#huile_sur_le_feu

  • Le #ministère de l’#environnement à la diète budgétaire
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/05/24/le-ministere-de-l-environnement-a-la-diete-budgetaire_4925610_3244.html

    Au total, ce sont 136 millions d’euros d’annulation de crédits de paiement pour l’année 2016, dont 23 millions d’euros consacrés à la #recherche dans les domaines « de l’#énergie, du développement et de la mobilité durables ». Les coupes franches dans les quelque 113 millions d’euros restants concernent la plupart des programmes relevant du ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer : infrastructures et services de transport (72,1 millions d’euros) ; prévention des risques (10 millions d’euros) ; sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture (7,7 millions d’euros) ; énergie, climat et après-mines (4,7 millions d’euros) ; météorologie (4,5 millions d’euros) ; paysages, eau et biodiversité (3,8 millions d’euros) ; informations géographiques et cartographiques (0,8 million d’euros). Il faut aussi ajouter 9,2 millions d’euros dans le programme conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durable, c’est-à-dire la gestion des services du ministère.Le décret préconise aussi un redéploiement de crédits, de l’ordre de 150 millions d’euros, vers le programme urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat.

    #budget

  • Le désarroi d’une prof qui parle de « Charlie » à ses élèves

    « Madame, me dit-elle, on ne va pas se laisser insulter par un dessin du prophète, c’est normal qu’on se venge. C’est plus qu’une moquerie, c’est une insulte ! » Contrairement au précédent, cette petite pesait ses mots, elle n’était pas du tout dans la provoc. À côté d’elle, l’une de ses amies, de confession musulmane également, soutenait ses propos. J’étais choquée, j’ai tenté de rebondir sur le principe de liberté et de liberté d’expression. Puis c’est un petit groupe de quatre élèves musulmans qui s’est agité : « Pourquoi ils continuent, madame, alors qu’on les avait déjà menacés ? »

    http://www.lepoint.fr/societe/le-desarroi-d-une-prof-qui-parle-de-charlie-a-ses-eleves-09-01-2015-1895173_

    • Ce qui me désole, c’est la fracture que cet événement tragique a créée dans des classes d’habitude soudées. Tout cela a divisé les élèves. Il régnait aujourd’hui une ambiance glauque, particulière. Cette classe de 4e sympa, dynamique, était soudain séparée en deux clans. Les communautarismes ont resurgi d’un coup. Et ça me fait peur pour la suite.

      mais c’est quand-même sacrément cynique pour Le Point de publier un papier comme ça sachant la quantité de unes à sous-entendus islamophobes qu’ils ont publiées et qui ont bien contribué aux crispations ambiantes.

    • sur le même sujet, sur le blog d’un prof
      https://monsieursamovar.wordpress.com/2015/01/09/leur-minute-de-silence

      Une minute de silence.

      Le chef sait, le chef nous le dit, ça peut être dur à tenir. Le chef, à demi-mot, nous dispense. Fierté idiote, je ne saute pas sur l’occasion. Je devrais. Parce que cette minute, je ne peux pas encore la vivre en tant que prof. Ça remue trop de choses, l’humain déborde. Pourtant, après avoir annoncé le programme du cours, je me lance :

      « J’imagine que vous savez ce qui s’est passé hier. »

      Bruissement léger. Du vent dans les feuilles. Ils savent ce que je m’apprête à dire.

      « Comme c’est souvent le cas lors d’événements aussi graves, il nous a été demandé, à midi, d’observer une minute de silence. »

      Rumeur commune, quelques secondes… qui éclate en dix réactions adolescentes, prisme. Lola, la première, panique : « Monsieur ! Ça va nous faire perdre du temps pendant le contrôle ! » Latifa soupire, agacée. Memet profite du relâchement pour se balancer sur sa chaise. Rien d’autre ?

      « Et si on est contre ? »

      Ken me regarde derrière ses lunettes double-foyer. Il l’a dit doucement, dans un souffle. Lorsque je tourne le regard vers lui, il le baisse.

      « Ouais. Ouais je suis contre ! »

      Ibrahim qui n’avait pas prononcé un mot jusque là hoche la tête. Soulagé. Quelqu’un a formulé ce qu’il ne voulait, ce qu’il ne pouvait pas dire. Je sens vingt paires de regards se braquer sur moi. En quelque sorte, tout le monde joue son rôle. Le tableau attendu ici est le professeur indigné partant dans la tirade républicaine incompréhensible. J’inspire rapidement.

      « Contre quoi ? »

      Et, chose rarissime, je m’assois. Ken me regarde en penchant la tête.

      « Pardon ?
      – Vous êtes contre. Contre quoi ?
      – Contre la minute de silence.
      – Pourquoi ?
      – Parce qu’ils insultaient le prophète !
      – Qui ?
      – Eux !
      – Qui ?
      – Les morts ! »

      C’est toujours le même malaise. Violent. Celui ressenti lorsque les mômes, qui qu’ils soient, d’où qu’ils viennent, s’arc-boutent sur des fétus de paille.

      « Donc ce n’est pas triste qu’ils soient morts.
      – Ils insultaient le prophète. Ils étaient anti-musulmans.
      – Comment ?
      – Ben en dessinant.
      – En dessinant quoi ?
      – C’est bon, je suis contre, c’est tout ! »

      Nous y voilà. Le « c’est bon ». Les deux mots dont j’ai appris à me méfier comme de la peste depuis mes débuts de prof. Le « c’est bon », c’est la fin du débat. Là où la peau s’arrête, la chair est à vif. On s’arrête au « c’est bon », c’est la dernière frontière. Parce qu’après, après ça, il n’y a plus rien. Ken est allé au bout de ses arguments, si j’insiste, je toucherai à sa personne, à sa vie privée peut-être, et il ne me le pardonnera jamais. Je change de tactique. Je projette une couverture de Charlie. Les mômes zyeutent, incrédules. Un « mais c’est chrétien, ça ! » fuse. Ils déchiffrent péniblement les bulles. Avant de se mettre à rire. Pour la première fois de ma vie, je bénis Nabilla. Ibrahim se tourne vers moi, suspicieux.

      « Vous êtes pas offensé monsieur ? Ils se moquent des chrétiens, là. »

      Ce n’est pas le moment. Pas le moment de parler de laïcité, de l’amalgame blanc = chrétien. Pas encore. J’explique juste doucement que l’humour, c’est d’abord savoir se moquer de soi. Et que c’est pour ça qu’il y a si peu de gens drôles. Loubia conteste, Antoine argumente. Ken se détend. Me demande pourquoi, alors, ils se moquaient de tout le monde à Charlie, pas seulement d’eux. J’explique. La satire. La liberté d’expression. L’humour, les débordement, les condamnations par la justice, d’un côté comme de l’autre. Le visage d’Ibrahim s’ouvre un peu. Juste un peu. Parce que pendant tout mon laïus il psalmodie un « c’est vous qui le dites, c’est vous qui le dites. » Il a peur. Et je le comprends. Je les comprends. Depuis vingt minutes nous parlons. Les paroles avancent, lentement, dépassent la frontière du « c’est bon », et s’enroulent en hélice d’ADN pour coloniser le vide qui règne au-delà. Liberté d’expression, attentats, différence entre islamique et islamiste (« ils font pas attention aux suffixes, les journalistes, c’est grave, c’est très grave ! »).

      Et peut-être, juste peut-être, est-ce l’un des enjeux, non seulement des profs mais du règne humain. Coloniser le « c’est bon ». Remplacer la violence du vide par des mots, des interrogations, étendre les mondes intérieurs. Ouvrir des fenêtres qui permettront de lever le nez quand les pires extrêmes ne proposeront que des tunnels aveugles.

    • C’est là qu’on s’aperçoit que le fait culturel, l’éducation sont difficilement déboulonnables. On ne change pas un système de pensée comme on change une ampoule grillée. D’aucuns prétendent que la parole est souvent bénéfique et libératrice de tension mais elle peut être aussi génératrice d’angoisse en essayant de combler la « violence du vide ».
      Je ne dis pas qu’il est préférable de se contenter d’un « c’est bon » mais il conviendrait plutôt d’accepter le fait que la tâche est ardue et qu’il faut sans cesse en tant qu’éducateur remettre sur le métier sans relâche et fréquemment. En tant qu’enseignant, notre rôle est certes important mais limité. Nos élèves ne nous appartiennent pas et nous ne sommes pas des directeurs de conscience.
      Je trouve l’exemple de ce prof remarquable par sa finesse d’analyse de la situation.

    • moi aussi Hermano, un type pareil est précieux, j’ai posté sur son blog l’expression de mon admiration pour son travail. Je ne sais s’il est un exemple rare mais il est certainement à faire connaître

    • @koldobika

      j’ai un vrai problème avec l’emploi de « coloniser » et avec la hiérarchie prof/élève.
      mais lire un témoignage qui aborde un petit peu la complexité du sujet, même de façon incomplète et discutable, fait du bien.

      Le visage d’Ibrahim s’ouvre un peu. Juste un peu. Parce que pendant tout mon laïus il psalmodie un « c’est vous qui le dites, c’est vous qui le dites. » Il a peur. Et je le comprends. Je les comprends.

    • http://tailspin.fr/post/107696839163/pour-mes-eleves-de-seine-saint-denis

      Je veux vous parler de ce qui s’est passé hier. Je vais vous dire ce que je ressens, et après vous me direz ce que vous, vous ressentez. Je vais vous raconter deux ou trois choses personnelles, parce qu’il est vraiment important que vous compreniez que ce que je vous dis est personnel. Je vais vous dire pourquoi je suis extrêmement triste, choquée, et inquiète après ce qui s’est passé hier.
      Premièrement, je suis triste parce que des innocents sont morts assassinés, et je ressens un sentiment de compassion qui est lié au fait que je suis humaine et que je ne comprends pas qu’on puisse tuer. Parmi ces personnes qui sont mortes, il y en a certaines que je ne connaissais pas personnellement, mais dont je connaissais le travail. Je ne vais pas vous raconter ma vie, mais ces morts me touchent beaucoup parce que j’ai grandi dans une maison remplie de livres et de bandes dessinées, que mon papa collectionnait quand j’étais petite. Alors vous voyez, certains de ces dessinateurs, je les ai connus dans l’enfance. Ils dessinaient dans d’autres journaux, avant que Charlie Hebdo existe, avant que je sois née, et ils étaient vraiment marrants. Ils se moquaient un peu de tout et de tout le monde. Vous savez tous que j’aime bien les blagues, alors quand des gens marrants meurent, moi ça m’embête beaucoup.
      Deuxièmement, je suis triste parce que j’ai eu peur. Ma petite sœur est journaliste, et j’ai eu très peur pour elle. Elle n’est pas journaliste à Charlie Hebdo, elle travaille pour la rubrique culture d’un journal, et quand il y a eu l’attentat, ils ont fermé toutes les grilles, ils ont posté beaucoup de policiers. Quand les journaux doivent se protéger, quand on doit avoir peur pour un membre de sa famille qui est journaliste, c’est très effrayant. Vous savez tous ce qu’est la dystopie, c’est le sujet du chapitre que nous sommes en train de terminer, je trouve vraiment que ça y ressemble.
      Enfin, je suis triste parce que je sais que vous allez en prendre plein la gueule. Je vous le dis parce que je trouve déjà qu’il y a beaucoup de gens qui vous montrent du doigt sans raison. Je vous le dis aussi parce que j’ai choisi d’enseigner en Seine Saint-Denis, je l’ai demandé. Je vous le dis parce que je vous vois tous les jours, je vous connais, je sais comment vous êtes, je vous aime bien. Je voudrais que tout le monde vous voie comme je vous vois, mais je sais que ce n’est pas le cas. Je suis triste et inquiète pour vous, parce que j’ai peur qu’on vous attaque parce que vous venez d’ici et parce que certains et certaines d’entre vous sont musulmans et musulmanes.