Pour réenchanter les réseaux sociaux, cap vers l’interopérabilité ! | France Culture
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Et si derrière le terme technique d’interopérabilité se trouvait l’espoir d’imaginer des réseaux sociaux plus saints en redonnant aux utilisateurs le contrôle de leurs données. De l’auteur canadien Cory Doctorow au conseil national du numérique, nombreux sont ceux qui réclament ce droit.
Dans le monde que nous traversons et encore davantage dans le monde connecté, un petit souffle d’espoir ne peut pas nous faire de mal, celui ci porte un nom « le droit à l’interopérabilité ». J’avoue que le terme est assez technique et de prime à bord, il ne fait pas rêver, mais ses effets pourraient être particulièrement bénéfiques pour nous, utilisateurs des réseaux sociaux. Le droit à l’interopérabilité nous offrirait la possibilité de pouvoir migrer d’une plateforme à une autre en emportant avec nous nos abonnés et nos abonnements, en un mot notre « capital social ».
Exemple concret depuis la reprise en main de Twitter (devenu X) par Elon Musk, beaucoup de personnes ont désiré quitter cet endroit devenu toxique mais elles se sont retrouvées face à un dilemme, acter ce départ voulait dire abandonner une communauté forgée depuis des années, lâcher un endroit de sociabilité et un espace de visibilité professionnelle. Les grandes plateformes le savent et profitent de cet « effet de réseau », elles ont acquis une telle taille critique qu’elles nous rendent captifs. Nous restons sur une interface nocive pour notre santé mentale car les personnes qu’on aime, qu’on suit, y sont. Mais si le droit à l’interopérabilité était fonctionnel, un mouvement de masse pourrait facilement d’organiser vers de nouveaux acteurs plus éthiques, une saine concurrence qui pourrait d’autant plus se déployer avec la garantie de l’interopérabilité.
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L’auteur canadien Cory Doctorow défend ardemment ce droit dans son dernier essai, « Le rapt d’internet » dont la traduction française vient de paraitre aux éditions C&F, je vous le recommande chaudement. L’auteur nous rappelle que par le passé, nous avons déjà remporté des combats similaires, par exemple en permettant la lecture d’un fichier de traitement de texte d’un mac à un PC ou encore la portabilité de nos numéros de téléphone, souvenez-vous Jean il fut un temps ou changer d’opérateur signifiait abandonner son numéro historique, ce n’est plus la cas aujourd’hui. Doctorow nous donne des pistes pour reprendre en main le contrôle de nos données et c’est le plus précieux des pouvoirs.
►https://cfeditions.com/rapt-internetVive les réseaux sociaux locaux
Oui en Europe grâce au DSA, le Digital Services Act, le règlement européen entré en vigueur pour assainir les réseaux sociaux. La portabilité est déjà garantie, elle a par exemple permis au mouvement HelloQuitteX d’accompagner les utilisateurs dans leur traversée en exigeant d’X leurs archives personnelles. Quant à l’interopérabilité, elle est évoquée à l’état de possibilité dans le DSA et l’UE aurait tout intérêt à accélérer sur cette mesure prometteuse. Ce droit est défendu par Jean Cattan, le secrétaire général au Conseil National du Numérique et d’autres institutions qui se battent pour un monde numérique meilleur.
Car les réseaux sociaux peuvent avoir du bon, l’actualité nous fait oublier cette évidence, et ce n’est pas la vidéo postée hier par Donald Trump représentant un gaza transformé par l’IA en riviera jonchée d’hôtels de luxe et de dollars qui arrange la perception.
Ces réseaux peuvent avoir du bon, s’ils retrouvent un peu d’humanité, cette semaine Le Monde accordait un reportage réjouissant autour de l’initiative Front Porch Forum, un réseau social local situé dans le Vermont aux Etats-Unis. 240 000 utilisateurs, échangent avec courtoisie dans un espace non gouverné par la viralité des contenus, il n’est pas possible de liker les messages et on ne peut pas publier un commentaire instantanément, pour laisser le temps à la réflexion.
Si l’interopérabilité était effective, des initiatives locales du même genre pourraient se multiplier en France et partout dans le monde. Voilà un cap de bonne espérance !