Il y a quelques décennies encore, le militant type était, avant tout, le porte-parole d’un territoire particulier (un quartier, un village, une entreprise solidement enracinée dans la vie locale). Quelles que soient ses ambitions personnelles (à supposer qu’il en ait eu), il lui fallait donc tenir compte en permanence de la situation et de l’avis de ses collègues ou des voisins dont il partageait, par définition, la vie quotidienne.
En substituant progressivement à ces logiques « territoriales » celle de l’organisation en #réseau (fondée sur la mobilité perpétuelle des individus atomisés), le #capitalisme moderne ne pouvait, à l’inverse, que favoriser l’émergence parallèle d’un nouveau type de « #militantisme » (dont #Twitter ou #Facebook [ou Seenthis] offrent, de nos jours, le paradigme privilégié) et dans lequel chacun – désormais libéré de toute solidarité communautaire – peut enfin s’autoriser entièrement de lui-même (tout en continuant, naturellement, à parler au nom des autres).
Lorsque l’activité militante en vient ainsi à se couler dans la forme réseau, plus rien ne peut donc garantir que le collectif (ou l’association) conservera ce minimum de rapport avec la réalité quotidienne et les préoccupations des classes populaires, qui était encore celui des organisations politiques et syndicales traditionnelles. Les possibilités de délire idéologique – déjà suffisamment présentes dans l’ancien militantisme – s’en trouvent évidemment décuplées (et cela d’autant plus que les médias officiels sauront tendre une oreille complaisante aux plus manipulables de ces associations).