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    Dans Mayotte dévastée, la fracture face aux sans-papiers
    Par RFI Publié le : 31/01/2025
    Mayotte, dans l’archipel des Comores. Entre Madagascar et la côte africaine. Un département français, 320 000 habitants officiellement. Mais combien d’exclus, de sans-papiers ? Leur présence est encore moins cachée, depuis le passage du cyclone Chido mi-décembre. Les arbres déracinés ont laissé apparaître l’étendue des bidonvilles. Grand reportage.

    #Covid-19#migrant#migration#france#mayotte#cyclone#bidonville#sante#exclusion

  • À #France_Travail, l’essor du #contrôle_algorithmique

    « #Score_de_suspicion » visant à évaluer l’honnêteté des chômeur·ses, « #score_d’employabilité » visant à mesurer leur « #attractivité », algorithmes de #détection des demandeur·ses d’emploi en situation de « perte de confiance », en « besoin de redynamisation » ou encore à « risque de dispersion »… France Travail multiplie les #expérimentations de #profilage_algorithmique des personnes sans emploi.

    Mise à jour du 12 juillet 2024 : le directeur général de France Travail a souhaité utiliser son droit de réponse. Vous la trouverez à la suite de l’article.

    Après avoir traité de l’utilisation par la #CAF d’un algorithme de notation des allocataires, nous montrons ici que cette pratique est aussi partagée par France Travail, ex-#Pôle_Emploi. À France Travail, elle s’inscrit plus largement dans le cadre d’un processus de #numérisation_forcée du #service_public de l’#emploi.

    –-> Retrouvez l’ensemble de nos publications sur l’utilisation par les organismes sociaux d’algorithmes à des fins de contrôle social sur notre page dédiée et notre Gitlab : https://git.laquadrature.net/la-quadrature-du-net/algo-et-controle.

    Au nom de la « #rationalisation » de l’action publique et d’une promesse « d’#accompagnement_personnalisé » et de « #relation_augmentée », se dessine ainsi l’horizon d’un service public de l’emploi largement automatisé. Cette #automatisation est rendue possible par le recours à une myriade d’algorithmes qui, de l’inscription au suivi régulier, se voient chargés d’analyser nos données afin de mieux nous évaluer, nous trier et nous classer. Soit une extension des logiques de #surveillance_de_masse visant à un #contrôle_social toujours plus fin et contribuant à une #déshumanisation de l’accompagnement social.

    De la CAF à France Travail : vers la multiplication des « scores de suspicion

    C’est, ici encore, au nom de la « #lutte_contre_la_fraude » que fut développé le premier algorithme de #profilage au sein de France Travail. Les premiers travaux visant à évaluer algorithmiquement l’#honnêteté des personnes sans emploi furent lancés dès 2013 dans la foulée de l’officialisation par la CAF de son algorithme de notation des allocataires. Après des premiers essais en interne jugés « frustrants » [1], France Travail – à l’époque Pôle Emploi – se tourne vers le secteur privé. C’est ainsi que le développement d’un outil de détermination de la probité des demandeur·ses d’emploi fut confié à #Cap_Gemini, une multinationale du CAC40 [2].

    La #notation des chômeur·ses est généralisée en 2018. La présentation qui en est faite par France Travail donne à voir, comme à la CAF, l’imaginaire d’une institution assiégée par des chômeur·ses présumé·es malhonnêtes. Ses dirigeant·es expliquent que l’algorithme assigne un « score de suspicion » – dans le texte – visant à détecter les chômeur·ses les plus susceptibles « d’#escroquerie » grâce à l’exploitation de « #signaux_faibles » [3]. Une fois l’ensemble des personnes sans emploi notées, un système d’« #alertes » déclenche ainsi des #contrôles lorsque l’algorithme détecte des situations « suspectes » (emploi fictif, usurpation d’identité, reprise d’emploi non déclarée) [4].

    Pour l’heure, France Travail s’est refusé à nous communiquer le code source de l’algorithme. Au passage, notons que ses dirigeants ont par ailleurs refusé, en violation flagrante du droit français, de fournir la moindre information aux demandeur·ses d’emploi que nous avions accompagné·es pour exercer leur droit d’accès au titre du #RGPD [5]. Nous avons cependant obtenu, via l’accès à certains documents techniques, la liste des variables utilisées.

    On y retrouve une grande partie des données détenues par France Travail. Aux variables personnelles comme la nationalité, l’âge ou les modalités de contact (mails, téléphone…) s’ajoutent les données relatives à notre vie professionnelle (employeur·se, dates de début et de fin de contrat, cause de rupture, emploi dans la fonction publique, secteur d’activité…) ainsi que nos #données financières (RIB, droits au chômage…). À ceci s’ajoute l’utilisation des données récupérées par France Travail lors de la connexion à l’espace personnel (adresse IP, cookies, user-agent). La liste complète permet d’entrevoir l’ampleur de la #surveillance_numérique à l’œuvre, tout comme les risques de #discriminations que ce système comporte [6].

    #Profilage_psychologique et gestion de masse

    Fort de ce premier « succès », France Travail décide d’accroître l’usage d’algorithmes de profilage. C’est ainsi que, dès 2018, ses dirigeant·es lancent le programme #Intelligence_Emploi [7]. Son ambition affichée est de mettre l’#intelligence_artificielle « au service de l’emploi » pour « révéler à chaque demandeur d’emploi son #potentiel_de_recrutement » [8].

    Un des axes de travail retient notre attention : « Accélérer l’accès et le retour à l’emploi [via un] #diagnostic “augmenté” pour un accompagnement plus personnalisé ». Ici, l’#IA doit permettre de d’« augmenter la capacité de diagnostic » relative aux « traitements des aspects motivationnels » via la « détection de signaux psychologiques » [9]. En son sein, deux cas d’usage retenus sont particulièrement frappants.

    Le premier est le développement d’algorithmes visant à « anticiper les éventuels #décrochages », prévenir les « #risques_de_rupture » [10] ou encore « détecter les moments où ils [les personnes au chômage] peuvent se sentir découragés ou en situation de fragilité » [11].

    Ces travaux ont trouvé, au moins en partie [12], un premier aboutissement dans l’outil du #Journal_de_la_Recherche_d’Emploi (#JRE) actuellement expérimenté dans plusieurs régions de France [13]. Le JRE assigne à chaque incrit·e quatre scores de « profilage psychologique » visant respectivement à évaluer la « dynamique de recherche » d’emploi, les « signes de perte de confiance », le « besoin de #redynamisation » ou les « risques de dispersion » [14].

    Ces informations sont synthétisées et présentées aux conseiller·es sous la forme d’un tableau de bord. « Parcours à analyser », « Situations à examiner », « Dynamique de recherche faible » : des alertes sont remontées concernant les chômeur·ses jugé·es déficient·es par tel ou tel algorithme. Le ou la conseiller·e doit alors faire un « #diagnostic_de_situation » – via l’interface numérique – afin d’« adapter l’intensité » des « actions d’accompagnement ». Et là encore, ils et elles peuvent s’appuyer sur des « #conseils_personnalisés » générés par un dernier algorithme [15].

    Contrôle, #mécanisation et déshumanisation de l’accompagnement : voilà la réalité de ce que le directeur de France Travail appelle « l’accompagnement sur mesure de masse » [16].

    Diagnostic et score d’#employabilité

    Le second cas d’usage est tout aussi inquiétant. Il s’agit de déterminer la « qualité » d’un·e demandeur·se d’emploi. Ou, pour reprendre les termes officiels, son « employabilité » [17]. Ce projet n’est pas encore déployé à grande échelle, mais nous savons qu’une première version – basée, elle, sur des techniques d’intelligence artificielle [18] – a été développée en 2021 [19].

    L’algorithme alloue à chaque inscrit·e un score prédisant ses « chances de retour à l’emploi ». Véritable outil automatique de #tri des chômeur·ses, il vise à organiser la « #priorisation des actions d’accompagnement » [20] en fonction d’un supposé #degré_d’autonomie de la personne sans emploi.

    Si les informations disponibles sur ce projet sont limitées, on peut imaginer que ce score permettra le contrôle en temps réel de la « progression de la #recherche_d’emploi » via les actions entreprises pour améliorer « l’attractivité [de leur] profil » [21]. Il serait alors un indicateur d’évaluation en continu de la bonne volonté des chômeur·ses.

    Mais on peut aussi penser qu’il sera utilisé pour inciter les personnes sans emploi à se diriger vers les « #métiers_en_tension », dont une majorité concentre les conditions de travail les plus difficiles. En demandant aux chômeur·ses d’améliorer leur score, via une #réorientation, ils et elles seraient encouragé·es à accepter un emploi au rabais.

    Agenda partagé & agences virtuelles

    Mais l’étendue du processus de numérisation à l’oeuvre à France Travail va bien au-delà de ces exemples. Côté contrôle numérique, citons l’interface « #XP_RSA » [22], l’outil numérique déployé dans le cadre de la récente réforme du #RSA. Cette interface n’est rien d’autre qu’un agenda partagé permettant de déclarer, et de contrôler, les quinze à vingt « #heures_d’activité » hebdomadaires dont vont devoir s’acquitter les bénéficiaires du minima social. Son remplissage forcé est un pas supplémentaire vers le #flicage des plus précaires.

    Côté IA, France Travail a lancé en 2024 le programme « #Data_IA » [23], successeur d’Intelligence Emploi mentionné plus haut. Présenté avec fracas au salon de l’« innovation technologique » VivaTech – organisé par le groupe Publicis –, on retrouve parmi les projets en développement une #IA_générative visant à numériser l’accompagnement et la #recherche_d’emploi (« #Match_FT ») [24]. France Travail s’intéresse aussi aux « #maraudes_numériques » pour « remobiliser les jeunes les plus éloignés de l’emploi » [25] et au développement d’« #agences_virtuelles » [26].

    #Austérité, automatisation et #précarisation

    La numérisation de France Travail signe la naissance d’un modèle de gestion de masse où coexistent une multitude d’algorithmes ayant chacun la tâche de nous classifier selon une dimension donnée. Risque de « fraude », de « dispersion », de « perte de confiance », suivi des diverses obligations : les capacités de collecte et de traitements de données sont mises au service de la détection, en temps réel, des moindres écarts à des normes et règles toujours plus complexes [27]. Cette numérisation à marche forcée sert avant tout à contrôler les personnes sans emploi [28].

    À l’heure où Gabriel Attal annonce une énième réforme de l’assurance-chômage passée en force alors que l’Assemblée nationale est dissoute, ce contrôle ne cache plus son but : forcer les plus précaires à accepter des #conditions_de_travail toujours plus dégradées [29].

    Loin des promesses de « libérer du temps pour les conseillers » ou d’offrir un accompagnement « plus réactif et plus personnalisé » [30] aux personnes sans emploi, cette numérisation contribue à la déshumanisation d’un service essentiel et à l’#exclusion des plus précaires, voire tend à une généralisation du #non-recours_aux_droits. Il ne s’agit pas d’idéaliser le traitement « au guichet », mais de rappeler que la numérisation forcée accentue les écueils de ce dernier. En accompagnant la fermeture des points d’accueil, elle transfère une partie du travail administratif aux personnes usagères du service public, participant à l’éloignement de celles et ceux qui ne sont pas en mesure de le prendre en charge [31].

    En standardisant les processus d’accompagnement, via la #quantification de chaque action et le profilage de toute une population, elle restreint les possibilités d’échange et supprime toute possibilité d’accompagnement réellement personnalisé [32].

    En facilitant le contrôle généralisé, elle accentue enfin la #stigmatisation des plus précaires et participe activement à leur #paupérisation.

    –-

    Mise à jour du 12 juillet 2024

    À la suite de notre article, France Travail, via son directeur général Thibaut Guilly, a souhaité exercer son droit de réponse que nous publions ci-dessous in extenso.

    « Madame, Monsieur,

    Je reviens vers vous suite à mon précédent courrier du 2 juillet.

    Bien que le délai de 3 jours prévu à l’article 1.1-III de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique soit aujourd’hui expiré, je constate que le droit de réponse qui vous a été adressé n’a pas été publié. Pour rappel, le non-respect de cette obligation est passible d’une amende de 3 750 €.

    Aussi, je réitère par la présente ma demande de publication d’un droit de réponse suite à la parution le 25 juin 2024 de l’article intitulé « A France Travail, l’essor du contrôle algorithmique » (librement accessible à l’adresse : https://www.laquadrature.net/2024/06/25/a-france-travail-lessor-du-controle-algorithmique).

    Dans cet article, vous évoquez un « service public de l’emploi largement automatisé », ainsi qu’une utilisation des algorithmes qui « contribue à la déshumanisation d’un service essentiel », favorise « la stigmatisation des plus précaires et participe activement à leur paupérisation » et constitue « un pas supplémentaire vers le flicage des plus précaires ». Il s’agirait d’une « extension des logiques de surveillance de masse visant à un contrôle social toujours plus fin et contribuant à une déshumanisation de l’accompagnement social », cette « numérisation à marche forcée ser[van]t avant tout à contrôler les personnes sans emploi ». Vous faites également état de « la fermeture des points d’accueil ».

    Nous nous inscrivons en faux contre ces propos erronés qui conduisent à jeter un discrédit sur le travail des plus de 55 000 collaborateurs qui accompagnent chaque jour les demandeurs d’emploi et les entreprises et à travestir la réalité concernant l’usage que nous faisons de ces algorithmes.

    L’utilisation des algorithmes au sein de France Travail ne vise en aucun cas à remplacer le travail des conseillers. L’intelligence artificielle (IA) vient en complément et ne se substitue jamais à une intervention humaine. Au contraire, nous concevons les algorithmes et l’IA comme des outils d’aide à la décision pour les conseillers ou un moyen de leur libérer du temps administratif afin de leur permettre de se consacrer pleinement à l’accompagnement des demandeurs d’emploi.

    Toute utilisation d’algorithmes est en outre encadrée par une charte éthique (https://www.francetravail.org/accueil/communiques/pole-emploi-se-dote-dune-charte-pour-une-utilisation-ethique-de-linte) qui décrit nos engagements pour garantir un cadre de confiance respectueux des valeurs de France Travail, à l’opposé de toute « notation de chômeurs » que vous pointez dans votre article. Un comité d’éthique externe composé de personnalités qualifiées garantit le respect de ce cadre. En aucun cas, les algorithmes ne sont utilisés pour « encourager les demandeurs d’emploi à accepter des emplois au rabais ».

    Concernant la « mécanisation » ou la « déshumanisation » de l’accompagnement que vous avancez, c’est méconnaitre le travail que réalisent les conseillers quotidiennement dans plus de 900 agences ou par téléphone. Aucun projet de fermeture d’agence n’est d’ailleurs envisagé contrairement à ce que vous dites et France Travail est un des rares services publics à être ouvert tous les jours, sur flux le matin et sur rendez-vous l’après-midi. Plus de 8,8 millions de personnes sont venues dans nos agences l’année dernière. Cet accueil en agence reflète justement notre politique de proximité et d’accompagnement notamment des plus précaires. L’ambition de la loi pour le plein emploi est en outre de renforcer l’accompagnement humain des plus éloignés, en particulier des bénéficiaires du RSA.

    Vous parlez enfin de « flicage des plus précaires » à travers l’utilisation d’algorithmes concernant le contrôle de la recherche d’emploi et la lutte contre la fraude. Il convient tout d’abord de souligner que ce sont deux activités distinctes, le contrôle de la recherche d’emploi ne saurait être assimilé à de la lutte contre de la fraude, qui est, par définition, une activité illégale et susceptible de poursuites pénales. Sur ce dernier point, l’utilisation des données dans la lutte contre la fraude vise avant tout à protéger nos usagers. En effet, la majorité des situations recherchées par les équipes de France Travail ne concerne pas des demandeurs d’emploi mais des individus qui détournent les services d’indemnisation du chômage, bien souvent au préjudice de nos usagers : usurpation d’identité des demandeurs d’emploi pour s’approprier leurs droits à l’assurance chômage ou détourner leurs paiements, individus se fabricant un faux passé professionnel ou une fausse résidence en France pour ouvrir des droits indus. Concernant le contrôle de la recherche d’emploi, là encore nous réfutons vivement l’idée selon laquelle nous mènerions une chasse aux plus précaires. Tout demandeur d’emploi inscrit à France Travail bénéficie de droits mais a également des devoirs qui lui sont présentés dès son inscription, dont celui de rechercher activement un emploi. 600 conseillers sont dédiés à ce contrôle et là encore, l’IA est un outil d’aide et en aucun la pierre angulaire des contrôles réalisés par ces conseillers en contact avec les demandeurs d’emploi tout au long de ce processus de contrôle. Là encore votre article méconnaît le travail de nos conseillers et constitue une atteinte à leur engagement et à leur intégrité.

    Je vous remercie de publier sans délai ce droit de réponse. A défaut, je me réserve la possibilité de saisir les juridictions à cet effet.

    Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes sincères salutations.

    Thibaut Guilluy »

    Notre réponse :

    À la suite de notre article, France Travail, via son directeur général Thibaut Guilly, nous a initialement écrit pour faire des remarques d’ordre général sur notre article. Puis, dans une nouvelle lettre reçue aujourd’hui, il est subitement passé aux menaces : nous n’aurions, selon lui, pas fait droit à sa prétendue « demande de publication d’un droit de réponse ». Ces menaces sont particulièrement malvenues et, au demeurant, totalement vaines, puisque rien dans son courrier initial n’indiquait qu’il s’agissait d’une demande de droit de réponse…

    Le directeur général de France Travail s’en tient à une poignée d’éléments de langage sans jamais répondre sur le fond. Pas un mot sur la multiplication des algorithmes de profilage à des fins de contrôle. Tout au plus y apprend-on que des algorithmes d’IA sont aussi utilisés à des fins de « contrôle de la recherche d’emploi », ce que nous ignorions.

    Cette lettre se borne ainsi à un simple exercice, maladroit et malvenu, de communication. Elle s’essaye vainement à réfuter l’expression de « flicage des plus précaires » pour décrire les outils de surveillance des allocataires du RSA. La mise en place d’un agenda partagé pour le contrôle des 15 à 20 heures d’activité de ces dernier·ès serait ainsi – il faut savoir apprécier l’humour – une mesure visant à « renforcer l’accompagnement humain ».

    Quant à l’impact de la numérisation sur l’accueil des plus précaires, le directeur général de France Travail nie la réalité, tout comme son homologue de la CNAF, afin de minimiser l’étendue de la surveillance et le projet politique sous-jacent. Qu’a-t-il donc à répondre à la Défenseure des droits qui, en 2022 dans son deuxième rapportsur la dématérialisation des services publics, rappelait la hausse des inégalités et des réclamations en raison de cette dématérialisation « à marche forcée » ?

    Enfin, opposer, comme le fait cette lettre, le travail des salarié·es de France Travail et notre action de documentation et d’alerte sur les abus de l’administration est stérile : la déshumanisation et le changement de nature du service public se font non seulement au détriment des personnes au chômage mais également des agent·es de France Travail, comme l’ont dénoncé syndicats et associations au moment de la réforme de l’assurance chômage et la transformation de Pôle Emploi en France Travail [33].

    Ce que cette lettre souligne avant tout c’est donc l’absence de recul, de capacité de remise en cause et d’esprit critique du directeur général de France Travail quant à l’extension des logiques de contrôle numérique au sein de son institution. Ou sa pleine adhésion à ce projet.
    Notes

    [1] Voir cette note de synthèsenote de synthèse revenant sur les premières expérimentation faites par Pôle Emploi.

    [2] Voir cet article sur l’implication de Cap Gemini dans la réalisation de l’outil de scoring.

    [3] L’expression « score de suspicion » est extraite de l’analyse d’impact disponible ici, celle de « signaux faibles » d’une note de suivi des travaux OCAPI 2018 disponible ici, celle d’« indices » de l’ article présentant la collaboration de France Travail avec Cap Gemini. Quant au terme d’« escroquerie », il est issu d’un échange de mails avec un·e responsable de France Travail.

    [4] L’algorithme utilisé semble se baser sur des arbres de décisions, sélectionnés via XGBoost. Les principaux cas d’entraînement semblent être la détection de périodes d’activité dites « fictives » – soit des périodes de travail déclarées mais non travaillées – d’usurpation d’identité et de reprise d’emploi non déclarée. Voir ce document.

    [5] Nous accompagnons différentes personnes dans des demandes d’accès à leurs données personnelles. Pour l’instant, France Travail s’est systématiquement opposé à leur donner toute information, en violation du droit.

    [6] Voir notamment nos articles sur l’algorithme de la CAF, en tout point similaire à cette page.

    [7] Ce programme, financé à hauteur de 20 millions d’euros par le Fond de Transformation de l’Action Publique a été construit autour de 3 axes et s’est déroulé de 2018 à 2022. Voir notamment la note de 2020 envoyée à la DINUM par France Travail, disponible ici.

    [8] Rapport annuel 2018 de Pôle Emploi disponible ici.

    [9] Voir cette note envoyée par Pôle Emploi à la DINUM.

    [10] voir note 9

    [11] Voir ce support de webinaire.

    [12] En partie puisqu’au cœur des algorithmes du JRE, nulle trace de machine learning ou de traitements statistiques complexes. Chaque score résulte de l’application de règles simples, bien loin des ambitions initiales de recours à l’intelligence artificielle. Les dirigeant·es de France Travail semblent ici avoir éprouvé les limites d’un techno-solutionnisme béat. Voir ce document. À noter aussi que ce document évoque une « brique IA Mire » portant sur la détection de « situations de décrochage ». Il se pourrait donc que des algorithmes plus avancés soient en développement.

    [13] Le JRE est une refonte de l’interface numérique. Voir à ce sujet l’excellent article de Basta disponible ici. Si le JRE ne semble pas avoir été créé dans le cadre du programme Intelligence Emploi, il semble avoir été le cadre d’expérimentations de plusieurs des solutions produites. Voir ici.

    [14] Voir le document « Fiches pratiques à destination des conseillers » portant sur le JRE disponible ici.

    [15] Les documents les plus parlants sur la mécanisation de l’accompagnement via le JRE sont ce support et ce document à destination des conseiller·es. Voir aussi les documents que nous mettons en ligne sur l’utilisation d’IA pour générer des conseils automatisés, consultables par les personnes sans emploi et les conseiller·es.

    [16] Voir cette interview du directeur actuel de France Travail.

    [17] Pour un aperçu historique de la notion d’employabilité, voir le chapitre 5 de France Travail : Gérer le chômage de massse de J.-M Pillon.

    [18] Voir cette note envoyée par Pôle Emploi à la DINUM en 2020.

    [19] Voir cette autre note envoyée par Pôle Emploi à la DINUM en 2021.

    [20] voir note 18

    [21] Voir ce document sur l’utilisation de l’IA à Pôle Emploi.

    [22] Voir ce document de présentation de XP RSA.

    [23] Voir ce document de présentation du programme Data IA.

    [24] Pour Match FT, voir cet entretien, ce tweet et cet article de la Banque des Territoires. Voir aussi Chat FT, l’IA générative pour l’instant dédiée aux conseillers·es, dans ce document.

    [25] Voir ce tweet.

    [26] Voir ce tweet.

    [27] Sur la réforme à venir, voir notamment cet article du Monde. Sur le triplement des contrôles, voir cet articledu même journal.

    [28] Sur l’histoire du contrôle à France Travail, voir le livre Chômeurs, vos papiers de C. Vivès, L. Sigalo Santos, J.-M. Pillon, V. Dubois et H. Clouet, le rapport Le contrôle des chômeurs de J.-M. Méon, E. Pierru et V. Dubois disponible Sur le triplement des contrôles, voir ici et le livre France Travail : gérer le chômage de masse de Jean-Marie Pillon.

    [29] voir note 27

    [30] Voir, entre autres, cette vidéo du responsable du programme Data IA.

    [31] Voir le livre L’Etat social à distance de Clara Deville.

    [32] Voir le texte Déshumaniser le travail social de Keltoum Brahan et Muriel Bombardi, publié dans le numéro de février 2017 de CQFD.

    [33] La CGT a dénoncé une réforme qui n’« est pas favorable » aux personnes sans emploi. La CGT Pôle Emploi y voit une numérisation du service public qui « détruira les nécessaires relations humaines, et accentuera la fracture numérique et donc la précarité » et une réforme qui va « renforcer les devoirs au détriment des droits », ou encore « accroître les tensions entre les agents et les demandeurs d’emploi ». Solidaires a dénoncé le caractère « trompeur » de l’accompagnement. Côté personnes sans emploi, le constat est le même : cette transformation rend les personnes « Coupable[s] d’être au chômage » d’après le comité National CGT des Travailleurs Privés d’Emploi et Précaires. Enfin, les associations de solidarité et des syndicats ont ensemble dénoncé dans le Monde le « risque des contrôles abusifs de la situation globale des ménages ».

    https://lagrappe.info/?A-France-Travail-l-essor-du-controle-algorithmique-1132
    #algorithme #chômage #profilage

  • Sweden is a nearly cashless society – here’s how it affects people who are left out
    https://theconversation.com/sweden-is-a-nearly-cashless-society-heres-how-it-affects-people-who

    Dans une société sans argent les infortunés sont exclus de tout. Tu meurs de faim devant les étalages d’aliments parce que tu n’a pas l’autorisation d’acheter. C’est l’enfer.

    18.12.2024 by Moa Petersén - Around the world, cards and apps are the default way to pay – but nowhere is the transition away from cash more obvious than in Sweden. The Bank of Sweden notes that the amount of cash in circulation in the country has halved since 2007.

    Part of this is due to a unique Swedish law that prioritises “freedom of contract” above any legal requirement to accept cash. In other words, it is up to businesses – including banks – whether they take cash. Public transport, stores and services typically do not accept cash as payment, and there is no infrastructure for paying bills over the counter.

    The transition to cashlessness accelerated when a group of banks created the mobile payment app Swish in 2012. By 2017, Sweden was using less cash than other European countries. Today, more than 80% of the population has a Swish account.

    For most Swedes, the cashless economy is swift and convenient. As long as you have a bank account and can access the technology, you probably live a cashless life already. But for the few people who still depend on cash, life is getting harder.

    Our recent research shows how this affects the worst-off groups in Sweden’s cashless society. Our interviewees live in poverty-induced cash dependence, meaning they rely on cash payments because they are unbanked, lack credit or cannot afford digital technology.

    While it is difficult to measure just how many people depend on cash, older people, particularly, are struggling to pay bills digitally.

    Some of those we interviewed are homeless or have mental health issues. Others live on a very low income. The obstacles they face are both practical and cultural. They feel like delinquents, undervalued and locked out of participating in much of daily life.
    Being cash-dependent in Sweden

    If cash is the only money you have or the only money you can manage without help, you are confined to “cash bubbles”. Cash works like a local currency, isolated from the rest of the economy.

    In the cash bubble, you can buy necessities and go to no-frills cafes, but you can’t pay for parking and you can’t pay bills without help. Volunteers at local community groups told us that they spend most of their time doing people’s banking for them.

    A Ukrainian refugee, who can’t get a bank account because of their migration status, worried about a bill from the local health clinic that they had no technical means of paying.

    Homeless people who sleep in cars can’t use the cashless parking meters, so an illicit market has emerged where people with smartphones and bank accounts pay for their parking at a substantial extra cost. It’s expensive to be digitally poor.

    Our interviewees felt left behind in a society that does not care about their ability to participate. With a mix of shame, anger and resignation, they described everyday humiliations. One woman saved up to buy her grandchild a gift she wanted, only to be told at the till – grandchild in hand – that they didn’t accept her money. “I felt like a thief,” she told us.

    Sweden’s cashless transition

    Swedes are known to be early and uncritical adopters of technology – this has become part of the country’s self-image. In 2017, business researchers predicted that cash would be irrelevant in Sweden by March 2023. It didn’t quite happen, but near enough.

    Over the last 150 years, technological innovations and entrepreneurship have propelled the country from severe poverty to being one of the richest in Europe.

    The Swedish case is even more special due to the pervasive role of banks in the payment and identification infrastructure. Banks created the widely used payment app Swish, and also issue the electronic ID needed to access public services like the tax authority and benefits for illness, disability and unemployment.

    Consequently, if you are not a bank customer, you can’t access these public services.

    During the pandemic, fears of contamination made handling physical money seem like a health hazard. “I hate cash. It’s dirty,” as one Swedish tech entrepreneur put it.

    All of these factors combined have led to a modern Swedish society where digital money is good and cash is associated with crime and dirt. For people who still depend on cash payments, this stigma adds to their sense of being left out.

    In Sweden, as in many other countries, a fully cashless economy feels inevitable in the coming years. But as we have found, people who rely on cash due to poverty are left without the means to manage independently or even to pay their bills.

    This is not just a practical issue, but an emotional one. There is a sense of loneliness, of loss of community and human connection in the digital economy. As one of our interviewees said: “It’s not just cashlessness. I feel that human beings have disappeared. We live like robots; click here, click that. Digitisation has made people lonely.”

    #Suède #cash #paiement #exclusion_sociale

  • Code de conduite | Duchess France
    https://www.duchess-france.fr/coc

    Toute personne qui nuit au bon fonctionnement de la communauté s’expose à des sanctions allant du rappel à l’ordre jusqu’à l’exclusion du Slack et des évènements de la communauté. Les sanctions sont à la discrétion de la Core Team Duchess.

    –---

    Code de conduite - Paris Web
    https://www.paris-web.fr/code-de-conduite

    Nous ne tolèrerons aucune forme d’attaque personnelle quelle qu’elle soit. Les personnes participant à l’événement qui violeraient ces principes pourront être sanctionnées et expulsées à la discrétion de l’équipe d’organisation.

    –---

    Ce fil propose de recenser les #codes_de_conduite dans les communautés.

    #sexisme #logiciel #communauté #gestion_des_agressions #modération #exclusion #judiciarisation_improvisée

  • #Mayotte : #histoire_coloniale, fractures sociales et désastre environnemental

    Mayotte, petite île de l’océan Indien, symbolise à elle seule la collision brutale entre histoire coloniale, fractures sociales et désastres environnementaux. Département français depuis 2011, elle est un territoire en #crise, où la #misère humaine et les #catastrophes_naturelles s’entrelacent dans une spirale infernale. Les événements récents – #séismes, #tornades, #montée_des_eaux – ne sont que la face visible d’un #effondrement plus global. Ils révèlent une #vulnérabilité accumulée sur des décennies, amplifiée par des promesses non tenues, des #inégalités criantes et une gestion déconnectée des réalités locales.

    En 1974, Mayotte se sépare des Comores à l’issue d’un référendum où les Mahorais choisissent de rester français. Ce choix, né du désir d’échapper à l’instabilité politique des Comores indépendantes, place l’île dans une situation paradoxale : elle devient un territoire français entouré de voisins économiquement fragiles. Cette appartenance à la République française, vue comme une chance à l’époque, isole Mayotte de son propre environnement géographique et culturel. Rapidement, cette singularité engendre des tensions avec les autres îles de l’archipel, notamment l’île comorienne d’#Anjouan, d’où proviennent chaque année des milliers de migrants.

    L’intégration comme département, survenue en 2011, devait marquer une nouvelle ère pour Mayotte. Les Mahorais espéraient voir leur île se développer et accéder à des droits égaux à ceux des métropolitains c’est-à-dire que s’y applique pleinement les lois françaises et européennes, à la différence d’une collectivité territoriale. Mais cette #départementalisation s’est révélée un leurre. La croissance fulgurante de la population, (76 000 habitants en 1991, 300 000 habitants en 2023), dépasse largement la capacité des #infrastructures et des #services_publics à répondre aux exigences, tout en exacerbant l’obsolescence des équipements, faute d’entretien.

    Effondrement des services publics

    L’#éducation, en particulier, est le symbole de cet #échec. Avec des classes surchargées, des enseignants en sous-effectifs et des écoles délabrées, le #système_scolaire est incapable de répondre aux besoins d’une jeunesse nombreuse et en quête d’avenir. Cet effondrement du #système_éducatif alimente un sentiment d’#abandon et de #mépris parmi les Mahorais. Ils constatent chaque jour que la promesse d’#égalité_républicaine reste une illusion.

    Les infrastructures sanitaires et sociales sont tout aussi défaillantes. Les femmes comoriennes qui bravent les flots pour accoucher à Mayotte afin que leurs enfants acquièrent la nationalité française, contribuent à une #pression_démographique croissante. Mais ces enfants, bien que nés sur le sol français, grandissent souvent dans des conditions indignes. Ils alimentent les #bidonvilles, des espaces d’#exclusion où se forment des #bandes_de_jeunes livrés à eux-mêmes, vecteurs de #violences et d’#émeutes récurrentes. À leur majorité, en vertu du #droit_du_sol, ces enfants peuvent acquérir la #nationalité_française.

    La #colère gronde dans une population qui se sent méprisée, prise en étau entre un État central distant et des besoins locaux criants. Mais ce mépris ne se limite pas aux politiques sociales : il se manifeste aussi dans la gestion de l’#environnement. Mayotte est une île en pleine #dégradation_écologique, où les bidonvilles, sans réseaux d’#assainissement, rejettent leurs #déchets dans une #mer polluée, comme j’ai pu l’étudier dans le cadre d’une mission pour l’association Littocean. La destruction des #mangroves (due à un #développement_urbain incontrôlé et au #changement_climatique) et en conséquence des #récifs_coralliens, essentiels pour limiter l’#érosion et les submersions marines, témoigne de l’incapacité à relier environnement et développement.

    Une gestion écologique devenue symbole technocratique

    À cela s’ajoute un paradoxe criant : tandis que les populations locales luttent pour survivre, des moyens considérables sont mobilisés pour protéger l’écosystème marin par le biais du #parc_naturel de Mayotte. Ce parc, destiné à préserver la #biodiversité exceptionnelle des récifs coralliens, devient un symbole d’une gestion technocratique déconnectée des réalités humaines. Les Mahorais, exclus de ce projet, perçoivent cette #conservation comme une nouvelle forme de #colonialisme : une « #colonisation_bleue » où la priorité est donnée à la #nature, administrée par l’État français, au détriment des habitants. Ce fossé entre la préservation de l’environnement et les besoins des communautés accentue le #sentiment_d’abandon et l’idée que Mayotte n’est qu’un territoire périphérique, instrumentalisé pour des objectifs extérieurs et géopolitiques, traité comme une colonie et non comme un territoire français à part entière.

    Dans ce contexte, le changement climatique agit comme un catalyseur. Il intensifie les phénomènes naturels extrêmes, tels que les cyclones ou les #sécheresses, et exacerbe les inégalités. L’élévation du niveau de la mer menace directement les habitations précaires situées sur les littoraux, tandis que les ressources en #eau, déjà insuffisantes, s’amenuisent. Les catastrophes naturelles se multiplient, mais elles ne sont pas de simples fatalités : elles frappent un territoire déjà fragilisé, où chaque événement climatique devient un désastre humain par manque de préparation.

    Un avenir impensable et tragique

    Face à cette accumulation de crises, c’est le rapport au temps qui interroge. À Mayotte, l’idée même d’un avenir semble inatteignable. Les Mahorais vivent dans un présent sans repères, où les mêmes drames – émeutes, violences, destructions – se répètent sans fin. François Hartog, dans sa réflexion sur le #présentisme, décrit cet état où le passé perd sa valeur, où le futur est inconcevable, et où seul le présent s’impose, figé dans l’#urgence et l’incapacité d’anticiper.

    Mayotte incarne cette #temporalité_brisée. L’île n’a pas de nostalgie d’un âge d’or, car son histoire est marquée par des fractures successives : colonisation, séparation des Comores, départementalisation ratée. Elle n’a pas non plus de projet d’avenir, car les conditions de vie, les inégalités et les crises structurelles la maintiennent dans un état d’urgence permanent. Ce présentisme exacerbé renforce le sentiment d’#impuissance, rendant impossible toute perspective de reconstruction ou de progrès.

    La situation actuelle de Mayotte peut être qualifiée d’#hypercriticité : un état où les #tensions_sociales, politiques et environnementales atteignent un point de rupture, où chaque élément, même mineur, peut précipiter un #effondrement_global.

    Ce terme désigne non seulement l’accumulation des #vulnérabilités, mais aussi l’incapacité à s’en extraire. L’hypercriticité, c’est l’impossibilité de penser au-delà de l’urgence, l’incapacité de construire des ponts entre les crises pour trouver des solutions globales. À Mayotte, cet état est visible dans chaque aspect de la vie : dans l’école qui échoue à offrir un avenir, dans les bidonvilles qui s’étendent, dans la mer qui rejette les déchets de l’île et engloutit peu à peu ses côtes, dans l’#accès_à_l’eau et à un environnement sain, dans la pression démographique et ses conséquences écologiques.

    Cette crise révèle une conjonction inédite entre deux histoires : celle, humaine, de la #globalisation, avec ses migrations, ses inégalités et ses #fractures_coloniales ; et celle, planétaire, d’une Terre abîmée par la dégradation accélérée des écosystèmes. Comme l’explique Dipesh Chakrabarty dans "Une planète, plusieurs mondes" (https://www.cnrseditions.fr/catalogue/histoire/une-planete-plusieurs-mondes), ce croisement marque une #rupture : à Mayotte, cette rencontre s’incarne dans une « planète des pauvres », où les damnés de la Terre subissent de plein fouet l’amplification de ces dynamiques destructrices. Ici, les vulnérabilités humaines et écologiques se confondent dans un cycle sans précédent, soulignant la nouveauté tragique de cette crise.

    Toutefois, l’hypercriticité peut aussi être un point de départ. Elle force à regarder en face l’ampleur des problèmes et à repenser radicalement les relations entre les hommes, leur territoire et leur futur. Si Mayotte continue sur cette voie, elle risque de devenir un archétype de l’#effondrement_insulaire, un avertissement pour d’autres territoires. Mais si elle parvient à dépasser ce présentisme, à prendre en compte l’histoire passée, à s’attaquer aux urgences présentes tout en imaginant un avenir collectif mettant en avant la #double_identité mahoraise française et comorienne pour en faire un exemple d’#hybridité_culturelle réussie, elle pourrait, paradoxalement, transformer sa fragilité en force, en inventant un modèle résilient face aux défis du XXIe siècle. Le temps, à Mayotte, n’a pas encore retrouvé son cours, mais il n’est pas trop tard pour le remettre en mouvement.

    https://theconversation.com/mayotte-histoire-coloniale-fractures-sociales-et-desastre-environne
    #Comores #colonialisme #environnement

  • Krankenversicherung: Kassenverband fordert Ende der Bevorzugung von Privatversicherten
    https://www.zeit.de/gesundheit/2024-12/spitzenverband-gesetzliche-krankenversicherung-privatpatienten

    26..12.2024 - Privatpatienten kommen meist schneller an Termine als gesetzlich Versicherte. Der Spitzenverband der gesetzlichen Krankenkassen fordert ein Ende dieser „Diskriminierung“.

    Krankenversicherung: Gesetzlich Versicherte warten oft Wochen auf einen Termin, während Privatpatienten schneller drankommen. Der Kassen-Spitzenverband will, dass sich das ändert.
    Gesetzlich Versicherte warten oft Wochen auf einen Termin, während Privatpatienten schneller drankommen. Der Kassen-Spitzenverband will, dass sich das ändert.

    Der Spitzenverband der gesetzlichen Krankenkassen hat die nächste Bundesregierung dazu aufgefordert, die Bevorzugung von Privatpatienten bei der Vergabe von Arztterminen gesetzlich zu beenden. Laut der stellvertretenden Verbandschefin Stefanie Stoff-Ahnis erhalten Privatversicherte häufig schneller Termine als gesetzlich Versicherte, was zu einer Benachteiligung der Mehrheit der Versicherten führe. „Wer echte Gleichbehandlung will, sollte dafür sorgen, dass bei der Terminvergabe nicht mehr danach gefragt werden darf, ob jemand gesetzlich oder privat versichert ist“, sagte Stoff-Ahnis gegenüber dem RedaktionsNetzwerk Deutschland (RND).

    Stoff-Ahnis kritisierte insbesondere, dass auf Buchungsportalen gesetzlich Versicherte oft wochenlang auf einen Facharzttermin warten müssten, während Privatpatienten häufig bereits am nächsten Tag einen Termin erhalten. Diese ungleiche Behandlung von Patienten sei nicht akzeptabel, betonte Stoff-Ahnis, und sprach von einer „Diskriminierung der gesetzlich Versicherten“. Sie forderte, dass die Terminvergabe künftig ausschließlich auf Basis der medizinischen Notwendigkeit erfolgen müsse, unabhängig vom Versicherungsstatus.

    Zusätzlich schlug der Verband vor, alle Arztpraxen gesetzlich dazu zu verpflichten, ihre freien Termine tagesaktuell auf einem Onlineportal zu veröffentlichen. Über dieses Portal, auf das Krankenkassen und die Kassenärztlichen Vereinigungen zugreifen können, könnten Termine direkt vermittelt werden. Dies würde, so Stoff-Ahnis, einen diskriminierungsfreien Zugang zu Arztpraxen ermöglichen und sicherstellen, dass die Versorgung aller Versicherten transparenter und gerechter werde.

    #Allemagne #politique #social #assurence-maladie #exclusion #privilèges #nantis

  • RSA : une réforme pour « mettre fin » à une « fatalité », affirme le directeur de France Travail
    https://www.lanouvellerepublique.fr/a-la-une/rsa-une-reforme-pour-mettre-fin-a-une-fatalite-affirme-le-direc


    Thibaut Guilluy, directeur de France Travail.
    © (Photo AFP)

    Auprès de l’AFP, le directeur de #France_Travail (ex-Pôle Emploi) Thibaut Guilluy défend la réforme du #RSA, qui va être généralisée progressivement à partir de janvier. Entretien.

    Accompagnement personnalisé et #heures_d’activité pour mieux insérer les #allocataires : le directeur général de France Travail Thibaut Guilluy défend auprès de l’AFP la réforme du RSA, qui va être généralisée progressivement à partir de janvier, pour mettre fin à un « phénomène d’exclusion », selon lui.

    Quels sont les objectifs de la réforme ?

    « Il s’agit de mettre fin au phénomène d’#exclusion qu’entraînait le RSA (revenu de solidarité active), qui se résumait à une allocation (635,70 € pour une personne seule) et à un manque d’#accompagnement réel pour le retour à l’#emploi.

    Avant, plus de 50 % des personnes au RSA l’étaient depuis plus de quatre ans, et en moyenne c’étaient trois contacts par an, mails compris, donc des chances très faibles de retourner à l’emploi. Cela augmente fortement les #dépenses d’allocation. On est passé à 13 milliards de dépenses d’allocations, et chaque année qui passe, cela réduit les chances pour un allocataire qui tombe dans le RSA de pouvoir s’en sortir.

    L’objectif, c’est de mettre fin à cette fatalité qui est quasi organisée depuis plus de trente ans. »

    Comment comptez-vous y arriver ?

    « Cela suppose un accompagnement personnalisé pour tous, dont l’objectif est le retour à l’emploi, à l’autonomie par le #travail, grâce à une alliance, une coopération forte entre France Travail, qui apporte la capacité sur le retour à l’emploi, et le #département qui a le savoir-faire sur la prise en charge des problématiques sociales et d’#insertion professionnelle.

    Il faut arrêter de faire perdre du temps aux gens par des processus administratifs hyperlents. Cela pouvait prendre jusqu’à 5-6 mois pour le démarrage d’un soutien dans son parcours d’insertion de retour à l’emploi. Avec la réforme, l’orientation, on la fait en moyenne en quinze jours. »

    Quels enseignements tirez-vous de l’expérimentation qui a été menée et de l’activité obligatoire pour les allocataires ?

    « On a 90 % des bénéficiaires satisfaits de leur accompagnement, 50 % qui sont très satisfaits. Pour moi qui ai fait de l’insertion toute ma vie, ce n’est pas une surprise. Quand on s’occupe des gens, ils sont contents.

    Et concernant les quinze heures minimum (d’activité), si c’est mis en œuvre évidemment de façon personnalisée et intelligente, ce qui se passe dans l’immense majorité des cas, c’est perçu par les bénéficiaires du RSA plutôt comme une opportunité et une chance. C’est déjà encourageant de voir que 54 % des allocataires (qui ont bénéficié de l’expérimentation au cours des douze derniers mois) ont accédé à un emploi à un moment donné. »

    Est-ce que France Travail a des moyens suffisants pour généraliser la réforme ?

    « L’esprit de cette #réforme, c’est de faire mieux avec moins. Dans le département du Nord (un des premiers à lancer l’expérimentation) vous avez 20.000 bénéficiaires du RSA en moins à qui devoir payer des allocations, ça fait 180 millions d’euros d’économies (sur une année).

    Donc, vous pouvez en réinvestir quelques dizaines de millions d’euros dans l’insertion. C’est rentable, c’est bon pour les personnes, c’est bon pour les #entreprises et c’est bon pour les finances publiques.

    France Travail prévoit de quoi faire entre 180.000 et 200.000 accompagnements intensifs supplémentaires, avec l’aide de l’État qui apporte une subvention de 168 millions d’euros. »

    Ce qui se passe dans le Nord
    https://seenthis.net/messages/1089083#message1089170

    Ou dans l’Eure

    #sanctions #contrôle #cocotte_minute

    • Mais quel 💩 : ce n’est pas le RSA qui entraine l’exclusion, c’est l’exclusion qui a rendu nécessaire le machin-pansement totalement insuffisant qu’est le RSA.

      La bonne vieille d’inversion des causes pour mieux déblatérer de la 💩 qui permet de dissimuler les vrais objectifs : faire du gras sur les pauvres, les réduire à la misère pour pouvoir mieux les exploiter jusqu’à l’os.

    • Faut-il suspendre les sanctions contre les allocataires du RSA ? Le plaidoyer du médiateur de France Travail
      https://econostrum.info/suspendre-sanctions-rsa-france-travail

      Le médiateur national de France Travail, Jean-Louis Walter, s’est exprimé sur les défis liés à la mise en œuvre de la loi « plein emploi », qui prévoit notamment un accompagnement renforcé des allocataires du RSA. En effet,, il appelle à la prudence et recommande de différer toute sanction avant l’été 2025. Une démarche qui interroge sur la faisabilité et l’équité du dispositif dans un contexte de moyens limités et de transformation rapide.

      (...) « Les décrets d’application ne sont pas encore publiés, et les expérimentations menées sur 18 territoires depuis 2022 n’ont pas permis de résoudre des problèmes structurels majeurs, comme la faible interopérabilité des systèmes d’information », souligne-t-il dans son entretien avec Marianne.

  • zu: Krieg in den Städten | Klaus Farin
    https://klausfarin.de/presse/leserinnen-echo/zu-krieg-in-den-staedten

    Rezensionen (Auswahl)

    „In ihrem erschreckenden und inzwischen zu einem modernen Klassiker gewordenen Buch ‚Krieg in den Städten‘ untersuchen die Autoren Klaus Farin und Eberhard Seidel-Pielen die These vom ‚positiven Rassismus‘. Sie besagt, dass die von der übrigen Gesellschaft abgeschriebenen Jugendlichen überfordert werden durch die plakative Entgegensetzung ‚hier gute Ausländer‘ – ‚da böse Deutsche‘ und wie verhängnisvoll und grundfalsch die Forderung von Politikern, Journalisten und Pädagogen nach einseitigem Verständnis für die fremden Nachbarn ist, ohne die gleiche Forderung an deren Adresse zu richten. Nie dort gewesen, wo sie ihn verwirklicht sehen wollen, sind die Vertreter des ‚positiven Rassismus‘ blind gegenüber dem dualen Gesicht des Problems.“

    Ralph Giordano in: Wird Deutschland wieder gefährlich? Köln 1993.

    „… ein Kultbuch, das diesen Status auch verdient.“

    Torsten Borchers in: blick nach rechts

    „Das Beste ist, dass die Meinungen und Ansichten der Jugendgangs und der Rechtsradikalen gut dargestellt sind. Beide Seiten werden positiv und negativ beurteilt. Im Gegensatz zur Boulevard-Presse, die nur negativ bewertet und dadurch die Gesellschaft gegen die Jugend aufputscht. (…) Dieses Buch erzählt auch von den Ängsten, die die Jugendlichen haben …“

    Akin Özcan (14) in: Listen

    „… ein Taschenbuch, das keine Sensationsberichte, sondern aus der intimen Kenntnis der Szene dem Leser einen Schlüssel zum Verständnis der Ereignisse liefert. Es gibt derzeit kein besseres Buch über Jugendgangs.“

    Reiner Scholz in: Deutsches Allgemeines Sonntagsblatt

    „… ein Buch, das aneckt, das so recht in keine Schublade passen will – und das gerade deshalb so lebendig und authentisch ist. Sie lassen die Kids in ihrer ganzen Widersprüchlichkeit zu Wort kommen – tun dies in einer unverbrämt jugendlichen, direkten und zupackenden Sprache. (…) Seidel-Pielen und Farin ist es gelungen, ein Buch zu schreiben, das diese Kids nicht bevormundet, das sich aber auch nicht plump mit ihnen solidarisiert. Es ist ein schnelles, ein aggressives Buch. Ein Buch, das die vertrauten Erklärungsansätze so mancher Pädagogen und Sozialarbeiter über den Haufen werfen will. Unbedingt lesenswert.“

    Karsten Binder in: Radio Bremen 4

    „In Erich Böhmes ‚Talk im Turm‘-Show heizte der Berliner Journalist Klaus Farin beim Thema Rechtsradikalismus in den neuen Ländern dem CSU-Generalsekretär Erwin Huber unlängst derart ein, dass der sich erst nach der Sendung im Fahrstuhl zu wehren begann. Jetzt ist auch ein Buch erschienen. ‚Krieg in den Städten‘ basiert auf sorgfältig geführten Interviews. Zu Wort kommen Mitglieder multikultureller Streetgangs, Skinheads, Hooligans und Autonome. Weil die beiden Journalisten ihre Gegenüber ernst nehmen, entstanden außergewöhnliche Gespräche. Wenn in der nächsten Zeit wieder Farins und Seidel-Pielens Kollegen nach Berlin einfliegen, um Jugendgangs zu belauern, haben sie hoffentlich vorher ‚Krieg in den Städten‘ gelesen.“

    TIP Berlin

    „Erstaunlicherweise können die beiden schreiben, obwohl sie Deutsche sind.“

    Roland Schöny im Österreichischen Rundfunk

    „Sie durchkämmten die Jugendmilieus, suchten die Cliquen und Gangs von Skins, Punks, Antifa-Kämpfern und marginalisierten Migranten auf. Klaus Farin und Eberhard Seidel menetekelten einen ‘Krieg in den Städten‘, indem sie Verweigerung, Verwahrlosung und Gewaltbereitschaft als gesellschaftliche Symptome eines zerbröselnden Sozialstaats beschrieben. Das war 1991 – kurz nach der Wende in der DDR und der Deutschen, der europäischen Einheit, als Reformen neoliberal begründet und organisiert wurden, wo Politik und Wirtschaft Freiheit sagten und Enthemmung meinten. Über zwanzig Jahre danach ist das einstige Kultbuch des Rotbuch-Verlages – ergänzt durch ein aktuelles Nachwort der Autoren – jetzt wiederaufgelegt worden. Es zeigt, wie hellsichtig die damaligen Analysen waren. Gut für das Buch, weniger gut für die Gesellschaft, von der es erzählt.“

    Deutschlandradio

    #Allemagne #lutte_des_classes #libéralisme #exclusion #Krieg_in_den_Städten #jeunesse

  • Debatte Milieus: Im Windschatten der Generation Golf
    https://taz.de/Debatte-Milieus/!5096923

    3.4.2012 von Eberhard Seidel - Teile der Generation 35 plus wuchs privilegiert auf und grenzt sich heute unsolidarisch nach unten ab. In ihrem Schatten gibt es aber ein zweites Milieu, das mehr Hoffnung macht.

    D er Generation 35 plus kommt in einer Gesellschaft eine besondere Rolle zu. In diesem Alter haben die Menschen ihre Restjugend hinter sich gelassen. So langsam übernehmen sie die Verantwortungsjobs und die Ersten kommen wie Vizekanzler Philipp Rösler (*1973), Bundesfamilienministerin Kristina Schröder (*1977) und vorübergehend Karl-Theodor zu Guttenberg (*1971) in den Schaltzentralen der Macht an. Hinreichend Gründe also, um zu fragen: Wo kommen sie her? Und was waren die frühen, prägenden Einflüsse dieser nach 1970 Geborenen?

    Nach Ansicht von Florian Illies (*1971), dessen Buch „Generation Golf“ einem Teil dieser Alterskohorte vor gut zehn Jahren ihren Namen gab, ist diese Generation geprägt von einer materiell sorgenfreien Jugend. Sie genieße den Wohlstand, den die Eltern erarbeitet haben. Sie agiere daher im Gegensatz zur Vorgängergeneration sehr unpolitisch, bekenne sich zur eigenen Bürgerlichkeit und Spießigkeit, sei pragmatisch und erhebe den Hedonismus und das Markenbewusstsein zu einem Wert.

    Generationenerzählungen wie diese sind problematisch, da sie stets nur Teilsegmente einer Alterskohorte beleuchten. Es gibt auch andere Erzählungen.

    1989, als eine scheinbar grandiose Zukunft vor dieser Generation lag, ist nicht nur die Mauer gefallen, auch der Neoliberalismus hatte in ganz Deutschland gesiegt. Die Gewerkschaften verloren an Bedeutung, traditionelle Arbeitermilieus lösten sich auf. Dies tat 1985 auch die Band Ton Steine Scherben. Ihr „Macht kaputt, was euch kaputt macht …“ war fünfzehn Jahre lang der Soundtrack einer rebellischen, aufmüpfigen und anarchistischen Jugendkultur.

    Mit der Band und mit dem Fall der Mauer endete ein Kapitel deutscher Geschichte, die bislang zu wenig beachtet wurde. Die letzte homogen deutsche Jugendgeneration der Bundesrepublik wurde endgültig erwachsen. Für die in den 1950er und 1960er Jahren Geborenen war es keine allzu große Herausforderung, die gemeinsamen Wurzeln und ihre Identität in der deutschen Geschichte, in deutschen Familien und Traditionen zu finden.

    Für die nachwachsende Generation stellten sich hingegen neue Herausforderungen. Sie lauteten: Wie reagieren die nach 1970 Geborenen auf den Wandel durch Migration? Auf Diskriminierung und Rassismus? Auf ihre rechtliche und soziale Ungleichheit? Auf das Verschwinden der DDR, das Entstehen des neuen Deutschland? Auf welche gemeinsame Erzählung, auf welche gemeinsamen Traditionen und Werte werden sie sich einigen? Dieses bunte Mosaik der ethnischen und sozialen Herkunftsmilieus, das es so in der Geschichte Deutschlands nach 1945 noch nicht gegeben hat?

    Das Milieu der „Generation Golf“ blieb merkwürdig unberührt von all diesen Fragen. Aber außerhalb der geschützten Kinder- und Jugendzimmer der westdeutschen Mittelschicht tobte in diesen Jahren bereits ein harter Deutungs- und Verteilungskampf. Diesen Auseinandersetzungen haben wir unser Buch „Krieg in den Städten“ (1991 und 2012) gewidmet. Jugendgangs, häufig nach ethnischen Merkmalen gegründet, konkurrierten in jenen Jahren um die Dominanz in einem Viertel, einem Jugendklub oder einem Park.

    In diese Auseinandersetzungen waren vor allem die Kinder aus Einwanderer- und aus bildungsfernen Familien, aber auch aus den Familien der untergegangenen DDR verwickelt. Diese Heranwachsenden, nennen wir sie „Generation Krieg in den Städten“, waren unfähig zur Artikulation ihrer Interessen in den Jugendverbänden der Parteien, Gewerkschaften und Kirchen. Von der Erwachsenenwelt und den gesellschaftlichen Institutionen alleingelassen, stemmte sie sich mit zum Teil untauglichen, weil gewalttätigen Mitteln gegen Diskriminierung, Desintegration und sozialen Abstieg.

    Die Rebellion der Zukurzgekommenen

    „Krieg in den Städten“ – das war die bislang letzte laut vernehmbare Rebellion der Zukurzgekommenen, die letztlich nichts anderes als Teilhabe und den Einstieg in die neoliberale Konsumgesellschaft sowie gesellschaftliche Anerkennung forderten. Für den Staat und die Justiz war das ein leichter Gegner. Für viele mündete der eingeschlagene Weg in Jugendarrest und Knast. Die Mehrheit der „Generation Krieg in den Städten“ kämpft heute, zwanzig Jahre später, ums Überleben im Niedriglohnsektor.

    Auf Mitgefühl und Solidarität von den bessergestellten Angehörigen der „Generation Golf“ können diese Systemverlierer und ihre Kinder nicht unbedingt setzen. Solidarität und Einfühlungsvermögen gehören nicht zu deren Kernkompetenzen. Seit ein paar Jahren realisieren sie: Der lange sicher geglaubte (ererbte) Lebensstandard der westdeutschen Mittelschichten ist bedroht.

    Aggressiv grenzt sich dieses Milieu heute nach unten ab. Statt einer solidarischen, gemeinsamen Perspektive beschwört es eine Renaissance konservativ-bürgerlicher und bisweilen auch religiös-fundamentaler Werte. Es achtet auf Distinktion, häufig in Form kulturalistischer Islamdebatten. Es schickt seine Kinder auf (christliche) Privatschulen und strebt nach Homogenität – frei von sozialer und ethnischer Durchmischung. Ein solches Ausmaß an gewollter sozialer Segregation wie heute hat es seit Gründung der Republik noch nicht gegeben.

    Trotz dieser bedenklichen Entwicklungen gibt es keinen Anlass zum Pessimismus. Im Windschatten der saturierten „Golfer“ hat sich in der Generation 35 plus längst ein Milieu entwickelt, das nicht das Gestern der westdeutschen Provinz beweint, sondern zukunftsfähige Beiträge zu ihrem Generationenprojekt liefert, das da lautet: Wie wollen wir künftig in der entwickelten Einwanderungsgesellschaft im geeinten Deutschland in Zeiten der Globalisierung zusammenleben?

    Was sind die Themen und die Probleme? Fatih Akin (*1973), Juli Zeh (*1974), Yassin Musharbash (*1975), Jana Hensel (*1976), Bushido (*1978), Naika Foroutan (*1971), Judith Holofernes (*1976), Omid Nouripour (*1975), Hilal Sezgin (*1970), Bülent Ceylan (*1976) und viele andere gewinnen an Bedeutung. Sie belegen: Die Welt, sie bewegt sich doch. Auch in Deutschland.

    DER AUTOR

    EBERHARD SEIDEL ist Journalist und Geschäftsführer von „Schule ohne Rassismus - Schule mit Courage“.
    Die letze homogene Generation

    #Allemagne #lutte_des_classes #libéralisme #exclusion #Krieg_in_den_Städten

  • Depuis Macron, la police n’exclut plus les fonctionnaires violents

    Exclu Flagrant déni. Depuis 2018, il n’y a plus du tout d’#exclusions_disciplinaires pour les policiers violents. Brutalement, les #sanctions ont été divisées par dix. Sébastian Roché (CNRS) y voit un véritable « changement de standards ». Décryptage.

    A côté du pouvoir de #condamnation de la #justice, le ministère de l’Intérieur dispose d’un pouvoir de #sanction_disciplinaire sur les policiers. Darmanin ne cesse de clamer qu’il n’a « jamais eu la main qui tremble pour ceux qui déshonorent leur propre uniforme ». Bien loin des beaux discours, les chiffres prouvent qu’en cas de #violences, le ministre donne presque toujours l’#absolution. Analyse en un #graphique et trois leçons.

    1) Hausse de la #violence, mais baisse des sanctions

    Les #sanctions_disciplinaires internes à la #police prononcées pour #violences_illégitimes ont baissé brutalement depuis que #Macron est au pouvoir. Jusqu’en 2017, année de son élection, on compte une centaine de sanctions par an (parfois plus, parfois un peu moins). Brutalement, dès 2018, ce chiffre tombe à 20 ou 30 par an (voir également notre tableau avec les chiffres complets).

    Pour comprendre ces chiffres, nous avons interrogé #Sébastian_Roché, directeur de recherches au CNRS et spécialiste de la police. Il explique : « Il y a bien une rupture dans la série statistique, un décrochement. La méthode standard, c’est de chercher un élément qui aurait déclenché ce décrochement. Avec des données mensualisées, on aurait pu y voir plus clair, mais la transparence du ministère est insuffisante. Pour autant, on voit bien qu’il se passe quelque chose. En 2017 il y a une tendance à la baisse, puis une accélération de cette baisse ».

    « Or, poursuit le chercheur, sur cette même période, on constate qu’il y a une hausse de l’#usage_de_la_force et des #armes par la police. Il y a une élévation très nette du nombre de tirs de #LBD, de #grenades sur cette période, notamment pendant la crise des #Gilets_jaunes ». En effet, entre les mandats de Hollande et de Macron, le nombre de tirs de LBD a été multiplié par trois.

    Sébastian Roché analyse : « On pourrait imaginer que plus on demande à la police d’intervenir, plus il y a de confrontations, et plus y a de #fautes , ce serait logique. Or là c’est complètement l’inverse. Mon hypothèse c’est que la crise pousse les autorités à considérer que les comportements violents ne sont pas des fautes. Ces chiffres suggèrent ça ».

    2) Les « vraies » sanctions divisées par 10

    Les sanctions disciplinaires applicables aux policiers (comme à tous les fonctionnaires) sont classées en quatre groupes en fonction de leur gravité. Le premier groupe comprend les sanctions qui ne passent pas en commission de discipline et sont effacées du dossier du fonctionnaire au bout de trois ans : #blâme, #avertissement, #suspension_de_fonctions de trois jours maximum. En fait, comme l’explique Sébastian Roché, il s’agit plus de simples « #rappels_à_la_loi » (comme ceux que peuvent prononcer les procureurs devant la justice), que de vraies sanctions.

    Or, ces « rappels à la loi » constituent la majorité des sanctions prononcées en cas de violences illégitimes. Et depuis 2018, c’est presque les seules. Le ministère de l’Intérieur ne sanctionne quasiment plus ces comportements : 2,5 véritables sanctions en moyenne par an (autant dire rien), contre au moins une trentaine annuelle avant 2018. Dans le détail, depuis 2018, on compte seulement 11 exclusions temporaires (dont une seule de plus de 15 jours), 2 rétrogradations, et 1 déplacement d’office. Les 55 autres « sanctions » prononcées depuis 2018 sont des blâmes ou des avertissements.

    Sébastian Roché note la concomitance entre l’élection de Macron et la baisse du nombre de vraies sanctions. Il pointe le rôle probable de la #hiérarchie_policière : « Ce n’est certainement pas Emmanuel Macron qui a donné des instructions. Mais on peut imaginer qu’avec la crise des Gilets jaunes, le #DGPN [directeur général de la police] se dise : “c’est le mauvais moment pour prononcer des sanctions”. Les règles semblent suspendues, voire annulées. Car depuis la fin de la crise des Gilets jaunes, la baisse du nombre de sanctions se prolonge. Il y a une modification des #standards ».

    3) La justice est désormais la seule à prononcer des exclusions

    Avant 2018, des exclusions définitives pour violences étaient parfois décidées : 13 en 2011, 7 en 2016, 5 en 2016, etc. L’exclusion peut résulter soit d’une mise à la retraite d’office, soit d’une exclusion pure et simple. Depuis 2018, l’Intérieur n’exclut plus les policiers violents. Pour Sébastian Roché, « c’est un point très important car les données sont précises et claires. C’est la meilleure preuve d’un changement de standard » dans la façon du ministère de l’Intérieur de gérer le phénomène des violences.

    Qu’en est-il du côté judiciaire ? Lorsqu’elle condamne un policier, la justice peut prononcer une peine complémentaire d’interdiction d’exercer. Cette interdiction peut être temporaire, ou définitive. Dans ce dernier cas, et même dans certains cas d’interdiction temporaire, une « #radiation_des_cadres » (équivalent au licenciement pour les fonctionnaires) doit intervenir. Flagrant Déni a pu accéder aux chiffres des #peines_complémentaires du ministère de la Justice (voir Méthodo). Le constat est clair : ce dernier est bien plus sévère que l’Intérieur. Entre 2018 et 2021, la justice a prononcé 72 interdictions d’exercer (temporaires ou définitives) pour des policiers, gendarmes et autres « personnes dépositaires » violentes .

    Ainsi, le #ministère_de_l’Intérieur compte en moyenne plus de 3 « radiations des cadres » (c’est-à-dire des exclusions définitives) pour violences illégitimes par an depuis 2018. Légalement, ces radiations ne peuvent pas être décidées par le DGPN à titre de sanctions. Elles interviennent sans doute suite aux condamnations judiciaires. Contacté le 11 mai 2023, le DGPN ne nous a pas répondu. Moralité pour les victimes : n’oubliez de rappeler à la justice qui si elle ne fait pas le travail de sanction disciplinaire, ce n’est pas Darmanin qui s’en occupera…

    https://www.flagrant-deni.fr/depuis-macron-la-police-nexclut-plus-les-fonctionnaires-violents
    #macronisme #violences_policières #impunité #statistiques #France #chiffres

    aussi signalé par @colporteur ici :
    https://seenthis.net/messages/1003945

  • Brutal Berlin : „Das ist nicht mehr meine Stadt“ – eine Abrechnung
    https://www.berliner-zeitung.de/panorama/brutal-berlin-das-ist-nicht-mehr-meine-stadt-eine-abrechnung-li.225

    Voilà ce que ça donne quand tu regardes "ta ville" d’une perspective de gauche/droite caviar. Tu remarques que tes copines et copains en viellissant se sentent de moins en moins en sécurité. Puisqu’ils en on les moyens ils déménagent à la campagne ou partent à Paris/New York/Tel Aviv, enfin jusqu’à ce que les imbéciles des pays respectifs transforment ces villes en véritables zone de guerre.

    La guerre berlinoise contre les exclus provoque des réactions peu agréables, mais pour le moment nous sommes encore en mesure de lutter contre les origines de l’exclusion sociale. Qu’est-ce que tu veux, New York n’est pas pour tout le monde.

    5.10.2024 von Marcus Weingärtner - Eine Dystopie ist nichts, was in der Zukunft liegt. In Berlin ist sie doch längst zum Alltag geworden. Eine Abrechnung mit dieser Stadt und ihrem Niedergang.

    „Das ist nicht mehr meine Stadt“, sagt die Frau, die neben mir am Gleis steht, als die U8 einfährt. Ich kenne sie nicht, aber gemeinsam mussten wir zusehen, wie sich ein Mann nur ein paar Meter weiter erleichterte. Er pinkelte an die geflieste Wand des Bahnhofs, sein Urin spritzte auf den Boden und bildete eine Pfütze zu seinen Füßen. Wir blickten beide weg. Das ist nicht mehr meine Stadt. Ich verstehe, was die Frau meint.

    Ich habe lange über diesen Satz nachgedacht. Sechs Worte, die genau beschreiben, was auch ich in diesem Moment empfand und was mich schon länger immer wieder beschäftigt. Das ist nicht mehr die Stadt, in die ich mal voller Freude gezogen bin, aus Gründen, die mir abhandengekommen sind.
    Neulich sagte jemand zu mir, diese Stadt würde „verslummen“

    Wer hat sich verändert? Ich oder Berlin? Oft habe ich das Gefühl, dass wir uns auseinanderleben. Ich werde unsicherer, dünnhäutiger, die Stadt wird härter, abweisender. Oder war Berlin vor zehn Jahren noch nicht so runtergekommen? So harsch, dass ich im öffentlichen Raum dauerhaft das leise Summen der Paranoia im Hinterkopf spüre? Woher kommt dieses Gefühl?

    In der Bahn lese ich Polizeimeldungen auf meinem Handy:

    „Einsatzkräfte des Spezialeinsatzkommandos nahmen gestern Abend drei Männer in Prenzlauer Berg fest. Gegen 21.10 Uhr alarmierten mehrere Zeugen die Polizei zu einem Mehrfamilienhaus an der Lilli-Henoch-Straße, da sie dort zuvor in einer Wohnung mehrere Schüsse gehört hatten.“

    „In Gruppen gingen vergangene Nacht mehrere Männer in Britz aufeinander los.“

    „Ein bislang unbekannter Jugendlicher soll gestern Abend in Lichtenberg zwei Männer mit einem Baseballschläger geschlagen haben.“

    „Ein Mann hat gestern Nachmittag in Alt-Hohenschönhausen mehrere Menschen angegriffen. Dem bisherigen Ermittlungsstand zufolge soll der 23-Jährige gegen 14.45 Uhr auf der Hauptstraße zunächst eine 18-Jährige verbal bedroht haben. Anschließend soll er unvermittelt auf die junge Frau zugegangen, sie mit beiden Händen am Hals gewürgt und sie gegen einen Bauzaun gedrückt haben.“

    Solche Meldungen lese ich mittlerweile dutzendfach, jede Woche. Eine Freundin sagt, das wäre schon immer so gewesen. Berlin wäre eine Metropole mit den Problemen, wie sie alle Großstädte plagen. Nur eben mit einer Verzögerung würden in Berlin Dinge ankommen wie Massentourismus, Wohnungsnot und eben auch zunehmende Gewalt und Verwahrlosung. Neulich sagte jemand zu mir, diese Stadt würde „verslummen“.

    Eine Übertreibung, klar. Wer mal einen Slum gesehen hat, weiß, dass das etwas anderes ist als die Gruppe Obdachloser, die am Halleschen Tor in der Uferböschung zeltet. Aber trotzdem denke ich über diesen Satz nach, als ich die Zelte der Obdachlosen auf einer Rasenfläche sehe, auf der ein Feuer brennt, um das circa 15 Männer in abgerissener Kleidung stehen und trinken. Es ist nebelig, nasskalt, eine dystopische Szenerie, die ich mittlerweile an vielen Plätzen in Berlin gesehen habe. Zelte in Parks, Obdachlose unter Brücken, mitten in der Stadt. Trinkgelage, Hoffnungslosigkeit, Aggression.

    Ich fühle mich in Berlin nicht mehr sicher.

    Die Freundin einer Bekannten wurde im Gleisdreieck-Park ausgeraubt. Nicht da, wo die Grünanlage dicht bewachsen und dunkel ist, sondern auf dem Hauptweg, der parallel zu den prächtigen weißen Neubauten verläuft, die in einer Art protzigem Fake-Gründerzeit-Stil den Park säumen. Sie wurde am helllichten Tag von einer Gruppe Jugendlicher vom Rad gezogen und geohrfeigt. Man nahm ihr ihr Geld ab und ließ sie gehen. Anzeige erstatten wollte sie nicht, das wäre doch einzig für die Statistik, und so viel Geld sei es nicht gewesen. Vor der sicherlich traumatischen Erfahrung spricht sie nicht.

    Ich könnte einfach weitere Beispiele aus dem Berliner Alltagsleben nennen. Von Cracksüchtigen und Diebstählen, Dealern im Bahnhof und einem zunehmenden Gefühl der Entfremdung mit dieser Stadt.

    Eine Kollegin erzählte, wie sie in der Hasenheide beim Joggen von arabischstämmigen Jugendlichen beschimpft und bedroht wurde.

    Ein Freund von mir wurde in der S-Bahn in Neukölln von einem Mann mit Palästinensertuch angespuckt, weil er einen Aufnäher in Regenbogenfarben auf dem Rucksack trug. „Ich bring dich um, du Schwein“, soll der Mann gesagt haben. Mein Freund sagte, er sei froh gewesen, dass der Mann ihn nicht auch noch geschlagen habe. Wie bitte? Die Liste ließe sich beliebig fortsetzen, und dafür müsste ich noch nicht mal weitere Polizeimeldungen bemühen, ich könnte einfach weitere Beispiele aus dem Berliner Alltagsleben nennen. Von Cracksüchtigen und Diebstählen, Dealern im Bahnhof und einem zunehmenden Gefühl der Entfremdung mit dieser Stadt, die ich nach rund 25 Jahren als in vielen Teilen dysfunktional und runtergekommen empfinde. Von immer mehr Menschen, die ich nicht mehr als Bereicherung für diese Stadt, sondern als Bedrohung empfinde.

    Legende, die sich vom Speck der Vergangenheit nährt

    Ist eine Dystopie eigentlich nur das Gegenteil einer friedfertigen Zukunft, etwas, das erst kommt? Wenn ich nach einem Tag in Berlin meine Wohnungstür schließe und durchatme, bin ich mir da nicht mehr so sicher. Mittlerweile empfinde ich Berlin als eine Stadt, die irgendwie zerbröselt. In verschiedene Gesellschaften, in Teile und Communitys, die einander meiden. Die ohne Sympathie und Verständnis aufeinander herabsehen, auf die Abgehängten, die Menschen aus anderen Ländern, vor allem auf die, die nicht der westlichen Welt zuzurechnen sind. Als ich nach Berlin kam, war das anders. Aber da war auch die Welt eine andere.

    Man kann das alles als zynisch betrachten, als Wehleidigkeit auf sehr hohem Niveau. Aber nach 25 Jahren in dieser Stadt kann ich die immer gleiche, reflexartige Leier nicht mehr hören, nach der Berlin so liberal sei, so frei, eine Heimat für jeden, der nur will.

    Denn: Es ist nicht wahr und nährt sich noch immer vom Speck vergangener Zeiten, goldenen 20ern und hedonistischen 90ern und dem längst zu Asche zerfallenen Arm-aber-Sexy-Image der 2000er. Auch das ist Berlin – ängstlich am Überkommenen hängend und daraus ein heimeliges Image zimmernd, das aber tagtäglich auf den Straßen dieser Stadt zusammenklappt. Eine Art Volkstheater für Touristen und ein bisschen Balsam aufs Gemüt aller, die hier leben. Berlin, das ist auch ein wurstiges Schulterzucken ob all der Probleme, die mittlerweile so virulent sind, dass man sich wundert, dass trotzdem irgendwie alles seinen Gang geht zwischen Verrohung und Verwahrlosung im öffentlichen Raum. Trotz all der bräsigen Bürokratie, der Wohnungsnot und dem altbackenen Beharren auf dem Analogen. Hier ist man mittlerweile doch schon zufrieden, wenn die Bahn pünktlich kommt und die Fahrkarten-App funktioniert.

    Mittlerweile ziehen Bekannte und Freunde wieder weg, zu genervt von der Stadt. Überall sei es sauberer und angenehmer als in Berlin, so die einhellige Übertreibung. Anderswo hätte man das Gefühl, eine Zukunft zu haben, in der deutschen Hauptstadt regiere der Stillstand. Und das wäre noch nicht mal das Schlimmste. Sie habe Berlin sehr genossen, aber hier würde sie nun nichts mehr halten, erzählte mir eine Freundin, die für längere Zeit ins Ausland ging. Ihr Berlin-Feeling sei schal geworden, der Lack ab und sie könne jetzt genau sehen, was hier alles verpennt worden sei in den vergangenen Jahren, sagte sie bei einem Frühstück in einem Café in Prenzlauer Berg. Ich verstehe sie gut.

    #Berlin #sécurité #exclusion_sociale

  • Ausstellungseröffnung | Die Verleugneten
    https://www.die-verleugneten.de/wanderausstellung/ausstellungseroeffnung

    Dessin du patient dépendant de l’anti-douleur morphine persécuté par les nazis, Georg Tauber

    Après des années de travail quelques militants ont réuissi à faire élaborer une exposition et un site web à propos des victimes du nazisme hors de la perception publique : dans la terminologie nazie on les appellait les asociaux ou les criminels de profession (Berufsverbrecher).

    L’ironie de l’histoire est que l’organisation chargée par le réalistion de l’expo et du site, Stiftung Denkmal für die ermordeten Juden Europas , est connue pour ses pratiques anti-sociales, ses mauvais salaires et conditions de travail et l’utilisation de sous-entreprises dans le but d’économiser sur le dos du personnel de ses monuments et musées. La responsable (Rechtsaufsicht) du projet, la Beauftragte der Bundesregierung für Kultur und Medien Claudia Roth est connue pour son soutien du géant anti-social Uber qui pousse des travailleurs dans la misère partout dans le monde.

    Bref, on verra si l’inauguration de l’expositionse se passera sans protestations des exclus d’aujourd’hui.

    https://de.wikipedia.org/wiki/Asoziale_(Nationalsozialismus)

    Auch über 75 Jahre nach Ende des Zweiten Weltkriegs gibt es Leerstellen in der Erinnerungskultur Deutschlands und Österreichs. Das Leid zehntausender Frauen, Männer und Jugendlicher, die als »Gemeinschaftsfremde«, »Asoziale« oder »Berufsverbrecher« bezeichnet wurden, rückt erst allmählich ins öffentliche Bewusstsein. Sie wurden in Konzentrationslager gesperrt, in Heimen und psychiatrischen Anstalten festgehalten, viele von ihnen zwangssterilisiert. Erst 2020 erkannte der Deutsche Bundestag sie als Opfer des Nationalsozialismus an.

    Weshalb wurden Menschen überhaupt als »Asoziale« und »Berufsverbrecher« verfolgt? Wer waren diese Menschen? Wer war an ihrer Verfolgung beteiligt? Warum verweigerten Staat und Gesellschaft ihnen so lange die Anerkennung als Opfer? Diese und weitere Fragen greift die Wanderausstellung der Stiftung Denkmal für die ermordeten Juden Europas und der KZ-Gedenkstätte Flossenbürg auf, die 2024 eröffnet wird.

    Diese Webseite begleitet im Vorfeld als Werkstatt diesen Prozess – bereits jetzt.
    ...

    Am 10. Oktober 2024, um 19 Uhr, wird die Wanderausstellung unter dem Titel »Die Verleugneten. Opfer des Nationalsozialismus 1933 – 1945 – heute« durch die Staatsministerin für Kultur und Medien, Claudia Roth, in Berlin-Mitte eröffnet.

    Weitere Informationen zum Veranstaltungsort und zur Anmeldung folgen demnächst.
    Grafik: Save the Date - Ausstellungseröffnung
    Über die Ausstellung

    Wer waren die Menschen, die nach der Ideologie der Nationalsozialisten aus der »Volksgemeinschaft« ausgeschlossen werden sollten? Welche Behörden waren neben der Kriminalpolizei an ihrer Verfolgung, an Zwangssterilisierungen und an zehntausendfachen Einweisungen in Konzentrationslager beteiligt? Warum hat es bis 2020 gedauert, bis die Verfolgten überhaupt offiziell als Opfer des Nationalsozialismus anerkannt wurden? Darüber, und auch über die Ausweitung der Verfolgung auf nahezu ganz Europa unter deutscher Besatzung informiert diese Ausstellung mit innovativen Mitteln.
    ...

    Die individuell buchbare Führung bietet einen Überblick über das kaum bekannte Thema und stellt einzelne Biografien vor – mit Schwerpunkt auf den Erfahrungen der Verfolgten.

    vom 11. Oktober 2024 bis einschließlich 31. Januar 2025
    ...
    Kostenlose öffentliche Führungen
    Jeweils sonntags bietet die Stiftung Denkmal zudem eine kostenlose öffentliche Führung an.
    vom 13. Oktober 2024 bis einschließlich 26. Januar 2025
    jeden Sonntag um 13 Uhr

    #Allemagne #sans-abris #fascisme #exclusion #histoire

  • Poland : Government pledges to do what is needed to end Belarus border problems

    On Wednesday (July 10), the Polish government pledged to do what is needed to end the border crisis with Belarus. Even if that means complete closure of the border.

    Poland has already closed four of its six official border crossings with its neighbor Belarus. “We are ready for any solution in this area, because we will not allow this migration crisis caused by Belarus to last indefinitely,” Poland’s Deputy Defense Minister Cezary Tomczyk told the news agency Reuters.

    Polish government officials, including President Andrzej Duda have been raising these issues for months now. Most recently, Duda talked to his Chinese counterpart Xi Jinping, stressing that the issue would have an impact on trade within Europe if not resolved.

    Even before the current government took office, Poland has tried various methods to stop migrants from crossing its borders from Belarus. They have heavily fortified the border, with several layers of fencing and barbed wire, and sent police and military patrols to the area.

    On Wednesday, the Norwegian Refugee Council (NRC) issued a press release about the situation. In it, they called for “urgent action” to help “refugees trapped in Europe’s ’death zone’.”
    Further restrictions at the border

    They said that access to the Polish-Belarusian border had been restricted still further recently, which was “preventing the provision of humanitarian assistance to refugees seeking international protection.”

    The NRC said that the Polish government, alongside the EU and the international community, should work together to “address the escalating humanitarian crisis” in the area. “The exclusion zone with no access for humanitarian workers is a recipe for disaster. It affects the weakest and the most vulnerable refugees seeking international protection,” stated Neil Brighton, NRC’s country director in Poland.

    Since 2021, when restrictions were stepped up at the border, the NRC says their local partner on the ground, ’We are Monitoring’, had recorded “nearly 20,000 requests for assistance” from migrants in the zone, 82 deaths and nearly 9,000 violent pushbacks.

    The NRC has asked the EU to help the Polish government increase reception capacity for those who want to seek asylum in Poland, as well as “address the root causes of displacement through humanitarian and development assistance.”

    ’Death zone’

    The NRC describes the forests around the border between Poland and Belarus as a “death zone,” because the area is characterized by “extreme temperatures, dense forests and swamps, making it a dangerous crossing point for refugees seeking protection.”

    Amina, a Syrian refugee told NRC that she had experienced nine pushbacks while trying to cross into Poland. “They hit you with sticks to make your body grow bigger and swell up so that no one will manage to pass through,” she said.

    Farid, a refugee from Afghanistan told NRC, “they asked me ‘where are you from? I said I was from Afghanistan. They hit me on my broken leg, and I shouted terribly, which made them very angry –they beat me.”

    NRC works with local Polish humanitarian organizations to provide assistance and legal aid for those who are seeking asylum. One of those local partners Egala Association, joined NRC in calling for a “safe border…where the rights of those seeking international protection are respected.”

    Other humanitarian associations working in Poland have accused the current government of essentially continuing the anti-migrant policies established under the PiS Peace and Justice party.
    ’Hybrid warfare’

    In June 2024, the Polish border guards told the German international broadcaster Deutsche Welle (DW) that they had stopped almost 100,000 attempts to cross the border since 2021, when they accused Alexander Lukashenko of Belarus of beginning a form of ’hybrid warfare’ by encouraging migrants to cross the border into the EU to destabilize the West.

    Andrzej Juzwiak, a spokesperson from the Polish border guard told DW, “there is no doubt that the crisis at the border was caused by hybrid actions of the Belarusian side. We know that it is an artificially created and controlled migration route.”

    According to Polish officials, DW reports, about 90 percent of the migrants stopped at Poland’s border hold Russian visas, which they believe indicates Russian involvement in their journey towards Europe.

    Since the beginning of 2024, the Polish border guard say they see around 400 attempts a day to cross the border by migrants. Most of them, they say, want to journey on to Germany or the United Kingdom.
    ’No-entry buffer zone’

    On June 13, Poland instigated once again a special no-entry buffer zone along about 60 kilometers of its border with Belarus. The zone is 200 meters wide and is off-limits to all non-residents. That includes humanitarian groups and journalists. In 2021, the buffer zone was much wider and stretched along the entire border with Belarus.

    According to Juzwiak from the Polish border guard, the main purpose of the zone, reports DW, “is to ensure the safety of locals and security officials on duty at the border and to limit the activity of human smugglers.”

    At the end of May, a young Polish soldier was stabbed to death through the bars in the border fence. Polish officials say that a migrant carried out the attack. The soldier was taken to hospital, but later died of his injuries.

    Migrant rights groups however say the buffer zone prevents them from helping those in need. They say the buffer zones act as cover so that pushback tactics can be carried out away from the eyes of journalists and activists.

    The IOM has called on Poland, as well as Latvia and Lithuania to make sure that the rule of law is upheld at the border and that respect for human rights and freedoms are maintained, regardless of immigration status.

    In May, on a visit to the border, Polish Prime Minister Donald Tusk was adamant his government needed to continue to fortify their border. “There is no room for negotiation. Poland’s border must be protected,” he said. “Polish troops, border guards, officers have become the targets of aggression, and you have every right, not to say an obligation, to use every means available to you […] when you are defending not only the border but also your own life.”

    https://www.infomigrants.net/en/post/58384/poland-government-pledges-to-do-what-is-needed-to-end-belarus-border-p

    #Pologne #Biélorussie #frontières #migrations #réfugiés #fermeture_des_frontières #murs #barrières_frontalières #militarisation_des_frontières #exclusion_zone #zone_d'exclusion #zone_frontalière #crise_humanitaire #mourir_aux_frontières #décès #morts_aux_frontières #forêt #refoulements #push-backs #buffer_zone


    ajouté à la métaliste sur la Création de zones frontalières (au lieu de lignes de frontière) en vue de refoulements :
    https://seenthis.net/messages/795053

    • Briefing Note: Refugees trapped in Europe’s “death zone” - July 2024

      Poland: Urgent action needed for refugees trapped in Europe’s ‘death zone’
      Access to the Polish-Belarusian border has been restricted, preventing the provision of humanitarian assistance to refugees seeking international protection. The Norwegian Refugee Council (NRC) urgently calls on the Polish government, the European Union, and the international community to address the escalating humanitarian crisis.

      “The exclusion zone with no access for humanitarian workers is a recipe for disaster. It affects the weakest and the most vulnerable refugees seeking international protection. Data shows that building fences and pushing back people won’t stop them from seeking safety and protection,” said Neil Brighton, NRC’s country director in Poland. “The European Union and the international community must support the Government of Poland by increasing reception capacity at the border and addressing the root causes of displacement through humanitarian and development assistance.”

      Since the crisis began in 2021, NRC and local partners have recorded nearly 20,000 requests for assistance and nearly 9,000 violent pushbacks, including incidents involving pregnant women and minors. 82 deaths related to the conditions at the border have been documented in the ‘death zone’ between the Polish and Belarusian border fences and along the border. This area is characterised by extreme temperatures and dense forests and swamps, making it a dangerous crossing for refugees seeking protection. Those crossing the border irregularly, have endured hardships and long journeys from Iraq, Afghanistan, and other countries as far as Eritrea.

      “They hit you with sticks to make your body grow bigger and swell up so that no one will manage to pass through,” said Amina from Syria, a refugee who experienced nine pushbacks. On the final time, she managed to reach Polish territory, where she sought help from one of the humanitarian organisations operating in the area.

      Farid, a refugee from Afghanistan, recalled: “They asked me ‘Where are you from?’ I said I was from Afghanistan. They hit me on my broken leg, and I shouted terribly, which made them very angry - they beat me.”

      NRC has been supporting and working closely with local organisations, on the Polish territory, to provide thousands of refugees with life-saving assistance and legal aid. Despite these efforts, the recent reintroduction of the exclusion zone, a legally defined area restricting access for unauthorised individuals along parts of the Polish-Belarusian border, has severely restricted access for humanitarian workers to support those trapped at the border.

      “We believe that nobody should be left in life-threatening conditions regardless of their origin, nationality or religion. We strongly believe that a safe border means a border that is safe for all people, where the rights of those seeking international protection are respected,” said Katarzyna Potoniec from Egala Association, one of NRC’s local partner organisations in Poland.

      NRC calls on the Polish government to ensure humanitarian access to those in need, and to adhere to the Geneva Convention and the European Convention on Human Rights and ensure all claims for the international protection are properly processed. The European Union and international donors must provide sustained funding and support to address the urgent needs at the border and establish safe, legal pathways for refugees.

      https://reliefweb.int/report/poland/briefing-note-refugees-trapped-europes-death-zone-july-2024

  • L’Espagne s’apprête à régulariser un demi-million d’immigrés

    Le Parlement espagnol a accepté le 9 avril d’entamer les procédures visant à régulariser la situation légale de près d’un demi-million d’immigrés sans papiers. La Chambre a donné son feu vert à une Initiative législative populaire (ILP) promue par plusieurs centaines acteurs sociaux, comme l’association Caritas et les organisations d’immigrés, qui ont recueilli plus de 600 000 signatures. La loi requiert un demi-million de signatures pour passer. Le vote contre des 33 députés d’extrême droite Vox ne peut pas paralyser le processus judiciaire.

    Entre 390 000 et 470 000 personnes résideraient irrégulièrement en Espagne, dont un tiers seraient des mineurs. Le texte de l’ILP rappelle que le système d’accès à la résidence dans l’actuelle loi sur l’immigration est insuffisant, limité et inadapté à la réalité des migrants qui vivent et travaillent en Espagne.

    « L’irrégularité est une condamnation à l’#exploitation par le #travail, à l’#invisibilité face aux institutions, au manque de #protection_juridique ou à l’#exclusion de facto des #services_publics essentiels comme l’#éducation et la #santé », plaident les promoteurs de l’initiative présentée par l’ancien sans-papiers #Augustin_Marie_Nduor_Ndong.

    Condamnés à la clandestinité

    Les gens qui vivent pauvrement, sans papiers, travaillent sans couverture légale d’aucune sorte, dans des conditions d’exploitation effroyable, avec des salaires inférieurs aux salaires légaux.

    Payés au noir, ils ont d’énormes difficultés à accéder au logement et sont condamnés à la clandestinité. Or, une étude de l’Université Carlos III indique que la contribution nette moyenne des travailleurs régularisés au PIB pourrait dépasser les 3 250 euros par personne et par an.

    La socialiste Elisa Garrido a exprimé le soutien de son parti à l’ILP car il est nécessaire de « continuer à avancer dans les mécanismes qui garantissent des processus de migration sûrs ». De son côté, Gala Pin (Sumar, coalition de gauche qui inclut notamment Podemos) a demandé la régularisation des étrangers « pour la justice sociale ».

    Le Parti populaire ne pouvait pas dire qu’il était d’accord avec le gouvernement. Mais ne voulait pas non plus se retrouver dans le même camp que le parti d’extrême droite Vox. Aussi, Sofía Acedo a voté en faveur de l’ILP en appelant à traiter la question de « manière responsable ».

    Ces dernières années, l’Espagne a connu six vagues de régularisation, quatre menées par le Parti socialiste et deux par le Parti populaire. La dernière, la plus importante, a été menée en 2005 par le gouvernement socialiste de José Luis Rodríguez Zapatero, qui a légalisé la situation de quelque 600 000 travailleurs.

    Cela n’a eu aucun effet négatif sur l’emploi et a contribué à faire de l’économie espagnole l’une des plus dynamiques d’Europe. En 2023, le nombre de personnes employées a augmenté de 783 000 et le nombre de chômeurs a diminué de 193 400, selon l’Institut national des statistiques. Fin 2023, le chômage touchait 11,76 % de la population active, soit 1,1 point de moins que l’année précédente.
    Un phénomène qui augmente partout en Europe

    Dans l’Union européenne, entre 1996 et 2008, 43 programmes de régularisation ont été menés dans 17 Etats membres. Les initiatives les plus récentes ont été celles menées par le Portugal et l’Italie pendant la pandémie.

    Au cours de l’année 2023, 56 852 immigrants sont entrés irrégulièrement en Espagne, soit 82 % de plus que l’année précédente, selon le ministère de l’Intérieur. Il s’agit d’un changement par rapport à la tendance à la baisse des deux dernières années. La plupart de ces arrivées ont été enregistrées par voie maritime vers les îles Canaries, soit un total de 39 910 personnes.

    Ce n’est pas lié aux régularisations successives. Puisque dans l’ensemble de l’Europe, l’arrivée d’immigrants irréguliers a considérablement augmenté.

    L’année dernière, les Etats ont émis directement 430 650 ordres de quitter le pays, mais moins de 110 000 personnes ont été expulsées. L’aspect le plus dramatique de l’immigration irrégulière est le nombre impressionnant de décès et de disparitions lors des tentatives d’entrée dans l’Union européenne.

    En 2023, plus de 6 000 personnes sont mortes ou ont disparu. Entre 2014 et 2023, plus de 61 000 personnes ont perdu la vie ou ont disparu en tentant de rejoindre un pays européen, selon l’Organisation internationale pour les migrations des Nations unies.

    En Espagne, comme dans la grande majorité des pays, l’immigration est un phénomène extraordinairement positif. Elle ne représente pas seulement une question de justice et de droits de l’homme, mais aussi un enrichissement pour le pays d’accueil d’un point de vue culturel, social et économique.

    https://pour.press/lespagne-sapprete-a-regulariser-un-demi-million-dimmigres

    #régularisation #sans-papiers #Espagne #migrations

    via @karine4

    • Politique économique : le Nouveau Front populaire dessine un #changement_de_cap

      Le programme du Nouveau Front populaire, présenté le 14 juin, indique une direction de politique économique claire : il s’agit de reprendre le chemin d’une #politique_sociale et d’investissement (public et privé), articulée à une #politique_fiscale qui vise à (re)remplir les caisses et à instaurer davantage de #justice_fiscale. C’est une #réorientation marquée par rapport à la politique actuelle.

      Est-ce que les #mesures sont crédibles ? Oui, les pistes de #financement aussi. Est-ce que tout pourra être mis en œuvre et selon quel calendrier ? On verra bien. Dans tous les cas, la situation économique est incertaine et ce, quel que soit le gouvernement qui sera nommé.

      La bonne question n’est pas celle du « #sérieux » – la politique actuelle à maints égards n’est pas sérieuse, ni socialement, ni économiquement, ni budgétairement – mais de savoir quel cap de politique économique nous choisissons pour faire face aux incertitudes et répondre aux questions écologiques et sociales qui se posent. Car oui, il y a le choix.

      Le débat sur le #réalisme est à côté du sujet

      On pourrait résumer le programme du NFP ainsi : suspendre l’application des réformes antisociales, redonner du pouvoir d’achat aux ménages, renforcer les #services_publics, récupérer de l’argent sur le #patrimoine, et générer en retour des #effets_économiques vertueux.

      Cette politique tourne le dos à celle mise en œuvre depuis 2017 dont l’orientation principale, revendiquée par Bruno Le Maire, est la baisse des prélèvements obligatoires et l’horizon la réduction du rôle de la #protection_sociale et des services publics. Cette politique menée à un rythme rapide, comme une fuite en avant, une recherche vaine d’un retour de la #croissance, ne récolte qu’une baisse de la #productivité.

      Une large partie des critiques sur le sérieux du programme du NFP provient de commentateurs pour qui le seul débat économique valable est de savoir s’il faut d’abord définancer les retraites, l’école, les deux en même temps, ou si on n’ajouterait pas encore un peu de baisse de prélèvements sur les entreprises, pour la route.

      Et lorsque ces réformes sont évaluées scientifiquement, qu’on en démontre le #coût_social ou le peu d’#efficacité_économique, le plus souvent ces personnes haussent les épaules et passent à la suivante. Evidemment, une autre politique économique est possible.

      Des mesures sociales tout à fait à portée de main

      Si on considère les principales mesures proposées par le Nouveau Front populaire, elles apparaissent tout à fait envisageables. Elles sont sans doute d’ailleurs un peu plus modérées que celles du programme de la Nupes en 2022, pour tenir compte de la dégradation depuis des comptes publics.

      Pour ne prendre que quelques mesures sur les sujets que je connais le mieux : suspendre la réforme des #retraites de 2023 pour revenir à 62 ans immédiatement est faisable, d’autant que la réforme a à peine commencé d’être appliquée. Cela représente environ 0,8 point de PIB en 2032 pour le système de retraite et c’est en grande partie financé par la hausse prévue des cotisations de 0,6 point pour les employeurs et 0,6 point pour les salariés, selon un chiffrage réalisé d’après le simulateur du COR.

      Il est prudent de ne pas s’engager trop avant sur le droit à la retraite à 60 ans pour toutes et tous, même s’il apparaît évident que pour certaines personnes et certains métiers pénibles qui ne sont aujourd’hui quasiment pas reconnus, la baisse de l’âge de départ devrait être appliquée rapidement.

      Annuler les réformes de l’#assurance_chômage est également très facilement réalisable, la précédente n’étant même pas encore complètement montée en charge et la prochaine n’étant pas encore appliquée.

      Revaloriser le #point_d’indice de la fonction publique de 10 % est un #choix_budgétaire non négligeable dont il s’agit de mesurer l’ampleur, à hauteur de 0,8 point de PIB, selon certaines estimations. Cette priorité constitue bien une partie de la réponse aux graves difficultés de recrutement que connaissent actuellement les services publics.

      C’est particulièrement vrai pour les deux plus importants que sont la santé et l’éducation, dont les concours ne font plus, du tout, le plein. Cela sera sans doute plus utile pour l’avenir que la baisse de la fiscalité pour les ménages les plus aisés.

      L’indexation des salaires, elle, existe sous une certaine forme chez nos voisins Belges, qui ne s’en plaignent pas, et cela mériterait qu’on s’y penche pour en affiner les caractéristiques techniques.

      Aller plus loin sur les recettes

      Côté recettes, là aussi les pistes sont claires : récupérer des moyens sur les patrimoines des millionnaires et milliardaires par le retour à un impôt sur la fortune et l’instauration d’un impôt élevé sur les très hautes #successions. Il est également urgent de revenir sur certaines #niches_fiscales ayant peu d’effet positif et très coûteuses.

      C’est peut-être de ce côté-là d’ailleurs que le programme mériterait d’être approfondi. Un passage en revue systématique de la politique fiscale depuis 2017 pourrait donner des pistes de financement utiles. En effet, depuis cette date, les baisses de prélèvements obligatoires décidées par les différents gouvernements s’élèvent à près de 70 milliards d’euros par an.

      Ces 70 milliards ont eu deux contreparties : une baisse (ou un ralentissement du financement) des protections collectives (retraite, chômage, services publics), mais également un creusement du #déficit_public. Selon l’OFCE, de l’ordre de 40 milliards d’euros de baisse de recettes n’ont jamais été compensés depuis sept ans. Alors que le déficit s’est élevé à 5,5 % du PIB en 2023, ces mesures non compensées représentent environ 1,4 point de PIB, ce qui n’est budgétairement pas très « sérieux ».

      Selon la même logique, revenir sur le #CICE et le #pacte_de_responsabilité, mis en place sous François Hollande, ou sur la baisse de la #cotisation_sur_la_valeur_ajoutée des entreprises (#CVAE) plus récente, pourrait donner davantage de marge de manœuvre. Certes, ce n’est pas parce que ces mesures fiscales étaient contestables, qu’on peut les supprimer toutes, et d’un coup : les entreprises, même si elles n’en avaient pas besoin, s’y sont accoutumées. Mais il y a de la marge pour commencer tout de suite, et récupérer des montants conséquents.

      C’est pour cela qu’une revue paraît opportune afin de savoir jusqu’où et à quel rythme on peut remonter la pente dévalée au cours des dernières années. De manière intéressante, certains amendements aux dernières lois de finances de la majorité présidentielle, le rapport Bozio-Wasmer en cours de rédaction, ou encore la Cour des comptes, esquissent déjà des pistes en ce sens.

      N’esquivons pas le débat démocratique sur la politique à mener

      Ce qui serait « sérieux », et démocratique, c’est que les médias d’information utilisent le temps de cette élection pour mettre en perspective les #visions de politiques économiques alternatives des trois pôles : la baisse des prélèvements et des dépenses sociales de LREM, espérant faire revenir de la croissance, sa version amplifiée par le RN assortie d’une politique économique xénophobe motivée par des orientations racistes, et le changement de cap proposé par le Nouveau Front populaire qui fait le pari d’une réorientation écologique et sociale, appuyée par la fiscalité et dans une perspective keynésienne.

      Si le Nouveau Front populaire gagne, il aura alors à sa disposition tous les moyens de l’Etat pour calibrer, orchestrer, séquencer les mesures de son programme, et proposer des décisions à arbitrer. La feuille de route est suffisamment explicite pour que cela démarre vite, l’administration sait faire. Un programme est là pour définir un cap, le début du chemin et un horizon. En l’espèce, celui du NFP trace des perspectives sans ambiguïtés et enthousiasmantes.

      https://www.alternatives-economiques.fr/michael-zemmour/politique-economique-nouveau-front-populaire-dessine-un-changement-de-cap/00111532
      #crédibilité

  • Ohne Krankenversicherung, wie Heinz Hoenig ? Die Clearingstelle der Stadtmission Berlin hilft
    https://www.berliner-zeitung.de/mensch-metropole/ohne-krankenversicherung-wie-heinz-hoenig-so-hilft-die-clearingstel


    Kurz vor 10 Uhr in der Zinzendorfstraße 18. Kurz darauf beginnt die Beratung für Menschen, die nicht krankenversichert sind. Die Termine sind stark nachgefragt.

    A Berlin tu peux crever par absence de soins quand tu n’as pas d’assurance. Il y a plusieurs groupes de personnes à qui on refuse systématiquement l’accès à la sécurité sociale et aux soins :

    – On refuse le retour dans l’assurance publique aux autoentrepreneurs en faillite qui sont tombés dans le piège de l’assurance privée. Il y a de nombreux artiste parmi eux.
    – Les travailleurs étrangers europeens que leurs employeurs n"inscrivent pas à la sécurité sociale afin de faire baisser le prix de la main d’oeuvre
    – les sans-papiers et demandeurs d’asile refusés
    – les victimes de la traite des êtres humains dont beaucoup de vietnamiens
    – les prostituées originaires de l’Europe de l’Est
    – les personnes trop malades ou handicapées pour gérer les procédures bureaucratiques de l’assurance maladie et d’impôts.

    Pour les exclus du système d’assurance semi-privé il n"y a à Berlin qu’un unique centre de conseil géré par la une mission religieuse.

    17.5.2024 von Ida Luise Krenzlin - Schauspieler Heinz Hoenig sammelt Geld, um seine Operationen zu zahlen. Er ist nicht krankenversichert. In Berlin teilen viele sein Schicksal.

    Die Räume sind hell und licht. Großzügig erstrecken sie sich über das gesamte Erdgeschoss eines großen Eckhauses. Früher war hier einmal eine Kneipe. Seit knapp drei Jahren betreibt die Berliner Stadtmission in den sanierten und ausgebauten Räumen in Berlin-Moabit eine Beratungsstelle für Menschen, die dringend Hilfe benötigen.

    Viele von ihnen sind krank, manche schwer krank, sie alle haben aber keine Krankenversicherung. Damit sind sie in ihrer Situation aufgeschmissen: Arztpraxen schicken sie weg. Ämter schieben sich die Zuständigkeiten zu. Viele haben Schulden, nicht nur wegen nicht bezahlter Arztrechnungen.

    Kurz vor 10 Uhr in der Zinzendorfstraße 18. Kurz darauf beginnt die Beratung für Menschen, die nicht krankenversichert sind. Die Termine sind stark nachgefragt.

    Kurz vor 10 Uhr in der Zinzendorfstraße 18. Kurz darauf beginnt die Beratung für Menschen, die nicht krankenversichert sind. Die Termine sind stark nachgefragt.Ida Luise Krenzlin/Berliner Zeitung

    Louise Zwirner leitet die Beratungsstelle. Ihr 20-köpfiges Team, viele arbeiten in Teilzeit, besteht aus Sozialberatern, medizinischen Fachleuten und Juristen. Oberstes Ziel ist, die unversicherten Menschen in das Regelsystem mit Krankenversicherung (zurück) zu vermitteln. Wenn das nicht möglich ist, kann die Clearingstelle notwendige medizinische Behandlungen über von der Senatsverwaltung für Wissenschaft, Gesundheit und Pflege bereitgestellte Gelder finanzieren.
    Was tun? An Krebs erkrankt und nicht krankenversichert

    Der Bedarf ist offenbar sehr groß. Im Jahr 2023 hat die Stelle 1027 Personen erstmals beraten, dazu kommen solche, die sich schon länger begleiten lassen. Die Geschichten der ratsuchenden Menschen sind gänzlich unterschiedlich. Hierher kommen Deutsche, die nach einer Scheidung aus der Familienversicherung fallen oder die nach einer gescheiterten Selbstständigkeit nicht mehr in die gesetzlichen Krankenkassen zurückkommen. Viele können sich die hohen Beiträge der privaten Krankenversicherung nicht mehr leisten und haben sich bereits verschuldet.
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    Informationen in vielen Sprachen. Aus der ganzen Welt stammen die Ratsuchenden.

    Informationen in vielen Sprachen. Aus der ganzen Welt stammen die Ratsuchenden.Ida Luise Krenzlin

    Schöne helle Räume und viel Platz. Der Bedarf an Beratung ist groß.

    Schöne helle Räume und viel Platz. Der Bedarf an Beratung ist groß.Ida Luise Krenzlin

    Manchmal kann man nichts machen – außer weiter. Trost und Zuversicht spendet dieser Kalender wie auch die Mitarbeiter der Clearingstelle.

    Manchmal kann man nichts machen – außer weiter. Trost und Zuversicht spendet dieser Kalender wie auch die Mitarbeiter der Clearingstelle.Ida Luise Krenzlin

    Eine Kinderecke im Warteraum. Es gibt auch Kinder, die ohne Krankenversicherung in Berlin leben.

    Eine Kinderecke im Warteraum. Es gibt auch Kinder, die ohne Krankenversicherung in Berlin leben.Ida Luise Krenzlin

    Gabi Herrmann ist eine von ihnen. Sie hat Rachenkrebs und wird gerade im Krankenhaus behandelt, Chemotherapie. Hinter ihr liegt eine Odyssee. Als sie davon erzählt, kommen ihr am Telefon die Tränen, so verzweifelt ist sie. Nach einer langen Selbstständigkeit wurde sie krank, dauerhaft. Die bürokratischen Abläufe sind kompliziert, die Versicherungen gehen mitunter knallhart vor. Gabi Herrmann flog aus der privaten Krankenversicherung, die sie nicht mehr bezahlen konnte, eine gesetzliche Krankenversicherung nimmt die Patientin bis heute nicht auf. Die Clearingstelle hat ihr geholfen, überhaupt eine medizinische Behandlung zu bekommen. „Die haben mich gerettet!“, ist Gabi Herrmann dankbar. Wie es nach der Chemotherapie weitergeht, weiß sie nicht. Um jede einzelne Behandlung muss sie kämpfen, zu ihrem Glück hat sie nun eine starke Beraterin an der Seite.

    Diese nennt die größten Hürden: „Die Ämter sind schlecht erreichbar. Wir haben keine festen Ansprechpartner bei den Krankenkassen, Sozialämtern und Ausländerbehörden“, erzählt Patricia Schöne. Die Diplompädagogin arbeitet als Sozialberaterin für die Clearingstelle. Die Mitarbeiter müssten äußerst hartnäckig an den Fällen dran bleiben, mitunter jeden Tag nachhaken, bis sie ein Problem gelöst haben. Auch sie hängen in den langen Warteschleifen der Hotlines, echte Zeitfresser. „Wir brauchen aber oft schnell Lösungen.“ Wenn jemand etwa eine Krebserkrankung hat oder süchtig ist oder HIV hat – und deshalb die Zeit drängt, schnellstmöglich eine medizinische Behandlung zu bekommen. Die Menschen kommen meist erst in die Beratung, wenn sie schon am Ende sind, wenn sie ganz dringend Hilfe brauchen.

    Gabi Herrmann kämpft seit Jahren darum, wieder in eine gesetzliche Krankenversicherung zu kommen. Die Clearingstelle hat ihr geholfen, eine medizinische Versorgung zu bekommen. Gabi Herrmann hat Krebs.

    Gabi Herrmann kämpft seit Jahren darum, wieder in eine gesetzliche Krankenversicherung zu kommen. Die Clearingstelle hat ihr geholfen, eine medizinische Versorgung zu bekommen. Gabi Herrmann hat Krebs.privat/Gabi Herrmann
    Viele ausbeuterische Arbeitsverhältnisse in Berlin

    Eine weitere große Gruppe Ratsuchender kommt aus EU-Staaten. Unter ihnen Studenten, die nicht wissen, ob sie in Deutschland versichert sind. Angestellte, die vorher etwa in Spanien gearbeitet haben und hier seit Monaten nicht zum Arzt gehen, weil die Krankenversicherung nicht geklärt ist. Da kann die Clearingstelle helfen. Ihr erstes Ziel ist es, die Patienten in eine Regelversicherung zu bekommen.

    Deshalb machen sie hier bei den deutschen Krankenkassen Druck. Diese müssen Informationen aus den Ländern über Versicherungszeiten einholen. Viele Ratsuchende kommen aus Rumänien, Bulgarien oder Polen. Sie befinden sich in „ausbeuterischen Arbeitsverhältnissen“, so heißt es hier, oft auf dem Bau. Dort werden sie nicht versichert, obwohl sie in Deutschland versichert werden müssten.

    Louise Zwirner erzählt, wie schwer sich diese Menschen tun, ihren Arbeitgeber anzuzeigen. Oft würden andere Familienangehörige oder Bekannte auf denselben Baustellen arbeiten. „Sie schweigen deshalb lieber und nehmen den Zustand in Kauf, nicht versichert zu sein“, sagt Zwirner. Die meisten würden deshalb erst in die Beratung kommen, wenn sie akut erkrankt sind, Schmerzen haben, unbedingt zum Arzt müssen.

    Aus der ganzen Welt kommen die Ratsuchenden in die Clearingstelle der Berliner Stadtmission. Eine Karte im Warteraum zeigt die Herkunft der Klienten.

    Aus der ganzen Welt kommen die Ratsuchenden in die Clearingstelle der Berliner Stadtmission. Eine Karte im Warteraum zeigt die Herkunft der Klienten.Ida Luise Krenzlin
    Ärztliche Betreuung für Schwangere ohne Papiere

    In Deutschland ist der Zugang zur Gesundheitsversorgung für diejenigen geregelt, die über Ausweispapiere verfügen, die mit einem Wohnsitz gemeldet sind. Die Gesundheitsversorgung über das Sozialamt ist zwar kompliziert, aber möglich – trotzdem schaffen es viele nicht: „Menschen, die Berührungsängste mit Ämtern haben“, erklärt Zwirner. Die Leiterin der Beratungsstelle wünscht sich seitens der Ämter mehr Unterstützung für die Hilfesuchenden.

    Gar keinen Zugang zur gesetzlichen Gesundheitsversorgung haben die „Sans Papiers“, Menschen ohne gültige Ausweispapiere, Illegale, die in Berlin leben. Es gibt zum Beispiel eine große vietnamesische Gemeinschaft, viele von ihnen sind illegal in Berlin, arbeiten etwa in Nagelstudios, sind nicht versichert. „Diese Menschen fallen komplett durchs Raster“, sagt Zwirner, die Leiterin der Einrichtung.

    Menschen ohne Aufenthaltstitel arbeiten meist in prekären Jobs: als Putzfrauen und in der Kinderbetreuung oder als Prostituierte. „Sie sind aber hier. Und sie bleiben hier“, so die Einschätzung von Louise Zwirner. „Wer krank ist, muss versorgt werden“, bekräftigt sie. Oft handele es sich auch um Eltern, die zu ihren Kindern nach Berlin aus dem Ausland nachziehen. Da sie keine Chancen auf Asyl haben, bleiben sie ohne Papiere und ohne Krankenversicherung. Sie müssen mit der unzureichenden Behandlung bei chronischen Krankheiten leben.

    Für diese Menschen fordert Zwirner eine „City-ID-Card“, einen Stadtausweis für Menschen ohne gültigen Aufenthaltsstatus. Denn ohne Ausweis gibt es keinen Mietvertrag, keine Krankenversicherung, keine Sozialhilfe. New York hat eine solche ID-Card etwa längst eingeführt. In Berlin leben nach Schätzungen etwa 50.000 Menschen ohne Papiere.

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    Krankenhäuser bleiben auf unbezahlten Rechnungen sitzen

    Das Gesundheitssystem ist eh schon überlastet. Wenn jemand dann auch noch ohne Krankenversicherungskarte in eine Arztpraxis geht, wird er meist abgewimmelt. Die Praxen können sich die Kosten zwar beim Sozialamt oder eben bei der Clearingstelle holen, das erfordert aber Schriftwechsel und Zeit. Und die ist überall knapp. Louise Zwirner hat dafür auch Verständnis. Das System sei dysfunktional. Auch die Krankenhäuser würden auf hohen Summen unbezahlter Rechnungen sitzen bleiben. Denn Krankenhäuser müssen Notfallbehandlungen durchführen: bei Schlaganfällen oder Herzinfarkten müssen sie jeden Menschen behandeln. Zumindest akut.

    Die Rechnung für die Behandlung können die Krankenhäuser dann zwar beim Sozialamt beantragen, doch diese könnten diese Kostenübernahmen auch ablehnen. So wachsen die Außenstände bei den Krankenhäusern. Es ist also kompliziert.

    Eine Folge ist, dass Kranke, die akut versorgt wurden, viel zu früh entlassen würden. Manche würden mit dem Rettungswagen direkt in die Clearingstelle gefahren werden. Auch dafür hat Louise Zwirner Verständnis: „Die wissen ja auch nicht, wohin mit den Menschen.“ Es gibt zwar Anlaufstellen für zum Beispiel Obdachlose, die eine medizinische Versorgung brauchen. Aber diese reichen nicht aus. In Berlin gibt es noch vergleichsweise viele medizinischen Hilfen wie etwa das Caritas-Arztmobil, eine Ambulanz der Berliner Stadtmission am Hauptbahnhof und Zentren für sexuelle Gesundheit und Familienplanung, die etwa Vorsorge für Schwangere ohne Krankenversicherung anbieten.

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    „Krank und papierlos in Deutschland“

    Die Clearingstelle der Stadtmission gibt es seit 2018. Sie wächst seither stetig. Angefangen hat Louise Zwirner mit zwei Mitarbeitern, nun sind es insgesamt 20. Die Beratungsstelle erhält Geld von der Berliner Senatsverwaltung für Wissenschaft, Gesundheit und Pflege. Betrieben wird sie von der Stadtmission. „Um auch Menschen in Krisensituationen ausreichend sozial abzusichern, brauchen wir dringend langfristige bundespolitische und europäische Lösungen“, fordert sie.

    Übergreifend setzt sich die Bundesarbeitsgruppe Gesundheit/Illegalität (BAG) für den ungehinderten Zugang zur medizinischen Versorgung unabhängig von Herkunft und Aufenthaltsstatus ein. Engagiert sind in der BAG Sachverständige aus dem Gesundheitswesen. Auf das humanitäre „Problem krank und papierlos in Deutschland“ macht die Initiative seit vielen Jahren aufmerksam. Doch als der Schauspieler Heinz Hoenig zuletzt am Herzen operiert werden musste und seine Frau um Spenden bat, weil er nicht krankenversichert sei, ging ein Aufschrei durch Deutschland: Viele konnten sich nicht vorstellen, warum es überhaupt Menschen gibt, die hierzulande nicht krankenversichert sind.

    Dazu erklärte der Vertreter des Bundesverbands Schauspiel BFFS, Schauspieler Heinrich Schafmeister: „Altersarmut tritt bei sehr, sehr vielen Schauspielern auf, nicht nur bei den unbekannten, auch durchaus bei vielen namhaften. Viele wären überrascht, wenn sie wüssten, bei wem das alles zutrifft.“

    #Allemagne #maladie #social #exclusion #exploitation #immigration_clandestine #iatrocratie

  • Maka – The Documentary
    https://www.meltingpot.org/2024/04/maka-the-documentary

    Maka presenta la storia della prima donna nera ad avere ricevuto un dottorato e ad essere diventata direttrice di un quotidiano in Italia: Geneviève Makaping (Maka). Questo documentario ispirato alla biografia e al pensiero di Maka e distribuito da OpenDDB, racconta la sua dolorosa storia di migrazione dal Camerun attraverso il deserto, l’arrivo in Calabria nel 1982 in seguito alla tragica morte del compagno di viaggio, il successo come giornalista e conduttrice televisiva, e il recente trasferimento e l’attuale attività di insegnante a Mantova. La storia di Maka offre lo spunto per ripensare l’appartenenza nazionale, e il modo in (...)

  • Politiques migratoires : « Des dispositifs mortels, dont l’effet est de tuer pour dissuader »

    Les textes composant le Pacte migratoire européen devraient être votés à Bruxelles d’ici mercredi 10 avril. Ils pourraient réduire considérablement les droits des personnes en exil qui tenteraient de rejoindre l’Union européenne.

    Renforcer les contrôles aux frontières, procéder au tri des exilé·es aux portes de l’Union européenne, traiter les procédures d’asile en accéléré, expulser plus rapidement les « indésirables » ou encourager les logiques d’externalisation…

    Les textes qui composent le pacte migratoire européen sont actuellement débattus au Parlement européen et doivent être votés mercredi 10 avril. Censé répondre à la crise de l’accueil qu’a connue l’Europe en 2015, il est largement rejeté par la gauche et les ONG, mais a toutes les chances d’être adopté après plus de deux ans de tractations.

    Pourquoi a-t-il été aussi difficile d’aboutir sur un tel pacte ? Que va-t-il changer pour les personnes exilées ? Comment en contrer les potentiels effets négatifs ?

    Nos invitées pour en débattre :

    - #Rima_Hassan, candidate LFI aux élections européennes, juriste et fondatrice de l’Observatoire des camps de réfugiés ;
    - #Sophie-Anne_Bisiaux, membre du réseau Migreurop, spécialiste des questions liées à l’externalisation, notamment en Afrique du Nord ;
    - #Sophie_Djigo, philosophe, fondatrice du collectif Migraction59 dans le nord de la France, autrice de Penser avec la frontière (Éditions d’une rive à l’autre).

    https://www.mediapart.fr/journal/international/090424/politiques-migratoires-des-dispositifs-mortels-dont-l-effet-est-de-tuer-po
    #pacte_européen_sur_la_migration_et_l’asile #pacte #Europe #pacte_migratoire #asile #migrations #réfugiés
    #pression_migratoire #management_migratoire #triple_win #répression #administration_des_flux #exclusion #récupération #humanité #fermeté #enfermement #tri #militarisation_des_frontières #racisme #règlement_filtrage #filtrage #frontières #frontières_extérieures #détention #enfermement #fichage #empreintes_digitales #procédure_d'asile #procédure_à_la_frontière #procédure_accélérée #pays_sûrs #fiction_juridique_de_non-entrée #non-entrée #fiction_juridique #encampement #encampement_généralisé #répartition #répartition_de_solidarité #paternalisme_colonial #externalisation #externalisation_des_frontières #refoulements #push-backs
    #vidéo

  • Digitalzwang bei Bahncard, Bankkonto & Co. : Wer kein Handy hat, muss bald draußen bleiben
    https://www.berliner-zeitung.de/zukunft-technologie/digitalzwang-wer-kein-handy-hat-muss-draussen-bleiben-li.2206745

    L’espionnage par l’app de la Deutsche Bahn et l’impossibilité d’obtenir des billets de train à des prix abordables si on n’a pas de smartphone et de compte auprès de DB me poussent à n’utiliser plus que des moyens de transport individuels.

    Je vais acheter une voiture de l’ère quand la géolocalisation n’était pas encore obligatoire et quand n’importe quel mécanicien pouvait la réparer sans devoir passer par le service numérique du producteur pour identifier la raison d’un problème technique.

    C’est ennuyeux car j’aime les voyages en train, mais la qualité des wagons a tellement baissé que la perte de temps que représente la conduite d’une voiture est largement compensée. Lors de mon dernier voyage de nuit entre Paris à Berlin, j’avais acheté un ticket première classe, je n’ai pas pu dormir parce qu’il était impossible d’éteindre les lumières du compartiment.

    Désormais je ferai comme dans le passé et je conduirai en écoutant de la musique à fond pour me tenir éveillé.

    Mon but est de revenir à une vie cent pour cent analogue, sans paiement par carte d’ici quatre ans. C’est un projet politique. La lutte pour une #vraie_vie vient de commencer.

    Ceci ne signifie pas de me débarasser de mes outils. Je veux seulement qu’ils m’appartiennt vraiment et qu’on ne puisse rien m’imposer à travers ces objets.

    22.4.2024 von Adrian Lobe - Ob BahnCard, Parkplatz oder Bankkonto – ohne App geht im Alltag immer weniger. Für Menschen ohne Smartphone ist dies ein ernsthaftes Problem.

    Wer künftig mit der Deutschen Bahn reisen und die BahnCard für Rabatte nutzen will, braucht ein Smartphone oder Tablet: Ab dem 9. Juni gibt es die BahnCard nur noch digital. Die Bahn schafft die Plastikkarte ab. Aus Gründen des Umweltschutzes, wie es offiziell heißt: „Tschüss Plastikkarte – Hallo Nachhaltigkeit.“ So würden über 30 Tonnen Plastik pro Jahr eingespart. Um die digitale BahnCard zu erhalten, benötigen Kunden die App „DB Navigator“, in der auch Verspätungen und Anschlusszüge angezeigt werden. Knapp zwei Drittel der Bahnfahrer würden die Karte schon jetzt in der App nutzen, so die Bahn.

    Der Schritt kommt nicht überraschend. So gibt es das Bahn-Kundenmagazin DB Mobil nur noch digital (die gedruckte Ausgabe wurde Ende 2022 eingestellt), und auch Tickets im Zug können Spontanreisende nur noch mit ihrem Smartphone lösen – die Papier-Fahrkarten wurden abgeschafft. Doch was ist mit Menschen, die kein Smartphone haben?

    Als Alternative zur digitalen BahnCard können sich Kunden auf bahn.de ein PDF-Dokument herunterladen, heißt es bei der Bahn. Dieses Ersatzdokument könne dann ausgedruckt und bei Bahnreisen mitgeführt werden. Das setzt aber voraus, dass man ein Kundenkonto bei der Deutschen Bahn besitzt und das Internet nutzt. Doch es gibt Menschen, die gar nicht wissen, wie man das Internet bedient. Nach Angaben des Statistischen Bundesamts waren 3,4 Millionen Deutsche zwischen 16 und 74 Jahren noch nie im Internet. Und laut einer repräsentativen Studie des Digitalverbands Bitkom nutzt mehr als die Hälfte der Menschen über 65 Jahren kein Smartphone. Schon jetzt fühlen sich viele Menschen abgehängt.

    Beim Thema Datenschutz ist bei der Bahn schnell Endstation

    Dass Senioren, die Überweisungen noch in Papierform am Bankschalter durchführen, sich einen – nicht gerade benutzerfreundlichen – Online-Account bei der Deutschen Bahn zulegen, ist eher unwahrscheinlich. Sozial- und Verbraucherschutzverbände sehen daher in der Umstellung auf digital eine Altersdiskriminierung. „Mit der Ankündigung der Deutschen Bahn, die BahnCard nur noch digital anzubieten, werden Menschen ohne digitalen Zugang von der Rabattmöglichkeit ausgeschlossen“, kritisiert Ramona Pop, Vorständin des Verbraucherzentrale-Bundesverbands. Die BahnCard müsse für alle verfügbar sein. „Der ersatzweise gültige Papierausdruck muss auch für Menschen ohne digitales Kundenkonto zugänglich sein, etwa indem es im Reisezentrum ausgehändigt wird“, so Pop.

    Der Verein Digitalcourage hat kürzlich Klage gegen den „DB Navigator“ eingereicht. Der Vorwurf: Die App sei voller Tracker, die Nutzer überwachen. So würden bei der Nutzung der App ohne Einwilligung des Nutzers zahlreiche Informationen an Dritte – unter anderem an die Adobe Marketing Cloud – übermittelt: Anzahl der Reisenden, Mitfahrt eines Kindes, Abfahrtstag, Start- und Zielbahnhof. Eine Möglichkeit zu widersprechen gebe es nicht. So werde der Bahnfahrer gezwungen, Daten von sich preiszugeben, obwohl er dies unter Umständen gar nicht möchte. Beim Thema Datenschutz ist bei der Bahn schnell Endstation.

    So wie mit der Bahn geht es einem in ganz vielen Bereichen des täglichen Lebens. Ob Parkplatz, Supermarktrabatt oder Bankkonto – ohne Smartphone-App geht immer weniger. Beispiel DHL: Das Logistikunternehmen stellt seine Packstationen schrittweise auf App-Betrieb um – Scanner, Eingabefeld und Drucker werden ausgebaut. Kunden, die ein Paket abholen oder verschicken wollen, benötigen eine App. Die Versandmarke, die man bislang bequem an der Packstation ausdrucken konnte, wird durch einen Code ersetzt. Der Verein Digitalcourage spricht von einem „Digitalzwang“ – und verlieh der DHL Group im vergangenen Jahr den „Big Brother Award“. Eine Auszeichnung, die alles andere als ein Ruhmesblatt ist.
    Sogar Speisekarten in Restaurants gibt es oft nur noch digital

    Auch in der Gastronomie ist man ohne Smartphone verloren. In zahlreichen Cafés und Restaurants gibt es Speisekarten nur noch in digitaler Form: Wer wissen will, was auf der Tageskarte steht, muss erst einen QR-Code scannen. Und das geht nur mit Smartphone.

    Im Ausland sieht es nicht anders aus: Rom-Touristen, die das Forum Romanum mit seinen historischen Sehenswürdigkeiten besuchen wollen, müssen ihre Eintrittskarte online kaufen und auf dem Handy speichern – der Ticket-Verkauf vor Ort wurde im Zuge der Corona-Pandemie eingestellt. Wer kein Handy hat, muss draußen bleiben.

    Das Problem an dem digitalbasierten Zugang zum öffentlichen Leben besteht auch darin, dass man sich in regelmäßigen Abständen ein neues Smartphone kaufen muss, um die aus Sicherheitsgründen erforderlichen Software-Updates aufspielen zu können. Das kann und will sich nicht jeder leisten. So leistet das Handy einer sozialen Ausgrenzung Vorschub.

    Und es gibt auch eine weltweite Kluft. Nach Angaben der Internationalen Fernmeldeunion (ITU) sind auf der Erde immer noch 2,7 Milliarden Menschen offline. Diese Menschen, die in staubigen Dörfern in der Sahelzone oder in Indien leben, haben keinen Internetanschluss und müssen oft mehrere Kilometer zu Fuß zurücklegen, um ins nächste Internetcafé zu gelangen. Aber auch in wohlhabenden Industrienationen gibt es Menschen, die das Internet nicht nutzen, obwohl sie Zugang dazu hätten. In den USA sind dies immerhin sieben Prozent der Erwachsenen. Die Gründe dafür sind unterschiedlich: mangelndes Interesse, zu hohe Kosten, Datenschutzbedenken. Unter den Nichtnutzern befinden sich interessanterweise auch ehemalige Nutzer: Menschen, die am Ende ihres Berufslebens noch mit E-Mails in Berührung kamen, im Ruhestand aber das Interesse verloren haben und lieber den analogen Weg gehen.
    Kritiker fordern das Recht auf ein analoges Leben

    Kritiker fordern daher schon seit einiger Zeit ein „Recht auf analoges Leben“: Bürger müssten das Recht haben, sämtliche Rechtsgeschäfte und Verwaltungsangelegenheiten – von der Kontoeröffnung bis zur Steuererklärung – in analoger Form durchzuführen. Das Bargeld müsse erhalten bleiben, einen Zwang zu einer digitalen Präsenz dürfe es nicht geben.

    Das Recht auf analoges Leben kollidiert allerdings mit dem Recht auf digitale Verwaltung: Das jüngst vom Bundesrat blockierte Onlinezugangsgesetz soll Bürgern Behördengänge in ein paar Mausklicks ermöglichen. Während die einen das Medium Papier als Quell der Bürokratie sehen, ist es für die anderen ein Garant für Datenschutz – und Teilhabe am öffentlichen Leben.

    #exclusion_digitale #vie_privée #numérisation #vraie_vie

  • L’#Europe et la fabrique de l’étranger

    Les discours sur l’ « #européanité » illustrent la prégnance d’une conception identitaire de la construction de l’Union, de ses #frontières, et de ceux qu’elle entend assimiler ou, au contraire, exclure au nom de la protection de ses #valeurs particulières.

    Longtemps absente de la vie démocratique de l’#Union_européenne (#UE), la question identitaire s’y est durablement installée depuis les années 2000. Si la volonté d’affirmer officiellement ce que « nous, Européens » sommes authentiquement n’est pas nouvelle, elle concernait jusqu’alors surtout – à l’instar de la Déclaration sur l’identité européenne de 1973 – les relations extérieures et la place de la « Communauté européenne » au sein du système international. À présent, elle renvoie à une quête d’« Européanité » (« Europeanness »), c’est-à-dire la recherche et la manifestation des #trait_identitaires (héritages, valeurs, mœurs, etc.) tenus, à tort ou à raison, pour caractéristiques de ce que signifie être « Européens ». Cette quête est largement tournée vers l’intérieur : elle concerne le rapport de « nous, Européens » à « nous-mêmes » ainsi que le rapport de « nous » aux « autres », ces étrangers et étrangères qui viennent et s’installent « chez nous ».

    C’est sous cet aspect identitaire qu’est le plus fréquemment et vivement discuté ce que l’on nomme la « #crise_des_réfugiés » et la « #crise_migratoire »

    L’enjeu qui ferait de l’#accueil des exilés et de l’#intégration des migrants une « #crise » concerne, en effet, l’attitude que les Européens devraient adopter à l’égard de celles et ceux qui leur sont « #étrangers » à double titre : en tant qu’individus ne disposant pas de la #citoyenneté de l’Union, mais également en tant que personnes vues comme les dépositaires d’une #altérité_identitaire les situant à l’extérieur du « #nous » – au moins à leur arrivée.

    D’un point de vue politique, le traitement que l’Union européenne réserve aux étrangères et étrangers se donne à voir dans le vaste ensemble de #discours, #décisions et #dispositifs régissant l’#accès_au_territoire, l’accueil et le #séjour de ces derniers, en particulier les accords communautaires et agences européennes dévolus à « une gestion efficace des flux migratoires » ainsi que les #politiques_publiques en matière d’immigration, d’intégration et de #naturalisation qui restent du ressort de ses États membres.

    Fortement guidées par des considérations identitaires dont la logique est de différencier entre « nous » et « eux », de telles politiques soulèvent une interrogation sur leurs dynamiques d’exclusion des « #autres » ; cependant, elles sont aussi à examiner au regard de l’#homogénéisation induite, en retour, sur le « nous ». C’est ce double questionnement que je propose de mener ici.

    En quête d’« Européanité » : affirmer la frontière entre « nous » et « eux »

    La question de savoir s’il est souhaitable et nécessaire que les contours de l’UE en tant que #communauté_politique soient tracés suivant des #lignes_identitaires donne lieu à une opposition philosophique très tranchée entre les partisans d’une défense sans faille de « l’#identité_européenne » et ceux qui plaident, à l’inverse, pour une « #indéfinition » résolue de l’Europe. Loin d’être purement théorique, cette opposition se rejoue sur le plan politique, sous une forme tout aussi dichotomique, dans le débat sur le traitement des étrangers.

    Les enjeux pratiques soulevés par la volonté de définir et sécuriser « notre » commune « Européanité » ont été au cœur de la controverse publique qu’a suscitée, en septembre 2019, l’annonce faite par #Ursula_von_der_Leyen de la nomination d’un commissaire à la « #Protection_du_mode_de_vie_européen », mission requalifiée – face aux critiques – en « #Promotion_de_notre_mode_de_vie_européen ». Dans ce portefeuille, on trouve plusieurs finalités d’action publique dont l’association même n’a pas manqué de soulever de vives inquiétudes, en dépit de la requalification opérée : à l’affirmation publique d’un « #mode_de_vie » spécifiquement « nôtre », lui-même corrélé à la défense de « l’#État_de_droit », « de l’#égalité, de la #tolérance et de la #justice_sociale », se trouvent conjoints la gestion de « #frontières_solides », de l’asile et la migration ainsi que la #sécurité, le tout placé sous l’objectif explicite de « protéger nos citoyens et nos valeurs ».

    Politiquement, cette « priorité » pour la période 2019-2024 s’inscrit dans la droite ligne des appels déjà anciens à doter l’Union d’un « supplément d’âme
     » ou à lui « donner sa chair » pour qu’elle advienne enfin en tant que « #communauté_de_valeurs ». De tels appels à un surcroît de substance spirituelle et morale à l’appui d’un projet européen qui se devrait d’être à la fois « politique et culturel » visaient et visent encore à répondre à certains problèmes pendants de la construction européenne, depuis le déficit de #légitimité_démocratique de l’UE, si discuté lors de la séquence constitutionnelle de 2005, jusqu’au défaut de stabilité culminant dans la crainte d’une désintégration européenne, rendue tangible en 2020 par le Brexit.

    Précisément, c’est de la #crise_existentielle de l’Europe que s’autorisent les positions intellectuelles qui, poussant la quête d’« Européanité » bien au-delà des objectifs politiques évoqués ci-dessus, la déclinent dans un registre résolument civilisationnel et défensif. Le geste philosophique consiste, en l’espèce, à appliquer à l’UE une approche « communautarienne », c’est-à-dire à faire entièrement reposer l’UE, comme ensemble de règles, de normes et d’institutions juridiques et politiques, sur une « #communauté_morale » façonnée par des visions du bien et du monde spécifiques à un groupe culturel. Une fois complétée par une rhétorique de « l’#enracinement » desdites « #valeurs_européennes » dans un patrimoine historique (et religieux) particulier, la promotion de « notre mode de vie européen » peut dès lors être orientée vers l’éloge de ce qui « nous » singularise à l’égard d’« autres », de « ces mérites qui nous distinguent » et que nous devons être fiers d’avoir diffusés au monde entier.

    À travers l’affirmation de « notre » commune « Européanité », ce n’est pas seulement la reconnaissance de « l’#exception_européenne » qui est recherchée ; à suivre celles et ceux qui portent cette entreprise, le but n’est autre que la survie. Selon #Chantal_Delsol, « il en va de l’existence même de l’Europe qui, si elle n’ose pas s’identifier ni nommer ses caractères, finit par se diluer dans le rien. » Par cette #identification européenne, des frontières sont tracées. Superposant Europe historique et Europe politique, Alain Besançon les énonce ainsi : « l’Europe s’arrête là où elle s’arrêtait au XVIIe siècle, c’est-à-dire quand elle rencontre une autre civilisation, un régime d’une autre nature et une religion qui ne veut pas d’elle. »

    Cette façon de délimiter un « #nous_européen » est à l’exact opposé de la conception de la frontière présente chez les partisans d’une « indéfinition » et d’une « désappropriation » de l’Europe. De ce côté-ci de l’échiquier philosophique, l’enjeu est au contraire de penser « un au-delà de l’identité ou de l’identification de l’Europe », étant entendu que le seul « crédit » que l’on puisse « encore accorder » à l’Europe serait « celui de désigner un espace de circulation symbolique excédant l’ordre de l’identification subjective et, plus encore, celui de la #crispation_identitaire ». Au lieu de chercher à « circonscri[re] l’identité en traçant une frontière stricte entre “ce qui est européen” et “ce qui ne l’est pas, ne peut pas l’être ou ne doit pas l’être” », il s’agit, comme le propose #Marc_Crépon, de valoriser la « #composition » avec les « #altérités » internes et externes. Animé par cette « #multiplicité_d’Europes », le principe, thématisé par #Etienne_Balibar, d’une « Europe comme #Borderland », où les frontières se superposent et se déplacent sans cesse, est d’aller vers ce qui est au-delà d’elle-même, vers ce qui l’excède toujours.

    Tout autre est néanmoins la dynamique impulsée, depuis une vingtaine d’années, par les politiques européennes d’#asile et d’immigration.

    La gouvernance européenne des étrangers : l’intégration conditionnée par les « valeurs communes »

    La question du traitement public des étrangers connaît, sur le plan des politiques publiques mises en œuvre par les États membres de l’UE, une forme d’européanisation. Celle-ci est discutée dans les recherches en sciences sociales sous le nom de « #tournant_civique ». Le terme de « tournant » renvoie au fait qu’à partir des années 2000, plusieurs pays européens, dont certains étaient considérés comme observant jusque-là une approche plus ou moins multiculturaliste (tels que le Royaume-Uni ou les Pays-Bas), ont développé des politiques de plus en plus « robustes » en ce qui concerne la sélection des personnes autorisées à séjourner durablement sur leur territoire et à intégrer la communauté nationale, notamment par voie de naturalisation. Quant au qualificatif de « civique », il marque le fait que soient ajoutés aux #conditions_matérielles (ressources, logement, etc.) des critères de sélection des « désirables » – et, donc, de détection des « indésirables » – qui étendent les exigences relatives à une « #bonne_citoyenneté » aux conduites et valeurs personnelles. Moyennant son #intervention_morale, voire disciplinaire, l’État se borne à inculquer à l’étranger les traits de caractère propices à la réussite de son intégration, charge à lui de démontrer qu’il conforme ses convictions et comportements, y compris dans sa vie privée, aux « valeurs » de la société d’accueil. Cette approche, centrée sur un critère de #compatibilité_identitaire, fait peser la responsabilité de l’#inclusion (ou de l’#exclusion) sur les personnes étrangères, et non sur les institutions publiques : si elles échouent à leur assimilation « éthique » au terme de leur « #parcours_d’intégration », et a fortiori si elles s’y refusent, alors elles sont considérées comme se plaçant elles-mêmes en situation d’être exclues.

    Les termes de « tournant » comme de « civique » sont à complexifier : le premier car, pour certains pays comme la France, les dispositifs en question manifestent peu de nouveauté, et certainement pas une rupture, par rapport aux politiques antérieures, et le second parce que le caractère « civique » de ces mesures et dispositifs d’intégration est nettement moins évident que leur orientation morale et culturelle, en un mot, identitaire.

    En l’occurrence, c’est bien plutôt la notion d’intégration « éthique », telle que la définit #Jürgen_Habermas, qui s’avère ici pertinente pour qualifier ces politiques : « éthique » est, selon lui, une conception de l’intégration fondée sur la stabilisation d’un consensus d’arrière-plan sur des « valeurs » morales et culturelles ainsi que sur le maintien, sinon la sécurisation, de l’identité et du mode de vie majoritaires qui en sont issus. Cette conception se distingue de l’intégration « politique » qui est fondée sur l’observance par toutes et tous des normes juridico-politiques et des principes constitutionnels de l’État de droit démocratique. Tandis que l’intégration « éthique » requiert des étrangers qu’ils adhèrent aux « valeurs » particulières du groupe majoritaire, l’intégration « politique » leur demande de se conformer aux lois et d’observer les règles de la participation et de la délibération démocratiques.

    Or, les politiques d’immigration, d’intégration et de naturalisation actuellement développées en Europe sont bel et bien sous-tendues par cette conception « éthique » de l’intégration. Elles conditionnent l’accès au « nous » à l’adhésion à un socle de « valeurs » officiellement déclarées comme étant déjà « communes ». Pour reprendre un exemple français, cette approche ressort de la manière dont sont conçus et mis en œuvre les « #contrats_d’intégration » (depuis le #Contrat_d’accueil_et_d’intégration rendu obligatoire en 2006 jusqu’à l’actuel #Contrat_d’intégration_républicaine) qui scellent l’engagement de l’étranger souhaitant s’installer durablement en France à faire siennes les « #valeurs_de_la_République » et à les « respecter » à travers ses agissements. On retrouve la même approche s’agissant de la naturalisation, la « #condition_d’assimilation » propre à cette politique donnant lieu à des pratiques administratives d’enquête et de vérification quant à la profondeur et la sincérité de l’adhésion des étrangers auxdites « valeurs communes », la #laïcité et l’#égalité_femmes-hommes étant les deux « valeurs » systématiquement mises en avant. L’étude de ces pratiques, notamment les « #entretiens_d’assimilation », et de la jurisprudence en la matière montre qu’elles ciblent tout particulièrement les personnes de religion et/ou de culture musulmanes – ou perçues comme telles – en tant qu’elles sont d’emblée associées à des « valeurs » non seulement différentes, mais opposées aux « nôtres ».

    Portées par un discours d’affrontement entre « systèmes de valeurs » qui n’est pas sans rappeler le « #choc_des_civilisations » thématisé par #Samuel_Huntington, ces politiques, censées « intégrer », concourent pourtant à radicaliser l’altérité « éthique » de l’étranger ou de l’étrangère : elles construisent la figure d’un « autre » appartenant – ou suspecté d’appartenir – à un système de « valeurs » qui s’écarterait à tel point du « nôtre » que son inclusion dans le « nous » réclamerait, de notre part, une vigilance spéciale pour préserver notre #identité_collective et, de sa part, une mise en conformité de son #identité_personnelle avec « nos valeurs », telles qu’elles s’incarneraient dans « notre mode de vie ».

    Exclusion des « autres » et homogénéisation du « nous » : les risques d’une « #Europe_des_valeurs »

    Le recours aux « valeurs communes », pour définir les « autres » et les conditions de leur entrée dans le « nous », n’est pas spécifique aux politiques migratoires des États nationaux. L’UE, dont on a vu qu’elle tenait à s’affirmer en tant que « communauté morale », a substitué en 2009 au terme de « #principes » celui de « valeurs ». Dès lors, le respect de la dignité humaine et des droits de l’homme, la liberté, la démocratie, l’égalité, l’État de droit sont érigés en « valeurs » sur lesquelles « l’Union est fondée » (art. 2 du Traité sur l’Union européenne) et revêtent un caractère obligatoire pour tout État souhaitant devenir et rester membre de l’UE (art. 49 sur les conditions d’adhésion et art. 7 sur les sanctions).

    Reste-t-on ici dans le périmètre d’une « intégration politique », au sens où la définit Habermas, ou franchit-on le cap d’une « intégration éthique » qui donnerait au projet de l’UE – celui d’une intégration toujours plus étroite entre les États, les peuples et les citoyens européens, selon la formule des traités – une portée résolument identitaire, en en faisant un instrument pour sauvegarder la « #civilisation_européenne » face à d’« autres » qui la menaceraient ? La seconde hypothèse n’a certes rien de problématique aux yeux des partisans de la quête d’« Européanité », pour qui le projet européen n’a de sens que s’il est tout entier tourné vers la défense de la « substance » identitaire de la « civilisation européenne ».

    En revanche, le passage à une « intégration éthique », tel que le suggère l’exhortation à s’en remettre à une « Europe des valeurs » plutôt que des droits ou de la citoyenneté, comporte des risques importants pour celles et ceux qui souhaitent maintenir l’Union dans le giron d’une « intégration politique », fondée sur le respect prioritaire des principes démocratiques, de l’État de droit et des libertés fondamentales. D’où également les craintes que concourt à attiser l’association explicite des « valeurs de l’Union » à un « mode de vie » à préserver de ses « autres éthiques ». Deux risques principaux semblent, à cet égard, devoir être mentionnés.

    En premier lieu, le risque d’exclusion des « autres » est intensifié par la généralisation de politiques imposant un critère de #compatibilité_identitaire à celles et ceux que leur altérité « éthique », réelle ou supposée, concourt à placer à l’extérieur d’une « communauté de valeurs » enracinée dans des traditions particulières, notamment religieuses. Fondé sur ces bases identitaires, le traitement des étrangers en Europe manifesterait, selon #Etienne_Tassin, l’autocontradiction d’une Union se prévalant « de la raison philosophique, de l’esprit d’universalité, de la culture humaniste, du règne des droits de l’homme, du souci pour le monde dans l’ouverture aux autres », mais échouant lamentablement à son « test cosmopolitique et démocratique ». Loin de représenter un simple « dommage collatéral » des politiques migratoires de l’UE, les processus d’exclusion touchant les étrangers constitueraient, d’après lui, « leur centre ». Même position de la part d’Étienne Balibar qui n’hésite pas à dénoncer le « statut d’#apartheid » affectant « l’immigration “extracommunautaire” », signifiant par là l’« isolement postcolonial des populations “autochtones” et des populations “allogènes” » ainsi que la construction d’une catégorie d’« étrangers plus qu’étrangers » traités comme « radicalement “autres”, dissemblables et inassimilables ».

    Le second risque que fait courir la valorisation d’un « nous » européen désireux de préserver son intégrité « éthique », touche au respect du #pluralisme. Si l’exclusion des « autres » entre assez clairement en tension avec les « valeurs » proclamées par l’Union, les tendances à l’homogénéisation résultant de l’affirmation d’un consensus fort sur des valeurs déclarées comme étant « toujours déjà » communes aux Européens ne sont pas moins susceptibles de contredire le sens – à la fois la signification et l’orientation – du projet européen. Pris au sérieux, le respect du pluralisme implique que soit tolérée et même reconnue une diversité légitime de « valeurs », de visions du bien et du monde, dans les limites fixées par l’égale liberté et les droits fondamentaux. Ce « fait du pluralisme raisonnable », avec les désaccords « éthiques » incontournables qui l’animent, est le « résultat normal » d’un exercice du pouvoir respectant les libertés individuelles. Avec son insistance sur le partage de convictions morales s’incarnant dans un mode de vie culturel, « l’Europe des valeurs » risque de produire une « substantialisation rampante » du « nous » européen, et d’entériner « la prédominance d’une culture majoritaire qui abuse d’un pouvoir de définition historiquement acquis pour définir à elle seule, selon ses propres critères, ce qui doit être considéré comme la culture politique obligatoire de la société pluraliste ».

    Soumis aux attentes de reproduction d’une identité aux frontières « éthiques », le projet européen est, en fin de compte, dévié de sa trajectoire, en ce qui concerne aussi bien l’inclusion des « autres » que la possibilité d’un « nous » qui puisse s’unir « dans la diversité ».

    https://laviedesidees.fr/L-Europe-et-la-fabrique-de-l-etranger
    #identité #altérité #intégration_éthique #intégration_politique #religion #islam

    • Politique de l’exclusion

      Notion aussi usitée que contestée, souvent réduite à sa dimension socio-économique, l’exclusion occupe pourtant une place centrale dans l’histoire de la politique moderne. Les universitaires réunis autour de cette question abordent la dimension constituante de l’exclusion en faisant dialoguer leurs disciplines (droit, histoire, science politique, sociologie). Remontant à la naissance de la citoyenneté moderne, leurs analyses retracent l’invention de l’espace civique, avec ses frontières, ses marges et ses zones d’exclusion, jusqu’à l’élaboration actuelle d’un corpus de valeurs européennes, et l’émergence de nouvelles mobilisations contre les injustices redessinant les frontières du politique.

      Tout en discutant des usages du concept d’exclusion en tenant compte des apports critiques, ce livre explore la manière dont la notion éclaire les dilemmes et les complexités contemporaines du rapport à l’autre. Il entend ainsi dévoiler l’envers de l’ordre civique, en révélant la permanence d’une gouvernementalité par l’exclusion.

      https://www.puf.com/politique-de-lexclusion

      #livre

  • Review of zur Nieden, Susanne, Unwürdige Opfer : Die Aberkennung von NS-Verfolgten in Berlin 1945 bis 1949
    https://www.h-net.org/reviews/showrev.php?id=18269

    C’est un sujet pour l’année 2024 : l’exclusion et la culpabilisation des plus pauvres. La pratique la plus radicale de l’idéologie de la responsabilité individuelle pour la maladie et la pauvreté fut la définition assez floue et l’emprisonnement dans les camps nazis des « asociaux et criminels professionnels ».

    En principe et d’un point de vue de pauvre et de malade les déologies nazies et libérales sont identiques. Il y a une différence dans le détail : Les nazis t’assassinaient et t’euthanasiaient, les libéraux te laissent crever tout seul des suites de ta pauvreté et de ta maladie.

    Comme à l’époque nazie chaque personne non fortunée est encore aujourd’hui soumise à l’accusation de responsabilité pour son propre malheur. La transformation des états de providence en sociétés libérales ("there is no such thing as society", Thatcher) continue et se radicalise en temps de guerre.

    En 2024 on aura beaucoup de choses à découvrir et à contester.

    Reviewed by Veronika Springmann
    Published on H-Soz-u-Kult (November, 2003)

    In den vergangenen Jahren ist nicht nur einiges zur Geschichte der Nachkriegszeit in beiden deutschen Staaten veröffentlicht worden, auch die Anfänge der Debatten um Entschädigung und Wiedergutmachung wurden in den Blick genommen. Stellvertretend erwähnt sei hier der Sammelband Klaus Naumann (Hg.), Nachkrieg in Deutschland, Hamburg 2001.
    Susanne zur Nieden versteht ihre Untersuchung zum „Berliner Hauptausschuss Opfer des Faschismus“ als eine „Detailstudie im Kontext der Vergangenheitspolitik“ (S.11). Sie fokussiert sich auf die Diskussion um die Wiedergutmachung von NS–Verfolgten und deren Umsetzung in Berlin von Mai 1945 bis Ende 1948.

    Im ersten Teil der Untersuchung beschreibt Susanne zur Nieden die Versuche einer Gruppe von Überlebenden, eine „überparteiliche und gesamtdeutsche Verfolgtenpolitik“ zu initiieren. Das wurde bereits von Olaf Groehler 1995 Vgl. hier Olaf Goehler, Verfolgten- und Opfergruppen in den politischen Auseinandersetzungen in der SBZ und DDR, in: Jürgen Danyel (Hg.), Die geteilte Vergangenheit. Zum Untergang mit dem Nationalsozialismus und Widerstand in beiden deutschen Staaten, Berlin 1995, S. 17 – 31. beschrieben. Dies wird nun sehr detailreich ausgeführt, vor allem im zweiten Teil der Monographie, der sich nicht nur mit der konkreten Arbeit des Berliner Hauptausschusses „Opfer des Faschismus“ beschäftigt, sondern aufzeigt, nach welchen Kriterien Verfolgte des Nationalsozialismus aus der Entschädigungspraxis ausgeschlossen wurden. In ihrem Ergebnis kommt sie zu einem Resultat, welches bereits Constantin Goeschler formulierte: “Zwischen der Gesamtzahl derer, die im Dritten Reich oder durch dieses diskriminiert, verfolgt oder ermordet, und der Zahl derer, die nach dem Krieg in Deutschland als Verfolgte des Nationalsozialismus in Betracht gezogen wurden, herrscht eine erhebliche Diskrepanz. Vgl. Constantin Goschler, Nachkriegsdeutschland und die Verfolgten des Nationalsozialismus, in: Hans – Erich Volkmann (Hg.), Ende des Dritten Reiches – Ende des zweiten Weltkrieges. Eine perspektivische Rückschau, München/Zürich 1995, 317 – 342, hier: 318. Von dieser Diagnose ausgehend schält sich eine der Hauptfragen der Untersuchung heraus: Welche Überlegungen lagen der gängigen Praxis des Ein – bzw. Ausschlusses in die Gemeinschaft der Verfolgten zugrunde. Susanne zur Nieden lässt sich hier von der Annahme leiten, dass „Ausschluss und Grenzziehung“ konstitutive Elemente der Entschädigungspraxis gewesen seien. Dass sie diese Ausschlüsse nicht immer rückbindet an Normvorstellungen der Akteure, ist eine Schwäche des Bandes.

    Bereits im März 1945 hatte sich in Berlin eine Gruppe von Gegnern des nationalsozialistischen Staates zusammengeschlossen. Noch war Berlin nicht in Sektoren aufgeteilt und unterstand der sowjetischen Verwaltung. Der von der sowjetischen Militäradministration eingesetzte Berliner Magistrat arbeitete unter den extremen Bedingungen einer zerstörten Infrastruktur, einer Stadt voller Flüchtlinge und obdachloser Menschen. Im Mai 1945 gelang es einer Gruppe von Häftlingen um Ottomar Geschke eine Interessenvertretung für NS-Verfolgte zu initiieren. Ottomar Geschke, Stadtrat für Soziales, strich bereits in seiner ersten Rede heraus, dass er die soziale Betreuung der „Opfer des Faschismus“ für das Kernstück der Sozialpolitik halte: „ Ich habe mir gesagt, das deutsche Volk insgesamt, das tatenlos zugesehen hat, wie Millionen und Abermillionen in die KZ’s (sic!) in die Zuchthäuser und die Gefängnisse geworfen und durch Krematorien gejagt wurden, dieses deutsche Volk, also die Gesellschaft muss wiedergutmachen an uns.“ Zit. nach Susanne zur Nieden, Unwürdige Opfer, 31. Diese Passage macht deutlich, was Susanne zur Nieden erst im Schlusswort deutlich formuliert, sich aber als „leise“ Frage dennoch durch den ganzen Band zieht: Wie eng die Frage nach Wiedergutmachung von NS-Verbrechen mit einer anderen zweiten zusammenhing, nämlich wie die sich neu bildenden Instanzen im besetzten Deutschland mit den NS-Aktivisten beziehungsweise mit der Mehrheit der Mitläufer umgehen sollten.“(S. 186).

    Der Hauptausschuss, keinesfalls nur von Kommunisten geprägt, Das zeigt bereits die erwähnte Studie von Olaf Groehler. Vgl. dazu Barck, Simone, Antifa-Geschichte(n). Eine literarische Spurensuche in der DDR der 1950er und 1960er Jahre, Köln 2003. Vgl. Susanne zur Nieden, “...für das Ansehen, der ‚Opfer des Faschismus’ nicht tragbar“. Auseinandersetzungen um den Verfolgtenstatus von Minna R., Blockälteste im KZ Ravensbrück, in: Insa Eschebach/Sigrid Jacobeit/Susanne Lanwerd (Hgg.), Die Sprache des Gedenkens. Zur Geschichte der Gedenkstätte Ravnebsrück 1945-1995, Berlin 1999, 184 – 195. setzte sich zusammen aus ehemaligen NS-Verfolgten, unterschiedlichster politischer Couleur: „Ausschließlich NS-Verfolgte sollten ihre Leidensgenossen vertreten und betreuen.“ (S. 35). Sieht Jürgen Danyel in dieser pluralen Zusammensetzung demokratische Versuche, wertet es Susanne zur Nieden v.a. als taktisch. Eine Annahme, die in der Untersuchung nicht überzeugend belegt werden kann, auch nicht im zweiten Teil, der sich mit „Unwürdigen Opfern“ auseinandersetzt, und Fragmente von „Verfolgungsbiografien“ vorstellt. Insgesamt liest sich dieser Teil ungleich spannender als der vorhergehende.

    Susanne zur Nieden beschäftigt sich hier mit Überprüfungsaktionen des Berliner Hauptausschusses, in deren Verlauf Menschen der Status eines NS-Verfolgten aberkannt wurde. Susanne zu Nieden zeigt auf, an welchen Schnittstellen diese Überprüfungsaktion angesiedelt war. So geben uns diese Akten nicht nur Auskunft über das tatsächliche Procedere des Ausschusses, sondern berichten über die moralisch-politischen Vorstellungen der Gruppe, die darüber entschied, wer sich „Opfer des Faschismus“ nennen durfte. Deutlich wird hier, wie stark kollektive Erinnerung und Erinnerungsarbeit vom politischen und moralischen Impetus unterschiedlicher gesellschaftlicher Gruppen geleitet wird.

    Gegliedert ist der zweite Teil in vier Kapitel. Zunächst widmet sich Susanne zur Nieden der Frage, unter welchen Umständen es zu einer Überprüfung der anerkannten „Opfer des Faschismus“ kam. Im zweiten Kapitel wird von Menschen erzählt, die ihre Anerkennung als Opfer des Faschismus verloren haben. Moralischer und politischer Anspruch des Hauptausschusses zeigten sich in seiner formulierten gesellschaftlichen Vorbildfunktion, die es nicht zulassen konnte, dass sich innerhalb des OdF Menschen befanden, „die sich kriminelle Handlungen zuschulden kommen lassen“ (S.120). Susanne zur Nieden führt aus, dass es zwar einerseits einen rigiden moralischen Anspruch gegeben habe, andererseits dieser zunächst in den Richtlinien keinen ausdrücklichen Niederschlag fand. Bezeichnend hierfür der Fall zweier Frauen, denen homosexuelle Handlungen vorgeworfen wurden. Rechtlich gesehen konnten sie nicht belangt werden, da gleichgeschlechtliche Beziehungen unter Frauen nicht unter Strafe standen; der Leiter des Hauptausschusses fürchtete um das Ansehen des OdF und entzog beiden Frauen die Anerkennung (S. 128). Interessant an der Stelle die Auseinandersetzungen innerhalb des Hauptausschusses, nachdem die beiden Frauen Widerspruch einlegten: Hinsichtlich der Beurteilungen gab es keinesfalls einen Common Sense, sondern im Gegenteil sehr differierende Meinungen und Vorstellungen hinsichtlich der eigenen Rolle als „Sittenwächter“.

    Gesetzeskonflikte, in die „Opfer des Faschismus“ verwickelt waren, sind das Thema von Kapitel 3. Geschildert werden hier Schicksale von Menschen, die es nicht geschafft haben, sich im Nachkriegsdeutschland zu situieren. Tragisch komisch liest sich die Geschichte von Kurt W., der im Bezirksamt Charlottenburg für die Ausgabe von Bezugsscheinen für Kleidung zuständig war. Ihm wurde nun vorgeworfen, er habe etlichen Personen unabhängig von ihren behördlichen Ansprüchen Bezugsscheine ausgestellt. Während ihm ein Prüfer aufgrund dieses gesetzeswidrigen Verhaltens die Anerkennung absprach, setzte sich Maria Wiedmaier, Überlebende des Konzentrationslagers Ravensbrück, nun Leiterin des Charlottenburger OdF Ausschusses für Kurt W. ein mit der Begründung, Kurt W. würde immer noch das Lager mit den heutigen Verhältnissen verwechseln.
    Zur Aberkennung des Verfolgtenstatus konnte aber auch nachgewiesenes „schlechtes Verhalten im KZ“ führen. Susanne zur Nieden erläutert dies am Beispiel von Minna R., der vorgeworfen wurde, im Lager andere Häftlinge misshandelt zu haben. Vgl. dazu Barck, Simone, Antifa-Geschichte(n). Eine literarische Spurensuche in der DDR der 1950er und 1960er Jahre, Köln 2003. Weitere Gründe für die Annullierung einer Anerkennung lagen aber auch in „sozial auffälligem Verhalten“ (S. 124). Dazu gehörte auch der Handel mit den „roten Ausweisen“, die ein begehrtes Tauschobjekt darstellten. Deutlich wird in dieser Monografie aufgezeigt, dass es nicht nur eine scharfe Grenzziehung von Seiten der politischen Häftlinge gegenüber anderen Opfergruppen gab, sondern der Status eines OdF als „Ehrentitel“ zu verstehen sei(S.188). Geschaffen wurde das Bild des männlichen, sich selbstaufopfernden Widerstandskämpfers.[7]

    Bekanntermaßen folgten spätestens ab 1949 Ost– und Westdeutschland unterschiedlichen Prinzipien der Wiedergutmachung; in der Bundesrepublik wurden 1953 die Anordnungen im Bundesentschädigungsgesetz festgehalten; in der SBZ, bzw. DDR setzte sich ab 1949 das Fürsorgeprinzip durch. Alles in allem verrät die Untersuchung von Susanne zur Nieden ausführliche Quellenkenntnisse; gewünscht hätte ich mir an manchen Stellen eine genauere Analyse der Binnenstrukturen des Hauptausschusses, in die u.a. die unterschiedlichen politischen Traditionen und Absichten der Akteure miteinbezogen worden wären und somit eine Annäherung an die Motive und vielleicht auch Ängste, die handlungsleitend für die Entscheidungen waren, erfolgen hätte können. Den Grundstein für eine derartige Untersuchung hat aber Susanne zur Nieden mit der vorliegenden Studie gelegt. Leider ist das Buch nicht optimal redigiert; so sind Susanne zur Niedens zahlreiche Publikationen einer anderen Autorin zugeschlagen worden; eine Bescheidenheit , die - wenn auch unbeabsichtigt - überflüssig ist.

    Susanne zur Nieden. Unwürdige Opfer: Die Aberkennung von NS-Verfolgten in Berlin 1945 bis 1949. Berlin: Metropol Verlag, 2003. 208 S. ISBN 978-3-936411-20-1.

    #iatrocatie #maladie #santé #pauvreté #exclusion #néolibéralisme #capitalisme #nazis #euthanasie

  • Au niveau européen, un pacte migratoire « dangereux » et « déconnecté de la réalité »

    Sara Prestianni, du réseau EuroMed Droits, et Tania Racho, chercheuse spécialiste du droit européen et de l’asile, alertent, dans un entretien à deux voix, sur les #risques de l’accord trouvé au niveau européen et qui sera voté au printemps prochain.

    Après trois années de discussions, un accord a été trouvé par les États membres sur le #pacte_européen_sur_la_migration_et_l’asile la semaine dernière. En France, cet événement n’a trouvé que peu d’écho, émoussé par la loi immigration votée au même moment et dont les effets sur les étrangers pourraient être dramatiques.

    Pourtant, le pacte migratoire européen comporte lui aussi son lot de mesures dangereuses pour les migrant·es, entre renforcement des contrôles aux frontières, tri express des demandeurs d’asile, expulsions facilitées des « indésirables » et sous-traitance de la gestion des frontières à des pays tiers. Sara Prestianni, responsable du plaidoyer au sein du réseau EuroMed Droits, estime que des violations de #droits_humains seront inévitables et invite à la création de voies légales qui permettraient de protéger les demandeurs d’asile.

    La chercheuse Tania Racho, spécialiste du droit européen et de l’asile et membre du réseau Désinfox-Migrations, répond qu’à aucun moment les institutions européennes « ne prennent en compte les personnes exilées », préférant répondre à des « objectifs de gestion des migrations ». Dans un entretien croisé, elles alertent sur les risques d’une approche purement « sécuritaire », qui renforcera la vulnérabilité des concernés et les mettra « à l’écart ».

    Mediapart : Le pacte migratoire avait été annoncé par la Commission européenne en septembre 2020. Il aura fait l’objet de longues tergiversations et de blocages. Était-ce si difficile de se mettre d’accord à 27 ?

    Tania Racho : Dans l’état d’esprit de l’Union européenne (UE), il fallait impérativement démontrer qu’il y a une gestion des migrations aux #frontières_extérieures pour rassurer les États membres. Mais il a été difficile d’aboutir à un accord. Au départ, il y avait des mesures pour des voies sécurisées d’accès à l’Union avec plus de titres économiques : ils ont disparu au bénéfice d’une crispation autour des personnes en situation irrégulière.

    Sara Prestianni : La complexité pour aboutir à un accord n’est pas due à la réalité des migrations mais à l’#instrumentalisation du dossier par beaucoup d’États. On l’a bien vu durant ces trois années de négociations autour du pacte : bien que les chiffres ne le justifiaient pas, le sujet a été fortement instrumentalisé. Le résultat, qui à nos yeux est très négatif, est le reflet de ces stratégies : cette réforme ne donne pas de réponse au phénomène en soi, mais répond aux luttes intestines des différents États.

    La répartition des demandeurs d’asile sur le sol européen a beaucoup clivé lors des débats. Pourquoi ?

    Sara Prestianni : D’abord, parce qu’il y a la fameuse réforme du #règlement_Dublin [qui impose aux exilés de demander l’asile dans le pays par lequel ils sont entrés dans l’UE - ndlr]. Ursula von der Leyen [présidente de la Commission – ndlr] avait promis de « #dépasser_Dublin ». Il est aujourd’hui renforcé. Ensuite, il y a la question de la #solidarité. La #redistribution va finalement se faire à la carte, alors que le Parlement avait tenté de revenir là-dessus. On laisse le choix du paiement, du support des murs et des barbelés aux frontières internes, et du financement de la dimension externe. On est bien loin du concept même de solidarité.

    Tania Racho : L’idée de Dublin est à mettre à la poubelle. Pour les Ukrainiens, ce règlement n’a pas été appliqué et la répartition s’est faite naturellement. La logique de Dublin, c’est qu’une personne qui trouve refuge dans un État membre ne peut pas circuler dans l’UE (sans autorisation en tout cas). Et si elle n’obtient pas l’asile, elle n’est pas censée pouvoir le demander ailleurs. Mais dans les faits, quelqu’un qui voit sa demande d’asile rejetée dans un pays peut déposer une demande en France, et même obtenir une protection, parce que les considérations ne sont pas les mêmes selon les pays. On s’interroge donc sur l’utilité de faire subir des transferts, d’enfermer les gens et de les priver de leurs droits, de faire peser le coût de ces transferts sur les États… Financièrement, ce n’est pas intéressant pour les États, et ça n’a pas de sens pour les demandeurs d’asile.

    D’ailleurs, faut-il les répartir ou leur laisser le libre #choix dans leur installation ?

    Tania Racho : Cela n’a jamais été évoqué sous cet angle. Cela a du sens de pouvoir les laisser choisir, parce que quand il y a un pays de destination, des attaches, une communauté, l’#intégration se fait mieux. Du point de vue des États, c’est avant tout une question d’#efficacité. Mais là encore on ne la voit pas. La Cour européenne des droits de l’homme a constaté, de manière régulière, que l’Italie ou la Grèce étaient des États défaillants concernant les demandeurs d’asile, et c’est vers ces pays qu’on persiste à vouloir renvoyer les personnes dublinées.

    Sara Prestianni : Le règlement de Dublin ne fonctionne pas, il est très coûteux et produit une #errance continue. On a à nouveau un #échec total sur ce sujet, puisqu’on reproduit Dublin avec la responsabilité des pays de première entrée, qui dans certaines situations va se prolonger à vingt mois. Même les #liens_familiaux (un frère, une sœur), qui devaient permettre d’échapper à ce règlement, sont finalement tombés dans les négociations.

    En quoi consiste le pacte pour lequel un accord a été trouvé la semaine dernière ?

    Sara Prestianni : Il comporte plusieurs documents législatifs, c’est donc une #réforme importante. On peut évoquer l’approche renforcée des #hotspots aux #frontières, qui a pourtant déjà démontré toutes ses limites, l’#enfermement à ciel ouvert, l’ouverture de #centres_de_détention, la #procédure_d’asile_accélérée, le concept de #pays-tiers_sûr que nous rejetons (la Tunisie étant l’exemple cruel des conséquences que cela peut avoir), la solidarité à la carte ou encore la directive sur l’« instrumentalisation » des migrants et le concept de #force_majeure en cas d’« #arrivées_massives », qui permet de déroger au respect des droits. L’ensemble de cette logique, qui vise à l’utilisation massive de la #détention, à l’#expulsion et au #tri des êtres humains, va engendrer des violations de droits, l’#exclusion et la #mise_à_l’écart des personnes.

    Tania Racho : On met en place des #centres_de_tri des gens aux frontières. C’est d’une #violence sans nom, et cette violence est passée sous silence. La justification du tri se fait par ailleurs sur la nationalité, en fonction du taux de protection moyen de l’UE, ce qui est absurde car le taux moyen de protection varie d’un pays à l’autre sur ce critère. Cela porte aussi une idée fausse selon laquelle seule la nationalité prévaudrait pour obtenir l’asile, alors qu’il y a un paquet de motifs, comme l’orientation sexuelle, le mariage forcé ou les mutilations génitales féminines. Difficile de livrer son récit sur de tels aspects après un parcours migratoire long de plusieurs mois dans le cadre d’une #procédure_accélérée.

    Comment peut-on opérer un #tri_aux_frontières tout en garantissant le respect des droits des personnes, du droit international et de la Convention de Genève relative aux réfugiés ?

    Tania Racho : Aucune idée. La Commission européenne parle d’arrivées mixtes et veut pouvoir distinguer réfugiés et migrants économiques. Les premiers pourraient être accueillis dignement, les seconds devraient être expulsés. Le rush dans le traitement des demandes n’aidera pas à clarifier la situation des personnes.

    Sara Prestianni : Ils veulent accélérer les procédures, quitte à les appliquer en détention, avec l’argument de dire « Plus jamais Moria » [un camp de migrants en Grèce incendié – ndlr]. Mais, ce qui est reproduit ici, c’est du pur Moria. En septembre, quand Lampedusa a connu 12 000 arrivées en quelques jours, ce pacte a été vendu comme la solution. Or tel qu’il est proposé aujourd’hui, il ne présente aucune garantie quant au respect du droit européen et de la Convention de Genève.

    Quels sont les dangers de l’#externalisation, qui consiste à sous-traiter la gestion des frontières ?

    Sara Prestianni : Alors que se négociait le pacte, on a observé une accélération des accords signés avec la #Tunisie, l’#Égypte ou le #Maroc. Il y a donc un lien très fort avec l’externalisation, même si le concept n’apparaît pas toujours dans le pacte. Là où il est très présent, c’est dans la notion de pays tiers sûr, qui facilite l’expulsion vers des pays où les migrants pourraient avoir des liens.

    On a tout de même l’impression que ceux qui ont façonné ce pacte ne sont pas très proches du terrain. Prenons l’exemple des Ivoiriens qui, à la suite des discours de haine en Tunisie, ont fui pour l’Europe. Les États membres seront en mesure de les y renvoyer car ils auront a priori un lien avec ce pays, alors même qu’ils risquent d’y subir des violences. L’Italie négocie avec l’#Albanie, le Royaume-Uni tente coûte que coûte de maintenir son accord avec le #Rwanda… Le risque, c’est que l’externalisation soit un jour intégrée à la procédure l’asile.

    Tania Racho : J’ai appris récemment que le pacte avait été rédigé par des communicants, pas par des juristes. Cela explique combien il est déconnecté de la réalité. Sur l’externalisation, le #non-refoulement est prévu par le traité sur le fonctionnement de l’UE, noir sur blanc. La Commission peut poursuivre l’Italie, qui refoule des personnes en mer ou signe ce type d’accord, mais elle ne le fait pas.

    Quel a été le rôle de l’Italie dans les discussions ?

    Sara Prestianni : L’Italie a joué un rôle central, menaçant de faire blocage pour l’accord, et en faisant passer d’autres dossiers importants à ses yeux. Cette question permet de souligner combien le pacte n’est pas une solution aux enjeux migratoires, mais le fruit d’un #rapport_de_force entre les États membres. L’#Italie a su instrumentaliser le pacte, en faisant du #chantage.

    Le pacte n’est pas dans son intérêt, ni dans celui des pays de premier accueil, qui vont devoir multiplier les enfermements et continuer à composer avec le règlement Dublin. Mais d’une certaine manière, elle l’a accepté avec la condition que la Commission et le Conseil la suivent, ou en tout cas gardent le silence, sur l’accord formulé avec la Tunisie, et plus récemment avec l’Albanie, alors même que ce dernier viole le droit européen.

    Tania Racho : Tout cela va aussi avoir un #coût – les centres de tri, leur construction, leur fonctionnement –, y compris pour l’Italie. Il y a dans ce pays une forme de #double_discours, où on veut d’un côté dérouter des bateaux avec une centaine de personnes à bord, et de l’autre délivrer près de 450 000 visas pour des travailleurs d’ici à 2025. Il y a une forme illogique à mettre autant d’énergie et d’argent à combattre autant les migrations irrégulières tout en distribuant des visas parce qu’il y a besoin de #travailleurs_étrangers.

    Le texte avait été présenté, au départ, comme une réponse à la « crise migratoire » de 2015 et devait permettre aux États membres d’être prêts en cas de situation similaire à l’avenir. Pensez-vous qu’il tient cet objectif ?

    Tania Racho : Pas du tout. Et puisqu’on parle des Syriens, rappelons que le nombre de personnes accueillies est ridicule (un million depuis 2011 à l’échelle de l’UE), surtout lorsqu’on le compare aux Ukrainiens (10 millions accueillis à ce jour). Il est assez étonnant que la comparaison ne soit pas audible pour certains. Le pacte ne résoudra rien, si ce n’est dans le narratif de la Commission européenne, qui pense pouvoir faire face à des arrivées mixtes.

    On a les bons et mauvais exilés, on ne prend pas du tout en compte les personnes exilées, on s’arrête à des objectifs de #gestion alors que d’autres solutions existent, comme la délivrance de #visas_humanitaires. Elles sont totalement ignorées. On s’enfonce dans des situations dramatiques qui ne feront qu’augmenter le tarif des passeurs et le nombre de morts en mer.

    Sara Prestianni : Si une telle situation se présente de nouveau, le règlement « crise » sera appliqué et permettra aux États membres de tout passer en procédure accélérée. On sera donc dans un cas de figure bien pire, car les entraves à l’accès aux droits seront institutionnalisées. C’est en cela que le pacte est dangereux. Il légitime toute une série de violations, déjà commises par la Grèce ou l’Italie, et normalise des pratiques illégales. Il occulte les mesures harmonisées d’asile, d’accueil et d’intégration. Et au lieu de pousser les États à négocier avec les pays de la rive sud, non pas pour renvoyer des migrants ou financer des barbelés mais pour ouvrir des voies légales et sûres, il mise sur une logique sécuritaire et excluante.

    Cela résonne fortement avec la loi immigration votée en France, supposée concilier « #humanité » et « #fermeté » (le pacte européen, lui, prétend concilier « #responsabilité » et « #solidarité »), et qui mise finalement tout sur le répressif. Un accord a été trouvé sur les deux textes au même moment, peut-on lier les deux ?

    Tania Racho : Dans les deux cas, la seule satisfaction a été d’avoir un accord, dans la précipitation et dans une forme assez particulière, entre la commission mixte paritaire en France et le trilogue au niveau européen. Ce qui est intéressant, c’est que l’adoption du pacte va probablement nécessiter des adaptations françaises. On peut lier les deux sur le fond : l’idée est de devoir gérer les personnes, dans le cas français avec un accent particulier sur la #criminalisation_des_étrangers, qu’on retrouve aussi dans le pacte, où de nombreux outils visent à lutter contre le terrorisme et l’immigration irrégulière. Il y a donc une même direction, une même teinte criminalisant la migration et allant dans le sens d’une fermeture.

    Sara Prestianni : Les États membres ont présenté l’adoption du pacte comme une grande victoire, alors que dans le détail ce n’est pas tout à fait évident. Paradoxalement, il y a eu une forme d’unanimité pour dire que c’était la solution. La loi immigration en France a créé plus de clivages au sein de la classe politique. Le pacte pas tellement, parce qu’après tant d’années à la recherche d’un accord sur le sujet, le simple fait d’avoir trouvé un deal a été perçu comme une victoire, y compris par des groupes plus progressistes. Mais plus de cinquante ONG, toutes présentes sur le terrain depuis des années, sont unanimes pour en dénoncer le fond.

    Le vote du pacte aura lieu au printemps 2024, dans le contexte des élections européennes. Risque-t-il de déteindre sur les débats sur l’immigration ?

    Tania Racho : Il y aura sans doute des débats sur les migrations durant les élections. Tout risque d’être mélangé, entre la loi immigration en France, le pacte européen, et le fait de dire qu’il faut débattre des migrations parce que c’est un sujet important. En réalité, on n’en débat jamais correctement. Et à chaque élection européenne, on voit que le fonctionnement de l’UE n’est pas compris.

    Sara Prestianni : Le pacte sera voté avant les élections, mais il ne sera pas un sujet du débat. Il y aura en revanche une instrumentalisation des migrations et de l’asile, comme un outil de #propagande, loin de la réalité du terrain. Notre bataille, au sein de la société civile, est de continuer notre travail de veille et de dénoncer les violations des #droits_fondamentaux que cette réforme, comme d’autres par le passé, va engendrer.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/281223/au-niveau-europeen-un-pacte-migratoire-dangereux-et-deconnecte-de-la-reali
    #pacte #Europe #pacte_migratoire #asile #migrations #réfugiés

  • #Violences et fabrique de la #subalternité_foncière à #Sihanoukville, Cambodge

    Depuis le milieu des années 2010, la ville de Sihanoukville au Cambodge, principal #port du pays et petit centre de villégiature, fait l’objet d’un #développement_urbain éclair porté par la construction de nouvelles infrastructures de transport et de zones logistiques, de casinos (plus de 150 nouveaux casinos depuis 2015) et la mise en place de #mégaprojets_immobiliers à vocation touristique qui nourrissent une #spéculation_foncière galopante. Ces transformations territoriales sont notamment le fruit d’une coopération technique, politique et économique entre le Cambodge et la #Chine au nom de la #Belt_and_Road_Initiative, la nouvelle politique étrangère globale chinoise lancée en 2013 par #Xi_Jinping. Pour le gouvernement cambodgien, Sihanoukville et sa région doivent devenir, au cours de la prochaine décennie, la seconde plateforme économique, logistique et industrielle du pays après Phnom Penh, la capitale (Royal Government of Cambodia, 2015). Ce développement urbain très rapide a entraîné une évolution concomitante des logiques d’échange et de valorisation des #ressources_foncières. Comme le relève régulièrement la presse internationale, il nourrit d’importants #conflits_fonciers, souvent violents, dont pâtissent en premier lieu les habitants les plus pauvres.

    Cette recherche veut comprendre la place et le rôle de la violence dans le déploiement des mécanismes d’#exclusion_foncière à Sihanoukville. Pour reprendre les mots de Fernand Braudel (2013 [1963]), alors que ces #conflits_fonciers semblent surgir de manière « précipitée », notre recherche montre qu’ils s’inscrivent aussi dans les « pas lents » des relations foncières et de la fabrique du territoire urbain. Dans ce contexte, le jaillissement des tensions foncières convoque des temporalités et des échelles variées dont la prise en compte permet de mieux penser le rôle de la violence dans la production de l’espace.

    Les processus d’exclusion foncière au Cambodge s’inscrivent dans une trajectoire historique particulière. Le #génocide et l’#urbicide [1] #khmers_rouges entre 1975 et 1979, l’abolition de la #propriété_privée entre 1975 et 1989 et la #libéralisation très rapide de l’économie du pays à partir des années 1990 ont posé les jalons de rapports fonciers particulièrement conflictuels, tant dans les espaces ruraux qu’urbains (Blot, 2013 ; Fauveaud, 2015 ; Loughlin et Milne, 2021). Ainsi, l’#appropriation, l’#accaparement et la #valorisation des ressources foncières au Cambodge, et en Asie du Sud-Est en général, s’accompagnent d’une importante « #violence_foncière » tant physique (évictions et répression) que sociale (précarisation des plus pauvres, exclusion sociale), politique (criminalisation et dépossession des droits juridiques) et économique (dépossession des biens fonciers et précarisation).

    Cet article souhaite ainsi proposer une lecture transversale de la violence associée aux enjeux fonciers. Si la notion de violence traverse la littérature académique portant sur les logiques d’exclusion foncière en Asie du Sud-Est (Hall, Hirsch et Li, 2011 ; Harms, 2016) ou dans le Sud global plus généralement (Peluso et Lund, 2011 ; Zoomers, 2010), peu de recherches la placent au cœur de leurs analyses, malgré quelques exceptions (sur le Cambodge, voir notamment Springer, 2015). Par ailleurs, la violence est souvent étudiée en fonction d’ancrages théoriques fragmentés. Ceux-ci restent très divisés entre : 1) des travaux centrés sur le rôle de l’État et des systèmes de régulation (notamment économiques) dans le déploiement de la violence foncière (Hall, 2011 ; Springer, 2013) ; 2) des analyses politico-économiques des formes de dépossession liées aux modes de privatisation du foncier, à la propriété et à l’accumulation du capital, parfois resituées dans une lecture historique des sociétés coloniales et postcoloniales (voir par exemple Rhoads, 2018) ; 3) des approches considérant la violence comme stratégie ou outil mobilisés dans la réalisation de l’accaparement foncier et la répression des mouvements sociaux (voir par exemple Leitner and Sheppard, 2018) ; 4) des analyses plus ontologiques explorant les processus corporels, émotionnels et identitaires (comme le genre) qui découlent des violences foncières ou conditionnent les mobilisations sociales (voir par exemple Brickell, 2014 ; Schoenberger et Beban, 2018).

    Malgré la diversité de ces approches, la notion de violence reste principalement attachée au processus de #dépossession_foncière, tout en étant analysée à une échelle temporelle courte, centrée sur le moment de l’#éviction proprement dit. Dans cet article et à la suite de Marina Kolovou Kouri et al. (2021), nous défendons au contraire une approche multidimensionnelle des violences foncières analysées à des échelles temporelles et spatiales variées. Une telle transversalité semble indispensable pour mieux saisir les différentes forces qui participent de la construction des violences et de l’exclusion foncières. En effet, si les conflits fonciers sont traversés par diverses formes de violences, celles-ci ne découlent pas automatiquement d’eux et sont également déterminées par le contexte social, économique et politique qui leur sert de moule. Ces violences restent ainsi attachées aux différents #rapports_de_domination qui organisent les #rapports_sociaux en général (Bourdieu, 2018 [1972]), tout en représentant une forme d’#oppression à part entière participant des #inégalités et #injustices sociales sur le temps long (Young, 2011).

    Nous voyons, dans cet article, comment des formes de violence variées structurent les rapports de pouvoir qui se jouent dans l’appropriation et la valorisation des ressources foncières, ainsi que dans la régulation des rapports fonciers. Nous montrons que ces violences servent non seulement d’instrument d’oppression envers certains groupes de populations considérés comme « indésirables », mais aussi qu’elles les maintiennent dans ce que nous nommons une « subalternité foncière ». En prenant appui sur Chakravorty Spivak Gayatri (2005) et Ananya Roy (2011), nous définissons cette dernière comme la mise en place, sur le temps long et par la violence, d’une oppression systémique des citadins les plus pauvres par leur #invisibilisation, leur #criminalisation et l’#informalisation constante de leurs modes d’occupations de l’espace. La #subalternité foncière représente en ce sens une forme d’oppression dont la violence est l’un des dispositifs centraux.

    Cet article s’appuie sur des recherches ethnographiques menées à Phnom Penh et à Sihanoukville, entre 2019 et 2021. Elles comprennent un important travail d’observation, la collecte et l’analyse de documents officiels, de rapports techniques, d’articles de presse et de discours politiques, ainsi que la réalisation de près de soixante-dix entretiens semi-directifs (effectués en khmer principalement, parfois en mandarin, et retranscrits en anglais) auprès d’habitants de Sihanoukville, de représentants territoriaux locaux, d’experts et de membres de groupes criminels. Dans ce texte, le codage des entretiens suit la dénomination suivante : « OF » désigne les employés publics, « EX » des experts ayant une connaissance privilégiée du sujet, « RE » les résidents des zones d’habitat précaire et « F » les acteurs de la criminalité ; le numéro qui suit la lettre est aléatoire et sert à distinguer les personnes ayant répondu à l’enquête ; vient ensuite l’année de réalisation de l’entretien. De nombreux entretiens avec les habitants ont été conduits en groupe.

    https://www.jssj.org/article/violences-et-fabrique-de-la-subalternite-fonciere

    #foncier #Cambodge #Chine #violence

  • Cette #hospitalité_radicale que prône la philosophe #Marie-José_Mondzain

    Dans « Accueillir. Venu(e)s d’un ventre ou d’un pays », Marie-José Mondzain, 81 ans, se livre à un plaidoyer partageur. Elle oppose à la #haine d’autrui, dont nous éprouvons les ravages, l’#amour_sensible et politique de l’Autre, qu’il faudrait savoir adopter.

    En ces temps de crispations identitaires et même de haines communautaires, Marie-José Mondzain nous en conjure : choisissons, contre l’#hostilité, l’hospitalité. Une #hospitalité_créatrice, qui permette de se libérer à la fois de la loi du sang et du #patriarcat.

    Pour ce faire, il faut passer de la filiation biologique à la « #philiation » − du grec philia, « #amitié ». Mais une #amitié_politique et proactive : #abriter, #nourrir, #loger, #soigner l’Autre qui nous arrive ; ce si proche venu de si loin.

    L’hospitalité fut un objet d’étude et de réflexion de Jacques Derrida (1930-2004). Née douze ans après lui, à Alger comme lui, Marie-José Mondzain poursuit la réflexion en rompant avec « toute légitimité fondée sur la réalité ou le fantasme des origines ». Et en prônant l’#adoption comme voie de réception, de prise en charge, de #bienvenue.

    Son essai Accueillir. Venu(e)s d’un ventre ou d’un pays se voudrait programmatique en invitant à « repenser les #liens qui se constituent politiquement et poétiquement dans la #rencontre de tout sujet qu’il nous incombe d’adopter ».

    D’Abraham au film de Tarkovski Andreï Roublev, d’Ulysse à A. I. Intelligence artificielle de Spielberg en passant par Antigone, Shakespeare ou Melville, se déploie un plaidoyer radical et généreux, « phraternel », pour faire advenir l’humanité « en libérant les hommes et les femmes des chaînes qui les ont assignés à des #rapports_de_force et d’#inégalité ».

    En cette fin novembre 2023, alors que s’ajoute, à la phobie des migrants qui laboure le monde industriel, la guerre menée par Israël contre le Hamas, nous avons d’emblée voulu interroger Marie-José Mondzain sur cette violence-là.

    Signataire de la tribune « Vous n’aurez pas le silence des juifs de France » condamnant le pilonnage de Gaza, la philosophe est l’autrice d’un livre pionnier, adapté de sa thèse d’État qui forait dans la doctrine des Pères de l’Église concernant la représentation figurée : Image, icône, économie. Les sources byzantines de l’imaginaire contemporain (Seuil, 1996).

    Mediapart : Comment voyez-vous les images qui nous travaillent depuis le 7 octobre ?

    Marie-José Mondzain : Il y a eu d’emblée un régime d’images relevant de l’événement dans sa violence : le massacre commis par le Hamas tel qu’il fut en partie montré par Israël. À cela s’est ensuite substitué le tableau des visages et des noms des otages, devenu toile de fond iconique.

    Du côté de Gaza apparaît un champ de ruines, des maisons effondrées, des rues impraticables. Le tout depuis un aplomb qui n’est plus un regard humain mais d’oiseau ou d’aviateur, du fait de l’usage des drones. La mort est alors sans visages et sans noms.

    Face au phénomène d’identification du côté israélien s’est donc développée une rhétorique de l’invisibilité palestinienne, avec ces guerriers du Hamas se terrant dans des souterrains et que traque l’armée israélienne sans jamais donner à voir la moindre réalité humaine de cet ennemi.

    Entre le visible et l’invisible ainsi organisés, cette question de l’image apparaît donc extrêmement dissymétrique. Dissymétrie accentuée par la mise en scène des chaînes d’information en continu, qui séparent sur les écrans, avec des bandes lumineuses et colorées, les vues de Gaza en ruine et l’iconostase des otages.

    C’est avec de telles illustrations dans leur dos que les prétendus experts rassemblés en studio s’interrogent : « Comment retrouver la paix ? » Comme si la paix était suspendue à ces images et à la seule question des otages. Or, le contraire de la guerre, ce n’est pas la paix − et encore moins la trêve −, mais la justice.

    Nous assistons plutôt au triomphe de la loi du talion, dont les images deviennent un levier. Au point que visionner les vidéos des massacres horrifiques du Hamas dégénère en obligation…

    Les images deviennent en effet une mise à l’épreuve et une punition. On laisse alors supposer qu’elles font suffisamment souffrir pour que l’on fasse souffrir ceux qui ne prennent pas la souffrance suffisamment au sérieux.

    Si nous continuons à être uniquement dans une réponse émotionnelle à la souffrance, nous n’irons pas au-delà d’une gestion de la trêve. Or la question, qui est celle de la justice, s’avère résolument politique.

    Mais jamais les choses ne sont posées politiquement. On va les poser en termes d’identité, de communauté, de religion − le climat très trouble que nous vivons, avec une indéniable remontée de l’antisémitisme, pousse en ce sens.

    Les chaînes d’information en continu ne nous montrent jamais une carte de la Cisjordanie, devenue trouée de toutes parts telle une tranche d’emmental, au point d’exclure encore et toujours la présence palestinienne. Les drones ne servent jamais à filmer les colonies israéliennes dans les Territoires occupés. Ce serait pourtant une image explicite et politique…

    Vous mettez en garde contre toute « réponse émotionnelle » à propos des images, mais vous en appelez dans votre livre aux affects, dans la mesure où, écrivez-vous, « accueillir, c’est métamorphoser son regard »…

    J’avais écrit, après le 11 septembre 2001, L’#image peut-elle tuer ?, ou comment l’#instrumentalisation du #régime_émotionnel fait appel à des énergies pulsionnelles, qui mettent le sujet en situation de terreur, de crainte, ou de pitié. Il s’agit d’un usage balistique des images, qui deviennent alors des armes parmi d’autres.

    Un tel bombardement d’images qui sème l’effroi, qui nous réduit au silence ou au cri, prive de « logos » : de parole, de pensée, d’adresse aux autres. On s’en remet à la spontanéité d’une émotivité immédiate qui supprime le temps et les moyens de l’analyse, de la mise en rapport, de la mise en relation.

    Or, comme le pensait Édouard Glissant, il n’y a qu’une poétique de la relation qui peut mener à une politique de la relation, donc à une construction mentale et affective de l’accueil.

    Vous prônez un « #tout-accueil » qui semble faire écho au « Tout-monde » de Glissant…

    Oui, le lien est évident, jusqu’en ce #modèle_archipélique pensé par Glissant, c’est-à-dire le rapport entre l’insularité et la circulation en des espaces qui sont à la fois autonomes et séparables, qui forment une unité dans le respect des écarts.

    Ces écarts assument la #conflictualité et organisent le champ des rapports, des mises en relation, naviguant ainsi entre deux écueils : l’#exclusion et la #fusion.

    Comment ressentir comme un apport la vague migratoire, présentée, voire appréhendée tel un trop-plein ?

    Ce qui anime mon livre, c’est de reconnaître que celui qui arrive dans sa nudité, sa fragilité, sa misère et sa demande est l’occasion d’un accroissement de nos #ressources. Oui, le pauvre peut être porteur de quelque chose qui nous manque. Il nous faut dire merci à ceux qui arrivent. Ils deviennent une #richesse qui mérite #abri et #protection, sous le signe d’une #gratitude_partagée.

    Ils arrivent par milliers. Ils vont arriver par millions − je ne serai alors plus là, vu mon âge −, compte tenu des conditions économiques et climatiques à venir. Il nous faut donc nous y préparer culturellement, puisque l’hospitalité est pour moi un autre nom de la #culture.

    Il nous faut préméditer un monde à partager, à construire ensemble ; sur des bases qui ne soient pas la reproduction ou le prolongement de l’état de fait actuel, que déserte la prospérité et où semble s’universaliser la guerre. Cette préparation relève pour moi, plus que jamais, d’une #poétique_des_relations.

    Je travaille avec et auprès d’artistes − plasticiens, poètes, cinéastes, musiciens −, qui s’emparent de toutes les matières traditionnelles ou nouvelles pour créer la scène des rapports possibles. Il faut rompre avec ce qui n’a servi qu’à uniformiser le monde, en faisant appel à toutes les turbulences et à toutes les insoumissions, en inventant et en créant.

    En établissant des #zones_à_créer (#ZAC) ?

    Oui, des zones où seraient rappelées la force des faibles, la richesse des pauvres et toutes les ressources de l’indigence qu’il y a dans des formes de précarité.

    La ZAD (zone à défendre) ne m’intéresse effectivement que dans la mesure où elle se donne pour but d’occuper autrement les lieux, c’est-à-dire en y créant la scène d’une redistribution des places et d’un partage des pouvoirs face aux tyrannies économiques.

    Pas uniquement économiques...

    Il faut bien sûr compter avec ce qui vient les soutenir, anthropologiquement, puisque ces tyrannies s’équipent de tout un appareil symbolique et d’affects touchant à l’imaginaire.

    Aujourd’hui, ce qui me frappe, c’est la place de la haine dans les formes de #despotisme à l’œuvre. Après – ou avant – Trump, nous venons d’avoir droit, en Argentine, à Javier Milei, l’homme qui se pose en meurtrier prenant le pouvoir avec une tronçonneuse.

    Vous y opposez une forme d’amitié, de #fraternité, la « #filia », que vous écrivez « #philia ».

    Le [ph] désigne des #liens_choisis et construits, qui engagent politiquement tous nos affects, la totalité de notre expérience sensible, pour faire échec aux formes d’exclusion inspirées par la #phobie.

    Est-ce une façon d’échapper au piège de l’origine ?

    Oui, ainsi que de la #naturalisation : le #capitalisme se considère comme un système naturel, de même que la rivalité, le désir de #propriété ou de #richesse sont envisagés comme des #lois_de_la_nature.

    D’où l’appellation de « #jungle_de_Calais », qui fait référence à un état de nature et d’ensauvagement, alors que le film de Nicolas Klotz et Élisabeth Perceval, L’Héroïque lande. La frontière brûle (2018), montre magnifiquement que ce refuge n’était pas une #jungle mais une cité et une sociabilité créées par des gens venus de contrées, de langues et de religions différentes.

    Vous est-il arrivé personnellement d’accueillir, donc d’adopter ?

    J’ai en en effet tissé avec des gens indépendants de mes liens familiaux des relations d’adoption. Des gens dont je me sentais responsable et dont la fragilité que j’accueillais m’apportait bien plus que ce que je pouvais, par mes ressources, leur offrir.

    Il arrive, du reste, à mes enfants de m’en faire le reproche, tant les font parfois douter de leur situation les relations que je constitue et qui tiennent une place si considérable dans ma vie. Sans ces relations d’adoption, aux liens si constituants, je ne me serais pas sentie aussi vivante que je le suis.

    D’où mon refus du seul #héritage_biologique. Ce qui se transmet se construit. C’est toujours dans un geste de fiction turbulente et joyeuse que l’on produit les liens que l’on veut faire advenir, la #vie_commune que l’on désire partager, la cohérence politique d’une #égalité entre parties inégales – voire conflictuelles.

    La lecture de #Castoriadis a pu alimenter ma défense de la #radicalité. Et m’a fait reconnaître que la question du #désordre et du #chaos, il faut l’assumer et en tirer l’énergie qui saura donner une forme. Le compositeur Pascal Dusapin, interrogé sur la création, a eu cette réponse admirable : « C’est donner des bords au chaos. »

    Toutefois, ces bords ne sont pas des blocs mais des frontières toujours poreuses et fluantes, dans une mobilité et un déplacement ininterrompus.

    Accueillir, est-ce « donner des bords » à l’exil ?

    C’est donner son #territoire au corps qui arrive, un territoire où se créent non pas des murs aux allures de fin de non-recevoir, mais des cloisons – entre l’intime et le public, entre toi et moi : ni exclusion ni fusion…

    Mon livre est un plaidoyer en faveur de ce qui circule et contre ce qui est pétrifié. C’est le #mouvement qui aura raison du monde. Et si nous voulons que ce mouvement ne soit pas une déclaration de guerre généralisée, il nous faut créer une #culture_de_l’hospitalité, c’est-à-dire apprendre à recevoir les nouvelles conditions du #partage.

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/271123/cette-hospitalite-radicale-que-prone-la-philosophe-marie-jose-mondzain
    #hospitalité #amour_politique

    via @karine4

    • Accueillir - venu(e)s d’un ventre ou d’un pays

      Naître ne suffit pas, encore faut-il être adopté. La filiation biologique, et donc l’arrivée d’un nouveau-né dans une famille, n’est pas le modèle de tout accueil mais un de ses cas particuliers. Il ne faut pas penser la filiation dans son lien plus ou moins fort avec le modèle normatif de la transmission biologique, mais du point de vue d’une attention à ce qui la fonde : l’hospitalité. Elle est un art, celui de l’exercice de la philia, de l’affect et du lien qui dans la rencontre et l’accueil de tout autre exige de substituer au terme de filiation celui de philiation. Il nous faut rompre avec toute légitimité fondée sur la réalité ou le fantasme des origines. Cette rupture est impérative dans un temps de migrations planétaires, de déplacements subjectifs et de mutations identitaires. Ce qu’on appelait jadis « les lois de l’hospitalité » sont bafouées par tous les replis haineux et phobiques qui nous privent des joies et des richesses procurées par l’accueil. Faute d’adopter et d’être adopté, une masse d’orphelins ne peut plus devenir un peuple. La défense des philiations opère un geste théorique qui permet de repenser les liens qui se constituent politiquement et poétiquement dans la rencontre de tout sujet qu’il nous incombe d’adopter, qu’il provienne d’un ventre ou d’un pays. Le nouveau venu comme le premier venu ne serait-il pas celle ou celui qui me manquait ? D’où qu’il vienne ou provienne, sa nouveauté nous offre la possibilité de faire œuvre.

      https://www.quaidesmots.fr/accueillir-venu-e-s-d-un-ventre-ou-d-un-pays.html
      #livre #filiation_biologique #accueil

  • L’appel de 3 000 soignants : « Nous demandons le maintien de l’aide médicale d’Etat pour la prise en charge des soins des personnes étrangères »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/11/02/l-appel-de-3-000-soignants-nous-demandons-le-maintien-de-l-aide-medicale-d-e

    L’appel de 3 000 soignants : « Nous demandons le maintien de l’aide médicale d’Etat pour la prise en charge des soins des personnes étrangères »
    Tribune
    Nous, soignants de toutes spécialités et de toutes origines, souhaitons nous opposer fermement et de manière unie au projet de suppression de l’aide médicale d’Etat (AME) au profit d’un dispositif dégradé.
    L’AME est une aide sociale qui permet aux personnes étrangères en situation administrative irrégulière d’avoir accès aux soins. Il s’agit d’un outil de lutte contre les exclusions qui n’est accessible que pour les personnes dont les ressources sont inférieures à 810 euros par mois et qui font preuve d’une résidence stable en France.
    Les patients que nous soignons et qui bénéficient de l’AME ne sont pas, dans leur grande majorité, des personnes qui ont migré vers la France pour se faire soigner, mais des personnes qui ont fui la misère, l’insécurité ou qui l’ont fait pour des raisons familiales. Leurs conditions de vie difficiles en France les exposent à des risques importants : problèmes de santé physique et psychique, maladies chroniques, maladies transmissibles ou contagieuses, suivi prénatal insuffisant et risque accru de décès maternels.
    A ce titre, il s’agit d’une population prioritaire en matière de santé publique. Limiter leur accès aux soins aurait pour conséquence directe d’entraîner une dégradation de leur état de santé, mais aussi plus globalement celui de la population toute entière. En témoigne l’exemple malheureux de l’Espagne : la restriction de l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière votée en 2012 y a entraîné une augmentation de l’incidence des maladies infectieuses ainsi qu’une surmortalité. Cette réforme a finalement été abrogée en 2018.
    Nous, soignants du terrain, sommes extrêmement préoccupés à l’idée de devoir soigner dans un système de santé amputé de l’AME, car celui-ci serait alors exposé à un risque de paralysie. Les personnes étrangères sans papiers n’auraient d’autre choix que de consulter dans les permanences d’accès aux soins de santé (PASS) et les services d’accueil et d’urgences, déjà fragilisés et en tension, et qui se trouveraient à nouveau contraints d’assumer les conséquences de décisions politiques éloignées de nos réalités.
    Les barrières à l’accès aux soins sont déjà multiples pour ces patients. Les exclure encore davantage ne pourrait qu’entraîner leur renoncement aux soins et la dégradation de leur état de santé. L’éloignement du système de santé aboutit in fine à des retards de diagnostic, au déséquilibre et à l’aggravation des maladies chroniques, ainsi qu’à la survenue de complications. Le recours aux soins dans ce contexte survient en urgence avec des hospitalisations complexes et prolongées, parfois en réanimation, dans des structures déjà fragilisées, et à des coûts finalement bien plus élevés pour la collectivité, sans oublier les difficultés attendues à transférer ces patients en soins de suite et de réadaptation, qui requièrent une couverture maladie. Dans le contexte de crise que vit l’hôpital public, et dont le Covid-19 a été le révélateur, la remise en cause de l’AME ferait donc courir un risque majeur de désorganisation du système de santé, d’aggravation des conditions de travail des soignants et de surcoûts financiers importants.
    Nous, soignants exerçant en libéral, à l’hôpital, en centre de santé, en protection maternelle et infantile, dans les PASS, dans les structures de prévention et auprès d’associations, soignons les personnes sans papiers comme n’importe quels autres patients. Par humanité, et conformément au code de déontologie médicale auquel nous nous référons et au serment d’Hippocrate que nous avons prêté à la fin de nos études. C’est l’honneur de notre profession.
    Restreindre l’accès aux soins à une population fragilisée sur la base d’un critère de régularité du séjour est contraire à la majorité des textes en vigueur en France sur les droits de l’homme, qui stipulent que tout individu doit avoir accès aux soins quels que soient son origine et son statut. Ainsi, nous refusons d’être contraints à faire une sélection parmi les malades entre ceux qui pourront être soignés et ceux laissés à leur propre sort. Nous demandons le maintien de l’AME pour la prise en charge des soins des personnes étrangères.
    Au-delà de sa raison d’être humaniste, l’AME est aussi un outil essentiel à la santé des individus et à la santé publique. Leur santé, c’est aussi la nôtre. Les restrictions politiques ne feront qu’éprouver les corps, contribuer à la dégradation de la santé publique, compliquer la tâche des soignants et fragiliser un système de santé déjà exsangue. Nous appelons donc le gouvernement et nos élus à renoncer à tout projet portant atteinte à l’AME ou venant restreindre son périmètre, et à conforter l’accès à une couverture maladie pour tous.

    #Covid-19#migrant#migration#france#AME#PASS#sante#santepublique#politiquemigratoire#accueil#droit#exclusion#systemesante#urgence