• Russie : V. Poutine déclare 2027 ‘année de la géographie’

    REGARD SUR L’EST

    La géographie, c’est formidable.

    https://regard-est.com/russie-v-poutine-declare-2027-annee-de-la-geographie

    Russie : V. Poutine déclare 2027 ‘année de la géographie’

    03/11/2025 Céline Bayou

    Lors du XVIIe congrès de la Société russe de géographie organisé les 22 et 23 octobre à Moscou, le Président russe a annoncé que 2027 serait déclarée « année de la géographie » en Russie. Devant 195 délégués provenant de 89 régions (dont les territoires ukrainiens prétendument annexés par Moscou) et réunis au Kremlin, Vladimir Poutine a cité la contribution des géographes à l’histoire, en faveur du renforcement de l’Etat russe : « C’est important pour nous d’un point de vue politique. L’événement principal de l’année sera la consolidation des cartes – de nouvelles cartes – de la Fédération de Russie. »

    #géographie #russie #dictature

  • Indonesia’s new capital, Nusantara, in danger of becoming a ‘ghost city’ | Indonesia | The Guardian

    https://www.theguardian.com/world/2025/oct/29/indonesia-new-capital-city-nusantara

    Michael Nielson in Nusantara
    Wed 29 Oct 2025 01.35 CET

    State funding for the project has plunged, while construction has slowed and few civil servants have been eager to move away from Jakarta.

    Indonesia’s utopian new capital Nusantara seems to appear out of nowhere. Deep in the forest, a multilane highway abruptly opens up through the trees, leading to a palace topped by a winged eagle that glows under the equatorial sun.

    #Indonésie #Jakarta ##Nusantara #urban_matter

  • Les cyclistes commettent beaucoup moins d’#infractions que les automobilistes

    Contrairement à une idée reçue, le #taux_d'infraction des cyclistes est très largement inférieur à celui des #automobilistes. C’est en tout cas le résultat d’une étude danoise basée sur de nombreuses observations du #comportement aux #intersections.

    A l’aide de données provenant de caméras placées dans les carrefours de nombreuses grandes villes du pays, l’autorité routière du Danemark a observé le comportement des cyclistes. Le constat : en #ville, ils commettent beaucoup moins d’#infractions_routières que les automobilistes. Sur un total de 28 579 passages d’intersection par des #cyclistes, le pourcentage d’infraction est inférieur à 5% lorsqu’il existe des infrastructures cyclables, 14% lorsqu’elles sont inexistantes. L’infraction la plus répandue à vélo est le déplacement sur le #trottoir.

    Parallèlement, les autorités routières danoises ont recensé un taux d’infraction de 66% chez les automobilistes en ville, principalement des #excès_de_vitesse. Les conclusions sont les mêmes que celles d’une étude parue l’année dernière, cette fois sur un échantillon de 80 000 passages d’intersections. A Londres, une étude conduite il y a quelques années par l’autorité des transports, concluait qu’environ 16% des cyclistes y commettent des infractions.

    Les infractions des cyclistes, moins nombreuses mais plus visibles que celles des automobilistes

    Le constat peut étonner. Les cyclistes ont souvent la réputation de prendre de nombreuses libertés avec le code de la route, notamment de griller des feux rouges. C’est surtout que les infractions commises par des cyclistes sont en général plus #visibles : griller un #feu_rouge ou rouler sur un trottoir se voit davantage que les infractions commises régulièrement par des automobilistes en ville : excès de vitesse, refus de priorité à un passage piéton, usage de klaxon en absence de danger immédiat, oubli de clignotant, dépassement d’un cycliste à moins d’un mètre. Ces infractions sont souvent trop peu visibles ou trop habituelles pour être remarquées. En outre, de nombreux feux rouges en villes sont équipés de panneaux autorisant les cyclistes à passer, souvent pour tourner à droite, ce qui peut donner l’illusion d’une infraction.

    On ne dispose malheureusement pas encore d’études de ce type en France. On sait cependant que les infractions commises par les automobilistes y sont nombreuses. Selon la plupart des tests effectués, en l’absence de ralentisseurs, d’embouteillages ou de radars, une majorité d’automobilistes français ne respecte pas les zones 30. Et les remontées de données de vitesse des véhicules en free floating des villes européennes montrent que selon les villes, la limite de 50 km/h en ville est franchie dans 35% à 75% des cas.

    L’influence des #pistes_cyclables

    Le nombre d’infractions commises par les cyclistes baisse drastiquement en présence de pistes cyclables. Au Danemark, le taux d’infraction est même trois fois moins élevé. Mais les #infrastructures_cyclables ont également un impact positif sur la #mortalité_routière urbaine en général.

    Des chercheurs de l’Université de Denver ont analysé les données d’accidentologie de 24 grandes villes américaines sur une période de treize ans en étudiant les variables sociologiques, démographiques et leurs infrastructures. Selon leurs conclusions, le facteur le plus influent dans la baisse du nombre de morts sur les routes est l’existence de pistes cyclables. Plus une ville comporte d’infrastructures cyclables, plus ses rues sont sûres pour la totalité de ses habitants (pas seulement pour les cyclistes).

    Selon l’étude, ce type d’#infrastructure dans les villes y réduit la mortalité routière de 44% en moyenne et le nombre d’accidents graves de 50%. A Portland, où de nombreuses pistes cyclables ont été installées, la mortalité a même été réduite de 75% entre 1990 et 2015. La ville de Davis en Californie, considérée par beaucoup comme la capitale du vélo aux Etats-Unis, est également celle où la proportion de morts sur la route par habitant est la plus faible du pays, dix fois inférieure à la moyenne nationale.

    En Europe également, selon une étude de l’OCDE, plus une ville est équipée de pistes cyclables, plus le risque d’un accident mortel est faible : https://www.itf-oecd.org/sites/default/files/docs/road-safety-european-cities-performance-indicators.pdf

    https://www.liberation.fr/planete/2019/07/04/les-cyclistes-commettent-beaucoup-moins-d-infractions-que-les-automobilis
    #vélos #voitures #idées-reçus #stéréotypes #mobilité #mobilité_douce #urbanisme #géographie_urbaine

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  • Billet très édifiant de Arnaud Brennetot sur Linkedin. La comparaison de ces deux cartes est glaçante : l’extrême droite progresse désormais fortement dans les régions longtemps considérées comme celles qui lui étaient les plus défavorables (centres villes des métropoles, ouest de la France). Si elle atteint ses scores dans ses fiefs (Nord, Sud méditerranéen), elle sera au pouvoir.
    La pratique macroniste, mais aussi le jeu délétère des partis de gauche - et je ne parle pas que de LFI, j’ai en tête un exemple dans une ville tenue par le PCF depuis 60 ans - livrent notre pays à l’ED (de Le Pen à Zemmour à Ciotti et à Retailleau, avec le soutien de Bolloré, Stérin et autres
    https://www.linkedin.com/posts/arnaud-brennetot-34805b256_progression-de-lextr%C3%AAme-droite-entre-2019-

    • La progression de l’extrême-droite dans la France qui gagne

      Entre les #élections européennes de 2019 et celles de 2024, l’extrême-droite est passée de 6 à 9 millions de voix en France, soit une augmentation de 50 %.

      Cette progression spectaculaire est très inégalement répartie selon les territoires et démontre la volatilité socio-spatiale des blocs électoraux.

      La carte du nombre et du pourcentage des votes supplémentaires recueillis par l’extrême-droite entre 2019 et 2024 montre que celle-ci gagne des suffrages en priorité dans les espaces où elle était faible jusqu’ici, c’est-à-dire dans les territoires les plus attractifs et dynamiques du pays.
      Cela concerne :
      – la façade atlantique et son arrière-pays, la Corse, l’intégralité de la Région Rhône-Alpes, toutes très attractives ;
      – l’Ile-de-France et plusieurs grandes villes régionales (Brest, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Grenoble, Limoges, Lyon, Nantes, Rennes, Strasbourg, Toulouse) ainsi que diverses villes moyennes (Bayonne, Brive-la-Gaillarde, Saint-Brieuc, Tarbes, le Sillon alpin).

      Le littoral provençal est la seule région où l’extrême-droite était déjà solidement implantée auparavant et où elle progresse encore.

      Cette augmentation dans les régions en forte croissance socio-économique (en gros la France de l’Ouest et du Sud) démontre la capacité de l’extrême-droite à dépasser les frontières, à sortir de ses bastions historiques (le Midi méditerranéen puis les anciennes régions industrielles du Nord et de l’Est) et à étendre son implantation géographique là où elle recueillait jusqu’ici une moindre quantité de suffrages.

      Cette dynamique tient en partie au fait que, dans un contexte de rejet national du projet macronien, les marges de progression de l’extrême-droite sont plus fortes dans les grandes villes, le grand Ouest et la région lyonnaise. Si l’on tient compte des écarts qui subsistent entre les bastions historiques et les fronts pionniers, l’extrême droite conserve encore d’importantes marges de progression, notamment dans tous les bassins de vie où les inégalités sociales tendent à s’accentuer.

      Depuis la première publication de cette carte il y a une dizaine de mois, la situation politique de notre pays n’a fait que s’aggraver :
      – les forces politiques en présence ont démontré leur incapacité à former une coalition gouvernementale capable d’agir, essentiellement en raison de la fermeture du président de la République aux forces de gauche ;
      – le financement des conséquences du vieillissement de la population reste sans solution ;
      – la dégradation de la situation internationale place la France et l’Europe dans une position de fragilité exceptionnelle ;
      – le dérèglement bioclimatique poursuit ses destructions, insidieuses ou impressionnantes (Chido, Corbières), dans un contexte accentué de propagande contre les politiques de transition engagée par les forces d’extrême-droite.

      La carte du score de l’extrême droite en 2024 est disponible après celle relative à la progression.

      Comprendre et relativiser le vote « jeune » pour le RN, Camille Peugny
      https://www.alternatives-economiques.fr/camille-peugny/comprendre-relativiser-vote-jeune-rn/00111504

      les 28 % de Marine Le Pen en 2022 parmi les jeunes signifient également que 80 % d’entre eux n’ont pas voté pour elle

      #RN #vote #géographie #abstention

  • Une carte vers un lieu disparu

    In this city, there are thousands upon thousands of us, each carrying their own coordinates to somewhere that can no longer be found.

    In Gaza, the landscape changes faster than memory can keep up. Every neighborhood carries its own scars, some fresh, some already fading into dust. Places once familiar become unrecognizable overnight; streets you walked yesterday may not be there tomorrow. On this shifting ground, home is not just a structure. It is a fragile anchor to a previous version of life, one that can vanish without warning. Losing this place means losing the map inside you.

    I remember the first time I saw our house after it was hit. It was May 2024. I stopped in the street, staring at the roof. A missile had torn through it, leaving a wound wide open to the sky. I stepped inside slowly. The door wouldn’t open all the way, the paint peeled off the walls in rough patches. The air was thick with dust and the smell of burnt concrete. I tried to see it as someone else’s home, but I couldn’t. This was ours, the place that had shaped me since childhood.

    I cried—not in the quiet way I had learned during the war. My head tilted back, eyes locked on the hole above me, and I let it happen. I cried because the sky was now inside without permission. Because sunlight fell on broken tiles instead of on the living room floor. Because one strike could erase years of living.

    In June 2025, I returned. This time there was no house. Not damaged, not wounded—gone. Scraped from the earth as if it had never stood there. I stood where the living room had been, staring at dirt and scattered stone. I thought my chest would collapse. It didn’t. In place of tears, a strange stillness. That’s when I learned what it means for grief to run dry, to be left with only emptiness. Losing a home in one sudden blow knocks you down. Watching it disappear piece by piece teaches you how to live in the ruins.

    Before my house, it was my grandfather’s that was hit. It was January, cold and damp. His home had burned to the ground. No roof, no walls, just blackened remains. I had never seen him cry before. His shoulders shook, making him look smaller, as if the fire had shrunk him too. He stared at the ground where his kitchen used to be. I understood then that a house burns twice—once in the flames, and again in the eyes of the one who loved it.

    In the months after my house vanished, I began noticing how the absence of buildings changes the way you move through the city. Streets lose their logic. You turn corners expecting a wall that is no longer there. You look for shade that once came from a row of homes now replaced by a flat expanse of rubble. Even sound changes—footsteps echo differently when there’s nothing for them to bounce off of. In time, you start to mistrust your own sense of direction, as if your internal map has been quietly rewritten without your consent.

    Neighbors carry this disorientation, too. I have seen people stand frozen in the middle of what used to be a busy intersection, staring at nothing. Some point to the air as they speak, tracing outlines of vanished shops and doorways in the space above the dirt. Conversations about loss have grown shorter. At first, every destroyed home had a story, passed on in neighbors’ conversations and quick exchanges in the streets: the room where a wedding dress hung, the kitchen that smelled of coffee, the wall that wore the scribblings of a child. Where once people might tell you about a living room, a garden, now they just name a family and say, “They’re gone.” We talk about bombings like we talk about the weather: today here, yesterday there. The details are lost in the sheer volume of absence.

    Sometimes at night I try to picture our house in all its specificity: the way afternoon light spilled through the window, the cool hallway in summer. But the picture blurs, and panic sets in. What if I forget? What if the place that no longer exists vanishes inside me too? I’ve learned that memory, like a building, can erode without care. It starts with small things—forgetting the exact sound of the front door closing, the smell of rain on the balcony—and ends with a kind of internal demolition, the slow collapse of memory, the sense that pieces of yourself are being erased.

    Here, houses are more than walls and roofs. They hold footsteps, smells, echoes of conversations. They keep the map of your life. When too many are gone, the city itself begins to forget. Streets lose their shapes, people lose their usual routes and routines, the landmarks that once oriented them—the corner shop, the mosque, the old tree at the end of the street. The mind’s map slowly disappears. And when a city forgets, the people lose more than shelter—they lose themselves, the proof of their existence and belonging.
    I still pass by the ground where our house once stood. Sometimes I stop, sometimes I continue on. When I do stop, I don’t cry anymore. I remember the roof with the hole, the day the sky first came in uninvited, and how that hurt more than when everything was finally gone. Back then, there was still something to lose. Now, there is only the place that no longer exists. I do not hold that place alone. In this city, there are thousands upon thousands of us, each carrying their own coordinates to somewhere that can no longer be found.

    https://jewishcurrents.org/a-map-to-a-place-that-no-longer-exists

    #destruction #paysage #Gaza #palestine #mémoire #espace #traces #absence #vide #géographie_du_vide #souvenirs

    signalé par @mona :
    https://seenthis.net/messages/1133920

  • Un autre dessin du monde

    Palerme, milieu du XIIe siècle. Le géographe arabe #Al_Idrisi rédige, à la demande du roi de Sicile #Roger_II, l’un des plus grands traités de #géographie du Moyen Âge : La Géographie de l’Occident.

    Afin de mener à bien ce grand dessein, la cour entière est mobilisée : scribes, calligraphes, voyageurs et émissaires partis récolter des informations à travers l’ensemble du monde connu.

    Ainsi Paul de Balz, troubadour franc, et Aylan, calligraphe berbère, se lancent-ils dans un périple qui, du mont Saint-Michel à Bejaïa, les mènera à observer les œuvres artistiques et architecturales de leur époque ainsi que les coutumes et les bouleversements du monde médiéval sur les rives de la Méditerranée.

    Croisés et sorcières, marins et chevaliers côtoient dans ces planches la tapisserie de Bayeux, la statuaire romane et les fresques des cathédrales, les enluminures ou encore les peintures rupestres.

    Mais ce nouveau #dessin_d’un monde que Roger II rêve tolérant et pacifié, n’est-il pas en train de se craqueler sous les coups des intrigues, au sein même de cette cour de #Palerme où se mêlent cultures, peuples et religions ? Dessiner le monde, n’est-ce pas au fond une manière de l’embellir ?

    https://alifbata.fr/produit/un-autre-dessin-du-monde
    #BD #livre #bande-dessinée
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  • 95 - The Urban Crisis at Night: Engaging the Polycrisis after Dark
    https://urbanpolitical.podigee.io/95-the-urban-crisis-at-night-engaging-the-polycrisis-after-da

    To what extent does the current polycrisis intensify in urban settings during nighttime hours? Night lives are already characterized by precarity, urban inequalities, deeply seeded health and wellbeing concerns and a life ’in the shadows’. In this Polycrisis series episode, Michele Acuto, Andreina Seijas and Alessio Kolioulis take us on a “walking roundtable”, recorded on the road after dark in London. The speakers discuss how nighttime perspectives shape how we encounter the urban polycrisis. They reflect on how night studies, and practice, prompt embedded thinking on the intersections of urban health, climate, economics and conflict with the experiences of dwelling, living and working in the city after dark. Crisis talk is being challenged through night talk, while the everyday (...)

    #polycrisis,dark,night,walking,workers
    https://audio.podigee-cdn.net/2062646-m-a06a19998541f007104c83dd26c6af38.m4a?source=feed

  • La quadrature de la sphère
    https://www.visionscarto.net/la-quadrature-de-la-sphere

    Dans son livre de référence Flattening the Earth, le cartographe étatsunien John P. Snyder recense plusieurs centaines de projections cartographiques, c’est-à-dire des méthodes permettant d’« aplatir la Terre » (titre de son livre) pour en figurer la surface sur un papier ou un écran, par essence plats. De Claude Ptolémée à Al-Idrisi en passant par le fameux Geert de Kremer (Mercator), divers savants, mathématiciens, géographes, mais aussi artistes se sont cassé les dents sur ce problème, (…) Billets

    #cartographie #projections #géographie

  • Un jour, un lieu — un jour, une histoire

    https://www.visionscarto.net/visionscarto-tout-autour-du-monde

    En décembre 2024, visionscarto avait organisé un petit voyage autour du monde pour faire connaître quelques unes des contributions publiées sur visionscarto.net. Nous essayerons de rééditer cette initiative en décembre 2025 avec d’autres publications.

    #cartographie
    #géographie
    #visionscarto

  • #Géopolitique du sable. Une ressource omniprésente, auxiliaire de puissance et de #conflits

    À la fois omniprésent à la surface de la planète, notamment dans les #déserts, et invisible dans la variété de ses usages dans notre quotidien, le sable est la #ressource la plus consommée au monde. Accompagnant l’#urbanisation massive à l’échelle mondiale, son #extraction dépasse celle des combustibles fossiles et ­provoque d’importantes dégradations environnementales.
    Ressource très lucrative pour certains pays et les #mafias qui s’y implantent, elle permet à d’autres ­d’accroître leur territoire et d’asseoir leur #puissance maritime et sécuritaire.
    Tous les ingrédients sont donc réunis pour faire du sable une ressource éminemment géopolitique. Car, s’il n’est pas directement à l’origine de conflits, il en est un auxiliaire clé.
    La géopolitique du sable conduit aussi #Julien_Bueb à s’interroger sur l’#extractivisme et, plus largement, sur le #libéralisme et le #capitalisme, et les dérives qui lui sont attachées.

    https://www.lecavalierbleu.com/livre/geopolitique-du-sable
    #géographie_politique #sable
    #livre

  • #Essais_nucléaires en #Polynésie : « Vu de Paris, ce n’était qu’un désert liquide »

    Près de 30 ans après la fin des essais nucléaires en Polynésie, une commission parlementaire tente de faire reconnaître le préjudice des populations locales. Pour le chercheur Alexis Vrignon, « l’histoire n’est pas terminée ».

    Pendant trente ans, entre 1966 et 1996, la France a effectué 193 essais nucléaires en Polynésie, sur les atolls de #Mururoa et de #Fangataufa. Dans l’air, puis sous l’océan à partir de 1974. Près de 170 000 habitants auraient été exposés à des radiations. Les explosions atmosphériques ont dispersé des substances radioactives, notamment de l’iode, susceptible d’entraîner des cancers. D’après les recherches de l’Institut national de la #santé et de la recherche médicale, entre 1998 et 2002, la Polynésie arrivait en tête du funeste classement du taux d’incidence du #cancer de la thyroïde le plus élevé au monde.

    Pour tenter de faire reconnaître le #préjudice et de réparer les conséquences de ces essais, la députée de Polynésie #Mereana_Reid-Arbelot (Gauche démocrate et républicaine) a initié une #commission_d’enquête à l’Assemblée nationale. Stoppés par la dissolution en juin 2024, les travaux ont repris mardi 6 mai. En filigrane, les auditions permettent de mettre en lumière la question du colonialisme et de ses survivances. Pour Alexis Vrignon, maître de conférences à l’université d’Orléans, coauteur de Des bombes en Polynésie, les essais nucléaires français dans le Pacifique (éd. Vendémiaire, 2022), cette commission d’enquête illustre la difficile « reconnaissance du fait nucléaire ».

    Reporterre — Les essais nucléaires en Polynésie ont pris fin en 1996, mais l’histoire est-elle pour autant terminée ?

    #Alexis_Vrignon — Pas du tout. Au départ, la communication officielle du Commissariat à l’énergie atomique a été de dire qu’une fois le Centre d’expérimentations du Pacifique (CEP) démantelé, 1996 marquait la fin du nucléaire en Polynésie. Tout l’effort d’une partie de la société polynésienne au début des années 2000 a consisté à rappeler combien cette histoire ne pouvait pas se conjuguer au passé et à souligner les implications présentes.

    Ces enjeux ont été peu à peu pris en compte de manière chaotique et la question n’a jamais vraiment quitté l’espace public polynésien. La commission d’enquête qui a lieu en ce moment à l’Assemblée nationale est l’héritière de tous ces tâtonnements, ces hésitations et ces erreurs, qui illustrent les problèmes des pouvoirs publics face à la reconnaissance du fait nucléaire.

    Dans quel contexte la #France a-t-elle démarré ces essais nucléaires en Polynésie ? Pourquoi ce territoire ?

    Ils émergent dans le contexte historique de la #décolonisation, puisque les premiers essais nucléaires français ont eu lieu dans l’#Algérie encore colonie française, mais il était évident qu’à partir des #accords_d’Évian de 1962, cette solution ne pouvait durer et qu’il fallait un autre lieu. Plusieurs localisations ont dès lors été envisagées, certaines en France métropolitaine, notamment dans les Alpes et en Corse, avant d’être rapidement écartées, parfois pour des raisons géologiques, mais aussi et surtout, politiques. Dès lors, la France s’est rapidement tournée vers les outre-mer.

    Les atolls de Moruroa et Fangataufa ont été choisis. Cette décision s’est prise au début des années 1960 dans un contexte particulier de réaffirmation impériale. En 1956, la loi-cadre Defferre avait permis aux outre-mer de bénéficier d’une plus grande autonomie. Sauf qu’à partir de l’arrivée au pouvoir du général de Gaulle en 1958, les choses ont changé, il n’a plus été question d’aller vers l’autonomie totale des anciennes colonies africaines et des territoires d’outre-mer. La Polynésie fut alors choisie, sans consulter la population, ni les élites politiques locales.

    Les essais nucléaires ont-ils continué malgré une connaissance de leurs effets sanitaires et environnementaux ?

    À travers les archives militaires et locales, on constate que l’administration avait claironné à toute la Polynésie que les essais nucléaires allaient être propres et qu’il n’y aurait aucun problème. Après l’#essai_Aldébaran de 1966, qui a exposé les habitants des #îles_Gambier aux rayonnements ionisants et contaminé les citernes d’eau de pluie qu’ils buvaient, elle a été mise en porte-à-faux et c’est à partir de là qu’une culture du secret s’est développée.

    Les autorités ont ensuite tenté de limiter les risques en déplaçant parfois des populations, mais les questions de #sécurité n’étaient clairement pas leur priorité. Elles ont par exemple envoyé un avion dans un nuage radioactif afin d’effectuer des prélèvements. Il y avait aussi des bateaux militaires qui traversaient des zones sous le panache radioactif et à qui on ne disait pas grand-chose.

    Y a-t-il eu des résistances à l’époque ?

    La société polynésienne n’a jamais été totalement unanime. Mais entre 1962 et 1966, la mobilisation locale a été importante, notamment derrière le député #John_Teariki, qui a tenté de faire revenir le gouvernement sur sa décision de création du site d’expérimentations. Il s’appuyait sur la documentation scientifique des conséquences des essais nucléaires américains entre 1946 et 1958 dans les îles Marshall.

    Il insistait aussi sur la connaissance qu’avaient les Polynésiens de leur propre environnement, notamment des poissons qui se déplacent sur de longues distances et peuvent passer dans des zones contaminées avant d’être pêchés. Seulement, les autorités françaises se sont efforcées de marginaliser ces oppositions et de favoriser la montée en puissance des partis politiques liés au gaullisme, plus proches du pouvoir en place à Paris.

    À partir de 1974, les essais nucléaires sont devenus souterrains. En quoi menacent-il encore aujourd’hui l’écosystème des atolls ?

    Pour des raisons avant tout diplomatiques, vis-à-vis des Australiens et des Néo-Zélandais, la France a fait ce choix et réalisé d’importants #forages_offshore. Puisque ces essais fragilisaient notamment l’anneau corallien autour de Fangataufa, la majorité d’entre eux ont été effectués sur l’atoll de #Mururoa. Ces sites sont encore aujourd’hui étroitement monitorés, car les experts redoutent qu’une partie des atolls se décroche et entraîne un tsunami menaçant tout l’archipel, ou bien qu’ils s’ouvrent et libèrent des radio-éléments susceptibles de se disperser partout.

    Plus globalement, que sait-on des effets à long terme des radiations en Polynésie ?

    À l’heure actuelle, il s’agit encore de la question la plus délicate, car on manque de données permettant de mesurer pleinement les effets sanitaires sur les populations. Certaines archives cruciales, comme celles de l’hôpital Jean-Prince de Papeete [à Tahiti] n’ont pas encore été consultées car elles viennent tout juste d’être localisées. La Polynésie est un territoire grand comme l’Europe, mais éclaté sur énormément d’îles, ce qui rend plus complexes les études historiques et épidémiologiques. Ce que l’on sait, c’est qu’en 2023, près de la moitié des #indemnisations acceptées par le Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires provenaient de Polynésie.

    Dans quelle mesure ces essais relèvent-ils des mêmes logiques coloniales que pour le scandale du chlordécone aux Antilles ?

    Il y a bien sûr des parallèles : quand ces scandales se développent, ce sont sur deux territoires en situation coloniale, c’est-à-dire dont les institutions et les rapports sociaux sont déterminés par ce rapport qui perpétue une inégalité de statuts et de droits entre les populations locales colonisées et les populations colonisatrices.

    En Polynésie, personne n’a été consulté en amont et les essais nucléaires ont été beaucoup plus facilement envisagés par les autorités françaises en outre-mer que dans les Alpes ou en Corse. S’ajoute toute une série de présupposés sur ces espaces qui, vus depuis Paris, n’étaient rien d’autre qu’une sorte de désert liquide où il était plus facile d’installer une base d’essais nucléaires, peu importe les risques sanitaires et environnementaux.

    Peut-on imaginer qu’un jour une enquête parlementaire s’ouvre sur les essais nucléaires réalisés par la France en Algérie ?

    Pour la Polynésie, les procédures de déclassification et de dérogations d’archives ne datent que de 2021, elles ont permis d’établir une chronologie des faits et de documenter ce que les autorités savaient ou non. À ce moment-là, l’historien Renaud Meltz, chargé de la création de l’observatoire de l’héritage du CEP, avait soulevé la question : pourquoi ne pas faire la même chose pour les archives liées aux essais nucléaires en Algérie, qui sont encore peu connus ?

    Mais face aux relations complexes qu’entretiennent la France et l’Algérie, la ministre de la Mémoire et des Anciens combattants d’alors, Geneviève Darrieussecq lui avait opposé une fin de non-recevoir. Ce ne serait pas irréaliste et, en tant qu’historien, je ne peux qu’y être favorable. Mais l’accès aux archives ne sera qu’une première étape, car dès lors que l’on connaît mieux les faits, il faut tenter de les résoudre, et c’est là que les choses les plus difficiles commencent.

    https://reporterre.net/Essais-nucleaires-en-Polynesie-Vu-de-Paris-ce-n-etait-qu-un-desert-liqui

    #désert #désert_liquide #géographie_du_vide #radioactivité #histoire #colonialisme #colonisation

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  • Marie Tharp et la tectonique des plaques : une recherche sans faille | France Culture
    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-science-cqfd/marie-tharp-7457387

    On connaît mieux la surface de Mars que nos fonds marins. Pourtant, à la fin du XXe siècle, l’océanographe Marie Tharp a fait des découvertes majeures. Malgré les obstacles liés à son statut de femme, ses travaux ont bouleversé la géologie. Quelles furent ses découvertes et leur impact ?
    Avec

    Laurent Jolivet, professeur à Sorbonne Université. Chercheur à l’Institut des Sciences de la Terre de Paris (ISTeP).
    Javier Escartin, chercheur CNRS au laboratoire de géologie de l’ENS
    Cécile Prigent, chercheuse en géologie marine et maîtresse de conférences à l’Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP)

    En 1959, l’Américaine Marie Tharp publie les toutes premières cartes des fonds océaniques. Pourquoi peut-on parler d’un séisme dans l’histoire des géosciences ?

    Cette géologue et spécialiste des océans a façonné la géologie moderne. Pendant une grande partie de sa carrière, elle n’a pas été autorisé à embarquer sur des navires, en raison des stéréotypes de l’époque. Lorsqu’elle publie ses cartes des dorsales médio-océaniques de l’Atlantique Nord, elle révèle au monde un paysage inconnu, une véritable chaîne volcanique sous-marine, faite de rifts et de canyons. Pour saisir les processus géologiques, comprendre ce qui se cache sous les eaux est essentiel. Marie Tharp a ainsi posé une pierre angulaire essentielle à l’élaboration de la théorie de la tectonique des plaques.
    Marie Tharp et la découverte des dorsales océaniques : une révolution dans la compréhension de la tectonique des plaques

    Marie Tharp, l’océanographe sans navire (Le Temps, 2021)
    Qu’est ce que la tectonique des plaques(Nat Geo France, 2020)
    Blog de Laurent Jolivet, comparaison entre les cartes de Marie Tharp et nos cartes actuelles (2020)
    Scientific woman of the week - Marie Tharp (Université de Bruxelles, 2022)
    La tectonique des plaques ou l’histoire d’une théorie (Université de Bourgogne, 2018)
    La Méthode Sci : Dérive des continents : attention, Pangée ! (2019)
    La tectonique des plaques, à l’origine de la vie (Sciences et Avenir, 2018)
    How One Brilliant Woman Mapped the Secrets of the Ocean (National Geographic, 2017)
    Making Waves : Notable Women in Ocean Science (National Ocean Service)
    La tectonique des plaques et la dérive des continents (Ecole Polytechnique Montréal)
    Cartographie des fonds océaniques : l’héritage de Marie Tharp (Futura)
    Théorie de la téctoniques des plaques (Encyclopedia Universalis)
    L’effet MATILDA (CNRS)

  • En #Algérie, la France coloniale a aussi détruit la #nature

    L’accaparement colonial de la terre en Algérie a détruit des modes d’organisation et de gestion de la terre en commun. Le développement des monocultures et d’une agriculture d’exportation a aussi bouleversé l’environnement.

    Après avoir été suspendu de RTL début mars pour avoir évoqué les massacres français en Algérie au XIXe siècle, Jean-Michel Apathie a décidé de quitter la station. En pleine surenchère du ministre Bruno Retailleau avec l’Algérie et face à une extrême droite qui clame les bienfaits de la colonisation, le flot de réactions hostiles aux propos de l’éditorialiste rappelle que nombre de Français ne connaissent pas l’ampleur des crimes coloniaux commis par la France en Algérie.

    Face aux tentatives de révisionnisme historique, Reporterre s’est intéressé à un pan méconnu de la colonisation française en Algérie : ses dégâts sur la nature. À l’aube de la colonisation, le socle de la société algérienne reposait sur la paysannerie, l’agriculture était la principale source de richesse et rythmait la vie des populations qui alternait entre le travail de la terre et les transhumances saisonnières. Mais de 1830 jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, l’accaparement des terres par les colons a complètement bouleversé cet équilibre.

    « L’arrivée des colons en Algérie signe l’accaparement des ressources environnementales et celle du foncier. C’était une pratique d’expropriation sans explication, sans excuse et avec une grande brutalité. Pour les Algériens, c’est un monde qui s’effondre littéralement », relate Antonin Plarier, maître de conférence à l’université Lyon 3 et spécialiste de l’histoire environnementale des sociétés coloniales.

    Au total, d’après ses calculs, plus d’1,2 million d’hectares ont été transférés aux Européens entre 1830 et 1917 : soit l’équivalent de 1 000 fois la superficie de Paris, et trois fois celle de la Belgique.

    Pour réquisitionner des terres algériennes, la France a développé un arsenal juridique légalisant un paradoxe : celui d’une société qui défendait le droit à la propriété et d’une colonisation qui foulait au pied celle des Algériens. L’administration coloniale pouvait ainsi s’emparer de n’importe quelle propriété algérienne, qu’elle soit celle d’un individu comme d’une tribu entière.
    Détruire la paysannerie pour « soumettre le pays »

    La doctrine coloniale et militaire se lit à travers les écrits du maréchal Bugeaud, le militaire qui a permis d’étendre la conquête de l’Algérie. Voici notamment ce que précise cette violente figure de la colonisation, spécialiste des enfumades (pratique consistant à asphyxier des personnes réfugiées ou enfermées dans une grotte en allumant devant l’entrée des feux) : « J’y ai réfléchi bien longtemps, en me levant, en me couchant ; eh bien ! Je n’ai pu découvrir d’autre moyen de soumettre le pays que de saisir l’intérêt agricole ». Il faut donc empêcher les populations « de semer, de récolter, de pâturer », pour les priver des moyens d’existence, souligne l’historien Hosni Kitouni, chercheur en histoire à l’université d’Exeter.

    En filigrane, il s’agissait de punir tous ceux qui tentaient de se révolter, et de dissuader ceux qui en avaient l’intention. En 1838, l’ordonnance royale du maréchal Bugeaud indiquait que toute tribu s’insurgeant contre la domination française pouvait voir ses terres séquestrées. Cette politique monta encore d’un cran en 1871 à la suite d’une insurrection initiée contre la puissance coloniale.

    Cette « tempête des spoliations », selon l’expression d’Hosni Kitouni, a non seulement dispersé les populations, contraintes d’abandonner leurs maisons, leurs cultures, leur bétail, mais a également entraîné leur paupérisation, voire pire, leur famine, puis leur mort. En parallèle, la violence des razzias, ces opérations militaires menées dans des campements, a détruit les habitations et les récoltes. Les arbres fruitiers étaient rasés dans les zones de guerre.
    Spoliation de l’eau et des forêts

    « Devenus des paysans sans terre, sans bétail, sans abris, n’ayant que la force de leurs bras à vendre, ils vont alimenter la masse des candidats à toutes les servitudes », écrit Hosni Kitouni. D’anciens propriétaires algériens sont alors parfois revenus sur leurs terres louer leur force de travail aux colons français. « Des paysans algériens vont revenir cultiver la terre, fournir les semences, et les instruments agraires, en échange de quoi ils vont pouvoir récupérer un ou deux cinquièmes de la récolte, le reste revenant au propriétaire », raconte à Reporterre Antonin Plarier.

    Au-delà des terres, la colonisation s’est emparée des communs que sont les forêts et l’eau. Au XIXe siècle, plusieurs opérations de maîtrise des cours d’eau ont fleuri, toujours dans le but d’irriguer les terres des colons. Dans les années 1860, un projet de barrage a vu le jour dans le département d’Oran. Antonin Plarier pointe ainsi ce qui tient de l’évidence : « Lorsqu’une source en eau est maîtrisée, elle l’est uniquement au bénéfice des colons, et donc au détriment des agriculteurs algériens qui en sont de fait dépossédés. »

    La question de l’eau a entraîné plusieurs conflits, tout comme celle des forêts. Dès les années 1830, l’imposition du Code forestier par les colons a restreint peu à peu aux Algériens l’artisanat, le passage du bétail, le ramassage du bois de chauffe, et la coupe de bois pour les diverses constructions.

    Résultat : entre un tiers et la moitié des ressources économiques de la paysannerie algérienne a été menacée par ce nouveau cadre légal, estime Antonin Plarier. Il faut dire que l’administration coloniale y a très vite vu un filon : l’exploitation des forêts en vue de leur commercialisation.

    Dans la montagne de Beni Khalfoun, dans la vallée de l’Isser, l’administration octroya par exemple une concession d’environ 1 000 hectares de chênes-lièges, un bois cher et prisé pour la fabrication de bouchons, à un exploitant français. Difficile de donner un chiffre précis, mais cet accaparement de ressources essentielles n’a pas été sans conséquences sur l’écosystème algérien.

    « C’est toute une série d’éléments liés à la colonisation qui vont contribuer à dégrader l’environnement algérien. En asséchant les sols via la déforestation, l’État colonial a par exemple favorisé l’érosion des sols », dit l’historienne Hélène Blais, professeure d’histoire contemporaine à l’ENS et autrice de L’empire de la nature. Une histoire des jardins botaniques coloniaux.
    Monocultures et rentabilité

    En Algérie, comme ailleurs, la colonisation s’est accompagnée de l’introduction de nouvelles espèces jugées plus rentables, et d’un bouleversement dans les pratiques agricoles tournées vers une pratique intensive et exportatrice correspondant davantage aux besoins de la métropole.

    Ce qui fait dire à Alain Ruscio, historien spécialiste de la période coloniale, que « la totalité de l’écosystème algérien a été affectée par la colonisation » : « Au fur et à mesure que l’armée française considérait qu’une région était complètement contrôlée, des monocultures étaient rapidement mises en place. D’où aussi la construction de routes servant à acheminer ces marchandises vers la France », nous explique-t-il.

    C’est l’exemple de la vigne et de sa vinification, qui priva une partie de la population d’un accès à la culture de céréales, et entraîna la disparition de terres en jachères — qui fournissaient des pâturages jusqu’ici essentiels pour le bétail des paysans algériens. Mais aussi de l’introduction massive de l’eucalyptus, cette plante endémique d’Australie, dès les années 1860 pour tenter d’assainir les zones humides dans lesquelles le paludisme décimait des colons.

    « Des millions d’arbres ont ainsi été plantés. Dans certains endroits, cela a asséché plus qu’il était nécessaire, au détriment d’autres espèces endémiques qui ont été abattues ou abandonnées dans ce cadre », analyse Hélène Blais. L’historienne a également observé des tentatives d’introduction de moutons mérinos, apporté pour sa laine prisée en Europe.
    Chasses coloniales

    Sans oublier les chasses coloniales qui attiraient des Français originaires de tout l’Hexagone venus traquer hyènes, panthères, lions et autres animaux sauvages. Considérés comme des animaux nuisibles, leurs têtes furent mises à prix via une circulaire du général Bugeaud de 1844 offrant une récompense pour tout animal tué « proportionné à la puissance de chaque bête ». D’après les recherches d’Hosni Kitouni, rien qu’en 1860, ce ne furent pas moins de 61 panthères et 38 lions qui avaient été abattus. Si bien qu’à la fin du XIXe siècle, le plus gros de la faune sauvage avait disparu. Le dernier lion fut abattu en 1958.

    « L’ordre colonial s’accommode peu avec la différence biologique, écologique, humaine qui résiste à sa domination, conclut l’historien auprès de Reporterre. D’où la politique de mise en ordre à force de violence et de juridictions d’exception, empêchant la société autochtone de se développer à son rythme selon ses lois naturelles. »

    Au-delà des crimes commis sur les Algériens, peu d’historiens se sont jusqu’ici emparés des destructions des écosystèmes. L’ampleur d’un éventuel écocide lié à la colonisation française reste à quantifier et est un angle de mort de la recherche.

    https://reporterre.net/En-Algerie-la-France-coloniale-a-aussi-detruit-la-nature
    #destruction #paysage #colonisation #France #France_coloniale #histoire #terres #accaparement_des_terres #communs #agriculture #exportation #monoculture #paysannerie #foncier #expropriation #brutalité #violence #réquisition #droit_à_la_propriété #lois #maréchal_Bugeaud #enfumades #moyens_d’existence #insurrection #paupérisation #famine #razzias #arbres_fruitiers #eau #forêts #forêt #barrage #conflits #Code_forestier #érosion_des_sols #ressources #montagne #déforestation #environnement #érosion_des_sols #rentabilité #routes #vigne #jachères #terres_en_jachères #céréales #pâturages #eucalyptus #zones_humides #paludisme #arbres #laine #chasse #chasses_coloniales #ordre_colonial #animaux_sauvages #écocide
    #géographie_culturelle #géographie_du_droit #legal_geography

  • Rendre visible la construction sociale de l’espace par la méthode Topino

    par Corinne Luxembourg, Géographe et Anouk Migeon
    Architecte et dessinatrice (toutes deux de l’université Sorbonne Paris-Nord)

    https://www.visionscarto.net/methode-topino

    La méthodologie Topino sert à rendre visible des constructions sociales des espaces par la représentation des rôles assignés aux femmes et aux hommes.

    Nous présentons deux approches pour lesquelles cette méthodologie permet un comptage selon une lecture genrée, qui permet de rendre visibles des dynamiques spatiales et sociales. Dans le premier cas, l’accent est mis sur la socialisation de l’observateurice et sa subjectivité face aux rôles socio-sexués performés dans l’espace public. Dans le second cas, l’analyse se concentre sur la socialisation des producteurices d’images — photoreporters ou créateurs et créatrices de signalétique (communication, graphisme), qui sont également pris·es dans des normes sociales et des cadres de représentation propres à leur métier.

    #espace
    #territoire
    #genre
    #étude_de_genre
    #géographie
    #cartographie
    #méthode
    #méthodes_qualitatives_en_géographie

  • Faire la fête après la #guerre : au cœur des nuits du #Beyrouth des années 2010
    https://metropolitiques.eu/Faire-la-fete-apres-la-guerre-au-coeur-des-nuits-du-Beyrouth-des-ann

    À partir de l’étude des pratiques festives de la capitale libanaise entre 2013 et 2017, Marie Bonte montre comment la #nuit révèle une #géographie post-conflit marquée par l’organisation spatiale héritée de la guerre civile (1975-1990). L’ouvrage de la géographe Marie Bonte, issu de son travail de thèse, s’inscrit d’abord dans les études de sciences sociales de la nuit, avec l’objectif de prendre pour objet la vie nocturne de Beyrouth. Dans cette perspective, la nuit n’est pas une période temporelle mais #Commentaires

    / Beyrouth, #Liban, nuit, guerre, géographie

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_olive-alvarez.pdf

  • Quand le capitalisme fait sécession · Haud Guéguen
    https://www.terrestres.org/2024/04/02/quand-le-capitalisme-fait-secession

    À propos de Quinn Slobodian, Crack-Up Capitalism : Market Radicals and the Dream of a World Without Democracy, Dublin, Penguin Books, 2023, 352 pp.

    .... si Les Globalistes se terminait dans les années 1990, avec cette apogée du projet globaliste qu’est la création, à Genève, de l’OMC (et avec les premières manifestations de crise de la globalisation), c’est ici un phénomène en apparence contradictoire qui se trouve pris pour point de départ : une tendance à la « perforation » (p. 16) ou à la « fragmentation » (p. 18) du monde que Slobodian décèle à travers la multiplication toujours croissante du principe de la « zone » économique spéciale – liminairement définie comme une « enclave creusée dans une nation et libérée des formes ordinaires de régulation » (p. 13) – dont il montre qu’elle s’initie à partir des années 1970 dans la colonie anglaise de Hong Kong, et dont la carte qu’il en dresse à l’échelle mondiale n’en dénombre pas moins que 5400 à l’heure actuelle.

    En faisant le choix de s’installer dans cette « histoire du passé récent et de notre présent troublé » (p. 19) qu’est celle des quatre dernières décennies, il s’agit ainsi de s’attacher à ce qui n’est en réalité pas tant le contraire que l’autre face de la globalisation néolibérale : ce que Slobodian désigne comme le processus de « zonification » ou la prolifération d’espaces visant à l’optimisation du capital au moyen d’une neutralisation de la démocratie, dont l’auteur souligne qu’elle ne s’opère pas tant contre les États qu’elle ne s’opère au moyen de leur propre coopération. Des zones franches aux paradis fiscaux, des charters cities et des gated communities aux start-up nations ou aux utopies de la Silicon Valley, c’est donc une certaine tendance du capitalisme contemporain à faire « sécession » – ou, dit autrement, à se fortifier en se mettant à l’abri de tout contrôle démocratique – que Slobodian nous invite à regarder de plus près en s’attachant à la multiplicité de ces « enclaves » et des figures qui les promeuvent (de Milton, David et Patri Friedman à Murray Rothbard ou Peter Thiel pour ne citer que quelques-uns des plus connus).

    [...]
    .... en racontant ce qu’on pourrait se risquer à appeler cette « histoire des vainqueurs », Slobodian donne à voir une tendance dont il interroge la logique propre et les scénarios futurs qu’elle esquisse en montrant comment, à travers toutes ces expérimentations et conformément au projet politique qui les soutient, la valorisation de la liberté économique va de pair avec une désactivation de toute liberté politique. Une telle fétichisation de la liberté économique ne s’accompagnant pas seulement d’un conservatisme raciste ou sociobiologique (...) mais de formes plus ou moins assumées de néo-colonialisme (l’idée étant d’appréhender la fondation de nouvelles « zones » comme la conquête de nouveaux territoires supposant une main d’oeuvre au moindre prix et privée de droits).

    L’ « utopie » que dessine la tendance capitaliste à la « zonification » (p. 99) du monde est donc celle d’un monde où la notion même de droit se trouve entièrement transférée du plan politique au plan économique. Mais, comme le souligne très finement Slobodian à propos des rêves sécessionnistes d’une figure de la Silicon Valley comme Valaji Srinivasan (auteur d’un ouvrage intitulé The Network State : How to Start a New Country), c’est aussi celle de ce qu’on pourrait appeler un monde non terrestre, puisque c’est en réalité la question des ressources qui se trouve occultée (...)

    https://seenthis.net/messages/1032891
    #Quinn_Slobodian #capitalisme #État #zones_franches #histoire_contrefactuelle #géographie_politique #Ciskei #libertariens #liberté_économique

    • Quinn Slobodian, historien : « Il faut oublier cette idée reçue selon laquelle le capitalisme et la démocratie se renforcent mutuellement »

      L’historien estime (...) que la démocratie est menacée par l’évolution de l’économie, et notamment par la réalisation d’un rêve ultralibéral : la multiplication des zones économiques spéciales échappant aux règles démocratiques. Propos recueillis par Pascal Riché

      Après avoir exploré l’histoire intellectuelle du néolibéralisme dans Les Globalistes (Seuil, 2022), Quinn Slobodian, historien canadien spécialiste de l’histoire globale et professeur à l’université de Boston, poursuit son enquête sur cette école de pensée dans Le Capitalisme de l’apocalypse ou le rêve d’un monde sans démocratie (Seuil, 384 pages, 25,50 euros).

      Le titre original de votre livre est « Crack-Up Capitalism », le capitalisme à fragmentation. Que désigne cette expression ?

      Elle nous invite d’abord à réfléchir à la géographie du capitalisme d’aujourd’hui. Le capitalisme a été marqué ces dernières décennies non seulement par l’intégration des échanges (la mondialisation), mais aussi par la création d’une variété gigantesque d’instances destinées à favoriser les investisseurs et leurs profits : zones économiques spéciales, ports francs, parcs d’affaires…

      La deuxième utilisation du terme « crack-up capitalism » est plus normative. Elle renvoie à la vision de libertariens radicaux qui, depuis l’économiste Friedrich Hayek jusqu’à l’investisseur Peter Thiel, rêvent de l’effondrement du système des Etats-nations. Ils imaginent un monde post-démocratique et même post-nations. L’humanité serait organisée en villes privées – ce qu’ils appellent des charter states (« Etats à charte ») –, dans lesquelles le principe de gouvernance ne serait plus « un homme, une voix ». Elles seraient gouvernées comme des entreprises.

      Ce fantasme correspond-il déjà à une réalité ?

      En partie. Aujourd’hui, on compte plus de 6 000 zones économiques spéciales, au cœur de la production et des flux financiers, à l’échelle mondiale. De même, les gated communities (« communautés fermées ») aux Etats-Unis, qui n’existaient quasiment pas il y a un demi-siècle, se comptent par dizaines de milliers aujourd’hui.

      Une réorganisation de la vie humaine est donc bien en cours. Savoir si elle prépare un monde « post-Etat-nation » reste une question ouverte. Mon livre tente de comprendre pourquoi des personnalités issues de l’élite rêvent d’une telle dystopie.

      Ces zones, dans l’esprit de ces idéologues, sont des outils pour se passer des Etats. Mais à la fin du livre, vous dites qu’elles sont en fait des outils au service de ces derniers : Chine, Arabie saoudite, Dubaï… N’est-ce pas paradoxal ?

      Il y a toujours une dialectique entre les utopies et la réalité dans laquelle elles s’inscrivent. Le socialisme utopique au XIXe siècle était une façon de lire les mutations qui avaient alors lieu : l’essor de la classe ouvrière, la production de masse… De même, les anarcho-capitalistes et libertariens radicaux d’aujourd’hui voient, dans un monde de contractuels, de chauffeurs Uber, de médias sociaux et de cryptomonnaies, ce que pourrait être un autre futur politique si ces tendances étaient accélérées. Le fait est que la multiplication des zones spéciales ne semble pas près de provoquer l’effondrement des Etats-nations.

      Il est plus difficile de se débarrasser des Etats que de la démocratie…

      Absolument ! De ce point de vue, il faut oublier cette idée reçue – et relativement récente – selon laquelle le capitalisme et la démocratie se renforcent mutuellement. Joseph Schumpeter, dans les années 1940, était convaincu, comme d’autres alors, que l’avènement de la démocratie signifierait la fin du capitalisme, car les citoyens utiliseraient leur vote pour collectiviser les moyens de production. A l’inverse, des penseurs comme Milton Friedman, dans les années 1970, étaient sceptiques à l’idée que le capitalisme allait de pair avec la démocratie. Ils arguaient qu’un excès de démocratie conduisait à des inefficacités et que cela ralentissait la production. Friedman admirait alors Hongkong, un territoire qui était davantage géré comme une entreprise que comme un pays.

      Le récit habituel que l’on fait de l’après-guerre froide est plein de clichés et de platitudes : le triomphe de la démocratie, un mouvement vers une plus grande intégration supranationale, le succès du multilatéralisme, et, globalement, un progrès…

      C’est la rhétorique de « la fin de l’histoire », selon le titre du fameux livre de Francis Fukuyama, en 1992…

      Oui ! Mais contrairement à ce récit, la démocratie et le capitalisme ne sont pas allés de pair. La priorité donnée à la liberté économique plutôt qu’à la liberté politique – ce pourrait être une définition du néolibéralisme – a conduit à considérer comme des modèles des endroits comme Singapour ou Hongkong, dont les traditions démocratiques sont faibles ou nulles.

      Dans le processus de nation branding – les efforts pour attirer touristes et investisseurs –, l’existence d’élections libres ou même d’une liberté d’expression compte très peu. Dans les classements d’attractivité internationaux, Dubaï obtient des scores très élevés, même s’il fonctionne comme une autocratie clanique, même s’il repose sur une main-d’œuvre quasi esclavagisée, même s’il se classe très bas en termes de liberté de la presse ou d’égalité des genres. Que de telles places aient pu devenir les archétypes de ce qu’est un « bon Etat » au XXIᵉ siècle en dit long sur notre civilisation.

      Le capitalisme sans démocratie est-il un modèle solide ?

      Oui, et ce n’est pas nouveau. La première mondialisation, à la fin du XIXᵉ siècle, fonctionnait sur la base de l’étalon-or, mais aussi sur celle de l’absence de suffrage universel : pour rétablir la parité de la monnaie, on pouvait toujours réduire les salaires ou provoquer des vagues de chômage.

      Dans les années 1970, lorsque les banques de la City de Londres ou de Wall Street cherchaient des pays emprunteurs, elles considéraient que le risque était le plus faible dans des endroits comme l’Allemagne de l’Est, la Tchécoslovaquie ou l’URSS. Elles étaient ravies de prêter de l’argent à des pays non démocratiques, et même socialistes. Les démocraties étaient vues comme des sources d’insécurité pour les investisseurs. Les nouveaux droits qui ont été adoptés à l’aube du XXIᵉ siècle concernent surtout la sécurité des investisseurs, les droits du capital, la protection de la propriété privée…

      Comment Donald Trump s’inscrit-il dans le récit que vous présentez ?

      Son nationalisme économique semble certes aller à l’encontre de la fragmentation mondiale que je décris. Mais il défend aussi des politiques qui accélèrent la fragmentation de son pays : des responsabilités importantes (avortement, contrôle des armes, financement de l’éducation…) sont laissées aux Etats. Cela prépare une intensification de la concurrence entre eux. Par ailleurs, Donald Trump plaide pour la création de villes privées, les freedom cities (« cités de liberté »). Il a aussi poussé des initiatives comme celles d’Elon Musk pour créer des villes d’entreprises, permettant aux entrepreneurs d’élaborer leurs propres législations. Cette tendance devrait s’accentuer.

      La Chine, pays au pouvoir autoritaire, s’appuie également sur les zones économiques spéciales que vous décrivez.

      La Chine est l’acteur le plus important dans cette histoire du « capitalisme crack-up ». C’est l’émulation créée par Hongkong, dans le sud de la Chine puis dans d’autres régions, qui a permis au pays de connaître une croissance spectaculaire au cours des dernières décennies. On comprend mal ce modèle si on le perçoit comme « centralisé ». Le génie de la direction politique chinoise a été de décentraliser une grande partie des décisions économiques au niveau de ces zones économiques spéciales.

      Cela a permis de laisser une latitude importante aux investisseurs étrangers et aux entrepreneurs locaux. Les expérimentations réussies étaient ensuite reproduites dans de nouvelles zones… La Chine représente un mélange extraordinaire de contrôle public et d’initiative privée, qui a été admiré par de nombreux libertariens.

      Avec l’initiative « Ceinture et route » (Belt and Road Initiative), la Chine a tenté d’externaliser les zones le long des routes commerciales de l’ancien empire. Elle a reproduit en quelque sorte le modèle des enclaves, utilisé jadis par l’Empire britannique avec ses comptoirs de la péninsule Arabique jusqu’au détroit de Singapour. Comme au XIXᵉ siècle, on ne cherche pas à conquérir de vastes territoires, on se concentre sur des points stratégiques.

      Comment les démocraties peuvent-elles empêcher « l’économie de l’apocalypse » ?

      L’Europe est un endroit fascinant où la bataille est menée. L’Union européenne (UE) a été conçue pour assurer une concurrence non faussée, ce qui passait par l’élimination de la course au moins-disant fiscal ou social provoquée par des zones spéciales. Cependant, les pays d’Europe de l’Est, qui ont rejoint l’UE plus tard, ont continué à utiliser des zones pour attirer les investissements. La Pologne est devenue une seule grande zone économique spéciale : le pays entier offre des traitements de faveur. La Hongrie, supposée nationaliste et populiste, crée également des zones spéciales pour attirer les investissements coréens. En Italie, Matteo Salvini et Giorgia Meloni s’y sont mis aussi, dans le sud du pays…
      Ces initiatives nourrissent une confrontation en Europe, avec pour enjeu l’équité de la concurrence et la primauté de l’Etat de droit. L’UE est en tout cas bien placée pour résister à l’attrait des nouveautés clinquantes comme les cryptomonnaies ou autres gadgets censés fournir une prospérité « à la Dubaï ». Elle n’est pas impressionnée par les bulles de hype que souffle la Silicon Valley.

      « Le Capitalisme de l’apocalypse », de Quinn Slobodian : les trous noirs d’un système économique

      Le point de départ du livre fascinant de l’historien canadien Quinn Slobodian Le Capitalisme de l’apocalypse (Seuil, 384 pages, 25,50 euros) est une phrase de #Peter_Thiel, lors d’une conférence de 2009 : « Si nous voulons plus de liberté, nous devons augmenter le nombre de pays. » Alors âgé de 41 ans, le fondateur de PayPal imaginait un monde utopique, libéré des Etats, composé de milliers de cités et autres entités connectées. Eh bien, on y est presque, démontre Quinn Slobodian.

      L’avenir que décrivait le célèbre investisseur, en partie, est déjà là. Le monde contemporain est constellé de milliers de trous noirs creusés par les détenteurs de capital depuis une cinquantaine d’années. Des micro-Etats, des zones économiques spéciales, des paradis fiscaux, des villes privées… « Pour comprendre l’économie mondiale, il faut apprendre à voir les vides », écrit l’auteur, qui nous emmène les examiner de près : en Asie (Chine), en Amérique latine (Honduras), en Europe (Liechtenstein) en Afrique (Somalie), au Moyen-Orient (Dubaï) ou encore dans le métavers… Le point commun de ces milliers de zones est leur absence de démocratie. Et c’est aussi l’excitation qu’elles provoquent dans l’imagination des fondamentalistes du marché.

      A travers le tableau qu’il peint, l’historien déroule une histoire des idées, de celles qui font fantasmer un groupe d’intellectuels et d’entrepreneurs anarcho-capitalistes, dont Thiel est un archétype. L’univers privatisé dont rêvent tous ces disciples néolibéraux de Friedrich Hayek est une monstrueuse dystopie dans laquelle le citoyen disparaît au profit du business. Il apparaît au fil de ce récit coloré que le véritable adversaire de ce groupe de libertariens fortunés et influents n’est pas l’Etat (qui leur est utile à bien des égards), mais la démocratie, cette empêcheuse d’accumuler en rond.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/01/20/quinn-slobodian-historien-il-faut-oublier-cette-idee-recue-selon-laquelle-le

      #histoire #récit #démocratie #économie #libertariens #anarcho-capitalistes #mondialisation #territoire_entreprise #État_entreprise #tourisme #investisseurs #Dubaï #Hong_Kong #Chine #villes_privées #villes_entreprises #dystopie #Empire_britannique #Europe #Pologne #note_de_lecture

  • La plus vieille #société_savante de #France promeut le climatoscepticisme
    https://reporterre.net/La-plus-vieille-societe-savante-de-France-promeut-le-climatoscepticisme

    « Nous entrons dans un momentum critique pour la science », écrivent-ils après la victoire de Donald Trump et du #climatoscepticisme aux États-Unis. À « l’aube d’une colonisation des imaginaires » et d’attaques de plus en plus violentes contre la science et l’écologie, la #Société_de_géographie se présente comme « un bastion du climatoscepticisme en #France », dénoncent-ils.

    Peu active et marginalisée, bien qu’auréolée de son prestige passé, cette Société a-t-elle réellement un pouvoir d’influence ? Le fait qu’elle organise régulièrement ses #conférences et déjeuners dans les salons du Sénat n’est pas anodin. « Ces anciens chercheurs mis en avant par la Société de géographie, qui souvent ne font plus de recherche depuis longtemps, sont plébiscités par les milieux politiques #conservateurs, hélas dénués de culture scientifique et de contact avec les #scientifiques actifs. Ils diffusent au nom de leur autorité académique des thèses et des opinions très éloignées de la recherche actuelle », regrette une #chercheuse en #géographie.

    Interrogé sur ses prises de position et celles de la Société qu’il préside, Jean-Robert Pitte n’a pas souhaité répondre à #Reporterre. Il bénéficie en revanche d’une certaine notabilité : il présidera, pour l’année 2025, l’Académie des sciences morales et politiques. L’une des cinq prestigieuses académies de l’Institut de France, au côté de l’Académie des sciences ou de l’Académie française. La première conférence organisée sous sa présidence, gratuite et ouverte au public, sera donnée par… Sylvie Brunel.

    Cette Académie des sciences morales et politiques vient par ailleurs d’envoyer un signal inquiétant quant à ses dispositions vis-à-vis de la climatologie. Le 15 novembre, elle a abrité un colloque rassemblant la fine fleur du climatoscepticisme français, ainsi que l’a relaté un article du Nouvel Obs. L’Académie s’est désolidarisée de l’événement, ayant simplement prêté une salle aux organisateurs. Parmi lesquels on retrouve pourtant l’une des membres de l’Académie, Chantal Delsol, philosophe réactionnaire à son aise dans les cercles « climatoréalistes ».

    « Nous ne sommes qu’à l’aube d’une guerre d’opinion contre la science. La Société de géographie n’est qu’un exemple parmi d’autres d’un climatoscepticisme rampant », alerte Maxime Blondeau. Quels que soient les soubresauts à venir contre les faits scientifiques, le message des démissionnaires est clair : « La Société de géographie n’est plus la gardienne du temple. »

  • La #France du #TGV

    –-> Commentaire de Dana Hiliot sur Mastodon :

    Dans les zones en rouge on peut distinguer au moins deux cas : les « #arrières-pays » peu peuplés (sud-Auvergne, Lozère, Nord-Averyron, une partie du Limousin) où là, ce n’est pas seulement la gare TGV qui se trouve loin, mais les autres gares aussi, ces zones n’étant quasiment pas desservies par le train (j’ai vécu 17 ans sur les hauts plateaux de l’Est-Cantal.. l’automobile n’est pas une option)

    Et tout le nord du Puy-de-Dôme, jusqu’à Bourges : il y a bien des lignes de train (qui d’ailleurs suscite beaucoup d’agacements de la part des usagers pour les retards et ses interminables arrêts légendaires en rase campagne), mais pas le TGV.

    Je songe aussi à un troisième cas, quelques zones rose pâle ou jaune traversées par le TGV, mais seulement traversées : on le voit passer mais il ne daigne pas s’arrêter 😅

    (Et puis il y a Cherbourg et le Nord-Cotentin : cas assez particulier - c’est comme un île dit-on là-bas)

    https://mastodon.social/@danahilliot@climatejustice.social/113279500608449791

    #train #transports_publics #inoui #accessiblité #géographie_du_vide #géographie_du_plein #distance #gares_tgv #cartographie #visualisation #inégalités_territoriales

    via @freakonometrics : https://mastodon.social/@freakonometrics/113279419869170064
    ping @visionscarto

  • Comment les retraités façonnent la structure sociale des villes françaises
    https://metropolitiques.eu/Comment-les-retraites-faconnent-la-structure-sociale-des-villes-fran

    Les recherches sur la ségrégation des villes françaises tiennent rarement compte de la population retraitée, dont le poids démographique est pourtant croissant. En l’intégrant à l’analyse, cette enquête offre une image renouvelée de la ségrégation entre les aires urbaines hexagonales. Le vieillissement est l’une des évolutions démographiques majeures de la population française : les plus de 65 ans représentaient 15 % de la population en 1995, plus de 20 % en 2020 et on estime qu’ils seront près de 30 % à #Terrains

    / #personnes_âgées, #démographie

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/gourdon-et-al.pdf

  • Pour un spatio-féminisme - Nepthys Zwer - Éditions La Découverte
    https://www.editionsladecouverte.fr/pour_un_spatio_feminisme-9782348084195


    C’est le nouvel ouvrage de @nepthys que je vous conseille vivement. Pour l’instant je n’ai lu que la première moitié qui éclaircit déjà pas mal de choses que je savais vaguement. C’est un récit fascinant.

    Pourtant le livre partage un vilain défaut avec la quasi totalité des oeuvres féministes en dehors de la lignée Zetkin/Luxemburg cad là où s’imposerait une analyse économique et de classe précise on reste un peu sur sa faim. Il me reste à lire encore la deuxième moité du livre , alors voyons ...

    Sommaire et introduction (24 pages)
    https://www.calameo.com/read/000215022395cdb6b40ef
    C’est costaud. Après le style devient plus décontracté, les histoires et images fournissent plein de food for thought , c’est une belle source d’inspiration pour les nouvelles découvertes rendues possibles à travers la lecture du texte.

    Nos usages de l’espace reflètent notre situation sociale. En effet, le rapport qu’une personne entretient avec l’espace en dit long sur la place et le rôle qui lui reviennent en société. Où et comment habite-t-elle, vit-elle, travaille-t-elle ? Dans quel périmètre sa vie se déploie-t-elle ? Comment se déplace-t-elle et à quelle vitesse ?

    Dans cet essai novateur, richement illustré et nourri de théories féministes, Nepthys Zwer mobilise l’approche spatiale pour apporter un nouveau regard sur les phénomènes d’aliénation, de soumission et de domination. Alors que la cartographie a toujours été employée et instrumentalisée par les pouvoirs dominants masculins, Nepthys Zwer se sert de la contre-cartographie pour révéler d’autres aspects de notre rapport à l’espace et explorer au travers des représentations mentales, imaginaires et culturelles, l’assignation dans l’espace public. Cet ouvrage cherche les voies d’une émancipation, non seulement pour dénoncer mais aussi pour dépasser les situations d’inégalité et d’injustice sociale que subissent les groupes subalternes.

    #livre #féminisme #géographie #cartographie

  • Le relief c’est la vie
    https://laviedesidees.fr/Le-relief-c-est-la-vie

    Nous parlons de la Terre sans la connaître. Une synthèse des connaissances récentes sur le « système Terre » et son état préoccupant invite à promouvoir une nouvelles conception de l’environnement et des nécessaires orientations politiques.

    #environnement #écologie #géographie #Sciences
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240828_gaillardet.pdf

    • La Terre habitable ou l’épopée de la zone critique

      Nous n’avons jamais autant parlé de la Terre. Il n’est pas un jour sans qu’elle se rappelle à nous et que s’accroisse le sentiment que nous la perdons. Mais avons-nous pris le temps de la connaître vraiment ? Comment nous y relier de manière respectueuse et durable ?
      Ce livre unique en son genre, écrit par un géochimiste reconnu, montre que les vivants, les humains en particulier, n’habitent pas la Terre au sens du globe, mais une infime partie de celui-ci. Une zone comprise entre le ciel et les roches, discontinue, issue de la confrontation de l’énergie du soleil, qui active le cycle de l’eau, et de l’énergie tellurique, qui crée les reliefs. Ce n’est ni le sol traditionnel, ni les écosystèmes, ni les eaux souterraines ou les fleuves ; c’est tout à la fois. Altéré, tissé, ce voile est une zone critique, à découvrir pour en prendre soin et l’habiter mieux. Cette nouvelle Terre tourne, elle aussi. Elle se plie et se déplie en cycles et temporalités, au gré des transformations chimiques, physiques et biologiques.
      Du fleuve Congo à l’Amazone, des Alpes à l’Himalaya, de La Réunion à la Guadeloupe, le lecteur suit les scientifiques qui auscultent la zone critique. Ceux-ci décryptent le mouvement de l’eau, pistent les flux du carbone ou des métaux, des transformations chimiques d’une seconde ou d’un million d’années... Ensemble, dans leurs observatoires instrumentés, ils inventent une #science_du_terrestre_indisciplinée, font se parler #vivants et #non-vivants, étapes indispensables pour concevoir une nouvelle #politique_de_la_Terre. Vertigineux.

      https://www.editionsladecouverte.fr/la_terre_habitable-9782348075421

      #livre #habitabilité #Jérôme_Gaillardet

  • Kropotkine : Un géographe novateur
    https://www.partage-noir.fr/kropotkine-un-geographe-novateur

    Le théoricien et le militant anarchiste #Pierre_Kropotkine (1842-1922) fut un géographe réputé, comme son compagnon Elisée Reclus (1830-1905). Leurs contributions furent cependant oubliées par leurs pairs scientifiques. Les raisons en sont multiples, liées d’une manière générale à leur engagement politique. #Itinéraire_-_Une_vie,_une_pensée n°3 : « Kropotkine »

    / Itinéraire - Une vie, une pensée, Pierre Kropotkine, #@narlivres, #Camillo_Berneri, #Élisée_Reclus, #Errico_Malatesta

    #Itinéraire_-_Une_vie,une_pensée_n°3:« _Kropotkine »
    https://www.partage-noir.fr/IMG/pdf/itineraire_kropotkine2.pdf

  • « La #forêt_amazonienne est habitée depuis toujours »

    Sous ses dehors sauvages, la forêt amazonienne est habitée depuis des millénaires par des populations qui ont su l’exploiter tout en la préservant, comme le raconte le géographe François-Michel Le Tourneau dans ce 4ᵉ volet de notre série d’été consacrée à la forêt.

    On imagine la forêt amazonienne comme un espace vierge de présence humaine. Mais c’est loin de la vérité. Vous êtes spécialiste de la région amazonienne, notamment dans sa partie brésilienne. Pouvez-vous nous dire qui habite cette forêt aujourd’hui ?
    François-Michel Le Tourneau1. Depuis une trentaine d’années, le concept de forêt vierge appliqué à l’Amazonie est en train de voler en éclats. L’histoire de la région a été dominée jusqu’aux années 1970 par des archéologues occidentaux, qui avaient imposé l’idée d’une forêt impénétrable, produisant peu de ressources, en particulier peu de protéines animales, où ne pouvaient subsister que quelques tribus nomades. Mais c’est faux ! D’abord, le peuplement de cette région remonte au moins à 11 000 ans avant notre ère. Différentes populations ont peu à peu domestiqué des plantes comme le riz et le manioc. Elles ont par ailleurs développé des civilisations denses et quasi-urbaines dans les siècles qui ont précédé la colonisation européenne, comme le montre l’apport récent du lidar, une technique de télédétection laser qui traverse la canopée et révèle le modelé exact du sol.

    Mais à cause de l’arrivée des Européens et, avec eux, des épidémies, 80 % à 90 % de cette population a été décimée. Les Portugais ont alors importé de la main-d’œuvre depuis l’Afrique et une partie de ces esclaves, les quilombolas, appelés aussi « Noirs marrons », se sont échappés pour vivre en forêt. Par ailleurs, des métissages ont eu lieu entre Amérindiens et Européens, dont sont issus les caboclos, des paysans qui ont formé petit à petit le gros de la population du bassin amazonien. Le peuplement de la forêt amazonienne est donc le fruit d’une histoire où se sont succédé et mélangées des populations d’origines très différentes.

    Les Amérindiens ne sont donc pas les seuls habitants de cette forêt ?
    F.-M. Le T. Non, en effet. Et l’histoire ne se termine pas là ! Au XIXe et au XXe siècle, deux grandes vagues d’immigration ont entraîné des afflux de population du Nord-Est. À la fin du XIXe siècle, quand la demande de latex a explosé dans le monde, 500 000 seringueiros sont venus pratiquer en forêt la saignée des hévéas (seringueira en portugais, Ndlr). L’euphorie liée au commerce du caoutchouc n’a pas duré longtemps, car la Malaisie a repris cette exploitation à grande échelle. Comme dans le conte de Cendrillon, la région amazonienne s’est rendormie pour plus d’un siècle. Jusqu’à ce que le régime militaire brésilien arrivé au pouvoir en 1964 décide de développer une région considérée – toujours à tort ! – comme vide et arriérée et de l’arrimer au reste du pays, craignant une prise de contrôle par d’autres puissances. Il organise alors un grand plan de colonisation agricole par des populations paysannes sans terre, ce qui lui permet en même temps d’éviter une réforme agraire dans le reste du pays.

    Plusieurs millions de personnes arrivent ainsi dans les années 1970-1980, profitant des routes qui sont construites dans le même temps à travers la forêt. La population urbaine commence à dépasser la population rurale… au point que la géographe brésilienne Bertha Becker qualifiait dès 2000 cette Amazonie brésilienne de « forêt urbanisée » ! Aujourd’hui, environ 25 millions de personnes vivent en Amazonie brésilienne, dont 753 000 Amérindiens. Parmi elles, 350 000 habitent au cœur même de la forêt.

    La population amérindienne est à nouveau en progression ?
    F.-M. Le T. Oui, elle a fortement augmenté depuis trente ans au Brésil en général et en Amazonie en particulier. Depuis les années 1970, une meilleure prise en charge sanitaire, notamment vaccinale, a amélioré la santé des Amérindiens. Surtout, une convergence est apparue à partir de 1985 entre la montée des préoccupations environnementales d’une part et les luttes sociales des populations autochtones d’autre part.

    En 1988, une nouvelle constitution a reconnu leurs droits et leurs langues, et leur a restitué de larges pans de territoires : aujourd’hui, sur 3,3 millions de kilomètres carrés de forêt amazonienne brésilienne, environ 1,3 million de kilomètres carrés (trois fois la France métropolitaine environ) sont exclusivement réservés aux Amérindiens. À cela s’ajoutent les terres allouées à d’autres populations traditionnelles, comme les seringueiros. Confrontés dans les années 1970 à l’arrivée de propriétaires qui défrichent massivement, ils ont obtenu une gestion communautaire de ces terres. Même chose pour les ribeirinhos vivant sur les berges du fleuve, qui ont récupéré des réserves de développement durable et des droits spécifiques dans la préservation de ces écosystèmes.

    On oublie trop souvent que des centaines d’espèces et de variétés étaient cultivées en forêt par les Amérindiens avant le contact avec les Européens, sans entraîner de dégradation de la fertilité des sols, au contraire ! Là où les grandes entreprises agricoles défrichent d’immenses surfaces pour ne faire pousser que quelques espèces à grand renfort d’intrants chimiques.

    De quelle façon ces populations vivent-elles de la forêt ?
    F.-M. Le T. Les Amérindiens pratiquent pour la plupart un système mixte qui repose sur une agriculture rotative par abattis-brûlis, la collecte de ressources végétales (graines, semences, lianes), ainsi que la pêche et la chasse. Pour fonctionner, ce système impose d’avoir accès à de vastes surfaces qu’ils parcourent en fonction des saisons et des besoins.

    Les autres populations traditionnelles ont repris certaines bases des Amérindiens, notamment l’agriculture rotative, mais elles utilisent souvent plus intensivement d’autres ressources car elles tirent une partie de leur subsistance de la vente de ces produits (noix, fibres, semences, etc.) sur les marchés. Dans les deux cas, de plus en plus, les allocations sociales et les salaires participent aussi aux économies des familles, entraînant des changements de régimes alimentaires pas toujours heureux.

    Ces populations traditionnelles sont-elles un rempart contre la déforestation ?
    F.-M. Le T. En partie oui. Le gouvernement brésilien considère d’ailleurs que les territoires amérindiens participent au réseau des unités de conservation de l’environnement. Dans le même temps, les politiques de développement se pensent toujours face à une nature sauvage qu’il s’agirait de domestiquer, avec des plantations monospécifiques, des pâturages destinés aux élevages ovins et bovins, des grandes cultures, qui ne laissent aucune place aux processus naturels. L’idée perverse d’une profusion inépuisable de la forêt n’est pas remise en question...

    Mais les peuples autochtones deviennent aussi, pour certains, prisonniers d’une injonction à sauver la forêt. Or, leur projet de développement dans le futur n’est pas forcément de conserver un mode de vie traditionnel. De nouveaux besoins se font jour, qui nécessitent souvent l’accès à des revenus monétaires. Certains, pour subsister, acceptent de faire des coupes à blanc (abattage sur de très grandes surfaces de la totalité des arbres d’une exploitation forestière, Ndlr) dans la forêt afin d’y créer des pâturages pour de l’élevage. Doit-on les en empêcher ? Il faut noter enfin que la plupart ne résident plus seulement dans leurs territoires d’origine mais pratiquent des mobilités circulaires entre ville et forêt, utilisant l’espace périurbain pour continuer leurs activités agricoles et de collecte tout en profitant des avantages de la ville, comme l’accès à la scolarité ou à des emplois rémunérés.

    Le sujet est compliqué. En réalité, ce devrait être à l’État de protéger cet environnement, tout en acceptant le droit à l’autodétermination de ces populations et leur aspiration à une prospérité matérielle équivalente à celle du reste du Brésil.

    https://lejournal.cnrs.fr/articles/la-foret-amazonienne-est-habitee-depuis-toujours

    #géographie_du_vide #géographie_du_plein #Amazonie #peuples_autochtones #forêt #Amérique_latine #forêt_vierge #exploitation #Brésil #peuplement #quilombolas #noirs_marrons #esclavage #histoire #caboclos #agriculture #villes #urbanité #latex #hévéas #caoutchouc #colonisation #colonisation_agricole #réforme_agraire #forêt_urbanisée #vaccins #vaccination #démographie #agriculture_rotative #abattis-brûlis #alimentation #régime_alimentaire #déforestation #plantations #pâturages #terres #coupes_à_blanc #élevage #mobilités_circulaires