• Premières images de Furiosa : Mais au fait, pourquoi Mad Max : Fury Road était turbo de gauche ? - Frustration Magazine
    https://www.frustrationmagazine.fr/fury-road
    https://www.frustrationmagazine.fr/wp-content/uploads/2023/12/that-look-charlize.webp

    En plus d’un Miller excellant indéniablement dans la réalisation technique, de la photographie immersive de John Seal mais aussi du rythme électrisant et frénétique (mais néanmoins digeste) du montage de Margaret Sixel, le film pouvait également se pâmer de produire une critique sociale puissante et d’infuser chez son spectateur des idées révolutionnaires pas si dystopiques que ça. À travers son univers (post-apo) impitoyable, ses personnages résolument engagés, et ses thèmes audacieux, “Mad Max : Fury Road” s’était rapidement érigé en un manifeste en faveur de la lutte des classes. Bien plus donc, qu’une simple épopée motorisée, le film était une source d’inspiration pour ceux qui, comme nous, prônent la justice sociale, l’égalité des genres, et la lutte contre l’oppression des classes dominées.

  • Parliament Funkadelic - The Mothership Connection (Live in Houston, TX, 1976)

    https://youtu.be/r5aHD5ruSZ0?feature=shared


    Parliament Funkadelic - The Mothership Connection (Live in Houston, TX, 1976)

    It was Halloween night and Parliament Funkadelic was about to tear the roof off the Houston Summit, ready to bless the crowd with their cosmic brew of interplanetary funk. George Clinton, Bernie Worrell, Bootsy Collins and the rest of the P-Funk collective were riding the success of their first Top 5 R&B hit, “Give Up The Funk (Tear The Roof Off The Sucker),” a track that had earned them the kind of radio play that would bring the masses out to see them live in a stadium-sized arena. The group was only five dates into the tour when they arrived in Houston, but they were definitely ready to take it to the stage for an out-of-this-world show like no other. Taped on October 31, 1976, these seldom-seen performances at the Houston Summit represent Clinton and Parliament Funkadelic in their ’70s prime, in the era of their Mothership Connection and The Clones Of Dr. Funkenstein LPs-a rare opportunity for everyone to get their proper dose of The P-Funk.

    ///////////// Setlist (by duncan) //////////////
    0:00:25 - 0:02:03 : Prelude
    0:03:31 - 0:10:57 : Cosmic Slop
    0:10:59 - 0:14:33 : Dr Funkenstein’s Supergroovalisticprosifunkstication Medley
    0:14:33 - 0:18:15 : Do That Stuff
    0:18:19 - 0:21:36 : Gamin’ On Ya
    0:21:37 - 0:26:32 : Standing On The Verge Of Getting It On
    0:26:31 - 0:34:27 : Undisco Kidd (The Girl Is Bad)/Pussy
    0:34:27 - 0:37:24 : Children Of Production
    0:37:24 - 0:46:29 : Mothership Connection (Star Child)/Swing Down Sweet Chariot
    0:47:14 - 0:52:19 : Dr Funkenstein
    0:52:19 - 0:55:46 : Comin’ Round The Mountain
    0:55:55 - 1:00:56 : P Funk (Wants To Get Funked Up)
    1:01:42 - 1:16:28 : Give Up The Funk (Tear The Roof Off The Sucker)/Night Of The Thumpasorus Peoples
    1:17:31 - 1:21:29 : Funkin’ For Fun

  • George Orwell: Looking Back on the Spanish War
    https://www.orwellfoundation.com/the-orwell-foundation/orwell/essays-and-other-works/looking-back-on-the-spanish-war

    I have little direct evidence about the atrocities in the Spanish Civil War. I know that some were committed by the Republicans, and far more (they are still continuing) by the Fascists. But what impressed me then, and has impressed me ever since, is that atrocities are believed in or disbelieved in solely on grounds of political predilection. Everyone believes in the atrocities of the enemy and disbelieves in those of his own side, without ever bothering to examine the evidence. Recently I drew up a table of atrocities during the period between 1918 and the present; there was never a year when atrocities were not occurring somewhere or other, and there was hardly a single case when the Left and the Right believed in the same stories simultaneously. And stranger yet, at any moment the situation can suddenly reverse itself and yesterday’s proved-to-the-hilt atrocity story can become a ridiculous lie, merely because the political landscape has changed.

  • Orwell, very well | LeMonde | 08.07.23

    https://www.lemonde.fr/culture/article/2023/07/08/comment-le-xxi-siecle-est-devenu-orwellien_6181089_3246.html

    Sa figure de reporter antitotalitaire et d’écrivain visionnaire est un véritable étendard. Pour beaucoup, Orwell est une vigie, un phare. Sans compter son héritage sans testament que se disputent populistes et anarchistes, conservateurs et progressistes. Une captation politique notamment opérée par une droite politique et médiatique déboussolée par l’effondrement du monde d’hier, qui cherche en George Orwell un support à sa rhétorique réactionnaire.

    il doit se retourner dans son nuage, le Georges, avec ces fans de droite.

    • Face à la réécriture de l’histoire par les éditorialistes nationaux-populistes, il est devenu nécessaire de le rappeler : Orwell n’est pas de droite, mais de gauche. Et n’est ni réactionnaire ni conservateur. Comme en atteste cette réponse sans appel adressée le 15 novembre 1945 à Katherine Marjory, duchesse écossaise d’Atholl, qui l’invitait à un meeting anti­communiste organisé par la Ligue pour la liberté européenne : « Je ne puis m’associer à une organisation essentiellement conservatrice, qui prétend défendre la démocratie en Europe, sans avoir un mot contre l’impérialisme britannique. » N’oubliant pas de préciser avec la plus grande netteté : « J’appartiens à la gauche et c’est en son sein que je dois travailler. » « Le risque avec une icône, c’est de s’attacher ­davantage à sa vie qu’à son œuvre », prévient Jean-Jacques Rosat, philosophe et auteur de Chroniques orwelliennes (Collège de France, 2013), qui a édité et préfacé trois de ses livres en français aux Éditions Agone. Impossible pourtant, avec Orwell, de dissocier sa vie de ses écrits.

      Victime et observateur de l’humiliation sociale

      Eric Arthur Blair est né dans une famille de la petite bourgeoisie britannique, le 25 juin 1903, au Bengale, où son père, Richard Walmesley Blair (1857-1939), s’occupe du ­commerce de l’opium au sein de l’administration coloniale. Sa mère, Ida Mabel Blair (1875-1943), née Limouzin­, était la fille d’un homme d’affaires français installé en Birmanie, propriétaire d’une plantation de teck. Il arrivait à cette femme indépendante et cultivée de prendre sous la dictée les premiers poèmes que son fils, inspiré par William Blake, écrivait dès l’âge de cinq ans, racontera plus tard l’écrivain dans Pourquoi j’écris (1946).

      Le jeune Eric Blair vécut également avec ses deux sœurs, Marjorie (1898-1946) et Avril (1908-1978) et gardera sans doute de l’atmosphère bucolique de ses vacances familiales en Cornouailles­ un goût prononcé pour la pêche et la nature qu’il traduira plus tard sous la forme d’une éthique dans l’une de ses chroniques : « Je pense que c’est en conservant notre amour enfantin pour les arbres, les poissons, les papillons, les crapauds… que l’on rend un peu plus probable la possibilité d’un avenir paisible et décent. » Mais l’auteur relate avant tout une enfance solitaire lors de laquelle il prit l’habitude de s’« inventer des histoires et de converser avec des personnages imaginaires ».

      Scolarisé en Angleterre, il fut très tôt sensible aux différences de classes, tour à tour victime et observateur de l’humiliation sociale. Roué de coups de cravache au collège de St Cyprian’s pour ses incontinences nocturnes, il gardera de cet épisode une profonde blessure, une aversion pour la toute-puissance du pouvoir de la surveillance et plus généralement l’impression de « perdre [son] temps » et de « gâcher [ses] talents » (« Tels, tels étaient nos plaisirs », 1947). Certains biographes ont vu en la personne du directeur de cette école huppée, surnommé « Sambo », autocrate qui favorisait les élèves les plus riches et, écrira Orwell, « menait la vie dure aux plus pauvres doués » dont « les cerveaux étaient considérés comme des mines d’or », les prémisses de Big Brother. À St-Cyprian’s, dans le sud de l’Angleterre, entre sa huitième et sa quatorzième année, Eric Blair fut ainsi sensibilisé au « système de castes » qui divisait les élèves entre la minorité des aristocrates millionnaires, le gros bataillon des bourgeois aisés et, dit-il, « le rebut » dont il faisait partie, notamment composé de fils de fonctionnaires de l’administration impériale.

      Un dominé chez les dominants

      Pensionnaire boursier du prestigieux collège d’Eton, de 1917 à 1921, il découvre et réprouve également le snobisme des public schools, ces écoles privées et prisées des élites qu’il proposera plus tard d’abolir dans Le Lion et la Licorne (1941). C’est toutefois dans ce prestigieux établissement du Berkshire qu’il dévore les auteurs qui feront partie de son panthéon personnel, comme H.G Wells et, bien sûr, Charles Dickens, l’auteur de David Copperfield, dont il fit plus tard l’éloge en forme d’autoportrait, imaginant le visage de l’écrivain derrière ses pages : « C’est le visage d’un homme qui ne cesse de combattre quelque chose, mais qui se bat au grand jour, sans peur, le visage d’un homme animé d’une colère généreuse, écrit-il dans un essai qu’il lui consacrera en 1939, une intelligence libre, un type d’individu également exécré par toutes les petites orthodoxies malodorantes qui se disputent aujourd’hui le contrôle de nos esprits. »
      Eric Blair rompt avec cette précaire méritocratie autoritaire. Sa route scolaire s’arrête et il n’empruntera pas la voie royale qui mène d’ordinaire cette élite à Oxford ou à Cambridge. Mais il gardera, jusque dans les bas-fonds de Paris ou de Londres, l’accent etonien qui marquera à jamais son appartenance à sa classe, même si Orwell est non pas un transfuge, mais un dominé chez les dominants, dirait une certaine sociologie aujourd’hui, un homme capable de circuler entre les mondes, les bourgeois et les prolétaires, les officiers et les ouvriers, les éditeurs et les mineurs.

      Il s’embarque pour la Birmanie en 1922 et devient officier de la police impériale des Indes, avant de démissionner en 1927, horrifié par « les visages gris et apeurés des détenus » et « les fesses zébrées des hommes châtiés à coups de bambous ». Sur le bateau qui le mène vers l’Asie, il prend à nouveau conscience des différences de classes devant le comportement d’un des quartiers-maîtres anglais « détalant comme un rat » afin de dévorer les restes d’un pudding pris illicitement par un steward sur la table d’un passager. Même ces « êtres quasi-divins » apparentés aux officiers ne sont pas épargnés par l’empire de la nécessité. « La stupeur qui me frappa à ce moment-là m’en apprit plus que ne l’aurait fait une demi-­douzaine de brochures socialistes », écrira-t-il dans une de ses chroniques données à Tribune (1947).
      Car l’auteur d’Une histoire birmane pense presque toujours à partir d’une expérience. Le futur Orwell n’est pas un homme de la théorie, ni seulement un faiseur de récit. C’est un écrivain à la pensée éprouvée. Et en Birmanie, les épreuves ne manquent pas. Il en tirera deux nouvelles et son premier roman, Une histoire birmane (1934), récit cinglant, drôle et cruel d’un employé d’une compagnie forestière égaré dans la jungle coloniale. Il assista un jour à une pendaison, qui lui parut « plus atroce que mille assassinats » et après laquelle il ne put jamais pénétrer à l’intérieur d’une prison « sans avoir l’impression que [sa] place était derrière les barreaux plutôt que devant ». Sans doute est-ce dans Comment j’ai tué un éléphant (1936), où le jeune officier relate la façon dont il fut contraint d’abattre un pachyderme pour préserver son statut face à la foule, qu’il décrit le mieux « la vacuité du règne de l’homme blanc en Orient ».

      La Birmanie fut sans doute le baptême de sa conscience européenne blessée. Non pas seulement l’occasion de verser un « sanglot de l’homme blanc » moqué par les néoconservateurs, mais une prise de conscience graduée, suivie d’une critique raisonnée de l’impérialisme et de « toute forme de domination de l’homme par l’homme ».

      Enquêtes en immersion, puis à visage découvert

      Pour en comprendre les ressorts, l’officier rincé par cinq années de service au sein de l’empire a besoin d’effectuer « une véritable plongée ». C’est pourquoi il démissionne en 1927 et rejoint l’Europe où il va vivre, de 1929 à 1931, avec les paumés et les travailleurs paupérisés, les mendiants et les chapardeurs, le prolétariat en haillon des vagabonds et des cueilleurs de houblon. Installé rue du Pot-de-fer à Paris, dans un quartier latin populaire, il devient plongeur dans les cuisines d’un grand hôtel parisien de la rue de Rivoli et en observe la sévère hiérarchie. Lui comme ses pairs sont « astreints à un travail épuisant, qui n’offre aucune perspective d’avenir » et leur « horizon [est] parfaitement bouché ». Ainsi, écrit-il, « le plongeur est l’un des esclaves du monde moderne ». Il poursuit son enquête à Londres, se grime, joue la comédie et dort dans les asiles de nuit avant de partir dans le Kent ramasser le houblon, dans des plantations « où les lois sur le travail des enfants sont outrageusement bafouées », reste toutes les journées débout au point de se « sentir réduit à l’état de véritable loque ». C’est à cette époque qu’il prend son nom de plume et devient George Orwell, du nom d’un fleuve du Suffolk qui se jette dans la mer à cinquante kilomètres de la maison où vivaient ses parents, et publie sous ce pseudonyme

      Dans la dèche à Paris et à Londres (1933).

      Orwell se réapproprie le récit d’immersion, notamment adopté par Jack London dans Le Peuple de l’abîme (1903), qui consiste à partager la vie de ceux que l’on souhaite approcher et même à se faire passer pour un des leurs. Une méthode notamment prolongée par le journaliste allemand Günter Wallraff, l’auteur de Tête de turc (La Découverte, 1985), qui prit l’identité d’un travailleur immigré sans carte de travail et révéla les brimades et l’exploitation dont faisait l’objet cette communauté précarisée en Allemagne. Une approche employée dans d’autres enquêtes menées parmi les SDF et tous « les perdants du meilleur des mondes ». Une manière d’être au plus près des classes populaires, d’en partager les travaux et les jours, témoigner de leur décence ordinaire. Mais sans prétendre pour autant faire partie de leur monde, sans s’illusionner sur cette proximité momentanée. Une démarche qui inspirera également la journaliste française Florence Aubenas qui travailla comme femme de ménage dans les ferrys du Quai de Ouistreham (Éditions de l’Olivier, 2010), titre choisi en référence au Quai de Wigan, que publiera Orwell en 1937.

      Car, après des années à chercher du boulot et parfois à en trouver, notamment comme libraire, mais aussi à vouloir percer dans le monde littéraire avec des romans sans succès, comme La Fille du clergyman (1935) ou Et vive l’aspidistra ! (1936), Orwell repart, cette fois-ci, dans le Lancashire et sa région minière. Toujours pour le compte de son éditeur, Victor Gollancz, qui lui commande, en 1936, une enquête sur la condition de la classe ouvrière et sur les chômeurs du nord de l’Angleterre. Pas de masque ni d’identité d’emprunt cette fois-ci. Orwell enquête deux mois durant à visage découvert. Il descend notamment dans la profondeur des mines de charbon et « découvre l’enfer » de ces cavités à l’air vicié où « rugissent » les machines actionnées par des mineurs qui doivent « rester en permanence à genoux ». Il montre comment « le travail presque surhumain » de ceux d’en bas est « la contrepartie obligée de notre monde d’en haut ».

      La décence ordinaire

      C’est dans Le Quai de Wigan (1937) que George Orwell forge son concept de « common decency », cette propension de l’homme ordinaire à la générosité, au respect, à l’entraide et à la solidarité, particulièrement répandue dans les classes populaires. Non pas une supériorité morale des pauvres, mais « une profonde humanité qu’il n’est pas facile de retrouver ailleurs­ », écrit-il. « Cherchant l’humiliation, il découvre l’humilité », résume le philosophe Bruce Bégout, selon qui la décence ordinaire est, chez Orwell, « le revers de l’apparente indécence publique » des puissants (De la décence ordinaire, Allia, 2019).
      Mais la seconde partie de l’ouvrage révèle un reporter réflexif, un journaliste critique, un observateur engagé à la plume aiguisée. Orwell mène une analyse sans concession de l’avenir du socialisme auquel il restera attaché jusqu’à la fin de sa vie. « Le mouvement socialiste a autre chose à faire que de se transformer en une association de matérialistes dialectiques ; ce qu’il doit être, c’est une ligue des opprimés contre les oppresseurs », écrit-il à l’usage des marxistes s’adonnant au « culte sans réserve de la Russie. » Orwell propose même une alliance par-delà les différences.

      L’écrivain, qui a « reçu une éducation bourgeoise » mais qui était contraint de « vivre avec un revenu d’ouvrier », y explique que « des classes distinctes peuvent et doivent faire front commun ». Tous « ceux qui courbent l’échine devant un patron ou frissonnent à l’idée d’un prochain loyer à payer » doivent « unir leur force », enjoint-il. Ce qui revient à dire que « le petit actionnaire doit tendre la main au manœuvre d’usine, la dactylo au mineur de fond, le maître d’école au mécano ». Une alliance qui, pour beaucoup, reste largement d’actualité, en dépit des changements survenus dans les corps de métiers.
      Une autre conviction s’ancre dès cette expérience fondatrice : « Le socialisme, c’est l’abolition de la tyrannie, aussi bien dans le pays où l’on vit que dans les autres pays. » Or le stalinisme se déploie. Et le fascisme s’étend. En Italie, bien sûr, avec Mussolini. Mais aussi en Angleterre, avec la British Union of Fascists d’Oswald Mosley, qui sera interdite en 1940 et dont le leader sera emprisonné pendant la guerre. En Allemagne, le parti national-­socialiste d’Adolf Hitler répand la terreur d’État depuis 1933. Sans oublier l’Espagne où les Républicains se battent sans le soutien des démocraties française et britannique contre les phalanges franquistes armées par les fascistes et les nazis.

      Le cottage aux animaux

      Marié depuis 1936 à Eileen O’Shaughnessy, une femme de gauche au « visage de chat », Orwell s’installe en couple dans un modeste cottage sans électricité ni salle de bains, s’occupe d’un poulailler et d’un potager entouré de chèvres qu’il trait au petit matin et d’un chien ironiquement appelé « Marx ». Après s’être cherché durant des années, il s’est enfin trouvé. Dans sa vie, son style et ses écrits. Et décide de partir en Espagne. Non seulement pour raconter et témoigner, mais pour « combattre le fascisme ». De passage à Paris, avant de prendre le train pour Barcelone, l’écrivain Henry Miller tente de l’en dissuader. En vain. Lui laissant sa veste en velours qu’Orwell gardera tout au long de son expédition catalane. Il faut dire qu’il en aura besoin, tant le front d’Aragon est, en hiver, balayé par la neige, les vents froids et « le claquement glacé des balles ».

      George Orwell arrive à Barcelone en décembre 1936 et s’engage dans les milices du Parti ouvrier d’unification marxiste (POUM), organisation fondée en 1935 par Andrés Nin qu’il rejoint en raison de sa proximité avec l’Independant Labour Party, auquel Orwell adhère de juin 1938 à septembre 1939. Les drapeaux rouges des communistes, les fanions rouges et noirs des anarchistes qui tournoient dans les rues de Barcelone, les conversations lors desquelles tout le monde se tutoie, les différences sociales qui semblent soudainement abolies, les liesses lors desquelles des militants fraternisent, le grisent.
      Incorporé sur le front d’Aragon, dans la région de Saragosse et de Huesca, où il est nommé caporal, Orwell mène une guerre de tranchée avec de vieux fusils rouillés, guette les troupes ennemies en face de montagnes « grises et plissées comme la peau des éléphants », patrouille dans des « vallées obscures » où « les balles perdues passaient en sifflant comme des bécasseaux ». Le froid, les rats, l’attente. Une nuit, il tient un fasciste dans le viseur de son vieux Mauser. Mais il n’abat pas cette estafette franquiste en raison d’un détail qui interrompt son geste : l’homme tient dans sa main son pantalon. « J’étais venu pour tirer sur des fascistes ; mais un homme qui tient son pantalon n’est pas un fasciste, il est un être humain », écrira-t-il. Quatre mois plus tard, une permission le ramène à Barcelone où l’atmosphère a changé. Les distinctions sociales sont de retour et les divisions politiques éclatent au grand jour. Dans ces journées de mai 1937, la ville n’est plus, à l’image des milices qu’il a intégrées, ce « microcosme de la société sans classe » où « personne ne léchait les bottes à quelqu’un », mais une poudrière où les communistes s’affrontent aux anarchistes et aux poumistes.

      De retour sur le front d’Aragon, une balle fasciste lui traverse la gorge et Orwell échappe presque miraculeusement à la mort. Quand il revient à Barcelone, il découvre que les communistes ont obtenu que le POUM soit interdit par le gouvernement républicain. Ses membres sont ainsi arrêtés et emprisonnés. Les anciens alliés anarchistes et poumistes sont accusés d’espionnage, de trahison et de « complot trotskiste », à l’image du commandant de l’unité de sa milice, Georges Kopp (1903-1951), qui passera dix-huit mois dans les prisons républicaines. Eileen, venue rejoindre son mari et travailler au sein du bureau catalan de l’ILP, lui apprend qu’il est recherché. Orwell se cache pendant trois jours avant de réussir à partir, avec l’aide du consulat britannique.
      Une santé qui se dégrade
      Barcelone, Banuyls, puis Paris, avant de rejoindre le sud de l’Angleterre, « le plus onctueux paysage du monde ». Sur le trajet, une envie, perçue comme une « folie », lui traverse l’esprit : « retourner en Espagne ». Car malgré « l’épouvantable désastre » d’une « guerre politique », cette expérience inoubliable accroît sa « foi » dans la « dignité humaine ». George Orwell restera en quête d’un « trésor », un peu comme les maquisards selon René Char car, dit le poète, celui qui « a épousé la Résistance, a découvert sa vérité ». Orwell cherchera à retrouver cet élan malgré l’effondrement d’une Europe plongée dans de « sombres temps », une expression d’Hannah Arendt (1906-1975) qui estime que « l’histoire des révolutions pourrait être racontée sous la forme d’une parabole comme la légende d’un trésor sans âge qui, dans des circonstances les plus diverses, apparaît brusquement, à l’improviste, et disparaît de nouveau dans d’autres conditions mystérieuses, comme s’il était une fée Morgane ».

      Autant marqué par ce surgissement de la liberté que par la dérive totalitaire de certains révolutionnaires, Orwell a donc regagné une Angleterre plongée dans un « profond sommeil » et dont il craint qu’elle n’en soit arrachée par le vrombissement des bombes. Celles-ci ne tardent pas à tomber. En 1940, il assume pleinement son patriotisme sans renier pour autant son socialisme égalitaire. Et explique pourquoi, malgré son opposition politique aux tories, il a « choisi l’Angleterre », ce qui ne l’empêche pas de tonner contre « ces libéraux à la bouche fleurie qui attendent la fin de la Seconde Guerre mondiale pour toucher tranquillement leur dividende ». Il devient chroniqueur à la BBC, puis pour Tribune, le journal de l’aile gauche du Parti travailliste, et collaborateur de nombreuses revues. Il s’engage dans la Home Guard, organisation combattante composée de civils destinée à protéger le pays contre un potentiel débarquement allemand.

      En 1944, il adopte avec sa femme un fils, Richard Blair, qui préside aujourd’hui la Fondation Orwell et la Orwell society. En 1945, il publie La Ferme des animaux, chez Secker & Warburg, devenu son éditeur depuis les réserves émises par Gollancz sur ses analyses critiques de l’orthodoxie marxiste. Mais Eileen meurt la même année d’un cancer. Désemparé, Orwell se mettra rapidement en quête d’une épouse, notamment pour faire face à l’adversité, car l’avenir de sa paternité est menacé par une santé dégradée depuis qu’une sévère tuberculose a été détectée.

      « Mon erreur fondamentale »

      Ce sera Sonia Brownell (1918-1980), personnalité en vue du milieu littéraire et artistique, qui fut l’assistante de son ami Cyril Connolly à Horizon, la grande revue culturelle de l’époque, avec qui Orwell se marie en 1949, trois mois seulement avant sa mort. La même année paraît le roman 1984, qu’il termine à Barnhill, sur l’île écossaise de Jura, où il s’installe avec son tout jeune fils adoptif Richard. Sa sensibilité au mépris de classe s’aiguise presque jusqu’au dernier souffle et, dans une note du 17 avril rédigée au sanatorium de Cranham, Orwell raille encore la « satiété ronflante », la « sotte assurance » et la « lourdeur repue » des membres des classes huppées dont il entend les voix à l’hôpital. « Pas étonnant que tout le monde nous haïsse autant », conclut-il. Mais, rongé par la maladie, il n’aura pas le temps de connaître l’immense succès de son dernier livre, qu’il hésitait à titrer Le Dernier Homme en Europe, puisqu’il meurt le 21 janvier 1950, d’une hémorragie pulmonaire massive.

      Anticolonialiste dès la fin des années 1920, antitotalitaire dans les années 1930, patriote révolutionnaire dès 1940, socialiste radical et défenseur des libertés politiques jusqu’à sa mort, Orwell est doté d’un sens de l’histoire et d’une pensée de l’événement hors du commun. Une acuité politique remarquable qui le conduisit à être le premier auteur à forger la notion de « guerre froide » : « Il se pourrait que nous n’allions pas vers l’effondrement général, mais vers une époque aussi atrocement stable que les empires esclavagistes de l’Antiquité », écrit-il dans l’une de ses chroniques à Tribune (« La bombe atomique et vous », 9 octobre 1945). L’arme nucléaire contribuerait en effet à renforcer un certain type d’État qui serait « en même temps invincible et dans une situation permanente de « guerre froide » avec ses voisins », poursuit-il.
      Gare, toutefois, à ne pas transformer Orwell en « objet d’une vénération sirupeuse », prévient l’écrivain Christopher Hitchens, qui publia Dans la tête d’Orwell (Saint-Simon, 2019). Orwell n’est pas un saint qui ne se serait jamais trompé. Correspondant londonien à partir de janvier 1941 de Partisan Review, revue politico-littéraire de la gauche radicale américaine, Orwell reconnut notamment ses erreurs d’interprétation lors de la Seconde Guerre mondiale. Dans l’une de ces Lettres de Londres datée de décembre 1944, il admet s’être « grossièrement trompé » jusqu’en 1942. Son « erreur ­fondamentale », explique-t-il, a été de « croire qu’il était impossible de gagner la guerre sans ­démocratiser la manière de la mener ».

      Dès l’automne 1940, en effet, il avait avancé l’idée du patriotisme révolutionnaire, résumée en deux formules : on ne peut espérer faire la révolution un jour en Angleterre si on ne gagne pas la guerre. En effet si Hitler gagne, toute perspective de révolution socialiste disparaît, ce pour quoi il est violemment hostile au pacifisme, notamment celui de ses amis anarchistes. Mais on ne peut espérer gagner la guerre si on ne fait pas la révolution, si une alliance des ouvriers et des classes moyennes ne chasse pas du pouvoir la vieille classe dirigeante britannique.

      Le milieu littéraire boude Orwell

      C’est de la fausseté de cette seconde formule qu’Orwell prend conscience à la fin de l’année 1942. Exemplaire jusque dans la reconnaissance de ses erreurs d’appréciation, il écrit à la fin d’Hommage à la Catalogne, ouvrage qui dessilla les yeux de toute une génération sur la mainmise des staliniens sur la révolution : « Méfiez-vous de ma partialité, des erreurs sur les faits que j’ai pu commettre, et de la déformation qu’entraîne forcément le fait de n’avoir vu qu’un coin des événements. »
      Le succès de George Orwell repose aussi sur l’accessibilité et la limpidité de sa prose. C’est « un écrivain au style clair, précis et direct », observe Bruce Bégout. Loin de l’avant-gardisme de James Joyce ou d’Henry Miller, qu’il admirait et dont il lui arriva d’imiter maladroitement le style dans ses premiers romans, « Orwell écrit sans afféterie ni formalisme littéraire ».

      L’ambition d’Orwell est claire : il s’agit de « faire de l’écriture politique un art », explique-t-il dans Pourquoi j’écris (1946). Ce qui le « pousse au travail », c’est toujours « le sentiment d’une injustice, et l’idée qu’il faut prendre parti ». Pourtant, tient à ajouter Orwell, il lui serait « impossible d’écrire un livre » si cela ne représentait également « une expérience esthétique ».

      Un art du roman « imperméablement fermé à la poésie », lui reproche pourtant Milan Kundera­. Pour l’auteur des Testaments trahis (Gallimard, 1993), non seulement 1984 est un « mauvais roman », car « les situations et les personnages y sont d’une platitude d’affiche », mais cet ouvrage « fait lui-même partie de l’esprit totalitaire » puisqu’il réduit la vie à la politique, en l’occurrence celle d’une société haïe, « en la simple énumération de ses crimes ». Une posture également raillée par le romancier Claude Simon qui, dans le chapitre IV des Géorgiques (Minuit, 1981), réécrit Hommage à la Catalogne mais pour le déconstruire. Plébiscité par le grand public, Orwell fut longtemps boudé par le milieu littéraire, qui lui préférait Kafka ou Zamiatine.

      Mais la grande partie des écrits d’Orwell ne sont pas fictionnels. Ce sont des articles et des essais qui témoignent d’un goût de l’enquête réflexive et de la pensée informée. « Il y a du Montaigne en Orwell, analyse Bruce Bégout, l’idée qu’il faut aller voir les choses par soi-même et que connaître, c’est sortir de soi. » Une littérature de témoignage et d’engagement qui enthousiasme un public fervent. Des écrits qui apportent « un peu d’air frais », pour reprendre le titre d’un roman d’Orwell (1939), et tranchent avec les textes « théoricistes » de la radicalité savante et militante.

      Autre usage important et de plus en plus fréquent d’Orwell, sa critique de la société industrielle, déjà soulignée par Jaime Semprun dans L’Abîme se repeuple, ouvrage paru en 1997 à l’Encyclopédie des nuisances qui publia avec les éditions Ivrea, les Essais, Articles et lettres d’Orwell en France. Une lecture renforcée aujourd’hui par la prise de conscience de l’urgence écologique, au point que certains lecteurs le situent dans la famille des « précurseurs de la décroissance ». Sa sensibilité à la nature est évidente et son aversion contre la « mécanisation de la vie » est flagrante, en effet, comme en atteste sa critique des « lieux de loisirs », bulles de vacances artificielles qu’on imagine à l’époque, où l’« on n’est jamais en présence de végétation sauvage ou d’objets naturels de quelque espèce que ce soit ».

      Récupéré par les conservateurs

      Depuis quelques années, Orwell est loué dans la sphère conservatrice jusqu’à faire l’objet d’une véritable opération de récupération. C’est la notion de « décence ordinaire », cette morale des classes populaires selon lui instinctivement capables de distinguer « ce qui se fait » de « ce qui ne se fait pas », tout comme sa loyauté au gouvernement de son pays pendant la guerre, qui séduit une partie des conservateurs, inspirés par le travail du philosophe Jean-Claude Michéa, qui portraiture Orwell en « anarchiste tory ». Mais aussi parce que l’auteur de 1984 aimait à dire que « parler de liberté n’a de sens qu’à condition que ce soit la liberté de dire aux gens ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre ». Il serait donc l’intellectuel incorrect, l’écrivain anti-« bien-pensant ». Orwell, en effet, savait parfaitement tancer son camp et notamment brocarder les « compagnons de route ».

      Mais son souci des autres désarmerait les adversaires les plus caricaturaux du « politiquement correct » et du « wokisme » qui font de l’antiracisme un nouveau communisme : « quiconque est informé d’un cas avéré de discrimination raciale doit systématiquement le dénoncer », écrivait-il ; son anticolonialisme viscéral, éclos lors de ces cinq années passées dans la police impériale des Indes, désemparerait aujourd’hui les pourfendeurs de la « repentance » postcoloniale : « Nous oublions qu’à l’autre bout du monde il y a toute une série de pays qui attendent d’être libérés » ; son égalitarisme déstabiliserait les modernes rentiers : « Pendant près de trois ans, les squares sont restés ouverts et leur gazon sacré a été piétiné par les enfants de la classe ouvrière, dit-il à propos des grilles qui avaient été retirées des parcs privés pendant la guerre. Une vision à faire grincer les dentiers des boursicoteurs. Si c’est du vol, alors tout ce que je peux dire, c’est : “ Vive le vol !”. »

      Orwell resta indéfectiblement de gauche et anticolonialiste jusqu’à ses derniers jours, européen favorable même à des « États-Unis socialistes d’Europe ». En un mot qui pourrait s’adresser à la droite libérale et autoritaire comme à ses intellectuels affidés : « Personne ne s’attend à ce que le parti tory et ses journaux nous apportent des lumières. »

      Plébiscitée, mais encore largement méconnue, l’œuvre de George Orwell reste d’une grande actualité. Elle invite surtout à faire vivre l’esprit critique, comme il le fit à l’égard de son camp dont il ne cessa de brocarder les facilités de pensée. « Le remplacement d’une orthodoxie par une autre n’est pas nécessairement un progrès. Le véritable ennemi, c’est l’esprit réduit à l’état de gramophone, et cela reste vrai que l’on soit d’accord ou non avec le disque qui passe à un certain moment », ­écrivait-il en 1945. Elle invite aussi ses lecteurs à sortir de l’entre-soi. À l’heure où le séparatisme social s’est particulièrement renforcé, elle affirme avec constance que « rendre les gens conscients de ce qui se passe en dehors de leur propre petit cercle » demeure l’« un des principaux problèmes de notre temps ».

  • Luzi & Berlan, L’écosocialisme du XXIe siècle doit-il s’inspirer de Keynes ou d’Orwell ?, 2020 – Et vous n’avez encore rien vu…
    https://sniadecki.wordpress.com/2023/10/03/luzi-ecosocialisme

    Keynes s’inscrit consciemment dans ce machiavélisme économique, en considérant que l’amour de l’argent « comme objet de possession », de même que les pratiques capitalistes en elles-mêmes « détestables et injustes », doivent être tolérés, étant les moyens les plus efficaces pour résoudre le « problème économique » (la rareté). Et il renvoie à ses petits-enfants la tâche de revenir sur cet immoralisme, une fois ce problème résolu.

    Le raisonnement de Keynes, qui repose sur la distinction entre les besoins absolus et les besoins relatifs, est pourtant sans consistance, puisqu’il méconnait la nature socio-culturelle des besoins. Même Adam Smith savait que le développement du commerce n’était pas une nécessité pour couvrir les besoins absolus

    […]

    À l’opposé de Keynes, qui, faisant de la « résolution du problème économique » une finalité indiscutable, reporte dans un futur indéterminé la contestation de l’infamie des pratiques capitalistes, Orwell suggère qu’un art de vivre conforme à la common decency permettrait aux gens ordinaires d’affronter ce « problème » de façon autonome, en associant la norme du suffisant et un commerce avec la nature se tenant à égale distance de l’impuissance technique et de la volonté de puissance technoscientifique.

    […]

    Emporté par la perspective de l’abondance, Keynes est indifférent au « chômage technologique », pour lui un effet collatéral transitoire. Cette perspective lui permet également de taire les conditions du travail industriel, les conséquences culturelles et politiques de la division technique du travail (pourtant déjà analysées par Adam Smith, Tocqueville et Marx), de même que celles des perfectionnements du machinisme. La connaissance de ces conditions de travail, Orwell la déduit du partage concret de celles des mineurs de Wigan. Et le machinisme lui semble, plutôt que de les délivrer de la nécessité, rendre les humains dépendants de macro-systèmes technologiques (et de leurs concepteurs) et les réduire progressivement « à quelque chose qui tiendrait du cerveau dans un bocal ».

    Les réflexions d’Orwell prolongent les intuitions de Rousseau sur le machinisme :

    « Plus nos outils sont ingénieux, plus nos organes deviennent grossiers et maladroits ; à force de rassembler des machines autour de nous, nous n’en trouvons plus en nous-mêmes [des capacités]. »

    #économie #socialisme #capitalisme #Keynes #Orwell #George_Orwell #Aurélien_Berlan #Jacques_Luzi #autonomie

  • George Grosz - PARTAGE NOIR
    https://www.partage-noir.fr/george-grosz

    George #Grosz est sans doute le #dessinateur qui a le mieux pressenti l’arrivée du nazisme en Allemagne ; à tel point que, malgré la violence de son graphisme, ses dessins illustrent régulièrement les dossiers, les documents, voire même les manuels scolaires traitant de l’Allemagne pré-hitlérienne.

  • #Emeutes_urbaines : « Ce qu’elles révèlent, ce n’est pas tant l’échec de la #politique de la #ville que celui de toutes les #politiques_publiques »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/06/emeutes-urbaines-ce-qu-elles-relevent-ce-n-est-pas-tant-l-echec-de-la-politi

    Depuis le début des années 1980, les vagues émeutières embrasant les quartiers populaires s’accompagnent de controverses interprétatives enflammées dans les médias. Les explications proposées ont varié au fil du temps, mais un argument traverse les décennies qui semble faire consensus chez tous les commentateurs : l’émeute marquerait l’échec de la politique de la ville. La politique ainsi mise en cause a pourtant connu d’importantes évolutions au cours des quarante dernières années, le plus souvent à la suite d’épisodes émeutiers. Si échec de la politique de la ville il y a, ce n’est pas la même politique qui a échoué au début des années 1990, en 2005 ou aujourd’hui.

    Le jugement d’échec semble d’autant plus incontestable en 2023 que l’Etat aurait mobilisé, depuis une quinzaine d’années, des budgets considérables pour les quartiers populaires. Les annonces récurrentes d’un nouveau « plan banlieue » ont pu donner crédit à cette idée d’une politique de la ville richement dotée. Bien que ces annonces soient le plus souvent restées des annonces, elles ont ouvert la voie à la dénonciation des « milliards pour les banlieues », au profit de populations qui ne le mériteraient pas.

    Portée par des entrepreneurs de fracture sociale, cette critique a été d’autant plus ravageuse qu’elle s’est prolongée par une mise en concurrence des souffrances territoriales, opposant les quartiers défavorisés des métropoles et une « France périphérique » aux contours flous mais dont la couleur est claire. Les premiers bénéficieraient d’une discrimination positive, au détriment des villes moyennes, des espaces périurbains et des territoires ruraux, dont les populations sont pourtant durement affectées par les recompositions industrielles et la précarisation de l’emploi, les politiques d’austérité et les fermetures de services publics, ainsi que par l’augmentation du coût de la vie.

    La critique de l’inefficacité se mue alors en une mise en cause de la légitimité même de la politique de la ville, illustrée par cette formule qui fait florès à l’extrême droite : on déshabille la « France périphérique » pour habiller celle qui vit de l’autre côté du périph.

    Moins de 1 % du budget de l’Etat

    Il faut pourtant le répéter inlassablement : les quartiers qui cumulent toutes les difficultés sociales ne bénéficient pas d’un traitement de faveur. Les crédits de la politique de la ville ont toujours été limités, inférieurs à 1 % du budget de l’Etat. Comme l’ont montré de nombreux travaux de recherche et d’évaluation ainsi que plusieurs rapports de la Cour des comptes, les moyens alloués au titre de cette politique ne suffisent pas à compenser l’inégale allocation des budgets des autres politiques publiques (éducation, emploi, santé, sécurité…) qui s’opère systématiquement au détriment des quartiers dits « prioritaires » et de leurs habitants.

    Les seuls milliards dont ces quartiers ont vu la couleur sont ceux de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), qui ne proviennent que marginalement de l’Etat : sa contribution se limite à 10 % du budget de l’agence, loin derrière Action Logement (70 %) et l’Union sociale pour l’habitat (20 %). Ce sont donc les cotisations des employeurs pour le logement de leurs salariés et les contributions du monde HLM (habitation à loyer modéré) qui financent la rénovation urbaine et non les impôts des Français.

    Bien qu’infondée, la critique des « milliards pour la banlieue » n’a pas été sans effet, conduisant les gouvernants à désinvestir la politique de la ville par crainte de susciter le ressentiment d’une fraction importante de l’électorat populaire sensible aux discours du Rassemblement national sur l’abandon de la France périphérique. Cette crainte a été amplifiée par le mouvement des « gilets jaunes », à la suite duquel la politique de la ville et les quartiers qu’elle cible ont disparu de l’agenda politique.

    La « séquence banlieue » ouverte lundi 26 juin par Emmanuel Macron à Marseille visait à répondre aux maires de banlieue et aux acteurs de terrain qui, depuis l’enterrement du rapport Borloo (dont il n’est pas inutile de rappeler aujourd’hui le sous-titre : « pour une réconciliation nationale »), critiquent ce désintérêt de l’exécutif pour les quartiers populaires.

    Défiance généralisée

    Le grand débat organisé dans la cité de la Busserine devait mettre en scène un président à l’écoute, mobilisant des moyens exceptionnels pour l’égalité des chances dans des quartiers nord délaissés par les élus locaux. La séquence se prolongeait le lendemain à Grigny (Essonne), avec le lancement des célébrations des 20 ans de l’ANRU, dont les réalisations ont produit des transformations visibles du cadre de vie de centaines de quartiers, à défaut de leur situation sociale. Elle devait se conclure à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), avec un comité interministériel des villes (CIV) maintes fois repoussé, où allaient enfin être annoncées les mesures du plan Quartiers 2030 concocté par Olivier Klein.

    La séquence était bien préparée mais rien ne s’est passé comme prévu. S’il a permis au président de renouer avec un exercice qu’il affectionne, le grand débat a surtout révélé l’exaspération des habitants, l’épuisement des acteurs associatifs et la défiance généralisée à l’égard du pouvoir politique. L’explosion de colère qui a suivi la mort du jeune Nahel a éclipsé les images de vingt ans de rénovation urbaine, et contraint le gouvernement à rapatrier à Matignon un CIV dont les annonces ont été repoussées à une date indéterminée. Ce report peut être utile s’il amène le gouvernement à réviser sa copie, pour envisager des réformes structurelles plutôt qu’un catalogue de programmes exceptionnels et de mesures expérimentales.

    Car ce que révèlent les #émeutes, ce n’est pas tant l’échec de la #politique_de_la_ville que celui de toutes les politiques publiques qui laissent se déployer la #ségrégation, la #stigmatisation et les #discriminations, voire y contribuent. A cet égard, on ne peut que regretter l’abandon en mai dernier du plan de #mixité_scolaire envisagé par Pap Ndiaye. Mais ce que rappellent d’abord les émeutes, c’est l’état plus que dégradé des relations entre la #police et les #populations_racisées des #quartiers_populaires, et la nécessité d’une transformation profonde des #pratiques_policières. Même si elle est politiquement difficile, l’ouverture de ce chantier s’impose, tant elle conditionne la #réconciliation_nationale.

    by https://twitter.com/renaud_epstein

    • Fabien Jobard, politiste : « Le législateur a consacré l’ascendant de la police sur la jeunesse postcoloniale »
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/05/fabien-jobard-politiste-le-legislateur-a-consacre-l-ascendant-de-la-police-s

      Le spécialiste des questions policières revient, dans un entretien au « Monde », sur les spécificités françaises dans les rapports entre les forces de l’ordre et la jeunesse des quartiers populaires issue de l’immigration. Il éclaire le contexte dans lequel prennent place les émeutes ayant suivi la mort de Nahel M. à Nanterre.

      Directeur de recherche au CNRS, Fabien Jobard est politiste, chercheur au Centre de recherche sociologique sur le droit et les institutions pénales. Il est l’auteur, avec le sociologue Olivier Fillieule, de Politiques du désordre. La police des manifestations en France (Seuil, 2020), avec Daniel Schönpflug, de Politische Gewalt im urbanen Raum (« violence politique en milieu urbain », Gruyter, 2019, non traduit), avec Jérémie Gauthier, de Police : questions sensibles (Presses universitaires de France, 2018) et, avec Jacques de Maillard, de Sociologie de la police. Politiques, organisations, réformes (Presses universitaires de France, 2015). Directeur du Groupe européen de recherches sur les normativités (GERN), Fabien Jobard publie en septembre une bande dessinée réalisée avec Florent Calvez : de la création des bobbys anglais aux dystopies policières contemporaines, Global Police. La question policière à travers le monde et l’histoire (Delcourt/Encrage) interroge la nature et le devenir de nos polices.

      Les événements de Nanterre, qu’il s’agisse de la mort de Nahel M. ou des émeutes qui ont suivi, montrent à quel point les relations entre la police et les jeunes des quartiers populaires sont dégradées. S’agit-il d’une spécificité française ?

      Les événements auxquels nous avons assisté ces derniers jours ne sont pas propres à la France : on en observe de comparables aux Etats-Unis, en Belgique, aux Pays-Bas – parfois au Royaume-Uni ou en Suède. Or, Suède mise à part, ces pays ont en commun une histoire contemporaine marquée soit par la prégnance de l’esclavage des populations noires, soit par la présence d’une population issue des territoires coloniaux. Le contraste avec l’Allemagne est frappant : dans ce pays qui a été privé de ses colonies africaines par le traité de Versailles, en 1919, les tensions avec les populations minoritaires existent mais elles sont bien moins fréquentes et bien moins intenses...

      La suite #paywall

    • De quelle manière cette histoire coloniale française pèse-t-elle ?

      [Fabien Jobard ] La guerre d’Algérie et la colonisation sont à mille lieues des préoccupations des policières et policiers de notre pays : ce ne sont pas eux, individuellement, qui portent cette histoire et la font perdurer. Savoir si les policiers sont racistes ou non n’aide d’ailleurs pas vraiment à comprendre ce qui se joue. Ce qui fait que la police est un lieu de perpétuation du rapport colonial sur notre sol est la collision de deux phénomènes historiques.

      Le premier est le fait que les populations issues des territoires nord-africains ont été installées à la va-vite dans des grands ensembles de nos banlieues. Ces villes étaient sous-administrées – pas ou presque pas de police, quelques brigades de gendarmerie, des commissariats isolés. A cette époque, la police faisait avec ce qu’elle avait et, de surcroît, recrutait peu d’effectifs nouveaux. La doctrine et les chefs disponibles étaient donc ceux des années 1950-1960, ceux de la #guerre_en_métropole, lorsque la gestion des populations nord-africaines reposait sur la mise à distance, le contrôle, l’imposition d’une obligation de déférence permanente – bref, la subordination sous férule policière. Dans un tel schéma, le #contrôle_d’identité avec fouille est central : c’est l’instrument majeur d’imposition de l’autorité policière comme préalable non négociable.

      Une telle gestion des populations subalternes aurait pu s’éteindre peu à peu, silencieusement emportée par la croissance et le renouvellement des générations, tant du côté de la police que du côté de la jeunesse. Mais au milieu des années 1970, la France s’est engagée sur une voie économique singulière, celle de la #désindustrialisation – et c’est le second phénomène historique décisif. De 1975 à nos jours, plus de 2 millions d’emplois industriels se sont évaporés : la France est devenue un pays de services et cette mutation a pénalisé en tout premier lieu les jeunes hommes sortis du système scolaire sans qualification – les jeunes femmes s’en sortent mieux. Or, dans quels rangs se recrutent principalement ces jeunes hommes ? Dans ceux des familles les moins favorisées, les moins dotées – les familles immigrées.

      C’est un contraste marquant avec la trajectoire historique allemande : l’Allemagne a protégé son industrie. Lorsque les jeunes sortent du système scolaire sans qualification – le système allemand est bien plus soucieux de la formation aux métiers manuels –, une place les attend à l’usine, sur la chaîne, à l’atelier. Outre-Rhin, l’industrie parvient donc à absorber ces « jeunes à problèmes », comme on dit là-bas, comme autrefois [ces saloperies de, ndc] Renault et Citroën absorbaient nos blousons noirs.

      En France, dès le milieu des années 1970, une #population_oisive essentiellement formée des jeunes issus de l’immigration coloniale s’est constituée au pied des tours. Cette jeunesse est disponible aux tensions avec la police : de #Toumi_Djaidja, fils de harki victime, en 1983, un soir de ramadan, aux Minguettes, d’un tir policier dans le ventre alors qu’il tentait de venir en aide à un de ses amis aux prises avec un chien policier, à Nahel, à Nanterre, en 2023, les relations sont explosives. La dynamique socio-économique française a fourni à la police une clientèle, essentiellement issue des populations coloniales, qui est enfermée, avec elle, dans un face-à-face mortifère et sans issue. [une bien trop grande proximité, ndc]

      Les pratiques de la police sont encadrées par le droit. Quelle a été l’évolution des textes depuis les années 1970 ?

      Sur ce plan, il est frappant de constater que le droit, notre droit républicain, n’a pas corrigé les pratiques mais les a, au contraire, garanties. Je reprends les contrôles d’identité. Ces pratiques se développaient de manière assez sauvage : le droit positif ne les prévoyait pas. En février 1981, le gouvernement de Raymond Barre a fait adopter une loi décriée par la gauche qui a « créé » les contrôles d’identité (art. 78-2 du code de procédure pénale). En réalité, cette loi consacre ces contrôles : elle « couvre », en quelque sorte, des pratiques dont nos recherches ont démontré qu’elles visent essentiellement la jeunesse postcoloniale. Ce geste, que la gauche n’a pas abrogé, est significatif d’une dynamique qui s’est enclenchée dans d’autres domaines de l’action policière : les pratiques et les perceptions policières ont été relayées par les politiques publiques.

      Quelles étaient ces politiques publiques ?

      A partir des années 1990, une décennie marquée par des émeutes urbaines localisées engendrées par des faits policiers mortels (ou la rumeur de tels faits), deux choix ont été très explicitement arrêtés. Le premier, c’est le renforcement de l’arsenal pénal contre les #mineurs auteurs de faits de #délinquance_de_voie_publique : les circulaires de politique pénale, puis la loi elle-même, encouragent la fermeté à l’égard de ces jeunes délinquants qui se recrutent essentiellement parmi les jeunes de cité, ce qui vient rétrospectivement légitimer l’action policière à leur égard. La politique pénale est telle qu’aujourd’hui le législateur offre aux policiers la possibilité de sanctionner eux-mêmes des délits par une amende dite « délictuelle » . Or, ces délits étant ceux habituellement commis par les jeunes de cité, ce pouvoir de sanction exorbitant confié par le législateur à la police consacre son ascendant sur cette fraction de la jeunesse.

      La seconde trajectoire de politique publique est l’abandon de ce que l’on appelait, il n’y a pas si longtemps encore, les politiques d’accompagnement social de la délinquance. Pour des raisons à la fois idéologiques et budgétaires, les gouvernements successifs ont concentré la dépense publique sur les forces de l’ordre (15 milliards d’euros et 8 500 agents supplémentaires sont prévus dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur du 24 janvier 2023) et ont privé les communes et les départements de fonds permettant une action sociale portée par les éducateurs spécialisés, les éducateurs de rue, les travailleurs sociaux. Même les emplois précaires – les emplois-jeunes puis les emplois aidés – ont été supprimés, les premiers sous le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, les seconds sous celui d’Edouard Philippe. J’insiste sur la dimension budgétaire de ces choix : en Allemagne, les communes et l’Etat disposent encore de moyens financiers pour l’action sociale.

      La France pourrait-elle s’inspirer des politiques mises en place en Allemagne ?

      L’Allemagne a perdu ses colonies il y a un siècle, elle n’a pas fait le choix de se défaire de son industrie, elle n’a pas renoncé au social au profit du sécuritaire. Et le caractère décentralisé et régional de la police, qui était une des conditions de la sortie du nazisme en 1945-1949, a fait que « la » police existe à peine en tant qu’institution et, surtout, en tant que groupe d’intérêts. Les syndicats policiers n’y sont pas engagés dans un défi permanent lancé aux politiques et aux magistrats, facteur considérable d’apaisement des passions policières et de discipline dans les rangs. Plus qu’un modèle dont on importerait telle ou telle recette, l’Allemagne offre plutôt un horizon dans lequel s’inscrit la question policière.
      Cette question ne pourra pas être dénouée seule : libérer la police française de sa colonialité ne passe pas par je ne sais quelle réforme isolée – type « revenir-à-la-police-de-proximité » – mais par l’investissement massif dans la formation, l’emploi et l’accompagnement social d’une jeunesse que les gouvernements successifs ont bien lâchement confiée aux soins presque exclusifs de la police.

      heureusement qu’il y a une gauche qui veut libérer la police ah ah ah

    • #Didier_Fassin : en France, « la #police a gagné la #bataille_idéologique » | Mediapart
      https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/070723/didier-fassin-en-france-la-police-gagne-la-bataille-ideologique

      #post_colonialisme

      DidierDidier Fassin est professeur au Collège de France, directeur d’études à l’#EHESS, et enseigne également à l’Institute for Advanced Study de #Princeton.

      Il a publié aux éditions du Seuil La Force de l’ordre. Une anthropologie de la police des quartiers, dans lequel il étudiait des brigades anticriminalité (BAC) dont les insignes exhibaient les barres d’une cité prise dans la lunette de visée d’un fusil, des meutes de loups devant des tours d’habitation, une panthère déchirant de ses griffes un quartier plongé dans l’obscurité ou encore une araignée emprisonnant dans sa toile un ensemble d’immeubles. Il y observait des pratiques relevant souvent d’une logique « #postcoloniale ».

      Pour Mediapart, il revient sur les situations avant – et les mobilisations après – la mort de #George_Floyd aux États-Unis en 2020 et celle de #Nahel M. en 2023.

      Mediapart : Dans La Force de l’ordre. Une anthropologie de la police des quartiers, écrit à partir d’une enquête inédite menée pendant 15 mois, entre 2005 et 2007, avec une BAC de la région parisienne, vous dressiez un constat catastrophique de l’action des BAC dans les banlieues, qui relevait davantage d’un processus de chasse dans une « jungle » que d’une opération de maintien de l’ordre ou de lutte contre la délinquance. On a pu vous dire alors que cette unité n’était pas représentative de la police française : ce qui se passe aujourd’hui vous ferait-il dire qu’elle était plutôt préfigurative de tendances racistes de la police française ? 

      Didier Fassin : Je ne généraliserais pas de la sorte pour ce qui est de tous les policiers. Lorsque mon livre est sorti, on a dit en effet que j’avais dû étudier des unités très atypiques, car j’indiquais la sympathie que les agents avec lesquels je patrouillais manifestaient ouvertement à l’égard de Jean-Marie Le Pen. Six ans plus tard, en 2017, on découvrait que les deux tiers des policiers en activité avaient voté pour sa fille au premier tour de l’élection présidentielle, soit plus de trois fois plus que la population générale.

      Mais plutôt que le racisme individuel, ce qui m’intéresse, et m’inquiète, c’est le racisme institutionnel, qu’il soit celui de la police en général, dont on voit qu’elle ne sanctionne pas les pratiques violentes et discriminatoires de ses agents, ou de certains syndicats en particulier, dont on vient de lire qu’ils considéraient les jeunes des quartiers difficiles comme des « nuisibles » qu’il faut mettre « hors d’état de nuire ».

      Dans cette perspective, je pense que les choses se sont encore aggravées depuis que j’ai conduit mon enquête, et c’est largement la responsabilité des gouvernements successifs qui, d’une part, n’ont pas cessé de céder devant les exigences de l’institution et des syndicats, et, d’autre part, n’ont jamais tenté d’engager de réforme.

    • Nayra : « Vous leur avez craché dessus et vous leur demandez de se calmer ? »
      Après la mort de Nahel, tué à bout portant par un policier à Nanterre le 27 juin 2023, une partie des quartiers populaires s’embrase. Dans le fracas, des adolescents disent une réalité ancienne de ségrégation et de racisme. #Mediapart donne la parole aux #rappeuses et aux #rappeurs qui se tiennent du côté de ces #révoltes. Épisode 1 : #Nayra, rappeuse de #Saint-Denis.

    • super interview aussi d’un spécialiste (anthropologue, U. Saint-denis) qui recence les émeutes (dans une liste quasi exhaustive) partout ds le monde depuis 2007.

      #au_poste par l’excellent @davduf

      https://www.auposte.fr/le-soulevement-des-quartiers-ce-quil-dit-et-ce-quon-ne-dit-pas

      pas encore écouté ceux-là par contre :

      https://www.auposte.fr/soulevement-2023-leloge-de-lemeute-avec-jacques-deschamps-philosophe

      https://www.auposte.fr/soulevement-2023-vers-une-secession-des-quartiers-populaires-rencontre-avec-

    • De la répression coloniale aux violences policières. @survie
      https://survie.org/billets-d-afrique/2021/303-dec-2020-janv-2021/article/de-la-repression-coloniale-aux-violences-policieres

      Au moment où la France est traversée par une série de révoltes à la suite du meurtre de Nahel par la police, et pour alimenter les reflexions sur la colonialité de la police française, nous republions cet article de Florian Bobin, étudiant-chercheur en Histoire africaine, paru en janvier 2021 dans Billets d’Afrique. Il a été publié préalablement en anglais dans Africa is A Country puis dans Jacobin , et en français dans la revue Contretemps. Il retrace l’histoire de la structuration de la #police_française, au service des intérêts esclavagistes, colonialistes puis néocolonialistes. Il montre la continuité de cette histoire avec la culture et les pratiques actuelles des forces de l’ordre en France, notamment vis-à-vis des jeunes Africains et Afro-descendants, mais aussi de celles de ses anciennes colonies africaines.

    • Didier Fassin : en France, « la police a gagné la bataille idéologique »

      Pour George Floyd, toute la société s’était mobilisée, il y avait eu des manifestations dans tout le pays. Ça a été un choc majeur. Pour Nahel, seuls les quartiers populaires ont bougé. Le lendemain, on ne parlait plus que de désordres urbains et, le surlendemain, de l’incendie de la maison d’un maire.

      https://justpaste.it/9hjxo

      #police #quartiers_populaires

  • #Kimberly_Jones sur les révoltes aux Etats-Unis après la mort de #George_Floyd

    “When they say: ’Why do you burn down the community, why do you burn down your own neighborhood?’. It’s not ours! We don’t own anything. There is a social contract that we all have, whether you steal or I steal, then the person who has the authority comes in and they fix the situation. But the person who fixes the situation is killing us! So the social contract is broken. And if the social contract is broken what a fuck do I give a shit about burning a fucking football hall of fame, about burning the fucking Target? You broke the contract. When you kill us in the street and you give a fuck. You broke the contract for 400 years, we played your game and built your wealth.”

    https://twitter.com/Djame_/status/1674345275786240002

    https://www.youtube.com/watch?v=3QV3iOBcgjo

    #contrat_social #USA #Etats-Unis

    In the meantime, en France :
    Pourquoi les #services_publics sont pris pour #cible
    https://seenthis.net/messages/1008149

    • Vous avez dit « Contrat social » ?

      Le « Contrat social » n’est pas une vaine appellation car il voudrait que l’on fasse société en concédant de façon tacite à l’Etat la mise de notre liberté individuelle au service de la Liberté collective et du Bien commun par l’acceptation de la Constitution, des Lois et de la collecte des Impôts.

      En échange, l’Etat s’engage à respecter la Déclaration des droits de l’Homme, la Constitution, les Lois, le Parlement... Il doit aussi garantir la sûreté des personnes, les libertés individuelles et l’équité entre citoyens. Enfin, l’Etat doit défendre le bien et l’avenir collectif avant les biens individuels.

      Que devient le Contrat social, lorsque l’Etat et/ou ses représentants élus ou non bafouent la Constitution, les Lois, le Parlement ou détournent l’impôt du bien commun vers le bien particulier ?

      Que devient le Contrat social, lorsque l’Etat défend les intérêts particuliers au détriment de l’intérêt et de l’avenir collectif ?

      Que devient le Contrat social, lorsque l’Etat tolère, cautionne, organise la discrimination des citoyens selon leur origine sexuelle, ethnique, sociale, religieuse ?

      Que devient le Contrat social, lorsque l’Etat empêche les libertés individuelles comme celles de s’exprimer, circuler, manifester ou grèver ?

      Que devient le Contrat social, lorsque son bras armé (Police ou Armée) dépositaire pour lui de la « violence légitime » harcèle, emprisonne, mutile ou tue des citoyens sans motif « légitime » ?

      https://blogs.mediapart.fr/laurent-thines/blog/010723/vous-avez-dit-contrat-social

    • Le chantage aux parents est un abus de pouvoir !
      https://diacritik.com/2023/07/02/le-chantage-aux-parents-est-un-abus-de-pouvoir

      Il y a eu des paroles prudentes des politiques car il y a eu des images, glaçantes. Impossible de mentir, de répéter des éléments de langage, de détourner l’attention. Nos regards sont braqués sur une réalité épouvantable. Nahel, un jeune homme de 17 ans, un enfant, est mort une arme policière sur la tempe pour « refus d’obtempérer ». Pourquoi ne s’est-il pas arrêté ? Peut-être moins parce qu’il conduisait sans permis que parce qu’il a eu peur pour sa vie. Et si telle a été sa pensée, il a eu raison de s’y fier. Cédric Chouviat s’était arrêté ; on connaît la conséquence. Et il y a tous les autres, des morts sans deuil possible. Il est déjà impossible de se représenter l’absence d’un être cher mort dans un accident (au sens étymologique de « ce qui arrive par hasard ») alors dans un contexte de contrôle routier, quand on sait la responsabilité politique d’une action policière volontairement meurtrière, on imagine la sidération de la mère de Nahel, dont ils ont brisé les lendemains et le cœur. On sait que c’est une balle qui a tué, que la balle a atteint le corps de l’enfant parce qu’elle a été propulsée par la gâchette dont le doigt posé dessus appartient à un homme qui avait le pouvoir de ne pas en faire usage. La mort de Nahel aurait pu ne pas être, c’est ce qui la rend si insupportable, révoltante.

      Donc ceux qui subissent quotidiennement en silence depuis trop longtemps sortent, explosent tout et, si saccager un Conforama ou voler un jogging de marque a peu à voir avec la réparation morale, ça représente une expression de la révolte, hier encore contenue mais bouillante. Car il faut dire la colère, immense, et rarement la colère est raisonnable, mesurée, tempérée. Ça explose tout. Même des écoles, des bibliothèques, des commerces artisanaux. Des lieux essentiels parce qu’au service des autres, précieux parce que de plus en plus rares. Des lieux où des gens inoffensifs échangent chaque jour leur force de travail contre un salaire qui permet de s’offrir une vie correcte. Cela pourrait être dit par les politiques quand ils dénoncent une forme de violence. Violence qu’ils ne peuvent par ailleurs pas ignorer, puisqu’elle bout depuis longtemps sous le couvercle remuant sur lequel ils sont assis. Pas un mot, donc. Pas une pensée pour une vraie belle société bien ordonnée et partagée par tous. Retour aux éléments de langage droitiers qui en « appellent à la responsabilité des parents ». Désigner des responsables et procéder au chantage (amendes voire risque d’emprisonnement, stage de responsabilisation, TIG etc), voilà leur méthode. C’est à ces politiques qu’il faudrait proposer un stage de responsabilisation.

      J’ai enseigné dix ans dont cinq en banlieue parisienne. Je n’y ai rencontré que des parents d’élèves responsables et des enseignants qui faisaient avec les moyens que l’État donne à ses collèges et lycées c’est-à-dire des moyens du bord, des moyens de clochard. Les élèves savaient très bien que les places dans cette société verrouillée sont chères. Ils savaient très bien qu’il n’y en avait pas pour tout le monde, qu’ils étaient servis les derniers, en témoignait l’état délabré de leur établissement construit il y avait à peine dix ans mais déjà vétuste tant les matériaux utilisés étaient de pacotille. Notre excellence pédagogique et notre écoute n’y changeaient rien. C’était dans le fond une bonne nouvelle, une preuve que ces enfants étaient des citoyens parfaitement lucides, plus éclairés que les politiques en poste.

      Je me souviens d’une enfant de 13 ans qui venait en classe le cartable vide – et peut-être le ventre aussi. Mes encouragements, mes tentatives de dialogue la laissaient indifférente. En tant que professeure principale, j’avais la charge de proposer un rendez-vous à ses parents. Je rencontrai la mère à qui j’expliquais la situation de la fille, les dangers de la déscolarisation. Je peux aisément me rappeler mes mots, auxquels je crois et tiens toujours même si je n’enseigne plus, ayant démissionné en partie pour les raisons évoquées ici. La place d’une enfant de 13 ans est à l’école parce que rien d’autre ne compte à cet âge que d’apprendre et de découvrir le monde grâce au savoir (j’avais utilisée une formulation moins pompeuse). Et je me souviens m’être détestée ensuite en disant à cette mère : à 13 ans, on se croit en capacité de vivre comme un adulte mais la réalité c’est que ces élèves sont des bébés, ils ont besoin que leurs parents les encouragent à croire à l’école et en eux-mêmes avant tout. Je me suis détestée dans cette posture que je trouvais prétentieuse mais que je n’avais pu réfréner, lancée dans un discours de prévention que je croyais utile. Après quoi, la maman s’est mise à raconter. La vie seule avec sa fille, le frigo vide la moitié du mois, les retards de facture, les crédits, ses absences au domicile parce qu’elle n’avait pas eu d’autre choix que d’acheter une licence de taxi et de travailler la nuit pour espérer des jours meilleurs pour elle et sa fille. Elle avait un regard coupable quand j’étais sans voix devant cette leçon de vie de maman responsable. Elle rêvait de jours meilleurs pour elles, je lui promettais que les enseignants veilleraient sur son enfant. Lors du conseil de classe, j’exposai la situation du parent pour expliquer celle de l’élève. La direction proposait un rendez-vous avec l’assistante sociale. Mais l’on ne soutenait personne sérieusement avec un demi-poste d’assistante sociale, présente une demi-journée par semaine et sans moyens à disposition. Notre collège, comme tous les autres de la région compartimentés au-delà du périphérique, était fréquenté par des centaines d’enfants dont les parents responsables se démenaient comme ils pouvaient pour parer à l’urgence du quotidien, qui n’attend pas. Ils pouvaient être absents, oui, pour certains. Pas irresponsables.

      Si les politiques veulent exiger des parents qu’ils soient plus présents, qu’ils prennent leurs responsabilités pour permettre que le travail paye, que l’école n’ait plus pour fonction de reproduire les inégalités sociales, que joindre un service public ne soit plus un calvaire, que trouver un médecin ne soit pas impossible, qu’habiter en banlieue ne se résume pas un logement en carton, que postuler à un emploi ne soit pas l’occasion d’une discrimination ou une humiliation de plus, que descendre dans la rue ne soit pas un risque pour sa vie. Quand les politiques auront pris ces responsabilités-là, ils n’auront nul besoin de recourir au chantage, une méthode illégale, réservée aux escrocs.

  • Pourquoi les #services_publics sont pris pour #cible

    Médiathèques, écoles ou centres sociaux ont été pris pour cibles dans la nuit du 28 au 29 juin dans différentes villes de France. À l’éternelle question de savoir pourquoi, les sciences sociales apportent des réponses de plus en plus précises depuis les émeutes de 2005.

    À chaque affrontement entre forces de l’ordre et jeunes des #quartiers_populaires, après chaque nuit de #soulèvement_urbain, une question revient parmi les observateurs mais aussi les habitant·es : pourquoi s’en prendre aux #équipements_publics qui offrent encore quelques #services sur des territoires le plus souvent déshérités en la matière ?

    Derrière cette interrogation se loge aussi une question plus souterraine : qu’y a-t-il dans la tête des #jeunes qui affrontent la police, mettent le feu ou défoncent des vitrines ? Les sciences sociales ont largement travaillé la question, particulièrement depuis les émeutes de 2005, et montrent qu’il est impossible de voir dans ces gestes le simple #nihilisme, voire le #banditisme auxquels certaines voix voudraient les réduire.

    Une réponse préliminaire à la question oblige à commencer par passer au tamis ce que signifient « #services » ou « #équipements » publics dans un contexte de #révoltes et de #tensions_urbaines. S’en prendre à un commissariat au lendemain du meurtre d’un adolescent par un policier, ou même à une mairie qui a autorité sur une partie des forces de l’ordre, n’a pas nécessairement la même signification que s’en prendre à une école, un CCAS (centre communal d’action sociale), une salle des fêtes ou une bibliothèque...

    Un second préliminaire contraint aussi de rester prudent, au-delà même de la nature des institutions visées, sur ce qu’elles peuvent représenter, et dont la signification peut rester opaque ou confuse. Un des jeunes ayant participé aux ateliers d’écriture organisés par l’écrivain et éducateur Joseph Ponthus dans une cité de Nanterre affirmait ainsi, à propos des émeutes de 2005 : « On a commencé par discuter de ce qu’il fallait pas brûler. Pas les voitures des gens, pas l’école, pas le centre commercial. On voulait s’attaquer à l’État. » De manière symptomatique, alors même que la volonté de s’en prendre à l’État est affirmée, l’école, pourtant l’institution publique qui maille l’ensemble du territoire, est mise de côté…

    Cela dit, et bien qu’il soit encore trop tôt pour mesurer l’ampleur du soulèvement actuel et répertorier ou cartographier précisément ce à quoi il s’attaque, il semble bien que les #équipements_publics soient particulièrement visés.

    Le seul ministère de l’éducation nationale a ainsi dénombré jeudi « une cinquantaine de structures scolaires impactées à des degrés divers » par les incidents survenus après la mort de #Nahel, aboutissant à la fermeture d’une « dizaine » d’entre elles, principalement dans les académies de Versailles, de Créteil et de Lille.

    Pour le sociologue Sebastian Roché, il y aurait même une distinction à faire à ce sujet entre aujourd’hui et l’automne 2005. Interrogé sur France Info jeudi 29 juin, il jugeait en effet que la révolte actuelle « était beaucoup plus tournée vers les #institutions_publiques », tandis que les émeutes de 2005 auraient en priorité visé « beaucoup plus les voitures », même si des attaques contre des institutions publiques – gymnases, crèches, bibliothèques – s’étaient alors produites.

    Le #livre sans doute le plus précis sur le sujet a été publié aux éditions Presses de l’Enssib en 2013 par le sociologue Denis Merklen et s’intitule Pourquoi brûle-t-on des bibliothèques ? (lire l’entretien que Mediapart avait conduit avec lui sur le sujet à l’occasion du dixième anniversaire des émeutes de 2005 : https://www.mediapart.fr/journal/france/021115/pourquoi-les-emeutiers-s-attaquent-aux-equipements-publics). Le chercheur y montrait qu’environ 70 bibliothèques avaient été incendiées en France entre 1996 et 2013, et que 2005 ne constituait pas une scène inédite ou inaugurale.

    Toutefois, soulignait #Denis_Merklen à propos de ces attaques commises envers les institutions publiques, « leur interprétation a changé après les émeutes qui ont eu lieu en France cette année-là, sûrement comme conséquence de l’ampleur de la mobilisation. Auparavant, elles étaient perçues comme des actes irrationnels, nihilistes, on parlait alors de “#violences_urbaines” et pas encore d’émeutes. Pourquoi s’attaquer à une école maternelle ou à un gymnase ? Pourquoi les bénéficiaires détruisaient-ils ce qui leur était destiné ? Ce n’était pas compréhensible. La plupart des lectures en faisaient la manifestation d’un déficit, voire d’une absence de #socialisation_politique. »

    Cette interprétation « nihiliste » demeure active dans certains secteurs de la société et du champ politique. Elle est propre à une manière de regarder les #marges de la ville-centre comme une zone peuplée de populations « ensauvagées », incapables de respecter le #bien_commun ou même de distinguer leur propre intérêt.

    Le sociologue et anthropologue #Jérôme_Beauchez, professeur à l’université de Strasbourg, a tout récemment retracé l’histoire longue de ce regard négatif dans un livre intitulé Les Sauvages de la civilisation. Regards sur la Zone, d’hier à aujourd’hui, publié par les éditions Amsterdam l’an dernier.

    Toutefois, même lorsque n’est pas entonné le refrain de la nécessaire remise en ordre d’un monde prétendument décivilisé à coups de renforts policiers, de couvre-feux ou d’états d’urgence, la dimension politique des attaques contre les institutions politiques demeure encore parfois déniée. Lorsque les institutions publiques visées sont des écoles ou des centres d’action sociale, mais aussi quand ceux qui les visent n’appartiennent pas à des organisations référencées et sont en outre le plus souvent cagoulés et racisés.

    À l’inverse, lorsque le mouvement poujadiste s’en était pris à des centres des impôts, lorsque des militants de la FNSEA ont attaqué manu militari des préfectures ou lorsque des marins-pêcheurs ont incendié le Parlement régional de Bretagne en février 1994, la dimension politique du geste a été immédiatement lue comme telle. Ce n’est donc pas la violence en elle-même qui distinguerait le bon grain politique de l’ivraie et de l’ivresse émeutières.

    Pour Denis Merklen, le ciblage des institutions publiques lors d’épisodes de #soulèvements_urbains est bien de nature politique, et même en quelque sorte au carré. « Aujourd’hui, affirme-t-il, les chercheurs en sciences sociales – sociologues, politistes, anthropologues – sont d’accord pour y voir au contraire un geste éminemment politique. Pourquoi cela ? Parce que les personnes vivant dans les quartiers populaires, plus que les autres, sont en contact permanent avec des institutions publiques pour résoudre les problèmes de leur vie quotidienne. S’en prendre à elles est une manière de signifier ce face-à-face. Ce n’est pas un déficit de #politisation, mais un changement dans la #politicité_populaire – c’est-à-dire de la manière de faire de la politique par les catégories populaires – par la #territorialisation des #conflits_sociaux. »

    Pour le sociologue, les émeutiers manifestent ainsi « le conflit dans lequel ils sont pris quotidiennement. Aux guichets des administrations, lieu principal des interactions, les #exclusions et les difficultés d’accès prennent la forme d’un #mépris fortement ressenti ».

    L’anthropologue #Alain_Bertho, professeur émérite à l’université Paris VIII, a consacré une grande partie de son travail aux #émeutes_urbaines, en France et à l’étranger, pour comprendre la mondialisation de ce vocabulaire de la protestation et en repérer les formes nationales ou locales. Il en a tiré deux ouvrages, Le Temps des émeutes, publié chez Bayard en 2009, puis Les Enfants du chaos, paru à La Découverte en 2016.

    Dans ces deux ouvrages, le chercheur insiste, lui aussi, pour prendre en compte la dimension politique des émeutes, précisément quand celle-ci est parfois occultée par le fait que ces soulèvements n’empruntent pas les voies de la politique institutionnelle, ni celles de la geste révolutionnaire qui vise les lieux incarnant le pouvoir en majesté, et non un gymnase ou l’antenne d’un centre de sécurité sociale.

    Il y a eu un débat en 2005, nous expliquait Alain Bertho au moment du soulèvement des « gilets jaunes », « sur la question de savoir si ces émeutes étaient un mouvement politique, proto-politique ou apolitique. La réponse que m’ont donnée ceux qui avaient alors brûlé des voitures est restée gravée dans ma tête : “Non, ce n’est pas politique, mais on voulait dire quelque chose à l’État.” Comment dire de façon plus claire que la politique partisane et parlementaire, à leurs yeux, ne servait à rien pour dire quelque chose à l’État ? ».

    Dans ce même entretien, Alain Bertho insistait également sur la nécessité d’être « attentif au répertoire d’action qu’est le langage de l’émeute », faisant une distinction notamment entre les émeutes avec et sans #pillage.

    Dans ce répertoire d’action en réalité pluriel de l’émeute, parfois masqué par les images répétitives des fumées et des affrontements, les attaques visant des équipements publics tiennent une place spécifique et paradoxale.

    Cependant, le #paradoxe n’est sans doute pas seulement celui qui se formule d’ores et déjà à large échelle, dans des micro-trottoirs se demandant pourquoi certains jeunes attaquent des institutions censées les et leur servir, ou même dans la bouche de chercheurs, à l’instar de #Sebastian_Roché jugeant, toujours sur France Info, qu’on assiste en ce moment à un « #désespoir que les populations retournent contre elles-mêmes ».

    Il réside aussi dans ce que souligne Denis Merklen, à savoir que, pour les personnes vivant dans les quartiers populaires, « les #services_publics sont leur seul recours pour leurs besoins les plus élémentaires, liés à l’éducation, à la santé, au transport, au logement, à l’énergie et à la culture. Quasiment tous les aspects de leur vie quotidienne sont entre les mains d’institutions publiques. C’est une situation paradoxale, car cela tient aussi à la solidité et à la pénétration de notre État social qui assure tant bien que mal des filets solides de protection ».

    Ces filets de protection sont certes moins nombreux et solides aujourd’hui qu’il y a dix ans, en raison du délitement des services publics, mais il n’en reste pas moins qu’une spécificité des soulèvements urbains en France, par rapport à d’autres pays, est de viser les institutions publiques, en partie parce qu’il existe – ou existait – encore un #espoir en leur effectivité et efficacité.

    C’est en tout cas ce qui ressortait de l’ouvrage codirigé par les sociologues #Hugues_Lagrange et #Marco_Oberti l’année suivant les émeutes de 2005, intitulé Émeutes urbaines et protestations et publié aux Presses de Sciences Po. Le livre collectif proposait notamment une comparaison entre les situations italienne et britannique en rappelant que la société française se « caractérise par un État centralisé, de puissants services publics, une référence forte à la laïcité, une immigration ancienne liée à une histoire coloniale et à une décolonisation douloureuses ».

    Pour les directeurs de cet ouvrage, la comparaison internationale des protestations urbaines conduisait à un « étrange paradoxe. La plus grande efficacité de la société française à lutter contre les inégalités sociales et à assurer une meilleure protection sociale produit simultanément un fort sentiment d’#exclusion, surtout dans les quartiers populaires et immigrés les plus ségrégués ».

    D’autant qu’à lire Hugues Lagrange et Marco Oberti, les Français, contrairement aux Britanniques, étaient « équipés de lunettes construites pour ne pas voir cette #ségrégation_ethnique ». Une situation largement liée à une pensée de la République et une #organisation_territoriale de ses services publics qui, à force de vouloir être « #colour_blind », s’avèrent aveugles aux #discriminations_ethnoraciales que leurs propres institutions publiques peuvent pourtant reproduire.

    C’est évidemment le cas avec cette institution particulière qu’est la #police, comme l’avait déjà montré le sociologue #Didier_Fassin dans son ouvrage La Force de l’ordre, qui explorait le #racisme présent à l’intérieur de certaines unités de la #BAC en particulier et l’éloignement croissant entre les #forces_de_l’ordre et les habitant·es des quartiers populaires de façon plus générale.


    Mais c’est aussi vrai d’institutions qui ont, au contraire, tenté de réduire la distance entre les institutions et les populations auxquelles elles s’adressent. Concernant le cas particulier des #bibliothèques, Denis Merklen notait ainsi qu’elles « ont fait un immense travail de réflexion autocritique. Elles ont renouvelé leurs approches ; elles se sont ouvertes ».

    Mais, poursuivait-il, elles ne peuvent, pas plus qu’aucun service public pris isolément, « résoudre les problèmes économiques et sociaux qui se posent dans ces quartiers », en raison « de la situation catastrophique du marché du travail » qui fait que « beaucoup d’habitants ne peuvent plus compter sur leur salaire » et n’ont plus que les services publics – et non plus les employeurs - comme interlocuteurs de leur situation sociale. Ce qui peut amener à détruire une salle des fêtes plutôt que séquestrer un patron…

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/290623/pourquoi-les-services-publics-sont-pris-pour-cible
    #quartiers_populaires #France #émeutes #sciences_sociales #SHS #ressources_pédagogiques #banlieues #violence
    ping @cede

    • « Pourquoi ont-ils brûlé les écoles ? »

      Pourquoi s’attaquer à l’école, laquelle est le plus grand symbole de l’égalité, un sanctuaire du savoir
      Et, c’est gratuit ! Ils se pénalisent eux-mêmes !
      Comme ils sont bêtes et barbares dans les quartiers !

      Si c’était plus compliqué  ?

      L’école est sans doute la première institution marquant les jeunesses populaires (des banlieues) en appliquant une domination, une ségrégation, une violence.
      Sûrement même avant celle de la police.
      Derrière un idéal et des valeurs théoriques, on ne peut nier l’effet de l’école.

      Quand l’école transforme l’inégalité sociale en inégalités scolaires, quand l’école humilie les familles et les élèves.
      Quand on forme des ghettos scolaires et que l’école n’offre pas de bonnes perspectives.

      La gauche quinoa ne comprend pas
      « il faut s’attaquer aux méchantes banques qui ont refusé mon deuxième crédit ! »
      Mais, l’école est aussi un lieu d’exclusion et de répression pour une partie de la population.

      Dans
      « Quand les banlieues brûlent Retour sur les émeutes de novembre 2005. »

      Laurent Ott écrit un texte assez intéressant.
      J’ai le pdf si besoin.

      Une école qui brûle ce n’est pas bien. Je le précise quand même.
      Mais, ce n’est sans doute pas un acte qui sort de nulle part et qui peut s’expliquer calmement.
      Sans l’encourager, je précise encore.

      https://www.cairn.info/quand-les-banlieues-brulent--9782707152176-page-126.htm

      https://twitter.com/Banlieuedeprof/status/1674813901874114560

    • Pourquoi les émeutiers s’en prennent-ils aux services publics ?

      À chaque émeute urbaine que la France connaît depuis maintenant près de quatre décennies, les symboles de l’État et les équipements collectifs semblent concentrer la colère d’une partie de la jeunesse des quartiers concernés. Cette situation suscite d’autant plus d’interrogations que des moyens significatifs ont été consacrés à la rénovation des banlieues françaises dans le cadre de la politique de la ville, en particulier depuis le début des années 2000. Cet article apporte des éléments de réponses à ce paradoxe apparent, en montrant que le besoin de participation et de reconnaissance des habitants reste peu pris en compte par les pouvoirs publics et explique largement le ressentiment d’une frange de la population.

      https://www.cairn.info/revue-francaise-d-administration-publique-2017-3-page-631.html

    • Emeutes urbaines : « Ce qu’elles révèlent, ce n’est pas tant l’échec de la politique de la ville que celui de toutes les politiques publiques »

      Les crédits de la #politique_de_la_ville ont toujours été limités et ne compensent pas l’inégale allocation des budgets affectés au logement, à l’emploi, à la santé ou à la sécurité, qui s’opère au détriment des quartiers défavorisés, rappelle le sociologue #Renaud_Epstein, dans une tribune au « Monde ».

      Depuis le début des années 1980, les vagues émeutières embrasant les quartiers populaires s’accompagnent de controverses interprétatives enflammées dans les médias. Les explications proposées ont varié au fil du temps, mais un argument traverse les décennies qui semble faire consensus chez tous les commentateurs : l’émeute marquerait l’échec de la politique de la ville. La politique ainsi mise en cause a pourtant connu d’importantes évolutions au cours des quarante dernières années, le plus souvent à la suite d’épisodes émeutiers. Si échec de la politique de la ville il y a, ce n’est pas la même politique qui a échoué au début des années 1990, en 2005 ou aujourd’hui.

      Le jugement d’échec semble d’autant plus incontestable en 2023 que l’Etat aurait mobilisé, depuis une quinzaine d’années, des budgets considérables pour les quartiers populaires. Les annonces récurrentes d’un nouveau « plan banlieue » ont pu donner crédit à cette idée d’une politique de la ville richement dotée. Bien que ces annonces soient le plus souvent restées des annonces, elles ont ouvert la voie à la dénonciation des « milliards pour les banlieues », au profit de populations qui ne le mériteraient pas.

      Portée par des entrepreneurs de fracture sociale, cette critique a été d’autant plus ravageuse qu’elle s’est prolongée par une mise en concurrence des souffrances territoriales, opposant les quartiers défavorisés des métropoles et une « France périphérique » aux contours flous mais dont la couleur est claire. Les premiers bénéficieraient d’une discrimination positive, au détriment des villes moyennes, des espaces périurbains et des territoires ruraux, dont les populations sont pourtant durement affectées par les recompositions industrielles et la précarisation de l’emploi, les politiques d’austérité et les fermetures de services publics, ainsi que par l’augmentation du coût de la vie.

      La critique de l’inefficacité se mue alors en une mise en cause de la légitimité même de la politique de la ville, illustrée par cette formule qui fait florès à l’extrême droite : on déshabille la « France périphérique » pour habiller celle qui vit de l’autre côté du périph.

      (#paywall)

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/06/emeutes-urbaines-ce-qu-elles-relevent-ce-n-est-pas-tant-l-echec-de-la-politi

      déjà signalé sur seenthis :
      https://seenthis.net/messages/1008999

  • G. Friedman "..c’est cynique, immoral, mais ça marche ». Extraits du discours.

    Stratfor : comment Washington peut conserver sa domination sur la planète. Extraits du discours de George Friedman, directeur de la société de renseignement et d’analyse Stratfor, au Council on Foreign Relations de Chicago.
    Dans son discours au Council il explique comment Washington peut conserver sa domination sur la planète. Il identifie également les ennemis potentiels des USA.

    Friedman voudrait que le monde actuel soit exclusivement sous le contrôle direct ou indirect des USA
    Le président de Stratfor déclare que les USA n’ont pas de relations avec l’Europe. « Nous avons des relations avec la Roumanie, la France et ainsi de suite. Il n’y a pas d’Europe avec laquelle les USA ont des relations quelconques". Cela rappelle forcément la conversation de la sous-secrétaire d’Etat Victoria Nuland avec l’ambassadeur des USA à Kiev en 2014. Nuland avait alors expliqué à son interlocuteur en des termes très crus ce qu’elle pensait de l’Europe unie et de ses dirigeants : • Ukraine, la manip... 33] Plus tard, elle a présenté ses excuses pour la forme de ses propos, mais pas sur le fond. Il faut savoir que Mme Nuland est une lectrice des notes analytiques de Stratfor.
    « Les USA contrôlent tous les océans de la terre. Personne n’avait encore réussi à le faire. Par conséquent, nous pouvons nous ingérer partout sur la planète, mais personne ne peut nous attaquer. Le contrôle des océans et de l’espace est la base de notre pouvoir", a déclaré Friedman à Chicago,
    Selon lui, "la priorité des USA est d’empêcher que le capital allemand et les technologies allemandes s’unissent avec les ressources naturelles et la main d’œuvre russes pour former une combinaison invincible".Créer un "cordon sanitaire" autour de la Russie permettra à terme aux USA de tenir en laisse l’Allemagne et toute l’Union européenne

    https://www.youtube.com/watch?v=emCEfEYom4A


    #USA #UE #Russie

  • Was Orwell secretly a reactionary snitch ?
    https://www.independent.co.uk/news/uk/home-news/george-orwell-snitch-list-reactionary-grass-blacklist-communists-info

    Pendant la guerre froide il était difficile d’être de gauche car tous tes alliés potentiels étaient compromis. Tous entretenaient forcément des relations avec « Moscou », « Pankow », « Pekin » ou la #USIA. George Orwell préférait les services de son pays natal. Le film « Animal Farm » d’après sa novelle était financé en bonne partie par des services étatsuniens qui considéraient son oeuvre comme une arme anticommuniste efficace. Là, 39 ans après 1984 la brutalité des pratiques de surveillance des pays capitalistes dépasse de loin celle de son imaginaire et le problème de la liste orwellienne nous rappelle le bon vieux temps quand il fallait un délateur pour se retrover sur une liste noire.

    « Orwell was a snitch », il n’y a pas de doute. Apparamment dans sa vie quotidienne il il était aussi un peu réactionnaire comme la plupart des communistes, anarchistes et verts. C’est humain, n’est-ce pas ?

    24.6.2018 by Adam Lusher - George Orwell, born 115 years ago on Monday, was the writer who challenged the iniquities of imperialism and capitalism, who took a bullet in the throat fighting fascism, and who taught a Western audience about the horrors of Stalinist communism.

    That he died young, of tuberculosis at the age of 46, in 1950, served only to enhance his posthumous reputation. He became, in the words of one astute critic, “the James Dean of the Cold War, the John F Kennedy of English letters”.

    Death may also have saved him from curdling into the kind of bitter, contrarian conservatism that seems to have been the fate awaiting many a one-time youthful socialist.

    Instead, Orwell is often remembered as a man of “genius”, the “greatest political writer of the 20th century”.

    The commonly accepted view of the man is encapsulated in the aims of the foundation bearing his name. Through the coveted Orwell Prize, the Orwell Foundation seeks “to celebrate honest writing and reporting, to uncover hidden lives, to confront uncomfortable truths, to promote Orwell’s values of integrity, decency and fidelity to truth”.

    And yet there is one blemish – or complication – in the reputation of St George.

    It lay hidden until 1996 when Foreign Office file FO 111/189 was made public under the 30-year rule.

    The hitherto secret file revealed that in 1949 the great writer had, via his friend Celia Kirwan, given a semi-secret government propaganda unit called the Information Research Department (IRD) what became known as “Orwell’s List”.

    Orwell effectively handed over to the British authorities the names of 38 public figures whom he thought should be treated with suspicion as secret communists or “fellow travellers” who sympathised with the aims of Stalin’s Russia.

    When the existence of Orwell’s List was revealed in 1996, and when the Foreign Office finally divulged who was on it in 2003, the initial reactions seemed tinged with sadness and hedged about with qualifications.

    But the internet was young then.

    Now it has grown into a giant bristling with social media channels and anger; swift to judge, slow to reflect.

    Orwell worked for the BBC during the Second World War despite once describing it as being ‘halfway between a girls’ school and a lunatic asylum’

    And so George Orwell, a hero to so many, is now demonised online as a “fake socialist”, a “reactionary snitch”, a traitor, a McCarthyite “weasel”.

    “Orwell’s List is a term that should be known by anyone who claims to be a person of the left,” declares one fairly widely circulated condemnation. “At the end of his life, he was an outright counter-revolutionary snitch, spying on leftists on behalf of the imperialist British government.”

    “He was an anti-socialist,” asserts another indictment, “corresponding with British secret services and keeping a blacklist of writers.”

    So widespread has the vilification become, that “Orwell as snitch” is sometimes played with – not entirely seriously – as an internet meme.

    And yet, when you consult DJ Taylor, author of the acclaimed biography Orwell: The Life, you do not encounter boiling indignation.

    “I can’t get very worked up about the list,” he says mildly. “I don’t see it particularly as a mistake.

    “You just have to see it in the context of the time.”

    And that context, reveals Taylor, was explained to him by the left wing former Labour leader Michael Foot.

    Taylor recalls: “Foot told me that the great difficulty if you were a left wing Labour MP in the 1940s was working out exactly where your friends stood. You didn’t know whether some were listening to you and agreeing, and then going straight to the British Communist Party’s headquarters in King Street and telling them everything.”

    “Another example of the kind of thing they were facing,” says Taylor, “was the man who worked in the Foreign Office in the room next to Orwell’s IRD friend Celia. His name was Guy Burgess.

    “There were at least a dozen elected parliamentarians taking their orders from a foreign country,” adds Taylor. “What could be more traitorous than that?”

    Years after Orwell listed him as giving the “strong impression of being some kind of Russian agent”, the Mitrokhin Archive of KGB documents revealed that journalist Peter Smollett had indeed been a Russian agent.

    Laying aside the irony that Michael Foot was himself once falsely accused of being a KGB agent, it is, then, perhaps no coincidence that the IRD was in fact set up, not by a headbanging Tory, but by Labour foreign secretary Ernest Bevin.

    “This was at a time when the Soviet Union was swallowing up what had previously been independent East European states,” says Taylor. “The IRD was producing reasoned expositions, pamphlet literature, telling people on the ground in Eastern Europe why they should resist this kind of stuff.

    “But a lot of British people were still seduced by the idea of our ally ‘good old Uncle Joe Stalin’, when in fact the bloke was a mass murdering psychopath. And you were also dealing with some really hardline ideologues.

    “So Orwell’s idea was, if you are going to get somebody to write these kinds of pamphlets, they have to be genuine democrats.

    “He was a democratic socialist who wanted democratic socialists, not right wingers, to be writing this propaganda. But he wanted them to be people who had seen through the Soviet illusion, not covert stooges for Stalin’s Russia.”

    And so Taylor’s anger – such as it is – is reserved, not for Orwell, but for those like the late Labour MP Gerald Kaufman, who greeted the revelation of the list with the “pathetic” remark: “Orwell was a Big Brother too”.

    “This wasn’t Orwell denouncing anybody,” says Taylor. “He wasn’t writing public articles in the press saying ‘these people are evil’.

    “This was him giving private advice to a friend [Celia Kirwan] who was working for the IRD and wanted to know whom to avoid when asking people to write for her department.”

    It should perhaps be noted that Celia Kirwan was a bit more than just a friend. Three years earlier, Orwell had actually proposed marriage to her in the emotional turmoil that followed the death of his first wife Eileen.

    Kirwan rebuffed his advances, but some have suggested that Orwell, aware of his failing health, might have been seeking the comfort of a beautiful woman when on 6 April 1949 he wrote offering to name those who “should not be trusted as propagandists”.

    He certainly knew the list was not for Kirwan’s eyes only. As noted by Timothy Garton Ash, the historian who persuaded the Foreign Office to reveal the document in 2003, Orwell sent his list to Kirwan with a reference to “your friends” who would read it.

    And as Garton Ash also noted, the IRD did not confine itself to relatively innocuous pamphleteering.

    In the New York Review of Books article that formed the first detailed analysis of the list’s contents, Garton Ash wrote: “By the late 1950s, IRD had a reputation as ‘the dirty tricks department’ of the Foreign Office, indulging in character assassination, false telegrams, putting itching powder on lavatory seats and other such Cold War pranks”.

    When he sent his list to Celia Kirwan in 1949, Orwell might not have known that this was the IRD’s direction of travel, but of all people, the author of 1984, who envisaged the Ministry of Truth, should surely have been aware of the possibility.

    That said, as Garton Ash also wrote, not much seemed to have happened to the people on Orwell’s List (apart from missing out on the IRD pamphlet-writing gig). It seems their names weren’t even passed to MI5 or MI6.

    In America, Hollywood actors blacklisted during the McCarthy era had their careers and lives ruined. In England, Michael Redgrave appeared on Orwell’s List in 1949 and starred in the film adaptation of Orwell’s novel 1984 seven years later.

    Peter Smollett, named by Orwell as a likely Russian agent, got an OBE.

    In other words, what happened to those on Orwell’s List seems to have borne no comparison to the fate of Big Brother’s fictional victims or the real millions who died in the purges and repression ordered by Stalin.

    “The list invites us to reflect again on the asymmetry of our attitudes toward Nazism and communism,” wrote Garton Ash, whose own experiences of being spied on by the communist East German Stasi informed his book The File.

    What if Orwell had given the government a list of closet Nazis, he wondered. “Would anyone be objecting?”

    And in truth, there does seem a certain asymmetry in the online articles of denunciation.

    Indeed it is hard not to sense the inspiration of Private Eye’s (fictional) veteran class warrior Dave Spart in some of the articles condemning Orwell as “a social democratic traitor collaborating with the capitalist state against revolutionaries trying to create socialism.”

    “Sure, the USSR did a lot of objectionable things,” says one writer. “But … Western imperialist countries commit much more heinous crimes throughout the world every day.”

    A stronger charge against Orwell might be that of antisemitism. The private notebooks that formed the basis of the list he sent to the IRD included labels like “Polish Jew”, “English Jew”, and “Jewess”.

    But Orwell did also devote an entire 1945 essay to discussing how best to combat antisemitism, while having the honesty to admit – and regret – his own occasional lapses into jokes at the expense of Jews.

    And at the moment, antisemitism might be a problematic charge for some left wingers to level.

    Taylor, though, is convinced that some amongst “the newly emergent hard left” would secretly love to unleash something against Orwell.

    And yes, by “newly emergent hard left”, he does mean some Corbynistas.

    Younger party members, Taylor concedes, might not have the personal memories of the Cold War, still less an instinctive understanding of the context in which Orwell produced his list in 1949.

    But, he adds: “I am a Labour Party member. I have been to hear Corbyn speak and noticed how an awful lot of the people there were aged left wingers for whom there had not really been a place in the Labour Party for the last 20 or 30 years.

    “An awful lot of the hard left these days would pay lip service to Orwell as a beacon of sanity, while secretly having doubts.

    “There are still a load of extreme lefties out there to whom Orwell is this snivelling little Trotskyite telling them things they don’t want to hear and pointing out things that shouldn’t be pointed out because they get in the way of the revolution.”

    And to the ideological, Taylor would add the psychological: “Tall poppy syndrome – Orwell is this secular saint, so let’s have a go at him.”

    This battle over Orwell’s reputation, of course, is more than just a matter of idle literary historical curiosity.

    Its relevance to the political struggles of today is suggested by the remark of one of the more ferocious online critics.

    “George Orwell,” he says, “was the first in a long line of Trots-turned-neocons”.

    It is certainly true that far-right commentators have started trying to co-opt Orwell to their cause, even to the point of suggesting that the man who once chased a fascist across a battlefield with a fixed bayonet would deplore the Antifa movement.

    This, says Taylor, is pretty much what Orwell feared.

    “At the time he was giving Celia Kirwan his list, 1984 was about to be published. Orwell’s great fear was that right wingers would use it as a piece of anti-communist propaganda, and that’s what happened. Immediately after 1984 was published, it was used by the CIA as a propaganda tool.

    “Orwell wrote a very interesting letter to people in the US saying: ‘Look, this is not so much anti-communist as anti-totalitarian.’

    “He feared what right wingers would do with 1984, but thought it was the price you had to pay for exposing evils like totalitarianism.

    “And a writer can’t be blamed for how their books are used by people who are determined to twist meaning for malignant ends.”

    Orwell never wanted to be seen as a secular saint

    Taylor, though, can’t help wondering whether Orwell would really have been that upset by the comments of “slightly disconnected people” on the far left of the internet.

    Orwell himself, he points out, never sought secular saint status. Quite the reverse: “He was very wary of that kind of thing. In an essay on Gandhi he effectively says that when people start being referred to as saints there is something very odd about them and it usually ends in disaster.”

    Instead Taylor has a sneaking suspicion that Orwell might have been rather amused by his online detractors.

    “People undervalue Orwell’s wry sense of humour,” he says. “David Astor, who used to edit the Observer and employed him, told me about the time Orwell came to him saying, ‘You should hear the abuse I have been getting from some of the communist newspapers.’

    “Orwell said: ‘They call me a fascist octopus. They call me a fascist hyena.

    “Then he paused: ‘They’re very fond of animals’.”

    la liste et une introduction
    https://www.orwell.ru/a_life/list/english/e_list

    https://libcom.org/article/orwells-list

    https://en.m.wikipedia.org/wiki/Orwell%27s_list

    https://en.m.wikipedia.org/wiki/United_States_Information_Agency

    #anticommunisme #Royaume_Uni

    • Article de 2018… on en est encore là en 2023 ? Voici un article de 2020 des éditions Agone, avec un texte des éditions de L’encyclopédie des nuisances, datant d’avant même la diffusion de la liste, en… 1997 déjà.

      Malheureux comme Orwell en France (III) L’affaire de la « liste noire » (2)
      https://agone.org/aujourlejour/malheureux-iii-2

      Cependant, même s’il ne possède guère de connaissances historiques, un individu quelque peu attentif s’apercevra assez vite, à la lecture de la lettre d’Orwell, qu’il s’agit de tout autre chose que d’une lettre de dénonciation. Orwell, malade, a reçu au sanatorium la visite d’une amie proche, la belle-sœur d’Arthur Koestler, lui-même ami très proche d’Orwell. (Il faut noter à ce sujet que les auteurs de l’article – car ils se sont mis à deux –, qui se montrent si pointilleux, ne mentionnent à aucun moment ces relations d’amitié : on est donc amené à croire, à les lire, qu’Orwell a reçu Celia Kirwan en tant que fonctionnaire du Foreign Office.) À cette amie, qui lui parlait de ses activités dans le cadre de la lutte menée par le gouvernement travailliste de l’époque contre la propagande stalinienne, il a indiqué les noms de gens dignes de confiance pour participer d’une façon ou d’une autre à une telle campagne. Revenant là-dessus dans sa lettre, il lui mentionne également l’existence d’un carnet où il a noté les noms de journalistes et d’écrivains dont il faut au contraire, selon lui, se défier, parce qu’ils soutiennent plus ou moins ouvertement la politique de Staline. Orwell n’a donc rien “proposé” au Foreign Office, pas plus qu’il n’a “adressé” quoi que ce soit à l’IRD, et il n’a jamais dénoncé personne. Les journalistes et les écrivains dont il suggérait de se défier avaient une activité publique, et c’est en fonction de celle-ci que quiconque pouvait se faire comme lui, à l’époque, une idée de leur stalinophilie ; aussi facilement qu’en France, par exemple, n’importe qui aurait jugé peu avisé d’aller demander à Sartre de participer à une campagne contre la politique du PCF. En outre, tout au long de ces années-là, Orwell n’a cessé d’attaquer, lui aussi publiquement, cette stalinophilie de l’intelligentsia anglaise, s’en prenant nommément à ses principaux artisans. Et voici, en dernier ressort, ce que prétend révéler ce petit roman d’espionnage : Orwell était bien antistalinien !

      (et non pas anti communisme…)

      Ce pseudo-scoop est d’ailleurs tout aussi fallacieux dans le détail, puisque l’existence du carnet mentionné par Orwell était parfaitement connue depuis la biographie due à Bernard Crick, parue en Angleterre en 1982, comme celui-ci l’a rappelé dans sa lettre au Guardian du 12 juillet 1996. Mais peu importe à nos honnêtes journalistes. Une fois établie comme on l’a vu l’activité de délateur d’Orwell, il n’est guère utile, aux yeux de la conscience moralo-médiatique, de se souvenir que, pas plus qu’il n’y a eu dénonciation, il n’y a eu dans l’Angleterre de l’époque de persécution quelconque contre des écrivains ou des artistes prostaliniens. Il suffit de solliciter les réactions de diverses “personnalités”, toutes prêtes à se déclarer horrifiées par la nouvelle. Et il ne manque pas d’anciens staliniens à la Christopher Hill pour y aller de leur couplet, trop contents de pouvoir baver avec l’aval du ministère de la Vérité

      #George_Orwell

    • Et encore un autre

      Malheureux comme Orwell en France (II) Qui veut tuer son maître l’accuse de la rage - Agone
      https://agone.org/aujourlejour/malheureux-ii

      « En 1996 – puis encore une fois en 2002 –, écrivait Simon Leys en 2006, d’indécrottables staliniens lancèrent puis exploitèrent une rumeur selon laquelle Orwell n’aurait été qu’un vil indicateur de police. » Treize ans après, sans qu’aucune nouvelle pièce à charge n’ait été apportée au dossier, la même rumeur est exploitée aux mêmes fins par le même genre d’individu.

    • @rastapopoulos Ce qui est intéressant c’est de constater les clivages au sein de la gauche qui empêchaient une lutte efficace contre le système capitaliste et impérialiste.

      Nos camarades proches de « Pankow », je parle de l’époque entre 1971 et 1998, défendaient un système qui côté oppression n’était pas pire que n’importe quel autre état, mais on se heurtait toujours à deux forces antagonistes et irréconciliables. D’abord tu vivais dans la certitude que chaque contact avec des représentants du « régime communiste » te valait une entrée dans les fichiers des services de l’Ouest. Parfois tu te tapais une campagne délatrice par la presse de droite. Ceci fut le cas de l’écrivain et historien Bernt Engelmann


      Berlin: Die „Berliner Begegnung zur Friedensförderung“ wurde in der DDR-Hauptstadt eröffnet.
      An dem zweitägigen Treffen nehmen auf Einladung des DDR-Schriftstellers Stephan Hermlin rund 100 Schriftsteller, Künstler und Wissenschaftler aus beiden deutschen Staaten sowie aus weiteren europäischen Ländern und aus Westberlin teil. Unter ihnen sind Prof. Jürgen Kuczynski, Hermann Kant, Stephan Hermlin, Bernt Engelmann (BRD) und Ingeborg Drewitz (Westberlin).-v.l.n.r.

      Passons sur l’infâme « Berufsverbot » qui a transformé une génération entière de diplômés de gauche en chauffeurs de taxi et paumés sans perspective professionelle.

      Si par contre tu osais entretenir des contact avec l’Ouest et tu ouvrais ta gueule en critiquant la RDA on te rangeait dans la case anticommuniste et bien des camarades ainsi visés finissaient par le devenir. Rappellons-nous du sort de Wolf Biermann qui a commencé son itinéraire artistique comme communiste insoumis et s’est transformé en triste guignol anticommuniste après avoir été privé de son passeport RDA.


      Oostduitse zanger Wolf Biermann geeft persconferentie in Frascatie, Amsterdam, Datum : 23 februari 1977

      Pour les militants de gauche « non-dogmatiques » et « spontanéistes » qui vivaient sous la dictature militaire éclairée des #USA et de leurs alliés français et britanniques, il était à la fois évident qu’il fallait défendre la RDA et ses acquis pour les classes laborieuses, les femmes et la solidarité internationale, critiquer les défaillances du socialisme de Berlin-Est et combattre l’impérialisme états-unien qui était en train de corrompre nos amies et amis pendant qu’il assassinait et incarcérait dans le monde entier. Angela Davis fut une de ses victimes libérés grâce aux campagnes de solidarité menée par toutes les tendances de la gauche mondiale.


      11 August 1972, RIA Novosti archive, image #36716, Cosmonaut Valentina Tereshkova, chairperson of the Soviet women committee (right) meeting with Angela Davis at Sheremetyevo Airport.

      Bref le temps entre 1971 et 1989 fut une époque (relativement) heureuse marquée par le début d’une ouverture du rideau de fer et un impérialiste étasunien adouci pour les citoyens d’Europe. La gestion réussie du conflit entre le bloc #COMECON, les #USA et l’Europe nourrissait l’illusion que les conflits mondiaux étaient en train de s’estomper. La politique de détente promettait des avantages pour tous.

      Dans les dernières années de la vie de George Orwell les problèmes se posaient d’une manière différente parce que les forces à l’œuvre n’étaient pas les mêmes et la répartition du pouvoir exigeait un comportement différent de la gauche dans la première phase de la guerre froide.

      On ne pouvait pas ne pas prendre position d’un côté ou de l’autre sous peine de subir le sort des trotskystes ou d’une vie apolitique et insignifiante. La passation violente du pouvoir impérialiste mondial britannique aux nouveaux maîtres de Washington était en plein essor. L’époque de l’après 1914-1918 n’était pas encore révolu et chaque militant et auteur politique devait choisir son camps.

      Bert Brecht nous a légué un fragment de pièce de théâtre qui cerne ce dilemme :

      Untergang des Egoisten Johann Fatzer
      https://de.wikipedia.org/wiki/Fatzer_(Fragment)

      Fatzers letzte Worte sind: von jetzt ab und eine ganze zeit über / wird es keine sieger mehr geben / auf unserer welt sondern nur mehr / besiegte.

      En communiquant sa liste à son amie Orwell a choisi son camp. En prenant en compte la situation de l’époque on ne peut que constater qu’il s’est comporté en anticommuniste contrairement à Klaus Fuchs (https://de.wikipedia.org/wiki/Klaus_Fuchs) et d’autres qui ont opté pour la défense du socialisme même stalinien ou dégénéré.

      Quoi qu’il ait fait peu de temps avant sa mot, l’œuvre de George Orwell occupe une place importante dans notre patrimoine internationaliste au même rang que les écrits de Lev Tolstoï et ceux des humanistes. Notre discussion en est la preuve qu’il a dépassé une position où on peut encore le critiquer pour ses actes alors que nous lui devon l’admiration sans réserve pour tout ce qu’il nous a apporté par ses engagements politiques et comme écrivain.

      Il serait idiot de suivre ou contredire les jugements prononcés à l’époque. Si tu tombes dans ce piège tu risques de te trouver dans une impasse comme les camarades qui ont pris les armes après 1968 pour lutter contre l’impérialisme en Europe. Il ne faut jamais répéter les positions historiques mais il faut les étudier afin de comprendre où nous en sommes. Nous ne pouvons qu’essayer de comprendre comment tout le monde s’est fait avoir par les services secrets, les fausses grandes causes et les attitudes mesquines qu’on essaye de nous imposer par les « contraintes matérielles ».

      Je pense qu’un des meilleurs commentaires sur la question vient d’une source décidément anticommuniste.

      The Bare Necessities (from The Jungle Book)
      https://www.youtube.com/watch?v=08NlhjpVFsU


      The Jungle Book (1967 film)
      https://en.wikipedia.org/wiki/The_Jungle_Book_(1967_film)

      #guerre_froide

  • Nous jouons tou·tes à la roulette COVID. Sans air sain, la prochaine infection pourrait vous handicaper de manière permanente | George Monbiot
    https://cabrioles.substack.com/p/nous-jouons-toutes-a-la-roulette

    Vous pouvez voir le Covid-19 comme un test d’empathie. Qui était prêt·e à subir des perturbations et des désagréments pour le bien des autres, et qui ne l’était pas ?

    George Monbiot est un écrivain britannique connu pour son activisme environnemental et politique. Il écrit une chronique régulière pour The Guardian et est l’auteur de nombreux livres, dont récemment This Can’t Be Happening et Regenesis.

    Vous pouvez voir le #Covid-19 comme un test d’empathie. Qui était prêt·e à subir des perturbations et des désagréments pour le bien des autres, et qui ne l’était pas ? La réponse était souvent surprenante. Je pense, par exemple, à cinq écologistes de premier plan qui ont dénoncé les confinements, les vaccins et même les masques comme des intrusions intolérables dans nos libertés, tout en ne proposant aucune mesure significative pour empêcher la transmission du virus. Quatre d’entre eux sont devenus des propagateurs actifs de la désinformation.

    Si l’environnementalisme signifie quelque chose, c’est que nos gratifications nuisibles doivent passer après les intérêts des autres. Pourtant, ces personnes ont immédiatement échoué à ce test, plaçant leur propre confort au-dessus de la santé et de la vie des autres.

    Aujourd’hui, il y a encore moins d’excuses, car nous sommes devenus plus conscient·es du coût de l’inaction. L’une des justifications de l’égoïsme était que la libre circulation du virus renforcerait l’immunité collective. Mais nous disposons désormais de nombreuses preuves suggérant que l’exposition ne renforce pas notre système immunitaire, mais qu’elle peut l’affaiblir. Le virus attaque et épuise les cellules immunitaires, si bien que chez certaines personnes, le dysfonctionnement immunitaire persiste pendant des mois après l’infection.

    .... tout comme le choléra a été arrêté en assainissant l’eau, le Covid sera arrêté en assainissant l’air. Le virus prospère dans les espaces partagés mal ventilés, notamment les salles de classe, où les élèves restent assis·es ensemble pendant de longues périodes. Une étude a montré que les systèmes de ventilation mécanique dans les salles de classe réduisent le risque d’infection de 74 %.

    #air

  • GTA 6 Release Date : Rockstar Cleans Up Image After Employee Backlash - Bloomberg
    https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-07-27/gta-6-release-date-rockstar-cleans-up-image-after-employee-backlash

    Since that outcry, Rockstar has attempted to reinvent itself as a more progressive and compassionate workplace, according to interviews with more than 20 people who work there or left recently, all of whom requested anonymity because they weren’t authorized to speak publicly. One employee described it as “a boys’ club transformed into a real company.” A spokesman for Rockstar declined to comment.

    Can a kinder, gentler Rockstar still produce the chart-topping caliber of game the studio has become known for? Some employees aren’t sure. Morale across the company is higher than it’s ever been, according to many staffers. But the development of Grand Theft Auto VI has been slower than impatient fans and even longtime employees have expected.

    Much of that has to do with the pandemic, but the delay is also due to some of the changes that the company implemented in an effort to improve working conditions, such as a restructuring of the design department and a pledge to keep overtime under control. Some workers say they’re still trying to figure out how to make games at this new iteration of Rockstar and wonder even what a Grand Theft Auto game looks like in today’s environment. Besides, several Rockstar employees pointed out that you can’t really satirize today’s America — it’s already a satire of itself.

    Une héroïne, une action située à Miami... les premiers détails sur le jeu vidéo GTA VI fuitent
    https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/une-heroine-une-action-situee-a-miami-les-premiers-details-sur-le-jeu-video

    GTA VI, c’est pour bientôt ? Les joueurs vont encore devoir prendre leur mal en patience. Une enquête de l’agence de presse Bloomberg publiée ce mercredi permet d’en savoir plus sur la date de sortie du tant attendu sixième opus de la série Grand Theft Auto, l’une des plus populaires de l’industrie du jeu vidéo. Le titre pourrait être mis en vente au cours de l’année fiscale 2024 de l’éditeur Take-Two, soit entre avril 2023 à mars 2024. Il va donc s’écouler plus de dix ans entre la sortie de GTA VI et celle de son prédecesseur GTA V, paru en 2013.

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #business #ressources_humaines #développement #rockstar_games #take_two #george_floyd #aux_gendarmes_et_aux_voleurs #jeu_vidéo_grand_theft_auto_v #jeu_vidéo_grand_theft_auto_vi #grand_theft_auto_iii #activision_blizzard #riot_games #ubisoft_entertainment #heures_supplémentaires #récupération #héroïne #miami #bonnie_and_clyde

  • EA Reveals Why It Won’t Speak Out To Defend Abortion Rights
    https://kotaku.com/ea-roe-v-wade-abortion-trans-rights-fifa-apex-legends-1848977494

    Electronic Arts won’t be joining some other big game studios in publicly supporting abortion and transgender rights, Kotaku has learned. Asked about it during a May 24 company-wide town hall meeting, the gaming publisher told staff it couldn’t take a stance on every public issue and that “being an inclusive company means being inclusive of all those points of view.”

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #ea #electronic_arts #politique #roe_v_wade #ressources_humaines #assurance_santé #avortement #mala_singh #microsoft #lacey_haines #jeu_vidéo_destiny_2 #bungie #jeu_vidéo_halo_infinity #certain_affinity #jim_ryan #playstation #sony #jeu_vidéo_spider-man #insomniac_games #black_lives_matters #george_floyd #gearbox_entertainment #greg_abbott #lgbtq

  • Activision (ATVI) Illegally Threatened Staff, US Labor Officials Find - Bloomberg
    https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-05-23/activision-illegally-threatened-staff-us-labor-officials-find

    US labor board prosecutors determined that Activision Blizzard Inc. illegally threatened staff and enforced a social media policy that conflicts with workers’ rights, according to a government spokesperson. The finding is a setback for the company as it tries to fend off a unionization effort and finalize a $68.7 billion sale to Microsoft Corp.

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #activisionn_blizzard #ressources_humaines #syndicalisme #droit #justice #rachat #business #finance #microsoft #kayla_blado #raven_software #jeu_vidéo_call_of_duty #sexisme #harcèlement_sexuel #bro_culture #jennifer_abruzzo #george_w_bush #joe_biden #réseaux_sociaux

  • Aux origines du 1er Mai : Les Martyrs de Chicago
    https://www.partage-noir.fr/aux-origines-du-1er-mai-les-martyrs-de-chicago

    Un meeting se tient au Haymarket Square de Chicago le 4 mai 1886. Les orateurs anarchistes #Albert_Parsons, #August_Spies et #Samuel_Fielden soutiennent la revendication de la journée de huit heures pour les travailleurs. Les «  Chevaliers du Travail  » viennent de lancer une grande campagne de mobilisation afin d’obtenir ce droit. Les manifestants commencent à se disperser lorsque les forces de l’ordre chargent. Une bombe explose parmi les policiers, ceux-ci tirent alors sur la foule. MLT & OLT

    / August Spies, #George_Engel, Albert Parsons, #Louis_Lingg, #Adolph_Fischer, #Michael_Schwab, #Oscar_Neebe, Samuel (...)

    #MLT_&_OLT

    • https://www.arte.tv/fr/videos/082189-001-A/le-temps-des-ouvriers-1-4

      Du début du XVIIIe siècle à nos jours, Stan Neumann déroule sur plus de trois siècles l’histoire du monde ouvrier européen, rappelant en une synthèse éblouissante ce que nos sociétés doivent aux luttes des « damnés de la terre ».

      Dès le début du XVIIIe siècle, en Grande-Bretagne, une nouvelle économie « industrielle et commerciale », portée par le textile, chasse des campagnes les petits paysans et les tisserands indépendants. Pour survivre, ils doivent désormais travailler contre salaire dans des fabriques (factories) qui rassemblent plusieurs milliers d’ouvriers, sur des métiers appartenant à des marchands devenus industriels. C’est la naissance de la classe ouvrière anglaise. Le travail en usine, le Factory System, où seul compte le profit, impose aux déracinés une discipline et une conception du temps radicalement nouvelles. Avec la révolution industrielle de la fin du XVIIIe siècle, ils subissent un dressage plus violent encore, sous la loi de machines qui réduisent l’ouvrier à un simple rouage.
      Surexploitée et inorganisée, cette classe ouvrière primitive, qui oppose à la main de fer de l’industrie naissante des révoltes spontanées et sporadiques, va mettre plusieurs générations à inventer ses propres formes de lutte, dans une alliance parfois malaisée avec les républicains anglais, inspirés par la Révolution française de 1789. Ses revendications sont sociales et politiques : réglementation du travail des enfants, salaires, durée du temps de travail, liberté syndicale, droit de grève, suffrage universel... Dans les années 1820, après des décennies de combats perdus, une classe ouvrière anglaise puissante et combative semble en mesure de faire la révolution.

      Temps complet
      La classe ouvrière a-t-elle disparu, ou simplement changé de forme, de nom, de rêve ? Conciliant l’audace et la rigueur historique, l’humour et l’émotion, le détail signifiant et le souffle épique, Stan Neumann (Austerlitz, Lénine, Gorki – La révolution à contre-temps) livre une éblouissante relecture de trois cents ans d’histoire. Faisant vibrer la mémoire des lieux et la beauté des archives, célébrissimes ou méconnues, il parvient à synthétiser avec fluidité une étonnante quantité d’informations. Les séquences d’animation, ludiques et inventives, et un commentaire dit par la voix à la fois présente et discrète de Bernard Lavilliers permettent de passer sans se perdre d’un temps à l’autre : celui du travail, compté hier comme aujourd’hui minute par minute, celui des grands événements historiques, et celui, enfin, des changements sociaux ou techniques étalés parfois sur plusieurs décennies, comme le processus de légalisation des syndicats ou du travail à la chaîne. En parallèle, le réalisateur donne la parole à des ouvriers et ouvrières d’aujourd’hui et à une douzaine d’historiens et philosophes, hommes et femmes, « personnages » à part entière dont la passion communicative rythme le récit. On peut citer Jacques Rancière, Marion Fontaine, Alessandro Portelli, Arthur McIvor, Stefan Berger, avec Xavier Vigna comme conseiller scientifique de l’ensemble des épisodes. Cette série documentaire virtuose, où l’expérience intime coexiste avec la mémoire collective, au risque parfois de la contredire, révèle ainsi combien nos sociétés contemporaines ont été façonnées par l’histoire des ouvriers.

      #travail #lutte_des_classes #1er_mai

  • Où sont les milliards de #Kadhafi ?

    Que sont devenus les milliards de dollars que le colonel Kadhafi, peu de temps avant sa chute, a mis à l’abri en Afrique du Sud ? Digne des meilleurs thrillers, une enquête au long cours sur les traces d’un trésor insaisissable.

    Le 20 octobre 2011, après des mois d’affrontements entre ses soutiens et les forces rebelles, Mouammar Kadhafi, qui dirigeait la Libye d’une main de fer depuis plus de quatre décennies, est capturé et abattu. Avant d’être renversé, le dictateur avait pris soin de transférer à l’étranger une grande partie de sa faramineuse fortune, constituée avec les réserves pétrolières du pays. C’est en négociant, pour le compte du gouvernement de transition, un contrat d’armement avec l’Afrique du Sud qu’Erik Goaied, un consultant tunisien, a vent d’une cargaison de 12,5 milliards de dollars libyens arrivée à l’aéroport de Johannesburg fin 2010. Mais où sont passés les conteneurs remplis de billets ? Et pourquoi Kadhafi les a-t-il envoyés ici ? George Darmanovic, un influent agent des services secrets sud-africains, affirme que l’ANC, le parti au pouvoir, dont le leader libyen a soutenu financièrement les dirigeants depuis Mandela jusqu’à Jacob Zuma, aurait fait main basse sur une grande partie de l’argent. Épaulé par Johan Erasmus, un marchand d’armes ayant fait carrière dans le renseignement au temps de l’apartheid, et Fanie Fondse, un ex-membre des forces spéciales, Erik Goaied se met en tête de récupérer le magot. Son entreprise se complique lorsque Darmanovic est assassiné en pleine rue et que le gouvernement libyen le met sur la touche, en confiant l’opération à l’homme d’affaires Taha Buishi. Ce dernier entre en contact avec Tito Maleka, le chef des services de renseignements occultes de l’ANC, qui fait lui-même appel à Jackie Mphafudi, un proche du président Zuma. Alléchées par la commission de 10 % promise par la Libye, les deux équipes se lancent dans une chasse au trésor acharnée…

    https://www.arte.tv/fr/videos/088469-000-A/ou-sont-les-milliards-de-kadhafi
    #film #film_documentaire #documentaire #armes #Afrique_du_Sud #argent #Libye #George_Darmanovic #Jocob_Zuma #Zuma #Erik_Goaied #ANC #Johan_Erasmus #argent_liquide #Fanie_Fondse #Taha_Buishi #Tito_Maleka #Aziz_Pahad #Nelson_Mandela #Thabo_Mbeki #conférence_de_Polokwane #Mathews_Phosa #Brian_Crook #Jackie_Mphafudi #Bashir_Saleh

    déjà signalé par @simplicissimus
    https://seenthis.net/messages/912048

  • Twitch Adds Explanations To Bans and Suspensions For Streamers
    https://kotaku.com/twitch-will-finally-tell-streamers-why-they-got-banned-1847456655

    The days of Twitch mysteriously suspending popular streamers are coming to an end. The Amazon-owned streaming platform announced yesterday that it will now actually tell streamers who get temporarily banned why they’ve been punished. It only took 10 years, folks.

    Désormais, Twitch indiquera les raisons d’un bannissement aux streamers concernés de sa plateforme.

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #twitch #amazon #bannissement #expulsion #justice #george_davidson #georgenotfound #jeu_vidéo_minecraft #amouranth #indiefoxxlive

  • Ex-police officer Derek Chauvin sentenced to 22-1/2 years for George Floyd murder | Reuters
    https://www.reuters.com/world/us/ex-policeman-derek-chauvin-be-sentenced-george-floyds-murder-2021-06-25

    A Minnesota judge sentenced former police officer Derek Chauvin to 22-1/2 years in prison on Friday for the murder of George Floyd during an arrest in May 2020 on a Minneapolis sidewalk, video of which sparked global protests.

    #faits_divers #blm #black_lives_matter #procès #jugement #police #états-unis #george_floyd #derek_chauvin #condamnation

  • Border barrier boondoggle. Trump’s promised inexpensive, impregnable wall was anything but.

    “I would build a great wall — and nobody builds walls better than me, believe me. And I’ll build them very inexpensively,” Donald Trump said in 2015 as he announced his presidential run. “I will build a great, great wall on our southern border, and I will have Mexico pay for that wall. Mark my words.” During the campaign, Trump offered more details. His wall would span the entire length of the border, or nearly 2,000 miles, it would be fashioned with concrete — not unlike the Berlin Wall — and would be “impregnable” and “big and beautiful.”

    It didn’t quite work out that way. By the end of Trump’s term, his administration had completed construction of about 450 miles of barrier, none of which was concrete and all of which was demonstrably pregnable, at a cost at least five times that of the existing barriers. Mexico did not pay a dime for it. And the “beautiful” part? That, of course, is in the eye of the beholder.

    When Trump first promised to build the wall along the border, he apparently didn’t realize that his predecessors had already constructed hundreds of miles of barriers. It all started in 1996, when President #Bill_Clinton signed the #Illegal_Immigration_Reform_and_Responsibility_Act. Fences were constructed in urban areas, such as #Nogales and #San_Diego, with the intention of driving border crossers into the desert, where they could be more easily apprehended — but also where they were at greater risk of dying of heat-related ailments.

    A decade later, President George W. Bush signed the #Secure_Fence_Act of 2006, authorizing the construction of 700 miles of barriers. As a result, 652 miles of pedestrian and vehicle barriers already lined the border, mostly between #El_Paso and San Diego, by the time #Trump was elected. All the evidence, however, suggests that it did very little to stop undocumented migration, in part because at least two-thirds of undocumented immigrants in the U.S. arrived on #visas and then overstayed them.

    Besides, no wall is truly impregnable, as Trump himself indicated in a speech on the 30th anniversary of the fall of the Berlin Wall, when he said: “Let the fate of the Berlin Wall be a lesson to oppressive regimes and rulers everywhere: No Iron Curtain can ever contain the iron will of a people resolved to be free.” Oddly enough, “iron curtain” may be the most accurate description of Trump’s new segments of the wall.

    On the day of his inauguration, President Joseph Biden signed an executive order halting further construction. Now, many observers are urging him to go further and dismantle the barrier, as well as try to repair the damage done. Or, as President Ronald Reagan put it in 1987, “Tear down this wall!”

    https://www.hcn.org/issues/53.3/infographic-borderlands-border-barrier-boondoggle
    #cartographie #infographie #visualisation #murs #prix #coût #longueur #barrières_frontalières #Trump #promesses #promesses_non_maintenues #statistiques #chiffres #George_Bush #overstayers #Joe_Binden #walls_don't_work

    ping @reka