#fred_turner

  • Fred Turner : « Fascisme est le bon terme pour décrire le régime de Donald Trump »
    https://www.latribune.fr/article/tech/11076871763823/fred-turner-fascisme-est-le-bon-terme-pour-decrire-le-regime-de-donald-tru

    Le 18 octobre dernier, 7 millions de citoyens américains ont défilé à travers tous les États-Unis pour s’ériger contre Donald Trump. Dans la Silicon Valley, où les grandes entreprises de la tech se sont majoritairement ralliées à l’administration républicaine, les protestations se font bien plus discrètes au quotidien, regrette Fred Turner, historien et chercheur en sciences de la communication. L’auteur, de passage en France à l’occasion de la publication de deux de ses ouvrages chez C&F Éditions (Design d’une démocratie et Politique des machines), tient ce mardi 4 novembre une conférence à Sciences Po Paris sur l’autoritarisme californien, ou comment le monde numérique a basculé de l’idéologie libertaire vers un autoritarisme assumé. L’occasion de publier cet entretien réalisé par La Tribune quelques semaines plus tôt lors d’une rencontre avec Fred Turner dans son bureau à Stanford.

    #Fred_Turner #Technofascisme #Marine_Protais #La_Tribune

  • (16) Publier | LinkedIn
    https://www.linkedin.com/posts/denis-maillard-temps-commun-44615157_il-y-a-des-livres-vers-lesquels-il-faut-revenir-activity-7295470708787150848-6BRf/?originalSubdomain=fr

    Il y a des livres vers lesquels il faut revenir de temps en temps tant ils ont su saisir quelque chose de l’esprit nouveau du temps qui permet d’en éclairer à la fois le passé et notre présent.

    C’est le cas de « Aux sources de l’utopie numérique » (publié en 2013) qui raconte comment des gens comme Stewart Brand ont été des passeurs entre les technologies et les idées à travers des revues comme le Whole Earth Catalog dans les années 60 ou Wired dans les années 90.

    Or, on trouve p 341 un chapitre intitulé « Les nouveaux communalistes croisent les chemins de la nouvelle droite » qui raconte comment le premier leader républicain populiste Newt Gingrich a été une star de Wired à partir de 1995, autour d’idées simples : mettre la société en réseau, réduire les hiérarchies et obtenir un ordre cybernétique spontané… Bref, l’atterrissage de l’idéologie libertarienne dans l’utopie du web libre (ce que Monique Dagnaud a appelé l’idéologie californienne) qui a mis une trentaine d’années (et quelques dizaines de milliards de dollars) à accoucher du techno capitalisme qui gouverne aujourd’hui les États-unis…

    #Fred_Turner #Utopie_numérique

  • Note de lecture = Le Cercle Démocratique par emmanuel vergès
    https://www.linkedin.com/feed/update/urn:li:activity:7289918111670042625

    emmanuel vergèsemmanuel vergès • 1er • 1er co-directeur @Observatoire des Politiques Culturelles / co-directeur @lofficeco-directeur @Observatoire des Politiques Culturelles / co-directeur @loffice 6 h •
    Il y a 6 heures
    Note de lecture = Le Cercle Démocratique#1

    L’ouvrage de Fred Turner édité par C & F EDITIONS est pour moi une référence : il raconte l’histoire du Comité pour le Moral Américain dans les années 1930 aux Etats-Unis, et montre, à travers les travaux d’anthropologues, artistes, intellectuel·le·s, journalistes ... le lien entre média et construction politique de la société.

    💡 Pourquoi cette histoire est importante ?

    Fred Turner nous montre, que même si les technologies des médias ne sont pas culturellement neutres, différentes approches existent entre une approche « médias de masse » tendant vers l’autoritarisme, ou une approche « démocratique des médias ». Non seulement par les usages, mais aussi par ce que les Institutions souhaitent en faire.

    Les médias sont politiques puisqu’ils sont liens, pour suivre les travaux hashtag#HannahArendt
    Alors, les médias, réseaux sociaux et plateformes le sont aussi.

    💡 Pourquoi cette histoire est vraiment importante ? ;-)

    Parce qu’elle permet aujourd’hui, de porter un regard différent sur les médias et réseaux sociaux, et sur un ensemble de plateformes numériques qui nous relient, à travers des contenus, des messages, des likes, des scrolls, des gestes numériques ...

    Il me semble aujourd’hui que Facebook, Instagram ou Twitter, dans les mains d’entreprises monopolistiques, posent des problèmes démocratiques. Non pas parce que ce sont des réseaux sociaux contributifs et populaires, voire pupulistes. Non pas seulement par les messages qui s’y échangent.
    Mais parce qu’ils sont asservies à des intérêts partisans.

    🔔 Mais comme pour d’autres médias, les démocraties ont réussi à en légiférer l’intention, et non seulement les usages.

    Les récentes affaires à la télévision et sur la TNT arbitrées par l’ARCOM montrent l’importance des institutions et des lois.
    🔎 Et montrent l’attention que l’on doit porter en permanence à ce qui composent nos « paysages médiatiques », nos « environnement médiatiques ».

    🌐 Nous avons le pouvoir d’en constituer des « democratic surround ». Et de le garantir.

    Merci Fred Turner merci Hervé Le Crosnier

    #Fred_Turner #Emmanuel_Verges #Cercle_démocratique

  • Democracy depends on obedience | America Magazine
    https://www.americamagazine.org/politics-society/2025/01/08/democracy-trump-inauguration-249630

    Cultural historian Fred Turner’s book The Democratic Surround identifies this pattern as a systematic phenomenon. In attempting to inoculate people against the temptations of both fascism and communism, mid-20th century American cultural institutions developed a certain theory of the democratic subject—one whose fulfillment was not in collectivity but individuality. Our purpose was not to serve a community so much as to express ourselves through our distinctive choice, identities and (of course) purchases. In 1954, a film about solidarity in a Mexican-American labor union called “Salt of the Earth” was barely available in the United States due to anti-communist pressure; that year’s Best Picture award went to “On the Waterfront,” in which scrappy dockworkers find themselves by escaping their corrupt union for more individualized labor relations.

    The pursuit of unbridled selfhood is a shifty foundation for democracy. Lose your union power, and the boss wins. Holding up your personal truth above all else means failing to listen to the views of others. Democracy cannot accomplish anything under a regime of self-expression at all costs. Democracy also involves a dirty word in the American idiom: obedience.

    As we enter a second Trump administration, many people will face a test of what democracy asks of us. Last time around, there was the “resistance,” signified by Rebel Alliance emblems as bumper stickers. There were the one-off marches in the early days, up through the Black Lives Matter uprising of 2020. Democratic lawmakers played by the rules in a performance of law and order, but they also mounted two unsuccessful impeachment attempts.

    There are also moments, at times of gross injustice, when democracy requires well-aimed disobedience. But they are the exceptions that prove the rule. After all, civil disobedience has often been most effective among those who act in evident obedience to a higher law.

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    What I mean to offer is an invitation to enter this new moment by asking not merely how to rebel or dissent, or when to burst out in protest. All those things will surely come. But first, we might ask: To what and whom do we offer our obedience?

    In trying times, it is easy to forget who we are. When chaos agents are in charge, wielding division and dismay, obedience can ground us. It is a source of clarity and discipline. Is your obedience to your family or your faith, to your neighborhood or your city, to your vocation or your networks? The president need not be your highest power, even if he is in power over you. With the people you trust, discern together: How will you be accountable?

    If outbursts of self-expression are the sole strategy, I fear we will wear ourselves out quickly in what is to come. Obedience, I know, is a scary notion for those of us raised with individualism. But in moments like these, it can be an essential guide. If democracy is under threat from authoritarian urges, it is time to rediscover and reorganize our mutual obedience.

    #démocratie #Individualisme #Fred_Turner

  • Nouvelles technologies : Des réseaux bien peu sociaux - POLITIS
    https://www.politis.fr/articles/2024/12/societe-nouvelles-technologies-des-reseaux-bien-peu-sociaux

    L’une des promesses du web était de faire interagir des communautés du monde entier. Mais, à l’heure où l’on fait défiler des suites infinies de vidéos sur Instagram, Facebook ou TikTok, en quoi le temps passé en ligne a-t-il une fonction sociale ?
    Benjamin Tainturier • 18 décembre 2024 abonné·es
    Article paru
    dans l’hebdo N° 1841-1843

    Au début des années 1930, la ville autrichienne de Marienthal, dans la banlieue viennoise, est frappée par une grave crise causant un chômage endémique. Paul Lazarsfeld, Marie Jahoda et Hans Zeisel décrivent, dans une étude célèbre sur les chômeurs de Marienthal, l’état de déréliction dans lequel sont poussés ces ouvriers sans travail.

    N’ayant plus rien à faire de leurs journées, ils perdent le goût des loisirs et du lien social – ils désertent les clubs de sport, s’absentent des réunions syndicales et ne lisent plus. Ou si peu : beaucoup délaissent l’Arbeiterzeitung, journal de débats et d’analyses, pour s’adonner à la lecture du Kleines Blatt, tissu de faits divers et d’articles à la petite semaine.

    Quiconque aujourd’hui s’est déjà égaré le long d’un fil ininterrompu de stories Instagram ou de vidéos TikTok sait dans quel puits sans fond on se trouve alors précipité. Ces contenus, criards et parfois obscènes, composent un vrai musée du temps perdu. Ils ont bien plus à voir avec les bêtises du Kleines Blatt qu’avec l’Arbeiterzeitung. La consommation banalisée de tels contenus est-elle le symptôme d’une vie atone, comme celle des chômeurs de Marienthal, ou le temps passé sur les réseaux numériques est-il au contraire un véritable moment social ?

    Il y eut une période où les technologies numériques ­faisaient croire à l’avènement d’un « cerveau planétaire ». Fred Turner, dans Aux sources de l’utopie numérique, le rappelle. À la fin des années 1960, les hippies rêveurs de la contre-culture et les ingénieurs technophiles issus de la cyberculture célébraient ensemble les promesses des technologies numériques. Internet venait de naître et avec lui l’espoir que ce réseau des réseaux puisse un jour héberger toutes les idées, partout au monde, que les humains voudraient bien y consigner.

    Le numérique deviendrait le support d’une couche pensante sur Terre – ce que le philosophe Pierre Teilhard de Chardin nommait « noosphère » – où se rencontreraient toutes les pensées vagabondes sur un réseau où on ne se sentirait jamais seul. Cette aspiration doit beaucoup aux informaticiens des campus états-uniens, porteurs d’une culture universitaire louant le partage et la décentralisation du pouvoir et de l’autorité.

    Elle a pour corollaire une conception très libérale du sujet qui trouve dans les technologies numériques de nouveaux moyens pour s’exprimer. Comme le LSD, disait-on dans les années 1960, ouvre les portes de la perception, le numérique décuple la faculté de connaître et l’agir individuel, les hackers représentant le modèle le plus abouti de cet « empuissantement » technique individuel.

    La promesse du collectif

    Bien des années plus tard, espaces numériques et réseaux sociaux ont hérité de chacune de ces deux lignées – culture participative et culture de soi – mais on se demande si l’une n’aurait pas éteint l’autre. Dans les années 2000, le web était affaire de forums, d’instances, de réseaux pair à pair, de chats, déclinant en autant de lieux de rencontre toutes les formes possibles de l’agora. Aujourd’hui, on ne parle plus que de profils, de pages personnelles, de « bio ». Il existe bien entendu des formes intermédiaires, des Slack et des Discord, faits pour la délibération collective ou la conversation.

    Mais il semble qu’avec Instagram, TikTok ou Twitch, les espaces publics participatifs aient cédé la place à un web archipélisé, grouillant de communautés rassemblées autour de personnalités influentes. C’est cette forme que prend le social des réseaux dits sociaux. Nuançons. Tous ces petits rituels par lesquels on s’affiche sur son profil Instagram, par lesquels nous jouons une performance en ligne, nous incluent dans quelque chose de plus grand que nous.

    La sociologie interactionniste a largement établi combien ces rituels de mise en scène de soi nous aident à donner sens au monde et à nos échanges, à signifier notre adhésion à des normes communes et à donner, ainsi, réalité à ces normes. On s’en convaincra en se rappelant notre embarras devant certains profils Instagram ou Facebook transgressant les normes numériques : leurs images de profils sont louches, leurs messages écrits en majuscules, manquant de ponctuation ou, au contraire, abusant des points de suspension.

    Ces profils sont ceux d’individus pas tout à fait à leur place, parfois même des exclus du numérique qui portent leurs fautes de goût comme autant de stigmates. Si nous savons qu’on ne veut pas leur parler, c’est parce qu’ils transgressent les normes auxquelles nous-mêmes et la majorité des autres internautes souscrivons.

    Le temps passé sur le web n’est jamais gratuit, offert, indemne. Il n’est jamais l’exercice d’une forme positive de liberté.

    Dans un ouvrage magnifique, Asiles, Erving Goffman a bien montré que ces rites de présentation de soi, dirigés vers autrui, ratifient notre inclusion dans un collectif de normes où l’on se sait soi-même reconnu. La présentation à autrui constitue l’assise même de l’individu, de l’identité, du « moi ». Si le temps libre passé sur les réseaux est un temps cosmétique, où l’on raffermit son image, il est aussi social au sens où l’on est toujours soi à travers l’assentiment des autres.

    Mais nous oublions le troisième acteur de l’équation. Entre soi-même et les autres s’étale tout un continuum d’infra­structures numériques. Celles-ci génèrent des revenus en nous extorquant une partie de la richesse que nos données représentent. Nous sommes donc mis au travail malgré nous sur les réseaux sociaux, rendus agents de ce qu’on nomme digital labor. Le terme qualifie « la réduction de nos ‘liaisons numériques’ à un moment du rapport de production, la subsomption du social sous le marchand dans le contexte de nos usages technologiques (1) ».
    1

    Voir la définition donnée par Dominique Cardon et Antonio Casilli dans « Qu’est-ce que le digital labor ? », La Revue des médias, 7 septembre 2015.

    Le temps passé sur les réseaux sociaux est-il véritablement libre ? Il est libre comme l’est le temps de quiconque n’est pas occupé – définition négative de la liberté, où elle est définie par ce qu’elle n’est pas. Mais le temps passé sur le web n’est jamais gratuit, offert, indemne. En ce sens, il n’est jamais l’exercice d’une forme positive de liberté.
    Par Benjamin Tainturier

    #Culture_numérique #Personnalisation #Médias_sociaux #Fred_Turner

  • « Malgré Elon Musk, la Silicon Valley reste un bastion du parti démocrate »
    https://www.nouvelobs.com/idees/20241109.OBS96127/malgre-elon-musk-la-silicon-valley-reste-un-bastion-du-parti-democrate.ht

    Entretien avec Fred Turner sur la situation post-électorale dans la Silicon Valley

    Propos recueillis par Xavier de La Porte

    Publié le 9 novembre 2024 à 9h30
    Elon Musk au meeting de Donald Trump au Madison Square Garden, à New York, le 27 octobre 2024.

    Entretien La victoire de Donald Trump risque de bénéficier au patron de Tesla. Mais ce n’est pas toute la Tech américaine qui a basculé dans le camp républicain. Analyse avec l’historien de la Silicon Valley, et professeur à Stanford, Fred Turner.

    La participation d’Elon Musk à la campagne de Donald Trump a été spectaculaire. Mobilisation sur X (ex-Twitter), dons financiers, participation à des meetings… Au point que le patron de X, Tesla, SpaceX, Neuralink et Starlink a été longuement remercié par le nouveau président le soir de sa victoire. Il n’est pas le seul personnage important de la Silicon Valley à s’être engagé dans cette campagne auprès de Donald Trump : Peter Thiel (autre membre de la « mafia Paypal »), l’investisseur Marc Andreessen et d’autres encore. Eu égard à la timidité de Jeff Bezos, le patron d’Amazon et propriétaire du « Washington Post », qui a refusé que son journal s’engage pour Kamala Harris, et au silence relatif d’autres patrons de cette industrie longtemps favorable aux démocrates, on peut avoir l’impression que quelque chose a changé dans la Silicon Valley, que ce lieu jadis plein d’ingénieurs utopistes et post-hippies a cédé aux sirènes de l’alt-right. Fred Turner, auteur notamment de « Aux sources de l’utopie numérique » et historien de la Silicon Valley, nuance ce sentiment, tout en notant les effets néfastes que pourrait avoir l’influence de Musk sur Donald Trump.
    La victoire de Trump est-elle aussi, d’une certaine manière, celle d’Elon Musk ?

    Fred Turner Bien sûr. Et celle de Jeff Bezos aussi. En soutenant Trump de manière aussi agressive, Musk a fait du nouveau président son débiteur. Celui-ci lui doit maintenant bien des faveurs que le patron de X ne manquera sûrement pas de lui réclamer dans les années à venir. Elles peuvent aller d’avantages réglementaires pour ses entreprises à une influence directe dans le gouvernement.

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    Il est difficile de déterminer si l’implication de Musk découle d’une conviction politique sincère ou d’un opportunisme entrepreneurial. Quelle est votre hypothèse ?

    Avec quelqu’un comme Musk, il est difficile de démêler le personnel du politique. Comme d’autres magnats de la tech, il considère les affaires et la politique comme deux moyens de changer le monde, et comme deux systèmes nécessitant des « hommes forts » à leur tête.
    La technologie a déjà conduit à la privatisation de nombreux aspects de la vie. Ce lien fort entre Trump et Musk pourrait-il accélérer cette tendance ?

    Aux Etats-Unis, cela mènera certainement à davantage de dérégulations. Le contrôle des entreprises sur des fonctions historiquement assumées par l’Etat pourrait aussi se voir renforcé. Le système de satellites Starlink de Musk, conçu et entièrement détenu par une entreprise privée, est déjà une infrastructure critique pour l’armée américaine. Quand les oligarques accèdent au pouvoir, ils ont souvent tendance à céder les ressources de l’Etat à leurs partisans pour s’assurer de leur loyauté. On verra si cela se produit ici. Il faudra garder un œil sur le secteur de l’éducation, par exemple… et sur la possibilité d’une privatisation et d’une numérisation de l’instruction publique.
    L’implication d’Elon Musk (et, plus largement, de la « PayPal mafia »), combinée au refus de Jeff Bezos que le « Washington Post », journal dont il est propriétaire, ne prenne parti pour Kamala Harris, indiquent-ils une évolution politique de la Silicon Valley ?

    Non. Pas vraiment. Il existe une grande fracture entre les dirigeants des grandes entreprises technologiques et les employés de base. Comme l’ont montré les résultats du vote, la Silicon Valley reste un bastion du Parti démocrate, même si ses leaders promeuvent des dirigeants autoritaires – et se comportent d’ailleurs comme tels.
    Quels sont les aspects du message de Trump qui ont séduit ces dirigeants ?

    Pour des figures comme Musk, l’image de l’homme fort est assez attirante. De même que les appels à la dérégulation et la promesse de privilégier les intérêts des entreprises et le profit, au détriment de l’environnement et du bien public.
    Y a-t-il une forme de luttes des classes au sein de Silicon Valley ?

    Il existe dans cette région des Etats-Unis une inégalité immense. Dans notre livre « Visages de la Silicon Valley », nous avons tenté avec Mary Beth Meehan de rendre visible la classe ouvrière de la vallée. Malgré l’immense richesse produite ici, une grande partie de la population vit sous le seuil de pauvreté et, selon la banque alimentaire Second Harvest, un habitant sur six dépend régulièrement de leurs services.
    Y a-t-il encore des utopistes post-hippies à Silicon Valley ?

    Oui. Les utopistes des années 1960, qui ont joué des rôles clés dans l’essor de la Silicon Valley, ont aujourd’hui autour de 80 ans. Mais une nouvelle génération a pris le relais dans leur croyance que les technologies peuvent remplacer la politique et résoudre les problèmes sociaux, dont ils estiment par ailleurs qu’elle est la cause. Leur foi dans la promesse utopique portée par les machines et la technologie est visible partout, que ce soit dans la pratique du microdosage de LSD au travail (pour, pensent-ils, devenir plus intelligents) ou dans la création de systèmes d’Intelligence Artificielle censés doter les humains d’aptitudes quasi-divines. Chez beaucoup de personnes de la Silicon Valley, il persiste, comme c’était le cas dans les communautés des années 1960 qui en furent à l’origine, une grande cécité sur les conditions ordinaires de la vie ordinaire, et un manque d’intérêt pour trouver les moyens de l’améliorer.

    Kamala Harris a-t-elle adressé un message spécifique au monde de la tech ?

    Pas à ma connaissance. Mais elle y est bien connue évidemment, puisqu’elle est originaire de la région de la baie de San Francisco.
    Quel rôle les podcasts (notamment ceux de Joe Rogan et de l’alt-right) ont-ils joué pendant la campagne ? Voyez-vous cela comme un déplacement de l’influence des médias traditionnels vers les nouveaux médias ?

    Un des grands enseignements de cette élection est que les médias de masse comptent beaucoup, beaucoup moins qu’auparavant. Pensez-y : Kamala Harris a réussi à mobiliser en sa faveur la plupart des grandes figures d’Hollywood, de l’industrie musicale et de la télévision. Beyoncé a ouvert un de ses meetings, et Taylor Swift l’a soutenue publiquement. De nombreux grands journaux américains ont appuyé sa candidature, tacitement ou explicitement. Malgré tout, cela n’a pas suffi à convaincre les électeurs.

    Il est trop tôt pour produire une analyse satisfaisante de ce qui s’est passé, néanmoins il est de plus en plus évident que les gens vivent dans des silos informatifs très distincts et ne font plus confiance aux médias destinés à ce que nous appelions autrefois le grand public.

    BIO EXPRESS

    Fred Turner enseigne l’histoire des médias à l’université Stanford, en Californie. Il est l’auteur d’un ouvrage devenu un classique, « Aux sources de l’utopie numérique. De la contre-culture à la cyberculture, Stewart Brand, un homme d’influence » (C & F Editions, 2012).

    Propos recueillis par Xavier de La Porte

    #Fred_Turner #Xavier_de_La_Porte #Silicon_Valley #Elections #Musk #Mary_Beth_Meehan

  • De l’influence du livre de Fred Turner : Aux sources de l’utopie numérique - Educavox, Ecole, pédagogie, enseignement, formation
    https://www.educavox.fr/accueil/breves/retour-d-utopie-de-l-influence-du-livre-de-fred-turner

    De l'influence du livre de Fred Turner : Aux sources de l'utopie numérique

    https://cfeditions.com

    Entretien avec Fred Turner : Articles rédigés par Olivier Alexandre, Thomas Cazals, Anne Cordier, Adrian Daub, Xavier de La Porte, Hervé Le Crosnier, Christophe Masutti, Julie Momméja, Francesca Musiani, Valérie Schafer, Nicolas Taffin, Laurent Vannini et François Vescia. À l’occasion des 10 ans de la publication en français de Aux sources de l’utopie numérique. De la contre-culture à la cyberculture, Stewart Brand, un homme d’influence de Fred Turner, C&F éditions a réuni une douzaine de texte autour de ce classique des humanités numériques.

    Dix ans déjà. Cela fait 10 ans que C&F éditions a publié la traduction en français du livre majeur From Counterculture to cyberculture de Fred Turner. Le livre que vous lisez aujourd’hui est à la fois un hommage à un classique de l’histoire de l’Internet et un pertinent rebond au moment où de nouveaux grands mouvements se font jour dans l’industrie numérique.
    La fresque que Fred Turner déroule dans son livre est marquante de nombreux points de vue.

    Comme le souligne Dominique Cardon dans la préface, il y a d’abord ce tour de force de conter l’histoire d’une technologie en suivant le parcours d’un homme qui n’est pas informaticien, alors que les nombreuses histoires de l’Internet parues auparavant se construisent autour des biographies et travaux des « pères fondateurs ».
    C’est que Fred Turner n’écrit pas une histoire des techniques de l’Internet, mais d’emblée de son usage et de sa construction comme outil social, politique et idéologique.

    Donc comme un outil tantôt en phase, tantôt en divergence avec les idéologies, les discours et les porte-parole qui impriment leur marque dans l’air du temps. Les préconceptions, les idées et les orientations des personnes qui créent des systèmes laissent inévitablement des traces dans le fonctionnement et dans le type d’usage qui en sera fait. Alors que l’Internet est devenu le phénomène social et économique que l’on connaît, les premiers concepts y sont toujours actifs par-delà les changements de structure, les innovations et les concentrations économiques.

    Il importe donc de mesurer le poids des idées et des projets qui étaient à la source même de cet immense réseau interconnecté. On a souvent dit que le réseau avait été co-construit par les hippies et les militaires, puis par les universitaires et enfin par les méga-entreprises concentrées qui tiennent aujourd’hui la corde sur les pratiques sociales. C’est évidemment une formule, qui mérite à ce titre d’être précisée, mais qui garde néanmoins toute sa puissance évocatrice. Et c’est ce parcours que l’on va retrouver dans l’exploration des origines à laquelle se livre Fred Turner.

    Extrait de l’introduction par Hervé Le Crosnier & Nicolas Taffin.

    En savoir plus : https://cfeditions.com/retour-utopie
    Dernière modification le samedi, 15 juin 2024

    #Fred_Turner #Retour_Utopie

  • Cardinal Canvas : Green Library hides art in plain sight
    https://stanforddaily.com/2024/05/09/cardinal-canvas-green-library-hides-art-in-plain-sight

    By Adam Golomb
    Published May 9, 2024, 12:25 a.m., last updated May 10, 2024, 9:18 p.m.

    Editor’s Note: This article is a review and includes subjective opinions, thoughts and critiques.

    On my way to study in Green Library’s Lane Reading Room, I was suddenly struck by a portrait of a woman in an industrial kitchen, staring at me. An object label next to it reads: “Teresa.” As a regular at Green, I questioned how I had never seen this artwork — or noticed that the library even had art — before.

    After a little sleuthing, I discovered “Teresa” is a part of an exhibit entitled “Seeing Silicon Valley,” on display at Hohbach Hall, the East Wing of Green Library. The exhibit is a selection from the photography book of the same name, created by photographer Mary Beth Meehan in tandem with Stanford Professor of Communication Fred Turner.

    The original photography book captured the lives of those who struggle financially in Silicon Valley, an area known for its economic prosperity and technological innovation. Teresa is one of many essential workers in Silicon Valley, operating a food truck that serves the entire Bay Area, including Stanford itself. We see her in a full-body portrait, with the tubs of empty guacamole and salsa containers towering in the back.

    Teresa’s expression is complex. I initially saw it as hardened but, the more I stare, I see pride, tiredness, inquisitiveness. The object label explains, after a long shift, she returns to an apartment that she shares with her four daughters. I found myself contemplating the times I’ve walked past this picture without acknowledging Teresa’s story, oblivious of the work that drives Silicon Valley.

    While I appreciate the integration of an art exhibit into a library, the placements of some of the other photographs accidently contribute to this motif of ignoring these workers. Venturing toward the presentation room, a series of “Seeing Silicon Valley” portraits adorn the wall, but they are partially covered by the library’s collection of desktop monitors.

    One of these slightly obscured photos, “Abraham & Brenda,” caught my eye. A close-up of a couple embracing each other, but both focused toward the viewer. Abraham and Brenda pose in front of their trailer that they park outside of Stanford’s campus.

    Their expression of love toward each other is raw, a tight clasp between them that shines as both protective and reassuring. “Abraham & Brenda” spotlights the ways love beams through, even through hardship. With their entwined figures casting shadows against their trailer, Meehan’s photography masterfully catches the couple’s financial reality.

    While most of the portraits center their subjects, “Cristobal” pushes its titular character toward the back, nested in a small shed painted with bright pinks and greens. Cristobal, a full-time security officer at Meta, is only able to afford this shed located in someone’s backyard in Mountain View, reads the object label.

    The viewer can see the entirety of the shed in the frame, with Cristobal posing inside with his hands in front of his body, making him look as small as the shed. A wave of deep sadness flowed over me; there is almost no way to reconcile this deep socioeconomic inequality that pervades the region we all currently inhabit and benefit from.

    “Cristobal” is another portrait that is slightly covered by computer monitors. Poignantly, the person working right in front of “Cristobal” had a product from the same company that Cristobal works for, Instagram, open on the screen. In a way, “Seeing Silicon Valley” expresses its theme too well, as students ignore the lives of these workers even as their portraits tower over them.

    This exhibit is long-term, set to stay up until 2025. Next time you’re at Green, take the time to look and read their stories — they are complicated and thought-provoking, a true reflection of our positionality on campus.

    #Mary_Beth_Meehan #Fred_Turner #Visages_Silicon_Valley

  • Introduction. Au-delà de l’idéologie californienne | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-teque-2024-1-page-9.htm

    Les cinquante dernières années ont été marquées par la promesse suivant laquelle l’informatique permettra dans un futur proche de créer une société d’individus égaux et émancipés.L’idéal pastoral, communaliste, d’une société harmonieuse inter-espèces, à petite échelle et en marge de l’État, aura trouvé une matrice précoce dans le poème Tous surveillés par des machines d’amour et de grâce du hippie Richard Brautigan. Ce texte est cité par l’historien de l’internet Fred Turner dans son livre important Aux sources de l’utopie numérique, comme l’emblème d’un certain état d’esprit de la contre-culture de la baie de San Francisco. En hommage, l’un des premiers clubs d’informatique autonomes de la région est baptisé Loving Grace Cybernetics. À travers la référence à ce poème, c’est l’esprit des premiers colons qui rencontre la soif de liberté et d’épanouissement personnel de nerds en recherche d’alternative à la bureaucratie, qu’elle vienne des entreprises ou de l’État. Cet état d’esprit marque durablement la région. On le retrouve dans le magazine en forme de kit de survie pour les néoruraux The Whole Earth Catalog, dans la communauté de bricoleurs d’ordinateurs personnels réunis dans le Homebrew Computer Club (un lieu mythique de l’émergence d’Apple), puis dans la liste de diffusion électronique The WELL (considérée comme l’une des premières « communautés virtuelles »). Comment ne pas succomber à la vision élégiaque d’un cerf flânant en paix dans une forêt cybernétique ? Qui pourrait être contre une « harmonie mutuellement programmée »

    #Fred_Turner #Utopie_numérique #Teque

  • 1. De si vieilles promesses | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-teque-2024-1-page-29.htm

    L’ouvrage de Fred Turner, Aux sources de l’utopie numérique. De la contre-culture à la cyberculture (2010), a fourni un étayage empirique aux thèses de L’idéologie californienne, à partir du récit de la trajectoire de Stewart Brand : au premier abord, le fondateur de The Whole Earth Catalog, The WELL et du Global Business Network constitue le cas parfait du hippie devenu yuppie. Mais à y regarder de plus près, ce que montre Turner, c’est que celui-ci est avant tout un homme de réseaux — qui s’étendent d’ailleurs sur les deux côtes des États-Unis d’Amérique, et pas seulement en Californie. Sa curiosité et son activisme toujours à la frontière de différents milieux — ingénieur·es, designer·es, entrepreneur·euses, consultant·es des think tanks naissants et politicien·ennes — sont allés de pair avec une démarche qui ressemble à ce que les sociologues appellent un « entrepreneur de cause ». En l’occurrence, il s’agissait de promouvoir la démocratisation des outils techniques comme source d’émancipation et d’autonomie. Cette position a son intérêt sur le moment. La croyance dans le pouvoir de transformation du « faire » et l’attention au potentiel des technologies à l’échelle locale paraît apporter un contrepoint bienvenu à la pensée critique dominante (centrée sur la démystification économique et culturelle) et vis-à-vis des spiritualités new age. D’un autre côté, avec son flou sur les questions politiques majeures à une échelle plus systémique, elle a pu se glisser dans une logique capitaliste à laquelle elle avait d’abord paru s’opposer…

    #Fred_Turner #Utopie_numérique #Teque

  • AUX SOURCES DE L’UTOPIE NUMERIQUE OU L’AVENTURE LIBERTAIRE DES RESEAUX | Unidivers
    https://www.unidivers.fr/aux-sources-de-lutopie-numerique-ou-laventure-libertaire-des-reseaux

    Il est des acteurs de la Toile devenus célèbres, voire emblématiques, tels Bill Gates ou Steve Jobs. Et d’autres dont l’existence et le rôle sur le net sont restés méconnus. C’est typiquement le cas de Stewart Brand, que le livre de Fred Turner, Aux sources de l’utopie numérique, de la contre-culture à la cyberculture, Stewart Brand, un homme d’influence, dévoile au grand public.

    L’utopie, ça réduit à la cuisson. C’est pourquoi, il en faut énormément au départ.
    Gébé.

    Stewart Brand n’est pas un inventeur du net mais un « passeur », aidé en cela par ses multiples compétences (biologiste, photographe, designer, vidéaste, journaliste, enseignant…) et qui a pu ainsi lancer plus aisément des ponts entre les chercheurs, les artistes, les sociologues, les ingénieurs, les managers.

    Au final, et paradoxalement, la contre-culture utopiste et libertaire des « communalistes » et autres hippies californiens, qui a tracé la voie d’une libre expression des individus en réseaux sur internet, a aussi « fait le lit d’un ensemble de thématiques libérales qui donnera corps aux politiques de dérégulation des années 90 […]. La contre-culture est ainsi devenue le plus formidable ressort de l’expansion du capitalisme digital. » (Dominique Cardon).
    Ouvrage riche et instructif, à lire absolument pour qui veut mieux connaître la genèse des réseaux sur la Toile.

    #Fred_Turner #Utopie_numerique

  • AUX SOURCES DE L’UTOPIE NUMERIQUE OU L’AVENTURE LIBERTAIRE DES RESEAUX | Unidivers
    https://www.unidivers.fr/aux-sources-de-lutopie-numerique-ou-laventure-libertaire-des-reseaux

    Il est des acteurs de la Toile devenus célèbres, voire emblématiques, tels Bill Gates ou Steve Jobs. Et d’autres dont l’existence et le rôle sur le net sont restés méconnus. C’est typiquement le cas de Stewart Brand, que le livre de Fred Turner, Aux sources de l’utopie numérique, de la contre-culture à la cyberculture, Stewart Brand, un homme d’influence, dévoile au grand public.

    L’utopie, ça réduit à la cuisson. C’est pourquoi, il en faut énormément au départ.
    Gébé.

    Stewart Brand n’est pas un inventeur du net mais un « passeur », aidé en cela par ses multiples compétences (biologiste, photographe, designer, vidéaste, journaliste, enseignant…) et qui a pu ainsi lancer plus aisément des ponts entre les chercheurs, les artistes, les sociologues, les ingénieurs, les managers.

    #Fred_Turner #Utopie_numérique

  • Usbek & Rica - Détournement, droit d’auteur… 5 outils pour embrouiller les IA
    https://usbeketrica.com/fr/article/detournement-droit-d-auteur-5-outils-pour-embrouiller-les-ia

    « ChatGPT n’est qu’une version très poussée et à très grande échelle de tout ce qu’on sait faire depuis longtemps en termes d’apprentissage automatique. » Ainsi l’historien américain Fred Turner, auteur de plusieurs études primées sur l’impact des nouvelles technologies sur la culture américaine, résume-t-il dans nos colonnes son scepticisme face à l’emballement médiatique autour de l’intelligence artificielle.

    Il n’empêche : comme Fred Turner le reconnaît lui-même, l’émergence de ChatGPT, Dall-E et autres MidJourney achève de nous faire basculer dans un monde où cette « très grande échelle » change à peu près tout, notamment du point de vue de la création.

    Articles écrits par des robots, illustrations générées par quelques lignes de code… Derrière ces prouesses apparentes, on retrouve des algorithmes d’apprentissage automatique, bâtis à partir d’immenses bases de données en ligne plutôt banales, pas toujours protégées… et donc potentiellement faillibles. Pour envoyer balader ces systèmes, faire valoir leurs droits ou tout simplement sécuriser leurs données, certains ingénieurs bâtissent depuis quelques mois des outils en tout genre, du site amateur au logiciel professionnel. Nous en avons recensé cinq.

    #Fred_Turner #Intelligence_artificielle

  • Book club : « Aux sources de l’utopie numérique » de Fred Turner
    https://fisheyeimmersive.com/article/book-club-aux-sources-de-lutopie-numerique-de-fred-turner

    Avant de s’imposer dans les musées, l’art numérique trouve sa source dans les bibliothèques. « Book Club » revient sur ces livres essentiels des mouvements créatifs explorant les liens avec les nouvelles technologies. IA, métavers, réalité augmentée… Ces auteurs traitent de tout ! Aujourd’hui, focus sur Aux sources de l’utopie numérique, un classique à ranger dans le champ des humanités numériques, un ouvrage essentiel où Fred Turner revient sur l’histoire de la contre-culture américaine à travers la figure de Stewart Brand.
    L’auteur

    Actuellement professeur de Communication à l’Université de Stanford, Fred Turner s’est d’abord illustré comme journaliste au sein de nombreux médias, du Boston Globe Sunday Magazine au The Boston Phoenix, en passant par le mythique Harper’s. À partir de 1987, il se tourne en parallèle vers l’enseignement et rejoint le corps professoral de l’Université Northeastern avant d’intégrer l’Université de Boston, puis Harvard, le MIT et, en 2003, l’Université de Stanford.

    Cependant, le goût de l’écriture ne le quitte jamais. En parallèle à sa carrière d’universitaire, Fred Turner continue ainsi d’analyser des phénomènes culturels bien précis dans divers ouvrages, en rapprochant notamment la contre-culture hippie de la cyberculture.
    Le pitch

    Cette thèse est notamment développée dans son ouvrage le plus connu, Aux sources de l’utopie numérique, publié en 2012 aux éditions C&F (et réédité en 2021). Pour développer sa théorie, il s’appuie sur la biographie de Stewart Brand, hippie technophile et gourou de la contre-culture des années 1970, qu’il érige en personnalité charnière entre plusieurs univers, a priori très éloignés. De la consommation de LSD à sa théorisation, des communautés marginales aux pontes de la Silicon Valley, Aux sources de l’utopie numérique, cité en référence par Grégory Chatonsky, montre que les contre-cultures, aussi distantes semblent-elles, ne sont finalement pas si éloignées. Mieux, elles n’ont cessé de s’influencer mutuellement.
    Fred Turner ©C&F Éditions
    Notre avis

    Fresque colorée et dynamique, Aux sources de l’utopie numérique réussit le tour de force de rendre accessibles des aspects complexes de l’informatique, de la cybernétique mais aussi des différentes contre-cultures américaines, grâce à une figure qui semble presque irréelle tant elle est fascinante. Choisir la personne de Stewart Brand pour étayer son propos relève presque du génie, et l’on se plaît à suivre le parcours hallucinant du créateur du Whole Earth Catalog, comparé par Steve Jobs à une version papier du moteur de recherche Google, tout en faisant des ponts entre différents mondes.

    Au passage, Fred Turner déploie ici un regard critique et des théories, non redevables à l’effet waouh propre aux innovations technologiques, qui annoncent en quelque sorte le thème de son dernier ouvrage (L’usage de l’art : de Burning Man à Facebook, art, technologie et management dans la Silicon Valley), publié en 2020 (toujours chez C&F Éditions), où il écrit ceci : « Le monde de l’art s’est mondialisé et financiarisé. L’art est ainsi devenu une sorte de monnaie mondiale ».

    #Fred_Turner #Utopie_numérique

  • Retour d’utopie. De l’influence du livre de Fred Turner - Center for Internet and Society
    https://cis.cnrs.fr/en/retour-d-utopie-pub

    On the occasion of the 10th anniversary of the publication in French of Aux sources de l’utopie numérique. De la contre-culture à la cyberculture, Stewart Brand, un homme d’influence, the translation of a seminal book by Fred Turner, C&F éditions has brought together a dozen texts around this classic of digital humanities.

    Published in the series Les cahiers de C&F éditions, this work contains an interview with Fred Turner and articles written by Olivier Alexandre (CIS-CNRS), Thomas Cazals, Anne Cordier, Adrian Daub, Xavier de La Porte, Hervé Le Crosnier, Christophe Masutti, Julie Momméja, Francesca Musiani (CIS-CNRS), Valérie Schafer, Nicolas Taffin, Laurent Vannini and François Vescia.

    This digital book can be freely downloaded (+ a possible contribution for C&F éditions if you wish).

    An excerpt from the introduction: “Ten years already. It has been 10 years since C&F éditions published the French translation of the major book From Counterculture to cyberculture by Fred Turner. The book you are reading today is both a tribute to a classic in the history of the Internet and a relevant rebound at a time when new major movements are emerging in the digital industry.”

    #Fred_Turner #Retour_utopie

  • Ethics vs. Profit: Stanford’s Fred Turner on the Competing Forces that Drive Innovation and the Interplay with Ethics | Project Liberty
    https://www.projectliberty.io/news/ethics-vs-profit-stanford-s-fred-turner-on-the-competing-forces-that-
    https://projectliberty.io/news/ethics-vs-profit-stanford-s-fred-turner-on-the-competing-forces-that-drive-innovation-and-the-interplay-with-ethics/opengraph-image?06d8781e822bef70

    24 August 2023

    This interview was conducted by Project Liberty’s Institute as part of its effort to engage academics and build a global alliance for responsible technology to empower individuals and expand economic opportunities.

    On June 16, 2023, an engaging talk co-organized by Project Liberty’s Institute and SciencesPo brought together guests from diverse backgrounds to delve into the world of cyberculture and its influence on the evolving Web3 community. Fred Turner, the Harry and Norman Chandler Professor of Communication at Stanford University and renowned author of “From Counterculture to Cyberculture,” led the discussion, sharing profound insights into the past, present, and future of digital landscapes.

    What is Cyberculture? Professor Turner introduced the concept of “cyberculture,” a term widely used in the late 1990s to envision a new cultural landscape that would emerge with the advent of the Internet. Cyberculture represented a vision of freedom, collective voice, and expression in the digital realm, influenced by technological utopianism that had roots in the military industrial research world of the 1940s and 1950s. However, he emphasized that the initial cyberculture ideal failed to account for corporate and state interests, leading to the collision between hyper-individualism and commercial imperatives that shape today’s digital landscape.

    Corporate Centralization of Data in the Age of Individual Empowerment: Professor Turner highlighted a crucial aspect of the current digital ecosystem - the corporate centralization of data alongside the hyper individuation of user experiences. He unveiled the illusion of an originally free Internet and exposed how big tech companies market their technologies as tools for individual empowerment while subtly exercising control and profit. Twitter’s micro-broadcasting system was cited as an example of corporate centralization intertwined with hyper individualized usership, revealing the disappearance of the middle ground.

    The Legacy of Counterculture in Web3: As an alternative to centralized Web systems, the Web3 movement advocates for technical and social decentralization. Professor Turner drew parallels between the vibrant Web3 community and the legacy of countercultural movements that sought to redefine societal norms and systems. The pursuit of a decentralized and equitable digital landscape reflects the enduring influence of utopianism in technological development.

    Ethical Innovation Between Design and Regulation: Embedding ethics in technology presents formidable challenges, especially when profit-driven corporate interests dominate the tech landscape. Professor Turner shared his insights on transforming the ethos of technology designers, urging them to prioritize safety over utility. He envisioned a future where technologies are better-managed to create a safer and freer world for all individuals. However, he acknowledged that the current ethical deficit within corporations hampers their ability to drive meaningful change.

    To that end, he feels that we need good models which can think about the opportunities across industries and limit the negative outcomes. Only when technologies are managed, can we make the world safer and freer as it’s not simply a structural issue, it is an ethical one.

    Regulation for a Safer and Freer Digital World: He stressed the importance of regulating technology, comparing it to regulating pollution in the natural world. Regulating the social media industry, akin to regulating oil and coal, is crucial to safeguarding the digital world and individual liberties. Turner emphasized the potential of Europe’s regulatory efforts to shape behavior in the States, where corporate interests have heavily influenced regulatory decisions.

    By understanding the interplay between counterculture ideals, corporate interests, and individual empowerment, we can pave the way for a safer, freer, and more equitable digital landscape.

    #Fred_Turner #Paris

  • Utopie numérique, où en sommes-nous 10 ans plus tard ? | Sciences Po
    https://www.sciencespo.fr/fr/actualites/utopie-numerique-ou-en-sommes-nous-10-ans-plus-tard

    traduction en français de l’interview de Fred Turner par Sciences Po

    À l’occasion du dixième anniversaire de la sortie de son ouvrage Aux sources de l’utopie numérique en français, Fred Turner était invité vendredi 16 juin à Sciences Po pour une conférence sous forme de bilan de l’utopie numérique qui a entouré l’avènement d’internet. Il partage avec nous ses réflexions.

    Comment les utopies des années 1990 ont-elles évolué ? Certains d’entre elles sont-elles devenues réalité ?

    Dans les années 1990, presque tout le monde s’accordait sur l’idée qu’internet allait donner aux individus une nouvelle voix dans la vie publique et permettre de créer une société basée sur l’expression des désirs individuels. Dans cette société idéale, les gouvernements disparaîtraient. L’ordre social émergerait spontanément de l’interaction constante entre des individus augmentés par la technologie.

    Aujourd’hui, nous avons ouvert les yeux. Nous vivons en effet dans un monde où les voix et les désirs individuels se sont libérés à l’échelle mondiale. Et ce que portent ces voix, surtout à droite mais pas uniquement, c’est l’espoir de détruire les institutions qui organisent la société. Nous commençons donc à nous rendre compte qu’un tel monde n’est pas dans le droit fil de l’utopie sympathique promise par les idéologues californiens des années 1990.

    Tout d’abord, nous avons appris que la diffusion des paroles individuelles sans modération, à grande échelle, ne produit pas d’ordre social, mais plutôt une cacophonie. Ensuite, nous avons découvert que certaines voix ont plus de poids que d’autres et que prétendre que nous aurions tous accès à internet sur un pied d’égalité revient à occulter les inégalités qui imprègnent notre société. Enfin, nous avons commencé à admettre qu’internet ne peut se réduire à des individus et leur ordinateur. Il faut compter également avec de grandes entreprises, des acteurs étatiques et des incitations économiques et politiques dont la puissance est nettement supérieure à ce qu’une voix individuelle peut dénoncer.

    Aujourd’hui, nous constatons que l’utopie centrée sur l’individu promise dans les années 1990 a contribué à la concentration des entreprises au niveau mondial, à la polarisation politique et à la personnalisation extrême du débat public. Il n’y a qu’une seule façon de réparer ces dégâts, à mon avis : faire appel au pouvoir des institutions représentatives - c’est-à-dire des gouvernements démocratiques - pour tenter de maîtriser les conséquences d’une révolution sociale et technique qui s’est avérée bien différente de ce que beaucoup avaient imaginé.
    Aux sources de l’utopie numérique

    Pensez-vous que les nouveaux (et moins nouveaux) venus - tels que les médias sociaux, l’intelligence artificielle, notamment ChatGPT, l’OpenSource, les NFT - sont en train de créer une nouvelle utopie ? Est-il réaliste et utile d’essayer de les réglementer ?

    Non, il n’y a pas de nouvelle utopie, mais oui, il faut réglementer. Je dirais même que la réglementation est à la fois réaliste et essentielle.

    Commençons par abandonner cette idée d’utopie. Les utopies ont tendance à être des systèmes totalisants : elles promettent de résoudre tous les problèmes en même temps grâce à un ensemble d’outils semi-magiques. Actuellement, les outils magiques sont les technologies numériques. Mais elles ne sont pas magiques du tout ; elles sont le fruit d’une mécanique initiée par les entreprises et les États. Dans les pays occidentaux, elles sont largement développées et déployées pour servir les intérêts des sociétés commerciales et de leurs propriétaires.

    Mark Zuckerberg peut bien présenter Facebook comme un outil permettant d’améliorer les relations interpersonnelles, mais, comme toute une génération d’universitaires nous l’a appris, il s’agit également d’un moteur de polarisation politique à but lucratif, actif dans le monde entier. La fable selon laquelle pouvoir se parler via un écran créerait une société plus chaleureuse et plus intime n’est et n’a jamais été plus que cela : une fable.

    La question est la suivante : comment pouvons-nous aider les technologies que nous avons développées à servir l’intérêt général ?

    Nous pouvons commencer par ne pas prendre pour argent comptant les affirmations qui accompagnent chaque nouvelle technologie, selon lesquelles tel appareil ou tel système - médias sociaux, IA, crypto-monnaie - va changer la face du monde. C’est du pur marketing, et non le reflet de la réalité. En éliminant ce mirage marketing, nous pouvons commencer à voir ces technologies non pas comme radicalement nouvelles et magiques, mais bien souvent comme des répliques d’un vieux modèle industriel.

    Les réseaux sociaux, par exemple, gagnent de l’argent en exploitant nos interactions sociales, en les transformant en données et en revendant l’usage de ces données. À l’instar de l’exploration pétrolière ou de l’extraction du charbon pour notre planète, les médias sociaux ont un impact terrible sur l’environnement culturel. Facebook a littéralement contribué à polluer la culture politique américaine, sans parler de son ingérence dans la politique d’autres pays.

    Au cours du XXème siècle, les gouvernements se sont donné les moyens d’identifier et de gérer les conséquences de l’exploitation du pétrole et du charbon sur la société, en général au prix d’une lutte acharnée. Nous devons aujourd’hui faire la même chose pour les médias sociaux, l’IA et les crypto-monnaies, sans quoi nous risquons de nous retrouver face à une version politique du réchauffement climatique, une montée lente et pernicieuse de la température du débat public et une fonte drastique du civisme.

    Comment les générations futures, notamment les étudiantes et étudiants de Sciences Po, peuvent-elles aider l’utopie à prospérer et changer le monde de manière positive ?

    Et bien, s’il y a une chose que m’ont apprise mes nombreuses années d’étude sur les promesses de l’utopie technologique, c’est que les utopies ne valent pas la peine que l’on se batte pour elles. Nous devons nous battre pour des choses beaucoup plus banales : la survie des gouvernements représentatifs, la réduction des inégalités économiques, l’arrêt des émissions de carbone et du changement climatique. La technologie jouera certainement un rôle dans toutes ces batailles, et les étudiants de Sciences Po ont toutes les cartes en main pour comprendre comment l’utiliser au mieux. Certains problèmes se prêtent à des solutions technologiques, la plupart non. La formation des étudiants de Sciences Po doit les aider à contribuer à identifier ceux qui relèvent de la première catégorie et les autres, et améliorer le monde en conséquence.

    EN SAVOIR PLUS :

    « Elon Musk laisse ceux qui partagent ses tendances à l’autoritarisme déverser leur propagande sur Twitter », interview de Fred Turner dans Le Monde du 14 juin 2023
    Des liens étroits entre inégalités sociales et activisme politique
    Le médialab de Sciences Po

    Légende de l’image de couverture : Fred Turner dans son bureau. (crédits : DR)

    #Fred_Turner #Sciences_po

  • Digital Utopianism: Where Do We Stand 10 Years Later? | Sciences Po
    https://www.sciencespo.fr/en/news/digital-utopianism-where-do-we-stand-10-years-later

    Interview de Fred Turner par Sciences Po.

    To mark the tenth anniversary of the publication in French of his book From Counterculture to Cyberculture: Stewart Brand, the Whole Earth Network and the Rise of Digital Utopianism, Fred Turner gave a conference at Sciences Po on Friday 16 June, to look back on the digital utopia that surrounded the advent of the Internet. He shared some of his thoughts with us.

    How have the utopian dreams of the 1990s evolved? Have some of them become a reality?

    In the 1990s, almost everyone agreed: the internet would give individuals a new voice in public life and make it possible to create a society built around the expression of individual desires. In this ideal society, governments would melt away. Social order would simply emerge from the constant interaction of technology-enabled individuals.

    Today we know better. We do indeed inhabit a world in which individual voices and desires have been unleashed at global scale. And many of those voices, especially but not exclusively on the right, hope to tear down the institutions of government. We are beginning to see that such a world is hardly the easy-going utopia promised by the Californian ideologues of the 1990s.

    We’ve learned, first, that the broadcasting of relatively unmediated individual voices at scale doesn’t produce social order; it produces cacophony. Second, we’ve discovered that some voices are louder than others and to pretend we all access the internet on equal terms is to obscure the kinds of inequality that marble our society. Third, we’ve finally begun to recognise that the internet has never been simply a matter of individuals and their computers. It has always included large corporations, state actors, and economic and political incentives more powerful than anything an individual voice can shout down.

    Today, we can see that the individual-centered utopia promised in the 1990s has helped spawned corporate concentration at a global level, political polarisation, and a deep personalisation of public debate. The only way that I can think of to repair the damage is to invoke the power of representative institutions – i.e., democratic governments – to try to rein in the consequences of a social and technical revolution that has turned out quite differently than many thought it would.
    French cover of Fred Turner’s bestselling book. (credits: C & F éditions)

    Do you believe that the new (and not so new) comers – such as social media, Artificial Intelligence including ChatGPT, OpenSource, NFTs – are creating a new utopia? Is it realistic and useful to try and regulate them?

    No, they’re not, and yes, it is. Regulation is both realistic and essential.

    But let’s start by dropping the idea of utopia. Utopias tend to be totalising systems – they promise to solve all problems at once using some semi-magical set of tools. In our time, the magical tools are digital technologies. But they’re not magical at all – they are the product of corporate and state enterprise and in the West, they are largely developed and deployed to serve the interests of commercial firms and their owners. Mark Zuckerberg may market Facebook as a tool to improve interpersonal relationships, but as a generation of scholarship has taught us, it has also been a profit-driven engine of political polarisation around the world. The fantasy that being able to talk to one another on screen would somehow create a warmer, more intimate society is and always has been just that: a fantasy.

    The question is: How can we help the technologies we’ve built serve the public interest?

    We can start by disbelieving the claims that accompany each new technology, the claims that this device or system – social media, AI, cryptocurrency – will change the world. This is marketing, not reality. When we burn away the marketing cloud, we can start to see the work of these technologies not as new and magical, but often, as new iterations of an old industrial processes.

    Social media firms, for instance, make their money mining our social interactions, transforming them into data, and reselling that data. Like oil exploration or coal mining, their work has had terrible environmental effects. Facebook has literally helped pollute America’s political culture, not to mention the politics of other nations.

    Across the twentieth century, governments found a way to identify and manage the social consequences of drilling for oil and coal, albeit only after great struggle. We need to do the same thing now for social media, as well as AI and cryptocurrency. The alternative is a political version of global warming, a slow pernicious rise in the temperature of public debate and a melting away of civility.

    How can future generations, among which students from Sciences Po, help the utopia thrive and change the world in a positive manner?

    Well, I’m afraid that many years of studying promises of technological utopia tells me that utopias are not what we should fight for. We need to fight for things that are much more mundane: the survival of representative government; the reduction of economic inequality; a halt to carbon pollution and climate change. Technology will play a role in all of these efforts and Sciences Po students will have the training and institutional access to figure how best to use it.

    Some social problems are amenable to technological solutions; many are not. Sciences Po students will have training to let them see which is which, and to improve the world accordingly.

    MORE INFORMATION:

    Science Po’s médialab
    The article “Strong links between social inequalities and political activism” by Jen Schradie in Cogito, Sciences Po’s Research Magazine.

    Cover image caption: Fred Turner in his office. (credits: DR)

    #Fred_Turner #Sciences_Po

  • Fred Turner, démêleur de fils dans la contre-culture californienne - AgoraVox le média citoyen
    https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/fred-turner-de-me-leur-de-fils-249112

    En décrivant les communautés alternatives organisées par des jeunes dans les années 1960 et 1970 aux États-Unis, Fred Turner nous aide à comprendre leur impact sur l’évolution même de la société́ et du travail. Il trace les tâtonnements des hippies puis de leurs successeurs à inventer de nouveaux mondes dans le livre désormais classique Aux sources de l’utopie numérique De la contre-culture à la cyber-culture paru en 2006 en anglais puis traduit et publié en français en 2013 par C& F éditions.

    Article publié dans Retour d’Utopie, de l’influence du livre de Fred Turner – juin 2023

    #Fred_Turner #François_Vescia #Retour_utopie

  • Entretien avec Fred Turner, un penseur critique dans la Silicon Valley
    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-meilleur-des-mondes/entretien-avec-fred-turner-un-penseur-critique-dans-la-silicon-valley-46

    Alors que le professeur Fred Turner est à Paris, à l’occasion des dix ans de la publication de son livre en français aux éditions C&F, Le Meilleur des mondes en profite pour explorer le passé de la Silicon Valley. Qui sont les « néo-communalistes » issus de la contre-culture américaine ?
    Avec

    Fred Turner journaliste, professeur

    #Fred_Turner #François_Saltiel

  • Fred Turner : « La technologie c’est d’abord des entreprises, et leurs relations avec les États » - AOC media
    https://aoc.media/entretien/2023/06/16/fred-turner-la-technologie-cest-dabord-des-entreprises-et-leurs-relations-ave

    Cela fait déjà dix ans que le livre majeur Aux sources de l’utopie numérique a paru en France, s’étant imposé comme une référence pour quiconque s’intéresse à la cyberculture et aux imaginaires projetés sur les technologies de l’information et de la communication. Ce « tour de force », ainsi que le présentait Dominique Cardon dans une préface remarquable et si précise, consistait à suivre l’itinéraire de Stewart Brand[1], et de réveiller, dans son sillage, tout un « monde » comme Howard Becker parlait des « mondes de l’art ». Ce monde, terrestre, rationnel, celui des Douglas Engelbart[2], des Richard Buckminster Fuller, n’a pourtant jamais oublié de regarder vers le ciel, vers le futur onirique rêvé des John Perry Barlow[3] ou Mitch Kapor[4] : entre ciel et terre existe rien moins qu’une civilisation, dont les enfants peuplent aujourd’hui la Silicon Valley.
    Après une carrière dans le journalisme, Fred Turner s’est tourné vers l’enseignement et la recherche. Il est aujourd’hui professeur de communication à l’université de Stanford. Dans un second livre tout aussi vibrant que le premier, Le Cercle Démocratique, Fred Turner montrait comment les dispositif multimédias autour desquels s’organisent de grandes expositions internationales au milieu du XXe siècle, répondent en quelque sorte à une question, posée par la théorie des médias à la démocratie américaine… Ainsi Margaret Mead, László Moholy-Nagy, John Cage venaient s’ajouter à cette longue généalogie d’intellectuels, d’ingénieurs et d’artistes qui mettent médias et techniques au service de la « personnalité démocratique ». On doit aussi à Fred Turner de nombreux articles à l’intersection entre art, science, marketing et théorie politique, dont certains sont regroupés dans L’usage de l’art[5], traitant du festival « Burning Man » comme des habillages par l’art contemporain des locaux de Facebook.

    En profitant de cet anniversaire pour lire ou relire les deux grands livres de Fred Turner, on leur découvre ce souffle commun, dont on sent qu’il inspirait déjà tous les pionniers du numérique. C’est peut-être ce « supplément », très spirituel, qui fait le génie des ouvrages de Turner, cette célébration, sans adhésion béate, de ce que fut une certaine jeunesse, celle qui voulait croire tout possible au sortir de la guerre, mais que canalisait une grande ambition démocratique. De cet optimisme, il faut à notre tour tirer des ressources morales, et bien du courage, pour affronter la dystopie numérique actuelle qui abâtardit tellement la cyberculture californienne. BT

    #Fred_Turner #Interview

  • « Elon Musk laisse ceux qui partagent ses tendances à l’autoritarisme déverser leur propagande sur Twitter »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/14/elon-musk-laisse-ceux-qui-partagent-ses-tendances-a-l-autoritarisme-deverser

    Alors qu’Elon Musk sera à Paris pour participer à VivaTech, un salon sur les nouvelles technologies, qui se déroule du 14 au 17 juin, Fred Turner, spécialiste de l’histoire d’Internet, revient sur l’évolution de Twitter depuis son rachat par le milliardaire américain.

    Propos recueillis par Marc-Olivier Bherer

    Fred Turner est professeur de communication à l’université Stanford (Californie). Ses travaux portent sur l’histoire des nouvelles technologies depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Son livre Aux sources de l’utopie numérique (C & F, 2012) l’installe comme l’un des plus fins connaisseurs de l’histoire du Web et de la culture propre à la Silicon Valley. Le 16 juin, il prononcera une conférence à Sciences Po Paris.

    Elon Musk a racheté Twitter, en octobre 2022. Ce réseau social a-t-il profondément changé depuis ?

    Au moment de cette transaction, Twitter occupait une position enviable sur le marché. Certes, ses revenus étaient limités et cette société avait de profonds problèmes financiers. Mais elle occupait une position dominante. D’autres avaient tenté de lancer des plates-formes concurrentes, sans parvenir à faire jeu égal. De sorte que Twitter, avant Elon Musk, était le lieu du débat en ligne. Des garde-fous avaient été mis en place pour tenter de contenir les discours haineux et la désinformation. Mais, dès son arrivée, Musk s’est débarrassé de tout cela.

    Désormais, la publicité est davantage présente, tout comme les contenus portant sur des célébrités ou générés par elles. La droite en général occupe également un espace beaucoup plus important. Certains contenus sont mis en avant, alors même qu’ils font pratiquement appel à la violence en défense de l’ancien président américain Donald Trump.

    Les internautes ne retrouvent plus cette diversité de points de vue à laquelle ils avaient accès auparavant. Dans le débat tel qu’il existe aujourd’hui sur Twitter, il est plus difficile de distinguer le bruit d’un signal, d’une information pertinente et significative. Le réseau social occupe toujours une place dominante, mais il a perdu en influence.
    Lors d’un échange avec Elon Musk retransmis en direct sur Twitter, le gouverneur ultraconservateur de Floride, Ron DeSantis, a annoncé, fin mai, qu’il se portait candidat à la primaire républicaine. L’ancien animateur de Fox News Tucker Carlson, figure de l’extrême droite américaine, vient, lui, de relancer son émission sur Twitter. Ce réseau social fait-il le jeu de la droite la plus dure ?

    Deux forces sont à l’œuvre, ici : la droite américaine et la Silicon Valley. Aux Etats-Unis, un combat pour l’avenir de la démocratie est engagé. Le Parti républicain a pris un virage autoritaire, avec un durcissement de ses positions sans précédent dans l’histoire récente. Cette droite souhaite pouvoir s’appuyer sur ceux qui contrôlent une grande partie du système médiatique américain, les acteurs de la Silicon Valley.

    Elon Musk est le propriétaire de Twitter, il décide ce qui peut être dit. Il laisse ceux qui partagent ses tendances à l’autoritarisme déverser leur propagande. La trop faible intervention de l’Etat américain pour encadrer ce secteur est un grave échec, c’est l’une des raisons pour lesquelles notre démocratie est aujourd’hui en crise.

    L’autoritarisme de Musk ne s’inspire cependant pas d’une logique totalitaire, selon laquelle l’Etat contrôlerait les individus. Il incarne plutôt un autoritarisme individualiste, qui s’en remet au marché pour étouffer la voix des plus faibles. L’égalité en matière de liberté d’expression n’existe pas. Les individus fortunés, qui détiennent des médias comme Twitter, peuvent s’assurer de contrôler le débat public. L’autoritarisme individualiste permet aux détenteurs de systèmes aussi influents que Twitter de garder le pouvoir.
    Qu’est-ce qui explique que nous en soyons arrivés là ?

    Un malentendu s’est installé sur ce qu’est véritablement Twitter. Elon Musk veut nous faire croire que ce réseau social est un espace de discussion, ce qui laisse entendre que ce qui s’y passe relève uniquement de la liberté d’expression. Pour l’entrepreneur, si tout le monde peut s’exprimer de façon égale, l’ordre va émerger naturellement.

    Mais, en fait, Twitter ressemble davantage à une plate-forme de diffusion comparable à la télévision ou à la radio, qui sont encadrées par un système étendu de lois et de régulations. Une chaîne de télé est, par exemple, responsable des propos qu’elle diffuse, ce n’est pas le cas des réseaux sociaux. Twitter a, par ailleurs, cette particularité qu’il permet à ses utilisateurs de diffuser massivement leurs idées, tous les autres internautes peuvent y avoir accès. Sur Facebook, les choses se passent autrement, ce n’est pas une plate-forme aussi ouverte : avant de pouvoir consulter le contenu d’un utilisateur, il faut faire partie de son cercle d’amis.
    Dès le 25 août, de nouvelles règles européennes encadreront les plates-formes numériques, entre autres pour lutter contre la désinformation. Elon Musk ne semble pas pressé de s’y conformer, au point que le ministre de la transition numérique, Jean-Noël Barrot, a déclaré, le 29 mai, que « Twitter sera banni de l’Union européenne, s’il ne se conforme pas à [leurs] règles ». N’est-ce pas aller trop loin ?

    Si Twitter n’applique pas ces règles, je crois que l’Europe aura raison de prendre une telle décision. Je ne suis pas particulièrement favorable à l’intervention de l’Etat sur le marché, mais dans ce cas précis, je suis convaincu que ce sera la bonne chose à faire. L’Etat américain reste en position de faiblesse face au secteur technologique. Avec sa nouvelle réglementation, l’Union européenne défend l’intérêt public bien au-delà de ses frontières.
    Lire aussi la chronique : Article réservé à nos abonnés Sur Twitter, « Elon Musk fait le rude apprentissage de la modération des contenus »
    Fin mars, Elon Musk a signé, avec plus de 1 000 spécialistes et entrepreneurs des nouvelles technologies, une tribune appelant à ce que l’on encadre le développement de l’intelligence artificielle. Le patron de Twitter a lancé, en avril, une start-up dans ce domaine. Que vous inspirent ces récents développements ?

    Commençons par arrêter de parler d’intelligence artificielle, cette expression anthropomorphique est trompeuse, les ordinateurs ne sont pas en train de s’humaniser. Ce n’est que du marketing et il n’y a rien que la Silicon Valley n’aime davantage que de vendre du rêve, l’idée qu’elle s’apprête à changer le monde. Il n’y a pas si longtemps, c’était les cryptomonnaies…

    Pour le moment, ce que l’on appelle « intelligence artificielle » n’est rien de plus que des machines d’analyse à grande échelle. De sorte que l’image la plus appropriée pour parler de ces technologies emprunte plutôt au vocabulaire minier, car elles fouillent d’énormes quantités de données, du texte, des images, des enregistrements audio trouvés sur Internet, pour en extraire une réponse à la question formulée par l’utilisateur. C’est ce que fait ChatGPT.

    Laissons tomber les effets de manche de la Silicon Valley et concentrons-nous sur les dangers dont cette technologie est porteuse. Les créateurs de ces machines ne les maîtrisent pas parfaitement, elles peuvent prendre des décisions inattendues, imprévisibles. Cette technologie peut disposer d’une forme d’autonomie qui nous dépasse.

    Je crois qu’il faut donc faire comme pour le secteur minier et encadrer l’accès au sous-sol. Des lois doivent être mises en place pour encadrer l’accès aux données et ce qu’il est possible de faire avec ces données. Requérir que le fonctionnement de ces algorithmes soit accessible au régulateur me semble également une bonne chose.

    Marc-Olivier Bherer

    #Fred_Turner #Elon_Musk #Intelligence_artificielle

  • De la contre-culture à la cyberculture | médialab Sciences Po
    https://medialab.sciencespo.fr/actu/de-la-contre-culture-a-la-cyberculture

    C & F éditions, le Centre Internet et Société, le Celsa et le médialab s’associent pour accueillir, le 16 juin 2023, de 17h à 19h, une conférence de Fred Turner.
    Résumé

    La traduction en français du livre de Fred Turner « Aux sources de l’utopie numérique » a 10 ans.
    Dans cet ouvrage, devenu un classique de l’histoire de l’Internet et des technologies numériques, Fred Turner a montré les filiations du réseau, entre recherche militaire et les rêves technologiques de la contre-culture.

    Alors que la Silicon Valley est devenu un moteur central de l’économie mondiale, il est temps de revenir sur cette histoire et d’en étudier les conséquences actuelles. Le travail, la politique ont été bouleversés au même titre que la communication et l’accès à la culture. Les principales entreprises sont devenues des mastodontes hyperconcentrés et capable de surveiller toute la population. Ceci met en perspective les philosophies et les projets de la génération des années soixante. « Changer le monde », oui, mais au service de qui ?
    Informations pratiques

    Cette conférence (en anglais) aura lieu sur le campus parisien de Sciences Po, situé au 28 rue des Saints-Pères (75007).

    L’événément est ouvert à tous ; l’inscription est obligatoire.

    #Fred_Turner

  • In ’Do Not Fold, Spindle, or Mutilate,’ rule-breaking becomes the rule - 48 hills
    https://48hills.org/2022/10/in-do-not-fold-spindle-or-mutilate-rule-breaking-becomes-the-rule

    The title of the exhibition “Do Not Fold, Spindle, or Mutilate,” co-presented through December 3 by Casemore and Rena Bransten Galleries, draws upon a slogan from the 1964 Free Speech Movement that Stanford communications Professor Fred Turner addresses in his fascinating 2008 book From Counterculture to Cyberculture.

    Turner explains that when UC Berkeley students protested the computerization of student records, a protesting student pinned a punchcard to his chest printed with, “I am a UC student. Please do not fold, spindle, or mutilate me.” (Turner also speaks of the subject in this 2007 talk at Stanford.) The students viewed the university as an institution rife with mechanization that was whittling away their humanity.

    Given this extremely rich and local history, the content of “Do Not Fold” unfortunately shies away from addressing the confluence of counterculture and technology, though that legacy is referenced by the exhibition. Taking a more formalist approach, the galleries have positioned the titular slogan as a strategy for artists breaking gallery, disciplinary, and formal rules.

    #Fred_Turner #Exposition #Berkeley #Contre_culture

  • L’art selon la « tech » - Nonfiction.fr le portail des livres et des idées
    https://www.nonfiction.fr/article-11364-lart-selon-la-tech.htm

    Par Christophe Camus

    L’usage de l’art par les GAFAM n’a sans doute rien à voir avec le mécénat des grandes entreprises du siècle dernier.

    C’est dans le prolongement de ses précédents ouvrages analysant les liens entre culture, politique et économie qu’il faut lire le dernier livre de Fred Turner venant questionner les usages de l’art au cœur des grandes entreprises de la Silicon Valley
    . Plus précisément, ce petit ouvrage du spécialiste des sciences de la communication nous propose deux explorations de ces pratiques : la première se penche sur les liens existants entre Google et le festival Burning Man ; la seconde s’intéresse à « L’art chez Facebook ».

    De l’art dans la Silicon Valley

    Avant de commencer, l’auteur se demande si la Silicon Valley ne serait pas « restée étrangement sourde au chant des sirènes du marché traditionnel de l’art », si les grandes fortunes du numérique ne devraient « pas acheter peintures, sculptures et installations multimédias », comme leurs prédécesseurs fortunés, et s’il faut en déduire « que les programmateurs informatiques ne s’intéressent pas à l’art » (p. 6-7)
    .

    La réponse à ces questions n’est évidemment pas si simple. Dans la continuité de ce qu’il a précédemment montré dans sa biographie extensive de Stewart Brand
    , Turner revient sur une « longue tradition de collaboration entre industries technologiques et art, en Californie et au-delà » (p. 8). Sans remonter trop loin dans l’histoire de l’art, il nous ramène aux années 1960, auprès d’artistes imprégnés d’une culture cybernétique, utilisant la vidéo. Ses exemples nous entraînent de la Raindance Corporation à György Kepes, du Bauhaus au MIT, en insistant sur le rôle de quelques « entreprises comme AT&T ou Teledyne [qui] offraient des résidences et des bourses aux artistes »
    .

    Une histoire dans laquelle le Palo Alto Research Center (PARC) de l’entreprise Xerox occupe une place de choix : ce centre de recherches californien conçoit l’interface graphique des ordinateurs modernes tout en collaborant avec des artistes de la baie de San Francisco « dans l’espoir qu’ils puissent explorer ensemble de nouveaux horizons ». Une démarche qui a finalement « donné naissance, entre autres, à des sculptures multimédia, des récits multi-écrans, et les premiers exemples d’art algorithmique »
    .

    #Fred_Turner #Usage_art #Silicon_Valley