La même chose est arrivé à la page de Nantes Révoltée qui a communiqué sur twitter ce soir :
Comme d’autres pages militantes, nous vous annonçons ce soir que Nantes Révoltée vient d’être totalement déréférencée de facebook. 99% de chute d’audience d’un coup.
On vous invite donc à suivre notre site internet, en attendant qu’on trouve une solution.
▻https://twitter.com/Nantes_Revoltee/status/1167175023699877891
Quelques stats. Depuis ce soir, on passe donc de, entre 30 et 300 000 personnes touchées par article à ... 52 personnes touchées pour notre dernière publication. Audience quasiment divisée par 1000.
▻https://twitter.com/Nantes_Revoltee/status/1167181464338911232
bon, ce qui est ballot c’est de ne pas avoir mis l’adresse du blog ►https://www.nantes-revoltee.com dans le message et que la bio du compte renvoie vers la page facebook. Mais au moins, depuis plusieurs moins, Nantes Revoltée utilisait enfin son blog de manière de plus en plus active hors facebook pour renvoyer vers ses articles...
Lorsque je faisais partie de l’équipe de gestion de la page de soutien à la zad NDDL, nous avions déjà remarqué des soucis, mais c’était surtout dû au fait que nous ne correspondions pas aux attentes commerciales de facebook, avec beaucoup de publications automatisées depuis les blogs de la lutte et des liens qui incitaient donc à sortir de facebook. Il y a eut quelques cas pendant lesquels on a soupçonné une censure, mais extrêmement rares et improuvables. Je me permets de "libérer" l’article complet de médiapart :
Facebook anéantit l’audience d’une partie de la gauche radicale
Par Géraldine Delacroix
Confrontée à une soudaine chute du nombre de vues de leurs publications, plusieurs pages Facebook de collectifs de la gauche radicale cherchent à comprendre ce qui leur est arrivé. Censure politique, économique, algorithmes ? Leurs questions, et celles de Mediapart, restent sans réponse. Ils s’appellent Lille insurgée, Bretagne noire, Collectif Auto Média énervé, Cerveaux non disponibles, Groupe Lyon Antifa…
Plusieurs collectifs qui administrent des pages Facebook font état depuis quelques jours de la chute libre du nombre de vues sur leurs publications, alors qu’elles touchaient jusque-là des milliers de lecteurs, souvent des dizaines de milliers, parfois des centaines.
Pour ces groupes qui partagent des informations sur les mouvements sociaux et se présentent comme très à gauche, le soupçon est fort d’une censure politique, pour les uns avant le G7, pour les autres après qu’ils ont partagé, en début de semaine, un article d’Indymedia Nantes. Le site affirme qu’une militante bien connue des mouvements de « gilets jaunes », notamment à Toulouse, et des organisations présentes au contre-sommet de Biarritz serait en réalité une policière infiltrée.
Cerveaux non disponibles
Paul* est fondateur et administrateur des Cerveaux non disponibles, « collectif qui a pour ambition de relayer des contenus (articles, vidéo, photos) alternatifs mais aussi d’en produire ». Après une époque où la page Facebook du collectif se contentait de partager ses lectures, les choses ont changé avec le mouvement des gilets jaunes : « On a rapidement pris position, écrit des textes, on est globalement marqués à gauche, gauche radicale, on a appelé à rejoindre les gilets jaunes… On est sortis du cadre, on a écrit nous-mêmes. Aujourd’hui, on est entre un média et un relais d’infos. »
La chute du nombre de vues des publications de la page Cerveaux non disponibles.
Quand un utilisateur ou une utilisatrice se connecte sur son compte Facebook, il ou elle voit apparaître dans son « fil d’actualités » une sélection algorithmique des
publications de ses ami·e·s, des groupes auxquels il ou elle appartient, des pages qu’il ou elle suit. Depuis le mercredi 22 août, explique Paul, « [la]page [des Cerveaux non disponibles] a perdu la quasi-totalité de son audience : 200 personnes touchées par post, alors qu’on est habituellement sur une moyenne de 20 000 par post (avec des pics à 300 000) ». « Ce n’est jamais arrivé », ajoute-t-il.
Dans un billet de blog publié dès le 23 août sur Mediapart, Zazaz, lectrice habituelle de la page, témoigne de la disparition des Cerveaux non disponibles : « Ça faisait plusieurs jours que je ressentais un vide, quelque chose me manquait, mais je n’arrivais pas à déterminer vraiment de quoi il s’agissait. Ce matin, j’ai compris, la disponibilité de mon cerveau à une autre information était censurée. » L’administrateur envisage une explication possible : « Il y a 10 jours, quelqu’un a fait une réclamation sur une vidéo pour atteinte au droit d’auteur. »
« Forcément, on se demande ce qui se passe. Est_ce que d’autres ont ce même problème ou est-ce que c’est seulement des pages militantes ? Le silence de Facebook alimente les questions, c’est hyper opaque et très difficile, s’interroge Paul. On peut aussi se dire que ç’a été discuté en interne puisqu’on sait qu’ils discutent avec le gouvernement. Il suffit d’un employé de Facebook qui a eu des consignes orales… »
L’administrateur de la page a bien tenté de contacter Facebook et posé cette question : « Depuis quelques jours, et surtout hier, nous avons constaté une très forte baisse de la visibilité de nos posts (près de 95 % de moins qu’en moyenne !). Pourriez-vous nous expliquer les raisons de ce changement brutal ? Et nous dire comment y remédier ? Notre média étant particulièrement axé sur le traitement de l’actualité médiatique, il est très problématique pour nous de ne pas pouvoir toucher notre public au moment d’un événement aussi important que le sommet du G7.
Merci d’avance pour votre compréhension et votre retour. »
Réponse : « Votre avis sera utilisé pour améliorer Facebook. Merci d’avoir pris le temps de nous envoyer votre signalement. »« Une réponse automatisée », « qui n’est même pas adaptée… », souligne Paul. « L’idée d’être moins dépendant de Facebook » avait déjà conduit le groupe à créer son propre site : « Pour nos textes importants et nos vidéos : on n’a pas envie de tout perdre si la page est supprimée. »
Jeudi 29 août, alors que Mediapart avait contacté Facebook la veille pour obtenir des explications, la page commençait à reprendre des couleurs, et des abonnés témoignaient de ce que ses publications étaient réapparues dans leur fil. Faut-il y voir un lien de cause à effet ? « Cela semble revenir depuis ce matin. Pas autant qu’avant le 22 août, mais largement mieux que depuis une semaine. Sans raison ni explication », nous dit un membre du collectif.
Collectif Auto Média énervé
Basé à Toulouse et « fondé en 2016 pendant la loi travail », le Collectif Auto Média énervé s’appelait il y a encore deux semaines le Collectif Auto Média étudiant. C’est mardi 27 août que ses difficultés ont commencé, « une forme de censure », regrette Léon*, un des animateurs du groupe. « On a publié l’article sur l’indic à Toulouse et au contre-sommet, suite à ça on a été de suite déréférencés de Facebook…, nous explique-t-il. D’un coup, on n’apparaît plus sur le fil d’actu des personnes, même moi je ne vois plus les posts qu’on fait… »
Confronté à la disparition de ses lecteurs pour la première fois, le collectif a tenté de contacter Facebook, puis « supprimé le post qui pouvait poser problème » : « Si jamais ça pouvait résoudre le problème… On s’est dit que c’est peut-être des algorithmes… »
Jeudi 29, Léon a trouvé un message de Facebook daté du 27 et titré : « Your page has a breach » (« Votre page est en infraction »), dans lequel le réseau social explique qu’un contenu a été supprimé car il allait à l’encontre des « standards de la communauté », mais sans préciser de quel contenu il s’agit. Le collectif n’avait pas eu de problème pendant le G7 : « On a vachement produit sur le G7 en photos ; on a écrit des petits articles, qui ont fait plusieurs centaines à plusieurs milliers de vues. Le dernier truc, c’est quatre personnes ! Les stats ont été constantes jusqu’au G7, puis en hausse parce qu’on a couvert le G7, puis c’est redescendu après et aujourd’hui on n’a plus rien… »
« On reste radicaux », admet Léon, mais le groupe se veut sérieux et prudent : « On partage de l’info, on recoupe, on vérifie, on floute les visages, que ce soit ceux des flics ou des manifestants ; on fait attention, on travaille avec des avocats. »
Lille insurgée
Léon ne voit plus les publications de Lille insurgée. Car le groupe lillois rencontre les mêmes difficultés : « Avant, on faisait plusieurs dizaines de milliers de personnes (28 000 vues, 68 000 vues) et là, on passe à 400 vues depuis les 22-23 août », témoigne un membre du collectif, Camille*. La rencontre Macron-Poutine, « c’est la dernière publication qui fait pas mal de vues ».
La chute du nombre de vues des messages de la page Lille insurgée. Fataliste, le collectif a « juste interrogé le compte Twitter de Facebook. On sait pas trop quoi faire, on sait pas trop comment faire pour les contacter, je vois pas l’intérêt ».
En l’absence de justification, d’éléments de compréhension, les hypothèses fleurissent : « Une possibilité, c’est que Facebook ait envie de nous inciter à faire de la pub. Donc ils nous coupent notre audience pour qu’on prenne de la pub. » Mais « si c’est une censure délibérée, il y a un lien avec le G7, forcément ».
Sur Twitter, le Groupe Antifa Lyon relaie les Lillois et fait le même constat :
Bretagne noire, habitué à ce genre de traitement, a invité dès le 25 août à se rendre sur sa deuxième page :
« [INFO] Vous l’avez peut-être remarqués, cette page-ci est une nouvelle fois censurée, nous vous invitons donc à rejoindre notre 2nde page
Merci à vous tous pour vos messages de soutien. »
Contacté par Mediapart mercredi après-midi, Facebook nous a fait savoir le lendemain en début de soirée ne pas être en mesure de donner une réponse précise dans ce délai, et réserver les explications circonstanciées aux administrateurs des pages concernées.
Boite noire
Cet article a été mis à jour après sa parution avec la réponse de Facebook.
Nos interlocuteurs ont été joints par mail et téléphone mercredi 28 et jeudi 29 août.
* Certains prénoms ont été modifiés.