Procès du père accusé d’avoir poussé sa fille du haut du pont de Saint-Nazaire : le petit ami témoigne
▻https://actu.fr/pays-de-la-loire/saint-nazaire_44184/proces-du-pere-accuse-davoir-pousse-sa-fille-du-haut-du-pont-de-saint-nazaire-l
Le père de famille de Donges (Loire-Atlantique) accusé d’avoir poussé sa fille du haut du pont de Saint-Nazaire il y a bientôt deux ans est jugé depuis mardi 13 mai 2025 par la cour d’assises de la Loire-Atlantique pour « meurtre », et non plus pour « assassinat » comme cela avait été initialement envisagé. Même si la « préméditation » du crime a été écartée, Ozkan X – aujourd’hui âgé de 47 ans et toujours en détention provisoire à ce jour – encourt toutefois « 30 ans de réclusion criminelle » a bien rappelé mercredi 14 mai la présidente de la cour d’assises au deuxième jour de son procès.
« Projetée dans la Loire »
Pour rappel, sa fille de 18 ans avait chuté du pont de Saint-Nazaire peu après 16 h, le mardi 28 juin 2023 : quelques minutes plus tôt, les quatre agents présents au poste de sécurité avaient aperçu « un véhicule s’arrêter au milieu des voies ».
« Deux personnes en étaient descendues » et « la première avait saisi la seconde par la jambe alors que cette dernière avait commencé à enjamber la balustrade », avaient-ils témoigné.
Des gendarmes qui revenaient d’un exercice de tir avaient aussi assisté à la scène.
La jeune femme – qui vivait à Donges avec sa sœur cadette et ses parents – aurait en fait été « projetée dans la Loire », ce qui avait occasionné sa « chute mortelle », « 70 mètres plus bas », à une vitesse proche des « 110 km/h ».
Son père avait à son tour « franchi la balustrade » pour « sauter », mais il avait été « raisonné par un gendarme arrivé entre-temps ».
Tous deux revenaient en fait du Pellerin, où la jeune femme avait passé la nuit chez son petit ami avec l’autorisation de ses parents à condition qu’elle soit « à l’heure » le lendemain matin à « une formation à l’Afpa ».
Mais Selen X ne s’était « pas réveillée » et avait dû affronter ce père « colérique » quand celui-ci était venu la chercher à 15 h chez Mohamed X.
La jeune femme avait en réalité « mal au ventre et à la tête » et avait pris « du Doliprane dans des quantités importantes » la veille au soir après s’être « embrouillée » avec son petit ami, a relaté ce dernier mardi à la barre de la cour d’assises.
Un petit ami violent
Il a été extrait pour l’occasion de la maison d’arrêt de Nantes : il est en détention depuis « un an et deux mois » pour avoir pris part à un trafic de stupéfiants, avec son frère aîné et plusieurs de leurs amis, sur leur commune du Pellerin.
Mohamed X aurait aussi pu frapper ce soir-là Selen : le médecin légiste qui a examiné le cadavre de la jeune fille a relevé des « blessures au niveau des bras » et « des lésions plus anciennes ».
Or le jeune homme avait déjà été condamné pour « violences » sur sa petite amie par le tribunal correctionnel de Nantes…
La jeune fille avait en effet été vue le 16 avril 2022 en train de sortir « avec difficulté » d’une voiture avec « le visage en sang » à Saint-Sébastien-sur-Loire ; elle avait réussi à « prévenir une passante » pendant que son petit ami âgé aujourd’hui de 23 ans disparaissait.
Elle avait alors raconté avoir reçu « des gifles » et « des coups de poing » après une nouvelle « dispute » avec Mohamed X pour « des messages qu’elle avait reçus d’autres garçons ».
Par le passé, il l’avait déjà « traînée dans les escaliers » et « frappée » après qu’elle ait « dit bonjour à un garçon à Saint-Nazaire », avait raconté cette élève en « Métiers de la mode » au lycée Heinlex qui avait alors « peur de se retrouver dans la rubrique des féminicides » de la presse locale.
Un mystérieux SMS « Papa va me tuer »
Dans ce contexte, Ozkan X accusait donc le petit ami de sa fille d’être à l’origine de sa déscolarisation, de ses fugues et de sa consommation de stupéfiants.
Il était donc venu chercher sa fille au Pellerin en étant « très énervé », avec « un regard perçant » et en étant « plus froid que d’habitude » selon son « gendre ».
Le père de famille aurait alors promis de « tuer » Selen, a affirmé Mohamed X :
« Ces mots sont bien sortis de sa bouche, ce sont même les seuls souvenirs que j’ai de ce jour-là. »
Dans ces conditions, le jeune homme était « en panique » après le départ de sa petite amie et de son père à bord de leur Citroën Berlingo.
Il avait donc multiplié les SMS à Selen pour la supplier de le recontacter et en finissant de lui demander si elle était toujours « en vie ».
La mère de la jeune fille avait d’ailleurs reçu, toujours aux alentours de 15 h, un message « Papa va me tuer » en provenance du téléphone portable de sa fille.
Accusation d’attouchements
Mais son mari accuse encore aujourd’hui leur ex-gendre d’en avoir été l’auteur, juste avant son départ du Pellerin.
Mohamed X s’est toutefois dit « sûr » ce mercredi 14 mai 2025 de n’avoir « pas envoyé » ce macabre SMS depuis le téléphone portable de sa petite amie : il pense que Selen a dû l’expédier dans les secondes qui ont précédé l’arrivée de son père au Pellerin.
Depuis, les deux hommes ont eu l’occasion de « se croiser une fois » à la maison d’arrêt de Nantes, a expliqué le jeune délinquant du Pellerin.
En revanche il y a eu « des soucis » entre son frère aîné et son ex-beau-père car le premier aurait « fait courir le bruit » auprès de leurs codétenus que Ozkan X avait « violé sa fille ».
Sur ce point, Mohamed X a affirmé publiquement mercredi aux jurés que sa petite amie lui avait confirmé « un an avant » sa mort qu’elle avait subi les « attouchements » de son père.
La présidente de la cour d’assises de la Loire-Atlantique lui a alors demandé s’il était « sûr » de ce qu’il avançait : Selen X avait révélé à l’âge de 13 ans avoir été victime d’agressions sexuelles, mais de son grand-père maternel…
« Oui oui, j’ai bien compris que c’était par son père et par son grand-père. »
Mohamed X
De son côté, Ozkan X ne cesse de répéter qu’il a « fait tout ce qu’il pouvait » pour sauver sa « princesse » de sa lente dérive psychologique.
« Personne ne doute ici de l’amour que vous avez pu avoir pour votre fille, monsieur », lui a dit à ce sujet la présidente de la cour d’assises.
« Mais quand elle dénonce des faits d’agression sexuelle, elle est mineure et il ne se passe rien… Son petit ami la frappe, elle est toujours mineure et il ne se passe toujours rien. Pourquoi n’avez-vous donc pas déposé plainte quand vous la voyez rentrer blessée ? »
Verdict lundi
Sur ce point, l’accusé a affirmé avoir « emmené à la gendarmerie » sa fille pour dénoncer les agressions sexuelles de son propre beau-père mais ne pas avoir été « pris au sérieux ».
« Ils m’ont dit qu’ils avaient pris note de ce que j’avais dit, qu’ils m’avaient écouté mais que ma fille n’était pas la seule dans ce cas », a résumé le père de famille d’origine turque par l’intermédiaire de son interprète.
Concernant les violences conjugales du petit ami de sa fille, il aurait renoncé à porter plainte après des « menaces » de la mère de Mohamed X :
« Elle m’a parlé pendant une heure, en me disant qu’il allait se passer des choses graves si je ne retirais pas ma plainte. »
« Par contre, ma femme est allée porter plainte. » Mais celle-ci a été « classée sans suites », a-t-on appris ce mardi.
La cour d’assises de la Loire-Atlantique a prévu de rendre son verdict ce lundi 19 mai 2025.
Agence PressPepper