• Les sombres secrets des cartes en #Suisse

    Cartes secrètes, interdictions de vente et retouches : plusieurs mesures ont été prises dans le domaine de la cartographie suisse pour protéger les #secrets_militaires.

    L’Armée suisse a toujours protégé ses installations les plus importantes des regards indiscrets : dépôts de munition dissimulés dans des parois rocheuses, positions d’artillerie camouflées en chalets, usines d’armement entourées de forêts denses et aérodromes militaires encerclés de barbelés.

    Cette discrétion a conduit à des objectifs contradictoires en matière de cartographie : les cartes topographiques censées reproduire la surface de la Terre aussi fidèlement que possible ne devaient toutefois pas trahir les secrets militaires. Au fil des décennies, l’Office fédéral de topographie (aujourd’hui swisstopo) ne cessa d’inventer des moyens de résoudre ce dilemme.

    Deux cartogra­phies, l’une officielle et l’autre secrète

    La production cartographique officielle de la Suisse se scinda en deux dès la fin du XIXe siècle : une section publique et une section secrète. D’un côté, l’Office fédéral de topographie établit la cartographie officiellement en vigueur à ce moment-là, la carte Siegfried, à l’échelle 1:50’000 pour l’espace alpin et 1:25’000 pour le reste du pays. Ces cartes étaient en vente libre.

    De l’autre côté, le Département militaire fédéral (DMF) élabora des cartes à l’échelle 1:10’000 strictement confidentielles répertoriant les fortifications militaires de 1888 à 1952. Contrairement à la carte Siegfried, elles ne couvraient pas l’ensemble du pays, mais se limitaient aux endroits stratégiques comme la région du Gothard ou le Coude du Rhône. L’armée positionnée au sein de ces fortifications militaires avait rapidement besoin de ces cartes, car l’échelle 1:10’000 était indispensable pour calculer avec précision les trajectoires des tirs d’artillerie.

    Pendant la Première Guerre mondiale, la situation hautement dangereuse conduisit le Département militaire à ne plus délivrer la carte Siegfried, auparavant en libre accès, que sur présentation d’une autorisation spéciale, l’objectif étant de compliquer l’accès des espions étrangers aux cartes suisses récentes. Si les restrictions de vente furent levées en 1919, elles réapparurent 20 ans plus tard sous une forme encore plus stricte.

    Peu après le début de la Seconde Guerre mondiale en septembre 1939, le commandant en chef de l’Armée suisse Henri Guisan constata « que certains manifestaient un intérêt pour les cartes suisses qu’il convenait de surveiller ». Cette observation ne tombait pas du ciel : l’état-major suisse avait déjà soupçonné la Wehrmacht en mai 1939 de commander des cartes suisses via une adresse de couverture à Berlin.

    Henri Guisan s’inquiétait par ailleurs du fait que les réserves de cartes suisses « ne suffisent pas pour répondre aux besoins exceptionnels de réapprovisionnement, ni même pour fournir un second lot de nouvelles cartes aux états-majors et unités autorisés. » Pas de guerre possible sans connaissance du terrain : toute carte disponible devait donc être réquisitionnée et remise à l’armée au nom d’une stratégie défensive.

    En octobre 1939, le Conseil fédéral réagit à la pénurie de cartes et au problème de la confidentialité en interdisant la vente et l’exportation des cartes de la Suisse à l’échelle 1:1’000’000 ou supérieure. La reproduction d’informations cartographiques fut également interdite dans les livres, les journaux et même sur les cartes postales. Ces mesures, qui revenaient à une opération de grande envergure de censure des cartes, ne furent levées qu’à l’été 1945, à la fin de la guerre.

    Des données classées secrètes pendant la Guerre froide

    La stratégie de traitement des données spatiales sensibles changea après la Seconde Guerre mondiale. La production des cartes confidentielles des fortifications fut interrompue en 1952 et aucune nouvelle interdiction de vente ne fut prononcée pour les cartes officielles : la carte Siegfried et la carte nationale qui lui succéda à partir de 1938 furent disponibles à partir de 1945 en version intégrale et en vente libre. Ce changement était dû à la paix retrouvée en Europe, mais aussi au constat que les interdictions de vente n’empêchaient guère les autres Etats de se procurer les cartes souhaitées.

    Après 1945, la stratégie de confidentialité cartographique consista plutôt à dissimuler de manière ciblée les installations militaires importantes. Les aérodromes militaires, barrages antichars, usines d’armement et autres équipements stratégiques disparurent des cartes.

    Avec ou sans chalet ?

    Une fois les objets sensibles rayés de la carte, la question de la confidentialité semblait a priori réglée. Or des discussions enflammées éclatèrent pour décider de ce qu’on devait dissimuler ou non.

    Dans les années 1970, un groupe d’objets posa un véritable casse-tête : dans le cas des installations militaires camouflées en équipements civils, par exemple une position d’artillerie dissimulée derrière une façade de chalet, la confidentialité cartographique pouvait induire le contraire de ce qui était visé. Si, sur place, un espion apercevait un chalet qui ne figurait pas sur la carte, cela le désignait d’autant plus comme objet militaire. C’est pourquoi ces installations retrouvèrent leur place sur les cartes à partir de 1978.

    L’année 1978 marqua non seulement l’apparition d’un élément sur la carte, mais aussi la disparition d’un autre. Dans les années 1970, le risque d’attentats terroristes avait considérablement augmenté en Suisse. Les conduites forcées des centrales hydroélectriques furent donc rayées des cartes afin que leur représentation ne facilite pas les actes de sabotage. Cette dissimulation fut maintenue jusqu’au tournant du siècle.

    Déjà pendant la Guerre froide, certains commencèrent à émettre des doutes sur l’efficacité de la dissimulation cartographique. C’est finalement une avancée technologique qui fut à l’origine d’un changement de pratique : vers 1990, la télédétection par satellite était si aboutie que cela avait de moins en moins de sens de dissimuler des objets sur une carte. S’obstiner dans cette pratique aurait même pu se révéler contre-productif en attirant l’attention précisément sur les objets manquants sur la carte.

    Par conséquent, de nouvelles ordonnances et directives basées sur un principe de visibilité furent adoptées à partir de 1991. Cela signifiait que si des installations étaient visibles à la surface de la Terre, elles devaient figurer sur une carte. Ce principe s’avéra bel et bien valable puisqu’il est encore appliqué aujourd’hui.

    https://www.watson.ch/fr/blogs/suisse/214417070-les-sombres-secrets-des-cartes-en-suisse

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    via @reka

  • Ich war Stalins Spionin in den USA
    https://web.archive.org/web/20161220162139/http://www.zeit.de/1950/22/ich-war-stalins-spionin-in-den-usa/komplettansicht

    Hede -MassingEisler, Julian Gumperz, Richard Sorge et Gerhard Eisler sont tous connectés à Agnes Smedley, la journaliste qui a fait connaître au américains les communistes chinois et la lutte du peuple chinois pour sa libération.

    Wikipedia - Hede Massing
    https://de.wikipedia.org/wiki/Hede_Massing

    1.6.1950 von Hede Massing - Die geschiedene Frau des Kommunistenführers Gerhard Eisler enthüllt – 1. Verliebte Weltstaat-Träume

    Hede Massing, die in Amerika lebende Verfasserin unserer heute beginnenden Veröffentlichungsreihe, hieß einmal Hede Eisler und war die Frau jenes ostzonalen Propagandaministers Eisler, der gegenwärtig, indem er von Stalin redet, soviel von sich selbst reden macht. Während Gerhard, sobald dessen Umtriebe in Amerika bekannt wurden, zum Staatsfeind Nummer Eins „aufrückte“, lebte Hede in aller Zurückgezogenheit auf einer Farm in Pensylvania und suchte zu vergessen, daß sie einst eine rote Spionin gewesen war. Gerhard Eisler gelangte aus Amerika, wohin er vor Jahren emigriert war, auf abenteuerliche Weise nach Ostdeutschland, wo er alsbald sein prominentes Amt erhielt. Hede – wider Willen in den amerikanischen Prozeß gegen Alger Hiss hineingezogen – sah ein, daß sie nicht vergessen war und daß sie nicht länger schweigen konnte. Sie fühlte die Verpflichtung, aufzuklären und zu warnen. Sie enthüllt...

    Es sind nahezu neun Jahre gewesen, in denen ich als Geheimagentin der Auslandsabteilung des sowjetischen Systems, damals unter der Bezeichnung GPU bekannt, tätig war. Die ersten Jahre waren eine Art Lehrzeit, die ich zum Teil in Moskau durchmachte, doch führte ich gelegentlich auch Aufträge in verschiedenen europäischen Hauptstädten aus. Die letzten vier Jahre, von Oktober 1933 an bis zum Jahre 1937, war ich in den Vereinigten Staaten als selbständige Spionin beschäftigt. – Mit tiefem Bedauern schreibe ich heute diese traurigen Geschehnisse nieder, mit denen ich die besten Jahre meines Lebens vergeudete. Mit Bedauern, doch nicht mit Scham! Denn, was ich tat, das tat ich nicht aus niedriger Bosheit oder aus Geldgier. Ich folgte damals der Stimme meines Gewissens. Ich folge ihr auch heute, indem ich meine Geschichte der Öffentlichkeit unterbreite.

    Menschen wie ich arbeiteten glühend vor Stolz. Wir waren damals der Überzeugung, daß wir die „Menschheit retten“ müßten, und glaubten, wir hätten das Recht, außerhalb der gewöhnlichen Moralgesetze zu stehen. Dazu kam, daß die ganze Atmosphäre unserer Verschwörertätigkeit: die angenommenen Namen, die heimlichen Zusammenkünfte, das geheimnisvolle Kommen und Gehen von Abgesandten Moskaus, uns ständig in innerer Erregung hielten. Wir betrachteten uns niemals als Spione und Agenten im schmutzigen Sinne des Wortes. Wir fühlten uns als stolze und – ergebene Mitglieder einer weltumspannenden „Organisation“, als zuverlässige Soldaten der kommenden „Revolution“, als treue Angehörige der weltumspannenden Sowjetunion der Zukunft. Doch eines Tages fühlte ich auch, daß Amerika mir lieb geworden war. Ich spürte, daß ich, wenn ich für Moskau spionierte, mein Adoptiv-Vaterland Amerika verriet. Und es gelang mir, mich aus den Netzen der Spionage zu befreien. Von da ab lebte ich ruhig und friedlich auf meiner Farm bei Quakertown in Pensylvania, überzeugt, daß meine Vergangenheit begraben und vergessen sei. Viele meiner neuen Freunde hatten keine Ahnung, daß ich jemals Kommunistin oder gar Mitglied einer Spionagezentrale gewesen war. Selbst die unbestimmte Furcht, daß die Sowjets sich an mir rächen könnten, hatte aufgehört mich zu quälen.

    Da plötzlich kam der Alger-Hiss-Skandal und schleuderte mich ganz gegen meinen Willen in das Rampenlicht der Öffentlichkeit. Kaum hatten die Verhandlungen vor dem Großen Schwurgericht Ende 1948 begonnen, als ich von den Zeitungen als die „geheimnisvolle Frau hinter den Kulissen“ bezeichnet wurde. Im zweiten Prozeß gegen Hiss, der kürzlich vor einem Bundesgerichtshof in New York durchgeführt wurde, hatte ich dann über meine einzige Begegnung mit dem angeklagten Beamten des Außenministeriums als Zeugin auszusagen. Als ich jedoch zum erstenmal die Nachricht von den Anklagen gegen Hiss hörte, war ich ganz verzweifelt. Mein geliebtes Leben der Einsamkeit in Gefahr! Ich versuchte, meine Vergangenheit verborgen zu halten und höchstens das auszusagen, was im unmittelbaren Zusammenhang mit dem Hiss-Drama bestand. Dann aber, da ich einsah, daß mein Geheimnis gelüftet war, wurde mir klar, daß es meine Pflicht sei, alles zu sagen, was ich wußte. Mir kam der Gedanke, daß ich auf diese Weise dazu beitragen könnte, vergangenes Unrecht wiedergutzumachen.
    Die geheime Bruderschaft

    Einige der Ereignisse dieser meiner Geschichte sind blutig genug. Zum Beispiel starb mein erster Spionagechef in Amerika eines gewaltsamen Todes in New York. Der legendenhafte „Ludwig“, der europäische Meisterspion, der mich in die geheime Bruderschaft eingeführt hatte, vurde in der Schweiz von seinen eigenen Agenten auf Befehl Moskaus in eine Falle gelockt und erschossen. Einige andere, deren Wege den meinen bei meiner Tätigkeit in der „Untergrundbewegung“ kreuzten, fielen einer „Säuberung“ zum Opfer oder entgingen ihren Henkern nur durch Selbstmord. Wenn ich auch nur eine ganz gewöhnliche Agentin war, so haben doch nur wenige so tiefen Einblick in die Tätigkeit der GPU erhalten wie ich. Und nur wenige von jenen unter ihnen, die sich von der Organisation losgesagt haben, sind am Leben geblieben ...

    Übrigens muß ich betonen, daß das Leben eines Sowjetspions nicht ausschließlich aus romantischen Verkleidiungs- und Mordaffären besteht. Meine eigenen Erfahrungen gewann ich für meinen Teil hauptsächlich aus dauernder Kleinarbeit, die mehr Geduld als Mut, mehr einfache Schlauheit als hohe Strategie verlangte. Ich half zum Beispiel bei der Herstellung von falschen amerikanischen Pässen für unsere Mitarbeiter im Ausland. Oder ich überwachte einen New Yorker Zeitungsmann, dessen Treue und Verläßlichkeit Moskau gegenüber von der GPU geprüft wurde. Ungefähr ein dutzendmal mußte ich plötzlich als Kurier nach Europa fahren mit einem wertvollen Paket von Filmen, die ick am Leibe versteckt trug. In erster Linie erwartete man von mir, die ich eine Amerikanerin mit einem großen Bekanntenkreis in den sogenannten liberalen Bezirken von New York und Washington war, daß ich Leute, die mit den Sowjets sympathisierten, zu aktiver Mitarbeit an der Untergrundbewegung überredete. „Kontakt pflegen“ war der Ausdruck, den wir dafür in amtlichen Berichten verwendeten. Abgesehen von meinen unmittelbaren Vorgesetzten – stets waren es Russen mit Codenamen – durfte ich nur wenige Mitglieder meiner Organisation kennenlernen. Dezentralisierung ist das erste und strengste Gesetz für die Spionagearbeit. Und da ich ein kleines Rädchen in einer großen Maschine war, konnte ich nicht immer verstehen, wie meine Aufgaben in die größeren Pläne hineinpassen sollten. – Doch, um alles klarzumachen, muß ich wohl ganz von Anfang an beginnen, mit meiner eigenen Vergangenheit und jenen Vorgängen, durch die ich in das phantastische Labyrinth der kommunistischen Unterwelt hineingezogen wurde. Es war die Liebe zu einem jungen Mann namens Gerhard Eisler.

    Wien vor dem ersten Weltkriege war eine fröhliche, leichtlebige Stadt, doch in der Familie, in die ich vor 50 Jahren hineingeboren wurde, herrschte wenig von dieser Fröhlichkeit. Ein Paar, das schlechter zusammenpaßte als meine Eltern, kann man sich auch kaum vorstellen. Mein Vater, Philipp Tune, war ein fescher, halbgebildeter Zirkusreiter, dabei katholisch. Meine Mutter war eine unscheinbare, sanftmütige Jüdin mit einer guten Erziehung. Sie hatte den gutaussehenden Polen auf einem Jahrmarkt auf dem Lande in der Nähe von Lemberg kennengelernt, und er war ihr nach Wien gefolgt. Meine Mutter hatte gerade soviel Einkommen, daß sie ihren Mann, der nicht arbeiten wollte, unterhalten und ihre drei Kinder ärmlich durchbringen konnte. Es gab keinen Tag, an dem sie nicht unter den Liebesaffären, dem Trinken und dem Glücksspiel unseres Vaters zu leiden hatte. So lag ein Schatten auf meiner Kinheit und ließ mich auf meine Freunde neidisch werden, die unter normalen Familienverhältnissen lebten.

    Als ich ungefähr vier Jahre alt war, wanderten wir nach Amerika aus. Ein Restaurant, das meine Mutter in Fall River, Massachusetts, eröffnete, brachte nichts ein, weil ihr Ehemann bei seiner Trunksucht ihr bester Kunde war. Um sich und ihre Familie durchzuschlagen, arbeitete meine Mutter alsdann in einer Fabrik in New York. Ich habe eine dunkle Erinnerung an die ersten Schulklassen in einer Schule im Osten der Stadt, bevor wir nach Wien zurückgingen.

    Ja, wir gingen nach dreijährigem Amerika-Experiment nach Wien zurück. Als junges Mädchen besuchte ich sowohl die katholische als auch die jüdische Sonntagsschule. Ich sang im Kirchenchor, doch alle meine jugendlichen Träumereien drehten sich um eine Laufbahn als Schauspielerin. Tatsächlich gewann ich noch als Backfisch ein Stipendium am Konservatorium in Wien und verdiente mir bald ein Taschengeld durch Singen und Deklamieren bei privaten Veranstaltungen. Mein Vater ließ seine Familie schon während des ersten Weltkrieges im Stich. Meine arme Mutter aber beweinte den Taugenichts bis an ihr Lebensende – bis sie in Hitlers Todeskammern von Auschwitz während des letzten Krieges Erlösung fand ...

    Als der erste Weltkrieg zu Ende gegangen, war ich zu einem großen, rötlichblonden Mädchen herangewachsen, stark beschäftigt mit meiner eingebildeten Theaterkunst. Dann lernte ich in einem Wiener Kaffeehaus Gerhard Eisler kennen, und damit war mir mein Leben vorgezeichnet.

    Obgleich Gerhard erst Anfang der Zwanziger war, genoß er bereits einen ausgezeichneten Ruf unter seinen linkspolitisch gerichteten Freunden. Er galt als ein begabter Poet, Dramatiker und Redner. Was aber wichtiger war –: er genoß den Ruhm, daß er als Oberleutnant wegen ungesetzlicher revolutionärer Agitation degradiert worden war.

    In der ersten Zeit war er mehr mein älterer Bruder als mein Liebhaber. Nachdem er von meinem elenden Leben zu Hause gehört hatte, nahm er mich mit meiner gesamten Habe in seinem bürgerlichen Haushalt auf. Die alten Eislers, gute Menschen und große Bücherfreunde, erwiesen mir all die Liebe, nach der ich mich sehnte. Bald aber wurde Gerdi, wie wir ihn nannten, zu größeren Aufgaben berufen. Er. wurde einer der Führer der sich schnell entwickelnden kommunistischen Partei Deutschlands und Herausgeber ihres amtlichen Organs, der „Roten Fahne“ in Berlin.
    ABC des Kommunismus und der Liebe

    Unsere Heirat im Jahre 1920 bedeutete für seinen Kreis ein Entgegenkommen. Ich war eine junge Frau, die den Lippenstift benutzte und elegante Hüte liebte, und ich schien schlecht ins kommunistische Hauptquartier zu passen. Die Männer verwöhnten mich, die Frauen ärgerten sich über mich. Aber für mich war’s erregend, daß ich mich plötzlich inmitten dieser leidenschaftlichen Welt von Kameradschaft, Intrigen und revolutionärem Pläneschmieden befand.

    Für mich wurde die „Bewegung“ geradezu ein Ersatz für Religion. Obgleich ich wenig über den Kommunismus wußte, hatte ich ein Gefühl idealer Zugehörigkeit. Ich lernte genug vom marxistischen Jargon, um mich an der Unterhaltung beteiligen zu können. Revolutionen haben mehr, mit dem Herzen als mit dem Verstände zu tun! Wir waren nicht umsonst überzeugt, daß wir die Welt mit unseren bloßen Händen ändern könnten ... Ich erinnere mich, daß Gerhard versuchte, mich das „ABC des Kommunismus“ auswendig lernen zu lassen. Er gab diese hoffnungslose Angelegenheit bald wieder auf. Unsere Ehe dauerte vier Jahre und endete allmählich ohne Bitterkeit. Gerhard heiratete später meine jüngere Schwester Elli, die heute noch in Stockholm behauptet, seine gesetzliche Frau zu sein. Inzwischen hatte ich einen in Amerika geborenen Deutschen liebgewonnen, einen wohlhabenden jungen Nationalökonomen und Verlagsbuchhändler, namens Julian Gumperz. Bald darauf heirateten wir. Dr. Gumperz war der Besitzer des „Malik-Verlages“, des nichtamtlichen kommunistischen Verlagshauses. Wir richteten auch unter man er Leitung den „Malik-Buchladen“ ein, der bei den politisch linksgerichteten Intellektuellen zu einem guten Ruf gelangte. Im gewissen Sinne war er mein „Salon“. Erst viel später wurde es mir klar, daß er auch einen bequemen Treffpunkt für Sowjetagenten in Berlin abgegeben hatte.

    Es war im Jahre 1926, daß wir nach den Vereinigten Staaten gingen. Wir blieben dort nahezu zwei Jahre, wo Julian Material für ein soziologisches Buch sammelte. Dieser Besuch erwies sich als entscheidend für mein zukünftiges Leben. Als erstes erwarb ich als die Frau eines geborenen Amerikaners das amerikanische Bürgerrecht – sechs Jahre später mein nützlichster Besitz. Dann erwarb ich mir Dutzende von amerikanischen Freunden, bevor wir nach Deutschland zurückkehrten. Gerhard Eisler blieb für mich eine Art älterer Bruder in all den Jahren nach unserer Scheidung. Und ich muß es ihm heute noch hoch anrechnen, daß er sich die größte Mühe gab, mich aus der Spionage herauszuhalten. Nicht, weil er es im Prinzip verurteilte, sondern einfach deswegen, weil er mich für diese Art von Leben für ungeeignet hielt. Während der Jahre 1923 bis 1925 hatte Gerhard in bitterem Kampfe mit der deutschen kommunistischen Führung unter Ernst Thälmann gestanden. Im Jahre 1928 war es zur Krise gekommen, als Moskau sich auf die Seite Thälmanns stellte und Eisler tatsächlich eine Zeitlang aus dem Zentral-Komitee ausgeschlossen wurde. In diesem Kampf waren alle Mittel recht. Ein Anhänger Thälmanns zum Beispiel war in unser Heim eingeschlichen und hatte Privatpapiere gestohlen. Als er überrascht wurde, sprang er aus einem Fenster des zweiten Stockwerks. Der Verbrecher war Heinz Neumann, später ein Günstling Stalins und – wie alle seine Günstlinge – vom Schicksal dazu verurteilt, in einem GPU-Keller in den Jahren der „Säuberung“ zu sterben ... Obgleich wir in späterer, langer Zeit uns politisch weltenfern voneinander entfernten, kann ich mich nicht dazu entschließen, in Eisler die unheilvolle Gestalt zu sehen, als die er sich heute darstellt. Ich glaube, daß sich hinter der Maske eines stalinistischen Beamten immer noch ein in seinen Erwartungen enttäuschter und unglücklicher Künstler verbirgt. Wäre er nicht durch seine Hingabe an den Kommunismus verdorben, hätte er ein großer Schriftsteller und ein nützlicher Mensch werden können. – Vor einigen Jahren erblickte ich ihn, zum erstenmal seit zehn Jahren, durch ein Fenster in einem Broadway-Restaurant, wo ich gerade saß. Er schleppte sich mühsam dahin wie ein Gespenst aus meiner Vergangenheit –: ein beklagenswerter in Gedanken versunkener kleiner Mann in ungebügeltem Anzug, seine Taschen wie immer vollgepfropft mit Papieren und Flugschriften. Er kam mir furchtbar kläglich vor, und mit einem Herzen voll Mitleid verfolgte ich seine Schritte. Wie wird es ihm einst ergehen? Episoden wie Gerhards frühere Herausforderung Moskaus werden dort niemals ganz vergessen oder vergeben sein. Sie bleiben als schlechte Noten in seiner Personalakte. Ich war nicht überrascht, als er kürzlich einen „scharfen Verweis“ von seinen Vorgesetzten erhielt, und ich werde nicht überrascht sein, sollte er tragischerweise eines Tages hinter dem Eisernen Vorhang sein Ende finden ...
    Agentin niederen Grades

    Vor einigen Monaten hat General MacArthurs Hauptquartier in Tokio einen sensationellen Bericht über die Sowjetspionage im Fernen Osten vor und nach dem Kriege veröffentlicht. Die Hauptperson in diesem Bericht ist eine fast schon legendäre Gestalt im internationalen Ränkespiel, ein Dr. Richard Sorge, den die Japaner fingen und hingerichtet haben. Als ich auf meiner Farm in Pensylvania hierüber las, erinnerte ich mich auf das lebhafteste an meine Einführung in die Sowjetuntergrundbewegung. Julian Gumperz und ich hatten Sorge jahrelang als einen ruhigen gelehrten Kameraden gekannt. Später hörten wir, daß er am Marx-Engels-Institut in Moskau arbeitete.

    Gegen Ende des Jahres 1929 besuchte er uns in Berlin und überbrachte Grüße von einem jungen Deutschen, Dr. Paul Massing, der damals in Moskau lebte, und in den ich mich bis über die Ohren verliebt hatte. Dr. Sorge deutete damals an, daß man größere Dinge mit mir vorhabe. Er fragte mich, ob ich wohl zunächst zwei Kameraden, die gerade von Moskau gekommen seien, unter meine Obhut nehmen wolle. Ich sagte zu. Obgleich bei dieser meiner Aufgabe die ausgesuchtesten Vorsichtsmaßregeln angewandt wurden, war sie reichlich prosaisch. Ich hatte nur die zwei Leute mit europäischer Kleidung auszustatten sowie Gepäck und sonstigem Zubehör, so daß sie bei ihrer Ankunft in England nicht als Russen erkannt würden. Dr. Sorge stellte mir noch einige ziemlich unwichtige Aufgaben, die ich ausführte, ohne zu merken, daß ich für eine größere Sache geprüft und vorbereitet wurde. „Wir haben dich lange beobachtet, Hede“, sagte er schließlich. „Wir wollen dich mit einem sehr bedeutenden Mann der Partei bekannt machen.“ Ich hatte keine blasse Ahnung, was das „wir“ bedeute. Selbst nachdem ich eingefangen worden war, ist mir niemals ausdrücklich gesagt worden, daß es die GPU sei. Die Spione der niederen Grade kennen nämlich nur ihre nächsten Mitarbeiter, und je weniger Menschen um so besser. Alles darüber hinaus wird in Nebel und Dunkel gehalten. Meine romantische Seele aber wurde durch eine Vorahnung von Abenteuern erregt ... Jeder Kommunist ist sich darüber klar, daß unter der äußeren Schale der Partei sich ein riesiges unterirdisches Gebiet befindet, wo die wirkliche und gefährliche revolutionäre Arbeit geleistet wird. Ich hatte das Gefühl, daß ich drauf und dran war, in diese verbotenen geheimnisvollen Regionen eingeführt zu werden.

    Sorge geleitete mich zu der Zusammenkunft mit dem „wichtigen Kameraden“. Der ganze Vorgang wurde mit einem geheimnisvollen Dunkel umgeben. Wir wechselten mehrfach die Droschken – „um etwaige Verfolger abzuschütteln“ – und landeten schließlich in dem Hinterzimmer eines abgelegenen Kaffeehauses. Ich traute meinen Augen nicht und fing an zu lachen. Nach diesen langen dramatischen Vorbereitungen stellte es sich heraus, daß der Mann, der uns erwartete, einer meiner Lieblingskunden in dem Buchladen war, den ich jahrelang geleitet hatte.

    Er war ein kleiner dicklicher Mann in der Mitte der Dreißig, mit blauen Augen und einem ansteckenden Lächeln. Ich hatte ihn immer nach seinem Äußeren für einen freundlichen, gutbürgerlichen Menschen gehalten. Er war häufig in meinen Laden gekommen und hatte besonderes Interesse für Erstausgaben. Manchmal verschwand er für Monate, und ich freute mich immer, wenn ich ihn wiedersah. Wir sprachen über alles, außer über Politik. Ich war nie auf den Gedanken gekommen, daß er ein Kommunist sein könnte, und wirklich schien er mir alles andere eher zu sein, als was ich mir unter einem Verschwörer vorstellte. Tatsächlich aber war er damals der bedeutendste Agent der GPU in Europa; er blieb es bis 1937 ...

    „Nennen Sie mich Ludwig“, sagte er. Wir wurden enge Freunde, aber bis zu seiner neun Jahre später erfolgten Ermordung erfuhr ich nie, wie er wirklich hieß.

    In den folgenden Monaten sah ich Ludwig sehr oft. Gelegentlich unserer ersten Zusammenkunft hatte er mich um die Vorbereitung von Berichten auf Grund einer langen Liste von Menschen meines Kreises gebeten. Das einzige, was er in bezug auf meine zukünftige Aufgabe verlauten ließ, waren gelegentliche Bemerkungen, daß „unsere Arbeit“ nicht nur Amt, sondern auch Haltung, Grazie und weibliche Reize erfordere ... (Wird fortgesetzt.)

    Ich war Stalins Spionin in den USA - II. Vorsichtige Agenten-Schulung
    https://web.archive.org/web/20190812111623/https://www.zeit.de/1950/23/ich-war-stalins-spionin-in-den-usa/komplettansicht

    8.5.1950 von Hede Massing - Hede Massing, die einst als Frau des heutigen ostzonalen Propagandaministers Gerhard Eisler von diesem selbst in die Geheimlehre des internationalen Kommunismus eingeführt wurde, bereut nichts so sehr, als daß sie jahrelang Stalins Spionin in den Vereinigten Staaten war. Zur Warnung der zivilisierten Welt enthüllt sie, was sie weiß, und berichtet, was sie erlebte. Die „Zeit“ begann (in Nummer 22 vom 1. Juni) die Veröffentlichung ihrer Enthüllungen mit der Darstellung, wie Hede Massing, nachdem sie in überaus traurigen Verhältnissen zu Wien aufgewachsen, den Mann kennenlernte, der, wie sie schrieb, „ihr Schicksal wurde“. Ihre Ehe mit Eisler wurde jedoch geschieden, sie heiratete einen anderen Kommunisten, den „Malik“-Verleger Julian Gumperz. Schon tauchte ein dritter Mann auf: der in Moskau lebende Paul Massing. Endlich wurde sie für reif gefunden, in den Kreis der Eingeweihten Einblick zu nehmen. Sie sah den „Meisterspion“ der Sowjets, den geheimnisvollen Agenten, der keinen Namen, nur einen Vornamen hatte: „Ludwig“, und so geriet sie von Auftrag zu Auftrag tiefer ins Netz ...

    Wann immer ich es wagte, neugierige Fragen zu stellen, betonte Ludwig, wie weise es sei, nicht zuviel zu wissen. Er lehrte mich, daß ich niemals Verabredungen am Telefon treffen solle, es sei denn in geheimer Code-Sprache. Er zeigte mir Schliche, wie man der Polizei entgeht, wenn man verfolgt wird. Er lehrte mich hundert andere Dinge, die mir dann allmählich zur zweiten Natur wurden ... Ludwig fand heraus, daß Julian und ich im Begriff waren, uns zu trennen. Aber als ich ihm meinen Wunsch anvertraute, Paul Massing in Moskau zu treffen, versuchte er mich davon abzubringen. Später versuchten auch Dr. Sorge und Gerhard Eisler, mir diese Reise auszureden. Offenbar glaubten diese erfahrenen Männer, es sei das Beste für eine junge Schwärmerin, nicht einen allzu tiefen Einblick in die sowjetische Wirklichkeit zu tun. Ich machte mich dennoch auf die Reise. Während der fünfzehn Monate, die ich in Moskau verbrachte – vom Januar 1930 bis Frühling 1931 –, begann ich, ihre Befürchtungen zu verstehen. Meine Erfahrungen waren schmerzlich und ernüchternd.

    Es war die Zeit der Kollektivierung und des ersten Fünfjahresplans, der Massenverhaftungen und des Hungers. Das Maß all dieses Elends war zu offenbar, als daß selbst freundlich gesinnte Ausländer es übersehen konnten. Eine Zeitlang gab ich erwachsenen Deutschen klassenweise Unterricht. Ich war bestürzt über das verlegene und eisige Schweigen, das meine begeisterten Lobpreisungen der Herrlichkeiten unseres sowjetischen Vaterlandes fanden. Einen der schwersten Schläge aber erteilte mir – freilich ohne es zu wissen – der United Press-Korrespondent Eugene Lyons, den ich von New York her kannte. Er erzählte mir vom bolschewistischen Terror, der in den Dörfern herrschte. Ich war erschüttert und sprach mit „Ludwig“, der soeben in der Sowjet-Hauptstadt eingetroffen war. Er verbot mir, die Familie Lyons je wieder zu besuchen. Auch Gerhard Eisler kam in dieser Zeit nach Moskau, und auch ihm vertraute ich meine wachsenden Zweifel an. Mit der Offenheit des gewesenen Ehemannes gab er seiner Überzeugung Ausdruck, daß ich viel zu harmlos und leichtgläubig sei, um zu begreifen, daß die „großen Experimente“ von Natur aus blutige Angelegenheiten seien und keine Fünf-Uhr-Tee-Angelegenheiten. – Nur diejenigen, die ebenso wie ich Kommunist waren, werden verstehen, warum ich, trotz meiner Zweifel, mich nicht lossagte. Ich war an die Partei gefesselt mit tausend Banden der Treue, hochgespannten Hoffnungen und – aus reiner Gewohnheit. Zugleich sah ick in Deutschland den Hitlerismus hochkommen. Nun hielt ich es erst recht für häßliche Fahnenflucht, wenn ich meinen deutschen Kameraden die Treue bräche. Nach und nach verschwamm auf diese Weise das wirkliche Rußland vor meinem geistigen Auge, und ein nur in der Einbildung vorhandenes „Land der proletarischen Freiheit“, das Sinnbild unserer Träume, nahm Besitz von meinem Denken und Empfinden.

    Nach Berlin zurückgekehrt wurde unter der vorsichtigen Leitung von „Ludwig“ mein „Austritt“ aus der Partei organisiert. Ganz allmählich, soweit dies möglich war, brach ich die Beziehungen auch zu den hervorragenderen Kommunisten ab, von denen, wie ich hörte, einige nicht wenig murrten über „Hedes eigenartiges Abrücken von der aktivistischen Arbeit, und dies zu einem Zeitpunkt, da der Kampf begann, am heißesten zu werden...“

    Wegen der sich verschlimmernden Nahrungsmittellage in Rußland entschlossen sich damals meine Freunde Louis und Markoosha Fischer, ihre beiden kleinen Söhne in einer Berliner Schule unterzubringen. Ich sollte als „Ersatzmutter“ einspringen und die Kinder versorgen. Ein dritter Junge, der Sohn von Felix Silberstein, dem Vertreter von Ludwig, kam später noch dazu. Ludwig war entzückt. Keine Geheimpolizei der Welt würde auf den Gedanken kommen, daß eine „Hausfrau“ mit drei ihr anvertrauten Kindern überwacht werden müsse! Indem machte sich diese „Hausfrau“ eifrig an ihre geheime Aufgabe. Sie hieß: Anwerbung von Agenten für unsere Arbeit. Es war dies eine Geduldsprobe und eine Erziehung zur Vorsicht, die sich zu gegebener Zeit in Amerika bezahlt machen sollte.

    Wenn sie sich für einen neuen „Fall“ interessierten, bestanden Ludwig und Felix Silberstein darauf, die geringfügigsten Einzelheiten der Lebensgeschichte unseres Anwärters, alle Details über seine Familie, seine Gewohnheiten und kleinen Schwächen zu erfahren. Das verlangte diskrete Nachforschungen, lange Unterhaltungen mit dem Opfer und eine Menge mündlicher und schriftlicher Berichte. Einen „Anwärter“ reif zur „Zusammenarbeit“ zu machen, erforderte große Geschicklichkeit und Erfahrung. Man mußte sich überlegen, ob man sie bei ihrem etwa vorhandenen Idealismus oder ihrer Habgier, bei ihrer Eitelkeit oder ihrer Machtgier zu packen hatte.
    Ich war Stalins Spionin in den USA – Seite 2

    Einmal wurde ich nach Wien befohlen mit dem Auftrag, täglich zu einer bestimmten Stunde in einem bestimmten Restaurant zu sein und mich bereit zu halten. Ich begrüßte diese Reise als eine lang entbehrte Gelegenheit, meine Mutter wiederzusehen. Zugleich war ich neugierig auf das, was sich ereignen würde. Ludwig fuhr mit, er, den ich bewunderte und dessen Urteil ich unbedingt vertrauen durfte, eine Tatsache, die später bei meinem schließlichen Bruch mit dem Stalinismus eine Rolle spielen sollte. Diesmal sollten er und ich schnell ein einsames Versteck in einem Wiener Vorort ausfindig machen, wo die Aufstellung einer Radioantenne kein Aufsehen erregen würde. Ein Jugendfreund von mir half uns dabei. Er besaß zufällig genau das Landhaus, das wir brauchten. Ich hatte mir den Platz bereits angesehen, bevor ich an ihn herantrat. Doch ach, mein Freund war kein Held. Es kostete meine ganze Überredungskunst, ehe er sich unter dem Eindruck einverstanden erklärte, daß es sich um eine edle antifaschistische Aufgabe handle. Nachdem ich ein Zusammentreffen zwischen ihm und Ludwig, der natürlich einen angenommenen Namen trug, verabredet hatte, war meine Rolle ausgespielt; ich fuhr zu den drei Kindern nach Berlin zurück. – Ein anderes Mal wurde ich von der „Kommunistischen Internationale“ zu einer Mission nach London „ausgeborgt“, obwohl man gewöhnlich die GPU und ihre Tätigkeit peinlich getrennt hielt von den internationalen Angelegenheiten. Aber die Bitte kam von Hugo Eberlein, einem Gründer der Internationale, und durfte nicht abgelehnt werden, denn er genoß ein hohes Ansehen, das vornehmlich auf der Tatsache beruhte, daß er mit Stalins Adoptivtochter verheiratet war. Ich sollte ihm als Dolmetscherin dienen und ihn auch sonst nach Kräften in allen Dingen unterstützen. Dies ging so vor sich –: Ich begab mich zu einem Bücherrevisor mit Namen Callam, Kassierer der Partei, nach Essen, der den Auftrag erhalten hatte, die Bücher der Britischen Kommunistischen Partei und des Londoner Daily Worker" zu prüfen. Callam und ich fuhren mit denselben Zügen und demselben Kanalboot, und doch benahmen wir uns wie gänzlich Fremde. Einzeln und einige Stunden nacheinander kamen wir in einem zweitklassigen Londoner Hotel an.

    Bis in seine Fingerspitzen ein deutscher Buchhalter, jagte Genosse Callam hinter jedem einzelnen Schilling her. Die Bücher der Partei waren in einem Privathaus außerhalb Londons untergebracht. Callam und ich fuhren also unter Beobachtung aller Vorsichtsmaßnahmen täglich dorthin. Von Zeit zu Zeit bestellte ich Parteifunktionäre, wenn Einzelposten in den Abrechnungen erklärt werden mußten.

    In Erinnerung an diese Erfahrungen macht es mir immer Spaß, wenn ich Leute darüber diskutieren hörte, ob die einzelnen kommunistischen Parteien der Länder wirklich von der Moskauer Zentrale finanziert und kontrolliert würden. Ich vergaß niemals, daß unsere Mission in London nichts anderes war als die Prüfung der Bücher einer ausländischen Filiale durch das Büro des Stammhauses.

    Der in England tätige Kommunist Harry Pollit und andere führende Partei-Männer sorgten für unsere Bequemlichkeit. Aber Callam hatte nichts übrig für gesellschaftliches Leben, während ich fast im Übermaß von reichen und selbst mit Titeln ausgezeichneten Fremden gefeiert wurde. Der zunehmende Kampf mit dem Nazismus brachte es mit sich, daß deutsche Genossen, welche das Land besuchten, zum Gegenstände besonderen Interesses und besonderer Aufmerksamkeit wurden. Uns aber vermittelte die Gewißheit, einflußreiche Freunde in jedem Winkel der Erde zu treffen, das prickelnde Gefühl, einem großen geheimen Orden anzugehören, dem Orden der Aktivisten!

    Eine Begegnung in Berlin um 1932 herum möchte ich erwähnen: Ich traf einen kleinen, dunklen, unauffälligen Mann, der später eine allzu bekannte Persönlichkeit wurde und den Ludwig und Felix mit großer Ehrerbietung behandelten. Viele Jahre später, als sein Bruch mit den Sowjets eine Weltsensation wurde, wurde mir klar, daß es General Walter Krivitsky gewesen war, das Haupt des gesamten Roten Heeres-Abwehrdienstes in Westeuropa. Damals kam er mir so vor, als wollte er mich für eine besondere Verwendung prüfend beobachten. Doch vielleicht fand ich keine Gnade vor seinen Augen, da man von meiner Verwendbarkeit nicht wieder sprach.

    Als Hitler an die Macht kam, schien es, als sei mein amerikanischer Paß wichtiger als ich selbst. Konnte ich doch – ohne daß ich Verdacht erregte – Deutschland verlassen und wieder zurückkehren! Natürlich beeilte ich mich zunächst, die Kinder Fischers und den Sohn von Felix Silberstein nach Moskau zu schaffen, wobei ich aus Gründen größerer Sicherheit den Weg über Prag wählte. – Die Ereignisse in Deutschland hatten offenbar die üblichen Verbindungen mit Westeuropa unterbrochen. Ich wurde jedenfalls dazu bestimmt, eine bedeutende Summe in Franken von Moskau nach Paris zu bringen. Zuvor jedoch wurde ich in den Büroräumen der Komintern, wo ein Genosse namens Abramov mit den Vorbereitungen meiner Reise beschäftigt war, geradezu polizeimäßig fotografiert, von vorn und im Profil, und meine Fingerabdrücke wurden genommen. Ein abstoßender Vorgang, der mir eine Gänsehaut über den Rücken jagte. Das Geld, das mir in ziemlich kleinen Scheinen übergeben wurde, war übrigens so unhandlich, daß sogar, nachdem ich es glattgestrichen, in einen selbstangefertigtem Gürtel untergebracht hatte, ich für die Dauer der Reise so tun mußte, als ob ich in anderen Umständen sei. In dem sowjetischen Grenzen Negorelye ließ mich ein geflüstertes Losungswort ohne Untersuchung durch.

    Um die Gefahr einer Verfolgung zu verringern, machte ich einen Umweg über Wien und Zürich und blieb einige wenige Tage in jeder der beiden Städte. Im Zuge nach Zürich wurde ich durch einen jungen Franzosen beunruhigt, der mir trotz meiner ausgestopften Figur andauernd Aufmerksamkeiten erwies. Und meine Unruhe wurde zum Entsetzen, als ich ihm auch im Zuge nach Frankreich begegnete und er weiter überhöflich zu mir blieb. So war es mir eine unendliche Erleichterung, als ich bei unserer Ankunft in Paris eine kommunistische Abordnung antraf, die meinen Kavalier erwartete. Er war der Führer der französischen Jugend und hatte zufällig den gleichen Umweg von Moskau gewählt. In Paris angekommen, ging ich in das Wartezimmer eines Zahnarztes, wo ich auftragsgemäß eines Mannes harrte, dessen Bild mir in Moskau gezeigt worden war. Er kam. Wir gingen in eine Bar. Dort entledigte ich mich in der Damentoilette meiner „Schwangerschaft“. Ich händigte ihm die Franken aus; sie waren notdürftig in eine Zeitung verpackt...

    Ein anderes Mal halfen Paul Massing und ich in Berlin bei der Einrichtung einer illegalen Eisenbahnverbindung zum Herausschmuggeln schwerbelasteter Genossen aus dem Lande. Ich brachte die mir anvertrauten Leute in ein Dorf auf der deutschen Seite der tschechischen Grenze, wo ich sie in einem armseligen Gasthaus unseren tschechischen Helfern übergab. Dabei ging ich gewöhnlich ganz offiziell mit meinem amerikanischen Paß auf die tschechische Seite und wartete dort unruhig, bis ich mich überzeugt hatte, daß die Leute sicher herübergekommen waren. Während mehrerer Monate dieser Tätigkeit verloren wir nicht einen Mann. (Wird fortgesetzt)

    https://web.archive.org/web/*/https://www.zeit.de/1950/24/ich-war-stalins-spionin-in-den-usa*
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    Ich war Stalins Spionin in den USA - Die geschiedene Frau des Kommunistenführers Gerhard Eisler enthüllt – IV. Agenten konkurrieren im Dienst desselben Herrn
    https://web.archive.org/web/20161130165135/http://www.zeit.de/1950/25/ich-war-stalins-spionin-in-den-usa/komplettansicht

    22.6.1950 von Hede Massing - Die bisher in der „Zeit“ veröffentlichten Enthüllungen Hede Massings, die in erster Ehe mit dem heutigen ostzonalen Propagandaminister Gerhard Eisler verheiratet war und einst durch ihn in die Geheim-Zirkel der kommunistischen Internationale eingeführt worden war, haben Aufsehen erregt. War sie auch keine große Spionin in Stalins Dienst, sondern eher, wie sie meinte, „ein Sergeant unterm Befehl eines Offiziers“, so hat sie doch tiefen Einblick in die Hintergründe sowjetischer Spionage in den Vereinigten Staaten nehmen können. Nie wurde der „Alltag“ eines Sowjetspions, das Drum und Dran seiner obskuren Tätigkeit, so anschaulich geschildert, wie dies Hede Massing unternimmt, die aus Liebe Kommunistin wurde, aus Idealismus Spionin und die, nachdem sie die Wahrheit erfahren hatte, den Mut fand, ihre Handlungen öffentlich auszubreiten. Ihre Triebkraft ist Reue; ihr Ziel ist Warnung...

    Meinen ersten Bericht über mein Zusammentreffen mit Field hatte ich an Walters Nachfolger als meinen russischen Chef gerichet, einen Mann, den Berman unter dem Namen „Bill“ vorstellte. Erst auf Grund von Photographien, die mir nach Jahren der amerikanische Abwehrdienst vorlegte, erfuhr ich, daß er Walker Grinke hieß. Ein Mann von mittlerem Wuchs, vierzig Jahre alt, war er einer von jenen „dämonischen“ Russen mit stark mongolischen Gesichtszügen, einer niedrigen Stirn, gekrönt von dichtem aschblondem Haar. Ich erinnere mich besonders seines grausamen Mundes mit den dicken Lippen und seiner krankhaft blassen Gesichtsfarbe. Ja, Bill war der typische Sowjet-Apparatchik, ein kalter Bürokrat, ein böser Typus, wie er allen, die Stalins Rußland kennen, nur zu bekannt ist. Er war peinlich korrekt, doch zeigte er nicht ein einziges Mal in drei Jahren enger Verbundenheit so etwas wie freundschaftliche Gesinnung. Er fragte mich endlos über jede Einzelheit meines vergangenen und gegenwärtigen Lebens aus, wobei er keinen Zweifel darüber ließ, daß seine Fragen dienstlich seien, nicht menschliche Anteilnahme. Er war das verkörperte Mißtrauen des Sowjetbeamten gegenüber den ausländischen Kommunisten, die damals hoch alle idealistischen Schlagworte wörtlich nahmen und dies zum Teil noch heute tun. Sein Mißtrauen war gemischt mit Verachtung. Ich hatte das Gefühl, daß er mich beobachtete, wie man einen auf einer Nadel aufgespießten Käfer betrachtet. Er konnte sich lange nicht entschließen, mir zu vertrauen.

    Immerhin... Ich eröffnete ihm die Aussichten meiner neuen Freundschaft mit Noel Field. Er blieb eiskalt. Doch eine Woche später glich seine Erregung der meinen. Offenbar hatte er von höherer Stelle den Befehl erhalten, die günstige Gelegenheit bis zum äußersten auszunutzen. Er gab mir zu verstehen, daß ich keine Kosten scheuen sollte im Bewirten und Beschenken meiner neuen Freunde. Dennoch fühlte ich mich sehr erleichtert, als ein neuer Vertreter Sowjetrußlands, der anscheinend in höherem Rang stand als Bill, im Mai oder Juni 1935 erschien. „Fred“ – so hieß er getarnt – erwies sich als ebenso warmherzig, wie Bill sich als kalt und formell erwiesen hatte...

    Es gibt außerhalb Rußlands drei verschiedene Sowjetspionagemaschinen, die sorgfältig voneinander getrennt gehalten werden. Die eine ist das militärische Nachrichtenbüro, die sogenannte „Dritte Abteilung“ des Roten Heeres. Die zweite ist das Netzwerk der Komintern, durch das die kommunistische Bewegung überall in der Welt geleitet und beaufsichtigt wird. Schließlich gibt es noch einen Apparat der Geheimpolizei: die Auslandsabteilung der GPU (jetzt MWD), zu der ich gehörte.
    Genossen gleicher Schmach

    Wie üblich, wurde mir niemals mitgeteilt, welcher dieser Maschinen ich diente. Ich wußte aber trotzdem Bescheid, und zwar war ich durch eine Art Aussonderungs-Prozeß zu meinem Wissen gekommen. Die Tatsache nämlich, daß ich dauernd gewarnt wurde, mich öffentlich mit bekannten Kommunisten zu zeigen, bedeutete, daß ich nicht in dem Komintern-Ring war. Ich wußte ferner, daß Ludwig, mein europäischer Chef, mit Krivitsky, dem obersten militärischen Nachrichtenoffizier in demselben Bezirk, nicht in direkter Verbindung stand. So folgerte ich denn, daß, die Fäden meiner Organisation zur Liubyanka in Moskau, dem Hauptquartier der GPU, führten. Gegen Ende des Jahres 1935 – um einmal einen bestimmten Zeitpunkt aus meinen Erfahrungen herauszugreifen – kannte ich persönlich nur sechs Mitglieder meiner in Amerika tätigen Gruppe. Da waren Fred und, ihm untergeordnet, Bill, die beiden Chefs. Dann, mir gleichgestellt, Berman und ein anderer Russe namens Anton, ferner ein Tscheche, der Victor genannt wurde, und dann jene kleine Mata Hari deutscher Herkunft, Gerda Maria Frankfurter, die ich schon erwähnte. Wir beide, Gerda und ich, waren den anderen unter unseren richtigen Namen bekannt.

    Meine äußere Aufmachung war bescheiden –: eine kleine Wohnung und eine anspruchslose Lebenshaltung. Gerda hingegen hatte einen eindrucksvolleren Hintergrund –: eine große Wohnung in guter Gegend, schöne Kleider und sogar Schmuck. Wahrscheinlich erforderte die Art ihrer Tätigkeit diesen Luxus, vielleicht auch trug der Umstand dazu bei, daß sie Bills Geliebte war.

    Fred war von kleiner Gestalt, besaß wenig Haare und war nahezu fünfzig Jahre alt, anspruchslos und hatte eine gute Erziehung genossen. Er gehörte zu den bescheidenen, unaufdringlichen Menschen, welche die Aufmerksamkeit nicht auf sich zu lenken pflegen, was ein Vorzug bei seiner Art der Beschäftigung bedeutete. Während meiner verschiedenen Kurierreisen in Europa erfuhr ich, daß er aus adliger Familie stamme und in der Armee des Zaren Offizier gewesen sei, Gerda, die dazu neigte, mit ihrer Kenntnis der inneren Angelegenheiten der Organisation zu prahlen, nannte ihn Boris. Später erfuhr ich, daß wahrscheinlich Boris Bazarow sein richtiger Name sei. Mit ihm lebte seine Frau in New York. Aber in all den Jahren habe ich sie weder kennengelernt, noch erfuhr ich, wo sie wohnte. Fred und Bill hingegen hatten Schlüssel zu meiner Wohnung und benutzten sie gelegentlich während meiner Abwesenheit. Wie ich später noch erzählen werde, brachte diese Tatsache mich einmal in die größte Verlegenheit, die ich in Amerika erlebt habe. Übrigens – ich hätte oft gern gewußt, ob Bill und Fred noch Vorgesetzte in den Vereinigten Staaten hatten. Manchmal war für eine Entscheidung wirklich nicht Zeit genug, in Moskau anzufragen. Und dennoch war es offenbar so, daß sie in eilten Fällen schnelle Direktiven erhielten. Dies gab mir die Überzeugung, daß es hier Männer geben müsse, die ihnen übergeordnet waren. Diese meine Annahme schien einige Jahre später tatsächlich bestätigt zu wenden. Ich hörte nämlich, daß ein wichtiger GPU-Vertreter namens Gaik Ovakim bei der Amtorg Trading Corporation, einer Handelsgesellschaft, während meiner Zeit tätig gewesen sei. Er wurde schließlich verhaftet und gegen fünf russische Frauen, die mit Amerikanern verheiratet waren, ausgetauscht.

    Meine üblichen Zusammenkünfte mit Bill und – weniger häufig – mit Fred kamen immer nach demselben Verfahren zustande. Bei jeder Zusammenkunft legten wir Zeit und Ort für die nächste fest, gewöhnlich in einem Restaurant, einer Bar oder an einem öffentlichen Platz. Wenn einer von ihnen mich früher als vereinbart sehen wollte, telephonierte er und lud mich – je nachdem – zum Mittagessen, zum Abendessen oder zu Cocktails ein. Die übliche Form war so:

    „Wie denkst du über ein Mittagessen morgen mit mir?“

    „Ich würde mich außerordentlich freuen, und wo?“ pflegte ich zu antworten.

    „Warte mal... Wie steht’s mit dem kleinen Restaurant... Du weißt schon, der Name ist mir entfallen.“ – Das bedeutete in unserer Geheimsprache denselben Platz, an dem wir uns das letzte Mal getroffen hatten.

    „Schön“, stimmte ich bei; „merkwürdig, ich haben den Namen auch vergessen, aber ich weiß, wo es ist.“

    „Gut, sollen wir sagen: am ein Uhr?“

    Das bedeutete drei Uhr, denn wir legten immer zwei Stunden zu, um jeden Mithörer von der Spur abzulenken. Trotzdem verließ ich das Haus vor ein Uhr für den Fall, daß jemand mir folgen sollte, und nahm eine Droschke in der unserem Treffpunkt entgegengesetzten Richtung. – Wir spielten gern mit dem Gedanken, daß wir uns in großer Gefahr befänden, selbst in diesem vertrauensseligen und sorglosen Lande. Es traten lange Zeiten einer langweiligen Untätigkeit ein, die mich ärgerten. Fred merkte das. Er sagte mir einmal: „Bei unserer Arbeit, Hede, ist zuviel Energie gefährlich. Was wir brauchen, ist gesunder Menschenverstand, Geduld und Mut.“

    Meine Mit-Spionin in Amerika, Gerda Frankfurter, die auf großem Fuße lebte, wäre in einiger Verlegenheit gewesen, hätte man sie nach der Quelle ihres Einkommens gefragt. Auf einer meiner Kurierfahrten nach Europa half ich ihr, diese verwundbare Stelle zu schützen. Denn niemand durfte ja erfahren, daß ihr Geld aus Moskau stammte. Ende Juli 1935 nahm ich außer den üblichen Kleinfilmrollen eine große Dollarsumme mit, die ich Gerdas erstauntem Vater in der Schweiz übergab mit der Anweisung, davon regelmäßig bestimmte Beträge an seine Tochter in New York zu überweisen. Auf diese Weise erfanden wir einen wohlhabenden und freigebigen Vater, der für Gerdas luxuriösen Lebensstil aufkam. Der alte Mann selbst, davon war ich überzeugt, ahnte nicht, womit sich seine Tochter eingelassen hatte. Er lud mich zu einem wundervollen Schweizer Ferienaufenthalt in Montreux ein, zusammen mit Paul, meinem Mann, mit dem Sowjetagenten Ludwig und einigen anderen Kameraden. Ludwig schien über meine erfolgreiche Arbeit in der Angelegenheit der beiden Beamten des State Department, Noel Field und Laurence Duggan, im Bilde zu sein.
    Verantwortlich für Anton

    Als ich im September wieder nach New York, zum Ausgangspunkt meiner Operationen, zurückkehrte, trat ein neuer russischer Agent zum engen Kreis unserer Mitarbeiter. Ich hatte eben im Barbizon Plaza-Hotel ausgepackt, da rief mich Fred, unser Chef, an, um mich zu begrüßen und mich zum Essen „bei sich zu Hause um sechs“ einzuladen. In unserer Geheimsprache hieß dies, daß wir uns um acht Uhr in einem Restaurant treffen wollten, daß wir vor meiner Reise ausgemacht hatten. Gegen Ende der Mahlzeit stieß ein blonder, blauäugiger und außerordentlich gut aussehender junger Russe zu uns, der eher einem Gigolo als einem Spion glich. Wir zogen in ein italienisches Kellerlokal in der West 8th Street, wo genug Rumba-Lärm herrschte, um unsere Unterhaltung zu übertönen. Fred fragte mich, welche Namen wir unserem neuen Freund geben sollten. Nach einem Tanz mit dem verliebten Jüngling schien mir „Lothario“ oder „Don Juan“ sehr passend, aber wir einigten uns auf Anton. Und Anton blieb er für mich während der nächsten zwei Jahre. Fred erklärte mir, daß ich für Anton verantwortlich sei und die Aufgabe ernst nehmen müsse. Woher soviel Besorgnis? Erstens war Anton der Photograph der Gruppe: eine Schlüsselstellung in jedem Spionagenetz. Und zweitens war er der mißratene Brudereines mächtigen GPU-Häuptlings in Moskau.

    Was Anton vor allen Dingen brauchte, war ein Ort, wo er unbeobachtet zwei oder drei Abende in der Woche arbeiten konnte. Es war kein leichtes Stück Arbeit, seine Aufmerksamkeit lange genug von amerikanischen Frauen abzulenken. Aber es gelang mir schließlich, ihm ein Versteck zu beschaffen –: Mary, so will ich das Opfer nennen, hatte ich einige Monate früher in einem befreundeten Haus getroffen, und sie hatte sich mir angeschlossen. Reizlos, wenn nicht gar häßlich, eine Frau von dreißig Jahren ohne Liebe, eine Buchhalterin mit romantischen Sehnsüchten, war Mary gerade recht für unsere Aufgaben. Meine Schilderungen von heldenhafter antifaschistischer Betätigung hatten sie begeistert, und immer wieder hatte sie mich gebeten, ihr eine Möglichkeit zur Mitarbeit zu beschaffen. Diese Möglichkeit war nun in der angenehmen Gestalt unseres Anton aufgetaucht, und nachdem ich sie zusammengebracht hatte, nahm das Schicksal seinen Lauf: Marys kleine Wohnung wurde ein geheimes Photo-Studio, in dem ein großer Wandschrank als Dunkelkammer diente.
    Liebe trotz gefährlicher Geschäfte

    Obwohl ich dringend gefordert hatte, Mary müsse aus Sicherheitsgründen alle Beziehungen zu mir abbrechen, überfiel sie mich fünf oder sechs – Wochen später in einem Zustand, der an Hysterie grenzte. Sie war schamlos verliebt in den Russen, wußte aber, daß seine Liebe kaum mehr war als die Gegenleistung für die Benutzung ihrer Wohnung. Ihre letzten Zweifel hieran wurden zerstreut, als Anton eines Nachts ein bacchantisches Fest im „Studio“ veranstaltete und ihr einen seiner russischen Freunde aufdrängte. Ich schlug ihr vor, den Schlingel vor die Tür zu setzen, aber Mary weigerte sich. Und da ich befürchtete, daß ihre Eifersucht möglicherweise unseren Kreis gefährden könnte, berichtete ich über den Vorfall in allen Einzelheiten. Fred, der Puritaner, errötete bis zum Glatzenansatz. Seine erste Reaktion äußerte sich in merkwürdiger Form: „Hede“, sagte er, „du mußt von Anton das Mikro-Photographieren lernen.“ Im übrigen versprach Fred, er werde „durchgreifen“. – Das geschah. Mary erzählte mir einige Zeit später gebrochenen Herzens, daß Anton plötzlich seine Sachen gepackt habe und verschwunden sei... Lange hörte ich nichts mehr von Anton und nahm an, daß er nach Moskau zurückgerufen worden war. Da erfuhr ich jedoch zu meinem Entsetzen, daß er mit der Frau eines amerikanischen Kommunisten zusammengezogen war, welche die Schwester eines noch prominenteren Kameraden war. Da ich ihn dort zuerst eingeführt hatte, fühlte ich mich in der Angelegenheit schuldig. Ich setzte mich hin und schrieb über Anton einen scharfen Bericht, der einer Anklage gleichkam. Denn ich hatte große Sorge um die Organisation, der wir beide angehörten. Ich habe ihn nur noch einmal getroffen, eine Episode, die ich später schildern werde. Zuletzt aber sollte die Anton-Episode noch ein betrübliches Nachspiel finden. Als ich im Jahre 1938 in Moskau verhört wurde, fiel sein Name. „Wo ist Anton?“ fragte ich, ohne eigentlich eine Antwort zu erwarten. Mein Verhörer lachte vielsagend. „Oh, Anton ist gut aufgehoben, sehr gut aufgehoben“, sagte er. „Und es wird Sie freuen zu hören, daß Ihr Bericht das erreicht hat. Sie dürfen versichert sein, daß er dort, wo er jetzt ist, nichts mehr anstellen wird...“ Mir ging es kalt den Rücken herunter. Man hatte also den leichtsinnigen Anton liquidiert. Und es war scheußlich zu wissen, daß ich dazu beigetragen hatte, ihn ins Konzentrationslager zu bringen oder ins – Grab.

    Die natürlichste Tarnung, die ein Sowjetagent im Ausland haben konnte, war – auch außerhalb der Vereinigten Staaten selbst – ein amerikanischer Paß. Amerikanische Touristen waren in aller Welt etwas so Alltägliches, daß sie nie Aufsehen erregten. Manche dieser Pässe waren natürlich gefälscht, sie wurden von Fachleuten in den roten „Dokumenten-Druckereien“ hergestellt. Die meisten Pässe aber waren echt, nur –: sie wurden von Personen benutzt, für die sie nicht ausgestellt waren.
    Pässe – eine Wissenschaft für sich

    Eine wichtige Rolle bei der Beschaffung solcher Pässe spielte der spanische Bürgerkrieg. Männer aller Nationen ließen sich damals für die „Internationale Brigade“, die gegen Franco kämpfte, anwerben, und so versorgte der Tod jedes Ausländers im Kampf oder durch „Säuberung“ die Sowjetbehörden mit einem weiteren wertvollen Paß. Außerdem besorgten in den Vereinigten Staaten hilfsbereite Kameraden ganz vorschriftsmäßig auf ihren eigenen Namen Pässe, die sie dann der Partei zur Verfügung stellten. Oft wurden auch Pässe beantragt auf Grund von Geburtsurkunden, Einbürgerungsdokumenten und anderen Ausweisen von Männern und Frauen, die schon längst tot waren. Diese ganze „Paß-Wissenschaft“ lernte ich im Laufe der Zeit von Grund auf kennen. Einmal erklärte Bill, er sei in großen Sorgen. Er benötige in kurzer Frist ein ganzes Bündel Pässe oder wenigstens die Papiere, um die Pässe zu beschaffen. Da ausgedehnte Beziehungen zu Amerikanern dafür notwendig waren, war unsere Gruppe der Aufgabe nicht gewachsen. So ungern er es auch tat, so mußte er doch zugeben, daß wir uns an die ausgezeichneten Büros der amerikanischen Komintern-Untergrundbewegung wenden müßten, unsere Konkurrenz. – Gerhard Eisler, mein früherer Mann, befand sich damals in New York und besuchte mich von Zeit zu Zeit. Es war eine stillschweigende Verabredung zwischen uns, niemals über das Vorgehen unserer beiden Gruppen zu reden, aber bei seinem nächsten Besuch brach ich diese Vereinbarung. Er versicherte mir, daß er genau die Person kenne, die wir brauchten So brachte er mich einige Tage später beim Frühstück in Childs Restaurant an der Ecke 23rd Street und 5th Avenue mit dem berühmten und berüchtigten J. Peters zusammen, einem dunklen, untersetzten Ungarn mit gestutztem Schnurrbart, den ich bis dahin nur vom Hörensagen kannte. Es war ein freundlicher und sanft redender Mann. Es war derselbe Peters, der in den vergangenen Jahren in den Enthüllungen von Louis Budenz, Ben Gitlow und anderen Exkommunisten eine Rolle spielte und der im letzten Jahr, also 1949, nachdem er sich in einem Verfahren vor amerikanischen Gerichten geweigert hatte, die entscheidenden Fragen zu beantworten, mit der Erlaubnis „bestraft“ wurde, das Land freiwillig zu verlassen.

    Nachdem Gerhard uns allein gelassen hatte, setzte ich meine Notlage auseinander. Peters wollte wissen, für wen die Pässe sein sollten. „Für meine Gruppe“, antwortete ich. „Welche?“ fragte er lächelnd. „Sie wissen doch, daß ich Ihnen das nicht sagen darf“, sagte ich empört. Es wäre zu beschämend gewesen zuzugeben, daß ich es selbst nicht genau wußte. Auf seinen Einwand, daß viele Pässe viel Geld kosteten, beruhigte ich ihn: der Preis spiele keine Rolle. So wurden wir einig. Auch im folgenden Jahr traf ich Peters zehn- oder zwölfmal und machte ihm stets genaue Angaben: Wir brauchten Papiere für Personen diesen oder jenen Alters, im Lande geboren oder eingebürgert, mit einer bestimmten ursprünglichen Nationalität. Bei Abschluß solcher Geschäfte tauschten wir jedesmal Umschläge aus – meine enthielten Geld, seine die Papiere, die Bills Agenten brauchten. Es wurde mir klar, daß das, was Peters mir übergab, nur ein lächerlicher Bruchteil der großen Produktion seiner Paß-Fabrik war.

    Meine Beziehungen zu Bill wurden allmählich immer loser, so daß ich während der späteren Periode meiner Tätigkeit im sowjetischen Spionagenetz hauptsächlich mit Fred, dem anderen Chef, zu tun hatte. Die Oberaufsicht über meine Hauptaufgabe in Washington zum Beispiel – die Heranziehung von Noel H. Field und Laurence Duggan – lag gänzlich in Freds Händen. Immerhin war ohne sein Zutun insbesondere mein Verhältnis zu den Fields so eng und so herzlich geworden, daß ich nicht immer unterscheiden konnte, wo das „Geschäft“ endete und die Freundschaft begann. So war ich, als ich schließlich im Herbst 1935 Noel H. Field ohne Umschweife den Vorschlag machte, „unsere Organisation“ regelmäßig mit Informationen und Dokumenten zu versehen, sehr erstaunt, daß er sich weigerte, sich festzulegen. Er brachte sogar Argumente vor wie „Loyalität gegenüber seinem Vaterlande“. Ich hatte Befehl, die Angelegenheit nicht zu forcieren, und so verging noch einige Zeit. Schließlich berichtete ich Noel Field, daß mein Vorgesetzter darauf bestünde, ihn zu treffen. Und da rückte er mit einer Neuigkeit heraus, die mir einfach den Atem benahm. Er stünde unter Druck, so sagte er mir, einer anderen Organisation beizutreten, und sei versucht, ihr den Vorzug, vor der meinigen zu geben. Die Beeinflussung gehe von einem Kollegen in seinem Ministerium aus, einem Amerikaner. – Ich war entsetzt über diese Verhedderung der kommunistischen Untergrundlinien. Sollten die langen Monate meiner Bearbeitung von Field einfach fortgewischt werden? Sollte ich durch einen Fremden der Früchte meiner Bemühungen beraubt werden? Ich beschloß, um mein Recht zu kämpfen.

    „Wer ist dieser Mann?“ fragte ich.

    „Ich glaube nicht, daß du ihn kennst, Hede, er heißt Alger Hiß.“

    „Für welche Gruppe arbeitet er?“, fragte ich weiter.

    „Das weiß ich nicht, genau sowenig, wie ich eigentlich deine Gruppe kenne.“

    „Ich möchte diesen Hiß treffen“, sagte ich.

    Noel Field nahm diesen Vorschlag mit Begeisterung auf und versprach, eine Zusammenkunft zustande zu bringen. Wenige Tage später meldete er mir, daß alle Vorbereitungen getroffen seien und ich Alger Hiß beim Essen im Fieldschen Haus treffen würde.

    Etwa eine Woche später fand das Zusammentreffen mit Hiß statt, von dem er heute natürlich leugnet, daß es sich jemals ereignet habe.

    (Wird fortgesetzt)

    https://www.zeit.de/1950/26/ich-war-stalins-spionin-in-den-usa
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    #histoire #espionnage #USA #URSS #communistes #guerre_froide

  • Ruth Werner - Courier, traitor, bigamist, fabulist : behind the mythology of a superspy
    https://www.coldspur.com/wp-content/uploads/2020/12/Courier-traitor-bigamist-fabulist-behind-the-mythology-of-a-superspy.pdf
    Ursula (Ruth Werner) Kuczynski et son frère Jürgen n’ont jamais renoncé à leurs convictions communistes et montrent par leurs exemple qu’il y a des intellectuels d’origine bourgeoise qui ne trahissent pas les résultats et conséquences des analyses de la société capitaliste qu’ils ont pu réaliser. Cette confiance en soi et dans la science font la différence avec des esprits comme George Orwell dont la développement suit un itinéraire plus aléatoire empreigné par le vécu et les sentiments qui à un age avancé les fait retourner vers une identité petite bourgeoise.

    Aprés la guerre Orwell dénonce aux services de sécurité britanniques ses connaissances pas assez fiables à son avis alors que les Kuczynski se tournent vers la recherche scientifique et l’écriture de livres socialistes pour enfants. L’auteur Ben Macintyre essaye de reconstruire l’itinéraire de l’espionne Sonya en partant de son autobiographie Sonjas Report .

    Agent Sonya: Moscow’s Most Daring Wartime Spy, Ben Macintyre, New York: Crown, an imprint of Random House, 2020, 377 pp., $28.00 (Hardback). ISBN: 9780593136300

    Writing biographies of intelligence agents is a hazardous business. The subjects have led a life of subterfuge and deception, and their memoirs are similarly untrustworthy; their employers indulge in campaigns of disinformation; such few archives as do exist have frequently been extensively redacted, or have false entries deposited in them. A methodology for sifting the chaff and reconciling conflicting stories is a necessary part of the armoury.

    #histoire #espionnage #guerre_froide #bombe_nucléaire #URSS #DDR

    • Merci @rastapopoulos , c’est très intéressant ce qu’on trouve che Agone.
      https://agone.org/malheureux-iii-1

      On peut en conclure que « Sonya », son frère Jürgen Kuczynski et Klaus Fuchs ont choisi un camp et Orwell celui de ses adversaires. C’est compréhensible vu les crimes des stalinistes dont l’auteur de « 1984 » a été le témoin. Ursula Kuczynski alias Sonja alias Ruth Werner alias Ursula Beurton dit qu’elle a travaillé pour l’Union Soviétique pas pour Staline.

      A l’époque il faillait choisir son camp. Orwell s’est alors rangé parmi les collaborateurs de l’empire britannique. Il me rappelle les étudiants de 1968 qu’on a appellé à rentrer chez eux et de continuer leur carrière dans les cabinets d’avocat et de médecin paternels.

      Orwell n’a pas été un méchant délateur qui livrait ses amis aux tortionnaires de la MI5, il a simplement agi selon sa situation de petit bourgeois qui préférait sa patrie au monde ouvrier communiste déchiré. J’en retien que dans sa vie personnelle il n’a en fin de compte pas été assez anarchiste pour occuper une place importante dans la généalogie des révolté/es.

      En 2006, dans la notice consacrée à l’entrée « Information Research Department (IRD) » du glossaire du livre de John Newsinger, La Politique selon Orwell (Agone, 2006, p. 331-332), Jean-Jacques Rosat donne une synthèse de l’affaire et toutes les références nécessaires pour s’en faire une idée précise :

      Organisme créé en 1948 par le gouvernement travailliste comme un bureau semi-officiel de propagande anticommuniste et antisoviétique du ministère des Affaires étrangères. En mars 1949, Celia Kirwan – proche amie d’Orwell et qui y travaillait – demanda à celui-ci de participer à ses activités . Orwell, trop malade, refusa d’écrire quoi que ce soit ; mais il communiqua une liste de personnalités qu’il pensait susceptibles de collaborer ; et, surtout, il proposa d’indiquer les noms d’écrivains et de journalistes qu’il tenait pour des crypto-communistes et auxquels l’IRD ferait mieux, selon lui, de ne pas s’adresser. Pour cela, il s’appuya sur une liste personnelle qu’il tenait à jour depuis 1942 et où figuraient les noms de toutes les personnalités du monde politique et intellectuel dont il se demandait de quel côté elles seraient en cas de conflit avec l’Union soviétique. Cette liste de 135 noms comporte des commentaires et de nombreux points d’interrogation, ratures et marques d’incertitude et d’hésitation . Le 2 mai 1949, Orwell adressa à Celia Kirwan une liste beaucoup plus courte de 38 noms, qui a été retrouvée dans les dossiers du ministère des Affaires étrangères et rendue publique en 2003 *. Quelque jugement que l’on porte sur ce geste accompli par Orwell en pleine guerre froide, trois points sont clairs : 1. l’IRD ne relevait ni de la police ni des services secrets britanniques (même si ceux-ci n’ont sûrement pas été indifférents à ses activités) ; 2. la liste d’Orwell n’était pas une liste noire : il ne s’agissait pas d’interdire à certains journalistes ou écrivains d’exercer leur profession mais de suggérer à l’IRD de ne pas les employer comme propagandistes anticommunistes parce qu’ils risquaient d’être peu fiables dans cette tâche ; 3. aucune des 38 personnalités figurant sur la liste n’a jamais eu d’ennui avec les autorités britanniques. Sur cette affaire, on peut lire George Orwell devant ses calomniateurs. Quelques observations [Ivrea, 1997, dont nous donnons de larges extraits ici]. Pour des mises au point plus récentes qui tiennent compte des derniers documents retrouvés, lire D. J. Taylor, Orwell. The Life, Londres, Chatto & Windus, 2003, p. 408-410, et Timothy Garton Ash, « Orwell’s List », The New York Review of Books, 25 septembre 2003, vol. 50, n° 14

      #stalinisme #anarchisme #révolte

    • Il me semble que tu évinces le contexte, car en 1949, on n’est pas du tout sur « les soviets », ni sur « le monde ouvrier », concernant l’URSS, on est en plein stalinisme hard, et on est l’année où Staline obtient les bombes nucléaires, en pleine guerre froide avec une vraie peur et un vrai risque en Europe de l’ouest (pour le commun des mortels) de se faire éclater la gueule. Du coup ya rien de spécialement petit bourgeois à être anti-stalinistes à ce moment de l’histoire (ni à aucun moment en fait…)

    • Les crimes de Staline et de l’homme soviétique (homo sovieticus) particuliérement opportuniste ne représentent qu’une face de la médaille communiste de l’époque. Klaus Fuchs et Ursula Kuczinski considèrent alors qu’ils travaillent pour l’Union Soviétique et le socialisme, une position contestée par Koestler, Orwell et d’autres bourgeois et petit bourgeois attachés à leur statut. Les qualifications de bourgeois / petit bourgeois / paysan / etc. ne sont en rien péjoratives mais la déscription de la situation de classe et de la conscience politique d’un individu. L’ex communiste Koestler par exemple est parfaitement bourgeois, Orwell plutôt petit bourgeois. Mais là n’est pas la question.

      Depuis la célèbre phrase de Karl Liebknecht sur les relations de classe en temps de guerre l’attitude à adopter est évidente pour chaque révolutionnaire :

      Der Hauptfeind steht im eigenen Land.

      Conclusion : A défaut de pouvoir les combattre on ne collabore pas avec les capitalistes maîtres de son pays parce que c’est eux les responsables qui profitent de la guerre froide et chaude. On ne les soutient pas. Jamais, d’aucune manière.

      Ceci signifie que pendant ses dernières années Orwell est tout sauf un anarchiste ou révolutionnaire mais un petit bourgeois très cultivé et talentueux. Pour lui contrairement à par exemple Lev Tolstoï ou Maxime Gorki le plus haut sommet qu’il peut alors atteindre est le statut de grand écrivain vivant dans une union symbiotique avec la société britannique.

      C’est dommage pour un grand écrivan qui sait viser plus loin, mais à cause de la force des choses de la vie c’est prèsque inévitable pour la majorité des esprits moindres passé un certain age. Pour eux la révolution c’est un truc de jeunesse et du passé. C’est d’ailleurs une des raison pour le déclin du parti Die Linke .
      O.K. on ne peut jamais être complètement sûr de telles conclusions, mais c’est que j’observe quand je regarde autour de moi.

    • La liste, fallait quand le faire, l’écrire et la remettre à un service odieux impérialiste ...

      En 2006 paraît un dernier supplément aux Complete Works of George Orwell, sous le titre Lost Orwell (Timewell Press). On y trouve reproduite la « Liste des noms de cryptocommunistes et de compagnons de route envoyés à l’IRD le 2 mai 1949 » (p. 141-149)  :

      Anderson, John → Journaliste spécialisé dans l’industrie (Manchester Guardian) → Probablement sympathisant seulement. Bon journaliste. Stupide.
      Aldred (nom de famille ? Guy) → Romancier (« Of many Men », etc.) → Q. si ouvertement membre du PC.
      Beavan, John → Rédacteur en chef (Manchester Evening News et autres journaux) → Sympathisant sentimental uniquement. Pas subjectivement pro-PC. Peut avoir changé d’avis.
      Blackett, Professeur P. M. S → Vulgarisateur scientifique (physique). → []
      Carr, Professeur E. H. → The « Times ». Aberystwith University. Livres sur Bakounine, etc. → []
      Chaplin, Chas → [] → ?
      Comfort, Alex → Médecin. Poète, romancier. Contribut. à « Now » & périodiques similaires. Connexions avec Grey Walls Press (?) → Potentiel seulement. Pacifiste-anarchiste. Très antibritannique. Subjectivement pro-allemand pendant la guerre, semble de tempérament pro-totalitaire. Pas moralement courageux. Une main paralysée. Très talentueux.
      Crowther, D. J. → Scientifique (biologiste ?) → ? Frère de Geoffrey Crowthern (de The Economist.) Oui
      Childe, Professeur, Gordon → Vulgarisateur scientifique (anthropologie et histoire des sciences) → ?
      Calder-Marshall, Arthur → Romancier et journaliste → Autrefois proche compagnon de route. A changé, mais pas de manière fiable. Personne non sincère.
      Deutscher, I. → Journaliste (Observer, Economist et autres journaux) → Sympathisant seulement. Juif polonais. Auparavant trotskiste, il a changé d’avis principalement à cause de la question juive. Pourrait changer à nouveau.
      Duranty, W. → Correspondant étranger bien connu. Livres sur la Russie, etc. → []
      Driberg, Tom → Député de Malden et chroniqueur (Reynolds’ News, anciennement Daily Express) → Généralement qualifié de « crypto », mais à mon avis PAS vraiment pro-PC.
      Dover, Cedric → Écrivain (« Half Caste », etc.) et journaliste. Formation à la zoologie → Eurasien. Très anti-Blancs (en particulier anti-États-Unis), mais aussi pro-russe sur tous les sujets importants. Très malhonnête. Personne vénale.
      Goldring, D. → Écrivain (principalement de romans) → Carrière déçue.
      Hooper, Major → Expert militaire. Brochures, livres sur l’URSS. → Q. si CR ou simplement sympathisant.
      Jacob, Alaric → Correspondant étranger (D. Express et autres journaux) → Époux d’Iris Morley.
      Kohn, Marjorie → Enseignante et journaliste (New Statesman et autres journaux) → Sympathisante stupide.
      Litauer, Stefan → Expert en affaires étrangères. Correspondant polonais du News Chron. → Manifestement malhonnête. Aurait été auparavant un soutien de Pilsudski.
      Morley, Iris → Correspondante étrangère (Observer et autres journaux) → Très solide compagnon de route. Q. si elle est ouvertement membre du PC.
      Macmurray, Professeur John → S.C.M. du National Peace Council. Mouvement personnaliste. Beaucoup de livres → ? Pas de lien structurel, mais subjectivement très pro-URSS. Il est à noter que la branche française du mouvement personnaliste est en partie dominée par les compagnons de route.
      Martin, H. Kingsley → Éd. New Statesman → ?? Trop malhonnête pour être « crypto » ou un compagnon de route mais sûrement pro-russe sur toutes les questions importantes.
      Mackenzie, Norman → Journaliste (New Statesman) → Q. si ouvertement membre du PC
      McLeod, Joseph → Écrivain sur des sujets théâtraux, anciennement annonceur de la BBC → ? ?
      Mitchison, N. → Romancière → Sympathisante idiote. Sœur de J. B. S. Haldane.
      Moore, Nicholas → Poète → ? Tendances anarchistes.
      McDiarmid, H. → Poète et critique. Mouvement nationaliste écossais → Communiste dissident, mais sûrement pro-russe.
      Mende, Tibor → Expert en affaires étrangères. Livres → Hongrois. Peut-être seulement sympathisant.
      Neumann, R. → Romancier. Éditeur d’« International Authors » pour Hutchinsons pendant quelques années. → Allemand
      O’Donnell, Peader → Critique → Q. si ouvertement membre du PC.
      Parker, Ralph → Correspondant étranger (News Chronicle et autres journaux) → []
      Priestley, J. B. → Romancier et présentateur radio → ?
      Padmore, George → Ligue contre l’impérialisme et activités apparentées. Beaucoup de brochures → Noir. Dissident communiste (expulsé à partir de 1936 environ), mais sûrement pro-russe.
      Redgrave, Michael → Acteur → ?
      Smollett, Peter (de son vrai nom Smolka ?) → Correspondant, D. Express, etc. Section russe du MOI pendant la guerre → Selon C. Pers, ne serait qu’un carriériste, mais il donne la forte impression d’être une sorte d’agent russe. Personne très louche.
      Schiff, Leonard (Révérend) → Pasteur de C.E. (moderniste). Connaissance de l’Inde. Brochures. → ?
      Werth, Alexander → Correspondant étranger (Manchester Guardian et autres journaux) → ? N’est peut-être pas un compagnon de route mais donne cette impression.
      Young, Commandant E. P. (R. N.) → Expert naval. Brochures → presque certainement « crypto » CR ?
      Stewart, Margaret → Journaliste (News Chronicle, Economist et autres journaux). Actif dans le NUJ → Il y a environ 5 ans, était membre clandestin du PC. Elle a peut-être changé d’avis. Personne très compétente.

      --*—

      Si tu veux avoir mon avis - en tant qu’être humain à peu près sincère il faut toujours se tenir à l’écart des services secrets, si on ne veut pas se compromettre moralement. Quand on apercoit même de loin un agent des services, on change de trottoir. S’ils frappent á ta porte tu la leur fermes au nez malgré leurs menaces. Si en ce faisant tu coinces violemment un de leurs membres, c’est bien fait. Ils n’avaient qu’à te laisser tranquille. Si tu acceptes les échanges même de mots avec eux, tu entres dans leur jeu où tu sera toujours perdant.

      C’est tout ce je peux tirer comme conclusion de ma propre expérience comme de celle me mes proches qui ont vécu la guerre, l’époque du troisième reich et l’après guerre immédiat

      Les personnages historiques comme Orwell ou les espions comme Klaus Fuchs avaient des raisons pour adopter une attitude différente. Qu’on les juge suivant leurs mobiles et erreurs, sachant qu’il est impossible de revivre leurs combats.

  • Deserteur der US-Armee in der DDR : Was steckte dahinter ?
    https://www.berliner-zeitung.de/open-source/deserteur-der-us-armee-in-der-ddr-li.2224728

    Entre 1949 et 1961 au moins 200 soldats états-uniens ont demandé l’asyle politique en RDA/DDR. Parmi eux il y avait des agents doubles. La première phase de la guerre froide a été une sombre époque.

    29.6.2024 von Peter Köpf - Ein Soldat desertiert 1954 aus der U.S. Army und flüchtet in die DDR. Was suchte er bei den Kommunisten? Und weshalb verliert sich seine Spur neun Jahre später?

    Dass Soldaten aus kommunistischen Staaten in den Westen überliefen, weiß jeder Mensch. Dass Soldaten aus westlichen Armeen in die DDR türmten, war lange weitgehend unbekannt. Einige von ihnen hatten gute Gründe: Die einen hatten die Armee bestohlen oder waren zu spät in die Kaserne zurückgekehrt, andere wollten nicht auf den asiatischen Schlachtfeldern sterben oder – wie einige Afroamerikaner – unbehelligt von ihren Kameraden ihre Liebe zu deutschen Frauen leben.

    Ich habe zwei Jahre lang in den Archiven des DDR-Innenministeriums und der Staatssicherheit gesucht und die Akten von etwa 200 Überläufern gefunden, die allein bis zum Mauerbau in der DDR um Asyl baten. Einer von ihnen war William D. Adkins, Erkennungsnummer 01882212.

    Am 12. Januar 1954, sieben Tage vor seinem 23. Geburtstag und 17 Tage vor seiner Entlassung aus der U.S. Army, marschierte der Lieutenant zur sowjetischen Garnison in Amstetten, Österreich, und bat um politisches Asyl.

    Adkins begründete diesen Schritt damit, dass er „nicht einverstanden sei mit der aggressiven Außenpolitik der USA, mit den Handlungen des Senators McCarthy in der amerikanischen Armee und mit der Rassendiskriminierung in den USA“. Er werde so lange kämpfen, „bis die USA befreit von den heutigen Regenten und ein wirklich demokratischer Staat geworden sind“.

    Das Verrückteste daran war, dass Adkins sein Lager in Moskau aufschlagen wollte; denn da wollte er hin, in die Sowjetunion, um dort zu lernen und zu arbeiten. „Ich spüre, dass das kapitalistische System, bei dem ein paar mächtige Millionäre die Regierung völlig kontrollieren, falsch ist“, schrieb er in jenen Winterwochen in seinen Asylantrag. Sollte er die Erlaubnis erhalten, die Doktrinen der Kommunistischen Partei und der Sowjetunion zu studieren, so wäre er zu weitreichenden Gegenleistungen bereit: „Ich biete Ihnen meine Dienste im sowjetischen Militärgeheimdienst an. Dort könnte ich am nützlichsten sein.“

    Das klingt alles ein bisschen dick aufgetragen, und vollends pathetisch geriet ihm ein Abschiedsbrief, den er in sowjetischem Gewahrsam schrieb. Er war adressiert an „Mom“, die Mutter der Frau, die er gern geheiratet hätte, Patricia. „Wären Pat und ich ein Paar gewesen, keine Macht der Welt und kein Glauben hätte es vermocht, mich von ihr zu trennen“, schrieb er. „Aber es ist anders gekommen, und nun bin ich hier.“

    Adkins schien auf ein Leben an der Seite von Pat gehofft zu haben. Aber nun war sie schwanger von einem anderen Mann. Diese Nachricht erschütterte Adkins anscheinend so sehr, dass er nicht mehr heimkehren wollte. Liebe verleitet Menschen zu den verrücktesten Taten. Verschmähte Liebe auch.

    „Mom, ich habe Pat immer geliebt und ich glaube, ich werde sie immer lieben“, schrieb er. Aber nach deren Brief sei ihm klar geworden, „dass all meine Bande mit der westlichen Welt getrennt waren. Ich konnte sie nicht haben, also konnte ich mit meinem Leben nur noch eines anfangen: Ich konnte mein Leben nur noch einer Sache widmen, an die ich glaube. Ich weiß, es klingt für dich unvernünftig, aber hier habe ich eine Gruppe von Menschen gefunden, die meine Überzeugungen teilen. Hier in meiner neuen Heimat habe ich ein Volk gefunden, das Frieden wirklich herbeisehnt.“


    Armeepass von William Adkins bei der U.S. Army Privat

    „Ich werde dann ein Offizier der Armee sein, welche die USA befreit“

    Adkins wusste, dass die Armee und alle Menschen, die er kannte, seine Tat verurteilten. Ihm war völlig klar, dass junge Männer, mit denen er befreundet oder gar verwandt war, in Korea genau das bekämpften, woran er jetzt glaubte. „Ich glaube daran, dass die Vereinigten Staaten von Amerika ein großes Land sind“, schrieb er, „aber ich denke, sie haben zurzeit die falschen Führer.“ Und er, so muss sein Brief gelesen werden, wähnte sich als ein Mann, der dazu beitragen wollte, das zu ändern: „Möge es mir eines Tages erlaubt sein, in die sowjetrussische Armee einzutreten, dann werde ich sie wiedersehen. Ich werde dann ein Offizier der Armee sein, welche die USA befreit.“

    Einige Wochen später fand er sich in einer mehrstöckigen, braungrau verputzten Villa an einem See wieder. Es war zwar kein Gefängnis, aber die unteren Fenster waren durch Eisengitter gesichert, das Grundstück von einer hohen Mauer umgeben. Nach einer Weile kam ein kleiner Mann mit Brille herein und stellte sich in passablem Englisch mit deutlichem Akzent als „Dr. Huber“ vor. Da wusste Adkins, dass die Russen ihn den Deutschen übergeben hatten.

    Adkins wütete und zürnte Russen und Deutschen gleichermaßen wegen dieser eklatanten Missachtung seines Willens. Mit allen osteuropäischen Staaten wäre er einverstanden gewesen, nur damit nicht. Er habe „Hochverrat begangen“, erklärte er, indem er Militärgeheimnisse verraten habe; das könne in den USA die Todesstrafe bedeuten. Er müsse weg, weiter nach Osten, verlangte er. „In (Ost‑)Deutschland wäre ich Agenten der USA ausgesetzt, die in dieses Land eindringen. Ich lebte hier in ständiger Gefahr, entführt zu werden. Und später, wenn Deutschland wieder vereinigt ist, wäre ich wieder der Kontrolle der USA ausgesetzt.“

    Nachdem Adkins, sehr widerborstig, in dem Haus am See zwei Monate seines Lebens – wie er damals fand – verschwendet hatte, bot „Dr. Huber“ ihm eine attraktive Alternative zur Sowjetunion an, und der Amerikaner nahm das Angebot an, obwohl es seinen Plänen nicht entsprach.

    Am 14. Mai 1954 um 8 Uhr stieg er in einen Wagen und fuhr mit „Dr. Huber“ nach Dresden. Er hieß nun nicht mehr William D. Adkins, geboren am 19. Januar 1931 in Indianapolis, sondern „Jack Forster“, geboren am 1. Januar 1930 in New York City. Erich Mielke, Stellvertreter von Staatssicherheitschef Ernst Wollweber, gewährte ihm monatlich 500 D-Mark, mehr als ein Durchschnittsgehalt, mehr, als jeder andere berufstätige Deserteur erhielt. Dafür schrieb er in einem Hotel in Karl-Marx-Stadt Seite auf Seite über das Leben in den USA und über Aufbau und Struktur der United States Armed Forces, Berichte von „hohem operativem Wert“, wie „Dr. Huber“ urteilte.

    „Jack Forsters“ erster Einsatz

    Und dann hatte „Jack Forster“ seinen ersten Einsatz. In einem konspirativen Haus der Stasi in Dresden traf er einen Amerikaner, der im Mai 1954 betrunken über die Demarkationslinie getaumelt und sofort von drei Grenzsoldaten aufgegriffen worden war. Sein Pech war, dass die Stasi ihn verdächtigte, als Mitglied des amerikanischen Militärgeheimdienstes CIC in die DDR geschickt worden zu sein.

    Nach drei Wochen Vernehmung brachte „Dr. Huber“ den Amerikaner nach Bautzen. Hier, in einer alten Gründerzeitvilla, nicht weit vom Zentrum, aber weit von der Grenze zum Westen, sollte er bald zur Schule gehen, um die Sprache und die Grundzüge des Marxismus-Leninismus zu lernen. Schon am ersten Abend entschloss sich der Amerikaner, mit den 30 Mark, die „Dr. Huber“ ihm überlassen hatte, die Stadt auszukundschaften. Zu seiner Überraschung traf er dort eine ganze Kompanie weiterer Deserteure. Viele der Männer waren unzufrieden.

    Schnell erfuhr er, dass weder das Stipendium noch der Lohn für Arbeit ihm ein Leben nach seinen Vorstellungen ermöglichen würde, dass er den Landkreis nicht verlassen durfte, dass die meisten Männer tranken und einige hurten, er verachtete die einheimischen Frauen, die es sogar mit den „Negern“ trieben, und er beschloss, nicht lange hier zu bleiben. Das behielt er nicht für sich, sondern sagte es jedem, der es hören wollte.

    Nach nur zwei Wochen saß der Amerikaner wegen einer Kneipenschlägerei im Gefängnis, bald in einem Dresdner Filtrationspunkt der Stasi, wo „Dr. Huber“ hoffte, ihn mithilfe eines Zelleninformators enttarnen und seine Kommunikationskanäle auskundschaften zu können. Dazu schickte er „Jack Forster“ in die Nebenzelle. Der Amerikaner fasste schnell Vertrauen. Er beichtete seinem neuen Kumpel eine Reihe von Kriegsverbrechen, an denen er als Soldat der U.S. Army in Asien beteiligt gewesen war. „Forster“ gab dieses Wissen auftragsgemäß weiter. Außerdem informierte er die Stasi über den Plan, gemeinsam zu flüchten.

    Es war Sonntag, der 31. Oktober 1954, 20 Uhr, als der Amerikaner versuchte, in seinem Zimmer eine der Hauswachen zu überwältigen und zu entwaffnen. Doch ein zweiter Stasi-Bediensteter, der draußen gewartet hatte, eilte herbei. Die Flucht war schnell unterbunden. Die Dresdner Genossen konnten Vollzug melden: „Die Aktion am gestrigen Abend wurde genau nach Plan durchgeführt.“

    „Jack Forster“ erhielt eine Prämie von 1000 Mark, „für meine Zusammenarbeit mit dem Staatssicherheit-Department der Deutschen Demokratischen Republik“, wie er quittierte. „Durch meine Hilfe war es möglich, einen Feind der DDR unter Arrest zu nehmen. In Zukunft werde ich mit dem Staatssekretariat für Staatssicherheit kooperieren, wann immer Hilfe nötig ist. William D. Adkins ‚Jack Forster‘.“
    „Ich werde helfen, die DDR gegen diese Volksfeinde zu schützen.“

    Der Amerikaner dagegen saß bis Februar 1957 im Gefängnis in Waldheim in Sachsen. In den Stasi-Akten finden sich Briefe seiner Ehefrau. „How are you, baby?“, erkundigte sie sich Anfang Januar 1955 nach seinem Befinden. „Fine I hope. Ich war so besorgt um dich. Uns allen geht es gut. Jackie ist schon so groß und er gleicht dir sehr. Donna ist auch in Ordnung, und der kleine William jr. versucht zu gehen und ruft nach ‚Daddy‘. Bill, ich vermisse dich so. … Kann ich dir irgendetwas schicken, was du brauchst? Dann lass es mich wissen. Ich liebe dich. Deine Frau und drei Babys, Peggy, Jackie, Donna und William – ganz allein …“


    Aufenthaltserlaubnis von „Jack Forster“ in der DDR imago

    Am 18. Januar 1955 schrieb sie erneut, am 3. Februar setzte sie einen Lippenstiftkuss aufs Papier. Alles vergebens. Er bekam die Briefe nicht zu Gesicht, und sie sollte lange Zeit nichts von ihrem Ehemann hören. „Jack Forster“ raubte drei Kindern den Vater und einer Frau den Ehemann.

    Offenbar zufrieden mit seinem neuen Leben, bat Adkins die Regierung der UdSSR, ihm zu erlauben, für immer in der DDR zu bleiben. Er wolle endlich ein normales Leben beginnen und arbeiten. Und er war bereit, weiter für die Stasi zu arbeiten: „Ich weiß, dass die Agenten der feindlichen Geheimdienste liquidiert werden müssen, weil sie Kriminelle sind, eingesetzt von den Feinden der Völker mit dem Ziel, einen neuen Weltkrieg vorzubereiten. Ich werde helfen, die DDR, die mir eine neue Heimat gegeben hat, gegen diese Volksfeinde zu schützen.“ Am 22. Dezember 1954 ließ er sich auch formal verpflichten und wählte den Decknamen „James Duke“.

    In den ersten Monaten 1955 vervollständigte „James Duke“ umfangreiche Handakten über das Leben in den USA und über die U.S. Army, nahm – von der Stasi bezahlt – privaten Sprachunterricht und horchte mindestens zwei weitere Männer aus, die wie er aus dem Westen gekommen waren.

    Im September schrieb er sich an der Universität in Leipzig als „John Reed“, geboren am 11. Juni 1930 in Rock City, Georgia, für das Fach Journalistik ein – er wählte also den Namen jenes amerikanischen Journalisten, der 1919 die Kommunistische Partei der USA gegründet hatte. Später arbeitete er als Funkreporter beim Deutschen Demokratischen Rundfunk in Berlin-Oberschöneweide, wo er Programme für Angehörige der U.S. Army gestaltete und als „fähiger Redakteur und Sprecher“ galt. Sogar eine Nebenrolle in einem DEFA-Film bekam er: in „For Eyes Only“, in dem die USA einen Krieg gegen die DDR planen.

    Plötzlich verschwindet Adkins in den Westen

    Doch 1963 tauchte Adkins zeitweise ab. Im März meldete seine letzte Lebensgefährtin, hochschwanger, bei der Polizei „John Reeds“ Verschwinden, drei Wochen später auch beim MfS. In einer Akte ist lakonisch vermerkt: „Nach ihrer Meinung zeigte man aber auch dort nicht viel Interesse.“ Auch seine Ex-Frau gab Ende April eine Vermisstenanzeige auf, ohne dass etwas geschah.

    Im Mai 1963 schließlich war „John Reed“ tatsächlich fort. Er war wieder „nach drüben“ gegangen. Wie er das anstellte, darüber kann Jörg Brandi Auskunft geben, damals Student an der Wirtschafts- und Sozialwissenschaftlichen Fakultät der FU Berlin – und Fluchthelfer.

    Am 4. Mai stand er mit „John Reed“ und „Kitty“, dessen neuester Freundin, an einer Litfaßsäule am S‑Bahnhof Friedrichstraße. Nach einer Weile sprach Brandi einen Westdeutschen an, fragte, ob er in der DDR mal etwas Besonderes erleben wolle. Der 31-Jährige ließ sich darauf ein. Im Lokal Quelle am Tor in der Oranienburger Straße stießen „Reed“ und „Kitty“ dazu, gemeinsam feierten sie bei reichlich Alkohol eine kleine Wirtshausparty. Schließlich luden die drei den Mann aus Bremerhaven ein, das Fest in privatem Rahmen fortzusetzen. Sie gingen zu Fuß nach Prenzlauer Berg und betraten eine Wohnung, die angeblich einem abwesenden Bekannten von „Kitty“ gehörte. Dort mischte sie in der Küche zwei Tabletten Kalypnon in eine Tasse Kaffee.

    Auf Leben und Tod: Mit dem DDR-Fluchthelfer in den Westen

    Als der Westdeutsche schlief, nahm „John Reed“ dessen Reisepass, den Tagespassierschein, 15 Mark und einige Kleidungsstücke an sich und begab sich zur Grenzkontrollstelle Friedrichstraße. Keiner der Grenzposten im sogenannten Tränenpalast schöpfte Verdacht. Um 19.39 Uhr drückte einer von ihnen einen Stempel auf die Papiere des vermeintlichen westdeutschen Mehrfacheinreisenden, dann summte der Türöffner, und der Mann, der neun Jahre zuvor als William Adkins angeblich seine große Liebe verloren und dann beschlossen hatte, sein Leben der letzten Sache zu widmen, an die er noch glaubte, dem Sozialismus, ging zu den Gleisen der Nord-Süd-Bahn, stieg ein und fuhr in Richtung Kreuzberg. William Adkins alias „Karl Forster“ alias „John Reed“ gehörte wieder zum Lager des „freien Westens“.

    Am folgenden Tag traf Brandi ihn im Leierkasten an der Zossener Straße im Westbezirk Kreuzberg. Nach diesem Kneipentreffen verliert sich „John Reeds“ Spur. Weder seine Ex-Frau, die Unterhalt für die kleine Tochter beanspruchte, noch 20 Jahre später die inzwischen erwachsene Tochter konnten ihn finden. Der Mann, dessen ursprüngliches Ziel Russland und alternativ die vietnamesische Volksbefreiungsarmee gewesen war, blieb verschollen.

    Seine Militärakte endet mit dem Tag, an dem sein Status lautet: „Dropped from the Rolls of the United States Army“ (Aus dem Bestand der U.S. Army gelöscht). Laut dem National Personnel Records Center dauerte Adkins’ Militärdienst fünf Jahre. Die vierte und letzte Station im Hauptquartier der U.S. Forces Austria in Wels, wo er als Supply Officer eingetragen war, dauerte vom 26. Juni 1952 bis 29. Januar 1954. Allerdings endet der Dienst laut Chronological Record of Military Service am 11. Januar, dem Tag vor seiner Desertion in Amstetten, Österreich. Die letzte Zeile beginnt mit dem Datum 12. Januar, dahinter fehlt jeglicher Eintrag. Von einem Militärgerichtsverfahren ist nichts bekannt, weder zum Namen Adkins noch Reed, auch eine Fotografie fehlt in der Akte.

    War Adkins in Wirklichkeit ein Agent der USA?

    Nur wenige Menschen könnten verlässlich sagen, was William D. Adkins wirklich dazu bewogen hat, sein Leben gen Osten zu werfen: er selbst und eventuell diejenigen, die ihn dazu veranlasst haben. In den Stasi-Akten ist vermerkt, dass „John Reed“ zuvor Kontakt zur amerikanischen Botschaft in Ost-Berlin aufgenommen hatte. Und so könnte die Aussage seiner ehemaligen Ehefrau aus dem Jahr 1982 eine Erklärung für sein Verschwinden liefern, nämlich „dass ihr geschiedener Mann als Agent für den CIC gearbeitet hat“.

    Was, wenn Patricia und Mom, die Adressatin seines rührenden Briefs, gar nicht existierten? Dann wäre William Adkins’ pathetisches Schreiben für jene bestimmt gewesen, in deren Akten es tatsächlich hängen blieb: die östlichen Dienste. Und Adkins hätte erreicht, was es bezweckte: Glaubwürdigkeit für einen Agenten.

    Was aber, wenn Mom und Patricia doch keine Hirngespinste waren, nicht Teil einer Legende? Haben sie ihn vermisst? Oder hat William Adkins – versorgt mit einer neuen, seiner vierten Identität nach Adkins, Forster, Reed – sich nach dem 4. Mai 1963 bei Pat gemeldet? Diese Fragen könnten nur die Beteiligten beantworten, sofern sie noch leben. Die Archive geben darüber keine Auskunft.

    Peter Köpf, 63, hat zahlreiche Biografien („Stoiber“, „Die Burdas“) und Sachbücher veröffentlicht, zuletzt zusammen mit Zana Ramadani „Woke. Wie eine moralisierende Minderheit unsere Demokratie bedroht“ und im April 2024 zusammen mit Elmar Brok „Verspielt Europa nicht!“. Die Geschichte von William Adkins und zahlreicher weiterer Überläufer hat er in seinem Buch festgehalten: „Wo ist Lieutenant Adkins? Das Schicksal desertierter Nato-Soldaten in der DDR“, erschienen 2013 bei Ch. Links.

    Das ist ein Beitrag, der im Rahmen unserer Open-Source-Initiative eingereicht wurde. Mit Open Source gibt der Berliner Verlag allen Interessierten die Möglichkeit, Texte mit inhaltlicher Relevanz und professionellen Qualitätsstandards anzubieten. Ausgewählte Beiträge werden veröffentlicht und honoriert.

    #histoire #USA #DDR #Autriche #guerre_froide #espionnage

  • Spy vs. Spy, The Complete Casebook 1961 - 2009


    La vie d’espion vu par Antonio Prohias, un dessinateur Cubain anticommuniste témoigne d’un état d’esprit libre malgré la paranoïa officielle et l’ambiance politique pesante dans les pays du « mondes libre ». Ses bandes dessinées sont à la fois hilarantes, authentiques et poignantes malgré leur sujet tragique et degré d’abstraction élevé. Une collection de 40 fichiers est disponible sur archive.org.
    Source :
    https://archive.org/details/mad-magazine-spy-vs-spy-collection/Spy%20vs.%20Spy%20-%20The%20Complete%20Casebook%20%281961-2009%29/page/n1/mode/1up

    La série télévisée ...
    https://maditsmadfunny.fandom.com/wiki/Spy_vs._Spy
    ... est nettement moins bonne. Example :
    https://www.youtube.com/watch?v=onR7PD3Grc0


    94 episodes
    https://www.youtube.com/watch?v=pJwJS4QEEas&list=PL17mZ766yGx6eN5ORBU4J4i6HyC3qi-QV

    Paru dans MAD magazine, une source de moqueries astronomiques !

    #bande_dessinée #Cuba #USA #guerre_froide #humour #tragédie

  • Threads (1984)
    https://archive.org/details/1984-threads-remastered

    https://en.m.wikipedia.org/wiki/Threads_(1984_film)

    Threads is a 1984 British-Australian apocalyptic war drama television film jointly produced by the BBC, Nine Network and Western-World Television Inc. Written by Barry Hines and directed and produced by Mick Jackson, it is a dramatic account of nuclear war and its effects in Britain, specifically on the city of Sheffield in Northern England. The plot centres on two families as a confrontation between the United States and the Soviet Union erupts. As the nuclear exchange between NATO and the Warsaw Pact begins, the film depicts the medical, economic, social and environmental consequences of nuclear war

    Die Rückkehr der Atombombe: Vom Kollaps der Vernunft - 23.4.2024
    https://www.telepolis.de/features/Die-Rueckkehr-der-Atombombe-Vom-Kollaps-der-Vernunft-9694598.html

    #guerre_froide #guerre_nucléaire #film #fiction

  • Berlinskij Kreml / The Terror Machine, de Gregory Klimov, Le prix de la liberté, addendum à la deuxième édition du livre, 1971,
    https://g-klimov.info/klimov__pesn_pobeditelya_ru/pesn_pobeditelya_20.html

    On ne trouve ce texte en ligne que dans la version russe du livre. Vu d’aujourd’hui, plus de soixante dix ans après sa première publication et plus de cinquante ans après celle de l’addendum, ce texte nous révèle deux éléments intéressants de l’histoire de la guerre froide.

    D’abord Klimov raconte que le systéme de gestion des DP (displaced persons) états-unien était géré par des gangsters qui pillaient les réfugiés, les torturaient et les utilisaient comme monnaie d’échange pour leurs deals avec les services secrets de l’URSS. Il s’agit des observations personnelles du vécu l’auteur en 1947. Dans la deuxième partie du texte on découvre le résultat de la transformation d’un jeune homme brillant sous l’impression des persécutions stalinistes et états-uniennes et de sa tentative manquée to sort things out .

    En 1971 déjà Gregory Klimov se réfugie dans des idées dignes des médecins eugénistes nazis qui tournent autour de la décadence. Il explique cette vue du monde plus explicietement dans un autre texte. C’est remarquable car il anticipe une partie de la pensée russe post-soviétique dont se servent les poutinophobes pour dénoncer les Russes comme fascistes.

    Grigory Klimov « Le chant du vainqueur »
    Le prix de la liberté
    Addendum à la deuxième édition du livre
    De nombreux lecteurs de « Le Kremlin de Berlin » se sont demandé : « Et que s’est-il passé ensuite ? »
    Lorsque je leur en ai parlé, ils se sont exclamés : « Mon Dieu, c’est si intéressant ! Pourquoi ne l’avez-vous pas décrit ? »
    J’ai donc décidé de décrire les choses « intéressantes » que je n’avais pas décrites auparavant.
    Si aujourd’hui, en 1971, un touriste soviétique, un marin ou un Kagabeshnik saute d’un train ou d’un bateau à vapeur, il est immédiatement emmené en Amérique. Crier dans la presse qu’il a choisi la liberté américaine est une forme de guerre psychologique. Même la fille de Staline a été emmenée en Amérique.
    C’est parce qu’aujourd’hui, les États-Unis et l’URSS sont officiellement ennemis. Lorsque j’ai choisi la liberté, en 1947, ils étaient officiellement amis et alliés. Et il n’y avait pas encore de guerre psychologique. L’élection de la liberté était un peu différente à l’époque. À l’époque, je travaillais comme ingénieur principal pour la SVA, l’administration militaire soviétique en Allemagne.
    Dans ma quête de liberté, j’ai essayé de demander aux alliés occidentaux, les Britanniques et les Américains, ce que l’on appelle l’asile politique par le biais d’intermédiaires allemands. C’était un geste de courtoisie. Mais les gentilshommes alliés ne voulaient rien entendre.
    Au même moment, les journaux berlinois écrivaient que les Britanniques avaient échangé leur agent-espion Igor Stern, qui s’était endormi et avait été arrêté dans la zone soviétique, contre un officier soviétique qui avait choisi la liberté et demandait « l’asile politique » dans la zone anglaise.
    Quelques années plus tard, les Anglais ont condamné ce même Igor Stern à 10 ans de prison pour des faits délictueux. Et le Russe, qui cherchait la liberté, a payé de sa vie ce Stern.
    Comme j’ai été l’un des premiers à arriver au Kremlin à Berlin, j’ai eu un bon appartement et beaucoup de bonnes choses. Les officiers démobilisés avaient le droit d’emporter tout cela comme trophée. Je donnais maintenant toutes ces bonnes choses à mes bons amis. C’étaient des majors et des lieutenants-colonels du service du génie, presque tous membres du Parti. Lorsqu’ils ont reçu mes cadeaux, ils ont deviné que j’allais partir n’importe où, mais pas en URSS. Certains d’entre eux me l’ont directement laissé entendre. Mais moi, avec un pistolet dans ma poche, je me suis entêté :
    – Je vais à Moscou !
    Un camarade major, après s’être donné du courage avec un verre de vodka, m’a avoué qu’il avait un oncle à Paris et m’a proposé d’écrire son adresse. Je secouai la tête :
    – Je vais à Moscou !
    En guise de cadeau d’adieu, j’ai offert à Inga, une gentille petite amie allemande, toute une cargaison d’objets. Elle aussi a compris qu’un officier soviétique qui partait en Russie ne donnait pas toutes ses affaires, et elle m’a dit : "Écoute, veux-tu que je t’aide ?
    – Écoute, veux-tu que je t’aide à t’enfuir en Allemagne de l’Ouest ?
    Je me tais.
    « J’ai un camarade de classe », dit Inga. - Il était dans la SS pendant la guerre. Maintenant, il s’occupe de faire passer la frontière aux gens. C’est vrai, je devrais vous dire qu’à la frontière, il les tue, leur tire une balle dans la nuque et les vole..... Mais je lui dirai que tu es mon fiancé, et il ne te tuera pas.... Tu veux que je vienne avec toi ?"
    Je l’ai remerciée et j’ai dit que j’allais à Moscou. Oh, cette Inga était une bonne femme. Il est bon de s’en souvenir !
    Finalement, avec l’aide d’intermédiaires allemands, je suis arrivé en voiture dans un village frontalier de Thuringe. Le soir, deux guides, père et fils, paysans locaux, m’ont fait passer la frontière. Ils empruntaient souvent ces chemins forestiers pour se rendre chez leurs parents de l’autre côté de la frontière.
    C’était une nuit d’hiver lumineuse. Me souvenant de l’histoire d’Inga, je marche derrière mes guides - avec un parabellum dans ma poche - juste au cas où. Sous mon manteau est accroché à mon épaule, la bouche vers le bas, un fusil automatique allemand. Des grenades et des chargeurs de rechange pour la mitrailleuse sont éparpillés dans mes poches. C’était au cas où les gardes-frontières soviétiques nous croiseraient.
    Nous avons marché ainsi pendant deux ou trois heures. Et nous sommes arrivés sans encombre à la première gare de la zone américaine. Derrière le bâtiment de la gare, j’ai payé mes conducteurs : je leur ai donné, je crois, mille marks d’occupation, ce qui, à l’époque, représentait environ 5 dollars américains. C’était le premier paiement pour la liberté et, je dois le dire, je l’ai gagné très honnêtement. En guise de récompense, j’ai donné à mes guides mon parabellum, mon fusil automatique et mes grenades à main, ce dont ils m’ont vivement remercié et m’ont longuement salué. Peut-être ne s’attendaient-ils pas à avoir tout un arsenal derrière eux.
    Je suis monté dans le train. Allons-y. Je ne sais même pas où. Loin de la frontière. J’étais tellement concentré sur mon évasion de la zone soviétique que je n’ai pas pensé à ce que je ferais dans la zone américaine. Je me perdais parmi les Allemands, je jetais un coup d’œil et nous verrions ensuite. À cette fin, j’ai même obtenu une carte d’identité allemande au nom de Ralph Werner.
    Bientôt, la police militaire américaine commence à marcher le long du train : les Alliés vérifient les documents. Je montre ma kennecard et je suis arrêté. À la gare suivante, les Alliés me remettent à la police allemande. Je demande à l’aimable policier allemand ce qui se passe. Il s’avère que ma fichue carte d’identité provient de la zone soviétique et qu’ils ont d’autres cartes d’identité ici. Herr Werner sera donc renvoyé dans la zone soviétique par le prochain train. Le policier compatit beaucoup avec moi, mais c’est l’ordre des autorités d’occupation américaines : renvoyer tous les réfugiés allemands de la zone soviétique. Y compris Herr Werner.
    Voyant qu’il n’y avait rien à faire, j’ai sorti d’une autre poche ma carte d’identité SBA (Administration militaire soviétique), où j’étais représenté en uniforme d’officier soviétique.
    Le lendemain, je me suis retrouvé chez les Alliés, dans une villa de campagne près de Kassel, où il y avait une sorte de maison de vacances pour les officiers de renseignement américains. L’après-midi, l’un d’entre eux m’a invité à participer à une compétition de tir au pistolet. Nous avons tiré dans la cour sur des morceaux de bois de chauffage fraîchement sciés, en les mettant sur la crosse. L’éclaireur américain sortait de derrière sa ceinture un revolver court, presque sans canon, comme celui que portent les fringants agents du F.B.I. dans les films. Il a également tiré comme un cow-boy au cinéma - de la hanche, sans viser. Et, bien sûr, il ratait tout le temps.
    Il a ensuite sorti de sa poche un Colt de calibre 32 et me l’a tendu. Comme je tirais avec une arme normale et d’une manière normale, mes résultats étaient bien meilleurs. Mais je soupçonne qu’après cela, l’officier de renseignement américain a conclu que j’étais un tireur d’élite et donc un dangereux agent soviétique. Pour ma défense, je peux seulement dire qu’il était tout simplement impossible de tirer plus mal que lui.
    Quoi qu’il en soit, le lendemain, on m’a fait monter dans une jeep et on m’a conduit au Camp King à Oberursel, près de Francfort. Il s’agissait d’un ancien camp de concentration allemand où les Américains détenaient désormais principalement des criminels de guerre allemands. Le panneau au-dessus de la porte indiquait : « Quartier général du contre-espionnage américain en Europe ».
    Dans ce camp de concentration, j’ai été détenu pendant trois mois. En isolement. J’ai donc choisi la liberté - et pour la première fois de ma vie, je me suis retrouvé derrière les barreaux. Avec des criminels de guerre allemands. Un allié rendant visite à un allié !
    Pendant tout ce temps, je crois que je n’ai été interrogé que deux fois. À l’époque, je parlais couramment l’allemand, mais en anglais, je pouvais seulement lire, mais je ne pouvais pratiquement pas parler. Lors du premier interrogatoire, une Galicienne portant l’uniforme d’un sergent américain a servi d’interprète russe. Mais elle ne comprenait pas le russe et je ne comprenais pas le galicien. Qu’a compris le jeune lieutenant américain de cet interrogatoire ? - Je n’en sais rien.
    Je me suis dit : "Mon Dieu, ils n’ont donc pas un seul interprète russe dans les quartiers principaux du service de contre-espionnage américain ! Les protocoles d’interrogatoire sont estampillés « top secret ». Et cette femme ne comprend pas la moitié de ce que je dis. Et ma vie en dépend. Quelle idiote !"
    Lors du deuxième interrogatoire, on m’a donné un interprète allemand. C’était un jeune homme juif portant l’uniforme d’un caporal américain, qui parlait yiddish au lieu d’allemand. Il ne comprenait pas l’allemand et je ne comprenais pas le yiddish. L’interrogatoire s’est déroulé comme suit :
    Question :
    – De quel établissement d’enseignement avez-vous été diplômé ?
    J’ai répondu en allemand :
    – Polytechnische Hochschule, c’est-à-dire l’Institut polytechnique, où l’on forme des ingénieurs. Le traducteur traduit en anglais comme suit :
    – Vokeschenal High School, ce qui, en Amérique, signifie une école de commerce où vont les plus mauvais élèves qui ne peuvent pas obtenir un diplôme d’une école secondaire normale.
    Les questions qui suivent permettent à l’enquêteur d’apprendre que j’ai obtenu mon diplôme à l’âge de 23 ans, alors que les Américains les plus stupides y parviennent à l’âge de 18 ans. Je suis donc une sorte de supercrétine. Et après ça, j’ai été l’ingénieur en chef du SAS. Qu’est-ce que l’interrogateur a retiré de cet interrogatoire ? - Je n’en sais rien.
    Je me disais : « Comment interroger des criminels de guerre allemands si vous n’avez même pas d’interprètes allemands ? (Soit dit en passant, l’un de ces interprètes des services de renseignement américains était un juif, Henry Kissinger, qui devint plus tard le bras droit du président Nixon). Et ce magasin est le siège du contre-espionnage américain en Europe ?! »
    À Moscou, j’ai obtenu par hasard un diplôme de l’Académie diplomatique militaire, où des milliers de personnes étudiaient toutes les langues du monde, jusqu’aux dialectes nègres d’Afrique. Et ici ?
    Pour être objectif, je dois dire que la nourriture était bonne. Tous les matins, au lever du drapeau, le haut-parleur de la cour diffusait l’hymne américain, que j’écoutais, je l’avoue, avec le plus grand dégoût. Aujourd’hui encore, 24 ans plus tard, lorsque j’écoute cet hymne, il me rappelle automatiquement le camp King.
    Une cellule d’isolement. Sur les murs, des inscriptions laissées par d’anciens prisonniers. Dans toutes les langues du monde, y compris le russe. Certaines d’entre elles sont manifestement des notes de suicide. Par la fenêtre, derrière les barreaux, on aperçoit un canon de char américain. Puis des barbelés. Derrière les barbelés se trouve un champ vert, sur lequel des lapins allemands courent tranquillement. Parfois, ces lapins grimpent même sous les barbelés et s’ébattent sous ma fenêtre.
    Et moi, je m’assois et je me dis : « Oh, pourquoi ne suis-je pas un lapin ? » Prisonnier numéro M-62. Un homme qui a choisi la liberté. Lors de l’interrogatoire, j’ai déclaré que j’avais quitté l’URSS pour des raisons politiques et que je me considérais comme un émigrant politique. Mais pourquoi suis-je détenu ? Pourquoi n’y a-t-il pas d’interrogatoire ? Après tout, mon cas est parfaitement clair. J’ai tous mes documents soviétiques sur moi. Mon nom figure dans les procès-verbaux du Conseil de contrôle allié à Berlin, où j’ai travaillé avec les Américains et les Britanniques. J’ai de nombreuses connaissances allemandes qui vivent dans les secteurs américain et anglais de Berlin et qui me connaissent depuis des années, tant dans le cadre de mon travail que sur le plan personnel. Et tout cela est très facile à vérifier.
    D’un point de vue juridique, il existe un traité sur l’échange mutuel des déserteurs. Mais j’ai un certificat de démobilisation de l’armée. Avec toutes les signatures et tous les sceaux. Et même un laissez-passer pour passer la frontière, sur du papier-monnaie avec filigrane et ma carte-photo. Seul le laissez-passer était à l’envers. Mais de toute façon, le traité d’échange des déserteurs ne s’applique pas à moi.
    Mais alors pourquoi suis-je détenu ? Et en isolement. Et sans interrogatoire. Et sous le sceau « top secret ». Peut-être, me suis-je dit, pour m’échanger contre un espion américain qui s’est endormi dans la zone soviétique, comme Igor Stern ? Oh, vous, les marchands de biens vivants !
    Je ne sais pas si, à l’époque, on n’a pas trouvé de biens convenables à échanger, ou si c’est pour une autre raison. Quoi qu’il en soit, trois mois plus tard, un major américain m’a informé avec indifférence que j’étais libéré. En passant, il a fait remarquer qu’ils allaient devoir m’acheter une nouvelle carte d’identité. Au marché noir. À mes frais, bien sûr, avec l’argent qu’on m’avait pris lors de mon arrestation.
    J’étais un peu surpris que le quartier général du contre-espionnage américain, et dans toute l’Europe, n’ait pas d’autre moyen d’obtenir les papiers d’une personne que de les acheter au marché noir. Mais à l’époque, je m’en fichais. Au moins, ils me laissent sortir.
    La nuit, avant même l’aube, un Tadjik, qui parlait à peine le russe et qui servait apparemment de chauffeur dans ce camp, m’a conduit en voiture du camp King à Stuttgart. En chemin, il s’est arrêté dans un camp DP et a pris un papier certifiant que moi, Herr Ralf Werner, un homme de nationalité indéterminée, j’avais été libéré du camp DP et que je déménageais dans un appartement privé, c’est-à-dire que je passais des mains américaines à l’économie allemande. Je passais donc des mains des Américains à celles de l’économie allemande. C’était là toute l’astuce de l’achat de documents au marché noir.
    Avec ce morceau de papier, nous sommes allés à la police allemande et mon Tadjik a commencé à obtenir de nouveaux documents pour moi. Mais il parlait allemand de telle manière que le policier ne le comprenait pas. J’ai alors fait appel aux services de renseignements américains et j’ai expliqué au policier que ce n’était pas ce Tadjik qui avait besoin de ces documents, mais moi, Herr Werner. J’ai donc obtenu une nouvelle kennkarta, un permis de séjour et des cartes de rationnement.
    C’est ainsi que le vainqueur a choisi le destin du vaincu.
    Après avoir pris congé du Tadjik, je me suis assis sur un banc public et j’ai ouvert le paquet scellé que le Tadjik m’avait glissé au dernier moment - au nom de ses supérieurs. Il était censé contenir mes documents et l’argent emporté lors de l’arrestation. Mais tous les documents avaient disparu. La moitié de mon argent a disparu avec eux - 20 000 marks d’occupation, le prix d’une nouvelle carte d’identité.
    Travaillant comme ingénieur principal pour la SVA, je gagnais en tout et pour tout 8 000 marks par mois. Il n’est donc pas surprenant qu’au moment où la « liberté » a été élue, je me sois retrouvé avec environ 40 000 marks d’occupation (et d’inflation).
    J’ai payé 1 000 marks aux guides allemands qui m’ont fait passer la frontière. Et c’était un gesheft honnête. Mais voilà que le service de renseignement américain me réclame 20 000 marks pour ma « liberté » et tous mes documents professionnels, y compris mon diplôme d’ingénieur, dont je pourrais encore avoir besoin à l’avenir. Cette affaire américaine ne m’a pas enthousiasmé.
    Traduits en monnaie américaine, 20 000 marks représentaient à l’époque une somme insensée, de l’ordre de 100 dollars. Mais les officiers de renseignement américains n’étaient pas dupes. Pour le réfugié que j’étais, cette somme n’avait pas la même signification. Après tout, à cette époque, les Allemands, parmi lesquels je devais vivre, recevaient 400 à 500 marks par mois.
    Si les services secrets américains n’avaient volé que moi, si cela avait été un accident, j’aurais simplement craché et je n’aurais pas décrit la situation avec autant de détails. Mais ce n’était pas un accident, c’était un système. C’est ainsi que presque tous les Soviétiques qui ont « choisi la liberté » ont été traités à l’époque, entre 1945 et 1950. Plus tard, en tant que président de l’Association centrale des émigrés d’URSS de l’après-guerre, c’est-à-dire des personnes qui avaient suivi un chemin similaire, j’ai entendu de nombreuses histoires similaires de leur part.
    Les services de renseignement américains sont officiellement appelés les services de renseignement du gouvernement américain. Mais je dois dire à l’oncle Sema que ce bras n’est pas tant un bras de renseignement qu’un bras de voleur.
    Je dois faire remarquer que le vol ou le cambriolage au Camp King a été effectué de manière assez organisée et prudente. La veille de ma libération, un sergent américain est entré dans ma cellule et m’a tendu un papier à signer, disant : « Je confirme par la présente que j’ai récupéré sains et saufs tous les documents, objets de valeur et, en général, tout ce qui m’a été enlevé lors de mon arrestation ».
    En regardant les mains vides du sergent, j’ai demandé :
    – Où sont toutes ces choses ?
    – Vous les aurez demain quand vous serez libéré", m’a répondu le sergent.
    Après trois mois d’isolement, et avec la perspective d’être renvoyé devant le peloton d’exécution, je n’avais pas particulièrement envie de me disputer avec le sergent pour quelques papiers. J’ai donc pris et signé le papier que le sergent m’a glissé.
    Ainsi, les services secrets américains m’ont non seulement volé, mais ils ont également reçu un reçu attestant que tout m’avait été rendu. C’est peut-être la seule raison pour laquelle ils m’ont gardé à l’isolement pendant trois mois - comme entraînement psychologique pour intimider une personne. Je ne vois pas d’autre raison logique.
    Après avoir vécu quelques jours à Stuttgart, j’ai commencé à réfléchir à ce que je devais faire ensuite. Les officiers soviétiques de la mission de rapatriement se promenaient encore dans Stuttgart à cette époque. Il était un peu étrange pour Herr Werner de regarder cet uniforme qu’il avait lui-même porté récemment.
    Pour une raison quelconque, je me suis souvenu du Conseil de contrôle allié à Berlin, où j’avais rencontré les Américains. Les véritables vainqueurs de l’Allemagne hitlérienne y étaient clairement identifiés. Les Soviétiques se sont comportés de manière résolument cavalière, tandis que les Américains ont fait preuve d’ingratitude. Ils ont tâté mes boutons et mes épaulettes et m’ont souri de manière flatteuse. Ensuite, il y avait des divisions de chars soviétiques derrière moi. Ils m’ont alors pris pour un Soviétique et j’ai pensé qu’ils étaient des gentlemen. Aujourd’hui, le soviétique est devenu russe et les gentlemen sont devenus des escrocs. Bien sûr, pas tous, mais...
    Mais je n’avais pas encore subi la psychologie du vainqueur du Conseil de contrôle. Et si j’allais voir le consul américain à Stuttgart et lui demandais conseil sur ce que je devais faire ? Après tout, les Américains du Conseil de contrôle ne demandaient qu’à me parler. Mais je n’ai pas pu le faire à l’époque. Aujourd’hui, je le peux. Eh bien, parlons-en. Après tout, vous êtes les patrons ici. Je n’ai rien à vous cacher. Même si les services secrets américains sont truffés d’escrocs, les diplomates américains doivent être des gentlemen.
    Je suis donc assis dans le bureau du consul. Il a l’air d’un gentil monsieur avec une bedaine. Mais pour une raison que j’ignore, ce monsieur est surtout intéressé de savoir où et comment j’ai obtenu mon kennkart.
    – Par la police allemande, réponds-je. - Mais avec l’aide des services secrets américains.
    – Et avez-vous payé quelque chose pour cela ?
    La question est assez délicate et même un peu provocatrice. Si je me tais, le consul peut vérifier, et alors on me demandera : « Pourquoi le cachez-vous ? Peut-être cachez-vous aussi quelque chose d’autre ? »
    – Oui et non", réponds-je.
    – Que voulez-vous dire ? - insiste le consul.
    – Je ne l’ai pas payé moi-même, mais ils me l’ont pris.
    – Combien ?
    – Vingt mille marks.
    – Par qui ?
    – Les services secrets américains.
    Après avoir découvert cette question financière, le monsieur à la bedaine s’est désintéressé de moi. C’est peut-être vrai que les Américains ne s’intéressent qu’à l’argent. - me suis-je dit. En me disant au revoir, le consul m’a promis qu’il ferait quelque chose.
    Et effectivement, le lendemain matin, la police militaire américaine m’a tiré du lit. Ils m’ont mis dans une jeep, avec toutes mes affaires, et m’ont emmené. Ils m’ont emmené au même Camp King, près de Francfort. Ils m’ont retiré ma nouvelle carte d’identité et m’ont de nouveau enfermé à l’isolement.
    J’y suis resté trois mois de plus. Sans un seul interrogatoire. Une seule fois pendant tout ce temps, trois messieurs sont entrés dans ma cellule - comme par hasard - un colonel, un major et un sergent qui servaient d’interprète de l’anglais à l’allemand, ou plutôt, de nouveau en yiddish, où je ne comprenais que quelques mots.
    Sur un ton de reproche, le colonel m’informa qu’ils voulaient m’aider, mais qu’au lieu de leur témoigner de la gratitude, je ne faisais que leur causer des ennuis - un trable - et qu’ils ne savaient tout simplement pas quoi faire de moi : apparemment, ils n’avaient qu’à me renvoyer. Après quoi, secouant la tête d’un air réprobateur, ces messieurs sont partis.
    Comme le colonel est apparemment l’un des chefs du camp, je me suis dit qu’il ne s’agissait pas du travail de certains officiers, mais d’un système : tout le quartier général du contre-espionnage américain est entre les mains de gangsters. Et le consul américain à Stuttgart n’est pas mieux. Ils forment tous un seul et même gang, messieurs de la route.
    Mon opinion personnelle est bien sûr absurde. Mais je n’étais pas le seul à le penser, des centaines de Soviétiques qui avaient choisi la liberté et subi une rééducation idéologique au camp King le pensaient aussi.
    Une nuit, je me suis réveillé en entendant un grondement dans l’une des cellules voisines. À travers les murs, on entendait un bruit de lutte, comme si on attachait quelqu’un, et de forts jurons.... russe... Des piétinements et des voix d’Américains... Puis quelqu’un est traîné dans le couloir.
    Eh, me suis-je dit, cela signifie que quelqu’un de notre côté a été traîné... Pour la restitution.
    Après cela, j’étais tellement dégoûté que j’ai décidé d’entamer une grève de la faim et de refuser de prendre le plateau du petit-déjeuner le matin. Mais le sergent a placé le plateau sur la couchette du haut et a fermé la porte à clé. Le petit-déjeuner est resté là jusqu’à l’heure du déjeuner. Au déjeuner, un autre sergent plaça un autre plateau, qui resta là jusqu’au dîner. Et le dîner restait sur la couchette du haut jusqu’au matin. Et ainsi de suite tous les jours. Pendant douze jours.
    Si quelqu’un pense qu’il s’agit d’une farine alléchante, il n’en est rien. Même si j’avais toujours de la nourriture au-dessus de ma tête, je n’avais pas du tout envie de manger. Ensuite, on ne boit même plus. Seules la fatigue et la somnolence apparaissent. Et tout cela est absolument indolore. Ceux qui veulent perdre du poids peuvent essayer. Mais il faut d’abord se retrouver dans le couloir de la mort.
    Finalement, après douze jours de grève de la faim, un major américain est venu dans ma cellule avec une pipe entre les dents et m’a demandé ce qui se passait. Je lui ai répondu que je voulais moi-même savoir ce qu’il en était. Et pourquoi suis-je détenu ici ?
    En regardant la pipe entre les dents du major, je me suis souvenu que je n’avais pas fumé depuis plusieurs jours et je lui ai demandé une cigarette. Le major fouilla dans ses poches, puis regarda sa pipe, qui était vide et même sans cendres, et m’informa qu’il n’avait ni cigarettes ni tabac. Il a sucé la pipe vide. Juste pour le style.
    J’imite Sherlock Holmes, me suis-je dit.
    D’ailleurs, du point de vue de la psychanalyse freudienne, si populaire en Amérique, les hommes impuissants aiment sucer une pipe vide pour se donner l’air puissant. Et l’impuissance est souvent liée au sadisme. Et le sadisme, à son tour, est souvent associé à une soif pathologique de pouvoir sur les autres. Et ces types pullulent dans tous les lieux maléfiques - Tchéka, Gestapo ou camp de concentration américain - où un homme peut abuser d’un autre en toute impunité.
    Suçant sa pipe vide, le major a dit entre ses dents que j’étais envoyé demain et m’a recommandé d’arrêter ma grève de la faim afin de prendre des forces pour le voyage.
    – Où vais-je être envoyé ? - demandai-je.
    – Je ne le sais pas, répondit le major.
    – Et est-ce que c’est certain que c’est demain ?
    – Je vous donne ma parole d’honneur en tant qu’officier américain", a dit le major, apparemment un peu vexé que je ne l’aie pas cru dès le premier mot.
    Eh bien, pensai-je, si demain on m’envoie dans un endroit inconnu, il vaut mieux, en effet, économiser des forces pour la route - vendre ma vie plus cher.
    Sans retirer sa pipe vide de la bouche, le major m’a souhaité un bon appétit et est parti. Mais comme la grève s’était terminée dans des termes assez vagues, malgré douze jours de grève de la faim, je n’avais pas d’appétit. Sur la couchette du haut, il y avait un plateau de repas froid. Mais j’ai attendu le dîner, quand on m’a apporté un service chaud, et c’est seulement à ce moment-là que j’ai mangé. Je n’avais pas d’appétit non plus.
    Le jour suivant s’est écoulé sans changement. Puis le deuxième. Et le troisième. La parole d’honneur de l’officier américain s’est donc révélée aussi fausse que sa pipe vide !
    Auparavant, en tant que criminel particulièrement dangereux, on m’avait emmené me promener seul. Maintenant, je me promenais en compagnie d’un général SS et d’un colonel de la Gestapo. Au début, j’ai eu honte de leur dire qui j’étais. Je n’avais pas honte de moi, mais des Américains. Lorsque j’ai finalement révélé mon secret, mes collègues de prison ont presque éclaté de rire. Ils s’attendaient à tout sauf à une telle absurdité.
    Mais je ne riais pas. Que faire ? Attendre qu’ils vous attachent comme un mouton la nuit et qu’ils vous rendent ? Et selon la loi soviétique, fuir à l’étranger est officiellement considéré comme de la haute trahison et est passible du peloton d’exécution. J’ai lu de telles phrases plus d’une fois dans les ordres du quartier général de la SVA.
    En proie à un sentiment de protestation impuissante, j’ai décidé d’essayer de me suicider. Bien sûr, je n’avais pas l’intention de me tuer sérieusement. Mais quand on est sur le point d’être tué par d’autres, pourquoi ne pas essayer d’abord soi-même ? Au moins, il y a l’avantage de pouvoir changer d’avis à la dernière minute. C’est pour l’instant ma seule liberté.
    Après le dîner, je me suis mis au travail. J’ai déchiré ma chemise en lanières, je les ai torsadées en harnais et je les ai enduites de savon. Je les ai ensuite attachées en une corde et j’ai fait une boucle à l’extrémité. Le seul endroit où la corde pouvait être accrochée était une grille au plafond, derrière laquelle était cachée une ampoule électrique.
    La cellule était déjà plongée dans la pénombre. Je me suis assis sur la couchette supérieure, j’ai attaché la corde à la grille et j’ai regardé le plafond. Puis j’ai appuyé sur le plafond avec ma main. Pour un ingénieur ayant étudié la résistance des matériaux, il était clair que le jeu n’en valait pas la chandelle : mon cou était bien plus résistant que le mince plafond en contreplaqué.
    Pour ne pas me tromper, j’ai décidé de tester d’abord le plafond. Et pour ne pas gaspiller mon cou, j’ai saisi la boucle à deux mains et j’ai sauté.
    Mes calculs sur la résistance des matériaux se sont avérés exacts. J’ai atterri en douceur, comme dans un gymnase, sur le sol. Toutes sortes de matériaux de construction et de fragments d’ampoules me sont tombés sur la tête.
    Comme je ne voulais pas encore dormir, j’ai décidé d’essayer une autre méthode pour me tuer. Dans l’obscurité, j’ai cherché à tâtons sur le sol une douille d’ampoule dont les bords étaient recouverts de fragments de verre aiguisés comme des scies. Je me suis assis sur la couchette inférieure et j’ai commencé à scier les veines de mon bras gauche avec cet instrument. Là où bat le pouls.
    Je ne me sentais pas mal à l’aise de scier les veines d’où venait le sang. J’ai beaucoup de sang. Pendant la guerre, j’ai souvent donné mon sang pour des transfusions - juste pour le plaisir, parce que j’en ai beaucoup. Mais, bizarrement, pour une raison quelconque, je me suis senti désolé de voir dans l’obscurité les tendons, qui sont quelque part tout près de moi. Après tout, me suis-je dit, en cas de problème, tu ne pourras pas serrer le poing.
    Quelque chose de chaud et de collant a coulé le long de mon bras, comme disent les écrivains. La scie avec les éclats de verre était plutôt inconfortable et déchirait la viande. Cette procédure ennuyeuse a fini par me lasser et j’ai eu envie de dormir. Je me suis allongé sur la couchette, j’ai posé ma main (je l’ai sentie - elle fuyait) et je me suis endormi.
    Dans mon sommeil, j’ai entendu la porte s’ouvrir, les débris de verre et de matériaux de construction crisser sur le sol. Le faisceau d’une lampe de poche a traversé la cellule et a touché une flaque de sang sur le sol. Puis l’alarme a retenti dans le couloir. On a appelé un médecin, on m’a bandé le bras, on m’a enlevé mes lunettes et on m’a transféré dans une autre cellule. Seul, bien sûr. Comme il est d’usage pour les criminels dangereux.
    Le lendemain soir, un visiteur est venu dans ma cellule. Il portait un uniforme militaire, avec le ventre volumineux d’un rentier prospère, un énorme pistolet sur son cul tout aussi volumineux, et un brassard noir avec une croix blanche sur sa manche. J’ai regardé et je me suis demandé si c’était un pirate ou un médecin. Mais il s’agissait en fait d’un prêtre protestant.
    La seule chose dont je me suis rendu compte, c’est qu’une fois et pour une raison quelconque, il s’était également suicidé. Je pense que lorsqu’il était missionnaire en Afrique, ses disciples ont décidé qu’il valait mieux le faire bouillir et le manger.
    Que les cannibales allaient manger le pasteur, il y avait une certaine logique à cela. Une logique cannibale, mais une logique tout de même. Le pasteur était gros et il serait utile aux cannibales affamés. Mais à quoi cela servait-il aux Américains de faire ce qu’ils étaient en train de me faire ? - Je ne pouvais pas comprendre cela.
    Car à l’époque, je me considérais comme un partisan aussi sincère de l’Occident que, par exemple, à l’inverse, ces communistes américains qui passent du côté soviétique. Mais si les services secrets soviétiques rencontraient ces communistes comme les Américains m’ont rencontré, tous ces escrocs et ces voleurs seraient abattus comme des chiens. Non pas pour avoir volé, mais pour avoir porté atteinte aux intérêts de l’État. Et ici ? Quelle sorte de démocratie est-ce là ?
    De temps en temps, des livres anglais en lambeaux étaient apportés dans la cellule. Il s’agissait de romans policiers ou d’espionnage. En les lisant, je me suis dit : « C’est dans ces livres que les espions américains apprennent à travailler ».
    Mais parfois, ils apportaient des journaux allemands. Dans l’un d’eux, j’ai lu un petit article sur un soldat soviétique qui s’était échappé à l’Ouest et qui était resté dans un hôpital américain en attendant d’être extradé vers les autorités soviétiques.
    Je me suis dit qu’il était peu probable que ce soldat se soit rendu à l’hôpital pour des maux d’estomac. Il a probablement aussi tenté de se suicider lorsqu’il a appris qu’il allait être extradé.
    La note poursuit en disant que lorsqu’un groupe d’Américains accompagnés d’officiers soviétiques s’est présenté à l’hôpital, le soldat condamné a arraché une mitrailleuse à quelqu’un, a tiré sur huit ou neuf personnes autour de lui, puis s’est suicidé.
    J’ai soigneusement déchiré cette note et l’ai glissée dans ma poche.
    Quelques jours plus tard, on m’a réveillé au milieu de la nuit, on m’a emmené à la douche et on m’a dit de me raser. Ensuite, on m’a fait monter dans une jeep accompagnée de deux policiers militaires. L’un d’eux avait un sac avec mes papiers.
    À l’aube, nous sommes entrés sur l’autoroute et j’ai lu le panneau : « Tant de kilomètres jusqu’à Leipzig ». Nous sommes donc en route vers la frontière soviétique. Il reste quatre heures.
    Un soldat s’est assis au volant, l’autre à côté de lui, et on m’a mis à l’arrière. C’étaient de simples Américains à l’arrière du crâne rasé et rose. Pour montrer leur démocratie, ils m’ont même offert du chewing-gum. Puis le second s’est endormi, et son colt de gros calibre s’est balancé par derrière et m’a tapé séduisamment sur le genou.
    Prends ce colt, me suis-je dit, tire sur ces têtes roses vides et cours. Il y a des bois et des buissons tout autour. Mais courir où ? Je ne peux pas aller à l’est. Et si je tue ces soldats, je ne pourrai pas aller à l’ouest.
    La jeep roulait à vive allure vers la frontière soviétique, et j’essayais dans mon esprit de prévoir toutes les possibilités de transfert et de mettre la main sur une arme. Je me suis souvenu d’une note dans ma poche. Ce soldat a eu de la chance de mettre la main sur un fusil automatique. La mitrailleuse a 72 cartouches, mais ce colt minable n’en a que 8, et on ne peut pas faire de feu d’artifice avec un colt.
    Le plus important, c’est d’arracher l’arme. Au moins, je n’étais pas ligoté comme ce chercheur de liberté qui jurait alors qu’on le traînait dans les couloirs du Camp King la nuit.
    Je n’avais même pas particulièrement envie de tirer sur les conseillers. Pourquoi ? Parce qu’ils pouvaient être des gens comme moi, des esclaves du système. Mais abattre plus d’Américains, c’est un oui... Suis-je une nuisance pour vous ? Pourquoi me livrez-vous à l’abattoir ?
    Bien sûr, ce n’est pas la faute des soldats américains qui m’emmènent. Quelle est ma faute ? Je ne suis qu’un animal chassé. J’aimerais pouvoir abattre les lieutenants, les majors et les colonels qui sont restés au Camp King...
    Et puis lâchez la mitrailleuse, levez les mains et allez vers vos hommes pour qu’ils soient fusillés. Mais avant le peloton d’exécution, je ne vous demanderai qu’une seule faveur : faire un discours devant les soldats et les officiers soviétiques. Pour une fois, quand j’étais écolier, j’ai été le premier orateur. Puis, devenu adulte, je me suis tu. La conscience m’en a empêché. Mais maintenant, je vais faire un tel discours, un tel discours, du fond du cœur, du fond de mon cœur :
    – Camarades, frères, battez ces salauds d’Américains jusqu’à la dernière balle ! Je serais bien le premier, mais vous voyez, je ne peux pas... Ne croyez pas un seul mot des Américains. Ce sont tous des voleurs et des menteurs. J’en ai fait l’expérience moi-même. Et leur glorieuse liberté - la voilà, regardez-moi ! Vous voyez ?
    J’étais tellement en colère que j’étais même prêt à rejoindre le parti communiste avant d’être fusillé. Je vais le dire :
    – "Camarades, frères, je n’ai plus rien à perdre. Je vais donc vous dire toute la vérité. Oui, j’ai évité de rejoindre le parti communiste parce que je pensais que tous les communistes étaient des idiots ou des salauds. Mais maintenant, je suis convaincu que les Américains sont encore plus idiots et plus salauds. Et comme il n’y a pas de vérité dans le monde, inscrivez-moi au parti communiste. Je veux mourir en communiste !
    Oui, je leur ferai la propagande qu’aucun responsable politique n’a pu inventer. Et tout cela du fond du cœur. Et comment vont-ils abattre l’homme dont les Américains ont fait un ardent communiste ?
    Et je me suis dit : il y aura un idiot de moins qui aura cru à la liberté.... Ah, les ailes d’un paysan.
    Il est arrivé quelque chose de similaire aux soldats soviétiques qui se sont rendus aux Allemands au début de la guerre. Après avoir traversé les camps de la mort allemands, si ces soldats se sont à nouveau engagés dans l’Armée rouge, ils se sont vraiment battus jusqu’à la dernière balle.
    Entre-temps, la jeep a roulé jusqu’à la gare frontière du chemin de fer Bebra West. La même gare où, six mois plus tôt, j’avais choisi la « liberté » pour passer ces six mois dans une prison américaine.
    L’un des accompagnateurs a pris le sac contenant mes papiers et s’est rendu chez le commandant militaire américain. Je me suis assis là, m’attendant à ce que cela commence maintenant.... En même temps que le commandant américain, les gardes soviétiques armés de fusils automatiques sortaient et.... Je voulais juste arracher la mitrailleuse. J’ai retiré le support, libéré la sécurité et, le doigt sur la gâchette, j’ai tiré sur les Américains.....
    Au bout d’un moment, l’escorte est sortie seule et m’a fait signe de la main de sortir. Ils ont donc décidé de m’emmener là-bas. Je suis sorti de la voiture pour me rendre au bureau du commandant.
    Mais l’escorte s’est mise au volant et a démarré le moteur, comme si elle allait partir. Je n’ai eu d’autre choix que de demander :
    – Où dois-je aller ?
    – Où vous voulez aller", répond le soldat en mâchant du chewing-gum. - Si vous voulez, allez par là", dit-il en faisant un signe de la main en direction du côté soviétique. - Et si vous ne voulez pas, allez où vous voulez...
    Le soldat a fait tourner la jeep et a donné un coup d’accélérateur, de sorte que les pierres sous les roues me sont tombées dessus, comme dans les films de gangsters. Et je me suis retrouvé seul.
    J’ai regardé autour de moi pour voir si j’étais suivi. Le soleil brillait, les Allemands se promenaient et personne ne faisait attention à moi. J’avais l’impression d’être à nouveau libre. Je me suis assis sur une pierre à l’entrée de la gare et j’ai essuyé la sueur de mon front. Intérieurement, je m’étais préparé à toutes les possibilités, sauf à celle-ci.
    J’avais déjà tellement dit adieu à la vie que le retour à la vie m’avait assommé. Au lieu de la joie ou du soulagement, je ne ressentais qu’une froide fureur. Encore une chose sournoise ! Quel est ce jeu du chat et de la souris ?
    Poste frontière. Des policiers allemands se promènent et vérifient les documents. Il y a aussi des députés américains. Il y a six mois, j’ai été arrêté ici alors que je vérifiais mes papiers. Pour m’apprendre la gratitude et les bonnes manières, ces messieurs du Camp King m’ont retiré la carte de séjour pour laquelle ils m’avaient pris 20 000 marks. Et maintenant, je n’avais plus de papiers du tout. Si un policier s’approchait de moi et me demandait mes papiers, il me renverrait à Kamp-King, d’où je venais, pour identification.
    Le prochain train pour Stuttgart ne part que le lendemain matin. Comme il était dangereux de passer la nuit à la gare, j’ai passé ma première nuit de liberté en première ligne : je suis simplement entré dans une maison bombardée loin de la gare, je me suis allongé sur une pile de briques, j’ai mis mon poing sous ma tête et je me suis endormi en regardant le ciel étoilé au-dessus de ma tête.
    À mon arrivée à Stuttgart, je me suis rendu au poste de police où j’avais obtenu ma carte d’identité et j’ai déclaré qu’on me l’avait volée. Bien entendu, ayant appris de ma triste expérience avec le consul américain, j’ai prudemment gardé le silence sur le fait que les voleurs qui avaient dérobé ma carte étaient le quartier général des services de renseignements américains en Europe. Herr Werner a donc reçu un duplicata de sa carte et a commencé une nouvelle vie.
    En 1947, l’Allemagne de l’Ouest à moitié détruite était envahie par des millions de personnes déplacées de tous les pays d’Europe de l’Est et par des millions de réfugiés allemands expulsés de ces mêmes pays d’Europe de l’Est. Il n’y avait aucune possibilité de travailler dans une spécialité. Un jour, j’ai lu dans le journal que les Américains recherchaient un électricien pour superviser les fours à maïs électriques du PX. J’ai posé ma candidature et j’ai dit honnêtement qu’avant cela, j’avais été ingénieur principal dans l’administration militaire soviétique et que j’avais dirigé des dizaines de grandes usines électriques travaillant sur les réparations, et que j’espérais donc pouvoir m’occuper de quelques fours électriques pour rôtir le maïs. Mais j’ai essuyé un refus. Et ils m’ont même dit honnêtement pourquoi : je n’étais pas politiquement fiable.
    Allez au diable, me suis-je dit. J’ai fui l’Union soviétique parce que j’y étais considéré comme politiquement peu fiable. Et ici, je suis aussi politiquement peu fiable !
    Pour tuer le temps, j’ai écrit quelques croquis de la vie au Kremlin à Berlin, c’est-à-dire dans le quartier principal de la SVA, et je les ai envoyés aux éditeurs de Posev. Après avoir lu mes croquis, ils ont décidé que j’étais un professionnel de la presse et m’ont longtemps persuadé d’avouer où j’avais écrit auparavant - dans la Pravda ou les Izvestia, et sous quel nom.
    Je vivais alors dans une mansarde d’un hôtel bon marché, le « White Deer », dans la banlieue de Stuttgart. Je dormais sur un lit, et sur l’autre - un korobeynik allemand borgne, qui gagnait sa vie en se promenant avec une boîte autour du cou dans les villages voisins et en vendant des lacets, de la cire, du fil et des épingles. Pendant qu’il marchait, je m’asseyais à la fenêtre du grenier et j’écrivais sur le Kremlin de Berlin.
    À l’automne, j’ai emménagé dans une petite maison avec une veuve russe. Lorsque la veuve fut convaincue que je ne préférais pas une vieille femme russe mais de jeunes Allemands, les complications patriotiques commencèrent. Je m’asseyais et écrivais mes essais, tandis que la vieille femme offensée s’asseyait et écrivait partout des dénonciations selon lesquelles j’étais un espion soviétique. Puis le gendre de cette vieille femme a sauté par la fenêtre du cinquième étage et s’est tué. Pouvez-vous imaginer quel genre de vieille femme elle était ?
    En hiver, ma cellule n’était pas chauffée et il faisait aussi froid à l’intérieur qu’à l’extérieur. Le seul moyen de chauffage était les cigarettes faites avec du tabac noir de paysan - sucre, plus fort et plus puant que la mahorka. Le papier papyrus était un luxe trop grand pour mon budget, et j’ai filé des cigarettes à partir de « Posev », dans lequel j’étais imprimé, et que l’on m’envoyait en tant qu’exemplaires d’auteur. De cette façon, en une semaine, j’ai fumé tout The Seed.
    Toute la journée, je m’asseyais et j’écrivais - dans mon manteau, avec des gants et un chapeau sur la tête. Parfois, je devais faire des pauses lorsque l’encre de l’encrier gelait. La seule source de revenus était les droits d’auteur du Posev. À cette époque, la nourriture était très rare en Allemagne, et je devais parfois manger du hareng avec de l’eau et du pain pendant une semaine. Une autre semaine, je mangeais du miel artificiel, également avec de l’eau et du pain.
    J’ai essayé d’émigrer en France - on me l’a refusé. J’ai essayé d’émigrer en Australie - on me l’a refusé. Comme politiquement peu fiable. Au même moment, pour la troisième fois, tous mes documents ont mystérieusement disparu, y compris le duplicata de la malheureuse carte Kenn. Des DP expérimentés m’ont assuré que tous les fonctionnaires américains de l’UNRRA et de l’IRO chargés de l’émigration étaient des shantrapa internationaux, des compagnons de route communistes, des agents soviétiques ou simplement des voleurs qui vendaient même leur propre mère au marché noir, et qui avaient sans aucun doute vendu tous mes documents et questionnaires, dans lesquels je devais dire toute la vérité, aux services de renseignements soviétiques.
    Le deuxième hiver arriva, et je restai assis dans ma cellule à écrire. Mais à Noël, j’ai reçu un cadeau émouvant. L’un des lecteurs de Posev, qui gagnait sa vie en volant (un vol honnête), a volé une machine à écrire quelque part et me l’a apportée en cadeau :
    – Vous écrivez si bien, m’a-t-il expliqué, que j’en ai les larmes aux yeux. Et c’est le plus important, quand cela touche le cœur. Après tout, nous avons tous parcouru ce chemin. J’ai donc décidé d’aider la cause commune...
    En partant, il fait claquer ses talons comme un soldat et donne la visière de son chapeau de feutre :
    – Camarade ex-commandant, je vois que vous avez faim et froid ici. Même nous, les voleurs, nous ne vivons pas comme ça. Alors ne soyez pas timide... Si tu as besoin de quelque chose, tu n’as qu’à le dire... Nous t’aiderons.
    Oui, en parlant de voleurs. J’ai des photos de Kitty, une de mes amies berlinoises, qui manquent dans ma valise. J’ai récemment reçu ces photos par la poste. Elles n’ont pas pu se perdre. Mais qui les voudrait ? Seulement une agence de renseignements. Mais les services secrets soviétiques, en cas de besoin, ne prendront pas une photo, mais une Kitty en direct. Donc, selon la théorie des probabilités, il ne reste qu’une chose : les services secrets américains, les mêmes messieurs de Camp King.
    C’est amusant. Pendant que les voleurs russes me proposent leur aide, les services secrets américains fouillent mes valises. Et en même temps, pour la deuxième année consécutive, je publie chaque semaine dans Posev, qui est l’une des principales sources d’information pour les experts américains des affaires soviétiques. Cet épisode m’est revenu à l’esprit plus tard, après un nouvel échec et une flagellation publique de l’agence de renseignement américaine CIA, lorsque des badges ont été vendus dans tout Washington avec l’inscription suivante : "Notre travail est si secret qu’il n’y a pas d’autre moyen d’y parvenir : « Notre travail est si secret que nous-mêmes ne savons pas ce que nous faisons ».
    On dit que l’Amérique est un pays de merveilles. C’est pourquoi les vrais best-sellers russes sont écrits en Amérique par des écrivains fantômes. Et si quelqu’un a écrit son propre livre, ce n’est pas un phénomène normal.
    Les livres russes normaux sont écrits en Amérique de cette manière. C’est ainsi qu’est paru le livre « The Secret World » de Peter Deryabin, ancien lieutenant-colonel des services secrets soviétiques. La couverture indique honnêtement qu’il a été écrit par quelqu’un d’autre à partir des mots de Deryabin. Vient ensuite le film d’action suivant, Notes of Penkovsky, qui a été fusillé en URSS pour espionnage. Sur la couverture, on peut lire qu’au lieu de Penkovsky, ce livre a été écrit par Deryabin. Ce même Deryabin, qui ne pouvait même pas écrire son propre livre, écrit maintenant allègrement à la place du cadavre de Penkovsky. Miracles !
    Et moi, comme un idiot, je me suis assis pendant deux ans et j’ai écrit mon livre moi-même. Et dans des conditions telles que lorsque j’ai terminé mon travail, j’étais fermement convaincu que j’avais gagné la tuberculose.
    Fils d’un médecin gynécologue, j’ai toujours aimé feuilleter les livres de médecine de mon père. Peut-être parce qu’il s’agissait de livres sur les maladies féminines avec toutes sortes d’images intéressantes, si explicites qu’aujourd’hui en Amérique, même dans les magazines pornographiques, on ne les trouve pas. Après avoir regardé ces images, je me suis considérée comme une experte et, lorsque j’avais des douleurs, j’aimais me diagnostiquer moi-même.
    Ainsi, lorsque j’ai passé un examen médical, j’ai déclaré avec autorité que je devais avoir la tuberculose. Mais le médecin a secoué la tête et m’a dit que j’étais en pleine forme. J’ai d’abord été très surpris. Puis je me suis souvenue de mon père avec gratitude - il semble qu’il ait été médecin-gynécologue pour une bonne raison, il m’a formée selon toutes les règles de la science et de la technologie.
    En 1950, le pendule de la politique américaine est passé d’un extrême à l’autre. D’un extrême à l’autre. L’ère Roosevelt a été remplacée par l’ère McCarthy. L’un après l’autre, les procès d’espionnage atomique se déroulent en Amérique. Des centaines de pédés sont chassés du département d’État. Les compagnons de route communistes sont renvoyés des bureaux du gouvernement. La presse américaine crie à la chasse aux sorcières. Et les journaux allemands écrivaient que le consul américain à Stuttgart, un de mes amis, était tellement perturbé par tout cela qu’il en est mort le cœur brisé.
    En même temps, sur le front soviétique, les Américains ont commencé ce qu’on appelle la guerre psychologique. À Munich est apparu le Projet Harvard, qui se livrait à toutes sortes de recherches psychologiques, puis la radio Voice of America, Radio Liberty, et un certain Comité américain, qui a changé de nom si souvent que je ne sais même plus comment il s’appelle aujourd’hui.
    Tous les moineaux sur les toits de Munich ont gazouillé que l’agence de renseignement américaine CIA était derrière tout cela. La presse américaine elle-même l’a ensuite clairement confirmé. Le personnel américain de ce complexe de guerre psychologique, aussi étrange que cela puisse paraître, se composait principalement de fonctionnaires qui, pour une raison ou une autre, avaient été renvoyés du département d’État et qui, pour une raison ou une autre, avaient été pris sous leur aile par la CIA.
    À la même époque, l’Association centrale des émigrés d’URSS d’après-guerre (COPE) a été créée à Munich, réunissant tous les « nouveaux », et j’en suis devenu le président. Les « nouveaux » étaient nécessaires à la guerre psychologique. Mais grâce aux activités de Kamp-King, le flux des « nouveaux » s’est presque complètement arrêté. Pour comprendre pourquoi cela s’est produit, j’ai décrit en détail mes propres aventures dans ce Kamp-King.
    Un jour, un homme élégant, vêtu d’un costume tropical clair et de chaussures colorées, tel un gigolo italien, s’est présenté à mon appartement. Il se présenta comme le pasteur protestant qui avait failli être dévoré par des cannibales et qui avait eu le plaisir de me rencontrer au Camp King.
    En regardant le pasteur déguisé, je me suis dit : "Quel genre d’intelligence as-tu, mon oncle, de nos jours ?
    Remarquant ma mine déconfite, le pasteur s’est empressé de m’informer qu’une enquête gouvernementale spéciale avait été diligentée au sujet de Kamp-King, mais qu’à l’arrivée de la commission d’enquête, tous les documents relatifs aux activités de ce camp avaient été providentiellement brûlés. Aujourd’hui, cette commission tente de reconstituer indirectement ce qui s’est passé à Kamp-King. Et comme je suis le président de l’organisation représentant tous les citoyens soviétiques qui ont fui à l’Ouest après la guerre et qui ont donc subi une rééducation démocratique au camp King, c’est à ce moment-là que le pasteur s’est adressé à moi.
    Voici une petite illustration, par exemple. Un pédéraste soviétique s’est plaint bruyamment d’avoir caché des diamants dans son cul lorsqu’il s’est enfui, mais les messieurs du Camp King les ont trouvés même là et les ont volés. Ensuite, cet Ostap Bender n°2 a travaillé comme colonel de radio à Radio Liberty. Il y travaille encore aujourd’hui, depuis 20 ans.
    J’ajouterai quelques détails supplémentaires tirés de ma propre expérience. En plus des documents soviétiques et des timbres allemands que j’ai déjà mentionnés, les messieurs du camp King m’ont volé les babioles suivantes :
    1. Lorsque j’ai été démobilisé de l’armée, j’ai reçu 5 000 roubles pour ancienneté de service. Je n’ai pas eu le temps de les échanger contre des timbres. Les Américains ont empoché ces 5 000 roubles. Tout neufs, impeccables, tout droit sortis de la banque d’État. Pourquoi les espions américains en avaient-ils besoin ? Comme souvenirs ? Ou pour l’espionnage ?
    2) En tant qu’ingénieur de haut niveau, j’avais le droit de porter à la fois un uniforme militaire et un costume civil. Je me suis donc acheté une épingle à cravate en or avec une perle. Les Américains ont également volé cette épingle. Apparemment pour me débarrasser de mes habitudes bourgeoises.
    3. J’ai acheté aux Allemands, au marché noir, un stylo auto-écrivant américain Parker. Les Américains me l’ont volé au camp King.
    4. J’avais aussi un étui à cigarettes bon marché en métal jaune et émail noir. Les Américains l’ont apparemment pris pour de l’or et l’ont également empoché.
    Je ne me soucie pas de toutes ces petites choses. Mais si l’on raconte des anecdotes sur la façon dont les Russes ont volé des montres aux Allemands, pourquoi ne pas raconter comment les Américains ont volé des montres aux Russes ? Et certains, comme Ostap Bender #2, ont même regardé le cul.
    Tout cela s’est déroulé sous le drapeau des États-Unis flottant au vent. Et pour que les gens ne se trompent pas d’endroit, l’hymne national américain était diffusé par les haut-parleurs.
    Voice of America et Radio Liberty dépensaient des millions de dollars pour encourager les soldats et les officiers soviétiques stationnés en Allemagne de l’Est à choisir la liberté américaine. Les services de renseignement avaient besoin de langues, mais il n’y avait pas de transfuges.
    La propagande soviétique exploite pleinement les activités de Kamp King. Les troupes soviétiques recevaient constamment l’ordre de tirer sur les soldats et les officiers soviétiques qui avaient fui vers les Américains - et qui avaient été extradés. Bien sûr, cela décourageait l’élection de la liberté dans de telles conditions.
    Mais les Américains sont des gens pragmatiques. Afin d’augmenter le nombre de transfuges, les services de renseignements américains ont créé un bataillon spécial de prostituées à Berlin pour attirer les officiers soviétiques à l’Ouest, dans le cadre d’une forme de guerre psychologique. Les prostituées étaient payées sur la base d’une liste de prix fermes : 20 000 marks pour un lieutenant, 25 000 marks pour un capitaine et 30 000 marks pour un major. Et pas des marks d’occupation et d’inflation, mais des marks nouveaux et solides.
    Je me suis assis et j’ai fait un rapide bilan. Les braves scouts américains m’avaient déjà volé quelque chose comme 100 dollars. Et à cause de cela, ils paient maintenant des prostituées 7 500 dollars pour un tel homme ?! C’est ainsi que les contribuables américains paient les petits voleurs du camp King.
    Ensuite, dans le cadre de la guerre psychologique, un bataillon de prostitués masculins a été ajouté pour aider les prostituées féminines, c’est-à-dire les pédérastes allemands, qui ont repéré leurs semblables parmi les soldats et les officiers soviétiques - et les ont attirés à l’Ouest.
    Bien entendu, tous ces projets spéciaux de guerre psychologique étaient tellement confidentiels que même moi, le président de la CSPE, n’en avais pas connaissance. Mais comme ces personnes venaient ensuite me voir, j’en voyais les résultats. Tout cela ne peut être compris que rétrospectivement.
    Et les résultats sont les suivants. Plaisanter avec l’amour a mal fini. Les personnes qui ont été attirées à l’Ouest par des prostituées, femmes ou hommes, ont rapidement réalisé qu’elles avaient été trompées, se sont senties comme des poissons jetés dans le sable, se sont enivrées, ont sombré dans la misère sociale et, finalement, comme dernière forme de protestation impuissante, sont retournées en URSS - pour y être fusillées.
    À leur arrivée, Voice of America et Radio Liberty leur ont crié au ciel qu’ils avaient « choisi la liberté ». Lorsqu’ils sont repartis, il y a eu un silence sépulcral. Comme dans un bon salon funéraire. Ou bien, pour brouiller les pistes, ils faisaient courir une sale rumeur. La liberté était comme les ailes d’un citadin qui s’envole sur des ailes artificielles et qui tombe.
    Ainsi, si auparavant les services secrets américains volaient les transfuges soviétiques et les renvoyaient au peloton d’exécution, ils allaient maintenant eux-mêmes au peloton d’exécution. En partant, ils ont dit ouvertement :
    – "Les Américains ? Ce sont tous des prostitués. Nous préférons être fusillés par les nôtres !
    Entre-temps, mon « Kremlin de Berlin » a été traduit en allemand. Un jour, j’ai reçu une lettre de 12 pages d’un de mes lecteurs. Il s’agissait d’un colonel allemand, chevalier de la Croix de fer, la plus haute distinction de l’armée allemande. Le colonel avait perdu une jambe sur le front russe et avait passé sept ans en captivité en Union soviétique. De retour en Allemagne et après avoir lu mon « Kremlin », il a voulu me serrer la main pour ce livre - d’officier à officier.
    Le colonel allemand avait ramené de sa captivité russe une cuillère en bois faite maison, offerte par ses amis russes du camp de concentration, ainsi qu’une simple icône russe, offerte par un agriculteur collectif soviétique. Cet homme comprenait les problèmes du communisme et du peuple russe bien mieux que la plupart des experts occidentaux des affaires soviétiques.
    Un jour, j’ai reçu une lettre de ce type :
    "Cher Herr Klimov ! Aux jours de la victoire et de la défaite, vous, le vainqueur, avez trouvé dans votre « Kremlin de Berlin » des mots de sympathie et de gentillesse pour nous, les femmes et les enfants de l’Allemagne vaincue. En remerciement, je vous envoie ce médaillon, qui est consacré, et qu’il vous garde en sécurité."
    Edith Neugebauer.
    La lettre était accompagnée d’un médaillon catholique à l’effigie de la Madone et d’une chaîne à porter autour du cou.
    Quelques mois plus tard, j’ai effectué un long voyage d’affaires en voiture. En chemin, il y a eu un accident. Le chauffeur a été tué sur le coup. J’étais assis à côté du chauffeur, dans le couloir de la mort, mais je suis resté en vie.
    Lorsque je me suis réveillé à l’hôpital, j’ai vu que j’avais ce médaillon accroché à ma poitrine. Je n’avais jamais porté ce médaillon avant ou depuis. Mais lors de ce voyage, pour une raison que j’ignore, je l’ai porté. Je ne suis pas superstitieuse, mais...
    En général, tout s’est très bien passé avec les Allemands. J’ai même passé sans grande difficulté la procédure de dénazification, qui a été passée par tous les habitants de l’Allemagne, pour attraper tous les anciens nazis, la Gestapo, les SS et ainsi de suite. J’ai simplement écrit sur le formulaire que j’avais servi dans l’Armée rouge à l’époque et j’ai reçu un certificat officiel de dénazification. Avec tous les tampons, signatures et sceaux.
    Cependant, malgré le certificat de dénazification, on m’a à nouveau refusé l’émigration vers l’Amérique. Et ce, bien que j’aie été le chef du CITE, au sujet duquel tous les moineaux sur les toits de Munich gazouillaient qu’il s’agissait d’un projet spécial de la CIA, l’agence de renseignement américaine.
    Apparemment, les voleurs du Camp King m’avaient donné une mauvaise référence, pensai-je. Et le travail de la C.I.A. est tellement secret qu’ils ne savent pas ce qu’ils font.
    Peu à peu, la guerre psychologique est entrée dans une troisième phase. Cette troisième phase était principalement basée sur ce que l’on appelle le projet Harvard, qui a été réalisé à Munich en 1949-50, et où j’ai également travaillé un peu. Ce projet Harvard était principalement basé sur le mystérieux « complexe de Lénine », c’est-à-dire, comme les experts l’ont expliqué plus tard, sur le complexe d’homosexualité latente de Lénine.
    De quoi s’agit-il ? Il est assez difficile de l’expliquer. Mais en principe, d’un point de vue clinique, il s’agit d’une dégénérescence ou d’une dégénérescence composée de maladie mentale et de perversion sexuelle. C’est le poison corpulent de la race humaine, qui a ruiné la Grèce antique, la Rome antique, et qui a beaucoup contribué à la révolution en Russie. C’est donc un remède assez puissant. Et du point de vue de la religion, c’est ce que la Bible appelle le diable et le prince de ce monde.
    Après tout, les émigrés russes ont longtemps dit : "Contre les bolcheviks, même avec le diable ! Eh bien, les Américains pragmatiques ont pris ce même diable comme allié.
    Bien entendu, cette alliance inhabituelle a été si soigneusement classée que même le président du Comité central de l’Union soviétique n’en a pas eu connaissance. Tout cela ne peut être compris que rétrospectivement.
    Même si, à l’époque, je ne connaissais pas tous les secrets du projet Harvard, les services secrets soviétiques étaient au courant dès le début. Et ils ont pris leurs propres mesures. Il n’y a donc aucune raison de garder le silence à ce sujet. Pourquoi cette fausse honte ?
    Il est tout à fait naturel que pour une tâche aussi spécifique qu’une alliance avec le diable, vous ayez besoin du personnel approprié. Par exemple, j’avais un commissaire très sympathique de la C.I.A., un vrai charmeur. Mais il s’est avéré qu’au lieu de sa femme, ce commissaire préférait sa secrétaire.
    Vous savez, certaines personnes utilisent leur secrétaire et d’autres préfèrent leur secrétaire. On dit que c’est de là que vient le mot « secrétaire ». Du point de vue du projet Harvard, il s’agit là d’une des variantes du « complexe de Lénine ».
    Voici un autre exemple. Je faisais la cour à une charmante jeune femme de la Voix de l’Amérique. Mais il s’est avéré que cette charmante jeune femme courtisait ses amis, qu’elle était, pardonnez-moi l’expression, lesbienne. Oui, et aussi une sadique, comme celles qui travaillaient autrefois pour la Tchéka et qui, au bon vieux temps, étaient tout simplement brûlées sur le bûcher sous prétexte qu’elles étaient des sorcières. Et du point de vue des professeurs de Harvard, c’est le complexe de l’épouse de Lénine.
    Bien sûr, je ne peux pas dire que tous les employés de l’American Committee, de Radio Liberty, de Voice of America et d’autres organes de psycho-guerre étaient armés de ce complexe de Lénine. Mais je peux garantir que presque toutes les personnes que j’ai connues là-bas avaient cet ordre de Lénine. Et j’ai connu beaucoup de gens là-bas.
    Le projet de Harvard était une sorte de dramatisation du Besov de Dostoïevski, mise en scène par les services secrets américains. J’ai donc travaillé dans un environnement de dégénérés et de monstres, dont la moitié, selon les statistiques, sont des malades mentaux. C’est pourquoi, lors de la grande purge des années 30, Staline a détruit ces léninistes en les traitant de chiens enragés, Hitler les a conduits dans des chambres à gaz et des camps de concentration et, dans le bon vieux temps, on les a brûlés sur le bûcher en les traitant de sorciers et de sorcières. Pour ne froisser personne, nous pouvons ajouter que Staline et Hitler étaient eux-mêmes exactement les mêmes dégénérés.
    En général, dans un tel environnement, mon travail était agréable et je ne m’ennuyais pas.
    Certains appelaient le Comité américain « le Comité pour sauver la Russie des bolcheviks - avec l’aide des trotskistes et des mencheviks » ! Pourquoi ? C’est très simple. Après tout, le premier postulat du marxisme est l’unité et la lutte des contraires. Les Américains, rusés, ont donc décidé de vacciner les bolcheviks contre la rage, composée de la salive empoisonnée des trotskistes, des mencheviks et des SR.
    Mais cette chose est extrêmement confuse. Par exemple, il faut connaître la philosophie du chercheur de diable Berdyaev, qui prêchait l’union de Satan et de l’Antéchrist et le royaume du prince de ce monde qui en résulterait. Et si je l’explique, il y aura un tel hurlement, comme si nous avions marché sur la queue de Satan et de l’Antéchrist.
    Quels sont les « démons » du projet Harvard dans la pratique ? Du point de vue sociologique, il s’agit de « l’ordre de Lénine ». Du point de vue de la psychologie, il s’agit de l’"érotisme buccal" freudien. Et du point de vue de la langue russe, il ne s’agit pas de personnes, mais de jurons ineffaçables.
    Ces « porteurs d’ordre » font littéralement ce que disent ces jurons apparemment dépourvus de sens. Ce mystère fait d’eux une sorte de parti secret dont le nom est Légion, ce que la Bible appelle le prince de ce monde. Et derrière tout cela se cachaient des « démons », c’est-à-dire des maladies mentales.
    La tâche de ces démons était de mutiler à la radio ou dans la presse les mêmes démons en Union soviétique ou de les attirer à l’Ouest. Au début, cela se faisait avec l’aide de prostituées allemandes des deux sexes. Ensuite, ils ont eu recours à des prostituées de la radio.
    Comme ces « chercheurs de liberté » sont venus me voir à la CACE, j’ai vu les résultats de tout cela. Alors qu’auparavant les services de renseignement américains avaient volé les transfuges soviétiques et les avaient renvoyés pour qu’ils soient fusillés, ils allaient maintenant être fusillés eux-mêmes. D’autres se suicidaient. D’autres encore se retrouvaient dans des cliniques psychiatriques ou des centres d’isolement pour alcooliques. D’autres encore, de jeunes soldats soviétiques, choqués par tout cela, sont entrés dans un monastère.
    Pour ces personnes, la liberté s’est transformée en ailes de citadin, qui tente de voler avec des ailes artificielles - et tombe.
    Peu à peu, la guerre psychologique s’est transformée en une guerre de fous. Un psychiatre aurait dû siéger à la place du président de la CEPE. Mais comme je n’étais ni psychotique ni psychiatre, et que je n’avais pas le complexe de Lénine, je m’en suis simplement lavé les mains en 1955 et je suis parti en Amérique.
    Comme j’étais président de la CSPE, élu pour ainsi dire, j’étais censé rendre compte à mes électeurs, selon les règles démocratiques. Eh bien, me voici.
    Rétrospectivement, les discours de victoire de Voice of America et de Freedom Radio, qui parlaient de ceux qui avaient « élu la liberté », ressemblent aujourd’hui à des publicités de pompes funèbres. Franchement, si le Comité soviétique « Pour le retour à la mère patrie » était qualifié de comité-piège, le Comité américain avec sa Radio Liberty n’est pas moins un piège. Cette liberté n’est pas une simple liberté, mais une liberté spéciale, construite selon les recettes du chercheur de diables Berdyaev, où, comme en 69, le bien-mal et le mal-bien s’entremêlent, et où rien n’est rien. C’est pourquoi certains experts disent qu’il y a 69 façons d’être malheureux.
    Certains marchands d’âmes humaines n’apprécieront peut-être pas. Mais je dirai une chose : pour moi, une âme saine est plus proche qu’une âme malade. Et j’accorde plus de valeur à une âme vivante qu’à une âme morte. Et vous faites le commerce d’âmes malades ou mortes.
    Tels sont les résultats de la psycho-guerre américaine sur le front russe de 1945 à 1955. À cet égard, il convient de rappeler l’excellent livre d’Ariadna Delianich « Wolfsberg - 373 » (ce livre peut être obtenu auprès des rédactions des journaux « Russian Life » et « Russia » ou auprès des libraires), qui décrit comment, après la capitulation de l’Allemagne, les services secrets britanniques ont filtré les anticommunistes russes. De nombreux parallèles sont suggérés ici. Ici comme là, les résultats sont plutôt tristes.
    Par ailleurs, la troisième phase de la guerre psychologique, que j’ai décrite plus haut, se poursuit encore aujourd’hui. Les Américains utilisent toutes les méthodes de la guerre psychologique, par le biais de la radio et de la presse écrite, pour inciter les fous soviétiques de l’"Ordre de Lénine" à se révolter. Et le KGB soviétique, connaissant parfaitement tous les secrets et les mystères du projet Harvard, place discrètement ces « léninistes » dans des hôpitaux psychiatriques, que les fous eux-mêmes ont judicieusement baptisés « maisons de fous ».
    Dans le jargon professionnel du KGB, en pleine conformité avec le projet Harvard, ces fous sont classés selon Freud comme suit : type HS, type PL, type VRE, type GE, et ainsi de suite. Ces nouvelles abréviations soviétiques ne sont que des raccourcis de gros mots non imprimables. Ces victimes de la psycho-guerre américaine s’assoient dans des « maisons de fous » et chantent des chansons arméniennes :
    Eh, politika-malytica....
    Où es-tu, ma tête malade ?
    Et les dégénérés occidentaux, également comme HS, PL ou VRE, qui sont légion dans le nom, savent très bien que leurs frères sont mis dans des « maisons de fous » - et le crient au ciel. Voilà pour la quintessence de la psycho-guerre des 20 dernières années.
    C’est pourquoi les philosophes disent que le diable n’est dangereux que lorsqu’on ne le voit pas. Et quand on le voit, il est ridicule et pathétique. Les philosophes disent aussi que le diable est un mauvais allié.
    Les services secrets américains nourrissent ces fous et les services secrets soviétiques les exploitent. Et si nécessaire, ils seront écrasés comme les mouches bleues de Tarsis. Les mouches bleues sont des mouches de cadavres. Et elles transportent le poison des cadavres.
    À propos, pendant que le chef du renseignement américain Allen Dulles commandait la psycho-guerre, son fils était dans un asile de fous.
    Au siège de l’Agence centrale de renseignement des États-Unis, près de Washington, on peut lire sur la façade une phrase biblique : « Vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres » (Jean 8:32). La Bible ne parle pas du tout de la liberté américaine, mais de la liberté par rapport au péché. D’accord, je vais vous dire une de ces vérités sans péché :
    Franchement, si l’empereur Nicolas II avait fait en son temps ce que le KGB fait aujourd’hui, c’est-à-dire enfermer les Lénine, Kamenev, Trotski et autres dans des « maisons de fous », il n’y aurait pas eu de révolution ni de pouvoir soviétique en Russie. L’Amérique aurait alors été plus calme. Mais à l’époque, l’Amérique faisait la même chose qu’aujourd’hui.
    En ce qui concerne les patients des « asiles de fous » soviétiques, dans la plupart des cas, vous verrez la même chose que ce que le philosophe noir Berdyaev appelait l’union de Satan et de l’Antéchrist, qui promet le royaume du prince de ce monde. Nous devons admettre que le vieux chercheur de diable Berdyaev n’était pas du tout un imbécile.
    Et les professeurs de Harvard avec leur « complexe de Lénine » ne sont pas non plus des imbéciles. La police secrète soviétique et ses « maisons de fous » ne sont pas non plus des imbéciles. Les seuls imbéciles sont ceux qui ne savent pas tout. Mais essayez de dire ceci...
    On dit que la vérité nue est parfois désagréable. Comme, par exemple, les démons nus de la guerre psychologique. Mais ils disent aussi que Dieu n’est pas dans la force, mais dans la vérité.

    New York. 20 décembre 1971.

    #conspirationnisme #eugénisme #anticommunisme #histoire #guerre_froide

  • Unsere Auseinandersetzung gilt nicht Rußland als solchem, sondern nur dem Sowjetregime.
    https://g-klimov.info/klimov__pesn_pobeditelya_ge/berliner_kreml_00.html

    « Notre conflit ne concerne pas la Russie en tant que telle, mais uniquement le régime soviétique. » Cette phrase du maire de la partie anticommuniste de Berlin en 1951 se trouve dans l’introduction au livre Berlinskij Kreml . Depuis l’attitude de l’Ouest a changé. On aime de nouveau détester les soushommes russes.

    Die innere Entwicklung Rußlands während des Krieges, das Nachgeben des Stalinschen Regimes gegenüber dem naturgegebenen und unvermeidlichen vaterländischen Empfinden der Russen, die ihr Land gegen einen fremden Eroberer verteidigen mußten und verteidigten, die aber hofften, daß aus dieser Verteidigung etwas Neues entstehen würde, diese Entwicklung mit den grauenvollen Rückschlägen, die nach dem Krieg folgten, enthält den Schlüssel zum Verständnis zu allem, was in Sowjetrußland vor sich geht. Es zeigt die tiefe Schwäche dieses Regimes, es zeigt, wie anfällig Rußland sein wird, wenn es der westlichen Welt gelingt, die Überzeugung zum einheitlichen Gemeingut zu machen, daß unsere Auseinandersetzung nicht Rußland als solchem, sondern nur dem Sowjetregime gilt.
    ...
    Ernst Reuter, Regierender Bürgermeister von Berlin, den 21. August 1951

    La page de contenu du livre The Terror Machine - Berlinskij Kreml (Berliner Kreml) de Gregory Klimov
    https://seenthis.net/messages/683905

    #anticommunisme #histoire #Berlin #occupation #guerre_froide

  • Greece is planning a €40m automated surveillance system at borders with North Macedonia and Albania

    The European Commission wants Greece to build an automated wall to prevent some people from leaving the country. Locals are not enthusiastic, but their opinion counts for little.
    Many people holding Syrian, Afghan, Somalian, Bangladeshi or Pakistani passports seeking asylum in the European Union move out of Greece when they have the feeling that their administrative situation will not improve there. The route to other EU countries through the Balkans starts in northern Greece, onward to either North Macedonia or Albania. Greek police, it is said, are quite relaxed about people leaving the country.

    “We have many people who pass our area who want to go to Europe,” says Konstantinos Sionidis, the mayor of Paionia, a working-class municipality of 30,000 at Greece’s northern border. “It’s not a pleasant situation for us,” he adds.

    But leaving via Paionia is getting more difficult. In May 2023, Frontex guards started patrolling at North Macedonia’s border. Near the highway, one young woman from Sierra Leone said she and her friend tried to leave four times in the past month. Once, they got as far as the Serbian border. The other times, they were arrested immediately in North Macedonia at night, coming out of the forest, by Frontex officers asking “Do you want to go to Germany?” (No.) “They don’t want us here [in Greece],” she says. “Let us go!”

    However, the European Commission has plans to make it harder for people to travel through North Macedonia (and other parts of the Western Balkan route). According to a national programming document for the 2021 - 2027 EU “border management” funding for Greek authorities, €47m are budgeted to build an “automated border surveillance system” at Greece’s borders with North Macedonia and Albania. The new system shall explicitly be modeled on the one already deployed at the land border with Türkiye, along the Evros river.
    The virtual border wall

    Evros is described as a surveillance “testing ground.” (https://www.dw.com/en/is-greece-failing-to-deploy-eu-funded-surveillance-system-at-turkish-border-as-intended/a-63055306) In the early 2000s, police used thermal cameras and binoculars to spot people attempting to cross the border. As Greece and other Member-States increased their efforts to keep people out of the EU, more funding came in for drones, heartbeat detectors, more border guards – and for an “automated border surveillance system.”

    In 2021, the Greek government unveiled dozens of surveillance towers, equipped with cameras, radars and heat sensors. Officials claimed these would be able to alert regional police stations when detecting people approaching the border. At the time, media outlets raved about this 24-hour “electronic shield” (https://www.kathimerini.gr/society/561551092/ilektroniki-aspida-ston-evro-se-leitoyrgia-kameres-kai-rantar) that would “seal” (https://www.staratalogia.gr/2021/10/blog-post_79.html#google_vignette) Evros with cameras that can see “up to 15 km” into Türkiye (https://meaculpa.gr/stithikan-oi-pylones-ston-evro-oi-kamer).

    Greece is not the first country to buy into the vision of automated, omnipotent border surveillance. The German Democratic Republic installed automated rifles near the border with West-Germany, for instance. But the origin of the current trend towards automated borders lies in the United States. In the 1970s, sensors originally built for deployment in Vietnam were installed at the Mexican border. Since then, “the relationship between surveillance and law enforcement has been one between salespeople and officers who are not experts,” says Dave Maas, an investigator at the Electronic Frontier Foundation. “Somebody buys surveillance towers, leaves office and three administrations later, people are like: ‘Hey, this did not deliver as promised’, and then the new person is like: ‘Well I wasn’t the one who paid for it, so here is my next idea’.”

    At the US-Mexico border, the towers are “like a scarecrow,” says Geoff Boyce, who used to direct the Earlham College Border Studies Program in Arizona. His research showed that, in cases where migrants could see the towers, they took longer, more dangerous routes to avoid detection. “People are dying outside the visual range of the towers.”

    No data is available that would hint that the Greek system is different. While the Greek government shares little information about the system in Evros, former minister for citizen protection Takis Theodorikakos mentioned it earlier this year in a parliamentary session. He claimed that the border surveillance system in Evros had been used to produce the official statistics for people deterred at the Evros border in 2022 (https://www.astynomia.gr/2023/01/03/03-01-2022-koino-deltio-typou-ypourgeiou-prostasias-tou-politi-kai-ellinik). But thermal cameras, for example, cannot show an exact number of people, or even differentiate people from animals.

    In Evros, the automated border surveillance system was also intended to be used for search-and-rescue missions. Last year, a group of asylum-seekers were stranded on an islet on the Evros river for nearly a month. Deutsche Welle reported that a nearby pylon with heat sensors and cameras should have been able to immediately locate the group. Since then, authorities have continued to be accused of delaying rescue missions.

    “At the border, it is sometimes possible to see people stranded with your own eyes,” says Lena Karamanidou, who has been researching border violence in Evros for decades. “And [they] are saying the cameras that can see up to 15 kilometers into Türkiye can’t see them.”
    Keeping people in

    In contrast to the system in Evros, the aim of the newly planned automated border surveillance systems appears to be to stop people from leaving Greece. Current policing practices there are very different from those at Evros.

    At Greece’s border with North Macedonia, “we’ve heard reports that the police were actively encouraging people to leave the country,” says Manon Louis of the watchdog organization Border Violence Monitoring Network. “In testimonies collected by BVMN, people have reported that the Greek police dropped them off at the Macedonian border.”

    “It’s an open secret,” says Alexander Gkatsis from Open Cultural Center, a nonprofit in the center of Paionia, “everybody in this area knows.”

    Thirty years ago, lots of people came from Albania to Paionia, when there were more jobs in clothing factories and agriculture, many of which are now done by machines. These days, the region is struggling with unemployment and low wages. In 2015, it drew international media attention for hosting the infamous Idomeni camp. Sionidis, the Paionia mayor, says he didn’t know anything about plans for an automated border system until we asked him.

    “The migration policy is decided by the minister of migration in Athens,” says Sionidis. He was also not consulted on Frontex coming to Paionia a few years ago. But he readily admits that his municipality is but one small pawn in a Europe-wide negotiation. “[Brussels and Athens] have to make one decision for the whole European border,” says Sionidis, “If we don’t have the electronic wall here, then we won’t have it at Evros.”

    https://algorithmwatch.org/en/greece-is-planning-a-e40m-automated-surveillance-system-at-borders-w

    #Albanie #Macédoine_du_Nord #frontières #migrations #réfugiés #barrières #fermeture_des_frontières #Grèce #frontières_terrestres #surveillance #contrôles_frontaliers #technologie #complexe_militaro-industriel #Paionia #militarisation_des_frontières #Frontex #border_management #automated_border_surveillance_system #Evros #efficacité #inefficacité #caméra_thermiques #sortie #murs_anti-sortie (comme aux temps de la #guerre_froide)

  • Alonso Gurmendi :
    https://threadreaderapp.com/thread/1745927363806834811.html

    I think it’s important to situate the Genocide Convention and South Africa’s case within socio-legal context in which they operate. I think it will help explain the dissonance between people’s excitement at South Africa’s arguments and my more cautious view🧵

    […]

    To be clear: this is not bc ICJ Judges are just realpolitik agents of their states. They are serious competent jurists. But they do operate within the socio-legal context of an int’l law that conceives genocide a “once in a lifetime” crime that ought to be very difficult to prove

    • @biggrizzly Je ne le lis pas comme ça, plutôt le contraire. Il rappelle que la convention contre le génocide a été écrite en 1948, c’est-à-dire à une époque où les « occidentaux » veulent donner l’apparence d’interdire l’holocauste, tout en évitant de se rendre immédiatement coupables parce qu’ils continuent à pratiquer, très officiellement, la colonisation et la ségrégation raciale :

      This is bc when the term “genocide” was created states were careful to make sure it would cover the Holocaust (and now Rwanda), but not Jim Crow, and not colonialism in Africa, etc. Only the most obvious genocides could be genocide, not my national mythos!

      Il ne dit donc pas qu’il n’y a pas génocide dans le cas présent, il dit que c’est difficile à « démontrer » dans un cadre légal qui a été défini par des gens qui pratiquaient eux-mêmes des formes génocidaires (colonialisme, déplacements de population, ségrégation…).

    • Je fais partie des personnes qui pensent que vouloir à tout prix coller le mot génocide sur ce qui relève du massacre à relativement petite échelle, bien que la volonté de faire disparaître soit manifeste, c’est effectivement contre productif. Faire juger le crime contre l’humanité et le crime de guerre, ce serait déjà pas mal. Ceci dit la jurisprudence récente est en faveur de l’accusation actuelle. Ne reste qu’à attendre de voir si les juges souhaitent déjà annuler cette jurisprudence...

    • Plus d’une vingtaine de rapporteurs de l’organisation des Nations unies (ONU) s’inquiètent d’« un génocide en cours » à Gaza. Est-ce que vous employez ce terme ?

      Il y a deux sens au terme de « génocide ». Il y a le #génocide tel que défini par l’avocat polonais Raphael Lemkin en 1948, la seule définition juridique existante, aujourd’hui intégrée au protocole de Rome créant la #CPI [Cour pénale internationale – ndlr]. Lemkin a été obligé, pour que ce soit voté par les Soviétiques et par le bloc de l’Est, d’éliminer les causes politiques du génocide – massacrer des gens dans le but de détruire une classe sociale –, parce qu’il aurait fallu reconnaître le massacre des koulaks par les Soviétiques.

      La définition de Lemkin implique que ceux qui commettent un génocide appartiennent à un autre peuple que celui des victimes. D’où le problème aussi qu’on a eu avec le #Cambodge, qu’on ne pouvait pas appeler un génocide parce que c’étaient des Cambodgiens qui avaient tué des Cambodgiens. Là, on est dans une définition étroite. C’était le prix à payer pour obtenir un accord entre les deux Blocs dans le contexte du début de la #guerre_froide.

      Vous avez ensuite une définition plus large du terme, celui d’une destruction massive et intentionnelle de populations quelles qu’en soient les motivations.

      Il existe donc deux choses distinctes : la première, ce sont les actes, et la seconde, c’est l’intention qui est derrière ces actes. Ainsi le tribunal international pour l’ex-Yougoslavie a posé la différence entre les nettoyages ethniques dont la motivation n’est pas génocidaire parce que l’#extermination n’était pas recherchée, même si le nombre de victimes était important, et les actes de génocide comme celui de Srebrenica, où l’intention était claire.

      On voit ainsi que le nombre de victimes est secondaire. Pour Srebrenica, il est de l’ordre de 8 000 personnes.

      L’inconvénient de cette #logique_judiciaire est de conduire à une casuistique de l’intentionnalité, ce qui ne change rien pour les victimes.

      Au moment où nous parlons, le nombre de victimes dans la bande de #Gaza est supérieur à celui de Srebrenica. On a, semble-t-il, dépassé la proportion de 0,5 % de la population totale. Si on compare avec la France, cela donnerait 350 000 morts.

      Le discours israélien évoque des victimes collatérales et des boucliers humains. Mais de nombreux responsables israéliens tiennent des discours qui peuvent être qualifiés de génocidaires. L’effondrement des conditions sanitaires et l’absence même de ravitaillement à destination des populations concernées peuvent indiquer que l’on est sur la voie d’un processus de destruction de masse avec des controverses à n’en plus finir sur les intentionnalités.

      Henry Laurens : « On est sur la voie d’un processus de destruction de masse » à Gaza, entretien avec Rachida El Azzouzi (Mediapart, 19 novembre 2023, https://seenthis.net/messages/1028271).

      –—

      Du même historien (chaire d’histoire contemporaine du monde arabe au Collège de France), je vous conseille vivement cette conférence de 2h :
      https://www.youtube.com/live/lMZAGlZcNo0?si=7hZuI3YREkiMsEId

  • ARD Dokumentation - Doku am Montag die story : Deckname Artischocke
    https://web.archive.org/web/20021019195230/http://www.wdr.de/tv/dokumentation/artischocke.html

    L’assassinat de Frank Olson était une action couverte de la CIA qui considérait sa connaissance du programme de torture et lavage de cerveau MKULTRA comme un risque pour l’agence.

    Montag, 12. August 2002, 21.45 Uhr

    In den fünfziger Jahren führte die amerikanische CIA geheime Experimente zur Gehirnwäsche durch. Die Opfer wurden mit Drogen wie LSD vollgepumpt, unter Hypnose gesetzt und auch gefoltert. Ziel der grausamen Menschenversuche war es, den menschlichen Willen zu brechen und sowjetische Agenten gegen ihren Willen zur Preisgabe von Geheimnissen zu zwingen. Einige der Experimente verliefen tödlich. Deckname der Operation: Artischocke.

    Einer der beteiligten CIA-Wissenschaftler war Dr. Frank Olson. Im November 1953 stürzte er aus dem Fenster eines New Yorker Hotels. Sein Tod wurde von der CIA als Selbstmord deklariert. Doch als dessen Sohn Eric nach mehr als 40 Jahren den Leichnam exhumieren und obduzieren ließ, stellte sich heraus, dass Frank Olson wahrscheinlich einem Gewaltverbrechen zum Opfer gefallen war.

    Warum musste Frank Olson sterben?

    Die WDR-Autoren Egmont R. Koch und Michael Wech gehen in ihrer Dokumentation den Spuren des CIA-Forschers nach, der zunächst mit der Erprobung biologischer Waffen beschäftigt war, darunter Anthrax (Milzbrand); sie stoßen auf Zeugen, die erstmals über die Hintergründe seiner streng geheimen Tätigkeit sprechen; und sie finden in Olsons Nachlass Amateurfilme und Dias, die der CIA-Wissenschaftler in den letzten Jahren seines Lebens machte und die faszinierende Einblicke in die Welt des US-Geheimdienstes während des Kalten Krieges gewähren.

    Ein Verdacht, der sich immer mehr aufdrängt: Frank Olson war schockiert über die grauenhaften Verhöre der CIA, die größtenteils in Deutschland stattfanden - an Kriegesgefangenen, an Flüchtlingen aus Osteuropa, die man für Spione hielt, und an eigenen Landsleuten. Auf seiner letzten Europareise im August 1953 sah er in Berlin, wie Menschen so lange gequält wurden, bis sie starben. Nach seiner Rückkehr wollte Olson aussteigen, seinen Dienst quittieren. Das konnte die CIA nicht zulassen. Denn Frank Olson kannte Staatsgeheimnisse auf dem Gebiet der biologischen Kriegsführung, die um keinen Preis bekannt werden durften.

    Links zum Thema

    Über das Buch „Deckname Artischocke“
    „Frank Olson Project“ (Website seines Sohnes Eric;engl.)
    „What Did the C.I.A. Do to Eric Olson’s Father?“ ("New York Times"; mit weiteren Artikeln und Dokumenten zum Thema)
    Homepage der CIA
    Zur Geschichte der CIA
    John Marks: The Search for the Manchurian Candidate. The CIA and Mind Control (Online-Version des Buches von 1979; u.a. mit einem Kapitel über Frank Olson)
    CIA und LSD
    CIA und MKUltra (Informationen über die Menschenversuche der CIA; engl.)
    Human Radiation Experiments (Homepage des „Office of Human Radiation Experiments“)
    Biologische Waffen (ein Dossier der „Neuen Zürcher Zeitung“)
    Biologische Waffen (Informationen des „Katalyse“-Umweltlexikons)
    The Biological Weapons Convention (Hintergrundinformation zur Entstehung der Konvention, offizieller Vertragstext sowie einige Abschlusserklärungen zu Folgekonferenzen; UNO)
    Milzbrand (Informationen, Nachrichten, Videos und Links zum Thema bei „wdr.de“)
    Milzbrand: Bilanz einer Hysterie ("Monitor", 17.1.2002)
    Der Kalte Krieg (mit weiterführenden Links und Buchtipps)
    Cold War (ein interaktives Angebot von CNN mit zahlreichen Artikeln zum Thema „CIA im Kalten Krieg“; engl.)

    Bücher zum Thema in Auswahl

    Egmont R. Koch, Michael Wech: Deckname Artischocke. Die geheimen Menschenversuche der CIA
    Bertelsmann Verlag, September 2002
    ISBN: 357000662X, Preis: 23,90 Euro

    George Bailey; Sergej A. Kondraschow; David E. Murphy: Die unsichtbare Front. Der Krieg der Geheimdienste im geteilten Berlin
    Ullstein Bücher Nr. 26569, 2000
    ISBN: 3-548-26569-3, Preis: 16 Euro

    Wendy Barnaby: Biowaffen. Die unsichtbare Gefahr
    Goldmann Sachbuch/Ratgeber Bd. 15197, 2002
    ISBN: 3-442-15197-X, Preis: 10 Euro

    Klaus Eichner; Andreas Dobbert: Headquarters Germany. Die USA-Geheimdienste in Deutschland
    Edition Ost 2001
    ISBN: 3-360-01024-8, Preis: 14,90 Euro

    Erhard Geißler: Krieg mit Pest und Milzbrand. Die Geschichte der biologischen Waffen und das Versagen der Geheimdienste
    Links Verlag Oktober 2002
    ISBN: 3-86153-255-7, Preis: 19,90 Euro

    Alexander Kelle: Chemische und biologische Waffen. Risiken und Kontrollmöglichkeiten zu Beginn des 21. Jahrhunderts
    Leske & Budrich 2002
    ISBN: 3-8100-2974-2, Preis: 20 Euro

    Martin A. Lee; Bruce Shlain: Acid Dreams. The Complete Social History of LSD, the CIA, the Sixties and Beyond
    Pan Books 2001
    ISBN: 0-330-48481-8, Preis: 17,60 Euro

    Frank Olson
    https://de.wikipedia.org/wiki/Frank_Olson

    Documents – Frank Olson Project
    https://frankolsonproject.com/documents

    President Ford invited the Olsons to the White House, where he apologized on behalf of the federal government and set in motion a Congress approved compensation of $750,000. CIA director William Colby also felt compelled to offer an apology, and in the summer of 1975 he met the three grown Olson children in his office on the seventh floor of the agency’s headquarters.

    Document package provided to the Olson family by CIA Director William Colby, during their meeting with him in his 7th floor office at CIA headquarters in Langley, Virginia on July 24, 1975. (165 page PDF – 33MB)

    #USA #guerre_froide #CIA #MKULTRA #torture

  • Henry Laurens : « On est sur la voie d’un processus de destruction de masse » à Gaza, entretien avec Rachida El Azzouzi (19 novembre 2023).

    Pour l’historien, spécialiste de la Palestine, professeur au collège de France, « l’effondrement des conditions sanitaires et l’absence de ravitaillement à destination des populations concernées peuvent indiquer que l’on est sur la voie d’un processus de destruction de masse » dans la bande de Gaza.

    L’historien et universitaire Henry Laurens est l’un des plus grands spécialistes du #Moyen-Orient. Professeur au Collège de France où il est titulaire de la chaire d’histoire contemporaine du #monde_arabe, il a mis la question palestinienne au cœur de son travail. Il est l’auteur de très nombreux livres dont cinq tomes sans équivalent publiés entre 1999 et 2015, consacrés à La question de Palestine (Fayard).
    Dans un entretien à Mediapart, il éclaire de sa connaissance l’exceptionnalité du conflit israélo-palestinien et le « corps à corps que même l’émotion n’arrive pas à séparer » dans lesquels les deux peuples sont pris depuis des décennies. Il dit son pessimisme quant à la résolution du conflit qui peut durer « des siècles » : « Vous ne pouvez espérer de sortie possible que par une décolonisation, mais à horizon immédiat, cette décolonisation n’est pas faisable. Dans les années 1990, elle l’était. Il y avait 30 000 colons. Aujourd’hui, ils sont 500 000 dont quelques dizaines de milliers qui sont des colons ultrareligieux et armés. »

    Plus d’une vingtaine de rapporteurs de l’organisation des Nations unies (ONU) s’inquiètent d’« un génocide en cours » à Gaza. Est-ce que vous employez ce terme ?

    Il y a deux sens au terme de « génocide ». Il y a le #génocide tel que défini par l’avocat polonais Raphael Lemkin en 1948, la seule définition juridique existante, aujourd’hui intégrée au protocole de Rome créant la #CPI [Cour pénale internationale – ndlr]. Lemkin a été obligé, pour que ce soit voté par les Soviétiques et par le bloc de l’Est, d’éliminer les causes politiques du génocide – massacrer des gens dans le but de détruire une classe sociale –, parce qu’il aurait fallu reconnaître le massacre des koulaks par les Soviétiques.

    La définition de Lemkin implique que ceux qui commettent un génocide appartiennent à un autre peuple que celui des victimes. D’où le problème aussi qu’on a eu avec le #Cambodge, qu’on ne pouvait pas appeler un génocide parce que c’étaient des Cambodgiens qui avaient tué des Cambodgiens. Là, on est dans une définition étroite. C’était le prix à payer pour obtenir un accord entre les deux Blocs dans le contexte du début de la #guerre_froide.

    Vous avez ensuite une définition plus large du terme, celui d’une destruction massive et intentionnelle de populations quelles qu’en soient les motivations.

    Il existe donc deux choses distinctes : la première, ce sont les actes, et la seconde, c’est l’intention qui est derrière ces actes. Ainsi le tribunal international pour l’ex-Yougoslavie a posé la différence entre les nettoyages ethniques dont la motivation n’est pas génocidaire parce que l’#extermination n’était pas recherchée, même si le nombre de victimes était important, et les actes de génocide comme celui de Srebrenica, où l’intention était claire.

    On voit ainsi que le nombre de victimes est secondaire. Pour Srebrenica, il est de l’ordre de 8 000 personnes.

    L’inconvénient de cette #logique_judiciaire est de conduire à une casuistique de l’intentionnalité, ce qui ne change rien pour les victimes. 

    Au moment où nous parlons, le nombre de victimes dans la bande de #Gaza est supérieur à celui de Srebrenica. On a, semble-t-il, dépassé la proportion de 0,5 % de la population totale. Si on compare avec la France, cela donnerait 350 000 morts.

    Le discours israélien évoque des victimes collatérales et des boucliers humains. Mais de nombreux responsables israéliens tiennent des discours qui peuvent être qualifiés de génocidaires. L’effondrement des conditions sanitaires et l’absence même de ravitaillement à destination des populations concernées peuvent indiquer que l’on est sur la voie d’un processus de destruction de masse avec des controverses à n’en plus finir sur les intentionnalités. 

    La solution à deux États n’est plus possible.

    La crainte d’une seconde « #Nakba » (catastrophe), en référence à l’exil massif et forcé à l’issue de la guerre israélo-arabe de 1948, hante les #Palestiniens. Peut-on faire le parallèle avec cette période ?

    La Nakba peut être considérée comme un #nettoyage_ethnique, en particulier dans les régions autour de l’actuelle bande de Gaza où l’#intentionnalité d’expulsion est certaine. Des responsables israéliens appellent aujourd’hui à une #expulsion de masse. C’est d’ailleurs pour cela que l’Égypte et la Jordanie ont fermé leurs frontières.

    Dans l’affaire actuelle, les démons du passé hantent les acteurs. Les juifs voient dans le 7 octobre une réitération de la Shoah et les Palestiniens dans les événements suivants celle de la Nakba.

    Faut-il craindre une annexion de la bande de Gaza par Israël avec des militaires mais aussi des colons ?

    En fait, personne ne connaît la suite des événements. On ne voit personne de volontaire pour prendre la gestion de la bande de Gaza. Certains responsables israéliens parlent de « dénazification » et il y a une dimension de vengeance dans les actes israéliens actuels. Mais les vengeances n’engendrent que des cycles permanents de violence.

    Quelle est votre analyse des atrocités commises le 7 octobre 2023 par le Hamas ?

    Elles constituent un changement considérable, parce que la position de l’État d’Israël est profondément modifiée au moins sur deux plans : premièrement, le pays a subi une invasion pour quelques heures de son territoire, ce qui n’est pas arrivé depuis sa création ; deuxièmement, le 7 octobre marque l’échec du projet sioniste tel qu’il a été institué après la Seconde Guerre mondiale, un endroit dans le monde où les juifs seraient en position de sécurité. Aujourd’hui, non seulement l’État d’Israël est en danger, mais il met en danger les diasporas qui, dans le monde occidental, se trouvent menacées ou, en tout cas, éprouvent un sentiment de peur.

    Le dernier tome de votre série consacrée à « La question de Palestine » (Fayard) était intitulé « La paix impossible » et courait sur la période 1982-2001. Vous étiez déjà très pessimiste quant à la résolution de ce conflit, mais aussi concernant l’avenir de la région, comme si elle était condamnée à demeurer cette poudrière. Est-ce que vous êtes encore plus pessimiste aujourd’hui ? Ou est-ce que le #conflit_israélo-palestinien vous apparaît soluble, et si oui, quelle issue apercevez-vous ?

    La réelle solution théorique serait d’arriver à un système de gestion commune et équitable de l’ensemble du territoire. Mais un État unitaire est difficile à concevoir puisque les deux peuples ont maintenant plus d’un siècle d’affrontements.

    Qu’en est-il de la solution à deux États, dont le principe a été adopté en 1947 par l’ONU, après la fin du mandat britannique ? Est-elle possible ?

    La solution à deux États n’est plus possible dès lors que vous avez 500 000 colons, dont quelques dizaines de milliers qui sont des #colons ultrareligieux et armés. Vous avez une violence quotidienne en #Cisjordanie. La sécurité des colons ne peut se fonder que sur l’insécurité des Palestiniens. Et l’insécurité des Palestiniens provoque la violence qui engendre l’insécurité des colons.

    C’est un cercle vicieux et vous ne pouvez espérer de sortie possible que par une décolonisation, mais à horizon immédiat, cette #décolonisation n’est pas faisable. Dans les années 1990, elle l’était. Il y avait 30 000 colons. On pouvait, sans trop de dégâts, faire une décolonisation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. 

    Aujourd’hui, nous sommes dans une position de domination, et cette solution peut prendre des siècles parce qu’il y a l’exceptionnalité juive qui crée une exceptionnalité israélienne qui elle-même crée une exceptionnalité palestinienne. C’est-à-dire que sans être péjoratif, les Palestiniens deviennent des juifs bis.

    Qu’entendez-vous par là ?

    Nous sommes depuis le 7 octobre devant un grand nombre de victimes. Mais ces dernières années, nous en avons eu bien plus en Irak, en Syrie, au Soudan et en Éthiopie. Cela n’a pas provoqué l’émoi mondial que nous connaissons aujourd’hui. L’émotion a été suscitée parce que les victimes étaient juives, puis elle s’est déplacée sur les victimes palestiniennes. Les deux peuples sont dans un corps à corps que même l’émotion n’arrive pas à séparer.

    Les années 1990 ont été marquées par les accords d’Oslo en 1993. Relèvent-ils du mirage aujourd’hui ?
     
    Non, on pouvait gérer une décolonisation. Mais déjà à la fin des accords d’Oslo, il n’y a pas eu décolonisation mais doublement de la #colonisation sous le gouvernement socialiste et ensuite sous le premier gouvernement Nétanyahou. Ce sont l’occupation, la colonisation, qui ont amené l’échec des processus. Il n’existe pas d’occupation, de colonisation pacifique et démocratique.

    Aujourd’hui, c’est infiniment plus difficile à l’aune de la violence, des passions, des derniers événements, des chocs identitaires, de la #haine tout simplement. Qui plus est, depuis une trentaine d’années, vous avez une évolution commune vers une vision religieuse et extrémiste, aussi bien chez les juifs que chez les Palestiniens.

    La Palestine fonctionne en jeu à somme nulle, le progrès de l’un se fait au détriment de l’autre.

    Vous voulez dire que le conflit territorial est devenu un conflit religieux ?

    Il a toujours été religieux. Dès l’origine, le mouvement sioniste ne pouvait fonctionner qu’en utilisant des références religieuses, même si ses patrons étaient laïcs. La blague de l’époque disait que les sionistes ne croyaient pas en Dieu mais croyaient que Dieu leur avait promis la Terre promise.

    Le projet sioniste, même s’il se présentait comme un mouvement de sauvetage du peuple juif, ne pouvait fonctionner qu’en manipulant les affects. Il était de nature religieuse puisqu’il renvoyait à la Terre sainte. Vous avez une myriade d’endroits qui sont des #symboles_religieux, mais qui sont aussi des #symboles_nationaux, aussi bien pour les #juifs que pour les #musulmans : l’esplanade des Mosquées, le tombeau des Patriarches, le mur des Lamentations. Et puis il y a les gens qui se sentent mandatés par Dieu.

    De même, les musulmans ont cherché des alliés en jouant sur la solidarité islamique. Dès les années 1930, la défense de la mosquée Al-Aqsa est devenue un thème fédérateur.

    Pourquoi est-il devenu difficile d’invoquer une lecture coloniale du conflit depuis les massacres du Hamas du 7 octobre ?

    Le sionisme est à l’origine un corps étranger dans la région. Pour arriver à ses fins, il a eu besoin d’un soutien européen avant 1914, puis britannique et finalement américain. Israël s’est posé comme citadelle de l’#Occident dans la région et conserve le #discours_colonial de la supériorité civilisatrice et démocratique. Cet anachronisme est douloureusement ressenti par les autres parties prenantes.

    Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, les responsables sionistes n’hésitaient pas à se comparer à la colonisation britannique en Afrique noire avec la nécessité de mater les protestations indigènes. 

    La Palestine fonctionne en jeu à somme nulle, le progrès de l’un se fait au détriment de l’autre. La constitution de l’État juif impliquait un « transfert » de la population arabe à l’extérieur, terme poli pour « expulsion ». La #confiscation des #terres détenues par les Arabes en est le corollaire. Les régions où ont eu lieu les atrocités du 7 octobre étaient peuplées d’Arabes qui ont été expulsés en 1948-1950.

    Dire cela, c’est se faire accuser de trouver des excuses au terrorisme. Dès que vous essayez de donner des éléments de compréhension, vous vous confrontez à l’accusation : « Comprendre, c’est excuser. » Il faut bien admettre que le #Hamas dans la bande de Gaza recrute majoritairement chez les descendants des expulsés. Cela ne veut pas dire approuver ce qui s’est passé.

    Le slogan « From the river to the sea, Palestine will be free » (« De la rivière à la mer, la Palestine sera libre ») utilisé par les soutiens de la Palestine fait polémique. Est-ce vouloir rayer de la carte Israël ou une revendication légitime d’un État palestinien ?

    Il a été utilisé par les deux parties et dans le même sens. Les mouvements sionistes, en particulier la droite sioniste, ont toujours dit que cette terre devait être juive et israélienne au moins jusqu’au fleuve. Le parti de l’ancêtre du Likoud voulait même annexer l’ensemble de la Jordanie.

    Chez certains Palestiniens, on a une vision soft qui consiste à dire que « si nous réclamons un État palestinien réunissant la bande de Gaza et la Cisjordanie, nous considérons l’ensemble de la terre comme la Palestine historique, comme partie de notre histoire, mais nous ne la revendiquons pas dans sa totalité ».

    Israël depuis sa fondation n’a pas de #frontières définies internationalement. Il a toujours revendiqué la totalité de la Palestine mandataire, voire plus. Il a ainsi rejeté l’avis de la Cour internationale de justice qui faisait des lignes d’armistice de 1949 ses frontières permanentes.

    Cette indétermination se retrouve de l’autre côté. La libération de la Palestine renvoie à la totalité du territoire. D’autres exigeaient la carte du plan de partage de 1947. Pour l’Organisation de libération de la Palestine (#OLP), faire l’#État_palestinien sur les territoires occupés en 1968 était la concession ultime.

    Les Arabes en général ont reçu sans grand problème les réfugiés arméniens durant la Grande Guerre et les années suivantes. Ces Arméniens ont pu conserver l’essentiel de leur culture. Mais il n’y avait pas de question politique. Il n’était pas question de créer un État arménien au Levant.

    Dès le départ, les Arabes de Palestine ont vu dans le projet sioniste une menace de dépossession et d’expulsion. On ne peut pas dire qu’ils ont eu tort…

    Le mouvement islamiste palestinien, le Hamas, classé #terroriste par l’Union européenne et les États-Unis, est aujourd’hui le principal acteur de la guerre avec Israël…

    Définir l’ennemi comme terroriste, c’est le placer hors la loi. Bien des épisodes de décolonisation ont vu des « terroristes » devenir du jour au lendemain des interlocuteurs valables. 

    Bien sûr, il existe des actes terroristes et les atrocités du 7 octobre le sont. Mais c’est plus une méthodologie qu’une idéologie. C’est une forme de guerre qui s’en prend aux civils selon les définitions les plus courantes. Jamais un terroriste ne s’est défini comme tel. Il se voit comme un combattant légitime et généralement son but est d’être considéré comme tel. Avec l’État islamique et le 7 octobre, on se trouve clairement devant un usage volontaire de la cruauté.

    La rhétorique habituelle est de dire que l’on fait la guerre à un régime politique et non à un peuple. Mais si on n’offre pas une perspective politique à ce peuple, il a le sentiment que c’est lui que l’on a mis hors la loi. Il le voit bien quand on dit « les Israéliens ont le droit de se défendre », mais apparemment pas quand il s’agit de Palestiniens.

    D’aucuns expliquent qu’Israël a favorisé l’ascension du Hamas pour qu’un vrai État palestinien indépendant ne voie jamais le jour au détriment de l’#autorité_palestinienne qui n’administre aujourd’hui plus que la Cisjordanie. Est-ce que le Hamas est le meilleur ennemi des Palestiniens ? 

    Incontestablement, les Israéliens ont favorisé les #Frères_musulmans de la bande de Gaza dans les années 1970 et 1980 pour contrer les activités du #Fatah. De même, après 2007, ils voulaient faire du Hamas un #sous-traitant chargé de la bande de Gaza, comme l’Autorité palestinienne l’est pour la Cisjordanie. 

    Le meilleur moyen de contrer le Hamas est d’offrir aux Palestiniens une vraie perspective politique et non de bonnes paroles et quelques aides économiques qui sont des emplâtres sur des jambes de bois. 

    Quel peut être l’avenir de l’Autorité palestinienne, aujourd’hui déconsidérée ? Et du Fatah, le parti du président Mahmoud Abbas, pressé par la base de renouer avec la lutte armée et le Hamas ?

    Le seul acquis de l’Autorité palestinienne, ou plus précisément de l’OLP, c’est sa légitimité diplomatique. Sur le terrain, elle est perçue comme un sous-traitant de l’occupation israélienne incapable de contrer un régime d’occupation de plus en plus dur. Elle est dans l’incapacité de protéger ses administrés. Le risque majeur pour elle est tout simplement de s’effondrer.

    Le Hamas appelle les Palestiniens de Cisjordanie à se soulever. Un soulèvement généralisé des Palestiniens peut-il advenir ?

    En Cisjordanie, on a surtout de petits groupes de jeunes armés totalement désorganisés. Mais la violence et la répression sont devenues quotidiennes et les violences permanentes. À l’extérieur, l’Occident apparaît complice de l’occupation et de la répression israéliennes. L’Iran, la Chine et la Russie en profitent.

    Le premier tome de votre monumentale « Question de Palestine » s’ouvre sur 1799, lorsque l’armée de Napoléon Bonaparte entre en Palestine, il court jusqu’en 1922. Avec cette accroche : l’invention de la Terre sainte. En quoi cette année est-elle fondatrice ?

    En 1799, l’armée de Bonaparte parcourt le littoral palestinien jusqu’à Tyr. En Europe, certains y voient la possibilité de créer un État juif en Palestine. Mais l’ouverture de la Terre sainte aux Occidentaux est aussi l’occasion d’une lutte d’influences entre puissances chrétiennes. 

    Dans le tome 4, « Le rameau d’olivier et le fusil du combattant » (1967-1982), vous revenez sur ce qui a été un conflit israélo-arabe, puis un conflit israélo-palestinien. Est-ce que cela peut le redevenir ?

    Jusqu’en 1948, c’est un conflit israélo-palestinien avant tout. En 1948, cela devient un #conflit_israélo-arabe avec une dimension palestinienne. À partir de la fin des années 1970, la dimension palestinienne redevient essentielle.

    Ben Gourion disait que la victoire du sionisme était d’avoir transformé la question juive en problème arabe. Les derniers événements semblent montrer que le #problème_arabe est en train de redevenir une #question_juive.

    Le rôle des États-Unis a toujours été déterminant dans ce conflit. Que nous dit leur position aujourd’hui ? 

    La question de Palestine est en même temps une question intérieure pour les pays occidentaux du fait de l’histoire de la Shoah et de la colonisation. Il s’y ajoute aux États-Unis une dimension religieuse du fait du biblisme protestant et du « pionniérisme ». Les Palestiniens leur semblent être quelque part entre les Indiens et les Mexicains…

    La « République impériale » vient encore de montrer son impressionnante capacité de projection militaire dans la région, mais aussi son incapacité à obtenir un règlement politique satisfaisant.

    Pourquoi ce conflit déclenche-t-il autant de passions et clive-t-il autant dans le monde entier, où comme en France, le président appelle à « ne pas importer le conflit » ?

    C’est un conflit gorgé d’histoire. La Terre sainte est celle des trois religions monothéistes. Le conflit lui-même porte avec lui la mémoire de la Shoah et de la colonisation, d’où l’extraordinaire position d’exceptionnalité des acteurs.

    Vous avez écrit cinq tomes sur la question de Palestine. Après l’ultime « La Paix impossible », quel pourrait être le sixième ?
     
    Peut-être le retour de la question juive, mais c’est loin d’être une perspective encourageante.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/191123/henry-laurens-est-sur-la-voie-d-un-processus-de-destruction-de-masse-gaza

    #discours_génocidaire #religion (s) #sionisme

  • Crise capitaliste au moyen orient | Guillaume Deloison
    https://guillaumedeloison.wordpress.com/2018/10/08/dawla-crise-capitaliste-au-moyen-orient

    ISRAËL ET PALESTINE – CAPITAL, COLONIES ET ÉTAT

    Le conflit comme Histoire

    A la fin des guerres napoléoniennes, certaines parties du Moyen-Orient se retrouvèrent envahies par le nouveau mode de production capitaliste. Dans cette région, l’industrie textile indigène, surtout en Egypte, fut détruite par les textiles anglais bon marché dans les années 1830. Dès les années 1860, les fabricants britanniques avaient commencé à cultiver le coton le long du Nil. En 1869, on ouvrit le canal de Suez dans le but de faciliter le commerce britannique et français. Conformément à cette modernisation, on peut dater les origines de l’accumulation primitive en #Palestine à la loi de l’#Empire_ottoman de 1858 sur la #propriété_terrienne qui remplaçait la propriété collective par la propriété individuelle de la terre. Les chefs de village tribaux se transformèrent en classe de propriétaires terriens qui vendaient leurs titres aux marchands libanais, syriens, égyptiens et iraniens. Pendant toute cette période, le modèle de développement fut surtout celui d’un développement inégal, avec une bourgeoisie étrangère qui prenait des initiatives et une bourgeoisie indigène, si l’on peut dire, qui restait faible et politiquement inefficace.

    Sous le #Mandat_britannique, de nombreux propriétaires absentéistes furent rachetés par l’Association de colonisation juive, entraînant l’expulsion de métayers et de fermiers palestiniens. Étant donné que les dépossédés devaient devenir #ouvriers_agricoles sur leurs propres terres, une transformation décisive des relations de production commençait, conduisant aux premières apparitions d’un #prolétariat_palestinien. Ce processus eut lieu malgré une violente opposition de la part des #Palestiniens. Le grand tournant dans une succession de #révoltes fut le soulèvement de #1936-1939. Son importance réside dans le fait que « la force motrice de ce soulèvement n’était plus la paysannerie ou la bourgeoisie, mais, pour la première fois, un prolétariat agricole privé de moyens de travail et de subsistance, associé à un embryon de classe ouvrière concentrée principalement dans les ports et dans la raffinerie de pétrole de Haïfa ». Ce soulèvement entraîna des attaques contre des propriétaires palestiniens ainsi que contre des colons anglais et sionistes. C’est dans le même temps que se développa le mouvement des #kibboutz, comme expérience de vie communautaire inspiré notamment par des anarchistes comme Kropotkine, s’inscrivant dans le cadre du sionisme mais opposées au projet d’un état.

    La Seconde Guerre mondiale laissa un héritage que nous avons du mal à imaginer. L’implantation des juifs en Palestine, déjà en cours, mais de faible importance entre 1880 et 1929, connaît une augmentation dans les années 1930 et puis un formidable élan dans l’après-guerre ; de ce processus naquit #Israël. Le nouvel Etat utilisa l’appareil légal du Mandat britannique pour poursuivre l’expropriation des Palestiniens. La #prolétarisation de la paysannerie palestinienne s’étendit encore lors de l’occupation de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza en 1967. Cette nouvelle vague d’accumulation primitive ne se fit pas sous la seule forme de l’accaparement des #terres. Elle entraîna aussi le contrôle autoritaire des réserves d’#eau de la Cisjordanie par le capital israélien par exemple.

    Après la guerre de 1967, l’Etat israélien se retrouvait non seulement encore entouré d’Etats arabes hostiles, mais aussi dans l’obligation de contrôler la population palestinienne des territoires occupés. Un tiers de la population contrôlée par l’Etat israélien était alors palestinienne. Face à ces menaces internes et externes, la survie permanente de l’Etat sioniste exigeait l’unité de tous les Juifs israéliens, occidentaux et orientaux. Mais unir tous les Juifs derrière l’Etat israélien supposait l’intégration des #Juifs_orientaux, auparavant exclus, au sein d’une vaste colonie de travail sioniste. La politique consistant à établir des colonies juives dans les territoires occupés est un élément important de l’extension de la #colonisation_travailliste sioniste pour inclure les Juifs orientaux auparavant exclus. Bien entendu, le but immédiat de l’installation des #colonies était de consolider le contrôle d’Israël sur les #territoires_occupés. Cependant, la politique de colonisation offrait aussi aux franges pauvres de la #classe_ouvrière_juive un logement et des emplois qui leur permettaient d’échapper à leur position subordonnée en Israël proprement dit. Ceci ne s’est pas fait sans résistance dans la classe ouvrière Israélienne, certain s’y opposaient comme les #Panthéres_noire_israélienne mais l’#Histadrout,« #syndicat » d’Etat et employeur important s’efforçait d’étouffer les luttes de la classe ouvrière israélienne, comme par exemple les violents piquets de grève des cantonniers.

    En 1987, ce sont les habitants du #camp_de_réfugiés de Jabalya à Gaza qui furent à l’origine de l’#Intifada, et non l’#OLP (Organisation de Libération de la Palestine) composé par la bourgeoisie Palestinienne, basée en Tunisie et complètement surprise. Comme plus tard en 2000 avec la seconde intifada, ce fut une réaction de masse spontanée au meurtre de travailleurs palestiniens. A long terme, l’Intifada a permis de parvenir à la réhabilitation diplomatique de l’OLP. Après tout, l’OLP pourrait bien être un moindre mal comparée à l’activité autonome du prolétariat. Cependant, la force de négociation de l’OLP dépendait de sa capacité, en tant que « seul représentant légitime du peuple palestinien », à contrôler sa circonscription, ce qui ne pouvait jamais être garanti, surtout alors que sa stratégie de lutte armée s’était révélée infructueuse. Il était donc difficile pour l’OLP de récupérer un soulèvement à l’initiative des prolétaires, peu intéressés par le nationalisme, et qui haïssaient cette bourgeoisie palestinienne presque autant que l’Etat israélien.

    Quand certaines personnes essayèrent d’affirmer leur autorité en prétendant être des leaders de l’Intifada, on raconte qu’un garçon de quatorze ans montra la pierre qu’il tenait et dit : « C’est ça, le leader de l’Intifada. » Les tentatives actuelles de l’Autorité palestinienne pour militariser l’Intifada d’aujourd’hui sont une tactique pour éviter que cette « anarchie » ne se reproduise. L’utilisation répandue des pierres comme armes contre l’armée israélienne signifiait qu’on avait compris que les Etats arabes étaient incapables de vaincre Israël au moyen d’une guerre conventionnelle, sans parler de la « lutte armée » de l’OLP. Le désordre civil « désarmé » rejetait obligatoirement « la logique de guerre de l’Etat » (bien qu’on puisse aussi le considérer comme une réaction à une situation désespérée, dans laquelle mourir en « martyr » pouvait sembler préférable à vivre dans l’enfer de la situation présente). Jusqu’à un certain point, le fait de lancer des pierres déjouait la puissance armée de l’Etat d’Israël.

    D’autres participants appartenaient à des groupes relativement nouveaux, le #Hamas et le #Jihad_Islamique. Pour essayer de mettre en place un contrepoids à l’OLP, Israël avait encouragé la croissance de la confrérie musulmane au début des années 1980. La confrérie ayant fait preuve de ses sentiments anti-classe ouvrière en brûlant une bibliothèque qu’elle jugeait être un » foyer communiste « , Israël commença à leur fournir des armes.

    D’abord connus comme les « accords Gaza-Jéricho », les accords d’Oslo fit de l’OLP l’autorité palestinienne. Le Hamas a su exploiter ce mécontentement tout en s’adaptant et en faisant des compromis. Ayant rejeté les accords d’Oslo, il avait boycotté les premières élections palestiniennes issues de ces accords en 1996. Ce n’est plus le cas désormais. Comme tous les partis nationalistes, le Hamas avec son discours religieux n’a nullement l’intention de donner le pouvoir au peuple, avec ou sans les apparences de la démocratie bourgeoise. C’est d’ailleurs ce qu’il y a de profondément commun entre ce mouvement et l’OLP dans toutes ses composantes : la mise en place d’un appareil politico-militaire qui se construit au cours de la lutte, au nom du peuple mais clairement au-dessus de lui dès qu’il s’agit de prendre puis d’exercer le pouvoir. Après plusieurs années au gouvernement, le crédit du Hamas est probablement et selon toute apparence bien entamé, sans que personne non plus n’ait envie de revenir dans les bras du Fatah (branche militaire de l’OLP). C’est semble-t-il le scepticisme, voire tout simplement le désespoir et le repli sur soi, qui semblent l’emporter chaque jour un peu plus au sein de la population.

    Le sionisme, un colonialisme comme les autres ?

    Dans cette situation, la question de déterminer les frontières de ce qui délimiterait un État israélien « légitime » est oiseuse, tant il est simplement impossible : la logique de l’accaparement des territoires apparaît inséparable de son existence en tant qu’État-nation. S’interroger dans quelle mesure l’État israélien est plus ou moins « légitime » par rapport à quelque autre État, signifie simplement ignorer comment se constituent toujours les États-nations en tant qu’espaces homogènes.

    Pour comprendre la situation actuelle il faut appréhender la restructuration générale des rapports de classes à partir des années 1970. Parallèlement aux deux « crises pétrolières » de 1973-74 et 1978-80, à la fin du #nationalisme_arabe et l’ascension de l’#islamisme, la structure économique et sociale de l’État d’Israël change radicalement. Le #sionisme, dans son strict sens, fut la protection et la sauvegarde du « travail juif », soit pour le capital israélien, contre la concurrence internationale, soit pour la classe ouvrière contre les prolétaires palestiniens : ce fut en somme, un « compromis fordiste » post-1945, d’enracinement d’une fraction du capital dans dans un État-nation. Le sionisme impliquait qu’il donne alors à l’État et à la société civile une marque de « gauche » dans ce compromis interclassiste et nationaliste. C’est ce compromis que le Likoud a progressivement liquidé ne pouvant plus garantir le même niveau de vie au plus pauvres. Pourtant la définition d’Israël comme « État sioniste » résiste. Agiter des mots comme « sioniste », « lobby », etc. – consciemment ou pas – sert à charger l’existence d’Israël d’une aire d’intrigue, de mystère, de conspiration, d’exceptionnalité, dont il n’est pas difficile de saisir le message subliminal : les Israéliens, c’est-à-dire les Juifs, ne sont pas comme les autres. Alors que le seul secret qu’il y a dans toute cette histoire, c’est le mouvement du capital que peu regardent en face. La concurrence généralisé, qui oppose entre eux « ceux d’en haut » et aussi « ceux d’en bas ». L’aggravation de la situation du prolétariat israélien et la quart-mondialisation du prolétariat palestinien appartiennent bien aux mêmes mutations du capitalisme israélien, mais cela ne nous donne pour autant les conditions de la moindre « solidarité » entre les deux, bien au contraire. Pour le prolétaire israélien, le Palestinien au bas salaire est un danger social et de plus en plus physique, pour le prolétaire palestinien les avantages que l’Israélien peut conserver reposent sur son exploitation, sa relégation accrue et l’accaparement des territoires ».

    La #solidarité est devenue un acte libéral, de conscience, qui se déroule entièrement dans le for intérieur de l’individu. Nous aurons tout au plus quelques slogans, une manifestation, peut-être un tract, deux insultes à un flic… et puis tout le monde rentre chez soi. Splendeur et misère du militantisme. Entre temps, la guerre – traditionnelle ou asymétrique – se fait avec les armes, et la bonne question à se poser est la suivante : d’où viennent-elles ? Qui les paye ? Il fut un temps, les lance-roquettes Katioucha arrivaient avec le « Vent d’Est ». Aujourd’hui, pour les Qassam, il faut dire merci à la #Syrie et à l’#Iran. Il fut un temps où l’on pouvait croire que la Révolution Palestinienne allait enflammer le Tiers Monde et, de là, le monde entier. En réalité le sort des Palestiniens se décidait ailleurs, et ils servirent de chair à canon à l’intérieur des équilibres de la #Guerre_Froide. Réalité et mythe de la « solidarité internationale ».

    Nous savons trop bien comment la #religion peut être « le soupir de la créature opprimée, le sentiment d’un monde sans cœur » (Karl Marx, Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel). Mais cette généralité vaut en Palestine, en Italie comme partout ailleurs. Dans le Proche et Moyen-Orient, comme dans la plupart des pays arabes du bassin méditerranéen, l’islamisme n’est pas une idéologie tombée du ciel, elle correspond à l’évolution des luttes entre les classes dans cette zone, à la fin des nationalisme arabe et la nécessité de l’appareil d’état pour assurer l’accumulation capitaliste. Le minimum, je n’ose même pas dire de solidarité, mais de respect pour les prolétaires palestiniens et israeliens, nous impose tout d’abord d’être lucides et sans illusions sur la situation actuelle ; de ne pas considérer le prolétariat palestinien comme des abrutis qui se feraient embobiner par le Hamas ni comme des saints investi par le Mandat du Ciel Prolétarien ; de ne pas considérer le prolétariat israélien comme des abruti qui serait simplement rempli de haine envers les palestinien ni comme des saint dont la situation ne repose pas sur l’exploitation d’autres. L’#antisionisme est une impasse, tout comme l’#antimondialisme (défense du #capital_national contre le capital mondialisé), ou toutes les propositions de gestion alternative du capital, qui font parties du déroulement ordinaire de la lutte des classe sans jamais abolir les classes. Sans pour autant tomber dans un appel à la révolution globale immédiate pour seule solution, il nous faut partir de la réalité concrètes et des divisions existantes du mode de production, pour s’y attaquer. Le communisme n’est pas le fruit d’un choix, c’est un mouvement historique. C’est avec cette approche que nous cherchons à affronter cette question. Il en reste pas moins que désormais – à force de réfléchir a partir de catégories bourgeoises comme « le droit », « la justice » et « le peuple » – il n’est pas seulement difficile d’imaginer une quelconque solution, mais il est devenu quasi impossible de dire des choses sensées à cet égard.

    (version partiellement corrigée de ses erreurs typo et orthographe par moi)

  • Le sionisme, l’antisémitisme et la gauche, par Moishe Postone
    http://www.palim-psao.fr/2019/02/le-sionisme-l-antisemitisme-et-la-gauche-par-moishe-postone.html


    Graffiti antisémite en Belgique en 2013

    Moishe Postone : Il est exact que le gouvernement israélien se sert de l’accusation d’#antisémitisme comme d’un bouclier pour se protéger des critiques. Mais ça ne veut pas dire que l’antisémitisme lui-même ne représente pas un problème grave.

    Ce qui distingue ou devrait distinguer l’antisémitisme du #racisme a à voir avec l’espèce d’imaginaire du pouvoir attribué aux #Juifs, au sionisme et à #Israël, imaginaire qui constitue le noyau de l’antisémitisme. Les Juifs sont perçus comme constituant une sorte de pouvoir universel immensément puissant, abstrait et insaisissable qui domine le monde. On ne trouve rien d’équivalent à la base d’aucune autre forme de racisme. Le racisme, pour autant que je sache, constitue rarement un système complet cherchant à expliquer le monde. L’antisémitisme est une critique primitive du monde, de la modernité capitaliste. Si je le considère comme particulièrement dangereux pour la gauche, c’est précisément parce que l’antisémitisme possède une dimension pseudo-émancipatrice que les autres formes de racisme n’ont que rarement.

    MT : Dans quelle mesure pensez-vous que l’antisémitisme aujourd’hui soit lié aux attitudes vis-à-vis d’Israël ? On a l’impression que certaines des attitudes de la #gauche à l’égard d’Israël ont des sous-entendus antisémites, notamment celles qui ne souhaitent pas seulement critiquer et obtenir un changement dans la politique du gouvernement israélien à l’égard des Palestiniens, mais réclament l’abolition d’Israël en tant que tel, et un monde où toutes les nations existeraient sauf Israël. Dans une telle perspective, être juif, sentir qu’on partage quelque chose comme une identité commune avec les autres Juifs et donc en général avec les Juifs israéliens, équivaut à être « sioniste » et est considéré comme aussi abominable qu’être raciste.

    MP : Il y a beaucoup de nuances et de distinctions à faire ici. Dans la forme que prend de nos jours l’#antisionisme, on voit converger de façon extrêmement dommageable toutes sortes de courants historiques.

    L’un d’eux, dont les origines ne sont pas nécessairement antisémites, plonge ses racines dans les affrontements entre membres de l’intelligentsia juive d’Europe orientale au début du XXesiècle. La plupart des intellectuels juifs – intellectuels laïques inclus ? – sentaient qu’une certaine forme d’#identité_collective faisait partie intégrante de l’expérience juive. Cette identité a pris de plus en plus un caractère national étant donné la faillite des formes antérieures, impériales, de collectivité – c’est-à-dire à mesure que les vieux empires, ceux des Habsbourg, des Romanov, de la Prusse, se désagrégeaient. Les Juifs d’Europe orientale, contrairement à ceux d’Europe occidentale, se voyaient avant tout comme une collectivité, pas simplement comme une religion.

    Ce sentiment national juif s’exprima sous diverses formes. Le sionisme en est une. Il y en eut d’autres, représentées notamment par les partisans d’une #autonomie_culturelle juive, ou encore par le #Bund, ce mouvement socialiste indépendant formé d’ouvriers Juifs, qui comptait plus de membres qu’aucun autre mouvement juif et s’était séparé du parti social-démocrate russe dans les premières années du XXe siècle.

    D’un autre côté, il y avait des Juifs, dont un grand nombre d’adhérents aux différents partis communistes, pour qui toute expression identitaire juive constituait une insulte à leur vision de l’humanité, vision issue des Lumières et que je qualifierais d’abstraite. Trotski, par exemple, dans sa jeunesse, qualifiait les membres du Bund de « sionistes qui ont le mal de mer ». Notez que la critique du #sionisme n’avait ici rien à voir avec la Palestine ou la situation des Palestiniens, puisque le Bund s’intéressait exclusivement à la question de l’autonomie au sein l’empire russe et rejetait le sionisme. En assimilant le Bund et le sionisme, Trotski fait plutôt montre d’un rejet de toute espèce d’identité communautaire juive. Trotski, je crois, a changé d’opinion par la suite, mais cette attitude était tout à fait typique. Les organisations communistes avaient tendance à s’opposer vivement à toute espèce de #nationalisme_juif : nationalisme culturel, nationalisme politique ou sionisme. C’est là un des courants de l’antisionisme. Il n’est pas nécessairement antisémite mais rejette, au nom d’un #universalisme_abstrait, toute identité collective juive. Encore que cette forme d’antisionisme soit souvent incohérente : elle est prêt à accorder l’autodétermination nationale à la plupart des peuples, mais pas aux Juifs. C’est à ce stade que ce qui s’affiche comme abstraitement universaliste devient idéologique. De surcroît, la signification même d’un tel universalisme abstrait varie en fonction du contexte historique. Après l’Holocauste et la fondation de l’État d’Israël, cet universalisme abstrait sert à passer à la trappe l’#histoire des Juifs en Europe, ce qui remplit une double fonction très opportune de « nettoyage » historique : la violence perpétrée historiquement par les Européens à l’encontre des Juifs est effacée, et, dans le même temps, on se met à attribuer aux Juifs les horreurs du colonialisme européen. En l’occurrence, l’universalisme abstrait dont se revendiquent nombre d’antisionistes aujourd’hui devient une idéologie de légitimation qui permet de mettre en place une forme d’#amnésie concernant la longue histoire des actes, des politiques et des idéologies européennes à l’égard des Juifs, tout en continuant essentiellement dans la même direction. Les Juifs sont redevenus une fois de plus l’objet d’une indignation spéciale de la part de l’Europe. La solidarité que la plupart des Juifs éprouvent envers d’autres Juifs, y compris en Israël – pour compréhensible qu’elle soit après l’Holocauste – est désormais décriée. Cette forme d’antisionisme est devenue maintenant l’une des bases d’un programme visant à éradiquer l’autodétermination juive réellement existante. Elle rejoint certaines formes de nationalisme arabe – désormais considérées comme remarquablement progressistes.

    Un autre courant d’antisionisme de gauche – profondément antisémite celui-là – a été introduit par l’Union Soviétique, notamment à travers les procès-spectacles en Europe de l’Est après la Seconde Guerre mondiale. C’est particulièrement impressionnant dans le cas du #procès_Slánský, où la plupart des membres du comité central du parti communiste tchécoslovaque ont été jugés puis exécutés. Toutes les accusations formulées à leur encontre étaient des accusations typiquement antisémites : ils étaient sans attaches, cosmopolites, et faisaient partie d’une vaste conspiration mondiale. Dans la mesure où les Soviétiques ne pouvaient pas utiliser officiellement le discours de l’antisémitisme, ils ont employé le mot « sionisme » pour signifier exactement ce que les antisémites veulent dire lorsqu’ils parlent des Juifs. Ces dirigeants du PC tchécoslovaque, qui n’avaient aucun lien avec le sionisme – la plupart étaient des vétérans de la guerre civile espagnole – ont été exécutés en tant que sionistes.

    Cette variété d’antisionisme antisémite est arrivée au Moyen-Orient durant la #guerre_froide, importée notamment par les services secrets de pays comme l’#Allemagne_de_l’Est. On introduisait au Moyen-Orient une forme d’antisémitisme que la gauche considérait comme « légitime » et qu’elle appelait antisionisme. Ses origines n’avaient rien à voir avec le mouvement contre l’installation israélienne. Bien entendu, la population arabe de Palestine réagissait négativement à l’immigration juive et s’y opposait. C’est tout à fait compréhensible. En soi, ça n’a certes rien d’antisémite. Mais ces deux courants de l’antisionisme se sont rejoints historiquement.

    Pour ce qui concerne le troisième courant, il s’est produit, au cours des dix dernières années environ, un changement vis-à-vis de l’existence d’Israël, en premier lieu au sein du mouvement palestinien lui-même. Pendant des années, la plupart des organisations palestiniennes ont refusé d’accepter l’existence d’Israël. Cependant, en 1988, l’OLP a décidé qu’elle accepterait cette existence. La seconde Intifada, qui a débuté en 2000, était politiquement très différente de la première et marquait un revirement par rapport à cette décision. C’était, à mon avis, une faute politique fondamentale, et je trouve surprenant et regrettable que la gauche s’y soit laissée prendre au point de réclamer elle aussi, de plus en plus, l’abolition d’Israël. Dans tous les cas, il y a aujourd’hui au Moyen-Orient à peu près autant de Juifs que de #Palestiniens. Toute stratégie fondée sur des analogies avec la situation algérienne ou sud-africaine est tout simplement vouée à l’échec, et ce pour des raisons aussi bien démographiques que politico-historiques.

    Moishe Postone est notamment l’auteur de Critique du fétiche-capital. Le capitalisme, l’antisémitisme et la gauche (PUF, 2013)

    #Moishe_Postone #URSS #nationalités #autodétermination_nationale #anti-impérialisme #campisme #islam_politique

    • Il y a un siècle, la droite allemande considérait la domination mondiale du capital comme celle des Juifs et de la Grande Bretagne. À présent, la gauche la voit comme la domination d’Israël et des États-Unis. Le schéma de pensée est le même. Nous avons maintenant une forme d’antisémitisme qui semble être progressiste et « anti-impérialiste » ; là est le vrai danger pour la gauche. Le #racisme en tant que tel représente rarement un danger pour la gauche. Elle doit certes prendre garde à ne pas être raciste mais ça n’est pas un danger permanent, car le racisme n’a pas la dimension apparemment émancipatrice qu’affiche l’antisémitisme.

    • Israël, ce ne sont pas les juifs ; heureusement. Le pouvoir d’extrême droite israélien aimerait bien que tout le monde raisonne comme cela. Afin de perpétuer cet amalgame confus, qui permet de dire « t’es anti-impérialiste ? t’es antisémite ! ». on le voit arriver, le glissement dans cette dernière citation. Cet instrumentalisation l’air de rien. On passe de Juif+Grande-Bretagne à Israël+Usa, comme par magie. Et on nie tous les faits politiques qui objectivement démontrent que les Us et Israël sont à la manœuvre conjointement, géopolitiquement, au Moyen Orient, depuis plusieurs dizaines d’années.

      Le pouvoir israélien est un pouvoir fasciste et colonialiste. Cela dure depuis plusieurs dizaines d’années. Le pouvoir américain est un pouvoir impérialiste. Et cela dure depuis plusieurs dizaines d’années. Ce sont des faits objectifs.

      Renvoyer tous leurs adversaires plus ou moins progressistes dans la cuvette de l’antisémitisme, c’est confus, pour rester courtois.

    • La partie sur l’antisionisme et la Palestine repose sur un tour de passe-passe sémantique très classique : la création d’Israël est sobrement qualifiée d’« autodétermination nationale », et sa critique est systématiquement accolée à l’accusation d’être favorable à l’autodétermination des peuples, « sauf des juifs » ; tout en minimisant (voire en niant carrément) le fait que cette « autodétermination » a nécessité – et nécessite toujours – le nettoyage ethnique à grande échelle de la population indigène.

      Encore que cette forme d’antisionisme soit souvent incohérente : elle est prêt à accorder l’autodétermination nationale à la plupart des peuples, mais pas aux Juifs.

      […]

      Cette forme d’antisionisme est devenue maintenant l’une des bases d’un programme visant à éradiquer l’autodétermination juive réellement existante.

      […]

      Cette idée que toute nation aurait droit à l’autodétermination à l’exception des Juifs est bel et bien un héritage de l’Union Soviétique.

      À l’inverse, le termine « colonisation » n’est ici utilisé que pour être nié.

      la violence perpétrée historiquement par les Européens à l’encontre des Juifs est effacée, et, dans le même temps, on se met à attribuer aux Juifs les horreurs du colonialisme européen.

      […]

      Subsumer le conflit sous l’étiquette du colonialisme, c’est mésinterpréter la situation.

      Évidemment : l’euphémisation « immigration juive », alors qu’on parle de la période de la guerre froide (la Nakba : 1948) :

      Bien entendu, la population arabe de Palestine réagissait négativement à l’immigration juive et s’y opposait.

  • US-Soldaten bei Manöver im Grunewald, 1959


    Voilà encore un indice pour la véracité de l’hypothèse que le militaire (pas seulement) étatsunien est une bande d’imbéciles. Tôt le matin ces deux messieurs se sont munis de chapkas contre les températures sibériennes dans la forêt municipale berlinoise. Ensuite ils se sont perdus parce qu’ils ne savent pas lire la carte étalée sur le capot de leur jeep et parce qu’il sont trop bêtes pour suivre l’indication sur le panneau derrière eux qui montre le chemin de retour aux enfants de la ville après la baignade estivale dans le lac cinquante mètres plus loin.

    Si vous avez envie de découvrir d’autres histoires à la con du temps de la guerre froide l’ AlliiertenMuseum est à vous.

    Natur im Kalten Krieg
    AlliiertenMuseum
    Datum : 15.10.2023
    Uhrzeit : 12:00 Uhr

    Clayallee 135
    14195 Berlin
    T +49 (0)30 / 818 199-0
    F +49 (0)30 / 818 199-91
    E info@alliiertenmuseum.de

    https://www.kulturkorso.de/gruenegeheimnisse/alliiertenmuseum-von-der-gruensten-seite-3.html

    #guerre #guerre_froide #Berlin #USA

  • Eichmann-Prozess und Bau der Berliner Mauer
    https://de.m.wikipedia.org/wiki/Eichmann-Prozess


    Quel rapport existe-t-il entre le procès contre l’homme qui a organisé le génocide des juifs d’Europe et la construction du mur de Berlin ? Il n’y a bien sûr pas de causalité directe mais chacun des événement a eu lieu au même moment sur fond des mêmes décisions politiques après 1945. On verra quels acteurs et intérêts politiques ont joué un rôle pour les deux événements historiques et quels éléments de l’histoire jouent encore un rôle dans la politique d’aujourd’hui.

    Als Eichmann-Prozess wird das Gerichtsverfahren gegen den ehemaligen deutschen SS-Obersturmbannführer Adolf Eichmann bezeichnet, in dem dieser vor dem Jerusalemer Bezirksgericht zwischen dem 11. April und 15. Dezember 1961 für den millionenfachen Mord an Juden zur Verantwortung gezogen wurde. Das Urteil lautete auf Tod durch den Strang.

    D’abord pourquoi Eichmann a-t-il été jugé à Tel Aviv plutôt qu’en Allemagne ?
    https://seenthis.net/messages/939611
    La réponse est simple et surprenante : C’était la décision d’Eichmann.
    https://www.telepolis.de/features/Onkel-Arturo-und-der-Mossad-4590962.html

    ... die Militärs setzten durch, dass sich Eichmann das Land, in das er abgeschoben würde, selbst aussuchen durfte. Er wählte Israel.

    Comme beaucoup d’exploiteurs et criminels Eichmann e se considérait pas comme tel. Ses amis et la presse allemande lui ont sant doute suggéré qu’on jugeait sévèrement les nazis en Allemagne. Ils se voyaient mal compris et comme objets de décisions de justice sous contrôle des vainqueurs. L’état d’Israel lui paraissait davantage un état de droit et il espérait pouvoir se disculper et nommer les véritables responsables de l’holocauste qui occupaient des postes de responsabilité en RFA. Comme on sait il se trompait

    Die Bundesregierung hatte kein Interesse an einer Auslieferung Eichmanns an die deutsche Justiz. Ein Antrag des hessischen Generalstaatsanwalts Fritz Bauer blieb ebenso erfolglos wie ein Ersuchen Eichmanns selbst. Inoffiziell stimmte eine interministerielle Arbeitsgruppe die beiderseitigen Interessen bezüglich der Anklage und der Prozessführung mit der israelischen Regierung ab.

    Berliner Mauer
    https://de.m.wikipedia.org/wiki/Berliner_Mauer


    La photo montre la vie à l’époque de la « coexistence paisible » entre le bloc américain et soviétique. A l’est un groupe d’ouvriers fait le ménage dans le no-mans-land du mur pendant qu’un habitant de Berlin-Ouest promène son chien sur le trottoir de la rue le long de l’ancien canal de liaison entre la Spree et le port Humbold. Le mur de Berlin garantissait la paix parce qu’il faisait partie des éléments de l’équilibre entre les grandes puissances nucléaires.

    Die Berliner Mauer war während der Teilung Deutschlands ein Grenzbefestigungssystem der Deutschen Demokratischen Republik (DDR), das vom 13. August 1961 bis zum 9. November 1989 bestand, um West-Berlin vom Gebiet der DDR hermetisch abzuriegeln.

    ... histoire à suivre ...

    #Allemagne #nazis #guerre_froide #mur

  • Pendant ce temps-là, les puissances occidentales mettent en ordre de bataille les esprits et transforment à vitesse accélérée leurs économies en «  économies de guerre  »

    Contre la guerre en Ukraine et sa généralisation
    https://mensuel.lutte-ouvriere.org/2023/02/25/contre-la-guerre-en-ukraine-et-sa-generalisation_521781.html

    Poutine, qui nie jusqu’à l’existence d’une nation ukrainienne, aura, par son sanglant mépris des peuples, contribué à ce que s’affirme le sentiment d’appartenir à l’Ukraine, alors qu’il peinait à prendre corps malgré les efforts du pouvoir et des nationalistes.

    L’échec relatif de Poutine résulte, entend-on souvent, de la mobilisation d’un peuple dressé pour défendre sa patrie, rien de tel ne motivant les soldats russes. Certes. Mais ce n’est qu’une partie de la réalité. Si l’Ukraine a tenu bon, malgré une industrie et une armée a priori moins fortes que celles du Kremlin, elle le doit avant tout à la trentaine de membres de l’OTAN, dont les États-Unis, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, la France, qui l’ont armée, financée et soutenue de bien des façons. Et ils ne cessent de surenchérir en ce domaine, tel Biden encore le 20 février à Kiev.

    Quand les pays de l’OTAN livrent à l’Ukraine des armements de plus en plus sophistiqués, de plus en plus efficaces, ils poursuivent un objectif immédiat proclamé  : éviter la défaite de l’Ukraine et faire durer la guerre afin d’affaiblir la Russie, et si possible la mettre à genoux.

    Cela pour montrer au monde entier ce qu’il en coûte de ne pas s’incliner devant l’ordre impérialiste. Les propos de Biden à Varsovie  : «  L’Ukraine ne sera jamais une victoire pour la Russie  », son refus affiché de toute négociation avec Poutine, le fait que les dirigeants occidentaux ont tous adopté la même posture et le même langage ces derniers temps, tout cela va dans le même sens.

    Le conflit en cours n’est pas la principale raison d’une escalade que l’Occident mène tambour battant. Il fait aussi office de toile de fond pour une mise en ordre de bataille des esprits, ne serait-ce que par la banalisation d’une guerre qui s’installe pour durer, dans une Europe qui n’en avait plus connu depuis 1945, exception faite des bombardements de la Serbie par l’OTAN, il y a un quart de siècle.

    Une mise sur le pied de guerre qui vaut aussi pour les économies de chaque pays, dans un monde capitaliste qui s’enfonce dans la crise sans que ses dirigeants y voient d’issue. Certes, les dirigeants du monde capitaliste n’ont pas encore choisi la fuite en avant vers une conflagration généralisée, comme celle qui conduisit à la Première et à la Deuxième Guerre mondiale, mais rien ne garantit que le conflit ukrainien ne risque pas, à tout moment, de précipiter l’humanité dans une nouvelle guerre mondiale.

    Le conflit en Ukraine sert déjà de terrain d’entraînement aux États impérialistes pour préparer l’éventualité d’un affrontement dit de haute intensité, que les états-majors militaires et politiques envisagent explicitement. Il sert aussi aux chefs de file de l’impérialisme à renforcer des blocs d’États alliés, avec leurs réseaux de bases sur le pourtour de la Russie et de la Chine.

    sommant les autres États de se rallier à ces alliances militaires et d’adopter des trains de sanctions contre la Russie, même quand cela va à l’encontre de leurs intérêts et de ceux, sonnants et trébuchants, de leurs capitalistes. On le constate pour l’arrêt des importations de gaz et de pétrole russes, l’interdiction de commercer avec la Russie, d’y maintenir des activités industrielles, ce qui pénalise des pays européens, dont l’Allemagne et la France, mais profite aux États-Unis.

    Si un fait nouveau, capital pour l’avenir de l’humanité, s’est fait jour au feu de cette guerre, c’est l’évolution rapide de la situation mondiale dans le sens de sa #militarisation.

    Poutine a répondu de façon monstrueuse à la pression continue de l’impérialisme en Europe de l’Est en lançant ses missiles et ses tanks sur l’Ukraine le 24 février 2022. Mais c’est l’impérialisme qui s’est préparé depuis longtemps à aller à la confrontation.

    ... à plonger tôt ou tard l’Ukraine dans la guerre, donc à faire de ses habitants les otages d’une rivalité qui les dépasse, car elle oppose le camp mené par les États-Unis à la Russie, avec son dictateur, ses bureaucrates et ses oligarques pillards. D’un côté ou de l’autre, il n’y a nulle place pour le droit des peuples à décider de leur destinée, même si on veut nous le faire croire.

    L’ex-chancelière Angela Merkel n’en croit rien. Elle le dit dans une interview où elle revient sur la crise qui s’ouvrit en février 2014, quand le président ukrainien d’alors, contesté par la rue et surtout lâché par des secteurs de la bureaucratie et de l’oligarchie, dut s’enfuir. Le pouvoir issu du #Maïdan s’alignant sur les États-Unis, Poutine récupéra alors la #Crimée et poussa le Donbass à faire sécession. Les accords de Minsk, que Merkel parrainait avec Hollande et auxquels avaient souscrit Moscou et Kiev, devaient régler pacifiquement le différend, prétendait-elle à l’époque. Elle avoue désormais qu’il s’agissait d’un leurre. «  Poutine, explique-t-elle, aurait [alors] pu facilement gagner. Et je doute fortement que l’OTAN aurait eu la capacité d’aider l’Ukraine comme elle le fait aujourd’hui. […] Il était évident pour nous tous que le conflit allait être gelé, que le problème n’était pas réglé, mais cela a justement donné un temps précieux à l’Ukraine.  » Et à l’OTAN pour préparer l’affrontement avec Moscou.

    Le conflit couvait depuis l’effondrement de l’#URSS en 1991. Dès ce moment-là, États-Unis et Union européenne furent à la manœuvre pour aspirer l’Europe de l’Est dans l’orbite de l’OTAN. Des conseillers de la Maison-Blanche expliquaient qu’il fallait détacher l’Ukraine de la Russie, pour que celle-ci n’ait plus les moyens de redevenir une grande puissance.

    Or, après les années Eltsine (1991-1999), d’effondrement économique, d’éclatement de l’État et de vassalisation humiliante du pays par l’Occident, Poutine et la bureaucratie russe voulaient restaurer la #Grande_Russie.

    Une première tentative de l’Occident pour aspirer l’Ukraine eut lieu en 2004 sous l’égide du tandem ­Iouchtchenko­-­Timochenko, tombeur du pro-russe Ianoukovitch. Elle tourna court, la population, dégoûtée, finissant par rappeler Ianoukovitch. Elle allait le chasser à nouveau en 2014. Cette fois fut la bonne pour le camp occidental et signifiait la guerre  : dans le #Donbass, que l’armée de Kiev et des troupes d’extrême droite disputaient aux séparatistes, elle fit 18 000 morts et des centaines de milliers de réfugiés. Huit ans plus tard, tout le pays bascula dans l’horreur.

    Les dirigeants américains et européens savaient que Moscou ne pouvait accepter une Ukraine devenue la base avancée de l’OTAN. Ils savaient quels risques mortels leur politique impliquait pour les Ukrainiens, et pour la jeunesse russe que Poutine enverrait tuer et se faire tuer. Cette guerre, l’OTAN l’avait rendue inéluctable depuis 2014, en armant, entraînant, conseillant l’#armée_ukrainienne et les troupes des nationalistes fascisants.

    Les dirigeants occidentaux n’en avaient cure, car faire la guerre avec la peau des peuples est une constante de la politique des puissances coloniales, puis impérialistes. On le vérifie encore une fois dans le sang et la boue des tranchées en #Ukraine, dans les ruines des HLM de #Kharkiv, #Kherson ou #Donetsk que les missiles des uns ou des autres ont fait s’effondrer sur leurs habitants. N’en déplaise aux médias d’ici qui ressassent la fable d’un conflit soudain opposant le petit David ukrainien isolé et désarmé qu’agresserait sans raison le grand méchant Goliath russe.

    À l’occasion du premier l’anniversaire de l’invasion de l’Ukraine, on a eu droit au rouleau compresseur d’une #propagande sans fard dans les #médias. Il y aurait le camp du Mal (la Russie, l’Iran et surtout la Chine), face au camp du Bien, celui des puissances qui, dominant la planète, y garantissent la pérennité du système d’exploitation capitaliste au nom de la démocratie ou de la sauvegarde de pays comme l’Ukraine, dès lors qu’ils leur font allégeance.

    Cette propagande massive vise à s’assurer que l’opinion publique adhère sans réserve à ce qu’on lui présente comme la défense d’un peuple agressé, en fait, à la guerre que mènent les grandes puissances par Ukrainiens interposés. Car, au-delà de ce qu’il adviendra de la Russie et du régime de Poutine – une des préoccupations contradictoires des États impérialistes, qui disent vouloir la victoire de Kiev tout en craignant qu’une défaite de Poutine déstabilise de façon incontrôlable la Russie et son «  étranger proche  » – ces mêmes États visent un objectif au moins aussi important pour eux. Ils veulent enchaîner à leur char de guerre leur propre population, dans le cadre ukrainien, tout en ayant en vue des conflits plus larges à venir.

    En fait, le conflit ukrainien a tout du prologue d’un affrontement plus ou moins généralisé, dont politiques, généraux et commentateurs désignent déjà la cible principale  : la Chine. Ainsi, Les Échos du 15 février a mis à sa une un article qui titrait  : «  Pour l’Amérique, la Chine redevient l’ennemi numéro un  », après que «  la guerre en Ukraine [avait un temps détourné son attention] de la confrontation  » avec la Chine.

    Déjà, les steppes, les villes et le ciel d’Ukraine servent autant aux états-majors et industriels occidentaux à affronter la #Russie, par soldats ukrainiens interposés, qu’à tester sur le vif leurs #blindés, pièces d’#artillerie, #systèmes_de_commandement, de communication, d’interception, de renseignement, et à en tirer les leçons voulues. Ils y voient aussi une aubaine pour se débarrasser de #munitions et d’engins plus ou moins anciens que les combats vont consommer . Conséquence favorable pour eux, cela justifie l’escalade des livraisons d’armes et, de ce fait, l’explosion des #budgets_militaires afin de doper les #industries_de_guerre.

    Cette conjoncture permet à des États d’engranger des commandes, parfois énormes, de pays dépendants de protecteurs plus puissants et des leaders des marchés de l’#armement.

    Ainsi, Varsovie a envisagé de donner à Kiev des vieux Mig-29 de conception soviétique pour les remplacer par des F-16 américains, et promis de lui livrer d’anciens chars Leopard, qu’elle remplacera par de nouveaux modèles. Évidemment, cela ne fait l’affaire ni de Dassault ni du char Leclerc français qui peine à trouver preneur. C’est que, même alliés au sein de l’OTAN, voire soucieux d’afficher leur unité, comme Biden l’a souligné lors de la promesse que lui et Scholtz ont voulue simultanée de livrer des tanks à Kiev, les États impérialistes restent rivaux sur ce terrain, comme sur d’autres. Les États-Unis se réservent la part du lion, avec des commandes d’armement qui ont doublé en 2022, à la mesure de leur puissance industrielle, de leur suprématie militaire… et des guerres à venir.

    Ces commandes d’armes pour l’Ukraine, qui s’ajoutent à celles que l’on dit destinées à remettre à niveau chaque armée occidentale, servent autant à tenir la dragée haute à #Poutine qu’à transformer à vitesse accélérée les #économies occidentales en «  #économies_de_guerre  », selon les termes même du programme que se sont fixé les ministres de la Défense des pays de l’#OTAN, lors de leur sommet des 14-15 février à Bruxelles. Depuis des mois, les dirigeants politiques occidentaux et plus encore les chefs de leurs armées discutent publiquement et concrètement d’une guerre généralisée qu’ils savent s’approcher. Ainsi, à Brest, l’#amiral_Vandier, chef d’état-major de la Marine, a lancé à la nouvelle promotion d’élèves-­officiers  : «  Vous entrez dans une Marine qui va probablement connaître le feu à la mer.  » Certains avancent même une date pour cela, tel le général Minihan, chef des opérations aériennes aux #États-Unis  : «  J’espère me tromper, mais mon intuition me dit que nous nous affronterons en 2025  » avec la #Chine.

    Ukraine  : un effroyable bilan humain, social et économique

    En attendant, la guerre en Ukraine a déjà tué ou blessé 180 000 militaires russes, à peine moins de soldats ukrainiens, et tué plus de 30 000 civils, estime le chef de l’armée norvégienne, membre de l’OTAN. 7,5 millions d’Ukrainiens ont trouvé refuge en Pologne, Slovaquie, Autriche, etc., et en Russie. Parmi eux se trouvent une écrasante majorité de femmes et d’enfants, car les hommes de 18 à 60 ans, mobilisables, ont l’interdiction de quitter le territoire. Il y a aussi plusieurs millions de déplacés dans le pays même.

    De nombreuses villes, grandes ou petites, ont été bombardées, parfois rasées, les infrastructures énergétiques partout frappées, ce qui a plongé la population dans l’obscurité et le froid. Le montant des destructions de routes, ponts, voies ferrées, ports, aéroports, entreprises, écoles, hôpitaux, logements… atteignait 326 milliards de dollars, selon ce qu’estimait le Premier ministre en septembre dernier. Ce montant, déjà colossal, n’a pu que croître depuis, ne serait-ce que parce qu’il s’accompagne d’énormes détournements qu’ont effectués et que vont effectuer ministres, généraux, bureaucrates et oligarques ukrainiens.

    Zelensky a reconnu la corruption de l’appareil d’État jusqu’au sommet quand il a limogé une partie de son gouvernement, dont les ministres de la Défense et de la Reconstruction, et plusieurs très hauts dirigeants. Cela ne change rien à la nature d’un État qui, source principale des nantis comme en Russie, est l’un des plus corrompus au monde  : plus que l’État russe, dit-on, ce qui n’est pas rien. En fait, Zelensky n’avait pas le choix  : une commission américaine de haut niveau avait débarqué à Kiev pour vérifier ce que devenait l’aide colossale fournie par l’oncle d’Amérique. Après tout, même si l’État américain est richissime, il a aussi ses bonnes œuvres (industriels de l’armement, financiers, capitalistes de haut vol) et ne veut pas qu’une trop grosse part des profits de guerre file dans poches des bureaucrates, oligarques et maffieux ukrainiens.

    Et puis, au moment même où l’Occident annonçait fournir des tanks à l’État ukrainien, il ne s’agissait pas que le régime apparaisse pour ce qu’il est  : celui de bandits prospérant sur le dos de la population. Cela s’adressait moins à l’opinion occidentale, qui ne connaît de la situation que ce qu’en disent les médias, qu’à la population ukrainienne.

    Victime des bombardements et exactions de l’armée russe, elle se rend compte qu’elle est aussi la victime des parasites de la haute bureaucratie, des ministres véreux ou des généraux voleurs. Et l’union sacrée n’a pas fait disparaître les passe-droits qui permettent aux nantis de profiter en paix de leur fortune à l’étranger, tandis que leurs sbires de la police raflent les hommes, valides ou pas, pour le front. Les résistances que cela provoque ici ou là n’ont rien pour étonner dans un tel contexte, d’autant que, si l’armée a d’abord pu compter sur des volontaires, ceux qu’elle mobilise maintenant n’en font, par définition, pas partie.

    Tout à leurs commentaires dithyrambiques sur un régime censé incarner la démocratie et l’unité d’un peuple derrière ses dirigeants, les médias français préfèrent tirer un voile pudique sur des faits qui pourraient gâcher leur tableau mensonger.

    [...] Le régime de la bureaucratie russe et de ses oligarques milliardaires, lui-même bien mal en point socialement et économiquement, corrompu, policier et antiouvrier, ne peut représenter aucun avenir pour la population ukrainienne, même russophone.

    Quant au régime qu’incarne Zelensky, ce chargé de pouvoir des grandes puissances et de leurs trusts qui lorgnent sur les richesses agricoles et minières de l’Ukraine ainsi que sur sa main-d’œuvre qualifiée, afin de l’exploiter avec des salaires misérables , ce qui a commencé dès 2014, le conflit lui a sans doute sauvé la mise, au moins dans un premier temps. Comme dans toute guerre, la population s’est retrouvée bon gré mal gré derrière un pouvoir qui se faisait fort de la défendre. Mais gageons que de larges pans des classes populaires n’ont pas oublié pour autant ce qu’avait fini par leur inspirer cet acteur devenu président, qui avait joué au «  serviteur du peuple  » pour mieux préserver les intérêts des nantis.

    S’affrontant sur le terrain par peuples interposés, les dirigeants occidentaux, représentants d’une bourgeoisie impérialiste qui domine le monde, les dirigeants russes, représentants des parasites qui exploitent les travailleurs de Russie, les dirigeants ukrainiens, représentants de leurs oligarques autant que des trusts occidentaux, sont tous des ennemis des classes populaires, de la classe ouvrière.

    Et les travailleurs, où qu’ils se trouvent, quelle que soit leur nationalité, leur langue ou leur origine, n’ont aucune solidarité à avoir, sous quelque prétexte que ce soit, avec «  l’ennemi principal qui est toujours dans notre propre pays  », comme disait le révolutionnaire allemand Karl Liebknecht en 1916, en pleine Première Guerre mondiale.

    Partout, la marche à une économie de guerre

    Le 6 février, Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU [...] : «   Le monde se dirige les yeux grand ouverts [vers] une guerre plus large .  »

    On vient d’en avoir la confirmation au sommet des ministres de la Défense des membres de l’OTAN. Il leur a été demandé, selon Les Échos, «  de passer en #économie_de_guerre  », de relancer et activer la #production_d’armements, et d’abord d’#obus, de #chars et de pièces d’artillerie, pour faire face à «  une #guerre_d’usure  » en Ukraine. Et de préciser que si, il y a dix ans, les États-Unis demandaient à leurs alliés de monter leurs #dépenses_militaires à 2 % de leur produit intérieur brut, ce chiffre est désormais considéré comme un plancher que beaucoup ont dépassé. La conférence sur la sécurité en Europe qui a suivi, à Munich, a réuni la plupart des dirigeants européens et mondiaux pour aller dans le même sens.

    C’est ce qu’ils font en cherchant à persuader leur population de l’inéluctabilité de la guerre  ; en lui désignant comme ennemis certains pays, au premier rang desquels la Russie et la Chine  ; en déployant une propagande insidieuse mais permanente dans les médias autour de thèmes guerriers  ; en mettant l’accent sur la préparation de la #jeunesse à servir «  sa  » nation, à la défendre, sans jamais dire qu’il s’agira de la transformer en #chair_à_canon pour les intérêts des classes possédantes. Le gouvernement français s’en charge avec son #Service_national_universel, qui vise à apprendre à des jeunes à marcher au pas, avec des reportages télévisés plus ou moins suscités sur le service à bord de navires de guerre, sur des régions sinistrées (Saint-Étienne) où la reprise de la production d’armes ferait reculer le chômage. Le nouveau ministre allemand de la Défense se situe sur le même terrain, lui qui veut rétablir le service militaire et faire de la Bundeswehr la première armée du continent grâce aux 100 milliards de hausse de son #budget.

    En juin dernier, Macron avait annoncé la couleur avec son plan Économie de guerre doté par l’État de 413 milliards sur sept ans. Il fallait «  aller plus vite, réfléchir différemment sur les rythmes, les montées en charge, les marges, pour pouvoir reconstituer plus rapidement ce qui est indispensable pour nos #armées, pour nos alliés ou pour celles [comme en Ukraine] que nous voulons aider  ». Et, s’adressant aux dirigeants de l’organisme qui regroupe les 4 000 entreprises du secteur militaire, il leur avait promis des décisions et, surtout, des #investissements. Pour les #profits, la guerre est belle…

    Bien au-delà du conflit ukrainien, la cause profonde de l’envolée des budgets militaires est à chercher dans la crise du système capitaliste mondial, qui va s’aggravant sans que quiconque dans les milieux dirigeants de la bourgeoisie en Europe et en Amérique sache comment y faire face.

    Comme à chaque fois que le monde se trouve confronté à une telle situation, la bourgeoisie et ses États en appellent à l’industrie d’armement pour relancer l’économie. Car, grâce au budget militaire des États, elle échappe à la chute de la demande qui affecte les secteurs frappés par la baisse du pouvoir d’achat des couches populaires et, en dopant le reste de l’économie par des commandes de machines, de logiciels, de matériaux, de matières premières, etc., la bourgeoisie peut espérer que cela l’aidera à maintenir le taux de profit général.

    [...] même quand certains prétendent chercher une solution de paix à une guerre que leur politique a suscitée, la logique de leur politique d’armement continu de l’un des deux camps sur le terrain, celle de la militarisation de l’économie de nombreux pays sur fond d’une crise générale dont l’évolution leur échappe, tout cela fait que, de la guerre en Ukraine à un conflit plus large, la distance pourrait être bien plus courte qu’on ne le croit.

    Contrairement à ce qu’affirme Guterres, ce n’est pas toute l’humanité qui avance vers l’abîme les yeux grands ouverts. Les dirigeants politiques de la bourgeoisie ne peuvent pas ne pas voir ce qu’ils trament, eux, et dans quels intérêts, ceux de la bourgeoisie. Cela, ils le discernent en tout cas bien mieux que les masses du monde entier, auxquelles on masque la réalité, ses enjeux et son évolution qui s’accélère.

    Oui, en Ukraine, en Russie, comme partout ailleurs, le niveau de la conscience et de l’organisation de la classe ouvrière est très en retard sur cette course à la guerre dans laquelle la bourgeoisie engage l’humanité. Et plus encore au regard de ce qu’il faudrait pour l’enrayer, la transformer en guerre de classe pour l’émancipation des travailleurs du monde entier.

    C’est ce que firent les bolcheviks en Russie en 1917, en pleine guerre mondiale. C’est sur cette voie qu’il faut que s’engagent, en communistes révolutionnaires et internationalistes, en militants de la seule classe porteuse d’avenir, le prolétariat, toutes celles et tous ceux qui veulent changer le monde avant qu’il ne précipite à nouveau l’humanité dans la barbarie. Alors, pour paraphraser ce que Lénine disait de la révolution d’Octobre  : «  Après des millénaires d’esclavage, les esclaves dont les maîtres veulent la guerre leur [répondront]  : Votre guerre pour le butin, nous en ferons la guerre de tous les esclaves contre tous les maîtres.  »

    #guerre_en_ukraine #capitalisme #crise

    • Royaume-Uni : hausse significative du budget militaire

      A l’occasion de la mise à jour de sa doctrine de politique étrangère, le Royaume-Uni a annoncé son intention de porter à terme son #budget_défense à 2,5 % du PIB.

      Face aux « nouvelles menaces », le #Royaume-Uni va investir cinq milliards de livres supplémentaires dans sa politique de défense. Cette rallonge va porter ce budget à 2,25 % du PIB à horizon 2025, un redressement jamais vu depuis la guerre froide.
      Cette enveloppe doit permettre de « reconstituer et de renforcer les stocks de #munitions, de moderniser l’entreprise nucléaire britannique et de financer la prochaine phase du programme de #sous-marins_Aukus », a souligné Downing Street dans un communiqué, le jour même de la signature à San Diego du contrat entre l’Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni. A terme, l’objectif est de revenir à des dépenses militaires équivalentes à 2,5 % du PIB, bien au-dessus de l’engagement pris au niveau de l’#Otan (2 % du PIB).

      Ces annonces interviennent au moment où le Royaume-Uni met à jour sa doctrine de politique étrangère dans un document de 63 pages qui fait la synthèse des principaux risques pour la sécurité du pays. La dernière mouture, publiée il y a trois ans, exposait les ambitions de la « Global Britain » de Boris Johnson au lendemain du Brexit. La #Russie y était identifiée comme la principale menace pour la sécurité. La #Chine était qualifiée de « défi systémique » et le document annonçait un « pivot » du Royaume-Uni vers l’axe Indo-Pacifique.
      Les tendances observées sont toujours les mêmes, mais « elles se sont accélérées ces deux dernières années », observe cette nouvelle revue. « Nous sommes maintenant dans une période de risques renforcés et de volatilité qui va probablement durer au-delà des années 2030 », note le rapport.

      (Les Échos)

      #militarisation #impérialisme

    • Les importations d’armes en Europe en forte hausse

      Les #achats_d'armement ont quasiment doublé l’an dernier sur le sol européen

      Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’Europe s’arme massivement. C’est ce que confirme le dernier rapport de l’#Institut_international_de_recherche_sur_la_paix_de_Stockholm (Sipri), publié lundi. Hors Ukraine, les #importations_d'armements sur le Vieux Continent se sont envolées de 35 % en 2022. En intégrant les livraisons massives d’#armes à l’Ukraine, elles affichent une hausse de 93 %.

      […] Sur la période 2018-2022, privilégiée par le #Sipri pour identifier les tendances de fond, les importations d’armes européennes affichent ainsi une hausse de 47 % par rapport aux cinq années précédentes, alors qu’au niveau mondial, les transferts internationaux d’armes ont diminué de 5,1 % sur cette période. Un contraste majeur qui témoigne de la volonté des Européens d’« importer plus d’armes, plus rapidement », explique Pieter ​Wezeman, coauteur du rapport.
      Dans cette optique, outre les industriels locaux, les Européens comptent sur les #Etats-Unis. Sur la période 2018-2022, ces derniers ont représenté 56 % des #importations_d'armes de la région. Le premier importateur en #Europe a été le Royaume-Uni, suivi de l’#Ukraine et de la Norvège.
      […]

      En France, #Emmanuel_Macron a proposé une augmentation de 100 milliards d’euros pour la loi de programmation militaire 2024-2030 par rapport à la période 2019-2025. Le Premier ministre britannique, #Rishi_Sunak, vient pour sa part d’annoncer que le #Royaume-Uni allait investir 5 milliards de livres (5,6 milliards d’euros) supplémentaires dans la défense, dans un contexte de « nouvelles menaces venues de #Russie et de #Chine ». Plus symbolique encore, l’Allemagne du chancelier #Olaf_Scholz a annoncé, en mai 2022, le lancement d’un fonds spécial de 100 milliards pour moderniser son armée et rompre avec des décennies de sous-investissement.

      (Les Échos)

      #militarisation

    • La France s’apprête à relocaliser sur son sol une vingtaine de productions industrielles militaires , révèle mardi franceinfo. Ces relocalisations sont une déclinaison de « l’économie de guerre » réclamée par l’Élysée.

      Le mois dernier, on a appris que la France s’apprêtait à relocaliser la production de #poudre pour ses obus d’artillerie (de 155mm). Selon nos informations, en tout, il y aura une vingtaine de relocalisations stratégiques en France.

      Dans le détail, la France va donc de nouveaux produire sur son territoire des #coques de bateaux produites jusqu’à présent dans les pays de l’Est, des explosifs pour gros calibres produits en Suède, Italie ou encore Allemagne, mais, surtout, des pièces jugées « critiques » pour certains moteurs d’hélicoptères. On parle ici précisément des disques des turbines haute-pression des bi-moteurs RTM322. Jusqu’à présent, ces pièces étaient élaborées aux Etats-Unis puis forgées en Angleterre. Bientôt, l’élaboration et la forge seront faites en France dans l’usine #Aubert_et_Duval située dans le Puy-de-Dôme. […]

      (France Info)

      #militarisation #relocalisation #industrie_de_la_défense

    • Emmanuel Chiva est à la tête (de l’emploi) de la direction générale de l’armement (DGA). Son sale boulot : mettre en œuvre l’« économie de guerre » voulue par Macron.

      Un type qui pratique au quotidien "l’argent magique" et un "pognon de dingue" (public) au service des capitalistes de l’armement. Le principe : un vol à grande échelle des fruits du travail de millions de travailleurs pour produire en masse du matériel de destruction massive.

      Pour nous en faire accepter les conséquences (les futures baisses du pouvoir d’achat, les hôpitaux fermés, les écoles surchargées, les enseignants en sous-effectif, les transports dégradés, un budget de l’État écrasé par la dette, etc.), Le Monde lui tend ses colonnes : « Nous sommes entrés dans l’économie de guerre »
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/03/15/emmanuel-chiva-dga-nous-sommes-entres-dans-l-economie-de-guerre_6165595_3210

    • La marche vers un économie de guerre
      https://lutte-ouvriere.be/la-marche-vers-un-economie-de-guerre

      [...] Les USA augmentent fortement leur budget militaire, l’Allemagne débloque 100 milliards pour l’armée, la France annonce plus de 400 milliards de budget pour les prochaines années et en Belgique, 14 milliards de dépenses guerrières supplémentaires sont prévues d’ici 2030.

      Pour faire accepter l’envolée des dépenses militaires, alors que partout les besoins des populations sont criants, les dirigeants des pays capitalistes cherchent à persuader de l’inéluctabilité de la guerre. Ils désignent comme ennemis certains pays, au premier rang desquels la Russie et la Chine, et déploient une propagande insidieuse mais permanente dans les médias autour de thèmes guerriers.

      Les gouvernements mettent aussi l’accent sur la préparation de la jeunesse qu’ils comptent utiliser comme chair à canon. L’Etat belge s’en est chargé en ouvrant cette année, dans 13 écoles de la fédération Wallonie Bruxelles, une option « métiers de la Défense et de la sécurité » dans laquelle des jeunes sont préparés à devenir agent de sécurité, policier ou militaire, à partir de la quatrième secondaire technique !

      Au-delà du conflit ukrainien, la cause profonde de l’envolée des budgets militaires est à chercher dans la crise du système capitaliste mondial qui ne fait que s’aggraver.

    • Vers un doublement du budget militaire / Le Japon tourne la page du pacifisme
      https://www.monde-diplomatique.fr/2023/03/POUILLE/65605

      Ce samedi 27 novembre 2021, le premier ministre japonais Kishida Fumio effectue une visite matinale des troupes de défense terrestre sur la base d’Asaka, au nord de Tokyo. Après un petit tour en char d’assaut, il prononce un discours de rupture : « Désormais, je vais envisager toutes les options, y compris celles de posséder des capacités d’attaque de bases ennemies, de continuer le renforcement de la puissance militaire japonaise. » Selon le chef du gouvernement, « la situation sécuritaire autour du Japon change à une vitesse sans précédent. Des choses qui ne se produisaient que dans des romans de science-fiction sont devenues notre réalité ». Un an plus tard, M. Kishida annonce le doublement des dépenses de #défense et débloque l’équivalent de 315 milliards de dollars sur cinq ans. Le #Japon va ainsi disposer du troisième budget militaire du monde derrière ceux des États-Unis et de la Chine. Il représentera 2 % du produit intérieur brut (PIB), ce qui correspond à l’engagement pris en 2014 par les vingt-huit membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (#OTAN)… dont il ne fait pourtant pas partie.

      Ces décisions — qui s’inscrivent dans le cadre de la nouvelle « stratégie de sécurité nationale » dévoilée en août 2022 — changent profondément les missions des forces d’autodéfense, le nom officiel de l’#armée_nippone. Elles ne s’en tiendront plus, en effet, à défendre le pays mais disposeront des moyens de contre-attaquer. Et même de détruire des bases militaires adverses.

      Cette #militarisation et cette imbrication renforcée avec les États-Unis sonnent, pour la presse chinoise, comme dune dangereuse alerte. Certes, les rapports sino-japonais s’étaient déjà dégradés quand Tokyo avait acheté, le 11 septembre 2012, trois des îles Senkaku/Diaoyu à leur propriétaire privé et que, dans la foulée, Pékin avait multiplié les incursions dans la zone (8). Les visites régulières d’Abe au sanctuaire Yasukuni, qui honore la mémoire des criminels de guerre durant la seconde guerre mondiale, n’avaient rien arrangé.

      Mais le climat s’était plutôt apaisé dans la dernière période. « J’étais parvenu à un consensus important [avec Abe] sur la construction de relations sino-japonaises répondant aux exigences de la nouvelle ère (9) », a même témoigné le président chinois après l’assassinat de l’ex-premier ministre, en juillet 2022. Depuis l’annonce de la nouvelle stratégie de défense, le ton a changé.

      [...] en tournant le dos brutalement à sa politique pacifiste, le Japon se place en première ligne face à Pékin et éloigne tout espoir d’autonomie vis-à-vis des États-Unis. Cette impossible entrée dans l’après-guerre froide cohabite pourtant avec un dynamisme régional haletant où, de Hanoï à Colombo, ce pays vieillissant a construit les leviers de sa future croissance. Il y est en concurrence directe avec la Chine, très présente. Déjà, la plupart des pays asiatiques refusent de choisir entre Pékin et Washington, qui leur promet la sécurité. Et avec Tokyo ?

      (Le Monde diplomatique, mars 2023)

      #budget_militaire

    • Le géant de l’armement Rheinmetall surfe sur la remilitarisation de l’Europe (Les Échos)

      L’entrée au DAX, lundi, du premier producteur de munitions et constructeur de chars en Europe consacre le retour en force des combats conventionnels terrestres. Après une année 2022 record, Rheinmetall s’attend à faire mieux encore en 2023.

      Ce lundi, Armin Papperger, le patron de Rheinmetall, se fera un plaisir de sonner la cloche de la Bourse de Francfort pour marquer l’entrée de son groupe dans le Dax après une année record. Son cours a doublé et sa valorisation avoisine 10,5 milliards d’euros. « Le changement d’ère et la guerre en Europe ont ouvert une nouvelle page pour #Rheinmetall », a-t-il déclaré jeudi, lors de la présentation des résultats du premier producteur de munitions et constructeur de chars en Europe.

      Le retour des combats conventionnels terrestres a dopé le résultat net de ce dernier : il a bondi de 61 %, à 469 millions d’euros pour un chiffre d’affaires record de 6,4 milliards d’euros, en hausse de 13,25 %. Le résultat opérationnel (Ebit hors effets exceptionnels) a, lui, progressé de 27 %, à 754 millions d’euros. Et ce n’est qu’un début : « Je m’attends à ce que l’année 2023 soit de loin la meilleure année de l’histoire de l’entreprise en termes de commandes », a annoncé Armin Papperger.

      Carnet de commandes record

      Il a plusieurs fois loué devant la presse l’efficacité du nouveau ministre de la Défense Boris Pistorius, qui devrait, selon lui, permettre de débloquer enfin les 100 milliards du fonds de modernisation de l’armée allemande. Sur cette enveloppe, le patron de Rheinmetall estime pouvoir capter 38 milliards d’euros d’ici à 2030, dont 20 milliards répartis à parts équivalentes entre les chars et la numérisation des forces terrestres, et 8 milliards pour les munitions. A ces montants s’ajoute la hausse prévisible du budget de la défense allemande : Boris Pistorius a réclamé 10 milliards de plus par an et il faudrait même 10 milliards supplémentaires pour atteindre les 2 % du PIB. Un objectif pour tous les membres de l’Otan qui devrait rapidement devenir un prérequis minimum. Le réarmement généralisé des pays de l’Alliance atlantique ne peut donc que profiter à Rheinmetall. Il vient en outre d’élargir sa palette en s’invitant dans la fabrication du fuselage central du F-35 américain qui devrait lui rapporter plusieurs milliards d’euros. Le groupe, qui affichait déjà l’an dernier un carnet de commandes record de 24 milliards d’euros, estime avoir les capacités pour faire bien davantage.

      600.000 obus

      En Ukraine, Rheinmetall assure ainsi pouvoir livrer un peu moins de la moitié des besoins de la production d’artillerie. Avec l’achat du fabricant espagnol Expal Systems, qui devrait être bouclé dans l’année, la capacité annuelle du groupe passe à environ 450.000 obus, voire 600.000 d’ici à deux ans.

      Rheinmetall est en train d’agrandir une usine en Hongrie et souhaite en ouvrir une de poudre en Saxe avec la participation financière de Berlin. Selon Armin Papperger, l’intégration verticale de l’entreprise, qui produit elle-même ses composants, la met par ailleurs à l’abri d’un chantage éventuel de la Chine sur les matières premières. Quant à la main-d’oeuvre, elle ne manquerait pas : le groupe se dit « inondé de candidatures », il a recruté 3.000 personnes l’an dernier et compte en faire autant cette année. Toutes les planètes sont donc alignées aux yeux de Rheinmetall pour pousser les feux. Le groupe vise un chiffre d’affaires de 7,4 à 7,6 milliards d’euros en 2023, ce qui représenterait une nouvelle hausse de 15,5 % à 18,7 %. Sa marge opérationnelle devrait passer de 11,8 % à 12 % environ.

      #militarisation #militarisme #capitalisme #troisième_guerre_mondiale

    • La guerre en Ukraine accélère la militarisation

      La guerre en Ukraine accélère la militarisation de l’Europe. Tragédie pour les populations ukrainienne et russe qui ont déjà payé cette guerre de 30 000 morts, elle est une aubaine pour les militaires et les marchands d’armes. Première guerre dite «  de haute intensité  » en Europe depuis 1945, sur un front de plus de 1 000 kilomètres, elle permet aux militaires de tester leurs matériels, de valider ou adapter leurs doctrines d’utilisation. Elle offre un marché inespéré pour les marchands d’armes appelés à fournir munitions et missiles, drones ou chars détruits en grande quantité. Elle accélère la hausse des budgets militaires de tous les États.

      Une militarisation engagée avant la guerre en Ukraine

      La hausse des dépenses militaires dans le monde était engagée avant l’invasion russe de l’Ukraine. Selon le dernier rapport du Sipri, l’Institut international pour la paix de Stockholm, publié le 25 avril, les dépenses militaires dans le monde ont dépassé en 2021, pour la première fois, la barre des 2 000 milliards de dollars, avec 2 113 milliards de dollars, soit 2,2 % du PIB mondial. C’est la septième année consécutive de hausse des dépenses militaires dans le monde selon ce rapport, qui précise  : «  Malgré les conséquences économiques de la pandémie de Covid-19, les dépenses militaires mondiales ont atteint des niveaux records.  »

      Si la Russie, présentée comme le seul agresseur et va-t-en-guerre, a augmenté son budget militaire en 2021, qui atteint 66 milliards de dollars et 4 % de son PIB, elle n’arrive qu’en cinquième position dans le classement des puissances les plus dépensières, derrière les États-Unis, la Chine, l’Inde et la Grande-Bretagne.

      En Grande-Bretagne, avec 68,3 milliards de dollars, les dépenses militaires sont en hausse de 11,1 %. Après le Brexit, Boris Johnson a multiplié les investissements, en particulier dans la marine. Peu avant sa démission, il affirmait vouloir restaurer l’impérialisme britannique en tant que «  première puissance navale en Europe  » et marquait à la culotte les autres puissances impérialistes du continent. Il a été l’un des premiers dirigeants européens à se rendre à Kiev pour afficher son soutien à Zelensky. Toute une brochette de politiciens britanniques milite pour que les dépenses militaires augmentent plus vite encore dans les années à venir. Ainsi, Nile Gardiner, ancien collaborateur de Thatcher, affirmait en mars au Daily Express : «  Les dépenses de défense devraient doubler, de deux à quatre pour cent [du PIB] dans les années à venir si la Grande-Bretagne veut sérieusement redevenir une puissance mondiale.  »

      Johnson a renforcé par divers canaux sa coopération militaire avec les États-Unis. Ces liens étroits entre les impérialismes britannique et américain ont été illustrés par l’alliance #Aukus (acronyme anglais pour Australie, Royaume-Uni et États-Unis) contre la Chine. Cette alliance s’est concrétisée par la commande australienne de huit sous-marins à propulsion nucléaire, pour la somme de 128 milliards de dollars. Déjà en hausse de 4 % en 2021 par rapport à 2020, les dépenses militaires de l’Australie sont donc appelées à augmenter. C’est aussi la politique occidentale agressive vis-à-vis de la Chine, et les pressions américaines, qui ont poussé le Japon à dépenser 7 milliards de dollars de plus en 2021 pour ses armées, la plus forte hausse depuis 1972.

      Selon le rapport du #Sipri, dès 2021, donc avant la guerre en Ukraine, huit pays européens membres de l’#Otan avaient porté leurs dépenses militaires à 2 % de leur PIB, ce que réclament depuis longtemps les États-Unis à leurs alliés. Avec 56,6 milliards de dollars (51 milliards d’euros) dépensés en 2021, la France est passée de la huitième à la ­sixième place des États pour leurs dépenses en armement. La loi de programmation militaire 2019-2025 avait déjà prévu un budget de 295 milliards d’euros sur six ans, pour arriver à plus de 2,5 % du PIB en 2025.

      La guerre en Ukraine a donc éclaté dans ce contexte d’augmentation générale des dépenses d’armement, qu’elle ne peut qu’accélérer et renforcer.

      Les leçons de la guerre en Ukraine

      Pour les états-majors et les experts, la #guerre_en_Ukraine n’est pas une tragédie mais d’abord un formidable terrain d’expérimentation des matériels de guerre et des conditions de leur mise en œuvre. Chaque épisode – offensive contrariée des armées russes au début de la #guerre, retrait du nord de l’#Ukraine puis offensive dans le #Donbass, destruction méthodique des villes – et les diverses façons d’utiliser l’artillerie, les drones, l’aviation, les moyens de communication et de renseignement sont étudiés pour en tirer le maximum de leçons. Depuis six mois, des milliers d’experts et d’ingénieurs chez #Thales, #Dassault, #Nexter, MBDA (ex-Matra), #Naval_Group ou chez leurs concurrents américains #Lockheed_Martin, #Boeing ou #Northrop_Grumman, étudient en détail comment cette guerre met en lumière «  la #numérisation du champ de bataille, les besoins de munitions guidées, le rôle crucial du secteur spatial, le recours accru aux drones, robotisation, cybersécurité, etc.  » (Les Échos du 13 juin 2022). Ces experts ont confronté leurs points de vue et leurs solutions technologiques à l’occasion de l’immense salon de l’#armement et de la sécurité qui a réuni, début juin à Satory en région parisienne, 1 500 #marchands_d’armes venus du monde entier. Un record historique, paraît-il  !

      Les leçons de la guerre en Ukraine ne sont pas seulement technologiques. Comme l’écrivait le journal Les Échos du 1er avril 2022, «  la guerre entre grands États est de retour en Europe. » Cette guerre n’a plus rien à voir avec «  les “petites guerres” comme celles de Bosnie ou du Kosovo, ni les opérations extérieures contre des groupes terroristes (Al Qaida, Daech) ou des États effondrés (Libye, 2011)  ». Pour les militaires, cette guerre n’est plus «  une guerre échantillonnaire mais une guerre de masse  », tant du point de vue du nombre de soldats tués ou blessés au combat que du nombre de munitions tirées et du matériel détruit.

      Entre février et juin, selon les estimations réalisées malgré la censure et les mensonges de chaque camp, cette guerre aurait fait 30 000 morts russes et ukrainiens, plusieurs centaines par jour. L’Ukraine rappelle que la guerre est une boucherie, que les combats exigent sans cesse leur chair à canon, avec des soldats qui pourrissent et meurent dans des tranchées, brûlent dans des chars ou sont tués ou estropiés par des obus et des missiles. Leur guerre «  de haute intensité  », c’est avant tout des morts, parmi les militaires comme les civils. Préparer les esprits à accepter de «  mourir pour nos valeurs démocratiques  », autre déclinaison du «  mourir pour la patrie  », est l’un des objectifs de la #propagande des gouvernements occidentaux qui mettent en scène la guerre en Ukraine.

      Côté matériel, les armées russes ont perdu plusieurs centaines de chars. Les États-Unis et leurs alliés ont livré plusieurs dizaines de milliers de missiles sol-sol ou sol-air de type Javelin ou Stinger, à 75 000 dollars pièce. Une semaine après le début de l’invasion russe, le colonel en retraite Michel Goya, auteur d’ouvrages sur les guerres contemporaines, écrivait  : «  L’#armée_de_terre française n’aurait plus aucun équipement majeur au bout de quarante jours  » (véhicules de combat, pièces d’artillerie…). La conclusion de tous ces gens-là est évidente, unanime  : il faut «  des forces plus nombreuses, plus lourdement équipées [qui] exigeront des budgets de défense accrus  » (Les Échos, 1er avril 2022). Augmenter les budgets militaires, drainer toujours plus d’argent public vers l’industrie militaire ou sécuritaire, c’est à quoi s’emploient les ministres et les parlementaires, de tous les partis, depuis des années.

      Des complexes militaro-industriels concurrents

      La guerre en Ukraine, avec l’augmentation spectaculaire des #budgets_militaires qu’elle accélère, est une aubaine pour les marchands d’armes. Mais elle intensifie en même temps la guerre que se livrent ces industriels. L’annonce par le chancelier allemand, fin février, d’un emprunt de 100 milliards d’euros pour remettre à niveau la #Bundeswehr, autrement dit pour réarmer l’Allemagne, a déclenché des polémiques dans l’#Union_européenne. Le journal Les Échos du 30 mai constatait avec dépit  : «  L’#armée_allemande a annoncé une liste de courses longue comme le bras, qui bénéficiera essentiellement aux industries américaines  : achat de #F-35 à Lockheed Martin, d’hélicoptères #Chinook à Boeing, d’avions P8 à Boeing, de boucliers antimissiles à Israël, etc.  » Au grand dam des militaristes tricolores ou europhiles, le complexe militaro-industriel américain profitera bien davantage des commandes allemandes que les divers marchands de mort européens.

      Il en est ainsi depuis la naissance de l’Union européenne  : il n’y a pas une «  #défense_européenne  » commune car il n’y a pas un #impérialisme européen unique, avec un appareil d’État unique défendant les intérêts fondamentaux d’une #grande_bourgeoisie européenne. Il y a des impérialismes européens concurrents, représentant des capitalistes nationaux, aux intérêts économiques complexes, parfois communs, souvent opposés. L’#impérialisme_britannique est plus atlantiste que les autres puissances européennes et très tourné vers son vaste ex-­empire colonial. L’#impérialisme_français a développé ses armées et sa marine pour assurer sa mainmise sur son pré carré ex-colonial, en particulier en Afrique. L’impérialisme allemand, qui s’est retranché pendant des décennies derrière la contrition à l’égard des années hitlériennes pour limiter ses dépenses militaires, en se plaçant sous l’égide de l’Otan et des #États-Unis, a pu consacrer les sommes économisées à son développement économique en Europe centrale et orientale. Les interventions militaires ou diplomatiques n’étant que la continuation des tractations et des rivalités commerciales et économiques, il n’a jamais pu y avoir de défense européenne commune.

      Les rivalités permanentes entre Dassault, Airbus, #BAE, #Safran ont empêché la construction d’un avion de combat européen. La prépondérance des États-Unis dans l’Otan et leur rôle majeur en Europe de l’Est et dans la guerre en Ukraine renforcent encore les chances du #secteur_militaro-industriel américain d’emporter les futurs marchés. Ces industriels américains vendent 54 % du matériel militaire dans le monde et réalisent 29 % des exportations. L’aubaine constituée par les futures dépenses va aiguiser les appétits et les rivalités.

      Bien sûr, les diverses instances européennes s’agitent pour essayer de ne pas céder tout le terrain aux Américains. Ainsi, le commissaire européen au Commerce et ex-ministre français de l’Économie, Thierry Breton, vient de débloquer 6 milliards d’euros pour accélérer le lancement de 250 satellites de communication de basse orbite, indispensables pour disposer d’un réseau de communication et de renseignement européen. Jusqu’à présent, les diverses armées européennes sont dépendantes des États-Unis pour leurs renseignements militaires, y compris sur le sol européen.

      À ce jour, chaque pays européen envoie en Ukraine ses propres armes, plus ou moins compatibles entre elles, selon son propre calendrier et sa volonté politique. Les champs de bataille du Donbass servent de terrain de démonstration pour les canons automoteurs français Caesar, dont les journaux télévisés vantent régulièrement les mérites, et les #chars allemands Gepard, anciens, ou Leopard, plus récents. La seule intervention commune de l’Union européenne a été le déblocage d’une enveloppe de financement des livraisons d’armes à l’Ukraine, d’un montant de 5,6 milliards sur six ans, dans laquelle chaque État membre peut puiser. C’est une façon de faciliter l’envoi d’armes en Ukraine aux pays de l’UE les moins riches. Avec l’hypocrisie commune aux fauteurs de guerre, les dirigeants de l’UE ont appelé cette enveloppe «  la facilité européenne pour la paix  »  !

      Vers une économie de guerre  ?

      Pour passer d’une «  guerre échantillonnaire  » à une «  guerre de masse  », la production d’armes doit changer d’échelle. Pour ne parler que d’eux, les fameux canons Caesar de 155 millimètres sont produits en nombre réduit, une grosse dizaine par an, dans les usines #Nexter de Bourges, pour la somme de 5 millions d’euros l’unité. Pour en livrer une douzaine à l’Ukraine, le gouvernement a dû les prélever sur la dotation de l’armée française, qui n’en a plus que 64 en service. Juste avant le début de la guerre en Ukraine, Hervé Grandjean, le porte-parole des armées, rappelait les objectifs de l’armée française pour 2025  : «  200 chars Leclerc, dont 80 rénovés, 135 #blindés_Jaguar, 3 300 #blindés_légers, 147 hélicoptères de reconnaissance et d’attaque dont 67 Tigre, 115 #hélicoptères de manœuvre, 109 #canons de 155 et 20 drones tactiques notamment  ». En comparaison, et même si les chars des différentes armées n’ont ni les mêmes caractéristiques ni la même valeur, en trois mois de guerre en Ukraine, plus de 600 chars russes ont été détruits ou mis hors service.

      La guerre en Ukraine devrait donc permettre aux militaires d’obtenir davantage de coûteux joujoux. Ils ont reçu le soutien inconditionnel du président de la Cour des comptes, l’ex-socialiste Pierre Moscovici, pour qui «  l’aptitude des armées à conduire dans la durée un combat de haute intensité n’est pas encore restaurée  ». Et dans son discours du 14 juillet, Macron a confirmé une rallonge de 3 milliards d’euros par an pour le budget de l’armée. Mais pour rééquiper en masse les armées européennes, il faut que les capacités de production suivent. Le 13 juin, Le Monde titrait  : «  Le ministère de la Défense réfléchit à réquisitionner du matériel du secteur civil pour refaire ses stocks d’armes  », et précisait  : «  L’État pourrait demander à une PME de mécanique de précision qui ne travaille pas pour le secteur de la défense de se mettre à disposition d’un industriel de l’armement pour accélérer ses cadences.  » Et comme toujours, l’État s’apprête à prendre en charge lui-même «  les capacités de production de certaines PME de la défense, en payant par exemple des machines-outils  ». Les capitalistes n’étant jamais si bien servis que par eux-mêmes, le chef de l’UIMM, le syndicat des patrons de la métallurgie, est désormais #Éric_Trappier, le PDG de Dassault.

      Produire plus massivement du matériel militaire coûtera des dizaines, et même des centaines, de milliards d’euros par an. Il ne suffira pas de réduire encore plus les budgets de la santé ou de l’école. Les sommes engagées seront d’un tout autre niveau. Pour y faire face, les États devront s’endetter à une échelle supérieure. Les gouvernements européens n’ont peut-être pas encore explicitement décidé un tel tournant vers la production en masse de ce matériel militaire, mais les plus lucides de leurs intellectuels s’y préparent. L’économiste et banquier Patrick Artus envisageait dans Les Échos du 8 avril le passage à une telle «  #économie_de_guerre  ». Pour lui, cela aurait trois conséquences  : une hausse des #dépenses_publiques financées par le déficit du budget de l’État avec le soutien des #banques_centrales  ; une forte inflation à cause de la forte demande en énergie et en métaux parce que les #dépenses_militaires et d’infrastructures augmentent  ; enfin la rupture des interdépendances entre les économies des différents pays à cause des ruptures dans les voies d’approvisionnement.

      Avant même que les économies européennes ne soient devenues «  des économies de guerre  », les dépenses publiques au service des capitalistes ne cessent d’augmenter, l’inflation revient en force, aggravée par la spéculation sur les pénuries ou les difficultés d’approvisionnement de telle ou telle matière première. L’#économie_capitaliste est dans une impasse. Elle est incapable de surmonter les contradictions qui la tenaillent, et se heurte une fois de plus aux limites du marché solvable et à la concurrence entre capitalistes, qui engendrent les rivalités entre les puissances impérialistes  ; à la destruction des ressources  ; et à son incapacité génétique d’en planifier l’utilisation rationnelle au service de l’humanité. La course au militarisme est inexorable, car elle est la seule réponse à cette impasse qui soit envisageable par la grande bourgeoisie. Cela ne dépend absolument pas de la couleur politique de ceux qui dirigent les gouvernements. Le militarisme est inscrit dans les gènes du capitalisme.

      Le #militarisme, une fuite en avant inexorable

      Il y a plus d’un siècle, #Rosa_Luxemburg notait que le militarisme avait accompagné toutes les phases d’accumulation du #capitalisme  : «  Il est pour le capital un moyen privilégié de réaliser la plus-value.  » Dans toutes les périodes de crise, quand la rivalité entre groupes de capitalistes pour s’approprier marchés et matières premières se tend, quand le marché solvable se rétrécit, le militarisme a toujours représenté un «  champ d’accumulation  » idéal pour les capitalistes. C’est un marché régulier, quasi illimité et protégé  : «  L’#industrie_des_armements est douée d’une capacité d’expansion illimitée, […] d’une régularité presque automatique, d’une croissance rythmique  » (L’accumulation du capital, 1913). Pour la société dans son ensemble, le militarisme est un immense gâchis de force de travail et de ressources, et une fuite en avant vers la guerre généralisée.

      Pour les travailleurs, le militarisme est d’abord un vol à grande échelle des fruits de leur travail. La production en masse de matériel de destruction massive, ce sont des impôts de plus en plus écrasants pour les classes populaires qui vont réduire leur pouvoir d’achat, ce sont des hôpitaux fermés, des écoles surchargées, des enseignants en sous-effectif, des transports dégradés, c’est un budget de l’État écrasé par la charge de la dette. Pour la #jeunesse, le militarisme, c’est le retour au service militaire, volontaire ou forcé, c’est l’embrigadement derrière le nationalisme, l’utilisation de la guerre en Ukraine pour redonner «  le sens du tragique et de l’histoire  », selon la formule du chef d’état-major des armées, Thierry Burkhard.

      L’évolution ultime du militarisme, c’est la #guerre_généralisée avec la #mobilisation_générale de millions de combattants, la militarisation de la production, la #destruction méthodique de pays entiers, de villes, d’infrastructures, de forces productives immenses, de vies humaines innombrables. La guerre en Ukraine, après celles en Irak, en Syrie, au Yémen et ailleurs, donne un petit aperçu de cette barbarie. La seule voie pour éviter une barbarie plus grande encore, qui frapperait l’ensemble des pays de la planète, c’est d’arracher aux capitalistes la direction de la société.

      Un an avant l’éclatement de la Première Guerre mondiale, #Rosa_Luxemburg concluait son chapitre sur le militarisme par la phrase  : «  À un certain degré de développement, la contradiction [du capitalisme] ne peut être résolue que par l’application des principes du socialisme, c’est-à-dire par une forme économique qui est par définition une forme mondiale, un système harmonieux en lui-même, fondé non sur l’accumulation mais sur la satisfaction des besoins de l’humanité travailleuse et donc sur l’épanouissement de toutes les forces productives de la terre.  » Ni Rosa Luxemburg, ni #Lénine, ni aucun des dirigeants de la Deuxième Internationale restés marxistes, c’est-à-dire communistes, révolutionnaires et internationalistes, n’ont pu empêcher l’éclatement de la guerre mondiale et la transformation de l’Europe en un gigantesque champ de bataille sanglant. Mais cette guerre a engendré la plus grande vague révolutionnaire de l’histoire au cours de laquelle les soldats, ouvriers et paysans insurgés ont mis un terme à la guerre et menacé sérieusement la domination du capital sur la société. L’issue est de ce côté-là.

    • France. Militaires et industriels doutent d’être suffisamment gavés

      Les « promesses déjà annoncées : une hausse de 5 milliards d’euros pour combler le retard dans les drones, un bond de 60 % des budgets des trois agences de renseignement, une relance des commandes dans la défense sol-air , la reconstitution des stocks de munitions. Il a aussi promis plus de navires et de satellites pour l’Outre-Mer, des avancées dans la cyberdéfense, le spatial, la surveillance des fonds marins, le doublement du budget des forces spéciales, et enfin une progression de 40 % des budgets pour la maintenance des équipements, afin d’en accroître les taux de disponibilité.

      Ajouter à cette liste un doublement de la réserve, une participation potentiellement accrue au service national universel, la promesse de dégager 10 milliards pour l’innovation... « Toutes les lignes budgétaires vont augmenter, sauf la provision pour les opérations extérieures », a déclaré le ministre. Selon lui, les dépenses pour aider l’armée ukrainienne ne seront pas imputées sur le budget des armées. Ce dont beaucoup de militaires doutent. Un partage des frais entre ministères est plus probable.

      (Les Échos)

    • Pour eux, la guerre n’est pas une tragédie, mais une aubaine.

      Entre 2018 et 2022, la France a vu sa part dans les ventes mondiales d’armes passer de 7 à 11 %.

      Actuellement 3e sur le marché de l’armement, elle se rapproche de la 2e place. Un record qui contribue à la surenchère guerrière, en Ukraine et ailleurs, et qui alimente les profits des marchands d’armes.

    • La nouvelle #loi_de_programmation_militaire a été présentée en Conseil des ministres ce mardi 4 avril. Un budget de la défense en hausse de 40 % par rapport à la #LPM 2019-2025. Un montant historique

      D’autant que la LPM 2024-2030 n’inclura pas le montant de l’aide militaire à l’#Ukraine

      La politique de l’actuel président de la République contraste avec celle de ses prédécesseurs. Comme beaucoup de ses voisins, la France a vu ses dépenses de défense diminuer depuis la fin de la #guerre_froide

      Réarmement spectaculaire de la #Pologne par le biais de la Corée du Sud

      « Ce pays est en première ligne et sera potentiellement une grande puissance militaire en 2030 », a affirmé Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique lors de son audition au Sénat. Le 30 janvier dernier, le Premier ministre polonais a ainsi annoncé que le budget de la défense atteindrait 4 % du PIB en 2023.

      #militarisation #budget_de_la_défense

    • On ne prépare une guerre qu’à la condition de pouvoir la gagner. Et en l’état, les occidentaux commencent tout juste à comprendre que ce qu’ils pensaient assuré (première frappe nucléaire et bouclier ABM) de la part des américains, n’est finalement pas du tout si assuré que cela et que même, ma foi, la guerre est peut-être déjà perdue.

    • En l’état, ce n’est pas la guerre. Mais, oui, ils s’y préparent.

      Et cette nouvelle guerre mondiale ne sera pas déclenchée nécessairement quand ils seront certains de « pouvoir la gagner ».

    • L’Union européenne et ses obus : un petit pas de plus vers une économie de guerre
      https://journal.lutte-ouvriere.org/2023/05/10/lunion-europeenne-et-ses-obus-un-petit-pas-de-plus-vers-une-

      Mercredi 3 mai, le commissaire européen Thierry Breton a présenté son plan pour produire un million de munitions lourdes par an. Les industries d’armement européennes ne sont plus adaptées au rythme de production nécessaire pour des guerres de « haute intensité », ou même simplement telle que celle en Ukraine.

      Alors que l’armée ukrainienne tire 5 000 obus d’artillerie par jour de combat, la production annuelle du fabricant français Nexter ne permettrait de tenir ce rythme... que huit jours. Thierry Breton a annoncé une enveloppe de 500 millions d’euros pour stimuler dans ce sens les industriels de l’Union européenne. Elle fait partie d’un plan de deux milliards d’euros annoncé fin mars pour fournir des obus à l’armée de Kiev, sous prétexte « d’aider » l’Ukraine. Il s’agit d’abord de puiser dans les stocks nationaux, puis de passer des commandes, et enfin de remplir les caisses des industriels pour qu’ils produisent plus vite.

      Les sommes déployées par l’UE sont très marginales par rapport aux dépenses faites par chaque puissance impérialiste pour financer son propre armement et enrichir ses capitalistes de l’armement. Ainsi, la programmation militaire française a augmenté de 100 milliards d’euros, tandis que le gouvernement allemand promet, lui, 100 milliards pour moderniser son armée.

      L’annonce européenne vise sans doute surtout à afficher à l’échelle du continent, donc aux yeux d’un demi-milliard d’Européens, que l’on va vers une économie de guerre et qu’il faut s’y adapter dès maintenant. Dans ce qu’a déclaré Thierry Breton, il y a aussi l’idée de s’attaquer à tous les goulots d’étranglement qui bloquent cette marche vers une économie de guerre. Il prévoit des dérogations aux règles européennes, déjà peu contraignantes, sur le temps de travail, c’est-à-dire de donner carte blanche aux patrons pour allonger la journée de travail dans les usines concernées. Le flot d’argent public dépensé en armement, que ce soit au niveau des États ou de l’Union européenne, sera pris sur la population d’une façon ou une autre. Chaque milliard en plus pour les obus signifiera un hôpital en moins demain.

  • 4 - 11 février 1945, la conférence de Yalta : peur de la révolution et partage du monde

    https://journal.lutte-ouvriere.org/2015/02/18/fevrier-1945-la-conference-de-yalta-peur-de-la-revolution-et

    Du 4 au 11 février 1945, le président américain Roosevelt, le Premier ministre britannique Winston Churchill et le dirigeant de l’URSS Staline se réunissaient à Yalta, en Crimée, alors que la fin de la guerre était proche, pour décider du sort de l’Europe. Ce ne fut qu’une des conférences qui jalonnèrent la guerre, après celle de Téhéran en novembre 1943, et avant celle de Potsdam en juillet 1945, sans compter les multiples rencontres bilatérales, ou tripartites, entre chefs d’État ou ministres. Mais Yalta allait rester le symbole d’un accord de partage du monde.

    L’entente entre ces #Alliés contre l’#Allemagne était une collaboration non seulement pour gagner la guerre, mais aussi pour s’opposer à tout mouvement révolutionnaire. Ils n’avaient pas oublié que de la Première Guerre mondiale était sortie une révolution qui, partie de la Russie en 1917, avait ébranlé le monde.

    Alliés… contre le danger d’explosion révolutionnaire

    Les représentants de l’#impérialisme, en la personne de #Roosevelt et de #Churchill, se méfiaient de #Staline. Il était certes un dictateur, ce qui ne pouvait que les rassurer, à la tête d’un État gangrené par la #bureaucratie dont il était le représentant. Mais cet État était issu d’une révolution ouvrière, celle d’octobre 1917. Et si les travailleurs russes n’avaient plus le pouvoir politique en #URSS, l’économie, elle, restait collectivisée. De ce fait, les représentants américains et anglais de l’impérialisme n’auraient pas vu d’un mauvais œil que l’URSS soit vaincue par Hitler. Mais il n’en fut pas ainsi.

    Roosevelt et Churchill durent donc collaborer avec un allié dont la fidélité ne leur paraissait pas assurée. En réalité, Staline était tout autant qu’eux décidé à éviter l’explosion d’une révolution en Europe. Celle-ci aurait pu secouer la #classe_ouvrière soviétique, lui donner l’envie et la force de renverser le #régime_bureaucratique de Staline. Mais celui-ci n’en dut pas moins prouver aux Alliés impérialistes sa volonté de maintenir l’ordre établi.

    La crainte d’une révolution engendrée par la guerre, la misère et l’instabilité, conséquence de la destruction des appareils d’État, n’était pas seulement fondée sur le souvenir des révolutions passées, mais sur les événements révolutionnaires qui agitaient alors l’Italie et la Grèce.

    Italie, Grèce, Allemagne, la peur de révoltes ouvrières

    En Italie, dès le début du mois de mars 1943, en plein conflit mondial, et alors que #Mussolini était au pouvoir depuis vingt et un ans, une #grève contre la vie chère, partie de l’usine #Fiat de #Turin, s’étendit aux autres villes industrielles, du nord jusqu’au sud du pays. Au total, 300 000 ouvriers firent grève contre les bas salaires, mais aussi et surtout parce qu’ils en avaient assez de la guerre et de la dictature. Cette vague de grèves allait contribuer à l’écroulement du régime de Mussolini, et réveiller l’espoir des opprimés.

    Cette agitation, dans laquelle la classe ouvrière joua un rôle prépondérant, continua après le débarquement des troupes anglo-américaines en juillet 1943, après l’arrestation de Mussolini et la mise en place d’un nouveau régime qui ressemblait beaucoup à l’ancien.

    Un an plus tard, en mars 1944, toute l’Italie du Nord connut de nouveau une vague de grèves qui toucha 1 200 000 travailleurs. Mais le dirigeant du #Parti_communiste_italien (#PCI), #Togliatti, de retour d’URSS, assura les Alliés anglo-américains qu’ils n’avaient rien à craindre. Il déclara que le PCI, loin d’envisager une révolution, apportait son appui à « un gouvernement fort, capable d’organiser l’effort de guerre », et dans lequel il y avait, selon lui, « place pour tous ceux qui veulent se battre pour la liberté de l’Italie ».

    Cela incluait entre autres le roi, compromis jusqu’à la moelle avec le fascisme. Le 22 avril 1944, se constitua un gouvernement d’union nationale reconnaissant l’autorité du roi, avec Togliatti comme vice-président !

    Cette politique d’alliance dans des Fronts de résistance, allant des PC à des partis d’extrême droite et à des forces politiques qui s’étaient déjà compromises au pouvoir, fut appliquée partout.

    En #Grèce, comme en Italie, la population se révoltait contre la guerre et la misère. Mais le Parti communiste, qui avait organisé la résistance à l’occupation allemande, accepta de négocier avec les représentants de la dictature honnie de Metaxas et le roi, qui tous avaient fui en exil à Londres, et fit passer ses milices sous le commandement militaire anglais. Le 12 octobre 1944, les troupes allemandes évacuaient Athènes, et trois jours plus tard, les troupes britanniques y faisaient leur entrée. Début décembre, à l’occasion d’une manifestation à Athènes, Churchill donna pour consignes au commandement britannique de ne pas hésiter « à agir comme si vous vous trouviez dans une ville conquise où se développe une rébellion locale ». Le commandement britannique imposa la loi martiale et continua jusqu’au 5 janvier 1945 à réprimer la population qui se révoltait contre le retour de ces politiciens haïs.

    Au travers des événements en Italie et en Grèce, les Alliés purent vérifier la loyauté de Staline et son soutien total à la mise au pas de la population. Mais le danger révolutionnaire n’était pas écarté pour autant. Plus encore que la Grèce et l’#Italie, c’était la possibilité que les classes ouvrières allemande et japonaise réagissent qui inquiétait les dirigeants américains et anglais, et aussi Staline. Leur politique, initiée par les gouvernements américain et anglais dès 1941, fut de terroriser la population ouvrière, de la disperser, par des #bombardements massifs et systématiques des grandes villes, comme ceux qui, à #Dresde, rasèrent littéralement la ville, du 13 au 15 février 1945.

    La même terreur fut appliquée contre la population au #Japon. En 1945, cent villes furent bombardées et 8 à 10 millions de leurs habitants durent les fuir, avant même les bombes atomiques que les États-Unis allaient larguer sur #Hiroshima et #Nagasaki en août 1945.

    Le partage de l’Europe

    La #conférence_de_Yalta se tint trois mois avant la fin de la guerre, mais les futurs vainqueurs discutaient depuis déjà longtemps des zones d’influence qui leur reviendraient. Ces marchandages, se basant sur les rapports de force militaires existant sur le terrain, n’étaient alors pas favorables aux Occidentaux. L’#armée_soviétique, qui avançait à grands pas en Europe de l’Est, n’était déjà qu’à une centaine de kilomètres de Berlin.

    C’est dans ce contexte que se discuta le sort qui serait fait à l’Allemagne, une fois celle-ci définitivement vaincue. Roosevelt, Churchill et Staline tombèrent vite d’accord pour imposer le démantèlement du pays. L’Allemagne fut divisée en trois zones d’occupation, anglaise au nord-ouest du pays, américaine au sud-ouest, soviétique à l’est, auxquelles s’ajouta une zone d’occupation française prélevée sur les zones occidentales. La capitale, Berlin, fut elle aussi divisée en quatre zones. C’est en fait toute l’Europe qui allait être divisée en une zone contrôlée par l’URSS à l’est, et une autre à l’ouest contrôlée principalement par les États-Unis.

    Une fois le danger de révolution écarté avec certitude, l’entente entre les représentants de l’impérialisme et de la bureaucratie allait vite voler en éclats pour faire place à la #guerre_froide – froide seulement parce qu’elle ne dégénéra pas en guerre mondiale – opposant l’impérialisme américain à l’URSS.

    L’alliance militaire entre les États impérialistes et l’URSS stalinienne pour vaincre les #puissances_de_l’Axe se doubla ainsi d’un accord politique pour empêcher, à la fin de la guerre, toute révolution ouvrière qui aurait pu renverser le système capitaliste. La fin de la boucherie impérialiste ne fut pas celle du système économique qui l’avait engendrée. Soixante-dix ans après, l’humanité entière paye très cher cette survie d’un ordre social qui ne cesse d’engendrer crises, guerres et massacres.

    #éphéméride

  • Was Orwell secretly a reactionary snitch ?
    https://www.independent.co.uk/news/uk/home-news/george-orwell-snitch-list-reactionary-grass-blacklist-communists-info

    Pendant la guerre froide il était difficile d’être de gauche car tous tes alliés potentiels étaient compromis. Tous entretenaient forcément des relations avec « Moscou », « Pankow », « Pekin » ou la #USIA. George Orwell préférait les services de son pays natal. Le film « Animal Farm » d’après sa novelle était financé en bonne partie par des services étatsuniens qui considéraient son oeuvre comme une arme anticommuniste efficace. Là, 39 ans après 1984 la brutalité des pratiques de surveillance des pays capitalistes dépasse de loin celle de son imaginaire et le problème de la liste orwellienne nous rappelle le bon vieux temps quand il fallait un délateur pour se retrover sur une liste noire.

    « Orwell was a snitch », il n’y a pas de doute. Apparamment dans sa vie quotidienne il il était aussi un peu réactionnaire comme la plupart des communistes, anarchistes et verts. C’est humain, n’est-ce pas ?

    24.6.2018 by Adam Lusher - George Orwell, born 115 years ago on Monday, was the writer who challenged the iniquities of imperialism and capitalism, who took a bullet in the throat fighting fascism, and who taught a Western audience about the horrors of Stalinist communism.

    That he died young, of tuberculosis at the age of 46, in 1950, served only to enhance his posthumous reputation. He became, in the words of one astute critic, “the James Dean of the Cold War, the John F Kennedy of English letters”.

    Death may also have saved him from curdling into the kind of bitter, contrarian conservatism that seems to have been the fate awaiting many a one-time youthful socialist.

    Instead, Orwell is often remembered as a man of “genius”, the “greatest political writer of the 20th century”.

    The commonly accepted view of the man is encapsulated in the aims of the foundation bearing his name. Through the coveted Orwell Prize, the Orwell Foundation seeks “to celebrate honest writing and reporting, to uncover hidden lives, to confront uncomfortable truths, to promote Orwell’s values of integrity, decency and fidelity to truth”.

    And yet there is one blemish – or complication – in the reputation of St George.

    It lay hidden until 1996 when Foreign Office file FO 111/189 was made public under the 30-year rule.

    The hitherto secret file revealed that in 1949 the great writer had, via his friend Celia Kirwan, given a semi-secret government propaganda unit called the Information Research Department (IRD) what became known as “Orwell’s List”.

    Orwell effectively handed over to the British authorities the names of 38 public figures whom he thought should be treated with suspicion as secret communists or “fellow travellers” who sympathised with the aims of Stalin’s Russia.

    When the existence of Orwell’s List was revealed in 1996, and when the Foreign Office finally divulged who was on it in 2003, the initial reactions seemed tinged with sadness and hedged about with qualifications.

    But the internet was young then.

    Now it has grown into a giant bristling with social media channels and anger; swift to judge, slow to reflect.

    Orwell worked for the BBC during the Second World War despite once describing it as being ‘halfway between a girls’ school and a lunatic asylum’

    And so George Orwell, a hero to so many, is now demonised online as a “fake socialist”, a “reactionary snitch”, a traitor, a McCarthyite “weasel”.

    “Orwell’s List is a term that should be known by anyone who claims to be a person of the left,” declares one fairly widely circulated condemnation. “At the end of his life, he was an outright counter-revolutionary snitch, spying on leftists on behalf of the imperialist British government.”

    “He was an anti-socialist,” asserts another indictment, “corresponding with British secret services and keeping a blacklist of writers.”

    So widespread has the vilification become, that “Orwell as snitch” is sometimes played with – not entirely seriously – as an internet meme.

    And yet, when you consult DJ Taylor, author of the acclaimed biography Orwell: The Life, you do not encounter boiling indignation.

    “I can’t get very worked up about the list,” he says mildly. “I don’t see it particularly as a mistake.

    “You just have to see it in the context of the time.”

    And that context, reveals Taylor, was explained to him by the left wing former Labour leader Michael Foot.

    Taylor recalls: “Foot told me that the great difficulty if you were a left wing Labour MP in the 1940s was working out exactly where your friends stood. You didn’t know whether some were listening to you and agreeing, and then going straight to the British Communist Party’s headquarters in King Street and telling them everything.”

    “Another example of the kind of thing they were facing,” says Taylor, “was the man who worked in the Foreign Office in the room next to Orwell’s IRD friend Celia. His name was Guy Burgess.

    “There were at least a dozen elected parliamentarians taking their orders from a foreign country,” adds Taylor. “What could be more traitorous than that?”

    Years after Orwell listed him as giving the “strong impression of being some kind of Russian agent”, the Mitrokhin Archive of KGB documents revealed that journalist Peter Smollett had indeed been a Russian agent.

    Laying aside the irony that Michael Foot was himself once falsely accused of being a KGB agent, it is, then, perhaps no coincidence that the IRD was in fact set up, not by a headbanging Tory, but by Labour foreign secretary Ernest Bevin.

    “This was at a time when the Soviet Union was swallowing up what had previously been independent East European states,” says Taylor. “The IRD was producing reasoned expositions, pamphlet literature, telling people on the ground in Eastern Europe why they should resist this kind of stuff.

    “But a lot of British people were still seduced by the idea of our ally ‘good old Uncle Joe Stalin’, when in fact the bloke was a mass murdering psychopath. And you were also dealing with some really hardline ideologues.

    “So Orwell’s idea was, if you are going to get somebody to write these kinds of pamphlets, they have to be genuine democrats.

    “He was a democratic socialist who wanted democratic socialists, not right wingers, to be writing this propaganda. But he wanted them to be people who had seen through the Soviet illusion, not covert stooges for Stalin’s Russia.”

    And so Taylor’s anger – such as it is – is reserved, not for Orwell, but for those like the late Labour MP Gerald Kaufman, who greeted the revelation of the list with the “pathetic” remark: “Orwell was a Big Brother too”.

    “This wasn’t Orwell denouncing anybody,” says Taylor. “He wasn’t writing public articles in the press saying ‘these people are evil’.

    “This was him giving private advice to a friend [Celia Kirwan] who was working for the IRD and wanted to know whom to avoid when asking people to write for her department.”

    It should perhaps be noted that Celia Kirwan was a bit more than just a friend. Three years earlier, Orwell had actually proposed marriage to her in the emotional turmoil that followed the death of his first wife Eileen.

    Kirwan rebuffed his advances, but some have suggested that Orwell, aware of his failing health, might have been seeking the comfort of a beautiful woman when on 6 April 1949 he wrote offering to name those who “should not be trusted as propagandists”.

    He certainly knew the list was not for Kirwan’s eyes only. As noted by Timothy Garton Ash, the historian who persuaded the Foreign Office to reveal the document in 2003, Orwell sent his list to Kirwan with a reference to “your friends” who would read it.

    And as Garton Ash also noted, the IRD did not confine itself to relatively innocuous pamphleteering.

    In the New York Review of Books article that formed the first detailed analysis of the list’s contents, Garton Ash wrote: “By the late 1950s, IRD had a reputation as ‘the dirty tricks department’ of the Foreign Office, indulging in character assassination, false telegrams, putting itching powder on lavatory seats and other such Cold War pranks”.

    When he sent his list to Celia Kirwan in 1949, Orwell might not have known that this was the IRD’s direction of travel, but of all people, the author of 1984, who envisaged the Ministry of Truth, should surely have been aware of the possibility.

    That said, as Garton Ash also wrote, not much seemed to have happened to the people on Orwell’s List (apart from missing out on the IRD pamphlet-writing gig). It seems their names weren’t even passed to MI5 or MI6.

    In America, Hollywood actors blacklisted during the McCarthy era had their careers and lives ruined. In England, Michael Redgrave appeared on Orwell’s List in 1949 and starred in the film adaptation of Orwell’s novel 1984 seven years later.

    Peter Smollett, named by Orwell as a likely Russian agent, got an OBE.

    In other words, what happened to those on Orwell’s List seems to have borne no comparison to the fate of Big Brother’s fictional victims or the real millions who died in the purges and repression ordered by Stalin.

    “The list invites us to reflect again on the asymmetry of our attitudes toward Nazism and communism,” wrote Garton Ash, whose own experiences of being spied on by the communist East German Stasi informed his book The File.

    What if Orwell had given the government a list of closet Nazis, he wondered. “Would anyone be objecting?”

    And in truth, there does seem a certain asymmetry in the online articles of denunciation.

    Indeed it is hard not to sense the inspiration of Private Eye’s (fictional) veteran class warrior Dave Spart in some of the articles condemning Orwell as “a social democratic traitor collaborating with the capitalist state against revolutionaries trying to create socialism.”

    “Sure, the USSR did a lot of objectionable things,” says one writer. “But … Western imperialist countries commit much more heinous crimes throughout the world every day.”

    A stronger charge against Orwell might be that of antisemitism. The private notebooks that formed the basis of the list he sent to the IRD included labels like “Polish Jew”, “English Jew”, and “Jewess”.

    But Orwell did also devote an entire 1945 essay to discussing how best to combat antisemitism, while having the honesty to admit – and regret – his own occasional lapses into jokes at the expense of Jews.

    And at the moment, antisemitism might be a problematic charge for some left wingers to level.

    Taylor, though, is convinced that some amongst “the newly emergent hard left” would secretly love to unleash something against Orwell.

    And yes, by “newly emergent hard left”, he does mean some Corbynistas.

    Younger party members, Taylor concedes, might not have the personal memories of the Cold War, still less an instinctive understanding of the context in which Orwell produced his list in 1949.

    But, he adds: “I am a Labour Party member. I have been to hear Corbyn speak and noticed how an awful lot of the people there were aged left wingers for whom there had not really been a place in the Labour Party for the last 20 or 30 years.

    “An awful lot of the hard left these days would pay lip service to Orwell as a beacon of sanity, while secretly having doubts.

    “There are still a load of extreme lefties out there to whom Orwell is this snivelling little Trotskyite telling them things they don’t want to hear and pointing out things that shouldn’t be pointed out because they get in the way of the revolution.”

    And to the ideological, Taylor would add the psychological: “Tall poppy syndrome – Orwell is this secular saint, so let’s have a go at him.”

    This battle over Orwell’s reputation, of course, is more than just a matter of idle literary historical curiosity.

    Its relevance to the political struggles of today is suggested by the remark of one of the more ferocious online critics.

    “George Orwell,” he says, “was the first in a long line of Trots-turned-neocons”.

    It is certainly true that far-right commentators have started trying to co-opt Orwell to their cause, even to the point of suggesting that the man who once chased a fascist across a battlefield with a fixed bayonet would deplore the Antifa movement.

    This, says Taylor, is pretty much what Orwell feared.

    “At the time he was giving Celia Kirwan his list, 1984 was about to be published. Orwell’s great fear was that right wingers would use it as a piece of anti-communist propaganda, and that’s what happened. Immediately after 1984 was published, it was used by the CIA as a propaganda tool.

    “Orwell wrote a very interesting letter to people in the US saying: ‘Look, this is not so much anti-communist as anti-totalitarian.’

    “He feared what right wingers would do with 1984, but thought it was the price you had to pay for exposing evils like totalitarianism.

    “And a writer can’t be blamed for how their books are used by people who are determined to twist meaning for malignant ends.”

    Orwell never wanted to be seen as a secular saint

    Taylor, though, can’t help wondering whether Orwell would really have been that upset by the comments of “slightly disconnected people” on the far left of the internet.

    Orwell himself, he points out, never sought secular saint status. Quite the reverse: “He was very wary of that kind of thing. In an essay on Gandhi he effectively says that when people start being referred to as saints there is something very odd about them and it usually ends in disaster.”

    Instead Taylor has a sneaking suspicion that Orwell might have been rather amused by his online detractors.

    “People undervalue Orwell’s wry sense of humour,” he says. “David Astor, who used to edit the Observer and employed him, told me about the time Orwell came to him saying, ‘You should hear the abuse I have been getting from some of the communist newspapers.’

    “Orwell said: ‘They call me a fascist octopus. They call me a fascist hyena.

    “Then he paused: ‘They’re very fond of animals’.”

    la liste et une introduction
    https://www.orwell.ru/a_life/list/english/e_list

    https://libcom.org/article/orwells-list

    https://en.m.wikipedia.org/wiki/Orwell%27s_list

    https://en.m.wikipedia.org/wiki/United_States_Information_Agency

    #anticommunisme #Royaume_Uni

    • Article de 2018… on en est encore là en 2023 ? Voici un article de 2020 des éditions Agone, avec un texte des éditions de L’encyclopédie des nuisances, datant d’avant même la diffusion de la liste, en… 1997 déjà.

      Malheureux comme Orwell en France (III) L’affaire de la « liste noire » (2)
      https://agone.org/aujourlejour/malheureux-iii-2

      Cependant, même s’il ne possède guère de connaissances historiques, un individu quelque peu attentif s’apercevra assez vite, à la lecture de la lettre d’Orwell, qu’il s’agit de tout autre chose que d’une lettre de dénonciation. Orwell, malade, a reçu au sanatorium la visite d’une amie proche, la belle-sœur d’Arthur Koestler, lui-même ami très proche d’Orwell. (Il faut noter à ce sujet que les auteurs de l’article – car ils se sont mis à deux –, qui se montrent si pointilleux, ne mentionnent à aucun moment ces relations d’amitié : on est donc amené à croire, à les lire, qu’Orwell a reçu Celia Kirwan en tant que fonctionnaire du Foreign Office.) À cette amie, qui lui parlait de ses activités dans le cadre de la lutte menée par le gouvernement travailliste de l’époque contre la propagande stalinienne, il a indiqué les noms de gens dignes de confiance pour participer d’une façon ou d’une autre à une telle campagne. Revenant là-dessus dans sa lettre, il lui mentionne également l’existence d’un carnet où il a noté les noms de journalistes et d’écrivains dont il faut au contraire, selon lui, se défier, parce qu’ils soutiennent plus ou moins ouvertement la politique de Staline. Orwell n’a donc rien “proposé” au Foreign Office, pas plus qu’il n’a “adressé” quoi que ce soit à l’IRD, et il n’a jamais dénoncé personne. Les journalistes et les écrivains dont il suggérait de se défier avaient une activité publique, et c’est en fonction de celle-ci que quiconque pouvait se faire comme lui, à l’époque, une idée de leur stalinophilie ; aussi facilement qu’en France, par exemple, n’importe qui aurait jugé peu avisé d’aller demander à Sartre de participer à une campagne contre la politique du PCF. En outre, tout au long de ces années-là, Orwell n’a cessé d’attaquer, lui aussi publiquement, cette stalinophilie de l’intelligentsia anglaise, s’en prenant nommément à ses principaux artisans. Et voici, en dernier ressort, ce que prétend révéler ce petit roman d’espionnage : Orwell était bien antistalinien !

      (et non pas anti communisme…)

      Ce pseudo-scoop est d’ailleurs tout aussi fallacieux dans le détail, puisque l’existence du carnet mentionné par Orwell était parfaitement connue depuis la biographie due à Bernard Crick, parue en Angleterre en 1982, comme celui-ci l’a rappelé dans sa lettre au Guardian du 12 juillet 1996. Mais peu importe à nos honnêtes journalistes. Une fois établie comme on l’a vu l’activité de délateur d’Orwell, il n’est guère utile, aux yeux de la conscience moralo-médiatique, de se souvenir que, pas plus qu’il n’y a eu dénonciation, il n’y a eu dans l’Angleterre de l’époque de persécution quelconque contre des écrivains ou des artistes prostaliniens. Il suffit de solliciter les réactions de diverses “personnalités”, toutes prêtes à se déclarer horrifiées par la nouvelle. Et il ne manque pas d’anciens staliniens à la Christopher Hill pour y aller de leur couplet, trop contents de pouvoir baver avec l’aval du ministère de la Vérité

      #George_Orwell

    • Et encore un autre

      Malheureux comme Orwell en France (II) Qui veut tuer son maître l’accuse de la rage - Agone
      https://agone.org/aujourlejour/malheureux-ii

      « En 1996 – puis encore une fois en 2002 –, écrivait Simon Leys en 2006, d’indécrottables staliniens lancèrent puis exploitèrent une rumeur selon laquelle Orwell n’aurait été qu’un vil indicateur de police. » Treize ans après, sans qu’aucune nouvelle pièce à charge n’ait été apportée au dossier, la même rumeur est exploitée aux mêmes fins par le même genre d’individu.

    • @rastapopoulos Ce qui est intéressant c’est de constater les clivages au sein de la gauche qui empêchaient une lutte efficace contre le système capitaliste et impérialiste.

      Nos camarades proches de « Pankow », je parle de l’époque entre 1971 et 1998, défendaient un système qui côté oppression n’était pas pire que n’importe quel autre état, mais on se heurtait toujours à deux forces antagonistes et irréconciliables. D’abord tu vivais dans la certitude que chaque contact avec des représentants du « régime communiste » te valait une entrée dans les fichiers des services de l’Ouest. Parfois tu te tapais une campagne délatrice par la presse de droite. Ceci fut le cas de l’écrivain et historien Bernt Engelmann


      Berlin: Die „Berliner Begegnung zur Friedensförderung“ wurde in der DDR-Hauptstadt eröffnet.
      An dem zweitägigen Treffen nehmen auf Einladung des DDR-Schriftstellers Stephan Hermlin rund 100 Schriftsteller, Künstler und Wissenschaftler aus beiden deutschen Staaten sowie aus weiteren europäischen Ländern und aus Westberlin teil. Unter ihnen sind Prof. Jürgen Kuczynski, Hermann Kant, Stephan Hermlin, Bernt Engelmann (BRD) und Ingeborg Drewitz (Westberlin).-v.l.n.r.

      Passons sur l’infâme « Berufsverbot » qui a transformé une génération entière de diplômés de gauche en chauffeurs de taxi et paumés sans perspective professionelle.

      Si par contre tu osais entretenir des contact avec l’Ouest et tu ouvrais ta gueule en critiquant la RDA on te rangeait dans la case anticommuniste et bien des camarades ainsi visés finissaient par le devenir. Rappellons-nous du sort de Wolf Biermann qui a commencé son itinéraire artistique comme communiste insoumis et s’est transformé en triste guignol anticommuniste après avoir été privé de son passeport RDA.


      Oostduitse zanger Wolf Biermann geeft persconferentie in Frascatie, Amsterdam, Datum : 23 februari 1977

      Pour les militants de gauche « non-dogmatiques » et « spontanéistes » qui vivaient sous la dictature militaire éclairée des #USA et de leurs alliés français et britanniques, il était à la fois évident qu’il fallait défendre la RDA et ses acquis pour les classes laborieuses, les femmes et la solidarité internationale, critiquer les défaillances du socialisme de Berlin-Est et combattre l’impérialisme états-unien qui était en train de corrompre nos amies et amis pendant qu’il assassinait et incarcérait dans le monde entier. Angela Davis fut une de ses victimes libérés grâce aux campagnes de solidarité menée par toutes les tendances de la gauche mondiale.


      11 August 1972, RIA Novosti archive, image #36716, Cosmonaut Valentina Tereshkova, chairperson of the Soviet women committee (right) meeting with Angela Davis at Sheremetyevo Airport.

      Bref le temps entre 1971 et 1989 fut une époque (relativement) heureuse marquée par le début d’une ouverture du rideau de fer et un impérialiste étasunien adouci pour les citoyens d’Europe. La gestion réussie du conflit entre le bloc #COMECON, les #USA et l’Europe nourrissait l’illusion que les conflits mondiaux étaient en train de s’estomper. La politique de détente promettait des avantages pour tous.

      Dans les dernières années de la vie de George Orwell les problèmes se posaient d’une manière différente parce que les forces à l’œuvre n’étaient pas les mêmes et la répartition du pouvoir exigeait un comportement différent de la gauche dans la première phase de la guerre froide.

      On ne pouvait pas ne pas prendre position d’un côté ou de l’autre sous peine de subir le sort des trotskystes ou d’une vie apolitique et insignifiante. La passation violente du pouvoir impérialiste mondial britannique aux nouveaux maîtres de Washington était en plein essor. L’époque de l’après 1914-1918 n’était pas encore révolu et chaque militant et auteur politique devait choisir son camps.

      Bert Brecht nous a légué un fragment de pièce de théâtre qui cerne ce dilemme :

      Untergang des Egoisten Johann Fatzer
      https://de.wikipedia.org/wiki/Fatzer_(Fragment)

      Fatzers letzte Worte sind: von jetzt ab und eine ganze zeit über / wird es keine sieger mehr geben / auf unserer welt sondern nur mehr / besiegte.

      En communiquant sa liste à son amie Orwell a choisi son camp. En prenant en compte la situation de l’époque on ne peut que constater qu’il s’est comporté en anticommuniste contrairement à Klaus Fuchs (https://de.wikipedia.org/wiki/Klaus_Fuchs) et d’autres qui ont opté pour la défense du socialisme même stalinien ou dégénéré.

      Quoi qu’il ait fait peu de temps avant sa mot, l’œuvre de George Orwell occupe une place importante dans notre patrimoine internationaliste au même rang que les écrits de Lev Tolstoï et ceux des humanistes. Notre discussion en est la preuve qu’il a dépassé une position où on peut encore le critiquer pour ses actes alors que nous lui devon l’admiration sans réserve pour tout ce qu’il nous a apporté par ses engagements politiques et comme écrivain.

      Il serait idiot de suivre ou contredire les jugements prononcés à l’époque. Si tu tombes dans ce piège tu risques de te trouver dans une impasse comme les camarades qui ont pris les armes après 1968 pour lutter contre l’impérialisme en Europe. Il ne faut jamais répéter les positions historiques mais il faut les étudier afin de comprendre où nous en sommes. Nous ne pouvons qu’essayer de comprendre comment tout le monde s’est fait avoir par les services secrets, les fausses grandes causes et les attitudes mesquines qu’on essaye de nous imposer par les « contraintes matérielles ».

      Je pense qu’un des meilleurs commentaires sur la question vient d’une source décidément anticommuniste.

      The Bare Necessities (from The Jungle Book)
      https://www.youtube.com/watch?v=08NlhjpVFsU


      The Jungle Book (1967 film)
      https://en.wikipedia.org/wiki/The_Jungle_Book_(1967_film)

      #guerre_froide

  • Neujahrsansprache der Regierenden
    https://www.rbb-online.de/fernsehen/programm/01_01_2023/1845487.html

    Bei 3:20

    Als Regierende Bürgermeisterin kann ich Ihnen heute sagen, die Energieversorgung in unserer Stadt ist in diesem Winter in allen Sektoren sichergestellt.

    Verstehe, nicht nur im amerikanischen, britischen und französischen, auch im sowjetischen Sektor fließt der Sprit in Strömen. Ende Blockade. Demnächst iss auch in der Szone Schluß mit Sparsam, wünscht sich unser Rejiersternchen aus Frankfurt anne Oder . Welchet Jahr hamwa heute, 1949 oder?

    Und für alle, die es nicht glauben können oder wollen folgt hier die offizielle Veröffentlichung der Senatskanzlei. Da steht es texto.

    Giffey in ihrer Neujahrsansprache: Berlin ist „Stadt der offenen Arme und Herzen“ - Berlin.de
    https://www.berlin.de/rbmskzl/aktuelles/pressemitteilungen/2022/pressemitteilung.1279328.php

    „Liebe Berlinerinnen, liebe Berliner,

    ein einschneidendes und herausforderndes Jahr 2022 liegt hinter uns – und ein neues Jahr mit neuen Aufgaben vor uns. Als Ihre Regierende Bürgermeisterin wünsche ich Ihnen allen für 2023 viel Glück, Gesundheit und Kraft!

    Im letzten Jahr sind in Berlin über 30.000 Kinder zur Welt gekommen. Ihnen und allen anderen Kindern in unserer Stadt eine gute Zukunft zu ermöglichen, dafür arbeite ich zusammen mit dem Berliner Senat und unseren 12 Bezirken: für gleiche Chancen, gute Bildung und soziale Gerechtigkeit. Deshalb haben wir 2022 über 5.000 Kitaplätze und über 8.000 Schulplätze neu geschaffen. Und wir treiben die Schulbauoffensive auch künftig mit über einer Milliarde Euro pro Jahr voran.

    Zu einer guten Zukunft gehört auch bezahlbarer Wohnraum. 16.500 Wohnungen wurden 2022 neu gebaut – trotz Krise mehr als 2020 und 2021 und mehr als im Bundesdurchschnitt.

    Denn Berlin soll für alle Generationen eine soziale Stadt bleiben: bezahlbar, lebenswert und nachhaltig, vielfältig und sicher – mit einer starken Wirtschaft und guter Arbeit.

    Seit dem russischen Angriff auf die Ukraine herrscht Krieg in Europa. Viele Menschen machen sich Sorgen um die Zukunft. Es ist jetzt umso wichtiger, dass wir uns auf unsere Stärken besinnen. Aus unserer Geschichte wissen wir, dass Berlin in Krisen immer wieder zur Höchstform aufläuft – so wie bei der Versorgung und Unterbringung geflüchteter Menschen aus der Ukraine. Berlin hat sich als Stadt der offenen Arme und der offenen Herzen gezeigt. Viele haben Geflüchtete bei sich zuhause aufgenommen, haben am Bahnhof geholfen, haben Lebensmittel und Kleidung gespendet.

    Ihnen und allen beteiligten Hilfsorganisationen und Ehrenamtlichen danke ich für ihre beispielhafte Solidarität. Sie alle sind Botschafter der Menschlichkeit Berlins.

    Für Berlin beschämend sind die Fehler, die vor meiner Amtszeit bei den Wahlen 2021 gemacht wurden und die zur Entscheidung des Landesverfassungsgerichtshofs zur Wahlwiederholung führten. Diese Fehler schmerzen mich zutiefst. Das darf nie wieder passieren. Sie können versichert sein: Dieser Senat und der neue Landeswahlleiter tun alles dafür, dass die Wahlwiederholung reibungslos verläuft.

    Gleichwohl haben wir in Berlin im letzten Jahr auch Entscheidendes erreicht, was angesichts der vor einem Jahr noch bedrohlichen Corona-Pandemie kaum vorstellbar erschien: Berlins Wirtschaft ist im vergangenen Jahr überproportional gewachsen. Viele neue Unternehmen haben sich in Berlin angesiedelt, neue Arbeitsplätze sind entstanden und Millionen Gäste haben Berlin wieder besucht. Das zeigt, dass Berlin nichts von seiner Anziehungskraft verloren hat. Im Gegenteil!

    Als Regierende Bürgermeisterin kann ich Ihnen heute sagen, die Energieversorgung in unserer Stadt ist in diesem Winter in allen Sektoren sichergestellt. Mit unserem Berliner Entlastungspaket unterstützen und helfen wir denjenigen, die von hohen Energiepreisen und Inflation besonders betroffen sind. Zum Beispiel mit dem 29-Euro-Ticket, das eine echte Entlastung ist und der BVG einen neuen Kundenrekord beschert.

    Liebe Berlinerinnen und Berliner, ich danke heute insbesondere denjenigen, die unsere Stadt mit ihrer Arbeit rund um die Uhr am Laufen halten – den Beschäftigten in den Krankenhäusern und Pflegeeinrichtungen, bei Feuerwehr und Polizei, bei der BSR, bei BVG und S-Bahn. Und den vielen Ehrenamtlichen, die sich täglich für unsere Gesellschaft einsetzen und für Solidarität einstehen.

    Wir bewältigen die Krise in einer gemeinsamen Kraftanstrengung von Politik, Wirtschaft und Zivilgesellschaft. Vertrauen wir auf diese starke Kraft in unserer Stadt. Denn es ist die Kraft von uns allen! Die Kraft des Miteinander-Anpackens!

    Ich wünsche Ihnen, dass Sie trotz aller Herausforderungen zuversichtlich ins neue Jahr blicken können. Lassen Sie uns Berlin weiter tatkräftig gestalten. Ich bin sicher: Gemeinsam wird es uns gelingen.“

    #Berlin #Politik #SPD #Blockade #1949 #2023 #WTF

    • Dans son discours du nouvel an la maire de Berlin affirme que « la sécurité énergétique de notre ville est assurée dans tous les secteurs ».

      Le terme « secteur » prend une signification spécifique dans le contexte berlinois. C’est l’appellation des zones d’occupation étatsunienne, britannique, française et soviétique entre 1945 et 1991. Quand la maire principale de la ville et ses assistants ne sont plus au courant de la signification propre au contexte local de cette expression, on ne peut que rire de leur incompétence. C’est comme une maire parisienne qui ignore le mur des Fédérés et l’histoire du boulevard périphérique.

      Le partage de la ville de Berlin en secteurs a marqué la vie quotidienne des berlinois pendant plusieurs générations. Il en résulte un angle de vue sur le monde unique aux berlinois de l’Ouest et de l’Est. Leurs perspectives sont profondément différentes malgré leurs points communs et chacune n’est partagée par personne d’autre sur terre.

      #Berlin #mur #occupation #guerre_froide

  • La guerre froide de 100 ans ... Le Mythe de la bonne guerre - impérialiste - Libraire Tropique
    https://www.librairie-tropiques.fr/2022/09/la-guerre-froide-de-100-ans.html

    La guerre froide aura bientôt 100 ans. Selon certains on a même de bonnes raisons de penser qu’elle les a déjà ; puisque pour l’impérialisme américain, naissant sous sa forme moderne sur les décombres des « empires centraux » et coloniaux qui s’étaient auto-détruit ( sous les encouragements de l’Oncle Sam ) pendant la première guerre mondiale, les années 20 du siècle dernier furent aussi celles de la grippe espagnole et de « l’invasion communiste » venue de la Russie « judéo bolchévique » d’alors.

    https://www.youtube.com/watch?v=5l19Hrg_c_E&feature=emb_logo

     L’actualité géopolitique et le comportement inique et absurde de notre classe dirigeante, comme de l’appareil idéologique qu’elle appointe dans la représentation politique (aussi bien que dans l’appareil d’état), et de l’ensemble de nos médias, sous la houlette des plus grosses fortunes de France, s’inscrivent dans cette « guerre froide de 100 ans ».


     C’est ce conflit, provoqué par les prétentions impériales du capitalisme étasunien, qui doit être remis dans la perspective de lutte mondialisée des classes, et ses épisodes militaires, pour comprendre pourquoi et comment cette classe dominante et ses agents les plus zélés s’appliquent encore à produire une rhétorique de légitimation de cette « juste cause ». Une logomachie destinée à accompagner la soumission et la servitude des vieilles nations européennes, désormais ramenées au rôle de « proxies » accomplissant la sale besogne, voire de « chair à canon » au profit des stratèges du Pentagone, comme de Wall Street et leurs « amis » occidentaux.

     La récente visite de l’éminent historien Jacques Pauwels nous a donc donné l’occasion de remettre à l’affiche le livre ( épuisé chez son éditeur, mais les derniers exemplaires sont disponibles à la librairie) qu’il avait consacré naguère au « Mythe de la Bonne guerre » ... impérialiste. Un mythe tenace et qui marque cette Guerre froide de 100 ans ...

    A écouter : Jacques R. Pauwels : 1914 1918 La grande guerre des classes
    https://www.campuslille.com/index.php/entry/jacques-r-pauwels-en-direct-sur-radio-campus-lille-ce-samedi-25-octobre

    #histoire #guerre #livre #Jacques_Pauwels #Jack_Pauwels #impérialisme #usa #Ukraine #Impérialisme #Communisme #guerre_froide #Stratégie_du_Chaos,

  • L’inquiétant #boycott des #musiciens #russes
    https://www.lemonde.fr/culture/article/2022/03/10/l-inquietant-boycott-des-musiciens-russes_6116973_3246.html

    Encore moins compréhensible, le Concours international de piano de Dublin (DIPC), qui se tiendra du 17 au 24 mai, débarquant les candidats russes. « En accord avec les organisations artistiques du monde entier, en cette période difficile, nous avons le regret de vous informer que le DIPC ne sera pas en mesure d’inclure des concurrents russes dans le concours 2022. » Le courriel, envoyé à une dizaine de musiciens, a été posté, le 3 mars, sur le compte Facebook du pianiste Roman Kosyakov – formé à #Moscou, mais aussi à Birmingham. Les frais de dossier seront remboursés.

    [...]

    Le gel musical entre la Russie et les pays occidentaux serait, « pour l’humanité, une catastrophe », insiste Olivier Mantei. Au plus fort de la #guerre_froide, c’est un pianiste américain, Van Cliburn, qui avait remporté, en 1958, la première édition du Concours international #Tchaïkovski. « Il faut distinguer le pouvoir dictatorial de l’histoire du pays et de son patrimoine culturel, qui résiste depuis très longtemps, estime Olivier Mantei. L’apport des artistes russes à la musique est considérable. » Une vérité qu’il n’est pas inutile de rappeler en ces temps troublés.