que c’est un mouvement extrêmement minoritaire qui ne va pas se développer, mais c’est aussi une petite graine qui peut pousser. »

      Au local de la Ligue des droits de l’homme (LDH) personne n’avait vu les signes avant-coureurs d’un tel climat. « Je les ai vus jeudi soir, leur regard, tous bodybuildés, des nazis sortis de la dernière guerre mondiale… C’est du jamais-vu. On savait qu’il y avait l’ultradroite mais on n’y était pas confronté », affirme Josette Tardivelle. La présidente de l’antenne locale de la LDH relève juste qu’il « y a eu beaucoup de collages du temps de la campagne de Zemmour ».

      Le représentant local de Reconquête, Vincent Lecaillon, ancien chef de fil du Rassemblement national (RN), est élu au conseil régional. Jeudi après-midi, il a vécu son heure de gloire en prenant à partie la première ministre Élisabeth Borne lors de son déplacement à la préfecture de Haute-Savoie.

      Depuis l’attaque, la LDH d’Annecy est prise à partie sur les réseaux sociaux, après un tweet du militant identitaire Damien Rieu ayant repéré l’organisation d’un apéro solidaire, le 19 juin, pour les mineurs étrangers isolés. « Ça faisait un moment qu’on l’avait annoncé, et ça ne posait de problème à personne », relève Josette Tardivelle. Mais après le drame, le sujet devient inflammable.

      Sur les réseaux sociaux, les messages pleuvent : « Je pense qu’il va falloir passer au stade suivant avec ces collabos », « À vos armes citoyens, faut éliminer ces associations qui font venir avec nos impôts nos assassins », « Les fils de pute, c’est immonde, c’est honteux, provocateur. Ils jubilent. Profitez-en bien ça ne va pas durer. On va s’occuper de vous. Avec précision, ciblé, et détermination nationale »…

      « Les gens ne se cachent même pas, certains le font avec leur photo, leur nom », s’étonne Josette Tardivelle, en faisant défiler sur son portable les messages archivés. Décision est alors rapidement prise en interne d’annuler l’événement. « On ne veut pas aller au clash avec ces gens-là et se mettre en danger », justifie la présidente. L’apéro sera organisé plus tard, avec une autre affiche, « plus neutre », ou même « en faisant passer l’information par téléphone ». « Effectivement, reconnaît la présidente de la LDH, cela signifie que l’on cède, et que leur méthode marche. »

      https://www.mediapart.fr/journal/france/110623/drame-d-annecy-une-ville-face-au-venin-de-la-xenophobie
      #racisme #extrême_droite #récupération #menace #syndicat_des_fleuristes #Edelweiss #Nemesis #néo-nazis

  • L’affare CPR, un sistema che fa gola a detrimento dei diritti

    Sono 56 i milioni di euro previsti complessivamente, nel periodo 2021-2023, dagli appalti per affidare la gestione dei #Centri_di_Permanenza_per_il_Rimpatrio (CPR) ai soggetti privati. Costi da cui sono esclusi quelli relativi alla manutenzione delle strutture e del personale di polizia. Cifre che fanno della detenzione amministrativa una filiera molto remunerativa che, non a caso, ha attratto negli ultimi anni gli interessi economici di grandi multinazionali e cooperative. La privatizzazione della gestione è, infatti, uno degli aspetti più controversi di questa forma di detenzione senza reato e ne segna un ulteriore carattere di eccezionalità: il consentire che su quella privazione della libertà personale qualcuno possa trarne profitto.

    Ad illustrare questa situazione è la Coalizione Italiana per le Libertà e i Diritti civili (CILD), che questa mattina a Roma ha presentato un nuovo rapporto sul tema, intitolato “L’affare CPR. Il profitto sulla pelle delle persone migranti”, all’interno del quale grande attenzione è stata dedicata alle multinazionali #Gepsa e #ORS, alla società #Engel s.r.l. e alle Cooperative #Edeco-Ekene e #Badia_Grande che hanno contribuito, negli anni recenti, a fare la storia della detenzione amministrativa in Italia.

    Una storia tutt’altro che nobile fatta di sistematiche violazioni dei diritti delle persone detenute, con la possibilità per gli enti gestori di massimizzare -in maniera illegittima- i propri profitti anche a causa della totale assenza di controlli da parte delle pubbliche autorità. Nel Rapporto, infatti, si dà ampio spazio alla denuncia delle condizioni di detenzione che rischiano di configurarsi come inumane e degradanti e alla strutturale negazione dei diritti fondamentali dei detenuti. Il diritto alla salute, alla difesa, alla libertà di corrispondenza non sono, infatti, tutelati all’interno dei CPR: luoghi brutali che consentono ai privati di speculare sulla pelle dei reclusi, grazie anche alla totale assenza di vigilanza da parte del pubblico.

    “Da sempre questi centri – ha dichiarato Arturo Salerni, presidente di CILD – hanno rappresentato un buco nero per l’esercizio dei diritti da parte delle persone trattenute. Essi rappresentano un buco nero anche sotto il profilo delle modalità e dell’entità della spesa, a carico dell’erario, a fronte delle gravi carenze nella gestione e delle condizioni in cui si trovano a vivere i soggetti che incappano nelle maglie della detenzione amministrativa, ovvero della privazione della libertà in assenza di qualunque ipotesi di reato. Il proposito del governo di aumentarne il numero è il frutto di scelte dettate da un approccio tutto ideologico che non trova fondamento nell’analisi del fenomeno. L’esperienza degli ultimi 25 anni, a prescindere dalla gestione pubblica o privata dei centri, ci dice che bisogna guardare a forme alternative e non coercitive per affrontare la questione delle presenze irregolari sul territorio nazionale, che bisogna accompagnare le persone in percorsi di regolarizzazione e di emersione, cancellando l’obbrobrio della detenzione senza reato”.

    https://cild.eu/blog/2023/06/08/laffare-cpr-un-sistema-che-fa-gola-a-detrimento-dei-diritti

    Une #carte localisant les lieux de rétention administrative en Italie :


    #cartographie

    Pour télécharger le rapport :
    https://wp-buchineri.cild.eu/wp-content/uploads/2023/06/ReportCPR_2023.pdf

    #rapport #CPR #CILD #détention_administrative #rétention #business #privatisation #Italie #multinationales #coopératives #profits #droits_humains #CIE

    –—

    ajouté au fil de discussion sur la présence d’ORS en Italie :
    https://seenthis.net/messages/884112

    lui-même ajouté à la métaliste autour de #ORS, une #multinationale #suisse spécialisée dans l’ « #accueil » de demandeurs d’asile et #réfugiés :
    https://seenthis.net/messages/802341

    • “L’affar€ CPR”: un rapporto di CILD mette alla sbarra gli enti gestori

      Il profitto sulla pelle delle persone migranti

      Nel giugno scorso la Coalizione Italiana Libertà e Diritti civili (CILD) ha pubblicato un accurato rapporto dal titolo “L’affar€ CPR: il profitto sulla pelle delle persone migranti” 1, che analizza la gestione dei Centri di Permanenza per i Rimpatri (CPR) italiani da parte delle principali cooperative e imprese private che ne detengono o ne hanno detenuto l’appalto, vincendo i diversi bandi di gara istituiti dalle prefetture.

      Introdotta formalmente nel 1998 2 la detenzione amministrativa in Italia prevedeva inizialmente la facoltà per i questori, qualora non fosse possibile eseguire immediatamente l’espulsione delle persone extracomunitarie, di disporne il trattenimento per un massimo di 20 giorni (prorogabile di ulteriori 10) all’interno dei CPTA, Centri di Permanenza Temporanea e di Assistenza.

      Nel 2008 3, i CPTA diventano Centri di Identificazione ed Espulsione (CIE), e, nel 2009 4, i termini massimi di trattenimento vengono estesi a 180 giorni, per poi venire portati a 18 mesi nel 2011 5. Nel 2017 6, la c.d legge Minniti-Orlando ha ulteriormente modificato la denominazione di tali centri, rinominandoli Centri di Permanenza per i Rimpatri (CPR). Infine, il decreto Lamorgese del 2020 ha emendato alcune disposizioni, riducendo i termini massimi di trattenimento a 90 giorni per cittadini stranieri il cui paese d’origine ha sottoscritto accordi in materia di rimpatri con l’Italia 7.

      Inizialmente, i CPTA erano gestiti dall’ente pubblico Croce Rossa Italiana, e già all’ora diverse organizzazioni della società civile avevano denunciato le pessime condizioni di trattenimento, l’inadeguatezza delle infrastrutture e il sovraffollamento. In seguito al “pacchetto sicurezza” varato dal Ministro Maroni nel 2008, la situazione si aggrava, con la progressiva tendenza dello Stato a cercare di contenere i costi il più possibile. Così, diverse cooperative iniziano a partecipare ai bandi di gara, proponendo offerte a ribasso ed estromettendo la Croce Rossa. Infine, dal 2014, non solo le cooperative ma anche grandi multinazionali che già gestiscono centri di trattenimento in tutta Europa, iniziano a presentarsi e vincere i diversi bandi per l’assegnazione della gestione dei CPR.

      Multinazionali che si aggiudicano gare d’appalto proponendo ribassi aggressivi, a totale discapito dei diritti umani delle persone trattenuti. L’esempio più lampante è l’assistenza sanitaria, in quanto nei CPR, non è il SSN ad esserne competente, bensì l’ente gestore. Infine, nel triennio 2021-2023, le prefetture competenti hanno bandito gare d’appalto per la gestione dei 10 CPR presenti in Italia, complessivamente, per 56 milioni di euro, da sommare al costo del personale di polizia e la manutenzione delle strutture.

      Tra le principali imprese messe alla sbarra dal Report di CILD ci sono:

      Gruppo ORS (Organisation for Refugees Services). Multinazionale con sede a Zurigo, gestisce oltre 100 strutture di accoglienza e detenzione tra Svizzera, Austria, Germania e Italia. Sebbene risulti iscritta nel registro delle imprese dal 2018, ha iniziato la sua attività economica in Italia solo nel 2020. Nel 2019, si aggiudica l’appalto per la gestione del CPR di Macomer, in Sardegna (sebbene risultasse ancora “inattiva”). Nel 2020, gestisce il Cas di Monastir (Sardegna), due centri d’accoglienza a Bologna nel 2021, alcuni Cas a Milano, il CPR di Roma (Ponte Galeria) e quello di Torino.

      Nel centro di Macomer, personale medico ha denunciato l’assenza di interventi da parte delle autorità competenti in seguito a diversi episodi che hanno visto i trattenuti mettere a rischio la propria sicurezza. Inoltre, a più riprese è stata riportata l’impossibilità di effettuare ispezioni all’interno del centro da parte del Garante dei diritti delle persone private della libertà personale. Infine, un’avvocata che seguiva diversi clienti trattenuti, ha denunciato la sporcizia e l’inadeguatezza delle visite mediche di idoneità, che ha portato, tra l’altro, al trattenimento di soggetti affetti da gravi forme di diabete e soggetti sottoposti a terapia scalare con metadone, condizioni incompatibili con la detenzione amministrativa.

      Nel CPR di Roma è stata più volte denunciata l’insufficienza di personale, l’inadeguatezza dei locali di trattenimento (per esempio, l’assenza di luce naturale) e l’assenza della possibilità, per le persone recluse, di svolgere qualsiasi attività ricreativa. Anche a Torino, la delegazione CILD in visita ha riportato l’illegittimo trattenimento di persone soggette a terapia scalare con metadone, alto tasso di autolesionismo e abuso di psicofarmaci e tranquillanti somministrati.

      Cooperativa EKENE. Cooperativa sociale padovana che nel corso degli ultimi 10 anni ha spesso cambiato nome (nata come Ecofficina, poi Edeco 8 e infine Ekene), in quanto spesso al centro di inchieste giornalistiche, interrogazioni parlamentari e procedimenti giudiziari legati ad una cattiva gestione di alcuni centri d’accoglienza, come lo SPRAR di Due Carrare (Padova), dove la Procura di Padova aveva aperto un’indagine per truffa e falso in atto pubblico, tramutatasi in una maxi indagine estesasi ad alcuni vertici della Prefettura di Padova, per gare truccate e rivelazioni di segreto d’ufficio.

      Nel 2016, diversi giornalisti e ricercatori avevano ripetutamente denunciato il sovraffollamento e la malnutrizione di diversi centri in gestione alla cooperativa, come l’ex Caserma Prandina, il centro di Bagnoli e Cona (VE), dove, nel 2017, la donna venticinquenne Sandrine Bakayoko è morta per una trombosi polmonare, quando all’interno del centro erano ospitate più di 1.300 persone, in una situazione di sovraffollamento e forte carenza di personale. Nel 2016, è stata espulsa da Confcooperative Veneto, con l’accusa di gestire l’accoglienza seguendo un modello che guardava al business a discapito della qualità dei servizi.

      Tuttavia, nel 2019 si aggiudica l’appalto del CPR di Gradisca d’Isonzo, a Gorizia in FVG, un appalto da circa 5 milioni di euro per un anno, attualmente in proroga tecnica. Dalla riapertura nel 2019, il CPR di Gradisca è quello dove si sono verificati più decessi. Dal 2019, quattro persone sono decedute, due per complicazioni in seguito all’abuso di farmaci, e due suicidi. Ciò mette in risalto la malagestione delle visite di idoneità all’ingresso, nonché l’inadeguatezza delle condizioni di trattenimento. Inoltre, diversi avvocati hanno denunciato la difficoltà nello svolgere colloqui coi trattenuti, e come le persone trattenute non venissero nemmeno informate del diritto a fare domanda d’asilo una volta entrate in Italia.
      Nel dicembre 2021 Ekene si aggiudica anche la gestione del CPR di Macomer.

      ENGEL ITALIA S.R.L. Società costituita nel 2012 con sede legale a Salerno. Nata come ente gestore nel settore alberghiero, presto inizia ad occuparsi di strutture d’accoglienza per persone richiedenti asilo nella zona di Capaccio-Paestum. Sebbene sia una società fallibile dal 2020, è riuscita ad ottenere la gestione del CPR di Palazzo San Gervasio (Basilicata) e Via Corelli (Milano), grazie alla cessione di un ramo dell’azienda ad una società terza, Martinina s.r.l, con la stessa persona come amministratrice unica.

      Già nel 2014, Engel era stata al centro della cronaca per la discutibile gestione del centro di accoglienza di Capaccio-Paestum, dove agli ospiti non venivano erogati beni di prima necessità come cibo e vestiti. Era stata denunciata anche l’assenza di corsi d’italiano e l’irregolarità nell’erogazione del pocket money. Inoltre, molti ospiti avevano denunciato abusi e maltrattamenti all’interno del centro.

      Nel 2018 Engel si aggiudica l’appalto del CPR di Palazzo San Gervasio, con un ribasso sul prezzo d’asta del 28,60%, che ha gestito fino al marzo 2023. Fin da subito, il Garante nazionale per le persone private della libertà, in seguito ad una visita al centro, ne aveva denunciato le pessime condizioni: assenza di locali comuni, trattenuti costretti a consumare i pasti in piedi, e la presenza di solo tre docce comuni. Gli ambienti di pernotto, privi di un sistema di isolamento, risultavano caldissimi d’estate e molto freddi d’inverno.

      Sebbene il centro sia stato chiuso a metà del 2020 per lavori e riaperto a febbraio 2021, secondo CILD le condizioni continuerebbero ad essere critiche. Continua a mancare un locale mensa, e in stanze da 25mq sono ospitate fino ad 8 persone. Inoltre, anche per Palazzo San Gervasio è stata denunciata l’inadeguatezza delle visite di idoneità al trattenimento e la difficoltà per i trattenuti di avere accesso alla corrispondenza coi propri avvocati.

      Anche nel CPR di Milano, per il quale Engel ha ottenuto l’appalto nel 2021 e nel 2022, sono state denunciate le terribili condizioni dei locali, e l’incredibile numero di gabbie e reti di ferro, che danno l’impressione di isolamento estremo, non solo dall’esterno ma anche dal personale all’interno del centro. Anche il cibo e i letterecci erogati risultano di pessima qualità.

      GEPSA. Multinazionale francese che dal 2011 inizia ad investire in Italia nel campo dell’accoglienza, si aggiudica diversi appalti proponendo una strategia aggressiva, con un ribasso sulle basi d’asta dal 20% al 30%. Dal 2014 al 2017 gestisce il CIE di Ponte Galeria, dal 2014 al 2017 il CIE di Milano e dal 2015 al 2022 il CIE di Torino. Dal 2011 al 2014 avrebbe dovuto gestire anche il CIE e CARA di Gradisca d’Isonzo, ma l’aggiudicazione è stata annullata dal TAR del Friuli-Venezia Giulia per la mancanza di requisiti adeguati delle imprese facenti parti della rete.

      Del CPR di Torino, era stata denunciata l’eccessiva militarizzazione e la carenza di personale civile, nonché l’assenza di relazioni tra trattenuti ed operatori, che non entravano quasi mai nelle aree di detenzione. In particolare, Il Comitato Europeo per la Prevenzione della Tortura, in seguito ad una visita al centro, aveva denunciato come i trattenuti fossero costantemente sorvegliati da personale militare, che stavano letteralmente in mezzo tra trattenuti ed operatori, con funzioni di sorveglianza, ma senza interagire coi primi. Sempre nel CIE di Torino, sono stati riportati numerosi casi di malasanità, assenza di personale medico e la presenza di locali per l’isolamento dei trattenuti, che, secondo ASGI, poteva protrarsi fino a 5 mesi, in maniera del tutto arbitraria e illegittima.
      Durante gli anni della gestione Gepsa, nel CPR di Torino si sono verificate due morti e numerosi casi di autolesionismo e rivolta.

      BADIA GRANDE. Cooperativa sociale fondata nel febbraio 2007, con sede legale a Trapani, e presto si impone come colosso nel settore dell’accoglienza migranti nel Sud d’Italia, vincendo numerose gare d’appalto, soprattutto nel siciliano. Dal 2018 al 2022 gestisce il CPR di Bari-Palese e dal 2019 al 2020 quello di Trapani Milo. Nel 2021, diverse fonti giornalistiche denunciano la mala gestione del CPR di Bari, e diverse personalità dipendenti della cooperativa vengono rinviate a giudizio per casi di frode nell’esecuzione del contratto d’affidamento, in particolare nell’assistenza sanitaria e le misure di sicurezza sul lavoro.

      Anche per la gestione del CPR di Trapani la cooperativa viene indagata per frode nelle pubbliche forniture e truffa. Inoltre, in una visita nel 2019, il Garante nazionale riscontra l’assenza di vetri in molte finestre, assenza di porte e separatori che garantiscano la privacy nell’accesso ai servizi igienici, e l’assenza di locali per il consumo dei pasti, che i trattenuti sono obbligati a consumare sui letti o in piedi.

      Il rapporto si conclude con un’accurata riflessione sull’istituto della detenzione amministrativa, e su come ciò si sia dimostrata terreno fertile per “una pericolosissima extraterritorialità giuridica”, in cui non trovano applicazione neanche quei principi costituzionali che dovrebbero considerarsi inderogabili”. Infine, CILD sostiene che, sebbene la detenzione amministrativa abbia progressivamente creato un sistema che consente ad enti privati di “fare profitto sulla pelle delle persone detenute”, la soluzione non sarebbe la gestione dei CPR da parte del settore pubblico, bensì il superamento del sistema della detenzione amministrativa, da collocare in un quadro più ampio di gestione del fenomeno migratorio attraverso politiche più aperte verso la regolarizzazione degli ingressi, per motivi di lavoro, familiari o di protezione internazionale.

      https://www.meltingpot.org/2023/08/laffare-cpr-un-rapporto-di-cild-mette-alla-sbarra-gli-enti-gestori

  • Un #Kit_pédagogique proposé par #Exodus_Privacy
    https://framablog.org/2023/06/08/un-kit-pedagogique-propose-par-exodus-privacy

    À l’heure où dans une dérive policière inquiétante on criminalise les personnes qui veulent protéger leur #vie_privée, il est plus que jamais important que soient diffusées à une large échelle les connaissances et les pratiques qui permettent de prendre … Lire la suite­­

    #Éducation #Enjeux_du_numérique #Interviews #Animation #ateliers #médiation_numérique #MeTaL_PoU #ViePrivee

  • DOCUMENTAIRE. Des jeunes de lycée abordent le sexe et l’amour autrement avec le Dr Kpote
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/bas-rhin/strasbourg-0/documentaire-des-jeunes-de-lycee-abordent-le-sexe-et-l-
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/image/dl_qcKDgdKh1Bn7p-aEVEAFnuSg/930x620/regions/2023/05/22/646b6605602be_classe-libre-credit-ts-productions-15-31-

    Ils sont lycéens à Strasbourg et ils ont accepté de participer à une « classe libre ». Pendant une année scolaire, ils vont apprendre, ils vont devoir s’écouter et débattre autour des thèmes qui touchent à la sexualité et à la vie amoureuse : les sentiments, le respect de l’autre, le désir, la contraception ou l’identité de genre, tout passe à la moulinette de ces jeunes esprits, encore façonnés par leur éducation ou déjà en révolte face aux visions du passé.

    #éducation #sexualité #documentaire #adolescent #Dr_Kpote

  • Enseignement privé : 8 milliards de fonds publics et pas de contrôles
    https://www.cafepedagogique.net/2023/06/02/enseignement-prive-8-milliards-de-fonds-publics-et-pas-de-controles

    L’enseignement privé sous contrat est financé pour 73% par des fonds publics. Pourtant, les contrôles financiers, pédagogiques et administratifs sont quasi inexistants déplore la cour des comptes dans un rapport publié jeudi 2 juin. Tout aussi grave, en concentrant un nombre élevé d’élèves de milieux favorisés, l’enseignement privé risque d’aggraver « certaines faiblesses du système éducatif » pointent les sages de la rue de Cambon qui appellent à moduler les moyens en fonction du profil social des élèves. Pierre Moscovici assure que ce rapport est « intemporel » et qu’il n’a pas de lien avec la signature récente du protocole mixité entre Pap Ndiaye et le secrétaire général de l’enseignement privé ». Le président de la cour des comptes se défend de vouloir porter une parole politique, pour autant, il enjoint les collectivités à prendre en charge les frais de restauration et de transport scolaire pour permettre le « libre choix » des familles les moins favorisées.

    La manne de l’apprentissage : L’insolente santé de l’enseignement supérieur privé
    https://seenthis.net/messages/944563

    #éducation #école #enseignement_privé #pivatisation

  • Mai-juin 1940 : Quand la « démocratie » française renforçait la répression contre les antifascistes étrangers | Le Journal Lutte Ouvrière
    https://journal.lutte-ouvriere.org/2010/06/02/mai-juin-1940-quand-la-democratie-francaise-renforcait-la-re

    Aujourd’hui, la responsabilité de l’État français de #Vichy dans les persécutions et les crimes contre les étrangers et les #Juifs de France est officiellement reconnue. Mais pas celle des gouvernement précédents, pas celle des Daladier et Reynaud. Dans les livres d’histoire, les #persécutions contre les Juifs ne commencent que le 3 octobre 1940, date des mesures prises par Pétain contre les Juifs, pas avant. On continue à cacher soigneusement tout ce qui s’est passé avant l’arrivée au pouvoir de #Pétain, avant le 10 juillet 1940.

    #archiveLO 4 juin 2010 #Édouard_Daladier #Paul_Reynaud #répression #antifascisme

  • “Marxisme noir” de Cedric Robinson, ou la généalogie de la conscience révolutionnaire africaine
    https://www.philomag.com/articles/marxisme-noir-de-cedric-robinson-ou-la-genealogie-de-la-conscience-revolut

    #Marxisme noir, du théoricien politique afro-américain Cedric Robinson (1940-2016), est disponible en français. Paru pour la première fois il y a une quarantaine d’années, ce livre-somme est un classique de la théorie critique de la fin du XXe siècle. Démesurément ambitieux, il offre à la fois une histoire longue de l’éveil du racisme européen moderne et, comme en vis-à-vis, une genèse de l’activisme et de la pensée révolutionnaires noires.

    Si l’ouvrage, épais et dense, au style allusif et labyrinthique, fascine depuis longtemps étudiants et jeunes chercheurs aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, c’est en partie du fait des malentendus et des querelles d’interprétation qu’il rend possible. Son titre lui-même n’est pas sans embarras. Le marxisme noir dont il sera question n’est en effet pas à proprement parler l’objet du livre, mais plutôt l’annonce d’un paradoxe.

    #communisme #livres #édition

  • Prix de l’énergie : les litiges explosent, selon le Médiateur latribune.fr

    La part des litiges liés aux changements de prix de l’énergie a doublé sur un an, de 8% à 16%. Néanmoins, le nombre total de litiges enregistrés, tous sujets confondus, par le médiateur par rapport à 2021 est demeuré stable (30.558 litiges reçus) mais « cette stabilité masque des situations contrastées », insiste-t-il dans un communiqué.

    La crise de l’énergie enflamme les relations entre clients et fournisseurs. Dans son bilan publié ce mardi, le Médiateur de l’énergie constate, sans surprise, que les litiges sur les questions de prix ont doublé en 2022, dans un contexte d’explosion des cours du gaz et de l’électricité, selon un bilan publié ce mardi 30 mai.

    « Les hausses sans précédent des prix de l’énergie ont été souvent répercutées par certains fournisseurs de façon peu transparente, voire incompréhensible ou trompeuse, occasionnant une forte augmentation de ce type de litiges : la part des litiges liés à des changements de prix a doublé par rapport à 2021 (de 8 à 16%) » , pointe-t-il.

    Les mauvais élèves pointés du doigt
    Le Médiateur, qui a pour habitude de pointer publiquement les mauvais élèves, a ainsi dégainé plusieurs « cartons rouges » pour l’occasion à destination d’un certain nombre de fournisseurs : #Ohm_Energie#Gaz_de_Bordeaux , #Mint_Energie , #Mega_Energie et #Wekiwi .
    Quatre  « mauvaises pratiques tarifaires » sont notamment dénoncées chez certains : des prix non connus au moment où l’énergie était consommée dans des offres indexées sur les prix de marché, des contrats qui ne permettent pas de bénéficier du bouclier tarifaire (notamment chez Gaz de Bordeaux), des modifications de contrats en cours,  « sans donner une information loyale et transparente » , et surtout de fortes hausses de prix peu après la souscription d’offres à des prix très attractifs.

    Le nombre total de litiges reste stable
    Néanmoins, le nombre total de litiges enregistrés, tous sujets confondus, par le médiateur par rapport à 2021 est demeuré stable (30.558 litiges reçus) mais « cette stabilité masque des situations contrastées », insiste-t-il dans un communiqué. Contrairement aux litiges sur les prix, les litiges plus classiques ont été moins nombreux l’an dernier à cause de l’amélioration du traitement des plaintes par la plupart des fournisseurs, du déploiement des compteurs communicants ou de l’arrêt provisoire du démarchage.

    « Pour améliorer le fonctionnement du marché, je publierai à la rentrée un guide des recommandations de bonnes pratiques, rédigé en concertation avec l’ensemble des acteurs du secteur de l’énergie », a assuré le Médiateur Olivier Challan Belval dans le communiqué.

    Des factures en forte hausse
    Les factures d’électricité des ménages dans l’Union européenne ont bondi de 20% sur un an au second semestre 2022, tandis que leurs factures de gaz s’envolaient de 46%, atteignant des niveaux record à cause de la guerre en Ukraine, selon des chiffres d’Eurostat publiés fin avril. Sur la période allant de juillet à décembre 2022, les prix de l’électricité pour les ménages ont atteint en moyenne à travers l’UE 28,4 euros pour 100 kWh, soit un bond de 21% par rapport à la même période de 2021, a indiqué l’office européen des statistiques.

    Une conséquence de la flambée des prix de gros de l’électricité, de facto indexés sur le coût de production de la dernière centrale utilisée pour équilibrer l’offre et la demande, le plus souvent une centrale au gaz. Or, les cours du gaz naturel se sont envolés à mesure que la Russie cessait ses livraisons à l’Europe. Eurostat souligne cependant de fortes disparités entre les pays, ainsi que les impacts divers des mesures de soutien prises par les gouvernements nationaux. La part des taxes dans les prix de l’électricité a ainsi été diminuée quasiment de moitié en Europe.

    Au second semestre, les plus fortes hausses sur un an ont été enregistrées en Roumanie (+112%), République tchèque (+97%), Danemark (+70%), Lituanie (+65%) et Lettonie (+59%). A l’inverse, des augmentations bien plus modérées ont été constatées en Autriche, Allemagne, Pologne et Bulgarie (4 à 5%). La hausse en France s’établit à 9%. Exprimés en euros, les prix moyens de l’électricité pour les ménages ont varié d’environ 11 euros/100 kWh en Hongrie et en Bulgarie, à environ 45 euros en Belgique et 59 euros au Danemark.

    De même, les factures de gaz des ménages de l’UE se sont en moyenne établies à 11,4 euros pour 100 kWh au second semestre 2022, contre 7,8 euros un an plus tôt. Les pays de l’Est, très dépendants du gaz russe, ont été lourdement touchés : les prix du gaz ont plus que triplé en République tchèque, bondi d’environ 160% en Roumanie et en Lettonie, et ils ont doublé en Lituanie comme en Belgique. Seuls deux pays (Croatie et Slovaquie) ont enregistré des hausses inférieures à 20%, selon Eurostat.

    Source : https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/energie-environnement/les-litiges-lies-au-prix-de-l-energie-explose-selon-le-mediateur-963961.ht

    #ue #union_européenne #énergie #inflation #prix #électricité #france #gaz #politique #économie #europe #edf #capitalisme

  • Marxisme noir - extraits de l’introduction :
    https://qgdecolonial.fr/2023/05/27/marxisme-noir

    Néanmoins, il reste juste de dire qu’à l’origine, c’est-à-dire dans son substrat épistémologique, le #marxisme est une construction occidentale – une conceptualisation des affaires humaines et du développement histo­rique émergeant des expériences historiques des peuples européens, mé­diées à leur tour par leur civilisation, leurs ordres sociaux et leurs cultures. Ses origines philosophiques sont sans aucun doute occidentales. Mais on peut en dire autant de ses présupposés analytiques, de ses perspectives his­toriques, de ses points de vue. Cette conséquence des plus naturelles a pris une ampleur pour le moins inquiétante, puisque les marxistes européens ont le plus souvent présumé que leur projet coïncidait avec le développement historique mondial. Désorientés, semble-t-il, par l’ardeur culturelle des civilisations dominantes, ils ont pris pour des vérités universelles les struc­tures et dynamiques sociales issues de leur propre passé, lointain comme plus proche. Plus important encore, les structures les plus profondes du « matérialisme historique », la connaissance préalable à sa compréhension des mouvements historiques, ont tendu à exonérer les marxistes européens de leur devoir de recherche sur les effets considérables qu’ont eus sur leur science la culture et l’expérience historique. L’existence des idées directrices qui ont persisté dans la civilisation occidentale (et Marx lui-même, comme nous le verrons, a été amené à admettre de tels phénomènes), réappa­raissant à des « stades » successifs de son développement jusqu’à dominer l’arène de l’idéologie sociale, ne trouve que peu voire pas de justification théorique dans le marxisme. L’une de ces idées récurrentes est le racialisme : la légitimation et la corroboration de l’organisation sociale comme étant naturelle par rapport aux éléments « raciaux » qui la composent. Bien que n’étant pas spécifiques aux peuples européens, son apparition et sa codifi­cation au cours de la période féodale, au sein des conceptions occidentales de la société, allaient avoir des conséquences considérables et persistantes.

    #livres #édition #communisme #racisme

  • Sortie en librairie aujourd’hui :
    https://entremonde.net/marxisme-noir

    Dans ce clas­si­que de la pensée radi­cale noire enfin tra­duit en fran­çais, Cedric Robinson entre­prend d’écrire une his­toire intel­lec­tuelle du radi­ca­lisme noir. Bien que ce livre soit sur­tout resté dans la pos­té­rité pour la thèse du « capi­ta­lisme racial » qu’il y déve­loppe, Robinson revient, avec une érudition impres­sion­nante, sur les ori­gi­nes intra-euro­péen­nes du racia­lisme, ainsi que sur les ori­gi­nes euro­péen­nes du #marxisme avant de s’attar­der sur le déve­lop­pe­ment de l’his­toire afri­caine et les débuts de l’escla­vage trans­at­lan­ti­que. Enfin, il étudie minu­tieu­se­ment trois figu­res majeu­res de la tra­di­tion radi­cale noire : W.E.B. Du Bois, C.L.R. James et le roman­cier Richard Wright.

    #livres #édition #communisme #racisme

  • Guillaume Meurice et Nathalie Gendrot assignent les éditions Le Robert pour un livre non publié
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/05/19/guillaume-meurice-et-nathalie-gendrot-assignent-les-editions-le-robert-pour-

    L’humoriste et la linguiste, coauteurs du livre « Le Fin Mot de l’histoire en 200 expressions », reprochent à l’éditeur d’avoir cédé à la pression du milliardaire Vincent Bolloré.

    #édition #cancel_culture

  • Violences académiques ordinaires

    Violences et souffrances académiques : atteintes au #service_public et à la #santé_au_travail

    Ce troisième numéro de Mouvements consacré au champ académique, après ceux de 2008 (« Que faire pour l’Université ? ») et 2012 (« Qui veut la peau de la recherche publique ? »), trouve sa genèse dans un colloque consacré aux violences ordinaires dans les organisations académiques en juin 2022[1]. Lors des deux journées de discussion, les communications ont permis de mesurer à quel point, depuis ces quinze dernières années, le champ de l’enseignement supérieur et la recherche (ESR) a été profondément bouleversé par toute une série de réformes, depuis la #loi_LRU (Liberté et responsabilité des universités) en 2007 jusqu’à la #Loi_de_programmation_de_la_recherche (#LPR) votée en 2020. #Fusions, #précarisation, raréfaction des #postes – alors que les effectifs étudiants progressent –, #managérialisation, #sous-traitance, multiplication des #évaluations (des établissements, des formations, des professionnel·les comme des équipes) et de leurs instances, induisent #pression_psychique et dégradation des conditions de travail et rendent davantage visible et légitime la question de la #souffrance_au_travail.

    Qu’en est-il du #quotidien bouleversé de ces organisations en transformation et de celles et ceux qui y travaillent ? Comment cela se traduit-il sur le plan des décisions, des dispositifs, des activités, des interactions, des engagements et des subjectivités ? C’est cette attention aux « violences ordinaires » dans les #institutions_académiques qui constitue le cœur de ce numéro de Mouvements. Par #violence_ordinaire, nous entendons tout type de #contrainte verbale, morale, psychologique ou symbolique exercée sur les #corps au travail et ressentie comme telle par celles et ceux qui les vivent (et qui essaient – ou non – de s’en défendre). Comme y insiste l’article de Stéphane Le Lay et Olivia Chambard, quelle que soit la forme de ces violences, il importe d’essayer de comprendre leurs liens avec les #rapports_de_domination et d’interroger leur inscription – et la nature de cette inscription – dans des configurations organisationnelles ou des structures sociales ou culturelles propres à l’ESR.

    Ceci est d’autant plus important que se sont multipliées récemment les critiques à l’encontre d’enseignant·es-chercheur·euses supposé·es déconnecté·es du monde réel dans leurs enseignements (en inadéquation avec le marché du travail), et dans leurs recherches (insuffisamment en prise avec les « défis sociétaux » et la « demande sociale »). À celles-ci s’ajoutent désormais des #attaques, internes ou externes au champ académique, contre certaines disciplines et certains travaux suspectés d’être disculpants, politisés, voire contraires aux valeurs de la République[2]. L’université et la liberté consubstantielle à ses activités intellectuelles – l’#indépendance des chercheur·euses et enseignant·es-chercheur·euses étant inscrite dans la loi – sont mises à mal de manière plurielle par manque de moyens, mise au pas organisationnelle et #condamnation_morale. Si des travaux analysent les effets de ces réformes néolibérales sur le travail des chercheur·euses et enseignant·es-chercheur·euses, à l’image des articles de Frédérique Debout, d’Ambre Guichard-Ménard et de l’Observatoire des Conditions de Travail à l’Université de Caen Normandie, ils sont plus rares, voire inexistants, sur les conditions de travail des personnels administratifs ou techniques de l’ESR ou des salarié·es en sous-traitance exerçant dans les établissements académiques. Dans ce numéro, l’article d’Hugo Bret sur le #personnel_de_nettoyage d’une université et celui du collectif C. Noûs-Aussi consacré à l’#édition_scientifique permettent justement de jeter un regard incisif sur ces zones d’ombre.

    Les rapports de domination entre les statuts, les corps et les disciplines constituent de fait une clé d’entrée pour comprendre la spécificité des types de violence dans les organisations universitaires et académiques et leur analyse est ancienne. Plus récemment, des auteur·rices ont néanmoins renouvelé la perspective en s’emparant en particulier de la question des #violences_sexistes_et_sexuelles (#VSS) à l’université, sur lesquelles reviennent trois articles. L’un provient d’une chercheuse militante, sous la forme d’un témoignage anonyme. L’autrice prend appui sur son expérience en tant qu’étudiante, victime et témoin de violences, dans une grande école et évoque les actions collectives qui s’en sont suivies. De son côté, à partir du cas espagnol, Verónica Cala analyse finement les interrelations entre pensée féministe et action militante, expliquant en quoi l’université peut être aussi bien un terreau fertile qu’un système nuisant aux avancées pourtant nécessaires au développement de la pensée transformatrice féministe. Enfin, l’article d’Armelle Andro se penche sur les modalités de prise en charge des VSS spécifiques au monde académique, qui ont notamment fait suite à des médiatisations et des mobilisations importantes. Apportant un cadrage complémentaire, il expose les avancées et les freins au traitement institutionnel des VSS depuis vingt ans, pointant les spécificités et l’hétérogénéité des situations rencontrées dans le champ académique. Traitant aussi, mais de manière différente, la question des #rapports_sociaux (de sexe, hiérarchiques et de race), Morgane Le Guyader se penche sur le concept de #violence_épistémique. Celui-ci s’avère utile pour pointer ce qui, à l’intérieur même des critères de scientificité, vient discréditer certains points de vue indigènes ou subordonnés. Ce texte élabore une critique qui a l’intérêt de proposer d’autres manières de rendre compte de l’expérience sensible qui traverse les enquêté·es aussi bien que les enquêteurs et enquêtrices.

    Plusieurs articles de ce numéro, à l’image de celui de Marina Pietri consacré à une #animalerie_scientifique, cherchent ainsi à rendre compte de la manière dont la #division_du_travail au sein des organisations académiques est productrice de formes de violence, examinées comme étant propres à une activité et un rôle spécifiques, aussi bien que dans leur dimension transversale, lorsqu’elles affectent différentes catégories de personnels (chercheur·euses et enseignant·es-chercheur·euses, doctorant·es, personnels administratifs, techniques, etc.). Ce faisant, peut être interrogée la place des stratégies défensives liées aux cultures de métier et érigées pour lutter contre la souffrance. Plusieurs articles abordent également les manières dont les #inégalités et #discriminations s’activent et se reproduisent, dans des configurations où la hiérarchie bureaucratique peut se superposer aux formes de #domination_académique. Se donne alors à voir en quoi ces inégalités permettent de révéler des formes de #mépris plus ou moins visibles, qui peuvent aller de la délégation systématique du « sale boulot » à l’invisibilisation ou l’appropriation du travail d’autrui, en passant par l’empêchement de travailler et le #harcèlement.

    Pour faire face à l’aggravation de la situation en matière de santé physique et mentale, les établissements du supérieur ont obligation, depuis 2012, de mettre en place un Comité d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail (#CHSCT). Très variables selon les établissements, les modalités déployées en faveur de la prise en charge des « #risques_psychosociaux » (#RPS) se font régulièrement timides… ou inexistantes. Dans certains établissements, les fonctions de référent « Égalité, RPS, Handicap » ne sont pas pourvues, tardent à l’être ou encore ne sont dotées d’aucun moyens significatifs pour leur action, qui demeure parfois lettre morte. Nombre d’actrices et d’acteurs de terrain sont pourtant en première ligne et certain·es particulièrement actif·ves pour lutter contre les violences et réguler les dérives : préventeur·rices, médecins du travail, représentant·es du personnel siégeant ou non dans les CHSCT, associations féministes et de personnels précaires, sans oublier les juristes, certain·es cadres administratif·ves et personnes en responsabilité dans les composantes et les laboratoires. L’article de Gwenaël Delaval, Emmanuelle Puissant et Samira Saïdoune, consacré à un « #dispositif_RPS » dans une université, aborde les enjeux de cette prise en charge institutionnelle.

    On le voit, les chantiers ouverts sont nombreux et délicats à mener pour rendre visibles et pour lutter efficacement contre les différentes formes de violence, en desserrant l’étau des rapports de domination. Gageons que les contributions de ce numéro de Mouvements œuvreront dans ce sens, grâce à la réflexion individuelle et aux discussions collectives qu’elles susciteront dans le champ académique, et aux pistes d’action qu’elles ouvrent ainsi.

    https://mouvements.info/edito/violences-et-souffrances-academiques-atteintes-au-service-public-et-a-l
    #ESR #université #violence #violences_ordinaires #souffrance #conditions_de_travail #travail #recherche

    ping @karine4 @_kg_

  • François Dubet, sociologue : « La défense du statu quo scolaire est une défense de caste »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/05/15/francois-dubet-sociologue-la-defense-du-statu-quo-scolaire-est-une-defense-d

    L’explication de cette singularité n’est pas simple, mais une chose est sûre : les collèges et les lycées français sont particulièrement ségrégués. Cela signifie que les établissements les plus favorisés, d’une part, et les moins favorisés, d’autre part, participent d’un séparatisme scolaire accentuant fortement le seul jeu des inégalités sociales. A terme, derrière le décor de l’école républicaine, les élèves les plus favorisés se regroupent pendant que les moins favorisés d’entre eux sont contraints de rester ensemble.

    Les mécanismes de ces ségrégations sont parfaitement documentés et personne ne les conteste vraiment. D’abord, la carte scolaire reproduit très largement la répartition spatiale des inégalités. Ensuite, par les jeux des dérogations et, plus encore, par la présence des écoles privées, les familles les plus informées et les plus riches choisissent les meilleurs établissements et fuient ceux qui leur semblent trop populaires. Les seules inégalités spatiales sont ainsi redoublées par les choix des familles les plus favorisées.
    « Ghettos » scolaires

    Grâce à l’Indice de position sociale des établissements, auquel chacun peut accéder, on voit bien que le séparatisme scolaire est d’abord une affaire de « riches », financièrement et culturellement, pendant que les plus « pauvres » sont contraints d’aller dans des établissements de moins en moins favorisés. Les quelques établissements privés relativement populaires ne donnent pas le change : dans les grandes villes notamment, ils regroupent massivement les élèves venus de familles très favorisées. Ils participent activement d’un séparatisme qu’il est de bon ton de présenter comme une menace, sauf quand il s’agit du séparatisme des plus riches.

    après c’est #paywall

  • Le quasi-marché scolaire aux racines des inégalités (revue n’Autre école)
    https://www.questionsdeclasses.org/le-quasi-marche-scolaire-aux-racines-des-inegalites-revue-nautre

    Selon l’OCDE, « l’école tend à reproduire les effets de l’avantage socio-économique, au lieu de favoriser une répartition plus équitable des possibilités d’apprentissage et des résultats de l’apprentissage ». (OCDE, 2014). Si bien que pour Jean-Paul Delahaye 1, responsable de la mission « Grande pauvreté et réussite scolaire » pour le compte du ministère de l’Éducation nationale, il est impératif de « lutter contre les déterminismes sociaux en tant que déterminants de l’échec scolaire pour faire en sorte que la France ne soit plus le pays dans lequel l’origine sociale pèse le plus sur les destins scolaires ».

    Il est donc nécessaire d’analyser et de comprendre au mieux l’origine exacte des écarts de résultats constatés ; et puisque ces écarts sont moitié moindres dans un pays comme la Finlande, de nous pencher sur les éventuelles différences flagrantes entre les deux systèmes scolaires. Ici, les données fournies par Pisa montrent que les indices socio-économiques des écoles finlandaises sont bien moins dispersés que ceux des écoles françaises

    #école #éducation #déterminisme_social #PISA