• Les #cyclistes ont peut-être raison de brûler #arrêts et #feux_rouges. Voici pourquoi

    Sur nos routes, les interactions entre les différents usagers de la route sont souvent une source de #frustration, avec en tête d’affiche celles entre #automobilistes et cyclistes.

    Par exemple, plusieurs automobilistes sont frustrés de voir les vélos traverser une #intersection sans s’immobiliser complètement, alors qu’eux-mêmes se voient dans l’obligation de le faire.

    Pour beaucoup, ce geste est perçu comme une marque d’#indiscipline, voire une double mesure pour les cyclistes. En effet, les cyclistes ne semblent pas encourir de véritable #risque à ralentir au passage d’un panneau d’arrêt plutôt qu’à s’y immobiliser.

    En comparaison, les automobilistes risquent une amende salée pour conduite dangereuse s’ils brûlent un arrêt.

    Alors, faut-il exiger des cyclistes qu’ils respectent les mêmes #règles de la route que les automobilistes, ou au contraire, reconnaître que ces règles ne reflètent pas toujours la réalité du #vélo_en_ville ?

    En tant que professeur de droit à l’Université d’Ottawa spécialisé dans les questions d’#urbanisme, j’ai étudié diverses approches réglementaires adoptées à travers le monde, qui présentent différents avantages et désavantages.

    L’#égalité stricte entre les cyclistes et les conducteurs

    Au Québec, comme dans d’autres juridictions, les codes de la route s’imposent à tous les usagers, qu’ils soient automobilistes ou cyclistes.

    Par exemple, tous les usagers doivent faire un #arrêt_complet aux arrêts et aux feux rouges. Lorsqu’ils contreviennent à ces règles, les cyclistes « sont assujetti(s) aux mêmes obligations que le conducteur d’un véhicule », selon les mots de la Cour suprême du Canada.

    Ainsi, peu importe les différences entre une voiture et un vélo, la loi les traite de façon égale. Bien sûr, cette égalité demeure souvent théorique, car l’application des règles varie selon les contextes et les comportements.

    Une égalité trompeuse

    L’application uniforme des règles de la route peut sembler juste, mais peut créer une #fausse_égalité dans les faits.

    D’une part, les #risques associés aux différents moyens de transport sont incommensurables. Une voiture qui franchit un #feu_rouge peut causer des blessures graves, voire mortelles. Un cycliste, en revanche, peut difficilement infliger de tels #dommages.

    D’autre part, l’#efficacité du vélo dépend du maintien de la #vitesse. S’arrêter complètement, encore et encore, décourage l’usage du vélo, malgré ses nombreux bénéfices pour la santé, l’environnement et la fluidité du trafic.

    Traiter de la même manière deux moyens de transport si différents revient donc à privilégier implicitement l’automobile, un peu comme si l’on imposait les mêmes limitations de vitesse à un piéton et à un camion.

    L’arrêt Idaho

    Plutôt que de traiter les vélos et les voitures comme étant égaux, certaines juridictions ont opté pour une autre voie. Un exemple notable d’un traitement différent est celui de l’État de l’#Idaho.

    En Idaho, depuis 1982, les cyclistes peuvent traiter un panneau d’arrêt comme un cédez-le-passage et un feu rouge comme un panneau d’arrêt. Plusieurs États américains (comme l’Arkansas, le Colorado et l’Oregon) et pays, comme la France et la Belgique, ont adopté des règlements semblables. Au Canada et au Québec, des discussions sont en cours pour adopter un tel règlement.

    Il est important de noter que l’#arrêt_Idaho ne cherche pas à légaliser le chaos sur les routes. En effet, les cyclistes doivent quand même céder la priorité aux voitures qui les précèdent au panneau d’arrêt, ainsi qu’en tout temps aux piétons, et ne peuvent s’engager dans l’intersection que lorsqu’elle est libérée.

    L’arrêt Idaho a trois avantages principaux.

    Premièrement, la règle reconnaît que les dynamiques du vélo diffèrent fondamentalement de celles de la voiture, et ainsi, que ceux-ci ne peuvent pas être traités de façon équivalente.

    Deuxièmement, l’arrêt Idaho permet de décharger les tribunaux et les policiers de #contraventions.

    Troisièmement, l’efficacité du vélo dépend de la conservation de l’élan. S’arrêter complètement, encore et encore, décourage l’usage du vélo, malgré ses nombreux bénéfices pour la santé, l’environnement et la fluidité du trafic.

    Les effets de la #réforme

    Face à ces deux approches très différentes quant au #Code_de_la_route des vélos, on peut se demander laquelle est la plus appropriée.

    Plusieurs études empiriques indiquent que l’adoption de l’arrêt Idaho n’entraîne pas d’augmentation des collisions routières.

    Certaines études suggèrent même une diminution modeste des collisions avec l’Arrêt Idaho. En effet, les cyclistes libèrent plus rapidement les intersections, ce qui réduit leur exposition aux voitures. De plus, les automobilistes deviennent plus attentifs aux mouvements des cyclistes.

    D’ailleurs, la majorité des usagers de la route, automobilistes comme cyclistes, ne respectent souvent pas les arrêts de façon stricte. Selon une étude menée par la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ), seulement 35 % des automobilistes font leurs arrêts correctement. Encore selon la SAAQ, seulement 27 % des cyclistes déclarent faire un arrêt complet aux panneaux d’arrêt obligatoires.

    Bref, l’adoption de l’arrêt Idaho ne créerait pas le chaos, mais viendrait encadrer une pratique déjà commune, et ce, sans compromettre la #sécurité publique, contrairement à certaines inquiétudes. Les cyclistes, qui s’arrêtent rarement complètement en l’absence de circulation, ralentissent toutefois avant de traverser, conscients de leur #vulnérabilité.

    Un changement de culture

    Par ailleurs, l’arrêt Idaho au Québec invite à une réflexion plus large.

    Depuis des décennies, nos lois et nos infrastructures routières sont conçues principalement pour les voitures. Plusieurs automobilistes considèrent encore que les cyclistes sont dangereux et adoptent des comportements délinquants.

    Pourtant, il est important de se souvenir que les voitures représentent le principal danger structurel sur nos routes, et que les cyclistes sont en réalité vulnérables. Ce danger structurel s’est d’ailleurs accru avec la croissance des véhicules utilitaires sport (VUS) et camions, ce qui augmente les risques pour les piétons et des cyclistes.

    L’adoption de l’arrêt Idaho ne donne pas un passe-droit aux cyclistes, mais reconnaît leurs réalités, et légitimise le vélo comme mode de transport, avec un code routier adapté à ses risques et à ses bénéfices. Cette réforme, modeste mais symbolique, pourrait s’inscrire dans un ensemble plus vaste de changements qui offriraient aux citoyens une véritable liberté et sécurité pour se déplacer.

    https://theconversation.com/les-cyclistes-ont-peut-etre-raison-de-bruler-arrets-et-feux-rouges-
    #urban_matter

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    A mettre en lien avec cet autre article :
    Les cyclistes commettent beaucoup moins d’#infractions que les automobilistes
    https://seenthis.net/messages/1142996
    #vélo #mobilité_douce

    • Il me semble qu’il existe une échelle dite ? qui précise la responsabilité suivant le degré de dangerosité. Aux personnes qui conduisent d’adapter leur conduite.

      Poids lourd > Voiture > Moto > Cycliste > Trottinette > Piéton > Poussette

      Et sinon, quels sont ces règlements en france ?

      En Idaho, depuis 1982, les cyclistes peuvent traiter un panneau d’arrêt comme un cédez-le-passage et un feu rouge comme un panneau d’arrêt. Plusieurs États américains (comme l’Arkansas, le Colorado et l’Oregon) et pays, comme la France et la Belgique, ont adopté des règlements semblables .

    • Pour la France, une signalisation spécifique « cédez le passage aux feux » a fait son apparition (timide) pour autoriser une logique qui pourrait s’appliquer plus largement.
      https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/Céder%20le%20passage%20au%20vélo.pdf

      Code de la route vélo : les règles de circulation (divers panneaux spécifiques)
      https://www.drivecase.fr/conseils-prevention/tag/conseils-experts

      Au Québec, il y a beaucoup plus panneaux stop aux intersections (au détriment des priorités à droite) en particulier en milieu urbain.

      Sinon, l’argument selon lequel ces pratiques différentes autorisées aux cyclistes éduquent les automobilistes me parait fondé. On peut en attendre une accidentologie en baisse.

    • Je me fais encore de temps en temps klaxonner quand je passe au rouge alors qu’il y a un panneau m’autorisant à le faire... (rappel d’ailleurs que l’usage de l’avertisseur sonore en ville est interdit en dehors d’un danger imminent) La mentalité de l’automobiliste moyen reste un mystère pour moi, d’autant plus quand je les entends déblatérer leurs conneries sur les autres usagers de la route à la pause du midi (le summum ayant été atteint par une collègue qui se réjouissait d’avoir vu une trottinette se planter).

    • Ici, les panneaux qui transforment un stop en cédez-le-passage pour les cyclistes sont toujours d’un intérêt extrêmement limité : c’est quasiment uniquement des autorisations de tourner à droite, jamais de traverser complètement le carrefour si la voie est libre.

      Je suspecte qu’en France, comme pour le Covid, on déteste l’idée d’un cédez-le-passage dont l’appréciation de sécurité serait laissée à l’usager…

      Sinon, un autre intérêt des autorisations différenciées : plutôt que de se préoccuper des abrutis qui gueulent parce que les vélos passent au rouge, ça permettrait de leur dire qu’ils n’ont qu’à se mettre au vélo pour profiter à leur tour de cette extraordinaire libéralité du code la route.

    • Sinon, il y a tout de même déjà une différence importante entre cyclistes et automobilistes : il n’y a pas de perte de points ni de retrait de permis quand on brûle un feu à vélo.
      https://www.service-public.gouv.fr/particuliers/vosdroits/F20443

      Non, si vous commettez à vélo une infraction au code de la route, vous ne perdez pas de points sur votre permis de conduire.

      Toutefois, vous pouvez être sanctionné par une amende.

      Par contre, je découvre qu’on peut tout de même se prendre un retrait de permis si on fait du vélo bourré :

      De plus, en cas d’infraction grave, le juge peut suspendre votre permis de conduire. Par exemple, en cas de conduite en état d’ivresse ou de mise en danger de la vie d’autrui.

      C’est ballot, parce que justement je prends le vélo exprès pour les sorties arrosées (vu que je suis un type responsable).

  • Les cyclistes commettent beaucoup moins d’#infractions que les automobilistes

    Contrairement à une idée reçue, le #taux_d'infraction des cyclistes est très largement inférieur à celui des #automobilistes. C’est en tout cas le résultat d’une étude danoise basée sur de nombreuses observations du #comportement aux #intersections.

    A l’aide de données provenant de caméras placées dans les carrefours de nombreuses grandes villes du pays, l’autorité routière du Danemark a observé le comportement des cyclistes. Le constat : en #ville, ils commettent beaucoup moins d’#infractions_routières que les automobilistes. Sur un total de 28 579 passages d’intersection par des #cyclistes, le pourcentage d’infraction est inférieur à 5% lorsqu’il existe des infrastructures cyclables, 14% lorsqu’elles sont inexistantes. L’infraction la plus répandue à vélo est le déplacement sur le #trottoir.

    Parallèlement, les autorités routières danoises ont recensé un taux d’infraction de 66% chez les automobilistes en ville, principalement des #excès_de_vitesse. Les conclusions sont les mêmes que celles d’une étude parue l’année dernière, cette fois sur un échantillon de 80 000 passages d’intersections. A Londres, une étude conduite il y a quelques années par l’autorité des transports, concluait qu’environ 16% des cyclistes y commettent des infractions.

    Les infractions des cyclistes, moins nombreuses mais plus visibles que celles des automobilistes

    Le constat peut étonner. Les cyclistes ont souvent la réputation de prendre de nombreuses libertés avec le code de la route, notamment de griller des feux rouges. C’est surtout que les infractions commises par des cyclistes sont en général plus #visibles : griller un #feu_rouge ou rouler sur un trottoir se voit davantage que les infractions commises régulièrement par des automobilistes en ville : excès de vitesse, refus de priorité à un passage piéton, usage de klaxon en absence de danger immédiat, oubli de clignotant, dépassement d’un cycliste à moins d’un mètre. Ces infractions sont souvent trop peu visibles ou trop habituelles pour être remarquées. En outre, de nombreux feux rouges en villes sont équipés de panneaux autorisant les cyclistes à passer, souvent pour tourner à droite, ce qui peut donner l’illusion d’une infraction.

    On ne dispose malheureusement pas encore d’études de ce type en France. On sait cependant que les infractions commises par les automobilistes y sont nombreuses. Selon la plupart des tests effectués, en l’absence de ralentisseurs, d’embouteillages ou de radars, une majorité d’automobilistes français ne respecte pas les zones 30. Et les remontées de données de vitesse des véhicules en free floating des villes européennes montrent que selon les villes, la limite de 50 km/h en ville est franchie dans 35% à 75% des cas.

    L’influence des #pistes_cyclables

    Le nombre d’infractions commises par les cyclistes baisse drastiquement en présence de pistes cyclables. Au Danemark, le taux d’infraction est même trois fois moins élevé. Mais les #infrastructures_cyclables ont également un impact positif sur la #mortalité_routière urbaine en général.

    Des chercheurs de l’Université de Denver ont analysé les données d’accidentologie de 24 grandes villes américaines sur une période de treize ans en étudiant les variables sociologiques, démographiques et leurs infrastructures. Selon leurs conclusions, le facteur le plus influent dans la baisse du nombre de morts sur les routes est l’existence de pistes cyclables. Plus une ville comporte d’infrastructures cyclables, plus ses rues sont sûres pour la totalité de ses habitants (pas seulement pour les cyclistes).

    Selon l’étude, ce type d’#infrastructure dans les villes y réduit la mortalité routière de 44% en moyenne et le nombre d’accidents graves de 50%. A Portland, où de nombreuses pistes cyclables ont été installées, la mortalité a même été réduite de 75% entre 1990 et 2015. La ville de Davis en Californie, considérée par beaucoup comme la capitale du vélo aux Etats-Unis, est également celle où la proportion de morts sur la route par habitant est la plus faible du pays, dix fois inférieure à la moyenne nationale.

    En Europe également, selon une étude de l’OCDE, plus une ville est équipée de pistes cyclables, plus le risque d’un accident mortel est faible : https://www.itf-oecd.org/sites/default/files/docs/road-safety-european-cities-performance-indicators.pdf

    https://www.liberation.fr/planete/2019/07/04/les-cyclistes-commettent-beaucoup-moins-d-infractions-que-les-automobilis
    #vélos #voitures #idées-reçus #stéréotypes #mobilité #mobilité_douce #urbanisme #géographie_urbaine

    ping @reka

  • Gender, technology, and resistance : An interview with #Caroline_Bassett

    Professor Caroline Bassett MAE reflects on the promises and perils of digital technologies, and why critical feminist perspectives remain vital in shaping our technological futures.

    What motivated you and your co-authors to write Furious: Technological Feminism and Digital Futures and what core issues does the book address regarding gender and digital culture?

    “The cheap response to why we wrote Furious is that we were – separately and together – furious! What we were furious about was the way computational technology was being hailed as the future, and as a better future for all, when in fact many developments created problems for many, did little to improve lives, and often exacerbated inequalities. The claims made for technology endlessly revert to the universal; tech, we are told, is ‘for good’ – but the urgent question is always: good for whom, in what way, and where? These questions need to be continually revived in response to new waves of technological innovation, both in relation to industry hype and boosterish academic discourse.

    We all recognise that computational technology is powerful, and that it brings genuinely new developments. But we don’t believe it resets the world or pushes old issues – such as centuries of gendered discrimination, intersecting with other inequalities – to the sidelines. The core issue of the book, then, concerns what we might term, following Berlant, the cruel optimism of promises made about digital developments, particularly as these promises pertain to gender and sexuality.

    We are also furious about waste – the waste of work and opportunity. We’re not anti-computing in a global sense; we are against the waste, the misdirection, and the failure to weigh the costs and possibilities of computational technology against real measures: costs to specific groups, to particular regions, to the environment. We explored this especially in relation to future forms of life, visions of the future, and developments in biotech and health.

    All of this could have produced a very dark book. But we also wanted, through writing, to suggest forms of disruption, possibility, engagement, and solidarity.”

    In Furious, you highlight concerns about the problematic nature of much of the existing discourse on digital culture. Could you elaborate on what makes this writing problematic, and how it influences our understanding of the digital world?

    “One real issue – already clear from the above perhaps – is the fake universalism that pervades much existing discourse on digital culture. Even when the dial shifts from ‘this stuff is good’ to ‘this stuff is evil,’ the assumption is still that it applies equally to everyone. Of course, that’s not the case: what is good for one group often exacerbates suffering and discrimination for another.

    A second issue is the failure on digital culture to historicise. Somebody once said that every generation believes its own technology is exceptional – that it breaks through old barriers and rules, even disrupting earlier possibilities for resistance. In short, that it changes the order of things and determines the future. If you believe this, then history, context, previous injustices and inequalities all become irrelevant in the face of the so-called new. The only thing that matters is the present moment and the possibilities it generates for the future. This kind of short-termism produces a demand to develop technologies to safeguard “future people,” while overlooking the threats, possibilities, and discriminations of contemporary computational culture as a mode of informational capitalism. And because it refuses to recognise the past, it ends up entirely trapped in the present.”

    How do digital technologies, particularly artificial intelligence, both reinforce and challenge existing gender biases? Are there examples where AI has either perpetuated stereotypes or been utilised to promote gender equity?

    “Of course, there are many – and often notorious – examples of how big data has perpetuated existing gender and racial biases; AI bots that became Nazis, or image systems that consistently made doctors male and nurses female. The rise of large language models (today’s AI, if we accept the term) has amplified some of these issues, producing new problems and at larger scales.

    It’s obvious why and how language models are gender biased: they learn from us. Moreover, they have no bodies to ground their assumptions – they are pure discourse. This is partly why they are also highly normative. Homogenisation, the tendency of LLMs to narrow discourse and reproduce the canonical, means dominant ideas are likely to become more powerful and ubiquitous, and oppositional ones less so. I don’t think this is inevitable, but the direction of funding is certainly pushing us that way.

    On the other hand, there are many ways to use AI tools, and artists, teachers, activists, and students are already doing so. Still, the environmental cost of these technologies is urgent and must be addressed.”

    Your career transitioned from technology journalism to academia. How has this journey shaped your approach to studying digital cultures and gender?

    “My time as a tech journalist had a big influence on how I understand and study digital cultures, and questions of gender and intersectional discrimination. When I first started, I worked on a tech business magazine and saw how far vapourware and industry hype – what we might call “industrial imaginaries” – often diverged from the reality of what was actually made or what tech could do. I was also acutely aware of how male this world was, and watched digital technologies being “gendered masculine,” (to quote Judy Wajcman) – from how they were designed to how they were marketed.

    So, from the beginning of my academic life, I was sceptical about promises that technology would deliver universal benefits. Later, working for magazines focusing on Apple technologies, I became very aware of Silicon Valley myth-making. Beautiful design that looked – and in some ways was – radical could also be socially as conservative as ever: designed for the West, with Western culture in mind, and with the ideal user imagined as a white, Western male.

    At the same time, I also had a blast – and met many brilliant women who were hackers, designers, digital media artists, writers, journalists, and campaigners. Some identified as cyber-feminists, and I learned a lot alongside them. Being immersed in industrial tech culture also showed me what could be done with computational technology. Another – better, more equal, freer – world is possible. The fact that technologies that could support building that world are instead so often made for profit takes me back to Furious…”

    How has the intersection of gender studies and digital humanities evolved since you began your career, and what changes do you anticipate in the coming years?

    “I didn’t begin my career in Digital Humanities, at least not in the emerging discipline that later took that name. I was in digital media studies. But I would argue that digital media studies, software studies, and feminist technoscience are all key tributaries of what now constitutes DH. One positive development in DH is that this is increasingly recognised by more people who align themselves, in whole or in part, with the field.

    DH has also begun to move beyond the highly gendered and crudely binary distinction between “hacking” and “yacking” – where one term signalled valued work and the other dismissed as “just talking,” often a cover for the accusation of “uselessly theorizing.” These days, the argument that practice without critical thinking makes no sense has more traction. Feminists – and particularly intersectional feminists – within DH have been central to this shift, and that work needs recognition.

    For me, DH is a cultural study, or it is nothing. It is easier to argue that now than it used to be, and that places DH, amidst all the chaos and violence around us, in a good position to advocate for critical, intersectional feminist perspectives on emerging computational cultures and technologies – and the worlds they don’t determine, but can be used both to secure and to disrupt. I guess in the end, I am hopeful.”

    https://aecardiffknowledgehub.wales/2025/09/30/gender-technology-and-resistance-an-interview-with-caroline
    #genre #technologie #résistance #inégalités #discriminations #environnement #universalisme #faux_universalisme #historicisation #futur #biais #IA #AI #intelligence_artificielle #big_data #LLMs #normativité #homogénéisation #intersectionnalité #gendered_masculine #digital_humanities #féminisme

  • L’#intersectionnalité, de quoi parle-t-on ?

    Le #concept d’« intersectionnalité » peut apporter un nouvel éclairage sur les multiples réalités étudiantes, en transformant les perceptions et la compréhension des enjeux actuels (Fauteux, 2017).

    Au sens littéral, l’inter-sectionnalité constitue le point d’intersection des #appartenances_identitaires d’un individu. Il ne s’agit pas d’une addition des identités, mais de l’#entrecroisement ou de l’#imbrication des #catégories_sociales comme le genre, l’appartenance à un groupe racisé ou la classe (Harper et Kurtzman, 2014 ; Hill Collins et Bilge, 2020).

    Une expérience indivisible

    Selon la perspective intersectionnelle, les différentes réalités ne sont pas hiérarchisées entre elles : l’expérience d’une personne étudiante qui vit du racisme est aussi valide que celle qui vit de l’homophobie. De plus, alors que les actions antidiscriminatoires se concentrent souvent sur une seule discrimination (le sexisme vécu par des étudiantes, par exemple), une perspective intersectionnelle tient compte du fait que plusieurs formes de #discriminations (comme l’homophobie, le racisme, le sexisme) peuvent être vécues au même moment dans la vie d’une personne (Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, 2020).

    L’émergence d’une pensée intersectionnelle remonte au tournant du vingtième siècle, au moment où s’est révélée la complexité des systèmes d’oppression sur la population afro-américaine (Harper et Kurtzman, 2014). C’est toutefois au tournant des années 1990 que le terme « intersectionnalité » a été utilisé afin d’illustrer la situation des femmes afro-américaines et de mettre de l’avant le caractère indivisible de la personne et de son expérience, au fondement de l’interdépendance des catégories sociales (#genre, #classe, #handicap, etc.).

    Au Québec, vingt ans plus tard, la notion d’intersectionnalité a été reprise pour rendre compte des différentes #expériences_vécues par les femmes (Bilge, 2009 ; Juteau, 2010) : une femme blanche scolarisée ne vit pas la même réalité qu’une femme immigrante, par exemple.

    Un outil d’analyse des #inégalités

    En plus d’être une théorie interdisciplinaire, l’intersectionnalité est un outil d’analyse (Lépinard et Mazouz, 2021) qui permet de mieux comprendre comment les #identités — le genre, la classe sociale, l’âge, l’origine ethnoculturelle, le handicap, etc. — se chevauchent et interagissent de manière simultanée pour produire et maintenir des inégalités (Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, 2020).

    Une vision intersectionnelle envisage donc les inégalités comme étant le produit du #croisement de différentes situations sociales, de relations de pouvoir et d’expériences (ibid.).

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    L’approche intersectionnelle opère à deux niveaux :

    - Microsocial : en interrogeant les effets des inégalités sur les vies individuelles, ainsi que les configurations uniques découlant de l’interaction des appartenances identitaires ;
    - Macrosocial : en s’intéressant aux manières dont les systèmes de pouvoir, tels que les institutions économiques, religieuses et gouvernementales, les lois, les politiques ou encore les médias participent à la (re)production des inégalités (Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, 2020).

    L’analyse intersectionnelle peut aller plus loin en prenant en compte quatre dimensions de la vie sociale :

    –Organisationnelle, qui renvoie aux organisations sociales, politiques et économiques ;

    –Intersubjective, qui fait référence aux relations interpersonnelles dans des situations formelles ou informelles ;

    –Expérientielle, qui désigne l’expérience subjective des personnes, la manière dont elles se perçoivent et leurs attitudes avec les autres ;

    –Représentationnelle, qui renvoie au cadre de référence à partir duquel les individus et les groupes se représentent eux-mêmes et le monde (ibid.).

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    La notion de « #privilège » (voir la figure La #roue de l’intersectionnalité) réfère quant à elle à un avantage octroyé à une personne ou à un groupe de personnes en fonction de l’identité ou du statut dans la société et la valeur qu’on lui donne (l’orientation sexuelle, la présence ou l’absence de handicap, l’appartenance à un groupe majoritaire ou minoritaire, etc.) (Collège Ahuntsic, 2022).

    Une capacité d’agir

    L’approche intersectionnelle présente un intérêt pour les équipes professionnelles et d’intervention des établissements d’enseignement supérieur en rendant visible « la diversité de l’ensemble du public cible de l’éducation inclusive » (Bauer et Borri-Anadon, 2021).

    Sur le plan du sentiment d’appartenance, le partage des expériences contribue à relier et à tisser des solidarités (Fauteux, 2017). En effet, la perspective intersectionnelle inclut la capacité des personnes à se solidariser sur la base de leurs expériences identitaires et à développer des stratégies communes (Pagé, 2014). Cette capacité d’action mobilisatrice, malgré le poids des obstacles et des discriminations, est d’ailleurs au cœur des principes fondateurs de l’intersectionnalité : les femmes afro-américaines ont été des leaders de leurs communautés en créant des mouvements de reprise de pouvoir (Harper, 2013).

    Références

    Bauer, S. et Borri-Anadon, C. (2021). De la reconnaissance à l’invisibilisation  : une modélisation des enjeux conceptuels de la diversité en éducation inclusive. Alterstice  : revue internationale de la recherche interculturelle, 10(2), 45‑55.

    Bilge, S. (2009). Théorisations féministes de l’intersectionnalité. Diogène, 225(1), 70‑88.

    Collège Ahuntsic (2022). Portail (auto)éducatif EDI. Je te vois, je t’entends, je t’écoute.

    Duckworth, S. (2020). Wheel of Power/Privilege [image en ligne]. Instagram.

    Fauteux, J. (2017). Vers de nouvelles pratiques intersectionnelles  : quand parcours migratoire se conjugue avec situation de handicap [mémoire de maitrise, Université de Sherbrooke]. Savoirs UdeS.

    Harper, E. (2013). Ancrages théoriques entre l’intersectionnalité et les pratiques narratives en travail social. Dans E. Harper et H. Dorvil (dir.), Le travail social. Théories, méthodologies et pratiques (p. 47‑78). Presses de l’Université du Québec.

    Harper, E. et Kurtzman, L. (2014). Intersectionnalité  : regards théoriques et usages en recherche et en intervention féministes  : présentation du dossier. Nouvelles pratiques sociales, 26(2), 15‑27.

    Hill Collins, P. et Bilge, S. (2020). Intersectionality (2e éd.). Wiley.

    Juteau, D. (2010). « Nous » les femmes : sur l’indissociable homogénéité et hétérogénéité de la catégorie. L’Homme & la Société, 176‑177(2‑3), 65‑81.

    Lépinard, É. et Mazouz, S. (2021). Pour l’intersectionnalité. Éditions Anamosa.

    Pagé, G. (2014). Sur l’indivisibilité de la justice sociale ou Pourquoi le mouvement féministe québécois ne peut faire l’économie d’une analyse intersectionnelle. Nouvelles pratiques sociales, 26(2), 200‑217.

    Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (2020). L’intersectionnalité [vidéo].

    https://oresquebec.ca/article-de-dossiers/notions-cles/lintersectionnalite-de-quoi-parle-t-on

    #infographie

  • #bell_hooks : Un nom en minuscules pour une vie en majuscules

    De #Gloria_Watkins à bell hooks, itinéraire d’une penseuse étatsunienne qui nous fait reconsidérer nos compromis avec les #dominations de #genre, de #race et de #classe.

    Elle est née Gloria Watkins, mais prend le nom de bell hooks pour signer ses livres et cela nous dit déjà beaucoup d’elle. Ce nom en minuscule, c’est en effet d’abord une volonté de rester au second plan derrière ses textes et ses idées. Une humilité paradoxale, car la méthode de bell hooks, c’est aussi placer ses expériences intimes au cœur de ses développements théoriques. Elle ne s’efface donc pas derrière ses textes, loin de là et nous la découvrons ainsi au détour de nombreux passages de ses ouvrages.

    Ce nom, c’est aussi un hommage à sa mère et à sa grand-mère, deux figures récurrentes auxquelles elle se réfère au fil de son œuvre, sans toutefois toujours les ménager, sa mère notamment. Car c’est ce qui frappe à la lecture de bell hooks, de son œuvre théorique comme autobiographique : une plume et une pensée exigeantes, vibrantes, parfois tranchantes qui nous obligent à considérer avec lucidité nos propres compromis avec les dominations de genre, de race et de classe. Une plume vivante aussi qui explore notre appartenance territoriale (son Kentucky natal), ainsi que notre vie intime, affective et sexuelle – sans fard.

    Mémoires d’une petite fille noire

    Dans Noir d’Os, bell hooks évoque sa découverte de L’Œil le plus bleu de Toni Morrison : une épiphanie littéraire pour l’adolescente qu’elle est alors, qui trouve enfin dans un texte de quoi pallier les « lacunes » d’une littérature au sein de laquelle elle peine à se reconnaître. L’autrice, à son tour, écrit ses mémoires dans Noir d’Os et Rouge Feu pour combler ces absences, d’où l’importance de la lire encore aujourd’hui, explique Axelle Jah Njiké : « On a un déficit en matière de textes illustrant l’intime des personnes noires, et particulièrement des femmes noires, et ô combien des petites filles noires. »

    Dans ces textes, bell hooks raconte notamment le rôle de la #lecture, mais aussi un contexte familial troublé où la #violence et la #maltraitance étaient choses communes.

    Quelle importance aujourd’hui ?

    Malgré la célébrité certaine de bell hooks aux États-Unis, l’autrice ne figure pas parmi les féministes noires que l’on rencontre le plus, raconte la sociologue Fania Noël : « Aux États-Unis, qui souffrent un peu moins de la rareté du marché sur les études noires que la France, bell hooks fait partie d’un panthéon d’autrices, d’intellectuels, d’artistes féministes noires qui sont nombreuses. »

    En France, bell hooks bénéficie d’une relative renommée : on fait d’elle l’une des papesses de la notion d’#intersectionnalité, terme créé par Kimberley Williams Crenshaw pour identifier les populations qui cumulent et subissent plusieurs formes de discriminations. Une popularité qui s’explique notamment par les multiples rééditions de ses ouvrages, bien plus présents sur la scène littéraire que ceux des afroféministes francophones. Y aurait-il une volonté de faire écran à ce qui se joue sur nos territoires ?

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/avoir-raison-avec/episode-1-une-femme-majuscule-6096120
    #podcast #audio
    ping @reka @isskein @karine4 @_kg_

  • Rage against the racism. Prendre le temps de penser, s’armer avec les sciences sociales

    « It’s raining haine miskina » - Les moules s’en frittent

    Dans le contexte actuel d’attaques contre les personnels de l’université sur les questions de #discrimination ainsi que contre les militantes et militants qui luttent sur ces questions, nous souhaitons donner des éléments de compréhension de ce qui se joue dans notre université suite à la #censure par le président de l’UGA d’œuvres d’art sur notre campus.

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    Signer la pétition intersyndicale : pour le rétablissement de l’intégrité de l’œuvre artistique réalisée par les étudiants et personnels de l’UGA pendant le « #Mois_de_l’égalité », exposée dans la galerie des amphithéâtres du bâtiment Pierre Mendès France :
    https://mobilisation-uga.ouvaton.org/2025/05/21/petition-pour-defendre-la-liberte-dexpression-a-luga
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    Très récemment, l’#UNI, soutenue par des médias d’extrême droite (CNews) et de droite réactionnaire (Le Figaro), s’est offusqué de l’affichage (sous forme de stickers) de messages construits et produits lors d’activités organisées pour le mois de l’Égalité. L’UNI a aussi annoncé avoir porté #plainte contre l’Université. Le président a décidé suite à cela de faire retirer certains de ces stickers qui selon lui « sont incompatibles avec les #valeurs et les #principes républicains que l’université incarne ».


    Le communiqué du président, puis son message à tous les personnels, relayé à sa demande expresse dans certaines structures (notamment plusieurs laboratoires), soulève plusieurs questions de fond, notamment quant aux « valeurs » et aux « principes » mentionnés.

    Quelles sont ces « valeurs » et « principes » qui sont mentionnés, mais jamais définis explicitement par le président ?

    Qui décide, et comment, quelles sont ces « valeurs » ? Est-on sûr·es qu’elles soient largement partagées dans notre communauté universitaire ?

    Comment ces valeurs sont-elles censées être mises en œuvres, sans réponse à ces premières questions ?

    Les décisions prises, de communications, et de censures de certains messages, ont été prises sans consulter aucune instance représentative. Au vu du contenu des écrits du président, on peut aussi légitimement se demander si les personnels et services compétent·es ou expert·es de ces questions ont bien été impliqué·es ou au moins consulté·es pour ces décisions et communications.

    Dès les premiers articles parus dans les médias, et en prévention d’éventuelles réactions irréversibles, la CGT a pris contact avec le président avant que les messages ne soient enlevés, et s’est rendue disponible pour échanger avec lui sur ces questions que l’on sait sensibles. Cet échange n’a finalement pas pu avoir lieu. Les méthodes de communication du président, qui choisit lui-même, plutôt que le dialogue apaisé, de diffuser au maximum sa propre analyse, nous contraint à des modes d’échanges publics que nous regrettons, mais qui nous paraissent nécessaires pour rétablir un peu d’équilibre et de pluralisme dans l’analyse de la situation.

    Voici donc quelques clés pour vous faire une idée par vous même, loin des discours réducteurs et simplistes.

    Prenons par exemple l’accusation de « #racisme_anti-blanc », lancée sur CNews en particulier.

    Le #racisme kesako ?
    À part pour les personnes qui militent ou qui se forment sur ces questions-là, la question peut sembler absurde. Voyons, nous savons toutes et tous ce que c’est que le racisme ! Sauf que c’est un peu plus compliqué que ce qu’on peut penser au premier abord.

    Si on pense que le racisme c’est insulter une personne pour ce qu’elle est, alors oui tout le monde peut en être victime. Cela semble simple… sauf que. Nous y reviendrons plus bas.


    En revanche, si on considère le racisme par ses conséquences sociales ou par le biais de la statistique, alors tout d’un coup les choses changent. En effet, statistiquement, en France, les personnes qui sont discriminées dans l’accès au logement, l’accès au travail, l’accès aux stages, le droit à la santé, ou les personnes victimes d’agressions racistes ou des violences policières, ce sont les personnes identifiées comme noires, arabes, musulmanes, juives, roms ou asiatiques [1]. Pas les personnes perçues comme blanches.

    Cela ne veut pas dire que ces dernières ne vivent pas des situations sociales difficiles mais être non-blanc·he implique un risque largement accru de vivre des #discriminations et des #violences_sociales.

    Revenons sur la question des insultes et du fameux « racisme anti-blanc » si cher à l’extrême-droite.

    Statistiquement, ce racisme en direction des blancs est inexistant. Par exemple, il est socialement toujours avantageux d’être identifié comme blanc pour trouver un logement ou un emploi.

    Quelques repères pour comprendre certains concepts
    Personne racisée : il s’agit non pas de dire que ces personnes sont d’une race différente mais bien de dire qu’elle subissent une assignation à l’appartenance à un groupe supposé (« les noirs », « les arabes » par exemple) et aux #représentations_racistes qui y sont attachées.

    Blanc : utiliser les termes « noir » ou « asiatique », etc, qui renvoie à une caractéristique biologique floue (couleur de peau, forme du visage, …), ou à une origine supposée, peut sembler étrange pour des militants de l’#anti-racisme. Sauf que cela recouvre des réalités sociales de discrimination et de violence. L’utilisation du terme « blanc » est une façon de renvoyer les personnes non racisé·es à leurs caractéristiques pseudo-biologiques, comme pour les personnes racisées. Sauf que dans ce cas, cela ne recouvre pas des réalités de #discriminations.

    #Privilège_blanc : les avantages qu’ont les blancs dans les différentes sphères (accès au logement, à l’emploi etc) en comparaison des personnes non blanches, sans qu’ils ou elles s’en rendent compte. On peut de la même façon parler de #privilège_masculin pour parler de la question féministe, de #privilège_bourgeois pour parler de déterminisme social, de #privilège_valide pour parler du handicap, de privilège lié à l’âge, etc.

    #Intersectionnalité : l’idée ici est de dire que ce que subit une personne discriminée par plusieurs critères n’est pas la simple addition de chacun des effets associés. Par exemple, ce que subit comme violence sociale une femme noire n’est pas la simple addition des violences racistes et des violences sexistes. Le monde n’est pas linéaire, les représentations complexes.

    #Racisme_structurel : on utilise cette expression quand un effet raciste est fortement ancré dans la société. Il n’est pas forcément la conséquence d’une intention directe mais peut aussi l’être d’une façon d’organiser la société, un procédé administratif, etc. et de représentations racistes établies. On peut aussi parler de sexisme structurel, de validisme structurel, etc.

    #Woke : c’est aussi l’occasion de rappeler ici que le terme woke est utilisé depuis longtemps aux États-Unis, qu’il désigne simplement pour les personnes victimes de racisme le fait de rester éveillées sur ces questions et de ne rien laisser passer. Ce n’est en rien une théorie, juste un slogan pour la mobilisation et la vigilance.

    Murs blancs, peuple muet

    Revenons sur les #stickers, créés dans le cadre d’un #atelier organisé à l’occasion du mois de l’égalité, stickers qui ont été tant décriés par l’UNI et les médias de droite réactionnaire et d’extrême droite. Les réactions de ces médias servent le programme politique de l’#extrême_droite qui se présente aujourd’hui comme anti-raciste et premier rempart contre l’antisémitisme, alors que les liens des partis concernés ou des propriétaires de ces grands médias avec les mouvements néonazis ou ouvertement racistes, homophobes et sexistes sont parfaitement établis.

    Mais il n’est pas inutile, pour les personnes non spécialistes et honnêtes intellectuellement, de donner quelques clés de lecture de certains des stickers incriminé.

    Parmi les 32 messages initiaux, collés lors de l’atelier, et qui sont restés un mois et demi sur les vitres, seuls 16 restent intacts à l’heure actuelle. Les 16 autres ont donc été soit effacés à la demande du président, soit vandalisés. Le président n’ayant pas précisé quels messages étaient « incompatibles avec les valeurs », difficile de connaître le responsable réel de l’effacement de chaque message ; reste que nous faisons le lien entre la #censure_institutionnelle largement revendiquée, qui ouvre la porte au #vandalisme des messages restants.

    Voici les phrases qui ont été retirées :

    – « La Terre est monochrome comme un arc-en-ciel, le racisme est juste blanc »
    – « Le monde a mal, normal, il est dirigé par des blancs et des mâles. »
    – « Le bruit et l’odeur de la lacrymo et de la peur, dans les quartiers où les fachos sont passés. »
    – « Halal z’enfants de la patrie »
    – « J’aimerais grand remplacer le gouvernement français »
    – « Il était une fois des corps de mille couleurs illuminant le ciel d’un nuage iridescent les cœurs » (waaaa <3)
    – « Les fascistes c’est comme les enfants, c’est mieux chez les autres »
    – « Toutes les soirées en amphi mais pas de diplôme à la sortie. Qui suis-je ? » (à l’envers, en-dessous : « Le personnel de ménage »)
    – « Ce n’est pas du racisme, c’est une question de culture mais ce sont eux qui font votre couture »
    – « La pookie dans le faf »
    – « Aux échecs comme dans la vie, les blancs ont un coup d’avance »
    – « Racines emmêlées qui renvoient à une même forêt »
    – « Le bruit hait l’odeur »
    – « C’est le travail d’arabe qui a construit Versailles »
    – « L’amour est enfant de Bohème mais on les a mis dans des HLM »

    Sur ces 15 messages seuls 3 parlent explicitement des « blancs » ; les actions de censure ou de vandalisme visaient donc plus largement certains messages du fait de leur simple caractère politique.

    Ces messages nous inspirent ces quelques explications ou interprétations possibles, forcément partielles et partiales, comme le sera toute interprétation de messages à portée artistique.

    La notion de « #hiérarchie_des_races » a été inventée en Europe au moment où celle-ci a commencé à conquérir le monde. Nos plus grands penseurs de la Renaissance et des Lumières, que nous adorons citer, nos penseurs et scientifiques des 18ème, 19ème et 20ème siècles ont produit des textes d’un racisme incroyable, justifiant la domination coloniale et esclavagiste ainsi que l’antisémitisme par des #théories_racistes. C’est une production de notre civilisation européenne et il faut bien le reconnaître. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu de violence ou d’#esclavage avant. Mais la théorisation de la #hiérarchisation_des_races comme justification à ces violences, c’est chez nous, européens. Cela appartient à notre civilisation. Et cela a permis de justifier les pires horreurs, de l’extermination quasi complète des peuples autochtones d’Amérique, l’esclavage des peuples noirs d’Afrique pour remplacer cette population, les massacres de la colonisation comme à Madagascar, en Algérie, en Indochine comme dans toutes les colonies qu’elles soient françaises ou pas, et bien évidemment la solution finale nazie contre les juifs et les roms. En ce sens, le racisme est blanc.

    Le racisme au sens de domination sociale est produit et maintenu par les dominants, les décideurs. Or dans nos sociétés européennes, très majoritairement, les dominants sont blancs. En ce sens, le racisme est (majoritairement) blanc.

    Même lecture sociale : en France comme dans de nombreux pays qui dominent économiquement, ceux qui dirigent font partie des catégories privilégiées : des blancs, des #hommes, CSP+ qui n’ont aucun intérêt objectif à voir les choses s’améliorer pour les autres. Et la lutte pour l’égalité passe bien évidemment par la question démocratique, la question de la légitimité de nos représentants (voir leurs catégories socio-professionnelles, leur genre, leur couleur, leur age, ...) ainsi que des ministres qui sont par exemple très nombreux à être millionnaires.

    Il s’agit de dénoncer le racisme comme phénomène social et structurel. Le privilège blanc.

    Pour en revenir au contexte


    Le racisme est bien du côté de l’UNI dont plusieurs de ses membres ont soutenu des candidats aux élections objectivement racistes et parfois multi-condamnés pour cela, ou qui sont aussi membres de partis d’extrême droite.

    Le racisme est dans le camp du RN et de Reconquête qui utilisent des signes distinctifs de ralliement appelés #dog_whistles (https://blogs.mediapart.fr/ilkor/blog/211222/les-dog-whistles-des-extremes-droites-liste-non-exhaustive) pour continuer à communiquer et militer avec les pires militants néonazis et racistes.

    Le racisme est du côté du #ministre_de_l’Intérieur qui désigne systématiquement les musulmans comme la source de tous les maux.

    Il est du côté du président de la République qui laisse depuis des mois les Palestiniens se faire massacrer sans réagir sérieusement, et laisse depuis des années les migrants crever en Méditerranée et dans l’Atlantique en laissant les ONG agir dans des conditions déplorables.

    Dans notre Université, le choix du Président de qualifier de non conforme à nos valeurs les stickers cités plus haut, les retirer, sans en faire l’analyse, sans discuter avec le groupe qui les a créés, est un cadeau fait à l’UNI et à l’extrême droite, ainsi qu’aux médias tenus par celle-ci. C’est un manque de respect et de solidarité avec les personnels et les étudiant.es qui ont passé du temps à travailler pour produire ces œuvres, et à qui nous apportons tout notre soutien. C’est une porte ouverte aux prochaines attaques racistes et réactionnaires qui ne manqueront pas de venir.

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    [1] Pour creuser la question, de nombreux travaux et études sont disponibles : voir par exemple le dossier « Racisme et discrimination » de l’Ined (https://www.ined.fr/fr/ressources-methodes/etat-de-la-recherche/racisme-et-discrimination), les rapports de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) (https://www.cncdh.fr/actualite/cncdh-publie-le-rapport-2023-lutte-contre-racisme-antisemitisme-xenophobie), le guide de ressources UGA « Lutter contre le racisme et l’antisémitisme » (https://www.univ-grenoble-alpes.fr/lutte-contre-le-racisme-et-l-antisemitisme/guide-de-ressources-de-lutte-contre-le-racisme-et-l-antisemitism), l’enquête « ACADISCRI : Inégalités de traitement, conditions d’étude et de travail dans l’enseignement supérieur et la recherche (https://acadiscri.hypotheses.org).

    https://cgt.fercsup.net/syndicats/auvergne-rhone-alpes/universite-de-grenoble/uga/article/rage-against-the-racism-prendre-le-temps-de-penser-s-armer-avec-les-sci

    #UGA #Université_grenoble_alpes #petite_poissonne #tags #graffitis #art #oeuvres_d'art #ESR #universités #France

    ping @karine4

  • La Peur au Ventre : enquête dans l’urgence
    https://radioparleur.net/2025/05/07/la-peur-au-ventre-film-face-a-lurgence

    Aux États-Unis, sonne l’alarme d’une bascule historique dans les luttes féministes : le droit à l’avortement est enterré. Dans La Peur au Ventre, la réalisatrice, Léa Clermont-Dion, nous promène dans un film documentaire hésitant, au cœur des mouvements pro-choix et “pro-vie” étasuniens comme canadiens. Anti-avortement : jeunes et mobilisé·es Iels sont vieux, adultes mais […] L’article La Peur au Ventre : enquête dans l’urgence est apparu en premier sur Radio Parleur.

    #Au_fil_des_luttes #Carousel_1 #Antifascisme #avortement #cinéma #cinéma_documentaire #droit_à_l'avortement #Etats-Unis #Féminisme #International #intersectionnel #liberté

  • 23 novembre : plusieurs déferlantes féministes se sont tenues en France
    https://radioparleur.net/2024/12/03/le-gouvernement-nous-ignore-une-deferlante-feministe-dans-les-rues

    Radio Parleur s’est rendu à la #manifestation parisienne du 23 novembre 2024 contre les #violences_sexistes_et_sexuelles, qui partait de la gare du Nord jusqu’à la place de la Bastille. Cette manifestation a rassemblé 12 500 personnes selon la police et 80 000 selon les organisateur·ices. En France, on dénombre un viol ou […] L’article 23 novembre : plusieurs déferlantes féministes se sont tenues en France est apparu en premier sur Radio Parleur.

    #Au_fil_des_luttes #Carousel_1 #Toujours_en_lutte #Féminisme #Intersectionnelle #Lutte

  • #Pierre_Gaussens, sociologue : « Les #études_décoloniales réduisent l’Occident à un ectoplasme destructeur »

    Le chercheur détaille, dans un entretien au « Monde », les raisons qui l’ont conduit à réunir, dans un livre collectif, des auteurs latino-américains de gauche qui critiquent les #fondements_théoriques des études décoloniales.

    S’il passe son année en France comme résident à l’Institut d’études avancées de Paris, Pierre Gaussens évolue comme sociologue au Collège du Mexique, à Mexico, établissement d’enseignement supérieur et de recherche en sciences humaines. C’est d’Amérique latine qu’il a piloté, avec sa collègue #Gaya_Makaran, l’ouvrage Critique de la raison décoloniale. Sur une contre-révolution intellectuelle (L’Echappée, 256 pages, 19 euros), regroupant des auteurs anticoloniaux mais critiques des études décoloniales et de leur « #stratégie_de_rupture ».

    Que désignent exactement les études décoloniales, devenues un courant très controversé ?

    Les études décoloniales ont été impulsées par le groupe Modernité/Colonialité, un réseau interdisciplinaire constitué au début des années 2000 par des intellectuels latino-américains, essentiellement basés aux Etats-Unis. Il comptait, parmi ses animateurs les plus connus, le sociologue péruvien #Anibal_Quijano (1928-2018), le sémiologue argentin #Walter_Mignolo, l’anthropologue américano-colombien #Arturo_Escobar, ou encore le philosophe mexicain d’origine argentine #Enrique_Dussel (1934-2023). Les études décoloniales sont plurielles, mais s’articulent autour d’un dénominateur commun faisant de 1492 une date charnière de l’histoire. L’arrivée en Amérique de Christophe Colomb, inaugurant la #colonisation_européenne, aurait marqué l’entrée dans un schéma de #pouvoir perdurant jusqu’à aujourd’hui. Ce schéma est saisi par le concept central de « #colonialité », axe de #domination d’ordre racial qui aurait imprégné toutes les sphères – le pouvoir, le #savoir, le #genre, la #culture.

    Sa substance est définie par l’autre concept phare des études décoloniales, l’#eurocentrisme, désignant l’hégémonie destructrice qu’aurait exercée la pensée occidentale, annihilant le savoir, la culture et la mythologie des peuples dominés. Le courant décolonial se fonde sur ce diagnostic d’ordre intellectuel, mais en revendiquant dès le début une ambition politique : ce groupe cherchait à se positionner comme une avant-garde en vue d’influencer les mouvements sociaux et les gouvernements de gauche latino-américains. Il est ainsi né en critiquant les #études_postcoloniales, fondées dans les années 1980 en Inde avant d’essaimer aux Etats-Unis. Les décoloniaux vont leur reprocher de se cantonner à une critique « scolastique », centrée sur des études littéraires et philosophiques, et dépourvue de visée politique.

    Pourquoi avoir élaboré cet ouvrage collectif visant à critiquer la « #raison_décoloniale » ?

    Ce projet venait d’un double ras-le-bol, partagé avec ma collègue Gaya Makaran, de l’Université nationale autonome du Mexique (UNAM). Nous étions d’abord agacés par les faiblesses théoriques des études décoloniales, dont les travaux sont entachés de #simplisme et de #concepts_bancals enrobés dans un #jargon pompeux et se caractérisant par l’#ignorance, feinte ou volontaire, de tous les travaux antérieurs en vue d’alimenter une stratégie de #rupture. Celle-ci a fonctionné, car la multiplication des publications, des revues et des séminaires a permis au mouvement de gagner en succès dans le champ universitaire. Ce mouvement anti-impérialiste a paradoxalement profité du fait d’être basé dans des universités américaines pour acquérir une position de force dans le champ académique.

    La seconde raison tenait à notre malaise face aux effets des théories décoloniales. Que ce soient nos étudiants, les organisations sociales comme les personnes indigènes rencontrées sur nos terrains d’enquête, nous constations que l’appropriation de ces pensées menait à la montée d’un #essentialisme fondé sur une approche mystifiée de l’#identité, ainsi qu’à des #dérives_racistes. Il nous semblait donc crucial de proposer une critique d’ordre théorique, latino-américaine et formulée depuis une perspective anticolonialiste. Car nous partageons avec les décoloniaux le diagnostic d’une continuité du fait colonial par-delà les #décolonisations, et le constat que cette grille de lecture demeure pertinente pour saisir la reproduction des #dominations actuelles. Notre ouvrage, paru initialement au Mexique en 2020 [Piel Blanca, Mascaras Negras. Critica de la Razon Decolonial, UNAM], présente donc un débat interne à la gauche intellectuelle latino-américaine, qui contraste avec le manichéisme du débat français, où la critique est monopolisée par une droite « #antiwoke ».

    Le cœur de votre critique se déploie justement autour de l’accusation d’« essentialisme ». Pourquoi ce trait vous pose-t-il problème ?

    En fétichisant la date de #1492, les études décoloniales procèdent à une rupture fondamentale qui conduit à un manichéisme et une réification d’ordre ethnique. L’Occident, porteur d’une modernité intrinsèquement toxique, devient un ectoplasme destructeur. Cette #satanisation produit, en miroir, une #idéalisation des #peuples_indigènes, des #cosmologies_traditionnelles et des temps préhispaniques. Une telle lecture crée un « #orientalisme_à_rebours », pour reprendre la formule de l’historien #Michel_Cahen [qui vient de publier Colonialité. Plaidoyer pour la précision d’un concept, Karthala, 232 pages, 24 euros], avec un #mythe stérile et mensonger du #paradis_perdu.

    Or, il s’agit à nos yeux de penser l’#hybridation et le #métissage possibles, en réfléchissant de façon #dialectique. Car la #modernité a aussi produit des pensées critiques et émancipatrices, comme le #marxisme, tandis que les coutumes indigènes comportent également des #oppressions, notamment patriarcales. Cette #focalisation_ethnique empêche de penser des #rapports_de_domination pluriels : il existe une #bourgeoisie_indigène comme un #prolétariat_blanc. Cette essentialisation suscite, en outre, un danger d’ordre politique, le « #campisme », faisant de toute puissance s’opposant à l’Occident une force par #essence_décoloniale. La guerre menée par la Russie en Ukraine montre à elle seule les limites d’une telle position.

    En quoi le positionnement théorique décolonial vous semble-t-il gênant ?

    La stratégie de rupture du mouvement conduit à plusieurs écueils problématiques, dont le principal tient au rapport avec sa tradition théorique. Il procède à des récupérations malhonnêtes, comme celle de #Frantz_Fanon (1925-1961). Les décoloniaux plaquent leur grille de lecture sur ce dernier, gommant la portée universaliste de sa pensée, qui l’oppose clairement à leur geste critique. Certains se sont rebellés contre cette appropriation, telle la sociologue bolivienne #Silvia_Rivera_Cusicanqui, qui a accusé Walter Mignolo d’avoir détourné sa pensée.

    Sur le plan conceptuel, nous critiquons le galimatias linguistique destiné à camoufler l’absence de nouveauté de certains concepts – comme la « colonialité », qui recoupe largement le « #colonialisme_interne » développé à la fin du XXe siècle – et, surtout, leur faiblesse. Au prétexte de fonder un cadre théorique non eurocentrique, les décoloniaux ont créé un #jargon en multipliant les notions obscures, comme « #pluriversalisme_transmoderne » ou « #différence_transontologique », qui sont d’abord là pour simuler une #rupture_épistémique.

    Votre critique s’en prend d’ailleurs à la méthode des études décoloniales…

    Les études décoloniales ne reposent sur aucune méthode : il n’y a pas de travail de terrain, hormis chez Arturo Escobar, et très peu de travail d’archives. Elles se contentent de synthèses critiques de textes littéraires et théoriques, discutant en particulier des philosophes comme Marx et Descartes, en s’enfermant dans un commentaire déconnecté du réel. Il est d’ailleurs significatif qu’aucune grande figure du mouvement ne parle de langue indigène. Alors qu’il est fondé sur la promotion de l’#altérité, ce courant ne juge pas nécessaire de connaître ceux qu’il défend.

    En réalité, les décoloniaux exploitent surtout un #misérabilisme en prétendant « penser depuis les frontières », selon le concept de Walter Mignolo. Ce credo justifie un rejet des bases méthodologiques, qui seraient l’apanage de la colonialité, tout en évacuant les critiques à son égard, puisqu’elles seraient formulées depuis l’eurocentrisme qu’ils pourfendent. Ce procédé conduit à un eurocentrisme tordu, puisque ces auteurs recréent, en l’inversant, le « #privilège_épistémique » dont ils ont fait l’objet de leur critique. Ils ont ainsi construit une bulle destinée à les protéger.

    Sur quelle base appelez-vous à fonder une critique de gauche du colonialisme ?

    En opposition aux penchants identitaires des décoloniaux, nous soutenons le retour à une approche matérialiste et #dialectique. Il s’agit de faire dialoguer la pensée anticoloniale, comme celle de Frantz Fanon, avec l’analyse du #capitalisme pour renouer avec une critique qui imbrique le social, l’économie et le politique, et pas seulement le prisme culturel fétichisé par les décoloniaux. Cette #intersectionnalité permet de saisir comment les pouvoirs néocoloniaux et le capitalisme contemporain reproduisent des phénomènes de #subalternisation des pays du Sud. Dans cette perspective, le #racisme n’est pas un moteur en soi, mais s’insère dans un processus social et économique plus large. Et il s’agit d’un processus historique dynamique, qui s’oppose donc aux essentialismes identitaires par nature figés.

    « Critique de la raison décoloniale » : la dénonciation d’une « #imposture »

    Les études décoloniales constitueraient une « #contre-révolution_intellectuelle ». L’expression, d’ordinaire réservée aux pensées réactionnaires, signale la frontalité de la critique, mais aussi son originalité. Dans un débat français où le label « décolonial » est réduit à un fourre-tout infamant, cet ouvrage collectif venu d’Amérique latine apporte un bol d’air frais. Copiloté par Pierre Gaussens et Gaya Makaran, chercheurs basés au Mexique, Critique de la raison décoloniale (L’Echappée, 256 pages, 19 euros) élève le débat en formulant une critique d’ordre théorique.

    Six textes exigeants, signés par des chercheurs eux-mêmes anticoloniaux, s’attachent à démolir ce courant, qualifié d’« imposture intellectuelle ». Les deux initiateurs du projet ouvrent l’ensemble en ramassant leurs griefs : l’essentialisation des peuples à travers un prisme culturel par des auteurs qui « partagent inconsciemment les prémisses de la théorie du choc des civilisations ». Les quatre contributions suivantes zooment sur des facettes des études décoloniales, en s’attaquant notamment à la philosophie de l’histoire qui sous-tend sa lecture de la modernité, à quelques-uns de ses concepts fondamentaux (« pensée frontalière », « colonialité du pouvoir »…) et à son « #ontologie de l’origine et de la #pureté ». Un dernier texte plus personnel de la chercheuse et activiste Andrea Barriga, ancienne décoloniale fervente, relate sa désillusion croissante à mesure de son approfondissement de la pensée d’Anibal Quijano, qui lui est finalement apparue comme « sans consistance ».

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/11/24/pierre-gaussens-sociologue-les-etudes-decoloniales-reduisent-l-occident-a-un
    #décolonial

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    • En complément :
      https://lvsl.fr/pourquoi-lextreme-droite-sinteresse-aux-theories-decoloniales

      L’extrême droite veut décoloniser. En France, les intellectuels d’extrême droite ont pris l’habitude de désigner l’Europe comme la victime autochtone d’une « colonisation par les immigrés » orchestrée par les élites « mondialistes ». Renaud Camus, théoricien du « grand remplacement », a même fait l’éloge des grands noms de la littérature anticoloniale – « tous les textes majeurs de la lutte contre la colonisation s’appliquent remarquablement à la France, en particulier ceux de Frantz Fanon » – en affirmant que l’Europe a besoin de son FLN (le Front de Libération Nationale a libéré l’Algérie de l’occupation française, ndlr). Le cas de Renaud Camus n’a rien d’isolé : d’Alain de Benoist à Alexandre Douguine, les figures de l’ethno-nationalisme lisent avec attention les théoriciens décoloniaux. Et ils incorporent leurs thèses, non pour contester le système dominant, mais pour opposer un capitalisme « mondialiste », sans racines et parasitaire, à un capitalisme national, « enraciné » et industriel.

      Article originellement publié dans la New Left Review sous le titre « Sea and Earth », traduit par Alexandra Knez pour LVSL.

    • Les pensées décoloniales d’Amérique latine violemment prises à partie depuis la gauche

      Dans un livre collectif, des universitaires marxistes dénoncent l’« imposture » des études décoloniales, ces théories qui tentent de déconstruire les rapports de domination en Amérique latine. Au risque de la simplification, répondent d’autres spécialistes.

      PourPour une fois, la critique ne vient pas de la droite ou de l’extrême droite, mais de courants d’une gauche marxiste que l’on n’attendait pas forcément à cet endroit. Dans un livre collectif publié en cette fin d’année, Critique de la raison décoloniale (L’échappée), une petite dizaine d’auteur·es livrent une charge virulente à l’égard des études décoloniales, tout à la fois, selon eux, « imposture », « pensée ventriloque », « populisme » et « contre-révolution intellectuelle ».

      Le champ décolonial, surgi dans les années 1990 sur le continent américain autour de penseurs comme Aníbal Quijano (1928-2018), reste confidentiel en France. Ce sociologue péruvien a forgé le concept de « colonialité du pouvoir », qui renvoie aux rapports de domination construits à partir de 1492 et le début des « conquêtes » des Européens aux Amériques. Pour ces intellectuel·les, les vagues d’indépendances et de décolonisations, à partir du XIXe siècle, n’ont pas changé en profondeur ces rapports de domination.

      La première génération des « décoloniaux » sud-américains, autour de Quijano, de l’historien argentino-mexicain Enrique Dussel (1934-2023) et du sémiologue argentin Walter Mignolo (né en 1941), a développé à la fin des années 1990 un programme de recherche intitulé « Modernité/Colonialité/Décolonialité » (M/C/D). Ils ont analysé, souvent depuis des campus états-uniens, la « colonialité », non seulement du « pouvoir », mais aussi des « savoirs » et de « l’être ».

      Pour eux, 1492 est un moment de bascule, qui marque le début de la « modernité » (le système capitaliste, pour le dire vite) et de son revers, la « colonialité » : le système capitaliste et le racisme sont indissociables. Selon ces auteurs, « le socle fondamental de la modernité est le “doute méthodique” jeté sur la pleine humanité des Indiens », doute qui deviendra un « scepticisme misanthrope systématique et durable » jusqu’à aujourd’hui, expliquent Philippe Colin et Lissell Quiroz dans leur ouvrage de synthèse sur les Pensées décoloniales. Une introduction aux théories critiques d’Amérique latine, publié en 2023 (éditions de La Découverte).

      « Au-delà des indéniables effets de mode, la critique décoloniale est devenue l’un des paradigmes théoriques incontournables de notre temps », écrivent encore Colin et Quiroz. Depuis la fin des années 1990, cette manière de critiquer le capitalisme, sans en passer par le marxisme, s’est densifiée et complexifiée. Elle a été reprise dans la grammaire de certains mouvements sociaux, et récupérée aussi de manière rudimentaire par certains gouvernements étiquetés à gauche.

      C’est dans ce contexte qu’intervient la charge des éditions L’échappée, qui consiste dans la traduction de six textes déjà publiés en espagnol (cinq au Mexique en 2020, un autre en Argentine en 2021). Parmi eux, Pierre Gaussens et Gaya Makaran, deux universitaires basé·es à Mexico, l’un Français, l’autre Polonaise, s’en prennent à ces « discours académiques qui veulent parler à la place des subalternes » et dénoncent une « représentation ventriloque des altérités ».

      Préoccupé·es par l’influence grandissante des théories décoloniales dans leur milieu universitaire, Gaussens et Makaran veulent exposer leurs « dangers potentiels ». Dont celui de contribuer à « justifier des pratiques discriminatoires et excluantes, parfois même ouvertement racistes et xénophobes, dans les espaces où celles-ci parviennent à rencontrer un certain écho, surtout à l’intérieur du monde étudiant ».

      Les critiques formulées par ces penseurs d’obédience marxiste sont légion. Ils et elles reprochent une manière de penser l’Europe de manière monolithique, comme un seul bloc coupable de tous les maux – au risque d’invisibiliser des luttes internes au continent européen. Ils contestent la focalisation sur 1492 et jugent anachronique la référence à une pensée raciale dès le XVe siècle.

      De manière plus globale, ils dénoncent un « biais culturaliste », qui accorderait trop de place aux discours et aux imaginaires, et pas assez à l’observation de terrain des inégalités économiques et sociales ou encore à la pensée de la forme de l’État au fil des siècles. « L’attention qu’ils portent aux identités, aux spécificités culturelles et aux “cosmovisions” les conduit à essentialiser et à idéaliser les cultures indigènes et les peuples “non blancs”, dans ce qui en vient à ressembler à une simple inversion de l’ethnocentrisme d’origine européenne », écrit le journaliste Mikaël Faujour dans la préface de l’ouvrage.

      Ils critiquent encore le soutien de certains auteurs, dont Walter Mignolo, à Hugo Chávez au Venezuela et Evo Morales en Bolivie – ce que certains avaient désigné comme une « alliance bolivarienne-décoloniale », au nom de laquelle ils ont pu soutenir des projets néo-extractivistes sur le sol des Amériques pourtant contraires aux intérêts des populations autochtones.

      Dans une recension enthousiaste qu’il vient de publier dans la revue Esprit, l’anthropologue Jean-Loup Amselle parle d’un livre qui « arrive à point nommé ». Il critique le fait que les décoloniaux ont « figé », à partir de 1492, l’Europe et l’Amérique en deux entités « hypostasiées dans leurs identités respectives ». « Pour les décoloniaux, insiste Amselle, c’est le racisme qui est au fondement de la conquête de l’Amérique, bien davantage que les richesses qu’elle recèle, et c’est le racisme qui façonne depuis la fin du XVe siècle le monde dans lequel on vit. »

      La parole d’Amselle importe d’autant plus ici qu’il est l’un des tout premiers, depuis la France, à avoir critiqué les fondements de la pensée décoloniale. Dans L’Occident décroché. Enquête sur les postcolonialismes (Seuil, 2008), il consacrait déjà plusieurs pages critiques en particulier de la pensée « culturaliste », essentialiste, de Walter Mignolo lorsque ce dernier pense le « post-occidentalisme ».

      À la lecture de Critique de la raison décoloniale, si les critiques sur les partis pris téléologiques dans certains travaux de Walter Mignolo et Enrique Dussel visent juste, la virulence de la charge interroge tout de même. D’autant qu’elle passe presque totalement sous silence l’existence de critiques plus anciennes, par exemple sur le concept de « colonialité du pouvoir », en Amérique latine.

      Dans une recension publiée dans le journal en ligne En attendant Nadeau, l’universitaire David Castañer résume la faille principale du livre, qui « réside dans l’écart entre ce qu’il annonce – une critique radicale de la théorie décoloniale dans son ensemble – et ce qu’il fait réellement – une lecture du tétramorphe Mignolo, Grosfoguel [sociologue d’origine portoricaine – ndlr], Quijano, Dussel ». Et de préciser : « Or, il y a un grand pas entre critiquer des points précis des pensées de ces quatre auteurs et déboulonner cette entité omniprésente que serait le décolonial. »

      Tout se passe comme si les auteurs de cette Critique passaient sous silence la manière dont ce champ s’est complexifié, et avait intégré ses critiques au fil des décennies. C’est ce que montre l’ouvrage de Colin et Quiroz dont le dernier chapitre est consacré, après les figures tutélaires des années 1990 – les seules qui retiennent l’attention de Gaussens et de ses collègues –, aux « élargissements théoriques et militants ».
      Méta-histoire

      L’exemple le plus saillant est la manière dont des féministes, à commencer par la philosophe argentine María Lugones (1944-2020), vont critiquer les travaux de Quijano, muets sur la question du genre, et proposer le concept de « colonialité du genre », à distance du « féminisme blanc », sans rejeter pour autant ce fameux « tournant décolonial ».

      Idem pour une pensée décoloniale de l’écologie, à travers des chercheurs et chercheuses d’autres générations que celles des fondateurs, comme l’anthropologue colombien Arturo Escobar (qui a critiqué le concept de développement comme une invention culturelle d’origine occidentale, et théorisé le « post-développement ») ou l’Argentine Maristella Svampa, devenue une référence incontournable sur l’économie extractiviste dans le Cône Sud.

      La critique formulée sur la fixation problématique sur 1492 chez les décoloniaux ne convainc pas non plus Capucine Boidin, anthropologue à l’université Sorbonne-Nouvelle, jointe par Mediapart : « Les auteurs décoloniaux font une philosophie de l’histoire. Ils proposent ce que j’appelle un méta-récit. Ce n’est pas de l’histoire. Il n’y a d’ailleurs aucun historien dans le groupe des études décoloniales. Cela n’a pas de sens de confronter une philosophie de l’histoire à des sources historiques : on ne peut qu’en conclure que c’est faux, incomplet ou imprécis. »

      Cette universitaire fut l’une des premières à présenter en France la pensée décoloniale, en invitant Ramón Grosfoguel alors à l’université californienne de Berkeley, dans un séminaire à Paris dès 2007, puis à coordonner un ensemble de textes – restés sans grand écho à l’époque – sur le « tournant décolonial » dès 2009.

      Elle tique aussi sur certaines des objections formulées à l’égard d’universitaires décoloniaux très dépendants des universités états-uniennes, et accusés d’être coupés des cultures autochtones dont ils parlent. À ce sujet, Silvia Rivera Cusicanqui, une sociologue bolivienne de premier plan, connue notamment pour avoir animé un atelier d’histoire orale andine, avait déjà accusé dès 2010 le décolonial Walter Mignolo, alors à l’université états-unienne Duke, d’« extractivisme académique » vis-à-vis de son propre travail mené depuis La Paz.

      « Contrairement à ce que dit Pierre Gaussens, nuance Capucine Boidin, Aníbal Quijano parlait très bien, et chantait même, en quechua. C’était un sociologue totalement en prise avec sa société. Il a d’ailleurs fait toute sa carrière au Pérou, à l’exception de voyages brefs aux États-Unis durant lesquels il a échangé avec [le sociologue états-unien] Immanuel Wallerstein. Pour moi, c’est donc un procès d’intention qui fait fi d’une lecture approfondie et nuancée. »
      L’héritage de Fanon

      Au-delà de ces débats de spécialistes, les auteur·es de Critique de la raison décoloniale s’emparent avec justesse de nombreux penseurs chers à la gauche, de Walter Benjamin à Frantz Fanon, pour mener leur démonstration. Le premier chapitre s’intitule « Peau blanche, masque noire », dans une référence au Peau noire, masques blancs (1952) de l’intellectuel martiniquais. Le coup est rude : il s’agit d’accuser sans détour les décoloniaux d’être des « blancs » qui se disent du côté des peuples autochtones sans l’être.

      Pierre Gaussens et Gaya Makaran insistent sur les critiques formulées par Fanon à l’égard du « courant culturaliste de la négritude », qu’ils reprennent pour en faire la clé de voûte du livre. « Si le colonisé se révolte, ce n’est donc pas pour découvrir une culture propre ou un passé glorieux, ni pour prendre conscience de sa “race”, mais parce que l’oppression socio-économique qu’il subit ne lui permet pas de mener une existence pleine et entière », écrivent-ils.

      Dans l’épilogue de sa biographie intellectuelle de Fanon (La Découverte, 2024), Adam Shatz constate que des critiques de l’antiracisme contemporain, depuis le marxisme notamment, se réclament parfois du Martiniquais. « Ce qui intéressait Fanon n’était pas la libération des Noirs, mais celle des damnés de la Terre », confirme-t-il. Mais Shatz se montre aussi plus prudent, alors que « l’horizon de la société post-raciale [que Fanon appelait de ses vœux – ndlr] s’est considérablement éloigné » par rapport à 1961, année de sa mort à 36 ans à peine.

      À lire Shatz, Fanon menait une critique des pensées binaires telles que certains universalistes et d’autres identitaires la pratiquent. La nature de son œuvre la rend rétive aux récupérations. Il juge aussi que les décoloniaux, et des mouvements comme Black Lives Matter, qui se revendiquent tout autant de Fanon que les marxistes critiques de l’antiracisme, « sont plus fidèles à la colère » du psychiatre martiniquais, avec « leur style d’activisme imprégné d’urgence existentielle ».

      Aussi stimulante soit-elle, la publication de Critique de la raison décoloniale témoigne surtout, en creux, de la trop faible circulation des textes originaux des théories décoloniales en France, et du trop petit nombre de traductions disponibles en français (parmi les exceptions notables, la publication aux PUF en 2023 de Philosophie de la libération, de Dussel, classique de 1977). Le livre des éditions de L’échappée est une entreprise de démontage d’un champ encore peu documenté en France, ce qui donne à sa lecture un abord inconfortable.

      Et ce, même si Mikaël Faujour, collaborateur au Monde diplomatique, qui a traduit une partie des textes du recueil en français, avec l’essayiste partisan de la décroissance Pierre Madelin, insiste, dans une préface périlleuse, sur une clé de lecture française, qui complique encore la réception de l’ouvrage. Le journaliste s’inquiète des « cheminements » de la pensée décoloniale dans l’espace francophone, d’abord via les revues Multitudes et Mouvements, puis à travers le parti des Indigènes de la République (PIR) autour notamment de Houria Bouteldja, jusqu’à déplorer « le rapprochement, à partir de 2019, entre les décoloniaux autour du PIR et La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon ».

      La charge n’est pas sans rappeler le débat suscité en 2021 par le texte du sociologue Stéphane Beaud et de l’historien Gérard Noiriel, sur le « tournant identitaire » dans les sciences sociales françaises. Au risque d’ouvrir ici une vaste discussion plus stratégique sur les gauches françaises, qui n’a que peu à voir avec les discussions théoriques posées par les limites des premières vagues de la théorie décoloniale en Amérique latine ?

      Joint par Mediapart, Faujour assure le contraire : « Il n’y a pas d’étanchéité entre les deux espaces [français et latino-américain]. D’ailleurs, le livre [original publié en 2020 au Mexique] contenait un texte critique de Philippe Corcuff sur les Indigènes de la République. Par ailleurs, Bouteldja salue Grosfoguel comme un “frère”. Dussel et Grosfoguel sont venus en France à l’invitation du PIR. Tout l’appareillage lexical et conceptuel, la lecture historiographique d’une modernité débutée en 1492 unissant dans la “colonialité”, modernité, colonialisme et capitalisme, mais aussi la critique de la “blanchité”, entre autres choses, constituent bel et bien un fonds commun. »

      Mais certain·es redoutent bien une confusion dans la réception du texte, dans le débat français. « Pierre Gaussens et Gaya Makaran travaillent depuis le Mexique, avance Capucine Boidin. Je comprends une partie de leur agacement, lorsqu’ils sont face à des étudiants latino-américains, de gauche, qui peuvent faire une lecture simplifiée et idéologique de certains textes décoloniaux. D’autant qu’il peut y avoir une vision essentialiste, romantique et orientaliste des cultures autochtones, dans certains de ces écrits. »

      « Mais en France, poursuit-elle, nous sommes dans une situation très différente, où les études décoloniales sont surtout attaquées sur leur droite. Manifestement, Pierre Gaussens est peu informé des débats français. Ce livre arrive comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, avec le risque de donner à la droite des arguments de gauche pour critiquer les études décoloniales. »

      https://www.mediapart.fr/journal/international/271224/les-pensees-decoloniales-d-amerique-latine-violemment-prises-partie-depuis

  • #Nous_sans_l'État

    Une réflexion profonde et vivifiante sur les #résistances aux États-nations, par l’une des voix les plus fécondes de la critique décoloniale en Amérique latine.

    À rebours des assignations et représentations homogénéisantes façonnées par le #pouvoir, ce recueil de textes fondateurs de #Yasnaya_Aguilar, interroge à la source l’« #être_indigène », ce « nous » inscrit dans une catégorie paradoxale, à la fois levier de #résistance et d’#oppression. Yasnaya Aguilar mène la discussion sur trois points-clés de la recherche d’alternatives à la mondialisation néolibérale : l’importance de la #langue et de la #culture dans la résistance, la complexité de situation des #femmes_autochtones face à l’#assimilationnisme et enfin, la critique de l’État-nation colonial par les « premières nations ».

    Nous sans l’État rappelle avec force une donnée fondamentale : les États-nations modernes ont façonné leur politique d’oppression des peuples par le croisement de logiques capitalistes, patriarcales et coloniales.

    Cette parole située nous invite, chacun depuis nos géographies, à décoloniser nos #imaginaires pour une émancipation définitive et globale.

    https://editionsicibas.fr/livres/nous-sans-letat-une-reflexion-profonde-et-vivifiante-sur-les-resistan
    #Etat-nation #nationalisme #décolonial #peuples_autochtones #intersectionnalité #patriarcat #colonialisme #colonialité #capitalisme
    #livre
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    • Yásnaya Aguilar: la defensora de lenguas que imagina un mundo sin Estados

      #Yásnaya_Elena_Aguilar_Gil es lingüista, escritora, traductora y activista mixe; su voz es cada vez más relevante en un país enfrentado con su propio racismo y donde los pueblos indígenas aún son discriminados y despojados de sus territorios

      En febrero de 2019, Yásnaya Elena Aguilar Gil subió a una de las tribunas más importantes del país y dio un discurso en mixe, o ayuujk, su lengua natal, con motivo de la celebración del Año Internacional de las Lenguas Indígenas. Advirtió que cada tres meses muere una lengua en el mundo, y que esta pérdida cultural acelerada es resultado de las prácticas y políticas nacionalistas de los Estados, en general, y de México, en particular. Sus oyentes en la sala eran los diputados del Congreso de la Unión, uno de los pilares de esa entidad abstracta que llamamos Estado mexicano.

      “Fue México quien nos quitó nuestras lenguas, el agua de su nombre nos borra y nos silencia”, pronunció Yásnaya en su idioma. “Nuestras lenguas continúan siendo discriminadas dentro del sistema educativo, dentro del sistema judicial y dentro del sistema de salud. Nuestras lenguas no mueren solas, a nuestras lenguas las matan”.

      De acuerdo con los datos presentados por la lingüista originaria de Ayutla Mixe (Oaxaca), en 1820, 65 por ciento de quienes habitaban el recién creado territorio mexicano hablaba una lengua indígena. En la actualidad, dos siglos más tarde, esa proporción se redujo a 6.5 por ciento de la población. “Se quitó el valor a nuestras lenguas en favor de una lengua única, el español. Con el fin de hacer desaparecer nuestras lenguas, a nuestros antepasados se les golpeó, se les regañó y se les discriminó por el hecho de hablarlas”, continuó Yásnaya, quien advierte que, de mantenerse la tendencia, en cien años sólo 0.5 por ciento de los mexicanos se considerarán a sí mismos indígenas.

      La desaparición de la diversidad lingüística es una de las mayores preocupaciones de Aguilar Gil, y por eso trata el tema desde distintos ángulos en buena parte de sus ensayos. Sus ideas pueden encontrarse en diversas publicaciones colectivas e individuales, como la antología de autoras mexicanas que escriben sobre feminismo en Tsunami (Sexo Piso, 2018); o el libro breve Un Nosotrxs sin Estado (OnA Ediciones, 2018), donde la autora se pregunta si “necesitamos al Estado para nombrarnos o podemos gobernarnos nosotrxs mismxs”.

      Su voz se vuelve cada vez más relevante en un país enfrentado con su propio racismo, y en el que las comunidades indígenas aún son despojadas de sus territorios por gobiernos y empresas con proyectos extractivistas. A Yásnaya se le escucha en conferencias y en ferias de libros; en los medios de comunicación y en Twitter, la red que amplifica sus reflexiones, sus demandas y sus historias de Ayutla.

      ¿Cómo llega una lingüista mixe, nacida y criada en la sierra norte de Oaxaca, a plantear un debate sobre la deseable —aunque improbable en el corto plazo— desaparición de los Estados? La propia Aguilar Gil describe su recorrido intelectual en una entrevista telefónica. Cuando cursaba la licenciatura de Literaturas Hispánicas, en la UNAM, la estudiante descubrió su pasión por la gramática, y pronto se dio cuenta de que no conocía la descripción gramatical del mixe. No sabía cómo escribir su propia lengua materna. Por eso, ella y uno de sus amigos se propusieron analizarla.

      “Empezamos a transcribir un casete de mi abuela para tratar de entender la fonología y el funcionamiento de la lengua. Muchos de mis trabajos fueron sobre ese tema y así me conecté, por fin, con el movimiento que estaba escribiendo el mixe desde hacía más de veinte años”, cuenta la escritora, quien más tarde cursó la Maestría en Lingüística en la misma universidad. También, de esa forma, Yásnaya entró en contacto con aquellos con quienes después fundaría el Colmix, un colectivo de jóvenes que realiza actividades de investigación y difusión de la lengua, la historia y la cultura mixes (colmix.org).

      En los periodos vacacionales, cuando regresaba a su pueblo desde Ciudad de México, Aguilar Gil comenzó a notar un proceso de pérdida lingüística en su comunidad: “Veía diferencias respecto a la época en la que yo era una niña; cada vez escuchaba menos hablantes de mixe y esto me empezó a preocupar”. Aunque es verdad que para un observador externo puede parecer una lengua muy viva, hablada por más de 80 por ciento de la población mixe, también es cierto que la tendencia a perder hablantes es la misma en todas las lenguas no oficiales del mundo.

      El foco de atención de Yásnaya se centró entonces en la pérdida de las lenguas indígenas, y su primer objetivo fue buscar el porqué. “La respuesta que encontré, y que hoy me parece evidente —aunque no me lo parecía entonces—, es que el fenómeno tiene que ver con la conformación de los Estados”, dice. En otro de sus ensayos, titulado “Lo lingüístico es político” (2019), Aguilar Gil hace una distinción “entre las lenguas de Estado y las lenguas a pesar del Estado”.

      Como lingüista, analiza el origen y la carga simbólica de las palabras. Indio viene del sánscrito, sindhu, y su uso por los colonizadores españoles fue, como se sabe, el resultado de una confusión geográfica. La autora explica que la palabra indígena comenzó a utilizarse varios siglos después, tras la creación del Estado mexicano, y que, contrario a lo que se cree, ambos términos no tienen una relación etimológica. Indígena viene del latín indi (“de allí”) y gen (“nacido”), y significa “nacido allí” u “originario”. Hoy usamos esta palabra indistintamente para referirnos a las más de 68 naciones y las 12 familias lingüísticas que coexisten en territorio mexicano, aunque haya diferencias radicales entre ellas.

      Por eso, Aguilar Gil sostiene, como una de sus tesis principales, que “la categoría indígena es una categoría política, no una categoría cultural ni una categoría racial (aunque ciertamente ha sido racializada)”. Indígenas, propone, son las más de siete mil naciones en el mundo que no conformaron Estados, tales como “el pueblo ainú en Japón, el pueblo sami en Noruega y el pueblo mixe en Oaxaca”.

      El problema radica en que los cerca de 200 Estados modernos suelen negar o combatir la existencia misma de otras naciones con lengua, territorio y un pasado común propios. Estas naciones son la negación del proyecto de Estado, dice la lingüista, ya que dicho proyecto se fundamenta en una supuesta identidad homogénea, con una sola lengua, una bandera, un himno, una historia, unas fiestas y un territorio. “El nacionalismo mexicano es la narrativa que justifica la violencia racista que han padecido los pueblos indígenas de México”, afirma en su ensayo.

      Pero la autora también nos recuerda que tal división política del mundo funciona apenas desde hace un par de siglos —de los nueve mil años de historia mesoamericana—, y que no tiene por qué ser eterna. En un mundo sin Estados, deduce Aguilar Gil, ella dejaría de ser indígena para ser sólo mixe, y lo mismo pasaría con los ainú, los sami, los mapuche, los rarámuri o los wixaritari. El gran reto es imaginar cómo podría funcionar un mundo así.

      Las primeras lecturas

      Yásnaya Elena Aguilar Gil es parte de la segunda generación en su familia que terminó la educación primaria y la primera en obtener el grado de maestría. En un breve ensayo titulado “Los actos de lectura están inmersos en una red tejida por el colonialismo”, cuenta que su abuelo estudió hasta el segundo grado y que aun así trabajó como escribano, campesino y albañil: “Ayudaba con la correspondencia de las personas, leía las cartas a los destinatarios de mi comunidad cuando así se lo pedían, les traducía al mixe, escuchaba la respuesta, la traducía de nuevo al español, y por fin escribía la contestación con una hermosa letra que nunca he podido lograr”.

      Las letras siguieron presentes en la casa familiar. Los tíos de Yásnaya pudieron salir de Ayutla en la década de 1970 para estudiar la preparatoria y la universidad, y a su regreso se convirtieron en mentores de lectura para la futura escritora. Pero Aguilar confiesa que no siempre disfrutó leer, pues en los inicios tuvo que lidiar con textos complejos sin entender demasiado el español. Sus tíos se habían enfrentado a contextos de discriminación y querían evitar que ella pasara por lo mismo. La solución que idearon fue enseñarla a leer el castellano antes de entrar a la escuela, para eliminar su acento de mixehablante.

      Yásnaya describe la alfabetización que el Estado mexicano llevó a cabo en las comunidades indígenas como “un proyecto castellanizador belicoso y amedrentante”. Sucedió sobre todo a partir de la primera mitad del siglo XX, con el objetivo, afirma, de desaparecer las lenguas indígenas. “Alfabetizar significaba hacer triunfar la llamada lengua ‘nacional’ sobre dialectos que significaban pobreza y atraso en los discursos de educadores rurales oficiales como Rafael Ramírez” (quien colaboró con la reforma educativa impulsada por José Vasconcelos).

      Algunos de los textos con los que Aguilar Gil aprendió a pronunciar las palabras del nuevo idioma, sin entender su significado, provenían de ejemplares traducidos de la revista soviética Sputnik y del Libro Rojo, de Mao Tse-Tung. Los tíos de la autora estaban entusiasmados con el comunismo y con la urss, y gracias a esas lecturas se enteraban de la existencia de lugares “donde los obreros podían asistir a clases de Física o talleres de arte y donde todas las personas eran iguales”. De hecho, Yásnaya se llama así gracias a esa filia por lo ruso que existía en su familia. Su primer nombre lo eligió el mayor de sus tíos a partir de un sitio particular: Yásnaia Poliana, una finca rural a unos 200 kilómetros al sur de Moscú donde nació, vivió y fue enterrado el novelista León Tolstoi.

      “Con el paso del tiempo, conforme fui aprendiendo castellano, los edificios sonoros comenzaron a tomar sentido. Islas de significado iban emergiendo entre los textos del libro Español Lecturas que nos repartían en la escuela”, narra la lingüista. Sus tíos le dejaron una indicación muy concreta antes de tener que emigrar de Ayutla: elegir los libros que estuvieran clasificados como clásicos. Así fue como Yásnaya leyó adaptaciones infantiles de Las mil y una noches, La Ilíada o La Odisea. Y fue gracias a estas historias que comenzó a amar la lectura.

      Agua para Ayutla

      Además de su activismo por la diversidad lingüística, la escritora afirma que su otra gran lucha es por devolverle el agua a su comunidad. Ella ha denunciado una y otra vez, en distintos foros, que, desde junio de 2017, los habitantes de San Pedro y San Pablo Ayutla no tienen acceso al agua potable. Las autoridades estatales lo han llamado un conflicto agrario entre este municipio y su vecino, Tamazulápam del Espíritu Santo. Pero es más que eso, pues los habitantes de este último están respaldados por un grupo armado presuntamente ligado a la siembra de amapola.

      Aguilar Gil habló de este problema en su discurso ante los diputados: “Por medio de armas y de balas nos despojaron del manantial, por medio de armas tomaron y callaron la fuente de agua para nosotros. A pesar de que las leyes dicen que el agua es un derecho humano, ya el agua no llega desde hace dos años a nuestras casas y esto afecta, sobre todo, a ancianos y niños”.

      El día en que su sistema de agua potable fue dinamitado, la comunidad de Ayutla también perdió a uno de sus miembros —Luis Juan Guadalupe, quien fue asesinado—, debió atender a más de seis heridos y sufrió la ausencia temporal de cuatro compañeras que fueron secuestradas y torturadas. En más de dos años y medio, las autoridades responsables no han hecho justicia ni han sido capaces de devolver el servicio básico a un poblado de más de tres mil habitantes.

      La lingüista no duda que el Estado es parte del problema al solapar las violencias cometidas contra su pueblo. “Hay una impunidad activa, voluntaria, que no entiendo. Hay una complicidad, incluso, un dejar hacer”, lamenta.

      A pesar de las enormes dificultades que supone la carencia de agua potable, la comunidad continúa su vida colectiva en Ayutla. Aguilar Gil regresó al pueblo cuando la asamblea comunitaria —el máximo órgano de decisión— la nombró secretaria del presidente municipal y guardiana del archivo. Ahora, explica, se encuentra en un periodo de descanso al que tienen derecho todos los servidores públicos de este sistema normativo propio —conocido como “usos y costumbres”—, gracias al cual algunos pueblos indígenas ejercen un grado de autonomía establecido en la ley.

      En la asamblea comunitaria están obligados a participar todos los ciudadanos mayores de 18 años, excepto los estudiantes, los mayores de 70 o quienes hayan cumplido ya con todos sus cargos. El presidente municipal es nombrado por la asamblea y no puede hacer nada sin consultarla; a escala local no hay partidos políticos ni elecciones tradicionales y las autoridades municipales no cobran sueldos. Por el contrario, un cargo público supone un desgaste económico para quien lo asume.

      Aunque actualmente Yásnaya no tiene un cargo oficial, la asamblea le ha conferido un encargo: acompañar la interlocución con el Estado en el problema del agua. Por eso, el pasado 13 de enero, Aguilar Gil acudió, junto a las responsables de bienes comunales, a interpelar, una vez más, al gobernador de Oaxaca. Alejandro Murat hablaba en el Foro Estatal Hacia una Nueva Ley General de Aguas sobre el derecho humano de acceso a este recurso, cuando la lingüista y sus compañeras se pusieron de pie para mostrar una cartulina con la leyenda: “Agua para Ayutla”.

      La otra gran razón por la que Yásnaya decidió regresar a la vida rural fue su abuela, la persona con la que se crió. Quienes siguen a la lingüista en las redes (su cuenta en Twitter es @yasnayae) saben de su amor incondicional por ella, y lo difícil que ha sido su duelo tras perderla. “Ahora estoy tratando de continuar con todo lo que ella hacía; estoy concentrada en mantener todo vivo: la siembra, sus animales, sus plantas”, cuenta. Esto también la ha obligado a bajar el ritmo en la escritura. Mientras se acopla a sus nuevas labores, dice, escribe sólo cuando tiene un encargo o cuando aterriza alguna nueva idea.

      La organización comunitariacomo alternativa

      El pasado 13 de diciembre, la Banda Filarmónica de Ayutla sufrió el robo de la mitad de sus instrumentos musicales, que estaban resguardados en la escoleta municipal. De inmediato, figuras como el alcalde, el presidente de la banda y la lingüista Yásnaya Aguilar Gil denunciaron el hecho y pidieron ayuda para recuperar los instrumentos que, en su mayoría, son tocados por niños y niñas de entre seis y 13 años. El mensaje se difundió rápidamente. Tanto, que en pocos días la Secretaría de Cultura de Oaxaca resarció parte de los daños al entregar, de manos del gobernador, 36 instrumentos nuevos a los jóvenes músicos.

      El pueblo entero y algunos de sus vecinos se movilizaron para recuperar cuanto antes “el corazón de la comunidad”, como nombró Yásnaya a la agrupación musical. También tuvo un efecto significativo el llamado de la escritora vía su cuenta de Twitter, donde tiene más de 23 mil seguidores. Algunos de ellos hicieron donaciones que se convirtieron en tres flautas transversales, un saxofón alto, un clarinete, un violín, una trompeta, un arpa pequeña, una flauta alto y un atril. El 26 de diciembre, después de que la banda realizara los rituales de agradecimiento, la música en Ayutla volvió a sonar.

      También la lingüista ha puesto a discusión con sus interlocutores tuiteros su idea utópica de la desaparición de los Estados, llamando a aportar ideas sobre posibles formas de autogestión. Aguilar cuenta que, en efecto, ha recibido propuestas interesantes, pero, sobre todo, una lluvia de comentarios que expresan preocupación. “Resulta casi imposible pensar el mundo sin estas divisiones que se asumen como existentes desde siempre”, escribe en Un Nosotrxs sin Estado. Y en la entrevista agrega: “Yo les digo que no se preocupen, no creo que lo lleguemos a ver en esta vida; pero, ¿por qué no podemos imaginarlo? Hay incluso una colonización de la imaginación”.

      Lo que ella imagina “es una diversidad de sistemas políticos; una confederación o alianzas libres de unidades mucho más pequeñas y autogestivas que no dependan del famoso monopolio del uso legítimo de la violencia del Estado”. También señala que, en este ejercicio imaginativo, es importante no caer en la tentación de replicar el modelo de opresión al que siempre han resistido los pueblos indígenas: “Los Estados administran un sistema colonialista, capitalista y patriarcal, ¿por qué habríamos de replicarlo?”.

      Hacia el final de su ensayo, Yásnaya esboza algunas propuestas concretas para este mundo imaginario, relacionadas con la seguridad, la educación, la salud y la impartición de justicia. Además, deja abierta una invitación generalizada: arrebatar cada vez más funciones al Estado. Lo anterior ya se hace, en cierta medida, en Ayutla y otros municipios de Oaxaca, donde las asambleas de comuneros han cooptado la institución municipal.

      Pero el primer gran paso, sostiene Aguilar, sería declarar la existencia de territorios indígenas autónomos en los que el Estado no pueda concesionar proyectos extractivos que atenten contra la salud y la calidad de vida de las personas. “A nuestras lenguas las matan cuando no se respetan nuestros territorios, cuando venden y hacen concesiones con nuestras tierras”, pronunció Yásnaya en mixe durante su discurso en la Cámara de Diputados. “Es la tierra, el agua, los árboles los que nutren la existencia de nuestras lenguas. Bajo el ataque constante de nuestro territorio, ¿cómo se puede revitalizar nuestra lengua?”.

      https://magis.iteso.mx/nota/yasnaya-aguilar-la-defensora-de-lenguas-que-imagina-un-mundo-sin-estados

  • En guise d’héritage, une quête à poursuivre

    Trois vagues féministes plus tard, les slogans d’#Emma_Goldman ont sans doute perdu de leur charge révolutionnaire. Pourtant, les questions qu’elle posait il y a un siècle sont toujours d’une brûlante actualité. Et s’il était temps de la redécouvrir ?

    Près d’un siècle après la mort d’Emma Goldman, l’#intime est toujours #politique, les droits et #libertés_individuelles sont renforcés, le cadre démocratique renouvelé, et l’#émancipation_des_femmes est un processus toujours en cours. Entre la militante anarchiste et nous, des mythes ont disparu, et d’autres sont nés : la croyance dans l’État s’est fragilisée, celle dans le progrès humain aussi, et la violence terroriste comme les mouvements de backlash semblent toujours prêts à miner les acquis en matière de libertés individuelles. Anarchistes ou pas, nous sommes frappés par l’actualité des questions qu’Emma Goldman posait avec 100 ans d’avance.

    L’héritage d’Emma Goldman

    Pour la philosophe #Chiara_Bottici, la pensée d’Emma Goldman résonne avec encore plus de force aujourd’hui que dans le passé. En effet, Goldman est contemporaine du féminisme de la première vague qui avait fait de la revendication des #droits_politiques la priorité de son combat. C’est donc face à cette forme de féminisme qu’elle jugeait reservée à une élite qu’Emma Goldman se déclarait alors « non-féministe ». Aujourd’hui, force est de constater que ce féminisme de la première vague a montré ses limites : l’obtention de droits politiques n’ont pas suffi à créer les conditions de l’émancipation des femmes. « Ce qui est actuel dans la pensée d’Emma Goldman, c’est le fait qu’on ne peut pas séparer le féminisme de la critique du #capitalisme, de la critique de l’État en tant que machine d’exploitation. » juge Chiara Bottici.

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/avoir-raison-avec/la-quete-doit-se-poursuivre-et-se-poursuivra-8379133

    #intersectionnalité #corps #féminisme #héritage #anarchisme
    #audio #podcast 

  • Macron, en marche vers l’#extrême_droite ?
    https://www.youtube.com/watch?v=G43ZVd7wN60

    En 2017, puis en 2022, Emmanuel Macron a remporté l’élection présidentielle face à Marine Le Pen. Mais sa fascination pour l’extrême-droite et sa complaisance vis-à-vis d’empires médiatiques qui propagent la xénophobie contribuent à « booster » le Rassemblement national. Au second tour de la présidentielle de 2022, Marine Le Pen recueillait 41,8% des voix. Un record. Et le résultat d’une politique. Depuis 2017, interdictions de manifestations, arrestations arbitraires et surveillance généralisée sont utilisés par l’exécutif pour mater des révoltes populaires contre des politiques libérales imposées sans concertation, et considérées comme « anti pauvres ».
    Demain, l’Etat de droit et la devise républicaine « Liberté, égalité, fraternité » ne seront ils plus qu’un lointain souvenir ? Durant quatre mois, Thierry Vincent et Daphné Deschamps ont interviewé d’anciens macronistes déçus par la dérive autoritaire du président et des figures conservatrices et d’extrême-droite qui se réjouissent qu’Emmanuel Macron leur prépare un « boulevard » pour 2027.
    À quelques semaines des élections européennes, enquête au coeur d’une France en marche vers l’extrême droite.

    #Macron #Emmanuel_Macron #ni_de_droite_ni_de_gauche #de_droite_et_de_gauche #monarchisme #action_française #en_marche #jeanne_d'arc #Puy_du_Fou #11_novembre_2018 #Maréchal_Pétain #Pétain #décivilisation #Renaud_Camus #autoritarisme #macronisme #islamo-gauchisme #front_national (#FN) #arc_républicain #Jean-Michel_Blanquer #Amélie_de_Montchalin #front_républicain #Rassemblement_national (#RN) #Patrick_Vignal #intersectionnalité #gauche_radicale #extrême_gauche #France_insoumise #tenue_vestimentaire #habits #retraite #xénophobie #racisme #Elisabeth_Borne #Valeurs_Actuelles #migrations #connivence #symbole #Bruno_Roger-Petit #Bolloré #Vincent_Bolloré #médias #groupe_Bolloré #François_Coty #punaises_de_lit #bouc_émissaire #Pascal_Praud #grand_remplacement #Pap_Ndiaye #Rima_Abdul_Malak #Rachida_Dati #Cyril_Hanouna #Geoffroy_Lejeune #Journal_du_Dimanche (#JDD) #Gérald_Darmanin #conservatisme #homophobie #homosexualité #violences_policières #loi_immigration #préférence_nationale

  • Caricatural, ultra-politisé : le grand n’importe quoi du nouveau #musée_d'Histoire de #Lyon

    Nous avons visité la nouvelle #exposition_permanente du #musée niché dans le vieux Lyon : un parcours déroutant, regorgeant de lacunes, défendant une vision de l’#histoire_engagée et surtout trompeuse.

    Le jour de notre visite, un dossier de presse le martèle, en #écriture_inclusive : le nouveau parcours du musée d’Histoire de Lyon, qui achevait samedi 2 décembre une réorganisation commencée en 2019, a été « co-construit », aussi bien avec des « expert.es » que des témoins et… « témouines », citoyens anonymes de Lyon. Une des conceptrices du musée le détaille : « On est allé en ville, on a posé des questions aux passants, à des jeunes qui faisaient du skate pour leur demander leur récit de la ville ». Un postulat de départ qui fait sourire autant qu’il inquiète et augure du sentiment qu’on éprouvera pendant toute la visite.

    Celle-ci tient par-dessus tout à s’éloigner de la si décriée approche chronologique. Une première salle « questionne » donc la ville, exposant pêle-mêle des objets touristiques ou sportifs récents (maillot de foot), sans enseignement apparent. Il faudra s’y faire : l’histoire n’est pas vraiment au centre du musée d’histoire. La fondation de la ville est évoquée au détour d’un panneau sur lequel un Lyonnais de l’Antiquité exhibe sa… Rolex. Une farce assumée par le musée, dont les guides nous préviennent que les anachronismes fleuriront tout au long des salles. On se mettrait à rire si le musée n’était pas destiné aux enfants aussi bien qu’aux adultes, avec la confusion que ces erreurs assumées entraîneront chez les premiers.
    L’homme blanc quasi absent de... l’industrie lyonnaise

    Les salles, justement, sont magnifiques dans cet hôtel de Gadagne, bâti au XVIe siècle. Mais l’architecture des lieux ne semble pas devoir nous intéresser : un tout petit cartel pour présenter une cheminée monumentale, puis plus rien. Les objets historiques sont rares et s’effacent au profit de montages photographiques et de récits (tous en écriture inclusive bien sûr) de quatre personnages fictifs censés raconter la ville : trois femmes nées à différents siècles, et Saïd, ouvrier devenu bénévole associatif. À l’étage suivant, une pirogue-vivier datée de 1540 trône quand même, dans une ambiance bleutée : c’est la partie consacrée au Rhône et à la Saône. Quelques (beaux) tableaux figurant des scènes de vie des deux fleuves sont exposés... à quelques centimètres du sol : cette seconde partie est dédiée aux enfants de cinq ans et l’on apprend que deux groupes de maternelle ont été consultés pour la concevoir. Des jeux ont été élaborés avec eux, « sans mauvaise réponse pour ne pas être moralisateurs » et parce que le musée est un avant tout un lieu d’amusement. Nous commençons à le croire.

    La suite de l’exposition permanente, qui aborde le sujet de l’industrie lyonnaise, prend toutefois un tour nettement plus désagréable, voire odieux. Voyons bien ce que nous voyons : une absence quasi totale de référence aux ouvriers masculins et blancs. Un métier à tisser inanimé constitue la seule preuve tangible de l’existence des canuts et une salopette vide accrochée au mur figure le prolétariat du XXe siècle. Une véritable provocation car les ouvrières sont elles bien mises en avant, et surtout les travailleurs immigrés. Le directeur, Xavier de La Selle, avait prévenu : « Le concept de Lyonnais de souche n’a aucun sens. » Un visiteur manquant de recul sortira de cette pièce convaincu que la ville n’a été construite que par le travail de femmes et de maghrébins. Le prisme social de l’histoire aurait pu présenter ici un réel intérêt : il est manipulé pour servir une vision politique qu’on ne peut qualifier autrement que de délirante.

    Et nous ne sommes pas au bout de ce délire : la dernière partie, celle qui vient d’être révélée au public, porte sur les « engagements » des Lyonnais. On entre ici dans un bric-à-brac stupéfiant, synthèse gauchiste assumée faisant de l’histoire politique de Lyon une sorte de grande convergence des luttes. Sur les murs et dans les vitrines, des nuages de mots à peu près tous synonymes de rébellion, des pancartes féministes, un haut-parleur, et même un objet sordide : un fait-tout utilisé par une avorteuse locale, célèbre semble-t-il, qui y stérilisait ses ustensiles médicaux mais y cuisait aussi ses pâtes. Le père Delorme, prêtre connu pour avoir organisé en 1983 une grande marche contre le racisme, est abondamment glorifié. Rappelons qu’en matière de religion, le musée ne nous a toujours pas expliqué pourquoi et quand fut construite la basilique de Fourvière ! L’autre référence au catholicisme dans la ville est celle du Sac de Lyon par les calvinistes, une œuvre de bois peint de 1565 décrivant des scènes de pillage, un bûcher d’objets liturgiques, des moines chassés. Son intérêt historique est toutefois anéanti par le commentaire de notre guide, qui n’y voit « pas du tout une scène violente ».

    Désacralisation du savoir

    À ce stade, le musée d’Histoire de Lyon réussit son pari : il n’est plus qu’un divertissement. On aborde une salle qui couvre à rebours la crise algérienne, la Seconde Guerre mondiale et enfin la Révolution. Cette dernière ne fait l’objet que d’un panneau succinct. Le musée est-il ennuyé de devoir évoquer plus en détail les tendances contre-révolutionnaires de Lyon ? À propos de Joseph Chalier, qui avait mis en place une dictature sanguinaire dans la ville avant d’être renversé par le peuple en 1793, un commentaire : « Certains l’ont considéré comme un martyr de la liberté. » L’homme avait commandé la première guillotine à Lyon et préconisait de l’installer sur le pont Morand afin que « les têtes tombent directement dans le Rhône »... Le principal historien consulté sur cette époque, Paul Chopelin, est entre autres fonctions président de la Société des études robespierristes. Enfin, une galerie des grandes figures de l’histoire lyonnaise conclut ce drôle de parcours. Miracle : il s’y trouve presque autant de femmes que d’hommes. Quitte à ce que la première conseillère municipale féminine y tienne la même place qu’Édouard Herriot, maire pendant près d’un demi-siècle. Pas de portrait de Raymond Barre en revanche, mais une lettre anonyme fièrement disposée, le qualifiant de « peu regretté [maire], qui de toute sa carrière s’est bien peu occupé du sort de ceux que son système économique met de côté ».

    Tirons un bilan positif : il n’est pas donné à tout amateur d’histoire d’expérimenter une telle distorsion, une telle désacralisation du savoir. Aux inventions « pédagogiques » en vogue, pour certaines réussies mais souvent inutiles, le musée d’histoire de Lyon ajoute un militantisme qui laisse pantois, et ignore des pans entiers de l’histoire lyonnaise, ne faisant qu’effleurer le reste. L’équipe du musée est certes enthousiaste, convaincue de bien faire, mais s’est méprise sur la notion d’engagement. Plus qu’une déception, pour une structure qui emploie 50 personnes (et exploite aussi un musée de la marionnette et de guignol, peut-être moins amusant) avec un budget annuel d’environ 3 millions d’euros. Son projet scientifique et culturel, validé par l’État, bénéficie du plein soutien de l’actuelle mairie : le maire Grégory Doucet (EELV) se dit ainsi « admiratif du travail colossal » des équipes du musée d’une ville « profondément humaine, tissée par les lumières du monde ». Un tissu, oui, mais pas vraiment de lumière.

    https://www.lefigaro.fr/histoire/mensonger-ultra-politise-le-grand-n-importe-quoi-du-nouveau-musee-d-histoir

    Mots-clé tirés de l’article et de la vidéo :
    #wokisme #woke #révolution_culturelle_woke #intersectionnalité #affaire_de_Grenoble #militantisme #militants_extrémistes #ségrégationnisme #séparatisme #pride_radicale #non-mixité #genre #panique_morale #anti-wokisme #universalisme #universités #culture #films #imaginaire #civilisation_occidentale #industrie_lyonnaise #woke-washing #engagement #père_Delorme #1983 #Marche_pour_l'égalité_et_contre_le_racisme #planning_familial #catholicisme #racisme_systémique #Sac_de_Lyon #divertissement #Joseph_Chalier #histoire #Paul_Chopelin #militantisme

    Les invité·es :

    1. #Nora_Bussigny, autrice de ce #livre :
    Les Nouveaux Inquisiteurs


    https://www.albin-michel.fr/les-nouveaux-inquisiteurs-9782226476951

    2. #Pierre_Valentin, auteur de ce livre :
    L’#idéologie_woke. Anatomie du wokisme


    https://www.fondapol.org/etude/lideologie-woke-1-anatomie-du-wokisme

    3. #Samuel_Fitoussi :
    https://www.wikiberal.org/wiki/Samuel_Fitoussi
    (et je découvre au même temps « wikilibéral »)
    –-> qui parle notamment du film #Barbie (min 18’30)

    https://www.fondapol.org/etude/lideologie-woke-1-anatomie-du-wokisme

  • “Ciò che è tuo è mio”. Fare i conti con la violenza economica

    In Italia una donna su due ha subito violenza economica. WeWorld ha raccolto in un dettagliato report le storie di donne vittime di questa forma di abuso che colpisce in modo particolare chi subisce forme multiple di discriminazione legate all’età, al background migratorio o a una condizione di disabilità.

    “Ogni mese lui mi portava alle Poste, mi faceva prelevare tutti i soldi della mia pensione di 550 euro in contanti e poi pagare le bollette. Se rimanevano dei soldi, anche cinquanta euro, lui li prendeva. Nella vita di tutti i giorni io non avevo controllo su nulla: ogni volta dovevo giustificare come spendevo. Veniva sempre con me e decideva che cosa potessi acquistare e cosa no. Soprattutto per le spese alimentari. Non mi lasciava mai più di uno o due euro nel borsellino per bere un caffè o fare delle stampe”.

    Anna (nome di fantasia) è una donna di 55 anni che ha deciso di lasciare il marito dopo dieci anni di violenze fisiche, sessuali e psicologiche. Una relazione segnata anche da una forma di abuso che ancora troppo spesso viene sottovalutata: quella economica. La donna, che da una quindicina d’anni è in carico al Centro di salute mentale di Bologna per depressione, doveva chiedere il permesso al marito per ogni singola spesa, comprese quelle sanitarie: “Tutte quelle per la mia cura personale dovevano passare per una contrattazione perché non aveva piacere che spendessi. Per più di dieci anni ho chiesto di potermi fare sistemare i denti, ma lui non ha mai acconsentito. Nel 2020 gli ho fatto vedere che uno dei miei ponti in bocca era saltato e allora ha acconsentito, ma non ha mai pagato tutto. Quindi sono rimasta con i lavori a metà”.

    Quella di Anna è una delle diverse testimonianze raccolte dalla Ong WeWorld all’interno degli “Spazi donna” attivi in diverse città italiane (Milano, Napoli, Bologna, Brescia, Roma, Pescara e Cosenza) e contenute nel report “Ciò che è tuo è mio. Fare i conti con la violenza economica” pubblicato in occasione della Giornata internazionale per l’eliminazione della violenza contro le donne con l’obiettivo di fare luce su questa forma di abuso.

    Il rapporto unisce alle testimonianze un’indagine inedita realizzata da WeWorld in collaborazione con Ipsos, da cui emerge che il 49% delle donne intervistate dichiara di aver subito violenza economica almeno una volta nella vita, percentuale che sale al 67% tra le divorziate e le separate. Più di una donna separata o divorziata su quattro (il 28%) ha affermato di aver subito le decisioni finanziarie prese dal partner senza essere stata consultata in precedenza. A una su dieci il marito o il compagno ha vietato di lavorare.

    Dai dati e dalle storie raccolte emerge poi come “gli abusi economici abbiano una natura trasversale, ma colpiscano maggiormente quelle persone che subiscono forme cumulative di discriminazione: donne molto anziane o molto giovani, con disabilità o dal background migratorio -commenta Martina Albini, coordinatrice del centro studi WeWorld-. E ha radici ben precise in sistemi socioculturali maschio-centrici e patriarcali che alimentano asimmetrie di potere”.

    Una delle definizioni più riportate nella letteratura scientifica identifica questa forma di violenza come “tutti i comportamenti volti a controllare l’abilità della donna di acquisire, utilizzare e mantenere risorse economiche”. Viene agita prevalentemente all’interno di relazioni intime o familiari ed è raro che avvenga singolarmente: tende infatti a essere parte di un più ampio ciclo di violenza fisica, psicologica e sessuale. “Le donne -si legge nel report– hanno maggiori probabilità di subirla perché sono proprio quei sistemi economici e sociali basati sul controllo maschile a favorirla”.

    Esemplificativa, in questo caso, è la vicenda di una giovane di origini sudamericane che si è rivolta allo “Spazio donna” del quartiere Corvetto di Milano. Ha conosciuto l’uomo che sarebbe diventato suo marito mentre frequentava l’università, nel volgere di poco tempo la coppia è andata a convivere ed è nata una bambina: la neomamma è stata quindi costretta a interrompere gli studi: “Tutte le decisioni economiche in casa spettavano a lui, io non pensavo a questi aspetti: non pensavo fossero cose importanti e lasciato che lui si prendesse la responsabilità -racconta-. Anche il bonus statale per la nascita della bambina l’ha preso lui, io non avevo nulla, né conto bancario né Poste Pay. Mi aveva detto che aprire un altro conto corrente non era conveniente”.

    Come avviene per altre forme di violenza, anche quella economica affonda le proprie radici nelle disuguaglianze di genere, nelle aspettative di ruoli tradizionali (la donna che rinuncia al lavoro per prendersi cura della casa e dei figli). Sempre dal sondaggio realizzato da Ipsos per WeWorld, infatti, emerge come il 15% degli intervistati pensi che la violenza sia frutto di comportamenti provocatori delle donne. Mentre il 16% degli uomini ritiene sia giusto che sia il marito o il compagno a comandare in casa.

    Per inquadrare meglio questo fenomeno può essere utile anche fare riferimento ad altri dati che mettono in evidenza la particolare fragilità della popolazione femminile: in Italia il 21,5% delle donne si trova in una condizione di dipendenza finanziaria. E il maggiore carico di cura familiare può costituire un fattore di rischio: prendersi cura della casa a dispetto dell’accesso al mondo del lavoro retribuito incrementa del 25,3% la probabilità di essere vittima di violenza economica. Un altro indicatore preoccupante è il fatto che il 37% delle donne italiane non possiede un conto corrente.

    In altre parole: nel nostro Paese sono ancora troppe le donne che non hanno adeguate competenze finanziarie, considerano “troppo complessi” questi temi e si affidano completamente alle scelte del partner. Oppure hanno sempre dato per scontato che dovessero essere gli uomini a occuparsi di gestire i bilanci familiari. “All’inizio della relazione con mio marito era mio padre a pensare agli aspetti economici in modo da non farmi mancare nulla -racconta una donna che si è rivolta allo “Spazio donna” di Scampia, periferia di Napoli-. Pensavo che fosse quella la normalità. Io non ricevevo soldi, se si doveva fare la spesa andavamo assieme ed è capitato che, a volte, al momento del pagamento lui era fuori a fumare e io facevo passare avanti le persone, perché non potevo pagare senza di lui. Queste piccole cose erano la normalità”.

    Il report di WeWorld evidenzia poi come le esperienze di violenza economica possono essere diverse e sfaccettate tra loro, a seconda dei contesti in cui si inseriscono, e si manifestano in modi differenti. A partire dal controllo economico: l’autore della violenza impedisce, limita o controlla l’uso delle risorse economiche e finanziarie della vittima e il suo potere decisionale, ad esempio monitorando le spese o facendo domande su come questa ha speso i propri soldi. Le donne possono anche essere vittima di sfruttamento economico all’interno della relazione di coppia (il partner ruba denaro, beni o proprietà, oppure costringe la vittima a lavorare più del dovuto) o di sabotaggio quando l’autore della violenza le impedisce di cercare, ottenere o mantenere un lavoro o un percorso di studi.

    Tutto questo ha gravi conseguenze sulla vita delle donne, non solo nel momento in cui vivono all’interno di una relazione violenta e che limita la loro libertà di autodeterminarsi, ma anche dopo che ne sono uscite. L’autonomia economica, infatti, rappresenta un elemento essenziale nella decisione della vittima di lasciare un partner violento, come emerge da uno studio condotto negli Stati Uniti: il 73% delle vittime di violenza economica intervistate ha riferito di essere rimasta con l’aggressore a causa di preoccupazione finanziarie per mantenere sé stessa o i propri figli.

    “L’impossibilità di allontanarsi dal compagno violento per mancanza di risorse economiche le espone inevitabilmente a ulteriori abusi -si legge nel report-. È stato dimostrato che questo rischio è maggiore tra le donne con uno status economico elevato rispetto agli uomini e nelle società in cui le donne hanno iniziato a entrare nel mondo del lavoro, poiché l’emancipazione femminile interviene come elemento di ‘disturbo’ nel contesto coercitivo instaurato dal partner violento”.

    Altrettanto gravi sono le conseguenze economiche indirette di lunga durata, che si ripercuotono sulla vita delle vittime anche quando si è conclusa la relazione abusante: l’impossibilità di studiare e il mancato inserimento nel mondo del lavoro, ad esempio, rendono più difficile per queste donne trovare un lavoro che permetta di mantenere sé stesse e i propri figli. Non hanno quindi nemmeno risparmi a cui poter attingere e spesso sono costrette a chiedere aiuto a familiari e conoscenti per sostenere le spese legali durante la fase di separazione.

    Uscire da queste situazioni di violenza è possibile, come dimostra la vicenda della donna che si è rivolta allo “Spazio donna” di Scampia e che, attraverso il supporto offerto dalle operatrici, ha potuto avviare prima un percorso di auto-consapevolezza della propria situazione e successivamente uno di formazione professionale. “Quando ho realizzato cosa stessi subendo non sono stata più bene, perché nel momento in cui ti rendi conto che hai speso anni di vita pensando di non meritare e precludendoti qualsiasi cosa, stai male -racconta la donna-. Mi sono sentita come una bomba che esplode”. Questa consapevolezza ha fatto maturare una voglia di riscatto unita all’esigenza di fare qualcosa per sé stessa e di costruirsi una professionalità. Ha seguito un corso di cucito e ha avviato una piccola attività sartoriale: “Questo ha naturalmente cambiato il mio rapporto di coppia perché è cambiata la mia mentalità: ora se dico a mio marito che voglio uscire, anche se sa che ho i soldi, mi dice di prendere quello che mi serve. Ora siamo separati in casa, ma se potessi me ne andrei. Sono molto diversa da quella che ero prima e voglio fare il mio lavoro, mi fa stare bene, è una fonte di guadagno, e se io devo andare a lavorare ora non ho problemi a dire a mio marito di prepararsi da mangiare da solo perché io sono impegnata”.

    https://altreconomia.it/cio-che-e-tuo-e-mio-fare-i-conti-con-la-violenza-economica
    #violence_économique #genre #femmes #hommes #violence #Italie #intersectionnalité #rapport #patriarcat #dépendance_financière #compte_bancaire #contrôle_économique #autonomie_économique #travail

    • “Ciò che è tuo è mio. Fare i conti con la violenza economica”: il nostro report sulla violenza economica sulle donne in Italia

      Il 49% delle donne intervistate dichiara di aver subito violenza economica almeno una volta nella vita, percentuale che sale al 67% tra le donne divorziate o separate; più di 1 donna separata o divorziata su 4 (28%) dichiara di aver subito decisioni finanziarie prese dal partner senza essere stata consultata prima. Eppure, la violenza economica è considerata “molto grave” solo dal 59% dei cittadini/e.

      Sono alcune delle evidenze del report “Ciò che è tuo è mio. Fare i conti con la violenza economica” pubblicato in occasione della Giornata internazionale per l’eliminazione della violenza contro le donne. Il rapporto vuole fare luce su una delle forme di violenza contro le donne più subdola e meno conosciuta, concentrandosi sui risultati dell’indagine inedita realizzata insieme a Ipsos per valutare la percezione di italiani e italiane della violenza contro le donne e, in particolare, della violenza economica e dell’esperienza diretta.

      Un tempo considerata una forma di abuso emotivo o psicologico, oggi la violenza economica è riconosciuta come un tipo distinto di violenza, con cu si intendono tutti i comportamenti per controllare l’abilità della donna di acquisire, utilizzare e mantenere risorse economiche. Questo tipo di violenza viene messo in atto soprattutto all’interno di relazioni intime e/o familiari e spesso la violenza economica è parte di un più ampio ciclo di violenza intima e/o familiare (fisica, psicologica, sessuale, ecc.).

      LA VIOLENZA ECONOMICA IN ITALIA: I DATI DELL’INDAGINE

      Relazione tra violenza di genere e stereotipi

      - Più di 1 italiano/a su 4 (27%) pensa che la violenza dovrebbe essere affrontata all’interno della coppia.
      - Il 15% degli italiani/e pensa che la violenza sia frutto di comportamenti provocatori delle donne.
      – Il 16% degli uomini, contro il 6% delle donne, pensa che sia giusto che in casa sia l’uomo a comandare.

      L’immagine sociale delle diverse forme di violenza

      - Per 1 italiano/a su 2 la violenza sessuale è la forma più grave di violenza contro le donne.
      - La violenza economica è considerata molto grave solo dal 59% dei cittadini/e.
      – Per il 9% delle donne separate o divorziate, contro il 3% dei rispondenti, gli atti persecutori (stalking) rappresentano la forma più grave di violenza.

      La violenza economica

      - Il 49% delle donne intervistate dichiara di aver subito nella vita almeno un episodio di violenza economica. Il 67% tra le donne separate o divorziate.
      - 1 donna su 10 dichiara che il partner le ha negato di lavorare.
      – Più di 1 donna separata o divorziata su 4 (28%) dichiara di aver subito decisioni finanziarie prese dal suo partner senza essere stata consultata prima.
      – Quasi 1 italiano/a su 2 ritiene che le donne siano più spesso vittime di violenza economica perché hanno meno accesso degli uomini al mercato del lavoro.

      La situazione economica nei casi di separazione e divorzio

      - Dopo la separazione/divorzio, il 61% delle donne riporta un peggioramento della condizione economica.
      - Il 37% delle donne separate o divorziate dichiara di non ricevere la somma di denaro concordata per la cura dei figli/e.
      - 1 donna separata o divorziata su 4 avverte difficolta a trovare un lavoro con un salario sufficiente al suo sostentamento.

      L’educazione per contrastare la violenza economica

      - La quota di donne che non si sentono preparate rispetto ai temi finanziari è più del doppio di quella degli uomini (10% vs 4%).
      – Quasi 9 italiani/e su 10 (88%) sostengono che bisognerebbe introdurre programmi di educazione economico-finanziaria a partire dalle scuole elementari e medie.
      – Quasi 9 italiani/e su 10 (89%) pensano che bisognerebbe introdurre programmi di educazione sessuo-affettiva a partire dalle scuole elementari e medie.

      ”Dietro ai dati raccolti in questa indagine si trovano storie vere, voci di donne che hanno subito violenza economica e che vogliono raccontarla. Per questo abbiamo voluto inserire nel rapporto testimonianze dai nostri Spazi Donna WeWorld. Da qui emerge come gli abusi economici abbiano una natura trasversale, ma colpiscano maggiormente persone che subiscono forme cumulative di discriminazione: donne molto anziane o molto giovani, con disabilità o dal background migratorio”, commenta Martina Albini, Coordinatrice Centro Studi di WeWorld. “La violenza economica, come tutti gli altri tipi di violenza, ha radici ben precise in sistemi socioculturali maschio-centrici e patriarcali che alimentano asimmetrie di potere. Per questo è necessario un approccio trasversale che sappia sia includere gli interventi diretti, sia stimolare una presa di coscienza collettiva a tutti i livelli della società”.

      VIOLENZA ECONOMICA: I COMPORTAMENTI

      Le esperienze di violenza economica possono essere particolarmente complesse e sfaccettate a seconda dei contesti in cui si inseriscono: ad esempio, gli autori di violenza possono agire comportamenti abusanti culturalmente connotati nel Nord o Sud globale.

      I principali tipi di violenza economica identificati dalle evidenze in materia si distinguono in:

      – CONTROLLO ECONOMICO: L’autore della violenza impedisce, limita o controlla l’uso delle risorse economiche e finanziarie della vittima e il suo potere decisionale. Questo include, tra le altre cose, fare domande alla vittima su come ha speso il denaro; impedire alla vittima di avere o accedere al controllo esclusivo di un conto corrente o a un conto condiviso; monitorare le spese della vittima tramite estratto conto; pretendere di dare alla vittima la propria autorizzazione prima di qualsiasi spesa.
      - SFRUTTAMENTO ECONOMICO: L’autore della violenza usa le risorse economiche e finanziarie della vittima a suo vantaggio. Ad esempio rubando denaro, proprietà o beni della vittima; costringendo la vittima a lavorare più del dovuto (per più ore, svolgendo più lavori, incluso il lavoro di cura, ecc.); relegando la vittima al solo lavoro domestico.
      – SABOTAGGIO ECONOMICO: L’autore della violenza impedisce alla vittima di cercare, ottenere o mantenere un lavoro e/o un percorso di studi distruggendo, ad esempio, i beni della vittima necessari a lavorare o studiare (come vestiti, computer, libri, altro equipaggiamento, ecc.); non prendendosi cura dei figli/e o di altre necessità domestiche per impedire alla vittima di lavorare e/o studiare; adottando comportamenti abusanti in vista di importanti appuntamenti di lavoro o di studio della vittima.

      CONTRASTO ALLA VIOLENZA ECONOMICA: LE PROPOSTE DI WEWORLD

      Grazie all’esperienza maturata in dieci anni di intervento a sostegno delle donne e dei loro diritti, abbiamo sviluppato una serie di proposte per contrastare la violenza economica:

      PREVENIRE

      – Introduzione di curricula obbligatori di educazione sessuo-affettiva nelle scuole di ogni ordine e grado a partire dalla scuola dell’infanzia.
      – Introduzione di curricula obbligatori di educazione economico-finanziaria nelle scuole a partire dalla scuola primaria.
      – Campagne di sensibilizzazione multicanale e rivolte alla più ampia cittadinanza che individuino il fenomeno e le sue specificità.

      (RI)CONOSCERE E MONITORARE

      – Adozione di una definizione condivisa di violenza economica che ne specifichi i comportamenti.
      - Attuazione della Legge 53/2022, riservando attenzione alla raccolta e monitoraggio di dati sul fenomeno della violenza economica e su altri dati spia (condizione di comunione/separazione dei beni, presenza o meno di un conto in banca, condizione occupazionale, titolo di studio, presenza o meno di immobili o beni intestati, ecc.)

      INTERVENIRE

      - Maggiori e strutturali finanziamenti al reddito di libertà (sostegno economico per donne che cercano di allontanarsi da situazioni di violenza e sono in condizione di povertà) integrato a politiche abitative e del lavoro più solide e inclusive
      – Attività di prevenzione ed empowerment femminile che possano integrare l’operato della filiera dell’antiviolenza attraverso presidi territoriali permanenti.
      – Allargamento della filiera dell’antiviolenza a istituti finanziari con ruolo di “sentinella”.

      Pour télécharger le rapport:
      https://ejbn4fjvt9h.exactdn.com/uploads/2023/11/CIO-CHE-E-TUO-E-MIO-previewsingole-3.pdf

      https://www.weworld.it/news-e-storie/news/cio-che-e-tuo-e-mio-fare-i-conti-con-la-violenza-economica-il-nostro-report-
      #sabotage_économique #WeWorld

  • Luttes féministes à travers le monde. Revendiquer l’égalité de genre depuis 1995

    Les #femmes, les filles, les minorités et diversités de genre du monde entier continuent à subir en 2021 des violations de leurs #droits_humains, et ce tout au long de leur vie. En dépit d’objectifs ambitieux que se sont fixés les États pour parvenir à l’#égalité_de_genre, leur réalisation n’a à ce jour jamais été réellement prioritaire.

    Les progrès réalisés au cours des dernières décennies l’ont essentiellement été grâce aux #mouvements_féministes, aux militant.es et aux penseur.ses. Aujourd’hui, la nouvelle génération de féministes innove et donne l’espoir de faire bouger les lignes par son inclusivité et la convergence des luttes qu’elle prône.

    Cet ouvrage intergénérationnel propose un aperçu pédagogique à la thématique de l’égalité de genre, des #luttes_féministes et des #droits_des_femmes, dans une perspective historique, pluridisciplinaire et transnationale. Ses objectifs sont multiples : informer et sensibiliser, puisque l’#égalité n’est pas acquise et que les retours en arrière sont possibles, et mobiliser en faisant comprendre que l’égalité est l’affaire de tous et de toutes.

    https://www.uga-editions.com/menu-principal/nos-collections-et-revues/nos-collections/carrefours-des-idees-/luttes-feministes-a-travers-le-monde-1161285.kjsp

    Quatrième conférence mondiale sur les femmes


    https://fr.wikipedia.org/wiki/Quatri%C3%A8me_conf%C3%A9rence_mondiale_sur_les_femmes

    #féminisme #féminismes #livre #résistance #luttes #Pékin #Quatrième_conférence_mondiale_sur_les_femmes (#1995) #ONU #diplomatie_féministe #monde #socialisation_genrée #normes #stéréotypes_de_genre #économie #pouvoir #prise_de_décision #intersectionnalité #backlash #fondamentalisme #anti-genre #Génération_égalité #queer #LGBTI #féminisme_décolonial #écoféminisme #masculinité #PMA #GPA #travail_du_sexe #prostitution #trafic_d'êtres_humains #religion #transidentité #non-mixité #espace_public #rue #corps #écriture_inclusive #viols #culture_du_viol

  • Cette Intersectionnalité qui fait tant jaser
    http://www.groupe-louise-michel.org/?page=emission&id_document=1613

    Une nouvelle façon de concevoir le monde défraye la chronique depuis peu : Intersectionnalité, Woke etc. Les critiques en fusent de toutes parts même de la Gauche, de l’extrême-gauche, de certains anarchistes : ces nouvelles analyses porteraient ombrage à la bonne vieille Lutte des classes. L’équipe de PdQ reçoit en direct Raeve, professeur de Droit, qui met bon ordre à ces divagations. Émission du 8 mars 2022 animée par Mariama, Samuel, Moana, François, du groupe Louise-Michel avec Raeve, professeur de droit. Durée : 1h33 Source : Groupe Louise-Michel

    http://www.groupe-louise-michel.org/IMG/mp3/22_03_08_intersectionnalite_raeve.mp3

  • Le #genre en ville
    https://metropolitiques.eu/Le-genre-en-ville.html

    L’émission Le Genre en ville aborde les questions de genre en croisant les savoirs issus des mondes académique, professionnel, associatif et militant. Elle propose une lecture critique des rapports sociaux, à l’épreuve du genre, afin de construire de nouvelles épistémologies et de questionner les #inégalités en ville. ▼ Voir le sommaire de l’émission ▼ Le Genre en ville est une émission en écoute à la demande (podcast) imaginée comme un espace de réflexion et de production de savoirs sur la question du #Podcasts

    / #Grand_angle, genre, intersectionnalité, inégalités, transdisciplinarité, #femmes, #féminisme, #territoire, (...)

    #intersectionnalité #transdisciplinarité #épistémologie

  • « Le #féminisme_iranien est une force de contestation révolutionnaire »

    Interview de Chowra Makaremi

    Depuis la mi-septembre et l’assassinat de la jeune #Mahsa_Amini par la police religieuse, la jeunesse iranienne manifeste un peu partout aux cris de « Femme, vie, liberté ». Comment faut-il, selon vous, comprendre ce slogan ?

    #Zhina_Mahsa_Amini appartenait à la minorité kurde qui est extrêmement discriminée en Iran – son « vrai » prénom est d’ailleurs un prénom kurde, #Zhina, que l’État refuse d’enregistrer. C’est important pour comprendre les circonstances de sa mort : Zhina Mahsa n’était pas plus mal voilée que la majorité des filles à Téhéran, mais celles qui sont originaires de la capitale savent où aller pour éviter les contrôles, comment se comporter avec les agents, à qui donner de l’argent, qui appeler en cas de problème...
    Les protestations ont commencé le soir des funérailles de la jeune femme dans la ville de Saqqez. C’est de là qu’est parti le slogan en langue kurde « Femme, vie, liberté », une devise politique inventée au sein du Parti des travailleurs kurdes (PKK) d’Abdullah Öcalan – dans lequel, certes, les femmes n’ont pas toujours été suffisamment représentées, mais qui a théorisé que la libération du Kurdistan ne se ferait pas sans elles.
    Je note au sujet du mot « vie » contenu dans ce slogan que beaucoup de jeunes manifestantes et manifestants donnent littéralement leur vie pour le changement de régime qu’ils réclament. Quand Zhina Mahsa est morte, les premières images d’elle qui ont été diffusées la montraient en robe rouge en train d’exécuter une danse traditionnelle qui témoigne d’un culte de la joie qu’on retrouve sur tous les comptes Instagram ou Tiktok des manifestantes tuées auparavant.

    Quelle est la place des féministes dans le mouvement qui agite l’Iran depuis plus d’un mois ?

    La dimension principale de cette révolte est le refus du voile qui est la matérialisation de ce que les féministes iraniennes appellent « l’apartheid de genre » : un ensemble de discriminations économiques, culturelles et juridiques, inscrites dans les lois sur le travail ou l’héritage.
    Mais ce mouvement veut aussi mettre fin à d’autres discriminations : par exemple, celles contre les minorités comme les Baloutches, les arabophones, les Baha’is, ou encore les réfugiés afghans de deuxième génération qui n’ont jamais pu avoir la nationalité iranienne.

    Le mouvement féministe iranien existe depuis trente ans, et il est très puissant – la Prix Nobel de la paix [en 2003], Shirin Ebadi, est une femme, tout comme les détenues emblématiques du régime. Ses militantes ont été entraînées à une lecture juridique du système de domination, et leur doctrine constitue la colonne vertébrale de nombreuses formes d’activisme. Comme théorie et comme méthode, le féminisme intersectionnel iranien permet aujourd’hui de comprendre comment, pour la première fois depuis quarante ans, des segments de la population qui n’ont jamais été solidaires se soulèvent en même temps.

    Que demandent les hommes qui prennent part au soulèvement ?

    Il ne s’agit pas uniquement de manifestations pour les droits des femmes : les hommes originaires des quartiers populaires descendent aussi dans la rue pour protester contre la vie chère ; ceux originaires du Kurdistan manifestent pour ne pas être victimes de violence… Il faut aussi avoir en tête l’appauvrissement rapide de l’Iran, où les classes moyennes sont réduites à peau de chagrin en raison du Covid, des sanctions internationales et de la corruption. Tous ces éléments sont à comprendre ensemble.
    Finalement, le voile n’est devenu une demande de premier plan que lorsque, ces dernières années, les féministes sont arrivées au bout des revendications réformistes possibles. C’est ainsi qu’est né l’activisme quotidien sur cette question qui constitue un des piliers de l’ordre théocratique – une façon de rappeler à tous·tes les Iranien·nes que le pouvoir s’inscrit sur les corps. En 2018, « les filles de la rue de la révolution », défendues par l’avocate Nasrin Sotoudeh, se sont mises à manifester avec un voile blanc porté non pas sur la tête mais au bout d’un bâton. Elles ont écopé de quinze ans de prison et sont encore détenues aujourd’hui.

    En France, dans les médias comme chez les commentateur·ices politiques, un parallèle a souvent été établi entre les Iraniennes qui se dévoilent et les Françaises musulmanes qui se voilent. Pensez-vous que cette grille de lecture soit pertinente ?

    Ce que montre le soulèvement en Iran, c’est que le féminisme n’est pas uniquement un outil intellectuel qui permet de revendiquer l’égalité à l’intérieur d’un État de droit mais qu’il peut être une force de contestation révolutionnaire.
    Opposer les manifestantes iraniennes qui enlèvent leur voile aux Françaises musulmanes qui souhaitent le porter, c’est passer à côté de cette puissance révolutionnaire. La haine du voile chez celles qui le brûlent lors des manifestations ne renvoie à aucune altérité : elles ne détestent pas le voile de leur mère, de leurs grands-mères et de leurs amies, mais le tissu dont on les emmaillote. La question qui se pose à cet endroit est celle du contrôle politique du corps des femmes par les gouvernements partout dans le monde.
    Pour autant, je ne souscris pas au raccourci qui consiste à dire : « En Iran on oblige les femmes à porter le voile et en France à l’enlever. » En France on oblige les femmes à enlever le voile, et si elles ne le font pas elles risquent d’être déscolarisées, licenciées ou humiliées devant leurs enfants. En Iran ou en Afghanistan, si elles retirent leur voile, elles risquent d’être torturées et tuées. C’est une différence constitutive, pas un continuum de violences.
    Malgré tout cela, réduire ce qui se passe actuellement en Iran à une révolte contre le voile, c’est jouer le jeu des réformistes iraniens qui assimilent la situation insurrectionnelle actuelle à une revendication vestimentaire. Tous les slogans demandent un changement de régime, aucun ne dit non au hijab. Quand les filles brûlent leur voile dans la rue, c’est une façon de s’en prendre à un pilier du régime : elles le brûlent en disant « à bas la dictature ». Il faut les écouter.

    https://mailchi.mp/revueladeferlante/le-feminisme-iranien-est-une-force-de-contestation-revolutionnaire
    #contestation #contestation_révolutionnaire #féminisme #Iran #résistance #femmes #Chowra_Makaremi #minorités #kurdes #voile #Saqqez #vie #danse #joie #culte_de_la_joie #apartheid_de_genre #genre #discriminations #nationalité #intersectionnalité #féminisme_intersectionnel #manifestations #activisme_quotidien #pauvreté #insurrection

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  • « Tant qu’on sera dans un système capitaliste, il y aura du #patriarcat » – Entretien avec #Haude_Rivoal

    Haude Rivoal est l’autrice d’une enquête sociologique publiée en 2021 aux éditions La Dispute, La fabrique des masculinités au travail. Par un travail de terrain de plusieurs années au sein d’une entreprise de distribution de produits frais de 15 000 salariés, la sociologue cherche à comprendre comment se forgent les identités masculines au travail, dans un milieu professionnel qui se précarise (vite) et se féminise (lentement). Les travailleurs, majoritairement ouvriers, sont soumis comme dans tous les secteurs à l’intensification, à la rationalisation et à la flexibilisation du travail. Leur réponse aux injonctions du capitalisme et à la précarisation de leur statut, c’est entre autres un renforcement des pratiques viriles : solidarité accrue entre hommes, exclusion subtile (ou non) des femmes, déni de la souffrance… Pour s’adapter pleinement aux exigences du capitalisme et du patriarcat, il leur faut non seulement être de bons travailleurs, productifs, engagés et disciplinés, mais aussi des “hommes virils mais pas machos”. Pour éviter la mise à l’écart, adopter de nouveaux codes de masculinité est donc nécessaire – mais laborieux. Dans cette étude passionnante, Haude Rivoal met en lumière les mécanismes de la fabrique des masculinités au travail, au croisement des facteurs de genre, de classe et de race.

    Entretien par Eugénie P.

    Ton hypothèse de départ est originale, elle va à rebours des postulats féministes habituels : au lieu d’étudier ce qui freine les femmes au travail, tu préfères analyser comment les hommes gardent leur hégémonie au travail « malgré la déstabilisation des identités masculines au et par le travail ». Pourquoi as-tu choisi ce point de départ ?

    J’étais en contrat Cifre [contrat de thèse où le ou la doctorant.e est embauché.e par une entreprise qui bénéficie également de ses recherches, ndlr] dans l’entreprise où j’ai fait cette enquête. J’avais commencé à étudier les femmes, je voulais voir comment elles s’intégraient, trouvaient des stratégies pour s’adapter dans un univers masculin à 80%. Ce que je découvrais sur le terrain était assez similaire à toutes les enquêtes que j’avais pu lire : c’était les mêmes stratégies d’adaptation ou d’autocensure. J’ai été embauchée pour travailler sur l’égalité professionnelle, mais je n’arrivais pas à faire mon métier correctement, parce que je rencontrais beaucoup de résistances de la part de l’entreprise et de la part des hommes. Et comme je ne comprenais pas pourquoi on m’avait embauchée, je me suis dit que ça serait intéressant de poser la question des résistances des hommes, sachant que ce n’est pas beaucoup étudié par la littérature sociologique. J’ai changé un peu de sujet après le début de ma thèse, et c’est au moment où est sortie la traduction française des travaux de Raewyn Connell [Masculinités. Enjeux sociaux de l’hégémonie, Paris, Éditions Amsterdam, 2014, ndlr] : cet ouvrage m’a ouvert un espace intellectuel complètement fou ! Ça m’a beaucoup intéressée et je me suis engouffrée dans la question des masculinités.

    C’est donc la difficulté à faire ton travail qui a renversé ton point de vue, en fait ?

    Oui, la difficulté à faire le travail pour lequel j’ai été embauchée, qui consistait à mettre en place des politiques d’égalité professionnelle : je me rendais compte que non seulement je n’avais pas les moyens de les mettre en place, mais qu’en plus, tout le monde s’en foutait. Et je me suis rendue compte aussi que l’homme qui m’avait embauchée pour ce projet était lui-même extrêmement sexiste, et ne voyait pas l’existence des inégalités hommes-femmes, donc je n’arrivais pas à comprendre pourquoi il m’avait embauchée. J’ai compris plus tard que les raisons de mon embauche était une défense de ses propres intérêts professionnels, j’y reviendrai. Ce n’est pas qu’il était aveugle face aux inégalités – il travaillait dans le transport routier depuis 40 ans, évidemment que les choses avaient changé -, mais j’avais beau lui expliquer que les discriminations étaient plus pernicieuses, il était persuadé qu’il ne restait plus grand-chose à faire sur l’égalité hommes-femmes.

    Comment se manifeste cette “déstabilisation des identités masculines au et par le travail”, cette supposée « crise de la virilité », que tu évoques au début de ton livre ?

    Je me suis rendue compte en interviewant les anciens et les nouveaux que rien qu’en l’espace d’une génération, il y avait beaucoup moins d’attachement à l’entreprise. Les jeunes générations avaient très vite compris que pour monter dans la hiérarchie, pour être mieux payé ou pour avoir plus de responsabilités, il ne suffisait pas juste d’être loyal à l’entreprise : il fallait la quitter et changer de boulot, tout simplement. Ce n’est pas du tout l’état d’esprit des anciens, dont beaucoup étaient des autodidactes qui avaient eu des carrières ascensionnelles. Il y avait énormément de turnover, et ça créait un sentiment d’instabilité permanent. Il n’y avait plus d’esprit de solidarité ; ils n’arrêtaient pas de dire “on est une grande famille” mais au final, l’esprit de famille ne parlait pas vraiment aux jeunes. Par ailleurs, dans les années 2010, une nouvelle activité a été introduite : la logistique. Il y a eu beaucoup d’enquêtes sur le sujet ! Beaucoup de médias ont parlé de l’activité logistique avec les préparateurs de commandes par exemple, une population majoritairement intérimaire, très précaire, qui ne reste pas longtemps… et du coup, beaucoup d’ouvriers qui avaient un espoir d’ascension sociale se sont retrouvés contrariés. Ce n’est pas exactement du déclassement, mais beaucoup se sont sentis coincés dans une précarité, et d’autant plus face à moi qui suis sociologue, ça faisait un peu violence parfois. Donc c’est à la fois le fait qu’il y ait beaucoup de turnover, et le fait qu’il n’y ait plus le même sentiment de famille et de protection que pouvait apporter l’entreprise, qui font qu’il y a une instabilité permanente pour ces hommes-là. Et comme on sait que l’identité des hommes se construit en grande partie par le travail, cette identité masculine était mise à mal : si elle ne se construit pas par le travail, par quoi elle se construit ?

    Ça interroge beaucoup le lien que tu évoques entre le capitalisme et le patriarcat : la précarisation et la flexibilisation du travail entraînent donc un renforcement des résistances des hommes ?

    Oui, carrément. Il y a beaucoup d’hommes, surtout dans les métiers ouvriers, qui tirent une certaine fierté du fait de faire un “métier d’hommes ». Et donc, face à la précarisation du travail, c’est un peu tout ce qu’il leur reste. Si on introduit des femmes dans ces métiers-là, qui peuvent faire le boulot dont ils étaient si fiers parce que précisément c’est un “métier d’hommes”, forcément ça crée des résistances très fortes. Quand l’identité des hommes est déstabilisée (soit par la précarisation du travail, soit par l’entrée des femmes), ça crée des résistances très fortes.

    Tu explores justement les différentes formes de résistance, qui mènent à des identités masculines diversifiées. L’injonction principale est difficile : il faut être un homme « masculin mais pas macho ». Ceux qui sont trop machos, un peu trop à l’ancienne, sont disqualifiés, et ceux qui sont pas assez masculins, pareil. C’est un équilibre très fin à tenir ! Quelles sont les incidences concrètes de ces disqualifications dans le travail, comment se retrouvent ces personnes-là dans le collectif ?

    Effectivement, il y a plein de manières d’être homme et il ne suffit pas d’être un homme pour être dominant, encore faut-il l’être “correctement”. Et ce “correctement” est presque impossible à atteindre, c’est vraiment un idéal assez difficile. Par exemple, on peut avoir des propos sexistes, mais quand c’est trop vulgaire, que ça va trop loin, là ça va être disqualifié, ça va être qualifié de “beauf”, et pire, ça va qualifier la personne de pas très sérieuse, de quelqu’un à qui on ne pourra pas trop faire confiance. L’incidence de cette disqualification, c’est que non seulement la personne sera un peu mise à l’écart, mais en plus, ce sera potentiellement quelqu’un à qui on ne donnera pas de responsabilités. Parce qu’un responsable doit être un meneur d’hommes, il faut qu’il soit une figure exemplaire, il doit pouvoir aller sur le terrain mais aussi avoir des qualités d’encadrement et des qualités intellectuelles. Donc un homme trop vulgaire, il va avoir une carrière qui ne va pas décoller, ou des promotions qui ne vont pas se faire.

    Quant à ceux qui ne sont “pas assez masculins », je n’en ai pas beaucoup rencontrés, ce qui est déjà une réponse en soi !

    Peut-on dire qu’il y a une “mise à l’écart” des travailleurs les moins qualifiés, qui n’ont pas intégré les nouveaux codes de la masculinité, au profit des cadres ?

    Non, c’est un phénomène que j’ai retrouvé aussi chez les cadres. Mais chez les cadres, le conflit est plutôt générationnel : il y avait les vieux autodidactes et les jeunes loups, et c’est la course à qui s’adapte le mieux aux transformations du monde du travail, qui vont extrêmement vite, en particulier dans la grande distribution. C’est une des raisons pour laquelle le directeur des RH m’a embauchée : il avait peur de ne pas être dans le coup ! L’égalité professionnelle était un sujet, non seulement parce qu’il y avait des obligations légales mais aussi parce que dans la société, ça commençait à bouger un peu à ce moment-là. Donc il s’est dit que c’est un sujet porteur et que potentiellement pour sa carrière à lui, ça pouvait être très bon. Ça explique qu’il y ait des cadres qui adhèrent à des projets d’entreprise avec lesquels ils ne sont pas forcément d’accord, mais juste parce qu’il y a un intérêt final un peu égoïste en termes d’évolution de carrière.

    On dit toujours que les jeunes générations sont plus ouvertes à l’égalité que les aînés, je pense que ce n’est pas tout à fait vrai ; les aînés ont à cœur de s’adapter, ils ont tellement peur d’être dépassés que parfois ils peuvent en faire plus que les jeunes. Et par ailleurs, les jeunes sont ouverts, par exemple sur l’équilibre vie pro et vie perso, mais il y a quand même des injonctions (qui, pour le coup, sont propres au travail) de présentéisme, de présentation de soi, d’un ethos viril à performer… qui font qu’ils sont dans des positions où ils n’ont pas d’autres choix que d’adopter certains comportements virilistes. Donc certes, ils sont plus pour l’égalité hommes-femmes, mais ils ne peuvent pas complètement l’incarner.

    L’une de tes hypothèses fortes, c’est que le patriarcat ingurgite et adapte à son avantage toutes les revendications sur la fin des discriminations pour se consolider. Est-ce qu’on peut progresser sur l’égalité professionnelle, et plus globalement les questions de genre, sans que le patriarcat s’en empare à son avantage ?

    Très clairement, tant qu’on sera dans un système capitaliste, on aura toujours du patriarcat, à mon sens. C’était une hypothèse, maintenant c’est une certitude ! J’ai fait une analogie avec l’ouvrage de Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, pour dire que la domination masculine est pareille que le capitalisme, elle trouve toujours des moyens de se renouveler. En particulier, elle est tellement bien imbriquée dans le système capitaliste qui fonctionne avec les mêmes valeurs virilistes (on associe encore majoritairement la virilité aux hommes), que les hommes partent avec des avantages compétitifs par rapport aux femmes. Donc quand les femmes arrivent dans des positions de pouvoir, est-ce que c’est une bonne nouvelle qu’elles deviennent “des hommes comme les autres”, c’est-à-dire avec des pratiques de pouvoir et de domination ? Je ne suis pas sûre. C’est “l’égalité élitiste” : des femmes arrivent à des positions de dirigeantes, mais ça ne change rien en dessous, ça ne change pas le système sur lequel ça fonctionne, à savoir : un système de domination, de hiérarchies et de jeux de pouvoir.

    Donc selon toi, l’imbrication entre patriarcat et capitalisme est indissociable ?

    Absolument, pour une simple et bonne raison : le capitalisme fonctionne sur une partie du travail gratuit qui est assuré par les femmes à la maison. Sans ce travail gratuit, le système capitaliste ne tiendrait pas. [à ce sujet, voir par exemple les travaux de Silvia Federici, Le capitalisme patriarcal, ndlr]

    Ça pose la question des politiques d’égalité professionnelle en entreprise : sans remise en question du système capitaliste, elles sont destinées à être seulement du vernis marketing ? On ne peut pas faire de vrais progrès ?

    Je pense que non. D’ailleurs, beaucoup de gens m’ont dit que mon livre était déprimant pour ça. Je pense que les politiques d’égalité professionnelle ne marchent pas car elles ne font pas sens sur le terrain. Les gens ne voient pas l’intérêt, parce qu’ils fonctionnent essentiellement d’un point de vue rationnel et économique (donc le but est de faire du profit, que l’entreprise tourne et qu’éventuellement des emplois se créent, etc), et ils ne voient pas l’intérêt d’investir sur ce sujet, surtout dans les milieux masculins car il n’y a pas suffisamment de femmes pour investir sur le sujet. J’ai beau leur dire que justement, s’il n’y a pas de femmes c’est que ça veut dire quelque chose, ils ont toujours des contre-arguments très “logiques” : par exemple la force physique. Ils ne vont pas permettre aux femmes de trouver une place égale sur les postes qui requièrent de la force physique. Quand les femmes sont intégrées et qu’elles trouvent une place valorisante, ce qui est le cas dans certains endroits, c’est parce qu’elles sont valorisées pour leurs qualités dites “féminines”, d’écoute, d’empathie, mais elles n’atteindront jamais l’égalité car précisément, elles sont valorisées pour leur différence. Le problème n’est pas la différence, ce sont les inégalités qui en résultent. On peut se dire que c’est super que tout le monde soit différent, mais on vit dans un monde où il y a une hiérarchie de ces différences. Ces qualités (écoute, empathie) sont moins valorisées dans le monde du travail que le leadership, l’endurance…

    Ça ne nous rassure pas sur les politiques d’égalité professionnelle…

    Si les politiques d’égalité professionnelle marchaient vraiment, on ne parlerait peut-être plus de ce sujet ! Je pense que les entreprises n’ont pas intérêt à ce qu’elles marchent, parce que ça fonctionne bien comme ça pour elles. Ca peut prendre des formes très concrètes, par exemple les RH disaient clairement en amont des recrutements : ”on prend pas de femmes parce que physiquement elles ne tiennent pas”, “les environnement d’hommes sont plus dangereux pour elles”, “la nuit c’est pas un environnement propice au travail des femmes”… Tu as beau répondre que les femmes travaillent la nuit aussi, les infirmières par exemple… Il y a un tas d’arguments qui montrent la construction sociale qui s’est faite autour de certains métiers, de certaines qualités professionnelles attendues, qu’il faudrait déconstruire – même si c’est très difficile à déconstruire. Ça montre toute une rhétorique capitaliste, mais aussi sexiste, qui explique une mise à l’écart des femmes.

    On a l’impression d’une progression linéaire des femmes dans le monde du travail, que ça avance doucement mais lentement, mais je constate que certains secteurs et certains métiers se déféminisent. On observe des retours en arrière dans certains endroits, ce qui légitime encore plus le fait de faire des enquêtes. Ce n’est pas juste un retour de bâton des vieux mormons qui veulent interdire l’avortement, il y aussi des choses plus insidieuses, des résistances diverses et variées.

    En plus, l’intensification du travail est un risque à long terme pour les femmes. Par exemple, il y a plus de femmes qui font des burnout. Ce n’est pas parce qu’elles sont plus fragiles psychologiquement, contrairement à ce qu’on dit, mais c’est parce qu’elles assurent des doubles journées, donc elles sont plus sujettes au burnout. Les transformations du monde du travail sont donc un risque avéré pour l’emploi des femmes, ne serait-ce que parce que par exemple, les agences d’intérim trient en amont les candidats en fonction de la cadence. Il faut redoubler de vigilance là-dessus.

    Tu analyses les types de masculinité qui se façonnent en fonction des facteurs de classe et de race. On voit que ce ne sont pas les mêmes types d’identités masculines, certaines sont dévalorisées. Quelles en sont les grandes différences ?

    Je ne vais pas faire de généralités car ça dépend beaucoup des milieux. Ce que Raewyn Connell appelle la “masculinité hégémonique”, au sens culturel et non quantitatif (assez peu d’hommes l’incarnent), qui prendrait les traits d’un homme blanc, d’âge moyen, hétérosexuel, de classe moyenne supérieure. Par rapport à ce modèle, il y a des masculinités “non-hégémoniques”, “subalternes”, qui forment une hiérarchie entre elles. Malgré le fait que ces masculinités soient plurielles, il y a une solidarité au sein du groupe des hommes par rapport au groupe des femmes, et à l’intérieur du groupe des hommes, il y a une hiérarchie entre eux. Les masculinités qu’on appelle subalternes sont plutôt les masculinités racisées ou homosexuelles. Elles s’expriment sous le contrôle de la masculinité hégémonique. Elles sont appréciées pour certaines qualités qu’elles peuvent avoir : j’ai pu voir que les ouvriers racisés étaient appréciés pour leur endurance, mais qu’ils étaient aussi assez craints pour leur “indiscipline” supposée. En fait, les personnes “dévalorisées” par rapport à la masculinité hégémonique sont appréciées pour leurs différences, mais on va craindre des défauts qui reposent sur des stéréotypes qu’on leur prête. Par exemple, les personnes racisées pour leur supposée indiscipline, les personnes des classes populaires pour leur supposé mode de vie tourné vers l’excès, les femmes pour leurs supposés crêpages de chignon entre elles…. C’est à double tranchant. Les qualités pour lesquelles elles sont valorisées sont précisément ce qui rend l’égalité impossible. Ces qualités qu’on valorise chez elles renforcent les stéréotypes féminins.

    Tu montres que le rapport au corps est central dans le travail des hommes : il faut s’entretenir mais aussi s’engager physiquement dans le travail, quitte à prendre des risques. Il y a une stratégie de déni de la souffrance, de sous-déclaration du stress chez les travailleurs : pour diminuer la souffrance physique et psychologique au travail, il faut changer les conditions de travail mais aussi changer le rapport des hommes à leur corps ?

    Je pensais que oui, mais je suis un peu revenue sur cette idée. Effectivement, il y plein d’études qui montrent que les hommes prennent plus de risques. C’est par exemple ce que décrit Christophe Dejours [psychiatre français spécialisé dans la santé au travail, ndlr] sur le “collectif de défense virile”, qui consiste à se jeter à corps perdu dans le travail pour anesthésier la peur ou la souffrance. Ce n’est pas forcément ce que j’ai observé dans mes enquêtes : en tout cas auprès des ouvriers (qui, pour le coup, avaient engagé leur corps assez fortement dans le travail), non seulement parce qu’ils ont bien conscience que toute une vie de travail ne pourra pas supporter les prises de risque inconsidérées, mais aussi parce qu’aujourd’hui la souffrance est beaucoup plus médiatisée. Cette médiatisation agit comme si elle donnait une autorisation d’exprimer sa souffrance, et c’est souvent un moyen d’entrée pour les syndicats pour l’amélioration des conditions de travail et de la santé au travail. Donc il y a un rapport beaucoup moins manichéen que ce qu’on prête aux hommes sur la prise de risques et le rapport au corps.

    En termes d’émotions, là c’est moins évident : on parle de plus en plus de burnout, mais à la force physique s’est substituée une injonction à la force mentale, à prendre sur soi. Et si ça ne va pas, on va faire en sorte que les individus s’adaptent au monde du travail, mais on ne va jamais faire en sorte que le monde du travail s’adapte au corps et à l’esprit des individus. On va donner des sièges ergonomiques, des ergosquelettes, on va créer des formations gestes et postures, on va embaucher des psychologues pour que les gens tiennent au travail, sans s’interroger sur ce qui initialement a causé ces souffrances.

    D’ailleurs, ce qui est paradoxal, c’est que l’entreprise va mettre en place tous ces outils, mais qu’elle va presque encourager les prises de risque, parce qu’il y a des primes de productivité ! Plus on va vite (donc plus on prend des risques), plus on gagne d’argent. C’est d’ailleurs les intérimaires qui ont le plus d’accidents du travail, déjà parce qu’ils sont moins formés, mais aussi parce qu’ils ont envie de se faire un max d’argent car ils savent très bien qu’ils ne vont pas rester longtemps.

    Donc ce sont les valeurs du capitalisme et ses incidences économiques (les primes par exemple) qui forgent ce rapport masculin au travail ?

    Oui, mais aussi parce qu’il y a une émulation collective. La masculinité est une pratique collective. Il y a une volonté de prouver qu’on est capable par rapport à son voisin, qu’on va dépasser la souffrance même si on est fatigué, et qu’on peut compter sur lui, etc. J’ai pu observer ça à la fois chez les cadres dans ce qu’on appelle les “boys clubs”, et sur le terrain dans des pratiques de renforcement viril.

    Tu n’as pas observé de solidarité entre les femmes ?

    Assez peu, et c’est particulièrement vrai dans les milieux masculins : la sororité est une solidarité entre femmes qui est très difficile à obtenir. J’en ai fait l’expérience en tant que chercheuse mais aussi en tant que femme. Je me suis dit que j’allais trouver une solidarité de genre qui m’aiderait à aller sur le terrain, mais en fait pas du tout. C’est parce que les femmes ont elles-mêmes intériorisé tout un tas de stéréotypes féminins. C’est ce que Danièle Kergoat appelle “le syllogisme des femmes”, qui dit : “toutes les femmes sont jalouses. Moi je ne suis pas jalouse. Donc je ne suis pas une femme.” Il y a alors une impossibilité de création de la solidarité féminine, parce qu’elles ne veulent pas rentrer dans ces stéréotypes dégradants de chieuses, de nunuches, de cuculs… Les femmes sont assez peu nombreuses et assez vites jugées, en particulier sur leurs tenues : les jugements de valeur sont assez sévères ! Par exemple si une femme arrive avec un haut un peu décolleté, les autres femmes vont être plutôt dures envers elle, beaucoup plus que les hommes d’ailleurs. Elles mettent tellement d’efforts à se créer une crédibilité professionnelle que tout à coup, si une femme arrive en décolleté, on ne va parler que de ça.

    Toi en tant que femme dans l’entreprise, tu dis que tu as souvent été renvoyée à ton genre. Il y a une forme de rappel à l’ordre.

    Oui, quand on est peu nombreuses dans un univers masculin, la féminité fait irruption ! Quels que soient tes attributs, que tu sois féminine ou pas tant que ça, tu vas avoir une pression, une injonction tacite à contrôler tous les paramètres de ta féminité. Ce ne sont pas les hommes qui doivent contrôler leurs désirs ou leurs remarques, mais c’est aux femmes de contrôler ce qu’elles provoquent chez les hommes, et la perturbation qu’elles vont provoquer dans cet univers masculin, parce qu’elles y font irruption.

    Toujours rappeler les femmes à l’ordre, c’est une obsession sociale. Les polémiques sur les tenues des filles à l’école, sur les tenues des femmes musulmanes en sont des exemples… Cette volonté de contrôle des corps féminins est-elle aussi forte que les avancées féministes récentes ?

    C’est difficile à mesurer mais ce n’est pas impossible. S’il y a des mouvements masculinistes aussi forts au Canada par exemple, c’est peut-être que le mouvement féministe y est hyper fort. Ce n’est pas impossible de se dire qu’à chaque fois qu’il y a eu une vague d’avancées féministes, quelques années plus tard, il y a forcément un retour de bâton. Avec ce qui s’est passé avec #metoo, on dirait que le retour de bâton a commencé avec le verdict du procès Johnny Depp – Amber Heard, puis il y a eu la la décision de la Cour Constitutionnelle contre l’avortement aux Etats-Unis… On n’est pas sorties de l’auberge, on est en train de voir se réveiller un mouvement de fond qui était peut-être un peu dormant, mais qui est bien présent. L’article sur les masculinistes qui vient de sortir dans Le Monde est flippant, c’est vraiment des jeunes. En plus, ils sont bien organisés, et ils ont une rhétorique convaincante quand tu ne t’y connais pas trop.

    Les milieux de travail très féminisés sont-ils aussi sujets à l’absence de sororité et à la solidarité masculine dont tu fais état dans ton enquête ?

    En général, les hommes qui accèdent à ces milieux ont un ”ascenseur de verre” (contrairement aux femmes qui ont le “plafond de verre”) : c’est un accès plus rapide et plus facile à des postes à responsabilité, des postes de direction. C’est le cas par exemple du milieu de l’édition : il y a énormément de femmes qui y travaillent mais les hommes sont aux manettes. Le lien avec capitalisme et virilité se retrouve partout – les hommes partent avec un avantage dans le monde du travail capitaliste, souvent du simple fait qu’ils sont des hommes et qu’on leur prête plus volontiers d’hypothétiques qualités de leader.

    Dans quelle mesure peut-on étendre tes conclusions à d’autres milieux de travail ou d’autres secteurs d’activité ? Est-ce que tes conclusions sont spécifiques à la population majoritairement ouvrière et masculine, et au travail en proie à l’intensification, étudiés dans ta thèse ?

    J’ai pensé mon travail pour que ce soit généralisable à plein d’entreprises. J’ai pensé cette enquête comme étant symptomatique, ou en tout cas assez représentative de plein de tendances du monde du travail : l’intensification, l’informatisation à outrance… Ces tendances se retrouvent dans de nombreux secteurs. Je dis dans l’intro : “depuis l’entrepôt, on comprend tout.” Comme partout, il y a de la rationalisation, de l’intensification, et de la production flexible. A partir de là, on peut réfléchir aux liens entre masculinités et capitalisme. Les problématiques de violence, de harcèlement sortent dans tous les milieux, aucun milieu social n’est épargné, précisément parce qu’elles ont des racines communes.

    Comment peut-on abolir le capitalisme, le patriarcat et le colonialisme ?

    Je vois une piste de sortie, une perspective politique majeure qui est de miser sur la sororité. La sororité fonctionne différemment des boys clubs, c’est beaucoup plus horizontal et beaucoup moins hiérarchique. Il y a cette même notion d’entraide, mais elle est beaucoup plus inclusive. Ce sont des dominées qui se rassemblent et qui refusent d’être dominées parce qu’elles refusent de dominer. Il faut prendre exemple sur les hommes qui savent très bien se donner des coups de main quand il le faut, mais faisons-le à bon escient. C’est une solution hyper puissante.

    Ne pas dominer, quand on est dominante sur d’autres plans (quand on est blanche par exemple), ça revient à enrayer les différents systèmes de domination.

    Tout à fait. Les Pinçon-Charlot, on leur a beaucoup reproché d’avoir travaillé sur les dominants, et c’est le cas aussi pour les masculinités ! Il y a plusieurs types de critique : d’abord, il y a un soupçon de complaisance avec ses sujets d’étude, alors qu’il y a suffisamment de critique à l’égard de nos travaux pour éviter ce biais. Ensuite, on est souvent accusé.e.s de s’intéresser à des vestiges ou à des pratiques dépassés, parce que les groupes (hommes, ou bourgeois) sont en transformation ; en fait, les pratiques de domination se transforment, mais pas la domination ! Enfin, on peut nous reprocher de mettre en lumière des catégories “superflues”, alors qu’on devrait s’intéresser aux dominé.e.s… mais on a besoin de comprendre le fonctionnement des dominant.e.s pour déconstruire leur moyen de domination, et donner des armes à la sororité.

    https://www.frustrationmagazine.fr/entretien-rivoal
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  • Participant responses – Decolonial Research Methods webinar series

    This video features participant responses to the NCRM webinar series Decolonial Research Methods: Resisting Coloniality in Academic Knowledge Production.

    The seven speakers in this video are: Musharrat J. Ahmed-Landeryou, of London South Bank University (UK), Jorge Vega Humboldt, of Humboldt-Universität zu Berlin (Germany-Mexico), Luqman Muraina, of the University of Cape Town (South Africa), Nuruddin Al Akbar, from Universitas Gadjah Mada (Indonesia), Nirupama Sarathy, an independent facilitator and researcher (India), Dr Randy T. Nobleza, of Marinduque State College (Philippines) and Carl W. Jones, of the Royal College of Art and University of Westminster (UK).

    The series comprised six webinars, which took place between October and December 2021.

    https://www.youtube.com/watch?v=oXvjxGPVfGA

    #intersectionnalité #décolonial #décolonialité #méthodologie #savoirs #recherche #méthodologie_de_recherche #éthique #exclusion #violence_systémique #pouvoir #relations_de_pouvoir #pluriversalité #pluriverse #connaissance #savoirs #production_de_savoirs
    ping @postcolonial @cede @karine4

  • Communiqué unitaire et des personnels de l’#université_d'angers contre les #attaques d’#extrême_droite (22.03.2022)

    Cher‧es collègues,

    Depuis quelques semaines, les actes racistes, antisémites et fascistes se développent au sein même de notre #Université, du fait notamment d’étudiant‧es organisé‧es dans des #groupuscules d’extrême droite. Des #croix_gammées ont été taguées dans des toilettes, des autocollants racistes sont collés sur plusieurs de nos campus, un #collage géant « L’immigration tue » revendiqué par le mouvement nationaliste et identitaire #RED (#Rassemblement_des_étudiants_de_droite) est apparu dans la nuit de jeudi à vendredi sur le campus de #Belle_Beille, et ce jeudi 17 mars plusieurs étudiants de cette mouvance ont distribué un #tract infamant, raciste, sexiste et LGBTphobe à #Saint-Serge. Certains de ces actes touchent directement des enseignant‧es : des cours ont été interrompus par des remarques de soutien aux candidats d’extrêmes-droites, des enseignant‧es sont pris‧es à partie sur les #réseaux_sociaux par des étudiant‧es dévoilant leur nom et contenus de cours, et des médias d’extrême-droite attaquent nommément des collègues et leurs recherches liés aux #études_de_genre et à l’#intersectionnalité. Le contexte national d’élection présidentielle et d’exacerbation des discours racistes et violents y est pour beaucoup. Les discours de Blanquer et Vidal contre un soi-disant « islamo-gauchisme » des personnels de l’#ESR aussi. Le contexte local du déroulement du Mois du genre est également à prendre en compte : l’extrême-droite ne supporte pas que nos recherches documentent les inégalités et les dominations.

    Nous avons une pensée particulière pour toutes celles et tous ceux qui sont directement visés par ces attaques. Tous et toutes ensemble devons être vigilant‧es : nous ne laisserons aucun de ces autocollants, tags ou tracts avoir droit de cité au sein de notre université. Nous les effacerons systématiquement. Les discours racistes, sexistes, homophobes ne sont pas des opinions, ce sont des #délits. Les responsables de ces actes s’exposent donc à des #poursuites_judiciaires.

    Le service public de l’enseignement supérieur et de la recherche doit être le lieu où toutes et tous peuvent trouver leur place sans avoir peur d’une agression qu’elle soit verbale ou physique. Notre université doit permettre à tous et toutes, quelles que soient ses appartenances de genre ou ses origines ethniques, d’étudier, travailler, faire de la recherche. Notre communauté universitaire doit être un rempart contre les projets politiques nauséabonds, réactionnaires et fascistes.

    Nous invitons toutes celles et tous ceux qui le souhaitent à participer aux activités du Mois du genre tout le long du mois de mars et de la Semaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, qui commence lundi 21 mars à l’UA.

    Communiqué signé Snesup-FSU, Snasub-FSU, Sud Education 49, ainsi que des personnels de l’Université d’Angers engagés contre l’extrême-droite.
    (reçu via une mailing-list)

    #racisme #antisémitisme #fascisme #France #sexisme #homophobie #étudiants #Angers #facs