#Eric_Roset, photographe, réalise un livre sur les roms. Nous passons la nuit avec lui. Premier arrêt derrière un bâtiment public. Une dizaine de roms dorment là, tapis de mousse sur le gravier, ou plutôt : essaient. 21h, à peine le temps d’échanger quelques mots arrivent deux gendarmes -lampes torches sur les visages- qui intiment l’ordre à tout le groupe de dégager "Dégagez". Et pour aller où ? -N’importe où mais pas là. « Dégagez » c’est un mot que les roms connaissent très, très bien. Toujours bouger, pour aller.. nulle part. Alors dix, quinze, vingt fois par jours, si ce n’est plus, ils « dégagent », obéissent à l’illégalité de ces éloignements forcés. La police use à répétition de la contrainte pour obliger les personnes précaires à se déplacer sans cesse. Parmi les personnes précaires, elle en cible arbitrairement certains. La police a ses têtes de turc et les roms ont le profil. ils s’exécutent respectueusement, se déplacent, évitent le conflit. Ils racontent que certains policiers leur demandent d’aller à un endroit, d’où sont chassés d’autres roms au même moment pour aller là où ils se trouvent. Les groupes se croisent et se retrouvent en quelque sorte encerclé par deux polices qui leur demandent d’aller là où les autres doivent en dégager. Kafkaïen. Inutilité de mettre des personnes en mouvement, sans rien proposer d’autre qu’un harcèlement répétitif. Mobilisation des forces de police à vide qui seraient bien mieux utilisées à faire, par exemple, respecter le code de la route, verbaliser ceux qui le transgressent, mettent leur vie ou celles d’autres en danger ; des forces de police qui seraient par exemple plus utiles en protégeant les citoyen-ne-s contre les nuisances sonores, la criminalité. Notre police, dans cette situation, est payée pour faire la chasse aux pauvres. Et l’argent du contribuable sert là à activer un déplacement sans fin, sans résultats. Cette situation en devient presque risible tellement elle est absurde. Combien de policiers engagés en plus cette année ? 19, rien qu’en ville, et combien au canton ? Cela fait cher la chasse aux pauvres. Et si on investissait plutôt dans le social, la santé, l’éducation maintenant, d’une manière plus durable ?