• « Depuis six décennies, l’#aménagement touristique de la #montagne est engagé dans une fuite en avant »

    L’attribution des #Jeux_olympiques d’hiver de 2030 à la #France risque de retarder encore l’engagement des communes touristiques de montagne dans la #transition_écologique, estime, dans une tribune au « Monde », le géographe #Rémy_Knafou.

    La France a eu des politiques touristiques pour la montagne ; elle n’en a plus depuis longtemps. Et la récente décision d’attribuer à la candidature française les Jeux olympiques d’hiver de 2030 ne va pas faciliter la transition juste que le réchauffement climatique, plus important qu’en plaine, appelle pourtant.

    Le #plan_neige des années 1960, sous la présidence du général de Gaulle, était une réponse à l’#exode_rural qui vidait la montagne de ses forces vives et au projet de retenir en France la clientèle des skieurs français qui fréquentait les pays alpins voisins. Il en résulta la création ex nihilo en haute altitude de nombreuses stations de sports d’hiver et l’aménagement de vastes #domaines_skiables, désormais parmi les plus étendus de la planète.

    Avalanches et glissements de terrain meurtriers couplés à une mévente immobilière incitèrent l’Etat à un infléchissement, qui s’exprima dans le #discours_de_Vallouise, prononcé par le président #Valéry_Giscard_d’Estaing, le 23 août 1977 : « Trop de #résidences_secondaires s’éparpillent au gré des ventes de #terres_agricoles. Trop de #stations_de_ski furent implantées sans tenir compte suffisamment des populations locales et des contraintes de l’#environnement. L’effort de l’Etat portera dorénavant sur un tourisme intégré à d’autres activités, accessible au plus grand nombre, respectueux des sites et des #paysages. »

    Des clientèles étrangères en majorité fortunées

    En 1985, l’Etat s’est doté d’une loi « montagne », qui entendait à la fois développer et protéger – ce que, de facto, la France faisait déjà depuis une vingtaine d’années avec la création, en 1963, du #parc_national_de_la_Vanoise : tout était interdit dans sa zone centrale quand (presque) tout était permis dans sa zone périphérique, où se développaient quelques-unes des plus importantes stations françaises de #sports_d’hiver.

    Mais force est de constater que cette loi « montagne », complétée en 2016 par la loi « montagne II », n’a pu ralentir la progression de l’#immobilier en altitude, de l’équipement en #remontées_mécaniques et en #neige_artificielle, tandis que, parallèlement, les espoirs de #démocratisation du ski disparaissaient d’un marché porté par la venue croissante de clientèles étrangères en large majorité fortunées.

    Ainsi, depuis six décennies, l’aménagement touristique de la montagne est engagé dans une #fuite_en_avant – que j’avais déjà analysée dans ma thèse, publiée en 1978, « Les stations intégrées de sports d’hiver des Alpes françaises » (Masson) –, la croissance immobilière appelant constamment l’extension des domaines skiables et ceux-ci nécessitant à leur tour la construction de nouveaux programmes résidentiels. C’est ainsi que la seule #Tarentaise en est arrivée à totaliser en altitude 427 500 lits touristiques, soit plus que de la population cumulée des deux agglomérations d’Annecy et de Chambéry !

    Un cercle vicieux défendu par les #lobbys du ski

    La montagne hivernale a produit une machine infernale, sorte de course-poursuite sans fin entre les lits et les remontées mécaniques. La nécessité, toujours pour alimenter le chiffre d’affaires des remontées mécaniques, de remplacer les lits « froids » – les passoires thermiques représentent près de la moitié du parc ! – construits dans les années 1960-1990 et progressivement sortis du marché nourrit aujourd’hui cette dynamique.

    L’actuelle croissance immobilière va donc à l’encontre de ce qu’il faudrait faire : elle poursuit l’#artificialisation_des_sols, attire une clientèle étrangère qui va accroître l’empreinte carbone des stations et repose sur une progression de l’#enneigement_artificiel – c’est en effet une attente des acquéreurs de logements à plus de 15 000 euros le mètre carré, qui souhaitent sécuriser la pratique du ski, quels que soient les aléas d’un enneigement sur le repli.

    On voit comment le système touristique de la montagne hivernale a enfanté un cercle vicieux défendu par les puissants lobbys du ski – dont la dernière victoire en date est la promesse de l’organisation des Jeux olympiques d’hiver en 2030.

    A la recherche d’un équilibre de développement

    La France a été préférée à la Suède et à la Suisse parce que le #Comité_international_olympique (#CIO) aurait prudemment opté pour le pays qui n’avait pas le projet de soumettre à référendum ou à votation sa candidature – on le sait, le CIO ne trouve plus de candidatures que dans les pays dictatoriaux ou dans les démocraties qui ne demandent pas leur avis aux populations afin d’éviter le refus des citoyens contribuables.

    Au lieu de célébrer cette victoire trop facile, les pouvoirs publics s’honoreraient à engager la montagne touristique dans une transition juste, d’autant que les conditions semblent malgré tout favorables. En effet, face au réchauffement climatique, la montagne a et aura un avenir touristique, avec ou sans neige, car on y trouvera, en été en particulier, des températures plus supportables qu’ailleurs.

    Les communes et stations qui continueront à vivre du ski devraient le faire à plusieurs conditions. Il leur faudrait tout d’abord considérer le niveau actuel de développement comme un état d’équilibre qui permet de bien vivre sans poursuivre la construction de nouveaux #logements, l’effort étant tourné vers la #rénovation de l’existant. De plus, elles ne devraient plus se lancer dans des projets d’aménagement accentuant la pression sur un milieu naturel déjà très exploité, et qui pourraient compromettre leur réorientation économique, celle-ci étant inévitable à moyen ou à long terme.

    Prendre l’avis de toutes les populations

    Lorsque de tels projets (nouvelles urbanisations, retenues d’eau pour les canons à neige, etc.) sont néanmoins retenus, les communes devraient réfléchir à la manière de prendre en compte non seulement les avis de ceux qui habitent ces lieux touristiques à l’année, mais aussi les avis de ceux qui font vivre ces lieux en les fréquentant : une petite minorité ne devrait plus décider seule du sort de ces lieux.

    Enfin, les communes devraient alimenter un #fonds_de_prévoyance – car les temps difficiles finiront par arriver, même pour les communes de haute altitude –, afin que la collectivité nationale ne soit pas amenée, in fine, à financer une reconversion qu’elles auront refusé de préparer. C’est à ce prix que l’attribution des Jeux olympiques d’hiver à la France, si elle est confirmée, ne se transformera pas en victoire à la Pyrrhus.

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/12/30/depuis-six-decennies-l-amenagement-touristique-de-la-montagne-est-engage-dan
    #tourisme #aménagement_du_territoire #ski #loi_montagne #Vanoise #loi_montagne_II #lits_froids

  • Le mythe de l’exode urbain parisien : quelles mobilités en temps de crise sanitaire ?
    https://metropolitiques.eu/Le-mythe-de-l-exode-urbain-parisien-quelles-mobilites-en-temps-de-cr

    Les départs précipités de citadin∙es à l’orée du premier #confinement ont nourri l’idée d’un #exode_urbain. Par des données inédites sur les utilisateurs de Facebook en France, N. Cattan, O. Telle et C. Vacchiani-Marcuzzo en livrent une tout autre lecture, à une très fine échelle territoriale. Dossier : Les #mobilités post-Covid : un monde d’après plus écologique ? Cet article a pour objectif d’étudier les dynamiques des mobilités des Français·es et des Parisien·nes, entre mars 2020 et septembre 2022, afin de #Débats

    / #Covid-19, exode urbain, #réseaux_sociaux, confinement, mobilité, #mobilité_résidentielle, #numérique

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/cattan-etal.pdf

  • #José_Vieira : « La #mémoire des résistances face à l’accaparement des terres a été peu transmise »

    Dans « #Territórios_ocupados », José Vieira revient sur l’#expropriation en #1941 des paysans portugais de leurs #terres_communales pour y planter des #forêts. Cet épisode explique les #mégafeux qui ravagent le pays et résonne avec les #luttes pour la défense des #biens_communs.

    Né au Portugal en 1957 et arrivé enfant en France à l’âge de 7 ans, José Vieira réalise depuis plus de trente ans des documentaires qui racontent une histoire populaire de l’immigration portugaise.

    Bien loin du mythe des Portugais·es qui se seraient « intégré·es » sans le moindre problème en France a contrario d’autres populations, José Vieira s’est attaché à démontrer comment l’#immigration_portugaise a été un #exode violent – voir notamment La Photo déchirée (2001) ou Souvenirs d’un futur radieux (2014) –, synonyme d’un impossible retour.

    Dans son nouveau documentaire, Territórios ocupados, diffusé sur Mediapart, José Vieira a posé sa caméra dans les #montagnes du #Caramulo, au centre du #Portugal, afin de déterrer une histoire oubliée de la #mémoire_collective rurale du pays. Celle de l’expropriation en 1941, par l’État salazariste, de milliers de paysans et de paysannes de leurs terres communales – #baldios en portugais.

    Cette #violence étatique a été opérée au nom d’un vaste #projet_industriel : planter des forêts pour développer économiquement ces #territoires_ruraux et, par le même geste, « civiliser » les villageois et villageoises des #montagnes, encore rétifs au #salariat et à l’ordre social réactionnaire de #Salazar. Un épisode qui résonne aujourd’hui avec les politiques libérales des États qui aident les intérêts privés à accaparer les biens communs.

    Mediapart : Comment avez-vous découvert cette histoire oubliée de l’expropriation des terres communales ou « baldios » au Portugal ?

    José Vieira : Complètement par hasard. J’étais en train de filmer Le pain que le diable a pétri (2012, Zeugma Films) sur les habitants des montagnes au Portugal qui sont partis après-guerre travailler dans les usines à Lisbonne.

    Je demandais à un vieux qui est resté au village, António, quelle était la définition d’un baldio – on voit cet extrait dans le documentaire, où il parle d’un lieu où tout le monde peut aller pour récolter du bois, faire pâturer ses bêtes, etc. Puis il me sort soudain : « Sauf que l’État a occupé tous les baldios, c’était juste avant que je parte au service militaire. »

    J’étais estomaqué, je voulais en savoir plus mais impossible, car dans la foulée, il m’a envoyé baladé en râlant : « De toute façon, je ne te supporte pas aujourd’hui. »

    Qu’avez-vous fait alors ?

    J’ai commencé à fouiller sur Internet et j’ai eu la chance de tomber sur une étude parue dans la revue de sociologie portugaise Análise Social, qui raconte comment dans les années 1940 l’État salazariste avait pour projet initial de boiser 500 000 hectares de biens communaux en expropriant les usagers de ces terres.

    Je devais ensuite trouver des éléments d’histoire locale, dans la Serra do Caramulo, dont je suis originaire. J’ai passé un temps fou le nez dans les archives du journal local, qui était bien sûr à l’époque entièrement dévoué au régime.

    Après la publication de l’avis à la population que les baldios seront expropriés au profit de la plantation de forêts, plus aucune mention des communaux n’apparaît dans la presse. Mais rapidement, des correspondants locaux et des éditorialistes vont s’apercevoir qu’il existe dans ce territoire un malaise, qu’Untel abandonne sa ferme faute de pâturage ou que d’autres partent en ville. En somme, que sans les baldios, les gens ne s’en sortent plus.

    Comment sont perçus les communaux par les tenants du salazarisme ?

    Les ingénieurs forestiers décrivent les paysans de ces territoires comme des « primitifs » qu’il faut « civiliser ». Ils se voient comme des missionnaires du progrès et dénoncent l’oisiveté de ces montagnards peu enclins au salariat.

    À Lisbonne, j’ai trouvé aussi une archive qui parle des baldios comme étant une source de perversion, de mœurs légères qui conduisent à des enfants illégitimes dans des coins où « les familles vivent presque sans travailler ». Un crime dans un régime où le travail est élevé au rang de valeur suprême.

    On retrouve tous ces différents motifs dans le fameux Portrait du colonisé d’Albert Memmi (1957). Car il y a de la part du régime un vrai discours de colonisateur vis-à-vis de ces régions montagneuses où l’État et la religion ont encore peu de prise sur les habitants.

    En somme, l’État salazariste veut faire entrer ces Portugais reculés dans la modernité.

    Il y a eu des résistances face à ces expropriations ?

    Les villageois vont être embauchés pour boiser les baldios. Sauf qu’après avoir semé les pins, il faut attendre vingt ans pour que la forêt pousse.

    Il y a eu alors quelques histoires d’arrachage clandestin d’arbres. Et je raconte dans le film comment une incartade avec un garde forestier a failli virer au drame à cause d’une balle perdue – je rappelle qu’on est alors sous la chape de plomb du salazarisme. D’autres habitants ont aussi tabassé deux gardes forestiers à la sortie d’un bar et leur ont piqué leurs flingues.

    Mais la mémoire de ces résistances a peu été transmise. Aujourd’hui, avec l’émigration, il ne reste plus rien de cette mémoire collective, la plupart des vieux et vieilles que j’ai filmés dans ce documentaire sont déjà morts.

    Comment justement avez-vous travaillé pour ce documentaire ?

    Quand António me raconte cette histoire d’expropriation des baldios par l’État, c’était en 2010 et je tournais un documentaire, Souvenirs d’un futur radieux. Puis lorsqu’en 2014 un premier incendie a calciné le paysage forestier, je me suis dit qu’il fallait que je m’y mette.

    J’ai travaillé doucement, pendant trois ans, sans savoir où j’allais réellement. J’ai filmé un village situé à 15 kilomètres de là où je suis né. J’ai fait le choix d’y suivre des gens qui subsistent encore en pratiquant une agriculture traditionnelle, avec des outils de travail séculaires, comme la roue celte. Ils ont les mêmes pratiques que dans les années 1940, et qui sont respectueuses de l’écosystème, de la ressource en eau, de la terre.

    Vous vous êtes aussi attaché à retracer tel un historien cet épisode de boisement à marche forcée...

    Cette utopie industrialiste date du XIXe siècle, des ingénieurs forestiers parlant déjà de vouloir récupérer ces « terres de personne ». Puis sous Salazar, dans les années 1930, il y a eu un débat intense au sein du régime entre agrairistes et industrialistes. Pour les premiers, boiser ne va pas être rentable et les baldios sont vitaux aux paysans. Pour les seconds, le pays a besoin de l’industrie du bois pour décoller économiquement, et il manque de bras dans les villes pour travailler dans les usines.

    Le pouvoir central a alors même créé un organisme étatique, la Junte de colonisation interne, qui va recenser les baldios et proposer d’installer des personnes en leur donnant à cultiver des terres communales – des colonies de repeuplement pour résumer.

    Finalement, l’industrie du bois et de la cellulose l’a emporté. La loi de boisement des baldios est votée en 1938 et c’est en novembre 1941 que ça va commencer à se mettre en place sur le terrain.

    Une enquête publique a été réalisée, où tout le monde localement s’est prononcé contre. Et comme pour les enquêtes aujourd’hui en France, ils se sont arrangés pour dire que les habitants étaient d’accord.

    Qu’en est-il aujourd’hui de ces forêts ? Subsiste-t-il encore des « baldios » ?

    Les pinèdes sont exploitées par des boîtes privées qui font travailler des prolos qui galèrent en bossant dur. Mais beaucoup de ces forêts ont brûlé ces dernière décennies, notamment lors de la grande vague d’incendies au Portugal de 2017, où des gens du village où je filmais ont failli périr.

    Les feux ont dévoilé les paysages de pierre qu’on voyait auparavant sur les photos d’archives du territoire, avant que des pins de 30 mètres de haut ne bouchent le paysage.

    Quant aux baldios restants, ils sont loués à des entreprises de cellulose qui y plantent de l’eucalyptus. D’autres servent à faire des parcs d’éoliennes. Toutes les lois promues par les différents gouvernements à travers l’histoire du Portugal vont dans le même sens : privatiser les baldios alors que ces gens ont géré pendant des siècles ces espaces de façon collective et très intelligente.

    J’ai fait ce film avec en tête les forêts au Brésil gérées par les peuples autochtones depuis des siècles, TotalEnergies en Ouganda qui déplace 100 000 personnes de leurs terres pour du pétrole ou encore Sainte-Soline, où l’État aide les intérêts privés à accaparer un autre bien commun : l’eau.

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/021223/jose-vieira-la-memoire-des-resistances-face-l-accaparement-des-terres-ete-

    #accaparement_de_terres #terre #terres #dictature #histoire #paysannerie #Serra_do_Caramulo #communaux #salazarisme #progrès #colonisation #colonialisme #rural #modernité #résistance #incendie #boisement #utopie_industrialiste #ingénieurs #ingénieurs_forestiers #propriété #industrie_du_bois #Junte_de_colonisation_interne #colonies_de_repeuplement #cellulose #pinèdes #feux #paysage #privatisation #eucalyptus #éoliennes #loi #foncier

  • Comment les arbres ont conquis les villes

    Nécessaires pour embellir et rafraîchir les villes, les arbres n’ont pas toujours été intégrés à l’urbanisme, explique l’historienne #Andrée_Corvol. Les révolutions sociales ont permis leur essor.

    Depuis son appartement en banlieue parisienne, l’auteur de cet article contemple tous les jours un univers essentiellement minéral, composé de grandes tours d’habitation et de quelques bâtiments publics. Parmi ces blocs de béton se distinguent quelques arbres, essentiellement des marronniers, qui apportent une touche de vert bienvenue dans ce monde gris et marron et, l’été, une fraîcheur indispensable dans cet îlot de chaleur urbaine. Aussi rares et chétifs soient-ils, ces arbres parviennent à rendre supportable la vie dans un quartier densément peuplé, d’où toute nature a disparu depuis l’industrialisation de la ville au XIXe siècle.

    Ces marronniers s’inscrivent dans une longue lignée d’#arbres_urbains, retracée par l’historienne Andrée Corvol, spécialiste du végétal, dans L’Arbre dans la cité (éd. Le Pommier). Depuis son apparition systématique dans les villes françaises à l’orée du XVIIe siècle, l’arbre a toujours tenu le même rôle : rendre humainement vivables des villes de plus en plus denses, à mesure que les campagnes et les espaces naturels s’en éloignaient.

    Si la prose touffue d’Andrée Corvol tend, telle la sylve, à s’égarer en branches et rameaux, on peut néanmoins résumer à grands traits cette intégration du végétal au panel des outils d’aménagement à destination des autorités locales en France. Car c’est bien d’un outil qu’il s’agit, et ce, dès l’époque moderne.

    Alors que la ville française médiévale comportait peu d’arbres — sinon quelques-uns sur le parvis de l’église et d’autres sur les remparts, pour gêner les tirs adverses en cas de siège —, les autorités municipales des XVIIe et XVIIIe siècles confrontées à l’essor démographique de leurs villes respectives décidèrent de les doter de nouveaux quartiers végétalisés.

    Outre le sentiment de #fraîcheur que procuraient ces arbres — ormes, noyers et tilleuls pour la plupart —, les #plantations_urbaines offraient aux citadins un espace de #loisirs, des #promenades en famille jusqu’au #sport, en particulier le jeu de paume pratiqué à l’#ombre des cours et des mails, à l’instar de ceux structurant le centre-ville d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône).
    Embellir... et maîtriser l’étalement urbain

    À l’ère de l’#industrialisation et de l’#exode_rural vers la ville, les métropoles du XIXe siècle reprirent ces principes en les systématisant. Pour verdir les nouveaux boulevards qu’il perçait au beau milieu de la capitale, Georges-Eugène Haussmann, préfet de Paris sous Napoléon III, réorganisa le service des Promenades — ancêtre des Jardins — pour favoriser des plantations homogènes, après des décennies d’essais erratiques et désordonnés, peuplant ainsi la métropole de platanes et #marronniers. Comme souvent, les capitales régionales imitèrent l’exemple parisien et se dotèrent à leur tour d’avenues et cours végétalisés.

    Mais le tournant eut cependant lieu entre 1919 et 1924, avec l’adoption des #lois dites « #Cornudet ». À la différence des initiatives municipales antérieures, ces textes législatifs, les premiers en matière d’urbanisme en France, proposaient un encadrement national à travers un #Plan_d’aménagement_d’embellissement_et_d’extension (#PAEE) obligatoire pour les villes de plus de 10 000 habitants.

    Comme le résume Andrée Corvol, ces lois répondaient à la contradiction engendrée par la croissance urbaine : « Laisser les cités se densifier, c’était condamner leur #verdure intramuros. Laisser les cités s’étaler, c’était la réduire extramuros. » En somme, le PAEE envisageait la maîtrise d’un étalement urbain anarchique à travers une #végétalisation programmée des nouveaux quartiers et non ajoutée après coup de manière à les embellir.

    Au demeurant, le PAEE n’empêcha pas la construction à la va-vite, tout au long des Trente Glorieuses, d’ensembles minéraux destinés à reloger en urgence les déplacés de la Seconde Guerre mondiale. Le végétal servait alors à procurer bien-être et bien-vivre à des citadins toujours plus nombreux, en leur camouflant les désagréments des villes industrielles. Ainsi, à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), le parc des Chanteraines et ses 82 hectares dissimulent aux promeneurs les usines de béton qu’on verrait autrement depuis les immeubles d’habitation.

    L’arbre source de #conflits

    Toutefois, l’adoption des arbres en ville ne se fit pas sans heurts. Au contraire, la plantation, l’emplacement ou le type d’essence nourrirent durant quatre siècles un ensemble de contestations qui se déployèrent autour des arbres, pris comme emblèmes ou point de départ d’un conflit.

    Andrée Corvol parvient de la sorte à brosser une surprenante histoire de la #Révolution_française à travers ses arbres fétiches : aux « #arbres_de_mai » plantés spontanément en 1789 par des villageois enthousiastes succédèrent l’année suivante les arbres de la Fédération, impulsés par le marquis de La Fayette et les partisans de la monarchie constitutionnelle, puis, en 1792, les arbres de la liberté, destinés à enraciner, de manière physique et symbolique, la nouvelle République.

    Au cours de la période révolutionnaire, les arbres subirent tout autant que les humains les brusques changements de pouvoir. Ainsi, les peupliers plantés par les jacobins, qui rapprochaient naïvement populus et « petit peuple », furent souvent pris pour cible par les opposants à la Terreur, qui manifestaient au travers d’écorces mutilées ou brisées leur dissidence. Face à pareil conflit, le Directoire, le Consulat puis le Premier Empire tentèrent de finir la Révolution en aménageant des promenades urbaines pour calmer les esprits en offrant de nouveaux espaces de détente.

    Ces conflits politiques se doublaient en outre de conflits de classe. Dans le Paris haussmannien, les quartiers cossus réservaient « leurs » arbres aux nourrices et en chassaient les vagabonds, tandis que les quartiers ouvriers les gardaient pour leurs familles, au détriment des jeunes. En somme, « l’arbre était au centre de revendications territoriales. Il en supportait les conséquences sociétales, tout comme l’arbre de la liberté, les conséquences politiques ».

    Les investisseurs ont droit de vie ou de mort

    À ces combats s’ajoute une question cruciale : qui paye les plantations ? Les différents régimes issus de la Révolution, optimistes, crurent fidéliser les citoyens à leur cause en leur faisant financer eux-mêmes les nouvelles plantations urbaines. Peine perdue : versatile, seule une fraction de citoyens payait — et encore lorsque les fonctionnaires les y pressaient. Le volontarisme citoyen ne fonctionne qu’en de rares occasions et sur des points bien précis. En décembre 1999, une souscription populaire à la suite des tempêtes Lothar et Martin permit certes de financer la replantation des jardins du château de Versailles, mais les 2 millions d’arbres brisés en Seine-et-Marne ne connurent pas autant de succès.

    Au XIXe et XXe siècles, ce furent donc surtout les municipalités qui payèrent les plantations et leur entretien. Mais, hormis Paris et quelques grandes villes, beaucoup d’entre elles, par manque de fonds, privilégièrent des essences communes et connues de tous — le chêne, le marronnier, le platane, etc. — au détriment d’une réelle biodiversité végétale.

    En tant qu’investisseurs, les édiles se réservaient aussi le droit d’abattre les arbres lorsqu’ils les jugeaient vétustes ou faisant obstacle à de nouveaux projets d’aménagement, quitte à s’aliéner une partie de leurs administrés, témoin la bataille qui opposa plusieurs semaines en 2018 les habitants de la Plaine à la municipalité marseillaise.

    Ce dernier exemple illustre le peu de poids des arbres en ville. À peine mieux traités que du mobilier urbain par les services d’aménagement, ils furent forcés de s’acclimater, en dépit de leur métabolisme lent, au rythme de la ville moderne : tramway, métro, grands boulevards, éclairage nocturne, etc. Et, lorsqu’ils dérangeaient, on les abattait froidement.

    On mesure l’ampleur du désastre aux quelques chiffres que consigne l’historienne : si, en 1895, le réseau routier national français comptait 3 millions d’arbres, soit 49 % des routes plantées, un siècle plus tard il n’en dénombrait plus que 250 000, soit 12 % des routes. En cause : le caractère accidentogène des arbres en bord de route… Quelques défenseurs des arbres émergèrent bel et bien dès le milieu du XIXe siècle, mais se consacrèrent pour l’essentiel aux massifs forestiers ou aux trognes des campagnes en voie de disparition, rarement aux plantations urbaines, trop évanescentes.

    L’ouvrage achevé, une question se pose, à laquelle Corvol ne répond pas : qu’est-ce qu’une ville végétale digne de ce nom ? Si, comme le montre l’historienne, l’arbre a certes gagné sa place en ville, il s’agit d’une place strictement utilitaire, où la folie créatrice du sauvage n’a pas lieu d’être.

    https://reporterre.net/Comment-les-arbres-ont-conquis-les-villes

    #arbres #villes #urbanisme #urban_matter #végétation

    • L’arbre dans la cité : histoire d’une conquête (XVIIe-XXIe siècle)

      Autrefois, l’arbre en ville était cantonné aux enclos vivriers, il n’ombrageait pas nos routes ni nos fleuves et nos canaux. Vivant plutôt à la campagne, il procurait bois, fruits, fibres et feuilles. Aujourd’hui, le végétal entre en force dans nos cités par trop minérales ; il améliore nos conditions de vie, protège le sol, régule la température, purifie l’air et atténue les bruits.
      Comment l’arbre a-t-il conquis le pavé ? Cette histoire, moins utilitaire et monolithique qu’il n’y paraît, croise en fait celle de la modernité, et mérite d’être racontée. Car, bien avant la révolution industrielle et son introduction dans la cité pour assainir l’air, l’arbre s’y est fait une place dès la Révolution, comme symbole de la liberté.
      Récupéré dans le champ politique, il a depuis servi à commémorer un événement, à symboliser l’autorité, à améliorer l’aménagement urbain ou encore à satisfaire le besoin de nature des administrés. Ce faisant, il a suscité à la fois colères et affections. Une histoire qui est ainsi celle des hommes, de leurs revendications et de leurs aspirations. Mort ou vif, l’arbre fait partie du roman national.

      https://www.placedeslibraires.fr/livre/9782746527393-l-arbre-dans-la-cite-histoire-d-une-conquete-xviie-x
      #livre

  • Quand les #tomates rencontrent #Wagner

    Elias, petit village d’agriculteurs dans le centre de la Grèce, se meurt. Face à cette situation, deux cousins font équipe avec les grand-mères du village pour planter les graines de tomates qu’elles perpétuent depuis des siècles. Aidés par la musique de Wagner, censée encourager les tomates à pousser, ils parviennent à exporter aux quatre coins du monde des petits pots contenant des recettes à base de ces tomates biologiques. Le film suit les protagonistes de cette quête improbable, dans leurs efforts pour survivre et réaliser leurs rêves. Cette chronique nous rappelle l’importance de se réinventer en temps de crise et le pouvoir des relations humaines.

    https://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_fiche_film/32381_0
    #film #documentaire #film_documentaire

    #agriculture #musique #Grèce #rural #campagne #monde_rural #conserves #néo-ruraux #musique_traditionnelle #musique_classique #exode_rural #dépeuplement #Alexandros_Gousiaris

    • Our family’s activity in the area of beekeeping began in 1890 with beehives kept in our garden by my Great-great grandmother Evangelia Barbarousi for the family’s honey needs.

      In 1989, our activities were semi-professional, and in 1996 our Company was founded, after which our aims were clearly professional, regarding the number of hives as and their transfer within Greece (from Kalamata to Thassos), as well as the establishment of our storage and packaging facilities.

      In 1997 we began exporting our products, with the help of the “Odysea Ltd”, Company, with whom we continue to collaborate today.

      In 1998 our first investment plan was realized, with a program sponsored by the Greek Ministry of Agriculture for Countryside Restructuring. The plan was completed in 2000.

      ΤIn the same year, and together with the Taka family, we slowly began cultivating tomatoes on a large scale in the village of Fyllo, outside Kardista. The seed we use, then and still today, has been cultivated since 1900 by our extended family, and the pasteurization method is the same as that first implemented in the period between the two World Wars.

      In 2001 we exported the first tomato products, and in 2004 we began the certification process for the production of organic products on our estate in accordance with the DIO Certification Organization . In 2005 we began furnishing high-end hotels with our honey, offered both at breakfast and used in their kitchens.

      In 2007 we began our second investment plan with joint funding for Agricultural Development from the Greek Ministry of Agriculture and the European Union, and our packing and processing procedures were certified by the ISO Food Safety Management System (ISO 22000:2005).

      In 2008 we produced our first completely organic tomato products ("Tomata Stragisti" and tomato sauces), which were introduced onto the Greek market by the “Biotos”.

      We have inherited the knowledge of “how not to be afraid of bees” and we have developed a positive cooperation with them so as to produce an exceptional product with guaranteed safety to the consumer.

      We inherited a sack of seeds and we came to love the earth in which they grow, we respected the cultivating and production methods implemented before industrialized farming came into practice, and with great effort, know-how and experimentation we are able to offer products which bring back the flavours of yesterday.

      We will continue our efforts to prepare products of high quality and safety, giving particular importance to protecting the environment and to developing the human resources of our region.

      http://www.gousiaris.gr/main_en.html

  • Enclave agro-industriali e relazioni tra forza lavoro distrettuale – caso studio del saluzzese

    Introduzione

    Lo studio dei rapporti che intercorrono tra gli attori della filiera agroalimentare risulta particolarmente interessante per capire come si sono intrecciati nel tempo i processi di globalizzazione e i flussi migratori in agricoltura.

    Il punto di vista privilegiato di questo lavoro è l’enclave ovvero il distretto agricolo, un luogo che ha preso forma proprio per soddisfare le esigenze del mercato. Un “paesaggio operazionale” (Brenner e Katsikis 2020) che incarna la modernizzazione agricola globale, scollegato dal territorio che lo circonda ma connesso a realtà similari mono funzionali poste in altri punti del globo. Lì dove ha avuto luogo la globalizzazione delle campagne andremo ad indagare quali sono gli attori che attualmente ci lavorano e quali sono i loro interessi.

    Stiamo assistendo alla decontadinizzazione degli agricoltori italiani, le aziende diminuiscono anno dopo anno, le persone si spostano dalle campagne alle città e poco spesso ci si chiede chi resterà a produrre il nostro cibo. Non sempre ci si ricorda infatti che il cibo è l’esito di rapporti socio-ecologici complessi (Avallone 2017) nei quali sono fondamentali sia il lavoro umano che quello naturale. Terra e lavoro però non bastano più, la proprietà dei mezzi di produzione è strutturale all’agricoltura modernizzata, come strutturale è la necessità del lavoro di manodopera salariata nelle nuove “fabbriche” agricole.

    Intensificazione, artificializzazione, mercificazione, imprenditorialità, scalabilità, centralizzazione e specializzazione sono le parole chiave della supermarket revolution. Parole che non sembrano andare d’accordo coi ritmi e i modi della natura, andremo allora a scoprire che effetti danno queste contraddizioni sul territorio e sull’economia locale.

    Il caso studio è il Saluzzese, area in provincia di Cuneo (Piemonte) a forte vocazione produttiva, famosa per le sue eccellenze frutticole e per l’industria manifatturiera dei macchinari e dei mezzi di trasporto necessari alla filiera (CGIL Cuneo 2016). Questo distretto risulta essere un buon esempio di enclave agricola modernizzata in quanto zona rurale dove interagiscono attori globali della filiera e dinamiche sociali tradizionali di un’area marginale all’urbano.

    Nel primo capitolo verrà presentata ed approfondita una rassegna di contributi teorici utili all’analisi del tema indagato. Da un iniziale excursus storico che prende in considerazione le tappe fondamentali intercorse tra il primo regime alimentare e l’attuale, andremo ad approfondire quali sono le caratteristiche fondanti il sistema agroalimentare industriale. La sottomissione dell’azione statale all’efficienza del mercato ci porterà a focalizzarci infine su ciò che sono e rappresentano i distretti agricoli globali, spazi dove forza lavoro e produzione si incontrano e si scontrano.

    Da questo incontro, infatti, prende avvio il secondo capitolo, anch’esso di inquadramento teorico, ma riguardante nello specifico la forza lavoro. Si presenteranno allora le motivazioni che hanno portato alla considerazione del lavoro agricolo come lavoro di serie B. Le stesse che spiegano come la forza lavoro che si trova nel gradino più basso della filiera sia quella che deve in ultima istanza subire le esternalità negative dell’intera catena agroalimentare.

    Solo nel terzo capitolo prenderà avvio lo studio di ricerca che si concentra sulle specificità del distretto saluzzese. Storia agraria territoriale, evoluzione del modello produttivo, staffetta di attori che si sono dati il cambio nel tempo e infine caratteristiche esogene al distretto come la crisi climatica o la Politica Agricola Comune. Questi i temi che saranno trattati al fine di fornire un’idea concreta di quelli che sono i fattori che contribuiscono a dare forma al distretto per come lo conosciamo oggi e che aiutano nella comprensione in prospettiva di come questo potrà evolversi in futuro.

    Il quarto ed ultimo capitolo è il cuore della ricerca e infatti sarà qui che, prendendo in considerazione due attori alla volta, andremo a investigare come i rapporti globali di filiera si adattino al territorio piemontese. Attraverso un lavoro che prende in considerazione notizie di cronaca, interviste e ricerche portate avanti da altri studi similari, studieremo come la Grande Distribuzione Organizzata, pur non entrando a far parte della forza lavoro distrettuale, sia a capo delle scelte produttive degli agricoltori. Andremo poi allo stesso modo ad indagare come si relazionano gli imprenditori agricoli coi loro sottoposti, tema più che mai interessante data la massiccia presenza di migranti tra la manodopera agricola e la restrizione alla mobilità imposta dalla pandemia da Covid-19.

    Concluderemo infine con un accenno a ciò che riguarda i fenomeni illegali che avvengono all’interno del distretto. Data la mancanza di informazioni più approfondite affronteremo il tema partendo da due estratti di interviste che ben si prestano a dare un’idea della complessità che si cela dietro fatti a prima vista inspiegabili come mancate denunce o migrazioni bloccate in fasi di stallo per periodi prolungati.

    https://www.meltingpot.org/2022/05/enclave-agro-industriali-e-relazioni-tra-forza-lavoro-distrettuale-caso-

    #agriculture #alimentation #globalisation #migrations #enclave #distretto_agricolo #industrie_agro-alimentaire #mondialisation #Saluzzese #Piémont #Italie #enclave_agricole #modernisation #régime_alimentaire #travail_agricole #exode_rural #grande_distribution

  • L’« exode urbain », extension du domaine de la rente
    https://metropolitiques.eu/L-exode-urbain-extension-du-domaine-de-la-rente.html

    La thématique de l’exode urbain s’est imposée dans les médias comme l’une des conséquences de la pandémie de #Covid-19. Aurélie Delage et Max Rousseau perçoivent plutôt une « relocalisation du #capital » entretenue par les discours médiatiques. « Il n’y a plus rien à vendre. » Entendue de la bouche de maires ruraux ou d’agents immobiliers au sortir de l’été 2020, cette phrase est reprise comme une antienne en guise de preuve manifeste de l’« exode urbain ». Si le thème du réinvestissement rural montait depuis #Débats

    / #exode_rural, #immobilier, capital, Covid-19, #géographie_critique

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_rousseau-delage.pdf

  • 5 questions à Roland Riachi. Comprendre la #dépendance_alimentaire du #monde_arabe

    Économiste et géographe, Roland Riachi s’est spécialisé dans l’économie politique, et plus particulièrement dans le domaine de l’écologie politique. Dans cet entretien, il décrypte pour nous la crise alimentaire qui touche le monde arabe en la posant comme une crise éminemment politique. Il nous invite à regarder au-delà de l’aspect agricole pour cerner les choix politiques et économiques qui sont à son origine.

    https://www.carep-paris.org/5-questions-a/5-questions-a-roland-riachi
    #agriculture #alimentation #colonialisme #céréales #autosuffisance_alimentaire #nationalisation #néolibéralisme #Egypte #Soudan #Liban #Syrie #exportation #Maghreb #crise #post-colonialisme #souveraineté_nationale #panarabisme #militarisme #paysannerie #subventions #cash_crop #devises #capitalisme #blé #valeur_ajoutée #avocats #mangues #mondialisation #globalisation #néolibéralisme_autoritaire #révolution_verte #ouverture_du_marché #programmes_d'ajustement_structurels #intensification #machinisation #exode_rural #monopole #intrants #industrie_agro-alimentaire #biotechnologie #phosphates #extractivisme #agriculture_intensive #paysans #propriété_foncière #foncier #terres #morcellement_foncier #pauvreté #marginalisation #monoculture #goût #goûts #blé_tendre #pain #couscous #aide_humanitaire #blé_dur #durum #libre-échange #nourriture #diète_néolibérale #diète_méditerranéenne #bléification #importation #santé_publique #diabète #obésité #surpoids #accaparement_des_terres #eau #MENA #FMI #banque_mondiale #projets_hydrauliques #crise_alimentaire #foreign_direct_investment #emploi #Russie #Ukraine #sécurité_alimentaire #souveraineté_alimentaire

    #ressources_pédagogiques

    ping @odilon

  • #Éthiopie, inventer la #ville de demain

    Expédition en Éthiopie sur le chantier d’un nouveau type de ville, qui répond au défi démographique du pays. Conçu par l’urbaniste suisse #Franz_Oswald, l’idée est de construire des #micro-villes à la #campagne, autosuffisantes et durables. Pays à forte croissance démographique, l’Éthiopie, où plus de 80% de la population travaille dans le domaine de l’agriculture, est aussi caractérisée par un exode rural massif. Chaque année, des millions de jeunes en recherche d’emploi émigrent vers les villes, dont Addis-Abeba, la capitale, et y vivent dans la promiscuité et le dénuement des bidonvilles. Face à cette tendance préoccupante, une équipe composée d’architectes internationaux et d’agriculteurs locaux entreprend de réaliser un projet visionnaire, conçu par l’urbaniste suisse Franz Oswald. Leur idée : construire des micro-villes à la campagne, autosuffisantes et durables. Sur le chantier de la cité pilote de Buranest, ce documentaire part à la rencontre des participants, dont le paysan Tilahun Ayelew et l’architecte éthiopien reconnu Fasil Giorghis. Malgré les obstacles culturels et administratifs, une petite zone urbaine autonome en milieu rural voit progressivement le jour, avec un accès à l’eau, à l’électricité, à Internet et à l’école : une expérience source d’espoir pour désengorger les villes.

    https://www.les-docus.com/ethiopie-inventer-la-ville-de-demain
    #film #film_documentaire
    #Ethiopie #urbanisation #exode_rural #BuraNEST #Rainwater-unit #Zegeye_Cherenet #Fasil_Giorghis #architecture

    #TRUST #Master_TRUST

    • #Nestown

      Ethiopia’s present population of more than 90 million people is growing rapidly. In spite of the outstanding economic growth the multi-ethnic state on the Horn of Africa seems to be reaching its limits. It is confronted with inefficient cultivation of land and harmful migration to city centres. It lacks the experience to respond to the growth of its population with a sustainable settlement development approach. In order to develop a model town, the authorities in the Amhara region are working closely since 2007 with NESTown Group, including experts from ETH Zurich. It has been officially decided to implement this urban development proposal.

      The region aims to offer its mostly farming inhabitants a town and house type designed according to local conditions which they can build and manage themselves. The buildings are used to harvest rainwater and are built from local materials such as eucalyptus wood. The developed and tested construction is estimated to cost no more than the equivalent of 2000 - 3000 Swiss francs.

      To realize a sustainable town, other capacities have to be developed: cooperative communal living serving both the public good and the individual households, efficient water management, a productive and ecologically diverse agriculture for food security, continuous education, including appropriate technology transfer.

      By its nature, the implementation of a town is an open ended process emerging at various speeds and scales

      http://www.nestown.org

    • Ethiopia’s Plans to Bridge the Urban-Rural Divide

      Ethiopia’s population has tripled over the past few decades. Millions of farmers are leaving the fields only to end up living in the slums of huge cities. City planners believe they have found a solution — in the remote countryside.

      Stories about people embarking on their future usually start with a departure. But the story of farmer Birhan Abegaz is different. He plans to stay put right where he is in his quest for happiness — a treeless wasteland in northern Ethiopia.

      The crooked huts of his village, Bura, are surrounded by solitary thorn bushes and acacias. Birhan is cultivating rice on a patch of leased land behind his hut, at least during the rainy season. A few months have passed since the harvest. The dry season is here, and the earth is dusty. The Shine River, Bura’s lifeblood, is nothing but a trickle.

      Married with three children, Birhan is only 28 years old, but the hardness of rural life has taken its toll on him and he looks much older. He fetches the family’s water for drinking, cooking and washing from about a kilometer away. The nearest well is on the other side of the highway leading to the provincial capital of Bahir Dar, a two-hour drive away. In the past, many people from Bura and the nearby villages took this road, turning their backs on the countryside in search of a better life in the city.

      What Can Keep the Farmers in the Countryside?

      Since the 1970s, Ethiopia’s population has more than tripled, going from 30 million to over 100 million. In the countryside, overpopulation is leading to the overuse and overgrazing of fields and deforestation. More and more people are moving to the big cities, which are growing faster than the rest of the country. The provincial capital of Bahir Dar had about 60,000 inhabitants 30 years ago, but today it has 350,000. “Apartment buildings, streets, the drinking-water supply and the entire infrastructure can’t keep up with this tempo,” says Ethiopian city planner and architect Zegeye Cherenet.

      As a result, new arrivals end up living on the streets or in slums. In the early mornings in Bahir Dar, dozens of ragged young men stand at the intersections in the hope of picking up work as day laborers. In the evenings, their sisters and mothers go to the square and wait for johns.

      That’s supposed to change now, and the starting point is to be the barren wasteland next to the village of Bura. Birhan points to a construction site next to the highway. His new house is being built there, constructed out of eucalyptus wood and clay bricks. It’s supposed to be the first of many. An entire town is to be built here — with a school and a training center where the farmers from the surrounding area can learn new skills, which they can then put to use to earn money. The newly founded municipality, which is to gradually grow to around 15,000 residents, is called Buranest. The idea behind the project is that the city must come to the farmers in order to keep the rural population from flooding into the cities.

      The project is called Nestown, short for New Sustainable Town. The plan was primarily devised by Franz Oswald, a former professor at ETH in Zurich, and sociologist Dieter Läpple, the doctoral supervisor of Ethiopian city planner Cherenet at Hafencity University in Hamburg.

      Urbanization without Rural Depopulation

      An entire network of this new type of settlement is to be built as part of Ethiopia’s Nestown project — half village, half town. The inhabitants are to form cooperatives to build and run their towns themselves, as well as to make and sell agricultural and handcrafted wares. “The residents can remain farmers, which is familiar to them, but also simultaneously learn urban skills,” says Cherenet. Rural towns like Buranest are meant to keep the people in the countryside by offering them local opportunities like the ones they are moving to overpopulated cities to search for in vain.

      Work on the project began five years ago. First, model houses were built to show the skeptical farmers how useful it can be to have stable foundation walls, cisterns and toilets. The region’s usual dwellings are huts made of twigs, mud and cow dung — crooked housing often described as “dancing houses.”

      Birhan proudly opens the hatch of his cistern. He dug the pit for it together with his new neighbors. His home is also almost complete, a kind of row house that shares a large corrugated iron roof with the adjacent buildings. During the rainy season, the rainwater will drain into the cisterns using constructions called Rain Water Units (RWU). “With the water I can have not just one harvest per year, but several,” he says. A garden is being planted behind the house and his five cows “will even get their own shed.” Earlier, the animals lived in the old hut, under the same roof as the family.

      The construction style is unconventional for the region: The houses are two stories high, with a family housed on each floor in order to take up as little land as possible. Fertile land is valuable. One-half of a row house costs 75,000 Ethiopian birr, or about 2,200 euros, which is being financed partly through loans and partly with donations.

      The River Flows All Year Round

      The training center has been built on the village square — a building with cheerful red and green walls. The farmers will learn how to process food here, as well as household management and the basics of accounting. Their children are to take computer courses. Like his neighbors, however, Birhan has never been to school and doesn’t know how to read or write.

      A school, health center and church are to be built in the next construction phases — all largely by the new inhabitants. Swiss aid organization Green Ethiopia has planted a large vegetable garden as well as trees on the streets and along the banks of the Shine. For the first time in decades, the river is now flowing all year round.

      The rapid population growth has also left scars on the area surrounding Birhan’s village, Bura. The source region of the Shine River, 20 kilometers away, had been deforested, the fertile soil carried away by wind and storms. Since 2012, Green Ethiopia has planted almost 3 million trees on the hills of Lobokemkem. The organization also pays the local farmers to stop grazing their animals there.

      After five years, the successes are visible: The trees reach up to 5 meters high and a thin layer of topsoil has formed, with grass growing on top of it. Tree and grass roots hold down the soil. At several spots, the groundwater trickles out even in the dry season, which hasn’t been the case in two generations. Downriver, in Bunarest, there is enough water for the new gardens despite the drought. They are one of the most important foundations for the further development of the town. “What must I do to build a city? First, I plant a forest,” says Franz Oswald, summing up the seemingly paradoxical principle.
      The tree nursery is also part of the project. People from the region work here and raise the trees that are to be planted in Buranest.

      The Biggest Obstacle: Neighbors’ Skepticism

      Birhan Abegaz is already planning his transition away from farming to a life as an urban dweller. If one day he manages to get more land, he wants to plant more vegetables “and then open a restaurant,” he says. His family could work there. He hopes that his kids “can learn and have better career options. They shouldn’t remain farmers like me.”

      But his patience is repeatedly being put to the test. As a future urban dweller, he is dependent on the developments taking place around him. He is reliant on his neighbors. His house, as well as the first general construction phase, was supposed to be finished last year. The date has been pushed back repeatedly.

      It should be ready soon, but it’s hard to make predictions in Ethiopia. The cooperative of carpenters and stone masons, which was founded and trained specifically for the construction of the residential buildings, had to be dissolved again because as soon as they had their diploma, many of the trained tradespeople disappeared to find their luck in Bahir Dar or elsewhere. As a result, the construction site remained quiet for a year. The training center with the red-green exterior wall may be finished, but it remains empty because the local authorities are unable to agree on who will pay the instructors.

      Growth is nevertheless happening in Buranest, though not along the banks of the Shine where the planners had initially intended. The actual new town center has developed to the left and right sides of the highway. A kiosk has opened there, as well as a bar. About 300 people have built their traditional “dancing houses” there out of mud and twigs. Buranest, a city under construction, has attracted them from the surrounding villages, but most are still hesitating to sign onto the project. They shun the 40-euro fee for joining the cooperative, and an urban life with electricity and toilets in little sheds in front of the houses still seems alien and unfamiliar.

      The Government Wants to Build Thousands of New Towns

      Although the new settlement isn’t growing according to the Buranest planners’ intentions, they aren’t too bothered by it. The fact that so much is being built informally, says Dieter Läpple, is a sign that the people believe in the settlement’s future. He now hopes for what the founders call the “propaganda of the good deed” — that once families have moved into their new homes with water and gardens, neighbors will also soon recognize the advantages. The decisive factor, Läpple says, will be whether “the population makes the project theirs.”

      The government in Addis Ababa is already on board. In the city of 5 million, up to 80 percent of residents live in slums, according to UN estimates. And although migration into cities and urbanization used to be considered taboo, that’s no longer the case. By 2020, the Ethiopian Ministry of Urban Development and Housing wants to turn 8,000 rural settlements into “urban centers.” The government already has a concrete role model for their plans: Buranest.

      https://www.spiegel.de/international/tomorrow/ethiopia-plans-to-build-8000-new-cities-in-countryside-a-1197153.html

  • L’honneur perdu de la force hydraulique

    L’#énergie_hydraulique constitue l’épine dorsale historique de l’#approvisionnement en #électricité de la #Suisse. Et ce serait encore plus vrai aujourd’hui, dans le contexte de la #transition_énergétique. Mais celle-ci doit d’abord redorer son #image qui s’est ternie au cours des dernières décennies.

    Est-ce le sol étroit situé sous nos pieds qui tangue sous l’effet du vent, ou est-ce que ce sont les #montagnes alentour qui bougent ? Lorsqu’on traverse, saisi par le vertige, le pont suspendu et venteux tendu à 100 mètres d’altitude au-dessus de l’eau verte du Trift, dans l’Oberland bernois, on ne sait plus très bien ce qui est fixe ou en mouvement.

    Le pont du Trift se trouve au-dessus d’Innertkirchen (BE), dans une vallée latérale à 1700 mètres d’altitude, au cœur d’une des contrées montagneuses les plus paisibles de Suisse. Si l’on ose s’arrêter pendant la traversée de ce pont de 170 mètres de long, on aperçoit un cirque sauvage ruisselant d’eau et, tout en haut, les vestiges de l’ancien grand glacier du Trift. Cet amphithéâtre naturel est le décor de la dramaturgie conflictuelle qui se joue autour de l’exploitation de la force hydraulique.

    Apparition d’une cuvette

    Le réchauffement climatique a fait fondre à toute allure le glacier du Trift, qui recouvrait auparavant toute la cuvette. La gorge ainsi apparue mettait en danger l’ascension vers la cabane du Club Alpin Suisse, raison pour laquelle on a construit le pont suspendu en 2005. Mais le recul du glacier a également mis à nu un paysage de montagne vierge, rare et précieux.

    Ce « nouveau » bassin glaciaire éveille des convoitises. L’entreprise d’#hydroélectricité locale #KWO aimerait y construire un #barrage de 177 mètres de haut et créer ainsi un #bassin_de_retenue qui permettrait de fournir de l’électricité à près de 30 000 ménages.

    Cela pose un dilemme : KWO veut produire de l’électricité sans CO2, ce qui est indispensable pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais sacrifie pour ce faire une #nature intacte. C’est pourquoi une organisation de #protection_de_la_nature, petite mais tenace, bloque la construction du barrage-réservoir par des recours, tout en sachant que la Suisse fera sinon appel à des centrales à gaz très polluantes pour répondre à une éventuelle pénurie d’électricité. Ce qui menacera à son tour l’objectif de freiner le réchauffement climatique.

    On dirait qu’aucune argumentation ne permet de sortir de l’#impasse. Comment en est-on arrivé au point où l’énergie hydraulique, qui fut un jour le gage de pureté du « château d’eau de l’Europe », comme la Suisse aime à se présenter, doit se battre pour redorer son blason de source d’énergie écologique ?

    Moteur de la haute conjoncture

    La Suisse ne possédant pas de charbon, l’énergie hydraulique a toujours fait partie de l’équipement de base de l’économie énergétique. Mais elle est réellement entrée dans l’ADN du pays pendant la phase de haute conjoncture qui a suivi la Seconde Guerre mondiale. À un rythme frénétique, on a meublé les vallées alpines de barrages géants, et les #lacs_de_retenue ainsi créés ont permis de compter sur un approvisionnement en électricité stable, qui est devenu l’épine dorsale de la croissance économique.

    Grâce à ces constructions audacieuses dans des régions montagneuses difficiles d’accès, le petit pays alpin s’est offert une bonne dose d’#indépendance_énergétique. En 1970, avant que les premières centrales nucléaires ne soient mises en service, environ 90 % de l’électricité suisse était issue de la force hydraulique.

    Dans le boom des années 1970, les excursions familiales avaient leurs classiques : on prenait la voiture pour se rendre en Valais, à Sion par exemple, avant de monter au Val d’Hérémence pour admirer l’impressionnant barrage de la Grande Dixence. On éprouvait une sensation étrange lorsqu’on se tenait au pied de ce mur de 285 mètres, qui est aujourd’hui encore la plus haute construction de Suisse. Son ventre de béton pèse 15 millions de tonnes, davantage que les pyramides de Khéops, et c’est ce poids inouï qui lui permet de retenir le lac qui s’étend sur des kilomètres. Que se passerait-il s’il lâchait ?

    La gloire de l’énergie hydraulique a été alimentée par d’illustres ingénieurs, qui ont fait de la construction de barrages une discipline de haut niveau. Le Tessinois Giovanni Lombardi, par exemple (père de Filippo Lombardi, politicien du Centre et président de l’Organisation des Suisses de l’étranger), s’est fait un nom en 1965 avec l’élégant barrage-voûte de la Verzasca, dont la finesse a établi de nouveaux standards. Quand James Bond, dans la scène d’ouverture du film « Goldeneye », sorti en 1995, effectue un saut à l’élastique du haut du barrage, celui-ci devient une véritable icône. Giovanni Lombardi, qui a construit plus tard le tunnel routier du Gothard, est resté jusqu’à sa mort en 2017 une référence en matière d’édifices spectaculaires.

    La #redevance_hydraulique, ciment national

    La force hydraulique a consolidé non seulement le #mythe patriotique, mais aussi, de manière plus discrète, la #cohésion_nationale. Car l’eau stockée rapporte beaucoup d’#argent à la #montagne : les communes abritant les centrales électriques touchent des redevances hydrauliques pour l’exploitation de leur ressource, des sommes qui atteignent près d’un demi-milliard de francs par an.

    On peut voir ces redevances comme des transferts de fonds du Plateau économiquement fort vers les régions de montagne, qui peuvent ainsi investir dans leurs #infrastructures et lutter contre l’#exode_rural. Le Val Bregaglia, dans les Grisons, illustre bien la manière dont l’hydroélectricité soude la Suisse et comble le fossé ville-campagne : l’entreprise électrique #EKZ, à Zurich, qui a construit le barrage d’Albigna dans les années 1950, est jusqu’à ce jour l’un des plus grands employeurs de la vallée.

    Violents réflexes de rejet

    Cependant, l’exaltation mythique de l’énergie hydraulique fait parfois oublier que son extension a déclenché, très tôt déjà, de violents réflexes de #rejet au niveau local. Tout le monde se souvient du village grison de #Marmorera, au col du Julier, qui s’est résigné à être inondé par le lac du barrage du même nom en 1954, après plusieurs procédures d’#expropriation.

    « Des filiales des centrales nucléaires dans les #Alpes »

    Pour comprendre pourquoi l’énergie hydraulique a perdu son aura, l’année clé est toutefois 1986. Après des années de combat, les forces motrices #NOK ont enterré leur projet de noyer la plaine de la #Greina entre les Grisons et le Tessin pour en faire un lac de retenue. Épaulée par l’#opposition locale, une coalition de défenseurs de la nature et du #paysage issus de toute la Suisse, critiques à l’égard de la croissance, a alors réussi à mettre ce haut plateau isolé à l’ordre du jour de la politique nationale.

    La Greina est devenue le symbole de la critique écologique à l’égard du circuit de #profit de l’#hydroélectricité qui s’est liée avec une #énergie_nucléaire controversée. Le principe critiqué fonctionne ainsi : meilleur marché, l’énergie atomique non utilisée aux heures creuses est utilisée pour pomper de l’eau dans les lacs de retenue. Ainsi, les exploitants des centrales peuvent produire de l’électricité à un prix élevé durant les pics de demande et maximiser leurs gains. Axées sur le profit, ces « filiales des centrales nucléaires dans les Alpes », comme les surnomment leurs opposants, justifient-elles le sacrifice des derniers paysages naturels vierges ?

    Les limites de la croissance ?

    C’est sur cette question existentielle que s’écharpent partisans et opposants de l’extension de l’hydroélectricité depuis plus de 30 ans. De temps à autre, comme lors de la tentative – pour l’heure vaine – de réhausser le barrage du Grimsel, le conflit se poursuit jusque devant le Tribunal fédéral.

    D’après l’organisation de défense de l’environnement WWF, 95 % du potentiel de l’énergie hydraulique utilisable est déjà exploitée en Suisse. Bien que la Confédération impose aux acteurs du secteur des conditions écologiques plus strictes sous la forme de débits résiduels, le WWF estime que les limites sont « dépassées depuis longtemps » : 60 % des espèces de #poissons et d’#écrevisses locales ont déjà disparu ou sont menacées d’#extinction. Malgré cela, des centaines d’extensions ou de constructions de centrales hydroélectriques, souvent de petite taille, sont prévues. La plus grande, et ainsi la plus contestée, est celle qui doit pousser sur le terrain libéré par le recul du glacier du #Trift.

    Une pression accrue sur les performances

    Par rapport à l’époque de la Greina, la situation est encore plus conflictuelle. Deux nouvelles problématiques sont apparues. D’une part, le #réchauffement_climatique et la fonte des glaciers font que les débits d’eau les plus élevés se déplacent de l’été vers le printemps. D’autre part, après la catastrophe de Fukushima, la décision politique prise par la Suisse de débrancher petit à petit ses centrales nucléaires, de les remplacer par des sources d’énergie renouvelable et de contribuer ainsi à l’objectif de zéro émission de gaz à effet de serre accroît la pression sur les performances de l’énergie hydraulique.

    Est-il possible de tirer encore davantage de la force hydraulique, qui assure actuellement près de 60 % de la production d’électricité en Suisse, sans trahir les exigences écologiques minimales ? « En principe, oui », déclare Rolf Weingartner, professeur émérite d’hydrologie à l’université de Berne. Il décompose les différentes parties du problème et les réassemble pour résumer sobrement ce débat émotionnel.

    L’énergie hydraulique, nouveau service public ?

    Comme l’énergie hydraulique produit de l’électricité presque sans CO2, elle reste une source d’approvisionnement indispensable pour éviter les pénuries, surtout en hiver, quand les installations solaires, par exemple, sont moins productives. En même temps, le réchauffement climatique montre l’importance des lacs de barrage sous un jour nouveau, note Rolf Weingartner. Car du point de vue hydrologique, la fonte des glaciers fait que les réservoirs d’eau qui assuraient de hauts débits surtout pendant les six mois de l’été disparaîtront à l’avenir. Par conséquent, on manquera d’eau à la belle saison.

    Dans l’ensemble, les débits d’eau seront toujours aussi importants sur l’année entière. Mais comme les glaciers n’assureront plus leur rôle de réservoir et comme l’effet de la fonte des neiges diminuera, les débits se répartiront moins bien sur l’année. « Cela signifie, conclut Rolf Weingartner, que nous devrons remplacer, dans les Alpes, les réservoirs naturels par des artificiels. » En d’autres termes, les lacs de retenue existants se doteront d’une fonction supplémentaire pour la gestion durable de l’eau à l’heure du changement climatique, en alimentant par exemple l’irrigation agricole pendant les mois chauds et secs.

    Par ailleurs, on installe parfois sur les barrages, comme celui de Muttsee à Glaris, des installations photovoltaïques qui, situées au-delà de la limite du brouillard, produisent de l’électricité toute l’année. Face à cette nouvelle multifonctionnalité, Rolf Weingartner considère l’énergie hydraulique comme « un service public pour la production d’énergie, mais aussi pour la couverture durable des besoins en eau, ce qui inclut une utilisation écologiquement responsable des eaux résiduelles ». Ainsi, souligne-t-il, l’affrontement entre les intérêts écologiques et économiques qui a lieu à chaque nouveau projet de barrage est un exercice peu productif.

    Le spécialiste plaide pour une nouvelle approche globale, qui s’impose aussi parce que le réchauffement climatique fera apparaître dans les Alpes, après le recul des glaciers, plus de 1000 nouveaux lacs qui auront un potentiel pour la gestion de l’eau. « Nous devrions définir des zones de priorité », note Rolf Weingartner. C’est-à-dire diviser, sous la houlette de la Confédération, l’espace alpin en différentes zones où seraient prioritaires la production d’énergie, l’écologie, le tourisme ou l’agriculture. Ainsi, on dénouerait l’enchevêtrement spatial des intérêts et l’on préviendrait les conflits.

    Rolf Weingartner est conscient que sa vision pacificatrice de la gestion de l’eau a peu de chances de trouver sa place dans la realpolitik suisse. Pour l’instant. Mais si la Suisse reste un pays où la consommation d’électricité augmente inexorablement, elle devra toutefois y songer.

    L’électricité manquera-t-elle en Suisse ?

    La question de savoir s’il y aura assez d’électricité à l’avenir agite en ce moment la Suisse. La demande va, semble-t-il, inexorablement continuer à croître : le groupe énergétique Axpo, prévoit ainsi une hausse de 30 % de la demande d’électricité d’ici 2050.

    Il est possible que la « #transition_énergétique », soit l’abandon simultané de l’énergie nucléaire et des sources d’énergie fossile, stimule la #croissance de la demande. Le remplacement des chaudières à mazout par des pompes à chaleur et des voitures à essence par des électriques feront baisser les émissions de CO2, mais augmenter la consommation d’électricité. Dans quelle mesure les gains en #efficience et les changements de comportement freineront-ils la demande ? Difficile à prévoir.

    Une nouvelle étude de l’Office fédéral de l’énergie montre que dès 2025, de brèves pénuries d’électricité seront à craindre en hiver. En abandonnant les négociations sur un accord-cadre avec l’UE, le Conseil fédéral a encore aggravé la situation. En conséquence, l’UE rejette l’accord sur l’électricité déjà négocié, ce qui compliquera la tâche de la Suisse, dans l’état actuel des choses, pour s’approvisionner sur le marché européen de l’électricité en cas d’urgence.

    https://www.swisscommunity.org/fr/nouvelles-et-medias/revue-suisse/article/lhonneur-perdu-de-la-force-hydraulique

    #hydraulique #énergie #énergie_hydroélectrique #changement_climatique #extractivisme #écologie #faune

  • Vers un #tournant_rural en #France ?

    En France, la seconde moitié du XXe siècle marque une accélération : c’est durant cette période que la population urbaine progresse le plus fortement pour devenir bien plus importante que la population rurale. À l’équilibre jusqu’à l’après-guerre, la part des urbains explose durant les « trente glorieuses » (1945-1973).

    Dans les analyses de l’occupation humaine du territoire national, l’#exode_rural – ce phénomène qui désigne l’abandon des campagnes au profit des centres urbains – a marqué l’histoire de France et de ses territoires. En témoigne nombre de récits et d’études, à l’image des travaux de Pierre Merlin dans les années 1970 et, plus proches de nous, ceux de Bertrand Hervieu.

    Ce long déclin des campagnes est documenté, pointé, par moment combattu. Mais depuis 1975, et surtout après 1990, des phénomènes migratoires nouveaux marquent un renversement. Le #rural redevient accueillant. La #périurbanisation, puis la #rurbanisation ont enclenché le processus.

    La période actuelle marquée par un contexte sanitaire inédit questionne encore plus largement. N’assisterait-on pas à un #renversement_spatial ? La crise en cours semble en tous cas accélérer le phénomène et faire émerger une « #transition_rurale ».

    Si cette hypothèse peut être débattue au niveau démographique, politique, économique et culturel, elle nous pousse surtout à faire émerger un nouveau référentiel d’analyse, non plus pensé depuis l’#urbanité, mais depuis la #ruralité.


    https://twitter.com/afpfr/status/1078546339133353989

    De l’exode rural…

    Dans la mythologie moderne française, l’exode rural a une place reconnue. Les #campagnes, qui accueillent jusque dans les années 1930 une majorité de Français, apparaissent comme le réservoir de main-d’œuvre dont l’industrie, majoritairement présente dans les villes a alors cruellement besoin. Il faut ainsi se rappeler qu’à cette époque, la pluriactivité est répandue et que les manufactures ne font pas toujours le plein à l’heure de l’embauche en période de travaux dans les champs.

    Il faudra attendre l’après-Seconde Guerre mondiale, alors que le mouvement se généralise, pour que la sociologie rurale s’en empare et prenne la mesure sociale des conséquences, jusqu’à proclamer, en 1967 avec #Henri_Mendras, « la #fin_des_paysans ».

    L’#urbanisation constitue le pendant de ce phénomène et structure depuis la géographie nationale. Dans ce contexte, la concentration des populations à l’œuvre avait déjà alerté, comme en témoigne le retentissement de l’ouvrage de Jean‑François Gravier Paris et le désert français (1947). Quelques années plus tard, une politique d’#aménagement_du_territoire redistributive sera impulsée ; elle propose une #délocalisation volontaire des emplois de l’#Ile-de-France vers la « #province », mais sans véritablement peser sur l’avenir des campagnes. Le temps était alors surtout aux métropoles d’équilibre et aux grands aménagements (ville nouvelle – TGV – création portuaire).

    https://www.youtube.com/watch?v=JEC0rgDjpeE&feature=emb_logo

    Pour la France des campagnes, l’exode rural se traduisit par un déplacement massif de population, mais aussi, et surtout, par une perte d’#identité_culturelle et une remise en cause de ses fondements et de ses #valeurs.

    Le virage de la #modernité, avec sa recherche de rationalité, de productivité et d’efficacité, ne fut pas négocié de la même manière. Les campagnes reculées, où se pratique une agriculture peu mécanisable, subirent de plein fouet le « progrès » ; tandis que d’autres milieux agricoles du centre et de l’ouest de la France s’en tirèrent mieux. L’#exploitant_agricole remplace désormais le #paysan ; des industries de transformation, notamment agroalimentaires, émergent. Mais globalement, le rural quitta sa dominante agricole et avec elle ses spécificités. La campagne, c’était la ville en moins bien.

    Ce référentiel, subi par les populations « restantes », structurait la #vision_nationale et avec elle les logiques d’action de l’État. Cette histoire se poursuivit, comme en témoignent les politiques actuelles de soutien à la #métropolisation, heureusement questionnées par quelques-uns.

    … à l’exode urbain !

    Le recensement de 1975 marque un basculement. Pour la première fois, la population rurale se stabilise et des migrations de la ville vers ses #périphéries sont à l’œuvre.

    Le mouvement qualifié de « périurbanisation » puis de « rurbanisation » marquait une continuité, toujours relative et fixée par rapport à la ville. La « périurbanisation » exprimait les migrations en périphéries, un desserrement urbain. La « rurbanisation », la généralisation du mode de vie urbain, même loin d’elle. Le processus n’est pas homogène et il explique pour une grande part la #fragmentation contemporaine de l’#espace_rural en y conférant des fonctions résidentielles ou récréatives, sur fond d’emplois agricoles devenus minoritaires. Ainsi, la banlieue lyonnaise, l’arrière-pays vauclusien et la campagne picarde offrent différents visages de la ruralité contemporaine.

    Parallèlement, dans les territoires les plus délaissés (en Ardèche, dans l’Ariège, dans les Alpes-de-Haute-Provence par exemple), un « #retour_à_la_terre » s’opère. Si le grand public connaît ces nouveaux résidents sous l’appellation de « #néo-ruraux », des moments successifs peuvent être distingués.

    La chercheuse Catherine Rouvière s’intéressa à ce phénomène en Ardèche ; elle le décrypte en 5 moments.

    Les premiers, avec les « #hippies » (1969-1973), marquèrent culturellement le mouvement, mais peu l’espace, à l’inverse des « néo-ruraux proprement dits » (1975-1985) qui réussirent plus largement leur installation. Plus tard, les « #travailleurs_à_la_campagne » (1985-1995) furent les premiers à faire le choix d’exercer leur métier ailleurs qu’en ville. Enfin, les politiques néolibérales engagèrent dans ce mouvement les « personnes fragiles fuyant la ville » (1995-2005) et mirent en action les « #altermondialistes » (2005-2010). Le départ de la ville est donc ancien.

    https://www.youtube.com/watch?v=NcOiHbvsoA0&feature=emb_logo

    Jean‑Paul Guérin, voit déjà en 1983 dans ce phénomène d’exode urbain une opportunité pour les territoires déshérités de retrouver une élite. Ce qu’on qualifie aujourd’hui d’émigration massive avait ainsi été repéré depuis près de 30 ans, même si l’Insee l’a toujours méthodiquement minoré.

    Vers une transition rurale ?

    Présenter ainsi l’histoire contemporaine des migrations françaises de manière symétrique et binaire est pourtant trompeur.

    Tout comme l’exode rural est à nuancer, l’exode urbain engagé il y a des décennies mérite de l’être aussi. Les relations ville-campagne sont bien connues, la ruralité se décline dorénavant au pluriel et de nouveaux équilibres sont souvent recherchés. Malgré cela, la période actuelle nous oblige à poser un regard différent sur cette histoire géographique au long cours. La crise de la #Covid-19 marque une accélération des mouvements.

    Aujourd’hui, quelques auteurs s’interrogent et proposent des ajustements. En appelant à une Plouc Pride, une marche des fiertés des campagnes, Valérie Jousseaume nous invite ainsi collectivement à nous questionner sur la nouvelle place de la ruralité.

    https://www.youtube.com/watch?v=agAuOcgcOUQ&feature=emb_logo

    Et si, au fond, cette tendance témoignait d’un basculement, d’une transition, d’un tournant rural, démographique, mais aussi et surtout culturel ?

    La période rend en effet visible « des #exilés_de_l’urbain » qui s’inscrivent clairement dans un autre référentiel de valeurs, dans la continuité de ce qui fut appelé les migrations d’agrément. Celles-ci, repérées initialement en Amérique du Nord dans les années 1980 puis en France dans les années 2000, fonctionnent sur une logique de rapprochement des individus à leurs lieux de loisirs et non plus de travail.

    L’enjeu pour ces personnes consiste à renoncer à la ville et non plus de continuer à en dépendre. Dans la ruralité, de nombreux territoires conscients de ce changement tentent de s’affirmer, comme la Bretagne ou le Pays basque.

    Pourtant ils versent souvent, à l’image des métropoles, dans les politiques classiques de #compétitivité et d’#attractivité (#marketing_territorial, politique culturelle, territoire écologique, créatif, innovant visant à attirer entrepreneurs urbains et classes supérieures) et peu s’autorisent des politiques non conventionnelles. Ce phénomène mimétique nous semble d’autant plus risqué que dès 1978, Michel Marié et Jean Viard nous alertaient en affirmant que « les villes n’ont pas les concepts qu’il faut pour penser le monde rural ». Mais alors, comment penser depuis la ruralité ?

    https://www.youtube.com/watch?v=YOEyqkK2hTQ&feature=emb_logo

    Il s’agit d’ouvrir un autre référentiel qui pourrait à son tour servir à relire les dynamiques contemporaines. Le référentiel urbain moderne a construit un monde essentiellement social, prédictif et rangé. Ses formes spatiales correspondent à des zonages, des voies de circulation rapides et de l’empilement. Ici, l’#artificialité se conjugue avec la #densité.

    Le rural accueille, en coprésence, une diversité de réalités. Ainsi, la #naturalité se vit dans la #proximité. Ce phénomène n’est pas exclusif aux territoires peu denses, la naturalisation des villes est d’ailleurs largement engagée. Mais l’enjeu de l’intégration de nouveaux habitants dans le rural est d’autant plus fort, qu’en plus de toucher la vie des communautés locales, il se doit de concerner ici plus encore qu’ailleurs les milieux écologiques.

    Le trait n’est plus alors celui qui sépare (la #frontière), mais devient celui qui fait #lien (la #connexion). La carte, objet du géographe, doit aussi s’adapter à ce nouvel horizon. Et la période qui s’ouvre accélère tous ces questionnements !

    L’histoire de la civilisation humaine est née dans les campagnes, premiers lieux défrichés pour faire exister le monde. La ville n’est venue que plus tard. Son efficacité a par contre repoussé la limite jusqu’à dissoudre la campagne prise entre urbanité diffuse et espace naturel. Mais face aux changements en cours, à un nouvel âge de la #dispersion, la question qui se pose apparaît de plus en plus : pour quoi a-t-on encore besoin des villes ?

    https://theconversation.com/vers-un-tournant-rural-en-france-151490
    #villes #campagne #démographie #coronavirus #pandémie

    –—

    ajouté à la métaliste « #géographie (et notamment #géographie_politique) et #coronavirus » :
    https://seenthis.net/messages/852722

  • Tous au vert ? Scénario rétro-prospectif d’un #exode_urbain

    Dès le début de la pandémie de #Covid-19, la #densité_de_population est apparue comme un facteur déterminant de la #propagation_du_virus. Cette corrélation entre #pandémie et #densité est aujourd’hui remise en cause par les scientifiques, notamment au regard de la multifactorialité de l’#épidémie. L’âge, la qualité des services de soin, le type de métier, le mode de cohabitation des ménages, les habitudes culturelles… sont autant d’éléments qui contribuent à accentuer ou non la pandémie.

    Pour autant, les postures critiques vis-à-vis de la ville et de ce qu’elle nous révèle de nos modèles socio-économiques ne faiblissent pas. Si cette pensée radicale n’est pas nouvelle, elle réémerge en période de crise et nous invite à poser la question de l’urbain au regard de la propagation virale et de la #distanciation_sociale au moment du #déconfinement, mais aussi en tant que reflet de la société.

    Creuset de tous les maux, la #ville est mise au banc des accusés et les disparités de densité révèlent d’autres inégalités, à la fois sociales, culturelles économiques.

    Dans ce contexte, certains experts et décideurs s’enthousiasment autour de l’idée d’une possible revanche des #campagnes. De nombreux auteurs et journalistes voient dans la #migration_massive des #Franciliens vers leurs #résidences_secondaires pendant le confinement le signe annonciateur d’un futur #exode_urbain.

    L’observation des dynamiques démographiques sur un temps long montre que les #espaces_ruraux, y compris loin des villes, se repeuplent en effet depuis les années 2000, ce qui participe à la revitalisation des campagnes, sans nécessairement affaiblir pour autant les villes.

    Si aucune accélération du phénomène n’est enregistrée, on peut tout de même se demander à quoi ressemblerait cette France post-exode-urbain, qui se serait reconnectée à sa ruralité et aurait retrouvé une équidensité de peuplement. Quelles seraient les conséquences de cette dé-densification massive des villes ?

    Quand la France était « équidense »

    Cette géographie idéalisée a en réalité déjà existé. Elle correspond à la France de la fin du XIXe siècle, au tout début de la révolution industrielle. En 1876, la population française est répartie de façon beaucoup plus homogène dans l’espace qu’elle ne l’est aujourd’hui.

    La France métropolitaine compte alors 38 millions d’habitants, une densité moyenne de 70 habitants au km2 et plus de la moitié de la population habite dans ce que nous appellerions aujourd’hui le rural.

    Cette répartition spatialement équitable traduit le fait que les hommes habitent au plus près de leur force de travail, laquelle est essentiellement liée à la terre. En 2017, la France métropolitaine recense plus de 64 millions d’habitants, une densité de 119 habitants au km2 et moins d’un quart de la population vit dans une commune de moins de 2 000 habitants.

    En 150 ans, la population a donc presque doublé, entre autres parce que l’espérance de vie est passée de 43 à 86 ans. Il est vrai que cette croissance démographique s’est fortement polarisée dans l’espace, puisque les trois quarts de la hausse de population enregistrée s’est concentrée sur seulement 5 % de la superficie du pays, ce qui nous conduit aux densités actuelles tant décriées.

    Si l’on projette un scénario de dé-densification massive des espaces urbaines pour revenir à cette géographie en apparence plus égalitaire, quelles seraient les variations de population et les conséquences pour les territoires ?

    Des populations qui tripleraient à la #montagne

    À partir des données historiques disponibles, il est possible d’imaginer une #France_néo-rurale pour en tirer quelques leçons contemporaines. Pour cela, la population de 2017 est répartie entre les communes, au prorata du poids qu’elles occupaient en 1876.

    Retrouver la répartition de population du XIXe siècle impliquerait une réduction massive de la population urbaine, ville-centre et proche périphérie, au profit des campagnes et des montagnes. Le littoral méditerranéen et son arrière-pays proche, ainsi que les zones touristiques et attractives de la côte atlantique devraient aussi se dépeupler.

    Sans la réalité des chiffres, on pourrait presque penser que le modèle est soutenable. Mais si l’on précise un peu les dynamiques observées, on se rend compte qu’il faudrait doubler la population rurale.

    Pour retrouver la géographie du XIXe siècle, la ville de Bagnères-de-Bigorre dans les Hautes-Pyrénées passerait ainsi de 7 200 habitants à 16 100. Celle de Charolles, en Saône-et-Loire, de 2 700 à 6 200, et la commune de Murat, dans le Cantal, verrait sa population bondir de 1 880 habitants à près de 5 900.

    Avec une surface moyenne des appartements située à 32 m2 par personne en France, il faudrait construire plus de 130 000 m2 à Murat, soit 1 900 logements de 70 m2 ou bien encore près de 40 immeubles de 8 étages pour assurer cette transition néo-rurale.

    Certains espaces de montagne verraient tripler leur population résidente, c’est le cas globalement des Pyrénées, ou dans une moindre mesure du Massif central. Les Alpes, en revanche, n’enregistreraient qu’une faible hausse de 15 % et le Jura resterait stable puisqu’il pèse, en 2017, un poids équivalent à celui de 1876.
    Des villes pas forcément moins denses

    À l’inverse, certaines villes apparaissent proportionnellement moins peuplées en 2017 qu’en 1876. La capitale française, par exemple, devrait accroître sa population de 54 % et atteindre ainsi les 3,3 millions d’habitants pour retrouver son poids dans la population française.

    En 1876, 5,2 % de celle-ci vivait à Paris pour 3,2 % aujourd’hui. Bordeaux devrait voir sa population progresser de près de 50 % et dépasser les 370 000 habitants. Lyon, Lille et Saint-Étienne enregistreraient des hausses démographiques de 15 à 30 %.

    Outre ces quelques exceptions, l’ensemble des villes françaises devraient globalement se dépeupler et se dédensifier. Les villes moyennes, qui ont enregistré les plus fortes progressions de population au cours des deux derniers siècles, pourraient donc subir aussi ces mouvements d’exode urbain. Si l’on se fonde sur la géographie du XIXe siècle, Romans-sur-Isère ou Albi perdraient plus de 10 000 habitants et Colmar plus de 30 000.
    Le risque d’une gentrification rurale

    À partir de ce scénario rétro-prospectif, il est possible de discuter des conséquences des aspirations ou des appels à la dé-densification massive des villes. Pour dédensifier sérieusement les villes, il faut songer à urbaniser les campagnes, artificialiser de nombreux espaces fragiles et protégés.

    Pour garantir un accès à l’emploi, à la santé, à l’éducation dans un modèle d’habitat dispersé, il faut prévoir de développer les réseaux numériques, énergétiques, routiers afin d’assurer la connexion de ces espaces. Les déplacements motorisés augmenteraient, les prix dans ces espaces nouvellement convoités sans doute aussi, provoquant une forme de gentrification rurale, qui peut déjà s’exprimer dans les campagnes les plus attractives. Le corollaire de ce déménagement territorial pourrait même se traduire finalement par un nouvel engouement pour les villes.

    Finalement, cette projection nous montre surtout à quel point ville et campagne sont profondément reliées et constituent en réalité les deux facettes d’un même modèle territorial. Si en ces temps anxiogènes, la ville repoussoir trouve son pendant dans la campagne refuge, cela ne remet pas en cause la nécessité de travailler à l’amélioration des interactions spatiales, plutôt que d’appeler à soutenir de nouvelles fractures.
    Au-delà de l’opposition entre ville et campagne

    Le rapport affectif que les Français entretiennent avec le monde rural est un ciment important pour la cohésion territoriale. L’attractivité retrouvée de certaines campagnes depuis 20 ans, n’a jusque-là pas remis en cause la dynamique urbaine dont nous avons aussi besoin.

    L’urbanisation a bien sûr ses limites, mais il me semble que les enjeux pour l’action ne sont pas tant liés à la densité des villes, qu’à la qualité des espaces. Cela passe par une déminéralisation des espaces pour redonner une place à la nature, favoriser la biodiversité, réduire les îlots de chaleur.

    Il y a également un enjeu très fort autour de la reconnexion des espaces fonctionnels de vie, de travail, de loisir pour réduire les mobilités et accroître le bien-être des populations. Sur ce dernier point, les villes moyennes ont une opportunité à saisir en offrant dans la proximité à la fois des ressources résidentielles, productives et récréatives.

    Dans tous les cas, les approches clivantes de l’espace, opposant ville et campagne, #centre et #périphérie, ne nous font avancer. Au contraire, s’il doit y avoir un nouveau modèle de résilience à l’issue de la crise, c’est sur l’exceptionnel maillage de l’#espace_géographique de la France et sur le couple ville-campagne hérité de notre histoire, qu’il doit se construire.

    https://theconversation.com/tous-au-vert-scenario-retro-prospectif-dun-exode-urbain-137800
    #néo-ruralité #géographie #cartographie #visualisation

  • Le temps des ouvriers. Le temps de l’#usine (1/4)

    Du début du XVIIIe siècle à nos jours, Stan Neumann déroule sur plus de trois siècles l’histoire du monde ouvrier européen, rappelant en une synthèse éblouissante ce que nos sociétés doivent aux luttes des « damnés de la terre ».

    Dès le début du XVIIIe siècle, en Grande-Bretagne, une nouvelle économie « industrielle et commerciale », portée par le textile, chasse des campagnes les petits paysans et les tisserands indépendants. Pour survivre, ils doivent désormais travailler contre salaire dans des fabriques (factories) qui rassemblent plusieurs milliers d’ouvriers, sur des métiers appartenant à des marchands devenus industriels. C’est la naissance de la classe ouvrière anglaise. Le travail en usine, le Factory System, où seul compte le profit, impose aux déracinés une discipline et une conception du temps radicalement nouvelles. Avec la révolution industrielle de la fin du XVIIIe siècle, ils subissent un dressage plus violent encore, sous la loi de machines qui réduisent l’ouvrier à un simple rouage.
    Surexploitée et inorganisée, cette classe ouvrière primitive, qui oppose à la main de fer de l’industrie naissante des révoltes spontanées et sporadiques, va mettre plusieurs générations à inventer ses propres formes de lutte, dans une alliance parfois malaisée avec les républicains anglais, inspirés par la Révolution française de 1789. Ses revendications sont sociales et politiques : réglementation du travail des enfants, salaires, durée du temps de travail, liberté syndicale, droit de grève, suffrage universel... Dans les années 1820, après des décennies de combats perdus, une classe ouvrière anglaise puissante et combative semble en mesure de faire la révolution.

    Temps complet
    La classe ouvrière a-t-elle disparu, ou simplement changé de forme, de nom, de rêve ? Conciliant l’audace et la rigueur historique, l’humour et l’émotion, le détail signifiant et le souffle épique, Stan Neumann (Austerlitz, Lénine, Gorki – La révolution à contre-temps) livre une éblouissante relecture de trois cents ans d’histoire. Faisant vibrer la mémoire des lieux et la beauté des archives, célébrissimes ou méconnues, il parvient à synthétiser avec fluidité une étonnante quantité d’informations. Les séquences d’animation, ludiques et inventives, et un commentaire dit par la voix à la fois présente et discrète de Bernard Lavilliers permettent de passer sans se perdre d’un temps à l’autre : celui du travail, compté hier comme aujourd’hui minute par minute, celui des grands événements historiques, et celui, enfin, des changements sociaux ou techniques étalés parfois sur plusieurs décennies, comme le processus de légalisation des syndicats ou du travail à la chaîne. En parallèle, le réalisateur donne la parole à des ouvriers et ouvrières d’aujourd’hui et à une douzaine d’historiens et philosophes, hommes et femmes, « personnages » à part entière dont la passion communicative rythme le récit. On peut citer Jacques Rancière, Marion Fontaine, Alessandro Portelli, Arthur McIvor, Stefan Berger, avec Xavier Vigna comme conseiller scientifique de l’ensemble des épisodes. Cette série documentaire virtuose, où l’expérience intime coexiste avec la mémoire collective, au risque parfois de la contredire, révèle ainsi combien nos sociétés contemporaines ont été façonnées par l’histoire des ouvriers.

    https://www.arte.tv/fr/videos/082189-001-A/le-temps-des-ouvriers-1-4

    #documentaire #film_documentaire #film
    #agriculture #cleasning #nettoyage #industrie #industrie_textile #industrialisation #expulsions_forcées #histoire #Ecosse #UK #exode_rural #déplacés_internes #IDPs #histoire #force_de_travail #classe_ouvrière #Highlands #désindustrialisation #compétition #factory_system #esclavage #Crowley #temps #contrôle_du_temps #salaires #profit #filatures #travail_d'enfants #enfants #femmes #New_Lanark #Robert_Owen #silent_monitor #école #Institut_pour_la_formation_du_caractère #paternalisme #contrôle #tyrannie #liberté_de_commerce #grève #émeute #insécurité_sociale #pauvreté #workhouse #criminalisation_de_la_pauvreté #résistance #Enoch #Great_Enoch #John_Ludd #général_Ludd #luddisme #luttes #insurrection #cadence #progrès_technique #accidents_de_travail #Angleterre #insurrection_luddite #massacre_de_Peterloo #odeur #intercheangeabilité #temps_des_ouvriers

    Sur le silent monitor :

    This small four-sided wooden block was known as a ’silent monitor’ and was used by Robert Owen as a means of imposing discipline at his #New_Lanark_Mills.

    Robert Owen was strongly opposed to the use of corporal punishment, so in order to keep discipline at the New Lanark Mills, he devised his own unique system. The ’silent monitors’ were hung next to each worker in the mills, with each side displaying a different colour. ’Bad’ behaviour was represented by the colour black; ’indifferent’ was represented by blue; ’good’ by yellow; and ’excellent’ by white. The superintendent was responsible for turning the monitors every day, according to how well or badly the worker had behaved. A daily note was then made of the conduct of the workers in the ’books of character’ which were provided for each department in the mills.


    https://www.peoplescollection.wales/items/10456

    New Lanark :

    • Le temps des ouvriers (4/4)Le temps de la destruction

      Stan Neumann déroule sur plus de trois siècles l’histoire du monde ouvrier européen. Dernier volet : dans les années 1930, la classe ouvrière semble plus puissante que jamais. Le succès, en 1936, du Front populaire en France témoigne de cette force. Pourtant, les ouvriers européens vont de défaite en défaite...

      En Espagne, la dictature franquiste, soutenue par Hitler et Mussolini, triomphe en 1939. Puis dans l’Europe asservie, l’Allemagne nazie fait des ouvriers des pays vaincus des « esclaves du XXe siècle » : « travail obligatoire » pour les ouvriers de l’ouest de l’Europe, « extermination par le travail » des juifs, des Tsiganes et des prisonniers de guerre soviétiques.
      Après 1945, la guerre froide génère de nouvelles fractures. En Occident, on achète la paix sociale en améliorant les conditions de vie et de travail dans la plus pure tradition fordiste. À l’Est, le pouvoir est confisqué par des partis uniques qui prétendent représenter les ouvriers tout en les privant des libertés syndicales avec le soutien de l’URSS et de ses tanks. L’espoir renaît dans les années 1970, qui voient fleurir les utopies révolutionnaires, des Lip à Solidarnosc. Mais c’est un chant du cygne. Avec son cortège de misère et de chômage, la désindustrialisation a commencé.

      Temps complet
      La classe ouvrière a-t-elle disparu, ou simplement changé de forme, de nom, de rêve ? Conciliant l’audace et la rigueur historique, l’humour et l’émotion, le détail signifiant et le souffle épique, Stan Neumann ("Austerlitz", « Lénine »", ""Gorki"" – ""La révolution à contre-temps") livre une éblouissante relecture de trois cents ans d’histoire. Faisant vibrer la mémoire des lieux et la beauté des archives, célébrissimes ou méconnues, il parvient à synthétiser avec fluidité une étonnante quantité d’information. Les séquences d’animation, ludiques et inventives, et un commentaire dit par la voix à la fois présente et discrète de Bernard Lavilliers permettent de passer sans se perdre d’un temps à l’autre : celui du travail, compté hier comme aujourd’hui minute par minute, celui des grands événements historiques, et celui, enfin, des changements sociaux ou techniques étalés parfois sur plusieurs décennies, comme le processus de légalisation des syndicats ou du travail à la chaîne. En parallèle, le réalisateur donne la parole à des ouvriers et ouvrières d’aujourd’hui et à une douzaine d’historiens et philosophes, hommes et femmes, « personnages » à part entière dont la passion communicative rythme le récit. On peut citer Jacques Rancière, Marion Fontaine, Alessandro Portelli, Arthur McIvor, Stefan Berger, avec Xavier Vigna comme conseiller scientifique de l’ensemble des épisodes. Cette série documentaire virtuose, où l’expérience intime coexiste avec la mémoire collective, au risque parfois de la contredire, révèle ainsi combien nos sociétés contemporaines ont été façonnées par l’histoire des ouvriers.

      https://www.arte.tv/fr/videos/082189-004-A/le-temps-des-ouvriers-4-4

      #poing_levé #Front_populaire #Espagne #Fígols #mujeres_libres #guerre_d'Espagne #mineurs #alcolisme #violence_domestique #expulsions_collectives #travailleurs_étrangers #Volkswagen #nazisme #extermination_par_le_travail #Berlin #Pologne #Hongrie #superflu #rock_and_roll #mai_68 #Sochaux #Lip #Solidarność #Solidarnosc #Anna_Walentynowicz #printemps_de_Prague #NUM #autonomie_ouvrière #Arthur_McIvor #Margareth_Thatcher #muséification #désindustrialisation #invisibilisation #uberisation

  • Coronavirus : l’#exode_mondial avant le #confinement

    Près de 4,5 milliards de personnes sont soumises à un confinement dans 110 pays. Cette situation inédite a été précédée d’une autre étape, aussi exceptionnelle.

    Les frontières ont fermé les unes après les autres, les avions sont restés cloués au sol. Du début février à mi-avril, quelque 4,5 milliards de personnes – soit plus de la moitié de l’humanité – ont été soumises à un confinement total dans 110 pays, et le monde s’est figé. Cette situation inédite a été précédée d’une autre étape, tout aussi exceptionnelle, lorsque des millions d’êtres humains à travers la planète ont cherché à regagner leur pays, par leurs propres moyens ou bien par le biais d’opérations de rapatriement.

    A l’intérieur des Etats, des millions de citadins, à New York, Paris, Milan, Madrid ou Istanbul, ont décidé de fuir les grandes métropoles dans l’espoir d’échapper à la contagion du Covid-19 et à la complexité du confinement. Des travailleurs saisonniers ou transfrontaliers, bloqués ou contraints de rebrousser chemin, n’ont pas eu ce choix. Des migrants ont été chassés.

    En Inde, dès l’annonce du confinement immédiat du pays, le 25 mars, des millions de travailleurs pauvres, privés de leurs revenus journaliers, sont partis à pied rejoindre leurs villages. Ces scènes dantesques ont rappelé à l’écrivaine indienne Arundhati Roy celles de la partition, en 1947, des Indes britanniques, qui a abouti à la naissance du Pakistan.

    A l’exception de l’Afrique subsaharienne, où peu de grands mouvements ont été constatés jusqu’à présent, la pandémie de Covid-19 a partout provoqué un exode massif que nul n’avait anticipé. Il existe des projections sur des déplacements de population liés aux conditions climatiques ; des bilans ont été dressés à la suite de catastrophes naturelles ; des cérémonies religieuses ou des fêtes traditionnelles sont l’occasion, en Chine, en Inde ou en Arabie saoudite, de migrations spectaculaires. Cependant, des mouvements simultanés d’une telle ampleur n’avaient jamais été encore observés. « C’est un moment historique » , remarque Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche au CERI-Sciences Po et spécialiste des migrations internationales, qui se dit particulièrement inquiète quant au sort des migrants, « ceux qui fuient déjà une crise » .

    « Des Européens, interdits d’entrée dans des pays, ont expérimenté ce que c’est de ne pas être les bienvenus. Cela change les perspectives » (François Gemenne, spécialiste des migrations)

    « Il s’agit d’un mouvement mondial totalement inédit , abonde François Gemenne, spécialiste des migrations, professeur à Sciences Po Paris et à l’université de Liège, en Belgique. Autre élément nouveau, les flux habituels de migration ont été bouleversés. L’exode des ruraux a été remplacé par l’exode des citadins, celui des pays en voie de développement par celui des pays industrialisés. La Tunisie et la Mauritanie ont expulsé des Italiens ; des Européens, interdits d’entrée dans des pays, ont expérimenté ce que c’est de ne pas être les bienvenus. Cela change les perspectives. »

    Il est encore trop tôt pour se faire une idée exhaustive de ces mouvements et de leurs répercussions. Mais pour se forger une idée du phénomène, Le Monde a sollicité le réseau de ses correspondants à l’étranger. Sur la base d’éléments collectés entre le début février et le 8 avril (date du déconfinement progressif de la ville chinoise de Wuhan, point de départ de la pandémie), c’est un exode d’avant-confinement hors norme qui se dégage.

    Retour par ses propres moyens

    La crainte de l’isolement, le besoin de se rapprocher de la famille, ou la perte brutale de revenus ont poussé nombre de ressortissants basés à l’étranger à rentrer dans leur pays, le plus souvent par leurs propres moyens. Entre le 15 mars et le 7 avril, 143 000 Ukrainiens ont ainsi quitté la Pologne, selon les gardes-frontières polonais qui ont évoqué un « véritable exode, à une échelle encore jamais vue » . Ils étaient alors encore 11 000 à espérer un retour, selon l’ambassade ukrainienne à Varsovie.

    L’annonce, le 26 mars, de la fermeture des frontières par le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a précipité le mouvement. Sur une population estimée à plus de 1,2 million d’Ukrainiens résidant en Pologne avant la crise sanitaire, 12 % ont quitté le pays. Pour la plupart, il s’agit de travailleurs en situation légale : 90 % ont fui les difficultés économiques du secteur de l’hôtellerie et de la restauration après leur mise à l’arrêt.

    Plus de 200 000 Roumains ont eux aussi rejoint leur pays depuis le début de la pandémie, selon la police des frontières. Au point que les autorités de Bucarest ont appelé la diaspora à ne pas rentrer avant la fin de l’état d’urgence, prolongé jusqu’au 16 mai, par crainte d’un effet supplémentaire de contagion.

    Les effectifs des Danois et des Norvégiens enregistrés sur les listes consulaires à l’étranger ont fondu de moitié. Selon le ministère des affaires danois, ils n’étaient plus que 38 000 le 27 mars, contre 74 000 quelques jours auparavant. Des touristes, surtout, rentrés par leurs propres moyens, à l’instar des 234 000 Norvégiens encore à l’étranger le 12 mars, selon les données des opérateurs Telia et Telenor, qui n’étaient plus que 105 000 le 26 mars. De même, 25 000 à 35 000 Russes, bloqués par la fermeture des frontières, attendaient encore, le 3 avril, de pouvoir rentrer chez eux, en provenance notamment de Thaïlande.

    L’Australie pourrait faire face au plus grand déclin démographique de sa population depuis… 1788.

    Même phénomène en Australie, où plus de 280 000 citoyens et résidents permanents ont regagné l’île-continent depuis le 13 mars, sur 1 million vivant à l’étranger, soit 20 % d’entre eux, selon le ministère des affaires étrangères. Ces arrivées ne compensent pas les départs : 260 000 travailleurs temporaires, étudiants et touristes ont quitté le pays depuis le 1er février et 50 000 autres durant les deux premières semaines d’avril.

    A ce rythme, selon des projections sur l’année qui font état de 300 000 départs supplémentaires, l’Australie pourrait faire face au plus grand déclin démographique de sa population depuis… 1788, selon un expert cité par The Australian . Le 1er février, le premier ministre Scott Morrison avait prévenu que l’entrée du pays serait dorénavant refusée aux non-Australiens ayant voyagé en Chine. L’interdiction s’est ensuite étendue aux Iraniens, aux Sud-Coréens, aux Italiens, puis à l’ensemble de la planète à partir du 20 mars.

    Le gouvernement chilien a annoncé, le 2 avril, le retour de 30 000 de ses ressortissants depuis le 18 mars. En Chine, dans la semaine qui a précédé la quasi-fermeture du ciel chinois, le 29 mars, on comptait 25 000 arrivées quotidiennes. Un chiffre ramené à 3 000 la semaine suivante. En outre, 200 000 étudiants sur 1,6 million résidant à l’étranger sont revenus, selon le ministère de l’éducation (41 000 en provenance des Etats-Unis, 28 000 d’Australie, 22 000 du Royaume-Uni, 11 000 d’Allemagne et de France). Tous ont dû payer leur billet.

    Ces retours sont difficiles à quantifier au Venezuela, plongé dans une grave crise politique et économique depuis 2015 et qui a vu 4,3 millions de ses citoyens s’exiler. Mais des Vénézuéliens vivant dans une grande précarité au Pérou, en Equateur et en Colombie sont revenus – 2 153 recensés les 4 et 5 avril. Nicolas Maduro, président contesté, a ensuite annoncé l’arrivée de 5 800 réfugiés en provenance de Colombie.

    Plus de 20 000 expatriés Libanais reviennent au compte-gouttes, entravés par la situation de leur pays au bord de la faillite. La situation des Palestiniens est particulière. Depuis mi-mars, la quasi-fermeture des passages entre la bande de Gaza et Israël interdit la sortie de 5 000 travailleurs et commerçants palestiniens. Tandis que 70 000 autres, travailleurs légaux et illégaux de Cisjordanie, sont aujourd’hui bloqués en Israël s’ils veulent conserver leur emploi.

    Opérations de rapatriements

    Agnès Thierry, une Française installée depuis quatre ans au Vietnam après plusieurs années passées à Hongkong, songeait déjà, avant la pandémie, à rentrer au pays. Elle a brusqué sa décision. « Là-bas, au Vietnam, les écoles sont fermées depuis janvier, les autorités ont bloqué très tôt les frontières, puis elles ont refusé l’entrée des étrangers, la situation est devenue de plus en plus dure » , raconte-t-elle.

    La difficulté de renouveler son visa tous les trois mois, comme elle le faisait jusqu’à présent, a convaincu cette designer spécialisée dans la céramique de monter, le 27 mars, à bord d’un avion Air France, spécialement affrété – à charge pour les passagers de régler des billets négociés. « Il y a eu deux avions la même semaine, ils étaient pleins à craquer » , témoigne Agnès Thierry. Comme elle, près de 150 000 Français – en majorité des touristes – ont ainsi bénéficié de vols spéciaux depuis le 17 mars.

    En Pologne, le gouvernement a organisé l’opération « Vol à la maison », présentée comme le plus grand plan de rapatriement depuis la seconde guerre mondiale

    Partout, des opérations de rapatriement d’ampleur ont été mises sur pied : 200 000 Allemands coincés à l’étranger ont pu regagner leur pays en l’espace de trois semaines jusqu’au 6 avril, selon le ministère des affaires étrangères (il en restait encore 40 000 en Nouvelle-Zélande, au Pérou et en Afrique) ; 60 000 Italiens ont été évacués par des vols spéciaux ; 9 303 Algériens, selon le ministère de l’intérieur ; 12 000 Brésiliens au 6 avril ; 7 965 Tunisiens à la même date ; 8 432 Mexicains entre le 23 mars et le 3 avril ; 15 000 Turcs, entre mi-mars et début avril ; 14 950 Argentins, entre le 18 et le 30 mars ; 2 400 Norvégiens au 1er avril… La liste est longue. Le 17 avril, la Commission européenne a, pour sa part, évalué à 500 000 le nombre d’Européens rapatriés avec son concours ; tandis que 98 900 autres restent encore bloqués à l’étranger.

    En Pologne, après la fermeture des frontières, le gouvernement a organisé, avec la compagnie aérienne nationale LOT, l’opération « Vol à la maison », présentée comme la plus grande opération de rapatriement depuis la seconde guerre mondiale. Entre le 15 mars et le 5 avril, 360 vols et 44 avions mobilisés ont permis de ramener 54 000 Polonais, principalement de Londres (21 000 personnes), de Chicago (3 100), de Bangkok (2 200) ou encore d’Edimbourg (2 000).

    Fin mars, 300 000 Britanniques attendaient de pouvoir être rapatriés, ce qui a valu pas mal de critiques au gouvernement de Boris Johnson pour sa lenteur. Le 6 avril, seuls 1 450 Britanniques étaient parvenus à quitter la Tunisie, l’Algérie ou le Pérou, selon des chiffres du Foreign Office. Au 10 avril, environ 5 000 autres étaient censés, à leur tour, avoir réussi à quitter l’Inde. De leur côté, 16 812 Marocains n’ont pas encore trouvé de solution pour rentrer chez eux.

    Dans ce paysage chamboulé, seule l’Argentine semble se distinguer. A rebours du mouvement général, 30 000 Argentins ont quitté le pays, le 13 mars, au lendemain d’une allocution du président annonçant le confinement et la fermeture des frontières le 16. Pour quelles destinations ? La question demeure.

    Le retour contraint des migrants

    La question des migrants est celle qui préoccupe le plus les experts. En Iran, qui figure parmi les premiers foyers de contamination, la situation du million de travailleurs afghans présents dans le pays s’est dégradée. Alors que la République islamique s’est enfoncée dans la crise sanitaire, nombre de ces migrants, qui constituent une main-d’œuvre peu qualifiée souvent victime de discriminations, sont rentrés chez eux. Leur nombre exact n’est pas connu, mais mi-mars l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) faisait état du retour de 140 000 Afghans en provenance d’Iran. Cet afflux, parmi le plus important mouvement transfrontalier causé par la pandémie, laisse craindre le pire dans un pays ravagé par près de vingt ans de guerre et de corruption.

    30 000 migrants éthiopiens qui tentaient de rejoindre l’Arabie saoudite se sont retrouvés piégés au Yémen

    L’Arabie saoudite, où les travailleurs étrangers constituent un tiers de la population (80 % dans le secteur privé), a renvoyé chez eux des milliers d’Ethiopiens, y compris certains suspectés d’être contaminés par le Covid-19, en affrétant jusqu’à deux vols quotidiens pour Addis-Abeba. Dans les dix premiers jours d’avril, 2 968 travailleurs éthiopiens ont ainsi été ramenés dans leur pays, selon le Financial Times . Des retours « coordonnés », affirment les officiels saoudiens, alors que l’Ethiopie a demandé l’arrêt de ces déportations durant la pandémie. Dans la même période, 30 000 migrants éthiopiens qui tentaient de rejoindre l’Arabie saoudite se sont retrouvés piégés au Yémen.

    Pour sa part, Ankara a mis un frein à sa politique délibérée de déplacements de migrants vers la frontière grecque, le 13 mars, où plus de 10 000 personnes campaient selon les estimations. Selon le ministère turc de l’intérieur, 5 800 d’entre eux, pour la plupart des Afghans et quelques Syriens, ont quitté cette zone en bus à destination de centres de confinements dans neuf provinces de Turquie.

    Le Mexique a reconduit aux frontières 8 528 Guatémaltèques entre fin janvier et mars, selon l’Institut guatémaltèque de la migration, et expulsé 15 101 Honduriens, d’après le bilan fourni au 8 mars par le ministère des affaires étrangères hondurien. Côté américain, Washington autorise, depuis le 20 mars, les expulsions express – en moins de deux heures – à la frontière mexicaine pour protéger du Covid-19 ses agents. Selon la presse mexicaine, près de 7 000 clandestins mexicains et centraméricains ont ainsi été renvoyés en deux semaines. Au 25 mars, en Thaïlande, ce sont près de 60 000 migrants originaires du Cambodge, du Laos ou de Myanmar, qui ont quitté le pays après la fermeture des commerces.

    La fuite hors des villes

    C’est un phénomène connu depuis le Moyen Age : les plus aisés, du moins ceux qui en ont les moyens, fuient les villes menacées et confinées lors des grandes pandémies. « Le phénomène “résidence secondaire” – ceux qui partent vite, loin, et qui reviennent tard – a été observé notamment lors de la grande peste de Marseille de 1720 » , rappelle Isabelle Seguy, de l’Institut national des études démographiques (Ined). Un véritable mur sanitaire avait alors été constitué du Vaucluse aux Alpes, avec guérites et soldats. « Il fallait des autorisations pour passer » , souligne la spécialiste.

    Trois cents ans plus tard, les réflexes perdurent. Une scène, en particulier, est restée dans la mémoire des Italiens, celle des trains de nuit pris d’assaut en gare de Milan dans la soirée du 7 mars. Un brouillon du premier décret de confinement de la Lombardie venait de circuler, provoquant le départ massif, en quelques heures, de jeunes travailleurs pressés de rentrer chez eux, dans le Sud. On estime à 100 000 leur nombre ce soir-là.

    En Turquie, bien avant le 3 avril, jour de l’annonce des restrictions d’entrée et de sortie dans les 30 plus grosses villes du pays, près de 3 millions de citadins sont partis pour leur village d’origine ou leur résidence secondaire. Plus de 1 million de Stambouliotes ont rejoint leur lieu de villégiature sur la côte égéenne. Entre la mi-mars et le début avril, 125 000 Turcs ont par exemple gagné la ville touristique de Bodrum.

    En France, le confinement décrété le 17 mars a engendré de vastes mouvements. Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), entre 1,6 et 1,7 million de personnes ont rejoint leur département de résidence. A contrario, Paris intra-muros a perdu 11 % de sa population. Sur la base de ses propres statistiques, l’opérateur Orange estime qu’entre le 13 et le 30 mars, 1,2 million de Franciliens ont quitté la région, soit 17 % de la population du Grand Paris, tandis que celle de l’île de Ré a augmenté de 30 %.

    A New York, ce fut aussi la ruée hors de la ville. Début mars, « Big Apple » s’est vidée de nombreux habitants, partis se réfugier dans leur villégiature des Hamptons, à l’extrémité chic de Long Island, à l’est de Manhattan, dans la vallée de l’Hudson, au nord, ou sur les rivages du Maine. Aucun chiffre n’a été rendu public, mais des indicateurs confirment la tendance : les quartiers résidentiels de Manhattan sont moins touchés que d’autres par l’épidémie. La collecte d’ordures y a baissé de 5 %, alors que celle des quartiers pauvres (Queens, Staten Island) a au contraire progressé de 10 %. Cet exode des plus favorisés a été suffisamment important pour que la Maison Blanche s’inquiète d’une propagation du virus à Long Island, moins bien dotée médicalement que New York.

    Autre indicateur, à Moscou cette fois. Le vendredi 27 mars au soir, avant le début du confinement annoncé pour le lundi suivant, 750 000 voitures ont quitté la capitale russe, soit une augmentation de 15 % par rapport à la normale.

    Le départ de dizaines de milliers de Madrilènes, le 13 mars, a suscité un flot de réactions dans la presse. Des villes et villages ont érigé des barrières pour empêcher leur arrivée

    En Espagne aussi. Le départ de dizaines de milliers de Madrilènes hors de la capitale, le 13 mars, à la veille du confinement du pays, a suscité un flot de réactions dans la presse sous des titres tels que « ¡ Que vienen los Madrilenos ! » (« Les Madrilènes arrivent ! »), photos d’embouteillages à l’appui. Cette situation a poussé des villes et villages à ériger des barrières pour empêcher leur arrivée. Dans la station balnéaire de Calafell (25 000 habitants), au sud de Barcelone, des blocs de béton ont été installés et des contrôles de police instaurés à l’approche des fêtes de Pâques.

    En Australie, des mesures similaires ont été prises pour limiter les déplacements des citoyens d’un Etat à l’autre. La Tasmanie, le Territoire du Nord, le Queensland, l’Australie-Méridionale et l’Australie-Occidentale ont, durant la seconde moitié de mars, mis en place des mesures de contrôles à leurs « frontières ».

    Que dire enfin des 5 millions d’habitants de Wuhan, partis juste avant la fermeture de leur ville, le 23 janvier ? Etait-ce pour éviter l’enfermement ou pour tenter, malgré tout, de faire un voyage qu’ils avaient projeté à l’occasion du Nouvel An lunaire ? C’est ici que tout a commencé et que le balancier des déplacements repartira en sens inverse. Ou pas.

    https://www.lemonde.fr/international/article/2020/04/17/covid-19-l-exode-mondial-avant-le-confinement_6036919_3210.html
    #exode #émigration #retour_au_pays #mobilité #coronavirus #covid-19 #cartographie #visualisation #chiffres #monde #migrations

  • #Nul_homme_n'est_une_île

    ...« chaque homme est un morceau du continent, une partie de l’ensemble. » Nul Homme n’est une île est un voyage en Europe, de la Méditerranée aux Alpes, où l’on découvre des hommes et des femmes qui travaillent à faire vivre localement l’esprit de la #démocratie et à produire le #paysage du #bon_gouvernement. Des agriculteurs de la #coopérative le Galline Felici en Sicile aux architectes, artisans et élus des #Alpes suisses et du #Voralberg en #Autriche, tous font de la politique à partir de leur travail et se pensent un destin commun. Le #local serait-il le dernier territoire de l’#utopie ?


    http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=260888.html
    #agriculture #alternative #agriculture_biologique #Sicile #Italie #agrumes #Galline_felici #localisme #Suisse #commons #communs #film #documentaire #Vorarlberg #Autriche #Alpes #architecture #dignité #coopérative #aménagement_du_territoire #prix_équitable #vente_directe #exode_rural #artisanat #économie_solidaire #EES #pizzo #auto-gestion #mafia #réseau_européen #réseau #Grisons #Bregenzerwald #conscience_européenne #fierté #participation_citoyenne #fête #utopie #Bureau_des_questions_du_futur (1’18’00)

    –—

    #Zwischenwasser (#Bregenzerwald) : Nel comune hanno costruito una scuola in cui hanno aiutato benevolmente gli abitanti e richiedenti asilo
    min. 1’12’15
    #asile #réfugiés

    • “Dalla Sicilia ripartirà tutto”. #Roberto_Li_Calzi: da “Le Galline felici” agli Sbarchi Gas

      “Prodotti bio e naturali a casa vostra. Coltiviamo rispettando la natura, vendiamo rispettando la gente. Creiamo occasioni di occupazione gioiosa rispettando la dignità del lavoro. Promuoviamo lo sviluppo armonico del territorio. Sosteniamo la crescita della concorrenza perché per noi ‘concorrere’ significa correre assieme”. È questa la filosofia che anima il consorzio Le Galline Felici, ideato da Roberto Li Calzi, conosciuto e intervistato da Daniel Tarozzi a Siracusa, tra le ultime tappe del suo viaggio nell’Italia che cambia.

      Dopo diversi anni trascorsi all’estero, Roberto è tornato in Sicilia ed ha iniziato ad acquistare dagli allevamenti intensivi le galline, restituendo loro condizioni di vita dignitose. Da qui il nome “Le Galline felici”, nato ufficialmente nel settembre 2007.

      Il consorzio, che oggi mette insieme più di 15 realtà economiche, riunisce siciliani innamorati della propria terra e determinati ad agire per cambiare. Si tratta di agricoltori dediti all’agricoltura biologica, che lavorano per un’agricoltura rispettosa degli equilibri naturali e da molti anni servono numerosi Gas al centro-nord.

      Roberto Li Calzi racconta che tutto è iniziato una decina di anni fa, proprio quando è entrato in contatto con il mondo dei Gas. “Ho chiesto a mio fratello di insegnarmi ad usare il computer e ho scritto a tutti i gruppi di acquisto presenti in rete offrendo i miei prodotti, principalmente agrumi. Immediatamente hanno cominciato ad arrivare richieste dal Centro-nord. Per qualche anno ho fatto da ponte anche per i prodotti agricoli di altre aziende. Li compravo e li rivendevo senza chiedere commissioni. Ad un certo punto, quindi, creare il consorzio e sistematizzare questo processo è stato quasi naturale” (da “Io faccio così”, pag. 335).

      Da “Le Galline felici” all’associazione culturale Siqillyàh (dall’antico nome arabo della Sicilia), creata da Roberto e altri tra il 2009 ed il 2010 per sperimentare e proporre altri modi di vivere e consumare e divenuta poi una delle più importanti Reti di economia solidale nel sud Italia.

      Tra persone, Gas e altre associazioni, l’Arcipelago Siqillyàh conta oggi circa 600, soci, il 40% dei quali non è in Sicilia. Tra gli obiettivi vi è la valorizzazione dei produttori locali e delle coltivazioni tipiche siciliane. In questi anni Siqillyàh ha inoltre favorito uno scambio nord-sud: i produttori biologici ed etici siciliani creano rapporti commerciali e culturali con i Gas del centro-nord .

      Proprio in quest’ambito si colloca un’altra importante iniziativa ispirata dal lavoro di Roberto Li Calzi: gli Sbarchi Gas, un nuovo modo di vivere gli incontri nazionali di tutti i rappresentanti dei gruppi di acquisto solidale. Il primo Sbarco (il nome si deve proprio a Roberto e si riferisce all’idea di una nave di gasisti che sbarcasse proprio sulle coste siciliane) è stato nel giugno del 2009 a Petralia Sottana, in provincia di Palermo. Tre giorni di festa con concerti, balli, campeggi ed esposizioni che hanno fatto sì che l’incontro venisse ricordato come una piccola Woodstock dei Gas.

      A questo primo Sbarco Gas hanno quindi fatto seguito gli Sbarchi in Piazza e si è contribuito alla creazione della Ressud, rete di economia solidale volta a rafforzare i legami tra i soggetti solidali del Sud nell’ottica di un percorso evolutivo di tutto il movimento nazionale dell’economia solidale.

      Gli obiettivi degli Sbarchi in piazza sono molteplici:
      – dimostrare che l’economia solidale offre risposte per i problemi prodotti dalla globalizzazione e dall’esasperazione del mercato;
      – diffondere questa consapevolezza e le sue pratiche tra la gente “comune” ed in particolare a quelle fasce “contigue” al mondo dell’Economia Solidale (associazioni, ecc.)
      – accrescere il numero dei consumatori consapevoli ed allargare quindi il consumo di beni provenienti da reti di produttori solidali;
      – consentire l’accesso a questo mercato a tutti quei produttori (con le caratteristiche adeguate) finora esclusi da questo mercato;
      – favorire la riconversione colturale (verso il bio) e culturale (verso la solidarietà) dei produttori;
      – stimolare i produttori ad operare in reti e agevolare la costruzione della rete sud sud;
      – favorire il ritorno alla terra di molti giovani (e non solo) disoccupati o insoddisfatti della qualità della propria vita;
      – uscire dalla testimonianza e cominciare a fare statistica;
      – raggiungere quei numeri, quella massa critica che permetta di concretizzare quelli che finora vengono considerate utopie.

      Una molteplicità di obiettivi, dunque, riconducibili ad un unico importante valore: l’importanza della rete, nella consapevolezza che ‘concorrere’ vuol dire correre insieme.

      “Non ci interessano i singoli – afferma Roberto Li Calzi – non cerchiamo gli eroi, ci interessa la rete. Siamo un mosaico, tutti insieme formiamo un quadro, ognuno è fondamentale, ma preso da solo non ha molto significato. Noi stiamo cercando di ribaltare i paradigmi, dimostrare che con le proprie energie si può sostenere la concorrenza e guadagnarci tutti. Sono convinto che dalla Sicilia ripartirà tutto”.

      http://www.italiachecambia.org/2014/01/io-faccio-cosi-10-dalla-sicilia-ripartira-tutto-roberto-li-calzi-da

  • 2.3 million Venezuelans now live abroad

    More than 7% of Venezuela’s population has fled the country since 2014, according to the UN. That is the equivalent of the US losing the whole population of Florida in four years (plus another 100,000 people, give or take).

    The departing 2.3 million Venezuelans have mainly gone to neighboring Colombia, Ecuador, Brazil, and Peru, putting tremendous pressure on those countries. “This is building to a crisis moment that we’ve seen in other parts of the world, particularly in the Mediterranean,” a spokesman for the UN’s International Organization for Migration said recently.

    This week, Peru made it a bit harder for Venezuelans to get in. The small town of Aguas Verdes has seen as many as 3,000 people a day cross the border; most of the 400,000 Venezuelans in Peru arrived in the last year. So Peru now requires a valid passport. Until now, ID cards were all that was needed.

    Ecuador tried to do the same thing but a judge said that such a move violated freedom-of-movement rules agreed to when Ecuador joined the Andean Community. Ecuador says 4,000 people a day have been crossing the border, a total of 500,000 so far. It has now created what it calls a “humanitarian corridor” by laying on buses to take Venezuelans across Ecuador, from the Colombian border to the Peruvian border.

    Brazil’s Amazon border crossing in the state of Roraima with Venezuela gets 500 people a day. It was briefly shut down earlier this month—but that, too, was overturned by a court order.

    Venezuela is suffering from severe food shortages—the UN said more than 1 million of those who had fled since 2014 are malnourished—and hyperinflation. Things could still get worse, which is really saying something for a place where prices are doubling every 26 days. The UN estimated earlier this year that 5,000 were leaving Venezuela every day; at that rate, a further 800,000 people could leave before the end of the year (paywall).

    A Gallup survey from March showed that 53% of young Venezuelans want to move abroad permanently. And all this was before an alleged drone attack on president Nicolas Maduro earlier this month made the political situation even more tense, the country’s opposition-led National Assembly said that the annual inflation rate reached 83,000% in July, and the chaotic introduction of a new currency.

    https://www.weforum.org/agenda/2018/08/venezuela-has-lost-2-3-million-people-and-it-could-get-even-worse
    #Venezuela #asile #migrations #réfugiés #cartographie #visualisation #réfugiés_vénézuéliens

    Sur ce sujet, voir aussi cette longue compilation initiée en juin 2017 :
    http://seen.li/d26k

    • Venezuela. L’Amérique latine cherche une solution à sa plus grande #crise_migratoire

      Les réunions de crise sur l’immigration ne sont pas l’apanage de l’Europe : treize pays latino-américains sont réunis depuis lundi à Quito pour tenter de trouver des solutions communes au casse-tête migratoire provoqué par l’#exode_massif des Vénézuéliens.


      https://www.courrierinternational.com/article/venezuela-lamerique-latine-cherche-une-solution-sa-plus-grand

    • Bataille de #chiffres et guerre d’images autour de la « #crise migratoire » vénézuélienne

      L’émigration massive qui touche actuellement le Venezuela est une réalité. Mais il ne faut pas confondre cette réalité et les défis humanitaires qu’elle pose avec son instrumentalisation, tant par le pouvoir vénézuélien pour se faire passer pour la victime d’un machination que par ses « ennemis » qui entendent se débarrasser d’un gouvernement qu’ils considèrent comme autoritaire et source d’instabilité dans la région. Etat des lieux d’une crise très polarisée.

      C’est un véritable scoop que nous a offert le président vénézuélien le 3 septembre dernier. Alors que son gouvernement est avare en données sur les sujets sensibles, Nicolas Maduro a chiffré pour la première fois le nombre de Vénézuéliens ayant émigré depuis deux ans à 600 000. Un chiffre vérifiable, a-t-il assuré, sans toutefois donner plus de détails.

      Ce chiffre, le premier plus ou moins officiel dans un pays où il n’y a plus de statistiques migratoires, contraste avec celui délivré par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR). Selon ces deux organisations, 2,3 millions de Vénézuéliens vivraient à l’étranger, soit 7,2% des habitants sur un total de 31,8 millions. Pas de quoi tomber de sa chaise ! D’autres diasporas sont relativement bien plus nombreuses. Ce qui impressionne, c’est la croissance exponentielle de cette émigration sur un très court laps de temps : 1,6 million auraient quitté le pays depuis 2015 seulement. Une vague de départs qui s’est accélérée ces derniers mois et affectent inégalement de nombreux pays de la région.
      Le pouvoir vénézuélien, par la voix de sa vice-présidente, a accusé des fonctionnaires de l’ONU de gonfler les chiffres d’un « flux migratoire normal » (sic) pour justifier une « intervention humanitaire », synonyme de déstabilisation. D’autres sources estiment quant à elles qu’ils pourraient être près de quatre millions à avoir fui le pays.

      https://www.cncd.be/Bataille-de-chiffres-et-guerre-d
      #statistiques #guerre_des_chiffres

    • La formulation est tout de même étrange pour une ONG… : pas de quoi tomber de sa chaise, de même l’utilisation du mot ennemis avec guillemets. Au passage, le même pourcentage – pas si énorme …– appliqué à la population française donnerait 4,5 millions de personnes quittant la France, dont les deux tiers, soit 3 millions de personnes, au cours des deux dernières années.

      Ceci dit, pour ne pas qu’ils tombent… d’inanition, le Programme alimentaire mondial (agence de l’ONU) a besoin de sous pour nourrir les vénézuéliens qui entrent en Colombie.

      ONU necesita fondos para seguir atendiendo a emigrantes venezolanos
      http://www.el-nacional.com/noticias/mundo/onu-necesita-fondos-para-seguir-atendiendo-emigrantes-venezolanos_25311

      El Programa Mundial de Alimentos (PMA), el principal brazo humanitario de Naciones Unidas, informó que necesita 22 millones de dólares suplementarios para atender a los venezolanos que entran a Colombia.

      «Cuando las familias inmigrantes llegan a los centros de recepción reciben alimentos calientes y pueden quedarse de tres a cinco días, pero luego tienen que irse para que otros recién llegados puedan ser atendidos», dijo el portavoz del PMA, Herve Verhoosel.
      […]
      La falta de alimentos se convierte en el principal problema para quienes atraviesan a diario la frontera entre Venezuela y Colombia, que cuenta con siete puntos de pasaje oficiales y más de un centenar informales, con más de 50% de inmigrantes que entran a Colombia por estos últimos.

      El PMA ha proporcionado ayuda alimentaria de emergencia a más de 60.000 venezolanos en los departamentos fronterizos de Arauca, La Guajira y el Norte de Santander, en Colombia, y más recientemente ha empezado también a operar en el departamento de Nariño, que tiene frontera con Ecuador.
      […]
      De acuerdo con evaluaciones recientes efectuadas por el PMA entre inmigrantes en Colombia, 80% de ellos sufren de inseguridad alimentaria.

    • Migrants du Venezuela vers la Colombie : « ni xénophobie, ni fermeture des frontières », assure le nouveau président colombien

      Le nouveau président colombien, entré en fonction depuis hier (lundi 8 octobre 2018), ne veut pas céder à la tentation d’une fermeture de la frontière avec le Venezuela.


      https://la1ere.francetvinfo.fr/martinique/migrants-du-venezuela-colombie-xenophobie-fermeture-frontieres-a
      #fermeture_des_frontières #ouverture_des_frontières

    • Fleeing hardship at home, Venezuelan migrants struggle abroad, too

      Every few minutes, the reeds along the #Tachira_River rustle.

      Smugglers, in ever growing numbers, emerge with a ragtag group of Venezuelan migrants – men struggling under tattered suitcases, women hugging bundles in blankets and schoolchildren carrying backpacks. They step across rocks, wade into the muddy stream and cross illegally into Colombia.

      This is the new migration from Venezuela.

      For years, as conditions worsened in the Andean nation’s ongoing economic meltdown, hundreds of thousands of Venezuelans – those who could afford to – fled by airplane and bus to other countries far and near, remaking their lives as legal immigrants.

      Now, hyperinflation, daily power cuts and worsening food shortages are prompting those with far fewer resources to flee, braving harsh geography, criminal handlers and increasingly restrictive immigration laws to try their luck just about anywhere.

      In recent weeks, Reuters spoke with dozens of Venezuelan migrants traversing their country’s Western border to seek a better life in Colombia and beyond. Few had more than the equivalent of a handful of dollars with them.

      “It was terrible, but I needed to cross,” said Dario Leal, 30, recounting his journey from the coastal state of Sucre, where he worked in a bakery that paid about $2 per month.

      At the border, he paid smugglers nearly three times that to get across and then prepared, with about $3 left, to walk the 500 km (311 miles) to Bogota, Colombia’s capital. The smugglers, in turn, paid a fee to Colombian crime gangs who allow them to operate, according to police, locals and smugglers themselves.

      As many as 1.9 million Venezuelans have emigrated since 2015, according to the United Nations. Combined with those who preceded them, a total of 2.6 million are believed to have left the oil-rich country. Ninety percent of recent departures, the U.N. says, remain in South America.

      The exodus, one of the biggest mass migrations ever on the continent, is weighing on neighbors. Colombia, Ecuador and Peru, which once welcomed Venezuelan migrants, recently tightened entry requirements. Police now conduct raids to detain the undocumented.

      In early October, Carlos Holmes Trujillo, Colombia’s foreign minister, said as many as four million Venezuelans could be in the country by 2021, costing national coffers as much as $9 billion. “The magnitude of this challenge,” he said, “our country has never seen.”

      In Brazil, which also borders Venezuela, the government deployed troops and financing to manage the crush and treat sick, hungry and pregnant migrants. In Ecuador and Peru, workers say that Venezuelan labor lowers wages and that criminals are hiding among honest migrants.

      “There are too many of them,” said Antonio Mamani, a clothing vendor in Peru, who recently watched police fill a bus with undocumented Venezuelans near Lima.
      “WE NEED TO GO”

      By migrating illegally, migrants expose themselves to criminal networks who control prostitution, drug trafficking and other rackets. In August, Colombian investigators discovered 23 undocumented Venezuelans forced into prostitution and living in basements in the colonial city of Cartagena.

      While most migrants are avoiding such straits, no shortage of other hardship awaits – from homelessness, to unemployment, to the cold reception many get as they sleep in public squares, peddle sweets and throng already overburdened hospitals.

      Still, most press on, many on foot.

      Some join compatriots in Brazil and Colombia. Others, having spent what money they had, are walking vast regions, like Colombia’s cold Andean passes and sweltering tropical lowlands, in treks toward distant capitals, like Quito or Lima.

      Johana Narvaez, a 36-year-old mother of four, told Reuters her family left after business stalled at their small car repair shop in the rural state of Trujillo. Extra income she made selling food on the street withered because cash is scarce in a country where annual inflation, according to the opposition-led Congress, recently reached nearly 500,000 percent.

      “We can’t stay here,” she told her husband, Jairo Sulbaran, in August, after they ran out of food and survived on corn patties provided by friends. “Even on foot, we must go.” Sulbaran begged and sold old tires until they could afford bus tickets to the border.

      Venezuelan President Nicolas Maduro has chided migrants, warning of the hazards of migration and that emigres will end up “cleaning toilets.” He has even offered free flights back to some in a program called “Return to the Homeland,” which state television covers daily.

      Most migration, however, remains in the other direction.

      Until recently, Venezuelans could enter many South American countries with just their national identity cards. But some are toughening rules, requiring a passport or additional documentation.

      Even a passport is elusive in Venezuela.

      Paper shortages and a dysfunctional bureaucracy make the document nearly impossible to obtain, many migrants argue. Several told Reuters they waited two years in vain after applying, while a half-dozen others said they were asked for as much as $2000 in bribes by corrupt clerks to secure one.

      Maduro’s government in July said it would restructure Venezuela’s passport agency to root out “bureaucracy and corruption.” The Information Ministry didn’t respond to a request for comment.
      “VENEZUELA WILL END UP EMPTY”

      Many of those crossing into Colombia pay “arrastradores,” or “draggers,” to smuggle them along hundreds of trails. Five of the smugglers, all young men, told Reuters business is booming.

      “Venezuela will end up empty,” said Maikel, a 17-year-old Venezuelan smuggler, scratches across his face from traversing the bushy trails. Maikel, who declined to give his surname, said he lost count of how many migrants he has helped cross.

      Colombia, too, struggles to count illegal entries. Before the government tightened restrictions earlier this year, Colombia issued “border cards” that let holders crisscross at will. Now, Colombia says it detects about 3,000 false border cards at entry points daily.

      Despite tougher patrols along the porous, 2,200-km border, officials say it is impossible to secure outright. “It’s like trying to empty the ocean with a bucket,” said Mauricio Franco, a municipal official in charge of security in Cucuta, a nearby city.

      And it’s not just a matter of rounding up undocumented travelers.

      Powerful criminal groups, long in control of contraband commerce across the border, are now getting their cut of human traffic. Javier Barrera, a colonel in charge of police in Cucuta, said the Gulf Clan and Los Rastrojos, notorious syndicates that operate nationwide, are both involved.

      During a recent Reuters visit to several illegal crossings, Venezuelans carried cardboard, limes and car batteries as barter instead of using the bolivar, their near-worthless currency.

      Migrants pay as much as about $16 for the passage. Maikel, the arrastrador, said smugglers then pay gang operatives about $3 per migrant.

      For his crossing, Leal, the baker, carried a torn backpack and small duffel bag. His 2015 Venezuelan ID shows a healthier and happier man – before Leal began skimping on breakfast and dinner because he couldn’t afford them.

      He rested under a tree, but fretted about Colombian police. “I’m scared because the “migra” comes around,” he said, using the same term Mexican and Central American migrants use for border police in the United States.

      It doesn’t get easier as migrants move on.

      Even if relatives wired money, transfer agencies require a legally stamped passport to collect it. Bus companies are rejecting undocumented passengers to avoid fines for carrying them. A few companies risk it, but charge a premium of as much as 20 percent, according to several bus clerks near the border.

      The Sulbaran family walked and hitched some 1200 km to the Andean town of Santiago, where they have relatives. The father toured garages, but found no work.

      “People said no, others were scared,” said Narvaez, the mother. “Some Venezuelans come to Colombia to do bad things. They think we’re all like that.”

      https://www.reuters.com/article/us-venezuela-migration-insight/fleeing-hardship-at-home-venezuelan-migrants-struggle-abroad-too-idUSKCN1MP

      Avec ce commentaire de #Reece_Jones:

      People continue to flee Venezuela, now often resorting to #smugglers as immigration restrictions have increased

      #passeurs #fermeture_des_frontières

    • ’No more camps,’ Colombia tells Venezuelans not to settle in tent city

      Francis Montano sits on a cold pavement with her three children, all their worldly possessions stuffed into plastic bags, as she pleads to be let into a new camp for Venezuelan migrants in the Colombian capital, Bogota.

      Behind Montano, smoke snakes from woodfires set amid the bright yellow tents which are now home to hundreds of Venezuelans, erected on a former soccer pitch in a middle-class residential area in the west of the city.

      The penniless migrants, some of the millions who have fled Venezuela’s economic and social crisis, have been here more than a week, forced by city authorities to vacate a makeshift slum of plastic tarps a few miles away.

      The tent city is the first of its kind in Bogota. While authorities have established camps at the Venezuelan border, they have resisted doing so in Colombia’s interior, wary of encouraging migrants to settle instead of moving to neighboring countries or returning home.

      Its gates are guarded by police and officials from the mayor’s office and only those registered from the old slum are allowed access.

      “We’ll have to sleep on the street again, under a bridge,” said Montano, 22, whose children are all under seven years old. “I just want a roof for my kids at night.”

      According to the United Nations, an estimated 3 million Venezuelans have fled as their oil-rich country has sunk into crisis under President Nicolas Maduro. Critics accuse the Socialist leader of ravaging the economy through state interventions while clamping down on political opponents.

      The exodus - driven by violence, hyperinflation and shortages of food and medicines - amounts to one in 12 of the population, placing strain on neighboring countries, already struggling with poverty.

      Colombia, which has borne the brunt of the migration crisis, estimates it is sheltering 1 million Venezuelans, with some 3,000 arriving daily. The government says their total numbers could swell to 4 million by 2021, costing it nearly $9 billion a year.

      Municipal authorities in Bogota say the camp will provide shelter for 422 migrants through Christmas. Then in mid January, it will be dismantled in the hope jobs and new lodgings have been found.


      https://www.reuters.com/article/us-venezuela-migration-colombia/no-more-camps-colombia-tells-venezuelans-not-to-settle-in-tent-city-idUSKCN

      #camps #camps_de_réfugiés #tentes #Bogotá #Bogotà

    • Creativity amid Crisis: Legal Pathways for Venezuelan Migrants in Latin America

      As more than 3 million Venezuelans have fled a rapidly collapsing economy, severe food and medical shortages, and political strife, neighboring countries—the primary recipients of these migrants—have responded with creativity and pragmatism. This policy brief explores how governments in South America, Central America, and Mexico have navigated decisions about whether and how to facilitate their entry and residence. It also examines challenges on the horizon as few Venezuelans will be able to return home any time soon.

      Across Latin America, national legal frameworks are generally open to migration, but few immigration systems have been built to manage movement on this scale and at this pace. For example, while many countries in the region have a broad definition of who is a refugee—criteria many Venezuelans fit—only Mexico has applied it in considering Venezuelans’ asylum cases. Most other Latin American countries have instead opted to use existing visa categories or migration agreements to ensure that many Venezuelans are able to enter legally, and some have run temporary programs to regularize the status of those already in the country.

      Looking to the long term, there is a need to decide what will happen when temporary statuses begin to expire. And with the crisis in Venezuela and the emigration it has spurred ongoing, there are projections that as many as 5.4 million Venezuelans may be abroad by the end of 2019. Some governments have taken steps to limit future Venezuelan arrivals, and some receiving communities have expressed frustration at the strain put on local service providers and resources. To avoid widespread backlash and to facilitate the smooth integration of Venezuelans into local communities, policymakers must tackle questions ranging from the provision of permanent status to access to public services and labor markets. Done well, this could be an opportunity to update government processes and strengthen public services in ways that benefit both newcomers and long-term residents.

      https://www.migrationpolicy.org/research/legal-pathways-venezuelan-migrants-latin-america

    • Venezuela: Millions at risk, at home and abroad

      Venezuela has the largest proven oil reserves in the world and is not engulfed in war. Yet its people have been fleeing on a scale and at a rate comparable in recent memory only to Syrians at the height of the civil war and the Rohingya from Myanmar.

      As chronicled by much of our reporting collected below, some three to four million people have escaped the economic meltdown since 2015 and tried to start afresh in countries like Brazil, Colombia, Ecuador, and Peru. This exodus has placed enormous pressure on the region; several governments have started making it tougher for migrants to enter and find jobs.

      The many millions more who have stayed in Venezuela face an acute humanitarian crisis denied by their own government: pervasive hunger, the resurgence of disease, an absence of basic medicines, and renewed political uncertainty.

      President Nicolás Maduro has cast aside outside offers of aid, framing them as preludes to a foreign invasion and presenting accusations that the United States is once again interfering in Latin America.

      Meanwhile, the opposition, led by Juan Guaidó, the president of the National Assembly, has invited in assistance from the US and elsewhere.

      As aid becomes increasingly politicised, some international aid agencies have chosen to sit on the sidelines rather than risk their neutrality. Others run secretive and limited operations inside Venezuela that fly under the media radar.

      Local aid agencies, and others, have had to learn to adapt fast and fill the gaps as the Venezuelan people grow hungrier and sicker.

      https://www.irinnews.org/special-report/2019/02/21/venezuela-millions-risk-home-and-abroad
      #cartographie #visualisation

    • Leaving Home Through a Darkened Border

      I’m sitting on the edge of a boat on the shore of the Grita river, a few kilometers from the Unión bridge. The border between San Antonio del Tachira (Venezuela) and Cucuta (Colombia), one of the most active in Latin America, is tense, dark and uneasy. I got there on a bus from Merida, at around 4:00 a.m., and people were commenting, between WhatsApp messages and audios, that Maduro had opened the border, closed precisely the last time I went through in a violent haze.

      Minutes after I got off the bus, I could see hundreds standing in an impossible queue for the Venezuelan immigration office, at Boca de Grita. Coyotes waited on motorbikes, telling people how much cheaper and faster it’d be if they paid to cross through the side trail. I approached the first motorbike I saw, paid 7,000 Colombian pesos (a little over $2) and sleepily made my way through the wet, muddy paths down to the river.
      Challenge 1: From Merida to the border

      Fuel shortages multiplied the bus fares to the border in less than a month; the few buses that can still make the trip are already malfunctioning. The lonely, dark roads are hunting grounds for pirates, who throw rocks at car windows or set up spikes on the pavement to blow tires. Kidnapping or robberies follow.

      The bus I was in stopped several times when the driver saw a particularly dark path ahead. He waited for the remaining drivers traveling that night to join him and create a small fleet, more difficult to attack. The criminals are after what travelers carry: U.S. dollars, Colombian pesos, Peruvian soles, gold, jewelry (which Venezuelans trade at the border for food or medicine, or a ride to Peru or Chile). “It’s a bad sign to find a checkpoint without soldiers,” the co-driver said, as he got off to stretch his legs. “We’ll stop here because it’s safe; we’ll get robbed up ahead.” Beyond the headlights, the road was lost in dusk. This trip usually takes five hours, but this time it took seven, with all the stops and checkpoints along the way.
      Challenge 2: Across the river from Venezuela to Colombia

      Reaching the river, I noticed how things had changed since the last time I visited. There was no trace of the bottles with smuggled fuel, barrels, guards or even containers over the boats. In fact, there weren’t even that many boats, just the one, small and light, pushed by a man with a wooden stick through muddy waters. I was the only passenger.

      The paracos (Colombian paramilitaries) were in a good mood. Their logic is simple: if Maduro opened the border, lots of people would try to cross, but since many couldn’t go through the bridge due to the expensive bribes demanded by the Venezuelan National Guard and immigration agents, this would be a good day for trafficking.

      The shortage of fuel in states like Tachira, Merida and Zulia destroyed their smuggling of incredibly cheap Venezuelan fuel to Colombia, and controlling the irregular crossings is now the most lucrative business. Guerrillas and paracos have been at it for a while, but now Venezuelan pro-Maduro colectivos, deployed in Tachira in February to repress protests, took over the human trafficking with gunfire, imposing a new criminal dynamic where, unlike Colombian paramilitaries, they assault and rob Venezuelan migrants.

      A woman arrives on a motorbike almost half an hour after me, and comes aboard. “Up there, they’re charging people with large suitcases between 15,000 and 20,000 pesos. It’s going to be really hard to cross today. People will grow tired, and eventually they’ll come here. They’re scared because they’ve heard stories, but everything’s faster here.”

      Her reasoning is that of someone who has grown accustomed to human trafficking, who uses these crossings every day. Perhaps she’s missing the fact that, in such a critical situation as Venezuela’s in 2019, most people can no longer pay to cross illegally and, if they have some money, they’d rather use it to bribe their way through the bridge. The binational Unión bridge, 60 km from Cucuta, isn’t that violent, making it the preferred road for families, pregnant women and the elderly.

      Coyotes get three more people on the boat, the boatman sails into the river, turns on the rudimentary diesel engine and, in a few minutes, we’re on the other side. It’s not dawn yet and I’m certain this is going to be a very long day.

      “I hope they remove those containers from the border,” an old man coming from Trujillo with a prescription for insulin tells me. “I’m sure they’ve started already.” After the failed attempt to deliver humanitarian aid in February, the crossing through the bridges was restricted to all pedestrians and only in a few exceptions a medical patient could be let through (after paying the bribe). The rest still languishes on the Colombian side.
      Challenge 3: Joining the Cucuta crowd

      I finally reach Cucuta and six hours later, mid-afternoon, I meet with American journalist Joshua Collins at the Simón Bolívar bridge. According to local news, about 70,000 people are crossing it this Saturday alone.

      The difference with what I saw last time, reporting the Venezuela Live Aid concert, is astounding: the mass of Venezuelans lifts a cloud that covers everything with a yellowish, dirty and pale nimbus. The scorching desert sunlight makes everyone bow their heads while they push each other, crossing from one side to the other. There’s a stagnant, bitter smell in the air, a kind of musk made of filth, moisture and sweat.

      Joshua points to 20 children running barefoot and shirtless after cabs and vehicles. “Those kids wait here every day for people who want to cross in or out with packs of food and merchandise. They load it all on their shoulders with straps on around their heads.” These children, who should be in school or playing with their friends, are the most active carriers nowadays, working for paramilitaries and colectivos.

      The market (where you can buy and sell whatever you can think of) seems relegated to the background: what most people want right now is to cross, buy food and return before nightfall. The crowd writhes and merges. People shout and fight, frustrated, angry and ashamed. The Colombian police tries to help, but people move how they can, where they can. It’s unstoppable.

      The deepening of the complex humanitarian crisis in the west, plus the permanent shortage of gasoline, have impoverished migrants to a dangerous degree of vulnerability. Those who simply want to reach the border face obstacles like the absence of safe transportation and well-defined enemies, such as the human trafficking networks or the pro-Maduro criminal gangs controlling the roads now. The fear of armed violence in irregular crossings and the oppressive tendencies of the people controlling them, as well as the growing xenophobia of neighboring countries towards refugees, should be making many migrants wonder whether traveling on foot is a good idea at all.

      Although the border’s now open, the regime’s walls grow thicker for the poor. This might translate into new internal migrations within Venezuela toward areas less affected by the collapse of services, such as Caracas or the eastern part of the country, and perhaps the emergence of poor and illegal settlements in those forgotten lands where neither Maduro’s regime, nor Iván Duque’s government hold any jurisdiction.

      For now, who knows what’s going to happen? The sun sets over the border and a dense cloud of dust covers all of us.

      https://www.caracaschronicles.com/2019/06/11/leaving-home-through-a-darkened-border

  • Estonie : bus gratuits sur l’ensemble du pays, une première européenne - Sciencesetavenir.fr
    https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/estonie-bus-gratuits-sur-l-ensemble-du-pays-une-premiere-europeenne

    « Nous cherchions comment animer les régions rurales, arrêter l’exode vers les villes », a indiqué à l’AFP Mme Simson, soulignant que le programme est le fruit de discussions entre le gouvernement central et les comtés.

    « Au niveau d’un comté, le transport gratuit par bus vise principalement à créer des possibilités pour la #mobilité des habitants des régions rurales, afin de leur garantir l’accès aux services quotidiens », a-t-elle précisé.

    #transport #ruralité #égalité

  • Les #enfants_volés de #La_Réunion

    De 1966 à 1982, l’Etat français a transféré vers la métropole, 2 150 enfants réunionnais. Des bébés ou des adolescents, arrachés à leur famille, parfois sans consentement, pour aller repeupler des départements de métropole touchés par l’#exode_rural. En dépit des promesses qui avaient été faites, ces enfants n’ont jamais revu leurs parents biologiques. Ils ont été adoptés.
    Un scandale d’Etat, dont le gouvernement a pris la mesure depuis 2014. Fin février, début mars 2018, la Commission nationale mise en place pour faire la lumière sur ce drame doit rendre son rapport final.
    En décembre 2017, Valérie Andanson, de la Fédération des enfants déracinés, Maryse Ferragut et Marlène Morin sont retournées parfois, pour la première fois, sur leur île natale. Un voyage à la recherche de leurs origines.

    http://www.rfi.fr/emission/20180122-reunion-ile-enfants-voles-parents-metropole-exode-rural-commission-rapp
    #enfance #enfants #mineurs #démographie #repeuplement #adoption #Enfants_de_la_Creuse #France #colonialisme #colonisation

  • Rural Albania, the bet of those who stay

    Wild, untamed mountains, poverty, and massive depopulation. In the villages of northern Albania, some resist the temptation to escape to the city and hope for a new beginning, made of sustainable rural development and alternative tourism. Our report


    https://www.balcanicaucaso.org/eng/Areas/Albania/Rural-Albania-the-bet-of-those-who-stay-184918

    #Albanie #dépopulation #ceux_qui_restent #exode_rural #tourisme #alternatives #résistance #montagnes #celleux_qui_restent