• BnF : après plus d’un mois de grève, la #mobilisation ne faiblit pas

      Réorganisation du travail, missions supplémentaires, manque d’effectifs… En grève depuis le 4 mai, les salariés de la Bibliothèque nationale de France ne décolèrent pas et le bras de fer avec la direction est engagé. Décryptage.

      À trois mois de la réouverture de la somptueuse bibliothèque Richelieu, la Bibliothèque nationale de France (BnF) se heurte au mécontentement de ses employés, en grève depuis le 4 mai. Plus d’un mois plus tard, les grévistes répondent toujours présents. L’intersyndicale CGT-FSU-SUD appelle encore à la mobilisation ces mercredi 15 et jeudi 16 juin pour dénoncer une réorganisation du travail orchestrée par la direction de l’établissement et un sous-effectif. D’ores et déjà, le préavis de grève court jusqu’au 30 juin. Retour sur une mobilisation exceptionnelle en quatre questions.
      Pourquoi les salariés sont-ils en grève ?

      À cause du nouveau système de communication des documents aux usagers, goutte d’eau qui a fait déborder le vase déjà plein des agents de la bibliothèque François-Mitterrand. Concrètement, qu’est-ce que cela change ? Auparavant, les visiteurs de la bibliothèque pouvaient commander des documents toute la journée pour les consulter sur place. Depuis la crise sanitaire, cette communication directe des documents se fait seulement l’après-midi, de 13h30 à 17 heures. De plus, la réservation à l’avance doit se faire au minimum la veille, avant 20 heures. « Cela signifie qu’un lecteur ne peut pas demander le matin pour l’après-midi même. C’est absurde », estime Lucie, magasinière. Pour justifier ce nouveau fonctionnement, la direction s’appuie sur des chiffres : 44 % de communications en moins depuis dix ans. « Les usagers du matin ont considérablement baissé », avance-t-elle encore.

      Que cela change-t-il aux conditions de travail des employés ? Du fait de la concentration d’activité l’après-midi, les agents se disent surchargés, à l’image de Guillaume, catalogueur. « Les vagues de demandes arrivent toutes à 13 heures. Par conséquent, nous avons une charge de travail regroupée sur un moment de la journée, au détriment de l’accueil des usagers. » Des habitués de la bibliothèque qui soutiennent les grévistes, notamment à travers l’Association des lecteurs et usagers de la BnF (ALUBnF) et une pétition en ligne qui a récolté près de seize mille signatures. Si certains employés, comme Lucie, déplorent l’indifférence de la direction face au mécontentement manifeste des usagers, Kevin Riffault, directeur général de la BnF, dément : « Nous ne sous-estimons pas l’impact du nouveau dispositif sur les pratiques de recherche, mais il est limité. Et nous réfléchissons bien sûr à des améliorations. »
      Pour quelles raisons les grévistes réclament-ils des recrutements ?

      De nombreux chantiers occupent actuellement les agents de la BnF. Au premier chef desquels la préparation du nouveau centre de conservation nationale de la presse à Amiens et l’élargissement du dépôt légal aux œuvres numériques. Pour Gaël Mesnage, secrétaire général de la CGT-BnF, « c’est toujours la même logique de faire plus avec moins ». Car, selon les chiffres officiels, deux cent cinquante postes ont été supprimés entre 2009 et 2016. Depuis, les effectifs seraient « stables », assure la direction, qui ne cache pas son besoin de redéployer les employés chargés de la communication des documents aux lecteurs pour les poster sur ces nouvelles missions. « Les heures gagnées grâce au nouveau dispositif de communication permettront d’y répondre », soutient Kevin Riffault.

      « Si la direction n’avait pas décidé de supprimer 25 % des effectifs qui s’occupent de la communication aux lecteurs, on n’en serait pas à une telle réduction du service au public », affirme Gaël Mesnage. Au lieu de renouveler des contrats d’agents contractuels de catégorie C, l’établissement privilégierait des contrats à durée déterminée destinés aux étudiants. Une aberration pour Jean-François Besançon, délégué FSU à la BnF, qui redoute une précarisation de ces postes : « Comme réponse à notre désaccord, on nous dit que nous avons un devoir envers les étudiants qui ont souffert pendant la crise sanitaire, alors qu’il s’agit d’emplois précaires. »
      En quoi la réouverture du site Richelieu pose-t-elle problème ?

      Après plus de dix ans de travaux, la bibliothèque Richelieu, site historique de la BnF, rouvrira ses portes au public le 17 septembre prochain. Une réouverture qui n’enchante guère les employés en grève. Elle va même jusqu’à cristalliser leurs inquiétudes d’un affaiblissement des effectifs qui viendrait encore dégrader leurs conditions de travail. Gaël Mesnage, de CGT-BnF, dénonce la suppression de quarante postes à la bibliothèque François-Mitterrand pour les « transférer » vers Richelieu. La direction parle, quant à elle, d’environ cinquante emplois, venus de plusieurs sites de la BnF (il y en a sept en tout), dont le redéploiement « a déjà été opéré et intégré il y a un an, dès l’été 2021 ». « Cela doit se faire par redéploiement car le ministère de la Culture ne veut pas de recrutement », explique-t-elle encore.
      Où en sont les discussions avec la direction et le ministère de la Culture ?

      Au point mort, à en croire les grévistes. Voilà plus d’un mois que la grève est reconduite toutes les deux semaines, et les rapports sont plus que jamais tendus entre les salariés et leur hiérarchie, qualifiée de « macroniste et technophile » par certains. Le contrôle policier d’agents de la BnF lors de la mobilisation au site Richelieu du 2 juin est venu remettre de l’huile sur le feu. « La police nous a informés que nous allions être reçus par le ministère de la Culture. Puis, cette même police nous a empêchés de nous y rendre », raconte, indigné, Jean-François Besançon. Finalement reçue au ministère le 8 juin, l’intersyndicale ne dissimule pas son mécontentement : « Zéro avancée. Ils nous ont convoqués pour écouter. C’est incroyable d’avoir aussi peu de réponse », entend-on côté CGT.

      Du côté de la direction, on se dit encore ouvert aux négociations. « Des renforts sont prévus dans certains départements. Par ailleurs, le dispositif n’est pas figé et nous réfléchissons à de nouvelles évolutions de fonctionnement et de moyens », annonce le directeur général Kevin Riffault. La direction est actuellement en discussion avec ses « tutelles », les ministères de la Culture et du Budget, pour améliorer les moyens de l’institution. Une mention de Bercy qui ne devrait guère rassurer les grévistes dans leurs velléités de recrutement…

      https://www.telerama.fr/debats-reportages/bnf-apres-plus-d-un-mois-de-greve-la-mobilisation-ne-faiblit-pas-7010915.ph

    • « Madame la Présidente de la Bibliothèque nationale de France, votre #réforme est un #échec »

      Un collectif rassemblant plus de 350 acteurs du monde universitaire et culturel dénonce dans une tribune au « Monde » les mesures mises en place à la BNF, qui conduisent à une sévère réduction du temps pendant lequel la consultation des ouvrages est possible.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/06/20/madame-la-presidente-de-la-bibliotheque-nationale-de-france-votre-reforme-es

    • « Jour du dépassement universitaire » : « A partir de mercredi, tous les enseignements seront faits en dehors du service officiel des titulaires »

      Anne Roger, secrétaire générale du syndicat Snesup-FSU, dénonce un recours excessif aux vacataires et contractuels à l’université, faute de professeurs en nombre suffisant. Elle appelle à une grève jeudi.

      Ce mercredi marque, selon le syndicat Snesup-FSU, le « jour du dépassement universitaire », date symbolique à partir de laquelle les cours de l’année 2021-2022 cesseraient si l’on se contentait des heures statutaires des enseignants-chercheurs. Elle représente avant tout une manière, pour la secrétaire générale du syndicat, Anne Roger, de mettre en avant le sous-financement de l’université et le recours excessif aux heures supplémentaires, vacataires et contractuels.

      C’est quoi le « jour du dépassement pour l’année universitaire » ?

      C’est le jour à partir duquel les titulaires ont fait toutes les heures officielles qu’ils devaient faire pour l’année scolaire 2021-2022, dans l’hypothèse où les cours de ce premier semestre auraient tous été dispensés par eux. Concrètement, à partir d’aujourd’hui, tous les enseignements qu’il reste à couvrir seront faits en dehors de notre service officiel. Soit sur nos heures supplémentaires ou par le recrutement de contractuels ou de vacataires.

      Comment ce chiffre a-t-il évolué par rapport aux années précédentes ?

      Nous n’avons pas d’élément de comparaison car dans les bilans sociaux des années précédentes, il n’y avait pas les données suffisantes pour pouvoir établir un jour du dépassement. En revanche, il va être intéressant de voir dans les années à venir comment ça évolue, et surtout d’essayer de le comparer composante par composante, car toutes ne sont pas sur un pied d’égalité. En Staps [Sciences et techniques des activités physiques et sportives, ndlr] par exemple, qui est une filière particulièrement sous-dotée, dans de nombreuses universités ce jour du dépassement est beaucoup plus tôt. Au Staps de Bobigny, l’un des plus sous tension, ce jour est tombé le 1er décembre. Pour Marne-la-Vallée, c’était le 11 décembre, Rouen le 13…

      Ça montre que la question du sous-encadrement n’est pas un faux problème. Comment peut-on imaginer que les deux tiers des cours d’une année soient faits par des gens qui ne sont pas titulaires ? Comment peut-on continuer à faire de la recherche dans le même temps si on doit déjà multiplier les heures supplémentaires ? Ce n’est pas possible, c’est ingérable… Ça donne envie de dire « stop, on arrête ».

      Quelles conséquences cela entraîne-t-il, tant pour les professeurs que pour les étudiants ?

      Avant d’avoir des conséquences, cela met surtout en évidence le manque de financement de l’enseignement supérieur. Ça veut dire qu’on a, en gros, à l’échelle de la France entière, la moitié des moyens pour pouvoir tenir toute l’année avec des enseignants qui sont titulaires, en poste et stables. Nous sommes vraiment face à un sous-financement chronique de l’enseignement car on doit s’appuyer sur des personnels précaires pour pouvoir tenir l’année.

      Qu’est-ce que cela a comme incidence ? Eh bien cela crée une surcharge énorme sur les personnels. Sur les titulaires, parce qu’ils doivent accepter de faire des heures supplémentaires. Sur les contractuels, qui ont tous les ans leur contrat remis en cause. Et enfin sur les vacataires, à qui on donne des conditions de travail compliquées tout les sous-payant.

      Qui sont les personnes qui viennent compléter les professeurs pour donner des cours ?

      Cela peut être des doctorants en cours de thèse qui ont besoin de financer leurs études, des attachés temporaires d’enseignement et de recherche qui sont souvent des étudiants. On trouve aussi des enseignants qui viennent d’ailleurs : par exemple, en Staps, on a beaucoup de profs d’EPS qui viennent chez nous faire des vacations. Et il y a aussi de plus en plus de contractuels qui sont des doctorants sans poste de maître de conférences car aucun poste n’est créé, à qui ont fait signer des contrats leur demandant le double d’heures d’enseignement tout en continuant aussi à faire de la recherche, ce qui est impossible. Finalement, on a tout un tas de personnes que l’on met dans des situations précaires, que l’on paye au lance-pierre et qui viennent prêter main-forte aux enseignants qui font déjà des heures supplémentaires.

      Vous appelez donc à une grève jeudi. Quelles sont vos revendications ?

      Nous misons sur trois mots d’ordre. L’emploi tout d’abord, car le jour du dépassement n’est qu’une preuve de plus de notre besoin de postes, et nous voulons des postes titulaires, pas des vacataires ou contractuels car cela crée trop de tensions et de difficultés, avec des situations précaires. Ensuite, nous souhaitons une amélioration des conditions de travail, en lien avec ce qu’on a évoqué précédemment. On constate une énorme surcharge de travail, une dégradation des collectifs de travail : quand on fait trop d’heures on ne peut plus se parler et échanger sur les cours, ce qui entraîne une baisse de qualité des formations. Et le troisième point, c’est une hausse des salaires puisque, comme tous les fonctionnaires, nous avons un indice gelé depuis une grosse dizaine d’années, ce qui nous a fait perdre beaucoup en termes de pouvoir d’achat.

      https://www.liberation.fr/societe/education/jour-du-depassement-universitaire-a-partir-de-mercredi-tous-les-enseignements-seront-faits-en-dehors-du-service-officiel-des-titulaires-20220126_NBAXJWJOTBA35BGBODH2XRNO6Q/?redirected=1

    • Enseignants-chercheurs : « Moins il y a de moyens, plus le climat se dégrade, plus la sélection sociale est poussée »

      Un collectif de professeurs et chercheurs, titulaires ou vacataires, parmi lesquels Philippe Corcuff, Eva Debray, Caroline Déjoie, Ivan Sainsaulieu, tire, dans une tribune au « Monde », le signal d’alarme sur le niveau de précarité atteint actuellement dans l’université. Ils se demandent si l’amour de la recherche est devenu payant.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/03/31/enseignants-chercheurs-moins-il-y-a-de-moyens-plus-le-climat-se-degrade-plus

  • Après sa déroute électorale, Blanquer bénéficie de la création express d’un poste à l’université Assas | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/210622/apres-sa-deroute-electorale-blanquer-beneficie-de-la-creation-express-d-un

    Sors-le par la porte il revient par la fenêtre !

    L’enseignement supérieur ne manque visiblement pas toujours de moyens. L’université Paris 2 (Panthéon-Assas) a exceptionnellement décidé d’ouvrir un poste sur mesure au sein de son département de droit public pour accueillir l’ancien ministre Jean-Michel Blanquer, tout juste défait aux élections législatives, selon des informations de Mediapart.

    La possibilité de créer ce poste ad hoc, à l’heure où les universités affrontent depuis des années une lourde pénurie de personnels, s’est concrétisée vendredi 17 juin, cinq jours après le premier tour des élections. Elle doit être finalisée prochainement, à l’occasion d’une réunion du département de droit public.

    Première incongruité : elle a été annoncée par le président de l’université Stéphane Braconnier lui-même, et non par le directeur du département. Deuxième source de questionnement : le calendrier de l’annonce, intervenue quelques jours seulement après l’élimination, le dimanche 12 juin, de Jean-Michel Blanquer au 1er tour dans la 4e circonscription du Loiret et alors qu’aucun poste n’avait été envisagé jusque-là. Troisième interrogation : les raisons de ce recrutement express.

  • Big changes to staffing patterns at UK universities over past two decades

    The global explosion in university enrolment rates and the size of institutions has transformed their staffing patterns and organisational structure. New research from the Policy Institute at King’s College London provides the first in-depth study of 21st century changes in the UK university sector, and underlines the scale and impact of these changes.

    Funded by the Nuffield Foundation, the report is authored by Professor the Baroness Alison Wolf, a member of the Augar Review of Post-18 Education & Funding, and Dr Andrew Jenkins.

    Observers of contemporary higher education frequently complain of growing ‘managerialism’ and growth in insecure, short-term teaching contracts. Using the UK’s unique workforce database, and case-studies of six contrasting institutions, the researchers examined whether and why such changes had occurred. The report confirms major changes in both administrative and academic employment, alongside extensive centralisation and the decline of the autonomous academic department.

    Since the turn of the century, numbers of senior managerial and administrative posts have risen very markedly. Staff classified as ‘managers and non-academic professionals’ at UK universities increased some 60% over 12 years, from just under 32,000 in the academic year 2005/06 to almost 51,000 in 2017/18. At the same time, the number of technicians and of secretarial posts, supporting academics, declined. Managers and managerial professionals made up a fifth of all non-academic staff in 2005/06, but this had risen to more than a quarter by 2017/18. More and more decisions about staffing are taken at the centre of the institution, with a commensurate hollowing-out of the traditional academic department.

    Within universities, ongoing growth in non-academic appointments is justified by both the need to compete and market degrees globally, and by the importance of the ‘student experience’ as measured by government surveys such as the National Student Survey. However, the authors conclude that the structure of senior leadership teams means that there are few barriers to ‘upward drift’ in pay and seniority – “in sharp contrast to the situation with academic posts, where scrutiny was extensive”.

    Among academics, teaching-only posts at UK universities increased at five times the rate of ‘traditional’ academic roles between 2005/06 and 2018/19. Numbers rose by more than 80 per cent, compared with a rise of 16% over the same period in more traditional roles with both teaching and research responsibilities. Growth was most marked in the Russell Group and the faster a university grew, the more it increased its use of teaching-only staff.

    However, the move to casualised and part-time teaching staff has been fairly limited compared to ‘competitor’ university systems, such as those in the US or Australia. The report ascribes this to the government’s Research Excellence Framework, which determines direct funding allocations but also a university’s international reputation. The higher its research reputation, the higher the fees it can charge to overseas students. UK universities therefore have a strong interest in hiring ‘research-active’ academics, but use teaching-only staff to cover vacancies, including those created by academics who are ‘bought out’ for research, and to smooth staffing when student numbers change.

    Baroness Alison Wolf CBE, Professor of Public Sector Management at King’s College London, said:

    “It is striking how far expensive changes seem to have occurred without being underpinned by a clear strategy. Increased centralisation is also a concern. Large centralised bureaucracies are not good at innovation, which is the lifeblood of universities.”

    https://www.nuffieldfoundation.org/news/big-changes-to-staffing-patterns-at-uk-universities-over-past-tw

    Pour télécharger le rapport:
    https://www.nuffieldfoundation.org/wp-content/uploads/2021/12/Managers-and-academics-in-a-centralising-sector.pdf

    #rapport #UK #Angleterre #université #facs #ESR #management #centralisation #précarisation #autonomie #enseignement #enseignement_supérieur #teaching-only_staff #Research_Excellence_Framework #excellence #réputation #recherche

    ping @_kg_

  • Communiqué unitaire et des personnels de l’#université_d'angers contre les #attaques d’#extrême_droite (22.03.2022)

    Cher‧es collègues,

    Depuis quelques semaines, les actes racistes, antisémites et fascistes se développent au sein même de notre #Université, du fait notamment d’étudiant‧es organisé‧es dans des #groupuscules d’extrême droite. Des #croix_gammées ont été taguées dans des toilettes, des autocollants racistes sont collés sur plusieurs de nos campus, un #collage géant « L’immigration tue » revendiqué par le mouvement nationaliste et identitaire #RED (#Rassemblement_des_étudiants_de_droite) est apparu dans la nuit de jeudi à vendredi sur le campus de #Belle_Beille, et ce jeudi 17 mars plusieurs étudiants de cette mouvance ont distribué un #tract infamant, raciste, sexiste et LGBTphobe à #Saint-Serge. Certains de ces actes touchent directement des enseignant‧es : des cours ont été interrompus par des remarques de soutien aux candidats d’extrêmes-droites, des enseignant‧es sont pris‧es à partie sur les #réseaux_sociaux par des étudiant‧es dévoilant leur nom et contenus de cours, et des médias d’extrême-droite attaquent nommément des collègues et leurs recherches liés aux #études_de_genre et à l’#intersectionnalité. Le contexte national d’élection présidentielle et d’exacerbation des discours racistes et violents y est pour beaucoup. Les discours de Blanquer et Vidal contre un soi-disant « islamo-gauchisme » des personnels de l’#ESR aussi. Le contexte local du déroulement du Mois du genre est également à prendre en compte : l’extrême-droite ne supporte pas que nos recherches documentent les inégalités et les dominations.

    Nous avons une pensée particulière pour toutes celles et tous ceux qui sont directement visés par ces attaques. Tous et toutes ensemble devons être vigilant‧es : nous ne laisserons aucun de ces autocollants, tags ou tracts avoir droit de cité au sein de notre université. Nous les effacerons systématiquement. Les discours racistes, sexistes, homophobes ne sont pas des opinions, ce sont des #délits. Les responsables de ces actes s’exposent donc à des #poursuites_judiciaires.

    Le service public de l’enseignement supérieur et de la recherche doit être le lieu où toutes et tous peuvent trouver leur place sans avoir peur d’une agression qu’elle soit verbale ou physique. Notre université doit permettre à tous et toutes, quelles que soient ses appartenances de genre ou ses origines ethniques, d’étudier, travailler, faire de la recherche. Notre communauté universitaire doit être un rempart contre les projets politiques nauséabonds, réactionnaires et fascistes.

    Nous invitons toutes celles et tous ceux qui le souhaitent à participer aux activités du Mois du genre tout le long du mois de mars et de la Semaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, qui commence lundi 21 mars à l’UA.

    Communiqué signé Snesup-FSU, Snasub-FSU, Sud Education 49, ainsi que des personnels de l’Université d’Angers engagés contre l’extrême-droite.
    (reçu via une mailing-list)

    #racisme #antisémitisme #fascisme #France #sexisme #homophobie #étudiants #Angers #facs

  • Russia cancels the teaching of sociology, cultural studies and political science in all pedagogical universities of the country

    https://twitter.com/IrisovaOlga/status/1507252961122078756

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    « При В.В. Путине мне ни разу не приходилось прятаться по подвалам »

    Во всех педагогических вузах отменяют преподавание социальных наук и мировой культуры. Будущим учителям россиян все это незачем

    Минпросвещения решило повысить качество образования в России, престиж профессии учителя, для чего педвузы страны унифицируют, как армейский строй: в них внедряют единые стандарты подготовки педагогов, избавляя их от гуманитарных «излишеств». О планах такой «модернизации» — во исполнение поручения президента — министр Сергей Кравцов говорил еще летом прошлого года, упомянув рабочее название программы — «Учитель будущего поколения России». Сейчас чем больше ее очертания проясняются, тем более туманным кажется это будущее: планку человека разумного в грядущей России решено существенно занизить. Мир усложняется, но у нас «особый путь». Пожалуй, по Стругацким: «Дурак стал нормой, еще немного — и станет идеалом».

    И причины тому есть объективно, и объяснения найдутся. Для жизни в осажденной крепости, для добычи нефти, для перекачки ее в Китай гуманитарные дисциплины не просто не нужны — они вредны: мысли мешают. И потом, деградация не для всех и не всегда плохо — примитивные конструкции прочней.

    Но какие бы объяснения ни находились, надо представлять, что нас ждет.

    Последствия реформы комментирует Нина Лобанова, кандидат философских наук, доцент кафедры философии, социологии и религиоведения Красноярского государственного педагогического университета им. В.П. Астафьева:

    — «Социальная их малограмотность кажется еще ниже литературной. Историю литературы они не знают, классиков читают мало, действительность изучается ими по газетам». Эти слова А.М. Горький написал в 1928 году о начинающих писателях. Пройдет совсем немного времени, и то же самое можно будет сказать о наших школьных учителях — и то было бы отлично, если б они газеты хоть читали. И это — спустя почти сто лет после того гигантского образовательного рывка, что совершил весь мир, и СССР в том числе.

    Что дает основания для столь оптимистического прогноза? Очередные новации Минпросвещения: одним из наиболее впечатляющих является отмена преподавания социологии, культурологии и политологии во всех педагогических вузах страны.

    Педагогические университеты переходят на новые учебные программы, в основу которых положено «Ядро высшего педагогического образования». Вместо отдельных дисциплин там будут модули. В рамках социально-гуманитарного модуля сохраняется преподавание философии, истории, экономики и права. А преподавание социологии, культурологии, МХК (мировой художественной культуры) и политологии — исключено. Полностью.
    Парадокс! В социально-гуманитарном модуле отсутствуют ключевые социальные и гуманитарные науки!

    У кого-то, быть может, промелькнет мысль, что эти перемены в учебном плане носят частный характер и никоим образом на общее качество подготовки педагогов не влияют.

    Однако это не так. Чтобы убедиться в этом, достаточно вспомнить о том, откуда рекрутируются абитуриенты педвузов.

    Педвузы не входят в число лучших университетов страны (исключением являются МПГУ и РГПУ им. Герцена). Это значит, что набор на педагогические специальности происходит по остаточному принципу: педвузы, как правило, выбирают те, кто не смог поступить в федеральные, опорные или национально-исследовательские университеты. Соответственно, студенты педвузов отличаются от тех, кто учится в высокоселективных университетах, изначально более низким уровнем знаний и грамотности.

    Будущие учителя нередко открывают для себя «Троицу» Андрея Рублева и Венеру Милосскую только на семинарах по МХК. Воспоминания о первом (в своей жизни!) посещении театра или музея для многих связаны не с родителями, а с преподавателем культурологии, который организовал для них посещение «Ночи в музее».

    С перестройкой учебного плана они лишаются этой возможности. По сути, введение концепции «Ядра высшего педагогического образования» можно рассматривать как попытку провести культурную «черту оседлости» для педагогов (обозначить их культурный «потолок»). Результатом этого станет увеличивающийся разрыв в качестве и объеме культурного капитала студентов педагогических вузов и студентов, получивших классическое образование (что, в свою очередь, не сможет не сказаться на качестве предметной подготовки будущих педагогов).

    Дело, однако, не только в знаниях (то есть в сведениях, в информации) — дело в способностях, особого рода мыслительных умениях и навыках, которые позволяют развивать дисциплины социогуманитарного цикла.

    Как развивать социологическое воображение без помощи данных дисциплин?

    Хочу предупредить возможные недоразумения: сегодня социологическое воображение — это не роскошь, а «предмет первой необходимости». Для иллюстрации этой мысли приведу отрывок из недавней студенческой работы: «При В.В. Путине мне ни разу не приходилось прятаться по подвалам, у меня всю мою жизнь над головой мирное небо». Даже не говорю о том, как выглядит радость выхода из подземелий в реалиях современного мира. В поле зрения автора этого сочинения не попадает тот факт, что в это же самое время, когда были написаны эти строки, проходит … [«спецоперация»].

    Отсутствие социологического воображения — это прискорбный, но закономерный результат функционирования всей нашей системы образования (начиная со школы и заканчивая аспирантурой). Но сейчас у этого ребенка хотя бы есть шанс расширить горизонты своего восприятия. Знакомство с социологией, культурологией и политологией дает ему возможность увидеть мир таким, какой он есть, представить, насколько разноплановым и многогранным он может быть.

    С переходом на учебные планы, основанные на концепции «Ядра высшего педобразования», из всех перспектив останется только одна, в которой мир будет представлен таким, каким он должен быть с точки зрения государственной политики.

    В статье 43. п. 1 Конституции РФ сказано: «Каждый имеет право на образование». Следовало бы добавить: «На качественное».

    С последним у педвузов значительные проблемы. Учитывая это, напрашивается вывод о том, что обучение педагогов должно быть компенсирующим. Учебные планы должны быть выстроены таким образом, чтобы подтягивать общекультурный и языковой уровень обучающихся (что предполагает не исключение базовых социогуманитарных дисциплин из учебного цикла, а выделение дополнительных часов на их преподавание, а также включение в обязательную часть учебного плана такой науки, как культурная/социальная антропология, — вещь совершенно необходимая для ориентации в современном, сложном, глобальном, мультикультурном мире).

    Вместо этого концепция «Ядра высшего педобразования» и разработанный на ее основе подход, лишая студентов педагогических вузов возможности овладеть хотя бы тем культурным минимумом, на который имеют право рассчитывать студенты других университетов, будут только усиливать культурную депривацию будущих педагогов.

    Если решение об исключении социологии, культурологии, политологии из преподавания в педвузах не будет отменено,
    педагоги, которые придут в школу, по уровню своей социальной и культурной компетентности мало чем будут отличаться от своих учеников.

    Коллеги, преподаватели других педвузов сегодня молчат или их голосов не слышно; кажется, нет никого, кто мог бы дать адекватный анализ этому «Ядру высшего педобразования». Слышны только голоса официальных чиновников, в очень обтекаемой форме рассуждающих о необходимости этого шага и не говорящих ни слова о том, какие реальные изменения и образовательные потери этот шаг за собой повлечет. Нам говорят, что протестовать бесполезно: решение принято на уровне министерства. Видимо, там считают, что быть социально грамотными и культурно просвещенными будущим педагогам нет надобности: хватит с них и тех знаний, которые им дают для подготовки к ЕГЭ по обществознанию.

    Если это решение не будет отменено, слова Ярослава Кузьминова о том, что «мы выпускаем социальных дебилов», с полным основанием можно будет отнести не только к выпускникам школ, но и к тем, кого готовят педагогические университеты России. И это точно будет не вина выпускников.

    https://novayagazeta.ru/articles/2022/03/23/pri-v-v-putine-mne-ni-razu-ne-prikhodilos-priatatsia-po-podvalam

    #Russie #recherche #enseignement #ESR #université #facs #sociologie #sciences_politiques #fermeture

    ping @_kg_

    • Il professore di geografia che ha detto no al Cremlino

      Era un insegnante di geografia, a Mosca. Ma nel parlare della guerra in Ucraina ai suoi ragazzi non ha seguito le linee guida dettate dal Cremlino. E’ stato licenziato ed ha lasciato il paese. La storia di #Kamran_Manafly

      Kamran Manafly è un insegnante ventottenne di Mosca. O meglio, lo era fino a quando poco tempo fa ha perso il lavoro dopo essersi rifiutato di sottostare alle linee guida statali su come parlare dell’ «operazione speciale militare russa in Ucraina» con i suoi studenti. L’istituto scolastico l’ha licenziato per «comportamento immorale», e un addetto alla sicurezza l’ha in seguito aggedito fisicamente quando ha tentato di recuperare gli effetti personali dal suo ufficio. Dopo pochi giorni il preside lo ha minacciato di farlo processare per «tradimento della patria». Meduza ha parlato con Manafly sia del licenziamento che della conseguente decisione di abbandonare la Russia. Quanto segue è la sua storia, raccontata in prima persona.

      Ho ventotto anni e insegno geografia da sette. Ho trascorso gli ultimi due anni presso la scuola numero 498 nel distretto Tagansky di Mosca. Si tratta di una scuola superiore come tante.

      Mi sono laureato all’Università Statale Tver. Sono entrato nel dipartimento di geografia perché c’era la possibilità di svolgere un tirocinio all’estero. Quando si è uno studenti del primo o del secondo anno, c’è la possibilità di viaggiare in Europa, e si tratta di una cosa abbastanza insolita, specialmente per l’Università Statale di Tver.

      Durante il primo anno del master, ho lavorato con i bambini per la prima volta alle Olimpiadi Internazionali di Geografia. È stato tutto molto interessante. In seguito, ho seguito una formazione pedagogica aggiuntiva e poi sono andato a lavorare in una scuola.

      La conoscenza di base che i bambini russi ottengono a scuola penso che sia molto buona. Molti dei libri di testo di geografia e studi sociali sono di alta qualità. In molte scuole si respirava una certa libertà. Dopotutto, nessuno sa cosa accade in classe una volta che la lezione inizia. Ovviamente, ogni insegnante può sviluppare il pensiero critico degli studenti e insegnare a modo suo.

      Alcuni anni fa, come altri insegnanti, ho lavorato ai seggi elettorali. Il mio lavoro consisteva nel mostrare alla gente dove andare a votare. Altri hanno invece lavorato direttamente con le schede elettorali. I colleghi di altre scuole mi hanno detto che i conti non tornavano, e di come hanno chiuso i seggi elettorali e fatto uscire tutti i presenti per poi riscrivere tutto. In una riunione prima delle elezioni, il nostro principale ci ha anche detto: «Votate per Russia Unita!», ma non ci hanno fatto fotografare le schede elettorali come hanno invece fatto in altre scuole.

      Dopo il 24 febbraio [quando la Russia ha lanciato un’invasione su larga scala dell’Ucraina] tutto è diventato molto più rigido. Non riconoscevo nemmeno più dai loro comportamenti chi gestiva la scuola. Ci hanno inviato delle linee guida sull’"operazione speciale", come la chiamano, sulle origini del conflitto, e così via. Avremmo dovuto raccontare e mostrare tutto questo ai bambini. Naturalmente, mi sono rifiutato. [Non ci sono stati problemi in un primo momento], come ho già detto, dal momento che non controllavano cosa effettivamente veniva fatto in classe.

      Ma pochi giorni dopo l’inizio della guerra, [i funzionari a capo della scuola] hanno riunito tutti gli insegnanti e ci hanno detto che non era permesso manifestare le nostre opinioni, dal momento che siamo «dipendenti dello stato». Questa frase mi ha davvero colpito. Non credo che i lavoratori statali dovrebbero essere servi dello stato. Ci hanno detto che dovremmo parlare ai bambini solo secondo queste linee guida, e che Dio vieta che chiunque esprima un’opinione personale. E questo pure mi ha colpito. Per legge, le scuole dovrebbero essere un terreno neutrale, mentre qui ci stanno costringendo a fare propaganda.

      Come ogni persona rispettabile con una coscienza o senso di compassione ed empatia, io stesso sono contro la guerra. Questo è ciò che insegniamo ai nostri figli, dopotutto. Valorizzare la vita umana sopra ogni altra cosa. È la missione della scuola essere propulsione di pace.

      Fin dall’inizio [della guerra], i bambini mi correvano incontro nei corridoi facendomi domande. Volevano sapere cosa stava accadendo e quali erano questi due nuovi paesi [le auto-proclamate repubbliche popolari di Donetsk e Luhansk, che ora la Russia riconosce]. Accadevano questo tipo di cose. In un modo o nell’altro, la guerra saltava fuori durante le lezioni, e penso che sia proprio per questo che ci hanno mandato tutte quelle linee guida. Ho cercato di rimanere neutrale e spiegare la situazione senza schierarmi politicamente. Ho detto che molte cose stavano andando male, ma ho detto ai bambini di trarne le conclusioni da soli. I giovani di oggi sono stupendi; sono molto più amanti della pace rispetto alle generazioni più anziane. Non capiscono affatto perché qualcuno dovrebbe andare laggiù e uccidere altre persone.

      L’8 marzo ho postato una foto su Instagram, dove ho scritto che dobbiamo vivere in modo da non essere tormentati dalle nostre coscienze. Ho delle mie opinioni personali, che non coincidono con quelle dello stato. Non mi sono addentrato in alcuna questione politica specifica, e non ho mai usato la parola «guerra». In seguito la preside della scuola, Tamara Gordzeiko, mi ha convocato e mi ha detto di cancellare il post. Come sempre, si trattava di un ordine, non una richiesta. Quando ho rifiutato, ha detto che mi avrebbe licenziato.

      Il giorno dopo, sono andato a scuola per salutare i ragazzi e raccogliere i miei effetti personali. Su ordine della preside, c’erano dei sorveglianti all’ingresso che si sono rifiutati di farmi entrare. I ragazzi mi hanno visto proprio in quel momento, hanno letto il mio post su Instagram e hanno capito tutto.

      I funzionari della scuola hanno chiamato la polizia, che infine mi ha scortato all’interno per recuperare le mie cose. Ero già un emarginato: tutti i dipendenti della scuola distoglievano lo sguardo e non mi salutavano nemmeno, per essere sicuri di non dare l’impressione di conoscermi, Dio non voglia!

      Nel pomeriggio ho avuto bisogno di tornare nell’edificio. Mentre stavo camminando lungo uno dei corridoi, una delle guardie private della mattina mi ha aggredito. Ha urlato oscenità contro di me e poi ha iniziato a picchiarmi. Sono riuscito a tirare fuori il telefono e accendere la videocamera. Quando se ne è accorto, si è calmato un po’. Ma ho presentato comunque una denuncia alla polizia.

      Questo è successo intorno alle quattro. I bambini avevano già lasciato la scuola, ma c’erano ancora molti insegnanti presenti che hanno visto cosa stava accadendo. Si sono immediatamente spostati nei loro uffici per evitare di aiutare o intervenire. Questo è quello che mi ha depresso di più. Nessuno ha detto una parola. O hanno paura o sostengono questa linea. Su 150 persone che lavorano nella scuola, solo una persona - una giovane donna che è anche lei un’insegnante – mi ha contattato per confortarmi.

      Il giorno dopo, la preside mi ha detto che non avrebbe permesso che mi dimettessi, dicendo che mi avrebbe invece licenziato per aver organizzato una manifestazione che includeva dei minori. Con questo si riferiva al fatto che [dopo essere stato informato circa il mio licenziamento] mi sono permesso di scattare alcune foto fuori dalla scuola insieme ai miei ex studenti. Alla fine, mi hanno licenziato per «comportamento immorale».

      In seguito, ho contattato «Uchitel», il sindacato indipendente degli insegnanti, e abbiamo iniziato a mettere insieme i documenti per contestare il mio licenziamento in tribunale. Ma poi è successo qualcosa di veramente spiacevole, e ho deciso di abbandonare il paese: la preside della scuola, Tamara Gordzeiko, ha riunito tutti gli insegnanti per parlare di me. All’incontro [gli amministratori della scuola] hanno mostrato alcune fotografie personali che avevo pubblicato su Instagram dagli Stati Uniti e da un viaggio alla Corte Europea dei Diritti Umani, e hanno condiviso queste foto in gruppi chat gestiti dai genitori degli studenti, costringendo i bambini a cancellare i commenti di supporto sotto il mio post e minacciando di segnalarli al dipartimento di delinquenza minorile della polizia.

      Hanno raccontato a tutti le più banali, ridicole storie dell’orrore riguardo al fatto che io sarei un agente del Dipartimento di stato statunitense, su come l’Occidente mi finanzi e su come avrei degli affari collegati con l’Occidente. Poi il preside ha detto che avrebbe fatto tutto ciò che era in suo potere per farmi sbattere in prigione per 15 anni, perché sono un «traditore della madrepatria» e persone come me dovrebbero stare dietro le sbarre. Lei è una deputata di Russia Unita al consiglio comunale locale, quindi le sue parole mi hanno innervosito. E dopo che la mia storia ha iniziato a circolare, avrebbero potuto incastrarmi per qualsiasi cosa.

      Non ho ancora deciso quale sarà la mia prossima destinazione. In questo momento sono in una fase transitoria, ma molto probabilmente opterò per un paese occidentale. Spero tanto che sarò in grado di insegnare in un altro paese, ma in questo momento voglio solo andare in un posto sicuro e trovare un po’ di pace. Dopo una buona notte di riposo, inizierò a pensare a cosa fare. Idealmente, mi piacerebbe continuare a lavorare e crescere.

      Penso che la situazione dell’istruzione in Russia non farà che peggiorare. Appena quattro anni fa il preside precedente mi aveva concesso un viaggio pagato attraverso l’Europa e l’America per frequentare vari progetti pedagogici. Ora è diventato tutto inutile. La repressione è peggio che mai, il sistema educativo è sempre più soggiogato ad un regime totalitario. C’è più controllo sui bambini, più controllo su ciò che imparano e su ciò che leggono. Hanno introdotto lezioni in classe in tema di social network, spiegando quali è possibile utilizzare e quali non si dovrebbe. Il sistema scolastico sta cercando di dettare le regole della vita ai ragazzi.

      Sono in contatto con insegnanti di altre scuole, e un collega mi ha detto che loro sono costretti a indossare i nastri di San Giorgio a forma di lettera Z. Ovviamente, ci sono insegnanti che resistono, ma iniziano immediatamente a subire pressioni. Se in passato agli insegnanti era permesso di avere le proprie opinioni, ora non è più così.

      https://www.balcanicaucaso.org/aree/Russia/Il-professore-di-geografia-che-ha-detto-no-al-Cremlino-217060

      #géographie

  • "Réponse surréaliste de @VidalFrederique qui nous prend pour des imbéciles manifestement"
    Simon Grivet dixit sur twitter (https://twitter.com/SimonGrivet/status/1483444320027951117)


    https://twitter.com/LCP/status/1483442388374859779

    Vidal défend le Président en demandant de « chercher dans le discours du Président à quel moment il évoque l’augmentation des #droits_d'inscription »...

    Le discours de #Macron largement commenté sur seenthis ici :
    https://seenthis.net/messages/944115
    #Emmanuel_Macron

    –-

    Vidal dit aussi (en réponse à je ne sais pas qui) :
    « Vous réclamez plus de #logements, vous auriez pu le faire. Nous l’avons fait et nous avons rénové 100% des logements des #CROUS »

    –-> il va y avoir probablement des réponses en image ici :


    https://twitter.com/Academia_carnet/status/1483672311823802370

    #ESR #MESRI #Vidal #Frédérique_Vidal #mensonge #facs #université #frais_d'inscription #droits_d'inscription #discours #même_pas_honte #née_avant_la_honte

  • #Emmanuel_Macron, 13.01.2022

    « Au-delà des questions des moyens, nous avons une question structurelle et on ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont considérés comme boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale. »

    https://twitter.com/caissesdegreve/status/1481963876451340290

    Quand est-ce qu’on l’arrête celui-là ?

    #macronisme #ESR #université #discours #facs #France #destruction #précarité_étudiante #financement #enseignement_supérieur #budget #compétition #compétition_internationale #néo-libéralisme #privatisation #Macron

    La casse de l’université continue...

    Voici ce que j’écrivais en 2020, lors des luttes contre la fameuse LPR :

    Si je lutte ici et maintenant c’est parce que je suis fermement convaincue que si on gagne en France la victoire contre une université néolibérale, on peut faire tache d’huile bien au-delà des frontières nationales. Et si, en France, on ne cède pas au chant des sirènes du néolibéralisme universitaire, je suis aussi fermement convaincue que le supposé « retard » décrié par certain·es aujourd’hui se transformera en avance. Car la grogne grandit aussi dans les autres pays européens, qui se battent pour ce qu’en France, nous sommes en train de perdre, mais nous n’avons heureusement pas encore complètement perdu

    http://www.riurba.review/2020/03/comprendre-le-neoliberalisme-universitaire-francais-a-partir-de-la-suisse

    • La privatisation de l’écoles et de l’université représente une montagne de fric, à côté de laquelle la privation de la Française Des Jeux et des autoroutes sont des cacahuètes apéritives.

      Restera la montagne d’or amassée par les caisses de retraite complémentaires, ce sera pour la quinquennat suivant.

    • Emmanuel Macron expose une #réforme « systémique » de l’université

      Le chef de l’État a estimé que le système actuel d’#études_supérieures était « révolu » et que les universités devaient s’ancrer dans une dimension plus « professionnalisante ».

      À trois mois de la présidentielle, Emmanuel Macron a souhaité jeudi 13 janvier une réforme « systémique » des universités, qu’il veut plus « professionnalisantes », tout en jugeant intenable un système d’études supérieures « sans aucun #prix » pour les étudiants mais avec un #taux_d'échec massif. « Je le reconnais sans ambages, nous avons commencé à colmater les brèches, mais nous devons redoubler d’effort pour que, à l’horizon de dix ans, notre université soit plus forte », a-t-il déclaré, en clôturant en visioconférence le Congrès de la Conférence des présidents d’universités.

      Le chef de l’État a d’abord remis en cause le double système #grandes_écoles - universités. « Nous avons trop longtemps accepté un modèle à plusieurs vitesses, où les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de la formation des #élites et l’université de la #démocratisation de l’enseignement supérieur et la gestion des #masses. Ce système est révolu », a-t-il lancé. « Demain ce seront nos universités qui doivent être les piliers de l’#excellence ».

      « Garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi »

      Emmanuel Macron a aussi dénoncé l’« intolérable #gâchis » de l’#échec en première année, où « seuls 50% des étudiants se présentent aux examens », malgré l’injection de nouveaux moyens et la création de 84.000 places. Selon lui, il ne s’agit donc pas d’une question de #moyens. « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont considérés comme boursiers et où pourtant nous avons tant de précarité étudiante, et une difficulté à financer un modèle beaucoup plus financé par l’argent public que partout dans le monde », a-t-il argué.

      « Je dis les choses avec la clarté et la franchise que vous me connaissez » car « si nous ne réglons pas ces problèmes structurels, nous nous mentirions à nous-mêmes », a-t-il poursuivi. Et d’enchaîner : « Nous avons besoin d’une #transformation_systémique de nos universités ». Celles-ci doivent, selon lui, avoir d’avantage d’#autonomie mais l’État devra passer avec elles « de véritables #contrats_d'objectifs_et_de_moyens ». Notamment « les universités ne doivent plus seulement garantir l’accueil des étudiants dans une formation mais garantir l’orientation des jeunes vers l’#emploi ».

      « L’université doit devenir plus efficacement professionnalisante », a encore souhaité le chef de l’État : « la logique de l’#offre doit prendre le pas sur la logique de la #demande », ou encore, « l’orientation doit évoluer pour mieux correspondre aux besoins de la #nation ». « Quand on ouvre des filières sans #perspective derrière, nous conduisons un #investissement_à_perte », a-t-il dit, après avoir rappelé les nouveaux moyens - 25 milliards d’euros sur 5 ans - de la loi de programmation de la recherche, « un rattrapage » à ses yeux. Manuel Tunon de Lara, président de la Conférence des présidents d’universités, rebaptisée France Universités, a lui réclamé une plus grande autonomie des établissements mais aussi un financement de l’enseignement supérieur « à la hauteur de nos ambitions ».

      https://www.lefigaro.fr/demain/education/emmanuel-macron-expose-une-reforme-systemique-de-l-universite-20220113

      #professionnalisation

    • Le discours a été tenu devant le congrès de la CPU désormais appelée @FranceUniv

      qui représente « un nouvel élan, qui rappelle le rôle de partenaire essentiel des pouvoir publics / force de proposition et de transformation pour l’ESR » d’après M. Macron.

      https://www.youtube.com/watch?v=SwsAPNPyFU4&t=32750s

      –-

      Analyse de Julien Gossa sur twitter :

      Le discours commence par des banalités : « concurrence pour les talents », « décloisonner pour favoriser les synergies », « Shanghai / Saclay »...

      Mais surtout « conjurer notre histoire » avec « le vent de face en raison de la démographie ».
      C’est important pour la suite.

      Le discours se centre sur « repenser totalement le lien entre Lycée et Université » et « la séparation entre les études supérieures et le monde du travail ».
      Il fustige une « aristocratie égalitariste » avec la dichotomie Grandes Ecoles (« exellence ») et Université (« masse »).

      #debunk Il s’agit d’un classique diviser pour regner/l’herbe est plus verte ailleurs.
      Cette opposition (stérile ?) GE/Univ est systématiquement instrumentalisée pour réformer, mais seulement les universités.

      « ce n’est pas qu’une question de moyens » (?)

      D’après M. Macron « ce système est révolu » car « il ne correspond pas à la compétition internationale et crée des segmentations inefficaces ». C’est « le sens de l’Histoire ».

      Il faut donc « une nouvelle politique d’investissement ».

      #Point 1 : l’« intolérable gâchis » en Licence

      « Nous avons injecté 1 Md€ en plus dans le premier cycle / créé 84000 places / et 28000 oui-si... formidable ! et pourtant seulement 50% des étudiants se présentent aux examens de premières année »

      #debunk "Des efforts n’ont pas conduit à des résultats, donc il faut réformer plus en profondeur" est discutable.

      Par exemple, il y a en réalité une hausse des taux de réussite, que le discours doit ignorer volontairement pour atteindre son objectif.

      https://etudiant.lefigaro.fr/article/a-l-universite-un-taux-de-reussite-des-licences-en-pleine-croissan

      De plus, ces résultats ne sont pas évaluables en période de pandémie, parce que tout le système est perturbé, et que tirer des conclusions de mesures qui ont trois ans n’est pas intègre.
      https://www.franceculture.fr/societe/covid-19-la-detresse-croissante-des-etudiants

      Enfin, l’effort est en réalité factice, puisque la dépense par étudiant baisse, essentiellement à l’Université.

      Tout au contraire, si on en croit les indicateurs, l’Université a donc plutôt obtenu des résultats, sans moyen, et dans un contexte difficile.

      https://www.alternatives-economiques.fr/rentree-coutera-t-plus-cher-cette-annee/00100263

      #Discussion L’échec en Licence lui-même est peut-être un problème factice, instrumentalisé pour atteindre des objectifs pratiquement sans rapport, mais qui a le mérite de faire écho à un soucis très concret qu’on rencontre sur le terrain.

      #Point 2 : le financement public et la gratuité des études universitaires.

      Cela conduirait a un enseignement qui n’a « aucun prix » à cause d’« un modèle beaucoup plus financé par l’argent public que partout dans le monde »

      #Debunk Au delà du marqueur idéologique « ce qui n’a pas de prix n’a aucune valeur », l’affirmation sur le financement public de l’ESR en France est tout simplement fausse : nous sommes dans la moyenne, et en dessous des pays que nous admirons.

      https://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/FR/T165/la_depense_pour_l_enseignement_superieur_dans_les_pays_de_l_ocde

      Plus intéressant encore, si on prend le cas extrême de la Grande Bretagne (GB).

      D’abord l’évidence : moins de financement public, c’est plus de financement privé, donc plus d’endettement des familles.

      E. Macron propose donc de vous endetter plus.

      https://commonslibrary.parliament.uk/research-briefings/sn01079

      Ensuite, le financement "privé" est en réalité sur des prêts garantis par l’État, et qui sont en grande partie (52%) non remboursé, donc payés par le public.

      Ça a couté 12Md€ d’argent public l’an dernier (~50% du budget du MESRI).

      https://www.dailymail.co.uk/news/article-9753557/Almost-10-billion-paid-student-loans-2020-written-off.html

      Et enfin, ça n’a apporté aucun financement supplémentaire aux universités.

      La proposition est donc d’endetter les ménages, même si ça coute encore plus au contribuable, sans rien rapporter aux universités.

      Seuls gagnants : les usuriers.

      #Point 3 : la formation réduite à une forme d’insertion professionnelle

      « les universités [doivent] garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi » avec « de véritables contrats d’objectifs et de moyens ».

      En clair : l’emploi conditionne le financement des formations.

      « la logique de l’offre doit prendre le pas sur la logique de la demande » « l’orientation doit évoluer pour mieux correspondre aux besoins de la nation »

      En clair : ce n’est plus ni aux familles ni aux universitaires de décider de l’orientation et des formations, mais à l’Etat.

      D’après E. Macron,ces « besoins de la nation » sont seulement économiques, et tout le reste est un « investissement à perte ».

      C’est du bon sens, mais seulement avec une conception de la formation limitée à l’insertion professionnelle.

      #debunk Si on colle les trois points, on a une forme de logique :
      1. Les jeunes échouent en Licence
      2. Car ils se moquent d’études qui ne coutent rien
      3. Et qui de toutes façons ne mènent à aucun emploi.

      Faire payer les familles apparait alors comme une solution, non pas pour augmenter les financements (ils n’augmenteront pas, au contraire), mais seulement pour augmenter l’implication des familles, et restructurer « l’offre et la demande » de la formation.

      La réussite par l’augmentation de l’implication des familles repose sur la croyance « ce qui n’a pas de prix n’a aucune valeur ».

      Quand on regarde les indicateurs, c’est plutôt une question de moyens.


      https://twitter.com/anouchka/status/1481928533308022785

      La restructuration de « l’offre et la demande » imagine une vertu : si les études impliquent un endettement personnel, alors le choix d’orientation sera vers les formations qui permettent de rembourser, donc là où il y a des emplois.
      Et sinon c’est à la charge des familles.

      Julien Gossa
      @JulienGossa
      ·
      17h
      Les formations qui conduisent aux emplois bien payés peuvent augmenter leurs frais d’inscription, donc leur qualité. Les autres ferment ou de toutes façons ne coutent plus rien.

      Le marché comme solution à l’orientation et la formation, donc à la stratification sociale.

      C’est la vision qui a bien fonctionné au XXe siècle. Malheureusement, elle ne fonctionne plus. Tout simplement parce que « démographie » et « besoins [économiques] de la nation » sont désynchronisés.

      Il n’y a pas d’emplois non pourvus en France, il y a du chômage.

      Les emplois qui recrutent ne concernent pas les filières universitaires.

      Les formations universitaires montrent un léger chômage, qui indiquent qu’elles remplissent parfaitement leur rôle de fournisseur de main d’œuvre qualifiée.

      https://statistiques.pole-emploi.org/bmo/bmo?graph=1&in=1&le=0&tu=10&pp=2021&ss=1

      On revient à cette évidence, que le discours de M. Macron semble ignorer : diplômer quelqu’un ne crée pas un emploi.

      En terme d’emplois, la politique proposée est donc vouée à l’échec. Pire, elle enferme dans une sorte d’immobilisme économique.


      https://twitter.com/Taigasangare/status/1481897423437979649

      En toute logique, la politique proposée consiste donc non pas à augmenter le nombre de diplômés, puisque ça ne ferait que baisser le taux d’insertion professionnelle.

      Elle consiste forcément à baisser le nombre d’étudiants, seul moyen d’éviter un « investissement à perte ».

      Et ça nous mène à la question principale qui se pose pour l’avenir, même si on n’ose jamais l’affronter :

      Quel est le rôle des études supérieures ?

      Si c’est seulement économique, sans progrès futurs, alors Macron a raison : il faut endetter et réduire le nombre d’étudiants.

      Mais si c’est plus large que ça, que les études supérieures permettent de former des citoyens qui vont devoir gérer des crises graves... Alors il vaut mieux des chômeurs bien formés que des chômeurs mal formés.

      Et le projet proposé est très dangereux.

      Il est d’autant plus dangereux que la loi ORE a déjà posé des bases très solides pour sa réalisation :

      l’Etat contrôle désormais les places dans toutes les formations publiques. La réduction du nombre d’étudiants est donc techniquement possible.

      #Parcoursup est à la fois une sorte de concours national pour accéder aux places, et en plus une market-place pour les formations, incluant déjà des informations sur les "débouchés" et un module de paiement des frais.

      Toute la technique a été préparée pour ce projet politique.

      Reste que le projet politique de M. Macron, tout idéalisé et idéologisé qu’il soit, se confronte à une question toute simple : Que fait-on des jeunes surnuméraires par rapport aux besoin de l’emploi, si on ne les forme plus ?

      Ce fameux « vent de face de la démographie ».

      Julien Gossa
      @JulienGossa
      ·
      16h
      Pour conclure, le discours de M. Macron est bien rodé, puisqu’il a plus de 50 ans... Mais il est objectivement anachronique.

      Il faudrait un peu de courage, et attaquer vraiment la seule vraie question : Quel est le rôle des études supérieures au XXIe siècle ?

      Rappel qu’il y a une cohérence entre baisser le nombre d’étudiants et réduire le nombre de lycéens qui font des mathématiques.

      Si on n’a pas le courage d’aller jusqu’au bout, on aura donc autant d’étudiants, juste moins bien préparés à nos études.


      https://twitter.com/OlivierMusy/status/1481960693784092673

      NB : Si M. Macron souhaitait vraiment mettre en œuvre ce programme, il lui suffirait de donner une autonomie réelle aux universités, dont l’intérêt est effectivement de réduire le nombre d’étudiants et de les faire payer.

      Sauf que c’est impossible :
      https://blog.educpros.fr/julien-gossa/2021/10/17/selection-impossible-autonomie-fantome

      Ici le verbatim, qui termine sur cette blague « Et que fait-on ce soir, Cortex ? »
      https://t.co/9HYisOq789

      Et bien sûr la plus pathétiques des hypothèses : tout ce projet n’a en réalité aucun sens, complètement dépourvu de vision et d’ambition autre que séduire les présidents d’université dans une perspective tristement électoraliste.

      https://twitter.com/JulienGossa/status/1481996134042193925

    • Présidentielle 2022 : le programme d’Emmanuel Macron devant la CPU “#France_Universités

      Emmanuel Macron a prononcé un discours pour la clôture du 50e anniversaire de la Conférence des présidents d’université1. La vidéo et le verbatim sont disponibles ici2. Ce discours dresse le bilan de la politique du quinquennat en matière d’enseignement supérieur et de recherche, mais trace aussi un cap pour une nouvelle réforme — peut-être pour un nouveau mandat ?

      Le candidat-président Macron fixe dans tous les cas un certain nombre d’objectifs et de lignes directrices qu’il n’est pas inintéressant d’analyser.

      Cet article est tiré d’un fil Twitter (https://twitter.com/CathKikuchi/status/1481942125147312138) écrit à chaud et doit être complété avec d’autres analyses qui ont émergé à la suite de ce discours3. On citera en particulier :
      - Ce fil extrêmement complet de Julien Gossa : https://twitter.com/UnivOuverte/status/1481759141618139138
      - Cette réflexion de Marianne Blanchard sur la volonté de plus « professionnaliser l’université » : https://twitter.com/UnivOuverte/status/1481759141618139138
      - En complément, la reprise d’une intervention de l’économiste Elise Huillery au colloque de la Conférence des présidents d’université sur les ressources allouées à l’université française, un fil d’Ana Lutzky : https://twitter.com/anouchka/status/1481924369597308930

      Il est globalement beaucoup question de la politique universitaire, mais un article entier pourrait également être consacré à ce qu’Emmanuel Macron dit de la vie étudiante. Nous laissons ce point à analyser à d’autres.
      « Éclairer le monde tel qu’il va » ou l’abrutir

      « Faire pleinement de la France une avant-garde de la recherche de l’excellence du savoir » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Le discours commence bien sûr par brosser les présidents d’université dans le sens du poil. Beaucoup ont commenté la petite phrase des universités qui doivent « éclairer le monde ». Ce passage s’inscrit dans tout un segment sur l’importance de l’autorité académique, de la reconnaissance des pairs et du cadre scientifique : « Ne laissons personne le remettre en question ». Evidemment, ce n’est pas nous que le contredirons. Mais cette déclaration prend une saveur particulière, alors que Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation, cherche au contraire à dire aux universitaires ce qu’ils doivent chercher et comment en faisant l’ouverture d’un pseudo-colloque ((NDLR : Le président-candidat Macron évoque également la commission Bronner qui vient de rendre son “rapport” Des Lumières à l’ère du numérique.Il en retient la “nécessité d’empêcher la mise en avant ou le financement d’acteurs qui nuisent à l’information, à la cohésion sociale et in fine à la démocratie” — qui résone avec sa menace envers les “universitaires qui cassent la République en deux“.)). ou encore lorsqu’il prétend pouvoir dire quels universitaires constituent un « virus » de la pensée et donc, en creux, ceux qui pourraient en être le « vaccin ».

      « Tous ensemble, nous avons réussi à faire de notre jeunesse une priorité claire avec ces premiers résultats et également à faire de notre jeunesse et de nos étudiants une priorité. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Mais bien sûr, il s’agit d’abord de défendre un bilan. Emmanuel Macron se gargarise de milliers de places nouvelles ouvertes dans diverses filières pour accommoder la vague démographique. C’est bien rapide : ouvrir des places sans construction de bâtiment, sans recrutement de personnel, ne revient-il pas à faire du surbooking ? Changer un chiffre sur un tableur Excel, ne permet pas dans les faits d’accueillir correctement des milliers d’étudiants et d’étudiantes supplémentaires.

      Mais rassurons-nous : la loi de programmation a représenté un engagement financier sans précédent. Sauf que non : l’augmentation du budget de l’ESR stagne et sa légère augmentation, plus faible que par le passé, correspond à l’inflation. Un tour de passe-passe dénoncé par les politiques notamment au Sénat. L’effort budgétaire est principalement reporté sur la prochaine mandature :bel effort personnel pour le président Macron.

      « Justes hiérarchies » ? Parcoursup, reproduction sociale et démocratie

      Parmi les bons points qu’Emmanuel Macron se donne, le satisfecit sur Parcoursup est aussi d’un ridicule achevé. « Un système d’orientation avec des taux de satisfaction et de réponse incomparables, plus lisibles », alors que tous les acteurs du système, des élèves aux enseignants du secondaire, en passant bien sûr par les enseignants du supérieur disent le contraire. Mais peu importe : il s’agit de l’un des grands chantiers du quinquennat, il doit être un succès.

      « Des sociétés démocratiques comme la nôtre qui ont la passion de l’égalité que nous partageons toutes et tous doivent néanmoins défendre à nouveau les justes hiérarchies qu’il doit y avoir dans nos sociétés sans lesquelles tout se dissout » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Macron se lance ensuite dans un grand discours visant à intégrer les universités à la formation de l’élite, dans une optique implicite de démocratisation. Il cite les Idex en exemple. Sauf qu’en termes de démocratisation, les Idex contribuent plutôt à une reproduction de l’élite plutôt qu’à son renouvellement, comme l’on montré les travaux d’Audrey Harroche et ceux de Hugo Harari-Kermadec.

      Cette volonté de s’inscrire dans le cadre de grands établissements va de pair avec une volonté de professionnalisation accrue.colloque

      L.’université « doit devenir plus efficacement professionnalisante car on ne peut pas se satisfaire de l’échec de nos étudiants dans les premiers cycles ni du taux de chômage trop élevé des jeunes qui sortent de certaines filières universitaires. Pour vous y aider, nous devons poursuivre le travail d’amélioration de l’orientation qu’a initié Parcoursup ». (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Cet affichage ne peut être balayé d’un revers de main. Evidemment, aucun enseignant digne de ce nom ne peut vouloir que les universités forment des chômeurs. Mais cela passe sous silence que les universités sont déjà professionnalisantes : elles forment des professionnel·les de la recherche et de l’enseignement supérieur et des enseignant·es. Hors Master, , elles forment en licence en lien avec le monde du travail, y compris bien sûr celui hors de l’université et de l’enseignement : c’est vraiment n’avoir jamais regardé l’offre de formation universitaire ni les maquettes de premier cycle que de penser le contraire. S’il y a sûrement des améliorations à effectuer, il serait tout à fait faux de prétendre que les universitaires ne se préoccupent pas du devenir professionnel de leurs étudiant·es.

      « Les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de l’excellence et de la formation des élites, et les universités de la démocratisation de l’enseignement supérieur et de la gestion des masses. Ce système est révolu. Il est révolu d’abord parce qu’il ne correspond pas à la compétition internationale, parce que sa forme-même crée des barrières, des segmentations qui sont inefficaces. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Cependant, on peut être conscient des nécessités de professionnalisation à l’université tout en considérant que celle-ci a aussi un rôle intellectuel et émancipateur de transmission de savoir et de méthode scientifique. Mais cela, Macron n’en parle jamais pour l’enseignement. Enseigner à l’université est réduit à la formation en lien à des besoins identifiés de la nation. Et si les besoins de la nation, c’était aussi d’avoir des diplômés insérés dans le marché du travail ET capables de réfléchir par eux-mêmes ? Ce serait fou…

      De même la question de l’échec en première année de licence et de l’orientation est un vrai sujet. Mais ne serait-ce pas aussi parce que Parcoursup a accentué ce phénomène ? De nombreuses étudiantes et étudiants, à vue de nez encore plus nombreux qu’auparavant, s’inscrivent dans des formations sans réelle volonté de s’y investir. Alors quelle solution ? Emmanuel Macron évoque le développement de filières courtes et professionnalisantes, ce qui peut être une partie de la réponse. Mais est-ce que l’augmentation de leur capacité d’accueil va à nouveau se faire sans moyen supplémentaire ? Permettons-nous au moins de nous poser la question…

      « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Malgré tous ces points ambigus, voire volontairement mensongers, le plus inquiétant de ce discours réside dans l’une de ses dernières parties. Cela a été déjà relevé : Emmanuel Macron dénonce un système où l’université n’a « aucun prix pour la grande majorité des étudiants », où on a un tiers de boursiers et où on a « un modèle beaucoup plus financé par l’argent public qu’ailleurs dans le monde ». D’abord, ce dernier point est tout bonnement faux : la France n’investit proportionnellement pas plus d’argent public dans l’université que, par exemple, l’Allemagne, la Norvège, le Danemark ou la Belgique, même si elle en investit d’avantage que les Etats-Unis ou le Royaume-Uni. Elle se situe dans une moyenne légèrement supérieure à celle de l’OCDE.

      Ensuite, le changement systémique auquel il appelle revient bien à faire payer les étudiant·espour leur faire financer leurs propres études. Y compris via un endettement étudiant peut-être ? C’est en tout cas ce que de proches conseillers d’Emmanuel Macron suggéraient. Alors c’est une option bien sûr. Mais ça revient à poser franchement sur la table la nature du modèle universitaire que nous souhaitons et la manière dont l’université est encore un levier d’ascension sociale, ou a minima de formation de toutes les catégories économiques et sociales. Et ce débat-là, évidemment, Macron ne le pose pas clairement.

      Les systèmes de gouvernance [des universités], « il faut bien le dire par tradition, ont eu dans beaucoup de situations pour conséquence d’impuissanter trop souvent les équipes face aux défis qui leur étaient posés. Mais cette autonomie, soyons clairs et sincères entre nous doit aussi être synonyme d’une gouvernance renforcée de nos universités dans laquelle les équipes présidentielles pourront définir et incarner pleinement leur projet. (…) Notre système est très hypocrite – autonomie à moitié, on continue de contrôler ; ceux qui réussissent, on les aide un peu plus, ceux qui ne réussissent pas, on les compense. Et puis autonomie, mais au fond, même localement, on donne des responsabilités, mais on bloque ceux qui sont élus par nous-mêmes » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      De la même manière, on a un passage éminemment confus sur un contrat que les universités devront passer avec l’État, où il est question d’augmenter l’autonomie mais aussi la responsabilité. Selon quelles modalités ? Ce point n’est pas clair, mais il est un passage qui personnellement me fait froid dans le dos. Macron dénonce un système déresponsabilisant : « Notre système est très hypocrite — autonomie à moitié, on continue de contrôler ; ceux qui réussissent, on les aide un peu plus, ceux qui ne réussissent pas, on les compense ».

      Est-ce que cela signifie que l’État se désengagera des universités qui ne répondent pas aux critères d’excellence fixés par le gouvernement ? Que celles-ci ne feront plus partie du système de service public de l’enseignement supérieur ?

      On voit bien où cela peut mener : les grandes universités comme Saclay auront toujours plus, les petites universités au bassin de recrutement local toujours moins. Et si un tel système aide à la promotion de l’enseignement supérieur, à la formation des étudiant·es partout en France, je veux bien manger mon chapeau.

      « La France continuera de jouer son rôle de résistance en défense de l’esprit de connaissance, de recherche, d’un enseignement libre et d’une recherche libre. Parce que je crois que c’est la seule manière de continuer à véritablement conquérir le monde, c’est-à-dire à inventer des possibles nouveaux dans une humanité en paix. Les autres voies, nous les connaissons. Ce sont les obscurantismes, les totalitarismes, les nationalismes appuyés sur la discorde. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      https://academia.hypotheses.org/33766

    • Thread de Marianne Blanchard, 14.01.2022
      Pourquoi ça n’a pas de sens de vouloir plus « professionnaliser l’université » => un thread

      1/ pour Macron, "l’université doit devenir plus efficacement professionnalisante ". Derrière, deux présupposés : a) c’est nécessaire de professionnaliser b) l’université ne le fait pas

      2/voyons déjà le premier. Pour ça je m’appuie (notamment) sur ça : https://sms.hypotheses.org/24385
      On a interrogés des jeunes diplômés d’écoles (commerce/ingé) et d’université, en sciences et en gestion sur les "compétences" dont ils avaient besoin dans leur emploi actuel

      3/ on a distingué les "compétences spécifiques" (en gros tout ce qui est spécialisé, propre à un secteur d’emploi) et "transversales" (en gros, ce qui est général, et mobilisable dans plein de métiers).

      4/ résultat pour les 971 enquêtes : "Le niveau de compétences spécifiques considéré comme acquis est en moyenne supérieur ou égal à celui estimé requis dans leur emploi" => qu’ils viennent de l’université ou d’école, personne ne se trouve pas assez "professionnalisé"

      5/ les individus déclarent peu de lacunes en compétences spécifiques, car ils les mobilisent qd elles sont trop spécialisées. Qd des déficits sont mentionnés, ils concernent des compétences trop « pointues » ou dépendantes du contexte d’emploi pour être enseignées

      6/ Les jeunes interrogés insistent aussi sur le fait qu’il est possible de se former et se spécialiser en cours d’emploi. + les entretiens révèlent que les compétences spécifiques acquises en formation semblent surtout valorisées dans leur dimension transversale

      7/ ce ne serait pas tant leur caractère technique qui importerait, que les capacités à acquérir d’autres compétences qu’elles suscitent.
      En gros, en apprenant (des choses, plus ou moins "spécifiques"/professionnelles), on apprend aussi à apprendre, à se former.

      8/ il faut donc sortir de la vision « adéquationniste » à la française prônant une professionnalisation et une spécialisation sans cesse accrue des formations initiales. Bcp de diplômé·es n’exercent pas le métier correspondant à leur spécialité de formation,

      9/ C’est le sens de l’ "introuvable" relation formation-emploi dont parlait déjà L. Tanguy.
      Se former, c’est aussi acquérir une culture générale, apprendre à porter un regard critique sur les choses, comprendre le monde pour pouvoir y prendre part en tant que citoyen·ne

      https://twitter.com/MJ_Blanchard/status/1481971200100376577

    • Universités : le renforcement « systémique » promis par Macron cache mal un projet de privatisation

      Le quasi-candidat Macron a souhaité jeudi une réforme « systémique » des universités. Derrière la promesse de les rendre « plus fortes » et de casser la concurrence avec les « grandes écoles », il a posé, en creux, les jalons d’un projet de privatisation.

      Dans un discours de clôture du congrès de la Conférence des présidents d’université (rebaptisée à cette occasion « France Universités »), Emmanuel Macron a fait le bilan de son quinquennat pour l’université et dessiné l’avenir qu’il imagine pour l’enseignement supérieur : une orientation universitaire dont la seule boussole serait le marché du travail, et une formation qu’il veut encore « plus efficacement professionnalisante ». Surtout, il a évoqué, sans prononcer les mots, une augmentation substantielle des frais de scolarité étudiante.

      Fier de son quinquennat, dont il a vanté la loi d’orientation et de réussite des étudiant·es, la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR), l’ouverture de places supplémentaires à l’université (sans plan d’ouvertures massives de postes d’enseignant·es-chercheurs et chercheuses ni réels moyens supplémentaires), les entrées et « bonds de géant » des universités françaises dans le classement de Shanghai (pourtant décrié), le président de la République a oublié de citer, par exemple, les déboires de Parcoursup depuis 2018, l’immolation d’un étudiant par le feu devant le Crous de La Madeleine à Lyon en 2019, l’apparition des étudiant·es en masse dans les files d’attente des distributions associatives d’aides alimentaires pendant la crise du Covid-19, et la baisse de la dépense publique par étudiant·e. Tout de même, Emmanuel Macron a reconnu qu’il faudrait « redoubler d’effort pour que, à l’horizon de dix ans, notre université soit plus forte ».

      Ainsi, ce discours face aux présidents d’université était plus celui d’un candidat que celui d’un président en exercice. Le projet dessiné ? Une augmentation des frais de scolarité, et un pas de plus vers la privatisation de l’université.
      Un raisonnement fondé sur des chiffres erronés

      Sans se prononcer explicitement pour une hausse des frais de scolarité, Emmanuel Macron l’a remise sur la table en prenant prétexte de la précarité étudiante et du pourcentage important d’étudiant·es qui abandonnent avant même les examens en première année de licence (50 % selon lui). « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale », a déclaré le chef de l’État.

      Si cette déclaration d’Emmanuel Macron n’est pas claire sur le prix que devront payer les étudiant·es pour accéder à l’université dans le système qu’il semble prôner, elle fait planer la possibilité de la création d’un accès réservé à celles et ceux qui en auront les moyens, ou qui auront accès à un prêt bancaire pour se le payer.

      Le quasi-candidat à la présidentielle semble vouloir calquer sa réforme « systémique » sur les systèmes anglo-saxons, où une bonne partie des étudiant·es s’endettent pour des années afin d’accéder aux études supérieures. Pourtant, aux États-Unis, la dette étudiante a atteint à la fin de l’année 2021 plus de 1 500 milliards de dollars, selon la FED, et représente désormais un véritable boulet pour l’économie.

      Mais cette déclaration présidentielle s’appuie sur des chiffres manifestement erronés. Il est d’abord mathématiquement impossible que « 50 % des étudiants seulement se présentent aux examens de première année », quand « le taux de passage en L2 des néo-bacheliers inscrits en L1 à la rentrée 2019 est de 53,5 % », d’après une note du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation publiée en novembre 2021 (https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/sites/default/files/2021-11/nf-sies-2021-24-15115.pdf).

      Ensuite, le financement du système de l’enseignement supérieur français n’est pas « beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde », puisque selon l’OCDE (tableau C2.2b : https://www.oecd-ilibrary.org/sites/455a2bcc-en/index.html?itemId=/content/component/455a2bcc-en), la France finançait en 2018 à 80 % son système par des fonds publics pendant que, par exemple, l’Allemagne affichait un taux de 84 %, la Suède de 87 % et la Norvège de 95 % ! La réforme « systémique » de l’université française voulue par Emmanuel Macron tient sur des raisonnements scientifiquement peu solides.
      Une orientation dirigée par le marché du travail

      Jeudi, il a également jugé indispensable de pousser les universités à proposer des formations en fonction du marché du travail : « [Elles] ne devront d’abord plus seulement garantir l’accueil des étudiants dans une formation, mais garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi. » Si cette position pouvait avoir un sens il y a plusieurs décennies, cela fait longtemps que les universités se préoccupent de l’entrée dans la vie active de leurs étudiant·es.

      Les chiffres du ministère de l’enseignement supérieur donnent un taux d’insertion à 18 mois de 89 % pour les masters et de 92 % pour les licences professionnelles. Surtout, la question de l’adéquation entre études et marché du travail est particulièrement délicate : il est impossible de connaître l’avenir de l’emploi plusieurs années après l’entrée dans les études, dans un monde en perturbations permanentes. À titre d’exemple, le sacrifice de la filière informatique à l’université (raconté ici par Mediapart : https://www.mediapart.fr/journal/france/140921/universite-la-start-nation-sacrifie-la-filiere-informatique?onglet=full), à cause d’un manque de moyens, alors même que la demande industrielle est énorme, montre combien la volonté des établissements n’est pas forcément le problème principal.

      À entendre Emmanuel Macron, en tout cas, l’université devrait « devenir plus efficacement professionnalisante ». Elle ne le serait donc pas assez. Mais la sociologue Marianne Blanchard et ses collègues montrent que, lorsqu’on interroge de jeunes titulaires d’un diplôme de niveau bac+5 de master ou d’école, ils et elles considèrent que « le niveau de compétences spécifiques considéré comme acquis est en moyenne supérieur ou égal à celui estimé requis dans leur(s) emploi(s) ». En clair, ils et elles ne se considèrent pas comme « non professionnalisé·es ». Ces chercheuses et chercheurs expliquent aussi que les jeunes diplômé·es pensent « que leur capacité à acquérir ces nouvelles compétences, et donc à s’adapter à de nouveaux environnements de travail, est une compétence en soi que leur formation a contribué à développer ».
      Une remise en cause superficielle des grandes écoles

      Enfin, dans son discours de jeudi, Emmanuel Macron a semblé vouloir remettre en cause le système « grandes écoles-universités », en lançant : « Nous avons trop longtemps accepté un modèle à plusieurs vitesses, […] où les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de l’excellence et de la formation des élites, et les universités de la démocratisation de l’enseignement supérieur et de la gestion des masses. Ce système est révolu. [...] Demain, ce sont nos universités qui doivent être les piliers de l’excellence, le centre de gravité pour la recherche comme pour la formation. » Faut-il lire, en creux, une volonté de disparition pure et simple des grandes écoles ? Dès lors, l’ambition serait-elle de chasser des universités les pauvres dont les bourses « coûtent un pognon de dingue », pour y faire venir les étudiant·es plus fortuné·es des grandes écoles ?

      https://www.mediapart.fr/journal/france/150122/universites-le-renforcement-systemique-promis-par-macron-cache-mal-un-proj

      #bilan #frais_de_scolarité #LPPR #classement_de_Shanghai #parcoursup #chiffres #statistiques #financement #taux_d'insertion #moyens

    • Discours de Macron : une réforme « systémique » de l’université pas si nouvelle et fantasque que ça…

      Le congrès du 13 janvier 2022 célébrant les 50 ans de feu la Conférence des Présidents d’Université (CPU) — dorénavant #France_Universités (sic) — aura eu son petit effet médiatique. Cependant, ce n’est pas #FU qui est au centre de l’attention depuis près d’une semaine mais le président Emmanuel Macron, qui y est intervenu en visioconférence, dans un discours verbeux et ampoulé1.

      Une phrase du chef de l’État a en effet suscité des réactions nombreuses et indignées de la part des mondes universitaire [2], étudiant [3], médiatique [4] et politique [5] (dont on peut parfois douter de la sincérité… [6]) :

      « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale. » (p. 6)

      Malgré un flou artistique sur ce que voulait vraiment dire le Président, un consensus s’est formé autour de son probable projet pour l’enseignement supérieur : l’augmentation des frais d’inscription à l’université. En séances parlementaires, la ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (#MESRI), Frédérique Vidal, a été interpelée à ce sujet. Celle-ci y a catégoriquement démenti une telle interprétation des paroles de Macron [7]. Des macronistes se sont ensuite joint·es à elle pour dénoncer cette prétendue intox sur Twitter [8]. Ce SAV du discours du Président par la ministre culmine finalement avec un entretien dans Libération absolument lunaire [9].

      Au-delà de l’interprétation du discours, et du fait que le terme « évoquer » utilisé par Vidal (plutôt que « parler explicitement », cf. tweet de LCP) ne permet en rien de lever nos suspicions, existe-t-il des indications nous permettant de penser que Macron souhaiterait effectivement augmenter les frais d’inscription, en continuité avec sa politique depuis 2017 ? N’y aurait-il pas des précédents pendant son mandat ?

      Spoiler alert : oui, et oui à nouveau.

      Un précédent ?

      Alors que les macronistes égrainent dans leurs tweets une série de mesures qui démontrerait que, sous Macron, jamais les étudiant·es n’ont été aussi protégé·es (ce qui est de toute évidence faux), iels oublient systématiquement une mesure absolument honteuse : la hausse des frais d’inscription à l’université pour les étudiant·es extra-communautaires, passant de 170 à 2 770 euros en licence et de 243 à 3 770 euros en Master. Ce précédent, auquel le Conseil d’État n’a rien trouvé à redire [10], laisse penser qu’une telle hausse pourrait en principe être généralisée à tou·tes [11]. Mais est-ce dans le projet néo-libéral macroniste ?

      Un projet Macron-compatible ?

      Faisons d’abord un détour par l’#Institut_Montaigne, un think-tank néo-libéral. Ce dernier est consulté par le MESRI pour définir sa stratégie et sa politique ESR [12]. La collaboratrice de Vidal recrutée en juillet 2020, #Blanche_Leridon, est même passée par le think-tank de 2015 à 2018 [13]. Ce qui devient intéressant, c’est qu’en avril 2021, l’Institut faisait (à nouveau) des propositions sur une réforme de l’Université impliquant… une hausse des frais d’inscription, sans aucune ambiguïté ici ! [14]

      « [une] augmentation des droits de scolarité en licence à 900 € par an et à 1 200 € en master [qui] concernerait l’ensemble des universités, de manière uniforme » (p. 98–99)

      L’analogie ne s’arrête pas là puisque le think-tank propose, comme Macron (voir tableau en annexe) :

      – d’augmenter la part des #financements_privés dans les #fonds_universitaires ;
      - de résoudre la précarité étudiante par l’augmentation des frais d’inscription (ce que l’Institut Montaigne propose de faire en créant notamment des #prêts étudiants…) ;
      – de « remettre » la recherche au cœur des missions des universités au détriment des établissements de recherche, tels que le #CNRS, qui feraient office d’agences de moyens ;
      – de s’affranchir du « coût » que représente le tiers d’étudiant·es boursier·ères ;
      – la remise en cause du système historique Université–Grande école–EPST ;
      – le renforcement de la professionnalisation des formations universitaires ;
      – le renforcement de la #gouvernance des universités par leur #autonomisation.

      On remarquera tout de même quelques différences, notamment sur la précision de certains calculs puisqu’à l’inverse de Macron, l’Institut Montaigne montre que la France n’est pas la championne mondiale du financement public de ses universités ; le Président n’en étant pas à son premier raccourci grossier dans son discours [15]. Autre divergence notable, la transformation complète des EPST en agences de moyens n’est pas le scénario privilégié par le think-tank.

      Notons enfin que certain·es ont proposé à la suite du discours de Macron que l’augmentation des frais d’inscription serait inconstitutionnelle, sur la base d’une décision du Conseil constitutionnel en 2019 [16]. Cependant, ce dernier n’entérine pas la #gratuité de l’université mais sa « #modicité » ou #gratuité_payante. Un point que l’Institut Montaigne avait déjà bien pris soin de vérifier et qui serait selon lui compatible avec son projet de réforme, donc avec celui de Macron.

      « La question de la constitutionnalité d’une augmentation des droits de scolarité […] Il est donc possible de considérer que la proposition formulée [dans le rapport de l’Institut Montaigne] répond aux préoccupations du Conseil constitutionnel telles que précisées par le Conseil d’État. Des droits de scolarité annuels autour de 1 000 € apparaissent en effet modiques au regard du coût annuel moyen des formations dans l’enseignement supérieur (représentant autour de 10%).

      Ensuite, dans le cadre d’un prêt à remboursement contingent décrit ci-après, l’étudiant n’a à s’acquitter directement d’aucun droit sur la période de sa scolarité et le remboursement ultérieur de son emprunt sera fondé sur ses capacités financières. Un tel système, innovant et équitable, apparaît donc particulièrement adapté pour satisfaire aux obligations constitutionnelles pesant sur les droits de scolarité. » (p. 114–115)

      La comparaison entre le discours de Macron et celui du think tank est bluffante : il semblerait que l’un ait écrit l’autre, sans qu’on puisse savoir qui de la poule et l’œuf2 . L’ensemble des similarités entre le discours de Macron — et la politique ESR de son mandat — avec le rapport de l’Institut Montaigne montre le consensus libéral qui les unit sur la question de l’université. Une idéologie que l’un — l’Institut Montaigne — assume vis-à-vis de la question de l’augmentation des frais d’inscription, alors que l’autre — Macron et son gouvernement — la nie publiquement aussitôt l’avoir « évoquée ».

      Une difficulté à assumer qui en dit long sur l’absence de consensus dans la communauté académique et la société civile autour de ce projet de transformation de l’université.

      NB : au moment de l’écriture de ce billet, d’autres (ici le compte Twitter parodique @realUNIVFrance) ont aussi perçu le lien pour le moins troublant que nous décrivons. Le rapport de l’Institut Montaigne semble donc être une bonne grille de lecture pour comprendre le discours de Macron.

      Tableau annexe





      https://academia.hypotheses.org/33874

  • Quand le #budget de l’ESR baisse d’un milliard d’euros

    104 millions € de crédits budgétaires annulés

    Lire les documents budgétaires vaut mieux qu’écouter mille discours. 104 millions € de budget pour l’Université et la recherche (programmes 150, 172 et 190), pourtant votés par la représentation nationale ont été annulés.

    104 millions €, c’est le montant exact de la hausse de budget voté entre 2020 et 2021 (https://rogueesr.fr/20201026/#C), une fois pris en compte le bonneteau budgétaire sur les programmes spatiaux.

    L’#inflation est par ailleurs estimée désormais à 3,4 % en 2021. La baisse du budget consacré à l’Université et à la recherche en 2021 est donc de -1 milliard €. Voilà qui contraste avec le tweet de Noël de la ministre, Mme Vidal : « Il y a tout juste un an, la promulgation de la #LoiRecherche marquait une avancée historique pour la recherche française. »

    https://rogueesr.fr/2022/01/10

    –-

    Le tweet de #Frédérique_Vidal cité ci-dessus :





    https://twitter.com/VidalFrederique/status/1474290550593441800

    #ESR #université #facs #France #financement #mensonge

  • #Islamo-gauchisme, l’observatoire imaginaire de F. Vidal. Lettre par la voie hiérarchique

    Après que la ministre Vidal s’est appuyée sur un prétendu #observatoire européen ou mondial des #libertés_académiques, j’ai demandé au ministère, en vertu de la loi sur la transparence de 78, communication de tout document en sa possession portant sur ledit observatoire. Ces documents « n’existent pas », me répond le ministère. Au moyen d’un observatoire imaginaire, la ministre semble avoir désinformé et l’opinion publique et le Sénat. La lettre ci-dessous, transmise par la voie hiérarchique, est restée sans réponse.

    Mardi, Novembre 30, 2021 17h42 CET person #Nowenstein_Sebastian n@ac-lille.fr Destinataire

    Monsieur le Proviseur,
    Je vous saurais gré de bien vouloir transmettre le courrier ci-joint.
    Bien à vous,
    S. Nowenstein

    A Lille, le 30 novembre 2021.

    Madame la Ministre,

    s/c du chef d’établissement

    Interrogée 15 octobre 2021 sur France Info au sujet de l’islamo-gauchisme qui gangrène l’université et de vos déclarations sur la question, vous avez affirmé[https://twitter.com/franceinfo/status/1448913786421891095] : ça a permis de recenser un certain nombre d’empêchements de congrès, de colloques, dans tous les sens…

    Vous avez aussi affirmé qu’il y a un #observatoire_européen qui s’est monté, et même un observatoire mondial, qui veille aujourd’hui, qui recense, et la France n’est pas si bonne que ça dans les libertés académiques.

    Interrogée par le journaliste, vous reprenez votre phrase et précisez l’activité de l’observatoire européen ou mondial : …et qui recense tout événement empêché dans les universités.

    Ces initiatives et événements que vous décrivez ont été générés, à votre estime, par vos déclarations.

    En vertu du principe de la liberté d’accès aux documents administratifs institué par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, j’ai demandé à la Personne responsable de l’accès aux documents administratifs (PRADA) de votre ministère que me soit transmis tout document portant recensement des événements universitaires, colloques ou congrès empêchés en France, ainsi que tout document portant classement de la France en matière de libertés académiques, que ledit document ait été établi par le ministère ou par l’observatoire européen ou mondial auquel vous vous référiez.

    –—

    En date du 18 novembre 2021, la PRADA m’écrit :

    "Monsieur,

    Je vous informe que les documents demandés, qui auraient été établis par le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et recensant les évènements universitaires, colloques ou congrès empêchés en France n’existent pas.

    Par ailleurs, dans la mesure où les publications des observatoires mondiaux ou européens ainsi que les classements de la France en matière de libertés académiques sont en libre accès sur internet et diffusés sous la responsabilité des structures concernées, ces documents ont fait l’objet d’une diffusion publique au sens du quatrième alinéa de l’article L. 311-2 du code des relations entre le public et l’administration et ne relèvent pas du droit à la communication des documents administratifs.

    Je vous prie de bien croire, Monsieur, en l’expression de ma sincère considération,"

    –—

    Malgré les recherches que j’ai entreprises, je n’ai trouvé nulle trace de l’observatoire mondial ou européen que vous citiez, pas plus que du classement établi par ledit observatoire.

    Le journal Libération a également cherché à identifier cet observatoire : il a, comme moi, échoué (https://www.liberation.fr/checknews/islamo-gauchisme-frederique-vidal-instrumentalise-t-elle-le-travail-de-lo). Votre ministère, que le journal a sollicité en vain, n’a pas estimé devoir l’éclairer :

    Le ministère n’a, à ce jour, pas donné suite à nos sollicitations, lit-on dans l’article.

    Je note, avec Libération, que, lors de votre audition au Sénat du 9 septembre 2021, vous vous référiez déjà aux travaux de cet observatoire (je présume qu’il s’agit de la même instance que celle que vous évoquiez sur France Info) qui, à l’époque n’était pas mondial, mais modestement européen. Voici ce que vous déclariez devant la mission d’information sénatoriale "Mieux protéger notre patrimoine scientifique et nos libertés académiques" :

    "La question des libertés académiques se pose maintenant à l’échelon européen, puisque la Commission s’en empare, et nous devons travailler en coopération avec nos partenaires ; il existe d’ailleurs un observatoire européen des libertés académiques, qui recense les incidents, envahissements de colloque ou autres."

    Auriez-vous, madame la ministre, désinformé le Sénat et l’opinion publique en invoquant un observatoire qui n’existe pas ? Auriez-vous inventé, rêvé, imaginé un observatoire qui viendrait vous donner raison après des déclarations polémiques ? Auriez-vous cru que votre parole pouvait générer des faits ou des instances alternatifs et auriez-vous, de ces faits et instances, cherché à accréditer la réalité ?

    Ces questions me paraissent invraisemblables, mais les faits qui les font naître ne le sont pas moins. La rigueur et la déontologie scientifiques, que vous réclamez à juste titre des chercheurs, interdisent que l’on argumente en invoquant des données invérifiables. Ces exigences sont aussi celles de toute délibération loyale et rationnelle, celles que la Nation nous enjoint à nous, enseignants, de faire adopter par nos élèves dans leurs échanges à l’École ; celles aussi qui devraient caractériser la parole publique dans une société démocratique. Nos élèves nous prendront-ils au sérieux alors que la ministre que vous êtes a recours dans son argumentation à l’autorité d’un observatoire dont on ne sait s’il nourrit sa pensée ou s’il en est le fruit imaginaire ?

    Dans l’espoir que vous mettrez un terme à cette situation en dévoilant sans délai le nom de l’observatoire européen ou mondial auquel vous vous référez et les références de ses travaux, je vous prie de croire, madame la ministre, à l’expression de mes salutations les meilleures,

    S. Nowenstein,

    Professeur agrégé.

    https://sebastiannowenstein.org/2021/12/23/islamo-gauchisme-lobservatoire-imaginaire-de-f-vidal-lettre-par

    #ESR #université #facs #islamo-gauchisme #Vidal #Frédérique_Vidal

    –-

    ajouté à la métaliste sur l’"islamo-gauchisme" :
    https://seenthis.net/messages/943271

    • « Islamo-gauchisme » : Frédérique Vidal instrumentalise-t-elle le travail de l’Observatoire mondial des libertés académiques ?

      Dans son combat contre l’« islamo-gauchisme », la ministre s’appuie, curieusement, sur les travaux de l’Observatoire mondial sur la liberté académique… dont les membres sont pourtant très critiques vis-à-vis des attaques de la ministre contre l’Université.

      Question posée par Frédéric le 19 octobre 2021.

      En février, Frédérique Vidal avait provoqué un tollé en annonçant son intention de commander au CNRS « une enquête » sur « l’islamo-gauchisme » qui « gangrène », selon elle, l’université française. Interrogée à ce sujet lors de la matinale de France Info, vendredi 15 octobre, la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation a justifié son combat en s’appuyant sur les travaux d’un observatoire international, donnant raison a ses alertes. « La liberté académique, et l’intégrité scientifique, sont les deux piliers de la recherche et les deux piliers de l’Université, a déclaré Frédérique Vidal. Il y a eu beaucoup de débats [après sa proposition, retoquée par le CNRS, ndlr], j’en suis ravi, car ça a permis à beaucoup de gens qui avaient l’impression qu’ils ne pouvaient plus exprimer leur opinion, de pouvoir le faire. cela a permis de recenser un certain nombre d’empêchements, de congrès, de colloques, dans tous les sens. » Le journaliste la coupe et demande : « Vous, vous avez une idée chiffrée aujourd’hui du phénomène dans les facs ? » Réponse de la ministre : « Il y a un observatoire européen qui s’est monté, et même un observatoire mondial, qui veille aujourd’hui, et qui recense tout évènement empêché dans les universités, et la France n’est pas aussi bonne que ça. » Et de conclure : « La question, c’est : est-ce qu’aujourd’hui, dans l’université comme dans les écoles, les enseignants-chercheurs peuvent étudier, rechercher, sur tous les thèmes qu’ils souhaitent, sans être empêchés, sans être immédiatement ostracisés ? »

      Le 9 septembre, la ministre avait aussi fait allusion à cet observatoire au cours d’une audition devant le Sénat, sur le thème de la protection des libertés académiques. « La question des libertés académiques se pose maintenant à l’échelon européen, puisque la Commission s’en empare, et nous devons travailler en coopération avec nos partenaires ; il existe d’ailleurs un observatoire européen des libertés académiques, qui recense les incidents, envahissements de colloque ou autres », avait à cette occasion affirmé la biochimiste de profession.

      Quel est l’observatoire en question ? Contacté par CheckNews, le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation n’a pour l’instant pas précisé à quelle institution Frédérique Vidal fait référence.

      Un observatoire qui n’a rien publié

      Mais tout porte à croire qu’il s’agit du nouvel Observatoire mondial sur la liberté académique – en anglais, Global observatory on academic freedom (Goaf) –, le seul à réunir les différentes caractéristiques évoquées par Frédérique Vidal. Il s’est lancé récemment, très récemment même, puisque ses premières réunions ne remontent qu’à avril dernier. Sa portée se veut mondiale : tandis que l’Observatoire des libertés académiques et du droit d’étudier (Olade), également créé en 2021, porte spécifiquement sur la situation au niveau français. Et il « recense », ou plutôt s’intéresse de près aux menaces pour les libertés académiques, ce qui lui vaut d’être financé par l’Open society university network (Osun), réseau mondial visant à élargir l’accès à l’enseignement supérieur, et soutenu par le Conseil de l’Europe.

      Derrière cette initiative, on trouve Liviu Matei, administrateur et vice-recteur de l’Université d’Europe centrale (CEU), établissement anglophone, cosmopolite et pluridisciplinaire fondé en 1991 à l’initiative de George Soros. « L’université a été expulsée de Hongrie, et est maintenant installée à Vienne. Donc M. Matei est directement concerné par les atteintes aux libertés académiques », précise Danièle Joly, chercheuse en sociologie qui enseigne à l’Université de Warwick (Royaume-Uni) et préside le conseil scientifique du Goaf, l’instance qui supervisera les travaux de ses membres. Conseil scientifique dont fait partie un autre Français : Michel Wieviorka, sociologue spécialiste de la violence et du racisme, et professeur à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS). Liviu Matei, lui, a pris la direction de l’observatoire.

      Tous s’étonnent des propos de la ministre. Pour commencer, ils ne comprennent pas bien comment elle peut parvenir à des conclusions sur l’état des libertés académiques en France, alors que l’Observatoire n’a, à ce stade, publié aucune analyse. « De premiers travaux sont en cours et seront publiés, mais ce n’est pas encore le cas, explique Danièle Joly. Pour l’instant, l’Observatoire se penche sur la définition, le contour des libertés académiques. Lors du premier colloque, en janvier, sera présenté un état des lieux. Ensuite, les travaux de recherche seront empiriques, et consisteront à mener des études de cas sur différents pays à travers le monde. » Le site de l’Osun indique, à ce titre, que « Le rapport Goaf 2021 “Changement ou continuité, chemins convergents ou divergents ? Comprendre la liberté académique dans le monde pendant les années Covid” sera publié fin 2021, accompagné de plusieurs articles axés sur des études de cas qui incluent l’Inde, la France, le Royaume-Uni et la Hongrie ».
      Liberté académique attaquée

      « C’est tout à fait déplorable de parler d’une chose dont la ministre ne sait rien, en citant de fausses nouvelles », conclut Danièle Joly. « Elle part de ce qu’elle ne connaît pas. Soit elle mélange soit elle est dans l’ignorance », renchérit Michel Wieviorka. D’autant plus que, assure le sociologue, « s’il y a bien un thème sur lequel l’Observatoire est en désaccord avec elle, c’est sur l’idée que l’islamo-gauchisme gangrène les universités françaises ». Lui-même avait remis en avril à la ministre un rapport titré « Racisme, antisémitisme, antiracisme, Apologie pour la recherche », qui sans remettre totalement en cause l’idée qu’il puisse exister des « dérives » de courants antiracistes à l’université, critique fermement la démarche de Frédérique Vidal de s’immiscer dans un champ de recherche au sein des sciences sociales. « Les membres de l’Observatoire, ce sont des connaissances et ils sont en phase avec moi, complète Michel Wieviorka. J’ai une relation intellectuelle et amicale avec Liviu Matei. »

      Le directeur du Goaf se montre d’ailleurs, lui aussi, très critique à l’égard des prises de position de la ministre française, mais aussi de l’ensemble du gouvernement auquel elle appartient. « Nos recherches montrent que les universités et la liberté académique en France ont récemment été attaquées, répond-il à CheckNews. La principale source de ces récentes menaces contre la liberté académique, cependant, n’est pas interne, de l’intérieur des universités elles-mêmes, mais externe. Plus précisément dans ce cas, les universités ont été attaquées par des politiciens, y compris des représentants de haut niveau du gouvernement français. » Et de faire le parallèle avec d’autres exemples historiques : « Des déclarations telles que “l’islamo-gauchisme gangrène les universités” ne sont pas fondées sur des faits, elles sont fabriquées pour des usages politiques non démocratiques. Au fond, elles ne sont pas différentes d’autres tentatives et vocabulaire, il y a seulement quelques décennies, lorsque les universités françaises étaient accusées d’être toutes judéo-bolcheviques. »

      Dans deux articles publiés, le 23 puis le 29 mars, sur le Blog de Mediapart et le site du « Project Syndicate », il décrit le cas français comme « un récent symptôme » d’une « crise des libertés académiques » avec laquelle l’Europe serait aux prises. Plus loin, il dénonce aussi la ligne de défense développée par l’exécutif : « Vidal a justifié son attaque contre les universités non seulement par des arguments politiques et juridiques – à savoir que les restrictions imposées à certaines disciplines sont nécessaires pour protéger l’Etat de droit et prévenir le terrorisme – mais aussi par sa propre définition tendancieuse de la liberté académique. Adoptant une tactique familière de l’extrême droite, le gouvernement français a tenté de présenter son assaut contre les études postcoloniales comme un projet de recherche, comme s’il exerçait simplement la liberté académique pour lui-même. En présentant la question de cette manière, le gouvernement peut prétendre qu’il ne réprime pas les études postcoloniales pour des raisons politiques, mais qu’il mène sa propre “étude” sur la question de l’islamo-gauchisme. » Le ministère n’a, à ce jour, pas donné suite à nos sollicitations. Et la récupération par Frédérique Vidal de travaux qui lui sont pourtant évidemment hostiles reste donc un mystère.

      https://www.liberation.fr/checknews/islamo-gauchisme-frederique-vidal-instrumentalise-t-elle-le-travail-de-lo

    • Objet : Déclarations de la ministre Vidal devant la mission d’information sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français et leurs incidences.

      Mesdames les sénatrices,

      Messieurs les sénateurs,

      Enseignant dans le secondaire, je prépare un dossier sur la question de la désinformation et sur la manière dont cette dernière peut corrompre les processus délibératifs indispensables au bon fonctionnement de la démocratie.

      Dans le cadre de la mission Mieux protéger notre patrimoine scientifique et nos libertés académiques (http://www.senat.fr/commission/missions/influences_etatiques_extra_europeennes.html), vous avez auditionné madame la ministre Vidal, qui a déclaré :

      La question des libertés académiques se pose maintenant à l’échelon européen, puisque la Commission s’en empare, et nous devons travailler en coopération avec nos partenaires ; il existe d’ailleurs un observatoire européen des libertés académiques, qui recense les incidents, envahissements de colloque ou autres.

      Quelques semaines après, le 15 octobre 2021, madame la ministre évoquait sur France Info cet observatoire (je présume qu’il s’agit du même que celui mentionné devant vous) (https://twitter.com/franceinfo/status/1448913786421891095).

      En dépit de mes recherches, je n’ai pas réussi à identifier ledit observatoire et, a fortiori, à prendre connaissance de ses travaux. Le journal Libération, qui avait entrepris une recherche comparable (https://www.liberation.fr/checknews/islamo-gauchisme-frederique-vidal-instrumentalise-t-elle-le-travail-de-lobservatoire-mondial-des-libertes-academiques-20211021_5IEHETY64FAEDMIX6UYMODMNGE/?redirected=1), a aussi échoué. Cette situation m’a conduit à demander à la #Personne_responsable_de_l’Accès_aux_Documents_administratifs (#PRADA) du ministère de la Recherche transmission de tout document ((https://sebastiannowenstein.org/2021/10/23/madame-vidal-lislamogauchisme-et-lobservatoire-europeen-ou-meme-mondial-demande-de-transmission-de-documents/))se rapportant à l’observatoire auquel faisait référence madame la ministre. Cette demande a été formulée sur la base de la la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.

      La réponse de la PRADA (ANNEXE I : https://sebastiannowenstein.org/2021/10/23/madame-vidal-lislamogauchisme-et-lobservatoire-europeen-ou-meme), rendant vraisemblable que les documents et l’observatoire auxquels s’est référée madame la ministre devant votre mission n’existaient pas, j’ai écrit le 30 novembre 2021, par la voie hiérarchique à madame la ministre afin de lui demander des précisions sur l’observatoire et sur les documents publiés par celui-ci. Cette lettre (ANNEXE II : https://sebastiannowenstein.org/2021/12/23/islamo-gauchisme-lobservatoire-imaginaire-de-f-vidal-lettre-par) est restée sans réponse.

      Je me permets de vous écrire, car je souhaiterais, en premier lieu, savoir si madame la ministre a déposé auprès de votre mission des documents concernant l’observatoire qu’elle a mentionné et s’il serait possible que vous me communiquiez ces documents, s’ils existent. En deuxième lieu, je voudrais pouvoir informer les élèves des dispositions qui sont prises au sein de votre assemblée afin de garantir l’exactitude des informations transmises lors des auditions et si des suites sont données lorsque l’on cherche à désinformer le Sénat. En troisième lieu, je voudrais recueillir toute réflexion que pourrait vous inspirer la situation que j’ai décrite

      Je publie ce courrier à l’adresse https://sebastiannowenstein.org/2022/01/11/audition-de-la-ministre-vidal-au-senat-courrier-adresse-aux-sen

      Dans l’attente de votre réponse, je vous prie de croire, messieurs les sénateurs, à l’expression de mes salutations les meilleures.

      S. Nowenstein,

      Professeur agrégé.

      ANNEXE I.

      Réponse de la PRADA du ministère de la Recherche, en date du 18 novembre 2021.

      Monsieur,

      Je vous informe que les documents demandés, qui auraient été établis par le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et recensant les évènements universitaires, colloques ou congrès empêchés en France n’existent pas.

      Par ailleurs, dans la mesure où les publications des observatoires mondiaux ou européens ainsi que les classements de la France en matière de libertés académiques sont en libre accès sur internet et diffusés sous la responsabilité des structures concernées, ces documents ont fait l’objet d’une diffusion publique au sens du quatrième alinéa de l’article L. 311-2 du code des relations entre le public et l’administration et ne relèvent pas du droit à la communication des documents administratifs.

      Je vous prie de bien croire, Monsieur, en l’expression de ma sincère considération,

      ANNEXE II.

      Lettre adressée le à madame Vidal, ministre de la Recherche, le mardi 30 novembre 2021.

      Mardi, Novembre 30, 2021 17h42 CET person Nowenstein Sebastian n@ac-lille.fr Destinataire

      Monsieur le Proviseur,
      Je vous saurais gré de bien vouloir transmettre le courrier ci-joint.
      Bien à vous,
      S. Nowenstein

      A Lille, le 30 novembre 2021.

      Madame la Ministre,

      s/c du chef d’établissement

      Interrogée 15 octobre 2021 sur France Info au sujet de l’islamo-gauchisme qui gangrène l’université et de vos déclarations sur la question, vous avez affirmé[1] : ça a permis de recenser un certain nombre d’empêchements de congrès, de colloques, dans tous les sens…

      Vous avez aussi affirmé qu’il y a un observatoire européen qui s’est monté, et même un observatoire mondial, qui veille aujourd’hui, qui recense, et la France n’est pas si bonne que ça dans les libertés académiques.

      Interrogée par le journaliste, vous reprenez votre phrase et précisez l’activité de l’observatoire européen ou mondial : …et qui recense tout événement empêché dans les universités.

      Ces initiatives et événements que vous décrivez ont été générés, à votre estime, par vos déclarations.

      En vertu du principe de la liberté d’accès aux documents administratifs institué par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, j’ai demandé à la Personne responsable de l’accès aux documents administratifs (PRADA) de votre ministère que me soit transmis tout document portant recensement des événements universitaires, colloques ou congrès empêchés en France, ainsi que tout document portant classement de la France en matière de libertés académiques, que ledit document ait été établi par le ministère ou par l’observatoire européen ou mondial auquel vous vous référiez.

      En date du 18 novembre 2021, la PRADA m’écrit :

      Monsieur,

      Je vous informe que les documents demandés, qui auraient été établis par le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et recensant les évènements universitaires, colloques ou congrès empêchés en France n’existent pas.

      Par ailleurs, dans la mesure où les publications des observatoires mondiaux ou européens ainsi que les classements de la France en matière de libertés académiques sont en libre accès sur internet et diffusés sous la responsabilité des structures concernées, ces documents ont fait l’objet d’une diffusion publique au sens du quatrième alinéa de l’article L. 311-2 du code des relations entre le public et l’administration et ne relèvent pas du droit à la communication des documents administratifs.

      Je vous prie de bien croire, Monsieur, en l’expression de ma sincère considération,

      Malgré les recherches que j’ai entreprises, je n’ai trouvé nulle trace de l’observatoire mondial ou européen que vous citiez, pas plus que du classement établi par ledit observatoire.

      Le journal Libération a également cherché à identifier cet observatoire : il a, comme moi, échoué. Votre ministère, que le journal a sollicité en vain, n’a pas estimé devoir l’éclairer :

      Le ministère n’a, à ce jour, pas donné suite à nos sollicitations, lit-on dans l’article.

      Je note, avec Libération, que, lors de votre audition au Sénat du 9 septembre 2021, vous vous référiez déjà aux travaux de cet observatoire (je présume qu’il s’agit de la même instance que celle que vous évoquiez sur France Info) qui, à l’époque n’était pas mondial, mais modestement européen. Voici ce que vous déclariez devant la mission d’information sénatoriale Mieux protéger notre patrimoine scientifique et nos libertés académiques :

      La question des libertés académiques se pose maintenant à l’échelon européen, puisque la Commission s’en empare, et nous devons travailler en coopération avec nos partenaires ; il existe d’ailleurs un observatoire européen des libertés académiques, qui recense les incidents, envahissements de colloque ou autres.

      Auriez-vous, madame la ministre, désinformé le Sénat et l’opinion publique en invoquant un observatoire qui n’existe pas ? Auriez-vous inventé, rêvé, imaginé un observatoire qui viendrait vous donner raison après des déclarations polémiques ? Auriez-vous cru que votre parole pouvait générer des faits ou des instances alternatifs et auriez-vous, de ces faits et instances, cherché à accréditer la réalité ?

      Ces questions me paraissent invraisemblables, mais les faits qui les font naître ne le sont pas moins. La rigueur et la déontologie scientifiques, que vous réclamez à juste titre des chercheurs, interdisent que l’on argumente en invoquant des données invérifiables. Ces exigences sont aussi celles de toute délibération loyale et rationnelle, celles que la Nation nous enjoint à nous, enseignants, de faire adopter par nos élèves dans leurs échanges à l’École ; celles aussi qui devraient caractériser la parole publique dans une société démocratique. Nos élèves nous prendront-ils au sérieux alors que la ministre que vous êtes a recours dans son argumentation à l’autorité d’un observatoire dont on ne sait s’il nourrit sa pensée ou s’il en est le fruit imaginaire ?

      Dans l’espoir que vous mettrez un terme à cette situation en dévoilant sans délai le nom de l’observatoire européen ou mondial auquel vous vous référez et les références de ses travaux, je vous prie de croire, madame la ministre, à l’expression de mes salutations les meilleures,

      S. Nowenstein,

      Professeur agrégé.

      https://sebastiannowenstein.org/2022/01/11/audition-de-la-ministre-vidal-au-senat-courrier-adresse-aux-sen

  • « La #bureaucratie nuit gravement à la #recherche »

    L’alourdissement des #tâches_administratives, synonyme de perte de temps et d’énergie, conduira à un appauvrissement de la science française, prévient un collectif de directeurs de structure de recherche dans une tribune au « Monde ».

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/01/10/la-bureaucratie-nuit-gravement-a-la-recherche_6108818_3232.html
    #ESR #université #facs #administration #science

  • #Harcèlement, #précarité#Université, le grand gâchis ?

    Elle a enquêté sur les conditions de travail des #jeunes_chercheurs en #France : Adèle B. Combes, docteure en neurobiologie et initiatrice du projet “Vies de thèse”, auteure de "Comment l’Université broie les jeunes chercheurs" (Ed Autrement, 2022), est notre invitée aujourd’hui.

    Adèle B. Combes est docteure en neurobiologie. Partant de sa propre expérience et de témoignages recueillis grâce au questionnaire "Vies de thèse : Doctorat et qualité de vie", elle pointe un phénomène banal mais peu (re)connu : la #détresse des jeunes chercheur(e)s en France.

    Elle publie "Comment l’université broie les jeunes chercheurs : Précarité, harcèlement, #loi_du_silence" (Autrement, 5 janvier 2022). Une enquête sur les #conditions_de_travail des jeunes chercheurs en France, “ceux qui n’ont pas été écoutés”, entre #culte_du_secret, #copinages ou #malhonnêteté_intellectuelle. L’#enquête aborde ainsi "toute forme d’#abus_de_pouvoir dans la recherche" : #agressions psychologiques voire sexuelles, #discriminations, harcèlement au travail, difficultés à trouver un financement ou encore précarité du contrat doctoral.

    Des potentiels gâchés par la #désillusion, pour des jeunes chercheurs plein d’#enthousiasme lorsqu’ils commencent leur #doctorat. Selon Adèle B. Combes, qui parle aussi de sa propre expérience de doctorante, "au départ, c’est grisant. On est très fier de faire un doctorat, (...) de pouvoir apporter sa pierre à l’édifice de la connaissance humaine."

    L’enjeu touche à la #santé_publique autant qu’il est national, puisque la recherche en France s’en trouve menacée, entre rêves avortés, fuite des cerveaux à l’étranger et choix du privé. Il s’agit ainsi d’entraîner une réelle prise de conscience sur les conditions de #travail imposées à nombre de doctorant(e)s en France.

    Pour autant, le livre ne vise pas à dissuader de faire une #thèse. Dans de bonnes conditions, nous rappelle l’auteure, ces années-là peuvent être un moment de vie extraordinaire.

    https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-idees/harcelement-precarite-universite-le-grand-gachis

    #ESR #facs #science #recherche #Adèle_Combes

    ping @_kg_

    • Comment l’université broie les jeunes chercheurs. Précarité, harcèlement, loi du silence

      De retour d’un terrain, Laurine repousse les mains de son directeur de recherche, un géologue influent qui n’apprécie pas qu’on lui tienne tête et fera tout pour détruire sa carrière. Dans son laboratoire de biochimie, Baptiste se fait exploiter et insulter par son encadrant de thèse, un homme sanguin, homophobe et raciste. À l’autre bout de la France, Sarah, doctorante en anthropologie non rémunérée, essaie de survivre malgré le caractère imprévisible de sa directrice, la violence de l’administration, la perfidie de certains collègues et la détresse de ses amis.
      C’est un mal qui ronge la filière d’excellence du système universitaire français : la précarité, le harcèlement et la culture du silence. Chaque année, plus de 15 000 doctorants se lancent avec passion dans une thèse, mais à l’université, les dysfonctionnements engendrent les déviances. Manque de moyens, lourdeur d’une administration sans affect, compétition féroce et surtout toute-puissance des directeurs de thèse ont ouvert la voie au harcèlement, moral et sexuel, à la pression, aux sollicitations sans limites ou encore à la dévalorisation du travail des jeunes chercheurs, quand il ne s’agit pas simplement de se l’approprier.
      Cette enquête richement documentée perce le silence et appelle à un changement urgent, dont les premières étapes pourraient être déployées rapidement et sont proposées par l’auteure.

      https://www.autrement.com/comment-luniversite-broie-les-jeunes-chercheurs/9782080270474

      #livre

    • Leurs dénis et leurs délits

      Les propos de Frédérique Vidal ce 29 décembre sur France Info ont été à l’image de toute la politique de ce gouvernement en matière de gestion sanitaire, oscillant entre inaction et stratégie de communication, improvisation et décisions irrationnelles, dénis répétés et propagation de la peur. Mais un jour les objets de leurs dénis deviendront des objets de délits.

      Ce 29 décembre 2021 restera une date singulière dans l’histoire des errements politiques du gouvernement pour combattre la pandémie de #Covid-19. Un ministre de la santé, auditionné par les élus de la République pour imposer un passe vaccinal décidé en Conseil des ministres, menace à demi- mot 5 millions de Françaises et de Français : « Il y a vraiment peu de chances que vous puissiez passer cette fois-ci entre les gouttes ». Le même jour, le Préfet de Paris décide de rendre obligatoire le port du masque en extérieur, à l’exception du bois de Vincennes et du bois de Boulogne, où l’on ne manquera pas de créer une forte concentration de promeneurs. L’Absurdistan est de retour – si tant est qu’il nous ait quitté. Au même moment une pétition qui voit dans le passe vaccinal « une atteinte majeure à l’État de droit » promet de dépasser très vite le million de signatures. Le même jour encore, on apprend que des élus ont reçu une cinquantaine de menaces de mort et que certains de leurs biens ont été saccagés. Un tel concours d’événements devrait obliger nos « gouvernants » au sérieux et à une certaine gravité. Mais ce n’est pas ainsi que la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a commencé cette journée du 29 décembre 2021. Sa légèreté et son incurie nous ont laissés sans voix.

      S’il existait dans les Mediapart Awards 2021 une catégorie de « la meilleure tragi-comédie de l’année », nul doute que Frédérique Vidal serait l’autrice de la pièce en 12 actes qui remporterait le premier prix. Hier matin, en écoutant la ministre évoquer sur France info les « décisions » pour la rentrée universitaire et la tenue des examens, je suis resté coi, ne sachant pas si je devais rire ou pleurer. Dans mon état d’hébétude, une analogie m’a traversé l’esprit. Je me suis mis à penser à la scène du bureau ovale dans le film Don’t look up : déni cosmique. Face à une catastrophe qui est imminente, la présidente Janie Orlean a une formule qui pourrait résumer à elle-seule la politique française en matière de sécurisation sanitaire des écoles et des universités, et plus généralement de tous les services publics : « sit tight and assess », patienter et évaluer. Cette vacance, ou plutôt ce néant, dure depuis deux ans. Certes, Frédérique Vidal n’est pas Janie Orlean et Jean-Michel Blanquer n’est pas exactement son conseiller – il a même, politiquement, un peu plus de poids... Mais la stratégie politique de l’inaction relève d’une même couardise : ne rien faire pour ne pas déplaire est infiniment moins risqué que la moindre décision. C’est que Janie a dans le collimateur les élections de mi-mandat, quand le gouvernement français est en campagne au service de Macron-Roi, devenu avec son cher Castex, le « vaccinateur du genre humain ». La différence entre la fiction de Don’t look up et notre gouvernement est que le film est une bonne comédie satirique qui nous fait rire de nous-mêmes et de nos travers, alors que le spectacle que nous jouent nos politiciens est une très mauvaise tragédie dans laquelle, en définitive, ils jouent avec nos vies. Rappelons qu’il y a eu en France plus de 120 000 morts du Covid - sans compter les milliers de "morts indirectes" provoquées par "l’encombrement" des hôpitaux -, des dizaines de milliers de personnes qui subissent des séquelles graves de la maladie ou qui n’ont pu avoir accès aux soins en raison des fermetures de lits à l’hôpital, et plus d’un million de personnes qui souffrent de Covid long, sans qu’elles soient vraiment prises en charge et sans même que la recherche dispose de moyens pour trouver des thérapies efficaces (voir ici et là).

      Avant d’établir la liste de quelques « dénis cosmiques » de Frédérique Vidal et ses compères, il convient de dire haut et fort qu’elle a dépassé en ce 29 décembre toutes les bornes. D’ailleurs le silence qui entoure ses déclarations, masquées par d’autres informations, est proprement sidérant. Parlant des étudiants elle a dit ceci : « Lorsqu’ils sont cas contact et vaccinés, ils peuvent se rendre aux examens, puisqu’ils ne sont plus considérés comme cas contact car leur vaccination est complète » (voir ici : https://www.lemonde.fr/campus/article/2021/12/29/universite-les-partiels-auront-lieu-en-presentiel_6107601_4401467.html ou là : https://etudiant.lefigaro.fr/article/universite-frederique-vidal-annonce-le-maintien-des-examens-en-pre). S’il existait un vaccin contre l’#irresponsabilité politique il conviendrait de l’inoculer de toute urgence à Frédérique Vidal. Depuis quand et dans quel texte réglementaire apprend-on qu’une vaccination complète annule une situation de cas contact ? La ministre est-elle au courant qu’il y a plus de 100.000 cas par jour en moyenne et que la tranche d’âge des 20-29 ans est la plus touchée ? La ministre a-t-elle conscience qu’elle invite tous les #étudiants qui sont #cas_contact (avec ou sans symptômes) à se rendre à leurs examens à partir du moment où leur vaccination est « complète », sans d’ailleurs préciser si elle entend par #vaccination complète deux ou trois doses ? La ministre anticiperait-elle une décision à venir ? Dans tous les cas, cette affirmation invraisemblable et pour le moins irrationnelle est en contradiction avec la circulaire que la ministre a elle-même envoyée en date du 29 décembre 2021 aux chefs d’établissements. On peut en effet y lire ceci : « De la même manière, les #examens peuvent toujours être organisés en présentiel dans le respect des prescriptions du protocole sanitaire défini en novembre 2021. A cette fin, vous veillerez au respect des cas dans lesquels un étudiant contaminé ou cas contact ne doit pas se présenter et porterez cette information aux candidats le plus en amont possible des épreuves. » Par conséquent la distinction entre les personnes contact à risque modéré et à risque élevé reste en vigueur. On peut se référer à ce document, conforme au décret et surtout à ces informations de l’Assurance Maladie qui intègrent les nouvelles règles pour les cas contacts de personnes contaminées par le variant Omicron, nouvelles règles que la ministre semble totalement ignorer et qu’elle a oublié d’intégrer dans sa nouvelle circulaire. Au sujet du variant Omicron, le site de l’Assurance Maladie précise ceci : « compte-tenu de la particularité de ce variant, vous devez vous isoler immédiatement pour 7 jours (ou 17 jours si vous partagez son domicile), et ce même si vous êtes totalement vacciné ».

      Le rôle d’un.e ministre est d’informer : Frédérique Vidal désinforme. Le rôle d’un.e ministre est d’anticiper : Frédérique Vidal est la ministre de tous les retards. Le rôle d’un.e ministre est de prévenir les risques : Frédérique Vidal augmente les risques. Le rôle d’un.e ministre est de dire la vérité : Frédérique Vidal est dans le #déni permanent. Frédérique Vidal est à l’image de ce gouvernement et de tous ses membres. Elle doit démissionner.

      Voici maintenant ce que nient, imperturbablement depuis des mois, Frédérique Vidal et son gouvernement, concernant les personnels et les étudiants des universités. Voici les objets de leurs dénis et de leurs délits :

      - Ils veulent ignorer que de nombreux étudiants fragilisés par la crise sanitaire se présentent et se présenteront dès ce 3 janvier aux examens en étant positifs et parfois même symptomatiques, ou en étant personne contact à risque élevé, parce qu’ils ont tout simplement peur de devoir repasser les épreuves et d’échouer à leurs examens.
      - Ils ne veulent pas reconnaître l’état catastrophique des locaux universitaires où des centaines d’amphis sont sans aucune ventilation et des milliers de salles sans ouvrants fonctionnels.
      - Ils continuent sciemment d’ignorer que la transmission aéroportée du virus est la première cause de la contagion et ils laissent des milliers d’étudiants s’entasser dans des locaux avec des taux de CO2 supérieurs à 1000, 1500 ou même parfois 2000 ppm.
      - Ils ne reconnaissent toujours pas l’utilité des capteurs de CO2, lesquels permettent de définir les jauges des locaux, les seuils d’aération obligatoire et d’évacuation. C’est ainsi qu’Anne-Sophie Barthez, Directrice de la DGESIP sous la responsabilité directe de Frédérique Vidal, écrivait dans une circulaire en date du 19 novembre 2021, que le « dépassement des taux de CO2 recommandés n’est pas en soi un risque sanitaire », ce qui constitue un #mensonge éhonté au regard de nombreuses études scientifiques.
      - Ils ignorent sciemment la qualité de protection des masques FFP2 et les bénéfices de l’installation de purificateurs d’air, afin de s’exonérer de toute politique d’investissement dans la protection des personnels et des étudiants.
      – Ils ne veulent pas reconnaître le sous-encadrement vertigineux des administrations des universités, de leurs services de santé et de sécurité au travail, des laboratoires et des composantes d’enseignement, lesquels, minés par le développement de la précarité et de la souffrance au travail, sont littéralement abandonnés par l’État tout comme l’État a abandonné l’Hôpital.
      - Ils ne veulent pas admettre que la politique du tout-vaccinal est conduite à un échec retentissant et que seule une stratégie de prévention et d’actions de protection combinées et coordonnées permettra de combattre efficacement la pandémie.

      Dans sa circulaire du 29 décembre, qui traite essentiellement de la vaccination et de tests, Frédérique Vidal n’évoque ni les masques FFP2 évidemment, ni la mesure du CO2 qui est passée aux oubliettes, et encore moins les purificateurs d’air. Zéro moyen, comme toujours. Mais elle écrit ceci : « la situation actuelle ne justifie pas de nouvelles restrictions ». Le mot est riche d’enseignements. On n’est plus ici dans le seul déni. Il s’agit d’une véritable #dérive_idéologique : gouverner par les seules restrictions, réduire l’action publique à des mesures de privation des libertés. Nos « gouvernants » – si l’on peut encore user de cette dénomination - semblent ne plus être en état, ni en mesure de concevoir que l’action politique puisse consister en des décisions positives et concrètes de prévention, d’aide et de soutien à la population, en campagnes d’information, en plans d’accompagnement et en programmation de moyens.

      C’est ainsi que, concernant la seule rentrée universitaire, les mesures à prendre, attendues et réclamées, pour maintenir les cours et les examens en présence – ce qui est évidemment souhaitable -, sont les suivantes :

      - Distribution de masques FFP2 à tous les étudiants qui sont amenés à composer dans des salles et amphis sans jauges définies, ainsi qu’à tous les personnels qui le souhaitent ; la filtration de l’air commence avec le FFP2 (billet de septembre 2020 à relire : https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/240920/ffp2-mon-amour) !
      - Distribution massive de tests antigéniques sur les campus, en particulier avant les examens ;
      - Campagnes nationales et locales d’information sur les règles d’utilisation des masques et mise en place de formations et cet effet ;
      - Installation de capteur de CO2 dans tous les locaux et en priorité dans les amphis et salles sans ventilation et sans ouvrants fonctionnels ;
      - En fonction des mesures de CO2, définition des jauges de chaque local et installation de purificateurs d’air dans les locaux non conformes et tous les lieux de convivialité ;
      - Réparation des toutes les menuiserie non fonctionnelles et installation de ventilation motorisées dans tous les amphis et salles de grande capacité ;
      - Embauche de personnels en vue de réaliser les travaux d’amélioration et de réparation des locaux et plus généralement de gérer l’organisation et la mise en place de l’ensemble des mesures de sécurisation sanitaire des universités.

      Les quatre premières mesures peuvent et doivent être mises en œuvre rapidement. A cette fin le report de la rentrée d’une semaine laisserait le temps aux CHSCT de se réunir et aux établissements de s’organiser. Pour la mise en place des mesures 5, 6 et 7 – qui auraient dû être programmées dès le printemps 2020 -, le gouvernement doit dégager en urgence une enveloppe de crédits qui ira abonder immédiatement les budgets des universités. Comme ceux des hôpitaux et de l’ensemble des services publics.

      Nous l’avons compris depuis longtemps : la gestion du Covid-19 par le gouvernement répond avant tout à des considérations politico-économiques de courte vue et non à une stratégie sanitaire pensée sur la durée et construite pour toutes et tous, pour le bien commun. L’horizon défini par Macron est sa seule réélection. Il a privatisé la gestion sanitaire de la crise, comme il a privatisé l’Hôpital, comme il privatise la Recherche et l’Université. Pour être réélu, il lui faut - quoi qu’il en coûte - continuer de plaire, faire le moins de vagues possibles dans l’opinion en surfant sur les vagues épidémiques, et surtout continuer à engraisser le Cac 40 et les actionnaires qui n’ont jamais fait autant de profits. Et que les petits soldats obéissent. Par la force ou la servitude volontaire.

      Sans changement de stratégie sanitaire, nous savons que nous allons vers le pire. Que nos politiques en responsabilité réfléchissent un instant à ceci : quand ils disposent de moyens de protection de la santé et de la sécurité des personnes et qu’ils renoncent sciemment à les utiliser, ils commettent non seulement une #faute_morale, mais aussi, possiblement, un #délit. Il existe encore une Cour de justice de la République, qui a mis récemment en examen Agnès Buzyn (1).

      Mesdames et Messieurs les "gouvernants", nous n’oublierons ni vos dénis, ni vos délits ! Ni votre mépris, ni vos profits !

      Pascal Maillard

      https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/301221/leurs-denis-et-leurs-delits

  • #Parcoursup arrive au niveau master et s’appelle #TTM (#trouve_ton_master)...

    Quel master après ma licence ?
    « trouvermonmaster.gouv.fr » regroupe l’intégralité des diplômes nationaux de master proposés par les établissements d’enseignement supérieur en France.

    https://www.trouvermonmaster.gouv.fr
    #parcours_sup #sélection #master #université #études #études_universitaires #facs #ESR #France #centralisation #enseignement_supérieur

    –—

    voir aussi le fil de @marielle :
    https://seenthis.net/messages/937761

    • Un thread sur twitter de L’Alternative, union syndicale et associative :

      Le contexte : depuis 2016, les facs peuvent (et sauf dérogation, doivent) sélectionner en M1. Panneau chantier
      La plupart des facs qui ont essayé d’échapper à cette réforme se sont faites rattraper par le sous-financement : y a pas assez de profs, donc on sélectionne.
      Du coup, c’est la catastrophe, comme à #Nanterre (l’une des univ. les plus sous-dotées) avec le scandale des #SansFacs.
      Et comme ces milliers de drames des #ÉtudiantsSansMaster : l’an dernier, 12 000 étudiant⋅es ont fait un recours après avoir vu tous leurs vœux refusés !
      Heureusement, @VidalFrederique
      a une solution !
      La ministre vient d’annoncer un grand plan d’investissements pour recruter des enseignant⋅es et accueillir tou⋅tes les étudiant⋅es qui ont le droit de poursuivre en Master. Sac d’argentSac d’argentSac d’argent

      Hahahaha, non bien sûr, on rigole.
      Le ministère, donc, modifie #TrouverMonMaster, plateforme initialement créée pour les étudiant⋅es recalé⋅es, pour en fait un #Parcoursup des Masters.
      Faut dire que ça avait si bien marché, Parcoursup.
      Et depuis quelques semaines, les responsables de parcours se voient demander de remonter tout un tas d’infos, en plus des « capacités d’accueil » de chaque formation.
      Tout ça « avant Noël », alors qu’on n’a aucune info fiable pour l’instant...
      https://education.newstank.fr/article/view/233766/evolution-portail-trouver-master-modalites-deja-actees-points-enc
      Hier, @ASBarthez
      a enfin pensé à informer les organisations étudiantes. Un certain nombre de rumeurs ont donc été clarifiées.
      À commencer par le calendrier de la procédure.

      Voilà donc une réforme majeure, extrêmement technique, impliquant un travail monstre des enseignant⋅es, présentée en novembre pour une publication des textes en décembre, et une mise en place début février.

      D’ailleurs, au départ, c’était prévu pour 2023 cette histoire :
      https://www.letudiant.fr/etudes/3es-cycles-et-masters/trouvermonmaster-deviendra-une-plateforme-unique-de-candidature-en-2023.ht
      Mais il faut croire que l’agenda d’@EmmanuelMacron
      vaut plus que le sort de quelques centaines de milliers d’étudiant⋅es.
      Bon, donc c’est n’importe quoi, comme le rappelle très justement une motion lilloise : https://twitter.com/janine_bd/status/1460983980354904083
      On pense aussi à « l’effet Parcoursup » qui poussera les [diplômes privés valant] licences à surnoter pour placer leurs étudiant⋅es sur le marché des Masters.
      Revenons aux infos.
      Tous les masters seraient donc concernés, mais... pas tou⋅tes les étudiant⋅es ! Les candidat⋅es étranger⋅es (et sans doute les redoublant⋅es) passeront par une procédure interne. Encore un cadeau pour les personnels qui auront à gérer ça.
      La première inconnue, c’est le nombre de vœux. Il sera fixé par arrêté, nous dit la DGESIP.
      La rumeur, elle, parle de Touche dix vœux maximum.
      Rien n’indique, pour l’instant, si les étudiant⋅es pourront hiérarchiser leurs vœux.
      À en croire la description de la phase d’admission, ce serait le contraire (un système à la #Parcoursup sans hiérarchisation) : l’étudiant⋅e reçoit des propositions au fil de l’eau, et donne sa préférence ensuite.
      Enfin, le recteur pourra toujours être saisi par les #ÉtudiantsSansMaster et, on l’espère, aura un peu plus de visibilité pour les affecter — ça pourrait être le seul avantage de la réforme...
      Et voilà donc tous les établissements en train de se demander comment fixer des « attendus » pour les masters...
      Voici un exemple, issu de la CFVU d’une université.
      On lit même que des concours d’entrée pourraient être mis en place : pour rappel, c’est bien prévu par la réforme de 2016...
      Et voilà le retour du problème central de la sélection en master : elle sert surtout à favoriser quelques formations « d’élite ».
      Voilà où on en est. Alors, on fait quoi ?
      On demande le report de la réforme à 2023, comme le revendique le @SgenCFDT : https://www.sgen-cfdt.fr/actu/evolution-du-portail-trouver-mon-master-le-sgen-cfdt-demande-le-report-a-l
      Certainement, mais ça ne nous semble pas suffisant parce que le problème est ailleurs.
      Le problème, c’est toujours le même : quelques formations sur-financées veulent sélectionner drastiquement, pendant que la masse des masters crève du sous-financement de l’enseignement supérieur.
      On peut bien réformer, jouer les admissions en Master à pierre-feuille-ciseaux ou à la roulette russe, ça ne changera : RIEN.
      Et c’est pour ça qu’il faut :
      Flèche vers la droite l’abandon de ce projet stupide, bien sûr,
      Flèche vers la droite mais surtout les financements pour accueillir tout le monde.
      Non ?

      https://twitter.com/AlternativeESR/status/1463615225610047490

    • Communiqué SNESUP FSU, 30.11.2021
      Plateforme “trouvermonmaster.fr”, une consultation ministérielle pour la forme et une sélection renforcée !

      À contre-courant de la nécessité d’augmenter les capacités d’accueil et de consolider le droit à poursuite d’études, la ministre Frédérique Vidal a décidé de faire évoluer le site d’information officiel de l’offre de Master “TrouvermonMaster.gouv.fr” vers une plateforme de choix et d’affectation, calquée sur le modèle de Parcoursup, qui devrait être effective dès février en vue de la rentrée 2022. Depuis plusieurs mois, la DGESIP a consulté la CPU et le réseau VP CFVU et n’a pas jugé bon d’en informer les organisations syndicales alors que les responsables de master sont déjà sollicité·es pour saisir sur la plateforme les attendus et les mentions de licence compatibles avec celles de master. Les textes réglementaires ne sont pas publiés mais les choix gouvernementaux sont déjà arrêtés et les solutions techniques verrouillées.

      Pour le SNESUP-FSU, la situation actuelle n’est pas satisfaisante et la plateforme actuelle doit être améliorée ; la situation des étudiant·es sans place en master, dont le nombre croît d’année en année, est inacceptable. Mais la solution envisagée de calquer le système d’affectation sur celui de la plateforme Parcoursup ne l’est pas plus. Les problèmes et dérives que celle-ci a engendrés à la fois pour les jeunes et les personnels sont nombreux : tri social, anxiété, bureaucratie, abandon.

      Le projet de transformation en profondeur de cette plateforme consiste à construire un barrage pour limiter le nombre d’étudiant·es en master en dépit de l’augmentation de la population étudiante et à accroître la sélection en master. En ne faisant porter l’examen des candidatures que sur une partie du parcours, comme c’est le cas au lycée, il fait peser le risque d’une dévalorisation du diplôme de licence en vidant de sa substance le dernier semestre. Il entraînera également une surcharge de travail pour les équipes pédagogiques et des difficultés de traitement des dossiers.

      Pour le SNESUP-FSU, la nouvelle plateforme d’affectation “TrouvermonMaster.gouv.fr” doit avant tout tenir compte des souhaits des candidat·es et permettre aux équipes pédagogiques de privilégier l’humain sur l’algorithme dans l’examen des candidatures. Construire une plateforme master sur le même modèle que Parcoursup, c’est faire peser les conséquences de la politique éducative austéritaire du gouvernement sur les étudiant·es de licence en les culpabilisant de ne pas être retenu·es dans le master de leur choix.

      Le calendrier du ministère est intenable et met les personnels concerné·es dans une situation de tension inadmissible et incompatible avec les moyens humains insuffisants et le calendrier universitaire.

      Le SNESUP-FSU exige la suspension de la mise en oeuvre de ce projet pour entrer dans une réelle concertation pour une toute autre plateforme donnant une meilleure visibilité de l’offre de formation, s’appuyant sur des processus simplifiés de candidatures, permettant des voeux hiérarchisés par les étudiant·es et une affectation qui maximise la satisfaction des étudiant·es et des équipes pédagogiques.

      Le SNESUP-FSU rappelle au ministère l’urgence de donner aux établissements les moyens d’augmenter les capacités d’accueil dans les filières en tension et notamment d’augmenter le nombre d’emplois de titulaires pour accueillir toutes et tous les étudiant·es dans de bonnes conditions.

      Le SNESUP-FSU appelle à soutenir la mobilisation des organisations de jeunesse le 8 décembre prochain pour l’ouverture et l’augmentation du nombre de places à l’université en licence et en master, pour le droit à la poursuite d’études et pour l’investissement massif dans l’ESR.

    • Parcoursup en master : « Le gouvernement cherche à accroître la sélection »

      La ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, veut réformer l’accès en master à marche forcée en le calquant sur Parcoursup à l’entrée à l’université. Une réforme dénoncée par Naïm Shili, secrétaire national du syndicat étudiant l’Alternative.

      Bientôt un Parcoursup pour l’entrée en master. C’est le dernier chantier que #Frédérique_Vidal veut mener à terme avant la fin de son passage au ministère de l’Enseignement supérieur. Le plan est simple : la loi autorise la sélection en master, l’Etat ne donne pas aux universités les moyens nécessaires pour ouvrir suffisamment de places face à la hausse de la démographie étudiante, des jeunes se retrouvent donc sans affectation et le font savoir, la ministre se saisit du moment politique pour réformer l’entrée en master.

      Les organisations étudiantes ont eu une première réunion au ministère cette semaine sur le sujet. Le texte encadrant cette réforme doit être formalisé pour décembre avec une application qui commencera en février. Une « précipitation » que dénonce Naïm Shili, secrétaire national du syndicat étudiant l’Alternative.

      Quel est ce projet de réforme de l’entrée en master ?

      Le gouvernement compte faire en master ce qu’il a fait en licence. Il veut créer un nouveau Parcoursup, c’est-à-dire une #plateforme_centralisée pour les demandes d’entrée en master. Il peut y avoir des avantages comme la lisibilité des offres pour les étudiants et des procédures simplifiées pour les étudiants. Mais le gouvernement cherche surtout à accroître la sélection à l’entrée en Master 1.

      Cette année, de nombreux étudiants se sont retrouvés sans master, ils se sont rendus visibles à travers le mot-dièse #EtudiantSansMaster. En quoi cette réforme va accentuer la sélection ?

      Il existe des possibilités de recours à travers le droit à la poursuite d’étude que le gouvernement ne cesse de limiter. Cette réforme va dans ce sens. Sur Parcoursup, la procédure est tellement longue et incertaine que des milliers d’étudiants abandonnent en cours de route sans aller jusqu’au bout.

      Ces étudiants vont dans des formations privées hors de Parcoursup255 ?

      Certains, oui. D’autres redoublent pour retenter leur chance l’année d’après. Les derniers arrêtent tout simplement leurs études. Mais en restreignant l’#accès_au_master, le gouvernement restreint aussi l’accès aux concours de la fonction publique qui sont souvent accessibles à bac +4 ou +5. Le seul moyen de régler le problème, c’est d’ouvrir des places supplémentaires.

      Quel est le calendrier de cette réforme ?

      Nous avons eu une réunion mardi dernier au ministère. Le projet doit être officiellement présenté au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche le 14 décembre pour une application dans la foulée. Cela ne pourra pas se mettre en place convenablement. Les étudiants vont devoir rentrer des vœux courant février ou mars, la plupart ne sont pas informés de l’existence de cette procédure à l’heure où je vous parle. Personne n’est au courant de la réforme et les universités sont déjà sous pression. Cette procédure se fait dans la précipitation et sans texte réglementaire pour l’encadrer.

      Avez-vous des marges de négociations ?

      Jusqu’à présent nous n’avions des informations que via la presse spécialisée. On peut encore discuter du nombre de vœux possibles pour chaque étudiant, mais le débat sur le bien-fondé de cette plateforme n’a pas lieu. Plus leur présentation avançait, plus on comprenait qu’ils veulent copier-coller Parcoursup, avec ses défauts. Des temps d’attente beaucoup trop longs, des délais pour répondre à une proposition de formation parfois très courts, une absence de hiérarchisation des vœux et l’absence d’anonymisation de l’établissement d’origine. Cela ouvre la porte à une sélection sociale basée sur l’établissement, mais aussi à des étudiants mal orientés.

      Est-ce que tous les étudiants devront passer par cette plateforme ?

      Non. Les étudiants internationaux hors de l’Union européenne et les redoublants doivent être pris en charge par des dispositifs différents. C’est beaucoup de travail pour les personnels. Même les directions d’université alertant sur la difficulté de mettre en place cette réforme dans de bonnes conditions sans moyens supplémentaires et dans le calendrier imparti.

      https://www.liberation.fr/societe/education/parcoursup-en-master-le-gouvernement-cherche-a-accroitre-la-selection-202

    • Transformation de la plateforme trouvermonmaster en l’absence de toute concertation syndicale. Communiqué du SGEN-CFDT

      Academia relaie ce communiqué du SGEN-CFDT, en précisant que selon une source, la stratégie prévue pour trouvermonmaster, site d’information, évoluerait vers une plateforme unique, où l’étudiant·e visant un M1 pourrait formuler 10 vœux non hiérarchisés, et acceptation obligatoire du premier vœu.Et bien sûr, sans concertation syndicale.

      Communiqué de presse du 19 novembre 2021 -ESR : https://sgen-cfdt.fr/contenu/uploads/2021/11/2021119-CP-n%C2%B0-14-Sgen-CFDT.odt

      Le Sgen-CFDT déplore la précipitation dans laquelle se prépare l’évolution du portail “trouver mon master” sans que les organisations représentatives des principaux intéressés (personnels et usagers) n’y soient clairement associées.

      De nombreux collègues responsables pédagogiques de master alertent le Sgen-CFDT à propos des changements en cours concernant le recrutement des étudiants en 1ère année de master et du calendrier extrêmement serré qui leur est imposé pour les mettre en œuvre :

      - constitution d’une plateforme nationale unique se substituant aux applications des établissements ;
      - harmonisation des informations relatives à chaque parcours (attendus, taux d’accès, et taux d’insertion) à renseigner d’ici les vacances de Noël.

      Pour penser et réaliser ce travail de refonte pour la rentrée 2022, le ministère s’appuie sur un groupe de travail réunissant toutes les deux semaines la DGESIP, la CPU et des vice-présidents de CFVU ainsi que certaines conférences de doyens, sans que les organisations syndicales n’aient été sollicitées.

      Pourtant, le dispositif « trouver mon master » est le fruit d’un accord signé par le Sgen-CFDT, le 4 octobre 2016 sur la réforme du cursus conduisant au diplôme national de master et dont les principes fondateurs ont été traduits dans la loi du 23 décembre 2016 portant adaptation du 2ème cycle de l’enseignement supérieur français au Licence – Master – Doctorat (LMD).

      Le Sgen-CFDT s’étonne donc que le ministère n’ait pas cru bon d’inviter l’ensemble des signataires de cet accord à discuter des évolutions envisagées et demande à être associé, avec l’ensemble des organisations signataires de l’accord de 2016, aux travaux visant à faire évoluer la plateforme « trouver mon master ».

      Le Sgen-CFDT demande, par conséquent, le report de la mise en œuvre effective de ces évolutions à la rentrée 2023.

      https://academia.hypotheses.org/32978

    • L’admission en Master sur la plateforme « Trouver Mon Master » en 2022 ?

      Un projet précipité, infaisable, voué à l’échec

      Le #MESRI a annoncé que, dès mars 2022, les candidatures et admissions en master se feront via la plateforme Trouver Mon Master transformée en ParcourSup du 2e cycle.

      La position fondamentale de la CGT FERC Sup est que chaque étudiante et étudiant ayant obtenu une Licence doit pouvoir s’inscrire, de droit, dans le Master de son choix, de même que tout bachelier·ère doit pouvoir choisir sa formation de 1er cycle. La CGT FERC Sup réaffirme que l’État a le devoir d’adapter les moyens aux besoins de formations et non de considérer les étudiant·es comme des variables d’ajustement à la réduction des moyens du service public d’Enseignement supérieur et de Recherche (ESR).

      L’existence d’un problème dans le système actuel d’inscription en master est avérée. On ne sait pas qui s’inscrira vraiment là où il/elle est admis·e. La conséquence est que des étudiant·es en attente ratent des possibilités. De plus, le système de saisine rectorale finale fonctionne très mal (peu d’admissions) et arrive trop tard (les admis·es ne rejoignent les cours qu’en octobre), laissant toujours trop de diplômé·es de Licence sans possibilité de poursuite d’étude en master. Mais la réponse à ces problèmes qui est proposée par le MESRI n’est pas satisfaisante, et ne constitue nullement un progrès. Elle a été concoctée par le MESRI, comme toujours, sans véritable concertation avec les acteurs et actrices de terrain, qui, déjà, font connaitre leurs inquiétudes dans les établissements. Dans sa vision autoritaire et pyramidale, le MESRI n’a en effet consulté que la CPU et les VP CFVU.

      Encore une fois, la CGT FERC Sup dénonce l’organisation défaillante :

      - l’annonce est tellement tardive que les délais de préparation et de mise en œuvre sont de toute façon intenables ;
      - on demande pourtant déjà aux universités de préparer les informations à rentrer dans un dispositif qui n’est encore ni précisé ni établi, ce qui pousse à mettre les collègues devant le fait accompli et, de toute façon, rend le travail des équipes très difficile voire impossible à tenir pour mars prochain ;
      – la procédure de demande d’admission va être avancée en mars et annoncée en janvier ou février, ce qui va surprendre les étudiant.e.s et ajouter du stress dans une période déjà très difficile ;
      – les étudiant·es des licences de spécialité (ou « licences suspendues », qui n’ont qu’une année de L3) devront décider après quelques mois seulement de leur avenir dans une spécialité qu’ils et elles viennent à peine d’intégrer ;
      - on voit mal comment sera prise en compte, et selon quelles modalités, la procédure « études en France » à la fois en termes de calendrier (à peu près simultané) et des accords d’admission qui ne seront pas connus de TMM.

      La CGT FERC Sup continue à revendiquer l’abrogation de la loi ORE et de ParcourSup qui mettent en place la sélection à l’entrée de l’université. Elle continue à exiger la création de 70.000 postes de titulaires et l’ouverture de locaux – l’équivalent de 2 universités– pour répondre aux besoins du service public d’ESR et accueillir décemment toutes les étudiantes et tous les étudiants dans les filières de leur choix. C’est l’unique solution de progrès.

      Dans l’immédiat, la CGT FERC Sup demande le retrait de cette plateforme opaque afin de garantir le respect du principe constitutionnel de l’égalité d’accès à l’enseignement supérieur pour tous ceux et toutes celles ayant le diplôme requis. La CGT FERC Sup demande que le ministère publie les chiffres des demandes d’inscription par Master et par établissement, avec le nombre de recalés, avant d’ouvrir des négociations sur les moyens et les modalités d’inscription et d’affectation en Master.

      https://cgt.fercsup.net/les-dossiers/enseignement-superieur/article/l-admission-en-master-sur-la-plateforme-trouver-mon-master-en-2022

    • Parcoursup TrouvermonMaster : un point par l’Alternative et pétition

      Depuis quelques semaines, c’est l’effervescence autour d’un mystérieux projet de nouvelle plateforme de sélection : trouvermonmaster.
      Depuis 2016 ((Texte établi à partir du fil Twitter de l’Alternative du 24 novembre 2021), les universités peuvent — et sauf dérogation, doivent — sélectionner en M1. La plupart des universités qui ont essayé d’échapper à cette réforme se sont faites rattraper par le sous-financement : faute d’enseignant·e en nombre suffisant, on sélectionne. 🤡
      Conséquence : c’est la catastrophe, comme à Nanterre, une des universités les plus sous-dotées, avec le scandale des #SansFacs ou des #ÉtudiantsSansMaster, qui touchent des milliers d’étudiant·es : l’an dernier, 12 000 étudiant⋅es ont fait un recours après avoir vu tous leurs vœux refusés !
      Heureusement, Frédérique Vidal a une solution ! La ministre vient d’annoncer un grand plan d’investissements pour recruter des enseignant⋅es et accueillir tou⋅tes les étudiant⋅es qui ont le droit de poursuivre en Master.
      Hahahaha, non bien sûr, on rigole.

      Le ministère, au contraire, fait le choix de modifier “trouvermonmaster”, plateforme initialement créée pour les étudiant⋅es recalé⋅es, pour en faire un Parcoursup des Masters, dont le succès est bien connu (sic).
      Et depuis quelques semaines, les responsables de parcours se voient demander de remonter de nombreuses informations, en plus des « capacités d’accueil » de chaque formation. Tout ça « avant Noël », alors qu’on n’a aucune communication fiable de la part du Ministère pour l’instant… Yolo.
      Seul Newstank a publié un article sur une “Évolution du portail trouver mon master : les modalités déjà actées et les points encore à trancher” le 10 novembre, suggérant la mise en place d’une double plateforme, l’un pour informer les candidat·es — le portail trouvermonmaster — et l’autre pour leur permettre de candidater en se substituant aux applications de chaque établissement.
      Le 23 novembre 2021, Anne-Sophie Barthez, DGESIP, a enfin pensé à informer les organisations étudiantes. Elle a mis un terme à un certain nombre de rumeurs, à commencer par celle touchant au calendrier de la procédure. Accrochez-vous : la réforme, majeure, extrêmement technique, qui va reposer sur un travail monstre des enseignant⋅es, est donc

      - présentée en novembre
      - pour une publication des textes en décembre,
      - et une mise en place début février 2022.

      Une rapide recherche indique qu’au départ, la réforme était prévue pour 2023. Mais il faut croire que l’agenda d’Emmanuel Macron vaut plus que le sort de quelques centaines de milliers d’étudiant⋅es.
      Bon, donc c’est n’importe quoi, comme le rappelle très justement une motion lilloise.
      On pense aussi à « l’effet Parcoursup » qui poussera les [diplômes privés valant] licences à surnoter pour placer leurs étudiant⋅es sur le marché des Masters.
      Revenons aux infos.
      Tous les masters seraient donc concernés, mais… pas tou⋅tes les étudiant⋅es ! Les candidat⋅es étranger⋅es — et sans doute les redoublant⋅es — passeront par une procédure interne. Encore un cadeau pour les personnels qui auront à gérer ça. 💝
      La première inconnue, c’est le nombre de vœux. Il sera fixé par arrêté, nous dit la DGESIP. Selon une rumeur persistante, on parlerait de 10 vœux. Rien n’indique, pour l’instant, si les étudiant⋅es pourront hiérarchiser leurs vœux.
      À en croire la description de la phase d’admission, ce serait le contraire — un système à la Parcoursup sans hiérarchisation — : l’étudiant⋅e reçoit des propositions au fil de l’eau, et donne sa préférence ensuite. 😬 On a entendu aussi que si le premier vœu validé n’était pas accepté, l’étudiant·e serait exclu. 😬 😬
      Enfin, le recteur pourra toujours être saisi par les #ÉtudiantsSansMaster et, on l’espère, aura un peu plus de visibilité pour les affecter — ça pourrait être le seul avantage de la réforme…

      Les établissements se demandent désormais comment fixer des « attendus » pour les masters…

      Voici un exemple, issu de la CFVU d’une université.

      On lit même que des concours d’entrée pourraient être mis en place, étant bien prévu par la loi du 23 décembre 2016…
      Et voilà le retour du problème central de la sélection en master : elle sert surtout à favoriser quelques formations « d’élite ».
      Voilà où on en est. Alors, on fait quoi ?
      On demande le report de la réforme à 2023, comme le revendique le SGEN-CFDT ?
      Certainement, mais ça ne nous semble pas suffisant parce que le problème est ailleurs.

      Le problème, c’est toujours le même : quelques formations sur-financées veulent sélectionner drastiquement, pendant que la masse des masters crève du sous-financement de l’enseignement supérieur.

      On peut bien réformer, jouer les admissions en Master à pierre-feuille-ciseaux ou à la roulette russe, ça ne changera : RIEN.
      Et c’est pour ça qu’il faut :
      ➡️ l’abandon de ce projet stupide, bien sûr,
      ➡️ mais surtout les financements pour accueillir tout le monde.
      Non ?
      Signez la péttion : Contre un Parcoursup Master : https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSdQt1vlWSiNtuYm_eiX2TVKSJv-NiQKixmhEj2hAtO1Bn_NKw/viewform

      https://academia.hypotheses.org/33131

  • ‘My students never knew’: the lecturer who lived in a tent

    Higher education is one of the most casualised sectors of the UK economy, and for many it means a struggle to get by

    Like many PhD students, #Aimée_Lê needed her hourly paid job – as an English lecturer – to stay afloat. But what her students never guessed was that for two years while she taught them she was living in a tent.

    Lê decided to live outside as a last resort when she was faced with a steep rent increase in the third year of her PhD at Royal Holloway, University of London, and realised she would not be able to afford a flat and cover all her costs on her research and teaching income.

    She recalls: “It was cold. It was a small one-person tent, which meant after a bit it did get warmer. But there were days when I remember waking up and my tent was in a circle of snow. When I wasn’t doing my PhD or other work I was learning how to chop wood or start a fire.”

    She stored her books in the postgraduate office so they wouldn’t be damaged, and showered at university. She “didn’t quite tell” her parents, saying to them that she was staying on an ecological farm so as not to worry them.

    Nor did she tell her university, which insisted this week that the welfare of all its students was paramount and that it encouraged anyone struggling to reach out for support. Lê says she led a double life, fearful that it might damage her professional reputation if people knew she was homeless.

    “I got good reviews from students. I marked 300 GCSEs in a hotel lobby. I even organised an international conference. I was working to a very high standard and I was incredibly focused,” she says.

    The University and College Union says the plight of young academics who are desperate to get a firm footing on the career ladder is getting worse. Staff at 146 higher education institutions have until Thursday to vote on whether to strike once again – potentially before Christmas – over unfair pay, “untenable” workloads and casualised contracts.

    Lê says: “I think the students had every expectation I was receiving a salary for my work. I think that is what students everywhere assume: that we are lecturers on proper contracts. I did tell them that wasn’t the case, but I thought telling them I was living outside was a step too far.”

    Research published this month found that nearly half of the undergraduate tutorials for which Cambridge University is famous are delivered by precariously employed staff without proper contracts. The UCU says this is a familiar story across the country.

    Lê was awarded an annual fellowship of £16,000 for three years from Royal Holloway to do her PhD on minority ethnic groups in American literature, and won an extra scholarship from the US, where she is from, in her first year. But as an international student she had to pay £8,000 a year in fees to the university (fees that have been waived for UK fellows), leaving her with £12,000 a year to live on including her wages for teaching.

    She says she was just about managing until the cheap postgraduate hall she was living in was closed for renovations at the end of her second year. She was faced with finding an extra £3,000 a year for rent, which she says she couldn’t afford. Determined not to drop out, she borrowed the tent from a friend.

    Lê admits that at first “I was really scared. I found out there was a protest camp near campus so I turned up with my tent and asked if I could stay there so I wasn’t alone. And that was the start of my next two years.”

    While in her tent she looked forward to the “reward of stability” after her PhD. She knew she might still end up taking some shorter-term contracts but thought they would overlap and she wouldn’t ever have to worry about secure housing again.

    Today Lê feels such optimism was misplaced. She gained her PhD in 2018, and tutored schoolchildren and worked at a botanical garden to make ends meet before securing two years on a fixed-term contract teaching creative writing at Exeter University. Now she is living with her parents and job-hunting again.

    “I don’t know what is going to happen. I’ve had lots of interviews, including one at Cambridge recently, but I started looking in April while I was still employed. I feel really nervous.”

    She doesn’t know if she is right not to give up. “To be honest I struggle with that question. The irony is I think I am very well suited to the job. I know I’m a really good teacher. It’s like a vocation.”

    Royal Holloway did not know that Lê was struggling financially. A spokesperson said: “We have dedicated student advisory and wellbeing teams who are here to support our students, including PhD students, with their health and wellbeing.” Services included free counselling, crisis help, and a financial wellbeing team who could offer information on extra funding for which students may be eligible, he said.

    Vicky Blake, the president of UCU, said: “Many people are still shocked to learn that higher education is one of the most casualised sectors in the British economy. There are at least 75,000 staff on insecure contracts: workers who are exploited, underpaid, and often pushed to the brink by senior management teams relying on goodwill and a culture of fear.”

    The union’s research shows one-third of academics are employed on fixed-term contracts, and 41% of teaching-only academics are on hourly paid contracts. Women and BAME staff are more likely to be employed insecurely.

    Jasmine Warren, who teaches psychology part-time alongside her PhD at the University of Liverpool, says: “As a woman finishing your PhD and going straight into precarious contracts, you have to ask: at what point do I choose to have a family? At what point can I buy a house? I haven’t seen any university advertising lecturer positions with a contract of more than a year recently. We are expected to accept this as normal.”

    Sian Jones (not her real name) spent six months sleeping on friends’ floors while researching her PhD and teaching history for £15 an hour at a Russell Group university. Jones has a disability, and in the third year of her PhD her funding was frozen when she had to take a month out after surgery. Shortly afterwards she had to leave her home because of domestic violence. She couldn’t afford a deposit or rent.

    “It was a really hard time, carrying on teaching and doing my research while I had nowhere to live,” she says. “I ended up with severe PTSD.”

    Jones eventually finished her PhD while juggling two casual teaching jobs at two institutions an hour apart. “I’m still exhausted,” she says. “I’m now one of the lucky ones because I’ve got a three-year contract, so I can at last relax a bit. But knowing in two and a half years you will be unemployed again is absolutely terrifying.”

    Raj Jethwa, the chief executive of the Universities and Colleges Employers’ Association, said: “Despite UCU repeatedly rejecting opportunities to work with employers in this important area, employers have continued their efforts to reduce the sector’s reliance on fixed-term contracts.”

    He said that over the last five years fixed-term academic contracts had declined and “the vast majority of teaching is delivered by staff with open-ended contracts”.

    He added: “It is very disappointing that UCU is encouraging its members to take damaging industrial action which is specifically designed to disrupt teaching and learning for students who have endured so many recent upheavals.”

    https://www.theguardian.com/education/2021/oct/30/my-students-never-knew-the-lecturer-who-lived-in-a-tent
    #université #pauvreté #précarité #ESR #Angleterre #UK #facs #SDF #sans-abri #sans-abrisme #enseignement

    ping @_kg_

  • Degrees of Abuse

    A two-year investigation reveals how British universities are failing to protect their students from sexual harassment by senior academics or other students.

    https://www.ajiunit.com/investigation/degrees-of-abuse

    #université #ESR #facs #harcèlement_sexuel #abus_sexuels #UK #Angleterre #Oxford #Oxford_university #Warwick #Warwick_University
    #podcast
    #notOK

    ping @_kg_

    –-

    ajouté à la métaliste sur le #harcèlement_sexuel à l’université :
    https://seenthis.net/messages/863594
    et plus précisément ici :
    https://seenthis.net/messages/863594#message863599

  • #Liberté_académique et #justice_sociale

    On assiste en #Amérique_du_Nord à une recomposition du paysage académique, qui met l’exercice des #libertés_universitaires aux prises avec des questions de justice sociale, liées, mais pas seulement, au militantisme « #woke », souvent mal compris. Publication du premier volet d’un entretien au long cours avec #Isabelle_Arseneau et #Arnaud_Bernadet, professeurs à l’Université McGill de Montréal.

    Alors que se multiplient en France les prises de position sur les #libertés_académiques – voir par exemple cette « défense et illustration » -, un débat à la fois vif et très nourri se développe au #Canada depuis plus d’un an, après que des universitaires ont dû faire face à des plaintes pour #racisme, parfois à des suspensions de leur contrat, en raison de l’utilisation pédagogique qu’ils avaient faite des mots « #nègre » ou « #sauvages ». Significativement, un sondage récent auprès des professeurs d’université du Québec indique qu’une majorité d’entre eux pratiquent diverses formes d’#autocensure. C’est dans ce contexte qu’Isabelle Arseneau et Arnaud Bernadet, professeurs au Département des littératures de langue française, de traduction et de création de l’Université McGill de Montréal, ont été conduits à intervenir activement dans le débat, au sein de leur #université, mais aussi par des prises de position publiques dans la presse et surtout par la rédaction d’un mémoire, solidement argumenté et très remarqué, qui a été soumis et présenté devant la Commission scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique dans le milieu universitaire.

    Initiée en février 2021 par le premier ministre du Québec, François Legault, cette commission a auditionné de nombreux acteurs, dont les contributions sont souvent de grande qualité. On peut télécharger ici le mémoire des deux universitaires et suivre leur audition grâce à ce lien (début à 5 :15 :00). La lecture du présent entretien peut éclairer et compléter aussi bien le mémoire que l’audition. En raison de sa longueur, je publie cet entretien en deux parties. La première partie est consacrée aux exemples concrets de remise en cause de la liberté de citer certains mots en contexte universitaire et traite des conséquences de ces pratiques sur les libertés académiques. Cette première partie intègre aussi une analyse critique de la tribune parue ce jour dans Le Devoir, co-signée par Blanquer et le ministre de l’Education du Québec, lesquels s’attaquent ensemble et de front à la cancel culture. La seconde partie, à paraître le vendredi 29 octobre, portera plus précisément sur le mouvement « woke », ses origines et ses implications politiques, mais aussi sur les rapports entre science et société. Je tiens à remercier chaleureusement Isabelle Arseneau et Arnaud Bernadet d’avoir accepté de répondre à mes questions et d’avoir pris le temps de construire des réponses précises et argumentées, dont la valeur tient tout autant à la prise critique de ces deux universitaires qu’aux disciplines qui sont les leurs et qui informent leur réflexion. Ils coordonnent actuellement un volume collectif interdisciplinaire, Libertés universitaires : un an de débat au Québec (2020-2021), à paraître prochainement.

    Entretien, première partie

    1. Pourriez-vous exposer le plus factuellement possible ce qui s’est passé au mois de septembre 2020 à l’université d’Ottawa et à l’université McGill de Montréal ?

    Isabelle Arseneau. À l’automne 2020 éclatait à l’Université d’Ottawa une affaire qui a passionné le Québec et a connu d’importantes suites politiques : à l’occasion d’une séance d’enseignement virtuel sur la représentation des identités en art, une chargée de cours, #Verushka_Lieutenant-Duval, expliquait à ses étudiants comment l’injure « #nigger » a été réutilisée par les communautés afro-américaines comme marqueur subversif dans les années 1960. Parce qu’elle a mentionné le mot lui-même en classe, l’enseignante est devenue aussitôt la cible de #plaintes pour racisme et, au terme d’une cabale dans les #réseaux_sociaux, elle a été suspendue temporairement par son administration. Au même moment, des incidents à peu près analogues se produisaient au Département des littératures de langue française, de traduction et de création de l’Université McGill, où nous sommes tous les deux professeurs. Dans un cours d’introduction à la littérature québécoise, une chargée de cours a mis à l’étude Forestiers et voyageurs de #Joseph-Charles_Taché, un recueil de contes folkloriques paru en 1863 et qui relate les aventures d’un « Père Michel » qui arpente le pays et documente ses « mœurs et légendes ». Des étudiants interrompent la séance d’enseignement virtuel et reprochent à l’enseignante de leur avoir fait lire sans avertissement préalable une œuvre contenant les mots « Nègres » et « Sauvages ». Quelques jours plus tard, des plaintes pour racisme sont déposées contre elle. Le dossier est alors immédiatement pris en charge par la Faculté des Arts, qui lui suggère de s’excuser auprès de sa classe et d’adapter son enseignement aux étudiants que pourrait offenser la lecture des six autres classiques de la littérature québécoise prévus au syllabus (dont L’Hiver de force de Réjean Ducharme et Les Fous de Bassan d’Anne Hébert). Parmi les mesures d’accommodement, on lui conseille de fournir des « avertissements de contenu » (« #trigger_warnings ») pour chacune des œuvres à l’étude ; de se garder de prononcer à voix haute les mots jugés sensibles et de leur préférer des expressions ou des lettres de remplacement (« n », « s », « mot en n » « mot en s »). Trois mois plus tard, nous apprendrons grâce au travail d’enquête de la journaliste Isabelle Hachey (1) que les plaignants ont pu obtenir, après la date limite d’abandon, un remboursement de leurs frais de scolarité et les trois crédits associés à ce cours qu’ils n’ont cependant jamais suivi et pour lequel ils n’ont validé qu’une partie du travail.

    Lorsque j’ai imaginé notre doctorante en train de caviarder ses notes de cours et ses présentations Powerpoint, ça a fait tilt. Un an plus tôt, je travaillais à la Public Library de New York sur un manuscrit du XIIIe siècle dont la première image avait été grattée par un lecteur ou un possesseur offensé par le couple enlacé qu’elle donnait jusque-là à voir. La superposition de ces gestes de censure posés à plusieurs siècles d’intervalle témoignait d’un recul de la liberté universitaire que j’associais alors plus spontanément aux campus américains, sans pour autant nous imaginer à l’abri de cette vague venue du sud (2). Devant de tels dérapages, mon collègue Arnaud Bernadet et moi avons communiqué avec tous les étages de la hiérarchie mcgilloise. Las de nous heurter à des fins de non-recevoir, nous avons cosigné une série de trois lettres dans lesquelles nous avons dénoncé la gestion clientéliste de notre université (3). Malgré nos sorties répétées dans les médias traditionnels, McGill est demeurée silencieuse et elle l’est encore à ce jour.

    2. Pour être concret, qu’est-ce qui fait que l’emploi du mot « nègre » ou « sauvages » dans un cours est légitime ?

    Isabelle Arseneau. Vous évoquez l’emploi d’un mot dans un cadre pédagogique et il me semble que toute la question est là, dans le terme « emploi ». À première vue, le contexte de l’énonciation didactique ne se distingue pas des autres interactions sociales et ne justifie pas qu’on puisse déroger aux tabous linguistiques. Or il se joue dans la salle de classe autre chose que dans la conversation ordinaire : lorsque nous enseignons, nous n’employons pas les mots tabous, nous les citons, un peu comme s’il y avait entre nous et les textes lus ou la matière enseignée des guillemets. C’est de cette distinction capitale qu’ont voulu rendre compte les sciences du langage en opposant le signe en usage et le signe en mention. Citer le titre Nègres blancs d’Amérique ou le terme « Sauvages » dans Forestiers et Voyageurs ne revient pas à utiliser ces mêmes termes. De la même façon, il y a une différence entre traiter quelqu’un de « nègre » dans un bus et relever les occurrences du terme dans une archive, une traite commerciale de l’Ancien Régime ou un texte littéraire, même contemporain. Dans le premier cas, il s’agit d’un mot en usage, qui relève, à n’en pas douter, d’un discours violemment haineux et raciste ; dans l’autre, on n’emploie pas mais on mentionne des emplois, ce qui est différent. Bien plus, le mot indexe ici des représentations socialement et historiquement situées, que le professeur a la tâche de restituer (pour peu qu’on lui fournisse les conditions pour le faire). Si cette distinction entre l’usage et la mention s’applique à n’importe quel contexte d’énonciation, il va de soi qu’elle est très fréquente et pleinement justifiée — « légitime », oui — en contexte pédagogique. Il ne s’agit donc bien évidemment pas de remettre en circulation — en usage — des mots chargés de haine mais de pouvoir continuer à mentionner tous les mots, même les plus délicats, dans le contexte d’un exercice bien balisé, l’enseignement, dont on semble oublier qu’il suppose d’emblée un certain registre de langue.

    3. Ce qui étonne à partir de ces exemples – et il y en a d’autres du même type -, c’est que l’administration et la direction des universités soutiennent les demandes des étudiants, condamnent les enseignants et vont selon vous jusqu’à enfreindre des règles élémentaires de déontologie et d’éthique. Comment l’expliquez-vous ? L’institution universitaire a-t-elle renoncé à défendre ses personnels ?

    Arnaud Bernadet. Il faut naturellement conserver à l’esprit ici ce qui sépare les universités nord-américaines des institutions françaises. On soulignera deux différences majeures. D’une part, elles sont acquises depuis longtemps au principe d’autonomie. Elles se gèrent elles-mêmes, tout en restant imputables devant l’État, notamment au plan financier. Soulignons par ailleurs qu’au Canada les questions éducatives relèvent avant tout des compétences des provinces et non du pouvoir fédéral. D’autre part, ces universités obéissent à un modèle entrepreneurial. Encore convient-il là encore d’introduire des nuances assez fortes, notamment en ce qui concerne le réseau québécois, très hétérogène. Pour simplifier à l’extrême, les universités francophones sont plus proches du modèle européen, tandis que les universités anglophones, répliques immédiates de leurs voisines états-uniennes, semblent davantage inféodées aux pratiques néo-libérales.

    Quoi qu’il en soit, la situation décrite n’a rien d’inédit. Ce qui s’est passé à l’Université d’Ottawa ou à l’Université McGill s’observe depuis une dizaine d’années aux États-Unis. La question a été très bien documentée, au tournant de l’année 2014 sous la forme d’articles puis de livres, par deux sociologues, Bradley Campbell et Jason Manning (The Rise of Victimhood Culture) et deux psychologues, Jonathan Haidt et Greg Lukianoff (The Coddling of the American Mind). Au reste, on ne compte plus sur les campus, et parmi les plus progressistes, ceux de l’Ouest (Oregon, État de Washington, Californie) ou de la Nouvelle-Angleterre en particulier, les demandes de censure, les techniques de deplatforming ou de “désinvitation”, les calomnies sur les médias sociaux, les démissions du personnel - des phénomènes qu’on observe également dans d’autres milieux (culture, médias, politique). En mai dernier, Rima Azar, professeure en psychologie de la santé, a été suspendue par l’Université Mount Allison du Nouveau-Brunswick, pour avoir qualifié sur son blog Black Lives Matter d’organisation radicale…

    Il y a sans doute plusieurs raisons à l’attitude des administrateurs. En tout premier lieu : un modèle néo-libéral très avancé de l’enseignement et de la recherche, et ce qui lui est corrélé, une philosophie managériale orientée vers un consumérisme éducatif. Une autre explication serait la manière dont ces mêmes universités réagissent à la mouvance appelée “woke”. Le terme est sujet à de nombreux malentendus. Il fait désormais partie de l’arsenal polémique au même titre que “réac” ou “facho”. Intégré en 2017 dans l’Oxford English Dictionary, il a été à la même date récupéré et instrumentalisé par les droites conservatrices ou identitaires. Mais pas seulement : il a pu être ciblé par les gauches traditionnelles (marxistes, libertaires, sociales-démocrates) qui perçoivent dans l’émergence de ce nouveau courant un risque de déclassement. Pour ce qui regarde notre propos, l’illusion qu’il importe de dissiper, ce serait de ne le comprendre qu’à l’aune du militantisme et des associations, sur une base strictement horizontale. Ce qui n’enlève rien à la nécessité de leurs combats, et des causes qu’ils embrassent. Loin s’en faut. Mais justement, il s’agit avec le “wokism” et la “wokeness” d’un phénomène nettement plus composite qui, à ce titre, déborde ses origines liées aux luttes des communautés noires contre l’oppression qu’elles subissaient ou subissent encore. Ce phénomène, plus large mais absolument cohérent, n’est pas étranger à la sociologie élitaire des universités nord-américaines, on y reviendra dans la deuxième partie de cet entretien. Car ni l’un ni l’autre ne se sont si simplement inventés dans la rue. Leur univers est aussi la salle de classe.

    4. Au regard des événements dans ces deux universités, quelle analyse faites-vous de l’évolution des libertés académiques au Québec ?

    Arnaud Bernadet. Au moment où éclatait ce qu’il est convenu d’appeler désormais “l’affaire Verushka Lieutenant-Duval”, le Québec cultivait cette douce illusion de se croire à l’abri de ce genre d’événements. Mais les idées et les pratiques ne s’arrêtent pas à la frontière avec le Canada anglais ou avec les États-Unis. Le cas de censure survenu à McGill (et des incidents d’autre nature se sont produits dans cet établissement) a relocalisé la question en plein cœur de Montréal, et a montré combien les cultures et les sociétés sont poreuses les unes vis-à-vis des autres. Comme dans nombre de démocraties, on assiste au Québec à un recul des libertés publiques, la liberté académique étant l’une d’entre elles au même titre que la liberté d’expression. Encore faut-il nuancer, car le ministère de l’enseignement supérieur a su anticiper les problèmes. En septembre 2020, le scientifique en chef Rémi Quirion a remis un rapport qui portait plus largement sur L’université québécoise du futur, son évolution, les défis auxquels elle fait face, etc. Or en plus de formuler des recommandations, il y observe une “précarisation significative” de la liberté académique, un “accroissement de la rectitude politique”, imputée aux attentes ou aux convictions de “groupes particuliers”, agissant au nom de “valeurs extra-universitaires”, et pour finir, l’absence de “protection législative à large portée” entourant la liberté académique au Québec, une carence qui remonte à la Révolution tranquille. En février 2021, le premier ministre François Legault annonçait la création d’une Commission scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique en contexte universitaire. Cette commission qui n’a pas fini de siéger a rendu une partie de ses résultats, notamment des sondages effectués auprès du corps professoral (ce qui inclut les chargés de cours) : 60 % d’entre eux affirment avoir évité d’utiliser certains mots, 35 % disent avoir même recouru à l’autocensure en sabrant certains sujets de cours. La recherche est également affectée. Ce tableau n’est guère rassurant, mais il répond à celles et ceux qui, depuis des mois, à commencer dans le milieu enseignant lui-même, doublent la censure par le déni et préfèrent ignorer les faits. À l’évidence, des mesures s’imposent aujourd’hui, proportionnées au diagnostic rendu.

    5. La liberté académique est habituellement conçue comme celle des universitaires, des enseignants-chercheurs, pour reprendre la catégorie administrative en usage en France. Vous l’étendez dans votre mémoire à l’ensemble de la communauté universitaire, en particulier aux jeunes chercheurs, mais aussi aux personnels administratifs et aux étudiants ? Pourriez-vous éclairer ce point ?

    Arnaud Bernadet. Ce qui est en jeu ici n’est autre que l’extension et les applications du concept de liberté académique. Bien sûr, un étudiant ne jouit pas des mêmes dispositions qu’un professeur, par exemple le droit à exercer l’évaluation de ses propres camarades de classe. Mais a priori nous considérons que n’importe quel membre de la communauté universitaire est titulaire de la liberté académique. Celle-ci n’a pas été inventée pour donner aux enseignants et chercheurs quelque “pouvoir” irréaliste et exorbitant, mais pour satisfaire aux deux missions fondamentales que leur a confiées la société : assurer la formation des esprits par l’avancement des connaissances. En ce domaine, l’écart est-il significatif entre le choix d’un thème ou d’un corpus par un professeur, et un exposé oral préparé par un étudiant ? Dans chaque cas, on présumera que l’accès aux sources, la production des connaissances, le recours à l’argumentation y poursuivent les mêmes objectifs de vérité. De même, les administrateurs, et notamment les plus haut placés, doivent pouvoir bénéficier de la liberté académique, dans l’éventualité où elle entrerait en conflit avec des objectifs de gouvernance, qui se révéleraient contraires à ce qu’ils estimeraient être les valeurs universitaires fondamentales.

    6. Entre ce que certains considèrent comme des recherches “militantes” et les orientations néolibérales et managériales du gouvernement des universités, qu’est-ce qui vous semble être le plus grand danger pour les libertés académiques ?

    Arnaud Bernadet. Ce sont des préoccupations d’ordre différent à première vue. Les unes semblent opérer à l’interne, en raison de l’évolution des disciplines. Les autres paraissent être plutôt impulsées à l’externe, en vertu d’une approche productiviste des universités. Toutes montrent que le monde de l’enseignement et de la recherche est soumis à de multiples pressions. Aussi surprenant que cela paraisse, il n’est pas exclu que ces deux aspects se rejoignent et se complètent. Dans un article récent de The Chronicle of Higher Education (03.10.2021), Justin Sider (professeur de littérature anglaise à l’Université d’Oklahoma) a bien montré que les préoccupations en matière de justice sociale sont en train de changer la nature même des enseignements. Loin de la vision désintéressée des savoirs, ceux-ci serviraient dorénavant les étudiants à leur entrée dans la vie active, pour changer l’ordre des choses, combattre les inégalités, etc. C’est une réponse à la conception utilitariste de l’université, imposée depuis plusieurs décennies par le modèle néolibéral. Et c’est ce qu’ont fort bien compris certains administrateurs qui, une main sur le cœur, l’autre près du portefeuille, aimeraient donc vendre désormais à leurs “clients” des programmes ou de nouveaux curricula portant sur la justice sociale.

    7. La défense des libertés académiques, en l’occurrence la liberté pédagogique et la liberté de recherche d’utiliser tous les mots comme objet de savoir, est-elle absolue, inconditionnelle ? Ne risque-t-elle pas de renforcer un effet d’exclusion pour les minorités ?

    Isabelle Arseneau. Elle est plutôt à notre avis non-négociable (aucun principe n’est absolu). Mais pour cela, il est impératif de désamalgamer des dossiers bien distincts : d’une part, le travail de terrain qu’il faut encore mener en matière d’équité, de diversité et d’inclusion (qu’il est désormais commun de désigner par l’acronyme « ÉDI ») ; d’autre part, les fondements de la mission universitaire, c’est-à-dire créer et transmettre des savoirs. Les faux parallèles que l’on trace entre la liberté académique et les « ÉDI » desservent autant la première que les secondes et on remarque une nette tendance chez certaines universités plus clairement néolibérales à utiliser la liberté académique comme un vulgaire pansement pour régler des dossiers sur lesquels elles accusent parfois de regrettables retards. Bien ironiquement, ce militantisme d’apparat ne fait nullement progresser les différentes causes auxquelles il s’associe et a parfois l’effet inverse. Revenons à l’exemple concret qui s’est produit chez nous : recommander à une enseignante de s’excuser pour avoir prononcé et fait lire un mot jugé sensible et aller jusqu’à rembourser leurs frais de scolarité à des étudiants heurtés, voilà des gestes « spectaculaires » qui fleurent bon le langage de l’inclusion mais qui transpirent le clientélisme (« Satisfaction garantie ou argent remis ! »). Car une fois que l’on a censuré un mot, caviardé un passage, proscrit l’étude d’une œuvre, qu’a-t-on fait, vraiment, pour l’équité salariale hommes-femmes ; pour l’inclusion des minorités toujours aussi invisibles sur notre campus ; pour la diversification (culturelle, certes, mais également économique) des corps enseignant et étudiant, etc. ? Rien. Les accommodements offerts aux plaignants sont d’ailleurs loin d’avoir créé plus d’équité ; ils ont au contraire engendré une série d’inégalités : entre les étudiants d’abord, qui n’ont pas eu droit au même traitement dans le contexte difficile de la pandémie et de l’enseignement à distance ; entre les chargés de cours ensuite, qui n’ont pas eu à faire une même quantité de travail pour un même salaire ; et, enfin, entre les universités, toutes soumises au même système de financement public, dont le calcul repose en bonne partie sur l’unité-crédit. Les salles de classe ont bon dos : elles sont devenues les voies de sortie faciles pour des institutions qui s’achètent grâce à elles un vernis de justice sociale qui tarde à se traduire par des avancées concrètes sur les campus. Confondre les dossiers ne servira personne.

    8. Reste que ce qui est perçu par des acteurs de la défense de droits des minorités comme l’exercice d’une liberté d’expression est vécu et analysé par d’autres acteurs comme une atteinte à la liberté académique, en particulier la liberté pédagogique. La situation n’est-elle pas une impasse propre à aviver les tensions et créer une polémique permanente ? Comment sortir de cette impasse ?

    Isabelle Arseneau. En effet, on peut vite avoir l’impression d’un cul-de-sac ou d’un cercle vicieux difficile à briser, surtout au vu de la polarisation actuelle des discours, qu’aggravent les médias sociaux. Dans ce brouhaha de paroles et de réactions à vif, je ne sais pas si on s’entend et encore moins si on s’écoute. Chose certaine, il faudra dans un premier temps tenter de régler les problèmes qui atteignent aujourd’hui les établissements postsecondaires depuis l’intérieur de leurs murs. En effet, la responsabilité me semble revenir d’abord aux dirigeants de nos institutions, à la condition de réorienter les efforts vers les bonnes cibles et, comme je le disais à l’instant, de distinguer les dossiers. À partir du moment où l’on cessera de confondre les dossiers et où l’on résistera aux raccourcis faciles et tendancieux, des chantiers distincts s’ouvriront naturellement.

    Du côté des dossiers liés à l’équité et à la diversité, il me semble nécessaire de mener de vrais travaux d’enquête et d’analyse de terrain et de formuler des propositions concrètes qui s’appuient sur des données plutôt que des mesures cosmétiques qui suivent l’air du temps (il ne suffit pas, comme on a pu le faire chez nous, de recommander la censure d’un mot, de retirer une statue ou de renommer une équipe de football). Plus on tardera à s’y mettre vraiment et à joindre le geste à la parole, plus longtemps on échouera à réunir les conditions nécessaires au dialogue serein et décomplexé. Il nous reste d’ailleurs à débusquer les taches aveugles, par exemple celles liées à la diversité économique de nos campus (ou son absence), une donnée trop souvent exclue de la réflexion, qui préfère se fixer sur la seule dimension identitaire. Du côté de la liberté universitaire, il est nécessaire de la réaffirmer d’abord et de la protéger ensuite, en reprenant le travail depuis le début s’il le faut. C’est ce qu’a fait à date récente la Mission nommée par le recteur de l’Université de Montréal, Daniel Jutras. Les travaux de ce comité ont abouti à l’élaboration d’un énoncé de principes fort habile. Ce dernier, qui a été adopté à l’unanimité par l’assemblée universitaire, distingue très nettement les dossiers et les contextes : en même temps qu’il déclare qu’« aucun mot, aucun concept, aucune image, aucune œuvre ne sauraient être exclus a priori du débat et de l’examen critique dans le cadre de l’enseignement et de la recherche universitaires », le libellé rappelle que l’université « condamne les propos haineux et qu’en aucun cas, une personne tenant de tels propos ne peut se retrancher derrière ses libertés universitaires ou, de façon générale, sa liberté d’expression » (4). Il est également urgent de mettre en œuvre une pédagogie ciblant expressément les libertés publiques, la liberté académique et la liberté d’expression. C’est d’ailleurs une carence mise au jour par l’enquête de la Commission, qui révèle que 58% des professeurs interrogés « affirment ne pas savoir si leur établissement possède des documents officiels assurant la protection de la liberté universitaire » et que 85% des répondants étudiants « considèrent que les universités devraient déployer plus d’efforts pour faire connaître les dispositions sur la protection de la liberté universitaire ». Il reste donc beaucoup de travail à faire sur le plan de la diffusion de l’information intra muros. Heureusement, nos établissements ont déjà en leur possession les outils nécessaires à l’implantation de ce type d’apprentissage pratique (au moment de leur admission, nos étudiants doivent déjà compléter des tutoriels de sensibilisation au plagiat et aux violences sexuelles, par exemple).

    Enfin, il revient aux dirigeants de nos universités de s’assurer de mettre en place un climat propice à la réflexion et au dialogue sur des sujets parfois délicats, par exemple en se gardant d’insinuer que ceux qui défendent la liberté universitaire seraient de facto hostiles à la diversité et à l’équité, comme a pu le faire notre vice-recteur dans une lettre publiée dans La Presse en février dernier. Ça, déjà, ce serait un geste à la hauteur de la fonction.

    9. Quelle perception avez-vous de la forme qu’a pris la remise en cause des libertés académiques en France avec la polémique sur l’islamo-gauchisme initiée par deux membres du gouvernement – Blanquer et Vidal – et poursuivi avec le Manifeste des 100 ?

    Arnaud Bernadet. Un sentiment de profonde perplexité. La comparaison entre “l’islamo-gauchisme”, qui nous semble en grande partie un épouvantail agité par le pouvoir macroniste, et le “wokism” états-unien ou canadien - qui est une réalité complexe mais mesurable, dont on précisera les contours la semaine prochaine - se révèle aussi artificielle qu’infondée. Un tel rapprochement est même en soi très dangereux, et peut servir de nouveaux amalgames comme il apparaît nettement dans la lettre publiée hier par Jean-Michel Blanquer et Jean-François Roberge : “L’école pour la liberté, contre l’obscurantisme”. Déplions-la un instant. Les deux ministres de l’Éducation, de France et du Québec, ne sont pas officiellement en charge des dossiers universitaires (assurés par Frédérique Vidal et Danielle McCann). D’une même voix, Blanquer et Roberge condamnent - à juste titre - l’autodafé commis en 2019 dans plusieurs écoles du sud-ouest de l’Ontario sur des encyclopédies, des bandes-dessinées et des ouvrages de jeunesse qui portaient atteinte à l’image des premières nations. Or on a appris par la suite que l’instigatrice de cette purge littéraire, Suzie Kies, œuvrait comme conseillère au sein du Parti Libéral du Canada sur les questions autochtones. Elle révélait ainsi une évidente collusion avec le pouvoir fédéral. Inutile de dire par conséquent que l’intervention de nos deux ministres ressortit à une stratégie d’abord politique. En position fragile face à Ottawa, dont les mesures interventionnistes ne sont pas toujours compatibles avec son esprit d’indépendance, le Québec se cherche des appuis du côté de la France. Au nom de la “liberté d’expression”, la France tacle également Justin Trudeau, dont les positions modérées au moment de l’assassinat de Samuel Paty ont fortement déplu. Ce faisant, le Québec et la France se donnent aussi comme des sociétés alternatives, le Canada étant implicitement associé aux États-Unis dont il ne serait plus que la copie : un lieu où prospéreraient une “idéologie” et des “méthodes” - bannissement, censure, effacement de l’histoire - qui menaceraient le “respect” et l’esprit de “tolérance” auxquels s’adossent “nos démocraties”. Au lieu de quoi, non seulement “l’égalité” mais aussi la “laïcité” seraient garantes au Québec comme en France d’un “pacte” capable d’unir la “communauté” sur la base “de connaissances, de compétences et de principes fondés sur des valeurs universelles”, sans que celles-ci soient d’ailleurs clairement précisées. On ne peut s’empêcher toutefois de penser que les deux auteurs prennent le risque par ce biais de légitimer les guerres culturelles, issues au départ des universités états-uniennes, en les étendant aux rapports entre anglophones et francophones. Au reste, la cible déclarée du texte, qui privilégie plutôt l’allusion et se garde habilement de nommer, reste la “cancel culture” aux mains des “assassins de la mémoire”. On observera qu’il n’est nulle part question de “wokes”, de décolonialisme ou d’antiracisme par exemple. D’un “militantisme délétère” (mais lequel, exactement ?) on passe enfin aux dangers de la “radicalisation”, dans laquelle chacun mettra ce qu’il veut bien y entendre, des extrémismes politiques (national-populisme, alt-right, néo-nazisme, etc.) et des fondamentalismes religieux. Pour finir, la résistance aux formes actuelles de “l’obscurantisme” est l’occasion de revaloriser le rôle de l’éducation au sein des démocraties. Elle est aussi un moyen de renouer avec l’héritage rationaliste des Lumières. Mais les deux ministres retombent dans le piège civilisationniste, qui consiste à arrimer - sans sourciller devant la contradiction - les “valeurs universelles” à “nos sociétés occidentales”. Le marqueur identitaire “nos” est capital dans le texte. Il efface d’un même geste les peuples autochtones qui étaient mentionnés au début de l’article, comme s’ils ne faisaient pas partie, notamment pour le Québec, de cette “mémoire” que les deux auteurs appellent justement à défendre, ou comme s’ils étaient d’emblée assimilés et assimilables à cette vision occidentale ? De lui-même, l’article s’expose ici à la critique décoloniale, particulièrement répandue sur les campus nord-américains, celle-là même qu’il voudrait récuser. Qu’on en accepte ou non les prémisses, cette critique ne peut pas être non plus passée sous silence. Il faut s’y confronter. Car elle a au moins cette vertu de rappeler que l’héritage des Lumières ne va pas sans failles. On a le droit d’en rejeter les diverses formulations, mais il convient dans ce cas de les discuter. Car elles nous obligent à penser ensemble - et autrement - les termes du problème ici posé : universalité, communauté et diversité.

    10. La forme d’un « énoncé » encadrant la liberté académique et adopté par le parlement québécois vous semble-t-elle un bon compromis politique ? Pourquoi le soutenir plutôt qu’une loi ? Un énoncé national de référence, laissant chaque établissement en disposer librement, aura-t-il une véritable efficacité ?

    Isabelle Arseneau. Au moment de la rédaction de notre mémoire, les choses nous semblaient sans doute un peu moins urgentes que depuis la publication des résultats de la collecte d’informations réalisée par la Commission indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique en contexte universitaire. Les chiffres publiés en septembre dernier confirment ce que nous avons remarqué sur le terrain et ce que suggéraient déjà les mémoires, les témoignages et les avis d’experts récoltés dans le cadre des travaux des commissaires : nous avons affaire à un problème significatif plutôt qu’à un épiphénomène surmédiatisé (comme on a pu l’entendre dire). Les résultats colligés reflètent cependant un phénomène encore plus généralisé que ce que l’on imaginait et d’une ampleur que, pour ma part, je sous-estimais.

    Dans le contexte d’une situation sérieuse mais non encore critique, l’idée d’un énoncé m’a donc toujours semblé plus séduisante (et modérée !) que celle d’une politique nationale, qui ouvrirait la porte à l’ingérence de l’État dans les affaires universitaires. Or que faire des universités qui ne font plus leurs devoirs ? L’« énoncé sur la liberté universitaire » de l’Université McGill, qui protège les chercheurs des « contraintes de la rectitude politique », ne nous a été d’aucune utilité à l’automne 2020. Comment contraindre notre institution à respecter les règles du jeu dont elle s’est elle-même dotée ? Nous osons croire qu’un énoncé national, le plus ouvert et le plus généreux possible, pourrait aider les établissements comme le nôtre à surmonter certaines difficultés internes. Mais nous sommes de plus en plus conscients qu’il faudra sans doute se doter un jour de mécanismes plus concrets qu’un énoncé non contraignant.

    Arnaud Bernadet. Nous avons eu de longues discussions à ce sujet, et elles ne sont probablement pas terminées. C’est un point de divergence entre nous. Bien entendu, on peut se ranger derrière la solution modérée comme on l’a d’abord fait. Malgré tout, je persiste à croire qu’une loi aurait plus de poids et d’efficience qu’un énoncé. L’intervention de l’État est nécessaire dans le cas présent, et me semble ici le contraire même de l’ingérence. Une démocratie digne de ce nom doit veiller à garantir les libertés publiques qui en sont au fondement. Or, en ce domaine, la liberté académique est précieuse. Ce qui a lieu sur les campus est exceptionnel, cela ne se passe nulle part ailleurs dans la société : la quête de la vérité, la dynamique contradictoire des points de vue, l’expression critique et l’émancipation des esprits. Je rappellerai qu’inscrire le principe de la liberté académique dans la loi est aussi le vœu exprimé par la Fédération Québécoise des Professeures et Professeurs d’Université. Actuellement, un tel principe figure plutôt au titre du droit contractuel, c’est-à-dire dans les conventions collectives des établissements québécois (quand celles-ci existent !) Une loi remettrait donc à niveau les universités de la province, elle préviendrait toute espèce d’inégalité de traitement d’une institution à l’autre. Elle comblerait la carence dont on parlait tout à l’heure, qui remonte à la Révolution tranquille. Elle renforcerait finalement l’autonomie des universités au lieu de la fragiliser. Ce serait aussi l’occasion pour le Québec de réaffirmer clairement ses prérogatives en matière éducative contre les ingérences - bien réelles celles-là - du pouvoir fédéral qui tend de plus en plus à imposer sa vision pancanadienne au mépris des particularités francophones. Enfin, ne nous leurrons pas : il n’y a aucune raison objective pour que les incidents qui se sont multipliés en Amérique du Nord depuis une dizaine d’années, et qui nourrissent de tous bords - on vient de le voir - de nombreux combats voire dérives idéologiques, cessent tout à coup. La loi doit pouvoir protéger les fonctions et les missions des universités québécoises, à ce jour de plus en plus perturbées.

    Entretien réalisé par écrit au mois d’octobre 2021

    Notes :

    1. Isabelle Hachey, « Le clientélisme, c’est ça » (La Presse, 22.02.2021)

    2. Jean-François Nadeau, « La censure contamine les milieux universitaires » (Le Devoir, 01.04.2017)

    3. Isabelle Arseneau et Arnaud Bernadet, « Universités : censure et liberté » (La Presse, 15.12.2020) ; « Les dérives éthiques de l’esprit gestionnaire » (La Presse, 29.02.2021) ; « Université McGill : une politique du déni » (La Presse, 26.02.2021).

    4. « Rapport de la Mission du recteur sur la liberté d’expression en contexte universitaire », juin 2021 : https://www.umontreal.ca/public/www/images/missiondurecteur/Rapport-Mission-juin2021.pdf

    https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/211021/liberte-academique-et-justice-sociale

    #ESR

    ping @karine4 @_kg_ @isskein

    –-

    ajouté à la métaliste autour du terme l’#islamo-gauchisme... mais aussi du #woke et du #wokisme, #cancel_culture, etc.
    https://seenthis.net/messages/943271

    • La liberté académique aux prises avec de nouvelles #menaces

      Colloques, séminaires, publications (Duclos et Fjeld, Frangville et alii) : depuis quelques années, et avec une accélération notoire ces derniers mois, le thème de la liberté académique est de plus en plus exploré comme objet scientifique. La liberté académique suscite d’autant plus l’intérêt des chercheurs qu’elle est aujourd’hui, en de nombreux endroits du monde, fragilisée.

      La création en 2021 par l’#Open_Society_University_Network (un partenariat entre la Central European University et le Bard College à New York) d’un #Observatoire_mondial_des_libertés_académiques atteste d’une inquiétante réalité. C’est en effet au moment où des libertés sont fragilisées qu’advient le besoin d’en analyser les fondements, d’en explorer les définitions, de les ériger en objets de recherche, mais aussi de mettre en œuvre un système de veille pour les protéger.

      S’il est évident que les #régimes_autoritaires sont par définition des ennemis des libertés académiques, ce qui arrive aujourd’hui dans des #pays_démocratiques témoigne de pratiques qui transcendent les frontières entre #régime_autoritaire et #régime_démocratique, frontières qui elles-mêmes tendent à se brouiller.

      La liberté académique menacée dans les pays autoritaires…

      S’appuyant sur une régulation par les pairs (la « communauté des compétents ») et une indépendance structurelle par rapport aux pouvoirs, la liberté de recherche, d’enseignement et d’opinion favorise la critique autant qu’elle en est l’expression et l’émanation. Elle est la condition d’une pensée féconde qui progresse par le débat, la confrontation d’idées, de paradigmes, d’axiomes, d’expériences.

      Cette liberté dérange en contextes autoritaires, où tout un répertoire d’actions s’offre aux gouvernements pour museler les académiques : outre l’emprisonnement pur et simple, dont sont victimes des collègues – on pense notamment à #Fariba_Adelkhah, prisonnière scientifique en #Iran ; à #Ahmadreza_Djalali, condamné à mort en Iran ; à #Ilham_Tohti, dont on est sans nouvelles depuis sa condamnation à perpétuité en# Chine, et à des dizaines d’autres académiques ouïghours disparus ou emprisonnés sans procès ; à #Iouri_Dmitriev, condamné à treize ans de détention en #Russie –, les régimes autoritaires mettent en œuvre #poursuites_judiciaires et #criminalisation, #licenciements_abusifs, #harcèlement, #surveillance et #intimidation.


      https://twitter.com/AnkyraWitch/status/1359630006993977348

      L’historien turc Candan Badem parlait en 2017 d’#académicide pour qualifier la vague de #répression qui s’abattait dans son pays sur les « universitaires pour la paix », criminalisés pour avoir signé une pétition pour la paix dans les régions kurdes. La notion de « #crime_contre_l’histoire », forgée par l’historien Antoon de Baets, a été reprise en 2021 par la FIDH et l’historien Grigori Vaïpan) pour qualifier les atteintes portées à l’histoire et aux historiens en Russie. Ce crime contre l’histoire en Russie s’amplifie avec les attaques récentes contre l’ONG #Memorial menacée de dissolution.

      En effet, loin d’être l’apanage des institutions académiques officielles, la liberté académique et de recherche, d’une grande rigueur, se déploie parfois de façon plus inventive et courageuse dans des structures de la #société_civile. En #Biélorussie, le sort de #Tatiana_Kuzina, comme celui d’#Artiom_Boyarski, jeune chimiste talentueux emprisonné pour avoir refusé publiquement une bourse du nom du président Loukachenko, ne sont que deux exemples parmi des dizaines et des dizaines de chercheurs menacés, dont une grande partie a déjà pris le chemin de l’exil depuis l’intensification des répressions après les élections d’août 2020 et la mobilisation qui s’en est suivie.

      La liste ci-dessus n’est bien sûr pas exhaustive, les cas étant nombreux dans bien des pays – on pense, par exemple, à celui de #Saïd_Djabelkhir en #Algérie.

      … mais aussi dans les #démocraties

      Les #régressions que l’on observe au sein même de l’Union européenne – le cas du déménagement forcé de la #Central_European_University de Budapest vers Vienne, sous la pression du gouvernement de Viktor Orban, en est un exemple criant – montrent que les dérives anti-démocratiques se déclinent dans le champ académique, après que d’autres libertés – liberté de la presse, autonomie de la société civile – ont été atteintes.

      Les pays considérés comme démocratiques ne sont pas épargnés non plus par les tentatives des autorités politiques de peser sur les recherches académiques. Récemment, en #France, les ministres de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur ont affirmé que le monde académique serait « ravagé par l’#islamo-gauchisme » et irrespectueux des « #valeurs_de_la_République » – des attaques qui ont provoqué un concert de protestations au sein de la communauté des chercheurs. En France toujours, de nombreux historiens se sont mobilisés en 2020 contre les modalités d’application d’une instruction interministérielle restreignant l’accès à des fonds d’#archives sur l’#histoire_coloniale, en contradiction avec une loi de 2008.


      https://twitter.com/VivementLundi/status/1355564397314387972

      Au #Danemark, en juin 2021, plus de 260 universitaires spécialistes des questions migratoires et de genre rapportaient quant à eux dans un communiqué public les intimidations croissantes subies pour leurs recherches qualifiées de « #gauchisme_identitaire » et de « #pseudo-science » par des députés les accusant de « déguiser la politique en science ».

      D’autres offensives peuvent être menées de façon plus sournoise, à la faveur de #politiques_néolibérales assumées et de mise en #concurrence des universités et donc du champ du savoir et de la pensée. La conjonction de #logiques_libérales sur le plan économique et autoritaires sur le plan politique conduit à la multiplication de politiques souvent largement assumées par les États eux-mêmes : accréditations sélectives, retrait de #financements à des universités ou à certains programmes – les objets plus récents et fragiles comme les #études_de_genre ou études sur les #migrations se trouvant souvent en première ligne.

      Ce brouillage entre régimes politiques, conjugué à la #marchandisation_du_savoir, trouve également à s’incarner dans la façon dont des acteurs issus de régimes autoritaires viennent s’installer au sein du monde démocratique : c’est le cas notamment de la Chine avec l’implantation d’#Instituts_Confucius au cœur même des universités, qui conduisent, dans certains cas, à des logiques d’#autocensure ; ou de l’afflux d’étudiants fortunés en provenance de pays autoritaires, qui par leurs frais d’inscriptions très élevés renflouent les caisses d’universités désargentées, comme en Australie.

      Ces logiques de #dépendance_financière obèrent l’essence et la condition même de la #recherche_académique : son #indépendance. Plus généralement, la #marchandisation de l’#enseignement_supérieur, conséquence de son #sous-financement public, menace l’#intégrité_scientifique de chercheurs et d’universités de plus en plus poussées à se tourner vers des fonds privés.

      La mobilisation de la communauté universitaire

      Il y a donc là une combinaison d’attaques protéiformes, à l’aune des changements politiques, technologiques, économiques et financiers qui modifient en profondeur les modalités du travail. La mise en place de programmes de solidarité à destination de chercheurs en danger (#PAUSE, #bourses_Philipp_Schwartz en Allemagne, #bourses de solidarité à l’Université libre de Bruxelles), l’existence d’organisations visant à documenter les attaques exercées sur des chercheurs #Scholars_at_Risk, #International_Rescue_Fund, #CARA et la création de ce tout nouvel observatoire mondial des libertés académiques évoqué plus haut montrent que la communauté académique a pris conscience du danger. Puissent du fond de sa prison résonner les mots de l’historien Iouri Dmitriev : « Les libertés académiques, jamais, ne deviendront une notion abstraite. »

      https://theconversation.com/la-liberte-academique-aux-prises-avec-de-nouvelles-menaces-171682

    • « #Wokisme » : un « #front_républicain » contre l’éveil aux #injustices

      CHRONIQUE DE LA #BATAILLE_CULTURELLE. L’usage du mot « wokisme » vise à disqualifier son adversaire, mais aussi à entretenir un #déni : l’absence de volonté politique à prendre au sérieux les demandes d’#égalité, de #justice, de respect des #droits_humains.

      Invoqué ad nauseam, le « wokisme » a fait irruption dans un débat public déjà singulièrement dégradé. Il a fait florès à l’ère du buzz et des clashs, rejoignant l’« #islamogauchisme » au registre de ces fameux mots fourre-tout dont la principale fonction est de dénigrer et disqualifier son adversaire, tout en réduisant les maux de la société à quelques syllabes magiques. Sur la scène politique et intellectuelle, le « wokisme » a même réussi là où la menace de l’#extrême_droite a échoué : la formation d’un « front républicain ». Mais pas n’importe quel front républicain…

      Formellement, les racines du « wokisme » renvoient à l’idée d’« #éveil » aux #injustices, aux #inégalités et autres #discriminations subies par les minorités, qu’elles soient sexuelles, ethniques ou religieuses. Comment cet « éveil » a-t-il mué en une sorte d’#injure_publique constitutive d’une #menace existentielle pour la République ?

      Si le terme « woke » est historiquement lié à la lutte des #Afro-Américains pour les #droits_civiques, il se trouve désormais au cœur de mobilisations d’une jeunesse militante animée par les causes féministes et antiracistes. Ces mobilisations traduisent en acte l’#intersectionnalité théorisée par #Kimberlé_Williams_Crenshaw*, mais le recours à certains procédés ou techniques est perçu comme une atteinte à la #liberté_d’expression (avec les appels à la #censure d’une œuvre, à l’annulation d’une exposition ou d’une représentation, au déboulonnage d’une statue, etc.) ou à l’égalité (avec les « réunions non mixtes choisies et temporaires » restreignant l’accès à celles-ci à certaines catégories de personnes partageant un même problème, une même discrimination). Le débat autour de ces pratiques est complexe et légitime. Mais parler en France du développement d’une « cancel culture » qu’elles sont censées symboliser est abusif, tant elles demeurent extrêmement marginales dans les sphères universitaires et artistiques. Leur nombre comme leur diffusion sont inversement proportionnels à leur écho politico-médiatique. D’où provient ce contraste ou décalage ?

      Une rupture du contrat social

      En réalité, au-delà de la critique/condamnation du phénomène « woke », la crispation radicale qu’il suscite dans l’hexagone puise ses racines dans une absence de volonté politique à prendre au sérieux les demandes d’égalité, de justice, de respect des droits humains. Un défaut d’écoute et de volonté qui se nourrit lui-même d’un mécanisme de déni, à savoir un mécanisme de défense face à une réalité insupportable, difficile à assumer intellectuellement et politiquement.

      D’un côté, une série de rapports publics et d’études universitaires** pointent la prégnance des inégalités et des discriminations à l’embauche, au logement, au contrôle policier ou même à l’école. Non seulement les discriminations sapent le sentiment d’appartenance à la communauté nationale, mais la reproduction des inégalités est en partie liée à la reproduction des discriminations.

      De l’autre, le déni et l’#inaction perdurent face à ces problèmes systémiques. Il n’existe pas de véritable politique publique de lutte contre les discriminations à l’échelle nationale. L’État n’a pas engagé de programme spécifique qui ciblerait des axes prioritaires et se déclinerait aux différents niveaux de l’action publique.

      L’appel à l’« éveil » est un appel à la prise de conscience d’une rupture consommée de notre contrat social. La réalité implacable d’inégalités et de discriminations criantes nourrit en effet une #citoyenneté à plusieurs vitesses qui contredit les termes du récit/#pacte_républicain, celui d’une promesse d’égalité et d’#émancipation.

      Que l’objet si mal identifié que représente le « wokisme » soit fustigé par la droite et l’extrême-droite n’a rien de surprenant : la lutte contre les #logiques_de_domination ne fait partie ni de leur corpus idéologique ni de leur agenda programmatique. En revanche, il est plus significatif qu’une large partie de la gauche se détourne des questions de l’égalité et de la #lutte_contre_les_discriminations, pour mieux se mobiliser contre tout ce qui peut apparaître comme une menace contre un « #universalisme_républicain » aussi abstrait que déconnecté des réalités vécues par cette jeunesse française engagée en faveur de ces causes.

      Les polémiques autour du « wokisme » contribuent ainsi à forger cet arc politique et intellectuel qui atteste la convergence, voire la jonction de deux blocs conservateurs, « de droite » et « de gauche », unis dans un même « front républicain », dans un même déni des maux d’une société d’inégaux.

      https://www.nouvelobs.com/idees/20210928.OBS49202/wokisme-un-front-republicain-contre-l-eveil-aux-injustices.html

      #récit_républicain

    • « Le mot “#woke” a été transformé en instrument d’occultation des discriminations raciales »

      Pour le sociologue #Alain_Policar, le « wokisme » désigne désormais péjorativement ceux qui sont engagés dans des courants politiques qui se réclament pourtant de l’approfondissement des principes démocratiques.

      Faut-il rompre avec le principe de « #color_blindness » (« indifférence à la couleur ») au fondement de l’#égalitarisme_libéral ? Ce principe, rappelons-le, accompagne la philosophie individualiste et contractualiste à laquelle adhèrent les #démocraties. Or, en prenant en considération des pratiques par lesquelles des catégories fondées sur des étiquettes « raciales » subsistent dans les sociétés postcolonialistes, on affirme l’existence d’un ordre politico-juridique au sein duquel la « #race » reste un principe de vision et de division du monde social.

      Comme l’écrit #Stéphane_Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, « la République a un problème avec le #corps des individus, elle ne sait que faire de ces #différences_physiques, de ces couleurs multiples, de ces #orientations diverses, parce qu’elle a affirmé que pour traiter chacun et chacune également elle devait être #aveugle » ( Le Monde du 7 avril).

      Dès lors, ignorer cette #réalité, rester indifférent à la #couleur, n’est-ce pas consentir à la perpétuation des injustices ? C’est ce consentement qui s’exprime dans l’opération idéologique d’appropriation d’un mot, « woke », pour le transformer en instrument d’occultation de la réalité des discriminations fondées sur la couleur de peau. Désormais le wokisme désigne péjorativement ceux qui sont engagés dans les luttes antiracistes, féministes, LGBT ou même écologistes. Il ne se caractérise pas par son contenu, mais par sa fonction, à savoir, selon un article récent de l’agrégé de philosophie Valentin Denis sur le site AOC , « stigmatiser des courants politiques souvent incommensurables tout en évitant de se demander ce qu’ils ont à dire . Ces courants politiques, pourtant, ne réclament-ils pas en définitive l’approfondissement des #principes_démocratiques ?

      Une #justice_corrective

      Parmi les moyens de cet approfondissement, l’ affirmative action (« #action_compensatoire »), en tant qu’expression d’une justice corrective fondée sur la #reconnaissance des #torts subis par le passé et, bien souvent, qui restent encore vifs dans le présent, est suspectée de substituer le #multiculturalisme_normatif au #modèle_républicain d’#intégration. Ces mesures correctives seraient, lit-on souvent, une remise en cause radicale du #mérite_individuel. Mais cet argument est extrêmement faible : est-il cohérent d’invoquer la #justice_sociale (dont les antiwokedisent se préoccuper) et, en même temps, de valoriser le #mérite ? L’appréciation de celui-ci n’est-elle pas liée à l’#utilité_sociale accordée à un ensemble de #performances dont la réalisation dépend d’#atouts (en particulier, un milieu familial favorable) distribués de façon moralement arbitraire ? La justice sociale exige, en réalité, que ce qui dépend des circonstances, et non des choix, soit compensé.

      Percevoir et dénoncer les mécanismes qui maintiennent les hiérarchies héritées de l’#ordre_colonial constitue l’étape nécessaire à la reconnaissance du lien entre cet ordre et la persistance d’un #racisme_quotidien. Il est important (même si le concept de « #racisme_systémique », appliqué à nos sociétés contemporaines, est décrit comme une « fable » par certains auteurs, égarés par les passions idéologiques qu’ils dénoncent chez leurs adversaires) d’admettre l’idée que, même si les agents sont dépourvus de #préjugés_racistes, la discrimination fonctionne. En quelque sorte, on peut avoir du #racisme_sans_racistes, comme l’a montré Eduardo Bonilla-Silva dans son livre de 2003, Racism without Racists [Rowman & Littlefield Publishers, non traduit] . Cet auteur avait, en 1997, publié un article canonique sur le #racisme_institutionnel dans lequel il rejetait, en se réclamant du psychiatre et essayiste Frantz Fanon [1925-1961], les approches du racisme « comme une #bizarrerie_mentale, comme une #faille_psychologique » .

      Le reflet de pratiques structurelles

      En fait, les institutions peuvent être racialement oppressives, même sans qu’aucun individu ou aucun groupe ne puisse être tenu pour responsable du tort subi. Cette importante idée avait déjà été exprimée par William E. B. Du Bois dans Pénombre de l’aube. Essai d’autobiographie d’un concept de race (1940, traduit chez Vendémiaire, 2020), ouvrage dans lequel il décrivait le racisme comme un #ordre_structurel, intériorisé par les individus et ne dépendant pas seulement de la mauvaise volonté de quelques-uns. On a pu reprocher à ces analyses d’essentialiser les Blancs, de leur attribuer une sorte de #racisme_ontologique, alors qu’elles mettent au jour les #préjugés produits par l’ignorance ou le déni historique.

      On comprend, par conséquent, qu’il est essentiel de ne pas confondre, d’une part, l’expression des #émotions, de la #colère, du #ressentiment, et, d’autre part, les discriminations, par exemple à l’embauche ou au logement, lesquelles sont le reflet de #pratiques_structurelles concrètes. Le racisme est avant tout un rapport social, un #système_de_domination qui s’exerce sur des groupes racisés par le groupe racisant. Il doit être appréhendé du point de vue de ses effets sur l’ensemble de la société, et non seulement à travers ses expressions les plus violentes.

      #Alexis_de_Tocqueville avait parfaitement décrit cette réalité [dans De la démocratie en Amérique, 1835 et 1840] en évoquant la nécessaire destruction, une fois l’esclavage aboli, de trois préjugés, qu’il disait être « bien plus insaisissables et plus tenaces que lui : le préjugé du maître, le préjugé de race, et enfin le préjugé du Blanc . Et il ajoutait : « J’aperçois l’#esclavage qui recule ; le préjugé qu’il a fait naître est immobile. » Ce #préjugé_de_race était, écrivait-il encore, « plus fort dans les Etats qui ont aboli l’esclavage que dans ceux où il existe encore, et nulle part il ne se montre aussi intolérant que dans les Etats où la servitude a toujours été inconnue . Tocqueville serait-il un militant woke ?

      Note(s) :

      Alain Policar est sociologue au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof). Dernier livre paru : « L’Universalisme en procès » (Le Bord de l’eau, 160p., 16 euros)

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/28/alain-policar-le-mot-woke-a-ete-transforme-en-instrument-d-occultation-des-d

      #WEB_Du_Bois

      signalé par @colporteur ici :
      https://seenthis.net/messages/941602

    • L’agitation de la chimère « wokisme » ou l’empêchement du débat

      Wokisme est un néologisme malin : employé comme nom, il suggère l’existence d’un mouvement homogène et cohérent, constitué autour d’une prétendue « idéologie woke ». Ou comment stigmatiser des courants politiques progressistes pour mieux détourner le regard des discriminations que ceux-ci dénoncent. D’un point de vue rhétorique, le terme produit une version totalement caricaturée d’un adversaire fantasmé.

      (#paywall)
      https://aoc.media/opinion/2021/11/25/lagitation-de-la-chimere-wokisme-ou-lempechement-du-debat

    • Europe’s War on Woke

      Why elites across the Atlantic are freaking out about the concept of structural racism.

      On my 32nd birthday, I agreed to appear on Répliques, a popular show on the France Culture radio channel hosted by the illustrious Alain Finkielkraut. Now 72 and a household name in France, Finkielkraut is a public intellectual of the variety that exists only on the Left Bank: a child of 1968 who now wears Loro Piana blazers and rails against “la cancel culture.” The other guest that day—January 9, less than 72 hours after the US Capitol insurrection—was Pascal Bruckner, 72, another well-known French writer who’d just published “The Almost Perfect Culprit: The Construction of the White Scapegoat,” his latest of many essays on this theme. Happy birthday to me.

      The topic of our discussion was the only one that interested the French elite in January 2021: not the raging pandemic but “the Franco-American divide,” the Huntington-esque clash of two apparently great civilizations and their respective social models—one “universalist,” one “communitarian”—on the question of race and identity politics. To Finkielkraut, Bruckner, and the establishment they still represent, American writers like me seek to impose a “woke” agenda on an otherwise harmonious, egalitarian society. Americans who argue for social justice are guilty of “cultural imperialism,” of ideological projection—even of bad faith.

      This has become a refrain not merely in France but across Europe. To be sure, the terms of this social-media-fueled debate are unmistakably American; “woke” and “cancel culture” could emerge from no other context. But in the United States, these terms have a particular valence that mostly has to do with the push for racial equality and against systemic racism. In Europe, what is labeled “woke” is often whatever social movement a particular country’s establishment fears the most. This turns out to be an ideal way of discrediting those movements: To call them “woke” is to call them American, and to call them American is to say they don’t apply to Europe.

      In France, “wokeism” came to the fore in response to a recent slew of terror attacks, most notably the gruesome beheading in October 2020 of the schoolteacher Samuel Paty. After years of similar Islamist attacks—notably the massacre at the offices of the newspaper Charlie Hebdo in January 2015 and the ISIS-inspired assaults on the Hypercacher kosher supermarket and the Bataclan concert hall in November 2015—the reaction in France reached a tipping point. Emmanuel Macron’s government had already launched a campaign against what it calls “Islamist separatism,” but Paty’s killing saw a conversation about understandable trauma degenerate into public hysteria. The government launched a full-scale culture war, fomenting its own American-style psychodrama while purporting to do the opposite. Soon its ministers began railing against “islamo-gauchisme” (Islamo-leftism) in universities, Muslim mothers in hijabs chaperoning school field trips, and halal meats in supermarkets.

      But most of all, they began railing against the ideas that, in their view, somehow augmented and abetted these divisions: American-inspired anti-racism and “wokeness.” Macron said it himself in a speech that was widely praised by the French establishment for its alleged nuance: “We have left the intellectual debate to others, to those outside of the Republic, by ideologizing it, sometimes yielding to other academic traditions…. I see certain social science theories entirely imported from the United States.” In October, the French government inaugurated a think tank, the Laboratoire de la République, designed to combat these “woke” theories, which, according to the think tank’s founder, Jean-Michel Blanquer, Macron’s education minister, “led to the rise of Donald Trump.”

      As the apparent emissaries of this pernicious “Anglo-Saxon” identitarian agenda, US journalists covering this moment in France have come under the spotlight, especially when we ask, for instance, what islamo-gauchisme actually means—if indeed it means anything at all. Macron himself has lashed out at foreign journalists, even sending a letter to the editor of the Financial Times rebutting what he saw as an error-ridden op-ed that took a stance he could not bear. “I will not allow anybody to claim that France, or its government, is fostering racism against Muslims,” he wrote. Hence my own invitation to appear on France Culture, a kind of voir dire before the entire nation.

      Finkielkraut began the segment with a tirade against The New York Times and then began discussing US “campus culture,” mentioning Yale’s Tim Barringer and an art history syllabus that no longer includes as many “dead white males.” Eventually I asked how, three days after January 6, we could discuss the United States without mentioning the violent insurrection that had just taken place at the seat of American democracy. Finkielkraut became agitated. “And for you also, [what about] the fact that in the American Congress, Emanuel Cleaver, representative of Missouri, presiding over a new inauguration ceremony, finished by saying the words ‘amen and a-women’?” he asked. “Ça vous dérangez pas?” I said it didn’t bother me in the least, and he got even more agitated. “I don’t understand what you say, James McAuley, because cancel culture exists! It exists!”

      The man knew what he was talking about: Three days after our conversation, Finkielkraut was dropped from a regular gig at France’s LCI television for defending his old pal Olivier Duhamel of Sciences Po, who was embroiled in a pedophilia scandal that had taken France by storm. Duhamel was accused by his stepdaughter, Camille Kouchener, of raping her twin brother when the two were in their early teens. Finkielkraut speculated that there may have been consent between the two parties, and, in any case, a 14-year-old was “not the same thing” as a child.

      I tell this story because it is a useful encapsulation of France’s—and Europe’s—war on woke, a conflict that has assumed various forms in different national contexts but that still grips the continent. On one level, there is a certain comedy to it: The self-professed classical liberal turns out to be an apologist for child molestation. In fact, the anti-woke comedy is now quite literally being written and directed by actual comedians who, on this one issue, seem incapable of anything but earnestness. John Cleese, 81, the face of Monty Python and a public supporter of Brexit, has announced that he will be directing a forthcoming documentary series on Britain’s Channel 4 titled Cancel Me, which will feature extensive interviews with people who have been “canceled”—although no one connected with the show has specified what exactly the word means.

      Indeed, the terms of this debate are an insult to collective intelligence. But if we must use them, we need to understand an important distinction between what is called “cancel culture” and what is called “woke.” The former has been around much longer and refers to tactics that are used across the political spectrum, but historically by those on the right. “Cancel culture” is not the result of an increased awareness of racial disparities or a greater commitment to social justice broadly conceived—both of which are more urgent than ever—but rather a terrible and inevitable consequence of life with the Internet. Hardly anyone can support “cancel culture” in good faith, and yet it is never sufficiently condemned, because people call out such tactics only when their political opponents use them, never when their allies do. “Woke,” on the other hand, does not necessarily imply public shaming; it merely signifies a shift in perspective and perhaps a change in behavior. Carelessly equating the two is a convenient way to brand social justice activism as inherently illiberal—and to silence long-overdue conversations about race and inequality that far too many otherwise reasonable people find personally threatening.

      But Europe is not America, and in Europe there have been far fewer incidents that could be construed as “cancellations”—again, I feel stupid even using the word—than in the United States. “Wokeism” is really a phenomenon of the Anglosphere, and with the exception of the United Kingdom, the social justice movement has gained far less traction in Europe than it has in US cultural institutions—newspapers, universities, museums, and foundations. In terms of race and identity, many European cultural institutions would have been seen as woefully behind the times by their US counterparts even before the so-called “great awokening.” Yet Europe has gone fully anti-woke, even without much wokeness to fight.

      So much of Europe’s anti-woke movement has focused on opposing and attempting to refute allegations of “institutional” or “structural” racism. Yet despite the 20th-century continental origins of structuralism (especially in France) as a mode of social analysis—not to mention the Francophone writers who have shaped the way American thinkers conceive of race—many European elites dismiss these critiques as unwelcome intrusions into the public discourse that project the preoccupations of a nation built on slavery (and thus understandably obsessed with race) onto societies that are vastly different. Europe, they insist, has a different history, one in which race—especially in the form of the simple binary opposition of Black and white—plays a less central role. There is, of course, some truth to this rejoinder: Different countries do indeed have different histories and different debates. But when Europeans accuse their American critics of projection, they do so not to point out the very real divergences in the US and European discussions and even conceptions of race and racism. Rather, the charge is typically meant to stifle the discussion altogether—even when that discussion is being led by European citizens describing their own lived experiences.

      France, where I reside, proudly sees itself as a “universalist” republic of equal citizens that officially recognizes no differences among them. Indeed, since 1978, it has been illegal to collect statistics on race, ethnicity, or religion—a policy that is largely a response to what happened during the Second World War, when authorities singled out Jewish citizens to be deported to Nazi concentration camps. The French view is that such categories should play no role in public life, that the only community that counts is the national community. To be anti-woke, then, is to be seen as a discerning thinker, one who can rise above crude, reductive identity categories.

      The reality of daily life in France is anything but universalist. The French state does indeed make racial distinctions among citizens, particularly in the realm of policing. The prevalence of police identity checks in France, which stem from a 1993 law intended to curb illegal immigration, is a perennial source of controversy. They disproportionately target Black and Arab men, which is one reason the killing of George Floyd resonated so strongly here. Last summer I spoke to Jacques Toubon, a former conservative politician who was then serving as the French government’s civil liberties ombudsman (he is now retired). Toubon was honest in his assessment: “Our thesis, our values, our rules—constitutional, etc.—they are universalist,” he said. “They do not recognize difference. But there is a tension between this and the reality.”

      One of the most jarring examples of this tension came in November 2020, when Sarah El Haïry, Macron’s youth minister, traveled to Poitiers to discuss the question of religion in society at a local high school. By and large, the students—many of whom were people of color—asked very thoughtful questions. One of them, Emilie, 16, said that she didn’t see the recognition of religious or ethnic differences as divisive. “Just because you are a Christian or a Muslim does not represent a threat to society,” she said. “For me, diversity is an opportunity.” These and similar remarks did not sit well with El Haïry, who nonetheless kept her cool until another student asked about police brutality. At that point, El Haïry got up from her chair and interrupted the student. “You have to love the police, because they are there to protect us on a daily basis,” she said. “They cannot be racist because they are republican!”

      For El Haïry, to question such assumptions would be to question something foundational and profound about the way France understands itself. The problem is that more and more French citizens are doing just that, especially young people like the students in Poitiers, and the government seems utterly incapable of responding.

      Although there is no official data to this effect—again, because of universalist ideology—France is estimated to be the most ethnically diverse society in Western Europe. It is home to large North African, West African, Southeast Asian, and Caribbean populations, and it has the largest Muslim and Jewish communities on the continent. By any objective measure, that makes France a multicultural society—but this reality apparently cannot be admitted or understood.

      Macron, who has done far more than any previous French president to recognize the lived experiences and historical traumas of various minority groups, seems to be aware of this blind spot, but he stops short of acknowledging it. Earlier this year, I attended a roundtable discussion with Macron and a small group of other Anglophone correspondents. One thing he said during that interview has stuck with me: “Universalism is not, in my eyes, a doctrine of assimilation—not at all. It is not the negation of differences…. I believe in plurality in universalism, but that is to say, whatever our differences, our citizenship makes us build a universal together.” This is simply the definition of a multicultural society, an outline of the Anglo-Saxon social model otherwise so despised in France.

      Europe’s reaction to the brutal killing of George Floyd in may 2020 was fascinating to observe. The initial shock at the terrifyingly mundane horrors of US life quickly gave way to protest movements that decried police brutality and the unaddressed legacy of Europe’s colonial past. This was when the question of structural racism entered the conversation. In Britain, Prime Minister Boris Johnson responded to the massive protests throughout the country by establishing the Commission on Race and Ethnic Disparities, an independent group charged with investigating the reality of discrimination and coming up with proposals for rectifying racial disparities in public institutions. The commission’s report, published in April 2021, heralded Britain as “a model for other White-majority countries” on racial issues and devoted three pages to the problems with the language of “structural racism.”

      One big problem with this language, the report implied, is that “structural racism” is a feeling, and feelings are not facts. “References to ‘systemic’, ‘institutional’ or ‘structural racism’ may relate to specific processes which can be identified, but they can also relate to the feeling described by many ethnic minorities of ‘not belonging,’” the report said. “There is certainly a class of actions, behaviours and incidents at the organisational level which cause ethnic minorities to lack a sense of belonging. This is often informally expressed as feeling ‘othered.’” But even that modest concession was immediately qualified. “However, as with hate incidents, this can have a highly subjective dimension for those tasked with investigating the claim.” Finally, the report concluded, the terms in question were inherently extreme. “Terms like ‘structural racism’ have roots in a critique of capitalism, which states that racism is inextricably linked to capitalism. So by that definition, until that system is abolished racism will flourish.”

      The effect of these language games is simply to limit the terms available to describe a phenomenon that indeed exists. Because structural racism is not some progressive shibboleth: It kills people, which need not be controversial or even political to admit. For one recent example in the UK, look no further than Covid-19 deaths. The nation’s Office for National Statistics concluded that Black citizens were more than four times as likely to die of Covid as white citizens, while British citizens of Bangladeshi and Pakistani heritage were more than three times as likely to die. These disparities were present even among health workers directly employed by the state: Of the National Health Service clinical staff who succumbed to the virus, a staggering 60 percent were “BAME”—Black, Asian, or minority ethnic, a term that the government’s report deemed “no longer helpful” and “demeaning.” Beyond Covid-19, reports show that Black British women are more than four times as likely to die in pregnancy or childbirth as their white counterparts; British women of an Asian ethnic background die at twice the rate of white women.

      In the countries of Europe as in the United States, the battle over “woke” ideas is also a battle over each nation’s history—how it is written, how it is taught, how it is understood.

      Perhaps nowhere is this more acutely felt than in Britain, where the inescapable legacy of empire has become the center of an increasingly acrimonious public debate. Of particular note has been the furor over how to think about Winston Churchill, who remains something of a national avatar. In September, the Winston Churchill Memorial Trust renamed itself the Churchill Fellowship, removed certain pictures of the former prime minister from its website, and seemed to distance itself from its namesake. “Many of his views on race are widely seen as unacceptable today, a view that we share,” the Churchill Fellowship declared. This followed the November 2020 decision by Britain’s beloved National Trust, which operates an extensive network of stately homes throughout the country, to demarcate about 100 properties with explicit ties to slavery and colonialism.

      These moves elicited the ire of many conservatives, including the prime minister. “We need to focus on addressing the present and not attempt to rewrite the past and get sucked into the never-ending debate about which well-known historical figures are sufficiently pure or politically correct to remain in public view,” Johnson’s spokesman said in response to the Churchill brouhaha. But for Hilary McGrady, the head of the National Trust, “the genie is out of the bottle in terms of people wanting to understand where wealth came from,” she told London’s Evening Standard. McGrady justified the trust’s decision by saying that as public sensibilities change, so too must institutions. “One thing that possibly has changed is there may be things people find offensive, and we have to be sensitive about that.”

      A fierce countermovement to these institutional changes has already emerged. In the words of David Abulafia, 71, an acclaimed historian of the Mediterranean at Cambridge University and one of the principal architects of this countermovement, “We can never surrender to the woke witch hunt against our island story.”

      This was the actual title of an op-ed by Abulafia that the Daily Mail published in early September, which attacked “today’s woke zealots” who “exploit history as an instrument of propaganda—and as a means of bullying the rest of us.” The piece also announced the History Reclaimed initiative, of which Abulafia is a cofounder: a new online platform run by a board of frustrated British historians who seek to “provide context, explanation and balance in a debate in which condemnation is too often preferred to understanding.” As a historian myself, I should say that I greatly admire Abulafia’s work, particularly its wide-ranging synthesis and its literary quality, neither of which is easy to achieve and both of which have been models for me in my own work. Which is why I was surprised to find a piece by him in the Daily Mail, a right-wing tabloid not exactly known for academic rigor. When I spoke with Abulafia about it, he seemed a little embarrassed. “It’s basically an interview that they turn into text and then send back to you,” he told me. “Some of the sentences have been generated by the Daily Mail.”

      As in the United States, the UK’s Black Lives Matter protests led to the toppling of statues, including the one in downtown Bristol of Edward Colston, a 17th-century merchant whose wealth derived in part from his active involvement in the slave trade. Abulafia told me he prefers a “retain and explain” approach, which means keeping such statues in place but adding context to them when necessary. I asked him about the public presentation of statues and whether by their very prominence they command an implicit honor and respect. He seemed unconvinced. “You look at statues and you’re not particularly aware of what they show,” he said.

      “What do you do about Simon de Montfort?” Abulafia continued. “He is commemorated at Parliament, and he did manage to rein in the power of monarchy. But he was also responsible for some horrific pogroms against the Jews. Everyone has a different perspective on these people. It seems to me that what we have to say is that human beings are complex; we often have contradictory ideas, mishmash that goes in any number of different directions. Churchill defeated the Nazis, but lower down the page one might mention that he held views on race that are not our own. Maintaining that sense of proportion is important.”

      All of these are reasonable points, but what I still don’t understand is why history as it was understood by a previous generation must be the history understood by future generations. Statues are not history; they are interpretations of history created at a certain moment in time. Historians rebuke previous interpretations of the past on the page all the time; we rewrite accounts of well-known events according to our own contemporary perspectives and biases. What is so sacred about a statue?

      I asked Abulafia why all of this felt so personal to him, because it doesn’t feel that way to me. He replied, “I think there’s an element of this: There is a feeling that younger scholars might be disadvantaged if they don’t support particular views of the past. I can think of examples of younger scholars who’ve been very careful on this issue, who are not really taking sides on that issue.” But I am exactly such a younger scholar, and no one has ever forced me to uphold a certain opinion, either at Harvard or at Oxford. For Abulafia, however, this is a terrifying moment. “One of the things that really worries me about this whole business is the lack of opportunities for debate.”

      Whatever one thinks of “woke” purity tests, it cannot be argued in good faith that the loudest European voices on the anti-woke side of the argument are really interested in “debate.” In France especially, the anti-woke moment has become particularly toxic because its culture warriors—on both the right and the left—have succeeded in associating “le wokeisme” with defenses of Islamist terrorism. Without question, France has faced the brunt of terrorist violence in Europe in recent years: Since 2015, more than 260 people have been killed in a series of attacks, shaking the confidence of all of us who live here. The worst year was 2015, flanked as it was by the Charlie Hebdo and Bataclan concert hall attacks. But something changed after Paty’s brutal murder in 2020. After a long, miserable year of Covid lockdowns, the French elite—politicians and press alike—began looking for something to blame. And so “wokeness” was denounced as an apology for terrorist violence; in the view of the French establishment, to emphasize identity politics was to sow the social fractures that led to Paty’s beheading. “Wokeness” became complicit in the crime, while freedom of expression was reserved for supporters of the French establishment.

      The irony is fairly clear: Those who purported to detest American psychodramas about race and social justice had to rely on—and, in fact, to import—the tools of an American culture war to battle what they felt threatened by in their own country. In the case of Paty’s murder and its aftermath, there was another glaring irony, this time about the values so allegedly dear to the anti-woke contingent. The middle school teacher, who was targeted by a Chechen asylum seeker because he had shown cartoons of the prophet Muhammad as part of a civics lesson about free speech, was immediately lionized as an avatar for the freedom of expression, which the French government quite rightly championed as a value it would always protect. “I will always defend in my country the freedom to speak, to write, to think, to draw,” Macron told Al Jazeera shortly after Paty’s killing. This would have been reassuring had it not been completely disingenuous: Shortly thereafter, Macron presided over a crackdown on “islamo-gauchisme” in French universities, a term his ministers used with an entirely straight face. If there is a single paradox that describes French cultural life in 2021, it is this: “Islamophobia” is a word one is supposed to avoid, but “Islamo-leftism” is a phenomenon one is expected to condemn.

      Hundreds of academics—including at the Centre National de la Recherche Scientifique, France’s most prestigious research body—attacked the government’s crusade against an undefined set of ideas that were somehow complicit in the Islamist terror attacks that had rocked the country. Newspapers like Le Monde came out against the targeting of “islamo-gauchisme,” and there were weeks of tedious newspaper polemics about whether the term harks back to the “Judeo-Bolshevism” of the 1930s (of course it does) or whether it describes a real phenomenon. In any case, the Macron government backtracked in the face of prolonged ridicule. But the trauma of the terror attacks and the emotional hysteria they unleashed will linger: France has also reconfigured its commitment to laïcité, the secularism that the French treat as an unknowable philosophical ideal but that is actually just the freedom to believe or not to believe as each citizen sees fit. Laïcité has become a weapon in the culture war, instrumentalized in the fight against an enemy that the French government assures its critics is radical Islamism but increasingly looks like ordinary Islam.

      The issue of the veil is infamously one of the most polarizing and violent in French public debate. The dominant French view is a function of universalist ideology, which holds that the veil is a symbol of religious oppression; it cannot be worn by choice. A law passed in 2004 prohibits the veil from being worn in high schools, and a separate 2010 law bans the face-covering niqab from being worn anywhere in public, on the grounds that “in free and democratic societies…o exchange between people, no social life is possible, in public space, without reciprocity of look and visibility: people meet and establish relationships with their faces uncovered.” (Needless to say, this republican value was more than slightly complicated by the imposition of a mask mandate during the 2020 pandemic.)

      In any case, when Muslim women wear the veil in public, which is their legal right and in no way a violation of laïcité, they come under attack. In 2019, for instance, then–Health Minister Agnès Buzyn—who is now being investigated for mismanaging the early days of the pandemic—decried the marketing of a runner’s hijab by the French sportswear brand Decathlon, because of the “communitarian” threat it apparently posed to universalism. “I would have preferred a French brand not to promote the veil,” Buzyn said. Likewise, Jean-Michel Blanquer, France’s education minister, conceded that although it was technically legal for mothers to wear head scarves, he wanted to avoid allowing them to chaperone school trips “as much as possible.”

      Nicolas Cadène, the former head of France’s national Observatory of Secularism—a laïcité watchdog, in other words—was constantly criticized by members of the French government for being too “soft” on Muslim communal organizations, with whose leaders he regularly met. Earlier this year, the observatory that Cadène ran was overhauled and replaced with a new commission that took a harder line. He remarked to me, “You have political elites and intellectuals who belong to a closed society—it’s very homogeneous—and who are not well-informed about the reality of society. These are people who in their daily lives are not in contact with those who come from diverse backgrounds. There is a lack of diversity in that elite. France is not the white man—there is a false vision [among] our elites about what France is—but they are afraid of this diversity. They see it as a threat to their reality.”

      As in the United States, there is a certain pathos in the European war on woke, especially in the battalion of crusaders who belong to Cleese and Finkielkraut’s generation. For them, “wokeism” —a term that has no clear meaning and that each would probably define differently—is a personal affront. They see the debate as being somehow about them. The British politician Enoch Powell famously said that all political lives end in failure. A corollary might be that all cultural careers end in irrelevance, a reality that so many of these characters refuse to accept, but that eventually comes for us all—if we are lucky. For many on both sides of the Atlantic, being aggressively anti-woke is a last-ditch attempt at mattering, which is the genuinely pathetic part. But it is difficult to feel pity for those in that camp, because their reflex is, inescapably, an outgrowth of entitlement: To resent new voices taking over is to believe that you always deserve a microphone. The truth is that no one does.

      https://www.thenation.com/article/world/woke-europe-structural-racism

  • Violences sexuelles et sexistes : les enquêtes se multiplient dans l’#enseignement_supérieur, sommé d’agir

    En publiant un vade-mecum pour les #enquêtes_administratives, l’#inspection_générale_de_l’éducation, du sport et de la recherche veut inciter les établissements à mettre un coup d’arrêt aux violences sexuelles et sexistes, objet de multiples saisines depuis plusieurs mois.

    C’est le tournant #metoo de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (#IGÉSR) : en partageant, comme un modèle, lundi 27 septembre, un #guide très détaillé sur l’art et la manière dont ils conduisent une enquête administrative susceptible de suites disciplinaires, les inspecteurs généraux veulent appeler à leurs responsabilités les chefs d’établissement de l’enseignement supérieur sur des questions longtemps considérées comme mineures ou extérieures à la vie d’un campus.

    En 2020-21, l’enseignement supérieur a représenté 50 % des activités de contrôle de l’IGÉSR, avec vingt et une enquêtes administratives sur quarante-quatre. En septembre 2021, l’inspection a été saisie de trois nouvelles missions qui s’ajoutent aux cinquante encore en cours. Parmi elles, une majorité est liée aux #violences_sexuelles_et_sexistes (#VSS), au #harcèlement_moral ou à des #agressions lors de week-ends d’intégration. Viennent ensuite le « #management_brutal et inapproprié » ou encore la carence de dirigeants qui auraient pu faire cesser un scandale, comme celui du #Centre_du_don_des_corps de l’#université_Paris-Descartes, où l’ancien président #Frédéric_Dardel a finalement été mis en examen en juin.

    A l’échelle des #universités et #grandes_écoles, les #enquêtes_administratives menées en interne par l’administration de l’établissement – sans recourir à l’IGÉSR – sont un phénomène nouveau. « Il y a quelques années, nous n’en faisions quasiment pas et, aujourd’hui, certains établissements en sont à quatre par an », illustre Delphine Gassiot-Casalas, secrétaire générale de l’Ecole nationale supérieure d’architecture et de paysage de Bordeaux et présidente du réseau national des services des affaires juridiques, JuriSup, qui a publié, en juillet, un guide sur les #procédures_disciplinaires.

    Effet cathartique

    L’année 2021 a eu un effet cathartique dans la communauté universitaire et les grandes écoles. Les premiers à en faire les frais sont les #instituts_d’études_politiques (#IEP).

    Accusés d’#immobilisme voire de #complicité avec la « #culture_du_viol », ils ont été submergés en février par une déferlante de #témoignages d’étudiantes, sous le hashtag #sciencesporcs, rapportant avoir été violées ou agressées par des étudiants ou des personnels, sans qu’aucune sanction ait été prononcée. Aussitôt, Frédérique Vidal, la ministre de l’enseignement supérieur, avait diligenté une mission d’inspection, chargée de faire le tour des dix IEP et des sept campus de l’IEP de Paris.

    Remises fin juillet, les #préconisations de l’inspection invitent à dépasser la simple prise de conscience pour professionnaliser les missions de #veille et de #recueil_de_la_parole.

    Un #plan_national de lutte contre les violences sexuelles et sexistes doit être annoncé fin septembre ou début octobre par Frédérique Vidal ; il sera doté de #formations qui auront « vocation à être renforcées et pérennisées à partir de 2022 », assure le ministère. « Renforcer les cellules de veille et d’écoute est important, prévient Delphine Gassiot-Casalas. Mais il faut aussi recruter au sein des #services_juridiques, car ce sont eux qui gèrent les procédures, et nous croulons sous les affaires. »

    Qu’elle soit commise dans les locaux ou à l’extérieur, toute #agression doit faire l’objet d’un #signalement. « Au domicile d’un étudiant, il s’agit de la même communauté qui se regroupe, et le comportement déviant d’un des membres va nécessairement rejaillir sur le fonctionnement de l’établissement », appuie la présidente de JuriSup. Avec des répercussions immédiates en termes d’#image, de #réputation mais aussi d’#atteinte_à_la_santé et à la scolarité de la victime.

    « Un souci de #transparence »

    Trop longtemps tolérées, « les violences sexuelles et sexistes ne doivent plus du tout avoir cours et donc ne jamais être mises sous le tapis », affirme Caroline Pascal, chef de l’IGÉSR.

    Très régulièrement, lors de leurs missions, les inspecteurs généraux font face à des enseignants ou des responsables hiérarchiques qui ont « des habitudes de tutoiement, de bises, de contacts tactiles appuyés, qu’ils perçoivent comme des attributs de leurs fonctions, relate Patrick Allal, responsable du pôle affaires juridiques et contrôle à l’IGÉSR. Ils n’ont pas compris que le temps est révolu où l’on pouvait arriver le matin et hurler sur quelqu’un ou ne pas réagir au fait qu’un directeur de thèse impose des relations intimes à ses doctorantes ».

    A travers son #vade-mecum des enquêtes administratives, l’IGÉSR situe son action sur le volet de la #procédure. « C’est la première fois qu’une inspection générale rend publique la façon dont elle travaille, souligne Patrick Allal. Nous revendiquons un souci de transparence visant aussi à faire taire les critiques qui régulièrement entourent nos travaux : #opacité, absence de contradiction, enquêtes réalisées à charge, instrumentalisation par les ministres, etc. »

    En 2021, trois rapports ont été contestés par des personnes incriminées lors d’une enquête, soit à l’occasion de la procédure disciplinaire engagée conformément aux préconisations de la mission devant le juge administratif, soit lors des poursuites pénales faisant suite au signalement au parquet par l’inspection générale.

    « Fonctions nouvelles et chronophages »

    Le document de 65 pages détaille le déroulement d’une enquête étape par étape, de la préparation de la mission au recueil des pièces en passant par l’attitude durant l’audition des témoins et la procédure contradictoire préalable à la rédaction du rapport définitif.

    « #metoo a fait émerger une charge de travail nouvelle pour nous, sur un sujet qui était d’ordre individuel et qui devient collectif », analyse Caroline Pascal. « On s’interroge désormais sur l’amplitude de systèmes qui ont pu laisser prospérer des situations de harcèlement moral ou des violences sexuelles et sexistes, faute de réaction et de formation, avec à la clé un possible signalement au parquet », en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale, qui prévoit que tout fonctionnaire qui acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République.

    En attendant que se professionnalisent réellement les missions exercées par les cellules de veille et d’écoute au sein des universités et des grandes écoles, l’IGÉSR restera le principal recours. « Ce sont des fonctions nouvelles et chronophages pour lesquelles les établissements ne sont pas forcément très armés, même si l’on constate souvent le souci de bien faire », observe Patrick Allal. En témoigne cette mission d’inspection à l’encontre d’un professeur d’université qui vient tout juste de démarrer au sujet d’une suspicion d’agression sexuelle. L’enquête menée en interne est restée vaine : aucun témoin n’a osé s’exprimer, par manque de #confiance dans l’administration de l’établissement.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/09/27/violences-sexuelles-et-sexistes-les-enquetes-se-multiplient-dans-l-enseignem
    #sexisme #violences_sexuelles #violences_sexistes #ESR #France

    ping @_kg_

    –—

    ajouté à la métaliste sur le harcèlement sexuel dans les universités :
    https://seenthis.net/messages/863594
    Et plus précisément sur la France :
    https://seenthis.net/messages/863594#message863596

  • Higher Ed, We’ve Got a Morale Problem — And a Free T-Shirt Won’t Fix It

    Let’s say, hypothetically, that it’s been a difficult start to the fall semester for many of us who work as staff and faculty on college campuses in America.

    Perhaps we allowed ourselves the faintest glimmer of hope for better working conditions compared to last year, only to be met by sterile emails enforcing inflexible personnel policies, signs about “masking up” on campus as hoards of unmasked fans descend on football stadiums, and pressures to pantomime normalcy for students when our own lives feel far from normal.

    Maybe we have experienced a cruel deja vu, once again juggling hours of Zoom meetings with the needs of our unvaccinated children as the delta variant courses through schools and day care centers. Let’s say we’re not just physically and emotionally depleted, but we question whether our institutions have our best interests at heart. We might wonder if we can still enact our values in higher education, given our employers’ leadership and decision-making.

    Hypothetically speaking.

    Assuming that some part of the scenario above sounds vaguely familiar, college leaders may be casting about for ways to lift their employees’ spirits. More than a few, it seems, have turned to gimmicks that have little chance of meaningfully moving the dial on morale. That’s because the root of many morale issues in higher education run deep enough that a free T-shirt will feel shallow and even insulting.

    Morale can absolutely be improved in higher education, but it requires the type of sustained attention necessary to shift organizational culture. Leaders need to be ready to put in the work, starting with admitting there is a morale problem and actively listening to what staff and faculty are saying.
    From Burnout to Demoralization

    There was considerable discussion last fall about burnout among college staff and faculty. I wrote about how college leaders should prepare for a wave of burnout as the pandemic brewed a potent blend of constant work and worry. Recently, I’ve seen an increasing number of stories about workers who aren’t just exhausted. They are fed up.

    Stories have chronicled boycotts of in-person teaching, protests and die-ins to demand mask and vaccine mandates, faculty senate resolutions, and even faculty members walking away from jobs. I’ve heard from several colleagues at multiple institutions that morale is the lowest they have ever seen. People in higher education are using a new word to describe their experience: “demoralized.”

    Doris A. Santoro, a professor at Bowdoin College who wrote a book on teacher demoralization, has explained that teachers of all kinds are facing stressors during the pandemic that put them at heightened risk for burnout and demoralization. But she also draws clear distinctions between the two. Whereas burnout happens when teachers are entirely depleted, demoralization “happens when teachers are consistently thwarted in their ability to enact the values that brought them to the profession.” Anne Helen Peterson and John Warner have also written eloquently about demoralization and how it differs from burnout.

    Suffice it to say, demoralization suggests an ethical indictment of organizations, professions and society broadly. We still often talk about burnout (and its solutions) at the individual level, but we refer to demoralization among a group, like workers at a particular company or in an entire profession. In fact, many definitions of “morale” focus on collective sentiments, equating it to esprit de corps. Low morale, like demoralization, means a group is struggling to maintain belief in an institution or goal, especially when times get tough. As such, it provides a stronger push for people thinking about leaving their jobs. If burnout means driving while drowsy, demoralization means seeking the nearest off-ramp.
    What Has Changed This Fall?

    How did we get from burnout to demoralization in a year? In truth, the delta variant didn’t suddenly trigger demoralization. These issues predate the pandemic and have long co-existed. And, of course, the feeling isn’t universal. But it does seem like wading through another semester of Pandemic University—or, more accurately, through the ways that policymakers and college leaders responded to the pandemic—shattered many people’s fragile defenses. While writing this piece, I received many emails and messages about why morale is low at their institutions or why they left higher education, and a few themes surfaced.

    There’s a pervasive frustration that leaders didn’t learn any lessons from last year. It’s almost as if last year didn’t happen at all, or leaders are exercising a sort of selective amnesia about the trauma of the past 18 months. In practice, this manifests in zealously pursuing Normal Fall™ regardless of employees’ concerns and worsening public health indicators. Relatedly, many people feel that leaders simply aren’t listening, aren’t taking questions about fall plans in meetings, or aren’t transparently answering the questions they received. Values-based conflict emerged as staff and faculty sought compassion and thoughtful answers in the face of elevated risk and instead heard: “Everything’s fine!”

    Low compensation, of course, was frequently mentioned. A recent article in The Chronicle of Higher Education included results from a survey showing that 88 percent of respondents believed uncompetitive salaries are a top reason people leave college student affairs jobs. While staff and faculty may have previously tolerated inadequate pay, the equation changed significantly with the addition of excessive work demands and the possibility of serious illness. The fact that many leaders continued to ask employees to work under these conditions without additional compensation felt exploitative.

    Another reason for low morale is inadequate staffing. As people have left jobs, institutions have faced vacancies they haven’t been able to fill or fill fast enough. Or they simply haven’t ever hired enough people to do the work well. Sociologists Laura Hamilton and Kelly Nielsen described the pervasive and purposeful under-staffing of institutions in their book “Broke” as the austerity-driven goal of “tolerable suboptimization,” with workers “toiling under exceptionally high workloads with little relief in sight.” For many staff and faculty, the combination of low pay and ballooning workloads reveals institutions care little for employee wellbeing.

    Norms within the higher education profession aren’t helping matters. As Margaret Sallee, who recently edited a book on sustainable careers in student affairs, told me, “I’ve been so concerned about the ways that student affairs eats its people up. I think it’s been exacerbated by the pandemic … but, I hate to say it, I think it’s gotten worse in the last three months.” The profession normalizes working long hours to support students, and many senior student affairs leaders “are stuck in a rut of how we used to do things and how we’ve always done things.” Sallee attributes some of the low morale this year to disappointment after it looked like the field may shift away from these “ideal worker” norms: “Instead I just see this knee-jerk reaction to going back to how it was.”

    There are also tensions surfacing between different categories of university employees. Some workers have had autonomy to decide what was best for them and their families, while others have not. And some staff, in particular, are tired of having their expertise ignored. That’s what I heard when I spoke to a staff member at a rural community college who asked to not be named to protect their job. “Staff have degrees, they have expertise, they are publishing and doing these things that are just completely ignored by faculty,” the staff member explained. “It’s just really hard to be constantly dismissed.” They likened higher education to a class system: “I don’t have academic freedom. I don’t have any type of protection … I think that has become more apparent with the pandemic, being told who is ‘essential,’ who has to be on campus.”

    This staff member and their colleagues have been sending each other job ads: “There are data analyst jobs I could do and easily make double what I’m making.” But what bothers them about staff leaving is the sense that nobody cares. “We see a lot of ‘quit lit’ from faculty. We don’t see it often from staff, mainly because staff just disappear.”
    Gimmicks Won’t Get It Done

    Just as there were college leaders genuinely worried about burnout, there are leaders who want to do something about low morale. Too frequently, however, the solutions they devise don’t match the magnitude of the problems or initiate the long-term, cultural changes many employees desire.

    When I expressed my worry that many college leaders won’t put in the work to address low morale, my Twitter followers filled my mentions with examples of small tokens of appreciation or one-time events. It was clear they found many of these gifts or programs to range from comically unhelpful to infuriating. In no particular order, these examples included: a credit to the performing arts center, tickets to a football game, free ice cream, raffles for gift cards, a coupon to the coffee shop, food trucks, and free hats and T-shirts.

    To be clear, I don’t imagine most leaders believe these efforts will fix everything. They know what they have asked of staff and faculty during the pandemic, and they want to recognize that effort. However, they may not fully appreciate how these initiatives can trivialize concerns and have the opposite effect of what they intended.

    How Leaders Can Start to Improve Morale

    There are some obvious answers to higher education’s morale problem. People want compensation that reflects the realities of their labor and the value they bring to the institution. They also want their departments and units to be properly staffed to meet expectations and serve students well. This last point bears repeating: Students’ success is inextricably linked to staff and faculty working conditions. You don’t get the former without investing in the latter.

    It’s true that raises and adding new positions are huge expenses for most institutions, but that doesn’t make them impossible. Just as important, the price tag doesn’t prevent leaders from making a commitment and a plan. Leaders should tell staff and faculty that increasing pay is a priority, even if it takes time to implement, then develop a plan to analyze workload issues across the institution and create a timeline for addressing them. Knowing there is movement toward adequate pay and equitable workloads is more meaningful for many staff and faculty than a dozen thank-you emails.

    I’ve heard of a few other low-cost ideas. For example, leaders should think about their communication choices. I suggest they excise “return to normal” from their vocabulary, stop worshipping at the altar of “in-person” instruction and activities, and feel comfortable admitting when morale is low. Josie Ahlquist, an expert on digital leadership in higher education, recently wrote that leaders should give up on messages imbued with “toxic positivity” and consider instead a position of “critical hope.”

    I asked her about this in an interview, and she explained: “Leaders in the past could just be performative or hide behind, ‘I’m fundraising, attending big football games, and it’s all good.’ And we haven’t had ‘all good.’ To say ‘everything’s fine’ isn’t being emotionally connected.”

    She drew inspiration from professor Jessica Riddell, who wrote that many leaders have leaned on toxic positivity in their responses to the pandemic. By putting on a constantly cheery facade that brooks no dissent, leaders have silenced “candid and uncomfortable conversations.” On the other hand, critical hope acknowledges that we are in the midst of a radical transformation and welcomes complexity and discomfort as cornerstones of a process to reimagine higher education.

    Given how many people have told me they feel ignored, I can’t recommend enough the power of giving staff and faculty platforms to speak—and then listening to them. In practice, this means collecting perspectives and questions, then providing complete and transparent responses. It means bringing important campus decisions to shared governance bodies for deliberative discussion, rather than seeking “input” after the decisions have already been made. Ahlquist stressed the value of being accessible, whether it’s blocking off time for anyone in the campus community to meet, doing listening tours, or allowing people to send direct messages via social media. Even small efforts like these can help employees feel seen.

    I spoke with Terisa Riley, chancellor of the University of Arkansas at Fort Smith, after learning she asked a student affairs group on Facebook for ideas to improve staff wellbeing. “I’m a real active social listener, which will sometimes drive people crazy,” she explained. Although initially some people were suspicious of her engagement on multiple social media sites, Riley maintains it helps her get to the bottom of frustrations, note complaints, and collaborate with colleagues to find solutions.

    Listening isn’t enough to completely prevent departures. “We’ve started to face some of the turnover that we’ve been reading about,” Riley explained. But she is keenly aware that “other industries are much more flexible, they understand that the human being doesn’t divorce the family or responsibilities they have when they walk through the door at 8 a.m.”

    She’s a firm believer that higher education needs to do a better job of managing its talent. And that might mean leaders need to give people the ability to individually renegotiate their working conditions. As Riley put it: “If someone is thinking that leaving is their only option, I say, ‘Please don’t let it be. Can we talk through what you personally think you need to be here? I’ll try to help meet your needs, I want to hear from you personally.’ Because I only have 1,000 employees. I can work with all of them if I need to do it.”

    Importantly, this approach doesn’t treat workers as expendable. Colleges have a bad track record of operating as if there will be an endless supply of people who want to work at them. I think that’s both factually and ethically wrong—it’s also a terrible approach to attracting and retaining highly-skilled workers, many of whom are, at this very moment, perusing job ads.

    The simple truth is that while morale can tank quickly, rebuilding it takes time and sustained energy. And it’s harder still to rebuild as the pandemic continues. But I wouldn’t be writing this if I didn’t have my own critical hope that the “business as usual” systems and decisions that got us here can be transformed for the better. Save the T-shirts for another day and start building the type of organizational culture that staff and faculty can believe in again.

    https://www.edsurge.com/news/2021-09-27-higher-ed-we-ve-got-a-morale-problem-and-a-free-t-shirt-won-t-fi

    #burn-out #démoralisation #enseignement (pas pas que...) #ESR #université #facs #valeurs #moral

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  • Défense et illustration des libertés académiques : un eBook gratuit

    Mediapart propose sous la forme d’un livre numérique téléchargeable gratuitement les actes du colloque de défense des libertés académiques organisé par #Éric_Fassin et #Caroline_Ibos. Témoignant d’une alliance entre #journalistes et #intellectuels face à l’#offensive_réactionnaire contre le droit de savoir et la liberté de chercher, il sera présenté lors du débat d’ouverture de notre Festival, samedi 25 septembre.

    Dans un passage trop ignoré de ses deux conférences de 1919 réunies sous le titre Le Savant et le Politique, Max Weber plaide pour une sociologie compréhensive du #journalisme. Lui faisant écho à un siècle de distance, ce livre numérique à l’enseigne de La savante et le politique témoigne d’une alliance renouvelée entre intellectuels et journalistes, dans une #mobilisation commune en défense du #droit_de_savoir et de la #liberté_de_dire, de la #liberté_de_chercher et du #droit_de_déranger.

    Constatant que le journaliste, échappant « à toute classification sociale précise », « appartient à une sorte de #caste de #parias que la “société” juge toujours socialement d’après le comportement de ses représentants les plus indignes du point de vue de la #moralité », Max Weber en déduisait, pour le déplorer, que « l’on colporte couramment les idées les plus saugrenues sur les journalistes et leur métier ». Dans une réminiscence de son projet inabouti de vaste enquête sur la #presse, présenté aux « Journées de la sociologie allemande » en 1910, il poursuit : « La plupart des gens ignorent qu’une “œuvre” journalistique réellement bonne exige au moins autant d’“intelligence” que n’importe quelle autre œuvre d’intellectuels, et trop souvent l’on oublie qu’il s’agit d’une œuvre à produire sur-le-champ, sur commande, à laquelle il faut donner une efficacité immédiate dans des conditions de création qui sont totalement différentes de celles des autres intellectuels ».

    Ce plaidoyer en défense de l’artisanat du métier n’empêchait pas la lucidité sur les corruptions de la profession, avec un constat sans âge qui peut aisément être réitéré et actualisé : « Le #discrédit dans lequel est tombé le journalisme, ajoutait en effet Weber, s’explique par le fait que nous gardons en mémoire les exploits de certains journalistes dénués de tout sens de leurs #responsabilités et qui ont souvent exercé une influence déplorable. » De tout temps, le journalisme est un champ de bataille où s’affrontent l’idéal et sa négation, où la vitalité d’une discipline au service du public et de l’#intérêt_général se heurte à la désolation de sa confiscation au service d’intérêts privés ou partisans, idéologues ou étatiques. Tout comme, dressée contre les conservatismes qui voudraient l’immobiliser et la figer dans l’inéluctabilité de l’ordre établi, la République elle-même ne trouve son accomplissement véritable que dans le mouvement infini de l’émancipation, dans une exigence démocratique et sociale sans frontières dont l’égalité naturelle est le moteur.

    C’est ce combat qui réunit ici des journalistes et des intellectuels, le journal en ligne que font les premiers et le colloque qu’ont organisé les seconds. Si Mediapart publie en eBook, après l’avoir diffusé dans son Club participatif, les actes du colloque La savante et le politique organisé les 7-10 juin 2021 par Éric Fassin et Caroline Ibos, c’est tout simplement parce qu’à travers des métiers différents, avec leurs légitimités propres, leurs procédures universitaires pour les uns et leurs écosystèmes économiques pour les autres, intellectuels et journalistes sont aujourd’hui confrontés à la même menace : la fin de la #vérité. De la vérité comme exigence, recherche et audace, production et #vérification, #confrontation et #discussion. L’#assaut lancé contre les libertés académiques, sous prétexte de faire la chasse aux « pensées décoloniales » et aux « dérives islamo-gauchistes », va de pair avec l’offensive systématique menée contre l’#information indépendante pour la marginaliser et la décrédibiliser, la domestiquer ou l’étouffer.

    Les adversaires que nous partageons, qui voudraient nous bâillonner ou nous exclure en nous attribuant un « #séparatisme » antinational ou antirépublicain, sont en réalité les vrais séparatistes. Faisant sécession des causes communes de l’#égalité, où s’épanouit l’absence de distinction de naissance, d’origine, de condition, de croyance, d’apparence, de sexe, de genre, ils entendent naturaliser les #hiérarchies qui légitiment l’#inégalité de #classe, de #race ou de #sexe, ouvrant ainsi grand la porte aux idéologies xénophobes, racistes, antisémites, ségrégationnistes, suprémacistes, sexistes, homophobes, négrophobes, islamophobes, etc., qui désormais ont droit de cité dans le #débat_public. S’ils n’en ont pas encore toutes et tous conscience, nul doute que la nécrose des représentations médiatique et politique françaises à l’orée de l’élection présidentielle de 2022 leur montre déjà combien ils ont ainsi donné crédit aux monstres de la #haine et de la #peur, de la guerre de tous contre tous.

    Pour entraver ce désastre, nous n’avons pas d’autre arme que notre liberté, et la #responsabilité qui nous incombe de la défendre. Liberté de penser, d’informer, de chercher, de dire, de révéler, d’aller contre ou ailleurs, d’emprunter des chemins de traverse, de réfléchir en marge ou en dehors, de créer sans dogme, d’imaginer sans orthodoxie. Si la chasse aux dissidences et aux mal-pensances est le propre des pouvoirs autoritaires, elle est aussi l’aveu de leur faiblesse intrinsèque et de leur fin inévitable, quels que soient les ravages momentanés et désastres immédiats de leurs répressions.

    La richesse, la vitalité et la force des contributions de ce livre numérique ne témoignent pas seulement d’une résistance au présent. Elles proclament ce futur de l’#émancipation qui germe sur les ruines d’un ordre agonisant.

    Pour télécharger l’eBook :
    https://static.mediapart.fr/files/defense_et_illustration_des_libertes_academiques.epub

    https://blogs.mediapart.fr/edwy-plenel/blog/230921/defense-et-illustration-des-libertes-academiques-un-ebook-gratuit

    #livre #Caroline_Ibos #livre #liberté_académique #libertés_académiques #recherche #université #ESR #islamo-gauchisme

  • #Harcèlement à #Lyon-2 : #contre-enquête sur la #relaxe d’un professeur

    Suspendu en 2018 suite à des accusations de harcèlement formulées par une doctorante, un professeur de Lyon-2 a obtenu gain de cause en appel devant le #conseil_national_de_l’enseignement_supérieur_et_de_la_recherche. Problème : selon les informations de Mediacités, la décision repose sur des éléments faux ou sujets à caution.

    « Comment est-ce possible en #France ? Cette décision est scandaleuse. Le conseil a tranché alors qu’il disposait de #preuves contraires. J’accepte de témoigner pour qu’aucune femme n’ait plus à endurer ce que j’ai vécu. » Comme toujours, Lina* est calme. Mais sous sa voix posée gronde une colère sourde. En 2017, alors étudiante à Lyon-2, elle dénonce le harcèlement de son directeur de thèse, un professeur très reconnu dans le milieu universitaire. Conséquence, en 2018, Lyon-2 décide de le suspendre avec privation de salaire pendant un an. L’affaire avait à l’époque fait du bruit. Elle était loin d’être terminée…

    Le 10 septembre 2020, en appel, la #section_disciplinaire du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (#Cneser) a relaxé le professeur en question, qui n’a jamais repris ses cours à Lyon-2 (il est aujourd’hui professeur invité à l’université canadienne de Dubaï). La décision passe alors inaperçue, malgré la médiatisation de l’affaire deux ans plus tôt. Or, comme nous l’avons découvert au cours de notre enquête, dans son analyse du dossier, le Cneser s’est appliqué à décrédibiliser le témoignage de l’étudiante sur la base d’éléments faux.

    Après la libération de la parole et les errements de la direction à l’École normale supérieure de Lyon (ENS) [lire les enquêtes de Mediacités ici : https://www.mediacites.fr/enquete/lyon/2021/03/22/violences-sexuelles-a-lens-de-lyon-une-si-laborieuse-et-tardive-prise-de- et là : https://www.mediacites.fr/complement-denquete/lyon/2021/06/14/violences-sexuelles-a-lens-de-lyon-la-mediatisation-a-fait-bouger-les-choses/], après la gestion laborieuse d’un étudiant de Science Po Lyon accusé de viols par plusieurs femmes dévoilée par Mediacités (https://www.mediacites.fr/enquete/lyon/2021/03/02/violences-sexuelles-les-errements-de-sciences-po-lyon), après les récentes révélations de Rue89Lyon (https://www.rue89lyon.fr/2021/09/06/sous-emprise-monsieur-cinema-universite-lyon-2) sur le harcèlement subi par plusieurs étudiantes de #Jacques_Gerstenkorn à Lyon-2 (https://www.mediacites.fr/revue-de-presse/lyon/2021/09/06/jacques-gerstenkorn-monsieur-cinema-de-luniversite-lyon-2-accuse-de-harce), notre contre-enquête éclaire sous un autre jour la question des violences sexistes et sexuelles au sein de l’#enseignement_supérieur. Elle illustre le décalage entre un discours officiel qui encourage les victimes à dévoiler les harcèlements dont elles font l’objet et des procédures disciplinaires lentes et archaïques incapables de leur rendre justice.

    (#paywall)

    https://www.mediacites.fr/enquete/lyon/2021/09/14/harcelement-a-lyon-2-contre-enquete-sur-la-relaxe-dun-professeur

    #justice (really ?) #ESR #université #violences_sexistes #violences_sexuelles

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    ajouté à la métaliste sur le harcèlement à l’université :
    https://seenthis.net/messages/863594

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    • Violences sexuelles à l’ENS de Lyon : le rapport d’enquête épingle la présidence

      Après des violences sexuelles et sexistes au sein de l’École normale supérieure (ENS) de Lyon, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche avait diligenté une enquête. Et les inspecteurs se montrent sévère avec la présidence de l’ENS, dans un rapport d’enquête publié mercredi 27 octobre, estimant que l’établissement « n’avait pas suffisamment pris la mesure du problème ».

      L’enquête menée par l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR), à la suite de révélations dans la presse, a permis de reconstituer « une liste anonymisée de 27 situations de violences sexuelles et sexistes, dont la première remonte à 2017 ».

      Neuf cas « relèveraient de la qualification de viol », d’après la synthèse du rapport, précisant que les victimes sont des étudiantes, à l’exception d’un cas masculin. « Les personnes mises en cause sont pour la moitié d’entre elles des étudiants, ajoutent les inspecteurs. Pour l’autre moitié, il s’agit de cinq enseignants, de cinq autres personnels de l’ENS, de quatre personnes extérieures ou non identifiées. »
      Le « peu d’empressement à agir » de la direction

      La présidence de l’ENS n’était informée que de 15 de ces situations et « hormis une situation très récente, sur les 14 situations traitées par la présidence, une seule a donné lieu à une procédure disciplinaire », relèvent les enquêteurs de l’IGESR. « Toutes les autres sont demeurées sans décision formalisée de la part de l’ENS. »

      Selon le rapport d’enquête, « le manque de cohérence dans le traitement des situations, le peu d’empressement à agir, a conduit à une impossibilité de clôturer les instructions » et « a contribué à construire un sentiment d’incertitude, de peur et de défiance qui s’est installé chez les victimes présumées ».

      L’enquête a révélé « 27 situations de violences sexuelles et sexistes » depuis 2017. Elle pointe le « manque de cohérence » de la direction lorsqu’elle a été informée.

      https://www.francetvinfo.fr/societe/harcelement-sexuel/violences-sexuelles-a-l-ens-de-lyon-le-rapport-d-enquete-epingle-la-pre

  • J’aime beaucoup ce surnom... #ministre_Téflon...

    #Frédérique_Vidal, ministre en #distanciel

    Très critiquée pour sa gestion un peu erratique de la crise sanitaire, la ministre de l’Enseignement supérieur promet une rentrée à 100 % en #présentiel.

    Elle est donnée partante à chaque remaniement depuis quatre ans. Mais elle est toujours là, fidèle au poste. Les critiques à répétition des milieux universitaires, la fronde contre sa loi de programmation de la recherche, les polémiques mal venues, les railleries de la Macronie contre ses curieuses absences médiatiques : rien n’y fait. Tout glisse sur Frédérique Vidal, #ministre_Téflon de l’Enseignement supérieur. L’ancienne patronne de la fac de Nice-Sophia Antipolis est inébranlable.

    Ce 15 août lui a permis de repartir pour un tour. Les universités françaises se sont distinguées dans le très select #classement_de_Shanghai, publié tous les ans le jour de l’Assomption. Le fruit de sa politique, assure-t-elle, non sans quelques arguments.

    En guerre contre l’islamo-gauchisme

    Frédérique Vidal promet une rentrée à 100 % en présentiel et sans passe sanitaire aux étudiants et profs de fac. Qui ont un peu de mal à la croire, tant sa gestion de l’enseignement supérieur ces quatre dernières années s’est faite en distanciel. Techno, peu causante, cette docteure en sciences de la vie n’a jamais brillé par sa #présence ou son #empathie. On le lui a beaucoup reproché.

    Elle ne dit pas si elle compte reprendre sa croisade contre l’islamo-gauchisme qui « gangrène la société dans son ensemble et les universités » . Emmanuel Macron avait dû refroidir ses ardeurs guerrières l’hiver dernier. Hors sujet et à contretemps, avait jugé l’Elysée, au moment où le Covid vidait les amphis et plongeait beaucoup de jeunes dans la précarité. La politique est un métier.

    https://www.lesechos.fr/idees-debats/en-vue/frederique-vidal-ministre-en-distanciel-1338843

    #Vidal #ESR #enseignement_supérieur #France #université #recherche #facs #absence #téflon #teflon

  • Autour de l’#université, de la #science et de l’#enseignement, notamment de l’#enseignement_supérieur, quelques citations tirées du livre de #Nuccio_Ordine, L’utilité de l’inutile , 2016 [2013], Les belles lettres :

    « Quant aux professeurs, ils se transforment de plus en plus en modestes bureaucrates au service de la gestion de ces exploitations commerciales universitaires. Ils passent leurs journées à remplir des dossiers, à faire des calculs, à produire des rapports pour des statistiques (parfois inutiles), à tenter d’apurer les comptes de budgets toujours plus maigres, à répondre à des questionnaires, à préparer des projets pour obtenir des subsides misérables et à interpréter des circulaires ministérielles confuses et contradictoires. L’année universitaire s’écoule rapidement, au rythme d’un inlassable métronome bureaucratique qui règle le déroulement de toutes sortes de conseils (conseil d’administration, conseil de faculté, conseil de doctorat, conseil du département) et celui des interminables réunions générales.
    Il semble donc que plus personne ne se soucie comme il se doit de la #qualité de la recherche et de l’enseignement. Le fait même d’étudier (on oublie souvent qu’un bon professeur est avant tout un infatigable ‘étudiant’) et de préparer les cours devient un luxe qu’il faut négocier chaque jour avec la hiérarchie de l’université. On ne se rend plus compte que séparer complètement la recherche de l’enseignement, ce serait réduire finalement les cours à une répétition superficielle et livresque du déjà connu. »

    –-> Nuccio ORDINE, L’utilité de l’inutile, 2016 [2013], Les belles lettres, pp.83-84.

    « Les #études sont avant tout l’acquisition de #connaissances qui, détachées de toute obligation utilitaire, nous font grandir et nous rendent plus autonomes. […] Favoriser exclusivement la #professionnalisation des étudiants, ce serait perdre de vue la dimension universaliste de la fonction éducative de l’instruction : aucun #métier ne saurait être exercé en toute conscience, si les #compétences_techniques qu’il requiert ne sont pas subordonnées à une #formation_culturelle plus vaste, seule susceptible d’encourager les #étudiants à cultiver librement leur esprit et à laisser libre cours à leur curiositas. »

    –-> Nuccio ORDINE, L’utilité de l’inutile, 2016 [2013], Les belles lettres, p.85.

    « C’est précisément quand une nation subit une #crise qu’il est nécessaire de multiplier par deux les fonds destinés aux #savoirs et à l’#éducation des #jeunes, afin d’éviter que la société sombre dans l’abîme de l’#ignorance. […] Car saboter la #culture et l’#instruction, c’est saboter le futur de l’humanité. »

    –-> Nuccio ORDINE, L’utilité de l’inutile, 2016 [2013], Les belles lettres, pp.88-89.

    « Car saboter la culture et l’instruction, c’est saboter le #futur de l’humanité. »

    –-> Nuccio ORDINE, L’utilité de l’inutile, 2016 [2013], Les belles lettres, p.127.

    #ESR #recherche #facs #bureaucratie #livre #citation
    #curiosité