• Les émotions des émeutiers
    http://www.laviedesidees.fr/Romain-Huet-vertige-emeute-Zad-Gilets-jaunes.html

    À propos de : Romain Huët, Le vertige de l’émeute. De la Zad aux #gilets_jaunes, Puf. Pour Romain Huët, le vertige ressenti au cœur de l’émeute provoquerait un plaisir indicible en laissant entrevoir une autre forme de vie possible, plus solidaire. Mais la proposition fait peu de cas des règles de la méthode sociologique.

    #Société #révolte #émotions
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20200210_gayeremeute.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20200210_gayeremeute.pdf

  • #Allo_Place_Beauvau : « La France est une construction médiatico-policière »
    http://www.davduf.net/allo-place-beauvau-la-france-est-une-construction

    Présentation d’« #Allo_Place_Beauvau » et discussion du rôle des réseaux sociaux dans la visibilisation des violences policières. Débat sur Allo Place Beauvau et la place des images des réseaux Sociaux dans la visibilité des violences policières, à l’issue de la Masterclasse de David Simon. Allo Place Beauvau

    / Une, Allo Place Beauvau, #Gilets_Jaunes, #Maintien_de_l'ordre, #Police

  • Unité et différences dans les insurrections de France et du Chili

    Raoul Vaneigem

    https://lavoiedujaguar.net/Unite-et-differences-dans-les-insurrections-de-France-et-du-Chili

    Lettre de Raoul Vaneigem aux insurgées et aux insurgés du Chili, pour faire suite à une demande de précision sur la notion de « bien public » (31 janvier 2020), suivie de « Réponse et nouvelles du Chili ».

    La France a occupé et continue d’occuper dans l’imaginaire des révolutions une place particulière. Elle est le pays où pour la première fois dans l’histoire une révolution a brisé l’immobilisme et l’obscurantisme qu’imposait la prépondérance d’une économie essentiellement fondée sur l’agriculture. Sa victoire n’a pas signifié le triomphe de la liberté, elle a seulement marqué la victoire d’une économie de libre-échange qui, très vite, a étouffé les aspirations à une vraie liberté.

    La vraie liberté, c’est la liberté vécue. Les philosophes des Lumières en avaient pris conscience. Les Diderot, d’Holbach, Rousseau, Voltaire en avaient gravé l’évidence dans la mémoire universelle, et avant eux les principaux penseurs de la Renaissance, Montaigne, La Boétie, Rabelais, Castellion (à qui l’on doit le propos « Tuer un homme, ce n’est pas défendre une doctrine, c’est tuer un homme »).

    Bien que présente dans nombre de pays d’Europe, la lutte pour la liberté revêt en France une singulière acuité. Dès les XIe et XIIe siècles les insurrections communalistes se multiplient et s’intensifient. Elles ont pour but de libérer les villes de l’autorité tyrannique de la classe aristocratique, dont les revenus viennent principalement des paysans, des serfs qui travaillent leurs terres. (...)

    #Vaneigem #insurrections #unité #différences #bien_public #France #Chili #Gilets_jaunes #communalisme #révolution #Mai68 #émancipation #totalitarisme #Résistance #acquis #autogestion #radicalité #liberté

  • Manif des ’gilets jaunes’ : « Moi, dircab du Préfet, de leur point de vue, j’ai basculé dans le camp de l’ennemi »
    https://www.franceculture.fr/emissions/les-pieds-sur-terre/manifs-changer-de-camp


    Laurent est passé dans « l’autre camp ». Il était directeur de cabinet du Préfet en charge du maintien de l’ordre. Il dit aujourd’hui manifester avec les ’gilets jaunes’ au « nom des mêmes valeurs qui lui ont fait servir l’Etat ». Laurent et Philippe racontent leurs choix et leur changement de camp.

    Beau #témoignage #violences_policières #Gilets_jaunes

  • Les paradoxes de la « diagonale du vide »

    « La diagonale du vide, c’est cette bande de territoire allant du
    Nord-Est de la France jusqu’au Sud-Ouest en passant par le Massif
    central, caractérisée par une faible densité démographique et une
    tendance à la dépopulation.

    Cette expression alimente souvent un discours alarmiste, voire
    catastrophiste, en opposant une France urbaine supposée riche et
    dynamique à une France rurale abandonnée, en voie d’appauvrissement et de désertification.

    Cette opposition est simpliste et le tableau de la diversité
    territoriale de la France est beaucoup plus complexe et composite. Une étude récente de l’INSEE[1] à partir du dernier recensement le montre à nouveau. »

    Comment @Marc : encore un exemple d’un usage très politique de données statistiques…

    https://www.telos-eu.com/fr/les-paradoxes-de-la-diagonale-du-vide.html

    • Je vis dans un territoire du vide et je viens d’aller en visiter un autre et les données que j’en rapporte sont assez différentes.

      La principale variable explicative des mouvements de population actuelle est soigneusement gardée sous le boisseau, car il s’agit moins d’« attractivité » des territoires périphériques que d’un renforcement jamais égalé de la force centrifuge des métropoles par la pression immobilière .

      Pour la faire très courte : il n’est pas possible avec des revenus de zones périphériques de s’implanter à moins de 30 mn d’une métropole régionale (c’est encore plus vrai pour la capitale). Les conditions demandées pour l’accès à des logements étriqués excluent de fait au moins 50% de la population (en étant très généreuse).

      S’il y a bien quelques retraités encore un peu dotés financièrement et quelques actifs qui cherchent un cadre de vie de meilleure qualité, ce n’est plus du tout un mouvement majoritaire. Les jeunes ruraux (et assimilés) des zones excentrées qui espèrent avoir une éducation et/ou un boulot de qualité doivent toujours quitter le pays pour « la ville » qui concentre à un point jamais égalé la production de valeur ajoutée . Les babas & bobos qui sont arrivés jusqu’au début des années 2000 cherchent à présent à se rapprocher des centres de santé et services des métropoles régionales, qui répondent mieux aux problématiques des gens en perte d’autonomie et de santé.

      Alors qui arrive ?

      Depuis le début des années 2000 et encore plus intensément depuis la crise de 2007 qui a creusé vertigineusement les inégalités : les pauvres « inexploitables » des métropoles , les gens au minima sociaux sans espoir d’en sortir un jour, les « Cassos » qui entrent frontalement en concurrence avec les jeunes restés au pays qui godillent laborieusement dans le sous-emploi sous-payé et éclaté caractéristique de ces zones portées essentiellement par 4 secteurs d’activité :
      -- l’agriculture, saisonnière, morcelée, usante et extrêmement mal payée, qui ne permet généralement pas de sortir des minimas sociaux,
      -- les soins aux personnes (territoires vieillissants + pression foncière pour EHPADer loin des villes, où la « vie » est moins chère), un peu plus rémunérateurs mais très usants,
      -- le tourisme, qui paient peu et de manière saisonnière, donc on reste dans les systèmes D et minima sociaux,
      -- les fonctionnaires (surtout dans les préfectures) qui sont généralement les mieux payés et les mieux éduqués et qui permettent de n’avoir pas totalement une économie du tiers monde mais que les différents gouvernements s’acharnent à faire disparaître.

      L’arrivée des pauvres éjectés des villes ne se fait pas sur le mode du choix, mais plutôt de la sanctuarisation des métropoles économiques et cela engendre sur place des comportements de rejet et de repli qui ont commencé un peu à s’exprimer il y a un peu plus d’un an.

    • Tu as totalement raison. Et j’ai mentionné ce texte à dessein. Galland et un libéral de la mort qui tue. Et l’on voit donc comment tout le monde manipule les statistiques... En écho à un débat récent ici même sur les stats des atteintes sexuelles et la réponse pénale qui y est apportée...

    • Disons que j’ai remarqué une grosse vague de fond pour discréditer le travail de Christophe Guilluy sur « La France périphérique », ces derniers temps, qui va de pair avec la mise sous le boisseau du substrat (et donc de la légitimité) de la révolte des #Gilets_jaunes.

      J’ai de + en + l’impression qu’il s’agit d’invisibiliser la réalité du terrain : explosion des inégalités & durcissement des ségrégations spatiales sur fond de guerre des classes, avec sanctuarisation des centres-métropoles bourgeois.

      #territoires

    • Deux docus sur arte.tv disponibles en replay mais pas encore regardés :

      https://www.arte.tv/fr/videos/078202-000-A/les-nouveaux-pauvres-quand-travailler-ne-suffit-plus/?xtor=EPR-17

      Victimes du chômage ou condamnés aux petits boulots, un tiers des Européens, actifs et retraités, vivent dans une insécurité économique croissante. Le tableau édifiant d’une société au bord du précipice.

      https://www.arte.tv/fr/videos/084759-000-A/push-chasses-des-villes/?xtor=EPR-17

      Les grandes métropoles deviennent peu à peu le territoire exclusif des riches. Dans le sillage de Leilani Farha, rapporteuse spéciale de l’ONU sur le logement convenable, une enquête sur un phénomène mondial qui s’amplifie.

  • Le livre « Plein le dos, 365 gilets jaunes » est disponible en librairie, 372 pages, 20 euros :
    http://leseditionsduboutdelaville.com/index.php?id_product=11&controller=product&live_configur

    Les bénéfices vont aux caisse de soutien aux blessé.e.s, mis en examen et prisonnier.e.s du mouvement GJ !

    Ma compilation sur le sujet :
    https://seenthis.net/messages/752886

    #Gilets_Jaunes #photos

  • VIDEO. Grand débat national : un an après, le contenu introuvable des cahiers de doléances
    https://www.francetvinfo.fr/politique/gouvernement-d-edouard-philippe/grand-debat-national-le-contenu-introuvable-des-cahiers-de-doleances_37

    Il y a un an, les citoyens ont rempli plus de 16 000 cahiers de doléances, en mairies, dans le cadre du Grand débat national. Des cahiers transmis ensuite aux préfectures pour que l’État les analyse. Comme en Corrèze où une équipe de France 2 s’était rendue en février 2019. Mais le contenu de ces cahiers n’a jamais été mis en ligne.

    Sur le site du Grand débat, le gouvernement publie bien une synthèse issue, entre autres, des cahiers citoyens mais pas l’intégralité des contributions comme il s’y engage toujours sur la plateforme : “Les cahiers citoyens ouverts dans les mairies seront mis en ligne sous licence libre.”
    Des problèmes techniques en cause ?

    Alors que s’est-il passé ? Les préfectures, après avoir récupéré les cahiers, les ont transmis à la Bibliothèque nationale de France (BNF) pour qu’ils soient numérisés. Puis ces documents ont été transformés en texte informatique pour être analysés par des spécialistes. On appelle cela “l’océrisation”.

    Ces données, l’État les a gardées pour lui et ne les a jamais publiées sur Internet. Le cabinet de Sébastien Lecornu, ministre qui coanimait le Grand débat, avance des problèmes techniques. “Les cahiers citoyens représentent des téraoctets de données, les héberger en permanence sur le site aurait été trop lourd à mettre en place.”

    Hum, des teraoctets (beaucoup, n’est-ce pas ? pour empêcher une mise en ligne quand on a pour rien des disques de 2 à 10 To) pour du texte après OCR... bidon.

    Une explication qui ne convainc pas ceux qui ont analysé ces données. “On ne nous a jamais parlé de cette raison-là à l’époque, réplique Gilles Proriol, gérant de Cognito Consulting, l’une des trois entreprises mandatées par le gouvernement pour traiter les contributions. Je ne pense pas qu’elle soit pertinente puisque l’ensemble de nos données tenaient sur nos ordinateurs. Le problème c’est qu’on ne peut plus faire d’analyses sur ce corpus, qui est un trésor national. On n’a jamais collecté autant d’expressions citoyennes en France. C’est dommage.”

    #Transparence #Grand_débat #Gilets_jaunes #Cahiers_doléances

  • « On nous appelait les #prisonniers politiques » : des #gilets_jaunes #incarcérés racontent - Basta !
    https://www.bastamag.net/gilets-jaunes-prisonniers-politique-colere-sociale-detention-justice

    Plus de 400 gilets jaunes, condamnés à de la #prison_ferme, purgent ou ont purgé leurs peines. Certains ont accepté de raconter à Basta ! leur découverte de l’#univers_carcéral, une expérience qui marque les personnes et souvent déstabilise les familles. Tout en laissant une trace profonde sur le mouvement.

    En plus d’un an près de 440 gilets jaunes ont été incarcérés pour des peines de un mois à trois ans. Cette répression, menée sur le plan judiciaire et carcéral, a bouleversé leurs vies et celles de leurs proches, et affecté l’ensemble du mouvement. À #Montpellier, Perpignan, #Narbonne, #Le_Mans et d’autres villes, Bastamag a rencontré plusieurs prisonniers et leurs soutiens, qui nous ont raconté leur expérience.

    [...]

    Malgré ces conditions très difficiles, de nombreux gilets jaunes interrogés témoignent du respect exprimé par les autres détenus. « Mon nom c’était le "gilet jaune du B2 rez-de-chaussée", se souvient Victor. Pendant les promenades, certains prisonniers me posaient des questions sur le mouvement. Certains disaient "Quand on sort, si ça continue on sera avec vous !" »

    L’ambiance est similaire à #Perpignan. « On nous appelait les "#prisonniers_politiques". La majorité des détenus soutenaient les gilets jaunes. Ils savaient qu’on avait manifesté pour la justice et la dignité, témoigne Abdelaziz. Les prisonniers, majoritairement issus des quartiers populaires, y aspirent aussi. Ils sont souvent incarcérés parce qu’ils ont fait des actions illicites pour obtenir de l’argent et améliorer leur quotidien. »

    Parfois, les #manifestations de #soutien sont allées jusqu’au personnel de la #prison. « Une des surveillantes m’appelait "#camarade" », se souvient Victor. Abdelaziz est encore plus affirmatif : « Les trois-quarts des gardiens nous soutenaient, et le reste ce sont des fachos. L’un d’entre eux participait même au mouvement au début. » Sourire aux lèvres, Victor évoque même des encouragements, à mots couverts, de la psychologue chargée de son suivi. « Elle a fini par me dire que j’avais raison d’aller aux manifestations. »

  • « On nous appelait les prisonniers politiques » : des gilets jaunes incarcérés racontent
    https://www.bastamag.net/gilets-jaunes-prisonniers-politique-colere-sociale-detention-justice

    Plus de 400 gilets jaunes, condamnés à de la prison ferme, purgent ou ont purgé leurs peines. Certains ont accepté de raconter à Basta ! leur découverte de l’univers carcéral, une expérience qui marque les personnes et souvent déstabilise les familles. Tout en laissant une trace profonde sur le mouvement. En plus d’un an près de 440 gilets jaunes ont été incarcérés pour des peines de un mois à trois ans. Cette répression, menée sur le plan judiciaire et carcéral, a bouleversé leurs vies et celles de leurs (...) #Résister

    / #Luttes_sociales, #Justice, #Droits_fondamentaux, #Le_mouvement_des_gilets_jaunes, A la une, #Enquêtes, Classes (...)

    #Classes_populaires

  • Tout commence ici et maintenant

    Raoul Vaneigem

    https://lavoiedujaguar.net/Tout-commence-ici-et-maintenant

    À celles et ceux de Commercy,

    Jusqu’à présent le capitalisme n’a vacillé qu’en raison de ses crises de développement interne, de ses flux de croissance et de décroissance. Il a progressé de faillite en faillite. Jamais nous n’avons réussi à le faire tomber, si ce n’est en de très brèves occasions où le peuple a pris en main sa propre destinée.

    Ce n’est pas jouer les prophètes que de l’affirmer : nous sommes entrés dans une ère où la conjoncture historique est favorable à l’essor du devenir humain, à la renaissance d’une vie ivre de liberté.

    C’en est assez des murs de lamentations ! Trop d’hymnes funèbres minent en sourdine le discours anticapitaliste et lui donnent un arrière-fond de défaite.

    Je ne nie pas l’intérêt d’observatoires du désastre. Le répertoire des luttes s’inscrit dans la volonté de briser la mondialisation financière et d’instaurer une internationale du genre humain. Je souhaite seulement que viennent s’y ajouter les avancées expérimentales, les projets de vie, les apports scientifiques dont la poésie individuelle et collective jalonne trop discrètement ses territoires. (...)

    #Vaneigem #Commercy #Commune #capitalisme #devenir_humain #internationale #poésie #subjectivité #insurrection #terre #finance #État #autodéfense #auto-organisation #zapatistes #EZLN #Rojava #autoconstruction #permaculture #école #Gilets_jaunes

  • « Si je suis aux Restos du coeur, c’est parce que j’ai été mutilé par la police » | StreetPress
    https://www.streetpress.com/sujet/1579018259-restos-coeur-mutile-par-police-violences-blesses-gilets-jaun

    Mutilés par la police, ces Gilets jaunes ont perdu un oeil, une main ou des dents. S’ajoute le traumatisme psychologique mais aussi souvent l’extrême précarité financière. Ils racontent leur quotidien entre arrêt-maladie, chômage et restos du coeur.

  • Lettre à Cléone, depuis le Chiapas

    Jérôme Baschet

    https://lavoiedujaguar.net/Lettre-a-Cleone-depuis-le-Chiapas

    Chère Cléone,

    C’est une joie de vous écrire, même si je sais l’impossibilité de se porter au degré d’intensité de votre verbe ardent et de votre rebelle périple à travers géographies et calendriers.

    Bien sûr, le sentiment de fraternité-sororité m’inclinerait au tutoiement, mais votre être multiple impose tant de respect. Vous êtes si nombreuse, Cléone, si heureusement collective, que je crois plus convenable d’opter pour la seconde personne du pluriel.

    Vous venez de plus loin que nous, et pourtant vous nous avez devancés. Chargée de féroces siècles d’expérience, vous avez pris de l’avance sur nos futurs possibles. Les plus tragiques, mais aussi les plus désirables d’entre eux. Ceux dont nous avons le devoir de débattre davantage, de parler sans cesse plus fort. Ceux qu’il nous incombe de rendre dès maintenant visibles, hautement sensibles et puissamment actifs. Non pour demeurer confits dans une attente béate ou pétrifiés par l’angoisse, mais pour nourrir l’action présente, au milieu des immenses périls qui s’accumulent. (...)

    #Jérôme_Baschet #Chiapas #Cléone #zapatistes #Rojava #Gilets_jaunes

  • Les Vœux de la Coordination RATP SNCF IDF
    https://www.youtube.com/watch?v=dYMyq7v-OW4

    Les grévistes des transports IDF, rassemblés en Coordination, vous présentent leurs vœux 2020.
    Anasse Kazib
    RS-RATP

    Vœux 2020 des grévistes RATP/SNCF
    Coordination francilienne RATP/SNCF

    https://blogs.mediapart.fr/jean-marc-b/blog/311219/voeux-de-la-coordination-ratp-sncf-de-la-coordination-idf-la-breche-
    https://www.revolutionpermanente.fr/IMG/pdf/sans_titre-1.pdf

    Avant de commencer cette conférence de presse, on tient à dénoncer la répression que nos collègues de bus et tous leurs soutiens subissent depuis plusieurs jours devant les dépôts. Une répression particulièrement violente par la #Brigade_anti-criminalité qui a fait des blessés comme hier à Saint Denis, où un étudiant a été blessé puis arrêté par la police, ou encore ce matin à Ivry ou à Pavillon-sous-bois, où un collègue a dû partir aux urgences et a deux points de suture.

    Le président vient de transmettre ses vœux aux Français. Sans grande surprise il fait le vœu de continuer le pourrissement de la situation pour la rentrée 2020, en maintenant une réforme des retraites nocive pour l’ensemble des travailleurs et travailleuses du privé comme du public, mais également pour l’ensemble des générations futures.

    Depuis le 5 Décembre et après, les cheminots, les agents RATP, l’Education nationale, l’énergie, les raffineurs, les artistes de l’Opéra de paris, ainsi qu’un grand nombre d’entreprises du privé comme du public, sont en grève contre la réforme des retraites initiée par Jean-Paul Delevoye. Ni amendable, ni négociable, la base veut le retrait total et point barre.

    Nous sommes actuellement au 27ème jour de grève, sans aucune interruption. Nous avions prévenu le gouvernement
    que sans l’annonce du retrait, aucune trêve ne verrait le jour. Emmanuel Macron et son jusqu’au-boutisme mènent donc le pays vers une paralysie total pour la rentrée 2020.

    Nos vœux s’adresseront tout d’abord à l’ensemble des usagers des transports publics qui, nous le savons, sont impactés par la stratégie de pourrissement du Président de la République. Si certains politiques et médias passent leur temps à vouloir nous opposer les uns aux autres, nous connaissons votre solidarité et votre fraternité dans cette période. Nous sommes dans le même camp. L’ensemble des sondages d’opinion, les rencontres dans la rue, ou encore les caisses de grève que vous alimentez quotidiennement , témoignent de cette solidarité et nous vous en remercions chaleureusement.

    Nous réaffirmons dans nos vœux la nécessité de faire du transport public, le transport de toutes et de tous, contre la privatisation et le dumping social. C’est pour cela que nous souhaitons que le transport devienne #gratuit, d’une part car il est d’intérêt public et non d’intérêt lucratif, mais également car les transports gratuits participent directement à la réduction des émissions de carbone dans l’ #environnement. C’est au patronat de financer les transports, car la grande majorité des trajets en transport se font entre le domicile et le travail. Pourquoi donc un travailleur devrait-il continuer à payer un abonnement ou bien même la moitié, pour aller faire tourner l’entreprise d’un patron ?

    Nous dénonçons également le double discours de la direction de la #SNCF concernant les fêtes de fin d’année. D’un côté, elle fait croire qu’elle s’inquiète pour les usagers qui auraient eu des difficultés à prendre le train, et de l’autre, elle augmente les prix des billets #TGV durant #Noël de manière révoltante, allant parfois jusqu’à annuler des réservations pour revendre ces mêmes places à des prix prohibitifs.

    Nous dénonçons également l’attitude de la #RATP qui, pour donner l’illusion d’un retour progressif à la normale, envoie ses mercenaires de la « Réserve Générale » sur les tronçons de ligne traversant les beaux quartiers parisiens, abandonnant de fait à leur sort les prolétaires des quartiers populaires. Ils ont par ailleurs laisser les usagers payer 70 euros de pass Navigo pour ensuite les entasser comme des sardines.

    Nous souhaitons également attirer l’attention de l’ensemble de la population sur les risques importants que sont en train de prendre le gouvernement et les entreprises de transport. En effet, l’entretien du réseau ferroviaire, mais également du matériel RATP ou SNCF, ne se fait quasiment plus depuis le début de la grève, car la grève est importante également dans les métiers de la maintenance . Le gouvernement joue donc à la roulette russe avec chacune des circulations. Nous alertons l’opinion publique sur ces dérives, la vie des usagers ne doit pas être mise en danger pour faire passer cette reforme nocive coûte que coûte.

    Cette bataille contre le gouvernement n’est en réalité que la continuité de la crise sociale importante que le gouvernement #Macron a accentuée par ses multiples contre-reformes. En deux ans, la politique d’Emmanuel Macron aura fait surgir le mouvement le plus subversif de la 5ème République avec les #Gilets_jaunes, et il détient dorénavant le record de la #grève la plus importante depuis 1995, avec l’ensemble des #organisations_syndicales contre lui.

    Nous continuerons donc dès 2020 à lutter contre cette reforme qui ne propose rien d’autre qu’un monde de précarité aux actifs et aux générations futures. Au-delà du retrait de la réforme des #retraites, nous sommes conscients, nous grévistes, que c’est toute la société qu’il faut révolutionner. Une société avec plus de 6,5 millions de chômeurs, 9 millions de personnes qui vivent avec moins de 1000 euros par mois, 200.000 SDF dans les rues. La question n’est donc pas uniquement sur la retraite, mais sur quel monde nous voulons pour nos enfants. Voulons-nous un monde où des ministres qui cumulent 14 mandats demandent de l’équité à ceux d’en bas ? Voulons-nous un monde où c’est le leader américain des fonds de pension #Black_Rock qui va décider de nos pensions ? Voulons-nous un monde où la #fraude_fiscale annuelle est équivalente à 60 fois la #dette du système des retraites ?

    Nous l’affirmons, cette reforme du système par points ne vise rien d’autre qu’à niveler les pensions de retraite par le bas et c’est contre cela que nous nous battons. Nous sommes pour un système de retraites nivelé par le haut, permettant aux millions de travailleurs de profiter de leur vie, leur famille, leurs enfants, après des années de travail. Un système de retraites prenant en compte réellement la #pénibilité de l’ensemble des métiers et non seulement de quelques corporations. Nous pensons au #travail_de_nuit, aux métiers exercés en plein air avec le froid et la chaleur, etc. Le gouvernement voudrait faire croire à la population que le système #Delevoye serait positif, mais pourtant il en a déjà exclu un certain nombre comme la police, les militaires, les pilotes ou autres.

    Le gouvernement de la hausse de la #CSG, de la hausse des taxes, de la suppression de l’ #ISF, de la #FlatTAXE, de l’ #ExitTaxe, du doublement du #CICE en cadeau aux entreprises, de la fermeture des classes à l’école ou encore des lits d’hôpitaux, serait devenu bienveillant à l’égard des travailleurs ? Baliverne.

    Contre l’idée d’une reforme façon Delevoye et Black Rock, nous appelons à la mise en place d’une reforme des retraites financée par le patronat pour permettre aux millions de travailleurs de partir plus tôt avec une pension calculée a minima sur les 6 derniers mois de salaire. Jamais le PIB n’a été aussi élevé, jamais les dividendes aux actionnaires n’ont été aussi élevés, jamais la fraude fiscale n’a été aussi importante, et les cadeaux aux plus riches toujours aussi nombreux. Le #Conseil_d’orientation_des_retraites indique par exemple dans sont rapport qu’avec l’augmentation des #cotisations de 0,3% l’ensemble des régimes seraient à l’équilibre. C’est donc au patronat de prendre en charge cette augmentation et non pas à l’ensemble des travailleurs et la jeunesse de ce pays. De nombreux économistes démontrent également qu’avec 3 à 4% du PIB l’ensemble des salariés pourrait partir à 60 ans à taux plein avec le meilleur calcul de retraite. En somme, c’est à peine la moitié de la fraude fiscal annuelle. Des milliards, il y en a, mais aujourd’hui ils sont concentrés dans les mains des patrons qui pour beaucoup suppriment des emplois et disparaissent dans la nature.

    C’est donc une bataille importante pour notre avenir qui se joue aujourd’hui. Nous appelons à la solidarité financière de
    tous ceux qui nous soutiennent pour que nous puissions tenir le temps nécessaire pour gagner.
    Il est temps également que l’ensemble des confédérations syndicales mettent la main à la poche et participent à l’effort des grévistes depuis 27 jours maintenant. Mais par dessus tout nous appelons les confédérations syndicales à travailler réellement et concrètement pour faire rentrer l’ensemble des secteurs dans la grève générale pour gagner.

    Hier, à l’appel de cette même coordination, une importante délégation des grévistes RATP et SNCF s’est rendue à
    Grandpuits pour soutenir et encourager les grévistes de la raffinerie à poursuivre et à durcir le mouvement à nos côtés.

    Nous appelons l’ensemble des secteurs, du privé comme du public, ainsi que la jeunesse, à nous rejoindre dans la lutte. Cela va faire un mois qu’on est en grève et qu’on perd nos salaires pour défendre la retraite de tous et toutes. Mais le gouvernement joue le pourrissement et il est prêt à laisser tout le monde dans la galère encore un mois s’il le faut. Nous lançons, en cette soirée de réveillon, un appel solennel à tous les travailleurs et travailleuses de ce pays, qui nous soutiennent chaleureusement depuis le début, à nous aider encore un peu plus, à se mettre en grève pour en finir définitivement, tous ensemble, avec cette réforme de retraites. C’est maintenant que la brèche est ouverte pour généraliser la grève, et c’est maintenant qu’on peut faire plier Macron !

    Nous adressons donc à toutes et à tous une excellente année 2020, elle sera faite de luttes et, nous l’espérons, de victoire.

  • Grévolution : 1er round d’une grève généralisée
    http://www.platenqmil.com/blog/2019/12/29/grevolution--1er-round-dune-greve-generalisee

    Une analyse intéressant et très positive du mouvement en cours.

    Grévolution : 1er round d’une grève généralisée
    29 Décembre 2019

    Par Plateforme d’Enquêtes Militantes

    Depuis trois semaines, la France est traversée par un mouvement général de grève de très grande ampleur. Si cette grève est aussi forte, c’est parce qu’elle ne se contente pas de puiser dans le répertoire classique de la mobilisation sociale. Ce mouvement de grève s’appuie sur une année de lutte incroyable avec les Gilets Jaunes. Mais il s’appuie aussi sur la radicalité du mouvement contre la Loi Travail en 2016 et 2017 et sur la bataille des cheminot.e.s et des étudiant.e.s en 2018 – autant de combats dont les échecs sont peut-être en train d’être dépassés et dont certaines réussites se sont finalement consolidées. Comme le soulignait très justement une gréviste de la RATP lors d’une AG à Saint Lazare : « la référence c’est pas 1995 ou autre chose, la référence c’est 2019 ! ».

    En condensant une multitude de révoltes, ce mouvement redonne du souffle à une diversité de pratiques et de mots d’ordre globaux qui se sont renforcés jours après jours plutôt que de se limiter à une offensive par semaine ou par mois. La lutte est en cours et beaucoup de choses restent encore à imaginer et à construire. Mais dans un contexte européen en crise, il faut souligner l’ampleur de ce que suscite le cas français, par couches successives, en termes de production de contre-pouvoirs aux politiques néolibérales et autoritaires. C’est ça l’enjeu de l’affrontement, qui assume de plus en plus une portée historique, se situant bien au-delà du cadre national.

    #Grève #Gilets_jaunes #Syndicats

    • CES FORCES QUI COMPOSENT ET RECOMPOSENT LES LUTTES AUTOUR DES RETRAITES, Temps critiques
      https://lundi.am/Ces-forces-qui-composent-et-recomposent-les-luttes-autour-des-retraites

      UN MOUVEMENT NON RÉDUCTIBLE À CELUI SUR LES RETRAITES

      Depuis le 5 décembre 2019 c’est la grève qui est de retour, alors que depuis Nuit debout, le mouvement contre la loi-travail et l’événement Gilets jaunes, cette forme de lutte apparaissait en retrait, — si on excepte la dernière grève à la SNCF — et avec elle les manifestations de type syndical. Les forces qui composent le mouvement actuel sur les retraites viennent rencontrer, mais aussi heurter d’autres forces qui, soit les précèdent (le mouvement des Gilets jaunes), soit les accompagnent (étudiants, lycéens) à partir de leur propre base qu’on ne peut qualifier de revendicative [1]. Mais si la rencontre peut potentiellement se faire — du moins on peut l’espérer — c’est que toutes posent, à leur propre façon la question des conditions de vie et le fait que la survie n’est pas un mode de vie.

      Dans cette mesure, on peut dire que si le mouvement pour les retraites est au centre de la lutte actuelle et en constitue sa force prédominante, elle n’est pas et doit encore moins devenir l’horizon de la lutte. Le mouvement est en effet bien plus large et les retraites ne représentent que la partie émergée de la révolte actuelle qui s’exprime ici de façon immédiate contre les réformes à travers une sorte de front du refus opposé au « nouveau monde » qui lui est présenté et auquel il faudrait s’adapter (le darwinisme social de la révolution du capital).

      C’est parce que les Gilets jaunes ne pouvaient qu’aller au-delà de cette immédiateté, du fait de leur composition sociale, que leur urgence sociale porte en germe une généralité suffisante pour que s’y intègre aussi la question de la retraite... et pour que, finalement, ils restent eux-mêmes dans le jeu. C’est ce qu’on peut voir dans les AG et dans les rues où le « style Gilets jaunes » tend, si ce n’est à s’imposer, du moins influence certaines fractions de salariés. C’est ce point que les syndicats ont du mal à avaler. Mais cet « effet Gilets jaunes » reste cependant limité : il est à cet égard inapproprié de parler d’une « giletjaunisation » du mouvement.

      #chômage

  • Garde à vue
    https://lundi.am/Garde-a-vue

    Emilie Rolquin est étudiante en école d’animation. Le 8 décembre 2018, elle fait partie des 974 personnes placées en garde à vue à Paris à l’occasion de l’acte 4 des Gilets jaunes. Ces 24 heures de privation de liberté, les cellules sales, sa rencontre avec la police, c’est tout cela qu’elle raconte admirablement dans ce petit film d’animation.

    https://www.youtube.com/watch?v=n4fnRmLzH8E

  • Grande redistribution au Carrefour du Merlan - Marseille Infos Autonomes
    https://mars-infos.org/grande-redistribution-au-carrefour-4600

    Ce samedi matin 14 décembre, une action caddys gratuits a été menée au Carrefour du Merlan. Dans un contexte de lutte syndical au sein du magasin, des #Gilets_jaunes et des #précaires ont bloqué les caisses en exigeant de pouvoir sortir gratuitement avec leurs caddys remplis, ce qui a entraîné la fermeture du Carrefour pendant plusieurs heures.

  • « c’est ballot ! »
    https://nantes.indymedia.org/articles/47882

    Gendarmerie et justice ont plus de temps pour essayer d’intimider et criminaliser des manifestants que pour enregistrer des plaintes pour violence conjuguale ou défaut de pension alimentaire, par exemple... Comble de l’histoire : les ballots de paille, pourtant au coeur de la procédure, n’ont jamais été entendus, ni même convoqués !!

    #violences_judiciaires #Gilets_Jaunes #repression

    • Mais la justice non plus n’est pas aussi débordée que certaines mauvaises langues le disent : dès ce 2 décembre 2019, nous sommes 16 personnes convoquées par le délégué du procureur du tribunal de grande instance de la Roche sur Yon. En effet, même si ni Mac Donald ni Super U n’ont porté plainte, la justice, elle, ne l’entend pas de cette oreille et nous condamne selon une procédure simplifiée de 1972, mise en place pour traiter certaines contraventions, c’est à dire les infractions les moins graves. Son champ d’application a été élargi par la loi du 9 septembre 2002 en y incluant certains délits. Et c’est un délit qui nous est reproché. Donc, quelqu’un peut être condamné sans être entendu par la justice.

      Un procureur nous poursuit. Une vice présidente du TGI nous condamne à une peine de 150€ d’amende chacun, et 50€ de plus pour ceux qui avaient eu le malheur d’avoir eu affaire précedemment à la justice, pour avoir ’placé 4 ballots de paille devant les deux passages du parking véhicules du Mac Donald de la zone commerciale du Super U de Boufféré- Montaigu-Vendée’. Ce que aucun de nous ne reconnait : les ballots de paille s’étaient installés avant notre arrivée. Et personne n’a apporté la preuve qu’un de nous les a installés puisque ce n’est pas nous. Nous échappons à la prison, même avec sursis. Enfin cette fois ci car à quoi s’attendre à une prochaine manif ou dans d’autres circonstances, si on a le malheur d’être interpellé ? C’est peut être l’objectif : faire planer une menace sur des gens. Et aussi les frapper au portefeuille , 181€ , avec les frais de procédure. Quand on est au Smic (1203€ net) ou un peu au dessus, au minimum vieillesse (868€ net), au RSA (550€ net), 181 € ce n’est pas rien. Plus du cinquième du minimum vieillesse. Nous sommes dans ces situations car nous sommes ces gens là, qui travaillent, qui cherchent du boulot, qui sont à la retraite, toutes sortes de situations de ce monde du travail dégradé. Nous sommes des personnes très diverses, des hommes, des femmes, de tous âges. Ce qui nous relie c’est que nous sommes très ’peuple’ et avons dit ’y en a marre’.

      De plus, chacun aura une inscription au casier judiciaire, le B2. Très embêtant quand on cherche du boulot ou qu’on travaille dans certains secteurs. Cela participe à la criminalisation du militantisme et s’inscrit dans la repression d’un mouvement social.

      Nous souhaitons donc faire opposition (c’est le terme de la justice) à cette condamnation. Cette opposition va nous couter 125€ en frais de procédure et il faudra payer un avocat pour une défense commune. Ce recours va peut être nous couter autant que la condamnation, mais nous ne voulons pas être condamnés pour quelquechose que nous n’avons pas fait ni avoir une menace planant au dessus de nous.

      #ACAB #macronie

  • La France périphérique un an après : un mythe aux pieds d’argile | AOC media - Aurélien Delpirou et Achille Warnant
    https://aoc.media/analyse/2019/12/11/la-france-peripherique-un-an-apres-un-mythe-aux-pieds-dargile

    En dix ans, le consultant en géographie #Christophe_Guilluy a acquis une forte notoriété et réussi à imposer des formules chocs dans le débat public, à l’instar de sa trop fameuse « #France_périphérique ». Si les critiques sérieux n’ont pas attendu si longtemps pour déconstruire et réfuter cette doxa médiatique, le mouvement des Gilets jaunes est venu lui porter le coup de grâce. Il serait temps d’en prendre acte.
    Un an après l’explosion du mouvement des #Gilets_jaunes, qu’il aurait prophétisé, le géographe et essayiste Christophe Guilluy est considéré comme l’un des plus fins observateurs des recompositions sociales et territoriales à l’œuvre dans la France contemporaine. Théoricien, au début des années 2000, du concept de France périphérique, il se présente volontiers comme le porte-voix des territoires éloignés des métropoles, décrits comme étant relégués spatialement et socialement.

    Mobilisées par des responsables politiques de toutes obédiences et largement relayées par les médias et les réseaux sociaux, ses idées se sont progressivement imposées dans le débat public, comme en témoigne l’usage désormais banalisé de la notion de France périphérique.

    Ce succès politico-médiatique est d’autant plus remarquable que Guilluy s’estime ostracisé par les milieux académiques et « victime du politiquement correct ». Un avis que partage son confrère Laurent Chalard, qui lui a consacré un long article hagiographique en 2017 dans la revue Outre-Terre : « si vous souhaitez vous faire des amis au sein de la (petite) communauté des géographes français, il est vivement conseillé de ne pas aborder avec ses membres la question du plus célèbre de ses représentants vivants, Christophe Guilluy », ironise-t-il.

    Coupable de ne « pas être issu du sérail » et d’avoir « volé la vedette aux mandarins d’une communauté réputée pour sa fermeture et son entre-soi », Christophe Guilluy ferait l’objet de critiques « irrationnelles » de la part des chercheurs[1].

    Comment expliquer ce décalage inédit par son ampleur dans le champ des sciences sociales francophones ? Comment interpréter le succès des thèses de Guilluy malgré les controverses qu’elles ont suscitées ?

    Afin d’apporter quelques éléments de réponse à ces questions, cet article entend s’éloigner des polémiques en reconstruisant de manière factuelle le parcours éditorial du géographe, puis en présentant de manière aussi « rationnelle » que possible les principales critiques adressées à la notion de France périphérique, sans entrer dans les dimensions politico-idéologiques et ethnoculturelles du débat. Nous terminerons en montrant en quoi la crise des Gilets jaunes a signé dans le même temps l’apogée et le dépassement de cette notion.

    La bonne fortune médiatique d’un géographe « hors-circuit »
    Né en octobre 1964 à Montreuil, Christophe Guilluy grandit à Paris où il suit, dans les années 1980, un cursus de géographie à l’université. Dans son mémoire de maîtrise (1987), il s’intéresse aux conséquences des politiques de rénovation urbaine sur les quartiers populaires de Paris.

    Encadré par deux géographes proches du parti communiste, Jean-Philippe Damais et Michel Grosse, ce travail est l’un des premiers à mettre en lumière l’embourgeoisement de l’Est parisien. Faute d’avoir obtenu une bourse de thèse, Guilluy devient d’abord pigiste pour différents médias, avant de se tourner vers le conseil aux collectivités locales en 1989. Cette reconversion est dans un premier temps difficile : ses clients, pour l’essentiel des municipalités gérées par des élus communistes, se raréfient avec l’effondrement du parti.

    En 1995, le géographe crée un bureau d’études ; Maps, qui se spécialise dans l’appui à la rénovation des quartiers de grands ensembles. Dans le cadre de cette activité, il s’engage en faveur de la politique de la ville et prend des positions qui le situent alors à la gauche de la gauche[2].

    Cette même année, l’élection présidentielle est marquée par le discours de Marcel Gauchet et d’Emmanuel Todd sur la « fracture sociale » opposant la « France d’en haut » à celle « d’en bas ». Guilluy y est sensible et débute, à la fin des années 1990, l’écriture de son premier essai, Atlas des fractures françaises, qui paraît en 2000 aux éditions L’Harmattan.

    L’ouvrage s’attache à montrer les effets inégalitaires de la métropolisation sur les territoires à toutes les échelles. Cette analyse le conduit à évoquer, par opposition aux métropoles « qui concentrent l’essentiel du progrès économique et des richesses », des « territoires périphériques » constitués à la fois de « zones industrielles au tissu productif fragile » et de « zones à dominante rurale et tertiaire ».

    Si le succès éditorial n’est pas au rendez-vous, le livre permet à Guilluy d’ordonner ses idées et d’acquérir une certaine légitimité pour intervenir dans le débat public. En 2001, quelques mois avant les élections municipales, Libération lui ouvre ses colonnes : dans une tribune intitulée « Municipales : les bobos vont faire mal », le géographe explique que la gauche est susceptible de remporter la Ville de Paris grâce à l’apparition d’une nouvelle bourgeoisie bohème qui opère une « ghettoïsation par le haut » de la capitale.

    Le concept de « bobo », repris au journaliste américain David Brooks, permet au texte d’être remarqué. Guilluy signe une nouvelle tribune dans Libération l’année suivante, intitulée « Arlette et Le Pen, incarnation du peuple ». Il y explique que ces deux figures politiques sont les candidats « naturels » des catégories populaires, mais aussi que « paradoxalement, les discours des deux mouvements, loin de s’opposer, se complètent en couvrant un large spectre des causes de l’exaspération [sociale] ».

    Pour la première fois, l’auteur parle explicitement de la France périphérique[3], cette « terra incognita des fameuses élites gestionnaires ». La notion est définie en 2003, de manière très large, dans une tribune publiée elle-aussi dans Libération : il s’agit de la France des « régions industrielles, des espaces ruraux, des quartiers de logements sociaux et des zones de lotissements pavillonnaires bas de gamme ». 

    Ces idées sont développées et précisées dans l’Atlas des nouvelles fractures sociales en France, rédigé avec le géographe Christophe Noyé (Autrement, 2004). Les auteurs identifient une double dynamique d’embourgeoisement des centres urbains et de décrochage de la France périphérique.

    Celle-ci est désormais définie, à l’aide de plusieurs cartes et graphiques et dans une perspective plus sociologique, comme celle « des ouvriers ruraux, des petits paysans, des employés de lotissements pavillonnaires bas de gamme et des chômeurs de banlieue ». Le tableau des lignes de fracture du territoire français est encore complexe et nuancé.

    L’ouvrage connait un succès d’estime dans la sphère académique – il entre dans la plupart des bibliothèques universitaires –, tout en suscitant l’intérêt de personnalités politiques de premier plan : Dominique de Villepin, alors ministre de l’Intérieur, invite les deux auteurs à venir lui présenter leurs travaux[4].

    La publication de Fractures françaises en 2010 aux éditions François Bourin marque un tournant. La dimension ethnoculturelle prend une place nettement plus grande dans l’analyse[5], les données empiriques se font plus rares, le ton devient plus polémique sinon vindicatif.

    En opposition aux travaux « idéologiques » des « chercheurs politisés », Guilluy revendique désormais un « discours de vérité ». Le géographe dénonce l’« obsession des banlieues », qui masquerait selon lui les deux principales recompositions socio-spatiales liées à la mondialisation : gentrification et immigration dans les métropoles d’un côté ; relégation des catégories populaires traditionnelles (ouvriers et employés) dans la France périphérique de l’autre.

    Laissée à l’écart de la production de richesses, cette majorité invisible, blanche et laborieuse serait de plus en plus sensible aux idées du Front national en raison de son opposition au « multiculturalisme cosmopolite ». En conclusion, Guilluy en appelle à la reconnaissance du « capital d’autochtonie », au « retour du peuple » et à la réhabilitation du « récit national ».

    En raison de la modestie de son éditeur, le livre rencontre initialement peu d’écho. Selon Laurent Chalard, son destin bascule quand Alain Finkielkraut recommande « la lecture de Fractures Françaises à l’occasion d’une émission télévisée sur France 5 ».

    De fait, plusieurs quotidiens et hebdomadaires nationaux lui consacrent des articles (Le Monde, Le Figaro, Marianne,), tandis que Guilluy est invité dans l’émission Zemmour & Naulleau sur Paris Première, où il est présenté comme l’« idole » du polémiste star de la droite identitaire. L’ouvrage retient même l’attention du président de la République, Nicolas Sarkozy, qui invite le géographe à l’Élysée sur les recommandations de son conseiller spécial Patrick Buisson.

    Aux débuts des années 2010, plus largement, la notion de France périphérique est progressivement reprise dans le champ politique, à droite (Laurent Wauquiez, Jean-François Copé) et à l’extrême droite (Marine Le Pen) aussi bien qu’à gauche (Manuel Valls, Cécile Duflot), dans des versions très différentes toutefois.

    En 2012, François Hollande l’invite à son tour à l’Élysée, où il échange avec Emmanuel Macron qui, selon Guilluy, aurait « valid[é] [son] diagnostic » à l’occasion d’une rencontre informelle entre les deux hommes. De fait, dans son ouvrage Révolution (2016), le futur président cite abondamment la France périphérique.

    Les critiques sont rares ; la plus notable est sans doute celle de Martin Vanier dans la revue Urbanisme. Dans un court texte, il dénonce la « confusion sulfureuse » entretenue par l’auteur et sa façon de caricaturer les « contenus sociologiques, fonctionnels et idéologiques des catégories qu’il oppose ». Adoptant une posture qui sera la sienne jusqu’à aujourd’hui, Guilluy refuse de lui répondre ou même seulement de débattre, malgré de nombreuses propositions.

    Guilluy publie un quatrième essai en 2014, La France périphérique. Comment on a sacrifié les classes populaires (Flammarion). Si la thèse est sensiblement la même, sa réception change de ton et d’ampleur.

    L’ouvrage est encensé par la quasi-totalité de la presse nationale – l’hebdomadaire Marianne qualifiant l’essai de « seul livre que devrait lire Hollande ». L’analyse prend une dimension nettement plus politique : le géographe dénonce la trahison de la gauche de gouvernement, accusée d’avoir abandonné les classes populaires au profit (seulement apparent) des minorités. Une rhétorique néomarxiste, déployée à travers la question des inégalités territoriales, parcourt tout l’ouvrage.

    Mais celui-ci emprunte aussi le ton de la dénonciation morale en dressant le portrait d’un acteur collectif – les « classes dominantes » – pourvu d’une intentionnalité malveillante visant à exploiter le peuple tout en affichant un « faux altruisme ».

    Pour la première fois, l’ouvrage fait l’objet de quelques critiques, notamment dans Libération. Si l’éditorial de Laurent Joffrin reste plutôt positif, quelques universitaires reprochent à l’auteur sa vision binaire et caricaturale et son absence de prise en compte de la diversité des situations territoriales.

    Certains journalistes critiquent également sa lecture ethnicisée des problèmes sociaux et sa posture victimaire, susceptible d’alimenter les fractures qu’il prétend dénoncer.

    Dans Le Crépuscule de la France d’en haut (2016) et No Society (2018), Guilluy tente de faire monter ses analyses en généralité. Déployant une rhétorique qui emprunte à tous ses travaux antérieurs, il y annonce la fin de la « classe moyenne occidentale » et fait de l’identité la principale clé de lecture des problèmes politiques et sociaux de la France contemporaine.

    Il développe également sa vision de l’« Allemagne périphérique », de l’« Angleterre périphérique » et de l’« Italie périphérique », etc. Les données empiriques se sont presque totalement taries ; les écrits de journalistes ou de philosophes-essayistes (tout particulièrement Alain Finkielkraut) remplacent les cartes, les statistiques et les références aux travaux de sciences sociales[6].

    Le succès médiatique n’en est pas moins au rendez-vous, notamment grâce à la publication de « bonnes feuilles » ou la reprise de « bonnes formules » : la bourgeoisie des métropoles est qualifiée de « nouveaux Rougon Macquart (…) déguisés en hipsters », tandis que les « classes dominantes qui vivent le multiculturalisme à 5000 euros par mois » sont opposées aux « classes populaires qui vivent le multiculturalisme à 1000 euros par mois ».

    Le complotisme qui parcourt les deux ouvrages – « il n’est rien d’aussi puissant que la révélation au monde d’un secret dissimulé depuis des décennies mais connu intuitivement par une majorité de l’opinion » – trouve, par ailleurs, un large écho sur les réseaux sociaux.

    Les deux ouvrages suscitent plusieurs critiques de la part d’experts et d’universitaires. Ainsi, dans Libération, les membres de la revue Métropolitiques, un collectif de jeunes chercheurs en sciences sociales, signent une courte tribune dans laquelle ils dénoncent les « représentations fausses ou biaisées » de Christophe Guilluy qui, « bien qu’usant d’oripeaux scientifiques (cartes, statistiques) », s’affranchissent de « toute précaution et d’objectivité pour alimenter des arguments tronqués ou erronés ».

    Pourtant éparses, ces réactions déclenchent un véritable déchainement des partisans de Guilluy dans les médias et les réseaux sociaux, tandis que le géographe lui-même reste une nouvelle fois silencieux. Ainsi, dans Causeur, la démographe Michèle Tribalat s’insurge contre une entreprise de « démolition médiatique » (sic), tandis que la rédactrice en chef de l’Express regrette que la « lucidité » de Guilluy puisse lui valoir « de mauvais procès d’intentions politiques ». D’autres vont jusqu’à qualifier les auteurs de la tribune de « lâches », de « nouveaux censeurs » ou encore d’« aveugles corporatistes ».

    Le géographe reçoit également le soutien de nombreux sites de la droite identitaire, de l’Observatoire du journalisme à Radio Courtoisie en passant par Breizh Info. Quelques semaines après seulement, la crise des Gilets jaunes lui offre une exposition médiatique sans précédent.

    Cette trajectoire éditoriale singulière est donc marquée par quatre dynamiques : une prise de distance progressive et désormais radicale vis-à-vis des méthodes des sciences sociales en matière de collecte, d’exploitation et de validation des données ; l’affirmation croissante d’une dimension ethnoculturelle dans l’analyse, ouvrant la voie à une rhétorique identitaire victimaire ; une couverture médiatique d’envergure nationale et très largement favorable, y compris depuis 2016 ; une consécration politique précoce, se traduisant par de nombreux liens avec des responsables de tous bords, jusqu’aux trois derniers présidents de la République.

    À l’aune de ces éléments, on peut affirmer, sans esprit de polémique, que ce qui est totalement « irrationnel », c’est de continuer à présenter Guilluy comme une victime du « politiquement correct » ou d’un « lynchage médiatique ». Aveuglement sincère ou stratégie classique de retournement de stigmates ? La question mérite d’être posée.

    Du mythe politique à la mystification scientifique[7]
    Si la France périphérique est devenue le mainstream de la pensée territoriale dans les médias et les partis de gouvernement, elle suscite une très large opposition parmi les chercheurs en sciences sociales. Les critiques adressées à la notion – et plus largement aux thèses défendues par Christophe Guilluy – se sont exprimées à partir du début des années 2010.

    Contrairement à ce qu’affirment régulièrement ses partisans, elles sont dans le même temps largement convergentes et marquées par une grande diversité d’auteurs, de registres et de focales. L’idée qu’il y aurait « deux camps opposés au sein de la géographie française », récemment évoquée à la radio par le romancier Aurélien Bellanger, apparait donc erronée.

    En premier lieu, plusieurs éléments du diagnostic posé par Guilluy sont issus de recherches académiques bien antérieures à ses propres ouvrages. Ainsi, la thèse de la « moyennisation » de la société a été battue en brèche par de nombreux travaux sur « le retour des classes sociales » (selon le titre d’un article fameux de Louis Chauvel paru en 2001), sur le creusement des inégalités sociales (d’Edmond Préteceille à Thomas Piketty) ou sur l’émergence de nouveaux « ouvriers après la classe ouvrière ».

    Par ailleurs, Guilluy s’attribue ou attribue à quelques intellectuels des approches et des notions forgées dès le début des années 2000 par des universitaires, comme le « périurbain subi » (Martine Berger), le décrochage de certaines campagnes subissant la désindustrialisation ou les difficultés de la France des marges.

    Enfin, le consensus idéologique sur certains objectifs politiques, devenus de véritables totems de l’action publique (métropolisation, compétitivité, excellence, etc.), ou encore la théorie du « ruissellement » depuis les métropoles, ont fait l’objet de nombreuses déconstructions stimulantes (de Fabien Desage à Olivier Bouba-Olga, en passant par les travaux de l’ANR Altergrowth sur la décroissance urbaine). La prétention de Guilluy à révéler « un monde secret dissimulé depuis des décennies » (No Society, p. 21) est donc soit le témoignage d’une méconnaissance des références majeures de son champ d’études soit, plus prosaïquement, le fruit d’une mise en scène cherchant à faire le buzz.

    Elle témoigne aussi, plus profondément, de la difficulté des universitaires à diffuser et à valoriser leurs résultats pour construire les bases de controverses utiles au débat public.

    En effet, et en deuxième lieu, l’idée qu’il y aurait une collusion entre monde académique, classe politique et médias est une supercherie. La réalité est que, pour plusieurs raisons comme le quasi-monopole du pouvoir par les hauts-fonctionnaires ou la dévalorisation sociale et économique des diplômes académiques (à commencer par le doctorat), les universitaires français sont très faiblement représentés dans le débat politique et médiatique.

    Dans un récent entretien au média spécialisé Acteurs publics, l’ancien secrétaire d’État à l’Enseignement supérieur et à la recherche Thierry Mandon confirme et regrette cette marginalisation, unique en Europe par son ampleur : en Allemagne, en Italie, en Grande-Bretagne, l’expertise académique est non seulement reconnue mais recherchée ; les cadres des collectivités, les élus et souvent même les ministres sont issus de l’université ; les méthodes des sciences sociales irriguent les débats. Les réactions des chercheurs étrangers au succès politico-médiatique de Christophe Guilluy, oscillant entre incrédulité et exaspération, sont tout à fait significatives à cet égard.

    En troisième lieu, croire ou laisser croire que les chercheurs constitueraient un bloc homogène aux plans scientifique et politique, dont les théories et intérêts seraient convergents relève du fantasme. Bien au contraire, le monde académique est traversé par de nombreuses controverses, parfois très vives.

    Celles-ci s’expriment dans le respect des règles du débat scientifique, qui s’appliquent partout dans le monde : honnêteté et rigueur intellectuelles, validité empirique, confrontation des résultats. Si l’opposition à la notion de France périphérique est l’un des rares objets de consensus au sein des sciences sociales francophones, c’est qu’elle s’adosse à des critiques solidement argumentées – et s’aventurant rarement sur le terrain politico-idéologique, alors que, précisément, Guilluy et ses partisans tentent de les décrédibiliser a priori comme venant d’idéologues, plus militants que scientifiques.

    Un premier ensemble de critiques concerne la méthodologie utilisée par le géographe pour construire « sa » France périphérique. Au fil des ouvrages, les contours de celle-ci ne cessent de changer et sa définition n’est toujours formulée qu’en creux : la France, toute la France, hors des quinze-ou-vingt ou-vingt-cinq aires urbaines les plus peuplées du pays au sens de l’Insee (et une partie de leur couronne périurbaine, jamais définie néanmoins).

    Une telle représentation conduit, par exemple, à classer comme « périphériques » les classes créatives d’Angers, les chercheurs de la Rochelle et les cadres supérieurs d’Annecy, tandis que les dockers de la Seyne-sur-Mer ou les mineurs retraités de Lens seraient pour leur part « métropolitains » – élus et habitants seront heureux de l’apprendre ! De même, l’ensemble de l’espace rural, des vallées désindustrialisées de l’Est aux campagnes viticoles prospères du Val-de-Loire, en passant par les villages touristiques du Luberon, est relégué dans la France périphérique.

    Ces écueils sont directement liés à la fragilité du protocole méthodologique mobilisé par l’auteur. On l’a dit, la présentation des données et des sources se fait de plus en plus floue au gré de ses publications, au point d’être totalement invisibilisée dans No society – ce qui permet de ne plus avoir à en rendre compte. Quelques chercheurs ont néanmoins fait l’effort d’analyser les grandes variables statistiques agrégées servant de base à la démonstration analytique et cartographique de Guilluy.

    La réalité est qu’elles sont presque toujours construites ad hoc pour les besoins de la démonstration. Ainsi, le critère de fragilité sociale, point cardinal de l’analyse dans La France périphérique, est défini de manière particulièrement extensive : près de 25 000 communes françaises, regroupant 65% de la population nationale, sont classées comme « fragiles » ! Leur répartition géographique, leur composition sociale, leur profil fonctionnel sont pourtant extrêmement hétérogènes.

    Pour éviter ces biais homogénéisateurs, les recherches en sciences sociales mobilisent des méthodes qualitatives (par exemple des monographies détaillées de communes ou de quartiers) et des travaux de terrain. En la matière, le bât blesse à nouveau : comme tant d’autres commentateurs après lui, Christophe Guilluy analyse la France périphérique depuis… le cœur de la France métropolitaine.

    Nulle trace, dans ses travaux, d’entretiens avec les élus, d’enquêtes au contact des habitants et des usagers, d’observations participantes dans les associations, les mairies ou les bistrots. Comme le souligne justement le sociologue Benoît Coquard, la représentation de la France périphérique a donc été entièrement produite et appropriée par des personnes qui ne connaissent pas les territoires qu’elles recouvrent et encore moins leurs habitants ! La prétention à parler à leur place et en leur nom n’est pas sans rappeler les écueils de la « classe-objet », dénoncés par Pierre Bourdieu à propos de l’étude des paysans : la France périphérique a été en quelque sorte dépossédée d’elle-même.

    La rhétorique des deux France s’inscrit dans une histoire longue : l’Est urbain et industrialisé contre l’Ouest rural et paysan au XIXème siècle ; Paris et le « désert français » au lendemain de la Seconde Guerre mondiale ; la « diagonale du vide » des années 1970.

    Ces lignes de fractures se fondaient, au moins partiellement, sur des observations objectives et rendaient compte au moins autant des oppositions que des complémentarités entre les territoires. Au contraire, comme le rappelle le géographe Daniel Béhar, la France périphérique se borne à postuler un clivage vertical et irréductible entre un peuple / des territoires « dominés » et des élites / des territoires « dominants ».

    Pourtant, des dizaines de travaux de sciences sociales ont documenté de manière beaucoup plus rigoureuse, plus précise et plus stimulante que Guilluy les effets inégalitaires de la mondialisation sur les sociétés et sur les territoires. À la suite de Pierre Veltz, pourtant l’un des principaux inspirateurs des premiers travaux du géographe, on peut essayer de résumer leurs principaux résultats.

    En premier lieu, les grandes évolutions socioéconomiques décrites par Guilluy concernent tous les types de territoires, dans des proportions assez comparables entre les métropoles (hors Ile-de-France) et le reste du pays. Ainsi, la part des ouvriers et des employés décline de manière continue et régulière depuis 40 ans dans les espaces ruraux aussi bien qu’urbains – ces derniers accueillant encore, en stock, une large majorité d’entre eux.

    Cette dynamique ne signifie pas pour autant la « fin de la classe moyenne occidentale » (sic). Les professions intermédiaires sont loin d’avoir disparu : elles représentent un quart de l’emploi, un chiffre en croissance. En outre, si la mobilité sociale n’a pas augmenté depuis les années 1980, elle n’a pas non plus diminué et ce sont précisément les enfants issus des classes moyennes qui ont vu le plus progresser leurs chances d’ascension sociale.

    En deuxième lieu, les disparités territoriales ne distinguent plus nettement telles ou telles catégories (urbain / rural, Paris / Province, métropoles / France périphérique). Au contraire, elles s’enracinent désormais à des échelles fines, le plus souvent au sein du monde urbanisé : les grandes villes sont à la fois les lieux privilégiés de concentration des richesses et les points de fixation de la pauvreté (les faibles niveaux de vie y sont systématiquement surreprésentés, y compris dans les villes les plus riches comme Paris et Lyon).

    En troisième lieu ; selon les points de vue, les échelles et les indicateurs considérés, on trouve des « gagnants » et des « perdants » partout en France, dans des combinaisons diverses. Ainsi, la Seine-Saint-Denis est le septième département de France métropolitaine pour la richesse produite mais l’avant-dernier pour le revenu médian des ménages.

    À une autre échelle, l’Occitanie est à la fois la deuxième région française par le taux de chômage et la première par l’accueil de populations nouvelles et la création d’emplois ! Si « le territoire français a plus d’une pente » (selon la formule du géographe Roger Brunet), c’est que les difficultés sont loin d’être toujours cumulatives dans l’espace et dans le temps.

    En quatrième lieu, de très nombreux territoires non-métropolitains sont en bonne santé démographique et économique. Depuis les années 1970, l’espace peu dense a vu sa population progresser à un rythme plus soutenu que celui du cœur des grandes aires urbaines.

    Cette croissance est essentiellement liée au solde migratoire ; autrement dit, ces espaces supposés délaissés attirent chaque année de nouveaux habitants. De même, les zones d’emploi les plus dynamiques du pays sont situées loin des pôles métropolitains (Issoire, Les Herbiers, Avranches, Cluses, etc.).

    Avec un taux de chômage de 5% et un taux de pauvreté de 12%, le département du Cantal, si souvent cité par Guilluy comme emblème de la France périphérique, pourrait presque apparaître comme un havre de prospérité en regard de la métropole la plus attractive de France, Montpellier (13% de chômeurs et 19% de pauvres).

    Comme toujours, toutefois, les statistiques masquent un réalité sociale contrastée et les difficultés des entreprises locales à attirer de jeunes actifs qualifiés.

    Enfin, la France périurbaine est marquée par une grande diversité sociale et fonctionnelle. Elle crée plus d’emplois que les centres des villes ; elle accueille aussi bien des chefs d’entreprises installés que des ouvriers qui quittent le logement social, des employés attirés par la faiblesse relative des prix fonciers que des fonctionnaires se rapprochant de leur lieu de travail, des retraités attachés à l’idéal villageois que des jeunes cadres y déployant leur projet familial.

    À l’échelle nationale, ces périurbains disposent d’un revenu médian annuel (20 975 euros) plus élevé que celui des habitants des villes-centres (19 887). Et ils ne constituent pas un « réservoir naturel de vote FN, comme le voudrait une sociologie simpliste de la haie de thuyas et du chien de garde : leurs votes se répartissent sur tout le spectre, à peu près comme la moyenne du pays » (Pierre Veltz[8]).

    En effet, l’une des raisons principales de l’écho rencontré par les thèses de Guilluy tient dans le lien qu’il établit entre la France périphérique et une colère sociale qui trouverait son exutoire dans le vote pour l’extrême-droite (Front national puis Rassemblement national). Les périodes électorales se suivent et se ressemblent : Guilluy s’empresse de décrypter les résultats à l’aune de ses propres grilles de lecture et d’y voir une validation de ses théories.

    « Macron est […] le candidat des métropoles mondialisées. Inversement, de la même manière que l’Amérique périphérique a porté le vote Trump et l’Angleterre périphérique le Brexit, la France périphérique, celle des petites villes, des villes moyennes et des zones rurales, porte la contestation populiste. » (Christophe Guilluy, Le Monde, 26 avril 2017).

    Pourtant, les travaux académiques, fondés sur des échelles d’analyse fines et des méthodes pluridisciplinaires dessinent une géographie électorale bien différente. Ainsi, plusieurs chercheurs ont bien montré, en prenant appui sur les résultats électoraux du premier tour de l’élection présidentielle de 2017, que les voix des électeurs des trois principaux candidats (Macron, Le Pen, Mélenchon) se sont réparties de manière relativement homogène dans l’ensemble du territoire français.

    Emmanuel Macron, candidat ô combien emblématique des « élites parisiennes et mondialisées », a obtenu des scores très proches dans les grandes villes, les villes petites et moyennes et les territoires ruraux (et, au deuxième tour, 78% dans le Cantal ; 75% à Bourges, préfecture désindustrialisée de la « diagonale du vide » ; 72% à Dourdan, dans le lointain périurbain pavillonnaire francilien ; et encore 71% à Thionville, au cœur d’un des bassins industriels en décroissance parmi les plus durement frappés par les crises de 2008 et 2011).

    Si le vote pour Marine Le Pen est plus polarisé spatialement, près de 80% des voix qui se sont portées sur elle sont celles d’électeurs des grandes aires urbaines (cœur et périphérie). Dans une analyse statistique détaillée, des chercheurs du CNRS ont enfoncé le clou en soulignant l’absence de corrélation nette entre le vote pour ces deux candidats et le type de territoire.

    Dans ce champ d’étude aussi, un consensus se dégage : les explications du vote sont avant tout à chercher dans la profonde transformation des rapports au travail, dans l’accentuation des inégalités sociales et dans les déstructurations des instances de régulation collective (dans les lieux d’emplois, dans les activités associatives et dans la vie locale).

    Finalement, il n’est pas si compliqué de comprendre le succès éditorial, politique et médiatique de Christophe Guilluy. D’une part, ses analyses offrent des interprétations simples non seulement des fractures sociales et territoriales, mais aussi du rejet des élites, de la montée du populisme ou des succès électoraux du Front national.

    De l’autre, celles-ci sont parées des atours de la scientificité grâce à une série d’indicateurs et de cartes présentés comme objectifs. Or, force est de constater que certains élus, experts et journalistes sont particulièrement friands de vérités simples et unilatérales, susceptibles de déboucher sur des solutions manichéennes ou de nourrir des discours démagogiques potentiellement mobilisateurs.

    Guilly en est parfaitement conscient : face aux tenants du « c’est plus compliqué que ça », il dénonce « le refus de généraliser » et la tendance qu’auraient les universitaires à « occulter le réel », alors que, précisément, ce sont ses positions qui sont en contradiction avec toutes les données et analyses disponibles.

    Mais si cette rhétorique du « seul contre tous » est utile pour occuper l’espace médiatique et commercial, voire pour construire la mythologie du « chercheur-courage », elle s’effrite à mesure que la fragilité de ses fondements est mise en lumière. Le mouvement des Gilets jaunes a joué un rôle décisif en la matière.

    Les Gilets jaunes, apogée et dépassement de la France périphérique
    Il y a un an encore, Christophe Guilluy ne cachait pas son enthousiasme face à l’irruption des Gilets jaunes. En effet, celle-ci semblait consacrer de manière éclatante sa représentation d’une France coupée en deux entre métropoles dynamiques mondialisées et territoires « périphériques » laissés pour compte (et rassemblant le gros du « peuple »).

    La contestation en cours n’était finalement que l’expression de la revanche des seconds à l’égard des premières. Las, loin de conforter cette théorie, ce mouvement social atypique en a montré toutes les limites et impasses, au gré des rapports de police, des sondages des grands instituts et des enquêtes de terrain réalisées par les chercheurs en sciences sociales sur la base d’échantillons significatifs[9].

    – Les premiers Gilets jaunes, ainsi que plusieurs coordinateurs nationaux, sont originaires de l’agglomération parisienne, métropole mondiale située au sommet de la France métropolitaine. Et pour cause : si les Franciliens utilisent un peu moins leur voiture et réalisent des trajets un peu plus courts que le reste des Français, ils passent en moyenne 75 minutes par jour dans leur véhicule, contre 45 minutes pour les habitants de l’espace rural ! En somme, dans le Grand Paris, le budget-temps compense largement les moindres coûts liés aux déplacements.

    – Les figures charismatiques des Gilets jaunes sont marquées par une grande diversité sociale et résidentielle : ce sont aussi bien des chefs d’entreprises vendéens que des ouvriers d’Amiens, des petits commerçants du périurbain toulousain que des fonctionnaires du centre de Moulins, des retraités bretons que des jeunes cadres franciliens au pouvoir d’achat plombé par le coût du logement ; en somme, une véritable mosaïque socio-professionnelle totalement imperméable aux représentations binaires.

    – La cartographie des lieux de blocage et d’action des Gilets jaunes montre que l’immense majorité des communes concernées est située au sein des grandes aires urbaines. Bien sûr, on ne manifeste pas toujours là où l’on habite. Et pour cause : le mouvement reflète moins des frontières infranchissables que le rôle central des interdépendances territoriales dans les pratiques sociales des Français. De fait les Gilets jaunes dits de la « périphérie » se retrouvent bien souvent pour manifester au « centre », c’est-à-dire là où ils ont fait leurs études, où ils vont faire leurs courses le week-end, où ils emmènent un proche à l’hôpital ou leur famille au cinéma. Ainsi, l’automobile est moins le symbole d’une France périphérique marginalisée qu’un outil – coûteux – qui permet aux ménages de tirer parti des ressources et des services offerts par ces différents espaces. Cette forme de « zapping territorial » contredit frontalement les analyses en termes de relégation ou de sédentarisation.

    – Bien qu’étant encore plurielles, les revendications des Gilets jaunes ont progressivement convergé vers des enjeux de justice fiscale, sociale et spatiale : augmentation des bas salaires, revalorisation du pouvoir d’achat, égalité face à l’impôt, maintien des services publics sont les seuls mots d’ordre partagés par l’ensemble des manifestants. Or, la fragilité sociale traverse les territoires autant que les origines ou les générations : elle concerne aussi bien des familles du Pas-de-Calais frappées par le déclin industriel que des agriculteurs du Berry lourdement endettés ou des travailleurs précaires de la banlieue lyonnaise. Le mélange des uns et des autres au sein du mouvement, ainsi que l’absence de revendication de type identitaire (malgré quelques tentatives de manipulation grossières), montrent que les visions binaires et/ou ethnicisées des divisions des classes populaires relèvent avant tout de la récupération idéologique.

    – Élus et citoyens ont exprimé leur lassitude grandissante face aux grilles de lecture simplistes et caricaturales. Les seconds ne se sentent en aucun cas « périphériques », mais demandent de la considération de la part des médias, des chercheurs et des responsables politiques. Les premiers souhaitent travailler sur la base de données empiriques et d’analyses robustes, qui permettent de regarder la réalité en face, dans sa complexité. Ainsi, les fédérations d’élus, les centres de formation des techniciens territoriaux, les associations se détournent les uns après les autres de la France périphérique. Pour une raison simple : le succès du concept est inversement proportionnel à sa capacité à forger des réponses concrètes aux problèmes des Français ! Aucun responsable ne peut aujourd’hui construire des politiques de solidarité susceptibles de concilier innovation, transition écologique et respect des idéaux de justice sociale et spatiale sur la base d’une représentation incorrecte et purement victimaire ! Opposer grossièrement « territoires gagnants » et « perdants », ou « bons pauvres » et « mauvais pauvres », permet de faire un tri pour réduire le nombre de ceux qui « méritent » d’être aidés. Mais cela n’a jamais réglé leurs problèmes…

    Finalement, le double primat de la question sociale sur la question territoriale d’une part, de l’insécurité économique sur la supposée « insécurité culturelle » de l’autre, est sans aucun doute l’une des grandes leçons du mouvement. Dans ces conditions, il faut un certain art du funambulisme intellectuel pour continuer à interpréter les Gilets jaunes à l’aune de quelques obsessions géographiques.

    Si les climato-sceptiques, les théories du complot ou le mythe du Grand remplacement ont si peu d’audience en France, c’est le fruit d’une maturité collective des chercheurs, des citoyens, des médias et des institutions. Dans les sciences sociales et territoriales, il est temps de forger, avec humilité mais résolution et sans irénisme, de nouvelles manières de penser et d’agir pour répondre aux immenses défis – environnementaux, économiques, migratoires et sociaux – du début du XXIème siècle.

     

    [1] Laurent Chalard., 2017, « Guilluy en politique », Outre-Terre, n° 51, pp. 47-58.

    [2] Romain Ducornet, 2016, Christophe Guilluy dans la presse : étude d’une controverse géographique, Mémoire de Master 2, Reims, Université de Reims Champagne-Ardenne.

    [3] Entre guillemets dans le texte.

    [4] Laurent Chalard, op. cit.

    [5] Guilluy explique par exemple que « le changement de nature et d’origine de l’immigration a fait surgir une question à laquelle la France n’était pas préparée, celle de l’ethnicisation des territoires » (p. 65).

    [6] Les travaux de Pierre Bourdieu, de Nicolas Renahy, d’Éric Maurin ou de François Héran, plusieurs fois cités dans Atlas des fractures françaises et dans Fractures françaises, disparaissent au profit d’écrits d’autres auteurs comme Michèle Tribalat ou Jean-Claude Michéa, des « figures qui ont pour point commun de ne pas faire consensus dans leurs disciplines » comme le remarque Romain Ducornet. En parallèle, les études d’organismes publics sont de moins en moins mobilisées au profit d’articles de presse issus de différents médias, notamment Le Figaro.

    [7] Selon le titre d’un célèbre de Jean-Marc Offner sur les effets structurants du transport paru en 1993 dans L’espace géographique

    [8] Ibid. : Le département des Yvelines offre une illustration frappante de cette situation. Le score d’Emmanuel Macron ne décroit pas avec la distance à Paris, mais il atteint des pics aux franges de l’aire urbaine, dans des communes favorisées comme Houdan (71 %), Rambouillet (73 %) ou Montfort-L’amaury (77 %).

    [9] Voir par exemple : https://editionsladecouverte.fr/catalogue/index-a__Gilets_jaunes_a____hypoth__ses_sur_un_mouvement-978234 ; https://www.seuil.com/ouvrage/le-fond-de-l-air-est-jaune-collectif/9782021426205 ; https://www.pacte-grenoble.fr/programmes/grande-enquete-sur-le-mouvement-des-gilets-jaunes ; ainsi que toutes les enquêtes d’opinion des grands institut de sondage (un exemple parmi d’autres : https://www.institutmontaigne.org/blog/les-gilets-jaunes-la-partie-emergee-de-la-crise-sociale-francaise).

    • Son analyse est réfutée par des gens qui vivent également en centre-métropole et par des outils statistiques aussi pensés et conçus en centre-métropole.
      Il y a une bonne raison à cela : il n’y a aucune place pour les professions intellectuelles supérieures en zones périphériques.

      Bien sûr, il existe ponctuellement des regroupements de cadres sup. dans des trous perdus, au grès d’implantations de centres de recherches ou de boites ayant une implantation excentrée historique, mais si tu y vas en profondeur, ils se vivent comme « exilés » ou « au vert », à la recherche de « modes de vie alternatifs » et gardent des habitudes ancrées dans des métropoles qu’ils veulent accessibles et pas trop éloignées → gros lobbying pour avoir des accès autoroutiers, voire privatiser des nationales pour aller + vite là « où les choses se font ».

      Certaines « zones dynamiques périphériques » décrites comme contrarguments jouissent plutôt de l’effet « Bill Gates » entre dans le bistrot.

      Pas loin de chez moi, il y a le Madiran. Zone viticole prospère… ouais. Il se trouve que j’y ai été candidate. Donc ça donne :
      -- Une poignée de gros propriétaires terriens blindés, qui règnent en seigneurs sur le coin, tendance très grosse bourgeoisie, avec un mode de vie « gentlemen farmers » très peu éloigné de celui des gus des hyper-centres friqués (manière, ils y ont souvent un beau portefeuille immobilier). Comme ils « nourrissent » les gueux du coin, ils profitent de la « reconnaissance du ventre » pour occuper (cumuler) des fonctions électives locales : ne pas oublier qu’un mandat de maire chez les blédards ouvre la porte sénatoriale, surtout si tu as du fric et de l’entregent.
      -- Une énorme masse de travailleurs captifs (Pb accès éducation, confirmé par d’autres études), qui n’ont pas les moyens d’accéder aux villes où sont les meilleurs salaires et qui survivent avec des bouts d’emplois complétés + ou - bien par le RSA (le manque de services public fait que beaucoup s’assoient sur leurs droits faute de savoir et de moyens de les faire valoir, ce qui est aussi bien commode pour les statistiques !). Leur très grande pauvreté est masquée par l’abondance de l’économie informelle, pas bien mesurée non plus par les travaux et stats officielles.
      -- Une pseudo classe moyenne : les fonctionnaires qui même en C font remonter la moyenne des salaires, des commerçants en voie de disparitions qui cachent le fait qu’ils complètent par le RSA (et qu’ils fraudent surement un peu), des employés de la grande distribution qui grâce à des empilements de crédits font semblant de ne pas être pauvres.

      Bref, ce qui est particulièrement bien caché aux sociologues de centre-ville, c’est l’ampleur des inégalités (il est vrai que le problème se généralise) et surtout la perte de « chances » dans tous les domaines, suite à la disparition des services publics (partagé aussi par les banlieues populaires).
      À cela s’ajoute l’éloignement qui augmente (disparition des transports périphériques, routes à 80 km/h, villes saturées et chères) qui interdit de fait toute ascension sociale (alors que le pauvre de banlieue peut encore accéder aux services et aux salaires de centre-ville).

      Exemple : avec des revenus de brousse, on ne voit pas comment financer des études supérieures en ville.

  • Jen Schradie : « Internet a toujours été inégalitaire »
    https://usbeketrica.com/article/interview-jen-schradie-internet-inegalitaire (pas lu, j’archive, #hacktivisme #militer #internet)

    pour développer et poursuivre :

    « On n’imagine pas au départ combien de temps ça peut prendre de s’occuper d’une page Facebook. » Quand elle tire le bilan de son action lors du mouvement des « gilets jaunes », à l’espace Niemeyer le 19 avril dernier, Mme Priscillia Ludosky parle comme une cadre syndicale. « C’est toute une administration que l’on doit mettre en place. (…) Ça devient un métier, une deuxième vie. » Coadministratrice des deux plus grands groupes #Facebook de « #gilets_jaunes », dont La France en colère !!! (288 000 membres fin octobre 2019), celle qui lança la pétition contre la hausse du prix du carburant qui servit de détonateur au mouvement fut propulsée en quelques jours au cœur de l’économie de l’attention. « Le mouvement a été sans conteste aidé par le nouvel algorithme Facebook, qui survalorise les contenus de groupes au détriment des contenus postés par des pages (et donc par les médias) », relevait très tôt Vincent Glad (Libération, 30 novembre 2018). Conclusion du journaliste : « Les admins de groupe Facebook (…) sont les nouveaux corps intermédiaires, prospérant sur les ruines des syndicats, des associations ou des partis politiques. » Pour rebooter la démocratie, suffirait-il de changer d’algorithme ? Un tel jugement rappelle l’emphase de l’année 2011 : « Si vous voulez une société libre, donnez-lui accès à Internet », s’emportait alors l’Égyptien Wael Ghonim, administrateur de la page Facebook à l’initiative du premier rassemblement de la place Tahrir, au début de la séquence qui précipitera la chute du président Hosni Moubarak.

    Depuis, l’eau a coulé sous les ponts (et sur les places occupées). Mme Ludosky se fait plus nuancée que ses prédécesseurs : le réseau social lui paraît bien favoriser la discussion politique — « avec tous, tous ceux qui n’ont pas de diplômes » —, jusqu’à obtenir l’attention du pouvoir, voire l’obliger à réagir ; mais elle concède qu’il faudra « forcément à un moment pouvoir sortir de la plate-forme ».

    Dans la somme tout juste traduite en français qu’elle consacre à la « sphère publique connectée », depuis le mouvement zapatiste, au milieu des années 1990, jusqu’à l’élection de M. Donald Trump, la sociologue turque Zeynep Tufekci décrit l’effet ambivalent des technologies sur la dynamique des luttes contemporaines. « Autrefois, les mouvements renforçaient d’abord leurs capacités sur une longue période avant de pouvoir organiser de grandes manifestations, résume-t-elle. Aujourd’hui, les mouvements sont d’abord organisés presque exclusivement en ligne, puis n’entament généralement le dur travail nécessaire à leur pérennisation qu’après leur premier grand moment sous les feux des projecteurs. »

    https://www.monde-diplomatique.fr/mav/168/HENNETON/61029

  • La gendarmerie recherche désespérément des blindés pour remplacer ses VBRG antédiluviens
    https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/la-gendarmerie-recherche-desesperement-des-blindes-pour-remplacer-ses-vbrg


    Des VAB de l’armée de Terre pourrait être gendarmisés (Crédits : Ministère des armées)

    Après avoir souhaité lancer un programme de nouveaux véhicules blindés, la gendarmerie pourrait rénover tout ou partie de son parc de blindés et en obtenir d’autres des forces armées. Une solution beaucoup plus économique.

    La gendarmerie trépigne. Elle veut, et le plus rapidement possible, de nouveaux blindés, de préférence rénovés, pour remplacer ses « antiquités ». « Le VBRG est né avec la 4L », a d’ailleurs rappelé le 10 octobre à l’Assemblée nationale le général Richard Lizurey, alors encore directeur général de la gendarmerie nationale. Mais pourquoi rénover de très vieux VBRG (véhicules blindés à roues de la gendarmerie) entrés en service en 1974 ? La raison en est simple, le prix. « On s’achemine plus vers cette solution que vers l’achat de blindés neufs, qui pourraient coûter très cher et qui n’existent pas sur étagères en tant que tels, avait expliqué le 9 octobre au Sénat le général Richard Lizurey. L’idée est de diviser par quatre ou cinq au moins leur coût d’acquisition ».

    « Nous avons 84 engins blindés opérationnels, la moitié en outre-mer et la moitié en métropole, a précisé l’ancien patron de la gendarmerie. Depuis décembre 2018, nous avons vu que cela pouvait présenter un intérêt dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre. Dans le cadre de l’élaboration du livre blanc (qui doit être prêt début 2020, ndlr), nous cherchons à déterminer si et dans quelles conditions il est possible de renouveler la flotte actuelle des véhicules blindés ».

    Au départ, la gendarmerie envisageait le nec plus ultra avec le développement d’un programme de véhicules blindés de nouvelle génération. Mais les gendarmes sont très vite revenus à la réalité surtout face à leurs limites budgétaires : « C’est devenu hors de portée budgétaire et peu souhaitable, car on ne va pas engager un programme pour 84 véhicules blindés », a confirmé à l’Assemblée nationale le général Richard Lizurey. La gendarmerie s’est donc résolue à rénover deux types de blindés, tout ou partie de ses VBRG ainsi que des VAB cédés par l’armée de Terre. Dans ce cadre, le général Richard Lizurey prévoyait de faire rénover "six ou sept matériels chaque année pendant quatre ou cinq ans, selon l’ancien patron de la gendarmerie. Nous disposerions ainsi au bout de cette période d’une flotte de 84 véhicules blindés qui pourraient repartir pour trente, quarante ou cinquante ans".

  • Le Monde - Seize « individus proches de la mouvance "black bloc" » arrêtés à Bordeaux avant une manifestation de « gilets jaunes »

    #Dix hommes et six femmes, âgés de 19 à 45 ans ont été placés en #garde_à_vue. Selon les autorités, ils « n’allaient visiblement pas manifester de façon pacifique », ce samedi 7 décembre.

    « Le choix de #Bordeaux, devenue au fil des actes une des villes hors Paris où la mobilisation des « gilets jaunes » était la plus forte, ne le surprend pas. « Il y a des points d’ancrage dans certaines villes, dont Bordeaux, avec des personnes qui essaient seules ou avec du renfort, de peser sur une ville et de faire déraper une manifestation en s’en prenant aux forces de l’ordre. »

    Les seize hommes et femmes interpellés ont, durant leur garde à vue, « reconnu qu’ils s’étaient retrouvés en vue de la manifestation de l’après-midi, dévoile la procureure de la République de Bordeaux, Frédérique Porterie. Aucun ne revendique cependant la propriété des objets retrouvés en perquisition. » Un gros travail de police technique et scientifique s’annonce.

    « Cinq d’entre eux sont connus de la justice », précise le parquet de Bordeaux, pour participation à un attroupement avec arme et dissimulation de visage, pour violences avec arme ou encore pour des infractions à la législation sur les stupéfiants. D’autres ont été vus et remarqués à l’occasion de manifestations de « gilets jaunes » ou du dernier G7, à Biarritz. Tous ont été déférés lundi au parquet de Bordeaux. Une information judiciaire pour « dégradation et association de malfaiteurs en vue de commettre des dégradations et des violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique » a été ouverte.

    Des réquisitions de placement en détention provisoires ont été prises à l’encontre de l’ensemble des seize mis en cause. Seuls trois d’entre eux, cependant, en ont finalement fait l’objet. Les autres ont été placés sous contrôle judiciaire.« 

    • Critique de la manif comme forme de délégation, rappel des faillites du réformisme pour protéger l’État, nécessité du rapport de force...

      Il rappelle également que l’État et les classes dominantes définissent les mauvais manifestants non sur la base des dégâts matériels qu’ils occasionnent mais dans un compromis : la manif FNSEA, on peut attendre qu’elle passe, le secteur est bien cogéré. À comparer avec les GJ.

      Il est aussi question des manifs négociées par certains non-violents avec la police, dont ils apprendront plus tard que non, elle n’est pas neutre mais au service de l’État. Ça, les personnes racisées l’apprennent tôt, les militant·es un peu plus tard, certain·es jamais.

      N’empêche... au nom de quoi les manifs de centre-ville et leur folklore destructeur (je ne dis pas violent puisqu’elles ne s’attaquent pas aux personnes) ne sont-elles pas elles aussi une routine comme la manif merguez ? N’est-il pas plus intéressant de mettre cette force au service de luttes plus localisées, dans des défenses de lieux vécus ou de lieux de travail, auprès des personnes qui y vivent et y travaillent ? Et avec elles ?

  • Sous un gilet jaune, il y a... Liliane
    https://visionscarto.net/sous-un-gilet-jaune-il-y-a-7

    Suite de notre petite radioscopie de la France qui se réveille, avec une série de portraits sans retouche de #gilets_jaunes. Aujourd’hui : Liliane. 7. Liliane Je suis à la retraite depuis 2010. Après 43 années de travail, je perçois 1197 euros nets mensuels. Depuis 9 ans, j’ai bénéficié de moins de 10 euros d’augmentation ! Mon loyer est de 450 euros. Le coût de la vie est monté en flèche : essence, électricité, gaz... Par conséquent : je ne vis pas, je survis. Le 17 novembre 2018, je m’apprête à fêter (...) #Billets

    / gilets jaunes