#inattendu

  • Des paysages et des visages, le voyage intellectuel de #Felwine_Sarr

    Felwine Sarr nous invite, dans "La saveur des derniers mètres", à partager ses voyages à travers le monde, mais aussi un cheminement intellectuel, celui d’un homme qui veut repenser notre manière d’#habiter_le_monde et redéfinir la relation entre l’Afrique et les autres continents.

    L’économiste sénégalais Felwine Sarr est l’un des intellectuels importants du continent Africain. Ecrivain et professeur d’économie, il est également musicien. Deux de ses livres ont notamment fait date : Afrotopia (2016) et Habiter le monde (2017). Avec Achille Mbembé, il est le fondateur des Ateliers de la pensée de Dakar. Chaque année, des intellectuels et artistes s’y rencontrent lors d’un festival des idées transdisciplinaire pour “repenser les devenirs africains” à travers des concepts adaptés aux réalités contemporaines.

    La littérature, les arts, la production d’imaginaires et de sens demeurent de formidables boussoles pour l’humanité. Nous sommes dans une crise de l’imaginaire, nous n’arrivons pas à déboucher les horizons. (Felwine Sarr)

    L’utopie nous dit qu’on peut féconder le réel, faire en sorte qu’il y ait un surcroit de réel. (...) Le premier travail est d’imaginer qu’ "il est possible de..." (...) Il faut reprendre le chantier qui consiste à dire qu’il existe des horizons souhaitables, qu’il faut les penser, les imaginer, et travailler pour les faire advenir. (Felwine Sarr)

    Felwine Sarr a été, avec l’historienne de l’art Bénédicte Savoy, chargé de rédiger un rapport sur la restitution des œuvres d’art africaines spoliées lors de la colonisation, remis à Emmanuel Macron en novembre 2018.

    Nous devons reprendre notre élan notamment en reconstruisant un rapport à notre patrimoine, à notre histoire. (Felwine Sarr)

    Son livre La saveur des derniers mètres (éditions Philippe Rey) est une invitation au voyage intellectuel et physique, le voyage des idées et des hommes, un plaidoyer presque, pour l’importance des rencontres et du dialogue avec l’autre. La confrontation avec des ailleurs (Mexico, Mantoue, Le Caire, Istanbul, Port-au-Prince, Cassis, Kampala, Douala), mais aussi le retour chez soi, l’île de Niodior, sa terre natale, son point d’ancrage, sa matrice. Imaginaire en voyage et voyage des imaginaires.

    Goûter à la saveur du monde est un droit qui doit être équitablement réparti. Il faut considérer la mobilité comme un droit fondamental. (Felwine Sarr)

    Un récit entre le carnet de voyage, les notes de l’économiste, les réflexions anthropologiques et les évasions poétiques. Une plongée intime dans des transports de la pensée et du coeur.

    Voyager permet d’avoir un regard en biais, en relief, à la fois en dedans et en dehors. (Felwine Sarr)

    Appartenir à une île, c’est devoir la quitter. (Felwine Sarr)

    https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-idees/des-paysages-et-des-visages-le-voyage-intellectuel-de-felwine-sarr

    Lecture d’un texte de #Tanella_Boni :

    « Y aurait-il, depuis toujours, des peuples et des individus qui auraient droit à l’#aventure, suivraient leurs désirs de se déplacer en bravant toute sorte d’obstacles, et d’autres qui n’en auraient pas le droit. #Nous_sommes_tous_des_migrants et tout migrant a des #rêves et des #désirs. Certes, les lois doivent être respectées et les passages aux frontières autorisés, on ne part pas comme ça à l’aventure, dit-on. Comme ça, sur un coup de tête. Ou par pur #plaisir. Mais qui donc part aujourd’hui par pur plaisir sur les routes inhospitalières de nulle part. Dans certains pays où le mal-être des individus est palpable, chacun pourrait habiter quelque part, il y aurait moins de migration illégale. Je rêve, tandis que l’on continue de mesurer le seuil de pauvreté dans le monde. De nombreux pays africains vivent en dessous de ce seuil. Tout compte fait, est-ce que je sais de quoi habiter est le nom ? »

    –-> à l’occasion du festival Banquet d’été 2020

    #faire_monde #restitution #pillage #art #Afrique #colonialisme #imagination #imaginaire #utopie #futur #téléologie_inversée #covid-19 #coronavirus #rêves_collectifs #ouvrir_les_futurs #frontières #habiter #mobilité #migrations #liberté_de_mouvement #citoyenneté #liberté_de_circulation #inégalités #décolonialité #décolonial #décolonisation

    –—

    Il parle notamment des #ateliers_de_la_pensée (#Dakar) qu’il a co-fondés avec #Achille_Membé
    https://lesateliersdelapensee.wordpress.com

    ping @karine4 @isskein

  • De quoi se compose l’émeute ?

    De quoi se compose l’émeute ? De rien et de tout. D’une électricité dégagée peu à peu, d’une flamme subitement jaillie, d’une force qui erre, d’un souffle qui passe. Ce souffle rencontre des têtes qui parlent, des cerveaux qui rêvent, des âmes qui souffrent, des passions qui brûlent, des misères qui hurlent, et les emporte.

    Où ?

    Au hasard. À travers l’État, à travers les lois, à travers la prospérité et l’insolence des autres.

    Les convictions irritées, les enthousiasmes aigris, les indignations émues, les instincts de guerre comprimés, les jeunes courages exaltés, les aveuglements généreux ; la curiosité, le goût du changement, la soif de l’inattendu, le sentiment qui fait qu’on se plaît à lire l’affiche d’un nouveau spectacle et qu’on aime au théâtre le coup de sifflet du machiniste ; les haines vagues, les rancunes, les désappointements, toute vanité qui croit que la destinée lui a fait faillite ; les malaises, les songes creux, les ambitions entourées d’escarpements ; quiconque espère d’un écroulement une issue ; enfin, au plus bas, la tourbe, cette boue qui prend feu, tels sont les éléments de l’émeute.

    Ce qu’il y a de plus grand et ce qu’il y a de plus infime ; les êtres qui rôdent en dehors de tout, attendant une occasion, bohèmes, gens sans aveu, vagabonds de carrefours, ceux qui dorment la nuit dans un désert de maisons sans autre toit que les froides nuées du ciel, ceux qui demandent chaque jour leur pain au hasard et non au travail, les inconnus de la misère et du néant, les bras nus, les pieds nus, appartiennent à l’émeute.

    Quiconque a dans l’âme une révolte secrète contre un fait quelconque de l’état, de la vie ou du sort, confine à l’émeute, et, dès qu’elle paraît, commence à frissonner et à se sentir soulevé par le tourbillon.

    (Victor Hugo, « Les misérables », « L’insurrection du 5 juin 1832 »)

    #émeute #insurrection #misère #feu #victor_hugo #paris #révolte #casseurs #vagabonds #giletsjaunes #inattendu #secrets #escarpements #languefrançaise #pain

    • trois sortes de violence

      Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés.
      La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première.
      La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres.
      Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue.

      (Hélder Pessoa Câmara (1909-1999), archevêque de Recife)

      #violence #émeute #insurrection #résistance #violence_révolutionnaire #répression

  • le surréalisme n’aime pas perdre la raison ; il aime ce que la raison nous fait perdre

    Ferdinand Alquié

    André Breton par Marguerite Bonnet
    http://www.jose-corti.fr/auteursfrancais/breton2.html

    Cet #homme de la #quête n’a jamais eu le goût des #voyages lointains. A l’errance de Breton, suffisent la #ville et les #rues ; homme du voyage #intérieur, il demeure avant tout un sédentaire et un #terrien : « la grande #aventure #mentale » est tout ce qu’il importe de courir.

    [Ses] premiers #textes, tout appliqués qu’ils soient au bien-dire, nous emmènent au-delà des influences, vers les constantes d’une nature qui cherche, d’emblée, dans la culture, ce qui s’accorde à ses directions instinctives.

    http://www.youtube.com/watch?v=1rwHcEo4JY4

    A l’écoute des #œuvres de son #temps pour reconnaître vers quoi tend sa propre sensibilité, il la découvre plus accordée, dans ses oscillations, à l’inéprouvé, à l’#inattendu, au #mouvant, qu’à la #permanence du connu, si parfaite qu’en soit la réalisation. Ce qui bouge, même s’il est difficile de saisir le sens du #mouvement, supplante pour lui ce qui demeure.

    Il s’oppose en #art à toute anecdote – « Ecrire n’est pas forcément raconter » – comme à la représentation de la vie réelle, même interprétée, la jugeant « à peine moins servile que l’imitation fidèle » ; il veut atteindre à une #réalité autre qui, #tangentielle à celle du #monde #objectif, appartient en propre à l’œuvre et impose de ne la juger que selon ses propres lois.
    (...) Fort de l’exemple de la peinture de #Braque et de #Picasso, c’est pour une existence pleinement autonome de l’œuvre qu’il combat, refusant de la rapporter avant tout à un réel préexistant. Mais il ne tombe pas non plus dans le #formalisme : « aucune #liberté formelle ne pourra jamais remplacer ce que est l’#âme même de la poésie ».
    (...) Ce qui vient, ce qui, furtivement, est déjà arrivé, c’est la certitude que l’#écriture #automatique délivre, irréfutable : il faut que le poème meure pour que la poésie vive.

    L’expérience de l’#automatisme, dès le premier moment, tend à supprimer ou du moins à affaiblir l’opposition entre ce qui est en nous et ce qui est hors de nous, l’arbitraire n’étant arbitraire que pour notre ignorance et ouvrant en réalité en direction du monde comme des êtres, une autre voie de #connaisssance et de #communication.

    Le caractère « sans précédent » des #Champs_magnétiques, selon l’expression d’#Aragon, leur est donné non seulement par la méthode d’édriture dont lils relèvent, mais aussi par la visée à laquelle pour Breton ils répondent. Dans la grande quête parfois hagarde où, depuis 1916, il se trouve engagé pour confondre l’aventure poétique t la vie, ils marquent un tournant, mais un tournant périlleux : "Les Champs magnétiques dit #André_Breton dans ses notes, « c’est le désir d’écrire un livre dangereux ».

    La poésie de toutes parts, déborde les poèmes ; elle déborde le #langage même ; elle se fait existence. En choisissant de s’abandonner à la parole en dérive, Breton trouve provisoirement un solution au #conflit angoissant de l’écriture et du silence ÷ il n’écrit plus, il est écrit. C’est pourquoi l’écriture automatique figure alors une délivrance.

    La notion de surréalisme (…) rassemble sous l’appellation d’automatisme psychique, à côté de l’écriture, tous les modes d’expresion découverts – et à découvrir – capables d’amener au jour sans médiation réflexive les pulsions de l’inconscient dont la réalité enfouie s’oppose aux « #réalités_sommaires » de la #conscience. Le second temps de la définition, annoncé comme l’acception #philosophie du terme, vise à fonder en raison le surréalisme en l’établissant « sur la croyance à la réalité supérieure de certaines formes d’associations négligées jusqu’à lui, à la toute-puissance du #rêve, au jeu désintéressé de la #pensée ». C’est dire que l’homme n’est pas ce qu’il croit être et que la méthode de connaissance définie par l’#automatisme lui révèlera sa vraie nature, « les étendues illimitées où se manifestent ses désirs ».

    Rien dans le Manifeste ne postule une #transcendance ; il n’y a pas d’ambiguïté dans la revendication qui ferme la définition ; non content d’assigner pour tâche au surréalisme l’expression du « fonctionnement réel de la pensée », Breton lui attribue le pouvoir de changer l’existence, ici et maintenant.
    Réduire le Manifeste à une #déclaration de guerre à la raison est simplifier excessivement les #choses ; c’est à l’#avènement d’une nouvelle raison qu’il œuvre, celle qu’invoquait #Rimbaud, raison plus large, capable d’intégrer l’ensemble de la réalité humaine. #Alquié,[dans sa Philosophie du surréalisme] est tout à fait fondé à écrire : « le surréalisme n’aime pas perdre la raison ; il aime ce que la raison nous fait perdre ».

    #Littérature #Poésie #Peinture #Surréalisme #Psychisme #Psychanalyse #Dada #Tristan_Tzara #Livres #Vidéo