• BALLAST | Rachida Brahim : « Mettre en lumière les crimes racistes, c’est nettoyer nos maisons »
    https://www.revue-ballast.fr/rachida-brahim-mettre-en-lumiere-les-crimes-racistes-cest-nettoyer-nos

    Durant sept ans, #Rachida_Brahim, doc­teure en socio­lo­gie, a exa­mi­né 731 #crimes_racistes — des attaques ou des meurtres com­mis de 1970 à 1997, en France conti­nen­tale. Ce minu­tieux tra­vail d’en­quête est deve­nu un livre, La Race tue deux fois : il vient de paraître aux édi­tions Syllepse. La notion de « #classe » révèle l’ordre hié­rar­chique socio-éco­no­mique qui archi­tec­ture l’en­semble de la socié­té ; celle de « genre » met au jour les rap­ports sociaux à l’œuvre entre les sexes ; celle de « race » explique, en tant que construc­tion his­to­rique, les #inéga­li­tés, #dis­cri­mi­na­tions et pro­cé­dés déshu­ma­ni­sants qui frappent les groupes mino­ri­taires. Penser la façon dont les trois s’en­tre­lacent porte un nom bien connu dans les mondes mili­tants et aca­dé­miques : l’#in­ter­sec­tion­na­li­té — un nom que le ministre de l’Éducation natio­nale, Jean-Michel Blanquer, a, tout à son intel­li­gence, récem­ment assi­mi­lé aux « inté­rêts des isla­mistes ». Pour com­prendre l’his­toire des crimes racistes et l’im­pu­ni­té dont leurs auteurs conti­nuent de béné­fi­cier, Rachida Brahim est for­melle : il faut ques­tion­ner les logiques raciales propres à notre ordre social. Nous l’a­vons rencontrée.

    #racisme

    • Plein de choses intéressantes dans cet article, mais entre autres à rajouter au dossier sur les #statistiques sur les assassinats policiers, principalement en #France mais aussi dans d’autres pays :
      https://seenthis.net/messages/601177

      #Violence_policière #Violences_policières #brutalité_policière #Assassinats_policiers #racisme #racisme_d_Etat #justice #impunité
      –------------------------------
      Aussi sur le racisme à l’ #Université

      Cette mise en abyme, je l’ai vécue lors de ma soutenance de thèse : mon directeur de thèse et le président du jury m’ont expliqué que j’étais « hors-sujet ». D’après eux, le fait que je sois moi-même d’origine algérienne m’aurait empêchée de prendre de la distance avec le sujet. Car, si j’y étais parvenue, j’aurais compris que toute ces histoires de crimes n’étaient qu’une affaire de classe… Ce qu’on me demandait, en somme, c’était de nier les données d’archives, la parole des enquêtés et ma propre pensée pour demeurer, comme eux, aveugle à la race. Nous serions pourtant un certain nombre à être sincèrement ravis d’apprendre que c’en est vraiment fini de la race… Mais c’est intéressant, parce que ça confirme ce que Bourdieu, Passeron ou Foucault ont démontré il y a bien 50 ans maintenant, à savoir que l’Université, c’est l’École. Et c’est d’abord une institution étatique au même titre que la Police ou la Justice. Elle fait ce que l’État attend d’elle. Son but n’est pas de produire du savoir pour améliorer radicalement la société mais de maintenir une pensée dominante qui profite à l’ordre établi. Ce que l’Université évalue, ce n’est pas votre capacité à penser depuis votre propre densité mais votre capacité à vous soumettre.

      Puisqu’elle en parle, son directeur de thèse était #Laurent_Mucchielli et son jury de thèse en 2017 était composé de #Stéphane_Beaud (président du jury, qui refuse de croire au racisme et pense que ce ne sont que des histoires de classe...), #Françoise_Lorcerie, #Patrick_Simon, #Christian_Rinaudo, #Nacira_Guénif_Souilamas
      https://www.theses.fr/2017AIXM0163

      En France, entre les années 70 et fin 90, alors que la notion de crime raciste occupait fréquemment la sphère militante et médiatique, elle ne constituait pas une catégorie juridique dans la sphère judiciaire. La mésentente concernant le traitement des crimes racistes semble trouver son origine dans le fait que deux conceptions d’une même réalité ont pu coexister pendant une trentaine d’années : la réalité du groupe concerné par ces violences d’une part et celle émanant du droit étatique d’autre part. Alors que pour les premiers, le caractère raciste des violences ne faisait aucun doute, pour les parlementaires l’idée même d’un mobile raciste a régulièrement été rejetée. D’un point de vue législatif, il a fallu attendre l’année 2003 pour que la France adopte une loi permettant de prendre en compte l’intention raciste d’un crime. Depuis cette date, sous certaines conditions, le mobile raciste peut constituer une circonstance aggravante dans les infractions de type criminel. Cette thèse s’intéresse à ces deux vérités et aux circonstances qui ont déterminé leur existence. Elle vise notamment à interroger le rôle joué par le droit étatique dans la production et le maintien des catégories ethnoraciales par delà la politisation des violences qui en résultent. D’un point de vue empirique, l’enquête a consisté à confronter la parole des militants ayant dénoncé une double violence, celle provoquée par les agressions d’une part et celle induite par leur traitement pénal d’autre part, à un ensemble de sources archivistiques émanant des services du ministère de l’Intérieur et du Parlement. D’un point de vue théorique, les apports de la sociologie et de l’histoire de l’immigration ont été complétés en intégrant les réflexions des théories de l’ethnicité et de la Critical Race Theory. En définitive, cette recherche met en évidence le fait que l’universalisme républicain fait partie intégrante du processus de racialisation. En revenant sur les dispositions majeures de la politique d’immigration et sur la figure stigmatique de l’homme arabe, un premier axe s’intéresse à la manière dont le droit étatique a particularisé une catégorie d’individus en participant à la production des catégories ethnoraciales. Un deuxième axe vise à caractériser les crimes racistes qui ont été dénoncés entre les années 70 et fin 90. Un dernier axe enfin étudie la carrière juridique du mobile raciste durant cette même période. Il expose la manière dont la législation antiraciste a invisibilisé la question des crimes racistes et maintenu les catégories ethnoraciales en appliquant des règles universelles à des groupes qui ont auparavant été différenciés.

    • La race tue deux fois

      « De telles listes sont dressées depuis les années 1970. Compilées par plusieurs générations de militants, elles sont enfouies dans les caves des archives associatives et présentent toutes le même format, à la fois sec et funeste. On y trouve la date du crime, le nom de la victime, suivis d’une ou deux phrases laconiques. Elles frappent par leur rudesse, leur longueur et leur nombre. Poser une liste conduit inexorablement à en trouver une autre quelques jours plus tard. Ces listes expriment l’idée d’une #injustice. Elles dénoncent le racisme et l’#impunité du racisme. Elles pointent du doigt les crimes, mais également la grande majorité des #procès qui ont fini par des peines légères avec sursis ou des acquittements, quand ce n’est pas un non-lieu qui est venu clore l’affaire.

      Elles disent en substance que la #racialisation, autrement dit le fait de placer des personnes dans une catégorie raciale afin d’asseoir un #rapport_de_pouvoir et d’en tirer profit, tue deux fois. La première #violence touche à l’#intégrité_physique de la personne. La seconde violence a lieu à l’échelle institutionnelle. Elle est une conséquence du #traitement_pénal qui ignore la nature raciste des crimes jugés. »

      De la grande vague de violence de #1973 dans le sud de la #France aux #crimes_policiers des années 1990 en passant par les crimes racistes jalonnant les années 1980, cet ouvrage, issu d’une #base_de_données de plus de 700 cas, nous invite à prendre la mesure de cette histoire à l’heure où le #racisme_institutionnel et l’action de la #police continuent chaque année à être à l’origine de nombreux #morts.

      https://www.syllepse.net/la-race-tue-deux-fois-_r_65_i_821.html
      #livre #histoire

  • #LRPR. Le retour du #délit_d’entrave dans les #universités et autres immondices législatives

    UPDATE 1/2/2021 : L’#amendement#1255 (délit d’entrave) a été déclaré recevable par les services de l’Assemblée. Il sera donc bien discuté, quelque part entre demain soir et jeudi-vendredi selon la vitesse d’avancement des débats. Compte tenu du nombre d’amendements, leur discussion va aller très vite : il y a un réel danger qu’il soit adopté.

    Et c’est reparti pour un tour. Ce lundi 1er février à partir de 16h, l’Assemblée nationale commence la discussion en hémicycle du projet de loi confortant le respect des principes républicains (LRPR), tel qu’il a été amendé après plusieurs semaines de débats en commission.

    Academia a déjà lancé l’alerte sur le fait qu’il existe un vrai risque pour que l’enseignement supérieur et la recherche soient directement intégrés dans ce texte, qui est un grand fourre-tout liberticide, articulé autour de l’idée d’une lutte finale, qui serait actuellement en cours, entre la République, d’un côté, et « l’idéologie séparatiste », de l’autre côté.

    Rappelons que quelques universitaires poussent fort en ce sens, en particulier du côté de Vigilance Universités et de l’ « Observatoire du décolonialisme et des idéologies identitaires » tout récemment créé en partenariat avec Le Point. Pour la droite et l’extrême droite parlementaires, ces collectifs possédant leur rond de serviette au Point sont du pain-béni : ils seraient la preuve d’un appel à l’aide, qui proviendrait des tréfonds d’une communauté universitaire terrorisée par les ayatollahs américanisés du genre, de la race, de l’islamisme, du décolonialisme, de l’intersectionnalité (nous ne caricaturons pas : nous en sommes à ce niveau de discours, désormais…), pour que le législateur intervienne dans ces territoires perdus de la République que seraient devenues les universités.

    C’est pourquoi de nombreux amendements concernant l’ESR avaient été déposés il y a trois semaines par les Républicains. Jusqu’ici, toutes ces tentatives ont lamentablement échoué : clairement, la majorité gouvernementale ne souhaite pas rouvrir un front du côté des universités, même si, dans le même temps, certains députés de premier plan de la République en marche donnent crédit au discours – forgé, rappelons-le, dans les rangs de l’extrême droite – selon lequel il existerait dans les universités une

    « montée inquiétante de l’idéologie portant le racialisme, portant le séparatisme racial, portant l’indigénisme, le décolonialisme » (Eric Poulliat, rapporteur de la loi).

    Il était évidemment naïf de croire qu’on s’en tiendrait là, tout comme il est naïf de penser qu’on viendra à bout de ces idées en les ignorant, comme semblent le croire un certain nombre de chefs d’établissements d’enseignement supérieur. De façon peu surprenante, une nouvelle vague d’amendements concernant l’ESR a été déposée ces tout derniers jours. Très rapide tour d’horizon à chaud, avant examen, nous l’espérons, plus approfondi.

    Le nouveau délit d’entrave

    On remarquera d’abord que le « délit d’entrave » de la loi de programmation de la recherche tente de faire son grand retour, après sa censure par le Conseil constitutionnel le 21 décembre dernier1, ce qui était à craindre, puisque le Conseil constitutionnel avait fait le choix de ne pas le censurer sur le fond, mais pour de simples raisons de procédure parlementaire. C’est le sens de l’amendement n° 1255 des députés Benassaya et Therry, qui proposent d’ajouter l’alinéa suivant à l’article 431-1 du code pénal :

    « Le fait d’entraver ou de tenter d’entraver, par des pressions ou des insultes sur les enseignants universitaires, l’exercice des missions de service public de l’enseignement supérieur est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »

    C’est exactement ce contre quoi la communauté universitaire s’était élevée pendant les débats sur la LPR : une grande pénalisation de l’enseignement supérieur à partir d’une infraction largement indéfinie et permettant l’intervention des forces de police à l’intérieur des campus sans autorisation des présidences d’université, et ce, au nom, nous dit l’exposé sommaire de l’amendement, de « la libre expression et l’indépendance des enseignants-chercheurs ». « Entrave », par la voie de « pressions », à « l’exercice des missions de service public de l’enseignement supérieur » : les blocages sont évidemment concernés, mais plus généralement toute forme de chahut dans les établissements, qu’il s’agisse d’un débat un peu animé ou d’un conseil d’administration interrompu2
    L’interdiction du voile à l’université

    Cinq amendements des Républicains (les n° 20, 203, 878, 1152 et 1613) et un du Rassemblement national (le n° 1645) concernent le port du voile à l’université, en dépit du net rejet des précédentes tentatives de la mi-janvier. On ne reviendra pas à nouveau sur ce point : donner suite à une telle proposition, alors que nous sommes en présence d’étudiant·es majeur·es et responsables, c’est, d’abord, ouvrir grand la porte à la restriction générale des convictions dans l’espace public ; c’est, ensuite, restreindre de manière considérable le droit d’accès à l’enseignement supérieur ; c’est, enfin, porter une atteinte forte aux libertés académiques, dont, rappelons-le, les étudiant·es sont aussi titulaires au titre des « franchises universitaires » qui leur accordent une liberté d’expression particulièrement protégée dans les campus.

    Hors ces deux séries d’amendements, on retrouve par ailleurs toutes les mesures dont l’introduction avait déjà été tentée en commission par les Républicains. Citons pêle-mêle :

    L’obligation de remise dans les six mois d’un rapport sur « les dérives idéologiques dans les établissements d’enseignement supérieur » (amendements n° 138, 756 et 1831), dans la lignée de la demande, en novembre dernier, d’une mission d’information sur le sujet par les députés Aubert et Abad.
    Une succession de mesures néo-vichystes, telles que l’obligation pour chaque établissement d’enseignement supérieur de « propose[r] à l’ensemble des étudiants de participer aux commémorations nationales et veille[r] à ce qu’il soit organisé, sur le temps universitaire, la lecture du message du chef de l’État et du ministre chargé des anciens combattants » (amendement n° 2085) ou l’organisation dans ces mêmes établissements, « à chaque rentrée scolaire », d’« un serment à la Constitution et au drapeau pour l’ensemble de la communauté éducative, des élèves et des étudiants » (amendement n° 2078).
    La mise en place, à la demande de la quasi-intégralité des députés Les Républicains, d’ « enquêtes administratives » avant tout recrutement dans l’éducation nationale et l’enseignement supérieur, afin d’identifier celle ou celui qui « adhérerait manifestement à des thèses antirépublicaines » (amendements n° 793 et 1454).
    La subordination des subventions aux projets étudiants « à la participation des représentants des associations sollicitant ces aides aux formations sur la prévention et la lutte contre le séparatisme que leur établissement d’enseignement supérieur organise annuellement » (amendement n° 1174).
    La possibilité de mettre en place, autour d’un « référent laïcité », « un comité de sûreté en relation permanente avec le responsable de l’administration, de la collectivité ou de l’établissement public dont il dépend afin de l’assister dans ses missions » (amendement n° 1169), parce que, nous explique l’exposé sommaire, les universités sont « particulièrement prises au dépourvu face au séparatisme qui s’attaque à elle ».

    On signalera en outre l’amendement n° 2300, qui vient, cette fois, des rangs centristes et qui témoigne d’une volonté d’une véritable reprise en main des universités par l’État : il est proposé d’étendre le pouvoir dont disposent aujourd’hui les recteurs de suspendre les décisions des universités à toutes les décisions qui leur paraissent contraires « au principe de neutralité du service public ».

    Il y aurait tellement à dire encore : nous nous en tiendrons là en ce dernier dimanche de janvier 2021.

    Ajoutons pourtant, au titre de ce premier panorama, que certains députés proposent d’étendre aux syndicats le pouvoir de dissolution des associations, en visant directement le syndicat Sud Education 93 (amendement n° 1923). Et on aura compris que nous nous trouvons à un vrai tournant : toutes les barrières sont en train de tomber. Elles sont en train de tomber non pas du côté de groupuscules extrémistes, mais au sein de partis dits « de gouvernement », appelés à exercer le pouvoir d’État à plus ou moins brève échéance et qui sont intimement persuadés, désormais, que les universités sont devenues anti-républicaines.

    Cela ne sort pas de nulle part. Une poignée de collègues irresponsables — moins d’une centaine sur une population d’enseignant∙es-chercheurs et chercheuses de plus de 100 000 personnes — attise le feu, en coulisses et publiquement, et ce depuis le 30 mars 2018 au moins, à force de manifestes de 100, d’appel des 76 et autres observatoires tout aussi ridicules les uns que les autres, et autres procédés diffamatoires, qui servent parfaitement leur objet : mettre en danger les jeunes collègues entrant à l’université.

    Terminons donc par ces mots du professeur Bernard Rougier (Université Paris-3 Sorbonne Nouvelle), dialoguant avec une subtilité toute scientifique avec le ministre de l’intérieur dans le Figaro du vendredi 29 janvier 2021 :

    « Il existe, dans le monde académique en particulier, une mise en circulation des thématiques racialistes et indigénistes à travers des programmes de recherches, des colloques, des financements de l’Agence nationale de la recherche (ANR) etc. Si les financements publics privilégient, par effet de mode et de mimétisme anglo-saxon, des thématiques autour d’un « racisme d’État » de nature systémique et organique, on offre une légitimation au discours islamiste qui s’est spécialisé, lui, dans la lutte contre la prétendue « islamophobie d’État ». Ce que l’action publique condamne d’un côté, elle le légitime en laissant faire de l’autre, ce qui pointe le risque d’une certaine schizophrénie ».

    https://academia.hypotheses.org/30564

    #facs #France #recevabilité #loi_confortant_le_respect_des_principes_républicains #principes_républicains #séparatisme #idéologie_séparatiste #décolonialisme #indigénisme #séparatisme_racial #Benassaya #Therry #ESR #enseignement_supérieur #entrave #liberté_d'expression #blocages #voile #franchises_universitaires #dérives_idéologiques #commémorations_nationales #serment #drapeau #enquêtes_administratives #lutte_contre_le_séparatisme #référent_laïcité #comité_de_sûreté #neutralité #neutralité_du_service_public #racisme_d'Etat

    –—

    Ajouté à ce fil de discussion :
    https://seenthis.net/messages/884291

    • Jeudi 21 janvier 2021, le Président Macron est venu célébrer le lancement du « plan quantique » sur le tout nouveau campus d’excellence Paris-Saclay. À l’occasion de cette visite, avait été prévue une rencontre avec quelques étudiants dans la maison des étudiants, à Bures sur Yvette.

      Cet événement, et surtout l’échange avec les étudiants, a bénéficié d’une vaste couverture pour relayer les nouvelles annonces du Président au sujet des conditions de retour des étudiants à l’Université.

      La SMF souhaite alerter sur les événements survenus lors de cette visite sur le campus, et restée entièrement ignorés par les médias :

      Une visite tenue secrète jusqu’à son annonce par les médias, la veille après-midi, à l’ensemble du personnel de l’université et de ses usagers.

      Un cortège présidentiel d’une ampleur inégalée comportant de nombreuses rues et axes fermés à la circulation sur tout le campus, et un dispositif policier semblable aux encadrements des manifestations parisiennes : plus d’une centaine de cars garés autour des bâtiments d’enseignement, des policiers en casques et tenues de combat, un cordon sécuritaire à plusieurs centaines de mètres du lieu de présence du Président.

      Des contrôles d’identités, photos et films des quelques collègues venus protester avec des banderoles, se déplaçant à pieds sur le campus et retenus par la police à plusieurs centaines de mètres du lieu sécurisé, sans motif.

      Des menaces de garde à vue de collègues en cas de refus de confiscation des banderoles repliés qu’ils avaient avec eux.

      Des ordres d’expulsion du campus envers des collègues assortis de menaces de garde à vue.

      Des contrôles et fouilles d’étudiants et destruction de pancartes et banderoles.

      Encerclement et retenue, pendant plus de 2h d’un groupe d’une trentaine de collègues du campus venus manifester leur désaccord sur les politiques concernant l’ERSI.

      Accompagnement sous escorte policière des manifestants à travers le campus et jusqu’à sa sortie après le départ du Président.

      Il nous faut réfléchir aux conséquences des actes de la police sur un campus universitaire face à des collègues et étudiants venus pacifiquement avec des banderoles ainsi qu’au traitement de l’information choisie par les médias.

      Alors que l’amendement ajouté au Sénat sur l’intention de nuire vient d’être censuré par le Conseil Constitutionnel, les agissements de la police envers les collègues sur le campus universitaires sont graves, et doivent être connus.

    • Sur cette visite, voir aussi :
      https://academia.hypotheses.org/30291
      https://academia.hypotheses.org/30277

      Et plus précisément sur la ministre #Vidal :
      https://seenthis.net/messages/894951#message897615
      https://seenthis.net/messages/894951#message898096

      ... #Frédérique_Vidal, celle qui justifie les mesures d’isolement par le « #brassage » qu’impliquerait la vie étudiante avec ses pauses cafés et les « #bonbons partagés avec les copains » :
      https://academia.hypotheses.org/30215

      #Paris-Saclay #ESR #enseignement_supérieur #université #facs

  • Le cadeau de Noël du gouvernement aux universitaires (26.12.2020)

    https://academia.hypotheses.org/29772

    –-> je pense n’avoir pas donné cette nouvelle le jours où elle est sortie du chapeau du gouvernement... ni les jours suivants...

    La fameuse #LPPR, devenue #LPR entre temps... la #loi_de_programmation_de_la_recherche (qui s’appelait #Loi_de_programmation_pluriannuelle_de_la_recherche) est sortie dans le #journal_officiel le matin du... #26_décembre_2020... oui oui oui... même pas 24h après #Noël, en pleine vacances universitaires !

    J’en fait donc un 6e fil de discussion, que j’ajoute à la métaliste sur les réformes qui intéressent l’#enseignement_supérieur :
    https://seenthis.net/messages/820330
    Et plus précisément :
    https://seenthis.net/messages/820330#message820388

    #facs #France #réforme

    • L’essentiel est sans cesse menacé par l’insignifiant : cycle bas.

      Il y a un an exactement, nous étions cinq mille à présenter notre candidature collective à la présidence du #Hcéres. Alors que les avant-projets de ce qui s’appelait encore la LPPR commençaient à transpirer, il s’agissait de poser comme fondamentaux les principes d’#autonomie et de #responsabilité des universitaires et des chercheurs dont il nous revient d’instituer les conditions effectives : la probation d’un travail scientifique doit être le fait de l’ensemble de la communauté des pairs ; le travail scientifique doit disposer de moyens budgétaires, d’une temporalité et de garanties statutaires permettant une recherche inscrite dans le temps long et à même de produire des ruptures intellectuelles significatives, plutôt que de livrer des résultats incrémentaux ; ce travail, enfin, doit s’effectuer en lien avec la transmission, la consolidation mais aussi la critique des savoirs existants telles que l’Université les assure.

      Les douze mois qui se sont écoulés ont à la fois confirmé nos pires craintes et conforté notre conviction que ce programme de refondation de l’#Université et de la recherche (https://rogueesr.fr/retrouver-prise) est une ardente nécessité. Dans les semaines et les mois à venir, RogueESR produira des notes d’analyse partant de ces principes pour articuler des propositions destinées à composer à terme une mosaïque cohérente. Nous vous invitons à contribuer à cette entreprise de réappropriation collective par des notes sur les questions auxquelles vous avez pu réfléchir, et qui pourront être mises en commun.

      Avant de nous lancer dans ce travail de fond, nous refermons un cycle par un commentaire d’actualité qui porte principalement sur la non-ouverture de l’Université et sur le Hcéres.

      Situation des universités

      À nouveau, nos pensées vont aux étudiantes et aux étudiants victimes de l’impéritie gouvernementale et bureaucratique qui s’est encore manifestée cette semaine par diverses déclarations gouvernementales et présidentielles sur la réouverture des universités, dont aucune ne présente la moindre crédibilité, ni le minimum d’ancrage dans la réalité de nos établissements.

      « On est sur le moment où le décret sort, il faut que ce soit au moins la veille du jour où les choses sont mises en place. »

      « Et là, j’ai bien entendu la demande du président : si l’idée, c’est qu’on puisse faire revenir l’ensemble des étudiants sur l’ensemble des niveaux avec des, voilà, des jauges à 20% ou à un cinquième de temps, les universités, ça par contre je vais le leur dire… »

      Frédérique Vidal, le 21 janvier 2021

      Ces phrases sont extraites des discours tenus pendant la visite Potemkine du président de la République à Saclay, à écouter ici : https://rogueesr.fr/vidal_riendepret

      L’annonce de M. Macron[1] a annulé en direct la circulaire prévoyant le retour des étudiants de L1 au profit d’un retour de tous les étudiants, un jour sur cinq, en février, comme initialement prévu. La nouvelle « circulaire », enregistrant le « souhait » du président de la République, contredit dans le même temps le décret du 15 janvier[2] qui est le seul à avoir une valeur réglementaire en vertu de la hiérarchie des normes. En attendant un probable pseudo-confinement, il n’est besoin d’aucun autre commentaire.

      Ces annonces, qui n’ont aucune prise sur le réel, montrent une ignorance totale des conditions d’élaboration des emplois du temps dans les facultés, un mépris de la situation des étudiants éloignés des établissements et un report sur les personnels de la responsabilité morale et professionnelle de la gestion d’une crise sanitaire sans les moyens qui devraient l’accompagner. Car le but de cette entreprise de communication est bien de renvoyer la colère des étudiants vers les universitaires. La gestion calamiteuse de la crise n’en est pas moins directement imputable au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, qui a obstinément refusé de mettre en œuvre les protocoles sanitaires et les garanties sociales qui auraient permis aux étudiants de rester sur les campus et d’y suivre des cours.

      Rappelons plus que jamais notre double obligation à l’égard de la jeunesse, qui est en train d’être sacrifiée : rouvrir les universités (https://rogueesr.fr/rouvrons-les-universites) le plus tôt possible pour permettre une formation et socialisation académiques de qualité, et garantir que cette réouverture se fasse dans le respect des procédures sanitaires requises (https://rogueesr.fr/rouvrons-les-universites), avec les #investissements que cela nécessite.

      Un mouvement large de destitution du Hcéres

      Le projet de destitution du Hcéres et de réappropriation communautaire des normes qualitatives de notre métier est aujourd’hui partagé par un grand nombre de collectifs, d’instances et de sociétés. L’Assemblée des directions de laboratoire appelle ainsi à un désaveu du Hcéres (https://adl.frama.site/blog/appel-desavouer-le-hceres), tout comme la Commission Permanente du Conseil National des Universités (CP-CNU) qui appelle l’ensemble des enseignantes-chercheuses et enseignants-chercheurs à ne pas siéger dans des instances d’évaluation et à refuser de participer aux comités de visite du Hcéres (https://twitter.com/CP_Cnu/status/1338951928550739969).

      Plusieurs structures engagées dans ce projet proposent d’organiser un colloque sur le Hcéres, en terrain neutre, au Sénat ou en plein air, le 19 ou le 26 juin prochain. M. Coulhon a été invité à ce colloque. À ce stade, il n’a pas fermé la porte et a même déclaré sur le réseau social Twitter (!) qu’il était prêt à y participer. De notre côté, nous soutenons cette initiative et y contribuerons vraisemblablement pour autant qu’elle permette d’y poser clairement la question des normes collégiales de probation, ainsi que celle de la temporalité budgétaire et statutaire dans laquelle doit s’inscrire une science de qualité.

      L’enjeu n’est pas de discuter des modalités d’une « bonne » évaluation, mais d’en questionner frontalement le principe et la nécessité, que nous percevons comme un dévoiement de la dispute scientifique entre pairs. La question de l’utilité pratique du Hcéres, pour sa part, ne se pose plus : sa paralysie de fait depuis octobre 2019 s’est révélée sans incidence préjudiciable pour notre travail. Prévenant nos désirs, le Hcéres a ainsi fait lui-même la preuve de son inutilité. Le décalage d’un an des prochaines vagues d’évaluation va dans le même sens : les formations comme les unités de recherche continueront de tourner normalement. Nos travaux devront donc porter sur les modalités de sa destitution.

      Recours en « abus de pouvoir » devant le Conseil d’État

      Une requête en annulation des deux décrets de nomination au Hcéres a été déposée le 4 janvier dernier au greffe du Conseil d’État par 11 enseignants-chercheurs titulaires. La démonstration juridique de 22 pages déposée en appui de ce recours pour « abus de pouvoir » s’appuie sur quelques éléments nouveaux. Il convient en particulier de souligner la chronologie troublante des textes parus au Journal Officiel pour acter ces nominations.

      Si l’on s’en tient à la chronologie des publications du Journal Officiel, il apparaît que les numéros des décrets de nomination du président du collège (texte n°65) et de nomination des membres du Collège (texte n°66), tous deux datés du 30/10/2020 et publiés le même jour (01/11/2020) au Journal Officiel, sont dans un ordre inverse à la logique voulue par la Loi. Cela pose un questionnement juridique fondamental portant sur le non-respect de la procédure voulue par le 5ème alinéa de l’article 13 de la Constitution et sur l’empiètement manifeste du Président de la République sur le domaine de compétences du Premier ministre.

      En outre, un arrêté du 22/12/2020 stipule qu’il est mis fin aux fonctions de M. Coulhon à l’Elysée « à compter du 1er novembre 2020 ». Outre le caractère rétroactif de cette décision, le problème de dates est patent, Thierry Coulhon étant président du Collège du Hcéres depuis le 30 octobre. Cette intrication de dates démontre que l’intéressé a bénéficié de son statut singulier de membre du cabinet du Chef de l’État durant l’intégralité de la procédure ayant abouti à sa nomination et ce, jusqu’à sa prise de fonction effective au Hcéres. Elle jette également le doute sur les déclarations de Thierry Coulhon lors de son audition, le 20 octobre dernier, devant les commissions du Parlement : le candidat avait laissé entendre qu’il n’était plus en fonction à l’Élysée, ce que vient démentir la date mentionnée dans l’arrêté du 22 décembre.

      En se requalifiant en « Président du Hcéres », quand il n’est que Président de son collège, en accélérant par des recrutements, l’inflation bureaucratique de cette institution, M. Coulhon bat en brèche le principe de pluralisme et d’autonomie collective qui devrait prévaloir dans toute institution scientifique. Il s’écarte également de l’intention du législateur qui a voulu, dès la création de l’AERES, puis du Hcéres, inscrire dans la Loi ce principe de collégialité comme le principe de fonctionnement de cette autorité administrative, directement dérivé du modèle fondateur primus inter pares de l’Université.

      Dans ces conditions, il nous semble plus que jamais nécessaire de reprendre le programme collectif d’une évaluation des bureaucraties, y compris celle en charge de l’évaluation, à l’aune de nos propres critères.

      [1] Autre extrait à écouter, ainsi que l’original, entre les minutes 39 et 43.

      [2] Le décret du 15 janvier prévoit que les étudiants de L1 pourront accéder en présence à l’Université « 8° — aux travaux dirigés et travaux pratiques destinés aux étudiants inscrits en première année des formations du premier cycle de l’enseignement supérieur et en première année du premier des cycles de formation dispensés dans les établissements mentionnés aux titres IV, V et VII du livre VI du code de l’éducation. »

      https://rogueesr.fr/20210125

  • La revue SAMAJ se mobilise pour les #libertés_académiques en #Inde

    L’université, la science et la liberté d’expression sont attaquées de toutes parts en Inde. Ce n’est pas simplement une métaphore car ces attaques sont parfois physiques, comme lorsque le 15 décembre 2019 la police brutalisa des étudiants alors qu’ils étaient paisiblement en train de travailler dans la bibliothèque de l’université Jamia Millia ou lorsque, le 5 janvier 2020, sous le regard bienveillant de la police, des membres des milices de l’extrême droite hindoue attaquèrent un rassemblement pacifique organisé par l’Association des enseignants de l’Université Jawaharlal Nehru (JNU).

    Des éditeurs sont contraints de retirer ou de détruire des livres à la suite d’intimidations, comme celui de Wendy Doniger, The Hindus : An Alternative History, publié par Penguin. La liberté à l’intérieur et à l’extérieur des amphithéâtres universitaires est également sapée par l’annulation de conférences, de films, de pièces de théâtre et de séminaires. Certaines universitaires comme Nandini Sundar et Archana Prasad ont même fait l’objet de fausses accusations de meurtre par la police. Dans les pires cas, cette violence peut aller jusqu’à l’assassinat d’universitaires, dits « rationalistes » comme l’ancien président d’université, M. M. Kalburgi. Les données du V-Dem report 2020, qui suivent depuis 1945 l’évolution des libertés académiques et de la liberté d’expression, donnent à voir un déclin qui s’est accentué à partir de 2014, soit la date de l’élection de Narendra Modi au pouvoir (cf. Figure 1 ; pour davantage de détails sur ce sujet, voir aussi le rapport par Nandini Sundar et Gowhar Fazili).

    Les chercheurs et enseignants en sciences sociales sont désormais désignés comme des ennemis de l’intérieur. Nombre d’enseignants autocensurent leurs propos (portant, par exemple, sur d’éventuelles critiques à l’encontre de la politique de Modi) dans leur propre salle de cours, tant ils craignent d’être dénoncés ensuite par des étudiants gagnés à la cause des nationalistes hindous. Les spécialistes des sciences de la nature sont de plus en plus souvent sommés de mettre en place des protocoles d’étude visant à démontrer les bénéfices de la bouse et de l’urine de vache (rebaptisée par les nationalistes hindous Gau mata, la « Vache mère »), ou les vertus de l’eau présumée sacrée du Gange. Pour obtenir des visas, les chercheurs étrangers en sciences sociales sont fréquemment contraints de travestir la présentation de leurs projets de recherche, habités par la crainte de se voir refuser l’accès au territoire indien. C’est déjà le cas chez un nombre croissant d’entre eux.

    En tant que revue spécialisée sur l’Asie du Sud, SAMAJ considère que notre mission principale — produire des connaissances scientifiques sur les sociétés — est donc menacée. Cette situation a incité le comité de rédaction de la SAMAJ à réunir des universitaires spécialistes des questions pour réfléchir à cet état de fait.

    Notre principal objectif dans ce numéro est de montrer que les sciences sociales proposent des outils analytiques utiles pour comprendre l’évolution politique de l’Inde sous le régime de Narendra Modi. Afin de sensibiliser et d’aider les lecteurs non spécialistes à comprendre ce qui se passe actuellement en Inde, nous avons choisi de faire une exception à notre format habituel et d’ouvrir la revue à des publications s’écartant du traditionnel article académique pour y inclure également des essais, des interviews ou des portraits de personnalités importantes. Le sommaire de ce numéro et les liens vers les articles (tous enaccès ouvert) sont disponibles ci-dessous.

    Pour celles et ceux préférant une présentation en français de la situation indienne, il est toujours possible de se tourner vers l’article d’Aminah Mohammad-Arif et Jules Naudet publié dans la revue L’Homme : « La démocratie indienne à l’épreuve du nationalisme hindou » [sous embargo]

    https://academia.hypotheses.org/29629

    #liberté_académique #université #recherche #facs #Narendra_Modi #Modi

  • Le jeu de bonneteau du projet de #loi_de_finance #2021

    La lettre de démission du directeur général de la recherche et de l’innovation, B. #Larrouturou (https://seenthis.net/messages/888341), sitôt la loi de programmation de la recherche adoptée, éclaire d’un jour nouveau les #dysfonctionnements chroniques du ministère : les hauts fonctionnaires des administrations centrales n’ont eu aucun contact avec la ministre depuis six mois, cette dernière étant maintenue à l’isolement par le cabinet qui lui a été imposé par l’Elysée. On comprend dans ces conditions que Mme #Vidal ait fait porter les #amendements délétères de son groupe d’influence, la défunte #Curif devenue l’#Udice, par des parlementaires centristes.

    Les universitaires et les chercheurs ont eu la surprise de recevoir un “courrier destiné à l’ensemble des personnels de Madame #Frédérique_Vidal” (sic), truffé de fautes d’orthographe et de syntaxe, rassemblant l’ensemble des éléments de langage budgétaires égrenés par la ministre depuis un an. Leur réfutation, fastidieuse mais nécessaire, a été menée avec sérieux par le rapporteur au Sénat Jean-François Rapin (http://www.senat.fr/rap/l20-138-324/l20-138-3241.pdf), qui a mis à jour l’essentiel des #manipulations_budgétaires. On comprend mal, dans ces conditions, que le groupe Les Républicains ait voté ce #budget, en le conditionnant à l’adoption d’un amendement (http://www.senat.fr/enseance/2020-2021/137/Amdt_II-993.html) aussi absurde qu’injuste prélevant 20 millions à l’#Université au profit des #organismes_de_recherche.

    La #désinformation ne repose pas tant sur des chiffres erronés que sur un projet de loi confus, une comptabilité illisible et un budget insincère. L’angle d’attaque du sénateur Rapin est le bon : la #Loi_de_Programmation_de_la_Recherche ne programme strictement rien. Son volet budgétaire — qui fixe un #plafond bien plus qu’un #plancher — n’a été là que pour camoufler le plus longtemps possible la visée de la loi : dérégulation statutaire et généralisation des contrats. Relevons ici quelques faits saillants.

    Les #postes statutaires — 242 postes de chargés de recherche #CNRS seront ouverts au #concours en 2021 (https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042593121) : 51 de moins qu’il y a 3 ans, 117 de moins qu’il y a 10 ans. 60 postes de chargés de recherche à l’#Inserm (https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042660370) soit 15 de moins qu’en 2014. Le projet de loi de finance prévoit un plafond d’autorisation d’#emplois de 266 619 soit 11 de moins que l’an dernier. Et pour cause, depuis des années, comme le souligne la Cour des Comptes (https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-04/NEB-2019-Recherche-enseignement-superieur.pdf), 20’000 emplois programmés à l’Université ne sont pas créés, faute de moyens. Les 315 emplois supposés être créés dans la #fonction_publique en 2021 (5 200 en 10 ans) par la #LPR sont donc dérisoires et n’existeront probablement même pas, de nouveaux “#gels” de #postes_pérennes compensant les nouveaux #emplois_contractuels (« #tenure_tracks » et doctorants).

    Les #crédits — Dans le projet de loi de finance (http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3642_projet-loi.pdf), les crédits de paiement de la #Mission_Recherche_et_Enseignement_Supérieur décroissent de 28 664 milliards € à 28 488 milliards €, soit -0,6%, quand l’#inflation devrait être de 0,75% et le glissement vieillesse technicité de 0,45%. Le budget de l’Université (programme 150) croît de 244 millions € parmi lesquels 164 millions € pour les mesures de la LPR [1]. Or, l’inflation correspond à 105 millions € et le #glissement_vieillesse_technicité à 56 millions soit -161 millions €. Le plan de #revalorisations et de #promotions des #carrières scientifiques n’est donc pas financé, et sera compensé par la suppression de postes statutaires. Le budget de la #recherche_publique (programme 172) croît de 221 millions € [2]. 60 millions € serviront à résorber un trou dans la #masse_salariale du CNRS, qui y a consommé son fond de roulement ces dernières années. Ne restent pour les mesures de la LPR que 79 millions €. L’inflation correspond à 54 millions € et le glissement vieillesse technicité à 48 millions €, soit -101 millions €. Le plan de revalorisations et de promotions des carrières scientifiques devra donc prélever dans les #crédits_récurrents. En 2021, les crédits de l’#Agence_Nationale_de_la_Recherche (#ANR) augmenteront de 35 millions €. L’augmentation du taux de succès à l’ANR en 2021 ne sera logiquement financée que dans les budgets ultérieurs [3].

    Le #plan_de_relance — Le budget du projet de loi de finances 2021, médiocre, n’a pu être présenté en hausse qu’en mobilisant des crédits du plan de relance (hors LPR, donc) [4] qui proviennent essentiellement de #crédits_européens encore non votés (https://www.budget.gouv.fr/documentation/file-download/6187). Le budget européen pour la recherche est lui même passé de 100 milliards € escomptés à 76 milliards € en juillet puis 80 milliards € en novembre sans que l’on connaisse encore la ventilation entre recherche publique et privée. Impossible, donc, de faire un bilan factuel, prenant en compte les effets budgétaires du Brexit. Dans le plan de relance, 805 millions € sont consacrés à la recherche, qui s’ajoutent aux 1 250 millions d’euros en provenance du #Programme_d’investissements_d’avenir (#PIA). 247 millions € sont dédiés à l’#enseignement_supérieur en 2021, qui s’ajoutent aux 125 millions € du PIA. En 2021, 900 millions € seront consacrés à la #rénovation_énergétique des #bâtiments universitaires, en procédant par appel à projet plutôt que par un recensement des bâtiments vétustes. Cela reste excessivement loin des 6,4 milliards € annoncés par Mme Vidal dans son courrier, dont ni le rapporteur du Sénat, ni nous, n’avons trouvé la trace. Parmi ces sommes, 300 millions € sont supposés être consacrés à la préservation de l’#emploi_privé en #recherche_et_développement (#R&D), qui seront difficilement dépensés, la plupart de ces emplois étant déjà financés par le #Crédit_d’Impôt_Recherche (#CIR). Dernier élément notable, la montée en charge rapide des #prêts_étudiants garantis par l’État annonce l’arrivée du dernier volet de transformation du supérieur : l’augmentation des #frais_d’inscription.

    Reçu via la mailing-list RogueESR, 14.12.2020
    #ESR #université #facs #mensonges #chiffres

  • Comment sécuriser les #universités vis-à-vis de l’épidémie ?

    Comment éviter de nouvelles vagues épidémiques sans restreindre ni les libertés publiques ni l’activité sociale ? Comment faire en sorte que les universités, ainsi que les autres lieux publics, ne participent pas à la circulation du virus ? Nous examinons ici l’état des connaissances sur les voies de contamination pour formuler des préconisations à mettre en œuvre de toute urgence .

    Le coronavirus se transmet principalement par voie respiratoire. Une personne atteinte du Covid et symptomatique, émet en toussant des gouttelettes de salives entre 50 microns et 1 mm, chargées en virus . Les porteurs symptomatiques ou asymptomatiques, en parlant ou simplement en respirant, émettent de plus petites gouttes porteuse de particules virales, entre la centaine de nanomètre, ce qui correspond à la taille du virus, et 5 microns. Ces deux types de gouttelettes ont des comportements hydrodynamiques différents . Les grosses gouttelettes produites par la toux retombent sur le sol après un vol de l’ordre du mètre. Lorsqu’on les respire, elles se déposent, du fait de leur inertie, sur les parois des voies respiratoires. Les petites gouttelettes produites par la toux, par la parole, par le chant ou par la respiration ont une faible inertie et suivent l’écoulement de l’air. En conséquence, elles peuvent rester suspendues en aérosol dans l’air, entraînées par ses mouvements turbulents. Lorsqu’on les respire, elles pénètrent profondément dans les voies respiratoires. Seules des gouttelettes de petites tailles peuvent ainsi aller jusqu’aux alvéoles pulmonaires . Une dizaine d’études de cas ont montré des contaminations par voies aérosol. Cela a été confirmé par des études sur des modèles animaux. On estime maintenant que 50% au moins des contaminations sont dues aux porteurs asymptomatiques, ce qui implique des gouttes transportées en aérosol. Du reste, 4 personnes sur 5 se montrent incapables de savoir précisément dans quelles circonstances elles ont été contaminées.

    https://www.youtube.com/watch?v=x_HcZyz1pFQ

    #ESR #université #sécurisation #contamination #facs #vidéo #voie_aérosol #modélisation #goutelettes #épidémie #repas #coronavirus #covid-19 #toilettes #aérosolisation_fécale #masques #salles_de_cours #chaînes_épidémiques #tests #transmission #lieux_collectifs #ventilation #niveau_de_ventilation #respiration #tutoriel #CO2 #VMC #fenêtres #transmission_aéroportée #purificateurs_d'air #filtres_HEPA

    ping @simplicissimus

  • « Thomas B. professeur harcèle et agresse vos élèves » : une figure de la gauche intellectuelle mise en cause à l’#Université_de_Paris

    Une dizaine d’élèves ont contacté « Le Monde » pour accuser #Thomas_Branthôme, maître de conférences en histoire du droit. Provisoirement suspendu, il dément toute forme de harcèlement ou d’#abus.

    Le collage en lettres majuscules à la peinture noire, typique des collectifs féministes, s’est étalé le 21 novembre sur les fenêtres des anciens locaux de l’Ecole nationale de la statistique et de l’administration économique (Ensae) à Malakoff (Hauts-de-Seine), en face du campus de droit de l’Université de Paris : « Thomas B. professeur harcèle et agresse vos élèves », suivi d’un « Harceler ≠ enseigner » (« harceler n’est pas enseigner »). Derrière ce prénom et cette initiale, Thomas Branthôme, maître de conférences en histoire du droit qui enseigne dans cette université depuis 2014.


    Une dizaine d’élèves du même campus ont également contacté Le Monde pour mettre en cause l’enseignant. D’autres nous ont été signalées par une association féministe du campus et le collectif de colleuses L’Amazone. Des jeunes femmes de Sciences Po Paris et de l’université d’Evry nous ont aussi confié leur récit. Toutes font état de pratiques qu’elles ont ressenties comme du harcèlement sexuel, voire, dans au moins un cas, comme une agression sexuelle. Plusieurs ont alerté les autorités universitaires, qui sont en train d’instruire le dossier en vue d’une procédure disciplinaire. Aucune n’a saisi la justice pour l’heure. L’enseignant, de son côté, dément toute forme de harcèlement ou d’abus.
    « De plus en plus vulgaire »

    A 38 ans, Thomas Branthôme est un spécialiste de l’histoire de la République, un intellectuel reconnu, régulièrement invité lors des universités d’été de La France insoumise, de la Gauche républicaine et socialiste – le parti de l’ancien membre du Parti socialiste Emmanuel Maurel. On le retrouve également dans la mouvance du média en ligne Le vent se lève et au comité scientifique du think tank Institut Rousseau. Dans toutes les universités où il a donné des cours, M. Branthôme connaît un vrai engouement de la part des jeunes, qui se pressent à ses cours.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/12/09/harcelement-sexuel-une-figure-montante-de-la-gauche-intellectuelle-mise-en-c
    #France #harcèlement_sexuel #université #facs #grands_hommes #ESR

    #paywall

    –—

    Ajouté à la métaliste dédiée à harcèlement sexuel dans les universités :
    https://seenthis.net/messages/863594

    • Les garçons innocents et l’obsédé coupable

      Les propos orduriers et les comportements graves et inadmissibles à l’égard d’étudiantes de Thomas Branthôme, MCF en histoire du droit, ont été très récemment exposés par Sylvia Zappi dans Le Monde. Ils ont suscité beaucoup de réactions. Ce qui nous inquiète, c’est à quel point les réactions se focalisent sur son #vocabulaire et ses #expressions_grossières, plus que sur son #comportement lui-même, et les conditions qui lui ont permis de se conduire ainsi dans la plus totale #impunité durant des années, entre l’#Université_d’Evry, #Science_Po et désormais Université de Paris.

      Nous craignons que ne se mette en branle un mécanisme analogue à celui que décrit si bien Valérie Rey-Robert dans son ouvrage sur la #culture_du_viol , et qui relève de la mythologie du viol que des théoriciennes et chercheuses déconstruisent depuis les années 19703 : plus on décrit le violeur comme violent, grossier, brutal, plus les hommes « normaux » se sentent dédouanés dans leurs petites manœuvres et petites pressions, leurs chantages feutrés pour extorquer des rapports sexuels—le #violeur, c’est toujours l’autre, celui qui menace d’un couteau dans une ruelle obscure ! Plus on nous décrit « l’enseignant-chercheur queutard » comme agressant verbalement des étudiantes avec des propos crus, plus les enseignants-chercheurs « ordinaires », juste modérément sexistes, avec des propos policés, s’autorisent à penser qu’eux, c’est différent : eux draguent leurs étudiantes, mais dans le respect…

      Nous comprenons pleinement la stratégie des étudiantes et de la journaliste qui rapporte leurs témoignages : ces mots crus, orduriers, sont ce qui fait réagir l’opinion, qui serait sinon prompte à normaliser le comportement de Branthôme, ou à insister sur le fait qu’après tout, les étudiantes sont majeures et en mesure de consentir à une relation entre adultes… Faisant fi de la déontologie professionnelle et du fait que non, jamais, la relation entre enseignant et étudiante, même à l’université, n’est une relation entre égaux. Elle se construit nécessairement dans une relation d’#autorité et de #domination car même si on n’est plus directement dans une relation où l’un note le travail de l’autre, on peut toujours se trouver dans une relation où l’un peut nuire à l’autre : en refusant une lettre de recommandation, en le critiquant auprès de collègues ou de partenaires professionnels, bref, en limitant par différents gestes ses opportunités académiques et professionnelles…

      Des Branthôme mais policés, amicaux, souriants, l’université en compte des dizaines sinon des milliers. Ils ne sont pas seulement ceux qui découragent et finalement expulsent de l’enseignement supérieur des milliers de jeunes femmes qui se sentent humiliées, ou auxquelles on a fait comprendre que leur seule place et leur seul rôle dans cet univers théoriquement dédié au savoir et à sa transmission était d’illuminer et de décorer, d’assurer le « repos du guerrier », et non de participer comme actrice pleine et entière de la production et aux avancées de la connaissance. Tous ces Branthôme au petit pied, en train de s’exonérer à qui mieux mieux en ce moment parce qu’eux, ils ne réclament pas de but en blanc des fellations aux étudiantes, infligent pourtant de la #violence_symbolique sans vouloir (se) l’admettre.

      Nous en avons eu un exemple aussi concret que sordide avec la tribune de #Camille_Zimmerman qui explicite en septembre 2020 pourquoi elle arrête sa thèse commencée à l’université de Lorraine : sous le titre d’« #emprise », elle décrit un processus de #prédation, qui commence pour elle en fin de licence, qui entame la confiance en elle à mesure qu’elle gravit les échelons diplômants, son malaise, son inquiétude quand elle observe que le processus est répété — et la rupture qui est moins consécutive au suicide de sa camarade doctorante que dans la prise de conscience que l’institution ne lui procurerait aucune protection — celle de l’existence d’une #mise_au_silence, d’une « #omerta ». Il faut penser que ce comportement n’est restreint ni à l’Université de Lorraine, ni à l’Université de Paris. Bien au contraire, l’étude des décisions disciplinaires d’appel au CNESER — qu’Academia publie régulièrement — manifeste combien étudiant∙es et femmes ne sont pas des sujets à part entière des universités.

      Un article a aidé l’une d’entre nous à mettre des mots sur des pensées confuses : « She Wanted to Do Her Research. He Wanted to Talk ‘Feelings” » (https://www.nytimes.com/2016/03/06/opinion/sunday/she-wanted-to-do-her-research-he-wanted-to-talk-feelings.html), texte de #Hope_Jahren paru dans le New York Times en 2016. Cette biologiste explique très clairement la façon dont nombre de ses jeunes collègues féminines sont confrontées à des #avances non pas sexuelles, mais « sentimentales » de la part de collègues masculins — ce que résume bien son titre « Elle voulait faire sa recherche, lui voulait parler de ses ‘sentiments’ ». Jahren montre très bien comment ces avances, même présentées en mots choisis, avec des #compliments délicats, des aveux d’une irrésistible attraction… Contribuent au #malaise des femmes dans cet univers de la recherche, et les font fuir. Sans doute les collègues qui ont ce genre de comportement ne pensent-ils pas qu’ils constituent du harcèlement sexuel, et pourtant : les effets sont les mêmes.

      Il semble donc important d’insister sur le fait que, quand bien même Thomas Branthôme aurait choisi un registre de langue châtié pour faire ses avances, c’est bien son comportement qui pose problème : il est celui d’un grand nombre de collègues qui ne comprennent pas qu’on ne peut en toute #déontologie_professionnelle entretenir de #relation_intime avec des étudiant∙es qui, même si on ne les a pas en cours, peuvent être à la merci du #pouvoir dont disposent inévitablement les enseignant∙es-chercheur∙ses, en termes de réseau professionnel, d’influence… En science biologique, en droit, comme dans tous les autres champs disciplinaires.

      Plus on met en avant les paroles « monstrueuses » de TB, inadmissibles dans la bouche d’un enseignant-chercheur, plus on conforte l’idée du « monstre » obsédé sexuel, de la brebis galeuse, et plus on occulte, donc, le caractère systémique, institutionnalisé et normalisé de #relations_asymétriques dont les étudiantes paient chèrement le prix, en #dépression, en #suicide, en abandon de leurs études ou de leurs recherches.

      Combien de sections disciplinaires, à l’avenir, statueront sur le fait que « ce n’est pas si grave » par rapport à l’affaire Branthôme, parce que les propos graveleux sont absents d’une attitude volontairement séductrice pourtant tout aussi répréhensible ? Et encore, seulement si les victimes ont le courage de se faire connaître et de se plaindre, si elles sont suffisamment soutenues dans cette démarche par des collectifs féministes comme le Clasches qui font un travail extraordinaire.

      https://academia.hypotheses.org/29429

      ping @_kg_

  • #ContribUniv

    Ouverture la #plateforme ContribUniv ! L’objectif de cette #plateforme_participative est de constituer une #agora_virtuelle afin de construire collectivement un projet de #refondation de l’#ESR.

    Voici le lien pour y accéder : https://cartodebat.fr/contribuniv.

    Le dispositif a été conçu de manière à permettre à chacun·e de participer de manière pleine et entière, c’est-à-dire : échanger et débattre autour de points précis, contribuer aux textes existants, faire de nouvelles propositions ou encore voter.

    Des textes ont été rédigés à partir d’un travail de synthèse des propositions portées par différents collectifs et instances représentatives de l’ESR depuis des années ainsi que des controverses qui animent la communauté académique sur certaines questions. Ils ne sont là que pour servir de base à la discussion et vous pourrez à loisir les compléter, amender, critiquer et déposer de nouveaux textes.

    À l’heure actuelle, un premier thème ("Emploi et recrutement" : https://cartodebat.fr/contribuniv/topic/emploi---recrutement) est ouvert. Il contient déjà 13 textes. D’autres thèmes ouvriront prochainement. Plutôt qu’un mail trop long, vous trouverez ci-dessous les liens vers les pages de présentation du projet susceptibles de répondre aux questions que vous vous posez sur cette initiative.

    Le pari de ce projet est celui de l’intelligence collective, et nous sommes convaincu·e·s que l’outil numérique peut être un outil utile pour construire ensemble l’enseignement supérieur et la recherche que nous voulons.

    #université #France #enseignement_supérieur #facs #débat

  • Du malaise en milieu étudiant

    Seul un étudiant sur dix parvient encore à suivre ses #cours_en_ligne. Non, le problème n’est pas individuel. Arrêtez de nous envoyer vers des psychologues tout en prolongeant notre #isolement.

    Tous les cours se ressemblent. Se lever une demi-heure avant à grand-peine (rythme de sommeil complètement déstructuré), s’asseoir et ouvrir l’ordinateur, le connecter à la 4G instable du téléphone, chercher le lien de la visioconférence, couper le micro, et malaise.

    #Malaise des professeurs qui monologuent devant une galerie de portraits ennuyés et silencieux, au mieux, devant une grille de prénoms muets la plupart du temps. Mosaïques sinistres de visages qui en disaient davantage derrière un masque. Les professeurs disent : Je sais que les temps sont difficiles mais nous n’avons pas le choix, vous lirez cet article pour la fois prochaine, rendez-moi le travail pour mi-décembre. Ils disent aussi, sur un ton angoissé ou agacé – sûrement conscients du ridicule de la situation – Est-ce que ça va ? Vous m’entendez ? Quelqu’un veut répondre à la question ? Bon, s’il n’y a pas de remarque alors je poursuis. Malaise des étudiants, notre malaise. Il n’y a pas de questions parce qu’il n’y a rien à questionner ; on ne sait pas exactement ce qui vient d’être dit et on s’en fout, aussi. Trop difficile de rester concentré, les écrans finissent par brûler et fatiguer les yeux, la tête bourdonne des bruits de micros saturés. Malaise parce que ça ne rime à rien, parce que c’est complètement irréel, parce qu’on ne voit plus pourquoi on continuerait. Ça avait du sens lorsque c’était encore pris dans des relations sociales, lorsqu’il y avait un rapport entre le professeur et les étudiants, un jeu de regards, des interventions spontanées, des corps et des attitudes, un ancrage dans le réel. Ce n’est plus le cas. Et, pire, l’irréalité n’a plus de bornes depuis que le professeur donne cours dans nos chambres ; il n’y a plus guère de séparation spatiale entre vie étudiante et vie personnelle, et la première – celle qui déjà occupait et préoccupait beaucoup – envahit totalement la seconde. Avant, on refermait le cahier ou l’ordinateur portable, on faisait son sac, on discutait quelque temps avec des camarades ou un professeur, on prenait le métro, le bus, le vélo ou on marchait jusqu’à chez soi. Maintenant, on quitte la réunion Zoom et on reste sur la même chaise, dans la même chambre, avec la même solitude, à faire ce que l’on faisait de creux ou de sans intérêt pour passer le temps pendant le cours qu’on n’écoutait pas vraiment. Toujours ce sentiment d’irréalité, d’absurdité ; ce malaise.

    Les symptômes de ce malaise s’expriment partout, dans des circonstances plus ou moins terribles. Le premier confinement a été difficile, le second confinement est un coup de grâce. Nous sommes dans un sale état, toutes les enquêtes réalisées le prouvent : Article 1, dans une enquête datant du 16 novembre mené parmi 700 étudiants issus de milieux populaires, relève que 73.5 % d’entre eux se disent stressés et épuisés. À Sciences Po Paris, l’Association de l’École d’Affaires Publiques rapporte dans les résultats de son sondage (environ 1200 réponses) que les états dépressifs ont actuellement un taux de prévalence de 41 % parmi les étudiants, en plus de l’anxiété qui touche 61 % des interrogés (les moyennes françaises en octobre étaient respectivement autour de 15 % et 19 %). 91 % des étudiants affirment avoir des difficultés à suivre les cours en ligne. Dans le sondage réalisé dans notre spécialité de M1, on retrouve des chiffres similaires : onze personnes sur dix-huit (soit 61 %) rapportent des sentiments de tristesse ou de mélancolie, et seuls trois élèves sur dix-huit se disent capables de suivre correctement les cours. Les troubles du sommeil et les troubles alimentaires ont également des taux de prévalence particulièrement inquiétants. L’épuisement et la fatigue sont omniprésents, et concernent quinze étudiants sur dix-huit. On comprend aisément comment la charge de travail accrue, l’angoisse, l’exposition intensive aux écrans, les états dépressifs et l’isolement peuvent expliquer cette lassitude. Nous attendons les résultats d’enquêtes plus larges, mais rien ne laisse présager de meilleures conclusions.

    Malaise, donc : des professeurs font cours à des étudiants en souffrance qui ne les écoutent pas. Quel sens est-ce que ça peut bien avoir, pour nous comme pour nos enseignants ? Les professeurs et les administrations envoient les étudiants vers des psychologues, dans des messages pleins de bienveillance et de take care, parce qu’ils ne savent pas comment répondre autrement. Les tribunes et les articles qui paraissent ces dernières semaines sur le sujet ont beau faire ce même constat terrible, ils demandent également plus d’aide psychologique pour les étudiants. Ils se trompent : nous n’avons pas besoin de psychologues. Il est impossible de croire que le problème que nous rencontrons est individuel, alors qu’il concerne une majorité écrasante d’entre nous. Le problème n’est pas psychologique et ne se règle pas avec des séances chez un psy, des antidépresseurs ou des anxiolytiques. Ce n’est pas non plus une preuve de paresse des étudiants, et pas davantage un défaut d’adaptation que le temps corrigera. Nos études nous intéressent, nous voulons réussir et nous nous en savons capables : voilà pourquoi notre malaise est aussi dérangeant. Si le problème est aussi massif, c’est bien qu’il ne relève pas de fragilités individuelles et qu’un encouragement à s’accrocher ne suffit pas. Le problème, c’est que notre vie quotidienne est devenue insupportable et que tout le monde prétend ne rien voir parce que c’est plus simple.

    Il faut briser le silence et affronter ce malaise-là maintenant, parce que nous en payons les conséquences beaucoup trop cher. Affronter le fait qu’en moyenne sur Zoom, dans une classe de trente personnes, il n’y a que trois personnes qui écoutent effectivement. Affronter le fait que nous sommes envahis par les cours, les travaux à rendre et l’angoisse à l’idée de ne pas y parvenir. Affronter le fait que nous n’avons pour la plupart pas besoin d’un soutien psychologique, mais d’un changement matériel, réel de nos conditions d’étude. Affronter le fait que c’est pour la majorité d’entre nous un cauchemar qui n’en finit pas : si le déconfinement est prévu le 15 décembre, que tous les commerces sont ouverts et que les offices religieux peuvent se tenir à plus de trente personnes depuis le 28 novembre, les étudiants ne peuvent même pas rêver de retourner en cours avant mi-février – dans l’hypothèse plus que fragile qu’aucun nouveau confinement ne soit décrété. Le covid-19 ne nous a presque pas touchés, mais nous sommes écrasés par ses conséquences dans le déni général.

    Jusqu’à présent, chaque fois que nous avons osé parler, on nous a systématiquement répondu que dans les circonstances actuelles, on nous comprend mais que c’est une impasse et que tout le monde fait déjà au mieux. On nous répond – avec la facilité que cela comporte – qu’effectivement la période est difficile et frustrante, mais que les professeurs doivent bien évaluer leurs cours, qu’ils ne sont pas compétents en psychiatrie et qu’il faut consulter, et qu’on n’a pas le choix. Tous ces arguments sont audibles, mais aussi sans pertinence face à ce que nous vivons. Il n’y a pas d’impasse. Il n’y a d’impasse que parce qu’on refuse de toucher aux murs, parce qu’on se dit que les étudiants trouveront bien un moyen de tenir, qu’on notera gentiment leurs travaux médiocres, et que tout ça ne sera pas éternel ; comme on a toujours fait. Et on continue à faire des cours Zoom – au moins on ne se rend pas compte que personne n’écoute – en ignorant ce qui se passe de l’autre côté des écrans.

    Voilà ce qu’il y a, derrière les écrans, derrière les têtes fatiguées-ennuyées, les caméras éteintes et le mode muet : il y a nous qui ne tenons pas, nous qui arrivons de moins en moins à rendre des travaux même médiocres, nous pour qui l’horizon est complètement bouché. Alors il n’y a pas d’autre possibilité que de remettre en cause ce à quoi on refusait de toucher, dans sa totalité.

    https://blogs.mediapart.fr/maina-catteau/blog/051220/du-malaise-en-milieu-etudiant

    #ESR #étudiants #confinement #distanciel #enseignement #université #facs #enseignement_à_distance #témoignage #silence #interaction #concentration #relations_sociales #vie_étudiante #vie_personnelle #espace #séparation_spatiale #solitude #dépression #sondage #épuisement #fatigue #lassitude #souffrance #angoisse #conditions_d'étude #cauchemar #déconfinement #déni #covid-19 #coronavirus

    Déjà signalé ici : https://seenthis.net/messages/889944
    –-> j’ai ajouté des mots-clé

  • « Les étudiants sont-ils les derniers de cette putain de cordée ? » : la colère d’Olivier Ertzscheid
    https://www.nouvelobs.com/idees/20201127.OBS36694/les-etudiants-sont-ils-les-derniers-de-cette-putain-de-cordee-la-colere-d

    En plus d’avoir du renoncer aussi à leurs stages, à leurs projets, ils et elles ont bien sûr renoncé à toute forme de vie sociale, ils ne voient plus leurs amis autrement qu’en ligne. Ils n’ont pas fêté leur bac avec leurs ami.e.s. Ils n’ont pas fêté leurs partiels avec leurs ami.e.s. Ils ne fêtent souvent même pas leurs anniversaires avec leurs ami.e.s. Pour beaucoup d’entre elles, pour beaucoup d’entre eux, la troisième vague des séquelles psychologiques est déjà là,

    (...)

    Cette situation est d’autant plus aberrante et révoltante qu’une infime minorité de ces étudiant.e.s continuent d’étudier dans des conditions parfaitement normales : il s’agit des classes préparatoires et des BTS. La raison : les cours ont lieu en lycée. Donc ils s’entassent dans des salles de cours où ils sont souvent plus de quarante, mais comme ils sont « en prépa », et bien… on les prépare. Il paraît même qu’il y en a qui découvrent Bourdieu et la reproduction des élites.

    (...)
    Les sociabilités étudiantes sont complexes. Il en est de rituelles qui s’inscrivent dans des temps et des lieux dédiés, les soirées et les bars notamment. Mais il en est d’autres, tout aussi essentielles, qui sont des sociabilités courtes, fragmentaires, fractales presque : la sociabilité de l’intercours, la sociabilité du bavardage, la sociabilité du temps de pause entre deux amphis, la sociabilité du regard que l’on échange entre camarades de promo simplement parce que l’on est témoins et acteurs d’un même espace, une sociabilité qui peut-être celle du désir amoureux, celle de la connivence d’une amitié future ou déjà scellée, ce sont toutes ces micro sociabilités qui sont essentielles à la vie étudiante. Ces sociabilités sont « Covid compatibles » : elles peuvent s’exercer dans des groupes restreints, dans des lieux et des espaces réglementés avec toute la panoplie sanitaire nécessaire, elles peuvent également s’exercer masquées.

  • Une tribune d’enseignants-chercheurs demande la #réouverture des #universités

    Le monde de l’enseignement supérieur implore le gouvernement de rouvrir les facultés. Après les présidents d’université, ce sont des enseignants-chercheurs qui montent au créneau, à travers une tribune.

    https://www.dna.fr/education/2020/11/27/une-tribune-d-enseignants-chercheurs-demande-la-reouverture-des-universites

    –—

    La Tribune :

    C’est un sentiment de sidération, puis de colère, qui a saisi mardi soir des dizaines de milliers d’étudiants et d’universitaires : tandis que les lieux de culte et les supermarchés rouvriront dès ce week-end, les universités ont été condamnées à rester portes closes jusqu’en février dans le meilleur des scénarios. Aucun plan B n’est prévu. C’est pourtant le même exécutif qui, entre mai et octobre, a ignoré les alertes des universitaires sur les risques de contamination dans les établissements du Supérieur, mais aussi les rapports scientifiques détaillant les moyens qui permettent d’ouvrir ces lieux de création et de transmission du savoir sans en faire des foyers infectieux. Ces préconisations n’ont toujours pas été appliquées. La décision présidentielle résonne comme un aveu, dans un contexte où les universités subissent des attaques de l’exécutif et de ses alliés. Cette défiance envers les étudiants et les enseignants ne fait qu’accompagner le glissement de notre société vers un obscurantisme dont le développement des théories complotistes n’est qu’une des manifestations les plus évidentes.

    Le mythe de l’enseignement numérique s’est fracassé contre la réalité des conditions de confinement des étudiantes et des étudiants. Leurs situations, tant psychologiques que matérielles, ne cessent de nous alarmer : dépression, précarité matérielle et subjective, décrochage des études, en particulier pour les bacheliers qui doivent apprendre les méthodes de l’Université après avoir été en partie déscolarisés ce printemps. Une société qui maltraite ainsi sa jeunesse est une société qui se prive d’avenir. Ce sont les jeunes adultes d’aujourd’hui qui, dans les vingt années à venir, auront la charge de surmonter les crises économique, sociale, écologique et démocratique, laissées actuellement sans réponse. La réouverture de l‘Université n’est pas que l’affaire du monde académique : elle nous regarde toutes et tous, si nous voulons sortir notre société de l’ornière.

    Peut-on faire en sorte de limiter la circulation du virus dans les universités, afin de les ouvrir dès janvier ? À cette question, comme scientifiques, comme citoyens, comme parents ou comme grand-parents, nous devons répondre par l’affirmative. Dans l’état actuel des connaissances, on ne peut exclure qu’une fraction importante des contaminations se fasse par voie aérosol, dans des milieux clos mal ventilés, même avec le port de masques ordinaires, toujours imparfait. Il aurait été nécessaire dès le printemps dernier de quantifier le taux de transmission des différentes voies de contamination. Cela n’a pas été fait.

    Pour ouvrir enfin l’Université, et ne pas ajouter à l’angoisse d’un avenir fermé le désespoir des étudiants, il est possible d’adopter un protocole rationnel prenant en compte les lacunes actuelles de notre savoir sur la maladie et reprenant les meilleures pratiques en vigueur dans les pays qui ont réussi à limiter très tôt l’ampleur de la deuxième vague. Ainsi, des mesures systématiques des taux de CO2 permettent de déterminer le nombre de personnes admissibles dans chaque salle. En cas de ventilation mécanique insuffisante ou inexistante, il faut adjoindre des purificateurs d’air à filtre Hepa, comme ceux conçus en kit dans les écoles de santé publique de Harvard, Yale ou du Max Planck Institute. L’Allemagne a débloqué 500 millions € pour l’amélioration de la ventilation des lieux collectifs ; la France, pas un euro. Quant aux présidences des dix universités les plus dotées, qui demandent aujourd’hui à pouvoir rouvrir en premier, rappelons qu’elles ont refusé de procéder à tout investissement, s’enfermant dans le déni des contaminations dans les lieux publics. La réquisition de locaux additionnels peut compléter ce plan matériel d’urgence. Les équipes enseignantes comme les étudiants doivent être équipés de masques FFP2 non médicaux gratuits, et nettoyés sur les campus pour pouvoir être recyclés. Les tests salivaires collectifs et le suivi de la charge virale dans les eaux usées doivent être systématisés. Il faut enfin nettoyer et aérer les salles de cours ; repenser et fermer les lieux de restauration collective — voies principales de contamination — au profit du plein air. Enfin, pour recouvrer l’ensemble des étudiants après ces mois si pénibles, l’enseignement en petits groupes devra être privilégié.

    Cela demande des moyens, nous dira-t-on, en particulier des recrutements. Oui. Le sort de notre jeunesse en dépend. Si nous voulons redonner un avenir à notre pays, redonnons-lui son université.
    Les 100 premiers signataires

    Jocelyn Achard, Sylvain André, Bruno Andreotti, Maïtena Armagnague, Jean-Luc Autran, Sakina Ayata, Christine Bailleux, Christophe Baticle, Gwladys Bernard, Olivier Berné, Magali Bessone, Thibaud Boncourt, Jean-Guillaume Bordes, Vincent Borrelli, Elise Brayet, Sylvie Brodziak, Yann Bugeaud, Guillaume Calafat, Inès Cazalas, Kristel Chanard, Pascale Chiron, Guillaume Coqui, Florent Coste, Hélène Cottet, Dominique Crozat, Pierre-Yves Dacheux, Louis Dautais, Natalie Depraz, Jean-Pierre Digard, Pascale Dollfus, Pascale Dubus, Vincent Duchêne, Claire Ducournau, Thomas Dufaud, Florence Elias, Catherine Fabre, Isabelle Faure, Anaïs Flechet, Jean-Louis Fournel, Gilles Frison, Irène Gayraud, Laurence Giavarini, Lucas Gierczak, Linda Gil, Anne-Florence Gillard-Estrada, Séverine Grélois, Michèle Guillemont, Emilie Guitard, Alexandrine Guyard-Nedelec, Jacques Haiech, Patrick Haillet, Elise Julien, Benoît R. Kloeckner, Alexis Ladreyt, Frédéric Lambert, Frédéric Landy, Martin Laviale, Francis Lazarus, Coline Leonard, Pascal Maillard, Sandrine Maljean-Dubois, Dominique Manchon, François Marchal, Laurent Marsan, Emmanuel Marty, Jean-Marie Merle, Pierre-Yves Milcent, Perola Milman, Pierre-Yves Modicom, Mathilde Monge, Pierre-Louis Montagard, Marc Monticelli, Olivia Munoz, Alexandre Niveau, Pascal Noble, Luc Paillard, Arnaud Plagnol, Alson Ramamamtsialonina, Marwan Rashed, Nicolas Rialland, Jérémy Rivière, Michel Rueher, Arnaud Saint-Martin, Franck Salaün, Sabine Santucci, Nicolas Schabanel, Sophie Servais, Tumba Shango Lokoho, Johanna Siméant-Germanos, Frédéric Soulu, Frederic Sounac, Fabien Stalport, Matthias Steinle, Antonin Thiébaut, Mathieu Tremblin, Grégoire Varillon, Miguel Angel Veganzones, Eric Verdeil, Chantal Zabus, Simon Zara.

    http://rogueesr.fr/ouvrons_les_universites

    #facs #ESR #déconfinement #confinement #covid-19 #coronavirus #tribune #ouverture #réouverture

  • Crise au ministère de la Recherche : « Cette #démission a été pour moi une décision douloureuse »

    Le directeur général de la recherche et de l’innovation balance sec contre la ministre, #Frédérique_Vidal, dans sa lettre de départ que « Libé » s’est procurée.
    La ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique #Vidal, semble avoir réussi à se mettre un sacré paquet de personnes à dos. Certes, elle est parvenue à faire voter sa #loi_de_programmation_de_la_recherche (#LPR), mais pour le reste… les #critiques fusent de partout : des flopées d’universitaires et de chercheurs sont en #colère. Et désormais, ça tangue aussi à l’intérieur de son ministère, au sein même de son administration.

    #Bernard_Larrouturou, à la tête de la #Direction_générale_de_la_recherche_et_de_l’innovation (#DGRI) que l’on savait sur le départ, a décidé de quitter ses fonctions ce mardi. La décision a été confirmée en Conseil des ministres ce mercredi. Dans une #lettre adressée à son équipe, que Libération s’est procurée, il balance sec sur la ministre, et son cabinet, pour expliquer sa #démission. « Je ne m’y suis résolu que parce que l’#isolement – entretenu par la direction du cabinet – de la ministre, avec laquelle les directeurs généraux n’ont eu aucun échange depuis plus de six mois, et les difficultés aiguës qui persistent depuis un an et demi en matière de relations de travail entre le cabinet et les services ont installé un véritable #empêchement – voire une #impossibilité – pour la conduite d’une partie des actions que la DGRI doit porter. »

    « Avec mépris »

    Il assure avoir demandé « de façon répétée » ces derniers mois que « les services cessent d’être tenus à l’écart de certaines réflexions clés ou de la préparation de certains arbitrages majeurs, et qu’à tout le moins ils aient les informations minimales leur permettant de ne pas être en porte-à-faux vis-à-vis des interlocuteurs externes ». Bonne ambiance.

    Bernard Larrouturou brosse le portrait d’une ministre autoritaire, qui « a traité avec #mépris et humilié des personnes de la DGRI », ou « exigé arbitrairement la mise à pied de tel cadre de nos équipes ». Il avait été nommé à ce poste par Frédérique Vidal en août 2018.

    « De grands #regrets »

    Dans sa lettre, le directeur général de la recherche reconnaît aussi ne pas avoir suffisamment travaillé certains sujets. « J’ai eu de grands regrets depuis l’été 2019 du fait que, n’ayant pas vu d’autre voie pour mener le chantier d’élaboration de la LPR qu’en m’impliquant très fortement, j’ai manqué de disponibilité pour beaucoup d’autres tâches importantes. » Il cite « le #management_interne », « les #conditions_de_travail », le lien avec les rectorats et « plusieurs autres registres de notre action qui ont souffert de mon implication insuffisante ». Est-ce là une façon de souligner, sans le dire, le manque d’anticipation et d’accompagnement des équipes dans la gestion de la crise sanitaire ? En juin, un rapport sénatorial pointait « le manque de stratégie nationale de recherche sur la Covid-19 et l’absence de structure de pilotage unique ».

    https://www.liberation.fr/france/2020/11/25/crise-au-ministere-de-la-recherche-cette-demission-a-ete-pour-moi-une-dec
    #humiliation #MESRI #France #université #facs #recherche #Larrouturou

  • Mise au point : les dangers de la nouvelle pénalisation des universités

    La #commission_mixte_paritaire (#CMP) qui s’est tenue hier après-midi, lundi 9 novembre 2020, était chargée de trancher les points de désaccords persistants entre l’Assemblée nationale et le Sénat à propos de la loi de programmation de la recherche. Pour cela, elle devait trancher, article par article, entre la version du texte votée par l’Assemblée nationale en première lecture et celle retenue par le Sénat.

    Les choix qu’elle a faits ont été pour le pire. Mais sur un point bien précis, pourtant, la CMP a choisi d’innover, plutôt que de trancher : elle a inséré dans la loi un nouvel article 20 bis AA qui dispose que :

    « Le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement supérieur sans y être habilité en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ou y avoir été autorisé par les autorités compétentes, dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement, est passible des #sanctions définies dans la section 5 du chapitre Ier du titre III du livre IV du #code_pénal ».

    Cet article est tombé du ciel. Plus précisément, il élargit de façon considérable un précédent article, que le Sénat avait lui-même déjà sorti de son chapeau (amendement n°147), et à propos duquel Academia n’a eu de cesse de sonner l’alerte.

    Un tel article est très grave – l’un des plus graves que contient la LPR, même – pour les raisons que nous avons exposées dans les minutes qui ont suivi la fin de la CMP : il sonne rien moins que la fin pure et simple des contestations sur les campus et ouvre grand la porte à toutes les dérives autoritaires.

    Il faut d’ailleurs mesurer la bassesse de la manœuvre de la ministre : jusqu’à présent, la ministre avait veillé à ne donner aucune prise directe à une #contestation du projet de loi par les étudiant·es et leurs organisations. Elle savait, en effet, que si cette #contestation_étudiante venait à s’ajouter à la fronde des personnels de l’ESR, le projet de loi ne s’en relèverait pas. Le nouveau #délit qui a été introduit hier montre, pourtant, que ces organisations étudiantes se trouvaient bien, en réalité, au centre du viseur gouvernemental. Car ce sont bien elles, à n’en pas douter, qui seront les premières victimes de la #pénalisation des #contestations dans les établissements.

    Un énorme doute nous étreint, au passage. Academia a déjà expliqué la basse manœuvre procédurale dont a usé la ministre pour court-circuiter tout débat autour de la mise à l’écart du Conseil national des universités. Et si, assistée de quelques chefs d’établissement, elle avait fait pire encore ? Et si l’introduction d’un tel article en commission mixte paritaire – ce qui revient à évincer littéralement les deux chambres, à supprimer toute forme de débat public à propos de cette mesure, et à court-circuiter toute protestation étudiante – était, elle aussi, préméditée ? Ce qui est sûr, c’est que, préméditation ou improvisation de dernière minute, l’introduction d’un délit de grande ampleur au stade d’une commission mixte paritaire dite « conclusive » est une ignominie. Ce ne sont pas des pratiques qui, dans une démocratie, devraient être permises.

    Une rumeur circule néanmoins à propos de ce délit, à laquelle il faut couper court : celle selon laquelle les collègues affectés dans un établissement, ou sous contrat avec celui-ci, ainsi que les étudiant·es qui y sont inscrit·es n’entreraient pas dans le champ du délit nouvellement créé. Cette interprétation est tout à fait discutable : dès lors que la formule choisie intègre dans le champ du délit toutes les personnes situées dans l’enceinte de l’université qui n’y ont pas été « autorisé[es] par les autorités compétentes », son champ d’application est, au contraire, très étendu. Quelques explications très brèves s’imposent à ce propos .

    La pénalisation des « non-autorisé·es »

    Il n’y a rien de plus simple que de placer quelqu’un dans une situation de ne pas être autorisé·e à être dans tout ou partie de l’université, y compris si cette personne est un personnel de cette université ou un·e étudiant·e qui y est inscrit·e.

    Il existe, pour cela, deux moyens.

    Le premier moyen relève de ce que l’on nomme le pouvoir de police général du président d’établissement. Celui-ci est « responsable du maintien de l’ordre » dans l’université (article L. 712-2, 6° du code de l’éducation, complété par l’article R. 712-1). A ce titre, il peut, soit lui-même, soit par l’entremise du directeur ou de la directrice de site ou de composante auquel·le il a donné délégation, refuser la tenue de certaines manifestations ou évènements, et même interdire « à toute personne et, notamment, à des membres du personnel et à des usagers de l’établissement ou des autres services ou organismes qui y sont installés l’accès de ces enceintes et locaux » d’accéder à ces locaux (article R. 712-8 du même code). Sur ce fondement, la possibilité de se retrouver en situation « non autorisée » est considérable, et ce, quand bien même on est directement rattaché à l’établissement.

    Le deuxième moyen est plus puissant encore, car il est préventif, et fait écho à une vive polémique qui s’était développée en février dernier, concernant l’université Paris-Descartes (université de Paris). Il suffit, pour cela, de créer, dans le règlement intérieur des établissements, des obligations sévères concernant l’organisation des évènements scientifiques, des réunions publiques et autres assemblées générales, ou concernant l’accès aux locaux des présidences ou aux séances des conseils d’administration. On songe, par exemple, à des obligations de présenter, deux mois à l’avance, une demande d’affectation d’un local auprès du président de l’université » ou aux interdictions de se rendre dans certains locaux sans autorisation formelle préalable, que le « badgage » à grande vitesse des universités rend aujourd’hui très concrètes.

    C’est même une tendance de fond des dernières années, que nous sommes nombreux·ses à dénoncer : les « non-autorisé·es » se multiplient à l’infini, la tradition d’accessibilité aux campus est en voie de disparition, les universités, devenues paranoïaques sous l’impulsion de réseaux comme Vigilance Universités ou Qualité de la science française, se ferment physiquement, en même temps que les collègues et les étudiant·es se trouvent sans cesse plus contrôlé·es, que ce soit pour faits de grève ou pour prétendu·es radicalisations.

    Et voilà donc que maintenant, d’un trait de plume dans les règlements intérieurs, ces « non-autorisé·es » sont en voie de pénalisation, avec des peines disproportionnées allant d’un à trois ans d’emprisonnement. Mais quelle université sommes-nous donc en train de voir éclore ?
    L’atteinte aux franchises universitaires

    Précisons, enfin, qu’une fois ces règlements intérieurs rédigés pour ce qui concerne les personnels et les étudiant·es de l’établissement, et indépendamment même de ces règlements intérieurs pour tou·tes les autres, les forces de l’ordre pourront intervenir, au titre du flagrant délit, et les procureurs pourront engager des poursuites, sans même que le président de l’établissement ne les sollicite. C’est, autrement dit, la reprise en main des universités qui se dessine au travers de cette disposition, et une attaque d’une violence presque sans précédent à l’égard des franchises universitaires.

    Cette manière de faire a la finesse d’un bulldozer. Depuis l’article 157 du décret impérial du 15 novembre 1811 relatif au régime de l’université, qui disposait :

    « Hors les cas de flagrant délit, d’incendie ou de secours réclamés de l’intérieur des lycées, collèges et autres écoles publiques appartenant à l’université, aucun officier de police ou de justice ne pourra s’y introduire pour constater un corps de délit ou pour l’exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt dirigé contre des membres ou élèves de ces établissements, s’il n’en a l’autorisation spéciale et par écrit de nos procureurs généraux, de leurs substituts ou de nos procureurs impériaux »,

    les franchises universitaires, tout comme les libertés académiques dont elles sont une déclinaison, plient seulement devant le droit pénal. Dès lors, il existe une manière très simple de procéder, que la ministre et celles et ceux qui la soutiennent ont bien assimilées : cette manière de faire consiste, non pas à toucher directement aux « franchises universitaires », mais à « se contenter » d’étendre le champ de la pénalisation des universités, et donc… le pouvoir d’intervention des autorités extérieures aux universités. C’est comme cela que l’on tue, sans le dire et sans l’assumer, mais de manière incontestable, ces franchises.

    *

    Bref, on l’aura compris, il est parfaitement irresponsable de faire circuler la rumeur selon laquelle les collègues affectés dans un établissement, ou sous contrat avec celui-ci, ainsi que les étudiant·es qui y sont inscrit·es n’entreraient pas dans le champ du délit nouvellement créé.

    N’oublions pas, non plus, que cet article nouveau, que la CMP a introduit hier, est le décalque d’un article du code pénal, le L. 422-31, qui existe d’ores et déjà depuis dix ans concernant les établissements scolaires et non universitaires, à la suite d’une des lois les plus liberticides du quinquennat de Nicolas Sarkozy, la loi du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public. Un article qui a allègrement servi, au printemps 2018, à placer en garde à vue, puis à déférer devant un juge des adolescent·es occupant le lycée Arago à Paris.

    Quand la police a embarqué tout le monde, la question de savoir lesquel·les de ces lycéen·nes étaient, ou non, inscrit·es dans l’établissement, et bien personne ne l’a posée…

    https://academia.hypotheses.org/28160
    #criminalisation #université #facs #grèves #luttes #police #ESR

    • L’université en taule

      Dernière étape significative du processus législatif pour la LPPR/LPR, la commission mixte paritaire s’est achevée hier, lundi 9 novembre, sur le pire des textes, et pire encore.

      Certes, l’amendement 234, celui qui asservissait les libertés académiques aux « valeurs de la République », a été redéfini pour être neutralisé. En revanche, l’amendement 147 (dit du « #délit_d’entrave ») a été encore aggravé, transformant la LPPR, loi de précarisation et de privatisation, en un cauchemar qui dépasse notre imagination : « tout délit d’entrave est désormais passible de 1 an de prison et de 7 500€ d’amendes, et s’il est commis en réunion, de 3 ans de prison et de 45 000€ d’amendes. »

      Cette prétendue « loi recherche » est donc une loi de précarisation, de privatisation et de criminalisation, qui entend nous faire passer de l’université au pénitencier.

      C’est la fin des franchises universitaires, consubstantielles à l’université depuis ses origines. Est-ce la fin de l’université comme espace ouvert, garantissant la production collective et la diffusion des connaissances, fonctionnant comme un organe démocratique vital ? Est-ce la fin des mouvements sociaux étudiants que nous connaissons, privés d’une bonne partie de leur répertoire d’action ? La réponse dépend de nous, de la puissance de nos collectifs.

      Chez Université Ouverte, nous ne parvenons même pas à compter le nombre d’années cumulées que nous aurions, nous tou·tes, passées en prison – d’autant plus que, paraît-il, nous agissons en bande organisée. Notre lutte pour une université ouverte aurait clairement commencé (ou fini ?) en taule.

      Assurément, il sera encore plus difficile encore pour les plus précaires, pour les plus dominé·es (nous pensons notamment à nos camarades n’ayant pas une nationalité européenne) de se mobiliser pour défendre leurs droits, leurs conditions d’étude, de travail et de vie. Tou·tes, nous devons faire bloc et être là pour elles et eux.

      Game over, donc ? Certainement pas !

      D’une part, nous comptons bien faire tomber cet amendement qui criminalise le mouvement social. D’autre part, quoi qu’il arrive, nous n’arrêterons pas de lutter ! Comme l’intersyndicale de l’ESR de Montpellier, nous appelons à rejoindre les collègues de l’Éducation nationale dans la rue !

      https://universiteouverte.org/2020/11/10/luniversite-en-taule

    • Retour du délit d’entrave : c’est pour cet après-midi

      >>> Mise à jour 5 février 2021 : Les deux #amendements des députés LR ont été rejetés par l’Assemblée nationale ce jeudi 4 février vers 23h30, après avis défavorables de la rapporteure, Laurence Vichnievsky, et du garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, qui ont déclaré ne pas souhaiter multiplier les infractions pénales nouvelles pour chaque profession et situation. Il faut se réjouir de cette position du gouvernement et de la majorité : le soutien qui avait été accordé à l’amendement n° 147 du sénateur Lafon, lors des débats sur la loi de programmation de la recherche fin octobre, n’a donc pas été renouvelé.

      A noter que lors des débats sur l’amendement n° 1255, le député Breton a regretté ces deux avis défavorables et pointé les prétendues « dérives idéologiques » à l’université. « Des courants, cancel culture etc., visent à vous empêcher de parler », a-t-il expliqué, et « sont en train de s’infiltrer à l’université ».

      A suivre au Sénat…

      L’Assemblée nationale poursuit l’examen du projet de loi confortant le respect des principes de la République. Elle examinera, ce jeudi 4 février 2021 à une heure encore indéterminée de l’après-midi ou de la soirée, deux amendements particulièrement importants pour les universités. Il s’agit des amendements n° 1255 et 1832.

      L’amendement n° 1255, déposé par les députés (LR) Benassaya et Therry, est propre à l’enseignement supérieur et prévoit que :

      « Le fait d’entraver ou de tenter d’entraver, par des pressions ou des insultes sur les enseignants universitaires, l’exercice des missions de service public de l’enseignement supérieur est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »

      L’amendement n° 1832, déposé par l’inénarrable député Aubert accompagné de douze de ses collègues, concerne l’ensemble des agents publics ou privés en charge d’une mission de service public et prévoit que :

      « Le fait d’entraver à l’aide de menaces, violences, voies de fait, destructions ou dégradations au sens du présent code, l’exercice par un professionnel de santé de son activité professionnelle, l’exercice par un enseignant de sa mission de service public, ou l’exercice par un agent public ou privé de sa mission de service public est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. »

      Contexte défavorable

      Le contexte dans lequel ces deux amendements vont être discutés est très défavorable. Certes, les tentatives des Républicains (amendements n° 20, 203, 878, 1152 et 1613) et du Rassemblement national (amendement n° 1645) d’interdire le voile à l’université ont à nouveau échoué hier soir ; mais les discussions ont montré qu’un nombre désormais important de député·es, y compris de la majorité, croient mordicus que l’enseignement supérieur et la recherche sont devenus des hauts lieux de la « radicalisation » et du « séparatisme ». Ils et elles en sont persuadé·es, car ils et elles pensent en avoir la preuve irréfutable : à l’université, des enseignant·es et des chercheur·ses travaillent sur « le décolonialisme, le racialisme, l’indigénisme et l’intersectionnalité », qui sont des « mouvements puissants et destructeurs », comme l’expliquait hier soir sans rire la vice-présidente de l’Assemblée nationale, Annie Genevard.

      Ce discours n’est pas cantonné à l’opposition de droite et d’extrême droite. Il suffisait d’écouter, hier soir, la députée LREM Anne Christine Lang, transfuge du PS (voir la vidéo, à partir de 4h58 min) :

      « Il y a un autre combat, qui est effectivement encore plus urgent et beaucoup plus fondamental, et qui nous concerne tous, qui est évidemment le fait de défendre l’universalisme républicain à l’université contre les coups de butoir qui lui sont portés, défendre l’héritage des Lumières contre des théories qui, encore une fois, ne sont pas anecdotiques. Et elles ne sont pas anecdotiques, Monsieur Mélenchon, parce que si l’on respecte évidemment le débat que vous évoquiez sur les thèses indigénistes, sur l’intersectionnalité, le problème est que les partisans de ces théories excluent tout autre débat. Et c’est leur intolérance et une forme de totalitarisme intellectuel qu’il nous faut combattre […] ».

      Nous ne sommes pas sûr·es que la communauté de l’ESR ait bien pris la mesure de ce qui se passe : une partie de nos gouvernant·es est aujourd’hui convaincue que « l’université est malade », pour reprendre les mots d’Annie Genevard hier soir, et qu’un nombre grandissant d’enseignant·es-chercheur·ses travaillent contre la République, tout en faisant régner la terreur au sein des établissements.

      Au rythme où vont les choses, cette panique morale, savamment entretenue par quelques universitaires à la responsabilité gigantesque, risque à tout instant de se traduire sur le plan juridique. On a évité de très peu le choc lors de la préparation de la loi de programmation de la recherche, avec les tentatives de subordonner les libertés académiques aux « valeurs de la République » et de créer un délit d’atteinte au bon ordre des établissements. Mais la deuxième salve arrive déjà : les deux amendements qui seront examinés cet après-midi ou ce soir en sont l’une des manifestations. Et d’ailleurs, si ce n’est pas pour cette fois, ce sera pour la prochaine… Il ne fait plus aucun doute que l’université est dans le viseur.
      Les amendements n° 1255 et 1832

      À première vue, pourtant, les amendements n° 1255 et 1832 pourraient paraître défendables. Comment pourrait-on être contre une mesure destinée à protéger les « enseignants universitaires » contre les « entraves » et « tentatives d’entraves », par des « pressions ou des insultes », à « l’exercice des missions de service public de l’enseignement supérieur » (amendement n° 1255) ou contre des « entraves », « à l’aide de menaces, violences, voies de fait, destructions ou dégradations », à « l’exercice par un enseignant de sa mission de service public » (amendement n° 1832) ? Comment pourrait-on être contre une disposition qui lutterait contre des perturbations du type de celles qui ont gravement perturbé le colloque international sur la « nouvelle école polonaise d’histoire de la Shoah » en février 2019 à l’EHESS ?

      En réalité, ces deux amendements ressemblent en bien des points à l’amendement n° 147 du sénateur Lafon, qui avait été introduit dans la loi de programmation de la recherche lors d’une triste nuit au Sénat fin octobre 2020. Nous résumerons cela en trois points :

      Ces amendements cherchent à établir des infractions aux formulations très vagues, ce qui leur assure une portée répressive élargie. Car qu’est-ce qu’une « entrave » à « l’exercice des missions de service public de l’enseignement supérieur » et qu’est-ce qu’une « pression » ou une « menace » ? A l’évidence, les blocages entreront dans le champ de l’infraction, mais plus généralement toute forme de chahut, comme des interventions vives lors des débats ou la perturbation de conseils d’administrations. On sait par avance quels en seront, plus généralement, les effets sur la liberté d’expression dans les universités : comme à chaque fois que l’on pénalise un champ qui ne l’était pas, on le contraint à s’auto-discipliner de manière préventive ; et, sous prétexte de réagir à quelques situations ponctuelles, on introduit une atteinte à la liberté d’expression dont les effets insidieux débordent largement les hypothèses initiales.
      Les peines encourues sont en tout état de cause disproportionnée. Un an de prison et 15 000 euros d’amende pour l’amendement 1255, trois ans et 45 000 euros pour l’amendement 1832, alors même qu’en cas de violence ou de dégâts matériels, des infractions existent évidemment déjà et peuvent être lourdes.
      Mais le plus grave est ailleurs, et cela avait déjà été pointé à maintes reprises en novembre et décembre dernier, par exemple par Paul Cassia : cette grande pénalisation de l’enseignement supérieur est une attaque directe contre les « franchises universitaires », en ce qu’elle grignote l’autonomie dans la gestion de l’ordre public universitaire. Comme l’expliquait Academia, avec ces nouvelles dispositions pénales, si jamais elles sont adoptées, les forces de l’ordre pourront intervenir, au titre du flagrant délit, et les procureurs pourront engager des poursuites, sans même que le président de l’établissement ne les sollicite. C’est, autrement dit, la reprise en main des universités qui se dessine au travers de ces amendements, dont la prochaine étape, écrivait Paul Cassia :

      « est la reprise en mains ministérielle et parquetière de l’indépendance des universitaires dans leur cœur de métier, l’enseignement et la recherche, ainsi que le laissaient d’ores et déjà présager les propos tenus par la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal en séance publique au Sénat le 16 janvier 2019 à propos de l’augmentation des frais d’inscription spécifiques aux étudiants étrangers prévu par le programme « Bienvenue en France » : les professeurs et maîtres de conférences des universités « sont des fonctionnaires de l’Etat, il est évidemment très important qu’ils portent les politiques publiques décidées par l’Etat, c’est le devoir de tout fonctionnaire, ce devoir d’obéissance et ce devoir de loyauté ».

      L’enjeu autour de ces deux amendements est donc considérable. Si l’un ou l’autre est adopté, il est loin d’être sûr que le Conseil constitutionnel prononce une censure de l’ordre de celle accomplie pour la LPR : la qualité de « cavalier législatif » de ces deux amendements est loin d’être établie, et c’est d’ailleurs pour cela que les services de l’Assemblée nationale ont autorisé leur discussion.

      Alors, se fait-on peur pour rien ? La majorité parlementaire rejettera-t-elle ces deux amendements venant des rangs des Républicains comme elle a rejeté hier soir ceux interdisant le port du voile à l’université ? On peut l’espérer et on sera fixé cet après-midi. Une chose est sûre, en revanche : c’est qu’à ce jeu-là, on ne s’en sortira plus bien longtemps, si notre seule stratégie collective, en matière de défense des libertés académiques, est de nous terrer en espérant que, d’elle-même, la mitraille cesse.

      https://academia.hypotheses.org/30635

  • Facs fermées, prépas ouvertes : l’enseignement supérieur à marche différenciée

    Lundi, les étudiants des #classes_préparatoires et des #BTS, formations assurées dans des lycées, pourront suivre leurs cours en présentiel, contrairement aux étudiants de l’#université.

    En prépa maths-physique au lycée Camille-Jullian, à Bordeaux, Morgane Kramer est soulagée de pouvoir revenir en cours lundi, au retour des vacances de la Toussaint. « C’est une chance, je suis très contente. Même si c’est un peu bizarre, alors que tous mes amis, à la fac, vont rester à la maison », raconte la jeune femme de 19 ans. Le confinement du printemps, Morgane l’avait plutôt bien vécu : rentrée chez ses parents à Toulouse, elle avait suivi ses cours sur Zoom et Discord. « C’était pas si compliqué, on pouvait poser des questions, les profs étaient disponibles… Et puis, j’avais moins de transports, plus de temps pour travailler. Mais les vrais contacts me manquaient ».

    Avec ce nouveau confinement, les formations de l’enseignement supérieur ne sont pas toutes logées à la même enseigne. Jeudi soir, Jean Castex donnait des détails sur le fonctionnement à venir des universités – cours basculés intégralement en ligne, bibliothèques ouvertes sur réservation, restaurants accessibles seulement pour la vente à emporter, personnel en télétravail mais possibilité d’accès aux laboratoires, examens maintenus, dérogations possibles pour les cours en travaux pratiques…

    De son côté, Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, écrivait dans un post Instagram que les 85 000 étudiants de classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) continueraient, eux, d’aller en cours lundi, car les lycées restent ouverts. Tout comme les 260 000 élèves des BTS et formations assimilées assurés dans les établissements d’enseignement secondaire. Les Instituts universitaires de technologie (IUT), autres formations post-bac en deux ans, mais dépendants des universités, basculent leurs cours à distance.

    https://www.lemonde.fr/campus/article/2020/10/31/facs-fermees-prepas-ouvertes-l-enseignement-superieur-a-marche-differenciee_

    #facs #prépas #grandes_écoles #fermeture #ouverture #covid-19 #coronavirus

  • Loi de programmation de la recherche : nuit noire sur le Sénat
    https://academia.hypotheses.org/27401

    Les six premiers articles de la loi de programmation de la recherche ont été adoptés hier par le Sénat. En une soirée – une seule soirée ! –, les sénateurs et les sénatrices auront délibéré sur l’ensemble de la programmation budgétaire (articles 1 et 2), les chaires de professeurs junior (article 3), les contrats doctoraux de droit privé (article 4), les contrats post-doctoraux (article 5) et les CDI de mission (article 6). Les débats se poursuivront ce matin à partir de 10h30 ; mais, sans attendre, nous pouvons dresser un bilan d’étape, car ce qui se passe est bien au-delà de nos pires craintes. Il suffit de parcourir la version de la loi faisant apparaître les modifications du Sénat pour s’en convaincre : non seulement le Sénat n’a pas corrigé tel ou tel point de la loi de programmation de la recherche (...)

  • Arrive aujourd’hui, 21.10.2020, un message de mon #université (#Université_Grenoble_Alpes) qui nous invite à s’inscrire à une #formation...
    La formation s’intitule :
    Gestion du #stress pour les enseignant(e)s

    La troisième annonce en ce genre, les deux précédentes étaient des formations qui portaient sur :

    1. Gestion de #conflits (formation mise sous le thème « #efficacité_professionnelle »)

    2. Mieux vivre ses #émotions dans ses #relations_professionnelles (aussi mise sous le même thème : #efficacité_professionnelle)

    Comme dit ma collègue @mobileborders :
    « De la #responsabilisation_personnelle des #failles_structurelles... »

    #formations #université #facs #ESR

  • Sur la #chute de l’Université, en quatre graphes
    d’après Guillaume Miquelard, maître de conférences habilité en physique des polymères, auteur d’un blog EducPros Un tout petit monde : http://blog.educpros.fr/guillaume-miquelard-et-paul-francois/2015/11/10/evolution-des-effectifs-a-luniversite-personnels-et-etudiants

    Évolution du nombre d’étudiant∙es à l’Université (modulo de petites incertitudes liées à des chiffres concaténés de sources différentes), par Guillaume Miquelard, 2020 :

    Il s’agit de l’évolution du nombre de postes ouverts aux concours MCF sur plus de 20 ans1. Les chiffres 2020 sont provisoires (mais d’ores et déjà légèrement meilleurs que 2019)

    Par « postes proposés », entendre « ouvertures autorisées par le MESRI ». Toutes ne sont pas transformées en postes ouverts (publiés) par les établissements. Tous les postes publiés ne sont pas pourvus. Enfin les « nouveaux postes » sont les nouveaux entrants (donc minoré de détachement/mutation). « Postes proposés total » somme les postes MCF et PU.

    Depuis trois ans, on observe moins de 1000 nouveaux recrutés MCF. Le passage sous la barre des 2000 nouveaux recrutés a eu lieu autour de 2007. Dix ans auparavant, on était à 3000 nouveaux recrutés par an. Pour « MCF + PU », on est passé à moins de 2000 postes en 2018. Nous sommes à 1700 postes proposés MCF + PU aujourd’hui.

    Évolution du « stock » des personnels enseignants à l’Université (modulo de petites incertitudes liées à des chiffres concaténés de sources différentes), par Guillaume Miquelard, 2020 :

    Pour résumer, il y a quinze ans, 20% des docteurs formé·es devenaient MCF. Iels sont aujourd’hui 7%.

    « Je ne sais pas pourquoi [mais@ je repense toujours à cette planche de Pétillon où Jack Palmer écoute la radio qui annonce une chute vertigineuse de toutes les actions à la bourse, avant de s’éteindre et Jack Palmer se dit « soit les piles sont mortes soit c’est vraiment la fin » (Tweet de Guillaume Miquelard, 17 octobre 2020).

    https://academia.hypotheses.org/26900
    #université #statistiques #France #facs #chiffres #personnel #effectifs #étudiants #visualisation #graphique #MCF #doctorat #ESR

    ping @simplicissimus

  • Paroles étudiantes sur les #violences_sexuelles et sexistes

    Notre enquête a pour objectif de lever le voile sur les violences sexistes et sexuelles qui existent au sein des établissements d’#enseignement_supérieur. Nous souhaitons déclencher une prise de conscience pour inciter les différents acteurs de l’enseignement supérieur à agir.

    https://observatoire-vss.com/notre-rapport
    #sexisme #université #facs #France #violences_sexistes #VSS #ESR #étudiants #agressions_sexuelles #viol #homophobie #violences_verbales

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    aussi signalé par @colporteur
    https://seenthis.net/messages/880629

    ajouté à la métaliste :
    https://seenthis.net/messages/863594

    ping @_kg_

  • "Inventer l’#Université et la #recherche de demain"

    Les #vidéos des journées de prospective « Inventer l’#Université et la #recherche de demain » sont désormais presque toutes en ligne :

    • Introduction (J. Siméant-Germanos et B. Andreotti) : repartir des besoins de la société plutôt que de ceux de la recherche et de l’Université. https://youtu.be/qVwUzbKoi3Y

    • Finalités de l’#enseignement_universitaire (V. Durand) : https://youtu.be/RqTXfm888Ok

    • Workday for Future (V. Guillet) : https://youtu.be/IPItYRdfog8

    #Sciences_citoyennes (A. Lapprand) : https://youtu.be/_fKjTFMwSSc

    • De la #division_du_travail scientifique : le couple P.I. / précarité (R. Brette) : https://youtu.be/tu3yo64Q9UQ

    #Université et #démocratie (W. Brown) : https://youtu.be/3lnzDEkZj7g


    https://seenthis.net/messages/880189

    • Les conditions de l’#autonomie_étudiante (H. Harari-Kermadec) : https://youtu.be/N3-ht5lLmzc

    • La condition de #précaire (P.Stamenkovic) : https://youtu.be/NCwy4vqaddI

    • Restaurer la #collégialité dans les instances (J.Gossa) : https://youtu.be/psYZoBQI3_g

    • Une proposition de #budget répondant au besoins de la société (P-Y Modicom) : https://youtu.be/QbHtnZcroyg

    #ESR #facs #conférence