• c’est un n° du Canard post 12 janvier, si je lis bien le texte.

      Ils sont vraiment, vraiment, complétement débiles ; juste le fric, le pétrole ou l’électricité balancés par les fenêtres pour le transport des candidats, tout ça pour les flliquer, ça laisse rêveur.

  • Covid-19 : les clusters se multiplient dans les hôpitaux
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/02/05/la-multiplication-des-clusters-dans-les-hopitaux-etonne_6068893_3244.html

    Covid-19 : les clusters se multiplient dans les hôpitaux
    Plusieurs représentants du monde hospitalier appellent à vacciner au plus vite l’ensemble des professionnels de santé.

    Si les soignants sont fortement touchés par le Covid-19 depuis le début de l’épidémie, ces dernières semaines, les clusters intrahospitaliers se multiplient dans les établissements. Pas de chiffre à ce jour, pour établir une comparaison entre cette troisième vague avec celles de mars et de novembre 2020, mais un sentiment qui domine : « On est surpris qu’autant de clusters surviennent dans autant d’établissements au même moment », résume Thierry Godeau, à la tête de la conférence nationale des présidents de commissions médicales d’établissement (CME) de centres hospitaliers.

    Compiègne, Dieppe, Arras, Le Havre, Niort… La liste s’allonge depuis le début de l’année, constate-t-il. Le Collectif inter-hôpitaux (CIH) cite encore Quimper, Menton, Créteil, Rennes ou Pau, dans un communiqué daté du 24 janvier dans lequel il s’alarme de voir des soignants « massivement contaminés ». « Nous n’avons pas d’explications, rapporte Thierry Godeau, praticien au centre hospitalier de La Rochelle, directement concerné, avec des clusters déclarés dans six services en quelques jours. On a fait appel à la cellule de l’agence régionale de santé qui travaille sur les infections associées aux soins, ils n’ont pas trouvé de réponse pour l’instant. » Dans son établissement, aucun cas de variant britannique, dont la contagiosité est plus forte, n’a été détecté à ce jour.

    « L’usure et la fatigue des personnels peuvent entrer en compte, mais ça ne peut se résumer à une question de pratique soignante, estime-t-il. Pas dans autant d’établissements, au même moment, en si peu de temps. » Du côté des centres hospitaliers universitaires (CHU), ce sont environ trois quarts des établissements qui font état d’au moins un cluster dans leurs murs, début février, d’après la conférence des présidents de CME, qui a fait le point sur la situation de 24 CHU (sur la trentaine existant dans le pays). Avec, en général, trois à cinq soignants touchés par cluster, mais jusqu’à 15 à 20 soignants dans quatre établissements.

    « Fatigant et compliqué »

    « Actuellement, le nombre de clusters est stable, ou en baisse. On ne constate pas l’explosion redoutée avec le variant, rassure François-René Pruvot, à la tête de la conférence des présidents de CME de CHU. Cela impacte l’activité des services, mais il n’y a pas d’hôpitaux qui rencontrent un blocage ou une interruption de l’activité. » Ce qui n’empêche pas les difficultés : « Ce sont des clusters perlés, qui s’éteignent dans un service, se rallument dans un autre, c’est fatigant et compliqué en termes d’organisation. »

    « Cela révèle en tout cas combien il est important de vacciner tous les soignants, reprend le docteur Thierry Godeau. On a raisonné dans cette campagne vaccinale en termes de risque individuel, en ciblant d’abord les plus âgés, mais on a oublié le risque sanitaire de se retrouver avec des établissements de santé paralysés. » Jusqu’à aujourd’hui, seuls les soignants de plus de 50 ans ou souffrant de comorbidités font partie des populations auxquelles la vaccination est ouverte.

    Lui et ses deux homologues des CHU et des centres hospitaliers spécialisés ont alerté, à la fin janvier, le ministre de la santé, Olivier Véran, dans une lettre commune, appelant à étendre au plus vite la vaccination à « l’ensemble des professionnels au contact des patients en commençant dès maintenant par ceux qui travaillent dans toutes les unités de soins ». Une demande formulée dans le même sens par le CIH : « Les doses vaccinales sont certes insuffisantes, mais le CIH rappelle qu’un hôpital sans soignants ou avec des soignants propagateurs de l’infection ne sera d’aucune utilité dans cette nouvelle vague. »
    L’arrivée d’un troisième vaccin, celui d’AstraZeneca, proposé à partir de samedi 6 février à l’ensemble des soignants, comme l’a annoncé le gouvernement jeudi 4 février, devrait répondre à ces interpellations. « On aurait souhaité que ce soit fait avant, mais on ne va pas polémiquer, dit Thierry Godeau. Maintenant, il faut foncer, on peut l’organiser très vite dans nos hôpitaux, il faut juste recevoir les doses. »

    #covid-19 #covid-19_nosocomiaux #hôpital #soignants #clusters #stratégie_vaccinale #vaccins

    • La seule variable explicative qui tienne un peu la route, c’est qu’on est en train de gravement sous-détecter le virus. En témoigne les chiffres stables alors que dès qu’on teste un bahut ou un hosto, c’est l’horreur, alors que les gus qui mesurent le virus dans les égouts paniquent (alors même qu’il a beaucoup plu ces derniers temps, ce qui dilue un peu).

      Pourquoi serions-nous en sous-détection  ?
      → Sous-test chez les gens qui en ont marre de perdre des jours de boulot (peut-être voir s’il y a des secteurs mal indemnisés en cas de quarantaine)
      → Sous-test institutionnalisé dans toute l’EN et chez les mineurs
      → Sous-test parce que les parents ne veulent plus perdre de journées de travail  : beaucoup de témoignages rapportent des enfants scolarisés alors que toute la famille se sait touchée
      → incapacité de voir les variants
      → fiabilité en baisse des tests à cause des variants
      → protocole non respecté sur des tests AG  : un négatif doit être suivi d’un PCR de confirmation
      → sous-suivi des cas contact
      → refus des tester les asymptomatiques (pas mal de cas rapportés)
      → Non reconnaissance de suspicion de covid à cause de la méconnaissance profonde de la diversité des symptômes  : toute la com’ tourne autour de 3 symptômes (fièvre, grosse fatigue, anosmie) + une complication (détresse respiratoire), alors qu’il y a au moins une bonne vingtaine de symptômes connus.
      → la sous-détection entraine logiquement des flambée nosocomiales  : on met en chambre double et en service ordinaire des gens covidés
      → maintien délibéré des malades au travail (personnel de santé 👍)
      → quarantaine délibérément trop courte pour les infectés… et même pas respectée. Le lycée de ma fille (où elle refuse de remettre les pieds malgré les menaces) a fermé mercredi l’internat et la cantine  : tout le personnel était contaminé. Ils rouvrent lundi. 🤦‍♀️

  • Entre obstination et condescendance, le Gouvernement persiste à faire la sourde oreille.
    https://www.interurgences.fr/2021/01/communique-de-presse-22-01-2021

    Les organisations syndicales, les collectifs et associations, réunis en intersyndicale se sont rassemblés ce 21 janvier devant le Ministère de la Santé et des Solidarités, et partout en France, afin de dénoncer le manque de moyens de notre système de santé .

    Six mois après la conclusion du « Ségur » de la santé, l’attractivité qui était le principal défi est un échec. Les postes vacants sont de plus en plus nombreux accentués par une fuite continue des professionnels aggravant les conditions de travail des professionnels restant.

    Les discours d’Olivier Veran sur la fin du dogme de la fermeture des lits pouvaient nous laisser entrevoir un avenir meilleur, malheureusement, entre les paroles et les actes le décalage est immense. Ainsi plusieurs centaines de fermetures de lits, continuent d’être actées sans justification, sur tout le territoire, et ce malgré la crise du Covid et la colère des soignants.

    Le Ministère de la Santé et des Solidarités a donc reçu collectifs et organisations syndicales par l’intermédiaire de Madame Bénédicte Roquette, conseillère chargée de l’offre de soins, des ressources humaines et de l’organisation territoriale auprès du cabinet de Monsieur Veran.

    Après un tour de table où organisations syndicales et collectifs ont rappelé les revendications défendues depuis bientôt 2 ans, et ont à nouveau alerté sur l’aggravation de la situation avec la crise : dégradation de l’accès aux soins et des conditions de travail des personnels, ne permettent pas aux professionnels d’assurer leurs missions de soins dans des conditions de qualité et de sécurité acceptables. Le ministère a justifié sa politique en qualifiant le « Ségur d’historique » en terme de financement pour l’hôpital public, alors même que les salaires ne sont toujours pas à la moyenne des pays de l’OCDE, et que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 impose à nouveau 900 millions d’euros d’économies malgré la crise. Aucune proposition, aucun plan, calendrier, ni axe de travail n’ont été proposés, le ministère nous demande d’attendre la mise en œuvre du « Ségur » et ne semble pas entendre la grande détresse des hôpitaux, des personnels et l’urgence d’agir pour préserver un système hospitalier public de qualité.

    Loin de rassurer ou d’apporter des éléments constructifs pour l’avenir de la santé et du social, le ministère ne partage pas notre diagnostic et se satisfait des avancées « historiques » du « Ségur ». Les Collectifs, organisations syndicales et associations restent unis pour dénoncer le sous financement du système de santé et défendre la reconnaissance des professionnels. Nous appelons la population à nous rejoindre lors des prochaines mobilisations dans les jours et semaines à venir pour défendre l’hôpital public, nos établissements du médico social et du social , notre #bien_commun, et pour préserver un accès aux soins de qualité pour tous.

    Tout seul on va plus vite, Ensemble on va plus loin !

  • Mervin sur touiteur
    https://twitter.com/solatges2/status/1352332407412846594

    Voulez-vous connaitre la meilleure pour l’@IHU_Marseille ? Ils facturent pour 2 heures de visite (1 ECG (pour leur chloroquine !!) // 1 test pcr // 1 ordonnance HCQ/Azithromycine)) le tarif d’une journée d’hospitalisation ambulatoire : plus de 1200€.(avec 200€ de reste à charge)

    Le patient m’a présenté sa facture et était Covid positif. Il n’a même pas été prévenu pour le reste à charge (il n’a pas de mutuelle) et tout cela pour un médicament délivré hors AMM.. (car l’ECG n’est réalisé que pour la délivrance de l’HCQ)

    #IHU #Sécurité_sociale #hôpital

    • Je n’avais pas vu la facture, publiée ensuite.

      Ces deux mois avant l’acte facturé peuvent correspondre à un rdv antérieur à celui-ci (une inclusion dans une « étude » ? n’imp ?), une entrée dans la file d’attente, dans la patientèle pour une raison z.

      D’autres réponses au post parle de fake, car l’IHU n’est pas mentionné, en raison des deux dates éloignés (mais l’acte facturé est bien sur un jour), en raison du manque de détails de l’acte facturé (pas de PCRmentionné etc.). Je n’en sais rien.

      Ce que je sais c’est qu’IHU ou pas, malgré une bureaucratie tatillonne et une logique comptable hystérisée qui affecte diverses fonctions matérielles de manière tout à fait sensible, il y une grande liberté de facturation de ce qui est imputé à la sécu par les entreprises de toutes tailles, les divers « libéraux » qui émargent à cette caisse, les institutions de soins, en même temps que des obstacles à la prise en charge et d’invraisemblables sous-évaluations de divers actes (séance de kiné que sa cotation tend à tayloriser, par ex.).

      Avec la télémédecine, on a de nouveaux (?) cas, comme ces médecins traitants qui appellent un patient pour donner en deux minutes un résultat de test et facturent pour cela une consultation (oui, les consultations de médecine g sont sous côté et taylorisent elles-aussi les soins) alors qu’il ne se passe rien, qu’ils ont pas eu besoin par exemple de démêler une question clinique quelconque avec des spécialistes.

  • Ils ont reçu des soins… et un virus | La Presse
    https://www.lapresse.ca/covid-19/2021-01-18/ils-ont-recu-des-soins-et-un-virus.php

    Un patient sur sept hospitalisé avec la #COVID-19 a reçu son premier test positif plus de sept jours après son admission à l’hôpital, et est donc considéré par l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) comme un cas « #nosocomial présumé », c’est-à-dire que la maladie a probablement été contractée à l’hôpital.

    Depuis plusieurs mois, ce chiffre est stable : autour de 15 % des patients COVID hospitalisés sont considérés par l’INESSS comme des cas de maladie nosocomiale présumée. En chiffres absolus, ces patients représentent une vingtaine de cas par jour. Entre 2000 et 3000 personnes sont hospitalisées chaque jour au Québec. Le « risque » de contracter la COVID-19 en se rendant à l’#hôpital demeure donc faible, souligne Mike Benigeri, directeur du Bureau des données clinico-administratives à l’INESSS.

  • L’embrasement du #Roforofo_Jazz sur un nouvel EP

    Avec la sortie d’un EP 5 titres Fire Eater, le combo parisien marque son goût prononcé pour les mélanges aventureux, mixant #hip_hop, #afrobeat et #jazz dans un style unique.

    Afro Latin Vintage Orchestra, Oghene Kologbo, les Frères Smith, Los Tres Puntos, No Water Please, ou encore Sax Machine, chacun de ces groupes cache dans son line-up un ou plusieurs des membres de Roforofo Jazz. Le live band composé de sept musiciens et du MC originaire de Chicago Days (alias RacecaR) se retrouve aujourd’hui a remué sédiments et limons musicaux dans un marécage de radicalité hip hop, de groove #funk, de puissance afro, de liberté jazz avec un goût prononcé pour les mélanges aventureux.

    https://pan-african-music.com/roforofo-jazz-fire-eater

    https://officehomerecords.bandcamp.com/album/fire-eater

    #musique

  • BALLAST | Mutiler les gilets jaunes : le combat d’une famille
    https://www.revue-ballast.fr/mutiler-les-gilets-jaunes-le-combat-dune-famille

    À Pompidou, il faut le dire, ça a été com­pli­qué. Cet hôpi­tal est une véri­table usine, il y a 300 ou 400 chambres. C’est inhu­main. Arrivé depuis déjà trois jours, Gabriel n’avait tou­jours pas été opé­ré du visage, il était ter­ri­ble­ment gon­flé. Passe le pro­fes­seur Lantieri, spé­cia­liste des greffes de visage en France. Quand il a vu l’état de Gabriel, il était outré. « Une situa­tion inad­mis­sible », il a dit. Gabriel a dû subir une inter­ven­tion du visage dans son lit car il n’y avait pas de bloc opé­ra­toire libre. C’est assez éton­nant comme pra­tique, pour un hôpi­tal qui a une renom­mée euro­péenne. Un bout de plas­tique et de fer issu de la gre­nade, gros comme une pièce de mon­naie, était incrus­té au milieu de son front. Son visage était com­plè­te­ment tumé­fié, il gon­flait de jour en jour. Cette inter­ven­tion a été réa­li­sée sans anes­thé­sie par­ti­cu­lière — même s’il était sous mor­phine, il a souf­fert. Gabriel s’est sen­ti tout de suite mieux et son visage a dégon­flé. Au sein de l’hô­pi­tal, il y a eu une sorte de bataille entre les ser­vices. Gabriel avait été pris en charge pour sa main, donc par l’orthopédie : du coup, ils n’ont pas pris sa jambe ni son visage en compte. C’était un va-et-vient per­ma­nent entre les blocs. Et comme l’hôpital manque de place, on ne savait jamais quand il devait se faire opé­rer. Alors Gabriel ne man­geait plus, ne buvait plus. Plus d’une fois, on ne lui a pas appor­té de quoi man­ger, et sinon, le plus sou­vent, c’était froid. Il fal­lait que je des­cende au rez-de-chaus­sée pour faire chauf­fer sa nour­ri­ture. Dans ces moments, il faut apprendre à se taire, sinon la prise en charge de Gabriel aurait pu en pâtir.

  • Fermetures de lits à l’hôpital : l’inquiétude remonte chez les soignants
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/12/28/fermetures-de-lits-a-l-hopital-l-inquietude-remonte-chez-les-soignants_60646


    Lors de l’allocution télévisée de Jean Castex sur la situation épidémique, visionnée à la polyclinique Jean-Villar, à Bruges (Gironde), le 3 décembre.
    PHILIPPE LOPEZ / AFP

    Après la première vague de l’épidémie de Covid-19, Olivier Véran s’était engagé à mettre fin au « dogme » des réductions des capacités des établissements. Sur le terrain, les syndicats estiment que rien n’a changé, pour l’instant.

    Les fermetures de lits dans les hôpitaux, dans le cadre des projets de restructuration, sont-elles vraiment de l’histoire ancienne ? Au plus fort de la première vague de l’épidémie, en avril, le directeur de l’agence régionale de santé (ARS) du Grand-Est, Christophe Lannelongue, a eu le malheur de défendre le plan alors en cours au CHRU de Nancy, qui comprenait des centaines de suppressions de lits et de postes. Une faute politique, en temps de Covid-19.

    Le haut-fonctionnaire a été remercié, quelques jours après ses propos – un limogeage que le Conseil d’Etat a jugé irrégulier, dans une décision du 10 décembre. Le ministre de la santé, Olivier Véran, a assuré dans la foulée que « tous les plans de réorganisation » étaient « évidemment suspendus ». Il n’a cessé de le marteler depuis : c’en est fini du « dogme de la réduction des lits » qui prévalait lors des grands projets de transformation hospitalière.

    Mais, huit mois plus tard, sur le terrain, l’inquiétude remonte chez les soignants, les responsables d’hôpitaux, et les élus locaux. « Rien n’a changé », estime-t-on dans les rangs syndicaux : « Les projets se poursuivent comme avant, alors que la crise a bien montré que ce n’était plus possible », clame Christophe Prudhomme, de la CGT Santé. Lui comme d’autres égrènent les plans Copermo toujours en cours à Paris, à Nantes, à Caen, à Nancy… avec 100, 200, 300 suppressions de lits en perspective.

    « Projet par projet »
    #Copermo : ce sigle est devenu synonyme d’économies pour l’hôpital. Le Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers a été créé en décembre 2012 pour accompagner les hôpitaux dans leurs « projets d’investissement d’ampleur exceptionnelle », peut-on lire sur le site du ministère de la santé, selon des « critères exigeants en termes d’efficience », de « soutenabilité financière » et de « valeur ajoutée », et dans leurs « trajectoires de retour à l’équilibre ». Autrement dit, de gros projets de modernisation assortis d’un engagement à faire des économies. Une « boîte noire », ironise-t-on chez les hospitaliers. « Personne n’a jamais eu de contacts directs avec eux », rapporte un responsable d’établissement.

    • Olivier Véran a décidé de sa suppression cet été, lors des annonces du Ségur de la santé, et de son remplacement par un « conseil national de l’investissement », pour valider les projets supérieurs à 100 millions d’euros. « Les projets avancent, les nouvelles modalités d’accompagnement des investissements sont en train d’être expérimentées », assure-t-on au ministère.

      De premiers « feux verts » de ce futur conseil sont attendus début 2021 pour des projets revisités à l’aune du nouveau paradigme. Le taux de marge brute à « 8 % » ou encore la réduction automatique d’au moins « 15 % » des capacités en lits ne seront plus l’alpha et l’oméga de chaque projet, assure-t-on au ministère.

      Lire l’éditorial du « Monde » : Le Ségur de la santé, un tournant dans la politique hospitalière [ouarf ouarf]
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/07/22/segur-de-la-sante-un-tournant-dans-la-politique-hospitaliere_6046939_3232.ht

      Cela n’exclut pas, néanmoins, toute suppression de lits dans les mois à venir : « Le renversement est très clair, il n’y aura plus de critères imposés dans un pur objectif financier d’économies, dit-on au ministère. Ce sera projet par projet, selon les besoins, les projections d’activité et l’évolution de la médecine, qui permet des prises en charge plus courtes, et parfois d’aller vers moins de lits d’hospitalisation complète et plus d’ambulatoire [prise en charge sans hospitalisation] quand cela est pertinent. »

      « On ne veut plus l’entendre »

      Dans les hôpitaux, où l’on a surtout retenu la « fin » des fermetures de lits, le changement de ligne tarde à se matérialiser. « On en est nulle part », assure Christian Rabaud, président de la commission médicale d’établissement (CME) du CHRU de Nancy, où un rebond épidémique se fait déjà sentir, avec une augmentation des patients Covid depuis plusieurs semaines. « C’est très lourd pour la communauté médicale, actuellement la tête sous l’eau, et qui ne dispose toujours pas de perspectives pour la suite, souligne l’infectiologue. Le Covid a bien montré qu’on ne peut pas éternellement faire plus avec moins. »

      Le projet immobilier nancéien, qui représente plus de 500 millions d’euros d’investissement, prévoit le rassemblement du centre hospitalier, éclaté sur plusieurs sites souvent vétustes, sur le site de Brabois, assorti d’une réorganisation, avec 598 suppressions de postes et 179 lits de moins d’ici à 2024.
      La direction de l’hôpital et la commission médicale de l’établissement ont repris la copie à la rentrée. Mais les réunions avec l’ARS Grand-Est, toujours accompagnée du cabinet de conseil Capgemini, demeurent « tout aussi bloquées » qu’auparavant, estime le professeur Christian Rabaud. « Les choses ne sont pas claires, on nous demande de continuer à rendre des personnels et des lits pour faire des gains d’efficience, ça, on ne veut plus l’entendre, dit-il. On ne parle toujours pas la même langue, on nous demande encore : “Mais comment vous allez faire pour vous payer ceci ou cela ?” »

      Article réservé à nos abonnés Lire aussi Des restructurations au coronavirus, l’apport controversé des cabinets de consulting à l’hôpital

      D’après la direction de l’hôpital, 500 emplois et 300 lits ont déjà été supprimés dans cette restructuration qui a commencé il y a sept ans – dont 204 postes et 78 lits en 2019 et en 2020. « La situation est assez inconfortable et participe à une certaine morosité, reconnaît le directeur général, Bernard Dupont. Olivier Véran s’est exprimé clairement, mais la déclinaison prend du temps… »

      « Lassitude »

      « Il est urgent de sortir de l’ambiguïté », insiste Mathieu Klein (PS), maire de Nancy et président du conseil de surveillance de l’hôpital, qui s’oppose à ces réductions de lits et de postes, qu’il entend encore comme une « demande tacite » lors des discussions avec les autorités sanitaires. « La crise due au Covid a engendré une lassitude du monde hospitalier à un niveau inquiétant, personne ne comprend cet attentisme et cette hésitation. »

      A l’ARS Grand-Est, on indique que le dossier, retravaillé depuis l’été, est « en cours de finalisation », « en anticipation des nouvelles modalités de gestion des investissements issues du Ségur » , intégrant une « appréciation “cousue main” des critères de dimensionnement par rapport aux besoins de santé du territoire et pour tirer les leçons de la gestion de la crise du Covid ». Le projet fera partie des premiers dossiers examinés par la nouvelle instance nationale, début 2021.

      « Si c’est pour mettre en place une nouvelle structure qui prendra les mêmes décisions comptables, cela ne va pas être possible », prévient Arnaud Robinet, maire (Les Républicains) de Reims et président du conseil de surveillance du CHU de Reims. L’élu de droite multiplie lui aussi les appels, au plus haut sommet de l’Etat, sans avoir reçu d’ « engagement » à ce jour. Ainsi, 184 suppressions de lits sont prévues dans les futurs bâtiments de ce CHU, soit 24 % des capacités, souligne l’édile, initialement favorable au projet. « Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis », dit-il aujourd’hui.

      Un nouveau projet est sur la table, assure le professeur Philippe Rieu, président de la CME, sans la centaine de suppressions de lits prévue dans le second bâtiment (la construction du premier est déjà enclenchée). « Nous sommes en train de chiffrer le supplément avec l’ARS, ajoute la directrice générale, Dominique de Wilde. Notre ministre a dit : “Plus de suppressions de lits”. Moi je crois ce que dit notre ministre. »

      L’espoir est moindre en Ile-de-France

      L’espoir est moindre en Ile-de-France, sur le projet d’hôpital Grand Paris-Nord, porté par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), qui doit rassembler, à l’horizon 2028, les hôpitaux Beaujon (Clichy, Hauts-de-Seine) et Bichat (Paris) à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis). « Cela devient très concret », dit le cardiologue Olivier Milleron, qui siège dans les commissions d’évaluation du projet architectural. Mais rien n’a été remis en question, ou presque, d’après le médecin membre du Collectif inter-hôpitaux : sur les 350 suppressions de lits prévues, soit 30 % du total, l’AP-HP a annoncé que 84 lits seraient maintenus, et 94 autres mais sous forme « flexible » : « Ça ne nous satisfait pas du tout, on est toujours très loin du compte. »

      Le projet ne devrait néanmoins pas avoir besoin de repasser devant une instance nationale : il fait partie de la dizaine d’ex-Copermo les plus avancés, qui ont obtenu validation définitive. Pour ces projets, si des ajustements sont jugés nécessaires, ils pourront être demandés par les directions d’établissement directement auprès des ARS, indique-t-on au ministère. Sollicitée, l’AP-HP n’a pas souhaité répondre à nos questions.
      C’est l’ensemble de l’ « idéologie » derrière ce projet qu’il faut pourtant remettre en question, dénonce Olivier Milleron, qui signait dans Libération, en mai, une lettre ouverte au président de la République, avec une centaine de collègues et d’usagers : « Le nombre de lits dans le futur hôpital est basé sur un taux d’occupation de ceux-ci à 95 %, avec une durée moyenne de séjour des patients 30 % inférieure à la moyenne nationale, c’est démentiel », dit-il.

      Lire aussi la tribune d’un collectif de personnels hospitaliers et d’usagers : Hôpital Grand Paris Nord : « Nous demandons au ministre de la santé d’intervenir afin que le projet soit à la mesure des besoins de la population »

      Pour le sociologue Frédéric Pierru, coauteur de La Casse du siècle. A propos des réformes de l’hôpital public (Raisons d’agir, 2019), « la crise du Covid a jeté une lumière crue sur l’inanité de cette doctrine d’un hôpital géré “à flux tendu”, sans aucune marge de manœuvre. Nous avons quand même dû confiner le pays parce que notre nombre de lits en réanimation avait toujours été calculé au plus juste », juge-t-il.

      La question des ressources humaines

      Le « mirage » du virage ambulatoire, qui permettrait sans difficulté de réduire l’hospitalisation, est critiqué de toute part. « C’est vrai que l’hospitalisation peut être plus courte qu’avant pour certaines pathologies, mais nous gardons justement à l’hôpital des malades très lourds, pour lesquels on ne peut pas faire d’ambulatoire », relève Marie-Astrid Piquet, gastro-entérologue au CHU de Caen.

      La professeure passe déjà son temps à chercher des places aux patients qu’elle doit hospitaliser. « Nous n’avons jamais un lit vide, une dizaine de nos malades sont en permanence en chirurgie, faute de place dans notre service », rapporte la membre du Collectif inter-hôpitaux. Ici, 200 lits de moins sont prévus dans le projet de restructuration.

      Les élus de la région sont montés au créneau, à l’été. La sénatrice centriste du Calvados, Sonia de La Provôté, attend toujours une réponse au courrier envoyé avec quatre autres parlementaires normands du Parti socialiste et de La République en marche, en mai, au ministre de la santé, lui demandant de revoir le projet. « La crise a bien montré combien il était nécessaire d’avoir un volet de lits mobilisables pour l’urgence, insiste l’élue, médecin de profession. Derrière les lits, surtout, ce sont des ressources humaines, qui ne peuvent pas être la “denrée rare” en matière sanitaire. »

      A Nantes, où le chantier doit commencer en janvier, un collectif de syndicats, d’associations et de mouvements politiques s’est constitué et a recueilli quelque 2 000 signatures dans une pétition lancée mi-novembre, demandant à mettre « sur pause » le projet de transfert du CHU. « Tant que la première pierre n’est pas posée, on peut encore changer les choses », défend Olivier Terrien, de la CGT, qui dénonce les 202 lits en moins prévu dans ce déménagement sur l’Ile de Nantes, à l’horizon 2026. « Il n’y a eu aucun changement de braquet depuis la crise, lâche-t-il. Les derniers documents de la direction confirment qu’on se dirige vers ces suppressions de lits, alors qu’on est déjà sous-dimensionné. »

      Lire aussi : La doctrine de la fermeture des lits à l’hôpital « est venue se fracasser sur l’épidémie »

      A Marseille, le projet de restructuration, déjà très avancé, ne devrait pas être modifié, ce que défend la direction de l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, malgré les 150 suppressions de lits prévues.

      « Dans le cadre actuel des bâtiments, c’est difficile de faire mieux, souligne le directeur général, Jean-Olivier Arnaud. On ne veut pas recommencer un cycle de négociations qui retarderait le début des travaux, cela fait tellement longtemps qu’on attend, nos locaux sont tellement obsolètes… » Le directeur espère obtenir un soutien dans d’autres opérations, dans le cadre du prochain plan d’investissement.

      Ce classique où la bureaucratie fait du chantage, efficace : faites ce qu’on vous dit de faire, sinon vous aurez encore moins de moyens (par exemple des travaux à Marseille) et devrez toujours plus pallier par l’abnégation le dénuement organisé pour arriver à répondre un tant soit peu aux besoins..

      #hôpital #économie #virage_ambulatoire #santé_publique

  • Analyse critique du soin psychiatrique - Paris-luttes.info
    https://paris-luttes.info/analyse-critique-du-soin-14558

    Analyse critique du soin psychiatrique

    Trash Psychiatrie

    2020

    Ces lignes n’ont rien d’exhaustives, ne révèlent rien d’exceptionnel, elles dessinent le paysage psychiatrique nauséabond d’une réalité courante, dont le centre est partout et la circonférence nulle part, tant la santé mentale est devenue un marché juteux pour les laboratoires mais aussi pour certaines personnalités perverses qui exercent le contrôle de nombreux pôles de « soins ».
    J’ai bossé onze piges dans une « taule à soin » (un #hôpital) avant de calter. J’en rapporte quelques éléments factuels bien cradingues. Excusez l’expression.

    En psychiatrie, la formule si commode « pôle de soin » prend factuellement une signification quasi-paradoxale, elle affirme ce qu’elle nie. On prétend soigner, mais c’est l’emprisonnement qui prévaut (et son alter-ego : le bénéfice financier pour l’hosto). Le point d’orgue du pôle n’est pas médical, ne jamais l’oublier : c’est une entité d’abord gestionnaire aux ordres d’un directeur financier. Cette novlangue médico-sociale aura brouillé bien des pistes de compréhension.
    L’hôpital général est regroupé par secteurs : diabétologie, oncologie, gériatrie, psychiatrie, etc… mais d’autres instances ont préféré nommer cela des « pôles ». Nul doute que des psycho-linguistes ont durement réfléchi sur l’architecture syntaxique du caractère neutre et innocent de ce signifiant (pour causer comme les chairs à divan). Pôle, c’est plus pratique à dire, plus usuel, l’odeur du fric ne suinte pas.
    Une société vraiment civilisée, si ses dirigeants en avaient eu le désir, aurait su bâtir un système de soins gratuits (vraiment gratuit) pour ceux qui n’ont pas un flèche. Mais non ! Le conte bleu garde sa force propulsive quand il s’agit d’artiche.

    Donc, pour mémoire, rappelons qu’avant les années 2000, chaque hosto recevait une enveloppe globale annuelle sans (trop) d’obligation de résultats. Puis en 2009 l’ère barbare survint (elle eut des antécédents dès 2004), la présidence du « gagner plus » sut imposer sa loi plus férocement encore. C’est là que le gentil Ministère de la Santé a tout balayé. Dorénavant pour toucher sa maille, pour payer ses salariés, l’hôpital doit faire du chiffre, de la quantité. Les toubibs de tous poils doivent désormais produire de plus en plus d’actes médicaux, du plus stupide pansement au plus tragique mal incurable ! Comme cette pauvre femme d’un hôpital parisien, patiente condamnée mais dont le chirurgien sut convaincre la famille que l’opération était nécessaire. Nécessaire pourquoi ? Souffrances inutiles. Les obsèques eurent lieu deux mois après l’opération. « Bravo la démarche qualité ».
    Une collecte fut-elle versée pour couvrir les frais d’obsèques ? Macache. Une victoire se partage rarement en matière de biftons.

    Vous aurez saisi que « pôle » désigne ce vaste continent des administratifs enrégimentés, médecins collabos en herbe, comptables conscients de leur mission d’exécutants (il y a des exceptions, comme partout. Je tape sur la règle pas sur l’exception). Et inutile de penser aux syndicats ou au CHSCT pour vous défendre si vous trimez à contre-courant (en vous scandalisant), inutile d’espérer vous sentir écouté. Non ! surtout pas.
    Il y a l’entretien d’évaluation annuel (épistémologiquement nul et le plus souvent humiliant), l’entretien disciplinaire, l’isolement (l’opprobre), la mise à pied et la porte si vous ne suivez pas le rythme. Se jeter sur les rails s’effectue en dehors du périmètre de l’hôpital. Les services, les soignants, bien que maltraités (moins que les patients, il va sans dire) n’en restent pas moins les bons soldats de la bureaucratie. Services frileux, geignards à qui on accorde de temps en, temps une petite grève, mais grève minuscule, qui ne sert à rien, ne révolutionne rien, ne casse rien. Car rien ne bouge dans le monde des statues.

    #psychiatrie #management

    • LA PSYCHIATRIE SOUS CONTENTION FINANCIÈRE - Jef Klak
      Patient⋅es et soignant⋅es face aux lambeaux de l’hôpital public
      https://www.jefklak.org/la-psychiatrie-sous-contention-financiere

      Cela fait plus de dix ans que le monde du soin psychiatrique en France est entré en résistance contre le programme de contrôle de la #folie que les personnes en lutte qualifient de « nuit sécuritaire ». Ce tournant idéologique, initié par un discours de Nicolas Sarkozy fin 2008 prêchant les #soins sous contrainte, s’est appuyé par la suite sur une profonde réorganisation du travail en hôpital : politique d’austérité budgétaire, introduction de techniques de management et de démarches « qualité », etc. Si bien que des collectifs de soignant·es – comme Les perchés du Havre, Pinel en lutte ou Les Blouses noires – se joignent à présent aux patient⋅es pour crier leur écœurement devant le retour des pratiques les plus inhumaines de l’univers asilaire.

      Une bonne entrée pour creuser davantage, le site du collectif psychiatrie - COLLECTIF DES 39 CONTRE LA NUIT SÉCURITAIRE
      https://www.collectifpsychiatrie.fr

      #droit_à_la_folie

  • Malgré les déclarations d’Olivier Véran, suppressions de lits et fermetures d’hôpitaux se poursuivent - Basta !
    https://www.bastamag.net/Olivier-Veran-veut-sortir-du-dogme-des-fermetures-de-lits-voici-la-carte-f

    3400 lits hospitaliers ont été fermés en 2019, 4000 en 2018. Ces fermetures s’ajoutent aux 69 000 places d’hospitalisation à temps complet qui ont disparu entre 2003 et 2017 [2]. Il y a un mois Basta ! établissait une carte des suppressions de lits d’hôpitaux engagées ces dernières années. Ces suppressions ont encore lieu ces derniers mois, comme à l’hôpital de Juvisy, en région parisienne : 50 lits d’hospitalisation ont été fermés fin septembre alors qu’ils avaient accueilli des malades du Covid lors de la première vague, selon le collectif de défense des hôpitaux du Nord-Essonne. À Nancy, la suppression prévue de près de 200 lits au CHU sera-t-elle maintenue malgré la crise sanitaire ? Le 22 novembre, le maire socialiste de Nancy, Mathieu Klein, a demandé au ministre de la Santé de confirmer sans ambiguïté l’abandon des suppressions de lits à l’hôpital lorrain.

  • A Argenteuil, des malades du Covid-19 rentrent plus vite chez eux grâce à l’oxygénothérapie à domicile
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/12/02/a-argenteuil-des-malades-du-covid-19-rentrent-plus-vite-chez-eux-grace-a-l-o

    Depuis la mi-octobre, 140 patients ont été pris en charge par l’unité Covid-19 du centre hospitalier et suivis quotidiennement par des infirmières à domicile.

    Il y a quinze jours, Lucien Joyes a ressenti « un grand froid dans la nuit ». Il ne le savait pas encore, mais il s’agissait des premiers symptômes du Covid-19. Après deux courtes hospitalisations de cinq et trois jours au centre hospitalier (CH) d’Argenteuil, dans le Val-d’Oise, il est désormais soigné dans son appartement. Au pied de son lit installé dans le salon, contre la fenêtre et face à la télévision, une machine lui propulse de l’oxygène dans les narines par le biais d’un long tube en plastique.

    « J’ai une famille qui m’entoure, ils sont aux petits soins et font tout pour me rendre la vie agréable », dit en souriant l’homme de 70 ans, soulagé d’être sorti de l’hôpital qu’il ne connaît que trop bien, ses différents problèmes de santé l’ayant déjà mené les années passées dans les services de neurologie, de cardiologie et de pneumologie.

    Si Lucien a pu rentrer chez lui si vite, c’est grâce au dispositif d’oxygénothérapie à domicile mis en place par le centre hospitalier d’Argenteuil depuis la mi-octobre pour faire face à la deuxième vague de l’épidémie.

    Une petite équipe d’infirmières et d’aides-soignantes se partage une trentaine de patients sur un territoire allant de Sannois à Carrières-sur-Seine et d’Herblay à Gennevilliers, dans un rayon d’environ 8 kilomètres autour d’Argenteuil. Tous les matins, elles se rendent au domicile des malades passés par l’hôpital et dont l’état a été jugé assez bon pour leur permettre de finir chez eux leur sevrage en oxygène.

    Au bout de dix à quinze jours en général, si leur saturation en oxygène, c’est-à-dire leur taux d’oxygène dans le sang, devient supérieure à 94 %, ils passeront à un suivi téléphonique quotidien, jusqu’à leur complète guérison. La société Vitalaire viendra alors récupérer les extracteurs d’oxygène mis à leur disposition.

    « Ça m’a soulagée de rentrer chez moi »

    Pour leur tournée, Cécile Hubert, infirmière depuis vingt-sept ans au CH d’Argenteuil, et Natalia Pereira da Silva, aide-soignante depuis 2003, ont une routine bien au point. Devant le domicile de chaque patient, Natalia passe à Cécile, en plus de son masque, les différents équipements nécessaires à sa protection et à celle du malade : charlotte, surblouse, surchaussures et gants. Le tout sera jeté à la poubelle à la fin de chaque consultation.

    Pendant que Cécile mesure la tension, les fréquences respiratoire et cardiaque, la saturation en oxygène et prend la température du malade, Natalia note tout sur une fiche de suivi. Des données qui seront ensuite entrées sur la plate-forme Terr-eSanté, un outil de coordination, d’échange et de partage d’informations entre professionnels de santé pour assurer le suivi optimal des patients.

    Si ce dispositif demande une grande organisation, il représente un avantage sans conteste pour les personnes désireuses de quitter l’hôpital, à l’image de Françoise Tourbin, 73 ans. « C’est bon, les hôpitaux j’y vais trop fréquemment », souffle cette grande fumeuse qui vient de se faire opérer du cœur. Après plus d’un demi-siècle de cigarette, elle venait juste d’arrêter de fumer quand elle a attrapé le Covid-19. Après un passage éclair à l’hôpital le temps d’un bilan de santé, elle accueille désormais les soignantes à la porte de son petit pavillon sans tube d’oxygène dans le nez.

    Comme tous les soignés à domicile, son oxygénothérapie était accompagnée de corticoïdes en cachet et de piqûres d’anticoagulant réalisées par une infirmière libérale. Un traitement que l’on sait, depuis la première vague, efficace contre la maladie.

    A Montigny-lès-Cormeilles, Josiane Loyot accueille aussi ses visiteuses sans oxygène, mais elle est gentiment rappelée à l’ordre car sa saturation n’est pas encore jugée assez bonne. « A l’hôpital, j’ai été mal reçue. Ils ont du boulot et nous, les patients, on est plus ou moins chiants, mais ça se voit qu’ils n’en peuvent plus, les soignants. J’ai demandé à sortir, ça m’a soulagée de rentrer chez moi », raconte cette femme de 72 ans entre deux plaisanteries. Quand son fils sera reparti sur son chantier en Côte d’Ivoire, elle fera appel au service de portage de repas à domicile mis en place par la mairie pour les personnes âgées.

    Lits libérés pour d’autres malades

    « Quand on est à l’hôpital, on est contraints par une institution », opine Catherine Le Gall, chef des urgences du CH d’Argenteuil, qui reconnaît que les malades sont contents de rentrer plus vite chez eux. La coordinatrice du dispositif de suivi à domicile dresse un bilan positif de cette expérience : sur 140 patients pris en charge depuis la mi-octobre, aucun n’est mort à domicile et seulement 10 % d’entre eux ont eu besoin de repasser par l’hôpital, essentiellement pour des examens complémentaires. « Cent dix malades, c’est l’équivalent de l’activité d’un service de trente lits », souligne-t-elle. Autant de lits libérés pour d’autres malades, dans un hôpital qui voit passer dans ses urgences de 160 à 200 personnes par jour.

    A Argenteuil comme partout en France, la question du nombre de lits disponibles pour accueillir l’afflux de nouveaux patients atteints du Covid-19 était au cœur de toutes les préoccupations cet automne. D’autant plus dans un département comme le Val-d’Oise, touché très gravement par la première vague. Au printemps, « l’hôpital a été submergé, tout a été déprogrammé et ça a désorganisé les soins, se souvient Catherine Le Gall. Alors, pour cette deuxième vague, on n’a pas voulu vivre la même chose ».

    De mars à mai, l’hôpital comptait 200 lits réservés au Covid-19, dont quarante en réanimation, tandis que, de septembre à novembre, seulement 75 « lits Covid » ont été ouverts, dont dix-huit en réanimation. Au pic de la première vague, les soignants ont dû gérer 242 patients en même temps, tandis que, à celui de la deuxième vague, 91 malades du Covid-19 se trouvaient à l’hôpital.

    Une situation observée dans l’ensemble du Val-d’Oise, dernier département français avec Mayotte à passer en vert sur la carte du déconfinement à la fin mai. Quand le territoire comptait 180 lits de réanimation occupés par des patients du Covid-19 le 8 avril, ils n’étaient plus que 70 à la mi-novembre.

    « La trajectoire est bonne mais l’objectif n’est pas atteint », souligne toutefois Anne Carli, déléguée départementale du Val-d’Oise de l’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France, qui ne veut pas se féliciter trop tôt de la fin de cette deuxième vague. « On est encore très loin du seuil d’incidence de cinquante nouveaux cas par semaine pour 100 000 habitants, qui constitue le seuil d’alerte. »

    Qualité du lien entre la médecine de ville et l’hôpital

    Les raisons pour lesquelles cette deuxième vague s’est mieux passée que la première sont nombreuses, et notamment la meilleure prise en charge des malades grâce aux corticoïdes, aux anticoagulants et une oxygénothérapie préférée à l’intubation.

    « La grande différence entre les deux vagues, c’est la qualité du lien entre la médecine de ville et l’hôpital », appuie également Anne Carli. Au printemps, c’est en effet surtout l’hôpital qui a été en première ligne pour faire face à cette maladie infectieuse émergente, avec des professions libérales plus difficilement associées. « Mais le Val-d’Oise a beaucoup investi sur le lien ville-hôpital », explique la déléguée départementale, notamment par le biais de l’outil Terre-eSanté mis à disposition par l’ARS d’Ile-de-France depuis plus d’un an, mais dont les professionnels de santé peinaient à s’emparer. « Cette crise a rendu l’outil indispensable », insiste Anne Carli.

    Un constat partagé par Catherine Le Gall, dont les équipes ont commencé à utiliser l’outil avec le Covid-19. « Il permet de mettre en place un parcours de soins coordonnés entre différents professionnels de santé », explique-t-elle. Par exemple, dans le cas d’un suivi de Covid-19, sont mis en relation autour d’un même patient le médecin des urgences, son infectiologue, son médecin traitant, les infirmières, le centre de télésurveillance, et un pneumologue quelques mois plus tard. Le malade a également accès à son dossier et peut informer ses médecins de ses nouveaux symptômes.

    « Dans le futur, il faudrait créer des cercles de soins pour d’autres pathologies », s’enthousiasme Catherine Le Gall. Pour gérer le Covid-19, « un médecin seul dans son coin, c’est dangereux, et l’hôpital seul, c’est un canard boiteux. Le lien entre la ville et l’hôpital, c’est l’avenir pour les malades ». D’autant plus dans une région comme l’Ile-de-France frappée par la désertification médicale.

    #covid-19 #HAD #médecine_de_ville #hôpital #santé-publique

    • Débat d’experts autour de l’oxygénothérapie à domicile
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/12/02/debat-d-experts-autour-de-l-oxygenotherapie-a-domicile_6061896_3244.html

      De nombreux spécialistes estiment que les recommandations de la Haute Autorité de santé concernant une prise en charge à domicile sont « dangereuses ». Par Delphine Roucaute

      Faut-il encourager la prise en charge des personnes atteintes du Covid-19 à domicile, même quand elles ont besoin d’apports constants en oxygène ? Pour répondre à cette question, la Haute Autorité de santé (HAS) a publié un ensemble de recommandations pratiques, le 9 novembre, au moment où les services hospitaliers étaient submergés par la deuxième vague. L’institution estime que cette prise en charge doit être réservée à deux situations : d’abord pour les patients hospitalisés et pouvant achever leur sevrage en oxygène à domicile, donc en aval de l’hôpital, et ensuite pour les malades non hospitalisés, mais ayant néanmoins des besoins en oxygène, donc en amont de l’hôpital.

      Les critères d’éligibilité au dispositif sont les mêmes pour les deux types de patients. D’abord, un environnement favorable, c’est-à-dire un domicile salubre, à moins de 30 minutes d’un hôpital et du SAMU, la présence d’un tiers vingt-quatre heures sur vingt-quatre et l’accompagnement d’une équipe de médecins. Mais aussi des critères liés au patient, qui ne doit pas avoir une saturation en oxygène trop basse ni de contre-indication signalant des risques de forme grave de la maladie (diabète, insuffisance rénale, etc.).

      Appel à la prudence

      Ces recommandations, pourtant très contraignantes, ont été jugées insuffisantes par plusieurs spécialistes. Dans un Tweet, la Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF) a déclaré que « le maintien à domicile de patients devenant oxygénorequérants est dangereux ». Dans le même temps, la Société de pneumologie de langue française a appelé à la prudence et publié ses propres « rappels réglementaires et techniques », insistant sur la nécessité d’un encadrement par un pneumologue, alors que la HAS place la responsabilité de coordination entre les mains des médecins généralistes.

      Si l’oxygénothérapie en aval de l’hôpital fait plutôt consensus parmi les spécialistes, c’est bien l’opportunité d’une prise en charge directement à domicile qui fait débat. Le président de la SPILF, Pierre Tattevin, explique cette différence : « Dans le cas du Covid, quand on commence à avoir besoin d’oxygène à domicile, c’est que ça commence à être grave. Même à l’hôpital, c’est difficile à suivre. » Par ailleurs, insiste-t-il : « Organiser le suivi du patient en lien avec un généraliste, c’est compliqué. Il y a un risque de manque de réactivité en cas de problème. »

      « Sur le fond, on est d’accord que l’oxygénothérapie en amont est risquée et relève de l’exceptionnel ; ces recommandations sont là pour créer des repères et fixer le cadre si ce genre de cas se présente pour des médecins généralistes », explique Paul Frappé, président du Collège de la médecine générale, qui a participé au groupe de travail mis en place par la HAS. Car ces cas existent déjà, souvent à la demande de patients ne désirant pas entrer à l’hôpital. Près de 30 000 patients atteints du Covid-19 requérant une oxygénothérapie ont été pris en charge par les prestataires de santé à domicile (PSAD), 20 000 au cours de la première vague et 10 000 au cours de la seconde. Les prescriptions d’oxygénothérapie émanant de médecins généralistes n’ont pas dépassé 5 % des patients lors de la seconde vague, selon le président de la Fédération des PSAD.

      Il ne faut pas oublier que ces recommandations sont émises en situation de crise sanitaire, pour désengorger les services hospitaliers. « L’oxygénothérapie à domicile est un moyen de conserver les chances des patients en cas de saturation des services », et notamment dans l’éventualité d’une troisième vague, fait ainsi valoir de son côté Jean-Pierre Thierry, conseiller médical de France Assos Santé, organisation représentant les patients.

      « Une demande des patients »

      De l’avis d’Aurélien Dinh, praticien dans le service des maladies infectieuses de l’hôpital Raymond-Poincaré (AP-HP) et l’un des créateurs du dispositif Covidom (télésurveillance des patients atteints de Covid-19) de l’AP-HP, ces recommandations « ne sont pas suffisamment prudentes, car il y a souvent une aggravation brutale de l’état du patient après sept jours de maladie ». Pour autant, l’équipe qui a pris en charge en aval de l’hôpital 75 malades oxygénorequérants lors de la première vague, sans aucun décès ni réhospitalisation, est prête à tenter l’expérience.

      L’équipe de Covidom a ainsi engagé une réflexion pour les patients qui ont besoin d’une oxygénothérapie à moins de 2 litres d’oxygène, âgés de moins de 65 ans et sans comorbidité particulière. « Nous pourrions les hospitaliser de vingt-quatre à quarante-huit heures pour les évaluer, faire un bilan biologique, puis mettre en place le dispositif à domicile, s’assurer qu’ils seront entourés », explique le docteur Dinh.

      Si la présidente de la HAS, Dominique Le Guludec, reconnaît une communication un peu hâtive, elle ne compte pas revenir sur les préconisations et préfère traiter directement avec les sociétés savantes. « Il faut faire confiance aux médecins, on a besoin de toutes les forces disponibles. Dès qu’on voit que l’état du patient ne s’améliore pas rapidement, il faut passer la main à l’hôpital », explique-t-elle. « On a précisé que la prise en charge directement à domicile en amont de l’hôpital est exceptionnelle, renchérit Catherine Grenier, directrice de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins à la HAS. Mais c’est aussi une demande des patients. Il est important de prendre en compte le caractère délétère de l’hospitalisation. »

    • Le truc, c’est que quand la sat des covidés s’enfonce, tu as 5-10 min pour lui sauver la peau. Alors que le patient ne se rend même pas compte qu’il est en train d’étouffer. C’est spécifique au covid19 et ça s’appelle l’hypoxie heureuse. Cette politique de HAD est purement criminelle dans ce contexte particulier.
      Mais ça fait de beaux chiffres de sorties d’hosto et ça sort les gus des stats de mortalité covid.

      https://association-victimes-coronavirus-france.org/quest-ce-que-lhypoxie-heureuse

    • Oui, enfin pas tout à fait puisque la controverse porte plutôt, contre une indication aussi vague que générale d’oxygénothérapie à domicile, sur le fait de préciser que c’est en aval des hospitalisations que celle-ci peut-être mise en oeuvre, après le pic éventuel de symptômes respiratoires.

    • En sachant que la soit disant hypoxie est réellement une hypoxémie , (baisse du taux d’oxygène dans le sang) qui n’est « joyeuse » que parce qu’elle n’entraîne pas, à ce stade, une hypoxie (organes insuffisamment fournis en oxygène).

      Une véritable hypoxie n’est jamais joyeuse.

      What We Have Learned About COVID-19 : Part One - Mass General Advances in Motion
      https://advances.massgeneral.org/pulmonary/article.aspx?id=1269

      Happy Hypoxia : Not Hypoxia and Not New

  • #Espagne : Madrid ouvrira son nouvel hôpital des pandémies en décembre
    https://information.tv5monde.com/info/espagne-madrid-ouvrira-son-nouvel-hopital-des-pandemies-en-dec

    ... certaines voix se sont élevées contre cet #hôpital, mettant en doute la nécessité d’un tel projet avec la crainte qu’il capte des ressources allouées aux autres hôpitaux, notamment en matière de personnel sanitaire.

    [...] la région n’a en effet pas prévu d’embauches, malgré l’ouverture de l’hôpital.

    Il y a deux semaines, l’autorité sanitaire de la région avait lancé un appel pour réunir 669 professionnels des autres centres madrilènes, afin de mettre en route le premier pavillon de l’hôpital.

  • « La peur s’est déplacée. Ce n’est plus celle du virus mais celle du confinement sans limite de temps », Journal de crise des blouses blanches
    https://www.lemonde.fr/journal-blouses-blanches/article/2020/11/21/journal-de-crise-des-blouses-blanches-la-peur-s-est-deplacee-ce-n-est-plus-c

    « On ne devrait pas admettre des patients en réanimation uniquement “parce qu’il y a des places” » . Nicolas Van Grunderbeeck, 44 ans, réanimateur au centre hospitalier d’Arras (Pas-de-Calais)

    « Le problème de la “dernière place” résume tous les problèmes éthiques de #réanimation. La crise a fait prendre conscience à tous de cette réalité, éloignée en temps normaux par une pratique de la médecine où l’on fait parfois “parce qu’on peut le faire”.

    Les capacités d’hospitalisation en soins critiques ont été augmentées partout grâce aux renforts, notamment celui des anesthésistes-réanimateurs et du personnel paramédical des blocs opératoires : merci à eux. Mais malgré cette extension, il ne reste, ce soir, qu’une place de réanimation pour la garde.

    On ne devrait pas admettre des patients en réanimation “parce qu’il y a des places”. Le temps change vite, comme en mer ou en montagne : on passe de cinq places à rien, et c’est à ce moment-là qu’arrive le ou la patiente qui en a absolument et immédiatement besoin. De même, comme pour tous les traitements, la réanimation inutile, pour un patient pas assez ou trop grave, comporte aussi ses effets indésirables : douleurs, anxiété, ou faux espoirs pour le patient, sa famille… Et les ressources utilisées pour les uns ne seront plus disponibles pour les autres.

    S’il y a toujours eu, en temps “normal”, des décisions d’admission ou de non-admission, la situation épidémique – et la limite des ressources disponibles – ont augmenté l’enjeu et le nombre de sollicitations. Contrairement à ce qui est parfois perçu, ce n’est pas évident de refuser des patients, encore moins quand c’est souvent. Les réanimateurs sont devenus les référents des limitations thérapeutiques, et on peut passer plus de temps, en garde, à exercer la “non-réanimation” que la réanimation elle-même.

    Depuis le printemps, nous avons appris à connaître un peu mieux la maladie, et aussi appris pour qui on peut espérer une vie après un syndrome de détresse respiratoire aigu lié au Covid. On en revient à l’essentiel : admettre des patients pour essayer de leur rendre une “vie vivable après” la réanimation. Pas pour faire plaisir à un collègue, à la famille, pas parce qu’une maladie incurable “a encore une possibilité de traitement”, pas pour “passer un cap” infranchissable, pas parce que certains estiment que c’est mieux de mourir en réanimation ou juste après, pas en raison d’une maladie d’organe ou de son traitement qui deviendraient plus importants que le patient lui-même.

    Ce “retour aux basiques” est probablement une des raisons de la motivation maintenue des équipes de soins critiques, sursollicitées, et qui répondent encore présent. C’est souvent, à l’inverse, les traitements inappropriés et les souffrances infligées qui nous font arrêter la réanimation.
    Voilà ce qu’il y a derrière les décisions de refus d’admission des réanimateurs. »

    « Je suis très préoccupée par le vécu des survivants et de leurs proches » . Aurélie Frenay, 36 ans, psychologue en réanimation au centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc à Lyon (Rhône)

    « Depuis quelques années, les services de réanimation s’adaptent pour s’ouvrir vingt-quatre heures sur vingt-quatre aux visites et aux entretiens avec les familles. Là, tout d’un coup, nous sommes revenus en arrière, et tout se ferme. Tout est à réinventer, et l’absence des visites a des effets importants sur l’état psychologique des patients et de leurs proches. Il faut créer des liens différents, être un médiateur, appeler les familles, parfois tenir le téléphone à l’oreille du patient, faire des vidéos avec des tablettes… On ne peut plus porter les gens par le regard, les mots, une main sur l’épaule. Jamais je n’aurais cru maintenir des liens avec des familles par SMS.

    On bricole, on fait ce qui marche. Mais il y a beaucoup de travail et cela m’arrive de retourner à l’hôpital le week-end, d’appeler les familles le soir. On ne peut pas aider tout le monde, c’est très frustrant. Il est difficile de renoncer.

    Je suis très préoccupée par le vécu des survivants et de leurs proches. Il y a des gens qui sont restés en réanimation pendant des mois et sont sortis juste avant la deuxième vague. Ils sont extrêmement marqués, avec des séquelles physiques et psychiques : troubles du sommeil, de l’alimentation, cauchemars… Ils vivent ce qu’on pourrait définir comme un état de stress post-traumatique avec une incapacité à reprendre une vie active, une place dans leur famille. Des bruits les font sursauter, tellement ils ont été marqués par les alarmes des machines pendant des jours. On commençait à revoir ces patients de la première vague mais on n’a plus le temps de le faire. »

    « Nos patients n’ont pas les moyens de se confiner correctement et nous n’avons aucune alternative à leur proposer » . Slim Hadiji, 46 ans, médecin généraliste dans le 13e arrondissement de Marseille

    « Cette semaine, j’ai rempli 49 fiches individuelles de détection Covid, j’ai dû hospitaliser deux patients en réanimation, et j’en ai un troisième qui vient de sortir des soins intensifs et bénéficie d’oxygène à domicile. Pour moi, l’épidémie ne ralentit pas.

    Je commence à être en rupture de tests antigéniques. Je n’arrive pas à obtenir mon quota de quinze tests par jour. J’essaie de me débrouiller avec mes collègues, mais beaucoup de mes confrères aux alentours n’ont pas leur dotation non plus. Est-ce un problème d’approvisionnement des pharmacies, d’anticipation de commandes ? Ou est-ce que cela signifie qu’on sera servis au compte-gouttes ? C’est un problème, car ces tests m’ont déjà permis de détecter une bonne vingtaine de cas positifs.

    Les contaminations que j’observe dans mon cabinet sont exclusivement d’origine intrafamiliale. Il suffit d’un cas positif, souvent une personne qui ramène le Covid de son lieu de travail, pour que toute la famille soit touchée. Notre difficulté est toujours la même : dans les quartiers populaires, nos patients n’ont pas les moyens de se confiner correctement chez eux et nous n’avons aucune alternative à leur proposer.

    La semaine dernière, je demandais une feuille de route pour les généralistes. Le 13 novembre, j’ai reçu un pavé de 22 pages du ministère de la santé qui définit une vision globale. Malheureusement, il n’y a toujours pas de fiche simple pour ma pratique quotidienne. Et je suis encore obligé de m’en remettre à mes contacts hospitaliers pour les patients diabétiques, hypertendus… Nous, généralistes, avons plein de questions. Qu’est-ce que je dois arrêter, qu’est-ce que je dois prescrire, qu’est-ce que je dois surveiller ? J’ai besoin d’aide. Il faut que les gens aient autant de chances d’être bien soignés qu’ils soient hospitalisés à Paris, Lille ou pris en charge dans les quartiers populaires de Marseille.

    Quand je prescris des bilans biologiques, je vois des dégradations importantes, des atteintes hépatiques, des facteurs de coagulation très perturbés. Si un patient venait me voir, hors Covid, avec un tel bilan, je prendrais peur. Ce virus fait des choses qu’une autre maladie n’a pas l’habitude de faire. Le risque thromboembolique y est très important. C’est inimaginable de ne pas proposer systématiquement un #bilan_biologique aux patients Covid au-delà de la quarantaine. On éviterait pas mal de passages en réanimation. »

    « Moralement, c’est lourd. On s’identifie aux patients : 50-60 ans, c’est l’âge de mes parents » . Lucas Reynaud, 30 ans, interne en réanimation à l’hôpital de Montélimar (Drôme)

    « En début de semaine, je pensais qu’on avait passé le pic dans le service, que le plateau était atteint. Mais, dans la nuit de mercredi à jeudi, trois nouveaux malades du Covid sont arrivés, et le projet de la baisse de charge est pour le moment repoussé.

    J’ai eu trois décès en cinq jours, dont un monsieur qui était arrivé en même temps qu’un autre, avec les mêmes antécédents. L’un est toujours dans le coma, le second n’a pas survécu. Il avait 76 ans. Deux semaines auparavant, il était sans machine, les jambes croisées dans son lit… Une dame de 56 ans a dû être transférée à Lyon car elle avait besoin d’un appareil plus sophistiqué pour soulager son cœur et oxygéner son sang. J’ai aussi fait une entrée gravissime, une femme renversée par une voiture.

    « Le soir, entre jeunes médecins, on se raconte nos cas, nos difficultés, nos interrogations. Cela nous sert de psychothérapie de groupe »
    En expérience humaine, pathologies rencontrées et gestes pratiqués, ce que je vis est un condensé de mes dix années de médecine. Une plongée rapide dans le grand bain. Au début du mois, j’ai même doublé une garde senior. Moralement, c’est lourd. On s’identifie aux patients : 50-60 ans, c’est l’âge de mes parents. Normalement, il ne faut pas le faire en médecine. De l’empathie, il faut en avoir, mais s’identifier, non. L’expérience va m’endurcir, même si je suis encore jeune.

    Notre chance, à Montélimar, en tant que jeunes médecins, c’est d’être logés à l’internat. Nous sommes une trentaine. Le soir, on se retrouve pour débriefer. On se raconte nos cas, nos difficultés, nos interrogations. Cela nous sert de psychothérapie de groupe. La dernière fois, j’ai fait remarquer qu’on ne parlait que boulot. Mais on en a besoin, je crois. »

    « On est agréablement surpris, le pic est monté moins haut que ce qu’on craignait ». Thomas Gille, 39 ans, pneumologue à l’hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis)

    « Contrairement à certains autres établissements de l’AP-HP [Assistance Publique-Hôpitaux de Paris], à Avicenne, on connaît plutôt un plateau qu’une décrue, ces jours-ci. Déjà, lors de la première vague, on avait été les premiers saturés et les derniers désaturés d’Ile-de-France, notamment parce que la Seine-Saint-Denis est un désert médical, en raison de la grande précarité de la population, de ses facteurs de risques, etc.

    L’activité reste importante mais elle a arrêté d’augmenter, c’est très net. Comparé à mars-avril, il y a environ deux fois moins de lits occupés par des patients infectés par le virus. Sauf accident, ça va décroître dans les jours qui viennent. On va accompagner cette décrue en reprogrammant des blocs qui n’étaient pas urgents et avaient été décalés. Par exemple, des chirurgies ambulatoires de la cataracte, ou des coloscopies.

    On est agréablement surpris, le pic est monté moins haut que ce qui avait été craint. Probablement qu’il y a eu un effet “vacances scolaires”, qui réduit la circulation du virus de manière évidente. Mais nous restons prudents face à un risque de rebond du fait de la rentrée, dans la mesure où tout est décalé.

    Comme pneumologue, il y a des questions en suspens : quelles sont les #séquelles ? Dans quelles proportions ? S’il y a de l’inflammation ou de la fibrose pulmonaire qui persiste, avec quoi peut-on la traiter ? La semaine dernière, j’ai revu un patient septuagénaire très gêné, qui reçoit de l’oxygène lorsqu’il marche, ce qui n’était pas du tout le cas avant sa contamination. On a essayé un premier traitement, qui a été partiellement efficace. Sans doute avait-il une maladie pulmonaire sous-jacente qui n’avait pas été identifiée ni ressentie, mais a probablement été accélérée par l’infection. »

    #covid-19 #hôpital

  • AP-HP : polémique après « l’arrêt temporaire » des urgences de l’Hôtel-Dieu pour ouvrir des lits de réanimation
    https://www.bfmtv.com/sante/le-service-d-urgences-de-l-hotel-dieu-ferme-pour-ouvrir-des-lits-de-reanimati

    Les dirigeants de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (#AP-HP) ont indiqué ce mardi avoir décidé un « arrêt temporaire » des urgences de l’Hôtel-Dieu pour ouvrir des lits de soins critiques dans un établissement voisin. Cette décision a été condamnée par la CGT et des élus de gauche.

    Cette fermeture « va nous permettre de redéployer des professionnels qui sont compétents dans les secteurs de soins critiques », a expliqué lors d’une conférence de presse le Pr Alain Cariou, directeur médical de crise du groupement Centre-Université de Paris, qui chapeaute 8 établissements de l’AP-HP.

    « Une quinzaine d’infirmiers spécialisés et 18 aides-soignantes » vont ainsi renforcer les équipes de réanimation de l’hôpital Cochin, ce qui sera « nécessaire pendent la durée du pic épidémique », a-t-il ajouté.

    Un redéploiement « justifié »

    « On en a discuté avec l’équipe des urgences de l’Hôtel-Dieu et tout le monde a convenu que l’importance de ce renfort justifiait pleinement ce redéploiement », a-t-il affirmé.
    La CGT de l’Hôtel-Dieu y voit pourtant un « contresens » et souligne dans un communiqué que l’établissement dispose « de locaux vides ayant la capacité d’intégrer une activité ambulatoire » et pourrait servir de « relai Covid-19 pour les examens rapides ».

    Les sénateurs communistes Pierre Laurent et Laurence Cohen ont pour leur part dénoncé une « décision aberrante » et annoncé qu’ils se rendraient sur place vendredi « pour constater le nombre de chambres et locaux disponibles et non utilisés ».

    #hôpital #Martin_Hirsch

  • Covid-19 : le taux de mortalité des patients en réanimation lors de la première vague a baissé
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/11/03/covid-19-la-mortalite-a-baisse-en-reanimation_6058305_3244.html

    Selon une étude menée au printemps sur plus de 4 200 malades, le taux de mortalité est passé de 42 % à 25 %. Ces cas graves sont surtout des hommes, souvent en surpoids. Un quart a moins de 54 ans. Par Sandrine Cabut

    Avec un recul de trois mois, presque sept malades sur dix passés en réanimation pour un Covid-19 (69 %) sont en vie, et le taux de mortalité a baissé de 42 % à 25 % au fil du temps. Alors que la deuxième vague de l’épidémie déferle en Europe, une étude principalement française, Covid-ICU (pour Intensive Care Unit), apporte des données précieuses sur les cas les plus sévères de la première vague, précisant le profil, la prise en charge et le pronostic de ces patients selon leurs facteurs de risque.

    Cette cohorte prospective a inclus 4 244 adultes présentant un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) lié à une infection à SARS-CoV-2, qui ont été admis en réanimation entre le 25 février et le 4 mai dans 138 hôpitaux, surtout en France, mais aussi en Belgique et en Suisse. Plus d’un patient sur deux (56 %) a été recruté en région Ile-de-France.

    Les résultats de cette série, inédite par l’ampleur de son effectif et la durée de suivi, sont accessibles en prépublication sur le site de la Société européenne de réanimation. Elles seront publiées prochainement dans la revue de cette société savante, Intensive Care Medicine.

    « Des Français moyens, “bons vivants” »

    Premier constat : il s’agit surtout d’hommes (dans 74 % des cas), dont l’âge moyen est de 63 ans. Les trois quarts sont en surpoids (41 % étant obèses), près d’un sur deux est hypertendu (48 %) et 28 % sont diabétiques. Seulement 7 % sont immunodéprimés, dans la moitié des cas dans un contexte de traitement par corticoïdes au long cours ; et ils ne sont que 4 % à être des fumeurs actifs. « Contrairement à l’image qui a pu être véhiculée, il ne s’agit pas de personnes extrêmement fragiles, mais plutôt de Français moyens, “bons vivants”. C’est un profil assez différent des patients avec une grippe sévère » , souligne le professeur Alexandre Demoule, président du conseil scientifique du Réseau européen de recherche en ventilation artificielle (REVA) qui chapeaute, avec l’AP-HP, le registre Covid-ICU. Le chef de service de réanimation à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris, précise aussi que 25 % de ces malades ont moins de 54 ans.

    Deuxième constat : la plupart des patients de la cohorte (80 %) ont dû être intubés et ventilés par un respirateur pendant leur séjour en réanimation, dont près des deux tiers (63 %) dans les premières vingt-quatre heures. Les autres ont bénéficié d’une oxygénothérapie avec un débit parfois élevé (pouvant atteindre 40 à 50 litres/min) ou d’une technique d’assistance respiratoire non invasive.

    Pour disposer de données consolidées, les réanimateurs ont pris en compte la mortalité à quatre-vingt-dix jours (trois mois). « Il est important d’avoir un recul assez long, car au bout d’un mois on ne peut pas considérer que les survivants sont définitivement tirés d’affaire » , insiste le réanimateur Matthieu Schmidt, coordinateur de l’étude Covid-ICU. De fait, parmi les patients qui ont nécessité une ventilation mécanique pendant les vingt-quatre premières heures de la réanimation, le taux de mortalité était de 31 % à J28, et a grimpé à 37 % à J90.

    Globalement, le taux de mortalité à trois mois chez ces 4 244 patients est de 31 %. Il est donc plus faible que dans les séries américaines et britanniques (de l’ordre de 40 % à un mois) et chinoises (mortalité à un mois supérieure à 50 %).

    Mener des études complémentaires

    Surtout, ce pronostic vital a nettement évolué entre le début et la fin de l’étude, passant de 42 % à 25 %. Parallèlement, la proportion de malades intubés et ventilés a diminué, tandis que celle des ventilations non invasives augmentait. Peut-on attribuer ce meilleur pronostic à l’optimisation de la prise en charge en réanimation ou à des formes moins sévères à la fin de la première vague ? « Pour l’instant, il faut rester prudent sur l’interprétation de la baisse de mortalité, car nous n’avons pas encore comparé les caractéristiques des patients dans les différentes périodes de l’étude » , tempère le docteur Schmidt.

    Selon lui, l’un des résultats les plus frappants de cette étude tient dans les particularités des syndromes de détresse respiratoire aiguë (SDRA) dus au Covid-19. « Comparées à ce que l’on sait des SDRA d’autres origines, nos données montrent un pronostic similaire en termes de mortalité. Mais la durée de séjour en réanimation est bien plus longue en cas de Covid : vingt et un jours en moyenne, contre onze dans les autres SDRA, explique le réanimateur. C’est un facteur d’engorgement des services, qu’il faut prendre en compte dans la planification. »

    L’analyse de la cohorte Covid-ICU a permis aussi de mieux identifier les principaux facteurs de risque associés à un mauvais pronostic – de façon indépendante les uns des autres : âge, obésité, diabète, immunodépression, atteinte rénale, temps court entre le début des symptômes et l’admission en réanimation. L’hypertension artérielle n’est en revanche pas apparue à elle seule, de manière indépendante, comme un facteur de mortalité.

    Les réanimateurs sont loin d’avoir fini d’exploiter toutes les informations concernant ces patients. « Il y a là une masse de données considérable qui va nous permettre de mener des études complémentaires » , précise le professeur Demoule. Aucune nouvelle inclusion n’est prévue, faute de moyens financiers et humains pour gérer la cohorte. Mais Matthieu Schmidt et Alexandre Demoule l’assurent : les patients atteints du Covid-19 qui arrivent aujourd’hui dans les réanimations ont exactement le même profil que ceux de la première vague.

    #réanimation #hôpital #covid-19

    • Hum. J’avais graissé ce passage avant de ne pas. Il est de suite relativisé par la suite (alors qu’il y a un rajeunissement des hospitalisations ? légitimisme incroyable des toubibs, des professionnels), me disant, ah oui, comprendre c’est déjà excuser.
      C’est à l’image de l’interdiction de filmer la police, fréquement pratiquée et sans doute bientôt imposée par la loi de sécurité globale. L’action publique se doit d’être clandestine. Toute question publique (le « secret des affaires », mon dossier pôle emploi, etc) doit faire l’objet d’un culte de l’ignorance.

      #obscurantismepartout

    • « Un monde à part » : comment fonctionnent les services de réanimation
      https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2020/11/03/un-monde-a-part-comment-fonctionnent-les-services-de-reanimation_6058374_435

      Le niveau de ventilation artificielle administré dépend surtout du manque d’oxygène dans le corps, que l’on détermine par un indicateur : le rapport P/F, qui est la fraction de l’oxygène des poumons réellement transportée dans le sang. Plus cette fraction est faible et plus les réanimateurs devront ventiler le patient, jusqu’à recourir à l’intubation, une méthode lourde, associée à une incidence élevée de complications (de 20 à 50 %) pouvant menacer le pronostic vital.

      Les patients sous ventilation non invasive restent conscients tout au long de leur séjour. Ils sont soulagés par des antalgiques légers mais souffrent tout de même de gêne respiratoire et d’anxiété liée à leur présence dans un service réservé aux cas sévères.

      Lorsqu’un patient est intubé, en revanche, il est placé sous anesthésie générale et devra le rester le temps de l’intubation. Il est aussi mis sous analgésiques (antidouleurs) et « curarisé » : on lui administre des curares, une substance d’origine végétale qui provoque une grande détente musculaire pour faciliter à la fois le passage de la sonde d’intubation et la respiration. Durant cette période, le patient est placé sur le ventre pendant environ seize heures (on parle de décubitus ventral, cela permet d’améliorer la respiration) et massé régulièrement pour éviter les ecchymoses. Il est hydraté par voie veineuse et alimenté soit avec une sonde gastrique, soit également par voie veineuse : les nutriments sont alors directement injectés dans le sang.

      La période d’intubation est généralement très éprouvante pour le corps et provoque une perte significative de masse musculaire dès la première semaine. Selon la durée, de une à quatre semaines, voire plus, les patients ressortent durablement affaiblis. Il faut réapprendre à déglutir, à respirer, à mobiliser ses muscles, à manger. Les complications pulmonaires ou cardiaques sont fréquentes. Les patients mettent six à douze mois pour se remettre d’un tel choc, souvent plus.

  • Cyberattaques : alerte au rançongiciel sur les secteurs de la santé américain et canadien
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2020/10/30/cyberattaques-alerte-au-rancongiciel-sur-les-secteurs-de-la-sante-americain-

    (...) « Les attaques par rançongiciels sur les hôpitaux américains, pendant une pandémie, sont probablement les cyberattaques les plus dangereuses ayant jamais visé les Etats-Unis. Ce problème est hors de contrôle, et des gens vont en souffrir » a alerté sur son compte Twitter John Hultquist, responsable du renseignement au sein de l’entreprise américaine spécialisée FireEye.

    [...]

    Des conseils arrivés trop tardivement pour certains hôpitaux. Plusieurs établissements de santé américains ont vu au cours des dernières heures leur fonctionnement perturbé par des attaques informatiques. C’est notamment le cas du Sky Lakes Medical Center, dans l’Oregon, où les « communications [sont] compliquées » selon un communiqué publié par l’établissement.

    Les hôpitaux de Canton-Potsdam, de Massena et de Gouverneur, des villes de l’Etat de New-York, ont dû déconnecter une partie de leurs systèmes informatiques, et certaines ambulances ont dû être déroutées vers d’autres établissements. Un réseau d’hôpitaux du Vermont a aussi vu son fonctionnement informatique être affecté, sans qu’il soit question officiellement d’un rançongiciel. Le Ridgeview Medical Center, dans le Minnesota, a lui aussi été attaqué, tout comme le Sonoma Valley Hospital, en Californie.
    [...]

    Un médecin travaillant dans un hôpital touché par une attaque et interrogé par l’agence de presse Reuters a raconté que certaines fonctions vitales, comme la transmission numérique des résultats d’examen, étaient impossibles. « Les événements en cours peuvent causer des morts, peut-être dans plusieurs hôpitaux » (...)

    #hôpital #médecine #rançongiciel

  • Epidémie de #Covid-19 : « Nous allons être face à des situations humaines impossibles »
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/10/29/epidemie-de-covid-19-nous-allons-etre-face-a-des-situations-humaines-impossi

    Xavier Lescure, spécialiste des maladies infectieuses à l’hôpital Bichat, redoute une saturation des services de réanimation et critique le manque de lien entre le terrain et la prise de décision.
    Propos recueillis par Chloé Hecketsweiler

    Xavier Lescure, spécialiste des maladies infectieuses à l’hôpital Bichat, estime que les hospitaliers ont « multiplié les mises en garde », mais qu’ils n’ont pas été entendus.

    Dans son allocution mercredi soir, Emmanuel Macron a annoncé près de 9 000 personnes en réanimation au 15 novembre. N’est-ce pas trop tard pour sauver l’hôpital ?

    Depuis plusieurs semaines, nous avons perdu le contrôle de l’épidémie. Ce nouveau confinement est un coup de frein à main, qui ne nous empêchera pas de partir dans le décor. Les politiques et les citoyens considèrent que les hôpitaux sont solides, mais ils ne peuvent pas absorber de tels à-coups.

    Quand les « réas » seront débordées, il faudra bien choisir entre tel ou tel malade. On n’ose pas le dire mais c’est une réalité. Si on est complètement sous l’eau, nous allons être face à des situations humaines impossibles.

    Comment en est-on arrivé là ?

    Dès la mi-août, j’ai alerté sur la dégradation des indicateurs. Il y avait bien trop de clusters, signe que le virus circulait déjà beaucoup. Les CPAM [Caisses primaires d’assurance maladie] étaient à la peine pour tracer les cas. Du jour au lendemain, on a demandé à leurs agents de faire quelque chose qui n’a rien à voir avec leur métier : cela ne pouvait pas marcher. Il ne suffit pas de passer un coup de fil aux gens en leur expliquant qu’il faut s’isoler. Il faut aller sur le terrain, faire de la pédagogie, de l’accompagnement.

    Pourquoi avoir attendu que les réas soient à moitié pleines pour agir ? Il faut maintenant prendre des mesures qui auront un impact social et économique majeur. Cela fait neuf mois que nous sommes sur le pont, en première ligne pour voir ce qui se passe. Nous avons multiplié les mises en garde, mais nous ne sommes pas entendus. Il n’y a pas assez de lien entre le terrain et la prise de décision.

    Les politiques se sont-ils montrés trop optimistes ?

    Je comprends qu’il ne faille pas crier au loup trop tôt, qu’il faille que les mesures soient acceptées, mais entre « tout va bien » et « il faut confiner tous les Français », des mesures proportionnées auraient pu être prises avant. Les politiques réagissent quand le dernier rempart – la réanimation – est menacé. Dans certains hôpitaux la quasi-totalité des lits sont déjà occupés par des malades du Covid-19. Pour faire face à cette envolée, le ministre de la santé [Olivier Véran] affirme qu’il va armer 12 000 lits : c’est illusoire ! On peut toujours faire des effets d’annonce, nous dire qu’on est extraordinaire, mais où va-t-on trouver les soignants pour s’occuper de tous ces malades ?

    La pénurie de soignants est le « talon d’Achille » de la France…

    A la suite de la première vague, le salaire des infirmières a été revalorisé de 180 euros. Sur un petit salaire, c’est une revalorisation importante, mais cela ne permet pas de rattraper notre retard : nous sommes toujours bien au-dessous de la moyenne des pays de l’OCDE [Organisation de coopération et de développement économiques]. Il faut donner aux gens l’envie de travailler dans le public ! Le risque, sinon, est de créer un système de santé à deux vitesses, avec d’un côté des dispensaires, de l’autre des cliniques de luxe. La tâche qu’on nous demande d’accomplir est trop épuisante, les gens vont partir. Nous n’alertons pas pour sauver « notre » hôpital mais l’hôpital de tout le monde.

    Comment l’hôpital fait-il face à cette deuxième vague ?

    Certains services d’urgence ne savent déjà plus où mettre les malades. Les urgentistes doivent les faire dormir sur des brancards. Dans mon service, un étage entier – soit la moitié des lits – est occupé par des patients atteints du Covid-19, tous des cas graves. Nous avons tout fait pour faciliter le retour à domicile et renforcer les structures de soins de suite. Et, malgré cela, la réanimation prend de nouveau l’eau, et nous sommes proches d’un point de rupture.

    Quels sont les scénarios auxquels il faut s’attendre ?

    Il faut s’attendre à une succession de vagues plus ou moins rapprochées, au moins pendant quelques mois. Tout l’enjeu est qu’elles montent le moins haut possible. Et l’on ne pourra pas y arriver sans une implication de tous les citoyens.

    Le Covid-19 n’est pas une maladie grave – moins de 1 % de létalité – mais il est très transmissible, et peu visible. Environ la moitié des contaminations sont le fait de personnes « asymptomatiques », ou « présymptomatiques ». La seule solution est que nous agissions tous comme si nous étions porteurs du virus : il ne faut pas attendre d’être contact avéré ou symptomatique pour respecter partout et tout le temps les mesures barrières.

    Comment susciter un tel changement ?

    Toute la question est de savoir où mettre la contrainte pour qu’elle soit acceptée dans la durée. Faut-il imposer le port du masque dans la rue toute la journée, quand on sait que cela a une efficacité, certes, mais limitée ? Face à des informations un peu contradictoires, les gens sont perdus. Il faudrait davantage mettre l’accent sur les changements de comportements en simplifiant les mesures, en les expliquant.

    Il faudrait aussi tenir plus compte du terrain sur lequel nous menons ce combat. Cette épidémie débarque sur un terrain social fragile. Nous avons une recrudescence de personnes blessées grièvement à l’arme blanche. C’est un signe. Cette épidémie révèle les fragilités de notre société, attise les tensions. Nous sommes arrivés à un point de bascule, mais j’ai peur que les politiques soient un peu dans le déni.

    #crise_sanitaire #hôpital #soignants

  • « La #pénurie de #soignants, un problème de fond qui n’a pas été réglé »
    https://www.mediscoop.net/algologie/index.php?pageID=17fe834819ac26e0b104d24cea1f6b52&id_newsletter=13949&lis

    Cécile Thibert note dans Le Figaro : « Des masques, des blouses, des médicaments… et des #soignants. Voilà qui a manqué lors de la première vague épidémique. Plus de 6 mois plus tard, les hôpitaux ont-ils massivement recruté ? « Nous avons formé 7000 infirmiers et médecins » pour ouvrir des lits de réanimation supplémentaires, a affirmé #Emmanuel_Macron mercredi soir, sans préciser ce que recouvrait ce chiffre ».

    « Concernant les embauches, la Direction générale de la santé (#DGS) indiquait […] n’avoir aucune idée du nombre de personnels hospitaliers recrutés depuis la première vague. « Le ministère ne dispose pas encore de remontées sur les embauches dans les établissements », répondait la DGS, en précisant qu’un objectif de 15.000 recrutements à l’#hôpital était d’ores et déjà fixé, sans échéance précise », observe la journaliste.
    Elle constate que « si les directions hospitalières assurent faire le maximum, sur le terrain les professionnels sont amers ».
    Christian Lemaire, secrétaire du syndicat SUD-santé au CHU d’Angers, remarque ainsi : « Nous abordons cette deuxième vague avec moins de personnel que lors de la première . Aujourd’hui, nous avons des effectifs minimums d’#infirmiers et d’#aides-soignants, ce qui ne permet aucune souplesse ».

    Le Dr Renaud Chouquer, réanimateur au centre hospitalier d’Annecy, indique quant à lui que « des gens sont partis, des postes ne sont pas pourvus, l’absentéisme n’est pas remplacé. Les problèmes habituels, quoi. Hier après-midi, il manquait deux infirmiers dans le service pour le soir. Les cadres ont travaillé toute la journée pour essayer d’en trouver ».
    Cécile Thibert relève ainsi que « la plupart des hôpitaux veulent du renfort, en témoignent les annonces de contrats courts qui se multiplient sur les réseaux sociaux. Mais les infirmiers ayant une expérience en réanimation ne sont pas légion . […]

    En outre, les ratios infirmiers/malades sont plus importants en service Covid : un infirmier pour 6 patients (contre un pour 10 à 12 en temps normal) et 2 pour 4 en réanimation (2 pour 5 en temps normal) ».

    Amélie Roux, responsable du pôle ressources humaines à la Fédération hospitalière de France, déclare que « les établissements sont en grande majorité en train d’essayer de renforcer leurs effectifs [infirmiers] et ils sont en difficulté pour le faire. Ces difficultés ne sont pas nouvelles, mais elles sont accentuées par la crise sanitaire parce que les besoins sont accrus ».

    Cécile Thibert rappelle qu’« en temps normal, entre 2% et 3% des postes infirmiers ne seraient pas pourvus », et s’interroge : « La faute à un désenchantement de l’hôpital ? ».

    Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des infirmiers, observe qu’« il y a 26.000 infirmiers formés chaque année, et 180.000 infirmiers qui pourraient travailler mais ont cessé d’exercer. Si on rendait l’hôpital attractif avec de bonnes conditions de travail et des salaires corrects, on pourrait rapidement pourvoir les postes ».

    La journaliste relève ainsi que « l’augmentation de salaire de 183 euros dans le cadre du « Ségur de la santé » semble #dérisoire… ». Le Dr Chouquer déclare que « le problème de l’hôpital est préexistant à l’épidémie. Depuis des années, il y a une volonté délibérée de réduction des coûts , ce qui passe en premier lieu par une réduction des ressources humaines ».

    Cécile Thibert continue : « Lors de la première vague, 16.200soignants étaient venus aider les services submergés. Cette fois, ils ne viendront pas en nombre. […] Reste une solution : les faire venir d’autres services de l’hôpital, ce qui suppose de diminuer les prises en charge des autres malades, en particulier de reporter les opérations chirurgicales ».

    Le Pr Jean-Michel Constantin, réanimateur à la Pitié-Salpêtrière (Paris), souligne qu’« il n’y a pas de marge , l’hôpital fonctionne en flux tendu. Nous sommes inquiets de ce qu’il va se passer dans les semaines à venir ».

    Dans Le Monde, François Béguin note quant à lui que « dans les hôpitaux débordés par l’afflux de patients Covid-19, « il n’y a pas de réserve » ».

    Le journaliste observe qu’« un peu partout sur le territoire, les hôpitaux ont commencé à encaisser le choc ou se préparent à le faire. Mercredi, le « plan blanc » a été activé dans tous les hôpitaux de Bretagne, deux jours après ceux du Grand-Est. Mardi, Pierre Ricordeau, le directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) #Occitanie, avait jugé la situation « extrêmement grave » dans sa région, se disant « très étonné par la rapidité et le caractère général de la poussée que nous connaissons depuis le début du mois d’octobre », avec près de 440 hospitalisations supplémentaires en une semaine ».

    François Béguin note qu’« avant la prise de parole du chef de l’Etat, plusieurs responsables hospitaliers avaient appelé à des mesures fortes pour éviter la catastrophe. [...] « On n’est pas du tout large, il n’y a pas de réserve », avait reconnu en début de semaine Aurélien Rousseau, le directeur de l’ARS Ile-de-France après avoir appelé à une déprogrammation massive des opérations dans la région ».

    Le journaliste observe que « le chef de l’Etat a expliqué que les hôpitaux ne pourraient pas compter sur des transferts massifs d’une région à l’autre comme au printemps, « parce que le virus est partout ». Pour parvenir à presque doubler le nombre de lits de réanimation, il a assuré mercredi soir que « près de 7000 infirmiers et médecins » avaient été formés ces derniers mois « pour pouvoir travailler en réanimation » ».
    « Des formations jugées insuffisantes par les professionnels travaillant dans ces services », remarque François Béguin. Bérengère Araujo, porte-parole de la Fédération nationale des infirmiers en réanimation (FNIR), déclare ainsi que « ces infirmiers ont seulement reçu 14 heures de formation théorique, c’est-à-dire une initiation. Ils vont permettre de pallier l’urgence d’une situation catastrophique mais vont rester démunis face à la complexité des prises en charge de ces patients extrêmement fragiles ».

    #covid-19 #france #catastrophe

  • « Je n’en peux plus d’expliquer aux malades qu’il n’y a plus de lits disponibles » : l’hôpital au bord de la rupture - Elsa Fayner, Basta !
    https://www.bastamag.net/Hopital-public-burn-out-rupture-paroles-de-soignants-suppression-de-lits-r

    Alors que le pic de la seconde vague du Covid-19 n’est pas encore atteint, les signaux en provenance de l’#hôpital public sont alarmants : épuisés, découragés, meurtris, les personnels hospitaliers sont à la limite de la rupture. Du manque chronique de moyens en remise en question des motivations, leurs témoignages laissent augurer l’effondrement de tout un système.

    Avec le temps, le récit du « pic Covid », lors de la première vague de contaminations, prend des allures d’épisode cathartique. « Les médecins et les soignants avaient pris le pouvoir. Nous avons pu gérer les choses comme nous l’entendions », se souvient Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers SNPI CFE-CGC. Plus de réunions ni de projets « abscons », retient Guillaume [1], cadre aux urgences psychiatriques dans le Sud-Est. Matthieu a été marqué par « tous ces renforts » : « Il n’y a jamais eu autant de personnel dans le service », témoigne ce pneumologue, appelé pour l’épidémie dans un hôpital parisien. « J’ai eu un contrat en deux jours ! On nous a prêté un échographe cardiaque flambant neuf ! Du jamais vu... »

    Tous parlent d’une grande solidarité. Quand bien même ils peuvent dire aussi qu’ils étaient « soulagés » que « les personnels administratifs ne soient pas dans [leurs] pattes puisqu’ils télétravaillaient ». Et que des soignants qui ont fait tourner les autres services s’estiment oubliés malgré leur participation à l’effort commun. Enfin, le printemps n’a pas été que galvanisant. L’effet « nez-dans-le-guidon-sans-toucher-le-sol » a duré un moment. Et, finalement, la catharsis n’a pas eu lieu. La parenthèse s’est refermée, avant un hiver qui s’annonce très compliqué.

    Fin septembre, quand Paule Bourret, sociologue et coordinatrice d’un master destiné aux cadres de soin à l’Université de Montpellier, a revu la vingtaine de professionnels qui suivent cette formation continue, elle les a sentis « las, découragés ». En juin encore elle les trouvait seulement « fatigués mais satisfaits d’avoir repris la main, au plus près du terrain ». Infirmière à Belfort et secrétaire nationale de la Coordination nationale infirmière (CNI), Céline Durosay parle de « contre-coup » : « On se demande comment on a pu travailler dans ces conditions, avec toutes ces injonctions contradictoires, sans les protections nécessaires parce qu’elles n’existaient pas. Certaines expériences laissent d’importants traumatismes », raconte-t-elle, marquée par des récits glaçants.

    #soignants #santé_publique

  • « C’est la même maladie, les mêmes gens, les mêmes problèmes » : au service de « réa » de l’hôpital Bichat, une seconde vague du Covid-19 bien trop réelle
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/10/27/on-se-demande-si-on-va-tenir-dans-le-temps-au-service-de-rea-de-l-hopital-bi

    RÉCIT Pendant une semaine, « Le Monde » a suivi le quotidien des soignants, des patients et des familles de ce service. Après l’accalmie de l’été, c’est le retour au front, et peut-être, d’ici à quelques semaines, aux choix douloureux d’une « médecine de guerre ».

    #paywall, mais tout est dans le titre, il me semble

    • Selon les modèles épidémiologiques dont [Jean-François Timsit, le chef du service de réanimation médicale, ] dispose, plus de 7 000 patients Covid-19 pourraient être hospitalisés sur l’ensemble du territoire en réanimation au 1er janvier 2021. « Si on étale la courbe, on pourra sauver davantage de monde, mais la prise de conscience collective est difficile » , estime-t-il, en expliquant qu’avec un taux de reproduction – le « R » – de 1,4 le confinement risque d’être le seul moyen de reprendre le contrôle de l’épidémie.

      Dans leur petite salle de repos, avec un matelas aménagé à même le sol dans un recoin, les réanimateurs ne cachent pas leur lassitude. « Les mêmes qui nous applaudissaient au printemps ne mettent pas leur masque » , s’agace Juliette Patrier, en colère contre les flyers antimasque distribués près de l’hôpital. « La lune de miel avec les Français est passée » , abonde sa collègue Lucie Le Fèvre. De l’autre côté du périphérique, l’hôtel Formule 1 est un peu leur baromètre, avec le prix des chambres mis à jour en temps réel : 51 euros aujourd’hui contre 24 euros pendant le confinement. Le signe, selon ces médecins, que la vie continue un peu trop « comme avant ».

      [...]

      La seconde vague, la centaine de soignants de la « réa » l’a vue arriver depuis des semaines, avec son cortège de choix difficiles. « Répondre à la question : qui est prioritaire ? C’est quelque chose qu’on fait tout le temps, ce n’est pas spécifique au Covid , précise Lucie Le Fèvre, mais des plus de 75 ans qui s’en sont sortis, on n’en connaît presque pas. » La réanimation est une telle épreuve physique que chaque admission se décide au cas par cas, en évaluant la probabilité pour un patient de retrouver une vie autonome. Après deux ou trois semaines de soins intensifs, rares sont ceux qui ont les ressources pour se rétablir. « Du coup, les nouveaux qui arrivent à 78 ans, on se dit que ce n’est pas nécessaire de leur infliger ça. »

      Certains sont malgré tout hospitalisés en réanimation, après discussion. « Dans ce cas, on essaie d’éviter l’intubation » , explique Fabrice Sinnah, un autre réanimateur. « On les aide avec un apport d’oxygène et une surveillance rapprochée qui n’est pas possible ailleurs » , précise-t-il, en rappelant que, même pour les personnes en bonne forme physique, il faut six mois à un an de rééducation pour se remettre d’un passage en « réa ». Chaque mercredi, un « staff éthique » permet de faire le point sur les cas difficiles, de poser la question de « l’obstination déraisonnable » quand la prise en charge apporte davantage de souffrance que de bénéfices.

      [...]

      Ce mercredi, l’un des patients, un trentenaire prénommé Emin, vient d’ouvrir les yeux, après trois semaines de coma artificiel, mais il est difficile d’évaluer les éventuelles atteintes cérébrales. Lui aussi a frôlé plusieurs fois la mort : un arrêt cardiaque, une fièvre montée jusqu’à 43 °C, maîtrisée in extremis grâce à une chimiothérapie et à la mise en place d’une circulation extracorporelle destinée à refroidir le sang. Pierre Jaquet refait une nouvelle fois le point avec sa femme et sa sœur, et les réconforte : « Je ne peux pas vous rassurer plus que cela, mais il est jeune, il va pouvoir se battre plus longtemps. Ici on a toutes les machines pour l’aider. »

      Oui, « tout est dit », si ce n’est cette projection sur les effectifs de patients en réanimation, et l’absence de renforts, lue ailleurs, et qui va peser lourd.

      #hôpital #étaler_la_courbe... #crise_sanitaire #soignants

  • PERSONNEL NON PAYÉ - AP-HP RENDEZ L’ARGENT Thread by Jeannus
    https://threadreaderapp.com/thread/1320015194710560769.html

    [PERSONNEL NON PAYÉ - #AP-HP RENDEZ L’ARGENT]

    Alors tout commence vers mars quand l’épidémie explose, confinement, tout ça vous savez. A l’époque je suis en 5e année de médecine à Paris Descartes. Rapidement la fac en coopération avec l’aphp commence à recruter des étudiants pour
    Aller dans diverses missions COVID. Pour ma part, je débute une première mission sous la direction de la responsable du Bureau du Personnel Médical (= BPM) de l’HEGP, mon taff consiste à lister tous les #étudiants recrutés, les heures faites etc dans un but de RÉMUNÉRATION
    (les étudiants recrutés à l’HEGP je précise)

    Assez vite finalement je dois abandonner mes fonctions car les étudiants recrutés passent sous la responsabilité du Bureau du Personnel Non Médical (= BPNM) pour des raisons d’administration (pas possible de payer autrement)

    Le but étant que les étudiants soit rémunérés selon le #salaire horaire d’un.e IDE niveau 1 ou 2 (je me rappelle plus) mais globalement 12€/h.

    Et moi, je me retrouve dans mon ancien service de rea parce qu’ils ont besoin d’externes pour faire du travail aide soignant,
    Infirmier, de secrétariat, d’appel des familles etc....

    J’y reste pendant plus de 6 semaines, (je vois pas ma famille, je suis explosée au COVID tous les jours mais bref), je fais en tout plus de 100h, dont des weekends, parfois je fais deux semaines d’affilée sans pause
    J’abrège pour en arriver au total de ce que je suis censée toucher : 1500€ de salaire COVID à peu près (en plus de la prime COVID).

    En parallèle, pendant ces 6 semaines, la fac et les chefs de sevice nous garantissent qu’on va être payés, et merci, et vous êtes formidables, et
    Qu’est ce qu’on ferait sans vous etcetcetc

    Avril arrive, pas de salaire COVID, mais je suis pas la seule. Ok les élus étudiants nous disent que ça va arriver y’a du retard.
    Mai arrive, pas de salaire COVID.
    Juin arrive, prime COVID ok comme tt le monde mais pas de salaire COVID
    Donc là je commence à m’impatienter, avec les externes d’autres services concernés on va voir la responsable du BPNM qui nous dit qu’effectivement c’est bizarre, qu’on devrait être payés. Elle prend nos noms, nos heures, nos RIB, tout ce qu’il faut.

    Là, je vous avoue que je sais plus ce qui s’est passé exactement à chaque mois mais le résumé est le suivant :

    On retourne demander où est notre salaire. Et là d’un seul coup la responsable du BPNM dit qu’on nous avait jamais dit qu’on allait être payés, qu’on a pas signé de
    Contrats (!!!!!!!!!!!!!!!! on est externes !!!!!?!), qu’il est hors de question qu’on soit payés, que les consignes de « là haut » s’y opposent formellement, que la fac nous a promis ça sans l’accord de l’aphp.

    Nous sommes plus de 50 étudiants concernés seulement sur l’HEGP
    (et je reçois encore des messages toutes les semaines de nouvelles personnes qui se manifestent)
    J’estime environ 50000€ de salaires non versés...

    #covid-19 #externes #médecine #hôpital #soignants #cost-killers #toctoc

  • « Comment continuer à travailler à l’hôpital en toute sérénité quand on est diagnostiqué positif au Covid ? »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/24/comment-continuer-a-travailler-a-l-hopital-en-toute-serenite-quand-on-est-di

    La demande faite au personnel asymptomatique d’être présent, pour pallier le manque d’effectifs et malgré les risques de transmission, remet en cause « tout le discours éthique sur le soin », juge l’anesthésiste-réanimateur Philippe Bizouarn

    Tribune. Dans plusieurs hôpitaux de France, des soignants diagnostiqués positifs au Covid-19, pas ou peu symptomatiques, pourraient continuer de travailler en toute sécurité, parce qu’en se protégeant ils ne pourront pas contaminer les collègues ou les patients dont ils ont la charge. C’est du moins ce que certains responsables médicaux et administratifs répètent, au sein des hôpitaux et à travers les médias.

    Ces responsables se réfèrent à l’avis du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) du 23 mai, « relatif à la conduite à tenir pour les professionnels intervenant en établissements de santé et en établissements sociaux et médico-sociaux selon leur statut vis-à-vis du SARS-CoV-2 ». Selon cet avis, la découverte chez un professionnel asymptomatique positif doit conduire à une éviction de sept jours après le test PCR, sauf si ce professionnel est jugé non remplaçable : « La possibilité dégradée d’un maintien en poste avec un renforcement des mesures de précaution et d’hygiène est envisageable afin que la balance bénéfice-risque ne soit pas défavorable. » Les responsables, notamment médicaux, suggérant avec force que les personnels des services de réanimation en particulier peuvent – doivent – venir travailler s’ils se sentent bien, ne semblent pas avoir pris toutes les précautions que le HCSP avait prises en mai. Et de nombreuses voix se sont levées à cette annonce, parmi lesquelles celles des représentants syndicaux, comme au centre hospitalier universitaire de Nantes.

    Harnachés dans des tenues de héros du Covid

    « Tester-tracer-isoler », formule magique, que d’aucuns jugent inefficiente, ou mal appliquée en ce qui concerne la population générale. Les soignants appartiennent-ils à cette population ? Sont-ils des citoyens ordinaires, solidaires des autres membres de la communauté, se protégeant et protégeant ces autres parfois vulnérables en s’isolant ?

    Le maintien au travail des cas positifs peut en effet choquer notre bon sens collectif. Certes, comme l’assurent les chefs, en se harnachant dans des tenues de héros du Covid, en adoptant les gestes barrières, en s’isolant pendant les pauses – en admettant qu’une pause est encore possible en ces lieux de repos souvent si exigus qu’une distance de sécurité avec les collègues n’est jamais possible –, aucun risque n’est couru. C’est du moins ce qui est supposé, en admettant encore une fois que notre connaissance de la transmission de ce virus s’est grandement améliorée.

    Pourtant, comment puis-je, moi, soignant bien ordinaire, qui suis diagnostiqué positif mais déclaré non malade, aller au travail en toute sécurité, en toute sérénité ? Comment mes supérieurs hiérarchiques ne peuvent-ils comprendre mon état d’anxiété à l’approche d’un collègue ou d’un patient vulnérable, malgré toutes les précautions prises ? Comment ne pas admettre qu’un travail de douze heures d’affilée, dans ce service de réanimation, nécessite de prendre un peu de temps, de boire un café ou de manger quelque chose ? Seul alors. Mais l’architecture du lieu le permet-elle ? Et si, en pause, une alarme sonne, un appel à l’aide de mes collègues m’oblige à me rendre auprès du patient dont l’état s’aggrave ? Zut, j’ai oublié de remettre à temps mon masque…

    Le Haut Conseil de la santé publique avait bien insisté en mai : ce n’est qu’au cas où le professionnel de santé, diagnostiqué positif et peu symptomatique, serait jugé irremplaçable qu’il pourrait quand même aller travailler. Au cours de la première vague, des soignants submergés ont dû continuer de soigner. Il manquait sans doute des bras. Hélas, ce pourrait de nouveau être le cas cet automne. Lors des auditions au Sénat, une séance était consacrée aux problèmes éthiques posés par la première vague. Il a été formellement souligné que nous, soignants, avions travaillé en mode dégradé – pas de moyens de protection, insuffisance des effectifs – et en avions, parfois, payé le prix exorbitant de la maladie et de la mort.

    Politiques d’embauche insuffisantes

    Pourquoi alors ne pas dire que les injonctions de rester au travail – sur la base du volontariat, nous précisent les responsables – sont seulement dues au risque de manquer de personnel ? Sont seulement dues à l’impossibilité de remplacer les arrêts maladie ? Les politiques d’embauche restent en effet insuffisantes, comme continuent de le crier les collectifs de défense des hôpitaux, et comme vient de nouveau de l’admettre le Conseil économique social et environnemental. Les personnels continuent de fuir l’hôpital, et il semble que cette affaire de soignants positifs ne redonnera pas confiance à celles et ceux qui déjà veulent quitter la profession d’infirmier, comme l’enquête du Conseil de l’ordre des infirmières vient de le montrer.

    Frédéric Worms, dans une tribune publiée dans Le Monde daté du mercredi 14 octobre, s’est inquiété du caractère non éthique d’une santé publique oublieuse des méthodes de la bioéthique. Si l’éthique minimale du soin n’est pas respectée, en obligeant des soignants à risque à contaminer les autres vulnérables et ses propres collègues travailleurs du soin, alors tous les discours autour du prendre soin ne seront que lettre morte. A moins qu’en ces temps troublés le prendre soin soit mis entre parenthèses.

    Edit
    Covid+ au taff à Nice, à Bourgoin-Jallieu, au Puy-en-Velay et au CHU de Nantes, il y a plus dune semaine https://seenthis.net/messages/880516

    L’enquête #EpiCov constatait que 11% des soignants ont été covid+ lors de la première vague (des pénuries de gants et blouses sont actuellement rapportées).
    Ils majorent aussi le tarif des heures supplémentaires pour #assurer_la_continuité_des_soins

    #covid-19 #hôpital #soignants #arrêts_de_travail #santé

    • « On va au crash » : face à la deuxième vague de Covid, la course aux lits dans les hôpitaux franciliens

      https://www.leparisien.fr/info-paris-ile-de-france-oise/on-va-au-crash-face-a-la-deuxieme-vague-de-covid-la-course-aux-lits-dans-

      Opérations déprogrammées, inquiétude des soignants… De plus en plus de places de réanimation en Ile-de-France sont occupées par des patients Covid. La recherche de lits et de personnel est au cœur de toutes les préoccupations.

      « Le week-end nous éclaire sur le risque auquel nous devons faire face […], des vagues répétées d’arrivées, jour après jour, qui vont mettre en péril nos capacités de régulation régionale. Je vous demande formellement d’engager sans délais les déprogrammations et de vous mettre en situation d’atteindre le pallier suivant rapidement. »

      Ce message, parvenu ce dimanche aux directeurs d’établissements de santé d’Ile-de-France, est signé du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) Aurélien Rousseau. Vendredi, 3813 malades étaient hospitalisés en Ile-de-France, c’est 177 de plus que la veille, dont 715 en réanimation.

      Depuis plusieurs jours, des groupes WhatsApp d’urgentistes franciliens étaient en ébullition. « Les patients sont à 15 dans les couloirs, on ne sait pas où les mettre, on fait des gardes jusqu’à 4 heures du mat’, si ça continue comme ça, on va au crash », redoute un médecin réanimateur. Il n’a rien oublié de la première vague. « Quand on a découvert le titre des Echos où le ministre dit que l’hôpital est plus solide qu’au printemps, on s’est étranglés, on était fous ! » ajoute-t-il.

      Plus question de transférer les patients en TGV

      En Ile-de-France, la capacité « de routine » est de 1200 lits de réanimation. Au plus fort de la première vague, en avril, l’hôpital avait tout arrêté et plus que doublé ses places en réanimation pour atteindre 3000 lits, dont 2600 dédiés aux malades Covid les plus graves.

      Cette fois, les transferts médicalisés en TGV vers la province ne seront pas possibles, les hôpitaux de province ont trop à faire. En attendant les éventuels bienfaits du couvre-feu, des études de modélisation de l’institut Pasteur, notamment, permettent de se projeter à quelques semaines, en fonction de l’intensité des contaminations, le fameux R zéro, qui prédit aussi le niveau d’encombrement des urgences. Et donc d’anticiper.

      Une gestion mutualisée à l’échelle régionale

      Actuellement, au palier 2 de la mobilisation hospitalière, un millier de places sont mobilisées pour les malades les plus graves du coronavirus. Tous les départements franciliens sont mis à contribution, la gestion est mutualisée à l’échelle de la région, privé compris, appelé à contribuer à l’effort de guerre.

      Jusqu’à 30 % d’opérations non urgentes, peuvent être déprogrammées pour libérer des lits. « Le réservoir n’est pas plus gros, la jauge se fait au détriment d’autre chose », résume un urgentiste parisien. Vu la progression de l’épidémie, les mille places pourraient être remplies avant novembre. Après, c’est le palier 3 qui permet de dégager 1 700 places mais avec jusqu’à 60 % de déprogrammations des opérations « non urgentes ».

      Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a évoqué une hausse nationale de 15 % de lits de réanimation (passant de 5100 à 5 800) et l’ouverture, selon nécessité, de « 4 000 lits à la demande » disponibles « dès décembre, avant s’il le faut ». « Ces lits seront ouverts ponctuellement selon les besoins », assurait jeudi soir le ministère de la Santé, précisant qu’il s’agit principalement de lits de « médecine générale ».

      « La situation n’a pas changé depuis mars »

      Dans les hôpitaux, publics comme privés, aucun de ceux que nous avons interrogés n’a encore vu la couleur de ces lits supplémentaires. A Argenteuil (Val-d’Oise), par exemple, « la situation n’a pas changé depuis mars, voire s’est dégradée », selon Bertrand Martin, le directeur du centre hospitalier Victor-Dupouy, 300 médecins, 2100 personnels soignants, une cinquantaine de patients Covid dont 12 en réanimation.

      L’hôpital dispose aujourd’hui d’une douzaine de lits de réanimation. Pour la première vague, au plus fort de la crise, 51 lits avaient été ouverts au total. « Nous n’avons pas plus de moyens qu’au mois de mars, ni en termes de compétences médicales ou soignantes, insiste le directeur. Et nous avons des difficultés à pourvoir des postes, y compris dans les services difficiles que sont les réanimations. »

      Sans compter qu’il faut aussi des chambres individuelles pour éviter toute contamination. « On essaie de trouver des solutions, reprend le directeur. Mi-novembre, nous allons ouvrir une nouvelle unité d’une vingtaine de lits dans une aile vide de l’hôpital. »

      « Plus on ouvre de lits Covid, plus on a besoin de personnel »

      Christophe Prudhomme, porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France (Amuf) et délégué CGT de l’assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP), estime que les annonces gouvernementales sur un renfort en lits sont irréalisables. « Il y a un problème arithmétique très simple, ironise-t-il. 4000 lits pour un budget annoncé de 50 millions d’euros, ce n’est pas faisable ! Il faudrait 2 à 2,5 emplois par lit et donc un budget de… 400 millions d’euros. Et puis c’est maintenant qu’on a besoin de ces lits, pas plus tard. »

      A l’#AP-HP, plus grand centre hospitalier universitaire d’Europe, avec ses 39 établissements en Ile-de-France, 17 % des 20 000 lits étaient fermés en septembre, indique la direction (soit 3400), toute discipline et tout motif confondu (congés d’étés, chambres doubles transformées en chambres simples, postes non pourvus, travaux, désinfection, etc.). « Par ailleurs, précise la direction, plus on ouvre de lits Covid, plus on a besoin de personnel. Par exemple, un poste infirmier est nécessaire pour 10-12 lits de médecine en temps normal, avec le Covid, c’est un poste d’infirmier pour six lits. » L’effort de recrutement des derniers mois a permis de recruter 500 infirmiers, passant de 17 300 à 17 800. Mais 450 postes sont toujours vacants.

      Selon une enquête menée par l’ARS au sein des établissements de santé en juin, il y aurait 3 579 postes vacants en Ile-de-France, tout profil confondu, soit 4,8 % des effectifs….

      VIDÉO. Malaise à l’hôpital : « Les collègues viennent nous voir pour savoir comment démissionner »
      [témoignages : "on est tous un peu genoux"]

      « A la différence de mars, on a réussi à surmonter le problème matériel, avec des hausses de coût surréalistes, mais le personnel, c’est le problème principal », partage Patrick Serrière, responsable chez Ramsay Santé qui gère 30 établissements privés de santé en Ile-de-France, et 70 malades en soins critiques. Pour pallier la pénurie, des infirmiers actuellement en formation doivent suspendre leur cursus pour aller en renfort dans les hôpitaux. « Les dates de remise des diplômes seront donc décalées de deux mois », précise un mail interne à l’AP-HP.

      2000 lits à trouver… mais comment ?

      « Notre premier sujet, ce sont les ressources humaines », reconnaît Didier Jaffre, directeur de l’offre de soins à l’ARS Ile-de-France. Il rappelle que le manque de lits et de personnel est antérieur à la crise. Différentes pistes sont explorées, notamment avec le conseil régional, pour faciliter le logement des infirmiers, plus enclins à travailler aujourd’hui en grande couronne où les loyers sont moins chers qu’à Paris.

      Mercredi, des instructions ont été données par l’ARS, pour trouver rapidement 2000 lits de médecine. Les leviers ? Les déprogrammations d’opérations bien sûr, mais aussi le recours massif à l’hospitalisation à domicile, pour libérer des lits de médecine, le recours à la télémédecine pour les bilans… L’objectif est d’augmenter « significativement et rapidement le nombre de lits et les capacités d’accueil ».

      https://seenthis.net/messages/882871

      #soignants #lits #pénurie #IDF

  • Covid-19 : à Saint-Etienne, « la situation est en train de nous échapper », Luc Chatel
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/10/22/covid-19-a-saint-etienne-la-situation-est-en-train-de-nous-echapper_6056963_

    Si la contamination poursuit sa hausse, les hôpitaux ne pourront bientôt plus accueillir de malades.

    Déjà soumise au couvre-feu nocturne depuis le 17 octobre, la métropole de Saint-Etienne voit la situation sanitaire se dégrader de jour en jour. Le chef-lieu de la Loire affiche désormais le plus haut niveau de contaminations du pays, avec un taux d’incidence de 807 cas sur sept jours pour 100 000 habitants, contre 370,5 de moyenne nationale, selon les dernières données de Santé publique France. Le département de la Loire a enregistré neuf décès en vingt-quatre heures, jeudi 22 octobre. A l’Hôpital privé de la Loire (HPL), deuxième plus gros établissement sanitaire de Saint-Etienne, après le centre hospitalier universitaire (CHU), le directeur, Janson Gassia, détaille : « Nous avons actuellement 54 patients Covid, alors qu’ils étaient 45 au plus haut de la première vague, début avril. »

    Très présent dans les médias pour critiquer les décisions gouvernementales face au coronavirus, dont l’instauration du couvre-feu et la fermeture des bars dans sa ville, le maire (LR) de Saint-Etienne se fait ces jours-ci plus discret. Alors qu’il affirmait, lundi 12 octobre sur RTL, qu’il n’y avait « aucun malade dans les #Ehpad stéphanois », Gaël Perdriau, qui n’a pas souhaité répondre à nos questions, a dû faire face une semaine plus tard à l’identification par l’agence régionale de santé (ARS) d’une dizaine de clusters dans des Ehpad.

    Pour Janson Gassia, « à ce rythme, nous allons atteindre le taux maximum d’occupation des lits [d’hôpitaux] d’ici deux semaines » . Il avait été recommandé la semaine du 12 octobre aux établissements de la Loire de déprogrammer 30 à 40 % des interventions non urgentes, or l’HPL et le CHU en sont à plus de 70 %. « Nous allons très vite devoir cesser toute intervention hors Covid » , prévient le professeur Franck Chauvin, directeur de la prévention au CHU de Saint-Etienne, président du Haut-Conseil de la santé publique et membre du conseil scientifique mis en place au printemps par le gouvernement. Jusqu’à présent, la situation avait pu être en partie régulée grâce à des transferts de malades : neuf patients stéphanois ont notamment été pris en charge la semaine du 12 octobre par le CHU de Clermont-Ferrand. « Nous avons également fait des transferts entre établissements du groupement hospitalier de territoire » , précise Janson Gassia.

    « Notre personnel est très fatigué »

    C’est en effet à cette échelle locale, qui couvre la Loire et le nord de l’Ardèche et qui regroupe une dizaine d’établissements hospitaliers sous la direction du CHU de Saint-Etienne, que s’organise au quotidien la gestion des lits. « Nous avons une conférence téléphonique quotidienne entre directeurs, du lundi au dimanche, pour évaluer la situation, précise le patron de l’HPL. C’est ce qui nous a permis jusque-là de répartir au mieux tous les patients. Mais nous en sommes à un stade où nous ne pouvons pas repousser les murs pour ouvrir de nouveaux de lits. Et notre personnel, qui est très impliqué et désormais bien formé à cette situation, commence à être très fatigué. » Une fatigue qui se ressent aussi chez les médecins généralistes. « Tout le monde est débordé, la situation est en train de nous échapper, constate avec dépit Nassira Drikeche, médecin généraliste dans le quartier populaire de Montreynaud. Depuis une dizaine de jours, ça n’arrête pas : les appels téléphoniques liés au Covid ont doublé et il y a beaucoup plus de cas positifs, notamment chez des patients asymptomatiques. C’est une catastrophe. »

    Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer la situation. « La population de Saint-Etienne est plus précaire que celle des autres métropoles, puisque 25 % des Stéphanois vivent sous le seuil de pauvreté , rappelle Régis Juanico, député (Génération.s) de la Loire, dont la circonscription recouvre une bonne partie de la ville. Or on sait que le virus atteint plus spécialement ces personnes. C’est une piste d’analyse, mais on n’a en réalité aucune explication satisfaisante. Rien ne permet pour l’instant de justifier l’ampleur de la progression. » Pour Franck Chauvin, comme pour l’ARS, « Saint-Etienne n’est peut-être que la première d’une série de villes qui seront tout aussi fortement touchées. Les courbes des autres départements sont très mauvaises. »

    75 % de plus de 70 ans

    A Saint-Etienne, comme dans d’autres villes affectées par la pandémie de Covid-19, l’âge des patients est un motif d’inquiétude. « Les plus de 70 ans représentent plus de 75 % des personnes atteintes du coronavirus qui entrent à l’hôpital ces derniers jours , indique Franck Chauvin. Or leur durée d’hospitalisation est plus longue et ils sont plus souvent admis en réanimation que les autres malades du Covid. C’est de là que vient l’essentiel de la tension. » C’est donc auprès de ce public qu’il faudrait et qu’il faudra agir prioritairement, selon lui. « On n’a pas mis en place de mesures de protection spécifiques pour ces personnes fragiles, qui se contaminent pour l’essentiel dans la sphère familiale, regrette-t-il. Elles doivent absolument continuer à mettre un masque quand elles se trouvent avec des plus jeunes, ventiler les pièces, se laver les mains, utiliser du gel hydroalcoolique et respecter les distances pendant les repas. » Ce que soulignent tous les observateurs stéphanois, c’est en effet la mauvaise application des gestes barrières : masque enlevé pour se faire la bise, pour se parler ou pour téléphoner, relâchement lors de réunions familiales, distanciation non respectée, etc.

    En attendant de pouvoir compter sur une remobilisation de la population, d’autres solutions sont à l’étude au sein de la préfecture de la Loire, où chaque lundi, un « point Covid » est organisé autour de la préfète et d’un grand nombre d’institutions concernées par la pandémie. « Un arrêté d’extension de l’alerte maximale à des communes voisines de la métropole, voire à tout le département de la Loire, est déjà dans les cartons » , précise un participant à ces réunions. Deux autres mesures ont été évoquées lors du dernier « point Covid » de la préfecture : l’avancée du couvre-feu à 19 heures et le reconfinement localisé.

    #hôpital #précarité #prévention_en_berne (on se demande pourquoi) #couvre-feu #reconfinement

    • Covid-19 : « Les citoyens doivent être davantage associés aux mesures à prendre face à l’épidémie », le turbo prof Franck Chauvin, cancérologue et professeur de santé publique à l’université Jean-Monnet, à Saint-Etienne, préside le Haut Conseil de santé publique et est membre du conseil scientifique sur le Covid-19. Propos recueillis par Chloé Hecketsweiler
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/10/23/covid-19-les-citoyens-doivent-etre-davantage-associes-aux-mesures-a-prendre-

      Le professeur de santé publique Franck Chauvin (...) et la nécessité d’une pédagogie tournée notamment vers les plus de 70 ans.

      Franck Chauvin (...) explique la difficulté d’évaluer les conséquences à long terme des mesures prises pour lutter contre l’épidémie, et la nécessité d’associer les citoyens à ces choix qui engagent toute la société.

      Il va falloir vivre avec le virus tout l’hiver, voire au-delà. Quelles sont les stratégies possibles ?

      Il y a trois solutions. La première consiste à laisser le virus se propager sans prendre de mesures restrictives. L’expérience de pays comme le Royaume-Uni au début de la pandémie ou le Brésil, par exemple, montre l’impossibilité d’une telle solution, inacceptable en termes de mortalité. Une autre stratégie est de faire du « stop and go » , c’est-à-dire qu’on contrôle la circulation du virus par des confinements entrecoupés de périodes de relâche, car le confinement ne peut durer indéfiniment. Soit enfin, on trouve un moyen de réduire le risque de façon chronique en protégeant les plus fragiles et en essayant de limiter la circulation parmi les autres. [une politique de suppression du virus n’est pas envisagée, c’est con pour les précaires de Saint_Étienne et d’ailleurs, ndc]

      La seconde vague est là. Comment éviter une catastrophe dans les hôpitaux ?

      L’analyse rétrospective des chiffres montre que, si, en mars, on avait été en mesure de protéger les plus de 70 ans, les hôpitaux n’auraient pas été débordés. Mais nous ne le savions pas à l’époque. Le conseil scientifique avait proposé à la sortie du confinement de maintenir une sorte de confinement volontaire pour ces personnes-là : cela avait été très mal perçu.

      Je pense qu’il faut faire beaucoup de pédagogie auprès de cette population car, au-delà d’un certain âge, le risque de formes graves de ce virus augmente de façon très importante. Ce message, difficile à recevoir pour ces personnes, est crucial à faire passer dans l’ensemble de la population.

      Il faut bien avoir en tête que, au-delà d’un seuil, obtenir la disparition totale du virus n’est plus possible, sauf en cas de découverte d’un médicament ou d’un vaccin très efficaces et massivement disponibles. Il est donc très probable que nous devions apprendre à vivre avec ce virus comme l’humanité l’a fait et le refera.

      Les grands-parents doivent-ils renoncer à voir leurs petits-enfants, à les embrasser ?

      Le problème est que nous n’avons pas conscience que des gens de notre propre famille puissent représenter un danger. Au bout d’un moment, les mesures barrières tombent. C’est probablement à ces occasions-là que les gens se contaminent.
      Je ne pense pas qu’il faille réduire les liens sociaux notamment entre générations. Il faut en créer d’une autre nature. Si les petits se sont lavé les mains, et si tout le monde porte un masque, le risque est limité. Il faut juste s’y habituer. On n’empêchera pas le virus de circuler – on n’en est plus là – mais on peut espérer le garder sous contrôle et limiter son impact dans les populations à risque.

      En quoi cette épidémie se distingue-t-elle des autres ?

      Le caractère exceptionnel de cette crise n’est pas l’épidémie elle-même : il y en a eu d’autres, de grande ampleur, comme la grippe asiatique de 1957-1958 ou la grippe de Hongkong en 1968-1969. Tous les hôpitaux étaient saturés, plus d’un million de personnes sont décédées dans le monde et pourtant personne n’en a parlé.

      Ce qui est exceptionnel, c’est que, cette fois, on a considéré que le sanitaire devait l’emporter sur tout le reste et cela dans pratiquement tous les pays du monde. Le caractère extrêmement brutal de l’épidémie a sidéré tout le monde, et les pays ont quasi tous fait le même choix, en confinant leur population pour sauver les hôpitaux et permettre la prise en charge de tous les patients.

      Aujourd’hui, on prend des décisions sans savoir sur le long terme si leur effet n’est pas finalement plus délétère que la maladie…

      Il y a avant tout une situation urgente à résoudre. Idéalement, quand on conseille de prendre telle ou telle mesure, on devrait être en mesure de dire ce qu’on en attend en matière d’efficacité, et ce que cela va coûter, c’est-à-dire quel sera l’impact des mesures. Cela dit, le bilan de la première vague commence à se préciser. Le rapport de la mission présidée par le professeur Pittet [https://www.vie-publique.fr/rapport/276679-gestion-de-crise-la-covid-19-et-anticipation-des-risques-pandemi donne de premiers éléments en matière de PIB [ produit intérieur brut ], de baisse de taux d’emploi ou de chute de la consommation.

      Ainsi, ce rapport note que le confinement a été responsable d’une chute de 10 points de PIB, à laquelle s’ajoutent les dépenses sociales engagées pour soutenir les secteurs touchés. Les économistes préciseront probablement ces coûts dans les mois qui viennent. Les effets induits commencent à être mieux connus aussi grâce à des études conduites par des équipes de recherche en sciences humaines et sociales. De l’autre côté, des simulations permettent d’estimer le nombre de décès qui ont été évités par cette mesure inédite. Ce sont ainsi probablement plusieurs dizaines de milliers de morts qui ont été empêchés.

      Avec ces données, n’est-il pas possible d’établir la balance coût-bénéfice du #confinement ?

      C’est très compliqué à faire, car cela repose sur le calcul des décès « évités » prenant en compte l’âge des patients. Un certain recul est nécessaire pour apprécier ce qu’on a gagné d’un côté et perdu de l’autre grâce à cette mesure dont on sait, de façon certaine, qu’elle a eu pour effet de limiter la saturation du système hospitalier. Et ce n’est absolument pas en période de crise que l’on peut conduire ce type de réflexion. Le caractère émotionnel est trop important et notre jugement risque d’être faussé.

      La question aurait néanmoins pu être soulevée entre les deux vagues…

      C’est en effet une question que doit poser la société. Et la réponse ne peut être que collective. Les décisions à prendre pour faire face à l’épidémie sont extrêmement impactantes, et c’est pourquoi les citoyens doivent y être davantage associés. Il est vrai que l’arrivée de cette seconde vague aussi rapidement a probablement empêché ce type de discussion au sein de la société, mais cela reste une discussion nécessaire.

      En matière de santé publique, notre société est organisée autour d’un certain nombre de pactes implicites ou explicites. Par exemple, la grippe est responsable de 10 000 décès par an environ, et ce dans une certaine indifférence. Nous acceptons collectivement que la vaccination ne soit pas systématique dans l’entourage des personnes à risque ou à l’hôpital. C’est bien un choix sociétal qui est fait.

      Il faudra donc attendre la fin de la crise aiguë pour connaître le coût des restrictions pour la société ?

      Ce sera le travail des économistes de nous éclairer sur ce point. On est en récession, le déficit de la Sécurité sociale sera probablement l’un des plus élevés de ces dernières années. Mais le problème, ce ne sont pas tant les chiffres que leur traduction pour la population. En France, l’impact social des mesures prises pour contenir l’épidémie a été retardé grâce à un système d’amortisseur extrêmement performant. Mais cet impact sera perceptible pour chacun d’entre nous, c’est certain. Le président de la République a rappelé aussi les répercussions de ces mesures sur les étudiants, avec le risque de décrochage, des difficultés à trouver des stages, sans parler de l’accès à l’emploi qui va être compliqué pour eux.

      L’impact va être significatif et diffus, avec des effets y compris sur la santé des gens. C’est pour cela que le confinement ne peut se concevoir qu’en dernière extrémité. Il faut que la situation soit dramatique pour aller dans cette direction et elle l’était en mars.

      Compte tenu des enjeux, les Français n’ont-ils pas leur mot à dire sur les mesures à prendre pour « vivre avec le virus » ?

      En période de crise, nous partons du principe que les instructions venues d’en haut sont forcément adoptées dans la population. Or, nous savons que ce n’est pas forcément le cas. Les 20-40 ans, pendant l’été, ont par exemple adopté leur propre stratégie face à l’épidémie. Ils ont eu massivement recours aux tests mais ont été probablement très laxistes sur les mesures barrières. Il faut qu’on trouve le moyen d’associer la population à la mise en œuvre de ces mesures.

      Il faut d’abord informer, éduquer, et engager notre responsabilité individuelle, car l’Etat ne pourra pas tout faire. La génération des 20-40 ans, quoi qu’on en pense, est extrêmement responsable et elle l’a montré par ce recours massif aux tests. Si on leur explique qu’en cas de test positif il faut rester sept jours chez soi, ne sortir qu’avec un masque et voir le moins de gens possible, je suis certain qu’ils le feront.

      Voilà à quoi ressemble ce brave médecin, "directeur de la prévention et de la santé des populations au CHU de Saint-Étienne."
      https://www.hcsp.fr/explore.cgi/personne?clef=2179

    • Covid-19 : premiers transferts de patients pour soulager les hôpitaux sous tension
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/23/covid-19-premiers-transferts-de-patients-pour-soulager-les-hopitaux-sous-ten

      Huit patients des hôpitaux de Roubaix et Tourcoing ont été transférés dans la nuit de jeudi à vendredi vers des établissements de la région lilloise, et huit autres d’Auvergne-Rhône-Alpes vers la Nouvelle-Aquitaine.

      Dommage qu’il n’y ait pas plus d’hostos dans le Loir et Cher et les Alpes de Haute Provence, les départements à faible prévalence du virus se font rares.

      Par ailleurs, la presse ne parle guère des transferts intra régionaux (par exemple de la Seine Saint-Denis vers les Yvelines) qui sont en cours depuis un moment.