#heureux_concours_de_circonstances

  • "J’ai une femme exceptionnelle". #Carrières des hommes hauts fonctionnaires et arrangements conjugaux

    Très bon boulot qui est à développer au-delà du champs d’étude premier, à savoir sur l’ensemble de la population active.
    J’ai noté le même genre de biais dans les trajectoires professionnels lors de mes études en sciences sociales, donc, dans la population des universitaires.

    Mon directeur de recherche me reprochait de ne pas investir assez de temps dans mon travail. Je lui faisais remarquer que j’avais des contraintes externes indépassables, comme m’occuper des factures, des approvisionnements et de l’entretien de mes affaires et que c’était donc un temps que je ne pouvais consacrer à mon travail, par définition.

    C’est là que mon directeur de recherche a fini par me parler de la femme extraordinaire (eh oui, les mots sont importants !) qu’il avait. Chercheuse de haut niveau, tout comme lui, elle avait laissé tomber sa carrière universitaire pour s’occuper des contingences domestiques. Ainsi, il avait pu avoir une famille nombreuse et une belle carrière... sur le dos de sa femme. Mais ce n’est pas tout. En plus de prendre en charge 100% des petites contraintes physiologiques, d’éloigner les enfants pour qu’ils ne le dérangent pas dans son travail, d’inviter les meilleurs universitaires à leur table (ce qui est un bon booster de carrière, le dîner formalisé à la maison, avec apparat discret et mise en scène de la stabilité familiale), elle trouvait le temps de relire et corriger intégralement les travaux de monsieur le professeur...

    Il a fini par m’avouer que sans elle, il était perdu... mais je ne sais pas s’il a pris conscience de la réalité de ce qu’il lui avait fait... surtout que, comme dans les cas cités dans l’étude, cette femme brillante avait « choisi » de laisser tomber sa carrière pour se mettre à 100% au service de celle de monsieur.

    Plus tard, dans les entreprises privées, j’ai retrouvé systématiquement la même configuration dans les postes de haute direction DG, PDG, DO : des hommes 100% assistés dans le cadre de couples très stables et totalement inégalitaires. Parfois la femme n’avait pas un bagage culturel ou éducatif suffisant pour avoir eu un meilleur choix que la « domesticité », mais la plupart du temps, les hommes à haut poste de responsabilité se retrouvent avec des femmes brillantes et totalement à leur service.

    Et souvent, ils mettent en avant leur vie familiale comme démonstration même de leur réussite, quand bien même, ils n’y interviennent concrètement que de manière financière.

    En gros, cette enquête mérite d’être développée avec des moyens importants !
    http://www.cee-recherche.fr/publications/connaissance-de-lemploi/jai-une-femme-exceptionnelle-carrieres-des-hommes-hauts-fonctionnaires

    Majoritaires au sein de de la Fonction publique d’État (54 %), les #femmes n’étaient en 2011 que 26,5 % des cadres à y occuper des fonctions d’encadrement et de direction. Une inégalité professionnelle qui persiste en dépit du développement de politiques d’égalité. C’est pour mieux en comprendre les mécanismes que la Direction générale de l’administration et de la fonction publique a commandité une recherche qualitative auprès d’agent.e.s de la haute administration.
    Cette enquête montre à quel point, même (ou a fortiori) dans la Haute Fonction publique, la conciliation entre sphères professionnelle et privée reste un problème essentiellement féminin. En effet, l’organisation du #travail y est telle que seuls peuvent se plier aux exigences de leurs postes les cadres dont la conjointe, bien que tout aussi diplômée, assume l’exclusivité des charges familiales et désinvestit la vie professionnelle, devenant « une femme exceptionnelle » au service de la carrière de son conjoint. Ces cadres ne modifient leurs arrangements conjugaux que lorsque leur couple est en danger ou qu’ils éprouvent des déconvenues dans leur carrière. Des constats qui font mesurer le chemin restant à parcourir sur la voie de l’égalité professionnelle.