• « Le costume de tueurs de la consommation n’est-il pas trop grand pour les “gilets jaunes” ? », Philippe Askenazy
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/26/philippe-askenazy-le-costume-de-tueurs-de-la-consommation-n-est-il-pas-trop-

    Les premiers signes d’une baisse de la consommation sont bien antérieurs au mouvement de contestation, note, dans sa chronique au « Monde », l’économiste Philippe Askenazy.

    Chronique « Tendances France ». La croissance a marqué le pas fin 2018, du fait d’une #consommation atone. Les soldes d’hiver ont été décevantes. Politiques et analystes ont vite fait d’attribuer cela aux « gilets jaunes » : les commerces des centres-villes ont perdu des clients les samedis de manifestation et les restrictions de circulation à certains ronds-points ont perturbé les zones commerciales périphériques. Le costume de tueurs de la consommation n’est-il cependant pas trop grand pour les « #gilets_jaunes » ?

    Les difficultés des magasins en dur auraient dû induire un report massif sur le e-commerce : les principaux sites ont maintenu leurs délais de livraison, et les blocages de dépôts ont été rares et ponctuels. Or, les chiffres de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad) révèlent l’absence de ruée chez ses adhérents. Au contraire, en décembre, le e-commerce n’aurait progressé que de 6 % sur un an, un très net ralentissement par rapport aux 15 % de hausse jusqu’en octobre.

    D’où une autre interprétation : entendre des « gilets jaunes » décrire des vies de restrictions ne donnait guère envie d’acheter du superflu. Encore leur faute, donc ? Peut-être pas…
    Les conjoncturistes disposent de mesures des anticipations des entreprises et des ménages. Un des indices synthétiques phares de l’Insee est la confiance des ménages. De nombreux travaux montrent qu’il est un prédicteur de l’évolution de la consommation à court terme. Or, dès le mois de février 2018, il entame une descente. En mai, il passe sous sa moyenne historique. En septembre, il est au plus bas depuis avril 2016. Toutes les composantes se détériorent, en particulier l’opportunité de faire des achats importants et les perspectives d’évolution du niveau de vie. Ces chiffres auraient dû laisser prévoir un gros coup de frein à la consommation à la fin de l’année 2018. « Gilets jaunes » ou pas.

    Excès d’optimisme
    Le raisonnement du gouvernement et des conjoncturistes a été différent. Ils ont estimé que les Français n’avaient pas intégré dans leurs anticipations l’exonération de cotisations des salariés du privé et la baisse de la taxe d’habitation prévue en octobre. Leur confiance allait donc remonter dès novembre et la consommation dans son sillage, dès qu’ils liraient leur fiche de paye et leur feuille d’impôt. Tout aussi optimistes, les commerçants affichaient au début de l’automne des anticipations de hausse des achats et constituaient des stocks pour un Noël qui s’annonçait en fanfare.

    « Il faut questionner la pertinence de la mesure officielle du pouvoir d’achat en France »
    Patatras, la confiance s’est effondrée en novembre, notamment les opportunités d’achats. Difficile d’incriminer les « gilets jaunes » : l’enquête a été menée dans la première partie du mois, et l’acte I était le 17 novembre. On peut donc se demander si les dirigeants économiques, en imaginant des Français myopes que la pédagogie des réformes leur en ferait comprendre les avantages, n’ont pas été, eux, aveugles devant la montée d’un mécontentement social qui ressortait des enquêtes auprès des ménages dès le printemps.

    Il faut aussi questionner la pertinence de la mesure officielle du pouvoir d’achat en France. Elle suit une approche selon les comptes nationaux qui peut parfois s’éloigner du porte-monnaie. Par exemple, si un médicament est déremboursé et que son fabricant en baisse le prix pour sauver son marché, l’indice des prix à la consommation (IPC) diminue. Comme c’est cet indicateur qui est utilisé dans le calcul officiel du pouvoir d’achat, ce dernier augmente !
    En revanche, les normes Eurostat (indice des prix à la consommation harmonisés, IPCH) feraient, elles, apparaître une hausse de prix car elles retiennent la somme nette après remboursement que le consommateur doit sortir de sa poche. Or, en octobre et novembre 2018, l’#inflation mesurée par l’IPCH était significativement supérieure à celle de l’IPC, ce qui confirmait une dégradation de la situation des Français.

    L’indice Insee de confiance des ménages s’est redressé en janvier ; celui de février sera publié le 26 février. L’histoire retiendra peut-être que les concessions obtenues par les « gilets jaunes » ont permis de rétablir un minimum de confiance et sauvé l’économie française !

    • Cet article ne comporte qu’une chose utile, une amorce de critique de la mesure de l’inflation. Pour le reste il me semble qu’il s’agit d’un intellectuel de gauche qui sous couvert de science diffuse une théorie implicite de l’impuissance populaire et de l’innocuité des luttes. Le populaire tout ce qu’il peut c’est consommer si, éclairé, on lui en donne les moyens. Keynes, plus cheap que jamais. En plus il se moque du monde en faisant des « mesures » Macron l’élément déterminant d’un efficace effet placebo.
      #économiste #innocentiste