• Francisque (arme) — Wikipédia
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Francisque_(arme)

    Les preuves archéologiques indiquent que les élites guerrières franques utilisaient communément la #francisque (elle était peu répandue chez les soldats de base). Les soldats l’auraient lancée d’une distance d’environ dix à douze mètres. La lame de la hache était lourde afin de produire un impact important sur la cible, mais puisque l’arme n’était pas équilibrée comme peut l’être un javelot, la francisque n’avait pas une trajectoire très régulière, réduisant la portée et la précision.

    Où l’on apprend que l’arme qui symbolise l’#extrême_droite est une #arme de #riches qui fait très mal mais qui manque de précision... Tout un symbole.

  • Le droit de ne pas voter
    Alexandre Vigneault, La Presse, le 9 octobre 2019
    http://plus.lapresse.ca/screens/c91ccb7e-9bab-4973-b1a4-f580d2378e4c__7C___0.html

    S’abstenir de voter passe parfois pour un crime contre la société. #Francis_Dupuis-Déri, professeur de sciences politiques à l’UQAM, s’est carrément fait retirer des listes électorales. Son essai Nous n’irons plus aux urnes pose un regard éclairant sur ces gens – très nombreux – qui ne votent pas.

    A l’occasion de la sortie de son livre : Nous n’irons plus aux urnes
    Francis Dupuis-Déri, LUX Éditeur, le 3 octobre 2019
    https://www.luxediteur.com/catalogue/nous-nirons-plus-aux-urnes

    #Canada

    #élections #abstention à rajouter à la compilation ici :
    https://seenthis.net/messages/607993

  • #Football_leaks : coup de massue judiciaire contre le lanceur d’alerte Rui Pinto
    https://www.mediapart.fr/journal/international/220919/football-leaks-coup-de-massue-judiciaire-contre-le-lanceur-d-alerte-rui-pi

    Le parquet de Lisbonne a inculpé le Portugais à l’origine des "Football Leaks" de piratage informatique massif, l’accusant d’avoir commis 147 délits. Les avocats de Pinto dénoncent une tentative de « bâillonner et de détruire » mais aussi de l’empêcher de coopérer avec d’autres pays.

    #Francisco_Teixeira_da_Mota,_Justice,_Portugal,_William_Bourdon,_Rui_Pinto,_football_leaks,_parquet_national_financier

  • Deuxième volet. Chronique d’une initiation militante où l’activisme anarchiste de l’auteur prend les couleurs d’un certain "pessimisme combatif"

    BALLAST | Francis Dupuis-Déri : « C’est la rage du désespoir qui me pousse à écrire » 2/2
    https://www.revue-ballast.fr/francis-dupuis-deri-cest-la-rage-du-desespoir-qui-me-pousse-a-ecrire-2

    En 2009, vous écriviez dans un article que l’hypothèse d’un « grand soir », qu’il soit électoral ou insurrectionnel, n’était pas envisageable. 10 ans plus tard, vous écrivez que « l’espérance n’est plus de mise » et qu’il ne nous reste que « le pessimisme combatif ». Nos ennemis ont donc définitivement gagné ?

    Nos ennemis ont perdu depuis longtemps, mais ne le savent pas encore… C’est ce qu’annonçait déjà Herbert Marcuse quand il discutait de l’irrationalité de la rationalité du capitalisme ou de l’État. Ces systèmes semblent rationnels car ils maximisent la capacité humaine d’extorsion, de production, d’accumulation et de destruction organisée lors des guerres, par exemple. Mais cette rationalité est irrationnelle car elle mène l’humanité à sa perte, littéralement. Je ne suis ni météorologue, ni géologue, ni géographe, ni physicien, mais j’ai la certitude depuis les années 1980 que c’est foutu : l’humanité a accumulé bien trop de stock atomique civil et militaire et produit bien trop de déchets toxiques et de pollution pour que cela n’entraîne pas d’épouvantables catastrophes. Bientôt ou dans un avenir rapproché, ou dans quelques centaines d’années… Je n’ose même pas imaginer la situation dans 1 000 ou 2 000 ans, quand vont fissurer les silos dans lesquels les déchets nucléaires sont ensevelis et qu’il n’y aura peut-être même plus d’État ou de gouvernement juridiquement « responsable » de ces stocks. « L’espoir, c’est tout ce qui nous reste », me confient des jeunes des écoles secondaires qui se mobilisent pour le climat, et leur mobilisation m’apparaît évidemment comme un signe positif. J’imagine même que dans les prochaines années, plusieurs de ces jeunes vont se radicaliser autant dans leur position idéologique que dans leurs moyens d’action. Car après tout, c’est bien de l’avenir de la civilisation ou de l’humanité qu’il s’agit, et de la survie de milliers d’espèces animales. Mais je carbure surtout au pessimisme car j’ai l’impression depuis longtemps qu’il est trop tard et que les forces conservatrices et réactionnaires sont beaucoup trop puissantes. Bref, je suis encore punk : No Future !

    #anarchisme_punk

  • Démocratie directe et boussole anarchiste : le credo de Francis Dupuis-Déri et une analyse pertinente de la confusion qui règne dans le domaine du politique.

    BALLAST | Francis Dupuis-Déri : « La démocratie directe est le meilleur des régimes » 1/2
    https://www.revue-ballast.fr/francis-dupuis-deri-la-democratie-directe-est-le-meilleur-des-regimes-

    Francis Dupuis-Déri est l’une des voix de l’anarchisme francophone. Un océan nous sépare de son lieu de vie et de travail — l’homme enseigne au département de science politique ainsi qu’à l’Institut de recherches et d’études féministes de l’Université du Québec à Montréal. Son premier livre, un roman, a paru l’année de la dissolution de l’URSS : il se déroulait dans le futur et les animaux y parlaient ; nous voici bientôt 30 ans plus tard : les animaux ne parlent toujours pas mais Dupuis-Déri écrit encore. Des essais, pour l’essentiel — où l’on croise le peuple, la démocratie, la guerre contre le terrorisme, des manifestants tout de noir vêtus et des ennemies résolues du sexisme. Dans ce premier volet, nous avancerons munis d’un petit outil qui indique généralement le nord…

    • Les #black_blocs. La #liberté et l’#égalité se manifestent

      Apparue à Berlin-Ouest vers 1980 et popularisée lors de la « bataille de Seattle » en 1999, la tactique du black bloc connaît un renouveau. Des black blocs ont manifesté lors du Sommet du G20 à Toronto, du Printemps arabe, du mouvement Occupy et des Indignés, lors des récentes grèves étudiantes au Québec et contre la vie chère au Brésil, dans les « cortèges de tête » en France et contre les néonazis aux États-Unis.

      Cagoulés, vêtus de noir et s’attaquant aux symboles du capitalisme et de l’État, les black blocs sont souvent présentés comme des « casseurs » apolitiques et irrationnels, voire de dangereux « terroristes ».

      Publié une première fois en 2003 et depuis mis à jour et traduit en anglais et en portugais, ce livre est reconnu comme la référence pour qui veut comprendre l’origine du phénomène, sa dynamique et ses objectifs. Alliant observations de terrain, entretiens et réflexion éthique et politique, l’auteur inscrit les black blocs dans la tradition anarchiste de l’action directe.


      https://www.luxediteur.com/catalogue/black-blocs-2

      #livre

    • Un point de vue marxistes sur ces zozos :
      Autonomes et black blocs : une fausse radicalité et une impasse https://mensuel.lutte-ouvriere.org/2018/06/24/autonomes-et-black-blocs-une-fausse-radicalite-et-une-impass

      Extrait :

      Le pourrissement continu de la société capitaliste va certainement pousser, à l’avenir, bien des jeunes vers ce faux radicalisme, qui n’est en fait que le signe d’une démoralisation et d’un manque de confiance dans la capacité des masses à changer leur sort. Et il ne serait pas surprenant que, demain, un certain nombre de ces jeunes fassent un pas de plus et expriment leur «  rage  » et leur nihilisme non plus à coups de marteau dans des vitrines mais avec des bombes. Le mouvement ouvrier a déjà connu bien des fois de tels reculs.

      Nous continuons de penser que la seule chose utile pour espérer changer le monde, ce n’est pas d’infliger des petites piqûres de moustique à la bourgeoisie et au capitalisme, qui n’a que faire d’un magasin saccagé et d’un abribus brisé. Le radicalisme, ce n’est pas jeter un pavé sur un flic. C’est se battre pour le pouvoir aux travailleurs, l’expropriation de la bourgeoisie et l’abolition du salariat. C’est militer pour que puisse se produire la seule chose qui effraie réellement la bourgeoisie  : un soulèvement conscient du monde du travail.

  • Ils ont voulu tuer Zapata une seconde fois

    Jérôme Baschet

    https://lavoiedujaguar.net/Ils-ont-voulu-tuer-Zapata-une-seconde-fois

    Il y a cent ans, le 10 avril 1919, était assassiné Emiliano Zapata, le héros de la révolution mexicaine qui avait lutté pour que les communautés paysannes récupèrent leurs terres, accaparées par les grandes haciendas ; il avait également impulsé une forme de pouvoir populaire parfois qualifiée de « Commune de Morelos », du nom de l’État qui, non loin de Mexico, en constituait le bastion. Depuis, il est demeuré une référence pour toutes les luttes populaires, notamment paysannes et indiennes. Un peu partout, dans le Mexique d’en bas, on raconte que Zapata n’est pas mort. Depuis leur soulèvement, le 1er janvier 1994, les zapatistes du Chiapas le considèrent comme leur général en chef et disent qu’on l’aperçoit parfois chevauchant dans les montagnes.

    Depuis un siècle, des centaines de Zapata sont morts en défendant leurs territoires contre la spoliation et la destruction. Le 20 février dernier, dans le Morelos, à quelques kilomètres du village natal de Zapata, l’un d’eux a été assassiné de deux balles dans la tête par des tueurs qui sont venus le chercher chez lui. Il s’appelait Samir Flores. Avec les autres habitants de son village, Amilcingo, il luttait contre le « Projet intégral Morelos » (...)

    #Mexique #Morelos #Zapata #assassinat #Samir_Flores #EZLN #López_Obrador #Francisco_Madero

  • Un chef indigène a été assassiné au #Brésil

    Un chef de l’ethnie #Tukano, #Francisco_de_Souza_Pereira, âgé de 53 ans, a été abattu mercredi 27 février chez lui, dans la communauté d’#Urukia, dans le nord de #Manaus, au Brésil. Il dirigeait 42 communautés de la région de Manaus.

    Trois hommes cagoulés sont entrés dans la maison pendant la nuit et ont tiré sur le cacique. La femme et la fille de la victime ont été témoins du crime. Selon le Bureau de l’homicide et des homicides (DEHS), qui enquête sur l’affaire, les motifs du crime sont encore inconnus.


    https://reporterre.net/Un-chef-indigene-a-ete-assassine-au-Bresil
    #assassinat #peuples_autochtones

  • Quelle crise de la masculinité ?
    En accès libre
    #Francis_Dupuis-Déri
    https://www.hors-serie.net/En-acces-libre/2018-09-08/Quelle-crise-de-la-masculinite--id325
    En accès libre , émission publiée le 08/09/2018
    Durée de l’émission : 83 minutes

    Entretien visible en ligne ou à télécharger :
    – en vidéo :
    http://v42.hors-serie.net/telecharger/DLTDupuisD2.mp4


    – en #audio :
    https://www.hors-serie.net/medias/mp3/288783675.mp3

    (En suivant le tag, y’a deux entretiens récents écrits
    https://seenthis.net/messages/757145
    https://seenthis.net/messages/749037
    et audio
    https://seenthis.net/messages/751544)

    Le jeudi 7 février (hier), les Éditions du remue-ménage annoncent :

    Aujourd’hui paraissent en Europe francophone (France, Belgique, Suisse) LA CRISE DE LA MASCULINITÉ de Francis Dupuis-Déri et LES FILLES EN SÉRIE de @MartineDelvaux Grâce à Hobo Diffusion (Makassar), la présence outre-mer de notre maison d’édition féministe ne fera que croître.

    https://twitter.com/remue_menage/status/1093642964621033472

    Pour info, Dupuis-Déri sera en France en février :
    – Paris, librairie Violette and co, le jeudi 21, 19h
    http://www.violetteandco.com/librairie/spip.php?article1181
    – Rennes, librairie La Nuit des temps, mercredi 27, 19h
    "Si vous souhaitez réserver une place assise, vous pouvez nous envoyer un mail à librairielanuitdestemps/at/gmail.com ou nous appeler au 02 99 53 37 95 . Si toutes les places assises sont réservées, pas de panique, vous pouvez tout de même assister à la rencontre debout ou assis.e par terre.
    https://www.facebook.com/events/247047939553888
    – Ailleurs ?

    En attendant, Slate publie des extraits du bouquin :
    http://www.slate.fr/story/173145/crise-masculinite-mythe

    #fan-club

    • Présentation de l’entretien sur Hors-série :

      La Une de l’Obs cet été a tiré la sonnette d’alarme : « Etre un homme après #MeToo » serait une affaire compliquée - laissant les mecs, comme sur la photo qui illustrait cette couverture, hagards, démunis et esseulés. Que l’on ne s’inquiète pas trop, cependant : depuis l’Antiquité romaine, chaque fois que la moindre revendication féministe se fait entendre, l’alerte est sonnée et les masculinistes sont sur le pont, annonçant que la masculinité est en crise et la société en péril. Bien sûr, à l’époque de Caton l’Ancien ça ne s’appelle pas comme ça : « féminisme » et « masculinisme » ne sont pas encore des notions en vigueur, mais ça n’empêche pas le-dit Caton de penser le phénomène en une vision tout à fait analogue à celle d’un Eric Zemmour : « Les femmes, écrit-il en 195 avant J.C., sont devenues si puissantes que notre indépendance est compromise à l’intérieur même de nos foyers, qu’elle est ridiculisée et foulée aux pieds en public ».

      C’est le livre de Francis Dupuis-Déri qui nous l’apprend, en nous offrant une très précieuse mise en perspective historique : la prétendue « crise de la masculinité » est vieille comme le patriarcat, et son expression connaît des périodes de recrudescence à travers les siècles, non pas lorsque les rapports de sexe tendent vers des formes d’égalité (par exemple au Haut Moyen-Âge en Europe) mais lorsqu’au contraire la domination masculine a repris des formes si radicales et si spectaculaires que les protestations des femmes se font plus vives - suscitant, à chaque fois, ce qu’on pourrait appeler une « Réaction masculiniste ». Laquelle en général ne se contente pas de s’inquiéter qu’il ne soit plus possible d’être « un homme, un vrai » : c’est une rhétorique qui associe toujours la différenciation des sexes à leur hiérarchisation tacite (le masculin se caractérisant par des propriétés qui le vouent à une suprématie « naturelle ») et cette hiérarchisation à la bonne santé de la société. Dès le XVIIIème siècle, le masculinisme est un nationalisme, assignant les femmes aux seules tâches reproductives afin de soutenir une démographie assez tonique pour assurer la suprématie nationale sur les nations rivales. Et si par malheur les nations connaissent des crises économiques ou des défaites militaires, c’est bien sûr à cause des femmes, ou de la « féminisation de la société ».

      Il faut le lire pour le croire, et le livre du politiste québecois est une hallucinante somme de citations, dont la lecture est aussi cocasse que terrifiante : il s’est vraiment trouvé, à toutes les époques à peu près, des masculinistes pour expliquer les malheurs du monde par les trop voraces conquêtes des femmes. Le génocide au Rwanda, les attentats du 11 septembre 2001, l’échec scolaire des garçons, le taux de suicide des hommes, ne cherchez plus : c’est à cause de l’émancipation des femmes et de la féminisation de la société.

      On le comprend peu à peu, la soi disant « crise de la masculinité » a bon dos : c’est une arme de dépolitisation massive, qui permet de produire des pseudo-analyses du monde parfaitement aveugles aux rapports de violence et d’exploitation réels, et niant que la domination masculine est encore, factuellement, partout en vigueur. C’est aussi, tout bêtement, l’expression d’un anti-féminisme assez bas du front, qui s’invite ici et là - par exemple aux prochaines Universités d’été du féminisme, où s’exprimeront Raphaël Enthoven et Elizabeth Levy - en se faisant passer pour un art de la nuance ou un éloge de la différence dont il ne faut pas être dupe. Pour la paix des hommes et des femmes, pour leur émancipation respective et mutuelle, le masculinisme est le problème - ce n’est jamais la solution.

      NB : Le livre de Francis Dupuis-Déri, « La crise de la masculinité, autopsie d’un mythe tenace », sorti au Québec (Ed. Remue Ménage), ne sera disponible dans les librairies françaises qu’à partir de janvier 2019.

  • Francis Dupuis-Déri : « Les hommes sont en crise dès que les femmes avancent vers plus d’égalité et de liberté » - Libération
    https://www.liberation.fr/debats/2019/02/01/francis-dupuis-deri-les-hommes-sont-en-crise-des-que-les-femmes-avancent-

    Quelle que soit l’époque, quel que soit le lieu, la règle semble immuable : dès que les femmes s’affranchissent un tant soit peu des rôles qui leur sont assignés, les hommes se déclarent perdus, déstabilisés, en danger… Le chercheur québécois déconstruit ce mythe qui est avant tout une manipulation rhétorique pour préserver la domination masculine.

    • Francis Dupuis-Déri : « Les hommes sont en crise dès que les femmes avancent vers plus d’égalité et de liberté »
      Erwan Cario, Libération, le 1 février 2019
      https://www.liberation.fr/debats/2019/02/01/francis-dupuis-deri-les-hommes-sont-en-crise-des-que-les-femmes-avancent-

      Quelle que soit l’époque, quel que soit le lieu, la règle semble immuable : dès que les femmes s’affranchissent un tant soit peu des rôles qui leur sont assignés, les hommes se déclarent perdus, déstabilisés, en danger… Le chercheur québécois déconstruit ce mythe qui est avant tout une manipulation rhétorique pour préserver la domination masculine.

      Qui a écrit : « Les femmes sont devenues si puissantes que notre indépendance est compromise à l’intérieur même de nos foyers, qu’elle est ridiculisée et foulée aux pieds en public » ? Non, pas Eric Zemmour, mais Caton l’Ancien, en 195 avant J.-C., alors que les Romaines se mobilisaient contre une loi leur interdisant de conduire des chars et de porter des vêtements colorés. Le polémiste réac, lui, constatait en 2006, dans son ouvrage le Premier Sexe, que « face à cette pression féminisante, indifférenciée et égalitariste, l’homme a perdu ses repères ». Vingt-deux siècles n’ont donc pas suffi pour que l’homme, le pauvre, trouve sa place dans une société par trop féminisée. Dans son dernier essaila Crise de la masculinité, autopsie d’un mythe tenace, qui sortira jeudi en France (Editions du remue-ménage), Francis Dupuis-Déri, professeur de science politique à l’Université du Quebec à Montréal, est remonté aux origines de ce discours pour mettre en lumière ses rouages antiféministes.

      Comment cette crise de la masculinité se définit-elle à travers les âges ?

      C’est tout à fait cyclique, avec une intensification en période de crise politique ou économique. Mais elle a toujours à peu près le même canevas et elle est portée par des hommes qui occupent des positions privilégiées. Il y a cinq siècles, par exemple, au sein des cours royales, en Angleterre et en France, le roi, des évêques et des intellectuels considèrent que les hommes de la cour commencent à avoir des comportements efféminés. En parallèle - et c’est toujours comme ça avec ce discours de crise -, les femmes ne restent pas à leur place. Elles empiètent sur des domaines qui sont considérés comme masculins. C’est très élastique, cela va des modes vestimentaires et des coiffures aux métiers réservés aux hommes, en passant par la vie intime, et comment se comportent les conjointes. Cette crise concerne donc, à une époque donnée, la perception des hommes et la perception des transgressions des femmes. A partir de là, on déclare que les hommes sont déstabilisés, en danger, désespérés, perturbés, perdus, parce qu’ils n’auraient plus de modèle. C’est une rhétorique qui porte fondamentalement sur la différence entre les sexes, elle réaffirme une opposition sociale, une opposition économique, une opposition politique. On veut surtout réaffirmer une suprématie masculine dans ces domaines.

      La crise de la masculinité, c’est donc avant tout une mécanique d’autodéfense pour la domination masculine ?

      Tout à fait. On pourrait faire l’exercice avec d’autres discours de crise. D’une manière générale, quand on dit qu’il y a une crise, on appelle à l’aide et on identifie la source du problème qui doit être neutralisée. Quand c’est un incendie ou une inondation, il n’y a pas de débat politique quant à la nature de la menace, mais quand il s’agit d’un sujet social, culturel, économique ou politique, ça oppose des groupes, des catégories ou des classes entre elles. Dans ce cas-là, donc, les hommes appellent les autorités à agir en leur faveur.

      Le problème n’est donc pas la masculinité en crise, mais les femmes qui cherchent à s’émanciper…

      C’est un des multiples registres des discours antiféministes. Certains vont parler de l’ordre divin qui impose telle répartition des rôles, d’autres auront un discours plus nationaliste, axé sur la natalité, comme à la fin du XIXe et au début du XXe où, en France, il fallait des enfants pour la prochaine guerre. On peut aussi avoir de l’antiféminisme à l’extrême gauche, quand on établit que l’ennemi principal, c’est le capitalisme et que le féminisme divise les forces syndicales ou ouvrières. Ma thèse, c’est donc que la crise de la masculinité est une forme rhétorique spécifique qui s’exprime quand les femmes avancent collectivement vers plus d’égalité et de liberté.

      Ce discours de crise connaît-il une grande variation dans le temps et selon les pays ?

      Je suis politologue et, au quotidien, je travaille surtout sur des pays comme la France, le Québec, un peu les Etats-Unis. Quand j’ai projeté d’approfondir le sujet, je suis allé voir les collègues en histoire et j’ai voulu sortir de l’Occident pour voir ce qui se passe ailleurs. Et, des deux côtés, cela a été pour moi une découverte, basée sur le travail d’autres chercheuses et chercheurs. J’ai été complètement éberlué par ce que je trouvais : ça se répète presque toujours à l’identique, dans l’histoire et sur toute la planète. Sur cinq cents ans, en Occident, à des époques où l’égalité n’était pas d’actualité, et aujourd’hui dans des pays où on ne peut soupçonner une prise de contrôle par les féministes, comme la Russie, le Qatar, ou certains pays d’Amérique latine ou d’Asie, le masculin est toujours en crise. Cela peut presque suffire pour établir qu’il y a quelque chose de fallacieux là-dedans.

      Comment est définie cette masculinité en crise ?

      Ce sont toujours un peu les mêmes clichés et les mêmes raisonnements circulaires. Ce sont d’immenses généralités qui cherchent des références hors contexte, que ce soit Dieu qui nous a faits comme ça, ou la nature, avec la chasse au mammouth et la préhistoire, ou la biologie, avec la taille des crânes. Selon qui parle et où on se trouve, il y aura toujours une bonne explication. Et les femmes sont toujours comme on veut qu’elles soient : douces, passives, attentives, attentionnées, surtout pas combattantes, car la compétition est évidemment une caractéristique masculine. Ce qui est inquiétant dans cette conception, c’est que s’il y a un conflit entre les deux sexes, on annonce déjà qui va gagner, puisque le combat et la force ne sont que d’un seul côté. Le comble de l’absurde, c’est qu’on va finir par associer le principe même de l’égalité à la féminité et celui de la hiérarchie et de la structuration organisationnelle à la masculinité. Donc l’égalité provoque mécaniquement une crise de la masculinité, ce qui est incroyable au niveau politique, et ce qui ne laisse pas beaucoup d’espoir.

      Vous expliquez que le discours actuel de la crise de la masculinité prend naissance dans les années 60 avec l’apparition de groupes d’hommes proféministes…

      C’est surtout en termes de réseaux et d’organisation que ça se passe, ce ne sont pas nécessairement les mêmes individus. A cette époque, les féministes radicales s’organisent en groupes de conscience où elles se retrouvent, en non-mixité, à déconstruire leur propre socialisation. Elles commencent d’ailleurs à critiquer sérieusement les réseaux d’extrême gauche comme étant machistes et sexistes. Mais dans ces réseaux, il y a des hommes solidaires qui se disent « qu’est-ce qu’on peut faire pour soutenir ce mouvement ? ». Par effet de mimétisme, ils vont créer des groupes, non mixtes, d’hommes très progressistes en solidarité avec le mouvement féministe. Le problème c’est que, rapidement, ils commencent à développer des discours de moins en moins solidaires avec les femmes et de plus en plus préoccupés par leur nombril. Ils commencent par retourner la réflexion sur eux-mêmes, dans une perspective antisexiste, en parlant du système d’oppression des normes patriarcales sur les hommes. Rapidement, ils vont parler de leurs ex, de leurs conjointes, de leurs mères, etc. Les hommes proféministes vont finalement se retrouver minoritaires. A partir de ce moment, certaines organisations vont commencer à parler uniquement de la question de la paternité. On finit, dans certains congrès, par avoir des ateliers pour trouver un bon avocat ou un bon détective privé destinés aux pères divorcés en conflit au sujet de la garde de leur enfant.

      Sur quoi se base le discours de crise aujourd’hui ?

      Les époques induisent des problématiques particulières. Dans ma recherche, j’ai isolé quatre axes. Le premier, c’est que les hommes ne peuvent plus séduire car les femmes ont pris le contrôle de la sexualité. Le deuxième, c’est la question du suicide des hommes qui est, par exemple, très présente au Québec depuis dix ou quinze ans. Le troisième concerne les difficultés scolaires des garçons, et on termine avec la question de la pension alimentaire et de la garde des enfants qui est directement liée à la question des violences conjugales. En effet, certains prétendent que les femmes « instrumentalisent » ces violences pour obtenir la garde et affirment qu’il y a une symétrie dans la violence entre les sexes, même si celle des femmes serait avant tout « psychologique et verbale ».

      Comment expliquer la facilité avec laquelle ce type de discours se propage ?

      On a l’impression, en surface, que tout ça relève du sens commun. Les gens sont convaincus qu’il y a une crise de la masculinité. On le voit sur les blogs, sur les commentaires d’articles en ligne, ce sont toujours les mêmes arguments qui reviennent. Il est possible très facilement de les déconstruire. Sur l’éducation, par exemple, les inégalités économiques jouent un rôle beaucoup plus important sur la réussite que le sexe des élèves. J’ai découvert, par ailleurs, une citation de John Locke au XVIIe siècle qui se plaint que les garçons réussissent moins bien en apprentissage des langues que les filles…

      Concernant le suicide, on peut remonter à la fin du XIXe siècle et l’étude de Durkheim, où il trouvait, déjà à l’époque, un taux de suicide environ trois fois plus élevé chez les hommes que chez les femmes.

      Vous écrivez que ce mythe est « ridicule et risible, absurde et faux, scandaleux et dangereux »…

      Je voudrais appuyer le terme « dangereux », car c’est un mot que j’ai pesé quand je l’ai écrit. Ce discours de la crise de la masculinité peut aller dans certains cas jusqu’à la glorification de l’assassinat et des meurtres de masse de femmes pour se venger de cette crise qu’elles feraient subir aux hommes, comme avec les attentats en Amérique du Nord des involontary celibats, les incels (1), qui vont jusqu’à tuer car ils n’auraient pas eu une sexualité qui leur reviendrait de droit. Il faut aussi toujours déconstruire ces discours sur la symétrie des violences, car on voit même, aux Etats-Unis, des plaintes déposées contre les refuges pour les femmes victimes de violences, en expliquant que c’est discriminatoire car il n’existe pas d’équivalents pour les hommes, et demandant la fin des subventions.

      Finalement, vous dénoncez le mythe et le discours, mais vous l’attendez, cette crise…

      Si on est dans une société injuste, inégalitaire, dominatrice, si on veut mettre en acte des principes de solidarité, d’égalité et de liberté, on ne peut qu’espérer une crise. Et une vraie, cette fois !

      (1) Le dernier en date remonte au 23 avril 2018, à Toronto. Il a fait 10 morts et 14 blessés. Son auteur, Alek Minassian, a publié sur Facebook un message évoquant « la rébellion des incels ».

      #Francis_Dupuis-Déri #Hommes #Femmes #domination_masculine #masculinité #paywall

  • Franziska Mann: Widerstand vor der Tür des Todes :: Internationales Auschwitz Komitee
    https://www.auschwitz.info/de/aktuelles/archiv/artikel/lesen/23-oktober-1943-auschwitz-birkenau-krematorium-iii-199.html

    Ab Juli 1942 hatten im Warschauer Ghetto die großen Deportationen der jüdischen Familien in die Vernichtungslager der Nazis begonnen. Die ständigen Deportationen und den sicheren Tod vor Augen, erhoben sich die Bewohner des Ghettos am 19. April 1943 zum Aufstand, der erst am 16. Mai 1943 von den Deutschen niedergeschlagen werden konnte. Der Ermordung der Aufständischen und dem Aufstand folgte die Auflösung des Ghettos. In den folgenden Wochen versuchte die SS in Warschau der Juden habhaft zu werden, die sich bisher hatten verstecken können oder sich aus den Mauern des Ghettos auf die arische Seite gerettet hatten. Sie ließ verbreiten, dass im Hotel Polski in Warschau ausländische Visa und Zuzugsgenehmigungen ausländischer Staaten für Juden erworben werden könnten.

    
Mehrere tausend jüdische Bürger Warschaus meldeten sich daraufhin im Hotel Polski – für sie ein Ort der Hoffnung und eventueller Rettung.

    Eine von denen, die auch auf diese Rettung hofften, war die polnisch-jüdische Tänzerin Franziska Mann, die als Lola Horowitz in Brod geboren worden war. Franziska Mann war den Warschauern sowohl aus dem Theater als auch durch ihre Auftritte in Warschauer Nachtclubs bekannt. Sie bekam im Hotel Polski das ersehnte Visum – ein „Visum“, das sie erst nach Bergen-Belsen und schließlich nach Auschwitz-Birkenau führen sollte.

    Sicher ist – und das berichteten Überlebende übereinstimmend: Franziska Mann war eine schöne Frau. Eine, die auffiel. Auch den SS-Männern an der Rampe in Birkenau, die an diesem 23. Oktober 1943, einem Sonnabend, auf einen Zug mit Häftlingen warteten, die ins Gas geschickt werden sollten. Unter ihnen Franziska Mann, 37 Jahre alt. Eine Frau, die als Heldin in Erinnerung bleibt. Sie wagte den Aufstand vor den Türen der Gaskammer im Vernichtungslager Auschwitz-Birkenau – und tötete dabei einen SS-Bewacher.

    1800 Männer, Frauen und Kinder hatte die SS zuvor vom Hotel Polski in Warschau nach Bergen-Belsen transportiert. Von dort, logen die Nazi-Verbrecher, sollten die Gefangenen ins Lager „Bergau“ bei Dresden gebracht werden. Ein Lager, das es nicht gab. Stattdessen erreichte der Zug Auschwitz-Birkenau. Auf der Rampe, gleich nach dem Verlassen des Zuges, wurden die Häftlinge unruhig. Sie merkten, dass sie hintergangen und betrogen worden waren. Schreien, Brüllen, wütende Kommandos, Prügel mit Stöcken und Gewehrkolben. SS-Mannschaften trennten die Männer von den Frauen und Kindern. Auf Lastwagen wurden die Männer zum Krematorium II gebracht und dort sofort ins Gas geschickt, Frauen und Kinder zum Krematorium III.

    Einer der SS-Männer an der Rampe war Josef Schillinger. Überlebende beschrieben ihn später als sadistisch und besonders bösartig und brutal. Er war „ein verkommenes Subjekt, ein Schrecken der Häftlinge“. Er prügelte oft und gerne: „Der Hieb seiner Hand war wuchtig wie ein Knüppel, spielend zerschlug er einen Kiefer, und wo er hinschlug, floss Blut.“

    SS-Obersturmführer Franz Hößler, sogenannter „Schutzhaftlagerführer“ im Frauenlager Auschwitz-Birkenau, täuschte die verängstigten Häftlinge ein letztes Mal. Sie müssten desinfiziert werden, um ausreisen zu können. Er befahl ihnen, sich auszuziehen. Die Hälfte der Opfer ließ sich überreden, legte die Kleidung ab und betrat die Gaskammer. Die anderen waren misstrauisch, sie weigerten sich. Erst als sie von den SS-Bewachern mit Knüppeln und Peitschen geprügelt werden, begannen sie, sich auszuziehen. Unter ihnen Franziska Mann.

    Was dann geschah, wurde später unterschiedlich dargestellt. Von der wahrscheinlichsten Version berichtet der Publizist Andreas Meckel von „Gegen Vergessen – Für Demokratie e.V.“: Franziska Mann zog sich betont langsam aus. Plötzlich schlug sie dem völlig überraschten SS-Oberscharführer Walter Quakernack blitzschnell den Absatz ihres Schuhs ins Gesicht. Der Mann wollte sich mit den Händen schützen. Da entriss ihm Franziska Mann seinen Revolver und schoss auf ihn. Sie verfehlte ihn knapp. Aber sie traf den neben Quakernack stehenden Schillinger in den Bauch und verwundete ihn schwer. Schillinger starb auf dem Weg ins Krankenhaus. Franziska Mann schoss auch auf SS-Unterscharführer Wilhelm Emmerich, der mit einem steifen Bein danach nie wieder wie früher laufen konnte.

    Nach den Schüssen stürzten sich die Frauen mit bloßen Händen auf die SS-Leute. Die bewaffneten Männer rannten aus dem Raum. Kurz darauf ließ Lagerkommandant Rudolf Höß zwei Maschinengewehre aufstellen und auf die wehrlosen Gefangenen schießen. Der Widerstand, den Franziska Mann entfacht hatte, endete in einem Blutbad. Wer nicht von den Schüssen getroffen wurde, starb im Gas. Am nächsten Tag feuerten SS-Wachleute als Vergeltung wahllos ins Lager. 13 Häftlinge starben, viele wurden verwundet.

    Franziska Mann wurde vor 70 Jahren in Auschwitz-Birkenau ermordet. Ihr Aufstand war getragen vom Mut der Verzweiflung. Ihr Wille, sich aufzulehnen, obwohl sie nicht die geringste Chance hatte, ist auch heute noch bewundernswert.

    Internationales Auschwitz Komitee
    Stauffenbergstraße 13/14, 10785 Berlin, Deutschland

    Franciszka Mann – Wikipedia
    https://de.wikipedia.org/wiki/Franciszka_Mann#cite_note-1

    Nach anderer Darstellung soll sich der Vorfall bereits an der Rampe ereignet haben.

    #Allemagne #Pologne #histoire #shoa #shoah #résistance #femmes

  • Comment changer le cours de l’#histoire | Eurozine
    https://www.eurozine.com/comment-changer-le-cours-de-lhistoire

    Depuis des siècles, le récit expliquant les origines de l’#inégalité sociale est simple. Pendant la plus grande partie de leur histoire, les hommes vécurent dans des petits groupes égalitaires de #chasseurs-cueilleurs. Puis vint l’#agriculture, accompagnée de la #propriété privée, puis la naissance des #villes signifiant l’émergence de la #civilisation à proprement parler. Si la civilisation eut bien des aspects déplorables (les guerres, les impôts, la bureaucratie, la patriarchie, l’esclavage, etc.), elle rendit également possibles la littérature écrite, la science, la philosophie et la plupart des autres grands accomplissements humains.

    Tout le monde, ou presque, connaît les grandes lignes de cette histoire. Depuis l’époque de Jean-Jacques #Rousseau, au moins, elle a informé notre conception de la forme générale et de la direction de l’histoire humaine. Cela est d’autant plus important que ce #récit définit dans le même temps ce que nous percevons comme nos possibilités #politiques. La plupart d’entre nous considère la civilisation, et donc l’inégalité, comme une triste nécessité. Certains rêvent du retour à un #passé #utopique, de la découverte d’un équivalent industriel au “#communisme primitif” ou même, dans les cas les plus extrêmes, de la destruction complète de la civilisation et du retour à une vie de cueillette. Personne, cependant, ne remet en cause la structure élémentaire de cette histoire.

    Et pourtant, ce récit est fondamentalement problématique.

    Car il n’est pas vrai.

    • Pfiou je viens enfin de finir cet article de vulgarisation de l’actualité des connaissances archéo-anthropologiques (oui ça fait deux semaines que je le lis en plusieurs fois…). Il est vraiment super important, je trouve !

      Le premier pavé dans la mare sur notre liste concerne les origines et l’étendue de l’agriculture. La vision selon laquelle celle-ci a constitué une transition majeure dans les sociétés humaines ne repose plus sur aucun fondement solide. Dans les parties du monde où plantes et animaux furent d’abord domestiqués, il n’y eut en fait aucun “revirement” discernable du Cueilleur du Paléolithique à l’Agriculteur du Néolithique. La “transition” entre une vie reposant essentiellement sur des ressources sauvages à une autre fondée sur la production alimentaire s’étendit spécifiquement sur quelque chose comme trois mille ans. Alors que l’agriculture mit au jour la possibilité de concentrations de la richesse plus inégales, dans la plupart des cas, ceci ne commença que des millénaires après ses débuts. Entre les deux périodes, des individus dans des zones aussi retirées que l’Amazonie et le Croissant fertile du Moyen-Orient s’essayaient à l’agriculture pour voir ce qui leur convenait, une “agriculture ludique” si l’on veut, alternant annuellement entre les modes de production, autant qu’ils allaient et venaient en matière de structures sociales.

      […]

      Selon toute évidence, cela n’a plus aucun sens d’utiliser des expressions comme “la révolution agricole” lorsque l’on traite de processus aussi démesurément longs et complexes. Comme il n’y eut pas d’État semblable à l’Éden, à partir duquel les agriculteurs purent démarrer leur marche vers l’inégalité, il y a encore moins de sens à parler de l’agriculture comme ce qui donna naissance aux rangs et à la propriéte privée. S’il y a une chose à dire, c’est que c’est parmi ces populations – les peuples du “Mésolithique” – qui refusèrent l’agriculture pendant les siècles de réchauffement de l’Holocène précoce, que l’on trouve une stratification s’enracinant progressivement

      […]

      Dans au moins certains cas, comme au Moyen-Orient, les premiers agriculteurs semblent avoir consciemment développé des formes alternatives de communauté, pour accompagner leur mode de vie de plus plus intensif en travail. Ces sociétés néolithiques semblent remarquablement plus égalitaires lorsqu’on les compare à celles de leurs voisins chasseurs-cueilleurs, avec une hausse spectaculaire de l’importance économique et sociale des femmes, clairement reflétée dans leur vie rituelle et leurs arts

      […]

      Ces découvertes récentes montrent combien nos connaissances de la distribution et de l’origine des premières villes sont faibles, et combien aussi ces villes sont beaucoup plus vieilles que les systèmes de gouvernement autoritaire et d’administration par l’écrit que nous supposions jusqu’alors nécessaires à leur fondation. Et dans les centres mieux établis de l’urbanisation – la Mésopotamie, la vallée de l’Indus, le bassin de Mexico – il y a de plus en plus de preuves que les premières villes étaient organisées selon des règles consciemment égalitaires, les conseils municipaux conservant une autonomie significative par rapport au gouvernement central. Dans les deux premiers cas, les villes avec des infrastructures civiques sophistiquées fleurissaient pendant plus d’un demi-millénaire, sans aucune trace de sépultures et monuments royaux, sans grandes armées ou autres moyens de coercition à grande échelle, ni indice d’un contrôle bureaucratique direct sur la vie de la plupart des citoyens.

      […]

      Les cités égalitaires, même les régions confédérées, sont des lieux communs historiques. Ce que ne sont pas les familles et ménages égalitaires. Une fois que le verdict historique sera tombé, nous verrons que la perte la plus douloureuse des libertés humaines commença à petite échelle – au niveau des relations de genre, des groupes d’âge et de la servitude domestique – c’est-à-dire le type de relations où la plus grande intimité s’accompagne simultanément des plus profondes formes de violence structurelle. Si nous voulons vraiment comprendre comment il est devenu un jour acceptable pour les uns de transformer la richesse en pouvoir, et pour les autres de se faire dire que leurs besoins et que leurs vies ne comptaient pas, c’est bien là qu’il faudrait regarder. C’est là aussi, prédisons-nous, que le travail, le plus âpre qui soit, de création d’une société libre, devra se dérouler.

      BAM !!!

      #anthropologie #archéologie #vulgarisation #Histoire #préhistoire #structure_sociale #État #inégalité #David_Graeber #David_Wengrow #Rousseau #chasseurs-cueilleurs #agriculture
      critique de #Jared_Diammond et #Francis_Fukuyama entre autre
      @nicolasm :)

  • Contre la rhétorique masculiniste – Binge Audio
    https://www.binge.audio/contre-la-rhetorique-masculiniste

    Il paraît que les hommes vont mal. Que la virilité se perd. Que les sociétés occidentales seraient hyper féminisées. Que les hommes ne sauraient plus comment être des hommes, qu’ils seraient paumés et souffriraient beaucoup à cause des femmes, et à cause du féminisme, qui les briment et les oppriment. Les symptômes ? Mauvais résultats scolaires, difficultés à séduire, refus des tribunaux d’accorder la garde des enfants au père en cas de séparation, et même… suicides. Les solutions ? Les mouvements de défense des hommes, les stages de revilirisation d’inspiration chrétienne ou ésotérique, et autres “écoles de la masculinité” d’extrême-droite.

    Dans cet épisode, nous montrons d’où vient ce discours et ce qu’il révèle, avec Francis Dupuis-Déri politologue, professeur à l’Université du Québec à Montréal, auteur d’une enquête précise et documentée : “La crise de la masculinité, autopsie d’un mythe tenace”.

    Francis Dupuis-Déri est également un militant pro-féministe, qui reconnaît ses propres privilèges d’homme blanc hétérosexuel ; dans cet épisode, il partage avec franchise et drôlerie son expérience et son regard sur la société française contemporaine.

    Dupuis-Déri précise qu’un homme pro-féministe se doit de casser la solidarité masculine, ce qu’on appel aussi la #fraternité

    Par rapport au discours raciste-masculiniste d’extreme droite je rajoouterait Michel Houellbeq qui est completement dans ce discours de l’homme blanc dévirilisé par la féminisation de la société.

    Pour les masculinistes de gauche on trouve Alain Badiou et Michéa.

    Dupuis-Déri explique qu’être un homme ça reviens à dominer. Il n’y a aucune forme de masculinité qui ne soit pas une manière de dominer. La crise de la masculinité n’est pas arrivée et ca serait bien qu’elle arrive vraiment.

    Le groupe Charogne conseillé en fin d’émission
    https://www.youtube.com/watch?v=ohCzp5FjZ24

  • Lacrymos
    Qu’est-ce qui fait pleurer les anarchistes ?
    https://ecosociete.org/livres/lacrymos
    Bouquin de 2010 écrit par #Francis_Dupuis-Déri

    Avez-vous déjà pleuré pour des raisons politiques ?

    Voilà la question qu’a lancé Francis Dupuis-Déri aux militants, tout au long de son travail de terrain pour analyser la pensée, l’organisation et l’action anarchiste. Il a alors reccueilli une série de témoignages, s’est livré lui aussi et a décidé de rassembler ces voix dans Lacrymos.

    Quelques individus masqués de foulards noirs courent, en criant des slogans altermondialistes et en brandissant des pierres, tandis que les policiers casqués avancent sur eux dans un rythme régulier, intraitable, une autorité rationnelle maîtrisant le chaos. La scène est si connue que les médias couvrant une manifestation la recherchent et la recréent sans aucun questionnement. Mais quel est le sens de ces confrontations ? Qui sont les humains cachés derrière les masques et les casques ? Qu’est-ce qui motive ces gens à prendre la parole, à s’exposer parfois à la répression brutale ? Qu’est-ce qui amène à l’engagement politique, sinon une émotion vive ?

    Après des années de travaux consacrés aux théories et aux pratiques militantes d’aujourd’hui, Francis Dupuis-Déri nous propose de toucher aux émotions des anarchistes, et plus particulièrement aux larmes. Pourquoi les anarchistes pleurent-ils ? Parce qu’une belle cause rassemble dans leur ville une foule bigarrée et inattendue, parce qu’une rencontre leur fait prendre conscience de leur propre violence. Parce qu’un ami a été tué.

    Ces témoignages variés font entendre des hommes, des femmes, des jeunes, des moins jeunes, des gens d’ici et d’Europe. Sensibles et idéalistes, ils sont guidés non seulement par des idées, mais par ces sentiments qui font déplacer des montagnes, mais qui ne trouvent pas toujours leur place dans le débat public.

    J’avais vu tant d’activistes verser des larmes dans les nuages de gaz lacrymogène, que les policiers lançaient sans retenue contre les contestataires du néolibéralisme et du capitalisme… Mais il y a aussi toutes ces larmes dont la source se cache dans l’expérience sensible, dans une vision du monde qui se heurte à un monde sans vision. C’est d’ailleurs souvent face à l’injustice que les larmes coulent des yeux des anarchistes. J’ai eu l’intuition que de questionner les militants sur leur rapport aux larmes permettrait d’ouvrir des fenêtres nouvelles sur l’expérience anarchiste d’aujourd’hui, d’ouvrir la voie à une réflexion intelligente et sensible dont me détournaient mes questions analytiques plus froides.
    On dira ainsi souvent que l’émotion nuit à la raison, la perturbe, la trouble ; à l’inverse, que la raison vient neutraliser les émotions. Quelques sociologues et politologues qui se sont penchés sur la place qu’occupent les émotions en politique sont arrivés à une toute autre conclusion : l’émotion et la raison vont de paire, participant ensemble à la construction de la pensée et de la volonté politiques.

    – Extrait

    Peut-être que ça pourrait intéresser @mona, sur la question de l’articulation entre émotions et activisme.

  • Nicolas Hulot, Candide en Macronie Christophe Penaguin - 30 Aout 2018 - Un bruit blanc
    http://www.unbruitblanc.com/politique/nicolas-hulot-candide-en-macronie

    Après l’annonce par Nicolas Hulot, sur France Inter, de sa démission du ministère de la Transition écologique et solidaire, on serait tenté de produire une analyse politique de l’événement et de ses conséquences. Cette analyse devra être faite car il s’agit d’un fait politique majeur qui nous apprend (ou plutôt nous confirme) beaucoup sur ce qu’est réellement le « macronisme ». Mais pour le moment, nous voudrions simplement dire que Monsieur Hulot nous a ému. L’émotion n’a pas la cote en #politique. Elle est censée révéler le manipulateur chez le politicien qui tente de la susciter. Elle trahit le doux rêveur ou le faible aux yeux des cyniques fiers de leur absence de sens moral qu’ils nomment généralement Sagesse ou Expérience.
    https://i1.wp.com/www.unbruitblanc.com/wp-content/uploads/2018/08/Nicolas-Hulot.jpg?w=1500

    Lorsqu’il faudra aller vers vous, ô mon Dieu, faites que ce soit par un jour où la campagne en fête poudroiera.

    Nous avons écouté et regardé Monsieur Hulot lors de sa prestation sur France Inter et il nous a fait mal. Il aurait pu être ridicule et même, d’une certaine manière, il l’a été. Le visage défait, les traits tirés, agité de tics, il a répété à de nombreuses reprises qu’il respectait profondément le Président Macron, le Premier ministre Philippe et ses désormais anciens collègues du gouvernement. Il a plusieurs fois mis en cause les oppositions politiques et l’absence de mobilisation de la société dans son ensemble et de chaque citoyen en particulier. Et il a longuement expliqué que, depuis le début, le Président et le Premier ministre lui ont refusé les moyens de mettre en œuvre la révolution écologique qui, seule, pourrait sauver la planète et donc l’humanité.

    Je prendrai mon bâton et sur la grande route j’irai, et je dirai aux ânes, mes amis : Je suis Francis Jammes et je vais au paradis

    On pourrait gloser sur la naïveté de Monsieur Hulot, sur l’étrange inconscience qui l’a empêché de voir que le projet du candidat Macron et l’ensemble de son positionnement politique sont absolument incompatibles avec une prise en compte sérieuse de l’urgence écologique. Mais on n’a pas envie de rire ni de se moquer. Parce que Monsieur Hulot a commencé son intervention en affirmant qu’il ne comprenait tout simplement pas pourquoi le désastre écologique n’était pas la priorité absolue de tous les gouvernements et de toutes les sociétés du monde. Il y avait quelque chose d’insoutenable dans cet aveu candide. Parce qu’il paraissait sincère. Mais aussi parce qu’il signe la faillite complète de la démocratie.

    Je leur dirai : Venez, doux amis du ciel bleu, pauvres bêtes chéries qui, d’un brusque mouvement d’oreille, chassez les mouches plates, les coups et les abeilles

    Car en ce qui nous concerne, nous comprenons très bien l’inertie générale touchant l’écologie. La vérité est à la fois très simple et inouïe : la #planète va mourir et la plupart des gens s’en foutent. Ce n’est pas plus compliqué que cela. Certains ont toutes les raisons de s’en foutre. Les pauvres, les chômeurs, les mères célibataires, les gens rongés par leurs conditions de travail, tous ceux qui se battent chaque jour pour conserver une vie à peu près digne de ce nom et à qui on vient en plus faire la morale en leur expliquant qu’il faut mettre les bouteilles en plastique dans la poubelle verte. D’ailleurs, ils le font, en règle générale ils ne sont pas contrariants. Et si d’aventure ils le deviennent, contrariants, on les baptise #agitateurs ou délinquants.

    J’arriverai suivi de leurs milliers d’oreilles, suivi de ceux qui portent au flanc des corbeilles, de ceux traînant des voitures de saltimbanques

    Mais il y a les autres, qui s’en foutent eux aussi mais qui n’ont aucune excuse. Les #lobbies, les #multinationales, les #organisations_patronales, la plupart des #gouvernements. Puisque Monsieur Hulot est #candide, soyons-le aussi, regardons simplement ce qui se passe, ce qui se dit, et tirons-en les conséquences. La chose est désormais abondamment documentée, ce n’est en rien un secret ni une révélation. Partout sur la planète, des lobbies font pression sur les gouvernements pour empêcher, en toute connaissance de cause, la mise en place de mesures de préservation de l’environnement. Ces lobbies ne sont pas des entités autonomes ou des manifestations sataniques. Ils emploient des avocats et des juristes, des gens bien sous tous rapports, qui se mettent au service d’entreprises ou de groupements d’entreprises afin de faire en sorte qu’aucune décision gouvernementale n’aille à l’encontre de leurs intérêts économiques. Ils pratiquent ouvertement le chantage en menaçant de licencier, de délocaliser, de pratiquer l’#optimisation_fiscale à grande échelle. Ils parasitent le processus démocratique en rendant de fait impossibles certaines décisions, même quand elles sont validées par la volonté populaire.

    De ceux à qui l’on met de petits pantalons à cause des plaies bleues et suintantes que font les mouches entêtées qui s’y groupent en ronds

    Cette coalition d’intérêts privés purement, implacablement égoïstes et aveugles, c’est ce que Monsieur #Macron et beaucoup d’autres appellent le Réel. Il faut tenir compte du Réel, disent-ils, et il faut comprendre : si nous prenons certaines décisions, les marchés financiers et les grands groupes privés ruineront délibérément l’#économie. Or, le Réel, ce sont les oiseaux et les insectes qui disparaissent, les mammifères qui se raréfient, le climat qui se modifie, l’air qui devient irrespirable, l’eau polluée partout. Mourir de soif, développer un cancer à cause de produits chimiques, ou encore se promener dans un coin de campagne absurdement vide, silencieux, sans vie, c’est très réel.

    Mon Dieu, faites qu’avec ces ânes je Vous vienne. Faites que, dans la paix, des anges nous conduisent vers des ruisseaux touffus où tremblent des cerises

    Nous souhaitons bon vent à #Nicolas_Hulot mais, puisqu’il a répété plusieurs fois sur France Inter qu’il espérait que sa démission susciterait une prise de conscience, nous voudrions lui dire que la seule prise de conscience possible consiste à comprendre que le système capitaliste est mortifère et génère inévitablement la destruction de la planète. Et qu’on ne sauvera pas celle-ci en appelant à la coopération avec les entreprises et à la responsabilité individuelle.

    Et faites que, penché dans ce séjour des âmes, sur vos divines eaux, je sois pareil aux ânes (extraits de Prière pour aller au paradis avec les #ânes, de #Francis_Jammes, un gars qui ne valait rien mais qui aimait les ânes)

    #capitalisme

  • Mort d’Aretha Franklin : quand la « reine de la soul » enchantait le Palais des sports de Paris
    Francis Marmande, Le Monde, le 16 août 2018
    https://abonnes.lemonde.fr/disparitions/article/2018/08/16/mort-d-aretha-franklin-quand-la-reine-de-la-soul-enchantait-le-palai

    Archives. Seul concert d’Aretha Franklin en Europe en 1977, il est marqué par la lecture d’une scène de « Cyrano de Bergerac » et l’attitude d’un public de gougnafiers.

    Lundi 28 novembre 1977, soleil pâle : la reine de la soul music, l’impératrice des musiques de l’âme, la fille du révérend Franklin chavirée par le style de Ray Charles, l’homologue de James Brown, mais femme-femme, trois fois femme, Aretha Franklin, est au Palais des sports de Paris.

    Robe lamée, éclairages pour Holiday on Ice, esthétique tchécoslovaque, sono de salle des pas perdus à la gare Saint-Lazare, prix stratosphériques, orchestre sous-payé, bouillie sonore, public très mixte, ce qui n’est, sauf pour le free jazz, la musique antillaise et le blues, à l’époque jamais la règle. Dehors, queue de comète du gauchisme virulent, affaire de l’avocat allemand des chefs de la Fraction armée rouge Klaus Croissant, c’est soir de manif.

    Le concert d’Aretha Franklin est son seul concert en Europe. Son Aretha in Paris avait été enregistré en public dans les premiers jours de mai 1968. Le concert commence avec un solide retard. Ambiance d’échauffourée larvée. Le côté non voulu de la carrière d’Aretha est émouvant : cet enfant qu’elle a à 14 ans, sans bien savoir ; l’aspect étape des Alpes de sa course sentimentale ; celui, étape des Pyrénées avec quatre cols, de ses relations avec ses maisons de production, tout cela finit par toucher énormément et s’inscrit dans sa voix.

    A l’époque du Palais des sports, elle vient de tomber sous la houlette de l’immense et méconnu Curtis Mayfield (il lui permet d’enregistrer, en 1976, la bande originale du film Sparkle). Bien plus tard, Curtis Mayfield reste paralysé pour avoir pris un projecteur sur le crâne. Le dialogue d’Aretha Franklin avec le malheur n’est pas moins constant que celui qu’elle instaure avec la gloire.

    Une ambiance de radio-crochet

    De toute façon, comme Nina Simone, elle voulait être concertiste et uniquement concertiste, puisqu’elle en avait la compétence et la reconnaissance académique. Mais, Noire. Et il se trouve aujourd’hui de petites douanières de la pensée universitaire (si l’expression n’est pas devenue un oxymore), elles cachetonnent dans les universités américaines et interprètent, sur fond de gender studies et pensée politique de bactérie, les attitudes et les déclarations de Nina Simone ou d’Aretha Franklin, voire leurs choix musicaux, comme autant de stratégies de carrière. Fines mouches. Misère !

    Aretha Franklin est la première artiste à avoir dépassé par les ventes Elvis Presley. Elle est noire, elle impose le respect, sa voix couvre quatre octaves, elle milite pour les droits civiques, pour la culture, pour l’émancipation des femmes dans la culture afro-américaine. C’est le temps de la militante Angela Davis. N’importe quel clip ce soir peut donner, a contrario, la mesure du combat de ces femmes. Lesquelles ne faisaient que reprendre avec virulence le style de Bessie Smith, de Ma Rainey et de toutes ces filles du blues qui vivaient entre filles.

    Sur la scène du Palais des sports, dans une ambiance de radio-crochet, il lui vient une idée. Aretha Franklin n’a pas réussi à nouer avec le public turbulent ce lien sensuel, agressif, charmeur, gorgé de rythmes et de gospel profane qu’elle noue d’habitude. Qu’il attend. Pourtant, le public est partant. Mais les choses ne passent pas. C’est un temps où les publics sont comme aujourd’hui : uniquement prêts à aimer ce qu’ils connaissent déjà.

    Dans ces années 1960-1970, on vire Anita O’Day parce qu’elle est trop blanche, on conspue Albert Ayler parce qu’il joue trop free, Archie Shepp parce qu’il ne joue plus free, le Modern Jazz Quartet parce qu’il est trop bien sapé, Sun Ra parce qu’il ne l’est pas assez. Bref, l’intelligence ne manque pas.

    Elégance casse-cou

    C’est l’instant qu’Aretha Franklin choisit pour faire entrer en scène Glynn Turman, inconnu au bataillon, acteur de télé très célèbre dans le Middlewest, pas du tout au Palais des sports. C’est son nouvel amoureux. Elle lui fait fête. Elle est ainsi faite. Ambiance. Ils s’installent et elle l’interviewe dans la langue de Faulkner. Ambiance. On leur apporte les commodités de la conversation (pour mémoire : des fauteuils). Là, scène très étrange. Glynn Turman extirpe laborieusement de sa poche une édition de Cyrano de Bergerac : dans la langue d’Edmond Rostand. Ils lisent ensemble une (trop) longue scène de la pièce. C’est pour être agréable à l’Amour, à la culture, à la langue, à la France. Ingratitude des gougnafiers. Grande ambiance. Sortie injuste autant que piteuse de l’amant.

    Ce dont on se souvient, c’est la façon impérieuse, sèche, indéniable, dont Aretha Franklin récupère au piano, avec un blues sans fioriture, la situation, le déséquilibre. Et l’aliénation les gougnafiers. Qui fondent comme des nigauds. Ce génie de l’art et de la maladresse, cette élégance casse-cou, l’inaptitude totale au trucage, cette beauté de fille surprise par l’âge de femme, c’est exactement ce qu’on aimait. Sans indulgence, mais sans réserve.

    #Aretha_Franklin #Musique #Soul #Francis_Marmande

    • Archive : Aretha Franklin, « force et grâce » à l’Olympia en 1968
      Lucien Malson, Le Monde, le 8 mai 1968
      https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2018/08/16/archive-aretha-franklin-force-et-grace-a-l-olympia-en-1968_5343116_3382.html

      8 mai 1968. Que le jazz ait fécondé les variétés, qu’il ait eu avec elles des rejetons plus ou moins charmants, qu’il ait en tout cas modifié l’apparence de l’art populaire occidental, voilà ce dont on ne peut douter. D’autre part, ce grand séducteur voyage sous des noms nouveaux et, muni de faux papiers d’identité, va de New York à Londres et de Londres à Paris. Qu’est-ce donc que le « rhythm and blues » authentique, sinon une musique qui n’existe que pour le swing et ne vaut que par lui ?

      En ce domaine, les Noirs des Etats-Unis nous ont toujours paru difficilement imitables, non par le fait de quelque génie racial – à supposer qu’il soit concevable, celui-ci se trouverait aujourd’hui fort dilué –, mais en raison des circonstances de leur vie. Ce n’est pas un hasard, par exemple, si les talents de la plupart des chanteuses de couleur, depuis la guerre, éclosent dans les églises avant de s’épanouir dans les salles de concert. Cette expérience du rythme extatique, dès l’enfance, a marqué Fontello Bass, Mitty Collier, Byrdie Green, Etta James, Gloria Jones, Kitty Lester et, bien sûr, Aretha Franklin, que nous avons applaudie hier soir aux galas d’Europe 1.

      Comparée à Ray Charles

      Aretha Franklin, fille d’un pasteur baptiste, née à Memphis en 1942, s’est consacrée d’abord au gospel song et, pendant sept ans, jusqu’à la saison dernière, à toutes les formes de l’art vocal de divertissement chez Columbia. Désormais, Atlantic la révèle telle qu’elle est au plus profond d’elle-même : musicienne de jazz dans l’âme, et que la critique, outre océan, compare déjà – un peu hâtivement – à Ray Charles.

      La voix puissante d’une Mahalia Jackson et un tempérament scénique remarquable

      La troupe d’Aretha Franklin, c’est vrai, s’apparente à celle de Charles. Elle apporte partout où elle passe un mélange réjouissant de chants et de danses, de musique et de spectacle. Pourtant, le groupement criard et assommant, qui assure la première partie, n’a rien à voir avec celui de son illustre confrère ni même avec l’ensemble de James Brown. Les douze musiciens jouent selon le vieux principe du « chacun pour soi et Dieu pour tous » et ne se rachètent qu’après l’entracte en accompagnant tout de même assez bien la chanteuse. Celle-ci a la voix puissante d’une Mahalia Jackson et un tempérament scénique remarquable. Sa très jeune sœur, Caroline Franklin, anime un aimable trio vocal qui tient ici le rôle des « Raelets ».

      Tant de force et tant de grâce alliées font merveille. Le public parisien a beaucoup aimé une Aretha Franklin qui se promet de revenir et nous donne ainsi l’espoir d’assister plus souvent à ces « soirées de la 125e Rue », auxquelles nous restons très attachés.
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      Et pourtant ce concert a été très critiqué, jusque même sur la pochette du disque live (lors de sa réédition en CD) qui s’excuse que ce ne soit pas son meilleur concert...

  • L’Église et les Noirs dans l’audience du Nouveau Royaume de Grenade - Presses universitaires de la Méditerranée
    http://books.openedition.org/pulm/496

    Dans l’argumentaire des « justificatifs » de l’esclavage et de la traite des Noirs, la principale raison invoquée était d’ordre religieux : sauver des âmes. Mais en Amérique, le travail pastoral auprès des Noirs était-il mené à bien ? Et avec quels résultats ?

    Cette étude présente le processus d’évangélisation des populations noires dans l’Audience du Nouveau Royaume de Grenade (actuelle Colombie) au XVIIe siècle, et l’accueil que celles-ci réservèrent à la nouvelle religion. L’auteur retrace le rôle de la Couronne espagnole dans l’implantation de l’Église en Amérique et plus particulièrement en Nouvelle Grenade, ainsi que la situation du clergé (installation, charges, déficiences).

    Une étude originale des créations et désagrégations de paroisses met en exergue les obstacles rencontrés dans le travail d’évangélisation réalisé auprès des Noirs dans les différents évêchés au XVIIe siècle. Les Jésuites jouèrent un rôle primordial dans cette évangélisation ; leur action et leur méthode sont donc exposées, en particulier celle d’Alonso de Sandoval et de Pierre Claver qui se distinguèrent dans ce ministère. Pour appréhender le rapport des Noirs avec la religion, l’auteur recense les moyens utilisés par l’Église pour obtenir, conserver ou accentuer la dévotion des fidèles, ainsi que les différents moyens de contrôle destinés à éviter les déviances reprochées aux Noirs (beuveries, transes, blasphème, sorcellerie...).

    Un bref aperçu des religions d’Afrique permet de déceler quelques croyances ancestrales dans la religion des Afro-américains - même officiellement convertis-, survivances qui peuvent être aussi considérées comme actes de résistance à la christianisation et à l’acculturation. Se gardant de tout préconçu idéologique ou de tout manichéisme et se fondant exclusivement sur les documents replacés dans le contexte de leur époque, cette étude apporte incontestablement un regard nouveau sur la condition spirituelle des Noirs au XVIIe siècle.

    • L’Église et les Noirs dans l’audience du Nouveau Royaume de Grenade - Chapitre premier. La justification de l’#esclavage et de la traite - Presses universitaires de la Méditerranée
      http://books.openedition.org/pulm/501

      Les plus véhéments dans leur condamnation de l’esclavage furent sans conteste les deux missionnaires capucins #Francisco_José_de_Jaca et #Epifanio_de_Moirans, qui s’étaient rencontrés sur l’île caraïbe de Saint Domingue, où les esclaves noirs étaient en grand nombre. Ils escomptaient, par leurs sermons et leurs écrits, saper les fondements sur lesquels s’appuyaient les défenseurs de l’esclavage, en démontrant que tous les Noirs, qu’ils fussent païens ou chrétiens, étaient également libres et que leur maître n’avaient aucun droit sur eux ; ils demandaient donc leur affranchissement immédiat, la restitution de la valeur des travaux qu’ils avaient réalisés et recommandaient aux prêtres de ne donner l’absolution aux maîtres que lorsqu’ils auraient rempli ces conditions. La position outrancière de ces deux capucins inquiéta les autorités locales : le vicaire du diocèse de Saint Domingue, influencé par le mécontentement des planteurs employant des esclaves, excommunia, en 1681, les deux missionnaires car ils refusaient d’être reclus dans leur couvent, mais ceux-ci excommu- nièrent à leur tour le vicaire à qui ils reprochaient de ne pas respecter leurs privilèges qui les exemptaient d’une telle obligation. Reclus malgré eux dans le couvent des Capucins puis transférés à Séville en 1682, ils firent part de leurs contestations sur la traite négrière à la congrégation de Propaganda Fide, et envoyèrent une plainte au roi d’Espagne concernant les mauvais traitements que les fonctionnaires royaux leur avaient fait subir. En 1683, ils furent transférés à Valladolid avec l’interdiction formelle de revenir en Amérique.

      Avant de mourir les deux capucins avaient laissé chacun un écrit dans lequel ils réfutaient point par point les arguments en faveur de la traite et de l’esclavage en partant des postulats du droit naturel, du droit divin et du droit des gens.

      En 1685, le roi d’Espagne Charles II, à la suite de la lettre de protestation que lui avaient adressée les deux capucins, demandait au Conseil des Indes d’informer sur le fond et de communiquer son avis sur la suite à donner. Il lui fut répondu, qu’outre le fait que, grâce à la traite, les Noirs sortaient de leur barbarie et pouvaient ainsi venir à la connaissance du Christ, il fallait reconnaître que les intérêts économiques de l’Espagne justifiaient à eux seuls le maintien du statu quo. Toutes les positions qui allaient à l’encontre de celle du Conseil des Indes furent soit poursuivies et condamnées, soit ignorées.

  • Tout le site « Hors-série » en libre accès ce week-end. L’occasion de télécharger la vidéo et/ou l’audio de cet entretien avec
    #Francis_Dupuis-Déri (mars 2017)
    La peur du peuple
    http://www.hors-serie.net/Dans-le-Texte/2017-03-18/La-peur-du-peuple-id223

    #Geneviève_Sellier (décembre 2017)
    https://seenthis.net/messages/651611

    #Christine_Delphy (octobre 2017)
    http://www.hors-serie.net/Aux-Sources/2017-10-14/Antiraciste-et-antisexiste-id267

    #Pierre_Tevanian (mai 2017)
    http://www.hors-serie.net/Aux-Sources/2017-05-13/La-mecanique-raciste-id234
    (parmi beaucoup de mecs, blancs, etc. - critique déjà faite, je crois, à l’encontre de ce site. Ici ?)

  • Vers la révolution cosmopolitique
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/241217/vers-la-revolution-cosmopolitique

    Le philosophe #Francis_Wolff cherche à définir une utopie à l’échelle humaine, qui prenne de court l’utopie posthumaniste, située au-delà de l’humanisme, comme l’utopie animaliste, qui résiderait en deçà. Pour lui, la seule voie possible d’une humanité en crise réside dans le #cosmopolitisme et l’abolition des frontières étatiques.

    #Culture-Idées #animalisme #Philosophie #transhumanisme #utopies

  • A Madrid, les gauches sont piégées par le « problème catalan »
    https://www.mediapart.fr/journal/international/131217/madrid-les-gauches-sont-piegees-par-le-probleme-catalan

    Hors de #Catalogne, les gauches espagnoles peinent à comprendre ce qui se joue à Barcelone. Mediapart a rencontré des figures des mouvements sociaux, de syndicats et de partis, déboussolées, alors que la droite dicte son agenda en défense de « l’unité de l’Espagne ». Le cycle politique ouvert par le mouvement des Indignés, en 2011, se referme, écrasé par la logique identitaire de la crise catalane.

    #International #Espagne #Francisco_Frutos #indépendance #nationalisme #Podemos #PSOE

  • Démocratie connectée : #Politique truquée pour #moutons_numériques [ils ont tué #filoche]
    https://reflets.info/democratie-connectee-politique-truquee-pour-moutons-numeriques-ils-ont-tue

    Observer la gouvernance politique et le fonctionnement démocratique français en cette fin d’année 2017 est une véritable épreuve. Pour le moral et la confiance en des temps meilleurs. Il y a comme un goût aigre […]

    #Tribunes #Alain_Soral #arène_numérique #égotrip #En_Marche #fascisme_français #francisme #jupiter #macron #plèbe #rouges-bruns #Twitter