• Le « Groupe de La Haye » doit devenir une initiative mondiale
    Par Francesca Albanese, le 12 février 2025 - The Nation - Traduction : JB pour l’Agence Média Palestine

    https://agencemediapalestine.fr/blog/2025/02/25/le-groupe-de-la-haye-doit-devenir-une-initiative-mondiale

    (...) À la lumière de ces développements, l’initiative tri-continentale lancée à La Haye par neuf États déterminés à tenir Israël responsable de son agression contre l’existence collective des Palestiniens ne pouvait pas être plus opportune. Les engagements pris par le groupe dans le cadre de cet effort collectif (respecter les mécanismes juridiques nationaux suite aux mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale, refuser l’asile et imposer un embargo sur les armes) font partie des obligations les plus fondamentales que tous les États ont en vertu du droit international, compte tenu des crimes commis de longue date par Israël dans les territoires palestiniens occupés. Ces mesures constituent une première étape essentielle vers la résolution de la question palestinienne, ou « conflit israélo-palestinien », conformément au droit international.

    Pourtant, une solution ne sera jamais à portée de main tant que l’impunité d’Israël ne prendra pas fin. Malgré les efforts du peuple palestinien et de certains Israéliens engagés, la situation ne peut être changée de l’intérieur d’Israël. Une action internationale est nécessaire.

    C’est la tâche qui incombe désormais à tous les États. Ceux-ci ont des responsabilités juridiques contraignantes face aux violations prolongées du droit international, comme c’est le cas de l’occupation et de l’annexion illégales par Israël du territoire palestinien occupé, du régime d’apartheid qu’il a imposé aux Palestiniens et, plus récemment, du génocide à Gaza. Compte tenu de la gravité des actions d’Israël, les États sont appelés à mettre fin à toutes leurs relations économiques, accords commerciaux et relations universitaires avec Israël.

    #groupe_de_la_Haye

  • Les « #minerais_de_sang » du #numérique, clé de la guerre en #RDC

    Au Congo, le mouvement armé #M23 soutenu par le Rwanda s’est emparé de la ville de Goma, capitale d’une province riche en #minerais_stratégiques. Indispensables aux #smartphones, ils alimentent ce #conflit meurtrier et écocidaire.

    C’est un tournant dans la guerre qui ravage l’est de la République démocratique du Congo (RDC) depuis trente ans. Dimanche 26 janvier, des combattants du #Mouvement_du_23_mars (M23), un #groupe_armé antigouvernemental, appuyés par 3 000 à 4 000 soldats rwandais, sont entrés dans Goma, la capitale de la province du #Nord-Kivu où vivent un million de personnes.

    Au cœur de ce conflit, les « minerais de sang » — #coltan, #nickel, #étain et #or — indispensables à la fabrication des équipements électroniques et notamment des smartphones. Reporterre fait le point avec #Fabien_Lebrun, chercheur en sociologie et auteur de Barbarie numérique. Une autre histoire du monde connecté (L’Échappée, octobre 2024).

    Reporterre — Quel est le lien entre le conflit à l’est de la RDC et les minerais utilisés pour fabriquer nos smartphones ?

    Fabien Lebrun — Au cœur de cette guerre se trouvent les minerais de sang, aussi appelés #minerais_de_conflits : le coltan, le nickel, l’étain et l’or. Le coltan est transformé en #tantale, indispensable à la fabrication des #condensateurs pour smartphones : sans ce #métal très résistant à la chaleur et à la corrosion qui permet la miniaturisation des composants, les téléphones chaufferaient tellement qu’ils pourraient prendre feu. Or, les deux tiers des réserves mondiales de coltan se trouvent dans et à l’est du Congo. L’Afrique des Grands Lacs — Congo et #Rwanda confondus — en assure la moitié de la production mondiale.

    L’est du Congo est également riche en #cassitérite, dont provient l’étain indispensable pour les soudures des circuits électroniques ; en #wolfram, ou #tungstène, qu’on retrouve dans les vibreurs et les haut-parleurs des téléphones portables ; et en or, dont l’industrie numérique siphonne 10 % de l’extraction mondiale pour la fabrication de ses #cartes_mères et ses circuits imprimés. Depuis la première guerre de 1996, ces minerais occupent une place dans ce qu’on peut appeler une #économie_de_guerre, une économie militarisée qui perdure à ce jour.

    Depuis avril dernier, les rebelles du M23 contrôlent la zone minière de #Rubaya, qui fournit 15 % du coltan mondial. Quel intérêt stratégique y trouvent-ils ?

    En contrôlant administrativement la zone, le M23 peut élaborer tout un système de #taxes et ainsi financer le conflit. D’après un rapport de l’ONU, le groupe exporte désormais 120 tonnes de coltan par mois et les taxes qu’il prélève sur la production lui assurent un revenu d’environ 800 000 dollars mensuels. D’un point de vue économique et financier, les intérêts sont importants.

    Le M23 est soutenu par l’armée rwandaise. Depuis plusieurs années, le président de la RDC Félix Tshisekedi accuse le Rwanda de convoiter ses #ressources en #minerai. Quel rôle ont ces ressources dans l’aggravation des tensions géopolitiques dans la région ?

    Ces #métaux sont, si ce n’est la principale cause, au moins un déterminant important dans l’#instabilité de la #région_des_Grands_Lacs. L’exploitation et la commercialisation de ces minerais de sang structurent l’#économie, l’#industrie et la #politique de la région. Elles produisent une rente qui enrichit les #élites et favorise la #corruption.

    On parle beaucoup du Rwanda, plaque tournante pour ces minerais indispensables aux équipements électroniques, mais l’Ouganda et dans une moindre mesure le Burundi sont aussi dans le coup. L’État congolais lui-même est en partie responsable de la situation : 2 000 kilomètres séparent Goma de la capitale, Kinshasa, et les institutions étatiques y sont absentes.

    Quelles sont les conséquences humaines et écologiques de l’#industrie_minière pour les habitants du Nord-Kivu ?

    Depuis le milieu des années 1990, début de la révolution numérique, le coût humain et écologique de ce conflit autour des minerais de sang est démentiel. Avant même le regain de #violence des trois dernières semaines, les analystes parlaient de plusieurs millions de #morts, de 7 millions de #déplacés dans des conditions terribles et de 4 millions de réfugiés qui ont fui le Congo. Près de 30 millions de Congolais sont en situation de #malnutrition aiguë.

    Au-delà du conflit, le bilan écologique est dévastateur. Les terres du Nord-Kivu, fertiles et qui auraient pu bénéficier à l’agriculture locale, ont été saccagées par les activités minières. L’#air est pollué d’effluves toxiques.

    « À certains endroits, il n’y a plus de vie aquatique »

    L’industrie minière est aussi en partie responsable de la destruction de la #forêt du bassin du Congo, deuxième massif forestier tropical mondial crucial dans la lutte contre le changement climatique. Les espèces en voie d’extinction qui y vivent — gorilles des montagnes, bonobos, rhinocéros — sont massacrés par les groupes armés qui contrôlent les activités minières.

    Mais la première victime de l’extractivisme est l’#eau, comme l’explique l’ingénieure à SystExt Aurore Stéphant. Cela se vérifie au Congo, avec des centaines de kilomètres de cours d’eau contaminés aux #métaux_lourds — plomb, cadmium, etc. Le fleuve Congo est touché, ainsi que les #nappes_phréatiques. À certains endroits, il n’y a plus de #vie_aquatique.

    L’appétit des États occidentaux et des #multinationales de la tech pour ces ressources n’est pas étranger à ce désastre…

    Cela fait des décennies que la #responsabilité de l’#industrie_numérique dans la déstabilisation de la RDC est pointée du doigt. Mi-décembre, le président de la RDC a porté #plainte contre #Apple pour recel de #crime_de_guerre, blanchiment de faux et #tromperie des consommateurs.

    Déjà, en 2019, l’organisation internationale Right Advocates avait lancé une action collective contre Apple, #Microsoft, #Tesla, #Google et #Dell, qu’elle accusait de profiter du #travail_d’enfants dans les mines de cobalt congolaises. Malheureusement, la plainte n’avait pas abouti.

    « La production de masse de la #Playstation 2 de #Sony avait entraîné une ruée vers les activités minières »

    En 2016, Amnesty International et Afrewatch accusaient de grandes marques électroniques comme Apple, #Samsung et Sony d’acheter du cobalt à des négociants s’approvisionnant dans des mines où travaillent des enfants.

    En 2000, la flambée des prix du coltan, alimentée par la production de masse de la Playstation 2 de Sony, avait entraîné une ruée vers les activités minières à l’est de la RDC avec des conséquences très néfastes pour les communautés.

    Or, les États appuient bien souvent ces multinationales. En février, Bruxelles et Kigali signaient un accord pour un approvisionnement « durable » de l’Union européenne en minerais critiques. Alors qu’on sait très bien que 90 % des minerais de sang qui sortent du Rwanda proviennent du Congo !

    Peut-on parler de #néocolonialisme ?

    L’extractivisme est la pratique coloniale historique par excellence. Dès le XVIᵉ siècle, les conquistadors ont pillé l’or et l’argent des Amérindiens, qu’ils ont exterminés. Cet épisode a été un tournant pour l’enrichissement des États occidentaux et la naissance du capitalisme et de la mondialisation.

    Les activités minières, polluantes, génératrices de conflits sociaux, d’usages des terres et de l’eau, étaient sorties de nos imaginaires. Mais depuis trente ans, on assiste à un regain de l’extractivisme pour alimenter la #révolution_numérique.

    Il est évident que l’accord qui permet à l’Union européenne de piller la RDC en passant par le Rwanda est typiquement néocolonial. De même que la #mainmise de la #Chine sur le cobalt et le #cuivre congolais. On pourrait parler de #technocolonialisme.

    Que faudrait-il faire pour aider la région du Nord-Kivu à s’apaiser ?

    Nous ne pourrons pas diminuer la pression minière dans la région des Grands Lacs sans décroissance minérale et métallique. Pour être solidaires avec les Suds, il faudra forcément acheter moins et favoriser des appareils plus durables et mieux réparables.

    Réduire notre demande en métaux rares va aussi impliquer d’avoir des outils moins rapides, moins performants. C’est tout notre quotidien numérique et la numérisation à marche forcée qui sont à revoir.

    https://reporterre.net/Les-minerais-de-sang-du-numerique-cle-de-la-guerre-en-RDC
    #République_démocratique_du_congo #Congo #extractivisme #minerais #pollution

  • Jean-Marc Morandini, condamné en appel à 18 mois de prison avec sursis, va-t-il enfin être suspendu de CNews ? - L’Humanité
    https://www.humanite.fr/societe/jean-marc-morandini/jean-marc-morandini-condamne-en-appel-a-18-mois-de-prison-avec-sursis-va-t-

    L’animateur de #CNews Jean-Marc Morandini a été reconnu coupable de #harcèlement_sexuel sur un jeune comédien par la Cour d’appel de Paris. Il avait organisé de faux castings dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles de la part de jeunes hommes, alors apprentis comédiens.

    #groupe_bolloré

  • https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2025/01/19/pierre-ferracci-president-du-paris-fc-et-homme-d-affaires-tout-terrain_65048

    #Pierre_Ferracci, président du Paris FC et homme d’#affaires tout-terrain
    Par #Yann_Bouchez

    PORTRAIT Le président du modeste #club_de_football sera-t-il le premier dirigeant à pouvoir rivaliser avec le #PSG dans la capitale ? L’accord conclu à l’automne avec la #famille_Arnault lui donne trois ans pour y travailler. Un joli coup pour cet homme de #réseaux qui s’apprêterait, à 72 ans, à passer les rênes du #groupe_Alpha, le #cabinet_de_conseil spécialisé dans les #relations_sociales qu’il a fondé.

    Présider un club de #Ligue_2, l’antichambre de l’#élite du football professionnel, n’est pas toujours une sinécure. Ce samedi 7 décembre au soir, il pleut à verse sur #Ajaccio. Dans les tribunes du stade Michel-Moretti, un millier de courageux, guère plus, est venu assister au match opposant l’#AC_Ajaccio au #Paris_FC (PFC). Entre deux chants corses couvrant le bruit de la pluie, des supporteurs locaux lancent, de temps à autre, des noms d’oiseaux visant les « Français » de l’équipe parisienne.

    A 72 ans, Pierre Ferracci en a vu d’autres. Veste grise sur jeans foncé, cheveux clairsemés, le patron du Paris Football Club, lui-même né à Ajaccio, suit la rencontre en tribunes. Il s’est assis entre son fils François, directeur sportif du PFC, et un ex-dirigeant de l’AC Ajaccio. Le voilà presque comme un spectateur lambda ; ce soir-là, il a ignoré la loge dévolue aux dirigeants du club visiteur, trop excentrée.

    Le plateau de coppa, lonzu et fromages corses est resté intact, tout comme la bouteille de champagne. Malgré tout, Pierre Ferracci, s’est régalé. Au coup de sifflet final, scellant une victoire des Parisiens sur deux buts gaguesques, il s’invite sur la pelouse. Sous la pluie battante, il serre des mains, tout sourire. A ses joueurs comme aux adversaires.

    Changement de dimension

    Pierre Ferracci est un patron de club heureux. Les récentes défaites n’y changeront rien. D’ailleurs, le PFC, actuel troisième du classement, peut toujours viser la montée en Ligue 1 en fin de saison. « Je suis heureux parce que j’ai l’impression d’avoir mis le club sur de bons rails », avançait-il, satisfait, avant le match face à Ajaccio. « De bons rails », l’expression frise la coquetterie. Car le septuagénaire, fondateur et dirigeant du groupe Alpha, spécialiste et leader du conseil en ressources humaines, vient sans doute de réussir l’un des plus beaux deals de sa carrière. Le plus retentissant, à coup sûr.

    L’information a d’abord fuité dans le quotidien sportif L’Equipe, le 9 octobre. Une semaine plus tard, confirmation officielle : le Paris FC, modeste club de Ligue 2, jusque-là aux mains de Pierre Ferracci, accompagné d’un pack d’actionnaires, est en passe d’être racheté par la famille Arnault. Promesse, avec ces milliardaires, d’un changement de dimension. Et si émergeait enfin un « deuxième club de la capitale » capable, qui sait, de rivaliser un jour avec le richissime Paris Saint-Germain, sous pavillon qatari ?

    Le 20 novembre, foin de bling-bling, c’est dans la cantine du centre de formation du PFC, à Orly (Val-de-Marne) que Pierre Ferracci et Antoine Arnault, patron de deux fleurons du groupe de luxe LVMH, le maroquinier Berluti et le spécialiste du cachemire de très grand luxe, commentent l’union. Face à eux, des dizaines de caméras et une centaine de journalistes. L’affluence, pour une conférence de presse du PFC, est inédite. L’aîné de la fratrie Arnault, 47 ans, fan de foot et… du PSG, prend des accents philanthropiques : « L’idée est de rendre à la société, à Paris, à notre pays, ce qui nous a été donné. » Une manière adroite, peut-être aussi, de faire oublier les dribbles du patriarche avec le fisc.

    Un carnet d’adresses bien fourni

    Pierre Ferracci savoure le moment. Avec gourmandise, il évoque les coulisses de l’opération, en se gardant de tout dévoiler. La décision prise « avec [ses] deux fils, à l’été 2023 », de « s’associer à des forces économiques plus puissantes que les [leurs] » pour viser la Ligue 1. La satisfaction d’avoir trouvé, ensuite, par le biais de la banque Rothschild, un investisseur français « alors qu’aujourd’hui les deux tiers des clubs de L1 et de L2 sont contrôlés par des capitaux étrangers ». « Un enjeu de souveraineté nationale », ose-t-il, tout en reconnaissant que ces dernières années, il avait réuni au capital du Paris FC, « à titre minoritaire » certes, des actionnaires venus de Bahreïn, des Etats-Unis, d’Arménie et du Sri Lanka.

    Du montant du rachat, il ne dit rien ou presque. Il conservera 30 % des parts jusqu’en 2027, date prévue de son départ de la présidence du club. Agache Sport, la holding des Arnault, possédera alors 85 % du PFC, contre 15 % pour Red Bull – sous réserve que BRI Sports Holding, l’actionnaire anglo-sri-lankais, le seul qui résiste, accepte de vendre ses parts (7 %).

    Jongler avec les sujets économiques, politiques et sportifs, voilà la marque de fabrique de cet homme de réseaux. Autoproclamé « de gauche » et « homme de compromis », ce patron tout-terrain évolue au carrefour de plusieurs mondes. L’entrepreneur, aujourd’hui à la tête d’un groupe fort d’un millier de collaborateurs et d’un chiffre d’affaires annuel supérieur à 140 millions d’euros, côtoie depuis des décennies le gratin des grands patrons, des syndicalistes, comme des dirigeants sportifs. Il déteste l’expression « homme d’affaires », trop « péjorative » à ses yeux.

    Ses différentes activités lui ont permis de se constituer l’un des carnets d’adresses les plus fournis du Tout-Paris. Depuis vingt ans, il loue, au travers de sa société Alpha, une loge VIP au Stade de France – compter environ 200 000 euros à l’année. Il y invite les huiles du monde patronal et syndical. « Le foot, résume-t-il, c’est le sport le plus populaire de la planète. Il fédère beaucoup de personnes, d’états d’esprit différents. J’aime ça. »

    « Il était très militant »

    Le sport, pourtant, a d’abord occupé une place annexe dans sa vie. Car, avant tout, il y eut les affaires. Certes, dans les années 1960, gamin à Ajaccio, Pierre Ferracci allait voir les matchs du Gazélec, le club de foot des gaziers et électriciens corses. S’il en est resté un « supporteur historique », cela relevait en partie, à l’époque, du tropisme héréditaire.

    Albert Ferracci, son père, instituteur et ancien résistant, fut une figure éminente en Corse du Parti communiste. Sa mère, Rose, également enseignante et syndicaliste, partageait les mêmes engagements. Le soutien au Gazélec s’est imposé comme une évidence. Mais, niveau loisirs, le petit Pierre préfère encore, durant ses vacances d’été, les parties de chasse sous-marine du côté de Suartone, un village dans le sud de l’île, près de Bonifacio, où habite la famille du côté paternel.

    Doué à l’école, Pierre Ferracci monte à la capitale et mène des études d’économie et d’expertise comptable à l’université Paris-Dauphine. L’un de ses profs s’appelle Jacques Attali – on y reviendra. Déjà, l’étudiant porte plusieurs casquettes. Il adhère aux Jeunesses communistes – il prendra vite ses distances avec le #PCF – et à l’#UNEF, syndicat étudiant marqué à gauche. « Il était très militant mais pas gauchiste du tout », se remémore Paul-Antoine Luciani, un ami de la famille, figure #communiste et ancien adjoint à la #mairie d’Ajaccio.

    Rapports cordiaux avec Vincent #Bolloré

    Le jeune homme tisse des liens avec la #CGT. La figure de son père, très respecté chez les communistes, est un atout qu’il n’est pas besoin d’inscrire sur son CV. Précieux pour lancer sa carrière. Au début des années 1980, il rejoint un petit cabinet d’expertise-comptable, Maréchal. Très vite, il grimpe les échelons, en prend la tête. Les #lois_Auroux, en 1982 et en 1983, favorisent les négociations salariales et élargissent le rôle des comités d’entreprise (CE). #Pierre_Ferracci flaire le bon filon.

    Son groupe, #Alpha, qui voit le jour en 1983, d’abord avec le cabinet #Secafi, s’impose assez vite sur cette niche très rentable ; la CGT deviendra un de ses principaux clients, avec le syndicat des cadres #CFE-CGC plus récemment. Le cabinet de conseil travaille aujourd’hui pour environ 2 000 comités sociaux et économiques (#CSE). Le groupe s’est diversifié : il s’occupe aussi du reclassement des salariés, après un plan de licenciement. Un conflit d’intérêts, s’offusquent des concurrents du secteur qui reprochent à Alpha de jouer sur les deux tableaux, #syndical et #patronal. « La plupart du temps, on modifie à la marge les plans de licenciement. Donc l’accompagnement des salariés licenciés, c’est la suite logique », répond Pierre Ferracci.

    Grâce à son activité, il est l’un des #patrons les mieux informés de l’état de santé des grandes entreprises françaises. L’expert du #dialogue_social cultive une proximité avec un nombre incalculable de patrons. Il y a eu les #Corses, comme Jean-Cyril Spinetta, PDG d’Air France (1997-2008), ou Jean-Marie Colombani, directeur du Monde (1994-2007). Et puis des figures du #CAC_40 et capitaines d’industrie, parmi lesquels le spécialiste du textile Maurice Bidermann (mort en 2020), l’ancien sidérurgiste et ex-ministre Francis Mer ou encore Vincent Bolloré.

    Pierre Ferracci connaît le milliardaire conservateur breton « depuis longtemps ». « Dans les années 1990, j’ai même réussi à lui faire rencontrer, lors d’un repas, Louis Viannet, le secrétaire général de la CGT. » Et d’ajouter, facétieux : « C’était à l’époque où Vincent Bolloré avait une image un peu plus sociale qu’aujourd’hui. » Il a conservé des rapports cordiaux avec l’industriel : « Mais on parle plus de football et de #Canal que du #JDD et de #CNews, si c’est ça que vous voulez savoir. »

    Donateur du candidat d’En marche !

    Pierre Ferracci n’a cessé de tisser son réseau, tous azimuts. Son étiquette d’expert des questions sociales est un précieux sésame. En 2007, au début de la présidence Sarkozy, il accepte d’être membre de la commission #Attali sur la libération de la croissance. Beaucoup, à la CGT, tiquent. Peu lui importe. Le Corse aime le rappeler aux journalistes : c’est Emmanuel Macron, alors banquier chez #Rothschild et rapporteur général adjoint de la commission, qui a glissé son nom. « Manu », comme il l’appelle en privé, le tutoyant, est depuis vingt ans l’un des amis de son fils aîné, #Marc_ferracci, économiste devenu ministre sous les gouvernements Barnier puis Bayrou.

    Etudiants à Sciences Po, Marc Ferracci et Emmanuel Macron ont préparé l’#ENA ensemble. Les révisions s’organisaient parfois dans le chic appartement que loue aujourd’hui encore Pierre Ferracci près du jardin du Luxembourg, à Paris. En 2017, l’homme d’affaires sera d’ailleurs l’un des donateurs du candidat d’En marche !, ce qui ne l’a pas empêché, par la suite, de critiquer publiquement l’actuel chef de l’Etat, avec qui il conserve des relations « respectueuses et amicales ». Insaisissable Pierre Ferracci. Sous la présidence #Hollande, en 2014, il est nommé à la tête du Conseil national éducation économie, une structure visant à favoriser le dialogue entre le système éducatif et les entreprises. Il a également été membre du Conseil d’orientation pour l’emploi.

    « Pierre, c’est un pont entre plusieurs mondes, courtois, bon vivant », résume le consultant en stratégie sociale Antoine Foucher, qui a appris à le connaître lorsqu’il travaillait au Medef, vers 2012-2013. « Je ne suis jamais pour la politique de la chaise vide, justifie Pierre Ferracci. Là où il y a moyen de faire passer ses idées, j’y vais. » Son mantra : que les choix économiques n’écrasent pas les questions sociales. Ses détracteurs dénoncent des compromissions, lui vante les « compromis équilibrés ».

    Débuts catastrophiques au Paris FC

    C’est le football qui va lui permettre d’étoffer encore ses réseaux. Au début des années 2000, le conseil général de Seine-Saint-Denis et la ville de Saint-Ouen demandent à son groupe un audit du Red Star, avant de le sonder pour qu’il reprenne les rênes du club. L’affaire n’est pas conclue, mais elle lui donne des idées. En 2007, Guy Cotret, dirigeant du Crédit foncier, fait entrer Pierre Ferracci dans l’actionnariat du Paris FC, alors en National, le troisième échelon français.

    Le Corse sympathise avec des dirigeants et des personnalités du ballon rond, comme le mythique entraîneur Arsène Wenger ou le journaliste Didier Roustan. « Le football lui a permis d’élargir son carnet d’adresses avec des personnalités qui ne sont pas forcément celles qu’il rencontrait habituellement à travers son activité », résume Guy Cotret. Qui, en 2012, se fait évincer par Pierre Ferracci de la tête du club. « Il avait mis au pot plus que moi, 1 million d’euros environ, se remémore le président déchu et fâché à l’époque. Il voulait garder la main. C’est un chef d’entreprise, il y a une part d’autoritarisme qui n’est pas anormale. Mais l’affaire s’est conclue en bonne intelligence. »

    Les débuts de la présidence Ferracci au Paris FC sont catastrophiques. Le club est relégué. Les entraîneurs valsent les uns après les autres. La venue comme conseiller de son ami le journaliste Charles Villeneuve, ex-président du PSG rencontré par l’intermédiaire d’#Alain_Minc, est un échec. Le projet, avec Jean-Marc Guillou, un ancien joueur de l’équipe de France qui a entraîné par la suite la Côte d’Ivoire, de faire venir des jeunes joueurs africains, ne prend pas non plus. « Ça m’a vacciné d’entrée, ça c’est sûr », observe Pierre Ferracci avec le recul. Depuis plus de dix ans, il ne jure plus que par la formation locale et la richesse du bassin parisien. « Il croit à ce projet et a une vision claire de ce qu’il veut faire », salue Jean-François Martins, ancien adjoint aux sports à la mairie de Paris.

    Accord critiqué avec le #Bahreïn

    En douze ans de présidence, Pierre Ferracci a professionnalisé le PFC. Sans parvenir à lui faire goûter à la Ligue 1. Un centre d’entraînement et de formation a été inauguré à Orly en 2019. Le budget du club, l’un des plus gros de Ligue 2, se situe désormais autour de 30 millions d’euros. Pierre Dréossi, figure connue de la Ligue 1 et manageur général du PFC de 2015 à 2020, loue un patron de club qui a su « trouver des partenaires financiers ».

    En 2015, ce fut d’abord Vinci comme sponsor – un groupe que le cabinet Secafi connaissait bien. Puis le Bahreïn en 2020, à l’époque pour 25 millions d’euros et 20 % du capital du club – et 2 millions d’euros annuels pour être sponsor maillot. L’accord a suscité son lot de critiques, d’autant que le prince Nasser Ben Hamed Al Khalifa, à la tête du fonds bahreïni, est accusé par plusieurs ONG d’actes de torture. « Vous avez au Bahreïn une synagogue, une église catholique, une église orthodoxe et beaucoup plus de liberté pour les femmes qu’au Qatar, donc je n’avais pas de problème avec le Bahreïn », balaie cet athée revendiqué – « je suis très croyant : je crois que Dieu n’existe pas » –, qui apprécie peu de recevoir des leçons.

    Pierre Ferracci reconnaît d’ailleurs sans mal avoir essayé, « dans les années 2014-2015 », de recruter le géant russe #Gazprom comme sponsor : « En octobre 2015, j’ai même eu un rapide échange avec #François_Hollande, #Vladimir_Poutine et #Alexandre_Orlov [ambassadeur de la Russie à Paris] à ce sujet. » Aucun accord n’a été trouvé, mais la rencontre lui a rappelé l’époque où Alpha avait des bureaux à Saint-Pétersbourg et à Moscou.

    Ces dernières années, avant le rachat par #les_Arnault, il a réussi, grâce à son seul entregent, quelques « coups ». Comme faire de Raï, l’ex-star brésilienne du PSG, pas vraiment désireuse de travailler avec les Qataris, un ambassadeur du PFC. Ou de rendre gratuite la billetterie du stade Charléty, l’enceinte du Paris FC, aux tribunes souvent aux trois quarts vides – cela a un peu changé ces derniers mois. Fin novembre 2024, il a nommé son ami #Michel_Denisot au conseil d’administration du PFC. L’homme de télé, ex-président du PSG, est aussi un ancien de Canal+. Le dirigeant du PFC milite d’ailleurs pour qu’un jour la #chaîne_cryptée et le football français renouent leur longue alliance, interrompue ces dernières années. En vain pour l’instant.

    L’affaire de ses villas

    Au cours des dernières semaines, la BBC, le New York Times ou le Washington Post l’ont sollicité pour des interviews. Flatteur, même pour cet habitué de la presse. S’il est intarissable sur les mille et une nuances du monde syndical, les petites ou grandes histoires du football européen, il l’est beaucoup moins, en revanche, sur ce qu’il considère relever de son intimité. De son goût pour les bolides, il n’a jamais rien dit. Rien non plus sur ses revenus – un peu plus de 750 000 euros déclarés auprès du fisc pour l’année 2018, selon nos informations.

    L’affaire de ses deux villas et de sa piscine près de #Suartone, en Corse, qui lui ont valu une longue bataille judiciaire et 1 #million_d’euros d’amende pour un permis de construire non respecté, l’agace encore. S’il a pu conserver les #villas, il n’a pas digéré les nombreux articles écrits. « Une conséquence de ma relation avec Emmanuel Macron », estime-t-il à propos de cette #attention_médiatique. Mais, même sur ces polémiques, le verbe s’emporte rarement. « Il est assez insondable, Pierre, observe Jean-François Martins, l’ex-adjoint parisien, c’est assez déroutant. Il n’est pas surexpressif, même s’il dit ce qu’il pense. »

    Le ton affable et le goût revendiqué pour le dialogue social de Pierre Ferracci ne convainquent pas tout le monde. Plusieurs ex-salariés du groupe Alpha décrivent, sous couvert d’anonymat, un patron « autocrate » et « un management de la tension ». Simple aigreur de collaborateurs licenciés ? Pas sûr : l’inspection du travail s’est émue, à plusieurs reprises, au mitan des années 2010, du manque de dialogue chez Secafi-Alpha lors de plans de réorganisation, avec des #syndicats_internes informés « au compte-goutte ».

    En 2015, un fichier des ressources humaines listant des dizaines de salariés avec des remarques désobligeantes et parfois personnelles fuite. #Scandale dans le groupe. « Il y a eu des sanctions, ces pratiques n’existent plus », assure Pierre Ferracci. Et d’ajouter : « Le groupe Alpha n’est ni une entreprise parfaite ni, compte tenu du modèle social qu’elle a mis en place, un groupe qui doit être l’objet de toutes les critiques, tant s’en faut. »

    Des mystères demeurent
    Au sein du Paris FC, depuis ses débuts compliqués, tout le monde reconnaît l’implication de Pierre Ferracci. Il assiste à la plupart des matchs. Mais quelques mystères demeurent. Combien d’argent a-t-il mis dans le club depuis près de quinze ans ? « Beaucoup, beaucoup », sourit-il. Mais encore ? « Ça, je ne le dirai jamais. » Malgré nos relances, il ne précise pas, non plus, à quel prix le club a été racheté – « ça n’a pas grande importance ». D’une formule, il reconnaît tout de même : « C’est une très belle #valorisation. » Et ajoute qu’il est « ravi que tous les actionnaires qui [l]’ont suivi depuis le départ n’ont pas perdu d’argent mais en ont gagné » avec la reprise par les Arnault. Lui compris, évidemment.

    Au sujet des nouveaux propriétaires, Pierre Ferracci l’assure : il ne connaissait pas personnellement la #famille_Arnault avant le printemps, au début des négociations. Avec son groupe Alpha, il avait pourtant eu à gérer, dans les années 2000, deux dossiers sensibles liés à LVMH. D’abord, la fermeture contestée de la Samaritaine, où son cabinet Secafi avait été très critiqué par des salariés l’accusant d’avoir joué le jeu de la direction. Ensuite, le rachat (d)#Les_Echos par #Bernard_Arnault.

    Antoine Arnault confirme n’avoir, avant le printemps 2024, que « croisé » le président du PFC « dans différentes réceptions ou événements liés à nos vies professionnelles ». Mais, depuis le printemps, ils ont appris à se connaître et à s’apprécier. Le patron de Berluti salue des #négociations menées « avec une grande intelligence et une grande patience ». « Après, nuance le nouveau propriétaire du Paris FC, c’est quelqu’un qui a aussi ses idées et qui n’en démord pas, et va négocier de manière extrêmement déterminée. Ce n’est pas un enfant de chœur, Pierre Ferracci. » C’est dit comme un compliment.

    Le casse-tête du stade

    Ces dernières semaines, Antoine Arnault, habitué aux tribunes VIP du Parc des Princes, a assisté à des matchs de son nouveau club. Même si l’enceinte du Paris FC n’a pas de loges, il a pu y côtoyer du beau monde. « Pierre Ferracci est quelqu’un qui a une très grande intelligence des gens et qui arrive à se les mettre dans la poche, jauge-t-il. Quand je vais à Charléty et que je croise aussi bien Philippe Martinez que Pascal Obispo… Il réussit à réunir des gens d’univers très différents et à les faire dialoguer. Dieu merci, avec Martinez, ce n’est pour l’instant que pour parler foot ! »

    Cette année, Pierre Ferracci a promis de passer la main à la présidence du groupe Alpha. D’ici à l’automne, il souhaite créer un fonds de dotation pour soutenir des actions liées à « l’éducation des tout-petits », un sujet cher à ce fils d’instits. Sa casquette de président du Paris FC, pour trois ans encore, devrait bien l’occuper.

    Les #chantiers ne manquent pas. Il y a cette montée en Ligue 1, dont il rêve depuis des années. L’agrandissement du centre d’entraînement, à #Orly, qui paraît sous-dimensionné au vu des ambitions des nouveaux propriétaires. Et puis, surtout, le casse-tête du stade. #Charléty, avec sa piste d’athlétisme et ses tribunes ouvertes aux quatre vents, n’est pas l’écrin rêvé. Il faudrait le réaménager, si la Ville de Paris l’accepte. Afin de pouvoir accueillir les célébrités qui devraient se presser en tribunes, pour voir jouer le club alliant désormais le savoir-faire du président Ferracci à l’argent des Arnault.

    #Yann_Bouchez

  • Codes de conduite, florilège

    Code de conduite | Duchess France
    https://www.duchess-france.fr/coc

    Toute personne qui nuit au bon fonctionnement de la communauté s’expose à des sanctions allant du rappel à l’ordre jusqu’à l’exclusion du Slack et des évènements de la communauté. Les sanctions sont à la discrétion de la Core Team Duchess.

    –---

    Code de conduite - Paris Web
    https://www.paris-web.fr/code-de-conduite

    Nous ne tolèrerons aucune forme d’attaque personnelle quelle qu’elle soit. Les personnes participant à l’événement qui violeraient ces principes pourront être sanctionnées et expulsées à la discrétion de l’équipe d’organisation.

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    Ce fil propose de recenser les #codes_de_conduite dans les communautés.

    #sexisme #logiciel #communauté #gestion_des_agressions #modération #exclusion #judiciarisation_improvisée

    • Le groupe Medvedkine nommé d’après Alexandre Medvedkine, inventeur d’un « ciné-train » parcourant l’URSS pour filmer les gens et projeter le film illico, le #groupe_Medvedkine s’est d’abord concrétisé à Besançon, de 1968 à 1971, autour de l’usine textile Rhodiacéta . Puis autour de l’usine Peugeot de Sochaux, de 1970 à 1974. et c’est à ce second groupe Medvedkine qu’appartint #Christian_Corrouge et qui cause sur 20 pages dans le dernier #Cheribibi, le n°13.
      https://www.cheribibi.net/les-numeros/sommaire-numero-13
      Causerie avec Christian Corouge - Ouvriers, cinéastes, tous en chaîne  !

      « Moi, tu vois, je suis ajusteur. J’ai fait trois ans d’ajustage. Pendant trois ans, j’ai été premier à l’école, dans mon CET… Et puis qu’est-ce que j’en ai fait ? Au bout de cinq ans, je peux plus me servir de mes mains, j’ai mal aux mains. J’ai un doigt, le gros, j’ai du mal à le bouger. J’ai du mal à toucher Dominique le soir. Ça me fait mal aux mains. La gamine, quand je la change, je peux pas dégrafer ses boutons. Tu sais, t’as envie de pleurer dans ces coups-là. Ils ont bouffé mes mains. J’ai envie de faire un tas de choses et puis, j’me vois maintenant avec un marteau, je sais à peine m’en servir. C’est tout ça tu comprends. T’as du mal à écrire. J’ai de plus en plus de mal à m’exprimer. Ça aussi c’est la chaîne. Quand t’as pas parlé pendant 9h, t’as tellement de choses à dire que t’arrives plus à les dires ; Que les mots ils arrivent tous ensemble dans la bouche. Et puis tu bégayes, tu t’énerves. Tout t’énerve. Tout. Et ce qui t’énerve encore plus, c’est ceux qui parlent de la chaîne, qui comprendrons jamais que tout ce qu’on peut dire, que toutes les améliorations qu’on peut lui apporter, c’est une chose, mais que le travail, il reste. C’est dur la chaîne. Moi, maintenant, je peux plus y aller, j’ai la trouille d’y aller. C’est pas le manque de volonté, c’est la peur d’y aller. La peur qu’ils me mutilent encore d’avantage. La peur que je ne puisse plus parler un jour, que je devienne muet. (…) J’ai tellement mal aux mains. J’ai tellement de grosses mains. Mes mains me dégoûtent tellement. Pourtant je les aime tellement mes mains. Je sens que je pourrais faire des trucs avec. Mais j’ai du mal à plier les doigts. Ma peau, elle s’en va. Je veux pas me l’arracher. C’est Peugeot qui me l’arrachera, et je lutterai pour éviter que Peugeot me l’arrache. C’est pour ça que je veux pas m’arracher la peau. Je veux pas qu’on les touche mes mains. C’est tout ce qu’on a. Peugeot essaye de les bouffer, de nous les user. Et nous, bah on lutte pour les avoir. C’est de la survie qu’on fait. »

  • Un front commun contre l’#industrialisation des #forêts françaises

    #Creuse, juin 2024. Les murs de la salle sont couverts de photos et de textes. Certains portent sur l’installation d’un parc photovoltaïque dans les forêts de la #montagne de #Lure, dans les #Alpes-de-Haute-Provence. D’autres annoncent la tenue, quelques jours plus tard durant l’été, de l’assemblée générale du #Réseau_pour_les_alternatives_forestières (#RAF). Dans un coin, une table accueille des brochures, des fanzines et quelques parutions récentes portant sur les forêts, la lutte pour les préserver, leur gestion. Une grande banderole au nom de SOS Forêt est tendue au-dessus des baies vitrées et une large toile peinte faisant figurer la tête d’un lynx entourée d’un massif diversifié, mélangeant feuillus et résineux, surplombe l’estrade. Au-dessus de celle-ci, sur un fond de couleur violette, se détache le titre donné aux retrouvailles qui se sont tenues les 28 et 29 juin dernier : « Assemblée pour des forêts vivantes ».

    Nous, c’est-à-dire deux doctorants en sciences sociales et un camarade musicien, tous trois sympathisants des initiatives décrites dans cet article et participant à l’occasion à certaines d’entre elles, assistons ce matin-là à la plénière d’ouverture, deux ans après une première édition à Nestier, dans les Hautes-Pyrénées1.

    Les prises de parole s’enchaînent et renseignent sur les actualités les plus récentes concernant les forêts françaises, évoquent des initiatives à soutenir et à rejoindre, rappellent le fonctionnement de ces deux jours de rencontres. Des tee-shirts floqués à l’insigne d’Adret Morvan, du #Groupe_national_de_surveillance_des_arbres (#GNSA) ou de la Marche pour les forêts organisée quelques années plus tôt par les syndicats de forestiers de l’#Office_national_des_forêts (#ONF), sont portés pour l’occasion.

    C’est au tour de C. de monter sur l’estrade. Elle habite sur le territoire, s’initie depuis un moment aux divers métiers de la forêt ou du bois et vient présenter la grande carte qu’un de ses camarades déplie derrière elle (dont des extraits illustrent cet article, ndlr). Elle commence : « Ici on lit souvent qu’il n’y a pas de culture forestière. Ce n’est pas si évident. Il y a une culture industrielle mais aussi un rapport habitant aux forêts et une histoire de luttes. » Pour l’attester, raconte-t-elle, un petit groupe s’est attaché à récolter des témoignages et à compiler des archives afin de « cartographier des événements et des récits à propos de l’histoire de la forêt sur la Montagne limousine ». Suivons l’invitation et observons la carte de plus près.

    Le territoire représenté est à cheval sur les départements de la Creuse, de la #Corrèze et de la #Haute-Vienne. Il est tout entier maillé de petites phrases et de vignettes qui illustrent une culture forestière contrastée mais bien présente : une commune est associée à la formation au bûcheronnage qui s’y déroule depuis plusieurs années, une autre à la « tentative désespérée d’empêcher la #coupe_rase d’une #hêtraie ». On lit des histoires de champignons et de cabanes, mais aussi les conséquences sur le milieu et l’emploi de l’industrialisation de l’exploitation forestière. Quatre bêtes fantastiques et menaçantes encadrent ainsi la carte. Elles symbolisent les « usines à bois » qui amputent les forêts de la région – la #scierie #Farges_Bois, le papetier #Sylvamo, la société #Groupe_bois_et_scieries_du_Centre ainsi que le projet d’usine de #granulés #Biosyl2.

    Cartographier les luttes

    Deux jours durant, on partage des données, des anecdotes, des témoignages, mais aussi des outils. À plusieurs reprises durant l’Assemblée, la #cartographie est apparue comme une pratique pertinente pour rendre compte des « petites et grandes histoires populaires de la forêt », donc, mais aussi pour représenter des lieux à surveiller et à défendre ou pour contester les données fournies par les acteurs dominants de la filière forêt-bois. Ces deux derniers enjeux ont fait l’objet d’un atelier durant lequel des outils récemment élaborés par un groupe forestier local rattaché au #Syndicat_de_la_Montagne limousine et par l’association #SOS_Forêt_Dordogne ont été transmis aux participant·es.

    L. et T. rappellent le contexte ayant mené à la création de #Vigie_Feuillus, un protocole de veille sur les coupes rases qui affectent quotidiennement les « forêts désenchantées3 » du #Plateau_de_Millevaches. Après plusieurs mobilisations contre des chantiers forestiers jugés inacceptables par une partie de la population, il leur a semblé important de trouver un mot d’ordre plus précis qu’une seule opposition à l’industrialisation des forêts locales. Un « guide d’intervention » fraîchement sorti de l’imprimerie est distribué à l’assistance et le sera dans toute la région durant les mois suivants. « Ce protocole, lit-on au dos de la brochure, offre quelques bases pour déterminer quelle stratégie d’intervention est la plus judicieuse et adaptée à la situation ». Il s’agit non seulement d’affûter le regard des habitant·es sur l’#exploitation_forestière dans leur territoire, mais également de s’exercer à les surveiller en identifiant les indices d’activité et à coordonner des actions afin de « créer des précédents sur les alternatives à proposer en cas de coupe rase ». Deux exemples sont convoqués pour illustrer l’éventail de situations qu’il est possible de rencontrer.

    Le premier cas a fait suite à une alerte donnée sur une probable coupe rase dans la forêt qui jouxte l’habitation de sympathisant·es du Syndicat de la Montagne limousine. Une personne a permis de gagner un temps précieux en s’opposant aux premiers travaux d’abattage, fournissant à l’organisation l’espace pour inviter les parties prenantes à une discussion conjointe, lors de laquelle les propriétaires de la parcelle boisée ont expliqué procéder à une coupe pour des raisons financières. Une issue semble alors possible par le biais du Parc naturel régional (PNR) de Millevaches dans lequel la parcelle est située : une proposition de contrat à hauteur des gains espérés par la coupe est acceptée par les propriétaires et inscrit dans la réglementation Natura 2000. L. conclue son récit en rappelant qu’il importe d’être « lucides sur là où il faut taper » : « pas sur les travailleurs », ni sur certains « petits propriétaires forestiers » dont les contraintes peuvent être tout à fait compréhensibles.

    Le second cas présente les effets qu’un outil comme #Vigie_Feuillus pourrait être susceptible de produire. En janvier 2023, sur la commune de #Tarnac, en #Corrèze, des travaux d’exploitation sont en passe de commencer sur une parcelle de plusieurs hectares que traverse la #Vienne. Plus précisément, une coupe rase est prévue dans ce qui a été identifié comme un « taillis dépérissant de châtaigniers », qui est aussi une belle forêt de feuillus appréciée des riverains. Aussitôt, un comité local se met en place pour défendre la forêt menacée. Très vite est décidée une série d’actions – « surveillance accrue, garde, blocage, occupation » – qui permettent de suspendre le chantier. À la différence de l’exemple précédent, la propriétaire n’a pas besoin d’argent : il s’agit seulement d’appliquer les mesures décidées dans le plan de gestion de sa forêt. Et de les appliquer coûte que coûte, peu importe les offres faites par le PNR ou la région pour lui acheter sa parcelle et ainsi empêcher son déboisement. Le point d’orgue de la contestation est atteint un matin de mars, lorsque les représentant·es de la filière forêt-bois du département, invité·es à un rassemblement sur place afin de soutenir la propriétaire, la coupe et un modèle forestier extractiviste, reçoivent une délégation d’opposant·es. « Le Bois du chat, symbole de la lutte entre deux visions de la forêt » titrera un journaliste présent sur place4.

    Au moment où, son récit terminé, L. s’interrompt, un hélicoptère de la gendarmerie survole le site du rassemblement pendant une longue minute, rappelant qu’ici les forêts sont un sujet sensible. Le bruit des pâles étouffe momentanément les discussions.

    M. prend ensuite la parole au nom de SOS Forêt Dordogne pour présenter une contre-expertise cartographique et collaborative menée par son association à la suite d’assises départementales sur la forêt tenues quelques années auparavant, lors desquelles le pourcentage de coupe rase réalisé chaque année leur a paru largement sous-évalué. « On s’est dit que pour parler à ces gens-là, il fallait qu’on ait des chiffres », commence-t-elle. Et d’ajouter : « Vous nous dites qu’il n’y a pas plus de coupes rases qu’auparavant : on a un outil cartographique qui montre le contraire ». Celui-ci se fonde sur l’identification in situ menée par un réseau de correspondant·es volontaires répartis sur l’ensemble du département, là où les chiffres de l’#Inventaire_forestier_national (#IFN) dépendent des #photographies_satellites. Il est simple de s’approprier la méthode proposée : une photo, un point GPS et un référencement sur une carte accessible en ligne suffisent à contribuer à l’effort de contre-cartographie.

    Tous ces exemples nous le rappellent : les forêts et les #cartes, c’est toute une histoire5. Leur mariage peut en effet aussi bien aller dans le sens d’une simplification des écosystèmes forestiers, être un outil de conquête et d’appropriation6, qu’être des plus efficaces pour mieux connaître les forêts et agir en leur sein, y travailler avec plus de précision, en préserver certaines parties ou, comme le montrent les exemples précédents, les défendre.

    De simples cartes de localisation seraient sans doute utiles, aussi, afin de mieux se retrouver parmi le foisonnement de collectifs forestiers présents lors cette deuxième Assemblée pour des forêts vivantes. La pluralité des espaces géographiques représentés est une force : de la #Meurthe-et-Moselle aux #Pyrénées, la défense des forêts suscite l’émergence de groupes locaux, mêlant habitant·es, professionnel·les et associations. Mais l’hétérogénéité des situations décrites peut aussi apparaître comme un frein à l’élaboration de mots d’ordre nationaux à même de massifier les mobilisations locales. Se pose, dès lors, la question du besoin d’une coordination nationale pour assurer l’organisation de tels événements.

    Adversaires et alliés : identifier les acteurs et les actrices de la forêt

    Après un déjeuner où des discussions enforestées ont porté sur les liens à consolider entre l’amont et l’aval de la filière bois et ont suscité l’envie d’aller rencontrer nos voisin·es Suisses pour apprendre de leur modèle sylvicole, il est temps de regagner la salle principale. Sur les bancs en bois ayant servi pour la plénière introductive, une petite vingtaine de personnes attend que commence l’atelier animé par un membre de l’association #Canopée – Forêt vivante. La séance est consacrée à l’identification des différents acteurs de la filière forêt-bois, des grandes coopératives forestières aux collectifs d’habitant·es, des sociétés de placement financier aux associations de gestionnaires forestiers.

    Par souci stratégique et didactique, ces acteurs, représentés par leur logo imprimé sur des rectangles de papier cartonné, sont placés sur un tableau déterminé par deux coordonnées. L’abscisse indique le positionnement politique de chacun par rapport aux écosystèmes forestiers et socio-professionnels. Plus ils se placent à gauche du tableau, plus ils sont considérés comme éloignés d’une sylviculture et d’une attention forestière privilégiant la vie, la diversité, la santé mentale et physique au travail, la constitution de communs inter-espèces, la subsistance. Ils sont au contraire caractérisés par leurs objectifs de profits à court terme, de maîtrise de la terre, des corps et des ressources, d’inattention écologique, de gestion des flux et d’opportunisme vert. L’ordonnée montre quant à elle le degré d’influence politique des structures et infrastructures. En haut de la ligne se retrouvent celles dont les ressorts sont les plus efficaces – en termes de taille, de capacité d’alliance, de communication, de maîtrise de l’opinion et donc de poids dans les sphères de la haute administration décisionnaire – pour faire peser la balance vers une orientation ou une autre.

    Chaque participant·e est invité·e à donner son avis sur le placement, au sein du tableau, des rectangle présentés par l’animateur de l’atelier. On apprend ainsi que Fransylva est l’unique syndicat des propriétaires forestiers privés, réduisant par conséquent à une seule liste le choix électoral, le reconduisant tous les six ans. Son président, Antoine de Ponton d’Amecourt, effectue sur ses propres parcelles forestières des coupes rases allant jusqu’à vingt hectares7.

    Par ailleurs, son syndicat contribue à légitimer, par des éléments de langage, l’industrialisation forcenée de la filière, la monoculture de résineux et le rajeunissement des peuplements – ce qui n’est pas pour déplaire à un proche de l’organisation nommé Jean-Michel Servant, ancien président de l’interprofession nationale France bois forêt et encore délégué interministériel à la forêt, au bois et à ses usages en juin dernier. À la lumière de ces informations sur le syndicat, Fransylva trouve une place évidente sur le tableau : très en haut, tout à gauche.

    L’animateur poursuit en mentionnant Pro Silva (à ne pas confondre avec la structure précédente), une association de propriétaires, gestionnaires, professionnel·les et ami·es de la forêt, reconnue d’utilité publique depuis 2013. Elle organise principalement des formations techniques prônant la sylviculture mélangée à couvert continu, pratique fondée sur le temps long, la diversification des essences et des âges. Ses principes sont applicables partout mais le faciès des forêts ainsi gérées n’est jamais le même, et s’oppose en cela au modèle monoculturel. Si Pro Silva a montré, depuis son lancement en 1989, son importance dans la balance politique, sa visibilité médiatique reste encore faible. Elle sera placée dans le quart inférieur droit.

    À la cartographie comme outil de lutte succède donc le plan. Les nombreux autres acteurs seront à leur tour présentés et disposés afin de mieux s’orienter dans le paysage institutionnel de la forêt française.
    Débrancher les forêts

    Au même moment, une discussion consacrée à la rencontre entre « forêt et production d’énergie », ou « comment résoudre l’équation impossible », débute sous un barnum nommé « bouleau » pour l’occasion. Certain·es participant·es feront remarquer qu’il n’y a pas de barnum « douglas », ni « pin maritime », les mal aimés, les pas beaux. C’est pourtant souvent de ces essences dont il est question, en ce qu’elles composent largement les forêts « sous camisole8 » impliquées dans les projets énergétiques qui seront discutés au cours de cet atelier.

    Quelques personnes préparent l’espace de discussion. Deux intervenants accrochent des photographies de parcs solaires sur la bâche blanche et jaune du barnum. L’un d’eux porte un tee-shirt du Réseau pour les alternatives forestières (RAF), dont il fut l’un des administrateurs. Un slogan y est inscrit : « Ça te branche ? ». La question prend ici une tout autre tournure.

    Deux clichés, « avant/après », amènent à constater l’impact forestier de la « centrale industrielle » de Monfort, développée par Engie Green dans les Alpes-de-Haute-Provence. Au-dessus, une cartographie « clandestine et non-exhaustive » permet d’insérer cette prise de vue dans ce qui est qualifié de « mitage en cours ». On comprend vite le sens de cette expression et de ce qu’elle recouvre : si la loi APER de 2023, relative à « l’accélération de la production d’énergies renouvelables », interdit les installations photovoltaïques supérieures à 25 hectares sur des zones forestières lorsque celles-ci nécessitent une autorisation de défrichement, n’amène-t-elle pas à la multiplication de projets certes moins grands, mais toujours aussi vastes dès lors qu’on accède à un aperçu global du phénomène ?

    Une dizaine de personnes a pris place – il y en aura une vingtaine lors de la session suivante. Quelques-unes étaient présentes aux Résistantes, les « rencontres des luttes locales et globales » qui ont eu lieu sur le plateau du Larzac l’année précédente. L’impact des parcs photovoltaïques sur les espaces agricoles ou forestiers y avait été discuté lors d’une table-ronde, à l’issue de laquelle une coordination nationale s’était créée9.

    Un nouveau « tour d’horizon des projets contestés et des luttes engagées » commence donc. Un intervenant venu des Bouche-du-Rhône aborde le cas de Gardanne, où l’avenir de la centrale à charbon reconvertie en usine à biomasse reste encore incertain. On estime sa consommation à 850 000 tonnes de bois par an. Ses propos sont ensuite complétés par un témoin des Pyrénées-Atlantiques, qui détaille pour sa part le projet BioTJET – une usine de bio-kérozène située à Lacq, censée alimenter les besoins de l’aéronautique en carburant à partir du bois. La production s’appuie sur l’électrolyse, un procédé lui-même très coûteux en énergie. Drôle de transition, pense-t-on, que celle nécessitant de nouvelles unités de production d’électricité, de nouvelles lignes de transports et, qui sait, de nouveaux panneaux solaires en forêt.

    Beaucoup attestent sur ce point d’une véritable « déferlante photovoltaïque » dans les milieux forestiers, que ce soit en Dordogne, en Franche-Comté, en Gironde ou dans les Alpes-de-Haute-Provence. La pression sur les espaces concernés est parfois double. Sur la Montagne de Lure, l’association Elzeard a dénombré plus de 1 000 hectares de zones naturelles convoitées par l’industrie photovoltaïque. Or, cette montagne fait déjà partie de la Zone d’Approvisionnement Prioritaire de la centrale de Gardanne.

    Là comme ailleurs, la pression s’intensifie par le biais d’un nouvel outil conçu par la loi APER : les Zones d’Accélération. Les communes doivent désormais identifier des sites jugés propices à l’installation d’unités de production et rapidement en fournir une cartographie. D’où l’organisation de balades « botanovoltaïque » dans le Buëch, comme nous l’a expliqué un membre du Collectif citoyen pour un autre photovoltaïque dans les Alpes du Sud. En se promenant sur ces terres convoitées et soumises à une spéculation nouvelle, il est sûrement possible de découvrir ce que la superposition de données oublie ou ne sait dire de la forêt.

    Une membre du Collectif Citoyens Résistants Champagnole est venue témoigner de ce qui aurait dû être le plus gros parc photovoltaïque de Franche-Comté dans les forêts de Loulle et de Mont-sur-Monnet. La voilure a dû être revue à la baisse. C’est également le cas en Gironde, ce dont témoignent des opposant·es au projet Horizeo, grand vainqueur de cette course au gigantisme. Les porteurs du projet envisagent l’installation de 700 hectares de panneaux photovoltaïques dans la forêt des Landes girondines, au sud de Bordeaux, au lieu des 1 000 hectares prévus initialement. Mais ce projet, qui serait alors le plus important en France, a toutefois du plomb dans l’aile. Il fut récemment désavoué par le même gouvernement qui avait adapté la loi APER à son calendrier, rendant ainsi possible le dépôt des demandes d’autorisation avant que l’interdiction des sites de plus de 25 hectares soit effective.

    Si les projets s’accumulent en entrent en concurrence, l’espace dédié à la compensation forestière également – une aubaine, malgré tout, pour des coopératives forestières attentives à l’expansion de leur domaine d’intervention, transformant des forêts de « faible valeur » en hectares compensateurs. Alors, les hectares en forêts se font plus chers, et c’est le foncier agricole qui apparaît comme une solution miracle.

    Nous l’avons vu, même si les argumentaires et les conditions matérielles sur lesquelles s’appuient ces projets varient en fonction des territoires, ils s’inscrivent néanmoins dans des dynamiques globales. Un chercheur qui enquête depuis Bruxelles sur le lobbying européen des grandes entreprises, notamment sur l’industrie de la biomasse, nous le raconte. Il rappelle l’intérêt de comprendre les directions de l’Union pour appréhender le contexte national et ses répercussions sur nos milieux de vie. Les contraintes sont fortes et les pénalités financières bien réelles. La France, seul État membre à n’avoir pas atteint ses objectifs de production d’énergie renouvelable en 2020 et dont la trajectoire a été jugée insuffisante, s’est vu infliger une amende de l’ordre de 500 millions d’euros.

    L’industrialisation de la forêt, largement évoquée lors de ces journées, est tout à fait compatible avec la « transition énergétique » telle qu’elle nous a été témoignée. En fait, cette mise au travail des forêt permet au moins deux choses. D’une part, elle garantit la pérennité et la progression d’une ressource en bois qui doit s’adapter à de nouveaux besoins : la production d’une énergie « verte » et « décarbonnée ». D’autre part, elle assure à cette production un espace dédié où pourront être implantées les infrastructures nécessaires à la transformation des ressources, qu’il s’agisse de bois ou de soleil. Pour ce faire, l’industrie emploie un argumentaire qui opère comme une épée à double tranchant. À la fois capable d’écologiser la forêt – un bien renouvelable pour une énergie propre – elle n’hésite pas à nier son existence quand cela l’arrange – au mieux elle est en dépérissement, au pire ce n’est pas une vraie forêt. Dans tous les cas, il s’agit de la couper pour satisfaire l’envolée d’une demande en énergie rarement ou jamais questionnée.

    Face à cette industrialisation de la forêt, une éclosion de luttes territorialisées est soucieuse de se mettre en lien. S’il convient de distinguer les nombreux domaines que couvrent la question de l’énergie (biomasse, photovoltaïque, biocarburants, etc.), ce travail de témoignages, de partages d’expériences et de réflexions ouvre à des prises de positions, enquêtes et actions communes aux participant·es. C’est toute une culture qui se construit, là où les développeurs, nous l’avons entendu, croient souvent tomber sur des « incultes », des habitant.es peu informé.es, et pensent bénéficier de causes parfois considérées comme indéfendables : il est compliqué de concevoir qu’un projet dit « de transition énergétique » puisse être contesté. « On l’entend dans la presse : les écolos attaquent les écolos ».

    Démanteler le complexe sylvo-industriel

    Défendre les forêts conduit donc bien souvent à en sortir pour comprendre ce qui les menace. Quitte à remonter pour cela une ligne à grande vitesse ou à suivre le parcours d’un camion chargé d’arbres fraîchement abattus. Depuis plusieurs mois, le collectif Méga-Scierie Non Merci lutte contre l’extension de la scierie Farges-Bois, en Corrèze, à Égletons – une lutte qui, pour l’heure, est sur la bonne voie : les procédures judiciaires en cours à l’encontre de l’industriel l’ont contraint à suspendre momentanément son projet d’extension. Et ce malgré l’achat récent de la propriété d’une riveraine et opposante par l’industriel, suite à l’expropriation de l’habitante par la communauté de communes Ventadour-Égletons-Monédières10.

    Cette histoire nous est racontée par deux membres du collectif. Ils reviennent sur les raisons de leur implication contre l’extension de la plus grosse scierie limousine, qui a pu être visitée lors de portes-ouvertes mémorables en septembre 202311. Rien ne les destinait à enquêter sur l’industrie forestière, à calculer des volumes de bois sur pied, abattus et sciés, ni à entamer un véritable travail de recherche pour mieux comprendre la réalité de ces « méga-scieries » qui s’installent et se développent de l’Alsace aux Pyrénées. Leur rencontre les a conduits à tenter de comprendre ce que l’aval d’une filière industrielle fait à la ressource qu’elle mobilise et aux forêts qui la produisent.

    En décembre 2022, plus de 200 personnes ont manifesté dans les rues d’Égletons pour protester contre le projet d’extension et elles étaient autant à participer à la première réunion d’information organisée par les opposants au début de l’année 2024. Aujourd’hui, le public de l’atelier est beaucoup plus clairsemé : l’outil industriel, sa logique de standardisation, de capitalisation et d’investissement, son rapport de prédation à la ressource en bois ne sont peut-être pas les sujets les plus séduisants de cette Assemblée pour des forêts vivantes. Le même après-midi, il est en effet possible de composer des vers ou des haïkus pour les déclamer ensuite en forêt, ou de s’initier à la grimpe d’arbre avec des membres du GNSA. Difficile, aussi, de trouver des failles chez des groupes composés de plusieurs centaines de salarié·es et qui bénéficient d’un soutien politique fort au-delà de la seule – et nécessaire – opposition.

    C’est notamment pour cette raison que A. et A. ont commencé à enquêter sur le monde discret des plus grosses scieries françaises. Mieux connaître ses réalités donne des prises pour envisager une riposte un tant soit peu suivie d’effets. Une démarche proche de celle qui a mené l’Atelier paysan à écrire le livre Reprendre la terre aux machines, dans lequel un retour critique sur la modernisation agricole et la constitution d’un complexe agro-industriel précède une série de propositions concrètes à l’adresse du monde paysan. Une heure durant, ils relatent leur cheminement, convoquent l’histoire récente du territoire et celle de l’industrie forestière avant d’ouvrir le débat sur quelques questions simples : comment démanteler de tels sites industriels ? Par où commencer ? Et qu’est-ce que démanteler, dans ce cas, veut dire ?

    Tandis que l’atelier prend fin, la discussion se poursuit avec trois personnes mobilisées contre le rachat et l’agrandissement d’une scierie à proximité de leur lieu de vie. Dans la grande salle, un chœur entame des chants, vite repris par le public. Nous mettons quelques chaises à l’écart pour recueillir le récit de G., X et E., trois membres d’un collectif situé autour de Brassac, dans le Tarn, qui se mobilise contre le projet porté par le groupe SIAT, propriétaire de la plus grosse scierie française, située en Alsace. Celui-ci entend faire d’une scierie moyenne, déjà reprise mainte fois, l’une des plus importantes d’Occitanie. Quelques semaines plus tôt, une petite délégation issue du collectif Méga-Scierie Non Merci est allé à leur rencontre pour entamer une collaboration militante. Des connexions commencent à se faire.

    « Nous, on habite à côté ». G. et M. ont assisté à l’émergence et la croissance de la scierie installée en face de chez eux, à Brassac, depuis 1997, jusqu’à son rachat récent par le groupe SIAT. Ils n’en sont pas à leur premier combat pour la sauvegarde de terres agricoles et naturelles : voilà une dizaine d’années qu’ils posent des recours pour contester le changement d’affectation des sols autour de chez eux, quelles que soient les sociétés concernées.

    Néanmoins, un changement d’échelle est cette fois à prévoir : « L’argument de SIAT est de dire qu’ils vont faire un site miroir de celui qu’ils ont en Alsace. Donc on a voulu savoir comment c’était en Alsace ». Une visio-conférence organisée avec des riverains du site d’Urmatt dans le Bas-Rhin a fini de convaincre les trois opposant·es : s’il se réalise, ce méga-projet industriel produira un niveau de nuisances et de pollutions invraisemblables pour les riverain·es, ainsi qu’une pression accrue sur des forêts déjà soumises à une exploitation importante et des perturbations climatiques de plus en plus intenses.

    Dès lors, dans le Tarn comme ailleurs, tous les moyens sont bons pour convaincre les habitant·es concerné·es qu’il est impératif de s’opposer à ce qui les attend. Des festivités se sont ainsi tenues le 22 septembre 2024 à Brassac dans l’espoir de faire changer d’échelle la lutte locale contre l’implantation du groupe SIAT. Un événement d’une tout autre ampleur, appelé par nombreux collectifs, associations et syndicats du Limousin a rassemblé le premier week-end d’octobre plus de 3 000 personnes à Guéret, dans la Creuse, là où le groupe Biosyl entend installer une usine à granulés qui menace les forêts de feuillus des environs. Cette journée de mobilisation populaire massive, soutenue aussi bien par des syndicats agricoles et de travailleurs que des associations environnementales, a été une véritable réussite.

    https://www.terrestres.org/2024/11/26/un-front-commun-contre-lindustrialisation-des-forets-francaises
    #forêt #France

  • Les #femmes, du foyer aux révolutions féministes (6/10) : 1971, les #femmes voteront
    https://img.rts.ch/articles/2024/image/32v9oe-28540994.image

    En #1971, les femmes obtiennent le #droit_de_vote en Suisse. Comment comprendre ce changement soudain après tant de résistances, de sourde-oreille et de passivité du législatif ? Il faut regarder à la fois à l’extérieur et à l’intérieur de la Suisse les pressions conjointes qui s’assemblent pour rendre possible ce droit refusé jusque-là. Les différentes manières de se penser femme et féministe s’expriment. La victoire permet l’émergence des nuances qui se taisaient encore.

    https://www.rts.ch/audio-podcast/2024/audio/les-femmes-du-foyer-aux-revolutions-feministes-6-10-1971-les-femmes-voteront-285
    #Suisse #histoire_vivante #podcast #audio
    #suffrage_féminin #féminisme #anti-féminisme #Suzanne_Besson #Ligue_vaudoise_féministe_antisuffragiste #histoire #xénophobie #conseil_de_l'Europe #marche_sur_Berne #marche_à_Berne #manifestation #lutte #groupe_de_travail_de_la_famille

    • Suzanne Besson

      14.2.1885 à Niédens (comm. Yvonand), 17.7.1957 à Villeneuve (VD), prot., de Chapelle-sur-Moudon et Yvonand. Fille d’Elie, agriculteur, et de Caroline Potterat. Célibataire. Journaliste. B. organisa en 1919 à Lausanne la première assemblée de femmes opposées au suffrage féminin, mit sur pied et présida une éphémère Ligue vaudoise féministe antisuffragiste, fonda en 1920, sur le plan national, la Ligue suisse des Femmes patriotes, qui se distingua par son intense propagande contre le suffrage féminin. Elle a publié sous le pseudonyme de Céréalis de courtes œuvres littéraires.

      https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/009271/2002-09-12

  • Scandale des #eaux_en_bouteille : la fraude de Nestlé s’élève à plus de 3 milliards en 15 ans | Mediapart

    https://www.mediapart.fr/journal/france/180724/scandale-des-eaux-en-bouteille-la-fraude-de-nestle-s-eleve-plus-de-3-milli

    #nestlé_waters

    L’ampleurL’ampleur de la fraude est inédite. Par sa durée : plus de quinze ans, et par son montant : plus de 3 milliards d’euros au minimum. C’est ce que révèle un nouveau rapport d’enquête, que #Mediapart a pu consulter, sur le #traitement #frauduleux des eaux minérales par #Nestlé

    Depuis 2005, la multinationale a vendu plus de 18 milliards de #bouteilles d’#eau sous les marques #Contrex, #Hépar ou #Vittel, dont la qualité équivalait à celle de l’eau du #robinet. Mais à un prix près de cent fois supérieur.

    « Au vu de la durée des pratiques et du nombre de directeurs qui ont pu se succéder sur cette période », le caractère systémique de cette #fraude conduit les enquêteurs à retenir principalement la responsabilité du #groupe_Nestlé davantage que des responsabilités individuelles. Contacté, le groupe Nestlé nous a renvoyés vers son site, où sont publiées des réponses types. 

    Tout a commencé en novembre 2020, lorsqu’un salarié du groupe Alma (qui commercialise les eaux de la marque Cristaline) signale auprès de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) des traitements non conformes des eaux commercialisées comme « eaux minérales naturelles ». Cette alerte déclenche un premier rapport du Service national d’enquête (SNE) de la DGCCRF, et un deuxième de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), comme l’avaient révélé Mediacités puis Le Monde et Radio France, 

    Ces enquêtes concluent que près de 30 % des marques françaises, dont celles du groupe Nestlé, ont recours à des techniques de purification des eaux classées comme « minérales naturelles » interdites, traitements utilisés notamment contre des contaminations bactériennes ou chimiques. 

    Les procédés auxquels ont recours les entreprises, tels que l’utilisation d’UV, de filtres à charbon actif ou de microfiltres (en deçà de 0,8 µm) sont seulement autorisés pour l’eau du robinet ou les « eaux rendues potables par traitements ». Ils sont strictement interdits pour les « eaux minérales naturelles » et les « eaux de source », qui ne doivent pas subir d’opérations modifiant leur composition. 

    Saisi en octobre 2022 par l’agence régionale de santé (ARS) Grand Est, chargée du contrôle de plusieurs sites du groupe Nestlé, le parquet d’Épinal (Vosges) a ouvert une enquête préliminaire, visant le groupe pour « tromperie par personne morale sur la nature, la qualité, l’origine ou la quantité d’une marchandise ». 

    C’est dans ce contexte que le service enquête de la DGCCRF a de nouveau été missionné et ce sont ses conclusions, rendues en avril, que Mediapart a pu consulter. Les investigations ont porté sur les eaux du groupe, embouteillées dans les Vosges : Contrex, Hépar et Vittel. Leur enquête révèle que pour ces trois eaux minérales, Nestlé a recours à des traitements interdits depuis au moins 2005, voire 1993 pour certaines, et cela de façon permanente, en raison, notamment, de contaminations bactériennes fréquentes. À partir de ces éléments d’investigation, le procureur va décider de l’orientation des poursuites. 

    Des contaminations fréquentes
    Selon les résultats de contrôles réalisés par Nestlé, de janvier 2020 à mars 2022, plusieurs sources d’eau sont contaminées « de pathogènes et de bactéries hétérotropes au-dessus de la limite légale », parfois même jusqu’à 85 % supérieurs. Et ce problème n’est pas récent. Pour y remédier, Nestlé a recours à des traitements par UV, supprimant les micro-organismes, des « process qui ne sont pas conformes avec la réglementation française », signale une note interne à l’entreprise.

    Lors de leur audition, plusieurs responsables reconnaissent ces pratiques interdites. L’ancien directeur de l’usine Nestlé dans les Vosges (en poste de 2019 à 2023) explique que ces appareils étaient utilisés « sur des captages qui avaient des dérives microbiologiques ». 

    Dans un courrier adressé à l’ARS, l’entreprise précise que « ces traitements ont été mis en place depuis plusieurs décennies » et cela sur plusieurs captages d’eau des groupes Contrex et Hépar. Pour justifier de telles pratiques, la multinationale attribue la présence de ces dérives bactériennes « au changement climatique », provoquant la diminution des nappes d’eau et favorisant les contaminations des sols versants. 

    Autre facteur potentiel de contamination, la surexploitation des ressources en eau par Nestlé n’est, en revanche, par abordée. Pas un mot non plus sur le signalement de ces bactéries que le groupe aurait dû faire auprès des autorités, et notamment de l’agence sanitaire de santé (ARS). Rien, non plus, sur la fermeture du site qui aurait dû être envisagée, ou encore sur le changement de classification de l’eau commercialisée, de « minérale naturelle » à « rendue potable par traitements ». 

    C’est en toute connaissance de cause que Nestlé a choisi d’avoir recours de façon intensive aux traitements par UV, ainsi que le constatent les enquêteurs. En épluchant les factures des différentes entreprises spécialisées dans ces installations, on découvre que de septembre 2005 à novembre 2022 (dates du début de l’enquête judiciaire et de l’arrêt de ces traitements), Nestlé a acheté plusieurs appareils à UV, dont quatre utilisés pour les eaux minérales naturelles. Les enquêteurs notent également que le « changement systématique des lampes UV une fois par an », par Nestlé, révèle une utilisation continuelle de cette technique. 

    Mais manifestement, cela ne suffit pas à endiguer les contaminations et concernant plusieurs sources, Nestlé installe également des microfiltres (de membrane inférieure à 8 micromètres – µm), permettant de désinfecter l’eau en filtrant les bactéries. Cependant, non seulement ces installations peuvent elles-mêmes être factrices d’infections mais elles ne permettent pas de retenir certains virus ou bactéries.

    Sans se prononcer sur les pollutions bactériennes fréquentes des sources ni sur les risques de telles pratiques, les enquêteurs relèvent « une utilisation de filtres non autorisés par les arrêtés préfectoraux à différents niveaux de filtration allant de 0,2 µm à 10 µm depuis au moins 2010 », et cela pour les trois eaux minérales exploitées dans les Vosges. 

    Nestlé date certains traitements de 1993 
    Certains traitements ne répondent nullement à des « besoins de sécurité sanitaire ». L’utilisation de filtres à charbon actif, là encore interdite, permet de retenir « d’éventuelles traces de résidus de pesticides » dans les eaux. Mais, lors de son audition par les enquêteurs, l’ancien directeur des usines du groupe dans les Vosges explique que cette technique visait surtout à « la protection de la réputation de la marque [Vittel, en l’occurrence – ndlr]. Il était possible de détecter des traces d’herbicides en très faible quantité ». 

    Cette stratégie est confirmée par le groupe dans un courrier envoyé à l’ARS en 2022 : « Ce type de filtration a été mis en place afin d’éviter toutes traces de pesticides et de métabolites qui pourraient être mal perçus par les consommateurs et ainsi protéger l’image de marque et plus généralement de l’industrie des minéraliers, face à un risque réputationnel important. »

    Il s’agit d’une #fraude_organisée, qui a perduré sur plusieurs décennies, relevant davantage d’une stratégie du groupe que d’une initiative individuelle.

    Les enquêteurs n’ont étonnamment pas retenu cette année-là, mais datent de 2010 la mise en place de ce traitement interdit, qui correspond à l’année de prise de poste du responsable ressource en eaux (REE) auditionné.

    Ils ne retiennent pas non plus la responsabilité de l’ARS, qui est pourtant mise en cause par les déclarations de l’ancien directeur de l’usine. Interrogé sur l’utilisation de CO2, traitement interdit mais mis en place par Nestlé, il affirme aux enquêteurs : « J’étais au courant pour l’ajout de CO2 pour Vittel. Nous l’avons montré à l’ARS lors des visites mais ils n’ont jamais considéré cela comme un point important. » 

    Le garant de la sécurité sanitaire, l’ARS, n’en a pas tenu rigueur à l’exploitant, ce qui soulève de facto la responsabilité de l’État dans les pratiques trompeuses de Nestlé. Interrogée sur ce point par Mediapart, l’ARS n’a pas souhaité répondre.

    La longévité de la fraude interroge également sur l’efficacité des contrôles effectués par l’ARS. Certes, Nestlé a sciemment dissimulé les installations permettant les traitements des eaux illégaux : dans des armoires, dans des bâtiments isolés, voire dans « une pièce souterraine », ainsi que le constatent les enquêteurs. Par ailleurs, les points de prélèvement pour les contrôles de la qualité de l’eau brute étaient sciemment positionnés après les différentes techniques frauduleuses. Pourtant, l’ARS connaissait au moins l’un des traitements interdits et a fait le choix, malgré tout, de fermer les yeux. 

    Caractère systémique de la fraude
    Les enquêteurs n’iront pas plus loin sur la responsabilité de l’État dans cette fraude. Concernant la multinationale, c’est le caractère systémique de la fraude qui est soulevé. En effet, dans leurs conclusions, les inspecteurs déplorent que l’expertise des responsables du groupe Nestlé « [soit] cependant utilisée de manière dévoyée, au regard de leur volonté de tromper les consommateurs et l’administration ». 

    « L’installation des traitements semble ancienne et pourrait être antérieure au rachat, en 1992, par le groupe Netslé des deux usines » de Vittel et Contrexéville. Mais ces pratiques ont perduré « non par négligence mais bien [du fait] d’un réel choix de l’entreprise de maintenir ces traitements en place ».

    Par ailleurs, « au vu de la durée des pratiques et du nombre de directeurs qui ont pu se succéder sur cette période, ayant agi pour le compte et au bénéfice de la société […], la responsabilité morale de Nestlé doit être retenue à titre principal ».

    De fait, les enquêteurs établissent qu’il s’agit d’une fraude organisée, qui a duré plusieurs décennies, relevant davantage d’une stratégie du groupe que d’une initiative individuelle. 

    La commercialisation d’au moins 18 milliards de bouteilles, selon les estimations des enquêteurs, « à destination finale des consommateurs, sous la dénomination “eau minérale naturelle” alors que ces eaux ne pouvaient prétendre à cette qualité, constitue l’élément matériel du délit de tromperie sur les qualités substantielles et la composition des marchandises ».

    La tromperie est renforcée par la publicité mensongère présentant ces eaux comme « pures » et exemptes de tout traitement.

    Ce délit est passible d’une peine de trois ans d’emprisonnement et d’une amende pouvant être portée à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel, soit 20 millions d’euros dans le cas de Nestlé, une somme qui peut paraître dérisoire comparée aux 3 milliards d’euros acquis par l’entreprise grâce à cette fraude (d’après les calculs faits dans le cadre des investigations).

    En effet, selon les enquêteurs, « la différence de chiffre d’affaires réalisée en vendant ces produits en eau minérale naturelle au lieu d’eau rendue potable par traitement est estimée à 3 132 463 297 euros pour les différentes marques et périodes infractionnelles correspondantes ».

    Mais le préjudice pour l’environnement induit par la surexploitation des ressources en eau par Nestlé n’est quant à lui pas chiffré. Les risques sanitaires ne font pas non plus à ce stade l’objet d’investigations. Ainsi que le concluent les inspecteurs, « le maintien des traitements a permis la continuité de l’exploitation de l’ensemble des sources. Le retrait des traitements UV a entraîné un arrêt de l’exploitation de certains captages qui étaient contaminés microbiologiquement ».

    Pascale Pascariello

    • ENQUETE. Scandale des eaux en bouteille : Nestlé a bel et bien triché « au vu et au su » de tous, notamment de plusieurs membres du gouvernement

      https://www.francetvinfo.fr/economie/scandale-des-eaux-en-bouteille-nestle-a-bel-et-bien-triche-au-vu-et-au-

      Selon la sénatrice Antoinette Guhl, en charge de la « mission flash » sur le géant de l’alimentaire, interrogée par franceinfo, « on ne peut pas être sûrs qu’il n’y a plus de tromperie en cours ». Une nouvelle commission d’enquête a été ouverte au Sénat.

      Nestlé a bel et bien triché « au vu et au su » de tous, notamment de plusieurs membres du gouvernement, en traitant avec des filtres interdits des eaux contaminées par des bactéries, selon l’une des conclusions principales d’une mission d’information « flash » lancée en avril 2024 par le Sénat, à la suite des révélations du journal Le Monde et de la cellule investigation de Radio France. L’enquête journalistique avait révélé le recours en France pendant de nombreuses années à des traitements interdits pour purifier des eaux minérales vendues en bouteille, notamment par #Nestlé_Waters.

      #Perrier, #Nestlé

      Les conclusions de cette mission, présidée par la sénatrice écologiste Antoinette Guhl, ont été adoptées ce mercredi matin par la Commission des affaires économiques du Sénat. Comme le révèlent Le Monde et franceinfo, il en ressort que la multinationale a bien eu recours à « des traitements interdits » sur ses eaux minérales, mais aussi que plusieurs ministres, notamment l’actuelle ministre de la transition écologique, Agnès #Pannier-Runacher, ainsi qu’Olivier #Véran, ancien ministre de la santé, et Elisabeth #Borne, bien qu’ayant connaissance de la tromperie en cours, n’ont pas mis en œuvre « les mesures correctives nécessaires ».

      « On ne peut pas être sûrs qu’il n’y ait plus de #tromperie en cours »
      Selon Antoinette Guhl, rapporteure de cette mission, interrogée par Le Monde et franceinfo, « Nestlé a fraudé et trompé les consommateurs. Tous les ministres ont su et ils ont laissé faire. Ils auraient dû sanctionner et informer. Ils ne l’ont pas fait ». La sénatrice pointe notamment dans son rapport l’"opacité", le « flou juridique », et le « caractère parcellaire de l’information dont ont disposé certaines administrations ». Elle déplore également qu’"aucune mesure de suivi immédiat n’ait été prise pour éviter la mise sur le marché d’eaux minérales naturelles ne remplissant pas les conditions requises pour être commercialisées", alors que des « mesures correctives », telles que « des mises en demeure de cesser les non-conformités et en cas d’inexécution, la suspension de la production », étaient possibles. La mission « flash » déplore que ces suites correctives n’aient pas été prises dès les aveux de Nestlé Waters en 2021. 

      Mais le rapport parlementaire ne se contente pas d’attester de l’existence d’une tromperie, et des défaillances de l’Etat dans ce dossier. En effet, selon Antoinette Guhl, « on ne peut pas être sûrs qu’il n’y ait plus de tromperie en cours sur le site de Perrier dans le Gard ». Pour comprendre cette situation, il faut savoir qu’après avoir « avoué » avoir recours à des filtres interdits, Nestlé s’engage auprès de l’Etat à mettre un « plan de transformation de ses usines ». En décembre 2023, la firme suisse obtient le droit, par arrêté préfectoral, de continuer à utiliser dans son usine du Gard, à Vergèze, des traitements de désinfection (filtres UV, filtres à charbon), pour produire une nouvelle marque de boissons, Maison Perrier, lancée à grand renfort de panneaux publicitaires et de vidéos sponsorisées sur les réseaux sociaux.

      Deux puits contaminés par des bactéries et des pesticides sont depuis cette date utilisés pour produire, non plus de l’eau minérale naturelle, mais des boissons énergisantes et des jus de fruits pour lesquels la réglementation n’interdit pas le recours à des filtres de désinfection. Problème, selon Antoinette Guhl : « Il existe désormais deux types d’eaux produites dans la même usine, une eau Maison Perrier qui a subi des traitements, et l’eau minérale Perrier censée être pure. Et il peut y avoir confusion entre ces deux types d’eau. Résultat : on ne peut pas être sûrs qu’il n’y a plus de tromperie sur le site de Perrier ».

  • New UNHCR/IOM/MMC Report Highlights Extreme Horrors Faced by Migrants and Refugees on Land Routes to Africa’s Mediterranean Coast

    Refugees and migrants continue to face extreme forms of violence, human rights violations and exploitation not just at sea, but also on land routes across the African continent, towards its Mediterranean coastline. This is according to a new report released today by UNHCR, the UN Refugee Agency, the International Organization for Migration (IOM) and the Mixed Migration Centre (MMC), titled “On this journey, no-one cares if you live or die” (Volume 2).

    With more people estimated to cross the Sahara Desert than the Mediterranean Sea – and deaths of refugees and migrants in the desert presumed to be double those happening at sea – the report casts light on the much less documented and publicized perils facing refugees and migrants on these land routes.

    Spanning a 3-year data collection period, the report also warns of an increase in the number of people attempting these perilous land crossings and the protection risks they face.

    This is in part the result of deteriorating situations in countries of origin and host countries – including the eruption of new conflicts in the Sahel and Sudan, the devastating impact of climate change and disasters on new and protracted emergencies in the East and Horn of Africa, as well as the manifestation of racism and xenophobia affecting refugees and migrants.

    The report also notes that across parts of the continent, refugees and migrants are increasingly traversing areas where insurgent groups, militias and other criminal actors operate, and where human trafficking, kidnapping for ransom, forced labour and sexual exploitation are rife. Some smuggling routes are now shifting towards more remote areas to avoid active conflict zones or border controls by State and non-State actors, subjecting people on the move to even greater risks.

    Among the litany of risks and abuses reported by refugees and migrants are torture, physical violence, arbitrary detention, death, kidnapping for ransom, sexual violence and exploitation, enslavement, human trafficking, forced labour, organ removal, robbery, arbitrary detention, collective expulsions and refoulement.

    Criminal gangs and armed groups are reported as the main perpetrators of these abuses, in addition to security forces, police, military, immigration officers and border guards.

    Despite commitments undertaken by the international community to save lives and address vulnerabilities, in accordance with international law, the three organizations warn that current international action is inadequate.

    Huge gaps in protection and assistance prevail across the Central Mediterranean route, pushing refugees and migrants to move onward on dangerous journeys. Specific support as well as access to justice for survivors of various forms of abuse is rarely available anywhere on the routes. Inadequate funding and restrictions on humanitarian access (including in key locations such as informal detention centres and holding facilities) are also hampering support.

    On their part, UNHCR, IOM, partners and several governments have stepped up life-saving protection services and assistance, identification and referral mechanisms along the routes – but humanitarian action is not enough.

    The organizations are calling for concrete, routes-based protection responses to save lives and reduce suffering, as well as a push to address the root causes of displacement and drivers of irregular movements– through positive action on peacebuilding, respect for human rights, governance, inequality, climate change and social cohesion, as well as the creation of safe pathways for migrants and refugees. These should span countries of origin, asylum, transit and destination.

    The organizations hope the report’s findings will bolster action to address the current gaps in the response towards people on the move.

    https://www.iom.int/news/new-unhcr-iom-mmc-report-highlights-extreme-horrors-faced-migrants-and-refugees

    #rapport #migrations #réfugiés #mourir_aux_frontières #morts_aux_frontières #violence #exploitation #Afrique #Méditerranée #Sahara #désert_du_Sahara #travail_forcé #milices #kidnapping #trafic_d'êtres_humains #risques #violence_physique #torture #exploitation_sexuelle #esclavage #trafic_d'organes #détention_arbitraire #refoulements #expulsions_collectives #gangs #groupes_armés #forces_de_l'ordre #protection

    • On This Journey, No One Cares if You Live or Die: Abuse, Protection and Justice along Routes between East and West Africa and Africa’s Mediterranean Coast – Volume 2

      In the complex landscape of migration, this second volume of the report, On This Journey, No One Cares if You Live or Die, emerges as a crucial body of work that sheds light on the stark realities faced by refugees and migrants traversing the perilous Central Mediterranean route all the way from East and Horn of Africa and West Africa to the North African coast of the Mediterranean and across the sea. Jointly published by IOM, MMC and UNHCR, this report delves into the protection risks faced by refugees and migrants during these journeys. It aims to inform increased and concrete routes-based protection responses to reduce the suffering associated with the desperate journeys refugees and migrants undertake, and to serve as a call to action in addressing the root causes of displacement and drivers of irregular migration through positive action on peace, climate change, governance, inequality and social cohesion, as well as the creation of safe migration pathways.

      https://publications.iom.int/books/journey-no-one-cares-if-you-live-or-die

  • Macron, en marche vers l’#extrême_droite ?
    https://www.youtube.com/watch?v=G43ZVd7wN60

    En 2017, puis en 2022, Emmanuel Macron a remporté l’élection présidentielle face à Marine Le Pen. Mais sa fascination pour l’extrême-droite et sa complaisance vis-à-vis d’empires médiatiques qui propagent la xénophobie contribuent à « booster » le Rassemblement national. Au second tour de la présidentielle de 2022, Marine Le Pen recueillait 41,8% des voix. Un record. Et le résultat d’une politique. Depuis 2017, interdictions de manifestations, arrestations arbitraires et surveillance généralisée sont utilisés par l’exécutif pour mater des révoltes populaires contre des politiques libérales imposées sans concertation, et considérées comme « anti pauvres ».
    Demain, l’Etat de droit et la devise républicaine « Liberté, égalité, fraternité » ne seront ils plus qu’un lointain souvenir ? Durant quatre mois, Thierry Vincent et Daphné Deschamps ont interviewé d’anciens macronistes déçus par la dérive autoritaire du président et des figures conservatrices et d’extrême-droite qui se réjouissent qu’Emmanuel Macron leur prépare un « boulevard » pour 2027.
    À quelques semaines des élections européennes, enquête au coeur d’une France en marche vers l’extrême droite.

    #Macron #Emmanuel_Macron #ni_de_droite_ni_de_gauche #de_droite_et_de_gauche #monarchisme #action_française #en_marche #jeanne_d'arc #Puy_du_Fou #11_novembre_2018 #Maréchal_Pétain #Pétain #décivilisation #Renaud_Camus #autoritarisme #macronisme #islamo-gauchisme #front_national (#FN) #arc_républicain #Jean-Michel_Blanquer #Amélie_de_Montchalin #front_républicain #Rassemblement_national (#RN) #Patrick_Vignal #intersectionnalité #gauche_radicale #extrême_gauche #France_insoumise #tenue_vestimentaire #habits #retraite #xénophobie #racisme #Elisabeth_Borne #Valeurs_Actuelles #migrations #connivence #symbole #Bruno_Roger-Petit #Bolloré #Vincent_Bolloré #médias #groupe_Bolloré #François_Coty #punaises_de_lit #bouc_émissaire #Pascal_Praud #grand_remplacement #Pap_Ndiaye #Rima_Abdul_Malak #Rachida_Dati #Cyril_Hanouna #Geoffroy_Lejeune #Journal_du_Dimanche (#JDD) #Gérald_Darmanin #conservatisme #homophobie #homosexualité #violences_policières #loi_immigration #préférence_nationale

  • « Quand vous avez un nombre de médecins insuffisant, il ne faut pas s’étonner que des groupes financiers prennent l’initiative »
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/04/21/quand-vous-avez-un-nombre-de-medecins-insuffisant-il-ne-faut-pas-s-etonner-q

    Les #groupes_financiers ont bénéficié du désengagement de l’Etat dans les besoins de #santé pour s’engouffrer dans le secteur, explique l’économiste Nicolas Da Silva dans un entretien au « Monde ». Au risque d’imposer leurs normes.
    Propos recueillis par Véronique Julia, Publié le 21 avril

    Nicolas Da Silva est économiste, maître de conférences en sciences économiques à l’université Sorbonne-Paris-Nord. Il appelle l’Etat à faire preuve d’imagination pour améliorer l’organisation de l’offre de soins sur tout le territoire [ah ah ah].

    L’offensive de la finance dans le secteur de la santé résulte-t-elle en partie des défaillances de l’Etat ?

    La finance profite de l’absence d’une réponse publique organisée aux problèmes que connaît le secteur de la médecine libérale. Et elle propose de pallier ces défaillances, en effet. Quand vous avez des besoins de santé non couverts, avec un nombre insuffisant de #médecins, des #déserts_médicaux et des urgences saturées faute d’alternative, il ne faut pas s’étonner que des groupes financiers prennent l’initiative et trouvent leur place dans le parcours de soins, en réorganisant l’offre et en investissant massivement. Et cela dans tous les domaines : la biologie, la radiologie, mais aussi les soins de premier recours.

    Juridiquement, les pouvoirs publics ont même facilité les initiatives privées et l’entrée d’investisseurs au capital des structures médicales. D’ailleurs, on entend davantage ceux qui râlent, mais certains médecins s’y retrouvent et ne se plaignent pas : quand un groupe privé s’occupe de toutes les tâches administratives et vous dit de vous concentrer sur votre cœur de métier, ça répond aussi à une attente formulée par les professionnels qui n’est pas suffisamment entendue.

    Vous alertez sur les dangers de cette tendance…

    Les financiers cherchent à rémunérer leur capital et ils sont dans leur rôle. Mais les risques sont multiples. Les risques d’inégalité d’abord, car ils ne vont investir que là où c’est rentable, ce qui peut les conduire à délaisser des actes, des zones géographiques, des pathologies et des publics moins intéressants d’un point de vue lucratif. Dans le domaine de la santé, la rémunération de l’offre de soins provient de financements publics, qui ne sont pas extensibles, donc comment faire du profit sans que ce soit sur le dos des patients et des professionnels de santé ?

    J’ajoute le risque de déposséder ces mêmes professionnels de leur outil de travail, ce dont les médecins prennent conscience. S’ils ne possèdent plus le contrôle de leur outil, ils peuvent perdre leur liberté d’exercice, et la logique financière pourrait prendre le pas sur le choix médical et l’intérêt du patient.

    Comment peut-on limiter ces risques ?

    Déjà, il serait bénéfique de chercher à quantifier et à qualifier la tendance observée depuis plusieurs années. On manque de données, c’est un travail titanesque de construire une cartographie des financiers et des financements. Ensuite, il faut réguler les statuts juridiques des groupes constitués pour s’assurer de l’indépendance réelle des praticiens. Enfin, il faut que les pouvoirs publics réagissent et aient un peu d’imagination pour mieux organiser l’offre sur le territoire : investir massivement dans certaines régions sous-dotées, mieux rémunérer certaines démarches d’installation, penser une organisation pérenne qui ne peut pas être que libérale…

    Laisser la finance pallier les manques relève d’une vue de court terme : cela rend service dans un premier temps, mais, finalement, cela peut bousculer le rapport de force avec des mastodontes qui imposeront leurs exigences tarifaires. C’est un vrai risque à prendre en compte.

    Véronique Julia

  • École : et si les familles de milieux populaires ne se laissaient pas faire ?
    https://www.inegalites.fr/Ecole-et-si-les-familles-de-milieux-populaires-ne-se-laissaient-pas-faire

    Il n’est pas nécessaire de lire dans une boule de cristal pour savoir de quelle catégorie sociale seront les élèves qui seront affectés dans les groupes de « niveau faible ». On dit que ce sera provisoire, mais on sait bien que ça risque de devenir définitif. On peut comprendre que des professeurs y voient une solution aux difficultés bien réelles qu’ils rencontrent. On se doute bien aussi que regrouper les élèves en difficulté en protégeant, par là-même, les autres élèves de leur fréquentation va rassurer les parents des élèves qui vont bien, ces Français qui, si on entend le ministre, « payent des impôts » et qui « veulent un retour sur investissement ». Le « retour sur investissement » impliquerait donc l’aggravation du séparatisme scolaire déjà à l’œuvre dans notre école ?

    • Si ça peut aider :

      http://www.afef.org/halte-la-casse-de-lecole-une-riposte-collective-simpose-0

      Ce texte d’appel pour reconstruire l’école républicaine fait suite à une rencontre en ligne, proposée par l’AFEF le 13 décembre 2023, annoncée dans le Café pédagogique du 22 novembre 2023. Les associations, syndicats, chercheurs présents ont approuvé le projet d’une riposte collective aux annonces ministérielles et présidentielle pour l’école, particulièrement inadaptées aux défis éducatifs actuels, et dangereuses. Ils ont décidé d’une action à long terme pour analyser la situation de l’école et de son environnement, pour chercher des propositions communes, notamment lors d’un Grenelle alternatif de l’école, et pour les diffuser largement. Ce texte constitue une première base, un premier état des lieux des problèmes pour lancer ce chantier.

      https://digipad.app/p/623073/e9b15ab6ebcb2

    • On ne peut alors manquer de s’étonner de la diminution des crédits consacrés aux #bourses et aux fonds sociaux alloués en 2024 aux élèves modestes. Certes, la démographie est en baisse, mais on aurait pu en profiter pour augmenter le montant des bourses en période d’inflation sévère. Ne sait-on pas que ces aides sont essentielles pour aider à acheter une tenue de sport, à payer la cantine ou une sortie scolaire ? On n’ose imaginer qu’on prendrait dans les crédits destinés aux familles pauvres pour financer l’#uniforme scolaire de leurs enfants… Il est vrai aussi qu’on ne peut pas augmenter comme il le faudrait les bourses et les fonds sociaux pour les élèves pauvres et trouver, « en même temps », l’argent que la loi de 2019 oblige le ministère de l’Éducation nationale à donner aux écoles maternelles privées.

      [...] On aurait tort de minimiser l’ampleur du ressentiment des milieux populaires face à l’échec scolaire encore trop massif de leurs enfants. Les politiques actuelles, en accentuant les inégalités sociales face à l’école, précipitent les classes populaires dans les bras de l’extrême droite.

      #école #école_privée #collège_unique #ségrégation #groupes_de_niveau

    • Les politiques actuelles, en accentuant les inégalités sociales face à l’école, précipitent les classes populaires dans les bras de l’extrême droite.

      Et un malheur n’arrivant jamais seul, l’extrême-droite ne fera strictement « pas grand chose » pour améliorer le sort des « classes populaires ». L’extrême-droite n’a pas besoin de prendre le pouvoir : elle est déjà en train de gouverner.
      (La victoire idéologique, toussa)

  • Le programme d’Attal lorsqu’il était ministre de l’éducation reste celui de Oudéa Castéra

    Collège unique : les réformes à faire | Fondation IFRAP [2015]
    https://www.ifrap.org/education-et-culture/college-unique-les-reformes-faire

    L’intention des réformateurs du « collège unique » était louable au premier abord puisqu’il s’agissait pour eux de réussir la démocratisation de l’éducation après avoir réussi sa « massification ». Mais les résultats de ces politiques de nivellement ne se sont pas faits attendre et perdurent jusqu’à aujourd’hui : ce fut l’échec massif, dont les indicateurs les plus terribles sont le quasi illettrisme après la classe de 3ème pour 12% des élèves (source : JAPD) et les sorties sans qualification du système éducatif, enkystées autour de 15% d’une classe d’âge (soit environ 120 000 élèves par an).

    #école #élèves #collège_unique -> tenue unique et #groupes_de_niveau #ségrégation

  • Ecole inclusive : alertes sur un système qui craque

    De 134 000 enfants handicapés scolarisés en milieu dit « ordinaire » en 2004, ils étaient plus de 436 000 en 2022. Faute de formation et d’accompagnement, les professeurs se disent démunis et en souffrance, dans des classes déjà surchargées.

    .... les familles rappellent que de nombreux enfants handicapés recensés comme scolarisés ne le sont pas à temps plein, et que certains n’ont pas accès du tout à l’éducation – le ministère dit en ignorer l’effectif ; la jeune association Ambition école inclusive les estime à 200 000. De l’autre, « un véritable cri s’élève de la part des personnels » de l’éducation nationale au sujet de l’inclusion, prévenaient, en octobre 2023, Benjamin Moignard et Eric Debarbieux, auteurs de l’enquête sur le climat scolaire dans le premier degré. Près des trois quarts du personnel s’y disaient confrontés à des difficultés « fréquentes », voire « très fréquentes », avec des enfants « gravement perturbés » ou « présentant des troubles du comportement », soit deux fois plus qu’en 2011.

    « Enseignants démunis »

    A tel point que le Snudi-FO, syndicat minoritaire du premier degré, a appelé à la grève, le 25 janvier, contre l’« inclusion systématique et forcée » des élèves en situation de handicap en « milieu ordinaire ». Ce mot d’ordre, inédit, a indigné de nombreuses associations et n’a pas été repris par les autres organisations syndicales. Il est toutefois révélateur d’un désarroi dont tous les représentants des enseignants se font l’écho : la dénonciation de l’« école inclusive sans moyens » faisait partie des motifs de la grève intersyndicale du 1er février.

    « Les enseignants sont démunis face à certains troubles, notamment du neurodéveloppement, qui ne relèvent pas de nos compétences pédagogiques. C’est devenu l’une des principales causes de souffrance au travail », s’alarme Guislaine David, à la tête du premier syndicat du primaire, le SNUipp-FSU, soulignant la hausse des situations signalées dans les registres santé et sécurité au travail. Elle s’inquiète désormais que les « tensions résultant du manque de moyens » n’alimentent un rejet du principe même de l’inclusion – il a été attaqué, en 2022, par le candidat Reconquête ! à l’élection présidentielle Eric Zemmour.


    https://www.lemonde.fr/education/article/2024/02/06/ecole-inclusive-alertes-sur-un-systeme-qui-craque_6214976_1473685.html

    https://justpaste.it/cawb8

    edit les commentaires plaident pour la relégation dans des « structures spécialisées » (IME, etc.)

    #école #école_inclusive #ségrégation #AESH

    • Les accompagnants des élèves en situation de handicap, très précaires piliers de l’école inclusive
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/05/03/les-accompagnants-des-eleves-en-situation-de-handicap-tres-precaires-piliers

      Un rapport d’information du Sénat, publié mercredi, dresse un sévère bilan de la gestion et des conditions de travail de ces personnels, qui représentent pourtant le deuxième métier de l’éducation nationale en effectifs.
      Par Eléa Pommiers, 03 mai 2023

      En moins de dix ans, les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) sont devenus le deuxième métier de l’éducation nationale. Leur effectif a été multiplié par cinq en sept ans pour atteindre presque 124 000 personnes en 2022, presque exclusivement des femmes. Une progression fulgurante, dans le sillage de celle des enfants en situation de handicap dans les écoles, au nombre de 432 000 en 2023, contre 321 000 en 2017 et 134 000 en 2004. Ces professionnels sont désormais « le principal moyen de compensation du handicap », notait, dans un rapport rendu public en décembre 2022, l’inspection générale de l’éducation, et, de fait, les chevilles ouvrières de la scolarisation des élèves handicapés dans le cadre de « l’école inclusive ».

      Mais « l’essor, sur le plan quantitatif, de la fonction d’AESH ne s’est pas accompagné d’une même dynamique sur le plan qualitatif », déplore un rapport d’information du Sénat publié mercredi 3 mai. Une semaine après la conférence nationale du handicap (CNH), lors de laquelle le président de la République, Emmanuel Macron, a promis des mesures encore floues pour les accompagnants des élèves, le sénateur (Les Républicains) de la Savoie Cédric Vial, rapporteur de cette mission d’information, dresse un bilan sévère de la gestion « totalement inadaptée » de ces personnels par l’éducation nationale. Cette dernière, constate le rapport, n’était « indéniablement pas préparée à gérer, tant sur le plan juridique, administratif que budgétaire, cette nouvelle catégorie d’agents ».

      Dix ans après la création de ce métier en 2014, les AESH ne bénéficient toujours d’aucun statut de la fonction publique et cochent toutes les cases de la #précarité. Près de 80 % d’entre eux travaillent en contrat à durée déterminée (#CDD) – une proposition de loi adoptée en décembre 2022 autorise toutefois désormais le passage en contrat à durée indéterminée (CDI) après trois ans en CDD, contre six jusqu’alors.

      Leur rémunération moyenne est comprise, selon les sources, entre 750 et 850 euros net mensuels. La conséquence d’une grille de #salaire au #smic [horaire] sur les neuf premières années, doublée de l’impossibilité pour l’éducation nationale de proposer des temps complets à ces personnels, qu’elle ne peut embaucher que sur le temps de classe et non sur la pause méridienne et le temps périscolaire, à la charge des collectivités territoriales. Les temps complets concernent à peine moins de 2 % des accompagnants des élèves en situation de handicap. « Avec ces contrats, vous ne vivez pas », résume Elisabeth Garnica, présidente du collectif AESH.

      « Mon formateur, c’est Google »

      Dans le cadre de la CNH, Emmanuel Macron a réitéré sa promesse de campagne de proposer, en partenariat avec les collectivités, des contrats de trente-cinq heures aux AESH [absolument délirant en terme de charge de travail !]-, mais aucune modalité concrète de mise en œuvre n’a été avancée, alors que persistent des obstacles de financement et d’organisation du temps de travail pour les personnels.

      En plus de son contrat de vingt-quatre heures avec l’éducation nationale, Clarisse (elle n’a pas souhaité donner son nom, comme toutes les personnes citées par leur prénom), qui exerce dans le Val-de-Marne, cumule par exemple déjà les employeurs pour compléter les 800 euros qui rémunèrent ses vingt-quatre heures d’accompagnement : en plus de son contrat avec l’éducation nationale, elle a signé avec la ville pour deux heures quotidiennes sur la pause méridienne, et avec une association pour une heure trente d’études le soir.
      « Je fais des journées continues de dix heures quatre jours par semaine, et je n’atteins même pas 1 000 euros net par mois, ce n’est pas possible de nous faire travailler comme ça », s’agace cette accompagnante de 50 ans.

      Cette précarité salariale se double de conditions de travail unanimement décrites comme « pénibles » par les AESH, amenés à côtoyer tout type de handicap, du handicap moteur aux troubles du spectre autistique, en passant par les troubles de l’attention ou encore les troubles des apprentissages, sans formation spécifique. « Mon formateur, c’est Google », ironise Clarisse. Il lui a fallu cinq ans avant de recevoir la #formation de soixante heures désormais promise à tous les AESH durant leurs trois premiers mois d’exercice, mais c’était « trop tard » et « trop peu » pour la préparer à la diversité des situations individuelles.

      La plupart des accompagnants des élèves en situation de handicap accompagnent plusieurs élèves chaque semaine, l’#aide_mutualisée a pris le pas sur l’aide individuelle ces dernières années.
      « On est censé écouter les cours, comprendre, reformuler pour les élèves, les aider à écrire quand c’est nécessaire, rappeler les consignes, les canaliser, les calmer s’ils font des crises… Et on en a parfois plusieurs dans une même classe_, détaille Isabelle, qui travaille dans l’Hérault. Il faut être en alerte sans arrêt, après une journée de six heures vous êtes vidé. »

      « Défections de plus en plus nombreuses »

      La tâche est d’autant plus difficile que, comme le constatait l’inspection générale en décembre 2022, et comme le confirme à présent le Sénat dans son rapport, des enfants qui devraient être orientés vers des « établissements et services spécialisés » du fait de leur handicap sont scolarisés en « milieu ordinaire » faute de places dans les établissements médico-sociaux, et dépendent alors entièrement de l’aide humaine que représentent les AESH.

      Nadia accompagne ainsi une fillette de CP à Saint-Etienne qui attend une place dans un institut médico-éducatif. « Nous n’arrivons pas à nous comprendre, elle hurle dans la classe, me mord jusqu’au sang… », déplore l’accompagnante, payée 900 euros par mois pour son CDD de vingt-six heures, qu’elle envisage de ne pas renouveler à l’issue des trois ans. « On sait qu’on fait un travail utile, mais les conditions sont impossibles, c’est de l’exploitation », juge cette femme de 47 ans. L’ancienneté moyenne dans le métier est inférieure à trois ans.

      Le rapport d’information du Sénat s’ajoute à une série d’études précédentes alertant sur des conditions à l’origine d’un profond manque d’attractivité du métier, qui « fait face à une pénurie de plus en plus inquiétante de candidats, à une volatilité grandissante de ses personnels en poste, à des défections de plus en plus nombreuses ». Les remplacements n’étant pas assurés, les ruptures de prise en charge sont ainsi fréquentes pour les élèves. Bien qu’il estime que le recours de plus en plus systématique à « l’aide humaine » traduit « les dysfonctionnements d’un système d’inclusion scolaire » qui a « atteint ses limites », le rapport de Cédric Vial invite à une réforme urgente des « conditions d’emploi des AESH », dont le métier demande encore à être « professionnalisé ».

      Faudra-t-il pour cela redéfinir leurs fonctions afin de pouvoir proposer des temps complets ? Les spécialiser dans l’accompagnement du handicap et donc créer davantage de ponts avec le secteur médico-social, ou bien élargir leur mission à « l’accompagnement à la scolarité » et rapprocher leur travail de celui de personnels de vie scolaire comme les assistants d’éducation ? Cette dernière piste – loin de faire l’unanimité – a été avancée par l’exécutif dans le cadre de la CNH, mais le ministère de l’éducation explique que des « concertations » sont nécessaires et prendront du temps [En fait, la fusion des deux fonctions a manqué d’être adoptée sous forme de cavalier législatif dans la loi de finance, ndc]. Quoi qu’il en soit, conclut le rapport, « il ne peut pas y avoir de politique d’inclusion efficace et pérenne sans évolution notable du statut, du temps de travail et donc de la rémunération des agents chargés de l’accompagnement des élèves en situation de handicap ».

      Les revendications des AESH, qui se sont plus mobilisés que quiconque dans l’éduc nat ces dernières années
      https://www.sudeducation.org/tracts/la-lutte-continue-en-greve-le-3-octobre-aesh-un-metier-un-statut-une-r

      . la titularisation sans condition de concours, d’ancienneté ni de nationalité de tou·tes les AESH dans un corps de fonctionnaire par la création d’un métier d’éducateur·trice scolaire spécialisé·e ;
      . l’augmentation des salaires avec une grille de progression salariale à l’ancienneté, un salaire minimum à 2200 euros bruts (soit environ 1870 euros nets, primes et indemnités comprises) ;
      . l’accès aux primes et indemnités dans les mêmes conditions et aux mêmes montants que ceux fixés pour les autres personnels (notamment l’indemnité REP/REP+) ;
      . la reconnaissance d’un temps plein pour 24 heures d’accompagnement auxquelles s’ajoutent les heures connexes pour le travail de préparation, de suivi et de concertation ;
      l’abandon des PIAL et de la logique de mutualisation ;
      une véritable formation initiale et continue, sur temps de service ;
      . la création de brigades de remplacement pour assurer le remplacement des collègues absent·es ;
      . un droit à la mobilité, interacadémique et intra-académique.

    • Face aux défaillances de l’Etat, des accompagnants privés pour les élèves en situation de handicap
      https://www.lemonde.fr/education/article/2022/09/13/face-aux-defaillances-de-l-etat-des-accompagnants-prives-pour-les-eleves-en-


      AUREL

      Des parents sont contraintes d’engager leur propre AESH dit privé, souvent par le biais d’associations, avec l’accord des rectorats ou des chefs d’établissement. Au risque de la rupture d’égalité.
      Par Carla Monaco, 13 septembre 2022

      « Bonjour, nous recherchons une AESH privée pour accompagner notre enfant pour l’année scolaire 2022-2023. Nous proposons un contrat en milieu scolaire et des heures en plus en dehors si possible. » Bien avant la rentrée, les petites annonces de parents à la recherche d’accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) fleurissaient sur plusieurs groupes Facebook. Comme pour les enseignants, le métier d’accompagnant souffre d’un manque d’attractivité.

      L’annonce, en juillet, par le ministre de l’éducation nationale, Pap Ndiaye, du recrutement de 4 000 AESH à la rentrée 2022 n’a pas résolu entièrement le problème. Le 1er septembre, de nombreux enfants à besoins éducatifs particuliers (BEP, selon la terminologie officielle), pourtant notifiés d’un accompagnement par la Maison départementale des personnes handicapées, se sont retrouvés seuls, sans AESH, au risque de voir leur accès en classe entravé. Selon une enquête du syndicat des chefs d’établissement (SNPDEN-UNSA), publiée mardi 13 septembre, 44 % des personnels de direction du second degré manquaient d’au moins un AESH pour accompagner leurs élèves au moment de la rentrée.
      Face aux carences de l’Etat, des familles recherchent par elles-mêmes, ou par le biais d’associations, des AESH dits privés. « Nous étions obligés car la directrice nous a dit que notre fille ne pouvait pas être scolarisée sans AESH », raconte Sabrina (le prénom a été modifié), mère d’une enfant porteuse du trouble du spectre autistique (TSA). Avec son mari, ils ont embauché un accompagnant durant quelques mois en 2020 pour intervenir quinze heures par semaine aux côtés de leur petite fille dans son école à Courbevoie (Hauts-de-Seine) mais également à domicile. Malgré un contrat chèque emploi-service universel, qui permet que les dépenses soient remboursées à 50 % grâce au crédit d’impôt, le couple peine à couvrir toutes les dépenses, déjà acculé financièrement par le coût de la supervision de l’association et les honoraires des professionnels de santé pour son enfant. « On avait dû faire un crédit, c’était très compliqué. La psychologue superviseuse [de l’association] nous coûtait 70 euros de l’heure », ajoute Sabrina.

      « Rupture d’égalité »

      Le montant d’une prise en charge peut se révéler conséquent. L’association B-aba Autisme le chiffre à 1 141 euros par mois pour seize heures par semaine, accompagnement scolaire, supervision par des professionnels médico-sociaux et « coaching des intervenants et des parents » compris. « Il y a une vraie rupture d’égalité parce que les classes populaires n’y ont pas accès, ce n’est pas un service public », relève Manuel Guyader, AESH et représentant syndical SUD-Education, tout en déplorant que « la version service public » soit « vraiment au rabais, autant pour les personnels que pour les élèves ».

      Le recours à des AESH privés s’est développé principalement dans l’accompagnement d’enfants autistes et se pratique surtout dans les académies d’Ile-de-France. De nombreuses associations y proposent leur offre. Auparavant AESH dans le public, avant de s’arrêter après la naissance de son enfant, Céline Le Clanche a repris l’exercice en privé en mars dans l’académie de Versailles. « J’ai vu une annonce sur Facebook postée par une dame qui habitait la même ville que moi. J’ai sauté sur l’occasion. Après l’entretien avec les parents et la psychologue de l’association, j’ai été embauchée », retrace-t-elle. Elle intervient entre douze et seize heures par semaine en classe, et à domicile pendant les vacances. Lorsqu’elle s’est présentée pour la première fois à l’école, personne ne lui a rien demandé. « C’est assez étonnant. La psychologue avait dû envoyer mon CV », présume-t-elle.

      Initialement, l’intervention d’un accompagnant se faisait plutôt dans les établissements privés, plus souples. Mais depuis la loi dite handicap de 2005, qui garantit notamment l’inclusion scolaire des enfants handicapés, l’éducation nationale a progressivement ouvert ses portes mais a parfois du mal à assurer ce droit. « Quand il n’y a plus d’argent, l’accompagnement cesse et on invite les familles à se tourner vers des associations pour que l’enfant reste en classe. C’est un chantage, un stratagème illégal car une AESH peut seulement être recrutée par l’éducation nationale », tonne Jean-Luc Duval, du Collectif Citoyen Handicap, qui organise des opérations militantes.

      Convention particulière

      Le procédé peut surprendre, surtout avec le plan Vigipirate, limitant l’accès dans les écoles pour toute personne extérieure. Comment ces travailleurs peuvent-ils y intervenir ? Et leur « psychologue référent », censé leur rendre visite ? « Ces personnels embauchés sous statut privé n’ont pas un statut d’AESH. Si des familles ont recours à des personnes pour l’accompagnement de leur enfant, ce ne peut pas être dans la classe, sauf avec l’accord express du directeur d’école ou du chef d’établissement des professeurs concernés… », rappelle le ministère. L’autorisation prend la forme d’un papier signé par le chef d’établissement, l’association et l’inspecteur. L’AESH prend dès lors d’autres noms, comme accompagnant psycho-éducatif.

      Certaines associations bénéficient néanmoins d’une convention avec les services académiques. Après avoir présélectionné leurs accompagnants, elles les soumettent à l’Etat qui les recrute directement. « Leur coût est beaucoup moins élevé pour des familles qui n’auraient pas eu les moyens de se payer une accompagnante privée », se réjouit Jean-René Buisson, président de Sur les bancs de l’école, conventionnée depuis deux ans en Ile-de-France. Le rectorat de Paris reconnaît collaborer avec certains acteurs associatifs « pour le recrutement d’AESH dits privés comme explicitement prévu pour le champ de l’autisme via la loi de 2005 », et se félicite d’un « service de grande qualité avec une rotation moindre notamment du fait de leur formation de qualité ».

      Mieux payés, mieux formés que dans le public

      Salariés ou non de l’éducation nationale, ces accompagnants sont supervisés et formés par les associations, alors même qu’aucun lien hiérarchique officiel ne les y relie. C’est dans cet encadrement officieux que des AESH trouvent satisfaction. « Cette supervision fait tout parce que ce n’est pas un métier si facile. On peut parler des petites choses qui se sont moins bien passées avec un psychologue qui nous conseille et nous remotive », explique Astrid (qui n’a pas souhaité donner son nom de famille), qui a accompagné un collégien porteur de TSA pendant un an. En 2020, cette ancienne employée d’entreprise décide de se tourner vers l’accompagnement privé par le biais d’une association, « freinée » par la rémunération modeste proposée par l’éducation nationale, de 750 euros mensuels en moyenne. « J’étais mieux payée qu’une AESH publique », indique-t-elle, sans vouloir préciser ce qu’elle touchait.

      Mieux payés que dans le public, mieux formés aussi. Formations spécifiques sur l’autisme, les troubles « dys » et de déficit d’attention, méthodes d’apprentissages alternatives sont dispensées au sein des associations, sur le temps libre des accompagnants.

      Du côté de l’éducation nationale, la formation initiale s’étale sur 60 heures mais elle arrive souvent bien après la prise de fonction. Quant à son contenu, beaucoup le jugent insuffisant. « C’est plus que survolé, se souvient Christelle Stock, éducatrice spécialisée libérale, ancienne AESH dans le public et le privé dans le Vaucluse. Une grande partie porte sur le fonctionnement de l’éducation nationale. Or, nous, ce qu’on veut savoir c’est : qu’est-ce que l’autisme ? Un enfant qui a des troubles neurodéveloppementaux ou des troubles du comportement ? »

      Meilleure reconnaissance

      La différence public-privé se ressent aussi en matière de reconnaissance. Céline Le Clanche et Astrid disent s’être senties vues comme de vraies professionnelles et non des « pions » utilisés parfois pour « faire autre chose ». Un sentiment qui a pu s’exacerber avec la mise en place décriée des pôles inclusifs d’accompagnement localisé (PIAL). Ce dispositif de mutualisation lancé en 2019 consiste à répartir les AESH sur les établissements d’un même secteur et donc entre plusieurs élèves, diminuant du même coup le nombre d’heures d’accompagnement.

      « Je rencontre beaucoup d’AESH qui sont prêtes soit à laisser tomber la profession, soit à travailler différemment. Elles sont très demandeuses car on leur propose de suivre un seul enfant, lorsque les PIAL leur en font suivre plusieurs », remarque Gladys Lauzeat, créatrice du groupe Facebook « AESH privées et parents : recrutements, placements, formation, conseils ». Ex-accompagnante éducation nationale, elle a lancé son service de mise en relation de parents et d’AESH. L’idée lui est venue durant les confinements, lorsque des AESH se sont retrouvés sans nouvelles des enfants accompagnés car, dans le système public, ils n’ont pas le droit d’entrer en contact avec les familles en l’absence de l’enseignant.

      Très sollicités, Gladys Lauzeat et Jean-René Buisson demeurent conscients que leur offre d’accompagnement ne peut être la réponse aux carences de l’Etat, du fait de son caractère inégalitaire. « Nous étions satisfaits par ce service mais c’est une solution de dernier recours. L’école étant un droit, l’enfant doit pouvoir être accompagné », souligne pour sa part Sabrina, soulagée que sa fille soit de nouveau accompagnée par une AESH publique en cette rentrée.

    • .... avec les groupes de niveau, le ministère entend faire une nouvelle économie de personnels AESH. Si les groupes de niveau sont mis en place, les élèves en situation de handicap, qui réussissent moins bien faute d’adaptation et de compensation, seront orientés vers les groupes d’élèves faibles dès la classe de sixième. Avec la mutualisation mise en place depuis 2017 par le ministère, il pourra être demandé à un⋅e personnel AESH d’accompagner simultanément tou⋅tes les élèves en situation du groupe qu’importe leur handicap et leurs besoins.

      https://www.sudeducation.org/communiques/les-mauvaises-reponses-de-gabriel-attal-pour-lecole-inclusive-aesh-ces

      #groupes_de_niveau #AESH_mutualisé

  • Désavoué par Amélie Oudéa-Castéra dans sa réforme des classes prépa, le recteur de Paris démissionne | Actu Paris
    https://actu.fr/ile-de-france/paris_75056/desavoue-par-amelie-oudea-castera-dans-sa-reforme-des-classes-prepa-le-recteur-

    « La reproduction sociale caractérise encore beaucoup trop notre système éducatif. Paris en est un exemple, certains diront un miroir grossissant. » Ces termes, forts, ne sont pas de Pierre Bourdieu, mais bien de Christophe Kerrero. Le recteur de l’académie de Paris vient d’annoncer sa démission dans une lettre adressée aux personnels enseignants de l’académie de Paris. Une crise de plus à gérer pour la ministre de l’Éducation Amélie Oudéa-Castéra.

    • Le recteur avait averti à l’automne 2023 de la fermeture de quatre #classes_préparatoires et l’ouverture de trois autres à la rentrée 2024, mais un moratoire sur ces fermetures a été annoncé au Conseil supérieur de l’éducation du 31 janvier par Amélie Oudéa-Castéra, sans que Christophe Kerrero en ait été informé. Le sujet était arbitré « en faveur » du recteur il y a plusieurs semaines. « Cela était clos et entendu avec Matignon. Le recteur de Paris a découvert la décision de la ministre via les réseaux sociaux des syndicats », assure-t-on dans son entourage.

      Dans son long courrier, le recteur semble regretter le choix de surseoir à cette évolution de la carte des formations parisiennes. Il revient sur le projet de prépa au concours de professeur des écoles, en évoquant un dispositif destiné à « aller chercher des bacheliers pour qui l’enseignement constitue une voie de promotion sociale et pour former des professeurs dont nous manquons cruellement ». Il assume également d’avoir choisi « pour cela [de] fermer, en effet, quelques classes au sein d’une carte parisienne dont l’offre dépasse largement les besoins ».

      Le recteur évoque également le grand chantier de ces dernières années : mettre fin aux « #lycées_de_niveau » et aux ghettos scolaires qui se renforçaient jusqu’alors dans les lycées publics parisiens. Pour réussir ce pari, le recteur d’académie avait lancé dès l’hiver 2020-2021 une réforme de la plate-forme d’Affectation des lycéens par le Net (Affelnet), entrée en application en 2008 et utilisée partout en France pour répartir les élèves de 3e dans les lycées – avec un paramétrage différent pour Paris.

      A l’issue de cette réforme, « en l’espace de deux ans, la ségrégation sociale des lycées publics de la capitale, qui était supérieure de 15 % à la moyenne des autres académies, est devenue inférieure de 26 % à cette moyenne », résumaient Julien Grenet et Pauline Charousset, chercheurs à l’Ecole d’économie de Paris, dans une note d’analyse diffusée le 8 février 2023. L’année suivante, le dispositif est élargi aux prestigieux lycées Louis-le-Grand et Henri-IV, non sans provoquer de polémiques.

      Dans sa lettre de démission, Christophe Kerrero rappelle qu’il a « été l’un de ces élèves en échec ». « Il s’en est fallu de peu que je ne rejoigne la cohorte des exclus si certains professeurs, dans un autre cadre, n’avaient cru à mes capacités révélées plus tardivement », poursuit-il.

      https://justpaste.it/2s9pi

      Le beau geste d’un libéral hostile aux rentes de situation
      https://seenthis.net/messages/852711

      #école #élèves #Paris #éducation_nationale #groupes_de_niveau #ségrégation_sociale #classes_préparatoires #démission

  • Assurance-chômage : les scénarios du gouvernement pour un nouveau saccage, Cécile Hautefeuille

    L’exécutif étudie des pistes de réduction des droits au chômage, parmi lesquelles une baisse supplémentaire de 20 % de la durée d’indemnisation et un durcissement des règles concernant les seniors. Mediapart a eu accès aux chiffrages établis par la Dares, l’institut statistique du ministère du travail.

    Plusieurs scénarios pour un très mauvais film. Dans le droit fil des déclarations d’Emmanuel Macron sur un nouveau durcissement des règles d’#assurance-chômage lors de sa conférence de presse du 16 janvier, le ministère du #travail a demandé à la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques), son institut statistique, de plancher sur différentes pistes de réduction des droits et vient d’en recevoir les résultats détaillés.

    Selon ces documents que Mediapart s’est procurés, l’hypothèse d’une nouvelle baisse de la #durée_d’indemnisation a été explorée, un an tout juste après une première diminution de 25 %. La seconde salve ferait mal : 20 % de moins pour toutes et tous. La durée maximale d’indemnisation passerait alors de 18 mois à 14,4 mois pour les moins de 53 ans, de 22,5 mois à 18 mois pour les 53-54 ans et de 27 mois à 21,6 mois pour les 55 ans et plus. Comparée à la durée initiale, avant la réforme de février 2023, la baisse totale serait… de 40 %.

    Et ce n’est pas tout. En pleine négociation sur le #chômage des #seniors avec les partenaires sociaux, le ministère a demandé à la Dares de travailler sur des scénarios visant à réduire, voire à supprimer totalement, les règles plus favorables dont les 53 ans et plus bénéficient en termes de durée et de maintien de droits jusqu’à la #retraite

    Sollicité par Mediapart sur ces chiffrages, le ministère du travail, désormais piloté par Catherine Vautrin, n’a pas souhaité commenter.
    S’ils ne sont, pour l’heure, que des documents de travail, ces chiffrages donnent un sérieux aperçu des hypothèses envisagées par l’exécutif. Emmanuel Macron a exposé sa volonté en conférence de presse, puis à Davos devant les puissants de l’économie mondiale : il veut un « acte II » de la réforme du marché du travail. Il veut des règles plus sévères. Il veut un taux de chômage à 5 %.

    Sitôt exigé, sitôt exploré. Le ministère du travail détient désormais le détail des plans possibles. De belles économies en vue mais un désastre pour les #chômeurs et les #chômeuses. Sans que les effets concrets s’annoncent très positifs en termes de baisse du chômage : la Dares n’anticipe que quelques dizaines de milliers d’emplois gagnés si ces mesures entraient en vigueur.

    Fin de droits et bascules au RSA

    Selon les calculs de la Dares, une nouvelle baisse de durée d’indemnisation « précipitera la fin de droit de 400 000 allocataires supplémentaires sur une année, conduisant ainsi à 100 000 bascules supplémentaires au #RSA ou à l’#ASS [allocation de solidarité spécifique − ndlr] ». La note transmise au ministère le rappelle : la réforme de 2023 réduit déjà « la durée consommée de 1,6 million d’allocataires sur un an qui sont ainsi concernés par une fin de droit plus précoce, parmi lesquels un quart, soit 400 000, basculent au RSA ou à l’ASS sur l’année ».

    Si l’exécutif taille encore dans la durée de versement des allocations, cela devrait dégager 3 milliards d’euros d’économies par an. Les coupes dans le modèle social générées par les #réformes de l’assurance-chômage de 2021 et 2023 sont, elles, déjà chiffrées : près de 7 milliards d’euros à l’horizon 2027, dont 4,5 milliards pour la seule baisse de 25 % de la durée. Une saignée.

    Les « effets emploi » attendus − autrement dit les retours à l’emploi espérés − sont également mesurés : 40 000 selon la Dares.
    Supprimer la filière “seniors” engendrerait chaque mois 6 800 fins de droits supplémentaires (82 000 sur une année).

    Les scénarios concernant les seniors ne sont guère plus réjouissants. Trois pistes sont étudiées par la Dares. La première consiste à décaler de deux ans les « bornes d’âge » qui permettent de percevoir des allocations plus longtemps. Actuellement, ce régime d’exception commence à 53 ans. Il passerait donc à 55 ans, jetant 32 000 personnes supplémentaires par an en fin de droits.

    La deuxième piste prévoit, en plus de ce décalage de deux ans, de supprimer « la tranche intermédiaire » qui concerne actuellement les 53-54 ans. Dans ce cas, seul·es les 57 ans et plus auraient droit à une durée plus longue. Le dernier scénario, brutal, consiste à supprimer purement et simplement « la filière senior ». Selon les règles actuelles, la durée de versement maximum passerait donc à 18 mois, quel que soit l’âge. Et même à 14,4 mois si l’exécutif décide d’appliquer la baisse de 20 % et d’infliger une double peine aux seniors.

    « Supprimer la filière “seniors” engendrerait chaque mois 6 800 fins de droits supplémentaires (82 000 sur une année) pour un montant total d’économies à terme de 880 millions d’euros par an », estime la Dares. Deux mille trois cents personnes basculeraient ensuite, chaque mois, au RSA ou à l’ASS quand d’autres n’auraient… plus rien du tout. Car actuellement, souligne la Dares, chez les 55 ans et plus qui atteignent leur fin de droits, près de la moitié (46 %) ne perçoivent aucune allocation dans les six mois qui suivent. Un tiers perçoivent le RSA et l’ASS quand seul·es 21 % arrivent à recharger des droits.

    Ici, les « effets emploi » attendus seraient de « 22 000 emplois supplémentaires en cas de suppression de la “filière seniors” » contre 2 000 en cas de « simple » rehaussement de deux ans des bornes d’âge. La Dares alerte toutefois dans sa note sur « la littérature économique [qui] met en évidence un effet assez significatif de la réduction de la durée d’indemnisation sur la qualité de l’emploi repris pour les seniors ».

    Supprimer le maintien de droits jusqu’à la retraite ?

    La dernière piste explorée par l’institut statistique à la demande du ministère concerne enfin le maintien de droits jusqu’à la retraite. Ce dispositif « permet actuellement aux allocataires de 62 ans ou plus de bénéficier d’un maintien dans leur indemnisation chômage au-delà de leur fin de droits et jusqu’à l’âge de la retraite à taux plein, sous réserve notamment d’avoir été indemnisés au moins durant un an ».

    Deux scénarios de réforme sont sur la table. Un report de deux ans de l’âge d’entrée dans le dispositif, de 62 à 64 ans. Et sa suppression. Cette dernière « concernerait 20 000 allocataires et réduirait les dépenses d’assurance-chômage de 342 millions d’euros à terme », précise la Dares, qui ajoute que « ces chiffrages ne prennent pas en compte les éventuelles réformes de la filière seniors ». En cas de double, voire de triple peine pour les seniors, les économies seraient donc bien plus larges. Et les droits des seniors, réduits à peau de chagrin.

    Ces chiffrages commandés par l’exécutif ne sont pas une surprise. Le gouvernement martèle, depuis des mois, qu’il souhaite réduire la durée d’indemnisation des 53 ans et plus. Le député Renaissance #Marc_Ferracci, artisan de la première réforme de l’assurance-chômage, en a remis une couche lundi 29 janvier dans Les Échos, plaidant pour une réforme profonde du chômage des seniors et formulant des propositions qui ressemblent à s’y méprendre aux chiffrages réalisés courant janvier par la Dares. Le député y concède que « le sujet le moins consensuel » est celui de la suppression de la « filière senior ».

    Des indices, depuis fin 2022

    L’idée de baisser, encore, la durée d’indemnisation de l’ensemble des demandeuses et demandeurs d’emploi n’est pas nouvelle non plus. La loi « portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi » votée fin 2022 a ouvert la voie à la modulation des allocations-chômage, selon la santé économique du pays. C’est pour cette raison que les droits ont baissé en février 2023. La conjoncture étant jugée « favorable », un coefficient (de 0,75, soit 25 % de baisse) a été appliqué sur le calcul de la durée des droits.
    Dès l’adoption de la loi, l’exécutif a pavé le chemin d’indices démontrant sa volonté d’aller plus loin. Un projet de décret avait fait hurler les partenaires sociaux car il prévoyait, sans concertation aucune, de baisser de 40 % la durée d’indemnisation si le taux de chômage passait sous la barre des 6 %. Ce passage avait finalement été retiré, mais Mediapart l’avait pressenti : l’idée n’allait pas finir aux oubliettes. Preuve en est que c’est bien sur un coefficient réduit de 0,75 à 0,6 que la Dares vient de plancher.

    Seule nuance, et de taille, avec le projet de décret : le taux de chômage est loin de 6 %. Il a même sensiblement augmenté de 0,2 point au troisième trimestre à 7,4 %. Les derniers chiffres du chômage, portant sur le nombre d’inscrits à #France_Travail (ex-Pôle emploi) affichent également une hausse de 1 % pour les catégories A,B et C au quatrième trimestre 2023. Signe, selon la CGT dans un récent communiqué, que les réformes successives des droits des chômeurs et des chômeuses ne fonctionnent pas et que le gouvernement, en continuant ses assauts, « veut encore amplifier une politique pourtant en échec ».

    Ce mardi après-midi, Gabriel Attal précisera peut-être, lors de son discours de politique générale au Parlement, les mesures qui seront intégrées à « l’acte II » de la réforme. Tous les chiffres sont désormais sur la table, l’exécutif n’a plus qu’à choisir le scénario. Quel qu’il soit, on connaît déjà l’issue : ça finit mal pour les chômeuses et les chômeurs.

    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/300124/les-scenarios-du-gouvernement-pour-un-nouveau-saccage

    #Droit_au_chômage #tirer_sur_l'ambulance

    • Attal annonce la suppression de l’allocation de solidarité spécifique (#ASS) touchée par + de 300 000 chômeurs exclus de l’assurance chômage. C’est une baisse ou une coupure de revenu, car les critères de la familialisation sont plus durs au RSA qu’à l’ASS, et un temps de chômage qui comme le chômage non indemnisé (majorité des chômeurs) ne vaudra plus aucun trimestre pour la retraite.

      N’oublions pas un gros mot en voie d’obsolescence programmée : #solidarité

      edit : la suppression de l’ASS va représenter une grosse économie en matière de revenu des chômeurs. environ 50 balles pour ceux qui rentrent dans les clous du RSA, et un nombre qui devrait être important d’ex AsS dont lea conjoint.e dispose d’un SIMC mensuel qui elleux n’auront rien.

    • Évolution et paupérisation d’une partie des Français
      https://www.senat.fr/rap/r20-830/r20-830.html

      Selon les données fournies par la Dares, la durée moyenne d’un CDD était de 46 jours en 2017 contre 113 jours en 2001. La moitié des CDD duraient moins de 5 jours en 2017 alors que la durée médiane était de 22 jours en 2001. En 2017, près d’un tiers des CDD ne duraient qu’une journée.

      ARE rabotée ad libitum, RSA conditionné, Prime d’activité (où est le mérite, réside le steack, ou le plat de quinoa aux légumes, comme vous voudrez), voilà le triptyque qui s’impose aux chômeurs en activité à temps réduit. Et c’est à cette catégorie là qu’entre 53 et 67 ans et plus (en fonction de la précarité d’emploi antérieure), les chômeurs doivent appartenir.

      edit

      au quatrième trimestre 2023, en France métropolitaine, le nombre de personnes inscrites à France Travail et tenues de rechercher un emploi (catégories A, B, C) s’établit à 5 129 600. Parmi elles, 2 824 400 personnes sont sans emploi (catégorie A) et 2 305 200 exercent une activité réduite (catégories B, C).

      https://statistiques.pole-emploi.org/stmt/publication#:~:text=Chômage%20et%20demandeurs%20d%27emploi.

      #chômeurs_en_activité_à_temps_réduit

    • Comme tant d’autres, nous prendrons leurs emplois à temps partiel payés au SMIC horaire. Ça permet à bien des précaires de survivre et d’esquiver le contrôle, et ça permettra à beaucoup de pensionnés à faible retraite d’échapper au 15h qu’ils n’auront de toutes façons pas les moyens de généraliser.
      Ce qui arrive avec l’inaptitude totale au travail (pathologies ou âge) est une autre question, dont la réponse se lira du côté des évolutions de l’AAH et de l’ASPA.

      #minima_sociaux #travail #précaires #précarisation

    • Fin de l’allocation de solidarité spécifique : vers une « fragilisation » des chômeurs de longue durée
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/02/01/fin-de-l-allocation-de-solidarite-specifique-vers-une-fragilisation-des-chom


      Gabriel Attal, le jour de sa déclaration de politique générale, à l’Assemblée nationale, le 30 janvier 2024. JULIEN MUGUET POUR « LE MONDE »

      La réforme de l’allocation de solidarité spécifique, source d’économie, serait préjudiciable à de nombreux allocataires. Les associations dénoncent le projet du gouvernement.
      Par Bertrand Bissuel

      Derrière l’opération de vases communicants, il y a un risque de casse sociale. Dans sa déclaration de politique générale prononcée, mardi 30 janvier, à l’Assemblée nationale, le premier ministre, Gabriel Attal, a annoncé la suppression de l’allocation de solidarité spécifique (#ASS) et « sa bascule » vers le revenu de solidarité active (#RSA). Ce scénario, envisagé à plusieurs reprises au cours des trente-cinq dernières années, avait, jusqu’à présent, été écarté car il était susceptible de pénaliser de nombreuses personnes en situation de très grande vulnérabilité. Il devient aujourd’hui réalité, suscitant une vive colère à gauche, parmi les syndicats et les associations de lutte contre l’exclusion.

      Créée en 1984, l’ASS est une prestation accordée, sous certaines conditions, aux demandeurs d’emploi ayant épuisé leurs droits à l’#assurance-chômage. Pour la percevoir, il faut avoir des ressources faibles, qui n’excèdent pas un seuil donné (près de 1 272 euros par mois pour un individu seul, au 1er avril 2023). Le montant mensuel de l’allocation peut aller jusqu’à 552 euros. Dans un cas sur deux, la somme est versée à des personnes qui sont à la recherche d’un poste depuis au moins cinq ans. Ce sont des seniors, le plus souvent, 58 % des bénéficiaires ayant au moins cinquante ans . En août 2023, elle était attribuée à quelque 261 000 femmes et hommes (contre quelque 530 000 en 1996). Chargé de la financer, l’Etat a prévu un budget de 1,65 milliard d’euros pour l’exercice 2024 .
      Mardi, M. Attal a justifié son choix de mettre fin à l’ASS en faisant valoir que cette aide « permet, sans travailler, de valider des trimestres de #retraite ». Or, a ajouté le locataire de Matignon, « la retraite doit être le fruit du #travail » . D’où la décision d’éteindre le dispositif ciblé sur les #chômeurs de très longue durée. « Chercher un modèle social plus efficace et moins coûteux, ce n’est pas un gros mot mais un impératif », a-t-il complété. Son discours obéit donc à des considérations morales et au souci de dégager des économies. Il recèle aussi l’idée sous-jacente que, en basculant vers le RSA, les publics concernés intégreront un système qui vient d’être réformé (instauration de quinze à vingt heures d’activité hebdomadaire pour les #allocataires, accompagnement renforcé dans le but de reprendre pied dans le monde du travail, etc.).

      « Economies » substantielles

      Le problème, c’est que les règles encadrant l’ASS ne sont pas identiques à celles applicables au RSA, les premières s’avérant souvent plus favorables aux individus que les secondes. Ainsi, le plafond de revenus à ne pas dépasser pour pouvoir prétendre à une aide est plus élevé pour l’ASS que pour le RSA, si bien que le nombre potentiel de bénéficiaires est plus important dans le premier cas. De plus, les ressources prises en compte et les modalités de calcul peuvent se révéler plus avantageuses, s’agissant de l’ASS. Autrement dit, la disparition de cette prestation pourrait être préjudiciable à un certain nombre de personnes. Combien ? Sollicité, le ministère du travail, de la santé et des solidarités n’a, à ce stade, pas livré de données.

      Fin 2017, dans une note confidentielle que Le Monde a pu consulter, France Stratégie, un organisme d’expertises rattaché à Matignon, avait présenté des « scénarios d’évolution du régime de solidarité chômage ». L’un d’eux tentait d’apprécier l’impact d’une « suppression sèche de l’ASS » : « 70 % des allocataires actuels seraient perdants (…), avec une [réduction] moyenne de niveau de vie de 8 % », en faisant l’hypothèse que tous les individus ayant droit au RSA et à la #prime_d’activité les réclament – ce qui n’est pas le cas, à l’heure actuelle. « La part des perdants passerait à 75 % (…), avec une baisse moyenne de niveau de vie de 16 % », si l’on retenait un « taux de recours » au RSA et à la prime d’activité équivalent « à celui estimé aujourd’hui ». En outre, l’extinction de l’ASS conduirait à des « économies » substantielles dans nos régimes de pension, puisque cette prestation octroie des trimestres de cotisation au titre de la retraite. Dans un rapport sur les #minima sociaux rendu en avril 2016, Christophe Sirugue, alors député de Saône-et-Loire, était parvenu à des constats similaires. Ses chiffrages et ceux de France Stratégie, réalisés il y a plusieurs années, nécessitent d’être actualisés, mais ils mettent en lumière les effets négatifs qui pourraient se produire, après l’annonce de mardi.

      C’est pourquoi Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, se dit « choqué » face à la déclaration du premier ministre. « Elle fragilise des personnes déjà fragiles », renchérit Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD Quart Monde. Pour elle, c’est un « signe grave, qui montre que, lorsque vous êtes #précaire, on vous enfonce encore plus dans la précarité ».

      Le nombre d’allocataires de l’ASS n’a cessé de baisser alors que cette allocation a pu concerner 450 000 allocataires.
      Le journaliste spécialisé réussi à ne pas parler du caractère non individuel des deux prestations.

      ASS : Contre-attaque, Figaro, Michaël Zemmour
      https://seenthis.net/messages/1039298
      https://seenthis.net/messages/1039300
      https://seenthis.net/messages/1039331

    • La réforme de l’assurance-chômage de 2019 a d’abord affecté les jeunes et les précaires
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/02/27/assurance-chomage-la-reforme-de-2019-a-d-abord-affecte-les-jeunes-et-les-pre

      Alors qu’un nouveau tour de vis pour les chômeurs est sérieusement envisagé par le gouvernement, le comité d’évaluation des mesures prises en 2019 a rendu son rapport intermédiaire, mitigé, mardi 27 février.
      Par Thibaud Métais

      Pendant que le gouvernement prépare l’opinion à une nouvelle réforme de l’assurance-chômage, les effets des précédentes commencent à être mieux connus. La direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, rattachée au ministère du travail, a publié, mardi 27 février, un rapport intermédiaire réalisé par son comité d’évaluation de la #réforme de l’#assurance-chômage lancée en 2019 et qui avait durci les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi.
      La publication de ces travaux intervient au moment où un nouveau tour de vis pour les chômeurs – ce serait le cinquième depuis 2017 – est dans les cartons de l’exécutif. Dans Le Journal du dimanche du 25 février, le premier ministre, Gabriel Attal, a annoncé que la durée d’indemnisation « peut encore » être réduite et qu’il est également possible d’« accentuer la dégressivité des allocations ». Si les arbitrages ne sont pas arrêtés, le locataire de Matignon a confirmé sa détermination sur RTL, mardi 27 février. « Travailler doit toujours rapporter toujours plus que ne pas travailler , a affirmé le chef du gouvernement, qui souhaite qu’on « rouvre le chantier » de l’assurance-chômage pour avoir « un #modèle_social qui incite davantage à l’activité ».

      https://seenthis.net/messages/1043484

      La volonté du gouvernement de durcir une nouvelle fois les règles d’indemnisation vise à répondre au retournement du marché de l’#emploi observé ces derniers temps. Alors que le président de la République, Emmanuel Macron, avait fait du #plein-emploi – autour de 5 % de chômage – l’objectif majeur de son second quinquennat, la possibilité de tenir cette promesse s’envole.
      Après plusieurs années de baisse continue du chômage, celui-ci est en hausse depuis plusieurs mois, passant de 7,1 % fin 2022 à 7,5 % sur le dernier trimestre de 2023. La dernière réforme de l’assurance-chômage mise en place en février 2023 et qui a réduit de 25 % la durée d’indemnisation avait pourtant comme objectif de rendre les règles plus incitatives lorsque la conjoncture est favorable et plus protectrice lorsque la situation se dégrade.

      Baisse du nombre d’ouvertures de droits
      Les changements se succèdent si rapidement que de nouvelles règles sont mises en place, sans même que les effets des précédentes soient connus. Le rapport publié mardi répond en partie à cette carence. Ces travaux s’intéressent aux conséquences de la réforme de l’assurance-chômage décidée en 2019 et mise en œuvre par étapes jusqu’à fin 2021, notamment en raison de la crise sanitaire. Les différents décrets pris par le gouvernement ont eu pour conséquence de durcir les conditions d’indemnisation.
      Les conditions d’accès au système sont devenues plus exigeantes puisque les demandeurs d’emploi doivent désormais travailler pendant six mois sur vingt-quatre (contre quatre sur vingt-huit auparavant) pour ouvrir des droits. Cette réforme a également modifié le mode de calcul du montant de l’indemnisation (et mis en place la dégressivité de l’allocation à partir du septième mois pour les chômeurs de moins de 57 ans qui avaient un salaire égal ou supérieur à 4 700 euros brut par mois). Enfin, du côté des entreprises, elle instaure le bonus-malus, qui module le taux de cotisations en fonction du nombre de salariés dont elles se sont séparées, pour réduire le recours aux contrats courts.

      Les résultats montrent une baisse significative (17 %) du nombre d’ouvertures de droits entre 2019 et 2022. « La baisse des entrées au chômage peut aussi être due à la dynamique du marché du travail à ce moment-là », nuance toutefois le président du comité d’évaluation, Rafael Lalive, faisant référence aux nombreuses créations d’emplois qui ont suivi la crise sanitaire. La diminution s’avère plus marquée chez les jeunes et les plus précaires : − 24 % pour les moins de 25 ans, – 25 % pour ceux ayant terminé un CDD et – 35 % après un contrat d’intérim.

      Retour à l’emploi peu durable

      L’allongement de la durée de travail nécessaire à l’ouverture de droits de quatre à six mois peut également priver des salariés de l’accès à l’assurance-chômage. « Cette perte de revenu peut les amener à accepter plus systématiquement les offres d’emploi qui leur sont proposées, au détriment de la qualité de l’emploi retrouvé », estiment les auteurs du rapport. L’étude souligne cependant l’effet positif et significatif de la mesure sur la probabilité de retrouver un emploi. Mais pour les plus de 25 ans, l’effet porte uniquement sur un retour à l’emploi peu durable (CDD inférieur à deux mois ou mission d’intérim).

      Le rapport met par ailleurs en lumière les possibles effets opposés sur le retour à l’emploi induits par la modification du calcul de l’allocation. « D’une part, la baisse du montant des allocations pourrait accélérer le retour à l’emploi ; d’autre part, l’allongement de la durée d’indemnisation [induite par la modification du mode de calcul] pourrait retarder ce retour », écrivent les auteurs. Quant aux entreprises, 18 000 d’entre elles ont été concernées par le mécanisme du bonus-malus, ce qui représente 6 % des sociétés des sept secteurs concernés par la mesure. 36 % d’entreprises sont en malus et 64 % en bonus.
      Il faut désormais attendre la fin de l’année pour que le comité d’évaluation rende ses travaux définitifs et pour connaître dans les détails les conséquences de la réforme de 2019 sur les comportements des demandeurs d’emploi. Même si, d’ici là, ils seront probablement soumis à de nouvelles règles d’indemnisation encore plus strictes.

    • FRANCE TRAVAIL : RÉVÉLATIONS SUR UNE AFFAIRE D’ÉTAT, 12 juil. 2023
      https://www.youtube.com/watch?v=rgXYJlq7Aek

      La #loi_Plein_emploi est annoncée comme un marqueur du second mandat de la présidence Macron. C’est elle qui, le gouvernement l’explique, va permettre à la France de passer sous la barre des 5% de demandeurs d’emploi. Ce big-bang, qui rassemblera sous une même bannière, celle de France Travail, tous les organismes publics intervenant sur l’accès à l’emploi, va renforcer dans les faits le #contrôle_des_chômeurs.

      Mais il est un autre effet direct dont personne ne parle. Blast révèle dans une enquête exclusive comment cette réforme imaginée et conceptualisée par le meilleur ami et témoin de mariage d’Emmanuel Macron va profiter aux affaires de son père... et à lui-même.

      Ce circuit, qui relie le député Renaissance #Marc_Ferracci et son père Pierre Ferracci, passe par une société que le second a créée avec deux hommes dont il est le mentor, et un accord qui fait de son #groupe_Alpha le grand bénéficiaire de la réforme de Pôle emploi.

      Blast révèle également, fait aggravant de ce mélange des genres insensé, que le député des Français de l’étranger va... lui aussi bénéficier de la loi dont il est rapporteur à l’Assemblée nationale.

  • L’alerte des chefs d’établissement scolaire sur la mise en place des groupes de niveau
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/24/l-alerte-des-chefs-d-etablissement-scolaire-sur-la-mise-en-place-des-groupes

    L’initiative est rare de la part d’une organisation syndicale représentant des cadres de l’#éducation_nationale peu coutumière des oppositions frontales au ministère. Le SNPDEN-UNSA, largement majoritaire chez les #chefs_d’établissement du public, a remis lundi 22 janvier un courrier « d’alerte » à la ministre de l’éducation nationale, Amélie Oudéa-Castéra, sur les #groupes_de_niveau au collège. Cette mesure, décidée en décembre 2023 par Gabriel Attal lorsqu’il occupait encore son poste Rue de Grenelle, est « contraire à nos valeurs » et « engendre de nombreuses difficultés techniques et organisationnelles », dénonce le syndicat. « Il n’y a rien de plus difficile pour des cadres que de porter un projet auquel ils ne croient pas, et contraire à ce qu’ils ont toujours porté », prévient le courrier.

    https://justpaste.it/bwpfl

    La #ségrégation / #relégation est trop franche ?

    #défection ?

    • « Nous sommes à certains moments obligés de procéder à certaines fermetures de classes. Les écoles peuvent être performantes, mais si le nombre d’enfants est trop réduit pour une classe donnée c’est toute l’émulation qui est remise en cause », assure @AOC1978.

      Avant d’être démise, une défense inévitablement pernicieuse des sureffectifs scolaire et de la compétition.

      #école

  • « Faire du brevet l’examen de l’entrée en seconde, c’est la fin programmée du collège unique », Claude Lelièvre

    Invité à préciser ce qu’il entendait par « libéralisme avancé », le président de la République Valéry Giscard d’Estaing (« VGE ») déclarait, sur RTL, le 20 mai 1975 : « Il y a dans la pensée de gauche des éléments positifs importants dont je compte bien m’inspirer ; ce qui fait que, dans l’action libérale avancée, il y a beaucoup d’idées de gauche qui doivent être mises en œuvre. »

    Quelques-unes d’entre elles ont alors défrayé la chronique : création d’un secrétariat à la condition féminine, loi Veil sur l’IVG, abaissement de l’âge de la majorité à 18 ans, regroupement familial pour les immigrés, collège unique.

    On aurait pu penser qu’avec son antienne du « en même temps », la présidence d’Emmanuel Macron s’inscrirait dans cette filiation. On voit clairement qu’il n’en est rien. La loi Veil sur l’IVG a été adoptée avec l’appui de l’ensemble des députés de gauche le 20 décembre 1974 et une minorité de parlementaires de droite.

    A contrario, la récente loi sur l’immigration a été adoptée avec l’appui de l’ensemble des députés du Rassemblement national. Par ailleurs, Michelle Perrot, la grande spécialiste de l’histoire des femmes, a pu se dire « scandalisée » par les propos d’Emmanuel Macron concernant l’affaire Depardieu.

    Rupture avec la « tradition républicaine »

    La conception du « collège unique » est une version française de l’« école de base » suédoise (sociale-démocrate), de la « comprehensive school » (travailliste), de la « Gesamtschule » (sociale-démocrate). Dans le cadre du « libéralisme avancé », le collège unique a été voulu et porté personnellement par Valéry Giscard d’Estaing, mais a rencontré de nombreuses oppositions, en particulier dans son propre camp politique. Encore en octobre 1991, Alain Juppé (alors secrétaire général du RPR) proclamait qu’il fallait « casser le collège unique ». Mais, dans son livre paru en vue de la campagne présidentielle de 2017, il ne prônait plus que quelques aménagements.

    Marine Le Pen, elle, a proposé dans son programme pour l’élection présidentielle de 2022 une arme de « destruction massive » afin d’en finir avec le collège unique : « Le diplôme national du brevet deviendra un examen d’orientation post-troisième. » L’ex-ministre de l’éducation nationale, Gabriel Attal, a repris pour l’essentiel cette prescription en annonçant que le brevet serait désormais une condition nécessaire pour entrer en seconde (générale et/ou technologique ?), ce qu’il n’a jamais été jusque-là. Faire du brevet l’examen de l’entrée en seconde, c’est choisir sans appel que le collège doit être une propédeutique au lycée, et non pas la deuxième phase d’une instruction obligatoire (pour tous).

    C’est la fin programmée du collège unique et de son sens originel initié dans le cadre du libéralisme « avancé ». « VGE » avait été très net, en 2001 : « Le débat doit se concentrer sur cette question : quels savoirs donner à cet ensemble de jeunes qui constituent un acquis culturel commun ? On n’a guère avancé depuis vingt-cinq ans. Au lieu d’avoir rabattu tout l’enseignement des collèges vers l’enseignement général, les rapprochant des classes de la 6e à la 3e des lycées d’autrefois, en un peu dégradé, il aurait mieux valu en faire une nouvelle étape de la construction du cycle scolaire. »

    Le renoncement aux ambitions portées par le libéralisme « avancé » dans certains domaines peut parfois aller plus loin et rompre non seulement avec le « libéralisme avancé » mais même avec la simple « tradition républicaine ». On peut en prendre pour exemple significatif la volonté réitérée constamment ces derniers mois par l’ex-ministre de l’éducation nationale d’aller vers une forte « labellisation » ministérielle des manuels scolaires.

    Le choix des manuels scolaires, question vive

    La question du choix des manuels scolaires a été une question vive lors de l’instauration de l’école républicaine et laïque, sous la IIIe République. Le 6 novembre 1879, le directeur de l’enseignement primaire, Ferdinand Buisson, dans une note adressée à Jules Ferry, indique qu’« il y aurait de graves inconvénients à imposer aux maîtres leurs instruments d’enseignement » et qu’« il n’y en a aucun à leur laisser librement indiquer ce qu’ils préfèrent ».

    En conséquence, Jules Ferry signe, le 16 juin 1880, un arrêté qui fait largement appel au concours des maîtres et il souligne que « cet examen en commun deviendra un des moyens les plus efficaces pour accoutumer les enseignants à prendre eux-mêmes l’initiative, la responsabilité et la direction des réformes dont leur enseignement est susceptible ». Le 13 octobre 1881, une circulaire établit, pour les professeurs de collèges et lycées, des réunions mensuelles en leur confiant le choix des livres de classe.

    L’école républicaine instituée sous la IIIe République s’est ainsi distinguée nettement de ce qui l’a précédée et de ce qui l’a suivie dans ce domaine. Par exemple, François Guizot, ministre de l’instruction publique en 1833, a fait paraître des manuels scolaires officiels dans les cinq matières principales de l’école primaire. Et, dès l’arrivée de Philippe Pétain au pouvoir, un décret du 21 août 1940 a mis un terme à l’attitude libérale qui avait prévalu : ce décret ne traite plus de la liste « des livres propres à être mis en usage » mais de celle « des livres dont l’usage est exclusivement autorisé ».

    A la Libération, le 9 août 1944, une ordonnance annule « tous les actes relatifs à l’interdiction de livres scolaires ou instituant des commissions à l’effet d’interdire certains livres ».

    En miroir, on peut rappeler la réponse du ministre de l’éducation nationale Alain Savary à une question écrite de parlementaires en avril 1984 à propos d’un manuel incriminé : « Le ministre ne dispose pas du pouvoir d’injonction lui permettant de faire retirer ni même de faire amender un ouvrage. Il n’exerce aucun contrôle a priori sur le contenu des manuels scolaires et il n’a pas l’intention de modifier la politique traditionnellement suivie à cet égard. Il n’existe pas de manuels officiels, pas plus qu’il n’existe de manuels recommandés ou agréés par le ministère de l’éducation nationale. Il y a eu dans le passé des tentatives allant dans ce sens, avec risques de censure. »

    Oui, dans bien des domaines, on est désormais loin de l’horizon d’un certain libéralisme « avancé » qui se voulait « moderniste » : ce qui se profile, c’est presque sans fard un libéralisme « d’attardés » plus ou moins assumé.

    Claude Lelièvre est l’auteur de L’Ecole d’aujourd’hui à la lumière de l’histoire (Odile Jacob, 2021).

    https://www.lemonde.fr/education/article/2024/01/16/faire-du-brevet-l-examen-de-l-entree-en-seconde-c-est-la-fin-programmee-du-c

    #école #BEPC #collège

    • « Si le récit égalitaire perdure, l’Etat organise une forme d’optimisation scolaire », Laurent Frajerman
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/16/si-le-recit-egalitaire-perdure-l-etat-organise-une-forme-d-optimisation-scol

      L’ancien ministre Gabriel Attal avait annoncé, en novembre 2023, avant sa nomination comme premier ministre le 9 janvier, un important train de mesures pour réformer l’éducation nationale, incluant d’aborder la « question du tabou du #redoublement » et de créer des #groupes_de_niveau au collège. Au regard des enquêtes internationales, personne ne conteste plus la baisse du niveau des #élèves français, même de ceux qui figurent parmi les meilleurs.

      L’ex-ministre en avait conclu que l’#enseignement doit se montrer plus exigeant, ce qui correspond à un sentiment très majoritaire. Outre les menaces qu’elles font peser sur la liberté pédagogique, on peut douter que les mesures soient à la hauteur de l’enjeu. Toutefois, ces critiques ne peuvent dissimuler que cela fait plus de dix ans que la dynamique positive qui a démocratisé l’école française a disparu. La panne du modèle actuel, miné par la #ségrégation_sociale et des cures d’#austérité à répétition, impose des changements. Tout l’enjeu étant de savoir si c’est pour revenir aux années 1950 ou pour relancer sa démocratisation.

      Les politiques éducatives menées depuis le général de Gaulle œuvraient pour la scolarisation de tous les élèves du même âge dans une structure identique, dans l’objectif de leur délivrer le même enseignement. En conséquence, les classes ont été marquées par une hétérogénéité croissante, avec son corollaire : une baisse d’exigence, afin de faciliter l’accès de tous les élèves aux anciennes filières élitistes.

      Avec succès, puisque l’#accès_aux_études a été considérablement élargi. Cela s’accompagne du passage presque automatique en classe supérieure. A la fin des années 1960, le redoublement constituait la règle : un tiers des élèves redoublait la classe de CP, contre 1,3 % aujourd’hui. En 2021, seulement 12 % des élèves arrivaient en seconde avec du retard. Devenu résiduel, le redoublement a changé de nature, ne concernant plus que des élèves en forte difficulté, qu’elle soit structurelle ou conjoncturelle.

      Classes moyennes supérieures

      Les enseignants affichent leur scepticisme. Ils ne considèrent pas le redoublement comme une recette miracle, car il peut générer ennui et découragement. Toutefois, ils se trouvent démunis devant l’écart grandissant entre les meilleurs élèves, qu’il faut stimuler, et ceux qui cumulent les difficultés de compréhension. Ils constatent que plus les années de scolarité passent, plus l’échec s’enkyste, moins la notion de travail scolaire ne revêt de sens, générant quelquefois une attitude perturbatrice.

      Gabriel Attal en a tiré d’ailleurs argument pour dénoncer l’absurdité de cette situation et la souffrance qu’elle génère pour les élèves. Nombre d’enseignants vivent une situation d’autant plus ingérable que, paradoxalement, si l’affichage est homogène, le rêve de l’école commune s’éloigne.

      Jusque-là, la sociologie de l’éducation dénonçait les limites de cette politique de massification. Les inégalités sociales étant structurelles, le système est d’abord soumis aux effets de la #ségrégation-spatiale. Quoi de commun entre un collège en éducation prioritaire et un autre situé en centre-ville d’une métropole ?

      Quatre types d’école cohabitent, donc : l’#école_publique normale, celle en #éducation_prioritaire, l’école publique élitiste, et l’#école_privée. Aujourd’hui, avec le développement d’un #marché_scolaire, nous vivons une nouvelle phase. L’Etat aggrave la fracture existante en créant des établissements dérogatoires et de nouvelles #filières_élitistes sélectionnant par les langues, critère socialement discriminant. Pire, il subventionne massivement sa propre concurrence, l’enseignement privé.

      Le privé accueille de plus en plus d’élèves des milieux favorisés, au détriment de la mixité sociale. Les difficultés se concentrent alors dans l’école publique « normale ». Seule à supporter réellement les contraintes de la démocratisation, celle-ci n’en est que plus répulsive pour les classes moyennes et supérieures, générant un terrible cercle vicieux. Si le récit égalitaire perdure, l’Etat organise en réalité une forme d’#optimisation_scolaire au détriment de ceux qui n’ont pas d’échappatoire.

      Depuis une quinzaine d’années, les enquêtes internationales nous alertent sur l’aggravation du poids des #inégalités_sociales dans les résultats scolaires. Ce constat est dissimulé par l’invisibilisation de la #compétition. D’un côté, les notes ont été remplacées par les compétences, de l’autre, elles connaissent une inflation qui, malheureusement, ne reflète pas une hausse du niveau réel. En 2022, 59 % des bacheliers ont obtenu une mention. Ils étaient moins de 25 % en 1997… Le flou qui en résulte bénéficie aux familles les plus informées sur la règle du jeu, ou capables de payer coachs et cours particuliers.

      Politique éducative « discount »

      Le second vice de fabrication de la démocratisation scolaire est son caractère « discount ». Par exemple, l’argent économisé par la quasi-suppression du redoublement n’a guère été réinvesti dans des dispositifs permettant d’épauler les élèves en difficulté. Autrefois, les enseignants encadraient les élèves dans leurs exercices et l’apprentissage du cours en dehors des heures de classe. Aujourd’hui, ce type de travail est généralement confié à des étudiants bénévoles ou à des animateurs ou surveillants peu qualifiés. Même dans le dispositif « Devoirs faits » en collège, la présence d’enseignants est optionnelle.

      De nombreux choix proviennent de la #rationalisation_budgétaire : chasse aux options, suppression progressive des dédoublements de classe. Par exemple, en 2010, un élève de 1re L avait obligatoirement six heures de cours en demi-groupe (en français, langues, éducation civique, mathématiques et sciences). Aujourd’hui, les établissements ont toujours la latitude de créer de tels groupes, mais en prenant dans une enveloppe globale qui se réduit d’année en année et sans qu’un nombre maximum d’élèves ne soit prévu.
      Le pouvoir d’achat des #enseignants a baissé d’environ 20 %, source d’économie massive sur les salaires. Les effets commencent seulement à en être perçus : crise du recrutement, hausse exponentielle des démissions et professeurs en place démotivés par le déclassement de leur métier. Les promoteurs de cette politique leur préfèrent des enseignants précaires et sous-qualifiés, sommés de suivre les injonctions pédagogiques du moment. Remarquons que ces #contractuels sont nettement plus nombreux dans les établissements difficiles de l’enseignement public…

      Depuis 2002, les gouvernements de droite et de centre droit suppriment des postes d’enseignant. Malgré le redressement opéré sous François Hollande, le solde reste négatif, avec moins 36 500 postes. Le second degré a été particulièrement affecté, avec un solde de moins 54 700 postes, au nom de la priorité au primaire. Un maillon essentiel de la chaîne éducative a donc été fragilisé, alors que c’est le lieu de maturation des contradictions du système. Quel sens cela a-t-il d’habituer un élève de REP + à des classes de quinze élèves pour, devenu adolescent, le mettre dans une classe de vingt-cinq au collège ? Ces politiques de ciblage, censées produire des résultats visibles à un moindre coût, créent souvent inégalités et incohérences.

      Aujourd’hui, la France dépense 1 point de moins du PIB pour l’éducation qu’en 1995. Si on appliquait aujourd’hui les ratios en usage à l’époque, le budget consacré à l’avenir du pays augmenterait de 24 milliards d’euros, dont 15,5 milliards d’euros dépensés par l’Etat. Ce sous-investissement chronique se paie par la crise de notre #système_scolaire. Un débat sans arguments d’autorité s’impose donc, sous peine que les idéaux généreux et les politiques cyniques aboutissent définitivement à une école à plusieurs vitesses, dans laquelle les #classes_populaires seront assignées à un enseignement public dégradé.

      Laurent Fajermann est professeur agrégé d’histoire au lycée Lamartine, sociologue, chercheur associé au Centre de recherches sur les liens sociaux, du CNRS

    • Philippe Mangeot (philippe.duke ) sur Instagram :

      Lecture effarée du rapport de l’enquête administrative de l’Inspection générale sur le collège Stanislas, que publie dans son intégralité @mediapart. Toutes les informations qui circulaient sur les pratiques de cet établissement privé sous contrat sont corroborées et objectivées : contournement de la loi et de Parcoursup, pédagogie brutale et assumée comme telle, programmes non respectés, enseignement sexiste et homophobe..

      À ce stade, le scandale n’est pas seulement que la ministre de l’Éducation nationale ait choisi d’y inscrire ses enfants, contournant l’enseignement public au profit d’une école privée où se cultive l’entre-soi. Il est que le ministère dirigé à l’époque par Gabriel Attal a mis ce rapport sous le boisseau depuis qu’il lui a été rendu en juillet dernier, refusant de le rendre public.

      Mais il est également que cette institution privée, qui viole en toute impunité le contrat qui la lie à l’État, est mieux dotée, sur fonds publics, que la quasi-totalité des établissements scolaires publics de Paris, comme l’a révélé en janvier dernier une enquête de @lemondefr. L’argent public favorise Stanislas, c’est-à-dire les familles les plus fortunées : les « trois petits garçons » de Madame Oudéa-Castéra ont coûté plus cher à l’État.que les élèves du public.

      L’anagramme de Stanislas dit une vérité : la complaïisäncé : des pouvoirs publics à l’égard d’un établissement qui devrait n’avoir aucune place dans « l’École de la République », comme dit la ministre, nous salit tous et toutes.

  • La critique anti-industrielle devant ses calomniateurs

    Quelques observations

    Suite à la publication du texte " Le naufrage réactionnaire du mouvement anti-industriel • Histoire de dix ans "

    https://seenthis.net/messages/1029340

    https://seenthis.net/messages/1029970

    Voici les réponses qui ont été publiées :

    0. #Paul_Cudenec, Targeted and smeared by the fake-left thought police (en anglais)
    https://paulcudenec.substack.com/p/targeted-and-smeared-by-the-fake
    Pris pour cible et dénigré par la police de la pensée de la fausse gauche

    1. Anaïs G.
    https://www.infolibertaire.net/reponse-naufrage-reactionnaire-du-mouvement-anti-indus
    Coup de gueule d’une camarade.

    2. « Naufrage réactionnaire » : la plaidoirie de la défense
    https://lille.indymedia.org/spip.php?article36165

    3. Qui a peur de la critique anti-industrielle ?
    https://collectifruptures.wordpress.com/2024/01/06/qui-a-peur-de-la-critique-anti-industrielle

    4. #Annie_Gouilleux, La nébuleuse (soi-disant) anti-autoritaire…
    https://lesamisdebartleby.wordpress.com/2024/01/07/annie-gouilleux-la-nebuleuse-soi-disant-anti-autoritair
    Laquelle prépare une sorte de biographie de #Paul_Kingsnorth pour montrer à quel point il est "fasciste" et "pro-Trump"...

    5. Une lettre du "fasciste" #Olivier_Rey à Vincent Cheynet
    https://lesamisdebartleby.wordpress.com/2024/01/16/une-lettre-dolivier-rey-a-vincent-cheynet

    6. Édouard Schaelchli, « À chacun son fascisme ? »
    https://lesamisdebartleby.wordpress.com/2024/01/24/edouard-schaelchli-a-chacun-son-fascisme
    Franchement, on se serait bien passé des petites obsessions de ce monsieur.

    7. #Sébastien_Navarro, Avant de tous y passer
    http://acontretemps.org/spip.php?article1033
    Recension d’un livre de #Derrick_Jensen qui commence par qqs commentaires sur le torchon.

    8. #Groupe_Grothendieck, Guerre généralisée au vivant et biotechnologies , ch. 4.
    https://lundi.am/Guerre-generalisee-au-vivant-et-biotechnologies-4-4

    Les thèmes principaux de la guerre au genre humain sont représentés : cyborg spatial, biocitoyenneté, génie génétique, postmodernisme, confusion entre liberté et consommation de corps, mise en exergue du « bios », combat contre le « zôên » vu comme « fossile vivant », neutralisation du politique par l’acte technoscientifique, tout y est ! [...]
    De tant à autres réapparaît sur la toile ce genre de manifeste et la prose toujours aussi scientiste qui va avec, on nous parle même, dans notre époque trouble, où toute la gauche est en mal de théorie politique, du « renouveau du #cyberfémnisme », car le fond de pensée est maintenant bien installé, tellement bien qu’on ne peut plus le remettre en cause sans que tout de suite des sociaux-missiles soit envoyés à la gueule du critiquant : « essentialiste », « réactionnaire », « bio-conservateur », sans oublier les classiques « transphobe » et « anti-féministe » [110]. Alors que, quoi de plus politique que de remettre en cause les idéologies sans pour autant être bassement dénigrant ou moqueur, surtout quand le but est réellement de se mettre en mouvement, pas de fabriquer de nouvelles chapelles, ni d’élever des digues !

    Le torchon est cité dans la note 110. Sachant que la « critique conséquente du capitalisme industriel » que ses auteurs revendiquent leur est inspirée par #Cy_Lecerf_Maulpoix, lequel cite élogieusement le Manifeste Xénoféministe qui prône une réappropriation des technologies les plus avancées afin d’aboutir à une « aliénation émancipatrice » (sic !) et dont le mot d’ordre est « Si la nature est injuste, changez la nature ».

    9. #Matthieu_Amiech, Au Village sans prétention , avril 2024, brochure publiée par les éditions La Lenteur (40 p. disponible à prix libre).

    Ce texte est une mise au point suite à des publications et des attaques sur Internet, qui illustrent de manière caricaturale la réduction que peuvent subir l’information, la réflexion et le débat politiques, quand ils s’enferment sur ce média. L’auteur et la maison d’édition n’ont ainsi pas souhaité publier cette mise au point en ligne, ils préfèrent qu’elle circule simplement sous forme de brochure.

    10. #Aude_Vidal, Sur quelques accusations de fascisme envers le mouvement anti-industriel , juin 2024 .
    https://blog.ecologie-politique.eu/post/Sur-quelques-accusations-de-fascisme-envers-le-mouvement-ant

    Cette critique nous invite à une vigilance qui a parfois manqué dans les rangs anti-indus au moment de publier tel ou tel. Il serait donc regrettable de l’écarter d’un revers de main. Mais, dans le camp des accusateurs, traiter de fascistes un si large panel de personnes et de groupes, écofascistes proches du pouvoir et écologistes plus ou moins conservateurs, rend confus le concept même de fascisme, son autoritarisme, son besoin de boucs émissaires, son service du capital.

    11. Revue L’Inventaire n°14, éd. La Lenteur, automne 2024.

    Même ainsi caviardée, nous n’arrivons pas à voir ce qui pourrait bien gêner dans ces perles, qu’on imagine choisies avec soin. Tous les présupposés sont à rétablir par le lecteur, au risque de commettre un faux pas que s’épargne le polémiste paresseux.

    Je mettrait à jour ce fil à mesure que de nouvelles réponses vont arriver...

    #technocritique #critique_techno #postmodernisme #calomnie #Naufrage_réactionnaire

  • La dérive d’un centre pour mineurs délinquants du Groupe SOS | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/231223/la-derive-d-un-centre-pour-mineurs-delinquants-du-groupe-sos

    La dérive d’un centre pour mineurs délinquants du Groupe SOS

    Tensions parmi les salariés, violences avec les jeunes, absence de formation… Ouvert en 2003 sur le causse de Mende pour éloigner de leur milieu les adolescents placés par la justice, le centre éducatif renforcé Lozère navigue de crise en crise.

    Nicolas Cheviron

    23 décembre 2023 à 16h22

    Mende (Lozère).– Le lieu est isolé, sur un plateau boisé à mille mètres d’altitude, dans le département le moins peuplé de France. C’est sur le causse de Mende que le centre éducatif renforcé (CER) Lozère a ouvert ses portes en 2003. Géré par le Groupe SOS, il offre une mise au vert et un nouveau départ à des ados promis autrement à la prison. S’il peine à fonctionner, aucune crise n’avait cependant atteint la violence de celle que vient de traverser l’établissement.

    Quand il découvre le centre, le 11 juin 2019, Tarik Zail est plein d’enthousiasme. Les locaux sont flambant neufs, avec des chambres individuelles, des espaces communs spacieux et fonctionnels, bien loin de la rusticité de la bergerie réaménagée qui a hébergé le CER pendant les quinze années précédentes. Le cadre est charmant, au milieu des pins. Idéal pour une rupture avec le monde urbain, ses tentations et ses névroses.

    L’optimisme du nouveau directeur est cependant de courte durée. « Rapidement, des choses m’interpellent. Je comprends qu’on est davantage sur de la répression que sur de l’éducation », affirme-t-il. Il y a les sanctions, comme celle « consistant à faire dormir un jeune dehors, sous tente, en plein hiver », note-t-il, ou encore le recours au détecteur de métaux pour fouiller les jeunes. Une pratique réprouvée par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), autorité de tutelle du centre.
    [...]

    https://jpst.it/3w4UG

    #centre_éducatif_renforcé #CER #Groupe_SOS #centre_pour_mineurs_délinquants #protection_judiciaire_de_la_jeunesse #PJJ

  • « Loin de créer un “choc des savoirs”, Gabriel Attal va produire un choc d’ignorance », Pierre Merle, spécialiste des questions scolaires
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/12/19/pierre-merle-specialiste-des-questions-scolaires-loin-de-creer-un-choc-des-s

    La réforme souhaitée par le ministre de l’éducation nationale, Gabriel Attal, sous l’appellation « choc des savoirs », est fondée sur des diagnostics erronés. Première contrevérité, le collège français n’est nullement « uniforme ». En 2022, les collèges publics scolarisent près de 40 % d’élèves défavorisés. Les collèges privés en scolarisent moins de 16 %. Encore ne s’agit-il que de moyenne ! Dans les réseaux d’éducation prioritaire (REP et REP+), la proportion d’élèves d’origine populaire dépasse parfois 70 % alors qu’elle est souvent inférieure à 10 % dans les collèges privés du centre-ville des capitales régionales.

    A cette #ségrégation_sociale interétablissement, à laquelle correspondent des différences considérables de compétences des élèves, s’ajoute, énonce notamment une étude publiée en 2016 par le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco), une ségrégation intraétablissement d’une importance équivalente en raison de la multiplication des #sections bilangues et européennes, des classes à horaires aménagés, des langues rares, etc.

    Vouloir créer des groupes de niveau (faible, moyen, fort) dans des classes déjà homogènes est une triple erreur. D’abord, l’idée (en elle-même bienvenue) de réduire à 15 le nombre de collégiens dans les groupes de niveau d’élèves faibles profitera à des élèves moyens, voire bons, scolarisés dans les collèges très favorisés, au détriment des élèves réellement faibles scolarisés en REP.

    Ensuite, en 2019, une synthèse des recherches publiée par Sciences Po Paris a montré un effet bénéfique de la mixité sociale et scolaire sur les progressions des élèves faibles, sans effet négatif sur les meilleurs. Séparer encore davantage les élèves faibles des élèves moyens et forts ne fera qu’accentuer leurs difficultés d’apprentissage.

    Mixité sociale bénéfique à tous

    Enfin, l’évaluation des expériences de mixité sociale réalisées en France, souligne une note publiée en avril par le Conseil scientifique de l’éducation nationale, se traduit par un accroissement du bien-être de l’ensemble des élèves, y compris celui des élèves favorisés. La mixité sociale favorise aussi le développement des capacités socioémotionnelles, réduit la prévalence des #stéréotypes raciaux et sociaux et, pour les élèves socialement défavorisés, améliore leur insertion professionnelle (note de l’Institut des politiques publiques, publiée en novembre). Autant d’effets bénéfiques à tous les élèves. L’établissement scolaire et la classe sont des petites sociétés. Il faut créer de l’unité, non des groupes de niveau.

    La seconde contrevérité du projet ministériel est d’accréditer l’idée d’un redoublement favorable aux élèves en difficulté. Un large consensus scientifique a montré que cette politique débouche sur un résultat inverse. Le redoublement produit des effets négatifs en termes d’estime de soi, de motivation et d’apprentissages ultérieurs. Les seules exceptions concernent, outre la classe de terminale, les classes de 3e et de 2de dans lesquelles les élèves faibles, en cas de redoublement, sont motivés pour éviter une orientation non choisie.

    Tout comme la création des groupes de niveau, des redoublements plus fréquents pénaliseront les élèves faibles, majoritairement d’origine défavorisée. Alors même que, pour l’école française, le constat principal de l’édition 2022 du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) est l’écart considérable entre le niveau des élèves d’origine défavorisée et favorisée, le ministre Gabriel Attal, loin de créer un choc des savoirs, va produire un choc d’ignorance fondé sur une mise à l’écart encore plus accentuée des élèves les plus faibles.

    Le projet ministériel contient d’autres contradictions. Par exemple, Gabriel Attal souhaite une réforme des programmes et une labellisation des manuels scolaires, non pas en référence avec les cycles actuels de trois ans, mais avec des « objectifs annuels », voire « semi-annuels ». Finalement, après avoir dénoncé une uniformité fantasmée du collège, le ministre veut imposer un rythme de progression identique à tous les élèves alors même que, dès l’âge de 2 ans, les inégalités socio-économiques différencient sensiblement leurs compétences langagières.

    De surcroît, la décision de réformer au plus vite le « socle commun » [de connaissances, de compétences et de culture] signifie que l’expérience des #professeurs, les plus avertis des difficultés des élèves, ne sera pas prise en compte. Gabriel Attal veut renforcer leur autorité et, dans le même temps, a déjà décidé d’une modification des programmes sans même les consulter. Un bel exemple de déni de leurs compétences. Pourquoi, aussi, faut-il changer d’urgence des #programmes déjà réécrits par Jean-Michel Blanquer ? Sont-ils à ce point médiocres ? Et pourquoi la nouvelle équipe ministérielle ferait-elle mieux que l’ancienne ?

    Effets délétères

    Dernier exemple, bien que les résultats de #PISA 2022 montrent une baisse des compétences des élèves en #mathématiques, le ministre a décidé la création, à la fin des classes de premières générales et technologiques, d’une nouvelle épreuve anticipée du bac consacrée aux mathématiques et à la culture scientifique. Le ministre se targue de provoquer un choc des savoirs tout en supprimant une année entière d’enseignement scientifique ! Un projet paradoxal dont la genèse tient à l’absence d’une réelle réflexion sur un problème incontournable : la #crise_de_recrutement des professeurs, particulièrement en mathématiques.

    La réforme Blanquer, en reportant le concours d’accès au professorat de la fin du master 1 à celle du master 2, a réduit l’attractivité déjà insuffisante du métier d’enseignant. Certes, Gabriel Attal souhaite revenir sur cette réforme désastreuse, mais son projet est controversé. Au mieux, une réforme ne s’appliquera qu’à la rentrée 2025. En attendant, le ministre se contente d’expédients tels que le recrutement de #contractuels non formés, choix incompatible avec l’élévation du niveau scolaire des élèves.

    L’analyse du projet ministériel montre les effets délétères des mesures envisagées. Groupes de niveau, #redoublement, fin du collège « uniforme », énième réforme des programmes, renforcement de l’autorité du professeur… ne sont que les poncifs éculés de la pensée conservatrice. Ils ne répondent en rien à la crise de l’école française. En revanche, électoralistes et populistes, ces mesures sont susceptibles de servir l’ambition présidentielle de l’actuel ministre de l’éducation.

    Pierre Merle est sociologue, spécialiste des questions scolaires et des politiques éducatives, et il a notamment publié « Parlons école en 30 questions » (La Documentation française, 2021).

    https://seenthis.net/messages/1031680

    #élitisme #obscurantisme #autorité #école #éducation_nationale #élèves #éducation #groupes_de_niveau #ségrégation #Gabriel_Attal #hétérogénéité #coopération

  • [SDAT] L’ultradroite ne cesse d’étendre son influence, malgré les dissolutions de groupuscules
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/12/18/l-ultradroite-ne-cesse-d-etendre-son-influence-malgre-les-dissolutions_62064

    « Entre 2021 et 2022, se souvient un ancien préfet dans le Sud-Est, le ministère nous a mis une pression incroyable pour multiplier les arrêtés contre les groupuscules d’ultradroite. Les services s’arrachaient les cheveux : on ne trouvait pas de motif juridique valable. Si ces gens-là nous avaient traînés devant les juridictions administratives, nous aurions pris raclée sur raclée. » De l’aveu du haut fonctionnaire, les militants ne « prenaient pas la peine » d’aller jusque-là. Plutôt que ferrailler et engager des procédures, « ils changeaient leur nom, se retrouvaient ailleurs et reprenaient tranquillement leurs activités, qui étaient d’ailleurs difficilement répréhensibles en l’état actuel du droit ».

    Ce cycle de dissolutions et de recréations a conduit les groupuscules d’ultradroite à changer de tactique. Comme l’analysait, en mai 2021, une note de la sous-direction antiterroriste (#SDAT), ils « ont adopté une nouvelle stratégie organisationnelle, en contournant leur #dissolution par la constitution de réseaux locaux ». Ainsi, moins de deux ans après la dissolution de son mouvement, l’ex-leader de L’Alvarium, Jean-Eudes Gannat, a lancé le Mouvement chouan et continue d’être actif dans les sphères ultranationalistes.

    On compte « une petite centaine » de ces groupuscules, actifs sur le territoire et possédant en général leurs propres canaux d’information, notamment sur le réseau russe Telegram, détaille M. Lebourg : Tenesoun, à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), Patria Albigès, à Albi, Furie française, à Toulouse, Lyon populaire ou Les Remparts, dans la capitale des Gaules, L’Oriflamme, à Rennes, Aurora, en Lorraine, Active Clubs, consacrés aux sports de combat…
    Forte tout au plus de quelques dizaines de militants chacune, ces formations « enracinées », selon leur vocable, qu’elles s’inscrivent dans une filiation #catholique_traditionaliste ou #identitaire, affichent des traits semblables : exaltation des traditions françaises, exécration de la modernité, détestation de l’ennemi « antifa », virilisme, entraînement à la boxe ou à la lutte et discours « accélérationistes » autour d’une inévitable « guerre raciale ». « Les groupuscules d’ultradroite se présentent volontiers non comme des agresseurs mais comme des défenseurs (…). Ils se perçoivent bien souvent comme des résistants contre l’armée d’invasion de l’immigration et contre la disparition de la race blanche », estimait la SDAT en 2021.

    De nouveaux profils plus âgés

    Cette nébuleuse ne connaît plus les clivages internes qui l’ont longtemps affaiblie. « La coupure entre “païens” et “cathos” est morte, confirme M. Lebourg. On est sur une tendance à une spiritualité catholique européenne face à l’islam. » Le chercheur note également, aux côtés des bandes urbaines jeunes comme la Division Martel ou les Zouaves, une « pénétration dans la ruralité », avec de nouveaux profils, plus âgés et moins « politisés », comme l’étaient les militants des Barjols, groupuscule dont treize membres ont été jugés, en février, pour des projets d’attentats antimusulmans.

    https://archive.is/CSNE1

    groupes d’extrême droite en France (La Horde)
    https://lahorde.samizdat.net/Combattre-l-extreme-droite-partout-ou-elle-s-implante

    c’est les flics qui ont inventé ultradroite pour les journalistes, ou l’inverse ? ça a le mérite de les distinguer du RN et de Reconquête auquel ces groupes servent de supplétifs et/ou inspirateurs (si ils ont assez lu Renaud Camus).

    #extrême_droite #groupes_locaux

  • Alexis Potschke : « J’ai lu le message du ministre et j’ai peur »
    https://www.cafepedagogique.net/2023/12/12/alexis-potschke-jai-lu-le-message-du-ministre-et-jai-peur

    J’ai lu le message du ministre tout à l’heure, et j’ai peur maintenant, très peur de ce qui vient : ça faisait longtemps que je n’avais pas eu peur comme ça.

    Il y a un passage qui m’a plongé dans une angoisse terrible. Tenez, c’est ce morceau-là :

    « À compter de la rentrée prochaine, les élèves de 6ème et de 5ème seront donc désormais répartis en 3 groupes de niveaux pour leurs enseignements de français et de mathématiques. »

    Ça n’a l’air de rien, comme ça, et quiconque ne sait pas vraiment ce qu’est une classe pourrait même hausser des épaules, trouver cela normal, se dire que j’en rajoute, passer outre. Ah ! ces profs, ils se plaignent tout le temps !

    C’est malgré tout la mise à mort d’une certaine vision de l’enfance. C’est la fin de l’idée des classes hétérogènes ou chacun peut apprendre à chacun et de chacun, où les élèves en réussite peuvent venir en aide aux élèves en difficulté, et où les élèves en difficulté peuvent prendre confiance en eux, s’appuyer sur leurs pairs ; se sentir un peu, de temps en temps, membre d’un groupe qui n’est ni bon ni mauvais, juste un groupe ; savourer leurs prises de parole réussies, travailler ensemble : apprendre des autres et leur apprendre des choses.

    C’est la fin d’un même postulat d’éducabilité. Tous les élèves sont égaux, mais certains sont plus égaux que d’autres ! À dix ans, le rouage se met en marche : les uns à droite, les autres à gauche, le bénéfice du doute pour le ventre mou, tout ça, ça se rangera plus tard. Hop ! On classe, on trie ! Mais ce qu’il faut bien avoir à l’esprit, c’est que c’est pour le pire. Que ça ne marche pas.

    Imaginez-vous, dix ans fraîchement révolus, faire votre entrée au collège. Le couperet est tombé quelques semaines plus tôt, vous ne le saviez peut-être même pas, mais : vous êtes un élève en difficulté. Alors voilà : vos camarades seront des élèves en difficulté. Votre enseignant vous fera des cours pour élèves en difficulté. Vous aurez un emploi du temps d’élève en difficulté. Vous avez dix ans, votre avenir a déjà un nom.

    Autour de vous, aussi : essentiellement des garçons. À cet âge, les groupes de niveaux sont aussi, malheureusement, des groupes de genre.

    Vous ne pourrez pas profiter des remarques brillantes de vos camarades, travailler avec eux, apprendre d’eux : non, ce n’est pas la place qui vous a été assignée. Vous êtes en difficulté. Vous aurez toujours l’impression que vos enseignants vous parlent plus lentement qu’aux autres, et de la suspicion en lisant les appréciations sur votre bulletin.

    Le groupe classe, c’est fini. Bienvenue dans le sépulcre des ambitions. Mais que voulez-vous ? C’est ainsi que fonctionne la fabrique des élites. On vous laissera prendre la forme qu’on attend de vous. Vous n’apprendrez que ce qu’on a décidé de vous apprendre – à vous, parce que vous êtes : en d-i-f-f-i-c-u-l-t-é. Tant pis pour le reste !

    #école #élèves #éducation #groupes_de_niveau #ségrégation

    • On arrive au tri classiste et à la ségrégation mise en place déjà au lycée il y a 10 ans. Ça n’était pas clairement écrit, mais j’ai vu celleux qui avaient une bourse relégués dans des classes différenciées, avec des profs et un programme différent et surtout un discours de la direction à leur égard de type « Ah mais non, tu ne peux pas aller dans cette classe, iels ont beaucoup plus d’assurance que toi. » Et j’aurai aimé vous montrer une photo des classes, de ceux avec l’assurance de leur avenir et celleux qui n’en avaient pas, la différence de leurs fringues, leur façon altière de se tenir, de se sentir bien dans leur peau, de s’échanger leur réseau. Les soldats et leurs maitres.

    • Le groupe le plus performant sera affublé du doux nom de « castor » et avec le second groupe, appelés « les chasseurs », ils formeront l’Arc RIP aux Blicains. Quant aux élèves du troisième (et dernier) groupe dénommé « les sauvageons », ils se verront imposer un SNU à vie avec lever du drapeau en pyjama rayé tous les matins jusqu’au bout de leur vie. Par contre, les ceusses qui appartiennent à l’élite castorienne seront eux exemptés de service national universel et, promus aux mérites de leurs géniteurs, ils pourront aller directement pantoufler dans des cabinets de conseil après avoir obtenu leur bac avec mention.

      #école-caserne #saloperies #privilèges_de_classe #classes_ghettos #Gabriel_Attal #consanguinité #endogamie

    • Plus sérieusement, ceci est la conséquence fatale (dans le sens où ça devait arriver un jour) d’un délitement de l’institution #éducation_nationale initié par Sarkozy et finalisé par Blanquer : effectifs pléthoriques dans les classes. Des missions toujours plus nombreuses assignées aux personnels soumis à un feu roulant d’injonctions contradictoires. Résultats : les enseignants se barrent. Le recrutement se tarit. Les relations entre familles et l’institution deviennent de plus en plus conflictuelles. La hiérarchie (du sommet de la pyramide au plus médiocre sous-fifre) va essayer de dissimuler la poussière sous le tapis avec l’idéologie patriotico-laïcarde mais l’illusion fait rapidement long feu.
      Ce processus fait partie d’un dispositif idéologique qui a fait ses preuves dans les pays anglo-saxons, le fameux « starving the beast ».
      A mon avis, les familles « castoriennes » n’hésiteront pas un seul instant et scolariseront leurs progénitures dans le privé, cette attitude étant déjà une tendance lourde. Quant aux deux autres groupes de niveau, ils s’affronteront sur les bancs de l’école publique, les uns zélateurs impénitents de l’idéologie libertarienne, les autres au mieux regarderont par la fenêtre pour faire passer le temps, au pire mettront le feu aux établissements. On fera croire aux familles « chasseurs » que leurs enfants sont l’avenir de la nation et on les enjoindra de faire régner l’ordre raie-pue-blicain au sein de leurs établissements (en dénonçant par exemple les comportements idéologiquement déviants des familles sauvageo-wokistes.
      L’école a toujours été une interface d’une grande porosité entre la société et le pouvoir. Ça ne fait que se confirmer.
      Mon messages aux (ex) collègues qui y croiraient encore : courage, fuyez ou résistez !

    • Un copain de 40 ans, y-a 10 ans : « mais les budgets n’ont jamais été aussi élevés, faut arrêter de vouloir faire grève ou de dire qu’on n’a pas les moyens ». Les budgets à l’époque augmentaient pour prendre en compte l’augmentation du nombre d’élèves si mes souvenirs sont bons. Mais les profs n’étaient pas remplacés, et le pli était donné. 10 ans plus tard, plus personne ne veut devenir prof.

    • Les élèves du groupe « chasseurs » issus en majorité des familles de la classe moyenne déclassée auront bientôt un joli uniforme et s’ils se tiennent sages, ils pourront effectuer leur SNU aux Antilles (ou tout autre DOM-TOM).
      NB : ces familles « chasseurs » auront plébiscité le RN aux présidentielles de 2027.

    • Les jeunes parents, très écolos et socio-conscientisés qui approchent de la 40aine ont vite mis leurs discours sous le boisseau quand il s’est agit de scolariser leur précieuse progéniture là où les prolos autrement glorifiés n’ont pas d’autres choix que de laisser la leur et les « pédagogies alternatives » ont été là bonne excuse toute trouvée et toute offerte, en vrai, pour justifier leur cavalcade vers le privé, bien moins couteuse, socialement que les stratégies anciennes de contournement de la carte scolaire.

    • Ayant bossé (sur un poste adapté) à Angers avec la crème des pédagos dans « l’ingénierie éducative », les collègues ne se cachaient même pas de scolariser leurs rejetons dans le privé catho, parce que bon, hein, le collège (public) de secteur avait « clairement pas le niveau » ... Bel euphémisme en tout cas.

    • « Les groupes de niveau viennent percuter la motivation et l’estime de soi, et donc la réussite scolaire »
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/12/17/les-groupes-de-niveau-viennent-percuter-la-motivation-et-l-estime-de-soi-et-

      Les économistes Yann Algan [HEC] et Elise Huillery [Dauphine] estiment, dans un entretien au « Monde », que, pour faire face à l’hétérogénéité des niveaux, il faudrait investir davantage dans la formation des enseignants et dans les compétences sociales et comportementales des élèves.

      .... à partir des évaluations de 6e de 2021, 50 % des élèves de classes sociales défavorisées se retrouveraient dans le groupe des élèves faibles contre seulement 13 % des élèves de classes sociales très favorisées. Les inégalités de genre seraient également marquées : le groupe des élèves forts en français compterait 57 % de filles et celui des forts en maths 56 % de garçons.

      https://archive.is/DwC84

      #PISA #économie #pédagogie_verticale #hétérogénéité #coopération

      "un choc d’ignorance"
      https://seenthis.net/messages/1032763