• Bonjour les Seenthisiens

    Est-ce que l’un·e d’entre vous sait ce qu’il est advenu du projet #grammalecte ?
    Le site https://grammalecte.net est inaccessible, un post de LinuxFr de 2022 signalait déjà des problèmes d’accès (https://linuxfr.org/users/ysabeau/journaux/adieu-grammalecte ), et dans les commentaires l’auteur expliquait avoir fait un burnout.
    Bref, aujourd’hui impossible de récupérer une version, et pour moi ça tombe carrément mal car j’ai un gros truc à rédiger en #LaTeX et j’aimerais bien avoir grammalecte derrière pour le coup (avec flycheck-grammalecte sur #emacs).

  • La Serbie va recevoir 14 millions d’euros de l’UE pour renforcer ses frontières

    L’Union européenne a promis une enveloppe de 14 millions d’euros à la Serbie pour renforcer les contrôles aux frontières. Les arrivées en Serbie ont déjà fortement diminué depuis 2023, avec une route migratoire qui se décale du côté de la Macédoine du Nord et de la Bosnie-Herzégovine.

    La Serbie s’apprête à recevoir une enveloppe de quatorze millions euros de la part de l’#Union_européenne pour lutter contre les migrations irrégulières et renforcer ses frontières.

    « Il s’agira d’#équipements spéciaux destinés aux couloirs verts et bleus, c’est-à-dire les frontières et les rivières », a précisé #Emanuele_Giaufret, le chef de la Délégation de l’Union européenne à Belgrade, rapporte l’AFP.

    Entre 2021 et 2024, l’UE a augmenté de 60 % ses financements en faveur des pays des Balkans occidentaux, pour atteindre plus de 350 millions d’euros. Des aides destinées à la fois à la gestion des frontières mais aussi aux systèmes d’asile et d’accueil.

    Une route « pratiquement fermée » selon l’Intérieur serbe

    En réaction à cette nouvelle enveloppe de 14 millions d’euros, le ministre serbe de l’Intérieur, Ivica Dačić, a mis en avant le fait que la route migratoire de la Serbie vers la Hongrie était « pratiquement fermée », mais que de #nouvelles_routes migratoires apparaissaient sans cesse. Il a également précisé qu’en 2023, le nombre de passages migratoires aux frontières serbes avait été réduit de près de 70% par rapport à 2022.

    Une nette diminution corroborée par les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) : entre janvier et octobre 2024, 15 200 migrants sont arrivés en Serbie, contre 106 000 en 2023 et 120 000 en 2022.

    De manière plus globale, au cours des cinq premiers mois de 2024, le nombre total de franchissements des frontières de l’UE par la route des Balkans a chuté de 71 % par rapport à l’an passé, pour atteindre un peu plus de 8 900 franchissements, selon les chiffres de Frontex, l’agence européenne des gardes-frontières.

    #Frontex bientôt déployée en #Macédoine_du_Nord et #Bosnie-Herzégovine

    Frontex est déjà déployée en Serbie, au niveau des frontières avec la Bulgarie et la Hongrie, depuis un accord de coopération signé fin juin. Cet accord encadre les opérations conjointes avec les gardes serbes pour surveiller les frontières albanaises, macédoniennes et celles du Monténégro.

    Cette coopération sera bientôt étendue à la Macédoine du Nord et à la Bosnie-Herzégovine, a fait savoir l’UE. Pour rappel, ces deux pays ne font pas partie de l’UE - malgré des demandes d’adhésion introduites en 2005 pour l’un et en 2016 pour l’autre - et constituent une voie d’entrée dans l’UE.

    Le but est de s’adapter aux changements de route : dès 2023, Frontex notait que la route migratoire principale se décalait de la frontière serbe pour se rapprocher plutôt de cette frontière de l’UE avec la Bosnie-Herzégovine. Frontex y enregistrait 80 % de passages frontaliers irréguliers supplémentaires en 2023, par rapport à 2022.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/61577/la-serbie-va-recevoir-14-millions-deuros-de-lue-pour-renforcer-ses-fro

    #Balkans #route_des_Balkans #Serbie #externalisation #externalisation_des_frontières #frontières #contrôles_frontaliers #asile #migrations #réfugiés #aide_financière #militarisation_des_frontières #gestion_des_frontières #Frontex

  • Histoire de France populaire. D’il y a très longtemps à nos jours

    Dans la poursuite du travail de Howard Zinn et de Gérard Noiriel, ce livre revisite les #mythes nationaux à l’aune des avancées historiques les plus récentes.
    Interroger les origines de la France, retracer les #résistances et les révoltes pour placer au cœur de l’histoire les acteurs et actrices oubliées par le grand roman national et colonial.

    « La France est un pays où l’on adore l’histoire. Tout le monde en connaît à peu près les principaux évènements – ne serait­-ce que parce que l’école nous les a transmis. Ce récit, que nous aimons écouter, s’appelle “#récit_national”, car il s’agit d’une histoire de la construction de la France comme nation. On en parle aussi en termes de “#roman_national” tant il se rapproche parfois de la fiction. Ce récit est puissant, facile à raconter et il fournit à peu de frais de l’orgueil national à celles et ceux qui aiment s’inscrire dans de grandes lignées éternelles.

     » Mais ce récit est biaisé et ignore l’essentiel des connaissances accumulées depuis par les professionnels de la recherche historique. Il laisse aussi de côté les hommes et les femmes “ordinaires” en mettant l’accent sur les personnages “extra­ordinaires”, essentiellement des hommes. Ce qui laisse penser que le moteur de l’histoire est aux mains de ceux qui ont le #pouvoir, que les autres doivent se contenter de subir leurs décisions, qu’ils n’en prennent jamais eux­-mêmes, qu’ils n’ont aucun poids dans les changements historiques et ne jouent aucun rôle dans les basculements de l’histoire.

     » Notre récit part à la recherche du “populaire”, pris dans les mécanismes de dominations, en revisitant les épisodes du récit national, mais en y ajoutant d’autres moments historiques, et surtout d’autres acteurs, et actrices. Il faudra donc lire ce livre comme une aventure faite de #luttes, de résistances, de désenchantements, de #soumissions, d’#émancipations, de #défaites et de #victoires. Une épopée tantôt joyeuse, tantôt triste et sanglante, et qui se déroule jusqu’à nos jours. Car on ne peut éviter de se poser la question : où est le populaire aujourd’hui ? et quel est son destin ? »

    https://agone.org/livre/histoire-de-france-populaire

    #histoire #histoire_populaire #France #livre #nationalisme

  • Wie der Osten den Westen verändert
    https://www.nd-aktuell.de/artikel/1186546.frauenemanzipation-wie-der-osten-den-westen-veraendert.html

    Selbstbewusste Frauen in der DDR Foto: cradall.org

    5.11.2024 von Pia Sophie Roy - Frauenemanzipation in der DDR und im vereinten Deutschland – Notizen von einer Debatte in Berlin

    Er ließ keinen Zweifel: »Hier findet nicht die Vereinigung zweier gleicher Staaten statt«, wusste Wolfgang Schäuble, der maßgeblich an der Aushandlung des Einigungsvertrages beteiligt war, 1990. Von »nachholender Modernisierung« in Ostdeutschland war die Rede, womit die Abwicklung »überflüssiger« Institutionen, die Privatisierung oder Liquidierung von 97 Prozent der Volkseigenen Betriebe (VEB), die Umstellung des staatlichen, kostenlosen Bildungs- und Gesundheitswesens der DDR auf Weststandard und radikaler Eliteaustausch gemeint war. Auf einem Gebiet jedoch gelang es nicht, das Rad der Geschichte zurückzudrehen: bei der Frauenemanzipation.

    Von einem »Gleichstellungsvorsprung« im Osten sprach 1992 anerkennend Rainer Geißler, ein westlicher Sozialwissenschaftler. Nicht alles sei schlecht in der DDR gewesen, befand er kühn. Das bedeutet natürlich nicht, dass im zweiten deutschen Staat für die Frauen alles bestens bestellt war, wie Ursula Schröter in ihren Rückblick auf einer Veranstaltung des Bildungsvereins Helle Panke in Berlin zu berichten wusste.

    Auf dem VIII. Parteitag der SED im Juni 1971 wurde die Gleichberechtigung in der DDR als erfüllt verkündet. Etwas voreilig, obwohl die Gleichstellung nicht nur verfassungsrechtlich fixiert und das neue Familiengesetz von 1965 frauenfreundlich war. Seit Mitte der 70er Jahre gab es in der DDR keine Geschlechterunterschiede mehr in der beruflichen Qualifikation von Frauen und Männern. Die hohe Quote bei der weiblichen Erwerbstätigkeit bei gleichzeitiger Mutterschaft verdankte sich der Angebote staatlicher Kinderbetreuung. In der DDR trugen Frauen zu 47 Prozent zum Haushaltseinkommen bei, in der Bundesrepublik waren es 18 Prozent. Ostdeutsche Frauen nutzten zu 90 Prozent Kindergärten, zu 80 Prozent Krippen und Schulhorte. 90 Prozent der Frauen in der DDR waren Mütter, was laut der Soziologin nicht zu toppen war, eingedenk eines gewissen Prozentsatzes ungewollter Kinderlosigkeit.

    Ein auffallender Unterschied zum Westen war auch, dass DDR-Bürgerinnen ihr erstes Kind bereits mit Anfang 20 bekamen. Für diese frühe Mutterschaft hatte man im Westen die skurrilsten Erklärungen: Junge Menschen im Arbeiter-und-Bauern-Staat hätten den »Hebel Kind« genutzt, um eine Wohnung zu ergattern. Den Ehekredit hätte man »abkindern« können. Andere Westexperten machten das Fehlen von Alternativen für junge Leute wie etwa Auslandsreisen oder staatliche Nötigung verantwortlich für die frühe Mutterschaft in der DDR. »Unglaublich« nennt Ursula Schröter solche Interpretationen.

    Obwohl mit dem auf dem VIII. Parteitag beschlossenen Wohnungsbau- und Sozialprogramm der – nach dem Babyboom der 60er Jahre in Ost und West – sinkenden Geburtenrate entgegengewirkt werden sollte, drei Kinder pro Familie als wünschenswert galten, wollten DDR-Frauen mehrheitlich nur zwei Kinder, wie eine Befragung seinerzeit ergab. Interessant ist, dass der Kinderwunsch am größten bei Bäuerinnen war, gefolgt von Akademikerinnen, wesentlich geringer hingegen bei Arbeiterinnen. Befördert wurde die selbstbewusste Entscheidung von Frauen für oder wider Kinder dadurch, dass ab 1972 in der DDR Abtreibung rechtens war, »wenn Frau es will«. Dieses Recht wollten sich die Ostfrauen 1990 nicht nehmen lassen. Auf zahlreichen Demonstrationen und Kundgebungen bekundeten sie ihren Willen, den in der Bundesrepublik fortbestehenden Strafparagrafen nicht zu akzeptieren.

    In der Debatte zum Vortrag wurde offenbar, dass Anlass für die Streichung des Paragrafen 218 in der DDR – soviel Ehrlichkeit muss sein – eine Kampagne von Frauen in der Bundesrepublik war: »Wir haben abgetrieben!«, Bekenntnisse von 374 Frauen im »Stern« 1971, initiiert von Alice Schwarzer. Inge Lange, Kandidatin des Politbüros und Leiterin der Abteilung Frauen des Zentralkomitees der SED, gelang es nun mit ihren Mitstreiterinnen, die geschlossene Männerriege im obersten Gremium der »führenden Partei« im Staate für die Straffreiheit von Schwangerschaftsunterbrechungen zu überzeugen, um nicht eventuell vom Klassenfeind überholt zu werden und sich als progressiveren deutschen Staat präsentieren zu können. Der Coup gelang. Und realisierte eine Forderung der KPD aus Zeiten der Weimarer Republik. Schon merkwürdig, dass Kommunisten an der Macht vergessen konnten, wofür Jahrzehnte zuvor ihre viel beschworenen Vorbilder wie Clara Zetkin und Edwin Hoernle auch im Reichstag leidenschaftlich gestritten hatten. Oder auch den in der DDR gefeierten Arzt und Schriftsteller Friedrich Wolf, der mit seinem strafbesetzte Abtreibung anklagenden Drama »Cyankali« 1929 Aufsehen erregt hatte.

    Als ein Indiz für die stärkere Emanzipation der DDR-Frauen kann auch die hohe Zahl der Scheidungen gewertet werden. Waren es 1960 noch 14,2 Prozent, so 1985 schon 30,8 und zum Ende der DDR 47 Prozent. Aufschlussreich ist die Neuorientierung nach einer gescheiterten Ehe. Anfang der 70er Jahre bevorzugte der geschiedene Mann als neue Partnerin eine jüngere und weniger qualifizierte (sic!) Frau und umgekehrt die Frauen einen älteren und höher qualifizierten Mann. Beziehungen auf Augenhöhe stellten sich also auch in der DDR nicht automatisch ein. Insofern hatte der »Spiegel« 1969 nicht ganz unrecht, wenn auch in typischer Manier »alter weißer Männer« formuliert, als er schrieb: »Die beruflich erfolgreichen Ehepartnerinnen provozieren bei ihren Männern Minderwertigkeitskomplexe.« Einige Monate zuvor war auf einer Tagung der Akademie der Wissenschaften der DDR bedauernd festgestellt worden: »Aus Rücksicht auf den Ehepartner … scheut sich die eine oder andere Frau, eine größere Verantwortung, eine höhere gesellschaftliche Position einzunehmen als ihr Mann.« Patriarchalische Strukturen wirkten in der DDR fort. Auch die Männer müssen sich ändern, wenn Gleichberechtigung gelingen soll.

    Wie aber stand es nun um die Frauenemanzipation nach 1990? Ostdeutsche Frauen, die von der Massenarbeitslosigkeit viel stärker als die Männer betroffen waren, weil vor allem die Leicht- und Textilindustrie weggebrochen wurde, reagierten nicht mit einer Rückkehr in den Hausfrauenstatus. Das Deutsches Institut für Wirtschaftsforschung (DIW) registrierte: »Durch die Zuwanderung aus der ehemaligen DDR Anfang der 1990er Jahre hat sich die Wiedervereinigung auch auf das Arbeitsmarktverhalten und die Normen der Westdeutschen ausgewirkt.« Vereinbarkeit von Beruf und Familie wurde ebenso westdeutschen Frauen wichtiger. Und der Westmann lernte hinzu.

    Laut soliden Studien ist die Befürwortung egalitärer Geschlechterrollen im Osten dennoch prägnanter ausgeprägt als im Westen. Frauenerwerbstätigkeit wird hier durch ein engmaschigeres Netz der Kinderbetreuung abgesichert, wobei Thüringen mit über 91 Prozent an DDR-Niveau heranreicht. Generell sind alle ostdeutschen Bundesländer diesbezüglich vorbildlicher als die westdeutschen. Wieder, muss man sagen, denn nach 1990 wurden zunächst massenhaft auch Kindergärten und Krippen geschlossen. Westdeutsche Ignoranz. Begründet mit ideologischer Indoktrination, angeblicher »Erziehungsdiktatur«. Es hat eine Weile gedauert, ehe die Hirne westdeutscher Entscheidungsträger die Sinnhaftigkeit solcher Einrichtungen begriffen. Nicht zuletzt auf Druck der Ostfrauen. Mittlerweile hat ALLBUS, eine seit Anfang der 80er Jahre in der Bundesrepublik alle zwei Jahre durchgeführte Allgemeine Bevölkerungsumfrage der Sozialwissenschaften bestätigt: »Es ist für ein Kind sogar gut, wenn die Mutter berufstätig ist und sich nicht nur um den Haushalt kümmert.«

    Auf ihre plötzliche erzwungene Arbeitslosigkeit reagierten Ostfrauen Mitte der 90er Jahre mit einem Gebärstreik – demografisch nach der Massenflucht aus der DDR im Sommer 1989 und der Übersiedlung Zigtausender qualifizierter junger Menschen, darunter viele Frauen, in den 90ern mangels Arbeit im Zuge der Deindustrialisierung Ostdeutschlands eine Katastrophe. Inzwischen gibt es wieder weniger Kinderlosigkeit im Osten als im Westen, in Thüringen am wenigsten. Im Osten wird dafür weniger geheiratet, uneheliche Kinder gibt es häufiger als im Westen. Bezüglich weiblicher Erwerbsarbeit sind seit 2020 jedoch nur noch geringe Unterschiede zwischen Ost und West zu verzeichnen. Einen »Ansteckungseffekt« konstatierte Ursula Schröter, die übrigens selbst als Beispiel einer emanzipierten Ostfrau gelten kann. Hatte die gebürtige Leipzigerin doch Mathematik studiert und war im EDV-Bereich eines VEB tätig, bevor sie nach Berlin übersiedelte und dort ihre Dissertation ablegte, um fortan sich der Soziologie zu verschreiben. DDR-Frauen waren wesentlich mehr auch in naturwissenschaftlichen und technischen Berufen präsent als ihre westdeutschen Geschlechtsgenossinnen.

    Fazit des Referats von Ursula Schröter und der lebhaften Diskussion in der Hellen Panke: Es ist etwas geblieben von der DDR im vereinten Deutschland, wovon auch die Westfrauen profitieren. Und dies ist den Ostfrauen zu verdanken. Denn sie gingen unbeirrt ihren Weg weiter, hielten an ihren Vorstellungen von einem guten, selbstbestimmten Leben selbstbewusst fest.

    #DDR #émancipation #féminusme #avortement

  • Notifications SeenThis vers Microsoft

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  • Les #femmes aux jardins : cultures vivrières et émancipation
    https://metropolitiques.eu/Les-femmes-aux-jardins-cultures-vivrieres-et-emancipation.html

    Résiduels en France, les jardins familiaux ou ouvriers sont nombreux en #Russie, où ils contribuent significativement à l’alimentation des citadins. L’enquête de Camille Robert-Bœuf à Kazan et en #Île-de-France montre que les femmes y prennent une place grandissante, à la fois comme jardinières et figures associatives locales. Dans les métropoles occidentales, le foncier non bâti cristallise les conflits d’usages qui sont au cœur de nombreuses mobilisations environnementales et agroécologiques (Paddeu #Terrains

    / #jardin, #alimentation, femmes, #émancipation, Russie, Île-de-France, #jardins_ouvriers

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met-robert-boeuf.pdf

  • En guise d’héritage, une quête à poursuivre

    Trois vagues féministes plus tard, les slogans d’#Emma_Goldman ont sans doute perdu de leur charge révolutionnaire. Pourtant, les questions qu’elle posait il y a un siècle sont toujours d’une brûlante actualité. Et s’il était temps de la redécouvrir ?

    Près d’un siècle après la mort d’Emma Goldman, l’#intime est toujours #politique, les droits et #libertés_individuelles sont renforcés, le cadre démocratique renouvelé, et l’#émancipation_des_femmes est un processus toujours en cours. Entre la militante anarchiste et nous, des mythes ont disparu, et d’autres sont nés : la croyance dans l’État s’est fragilisée, celle dans le progrès humain aussi, et la violence terroriste comme les mouvements de backlash semblent toujours prêts à miner les acquis en matière de libertés individuelles. Anarchistes ou pas, nous sommes frappés par l’actualité des questions qu’Emma Goldman posait avec 100 ans d’avance.

    L’héritage d’Emma Goldman

    Pour la philosophe #Chiara_Bottici, la pensée d’Emma Goldman résonne avec encore plus de force aujourd’hui que dans le passé. En effet, Goldman est contemporaine du féminisme de la première vague qui avait fait de la revendication des #droits_politiques la priorité de son combat. C’est donc face à cette forme de féminisme qu’elle jugeait reservée à une élite qu’Emma Goldman se déclarait alors « non-féministe ». Aujourd’hui, force est de constater que ce féminisme de la première vague a montré ses limites : l’obtention de droits politiques n’ont pas suffi à créer les conditions de l’émancipation des femmes. « Ce qui est actuel dans la pensée d’Emma Goldman, c’est le fait qu’on ne peut pas séparer le féminisme de la critique du #capitalisme, de la critique de l’État en tant que machine d’exploitation. » juge Chiara Bottici.

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/avoir-raison-avec/la-quete-doit-se-poursuivre-et-se-poursuivra-8379133

    #intersectionnalité #corps #féminisme #héritage #anarchisme
    #audio #podcast 

  • #thunderbird 128 Released With Major Changes
    https://www.omgubuntu.co.uk/2024/07/thunderbird-128-released-with-major-changes

    A major update to the open-source e-mail client Thunderbird is now available to download. Thunderbird 128 ‘Nebula’ builds on last year’s stellar Thunderbird 115 release with a flurry of new features, major code improvements, and bug fixes. And like the recent Firefox 128 release this version of Thunderbird is an Extended Support Release (ESR). Like an LTS, ESR status commits to continued updates, bug fixes, and support for several years. Linux distros which rely on ESR builds, like Debian, can update. Support period aside, you’ll find plenty of tangible changes on offer in Thunderbird 128, so preamble done let’s get […] You’re reading Thunderbird 128 Released With Major Changes, a blog post from OMG! Ubuntu. Do not reproduce elsewhere without (...)

    #News #App_Updates #Email_Clients

  • Qu’est-ce que l’ARC ? Définition, implémentation et vérification.
    https://www.badsender.com/2020/10/29/arc-definition-fonctionnement-verification

    L’ARC ou Authenticated Received Chain est un protocole d’authentification e-mails défini par la RFC 8617. L’objectif d’ARC est de permettre de garder les résultats d’authentification d’un e-mail (on parle ici de SPF, DKIM, DMARC) quand ce dernier passe par un flux de messagerie indirect (une liste de diffusion, un service de transfert d’e-mail ou encore un service de filtrage).
    [...]
    Lors d’un transfert d’e-mail, les systèmes d’authentification SPF & DKIM vont malheureusement être en échec car une IP différente va être utilisée lors du transfert (et donc cette IP ne figurera pas dans SPF) et la signature DKIM ne sera pas valide puisque l’e-mail ne sera pas émis du serveur d’envoi de l’annonceur mais du destinataire.
    Ainsi, quand DMARC va tenter de valider SPF & DKIM, le résultat sera sans appel et amènera au rejet de l’e-mail puisque ceci ne pourra valider SPF & DKIM (et donc appliquera la politique de sécurité définie par l’administrateur).

    Pour le détail des en-tête de mails liés AAR / AS / AMS : https://fr.slideshare.net/slideshow/overview-of-the-arc-protocol-for-email/62443278#14

    #email #spam #DKIM #SPF #DMARC #ARC

  • #Proton_Mail Desktop Client is Available for Linux
    https://www.omgubuntu.co.uk/2024/03/proton-mail-desktop-app-linux

    Proton Mail has released a brand new desktop app for Windows, Mac, and Linux. The app means subscribers to the privacy-focused mail service no longer need to use a web browser to read, send, and manage their mail. For privacy-conscious folks, Proton needs little introduction. Formed by a group of scientists and engineers who met working at CERN in 2014, the company has grown to provide a wide range of secure, privacy-focused online services, including encrypted email, VPN, and cloud storage. On the Proton blog the company explains the rationale behind freeing their webmail service from the confines of a web […] You’re reading Proton Mail Desktop Client is Available for Linux, a blog post from OMG! Ubuntu. Do not reproduce elsewhere without (...)

    #News #email_client #Privacy_Tools #Proton_AG

  • De Dakar au bout du monde, des #femmes_en_migration

    Quand on parle de migration au Sénégal, on imagine le plus souvent de jeunes hommes voguant vers les Canaries sur une pirogue incertaine. C’est oublier que parmi les migrants, il y a beaucoup de migrantes. Que leur voyage soit légal ou « clandestin », que leur destination soit l’Europe ou un autre pays africain, on n’en parle quasiment jamais. Quelle est l’histoire des #migrations_féminines depuis et vers le Sénégal ? Quels en sont les ressorts et les motivations, quelles en sont les spécificités ? *

    C’est à ces questions que ce podcast cherche à répondre, à travers les paroles d’une dizaine de femmes voyageuses, d’une syndicaliste et d’une sociologue. Elles parlent de la volonté de s’en sortir économiquement, de l’#aspiration à l’émancipation individuelle. Elle disent les beaux aspects du voyage, mais aussi ses difficultés (#violences, #racisme, etc.). Enfin, elles évoquent les problèmes de #visas et l’Europe forteresse qui en a poussé plus d’une à prendre la pirogue, au péril de sa vie...

    https://shows.acast.com/659fea6a3f690700175eb31a
    #podcast #audio #migrations #Sénégal #femmes_migrantes #femmes #genre #émancipation

  • 2,200 #Frontex #emails to #Libya

    Frontex has shared locations of migrant boats with Libya’s coast guard more than 2,000 times in three years – despite watching them whip, beat and shoot at passengers

    It has long been known that European countries provide support and funding to the Libyan Coast Guard to carry out a controversial mission: intercepting Europe-bound migrants whom EU member states and agencies cannot apprehend directly without breaching international laws.

    Numerous media and NGO reports have detailed the abuse and violence practised by the Libyan Coast Guard against migrants during sea interception and inside the detention centres they are taken to after being brought back to Libya.

    Lighthouse Reports has previously established suspicious patterns of collaboration between EU border agency Frontex and the Libyan Coast Guard, including direct links between Frontex aerial assets spotting boats and their subsequent interception by the coast guard.

    Despite the reports of abuse and torture, Frontex has withheld public criticism of the Libyan Coast Guard. And until now, the extent to which Frontex has shared information with the coast guard, and its internal knowledge of the abuse migrants face after they are intercepted, was unknown.
    METHODS

    Following the publication of Lighthouse investigation Frontex and the Pirate Ship in December, the EU Committee on Civil Liberties, Justice and Home Affairs (LIBE) sent a letter to Frontex Executive Director Hans Leijtens questioning the agency’s collaboration with Libyan actors, including militia, in eastern and western Libya.

    Lighthouse Reports and Der Spiegel gained access to the director’s response to the LIBE Committee’s questions. The email included all Serious Incident Reports (SIRs) relating to the Libyan Coast Guard.
    STORYLINES

    The SIRs reveal three incidents of Frontex aerial surveillance assets witnessing Libyan Coast Guard officers beating people in overcrowded boats at sea. In a separate incident, the agency’s surveillance drone recorded a Libyan officer shooting at a wooden boat to force it to stop.

    The letter from Leitjens meanwhile reveals that Frontex gave away the location of migrant boats to the Libyan Coast Guard approximately 2,200 times, usually via email, in the last three years – despite being aware of the regular instances of violence they commit.

    When confronted with these facts by our team, Frontex said: “The decision to share information about vessels in distress with the Libyan rescue coordination centre, alongside other national centres, is taken with a heavy heart”

    The SIRs contain parts of Frontex’s human rights officer’s recommendations for the agency. The measures proposed range from increasing the sharing of coordinates with NGO rescue ships to involving UN agencies in following the fates of those returned to Libya. Frontex did not comment on whether these recommendations were implemented.

    https://www.lighthousereports.com/investigation/2200-frontex-emails-to-libya

    #partage #localisation #migrations #asile #externalisation #frontières #contrôles_frontaliers #gardes-côtes_libyens #géolocalisation #SIRs #surveillance_aérienne #drones

  • Pourquoi faire de l’éducation populaire au numérique ?
    https://framablog.org/2024/01/24/pourquoi-faire-de-leducation-populaire-au-numerique

    Julie et Romain, les deux cofondateurices de l’Établi numérique, ont fait un travail très intéressant d’introspection sur le sens de leur activité, faire de l’éducation populaire au numérique. Nous sommes ravi⋅es de leur laisser la parole. Dès nos premières discussions, … Lire la suite­­

    #Dans_notre_archipel #Éducation #Émancip’Asso #Enjeux_du_numérique #Claviers_invités

  • Un long article de synthèse sur un débat en cours : jusqu’à quel point la société française actuelle est-elle marquée par des legs coloniaux ? A retenir, notamment, les noms et analyses des philosophes Souleymane Bachir Diagne et Nadia Yala Kisukidi.
    (la suite de l’article est à lire en vous connectant au site du Monde)

    Comment la question coloniale trouble les sociétés occidentales
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/19/comment-la-question-coloniale-trouble-les-societes-occidentales_6211842_3232

    Comment la question coloniale trouble les sociétés occidentales
    Par Nicolas Truong, le 19 janvier 2024

    Si l’histoire des colonisations se renouvelle en France, ses approches théoriques restent déconsidérées par une frange de l’opinion qui en refuse les conclusions et les réduit à leurs aspects les plus controversés.

    C’est une histoire qui travaille les mémoires. Un passé qui pèse sur le présent. La question coloniale ne cesse de hanter la politique nationale. A croire que chaque fracture française réveille ce passé qui a encore du mal à passer. Dans certaines de ses anciennes colonies, notamment africaines, où la France est conspuée et même chassée de pays longtemps considérés comme des prés carrés. Dans ses banlieues paupérisées au sein desquelles les émeutes contre les violences policières ravivent le sentiment du maintien d’une ségrégation sociale, spatiale et raciale héritée de la période coloniale. Dans des stades où La Marseillaise est parfois sifflée.

    Une histoire qui s’invite jusque dans les rangs de l’Assemblée nationale, où l’usage du terme « métropole » pour désigner la France continentale sans les territoires d’outre-mer est désormais rejeté, car considéré comme colonialiste. Et jusqu’à l’Elysée : après avoir affirmé, lors de la campagne présidentielle de 2017, que la colonisation était un « crime contre l’humanité » qui appartient à un « passé que nous devons regarder en face, en présentant nos excuses à l’égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes », Emmanuel Macron a finalement estimé, en 2023, qu’il n’avait « pas à demander pardon ». Un ravisement contemporain d’un ressassement idéologique et médiatique permanent contre la « repentance », la « haine de soi » et l’« autoflagellation ».

    Cependant, il semble difficile pour une société d’éviter les sujets qui finissent inexorablement par s’imposer. Il en va de la colonisation comme de la collaboration. La génération Mitterrand et les années Chirac ont été ponctuées par des révélations, débats et discours marquants liés à la période du gouvernement de Vichy. La France d’Emmanuel Macron n’échappe pas à l’actualité de l’histoire de ses anciennes colonies. Car « le passé colonial est partout », résume l’historien Guillaume Blanc, l’un des quatre coordinateurs de Colonisations. Notre histoire, ouvrage collectif dirigé par Pierre Singaravélou (Seuil, 2023).

    (...).

    #colonisation #colonialité #racisme #antiracisme #émancipation #universalisme

    • Suite de l’article :

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/19/comment-la-question-coloniale-trouble-les-societes-occidentales_6211842_3232

      « Le colonialisme n’est pas achevé »

      Au Sahel, la présence de la France est devenue indésirable. Bien sûr, la stratégie africaine de la Chine comme l’emprise de la Russie, à travers les milices privées du Groupe Wagner, n’y sont pas étrangères. Mais « il faut souligner l’épaisseur historique de ce sentiment », insiste Guillaume Blanc. L’histoire de cette réprobation est « à la fois récente et ancienne », ajoute-t-il, en référence aux analyses d’Ousmane Aly Diallo, chercheur à Amnesty International, selon qui les interventions militaires de la France dans ses anciennes colonies en Afrique – près de cinquante depuis 1960 – ont pérennisé « l’hégémonie française dans ces espaces ». Ainsi, à partir de 2022, lorsque l’armée française quitte le Mali et le Burkina Faso et se replie au Niger, « elle a beau dire y lutter contre le djihadisme, les populations y voient une ingérence française de plus », constate Guillaume Blanc.

      Cette histoire est également plus ancienne et « nous ramène notamment aux années 1950 », explique-t-il, à la lumière des apports de l’historienne Gabrielle Hecht : c’est à cette époque, selon elle, que la France a construit sa prétendue « indépendance énergétique » en exploitant l’uranium du Gabon et du Niger. En échange de prix avantageux, la France soutenait les dirigeants gabonais et nigériens au pouvoir.
      Lire aussi la tribune | Article réservé à nos abonnés « La question du passé colonial est le dernier “tabou” de l’histoire de France des XIXᵉ et XXᵉ siècles »

      C’est pourquoi « les sociétés africaines sont des sociétés postcoloniales, tout simplement au sens où le passé colonial pèse encore sur le présent », observe Guillaume Blanc, qui estime que « la France est, elle aussi, une société postcoloniale ». En effet, rappelle le philosophe Souleymane Bachir Diagne, l’Organisation des Nations unies (ONU) considère toujours que la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie sont des territoires « non autonomes », ce qui signifie que leurs populations « ne s’administrent pas encore complètement elles-mêmes ». Pour le professeur d’études francophones à l’université Columbia (New York), « cela veut dire que la majorité des nations qui composent l’ONU, et qui pour la plupart ont conquis leur souveraineté contre le colonialisme, estime que le mouvement des décolonisations, qui a défini l’histoire du XXe siècle, n’est pas achevé ».

      Souleymane Bachir Diagne rappelle une situation encore assez méconnue. Car si les recherches sur les colonisations et décolonisations sont nombreuses, novatrices et fécondes, la diffusion de ces savoirs reste parcellaire. Afin d’enseigner l’histoire de la colonisation et aussi « combattre les clichés », Guillaume Blanc, maître de conférences à l’université Rennes-II, trouve « assez utile » de partir des chansons, des bandes dessinées ou des films lors de ses cours sur les sociétés africaines et asiatiques du XIXe au XXIe siècle. Dans les amphithéâtres, l’auteur de Décolonisations (Seuil, 2022) n’hésite pas à diffuser le tube de Michel Sardou Le Temps des colonies (1976), où l’on entend : « Y a pas d’café, pas de coton, pas d’essence en France, mais des idées, ça on en a. Nous on pense », ou à évoquer certains albums d’Astérix « qui parlent de “nègres” aux lèvres protubérantes et ne sachant ni lire ni écrire ».

      La popularité du couscous

      D’autres contributeurs de Colonisations, comme la linguiste et sémiologue Marie Treps, s’attachent à l’actualité des « mots de l’insulte », comme « bougnoul », emprunté à la langue wolof où il signifie « noir », apparu au Sénégal à la fin du XIXe siècle, terme vernaculaire transformé en sobriquet « lourdement chargé de mépris » qui désigne désormais « un étranger de l’intérieur ». Les experts du fait colonial mobilisent l’analyse des objets ou de la cuisine – avec la popularité du couscous ou du banh mi – mais aussi du paysage urbain, comme le géographe Stéphane Valognes, qui montre la façon dont les rues de Cherbourg (Manche) portent encore les traces de la conquête coloniale, avec ses maisons de style néomauresque et ses rues estampillées du nom d’anciens généraux coloniaux. Sans oublier le palais de l’Elysée, à Paris, ancien hôtel particulier financé pour la monarchie par Antoine Crozat (1655-1738), qui bâtit sa fortune, dans les années 1720, grâce à la traite transatlantique, après avoir obtenu le monopole de la fourniture en esclaves de toutes les colonies espagnoles.

      « Si l’histoire de la colonisation est bien connue des spécialistes, en revanche, en France, il y a encore un refus de voir ce que fut la colonisation », estime Guillaume Blanc, qui trouve « aberrant » d’entendre encore des hommes politiques et certains médias évoquer les routes et les écoles que la France aurait « amenées » dans ses colonies : « Sans le travail forcé, la mort et la sueur des Congolais, des Malgaches ou des Vietnamiens, il n’y aurait jamais eu de routes. Quant à l’école, les petits garçons et les petites filles colonisés n’y allaient tout simplement pas : l’enseignement était réservé à une élite restreinte, et la France n’a jamais eu l’intention de scolariser les millions d’enfants qu’elle colonisait. »

      Nous vivons un moment postcolonial parce que notre époque est postérieure à l’ère des grandes colonisations – d’où le préfixe « post » – mais aussi, selon certains chercheurs, parce qu’il convient d’analyser ce passé qui pèse sur le présent en dépassant les anciennes dichotomies forgées aux temps des colonies. Notamment celles entre Orient et Occident, centre et périphérie ou civilisation et barbarie. « Postcolonial » est ainsi à la fois le marqueur d’une période historique et la désignation d’un mouvement théorique : après la critique du « néocolonialisme » des années 1960-1970, à savoir de l’emprise occidentale encore manifeste au cœur des nouvelles nations indépendantes, les études postcoloniales – postcolonial studies – émergent à la fin des années 1970. Elles prennent leur essor dans les années 1980 sur les campus américains et s’attachent à montrer comment les représentations et les discours coloniaux, en particulier ceux de la culture, ont établi une différence radicale entre les colonisés et le monde occidental, notamment forgé sur le préjugé racial.

      Publié en 1978, L’Orientalisme, ouvrage de l’écrivain palestino-américain Edward Said (1935-2003) consacré à la façon dont un Orient fantasmé a été « créé » par l’Occident (Seuil, 1980), est considéré comme l’un des premiers jalons du courant postcolonial, même s’il n’en revendique pas le terme. Au cours d’une déconstruction des représentations et clichés véhiculés sur l’Orient depuis le siècle des Lumières, ce défenseur lettré de la cause palestinienne assure que « le trait essentiel de la culture européenne est précisément ce qui l’a rendue hégémonique en Europe et hors de l’Europe : l’idée d’une identité européenne supérieure à tous les peuples et à toutes les cultures qui ne sont pas européens ». Se réclamant d’un « humanisme » qui ne se tient pas « à l’écart du monde », cet ancien professeur de littérature comparée à l’université Columbia estimait dans une nouvelle préface publiée en 2003, en pleine guerre en Irak à laquelle il était opposé, que « nos leaders et leurs valets intellectuels semblent incapables de comprendre que l’histoire ne peut être effacée comme un tableau noir, afin que “nous” puissions y écrire notre propre avenir et imposer notre mode de vie aux peuples “inférieurs” ».
      « La continuation du rapport de domination »

      La pensée postcoloniale fut largement inspirée par les subaltern studies, courant né en Inde dans les années 1970, autour de l’historien Ranajit Guha (1923-2023), études consacrées aux populations à la fois minorées par la recherche et infériorisées dans les sociétés récemment décolonisées. Une volonté de faire « l’histoire par le bas », selon les termes de l’universitaire britannique Edward Palmer Thompson (1924-1993), une façon de rompre avec l’idée d’un progrès historique linéaire qui culminerait dans l’Etat-nation, une manière de réhabiliter des pratiques et des savoirs populaires mais aussi d’exercer une critique des élites indiennes souvent constituées en mimétisme avec l’ancienne bourgeoisie coloniale.

      L’ambition des intellectuels postcoloniaux est assez bien résumée par l’Indien Dipesh Chakrabarty, professeur d’histoire, de civilisations et de langues sud-asiatiques à l’université de Chicago : il s’agit de désoccidentaliser le regard et de Provincialiser l’Europe (Amsterdam, 2009). L’Europe n’est ni le centre du monde ni le berceau de l’universel. Incarnée par des intellectuels comme la théoricienne de la littérature Gayatri Chakravorty Spivak ou l’historien camerounais Achille Mbembe, cette approche intellectuelle « vise non seulement à penser les effets de la colonisation dans les colonies, mais aussi à évaluer leur répercussion sur les sociétés colonisatrices », résume l’historien Nicolas Bancel (Le Postcolonialisme, PUF, 2019).
      Lire aussi l’enquête (2020) : Article réservé à nos abonnés « Racisé », « racisme d’Etat », « décolonial », « privilège blanc » : les mots neufs de l’antiracisme

      L’empreinte de l’époque coloniale n’est pas seulement encore présente à travers des monuments ou les noms des rues, elle l’est aussi dans les rapports sociaux, les échanges économiques, les arts ou les relations de pouvoir. Car une partie de ses structures mentales se serait maintenue. « La fin du colonialisme n’est pas la fin de ce que l’on appelle la “colonialité” », explique Souleymane Bachir Diagne. Forgé au début des années 1990 par le sociologue péruvien Anibal Quijano (1928-2018), ce terme désigne un régime de pouvoir économique, culturel et épistémologique apparu à l’époque moderne avec la colonisation et l’essor du capitalisme mercantile mais qui ne s’achève pas avec la décolonisation.

      La colonialité, c’est « la continuation du rapport de domination auquel les décolonisations sont censées mettre fin », poursuit Souleymane Bachir Diagne. « Et les jeunes ont une sensibilité à fleur de peau à ces aspects », relève-t-il, en pensant notamment aux altercations entre policiers et adolescents des « quartiers ». Pour le philosophe, une définition « assez éclairante de cette colonialité structurelle » a été donnée par le poète et homme d’Etat sénégalais Léopold Sédar Senghor (1906-2001), selon qui « l’ordre de l’injustice qui régit les rapports entre le Nord et le Sud » est un ordre fondé sur « le mépris culturel ». Ainsi, poursuit l’auteur du Fagot de ma mémoire (Philippe Rey, 2021), « on peut se demander si les populations “issues de l’immigration” dans les pays du “Nord” ne constituent pas une sorte de “Sud” dans ces pays ».

      « Le concept de colonialité ouvre des réflexions fécondes », renchérit la philosophe Nadia Yala Kisukidi, maîtresse de conférences à l’université Paris-VIII. Loin du terme « néocolonialisme » qui réduit la domination à une cause unique, la colonialité permet « d’articuler les formes de la domination politico-économique, ethnoraciale, de genre, culturelle et psychosociale, issues du monde colonial et de déceler leur continuation dans un monde qu’on prétend décolonisé. Ce qui permet de dire que, dans un grand nombre de cas, les décolonisations apparaissent comme des processus inachevés », poursuit l’autrice de La Dissociation (Seuil, 2022).

      Souleymane Bachir Diagne insiste sur le fait que Léopold Sédar Senghor, en « grand lecteur de Jean Jaurès », croyait comme le fondateur du journal L’Humanité en un monde où « chaque nation enfin réconciliée avec elle-même » se verrait comme « une parcelle » de cette humanité solidaire qu’il faut continûment travailler à réaliser. « Mais pour cela il faut combattre la colonialité, le mépris culturel, l’ordre de l’injustice. D’un mot : il faut décoloniser. L’impensé colonial existe : il consiste à ignorer la colonialité. »
      Universalisme eurocentré

      C’est ainsi que l’approche décoloniale, nouveau paradigme apparu dans les années 1990, est venue s’ajouter aux études postcoloniales autour de cette invitation à « décoloniser ». Née en Amérique du Sud au sein d’un groupe de recherche intitulé Modernité/Colonialité, la pensée décoloniale se donne notamment comme ambition de décoloniser les savoirs. Et de revisiter l’histoire. C’est pourquoi, selon ce courant théorique, la date capitale de la domination occidentale est 1492, le moment où Christophe Colomb ne « découvre » pas l’Amérique, mais l’« envahit ». C’est la période lors de laquelle naît la modernité par « l’occultation de l’autre », explique le philosophe et théologien argentino-mexicain Enrique Dussel (1934-2023). Un moment où la « reconquête » menée par la chrétienté expulsa les musulmans de la péninsule Ibérique et les juifs d’Espagne. Ainsi, une « désobéissance épistémique » s’impose, enjoint le sémiologue argentin Walter Mignolo, afin de faire éclore des savoirs alternatifs à une conception de l’universalisme jugée eurocentrée.

      Tous les domaines politiques, sociaux, économiques et artistiques peuvent être analysés, réinvestis et repolitisés à l’aide de cette approche décoloniale, à la fois savante et militante. L’écologie est notamment l’un des nombreux thèmes investis, car « la double fracture coloniale et environnementale de la modernité » permet de comprendre « l’absence criante de Noirs et de personnes racisées » dans les discours sur la crise écologique, assure l’ingénieur en environnement caribéen Malcom Ferdinand dans Une écologie décoloniale (Seuil, 2019). « Faire face à la tempête écologique, retrouver un rapport matriciel à la Terre requiert de restaurer les dignités des asservis du navire négrier tout autant que celles du continent africain », écrit Malcom Ferdinand.

      Partis d’Amérique latine, « ces travaux ont essaimé dans le monde entier », explique Philippe Colin, coauteur avec Lissell Quiroz de Pensées décoloniales. Une introduction aux théories critiques d’Amérique latine (Zones, 2023). Dans les années 1990, les lectures partisanes des théories postcoloniales ont suscité des controverses dans l’espace public, notamment autour de la notion de « discrimination positive » et du « politiquement correct ». Une discorde qui se rejoue aujourd’hui, notamment avec les attaques menées par les néoconservateurs américains contre ce qu’ils appellent, de manière péjorative, la « cancel culture », cette culture dite « de l’annulation » censée être portée par un « maccarthysme de gauche » et même un « fascisme d’extrême gauche », résume d’un trait Donald Trump.
      Pensées « victimaires »

      Aux Etats-Unis, les études postcoloniales et décoloniales, « forgées dans une matrice marxiste au sein d’une diaspora d’intellectuels indiens, africains ou sud-américains enseignant dans les campus américains, se sont déployées d’abord dans le champ académique », précise Philippe Colin. Alors qu’en France, la réception de ces travaux s’est faite immédiatement de façon polémique. « Le concept a été revendiqué par le Parti des indigènes de la République à partir de 2015 de manière explicite, et cela a changé beaucoup les choses en France », analyse l’historien Pascal Blanchard. « Il est alors devenu une cible idéale pour ceux qui cherchaient un terme global pour vouer aux gémonies les chercheurs travaillant sur la colonisation », poursuit-il dans le livre collectif Les Mots qui fâchent. Contre le maccarthysme intellectuel (L’Aube, 2022).

      Dans L’Imposture décoloniale (L’Observatoire, 2020), l’historien des idées Pierre-André Taguieff se livre à une critique radicale de « l’idéologie postcoloniale et décoloniale, centrée sur la dénonciation criminalisante de la civilisation occidentale ». Une position que l’on retrouve également au sein de L’Observatoire du décolonialisme et des idéologies identitaires, un site Web dont les contributeurs alimentent régulièrement les dossiers à charge des médias en guerre contre le « wokisme ».
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      Les critiques ne viennent toutefois pas uniquement de la galaxie conservatrice, des sites de veille idéologique ou des sphères réactionnaires. Auteur d’un ouvrage critique sur Les Etudes postcoloniales. Un carnaval académique (Karthala, 2010), le politologue Jean-François Bayart leur reproche de « réifier le colonialisme » car, affirme-t-il, aujourd’hui, « le colonial n’est pas une essence mais un événement ». Par ailleurs, rappelle-t-il, « le colonialisme n’a pas été l’apanage des seuls Etats occidentaux ». Des chercheurs insistent également sur le fait que la colonisation est un fait historique pluriel et qu’il convient de tenir compte de la diversité des sociétés où elle s’est exercée. Or, la prise en compte des formes de pouvoir propres à chaque société anciennement colonisée serait parfois omise par les approches décoloniales.

      Auteur de L’Occident décroché (Fayard, 2008), l’anthropologue Jean-Loup Amselle estime que ce courant de pensée a « détrôné l’Occident de sa position de surplomb, ce qui est une bonne chose, mais a entraîné des effets pervers », puisque, selon lui, elle reprend parfois à son compte « les stigmates coloniaux en tentant d’en inverser le sens ». Sur le site Lundimatin, l’essayiste Pierre Madelin critique, lui, les travers du « campisme décolonial » notamment apparu après le déclenchement de la guerre en Ukraine, à l’occasion de laquelle, dit-il, « plusieurs figures de proue des études décoloniales » ont convergé vers la rhétorique anti-occidentale de Vladimir Poutine.

      Procès en relativisme

      Comme toute théorie, ces approches postcoloniales et décoloniales sont critiquables, estime Nicolas Bancel, « mais à partir de textes, de positions théoriques et épistémologiques, et non à partir de tribunes maniant l’invective, la désinformation, la dénonciation ad hominem, sans que leurs auteurs sachent rien de la réalité et de l’importance de ce champ intellectuel », juge-t-il. D’ailleurs, prolonge Nadia Yala Kisukidi, au-delà de l’université, les termes « décolonial » ou « postcolonial », dans le débat public français, « fonctionnent comme des stigmates sociaux, pour ne pas dire des marqueurs raciaux. Loin de renvoyer à des contenus de connaissance ou, parfois, à des formes de pratiques politiques spécifiques, ils sont mobilisés pour cibler un type d’intellectuel critique, souvent non blanc, dont les positionnements théoriques et/ou politiques contribueraient à briser la cohésion nationale et à achever le déclassement de l’université française. Comme si le mythe de la “cinquième colonne” avait intégré le champ du savoir ». D’autant que « décoloniser n’est pas un mot diabolique », relève le sociologue Stéphane Dufoix (Décolonial, Anamosa, 2023)

      Un reproche résume tous les autres : celui du procès en relativisme. Une critique qui est le point de discorde de tous les débats qui opposent de façon binaire l’universalisme au communautarisme. Or, cette querelle a presque déjà été dépassée par deux inspirateurs historiques de ces mouvements postcoloniaux et décoloniaux : Aimé Césaire (1913-2008) et Frantz Fanon (1925-1961). Dans sa Lettre à Maurice Thorez, publiée en 1956, dans laquelle il explique les raisons de sa démission du Parti communiste français, à qui il reproche le « chauvinisme inconscient » et l’« assimilationnisme invétéré », le poète martiniquais Aimé Césaire expliquait qu’« il y a deux manières de se perdre : par la ségrégation murée dans le particulier ou par la dilution dans l’“universel” ».

      Aimé Césaire a dénoncé « un universalisme impérial », commente Souleymane Bachir Diagne, auteur de De langue à langue (Albin Michel, 2022). Mais, dans le même temps, « il a refusé avec force de s’enfermer dans le particularisme ». Au contraire, poursuit le philosophe, Césaire « a indiqué que s’il a revendiqué la “négritude”, c’était pour “contribuer à l’édification d’un véritable humanisme”, l’“humanisme universel”, précise-t-il, “car enfin il n’y a pas d’humanisme s’il n’est pas universel” ». Des propos que le Frantz Fanon des dernières pages de Peau noire, masques blancs (Seuil, 1952) « pourrait s’approprier », estime Souleymane Bachir Diagne.

      Ces exemples remettent en cause l’idée selon laquelle les études, réflexions et théories actuelles sur le fait colonial, postcolonial ou décolonial seraient des importations venues des campus américains et issues du seul frottement des études subalternes avec la French Theory, du tiers-monde et de la déconstruction. « Il n’est donc tout simplement pas vrai que les penseurs du décolonial soient unanimement contre l’universel », déclare Souleymane Bachir Diagne, qui, loin de tous les impérialismes et réductionnismes, appelle à « universaliser l’universel ».

      Nicolas Truong

    • « La question du passé colonial est le dernier “tabou” de l’histoire de France des XIXᵉ et XXᵉ siècles », Nicolas Bancel, Pascal Blanchard, historiens

      L’#histoire_coloniale est désormais à l’agenda des débats publics. Et si les débats sont très polarisés – entre les tenants d’une vision nostalgique du passé et les apôtres du déclin (de plus en plus entendus, comme le montre la onzième vague de l’enquête « Fractures françaises ») et les décoloniaux les plus radicaux qui assurent que notre contemporanéité est tout entière issue de la période coloniale –, plus personne en vérité ne met aujourd’hui en doute l’importance de cette histoire longue, en France, de cinq siècles.

      Loin des conflits mémoriaux des extrémistes, l’opinion semble partagée entre regarder en face ce passé ou maintenir une politique d’amnésie, dont les débats qui accompagnèrent les deux décrets de la loi de 2005 sur les « aspects positifs de la #colonisation » furent le dernier moment d’acmé. Vingt ans après, les politiques publiques sur le sujet sont marquées par… l’absence de traitement collectif de ce passé, dont l’impossible édification d’un musée colonial en France est le symptôme, au moment même où va s’ouvrir la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts.

      Si l’histoire coloniale n’est pas à l’origine de l’entièreté de notre présent, ses conséquences contemporaines sont pourtant évidentes. De fait, les récents événements au Niger, au Mali et au Burkina Faso signent, selon Achille Mbembe, la « seconde décolonisation », et sont marqués par les manifestations hostiles à la #France qui témoignent bien d’un désir de tourner la page des relations asymétriques avec l’ancienne métropole. En vérité, malgré les assurances répétées de la volonté des autorités françaises d’en finir avec la « Françafrique », les actes ont peu suivi les mots, et la page coloniale n’a pas véritablement été tournée.

      Relation toxique

      La France souffre aussi d’une relation toxique avec les #immigrations postcoloniales et les #quartiers_populaires, devenus des enjeux politiques centraux. Or, comment comprendre la configuration historique de ces flux migratoires sans revenir à l’histoire coloniale ? Comment comprendre la stigmatisation dont ces populations souffrent sans déconstruire les représentations construites à leur encontre durant la colonisation ?

      Nous pourrions multiplier les exemples – comme la volonté de déboulonner les statues symboles du passé colonial, le souhait de changer certains noms de nos rues, les débats autour des manuels scolaires… – et rappeler qu’à chaque élection présidentielle la question du passé colonial revient à la surface. C’est très clairement le dernier « tabou » de l’histoire de France des XIXe et XXe siècles.

      Ces questions, la France n’est pas seule nation à se les poser. La plupart des anciennes métropoles coloniales européennes sont engagées dans une réflexion et dans une réelle dynamique. En Belgique, le poussiéreux Musée de Tervuren, autrefois mémoire d’une histoire coloniale chloroformée, a fait peau neuve en devenant l’AfricaMuseum. Complètement rénové, il accueille aujourd’hui une programmation ambitieuse sur la période coloniale et ses conséquences. Une commission d’enquête nationale (transpartisane) a par ailleurs questionné le passé colonial.

      En France, le silence

      En Allemagne, outre le fait que les études coloniales connaissent un développement remarquable, plusieurs expositions ont mis en exergue l’histoire coloniale du pays. Ainsi le Münchner Stadtmuseum a-t-il proposé une exposition intitulée « Decolonize München » et le Musée national de l’histoire allemande de Berlin consacré une exposition temporaire au colonialisme allemand en 2017. Et, si le Humboldt Forum, au cœur de Berlin, fait débat pour son traitement du passé colonial et la présentation des collections provenant du Musée ethnologique de Berlin, la question coloniale est à l’agenda des débats publics de la société allemande, comme en témoigne la reconnaissance officielle du génocide colonial en Namibie.

      En Angleterre, le British Museum consacre une partie de son exposition permanente à cette histoire, alors que l’#esclavage colonial est présenté à l’International Slavery Museum à Liverpool. Aux Pays-Bas, le Tropenmuseum, après avoir envisagé de fermer ses portes en 2014, est devenu un lieu de réflexion sur le passé colonial et un musée en première ligne sur la restitution des biens culturels. Au Danemark, en Suisse (où l’exposition « Helvécia. Une histoire coloniale oubliée » a ouvert ses portes voici un an au Musée d’ethnologie de Genève, et où le Musée national suisse a programmé en 2024 une exposition consacrée au passé colonial suisse), au Portugal ou en Italie, le débat s’installe autour de l’hypothèse d’une telle institution et, s’il est vif, il existe. Et en France ? Rien. Le silence…

      Pourtant, le mandat d’Emmanuel Macron faisait espérer à beaucoup d’observateurs un changement de posture. Quoi que l’on pense de cette déclaration, le futur président de la République avait déclaré le 15 février 2017 à propos de la colonisation : « C’est un crime. C’est un crime contre l’humanité, c’est une vraie barbarie. Et ça fait partie de ce passé que nous devons regarder en face. »

      Notre pays est à la traîne

      Puis, durant son mandat, se sont succédé les commissions d’historiens sur des aspects de la colonisation – avec deux commissions pilotées par Benjamin Stora entre 2021 et 2023, l’une sur les relations France-Algérie durant la colonisation, l’autre sur la guerre d’#Algérie ; et une autre commission sur la guerre au #Cameroun, présidée par Karine Ramondy et lancée en 2023 – qui faisaient suite au travail engagé en 2016 autour des « événements » aux #Antilles et en #Guyane (1959, 1962 et 1967) ou la commission sur les zoos humains (« La mémoire des expositions ethnographiques et coloniales ») en 2011 ; alors qu’était interrogée parallèlement la relation de la France à l’#Afrique avec la programmation Africa 2020 et la création de la Fondation de l’innovation pour la démocratie confiée à Achille Mbembe en 2022. En outre, le retour des biens culturels pillés lors de la colonisation faisait également l’objet en 2018 d’un rapport détaillé, piloté par Felwine Sarr et Bénédicte Savoy.

      Mais aucun projet de musée d’envergure – à l’exception de ceux d’un institut sur les relations de la France et de l’Algérie à Montpellier redonnant vie à un vieux serpent de mer et d’une maison des mondes africains à Paris – n’est venu concrétiser l’ambition de regarder en face le passé colonial de France, aux côtés du Mémorial ACTe de Pointe-à-Pitre (#Guadeloupe) qui s’attache à l’histoire de l’esclavage, des traites et des abolitions… mais se trouve actuellement en crise en matière de dynamique et de programmation.

      Situation extraordinaire : en France, le débat sur l’opportunité d’un musée colonial n’existe tout simplement pas, alors que la production scientifique, littéraire et cinématographique s’attache de manière croissante à ce passé. Notre pays est ainsi désormais à la traîne des initiatives des autres ex-métropoles coloniales en ce domaine. Comme si, malgré les déclarations et bonnes intentions, le tabou persistait.

      Repenser le #roman_national

      Pourtant, des millions de nos concitoyens ont un rapport direct avec ce passé : rapatriés, harkis, ultramarins, soldats du contingent – et les descendants de ces groupes. De même, ne l’oublions pas, les Français issus des immigrations postcoloniales, flux migratoires qui deviennent majoritaires au cours des années 1970. On nous répondra : mais ces groupes n’ont pas la même expérience ni la même mémoire de la colonisation !

      C’est précisément pour cela qu’il faut prendre à bras-le-corps la création d’un musée des colonisations, qui sera un lieu de savoir mais aussi d’échanges, de débats, de socialisation de cette #histoire. Un lieu majeur qui permettra de relativiser les mémoires antagonistes des uns et des autres, d’éviter la polarisation mortifère actuelle entre les nostalgiques fanatiques et les décoloniaux radicaux, mais aussi d’intégrer à l’histoire les millions de personnes qui s’en sentent exclues. Une manière de mettre les choses à plat, pour tourner véritablement la page.

      De toute évidence, l’histoire coloniale est une page majeure de notre histoire, et l’on doit désormais repenser notre roman national à l’aune de la complexité du passé et d’un récit qui touche dans leur mémoire familiale des millions de familles françaises. Ce n’est pas là la lubie de « sachants » voulant valoriser les connaissances accumulées. Les enjeux sont, on le voit, bien plus amples.

      Mais comment concevoir ce musée ? Ce n’est pas à nous d’en décrire ici les contours… Mais on peut l’imaginer comme un carrefour de l’histoire de France et de l’histoire du monde, ouvert aux comparaisons transnationales, à tous les récits sur cinq siècles d’histoire, ouvert à toutes les mémoires et à inventer en collaboration avec la quarantaine de pays et de régions ultramarines qui en sont parties prenantes. Un musée qui mettrait la France à l’avant-garde de la réflexion mondiale sur le sujet, dans une optique résolument moderne, et permettrait de mettre en perspective et en récit les politiques actuelles de retour des biens coloniaux pillés et des restes humains encore présents dans nos musées.

      Allons-nous, à nouveau, manquer ce rendez-vous avec l’histoire, alors que dans le même temps s’ouvre la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, installée dans le château de François Ier avec « 1 600 m² d’expositions permanentes et temporaires ouvertes au public, un auditorium de 250 places, douze ateliers de résidence pour des artistes… », dotée de plus de 200 millions d’investissements ? Si nous sommes capables d’édifier cette cité, nous devons imaginer ce musée. Sinon, la page coloniale ne pourra être tournée.
      Nicolas Bancel et Pascal Blanchard sont historiens (université de Lausanne), et ils ont codirigé Histoire globale de la France coloniale (Philippe Rey, 2022). Pascal Blanchard est également codirecteur de l’agence de communication et de conseil Les bâtisseurs de mémoire.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/10/30/la-question-du-passe-colonial-est-le-dernier-tabou-de-l-histoire-de-france-d

      (candidature d’intellectuel éclairé)

      #1492 #Indochine (omise) #colonialité

    • La « cancel culture » avec les historiens Henry Laurens et Pierre Vesperini
      Publié le : 17/06/2022

      https://www.rfi.fr/fr/podcasts/id%C3%A9es/20220617-la-cancel-culture-avec-les-historiens-henry-laurens-et-pierre-vesperini

      Pierre-Édouard Deldique reçoit dans le magazine Idées, pour le thème la « cancel culture » ou « culture de l’annulation » en français : Henry Laurens, historien, titulaire de la chaire d’Histoire contemporaine du monde arabe au Collège de France, qui vient d’écrire Le passé imposé (Fayard) et Pierre Vesperini, historien, spécialiste de l’Antiquité grecque et latine, auteur de Que faire du passé ? Réflexions sur la cancel culture (Fayard).

  • Gmail And Yahoo Inbox Updates & What They Mean For Senders | Mailgun
    https://www.mailgun.com/blog/deliverability/gmail-and-yahoo-inbox-updates-2024

    The requirement from both Gmail and Yahoo is to set up strong authentication with “SPF, DKIM, and DMARC for your domain.” Previously not a requirement, this move towards implementing DMARC is something Sinch Mailgun’s Jonathan Torres had already predicted in our guide on email security and compliance.

    (...) For­ DMAR­C you will­ need­ to set at mini­mum a p=no­ne poli­cy. (...)

    Il ne suffit plus d’avoir SPF et DKIM, il va aussi falloir implémenter l’enregistrement DMARC, en mode « none » au minimum.

    • Je ne comprend pas pourquoi le standard mail n’évolue pas.
      Si les corps de mails étaient stockés sur le serveur d’émission et non sur celui de réception, le stockage des spam serait à la charge de l’émetteur. Du coup :
      1. les serveurs de réception pourraient accepter beaucoup plus facilement les entêtes
      2. le corps pourrait être scanné pour les spams uniquement lorsque l’utilisateur demande l’affichage d’où une réduction de charge.
      3. le volume global de transaction et de stockage serait beaucoup plus faible (seuls les entêtes seraient copiés pour un mail à plusieurs destinataire)

      En fait on est resté sur un modèle basé sur les lettres papiers.

    • After self-hosting my email for twenty-three years I have thrown in the towel. The oligopoly has won.
      Carlos Fenollosa
      https://cfenollosa.com/blog/after-self-hosting-my-email-for-twenty-three-years-i-have-thrown-in-the-
      Le problème est plus grave. Das Internet ist kaputt. L’exclusion des petit prestataires est sytématique. Depuis au moins deux ans je ne propose plus l’hébergement de boîtes email (sur mes serveurs). Ce monsieur espagnol explique pourquoi.

      September 04, 2022 — Many companies have been trying to disrupt email by making it proprietary. So far, they have failed. Email keeps being an open protocol. Hurray?

      No hurray. Email is not distributed anymore. You just cannot create another first-class node of this network.
      ...

      #monopoles #oligopoles #email #internet

    • De mon côté, depuis 2 ans, ça va mieux.

      Mieux : les serveurs Microsoft se font jeter par Google, et réciproquement. Parce que ponctuellement, les uns et les autres ne sont pas capables de respecter les RFC. Quand ça tombe sur un client que j’ai été contraint de migrer vers MS, ça fait plaisir de pouvoir lui dire que Microsoft n’est pas la panacée non plus.

      Ça va mieux au sens où MS et Google ont cessé de filtrer sur des règles arbitraires (surtout MS d’ailleurs). Il reste Orange, avec des règles absurdes, mais c’est vraiment rare qu’on doive intervenir.

      On en reste de notre côté à 3 points à contrôler :
      1) Les DNS conformes : SPF, DKIM, DMARC ; parfois, DKIM est compliqué, selon l’hébergement final utilisé
      2) Les IP émettrices identifiées et en nombre limité : ici, on concentre les flux sur deux IP RIPE
      3) La surveillance des DNSBL, pour être toujours au vert ; pas mal de temps qu’on n’a pas eu besoin de faire quoi que ce soit à ce sujet

    • De ce que je lis ici, l’enregistrement #DMARC est imposé uniquement si on envoie plus de 5000 e-mails par période de 24 heures sur un service (GMail ou Yahoo donc) :

      https://www.it-connect.fr/fevrier-2024-google-et-yahoo-imposent-utilisation-spf-dkim-dmarc

      En dessous, la norme reste SPF et/ou DKIM. Par contre, "Tous les domaines et adresses IP utilisées pour émettre des e-mails doivent avoir un enregistrement DNS de type « PTR » (reverse) correctement configuré" et ça, je ne sais pas trop ce que ça veut, si quelqu’un·e a des infos...

      Bon, j’imagine que ce n’est qu’une première étape et ça sera généralisé à terme.

    • L’enregistrement PTR, c’est de s’assurer que si ton serveur de messagerie répond qu’il se nomme toto.domain.tld, il faut que l’IP publique émettrice réponde « toto.domain.tld » à une recherche inverse.

      En mode Linux, avec la commande host, je vérifie la résolution dans les deux sens, nom vers IP et IP vers nom (PTR) :

      $ host seenthis.net
      seenthis.net has address 217.182.178.243
      $ host 217.182.178.243
      243.178.182.217.in-addr.arpa domain name pointer seenthis.net.

      Et là, je vérifie ce que répond le serveur de messagerie dans sa réponse d’accueil :
      $ nc seenthis.net 25
      220 seenthis.net ESMTP Postfix (Debian/GNU)

      Tout est conforme, donc.

  • En tant que chef de #projet #informatique, chaque journée débute comme un nouveau module à intégrer dans l’ensemble complexe de la #gestion de projet. Les #réunions s’entremêlent avec les échéances, et les flux de #emails incessants font écho aux lignes de #nocode qui attendent d’être écrites. C’est dans ce tourbillon que la tasse de #café devient un #compagnon ou un #camarade souvent incontournable. ☕
    https://michelcampillo.com/blog/6498.html

  • #Gramsci, défenseur des subalternes dans « un monde grand et terrible »

    Avec « L’Œuvre-vie d’Antonio Gramsci », Romain Descendre et Jean-Claude Zancarini nous plongent dans les combats et le laboratoire intellectuel d’une figure majeure de la tradition marxiste. Victime du fascisme et opposant au tournant stalinien du communisme, il a développé une pensée encore stimulante.

    « Gramsci« Gramsci, ça vous dit quelque chose ? Il était né en Sardaigne, dans une famille pauvre. À deux ans, une tuberculose osseuse le frappa à la moelle épinière, si bien qu’il ne mesura jamais plus d’un mètre et demi. Vous comprenez ? Un mètre et demi. Et pourtant, c’était un géant ! » Voilà comment, dans Discours à la nation (Les Éditions Noir sur Blanc, 2014), le dramaturge Ascanio Celestini présente le membre fondateur du Parti communiste italien (PCI), martyr du régime fasciste de Mussolini, aujourd’hui considéré comme un monument de la pensée marxiste.

    La même admiration pour « un des plus grands [philosophes] de son siècle » se ressent à la lecture du livre de Romain Descendre et Jean-Claude Zancarini, consacré à L’Œuvre-vie d’Antonio Gramsci (Éditions La Découverte). S’il existe déjà des biographies du révolutionnaire sarde (notamment celle de Jean-Yves Frétigné) ou des introductions de qualité à son œuvre (aux Éditions sociales ou à La Découverte), les deux spécialistes en études italiennes proposent, avec cet ouvrage de plus 500 pages, une enquête lumineuse et inégalée.

    Ils suivent pas à pas l’élaboration de la pensée gramscienne, liée aux événements de sa vie personnelle et militante, elle-même affectée par les soubresauts d’une époque que Gramsci a décrite comme un « monde grand et terrible ».

    Les deux auteurs embrassent ainsi tous les textes produits depuis ses premières années de militantisme socialiste dans les années 1910, jusqu’aux Cahiers de prison rédigés dans les années 1930, en passant par son implication dans le mouvement turinois des conseils d’usine en 1919-1920, puis son engagement comme responsable et chef du PCI dans les années 1920.

    « Sa vie, son action et sa pensée, écrivent Descendre et Zancarini, l’ont conduit à produire un corpus de textes ayant une double caractéristique rare : il conserve aujourd’hui encore une grande pertinence théorique et politique, en même temps qu’il hisse son auteur au rang des plus grands “classiques” européens. »

    Si c’est le cas, c’est parce que Gramsci a suivi une évolution intellectuelle singulière. Nourri de la lecture de philosophes italiens de son temps, il est imprégné d’une culture très idéaliste lorsqu’il découvre le marxisme. Tout en dépassant ses premières conceptions, il a développé une pensée subtile sur l’ordre politique et les moyens de le subvertir, en intégrant l’importance des conditions socio-économiques, mais en accordant toujours un rôle crucial aux idées et à la culture.
    La culture et l’organisation, clés de l’émancipation

    Certes, « Gramsci n’a jamais écrit ni pensé qu’il suffisait de gagner la bataille des idées pour gagner la bataille politique ». Pour autant, les deux auteurs repèrent chez lui une réflexion constante « sur les mots (idées ou images) qui permettent de mettre en mouvement une volonté collective et sur l’articulation entre pensée et action, entre interprétation et transformation du monde ».

    L’émancipation des groupes subalternes est le moteur de Gramsci, au sens où « possibilité [devrait être] donnée à tous de réaliser intégralement sa propre personnalité ». La chose est cependant impossible dans une société capitaliste, sans parler des autres dominations qui se combinent à l’exploitation du prolétariat ouvrier et paysan.

    Pour changer cet état de fait, la prise du pouvoir est nécessaire. Elle requiert des tâches d’organisation auxquelles Gramsci consacrera une bonne partie de sa vie, mais présuppose aussi un minimum de conscience, par les subalternes eux-mêmes, de leur condition, des tâches à accomplir pour la dépasser et de l’idéal de société à poursuivre. C’est pourquoi Gramsci insiste régulièrement dans son œuvre sur l’importance de s’approprier la culture classique existante, afin de la dépasser dans un but révolutionnaire.

    Citant un texte de 1917, Descendre et Zancarini pointent que selon Gramsci, « l’ignorance est le privilège de la bourgeoisie. […] Inversement, l’éducation et la culture sont un devoir pour les prolétaires, car la “civilisation socialiste”, qui vise la fin de toutes les formes de privilèges catégoriels, exige “que tous les citoyens sachent contrôler ce que décident et font tour à tour leurs mandataires” ». Avant que ce contrôle s’exerce à l’échelle de la société, Gramsci pensait nécessaire qu’il se déploie dans le parti révolutionnaire lui-même.

    À la même époque, des auteurs comme Roberto Michels délivrent des diagnostics sans concession sur les tendances oligarchiques qui finissent par affecter les partis de masse, y compris ouvriers. Or Gramsci est attaché à la forme-parti, qu’il juge indispensable pour affronter de manière « réaliste » la domination sociale et politique de la bourgeoisie. Contre tout fatalisme, il veut donc croire en la possibilité d’une dialectique démocratique, propre à éviter les « phénomènes d’idolâtrie, […] qui font rentrer par la fenêtre l’autoritarisme que nous avons chassé par la porte ».
    Un opposant au « tournant sectaire » de Staline

    Certes, Gramsci a été le dirigeant d’un parti de l’Internationale communiste dans lequel on ne plaisantait pas avec la discipline une fois l’orientation tranchée. Mais son attachement à la libre discussion n’était pas feint, et lui-même n’a pas hésité à interpeller de manière critique le parti frère russe, dans une missive d’octobre 1926 fort mal reçue par les intéressés, à l’époque où la majorité dirigée par Staline attendait un alignement sans discussion.

    L’épisode peut se lire comme un prélude à son rejet du « tournant sectaire » imprimé par Staline au mouvement communiste en 1928 – rejet qui l’a placé en porte-à-faux avec ses propres camarades, qui eux s’y sont ralliés. Gramsci était alors incarcéré, et doutait que tout soit fait, à l’extérieur, pour faciliter sa libération. Le constat de son « isolement », affirment Descendre et Zancarini, a en tout cas été « un élément déclencheur de sa réflexion » dans les Cahiers de prison.

    Les deux auteurs restituent bien les conditions compliquées dans lesquelles Gramsci a travaillé, en devant lutter contre la maladie, négocier l’accès aux lectures multiples qui le nourrissaient, et déjouer la surveillance de ses écrits. La ligne qu’il développait était originale, en ce qu’elle s’opposait tout autant au stalinisme qu’au trotskisme, sans se replier sur un réformisme social-démocrate. Mais « cette opposition de l’intérieur [ne devait] surtout pas être comprise ni récupérée par les autorités fascistes. D’où le caractère partiellement crypté – et donc ardu – de l’écriture de Gramsci. »

    Appuyés sur une nouvelle édition en cours des Cahiers de prison, Descendre et Zancarini décryptent comment le penseur sarde a élaboré un réseau de notions telles que « l’hégémonie politique », « la révolution passive », ou encore la « guerre de position » distinguée de la « guerre de mouvement ».

    En raison de la puissance de sa réflexion, ces notions peuvent encore nous aider à penser notre situation politique. Mais les deux spécialistes préviennent : « Le travail théorique de Gramsci ne produit jamais de catégories abstraites, encore moins un système à visée universelle : toute son élaboration critique et conceptuelle […] est en prise sur la réalité internationale autant qu’italienne. »

    Un exemple permet de bien le comprendre. Fin 1930, Gramsci défend auprès des autres détenus communistes une proposition hétérodoxe. Face au régime de Mussolini, estime-t-il, le PCI devrait travailler avec les autres forces antifascistes derrière le mot d’ordre de Constituante républicaine. Puisque « l’inutilité de la Couronne est désormais comprise par tous les travailleurs, même par les paysans les plus arriérés de Basilicate ou de Sardaigne », il s’agit d’un point de départ intéressant pour politiser des masses, avant d’aller plus loin.

    Au-delà du cas italien, il ne croit pas que la crise du capitalisme fournisse les conditions suffisantes à une offensive du prolétariat, du moins à court terme. Le refus du déterminisme économique est renforcé par le constat, préalable aux Cahiers de prison, des différences qui existent entre les pays d’Europe de l’Ouest et la Russie de 1917. Dans les premiers, la société civile et la société politique apparaissent beaucoup plus denses, et les élites dirigeantes sont mieux parvenues à reproduire le consentement des populations.

    C’est ce qui convainc Gramsci que la priorité est à la « guerre de position », c’est-à-dire une période longue d’apprentissages, d’accumulation de force, et d’élaboration d’une « contre-hégémonie ». Il ne croit certes pas à une transition pacifique vers le socialisme. Mais même après la dimension « militaire » de la prise du pouvoir, il estime qu’il restera beaucoup à faire pour qu’émerge un État nouveau, permettant à la société de s’autogouverner. Une « perspective anti-autoritaire et anti-bureaucratique » en contradiction avec l’évolution de l’État soviétique, que Gramsci cible en mettant en garde contre « le fanatisme aveugle et unilatéral de “parti” » et les risques d’une « statolâtrie » prolongée.

    Dans leur conclusion, Descendre et Zancarini rappellent que Gramsci s’était lui-même défini, dans une phrase terrible, comme « un combattant qui n’a pas eu de chance dans la lutte immédiate ». Si ses efforts n’ont toujours pas suffi à ce que triomphe une hégémonie des subalternes, ils lui auront néanmoins assuré une postérité impressionnante dans le champ de la pensée critique, bien au-delà de l’Italie et même de l’Occident.

    Pour les deux auteurs, Gramsci appartient à une génération « broyée dans les affrontements de cette époque, entre fascisme et communisme et au sein même du communisme ». Il se distingue cependant par « la force de [sa] résistance morale et intellectuelle ».

    C’est ce que traduit, à sa façon, le texte théâtral d’Ascanio Celestini par lequel nous avons commencé, et qui se poursuit ainsi : « Je suis en train de parler de Gramsci, le type qui fonda le Parti communiste italien et qui fit un seul discours au Parlement vu qu’ensuite les fascistes l’arrêtèrent et le jetèrent en prison où il passa dix années pendant lesquelles il transforma la pensée socialiste. Il sortit de prison cinq jours avant de mourir et pourtant, près d’un siècle plus tard, il nous rappelle que nous devons nous opposer au pessimisme de la raison en ayant recours à l’optimisme de la volonté. »

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/101223/gramsci-defenseur-des-subalternes-dans-un-monde-grand-et-terrible
    #Antonio_Gramsci #marxisme #culture #émancipation #organisation #exploitation #capitalisme #dominations #privilèges #civilisation_socialiste #éducation #ignorance #dialectique_démocratique #autoritarisme #idolâtrie #tournant_sectaire #Staline #hégémonie_politique #révolution_passive #guerre_de_position #guerre_de_mouvement #contre-hégémonie #socialisme #statolâtrie

    • L’Oeuvre-vie d’Antonio Gramsci

      Antonio Gramsci (1891-1937) reste l’un des penseurs majeurs du marxisme, et l’un des plus convoqués. L’Œuvre-vie aborde les différentes phases de son action et de sa pensée – des années de formation à Turin jusqu’à sa mort à Rome, en passant par ses activités de militant communiste et ses années d’incarcération – en restituant leurs liens avec les grands événements de son temps : la révolution russe, les prises de position de l’Internationale communiste, la montée au pouvoir du fascisme en Italie, la situation européenne et mondiale de l’entre-deux-guerres. Grâce aux apports de la recherche italienne la plus actuelle, cette démarche historique s’ancre dans une lecture précise des textes – pour partie inédits en France –, qui permet de saisir le sens profond de ses écrits et toute l’originalité de son approche.
      Analysant en détail la correspondance, les articles militants, puis les Cahiers de prison du révolutionnaire, cette biographie intellectuelle rend ainsi compte du processus d’élaboration de sa réflexion politique et philosophique, en soulignant les leitmotive et en restituant « le rythme de la pensée en développement ».
      Au fil de l’écriture des Cahiers, Gramsci comprend que la « philosophie de la praxis » a besoin d’outils conceptuels nouveaux, et les invente : « hégémonie », « guerre de position », « révolution passive », « subalternes », etc. Autant de concepts qui demeurent utiles pour penser notre propre « monde grand et terrible ».

      https://www.editionsladecouverte.fr/l_oeuvre_vie_d_antonio_gramsci-9782348044809
      #livre

  • Notre billet le plus lu en 2023 et rédigé par Marc van der Wal, Ingénieur R&D à l’Afnic, porte sur les résultats de l’étude sur l’usage de SPF, DKIM et DMARC au sein de la zone .fr.

    Saviez-vous que moins de 10 % des domaines .fr exploitent pleinement le DNS pour assurer l’authenticité de leurs e-mails ?

    Lisez son analyse complète sur https://www.afnic.fr/observatoire-ressources/papier-expert/spf-dkim-et-dmarc-ou-en-sommes-nous-sur-le-fr

    #Afnic #Sécurité #emails #DMARC #DKIM #SPF