• Paradoxe des flux de capitaux: et si les pays riches étaient financés par les pays émergents [2021]
    https://www.swissinfo.ch/fre/politique/paradoxe-des-flux-de-capitaux-et-si-les-pays-riches-%c3%a9taient-financ%c3%a9s-par-les-pays-%c3%a9mergents/46991792

    La publication [de la CNUCED] montre que le montant total des #flux_financiers qui sortent des #pays_en_développement excède largement ceux qui y entrent depuis les pays riches (l’#aide_au_développement, mais aussi les #investissements_directs_étrangers ou encore les flux commerciaux).

    Ce phénomène « contredit les théories économiques néoclassiques, selon lesquelles les capitaux devraient naturellement circuler des pays riches vers les pays déficitaires en capital », explique Rachid Bouhia. « Il montre aussi que certains modèles de développement mis en avant ces dernières décennies, non seulement n’ont pas marché, mais ont créé beaucoup de vulnérabilité. »

    Les fuites de capitaux résultent de plusieurs facteurs, mais sont particulièrement liées à « la fragilité financière inhérente à l’#endettement extérieur des pays en développement », relève la publication.

    Incités à s’endetter envers l’étranger pour se développer, certains pays ont atteint des niveaux de dettes très élevés, qui les entraînent dans une spirale : les paiements d’intérêts et de transferts de bénéfices l’emportent sur les revenus.

    Les statistiques de l’ONG britannique Jubilee Debt Campaign, qui milite pour une annulation de la #dette des pays du Sud, montrent que la part de leur revenu consacrée au paiement de la dette extérieure est en hausse. Elle avoisine par exemple les 60% au Gabon et 46% en Angola, contre 3 à 4% dans la plupart des pays d’Europe occidentale et 0,4% en Suisse.

    Rachid Bouhia évoque aussi le déficit de la #balance_commerciale dans beaucoup de pays émergents – qui importent davantage qu’ils n’exportent, ou exportent des #matières_premières dont les cours fluctuent fortement.

    « De nombreux pays n’ont pas réussi à développer une industrie suffisante pour pouvoir exporter vers les pays développés et sont restés coincés dans des ‘trappes à pauvreté’ », explique l’économiste.

    Autre élément encore : « pour se prémunir des risques, les pays en développement se sont lancés dans une course à accumuler des monnaies étrangères, en particulier du dollar », ce qui correspond à une sortie de capitaux pour le pays qui achète, et à une entrée pour le pays qui fabrique la devise.

    Le déficit cumulé pour les pays en développement entre 2000 et 2017 serait ainsi proche des 11’000 milliards de dollars, 500 milliards de dollars pour la seule année 2017 (plus du triple de l’APD totale cette année-là).

    Et il ne s’agit que des chiffres officiels, qui ne prennent pas en compte les flux financiers illicites (#FFI, ajoutés à titre indicatif sur le graphique de la CNUCED). Ces derniers recouvrent en partie les transactions criminelles, le blanchiment d’argent, l’évasion fiscale, etc. mais, surtout, du commerce licite « qui n’est pas facturé correctement (…) dans une optique d’optimisation fiscale », explique le professeur à l’IHEID Gilles Carbonnier.

    #impérialisme

  • Frank Garbely : En Suisse, la #mafia peut s’installer « sans avoir de problèmes avec la #justice »

    Le journaliste d’investigation Frank Garbely est revenu dans La Matinale sur les mécanismes légaux qui permettent à des mafias telles que la ’Ndrangheta de s’implanter en #Suisse, notamment en #Valais. Une problématique qui n’est pas assez prise au sérieux, selon lui.

    Dans son nouveau livre « Der Mafiaboss von Brig » ("Le parrain de la mafia de Brig"), le journaliste d’investigation Frank Garbely déroule une enquête sur l’expansion de la mafia en Suisse et en particulier dans le Haut-Valais, avec le constat que « la mafia est tout à fait autre chose que ce que l’on s’imagine ».

    « Si l’on regarde de près, elle est partout. [...] Et ce qui est vraiment inquiétant, c’est que la police et la justice suisses travaillent de telle sorte qu’en tant que mafia, vous pouvez vous installer tranquillement sans avoir de problèmes avec la justice », affirme-t-il lundi dans La Matinale de la RTS.

    Infiltration de l’#économie_légale

    La mafia calabraise ’Ndrangheta s’est développée jusqu’au nord de l’Italie, avant de s’implanter en Valais. Mais l’image que l’on se fait de ce type d’organisations relève de « clichés », note Frank Garbely. Les mafieux sont « aujourd’hui des hommes d’affaires » actifs dans le #blanchissement_d'argent et les #investissements, relève-t-il.

    « Les affaires légales de la mafia sont presque plus importantes que les affaires illégales. [Ces #hommes_d'affaires] implantent des sociétés un peu partout et, une fois bien installés, deviennent amis des politiques et des avocats », jusqu’à jouir d’une structure à travers laquelle l’organisation peut être active, souligne le journaliste.

    Dans le cas du Valais, les activités mafieuses se traduisent surtout par l’infiltration de l’économie légale, selon l’enquêteur. « Dans la #construction ou l’#entretien_des_autoroutes, par exemple, vous pouvez faire des propositions avantageuses et, si vous êtes assez forts, faire en sorte que les autres qui soumettent [une offre] se retirent. Et à un moment donné, vous avez le monopole », illustre-t-il.

    Manque de considération

    D’après Frank Garbely, dans le #Haut-Valais, la ’Ndrangheta est surtout implantée dans les bureaux d’avocats, bien qu’il soit difficile de connaître l’étendue de son réseau, tant le système est opaque. « Un banquier doit dénoncer s’il a des doutes sur l’origine de capitaux. Or, un avocat n’est pas obligé de le faire », explique-t-il.

    L’enquêteur regrette un manque d’intérêt pour ces problématiques, qui concernent aussi d’autres régions en Suisse. « Je ne sais pas si l’on est inconscients ou si c’est parce que cela rapporte », mais « on ne fait pas grand-chose [à ce niveau], on couvre le système financier », conclut-il.

    https://www.rts.ch/info/regions/valais/2024/article/la-mafia-en-suisse-comment-elle-s-implante-sans-inquieter-la-justice-28729066.ht
    #infiltrations_mafieuses #'ndrangheta #ndrangheta #finance #banques

  • #Suisse : Faillite de Prime Energy : entre la fausse promesse « 100% vert » et la rémunération de bertrand piccard RTS

    Alors que des centaines d’épargnants romands avaient été séduits par l’investissement dans le photovoltaïque promis par l’entreprise PrimeEnergy, aujourd’hui en faillite, Mise au Point révèle qu’un sixième de leur argent serait en fait allé dans l’immobilier. L’émission lève aussi le voile sur la rémunération de bertrand piccard, ambassadeur de l’entreprise pendant près de dix ans. Un montant de 100’000 francs par an était prévu, ainsi que des parts dans la société.

    La faillite a frappé comme un éclair dans un ciel a priori sans nuages. Depuis 2011, PrimeEnergy Cleantech (PEC) avait tout de la « success story ». Son credo : des énergies renouvelables crédibles, fiables et rentables. Elle vendait des obligations vertes aux particuliers pour financer l’installation de centrales photovoltaïques en Suisse et en Europe.


    Au total, elle a récolté quelque 122 millions de francs auprès d’environ 2000 investisseurs et investisseuses, principalement en Suisse romande, certains plaçant une bonne partie de leur retraite dans la société, notamment rassurés par la présence de bertrand piccard dans l’aventure, et le label décerné par sa fondation, Solar Impulse.
    Mais en octobre, contre toute attente, les dividendes ne tombent plus. La direction de l’entreprise informe ses clients et clientes d’une crise de liquidités. Une procédure de faillite est ouverte, menaçant d’emporter avec elle les économies des investisseurs.
    . . . . . .
    Source et suite : https://www.rts.ch/info/economie/2024/article/faillite-de-prime-energy-entre-la-fausse-promesse-100-vert-et-la-remuneration-de

    #bertrand_piccard #électricité #énergie #renouvelables #prime_énergy #PrimeEnergy #investissements #argent #solar_impulse

  • « Nous assistons à une escalade de la #prédation_minière »

    Une nouvelle #ruée_minière a commencé et touche aussi la #France. Au nom de la lutte contre la crise climatique, il faudrait extraire de plus en plus de #métaux. Celia Izoard dénonce l’impasse de cette « #transition » extractiviste. Entretien.

    Basta/Observatoire des multinationales : Il est beaucoup question aujourd’hui de renouveau minier en raison notamment des besoins de la transition énergétique, avec la perspective d’ouvrir de nouvelles mines en Europe et même en France. Vous défendez dans votre #livre qu’il ne s’agit pas du tout d’un renouveau, mais d’une trajectoire de continuité. Pourquoi ?

    #Celia_Izoard : Les volumes de #métaux extraits dans le monde aujourd’hui augmentent massivement, et n’ont jamais cessé d’augmenter. Ce qui est parfaitement logique puisqu’on ne cesse de produire de nouveaux objets et de nouveaux équipements dans nos pays riches, notamment avec la #numérisation et aujourd’hui l’#intelligence_artificielle, et qu’en plus de cela le reste du monde s’industrialise.

    En conséquence, on consomme de plus en plus de métaux, et des métaux de plus en plus variés – aussi bien des métaux de base comme le #cuivre et l’#aluminium que des métaux de spécialité comme les #terres_rares. Ces derniers sont utilisés en très petite quantité mais dans des objets qui sont partout, comme les #smartphones, et de façon trop dispersive pour permettre le #recyclage.

    Et la production de tous ces métaux devrait continuer à augmenter ?

    Oui, car rien ne freine cette production, d’autant plus qu’on y ajoute aujourd’hui une nouvelle demande qui est un véritable gouffre : celle de métaux pour le projet très technocratique de la transition. « Transition », dans l’esprit de nos élites, cela signifie le remplacement des #énergies_fossiles par l’#énergie_électrique – donc avec des #énergies_renouvelables et des #batteries – avec un modèle de société inchangé. Mais, par exemple, la batterie d’une #voiture_électrique représente souvent à elle seule 500 kg de métaux (contre moins de 3 kg pour un #vélo_électrique).

    Simon Michaux, professeur à l’Institut géologique de Finlande, a essayé d’évaluer le volume total de métaux à extraire si on voulait vraiment électrifier ne serait-ce que la #mobilité. Pour le #lithium ou le #cobalt, cela représenterait plusieurs décennies de la production métallique actuelle. On est dans un scénario complètement absurde où même pour électrifier la flotte automobile d’un seul pays, par exemple l’Angleterre ou la France, il faut déjà plus que la totalité de la production mondiale. Ce projet n’a aucun sens, même pour lutter contre le #réchauffement_climatique.

    Vous soulignez dans votre livre que l’#industrie_minière devient de plus en plus extrême à la fois dans ses techniques de plus en plus destructrices, et dans les #nouvelles_frontières qu’elle cherche à ouvrir, jusqu’au fond des #océans et dans l’#espace

    Oui, c’est le grand paradoxe. Les élites politiques et industrielles répètent que la mine n’a jamais été aussi propre, qu’elle a surmonté les problèmes qu’elle créait auparavant. Mais si l’on regarde comment fonctionne réellement le #secteur_minier, c’est exactement l’inverse que l’on constate. La mine n’a jamais été aussi énergivore, aussi polluante et aussi radicale dans ses pratiques, qui peuvent consister à décapiter des #montagnes ou à faire disparaître des #vallées sous des #déchets_toxiques.

    C’est lié au fait que les teneurs auxquelles on va chercher les métaux sont de plus en plus basses. Si on doit exploiter du cuivre avec un #filon à 0,4%, cela signifie que 99,6% de la matière extraite est du #déchet. Qui plus est, ce sont des #déchets_dangereux, qui vont le rester pour des siècles : des déchets qui peuvent acidifier les eaux, charrier des contaminants un peu partout.

    Les #résidus_miniers vont s’entasser derrière des #barrages qui peuvent provoquer de très graves #accidents, qui sont sources de #pollution, et qui sont difficilement contrôlables sur le long terme. Nous assistons aujourd’hui à une véritable #escalade_technologique qui est aussi une escalade de la #prédation_minière. La mine est aujourd’hui une des pointes avancées de ce qu’on a pu appeler le #capitalisme_par_dépossession.

    Comment expliquer, au regard de cette puissance destructrice, que les populations occidentales aient presque totalement oublié ce qu’est la mine ?

    Il y a un #déni spectaculaire, qui repose sur deux facteurs. Le premier est la religion de la #technologie, l’une des #idéologies dominantes du monde capitaliste. Nos dirigeants et certains intellectuels ont entretenu l’idée qu’on avait, à partir des années 1970, dépassé le #capitalisme_industriel, qui avait été tellement contesté pendant la décennie précédente, et qu’on était entré dans une nouvelle ère grâce à la technologie. Le #capitalisme_post-industriel était désormais avant tout une affaire de brevets, d’idées, d’innovations et de services.

    Les mines, comme le reste de la production d’ailleurs, avaient disparu de ce paysage idéologique. Le #mythe de l’#économie_immatérielle a permis de réenchanter le #capitalisme après l’ébranlement des mouvements de 1968. Le second facteur est #géopolitique. Aux grandes heures du #néo-libéralisme, le déni de la mine était un pur produit de notre mode de vie impérial. Les puissances occidentales avaient la possibilité de s’approvisionner à bas coût, que ce soit par l’#ingérence_politique, en soutenant des dictatures, ou par le chantage à la dette et les politiques d’#ajustement_structurel. Ce sont ces politiques qui ont permis d’avoir par exemple du cuivre du #Chili, de #Zambie ou d’#Indonésie si bon marché.

    Les besoins en métaux pour la #transition_climatique, si souvent invoqués aujourd’hui, ne sont-ils donc qu’une excuse commode ?

    Invoquer la nécessité de créer des mines « pour la transition » est en effet hypocrite : c’est l’ensemble des industries européennes qui a besoin de sécuriser ses approvisionnements en métaux. La récente loi européenne sur les métaux critiques répond aux besoins des grosses entreprises européennes, que ce soit pour l’#automobile, l’#aéronautique, l’#aérospatiale, les #drones, des #data_centers.

    L’argument d’une ruée minière pour produire des énergies renouvelables permet de verdir instantanément toute mine de cuivre, de cobalt, de lithium, de #nickel ou de terres rares. Il permet de justifier les #coûts_politiques de la #diplomatie des #matières_premières : c’est-à-dire les #conflits liés aux rivalités entre grandes puissances pour accéder aux #gisements. Mais par ailleurs, cette transition fondée sur la technologie et le maintien de la #croissance est bel et bien un gouffre pour la #production_minière.

    Ce discours de réenchantement et de relégitimation de la mine auprès des populations européennes vous semble-t-il efficace ?

    On est en train de créer un #régime_d’exception minier, avec un abaissement des garde-fous réglementaires et des formes d’extractivisme de plus en plus désinhibées, et en parallèle on culpabilise les gens. La #culpabilisation est un ressort psychologique très puissant, on l’a vu durant le Covid. On dit aux gens : « Si vous n’acceptez pas des mines sur notre territoire, alors on va les faire ailleurs, aux dépens d’autres populations, dans des conditions bien pires. » Or c’est faux. D’abord, la #mine_propre n’existe pas.

    Ensuite, la #loi européenne sur les #métaux_critiques elle prévoit qu’au mieux 10% de la production minière soit relocalisée en Europe. Aujourd’hui, on en est à 3%. Ce n’est rien du tout. On va de toute façon continuer à ouvrir des mines ailleurs, dans les pays pauvres, pour répondre aux besoins des industriels européens. Si l’on voulait vraiment relocaliser la production minière en Europe, il faudrait réduire drastiquement nos besoins et prioriser les usages les plus importants des métaux.

    Peut-on imaginer qu’un jour il existe une mine propre ?

    Si l’on considère la réalité des mines aujourd’hui, les procédés utilisés, leur gigantisme, leur pouvoir de destruction, on voit bien qu’une mine est intrinsèquement problématique, intrinsèquement prédatrice : ce n’est pas qu’une question de décisions politiques ou d’#investissements. L’idée de « #mine_responsable » n’est autre qu’une tentative de faire accepter l’industrie minière à des populations en prétendant que « tout a changé.

    Ce qui m’a frappé dans les enquêtes que j’ai menées, c’est que les industriels et parfois les dirigeants politiques ne cessent d’invoquer certains concepts, par exemple la #mine_décarbonée ou le réemploi des #déchets_miniers pour produire du #ciment, comme de choses qui existent et qui sont déjà mises en pratique. À chaque fois que j’ai regardé de plus près, le constat était le même : cela n’existe pas encore. Ce ne sont que des #promesses.

    Sur le site de la nouvelle mine d’#Atalaya à #Rio_Tinto en #Espagne, on voir des panneaux publicitaires alignant des #panneaux_photovoltaïques avec des slogans du type « Rio Tinto, la première mine d’autoconsommation solaire ». Cela donne à penser que la mine est autonome énergétiquement, mais pas du tout. Il y a seulement une centrale photovoltaïque qui alimentera une fraction de ses besoins. Tout est comme ça.

    Le constat n’est-il pas le même en ce qui concerne le recyclage des métaux ?

    Il y a un effet purement incantatoire, qui consiste à se rassurer en se disant qu’un jour tout ira bien parce que l’on pourra simplement recycler les métaux dont on aura besoin. Déjà, il n’en est rien parce que les quantités colossales de métaux dont l’utilisation est planifiée pour les années à venir, ne serait-ce que pour produire des #batteries pour #véhicules_électriques, n’ont même pas encore été extraites.

    On ne peut donc pas les recycler. Il faut d’abord les produire, avec pour conséquence la #destruction de #nouveaux_territoires un peu partout sur la planète. Ensuite, le recyclage des métaux n’est pas une opération du saint-Esprit ; il repose sur la #métallurgie, il implique des usines, des besoins en énergie, et des pollutions assez semblables à celles des mines elles-mêmes.

    L’accent mis sur le besoin de métaux pour la transition ne reflète-t-il pas le fait que les #multinationales ont réussi à s’approprier ce terme même de « transition », pour lui faire signifier en réalité la poursuite du modèle actuel ?

    Le concept de transition n’a rien de nouveau, il était déjà employé au XIXe siècle. À cette époque, la transition sert à freiner les ardeurs révolutionnaires : on accepte qu’il faut des changements, mais on ajoute qu’il ne faut pas aller trop vite. Il y a donc une dimension un peu réactionnaire dans l’idée même de transition.

    Dans son dernier livre, l’historien des sciences #Jean-Baptiste_Fressoz [Sans transition - Une nouvelle histoire de l’énergie, Seuil, 2024] montre que la #transition_énergétique tel qu’on l’entend aujourd’hui est une invention des #pro-nucléaires des États-Unis dans les années 1950 pour justifier des #investissements publics colossaux dans l’#atome. Ils ont tracé des belles courbes qui montraient qu’après l’épuisement des énergies fossiles, il y aurait besoin d’une #solution_énergétique comme le #nucléaire, et qu’il fallait donc investir maintenant pour rendre le passage des unes à l’autre moins brutal.

    La transition aujourd’hui, c’est avant tout du temps gagné pour le capital et pour les grandes entreprises. Les rendez-vous qu’ils nous promettent pour 2050 et leurs promesses de #zéro_carbone sont évidemment intenables. Les technologies et l’#approvisionnement nécessaire en métaux n’existent pas, et s’ils existaient, cela nous maintiendrait sur la même trajectoire de réchauffement climatique.

    Ces promesses ne tiennent pas debout, mais elles permettent de repousser à 2050 l’heure de rendre des comptes. Ce sont plusieurs décennies de gagnées. Par ailleurs, le terme de transition est de plus en plus utilisé comme étendard pour justifier une #croisade, une politique de plus en plus agressive pour avoir accès aux gisements. Les pays européens et nord-américains ont signé un partenariat en ce sens en 2022, en prétendant que certes ils veulent des métaux, mais pour des raisons louables. La transition sert de figure de proue à ces politiques impériales.

    Vous avez mentionné que l’une des industries les plus intéressées par la sécurisation de l’#accès aux métaux est celle de l’#armement. Vous semblez suggérer que c’est l’une des dimensions négligées de la guerre en Ukraine…

    Peu de gens savent qu’en 2021, la Commission européenne a signé avec l’#Ukraine un accord de partenariat visant à faire de ce pays une sorte de paradis minier pour l’Europe. L’Ukraine possède de fait énormément de ressources convoitées par les industriels, qu’ils soient russes, européens et américains. Cela a joué un rôle dans le déclenchement de la #guerre. On voit bien que pour, pour accéder aux gisements, on va engendrer des conflits, militariser encore plus les #relations_internationales, ce qui va nécessiter de produire des #armes de plus en plus sophistiquées, et donc d’extraire de plus en plus de métaux, et donc sécuriser l’accès aux gisements, et ainsi de suite.

    C’est un #cercle_vicieux que l’on peut résumer ainsi : la ruée sur les métaux militarise les rapports entre les nations, alimentant la ruée sur les métaux pour produire des armes afin de disposer des moyens de s’emparer des métaux. Il y a un risque d’escalade dans les années à venir. On évoque trop peu la dimension matérialiste des conflits armés souvent dissimulés derrière des enjeux « ethniques ».

    Faut-il sortir des métaux tout comme il faut sortir des énergies fossiles ?

    On a besoin de sortir de l’extractivisme au sens large. Extraire du pétrole, du charbon, du gaz ou des métaux, c’est le même modèle. D’ailleurs, d’un point de vue administratif, tout ceci correspond strictement à de l’activité minière, encadrée par des #permis_miniers. Il faut cesser de traiter le #sous-sol comme un magasin, de faire primer l’exploitation du sous-sol sur tout le reste, et en particulier sur les territoires et le vivant.

    Concrètement, qu’est ce qu’on peut faire ? Pour commencer, les deux tiers des mines sur la planète devraient fermer – les #mines_métalliques comme les #mines_de_charbon. Ça paraît utopique de dire cela, mais cela répond à un problème urgent et vital : deux tiers des mines sont situées dans des zones menacées de #sécheresse, et on n’aura pas assez d’#eau pour les faire fonctionner à moins d’assoiffer les populations. En plus de cela, elles émettent du #CO2, elles détruisent des territoires, elles déplacent des populations, elles nuisent à la #démocratie. Il faut donc faire avec une quantité de métaux restreinte, et recycler ce que l’on peut recycler.

    Vous soulignez pourtant que nous n’avons pas cessé, ces dernières années, d’ajouter de nouvelles technologies et de nouveaux objets dans notre quotidien, notamment du fait de l’envahissement du numérique. Réduire notre consommation de métaux implique-t-il de renoncer à ces équipements ?

    Oui, mais au préalable, quand on dit que « nous n’avons pas cessé d’ajouter des nouvelles technologies polluantes », il faut analyser un peu ce « nous ». « Nous » n’avons pas choisi de déployer des #caméras_de_vidéosurveillance et des #écrans_publicitaires partout. Nous n’avons pas choisi le déploiement de la #5G, qui a été au contraire contesté à cause de sa consommation d’énergie.

    La plupart d’entre nous subit plutôt qu’elle ne choisit la #numérisation des #services_publics, instrument privilégié de leur démantèlement et de leur privatisation : l’usage de #Pronote à l’école, #Doctissimo et la télémédecine dont la popularité est due à l’absence de médecins, etc. Dans le secteur automobile, la responsabilité des industriels est écrasante. Depuis des décennies, ils ne cessent de bourrer les véhicules d’électronique pour augmenter leur valeur ajoutée.

    Ces dernières années, ils ont massivement vendu d’énormes voitures électriques parce qu’ils savaient que le premier marché de la voiture électrique, c’était d’abord la bourgeoisie, et que les bourgeois achèteraient des #SUV et des grosses berlines. Donc quand je dis que nous devons réduire notre #consommation de métaux, j’entends surtout par-là dénoncer les industries qui inondent le marché de produits insoutenables sur le plan des métaux (entre autres).

    Mais il est vrai que nous – et là c’est un vrai « nous » - devons réfléchir ensemble aux moyens de sortir de l’#emprise_numérique. Du point de vue des métaux, le #smartphone n’est pas viable : sa sophistication et son caractère ultra-mondialisé en font un concentré d’#exploitation et d’#intoxication, des mines aux usines d’assemblage chinoises ou indiennes.

    Et bien sûr il a des impacts socialement désastreux, des addictions à la #surveillance, en passant par la « #surmarchandisation » du quotidien qu’il induit, à chaque instant de la vie. Là-dessus, il faut agir rapidement, collectivement, ne serait-ce que pour se protéger.

    https://basta.media/nous-assistons-a-une-escalade-de-la-predation-miniere
    #extractivisme #minières #électrification #acidification #contamination #hypocrisie #relocalisation #prédation #guerre_en_Ukraine #militarisation #déplacement_de_populations #dématérialisation #industrie_automobile

  • #Plastique, l’#escroquerie du #recyclage

    La fin de l’âge du fer ? Au début des années 1960, scientifiques et plasturgistes prédisent que les progrès fulgurants dans la fabrication des #polymères permettront aux plastiques de détrôner métaux, verres et bois sur le podium des matériaux dominants. Chacun s’extasie. Le sémiologue Roland Barthes qualifie en 1957 le produit de la distillation du pétrole de « substance alchimique », de « matière miraculeuse ». Un an plus tard, le poète Raymond Queneau succombe au chant du styrène et à l’esthétique des « innombrables objets au but utilitaire » appelés à surgir du naphta, ce liquide provenant du raffinage à partir duquel se fabriquent l’essentiel des plastiques (1). Au XXIe siècle, les plastiques écrasent effectivement la concurrence. Entre 1950 et 2015, le secteur pétrochimique en a produit plus de 8 milliards de tonnes, surtout au cours des vingt dernières années, et l’accélération se poursuit (2).

    Après l’extase, l’effroi : soixante-dix ans plus tard, 350 millions de tonnes de déchets plastiques se déversent chaque année sur le monde. La pollution qu’ils engendrent fait peser sur les vivants et non-vivants une menace aussi lourde que documentée (3). On boit, on mange, on respire du plastique. Pour faire face à ce cataclysme synthétique, les industries pétrochimiques promeuvent sans relâche une solution selon elles miraculeuse : le recyclage, avec son ruban de Möbius - une flèche circulaire conçue par les lobbies à la fin des années 1980 -, symbole d’une économie où rien ne se perd et tout se transforme. Une économie qui continue donc à produire ce poison environnemental, mais sous une forme partiellement réutilisable.

    Célébré comme plus intelligent et respectueux de la nature que l’incinération ou la mise en décharge, ce procédé a fini par s’imposer au nombre des priorités politiques mondiales. Le résultat laisse perplexe : après quatre décennies de propagande, moins de 10 % des 6,3 milliards de tonnes de plastique produit et jeté entre 1950 et 2017 a fait l’objet d’un recyclage (4). Pourtant, l’Europe et, singulièrement, la France ont adopté ce mot d’ordre avec un enthousiasme déconcertant.

    En 2019, Matignon fixe un objectif stratosphérique : 100 % des déchets plastiques nationaux recyclés en 2025. La méthode ? Rendre les industriels responsables du destin des objets polymères qu’ils produisent. L’approche française s’inscrit dans la droite ligne de celle impulsée par la Commission européenne : obligation faite aux États membres depuis 2021 d’interdire les plastiques à #usage_unique et d’utiliser au moins 30 % de matériaux recyclés dans les #bouteilles plastifiées ; recyclage en 2030 de 55 % des déchets d’#emballages plastiques (5).

    Alléchés, les industriels européens ne tardent pas à communiquer sur des #technologies « novatrices » ajustées à la nouvelle législation européenne. En 2022, les chimistes #BASF et #Borealis, l’emballeur #Südpack et le laitier bavarois #Zott claironnaient la mise au point d’un prototype d’emballage multicouche de mozzarella entièrement réalisé en nylon et polyéthylène recyclés. Mais ces « projets-pilotes » largement médiatisés représentent une goutte d’eau dans l’océan des ambitions politiques. D’autant qu’en période d’#austérité les #investissements d’infrastructure nécessaires à la collecte et au #tri des #déchets plastiques se trouvent rarement en tête des priorités, tant en Europe qu’aux États-Unis. D’où ces révélations aussi spectaculaires que banales, comme celle qui épouvanta l’été dernier Mme #Brandy_Deason, habitante de Houston, au Texas : quelques jours après avoir placé un traceur dans ses déchets plastiques destinés au conteneur recyclage, elle les géolocalisa non pas dans un centre de traitement dernier cri, mais dans une décharge géante à ciel ouvert (6).

    Ce cas extrême met en évidence le poids des considérations économiques dans l’#échec du recyclage. Du fait d’une production surabondante d’#éthylène, produit à partir du #pétrole ou du gaz, le prix du plastique « vierge » s’effondre et mine la #rentabilité des recycleurs européens, dont l’activité consiste en grande partie à retraiter le #polyéthylène (polymère de l’éthylène). Dans un monde guidé par la boussole du calcul coût-avantage, pourquoi les industriels et les distributeurs européens privilégieraient-ils des produits recyclés plus chers que le neuf ? En Allemagne, l’usine #Veolia de Rostock recyclait annuellement environ 36 000 tonnes de #polyéthylène_téréphtalate usagé (#PET). Elle a fermé ses portes car, selon la direction, l’#industrie_agro-alimentaire rechignait à soutenir ce produit plus vert mais plus cher. Non loin de là, un tribunal néerlandais a déclaré en faillite l’usine de recyclage de plastique d’#Umincorp, à Amsterdam (7). À moins que l’Union européenne n’édicte de nouvelles #réglementations plus contraignantes, le recyclage occidental ne pourra concurrencer l’orgie d’éthylène. D’autant que de nouveaux sites de production de ce composé chimique s’apprêtent à sortir de terre en Chine, aux États-Unis et en Arabie saoudite, ce qui, à demande constante, orienterait les #prix à la baisse.

    Mais la grande escroquerie du recyclage réside ailleurs : le procédé n’a jamais été viable, ni techniquement ni économiquement ; les industriels le savent de longue date, mais jouent avec succès sur la corruptibilité des pouvoirs et la crédulité du public. Un rapport du Center for Climate Integrity (CCI) publié en février 2024 a détaillé un secret que nul au fond ne voulait exhumer (8). Pendant des décennies, les grandes compagnies pétrochimiques ont sciemment provoqué la crise des #déchets_plastiques. « Ils ont menti, affirme M. Richard Wiles, un responsable du CCI. Voici venu le temps de rendre des comptes pour les dégâts qu’ils ont commis. »

    Sur les milliers de variétés produites, seules deux présentent des propriétés qui rendent le recyclage viable à ce jour : les PET et les #polyéthylènes_à_haute_densité (#PEHD). Le procédé nécessite donc un tri méticuleux qui renchérit le coût et conduit à écarter les éléments composés d’alliages de plastiques ou de plusieurs matériaux que l’on trouve dans de nombreux objets jetables. Un flacon et un bocal tous deux en PET devront être séparés s’ils comportent des additifs ou des colorants différents, de même que les bouteilles en PET vertes et transparentes. Autre difficulté de taille : les plastiques se dégradent à chaque #réutilisation et ne peuvent donc être réemployés qu’une fois ou, plus rarement, deux fois. Faute de quoi non seulement leurs propriétés se dénaturent, mais leur #toxicité peut s’accroître.

    La filière pétrochimique n’a jamais rien ignoré de ces obstacles structurels. Pour désarmer la mobilisation qui enfle contre les décharges à ciel ouvert ou la mode du jetable, et éviter le risque d’une réglementation trop contraignante, elle adopte au milieu des années 1980 l’idée du recyclage. En 1984 naît une fondation réunissant la pétrochimie et les embouteilleurs axée sur un engagement en faveur de ce procédé. L’année suivante, le secteur lance en grande pompe un centre de recherche à l’université Rutgers, dans le New Jersey, puis un projet-pilote de recyclage à Saint Paul, dans le Minnesota, alors que le conseil municipal de la ville venait juste d’interdire le polystyrène. Derrière les portes closes, personne n’y croit. « Il se peut qu’un jour cela puisse devenir une réalité, observait en 1994 un représentant d’#Eastman_Chemical lors d’une conférence sur le sujet. Il est plus probable que nous nous réveillerons et comprendrons que nous n’allons pas nous sortir de la question du recyclage des déchets solides. » Peu importait au fond puisque, comme le déclarait un employé d’Exxon au personnel de l’American Plastics Council (APC) : « Nous sommes engagés dans les activités de recyclage des plastiques, mais nous ne sommes pas tenus à des résultats. »

    Depuis quarante ans, l’« #engagement » consiste en une série de #campagnes de #désinformation et d’#enfumage sur les #mirages du recyclage. Elles mobilisent tantôt les #multinationales de la #pétrochimie, leurs associations professionnelles, leurs fondations, tantôt leurs multiples groupes de façade. À la fin de la décennie 1990, l’interdiction du polystyrène et du #polychlorure_de_vinyle (#PVC) dans plusieurs États accélère le mouvement. « Nous devons agir à la base et mener une guerre de guérilla comme nos adversaires », note un participant lors d’une réunion de l’Association européenne des producteurs de plastiques (Plastics Europe) le 2 janvier 1994. Des millions de dollars gonflent les caisses des agences de communication pour vendre la « solution » et riveter dans les consciences les mots : « modernité », « #innovation_technologique », « #efficacité », « engagement », « approche intégrée pour la gestion des plastiques », « avantage économique », etc. L’industrie chante désormais les vertus du « #recyclage_avancé », un procédé d’#incinération ou de #dégradation_chimique, plus polluant que la méthode classique, et qui ne produit que 1 à 14 % de matière réutilisable.

    Les pétrochimistes ont gagné leur bataille : en 2021, les États-Unis ne recyclaient que 5 à 6 % de leurs déchets plastiques (9) ; et l’industrie produisait toujours plus de #polymères. En 2022, le procureur général de Californie a lancé, sur la base du rapport du CCI, une enquête ciblant les fabricants « pour leur rôle dans la crise globale de la #pollution_plastique ». Mais quel tribunal international mettra l’humanité à l’abri de leur conduite criminelle ?

    Note(s) :

    (1) Roland Barthes, Mythologies, Seuil, Paris, 2010 (1re éd. : 1957) ; Raymond Queneau dans Le Chant du styrène, 1958, film commandé à Alain Resnais par le groupe de pétrochimie Péchiney.

    (2) Roland Geyer, Jenna R. Jambeck et Kara Lavender Law, « Production, use, and fate of all plastics ever made », Science Advances, vol. 3, n° 7, 2017.

    (3) Lire Mickaël Correia, « Le plastique, c’est fantastique », Le Monde diplomatique, février 2022.

    (4) Atlas du plastique. Faits et chiffres sur le monde des polymères synthétiques, Fondation Heinrich Böll - La Fabrique écologique - Break Free From Plastic, 2020.

    (5) Alex Scott, « Europe hardens stance on plastic recycling », Chemical and Engineering News, vol. 97, n° 29, Washington, DC, 2019.

    (6) Rachel Dobkin, « Woman drops AirTag in recycling to see if plastics are actually recycled », Newsweek, New York, 2 septembre 2024.

    (7) Alex Scott, « Global plastics glut and weak regulations hurt European recyclers », Chemical and Engineering News, vol. 102, n° 4, 2024.

    (8) Davis Allen, Alyssa Johl, Chelsea Linsley et Naomi Spoelman, « The fraud of plastic recycling. How big oil and the plastics industry deceived the public for decades and caused the plastic waste crisis » (PDF), Center for Climate Integrity, février 2024, dont sont tirées les citations suivantes. Cf. également Dharma Noor, « "They lied" : Plastics producers deceived public about recycling report reveals », The Guardian, Londres, 15 février 2024.

    (9) « The real truth about US plastic recycling rate », Beyond plastics, mai 2022.

    https://www.monde-diplomatique.fr/2024/11/LARBI_BOUGUERRA/67771
    #green-washing #coût #mensonge #dégradation #réemploi

  • Attention, un #classement peut en cacher un autre !

    L’autre jour, @lemonde a publié un article sur un classement alternatif au à celui de #Shanghai en utilisant les données de #Cairn, la plate-forme francophone de publication scientifique :

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/08/15/des-universites-francaises-loin-du-miroir-de-shanghai-un-autre-classement-es

    On pourrait s’en féliciter, mais la route de l’enfer est pavée de bonnes intentions...

    Le classement était établi à partir des données de consultations des publications en ligne sur #Cairn.

    En fait, en allant sur la plate-forme, on remarque que cette dernière a été considérablement modifiée et qu’elle offre désormais des statistiques de consultation ... par auteur (voir par exemple : https://shs.cairn.info/publications-de-gabriel-galvez-behar--64066)

    Quelle drôle d’idée !

    En 2020, dans un collectif consacré à l’édition en sciences humaines (https://shs.hal.science/halshs-02937110), j’avais attiré l’attention sur le rôle des #métriques alternatives dans l’ #édition numérique et sur leurs répercussions possible sur l’ #évaluation.

    Il existait déjà des statistiques publiques de consultations ou de citations par article mais toutes les plate-formes ne le font pas. Publier de telles statistiques est donc un choix qui mérite d’être justifié ou, du moins, questionné.

    Pourquoi publier de telles statistiques individuelles ? Qu’est-ce que cela apporte à la plate-forme ? Quels sont les usages pouvant être faits en aval ?

    Ces questions mériteraient d’être posées par toute la communauté scientifique.

    Par ailleurs, que nous disent de telles statistiques sur les différentes voies de diffusion des publications et notamment les archives ouvertes ?

    Faisons une petite expérience à partir d’un article sur #Pasteur que j’ai publié dans @AnnalesHSS

    L’article est présent sur :

    #Cairn et l’article a été vu 874 fois (https://shs.cairn.info/revue-annales-2018-3-page-629)
    #CambridgeCore et l’article a été vu 124 fois (1380 pour le résumé) (https://doi.org/10.1017/ahss.2019.46)
    #HAL-SHS en version pre-print : 977 consultations (mais 2402 téléchargements) (https://shs.hal.science/halshs-01267638)

    Bien entendu, ces données ne sont probablement pas homogènes (même si Cairn et CambridgeCore suivent la « norme » COUNTER, j’y reviendrai).

    Établir une analyse (et a fortiori un classement) sur la base d’une seule source statistique offre donc une vue complètement partielle. En toute rigueur, il faudrait obtenir une perspective consolidée. Mais selon quelle méthode ?

    Du côté des chercheurs, la question se pose de savoir s’il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier pour gagner en #visibilité

    Mais surtout, il faudrait se demander à quoi servent ces statistiques et pourquoi rendre publiques les données individuelles.

    Pour engager le débat, il n’est pas inutile de regarder ce que dit l’organisation à but non-lucratif Counter Metrics (https://cop5.countermetrics.org/en/5.1/00-foreword.html) qui fournit une « norme » de mesure de recherche et d’usage des publications électroniques.

    Il s’agit notamment de répondre au besoin des bibliothèques et des consortia pour évaluer leur retours sur #investissements (en matière d’acquisition d’abonnements à des ressources électroniques).

    Que doivent faire les bibliothèques avec les revues qui ne suscitent pas assez de consultations ? Que doivent faire les revues avec les collègues qui ne génèrent pas assez de trafic ?

    Dans les années 2000, lors des débats sur le classement des revues, l’idée d’un usage de la bibliométrie susceptible de distinguer les collègues était l’une des craintes les plus entendues. Avec la diffusion de la publication électronique et l’essor des métriques, il n’est même plus besoin de classer a priori les revues.

    Les données des usages de la #recherche deviennent un élément du pilotage de cette dernière et donc des chercheurs. Elles nous concernent au plus haut point.

    https://social.sciences.re/@ggalvezbehar/113028740594252235

    #classement_de_Shanghai #alternatives #ESR #édition_scientifique

  • Pourquoi prendre le train coûte si cher

    Le lieu commun selon lequel prendre le train est un choix écologique, mais trop coûteux, est en partie fondé. Pour développer le rail, les pouvoirs publics doivent choisir de l’avantager résolument.

    Peu de gens le contestent : prendre le train pour partir en vacances ou aller travailler, c’est bon pour le #climat. En TGV, l’empreinte carbone est de 70 à 80 fois moindre qu’en avion ou en voiture sans passager. Même si l’on compare les émissions moyennes des TER (peu remplis et roulant pour partie au fioul) à celles d’une voiture bien remplie, le gain reste non négligeable.

    Néanmoins, ce choix est parfois coûteux. D’après une étude de Greenpeace (https://www.greenpeace.fr/espace-presse/nouveau-rapport-le-train-deux-fois-plus-cher-que-lavion-en-europe), pour relier de grandes villes européennes distantes de moins de 1 500 km, le train est en moyenne deux fois plus cher que l’avion. C’est même 2,6 fois en France ! En outre, le sentiment est répandu que les prix du rail empirent, selon un sondage mené pour le Réseau action climat (RAC).

    De fait, d’après l’Insee, le prix du train de voyageurs a nettement augmenté après la pandémie. Mais depuis 2019, cette hausse (13 %) n’est pas supérieure à l’inflation. Et même si certains trajets (comme Londres-Barcelone) sont terriblement chers en train, il ne faut pas généraliser trop vite. Le #rail reste globalement avantageux, si l’on en croit les chiffres de l’Autorité de régulation des transports.

    Ainsi, sur une même distance, le TAGV (TGV et autres trains « aptes à la grande vitesse ») est en moyenne moins coûteux qu’un #avion classique. L’avion low cost, certes, est bien meilleur marché, mais lorsqu’il existe, le TAGV low cost fait aussi bien. Quant au trajet en autoroute, il revient beaucoup plus cher s’il est effectué seul : il faut être plus de deux pour faire de vraies économies en prenant la voiture.

    Sur des distances courtes, là aussi, le prix du TER – très bas pour les abonnés – est en moyenne inférieur au coût de la voiture en solo (11,2 cts/km), conclut une étude de la Fédération nationale des associations d’usagers du train (Fnaut) (https://www.fnaut.fr/uploads/2020/09/281.pdf). Surtout qu’il ne s’agit que d’un coût marginal : le coût moyen, incluant l’achat et l’entretien de la voiture, l’assurance etc., est de plus du triple !

    De nombreuses variables

    Reste que ces moyennes cachent de grandes disparités. Dans certains cas, la voiture ou l’avion sont bel et bien moins chers. Les prix varient en effet selon la ligne, le moment du voyage, mais aussi celui de la réservation, augmentant en fonction du remplissage : c’est le #yield_management.

    Une pratique que la #SNCF défend car elle permet d’optimiser le remplissage et d’offrir des places à petit prix. Sauf pour ceux qui ne peuvent décaler leur voyage… ou qui n’arrivent pas à anticiper leur achat – un motif de renoncement au train presque aussi fréquent (16 % des sondés) que le prix dans l’absolu (22 %), selon le RAC.

    La #comparaison avec la voiture dépend du nombre de passagers. Celle avec l’aérien, de la distance parcourue. « Une fois en l’air, l’avion ne coûte presque rien », souligne l’économiste Yves Crozet.

    Le train, lui, a besoin de lourdes #infrastructures pour rouler. Elles sont financées par un #droit_d’usage_des_voies, qui augmente avec les kilomètres. Acquitté au gestionnaire du réseau, ce « #péage » constitue une grosse part du coût, qui monte à près de 40 % dans le cas des #TGV. Plus le trajet est long, donc, plus l’avion a l’avantage…

    « Le train, c’est très lourd et structurellement très cher », estime plus généralement le professeur à Sciences Po Lyon. Par exemple, explique-t-il, les compagnies à bas coût peuvent maximiser le remplissage des avions en effectuant un petit nombre de liaisons entre deux villes. Le train, lui, subit des flux déséquilibrés entre matin et soir, semaine et week-end, etc.

    Il y a aussi les #frais_de_personnel, environ un tiers des charges de la SNCF (hors formation). Ils seraient particulièrement élevés en France : ainsi, les coûts de roulage des TER sont supérieurs de 60 % à ceux de leurs équivalents allemands, selon un rapport du Sénat (https://www.senat.fr/rap/r21-570/r21-5706.html#fn18).

    Les contraintes de la SNCF – comme la faible polyvalence des salariés – sont aux antipodes des modèles « extrêmement agressifs » des compagnies aériennes low cost, qui « poussent les coûts sur les salariés – ceci sur la planète entière », souligne Christian Desmaris, également économiste à Sciences Po Lyon.

    Prendre en compte les #coûts_externes

    Ces conséquences négatives – pollution, épuisement des salariés – mais non assumées financièrement par les entreprises, appelées « coûts externes » en économie, ne font généralement pas l’objet de pénalités pour les transporteurs les plus polluants ou les moins respectueux de leurs salariés.

    Certes, les émissions de CO2 des vols internes à l’UE sont bien soumises à des quotas. Mais jusqu’ici, la plupart étaient alloués gratuitement (ils seront bientôt payants1). De plus, le kérosène n’est pas taxé, et les vols internationaux sont exonérés de TVA (10 % sur le train et les vols intérieurs), bien que soumis à la taxe « Chirac » de solidarité, soit 2,63 euros en « classe éco » vers l’UE2.

    La #route ne bénéficie pas a priori des mêmes avantages. Les automobilistes paient de multiples #taxes sur le carburant, incluant une #contribution_carbone. Néanmoins, les prélèvements sont loin de couvrir les coûts que chaque véhicule engendre pour la société, en particulier en ville, à en croire une étude du Trésor (https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/2021/04/27/les-usagers-de-la-route-paient-ils-le-juste-prix-de-leurs-circu). Des « #externalités » qui comprennent, outre les émissions, l’usage de la route, le bruit, la pollution de l’air, les embouteillages et les accidents3.

    L’estimation des #coûts_externes dépend d’hypothèses et de valeurs discutables, souligne Yves Crozet dans un article. Elle éclaire néanmoins le besoin d’instaurer des prélèvements adaptés pour les compenser. Attention, toutefois, prévient le chercheur : même si le train engendre moins d’externalités, ses usagers ne paient pas non plus (et même encore moins) son coût pour la société. Il est en effet peu taxé et largement financé par les collectivités.

    Du moins… certains trains. Le transport ferroviaire conventionné avec les régions (TER) ou l’Etat (Intercités, trains de nuit) est ultra-subventionné : les pouvoirs publics assument les trois quarts de son coût. Lequel s’avère élevé, car ces trains emportent en moyenne peu de passagers. Difficile donc de les juger désavantagés face à leurs concurrents.

    Il en va autrement des #trains_à_grande_vitesse, dont le #modèle_économique historique est basé sur l’#autofinancement. Ce sont donc les passagers, en France, qui paient l’essentiel de l’infrastructure, les « péages » étant répercutés sur les billets. Et ces péages sont les plus élevés d’Europe, surtout pour les lignes à grande vitesse : 2 à 2,5 fois plus par train pour chaque kilomètre qu’en Espagne ou en Allemagne, presque 5 fois plus qu’en Italie.

    Même si l’écart par voyageur est moindre – car les TAGV en France emportent plus de passagers –, tout voyage est ainsi très coûteux pour les opérateurs, qui sont incités à limiter les circulations.

    C’est une des raisons pour lesquelles la SNCF a réduit son nombre de rames : la capacité totale de ses TGV a diminué de 14 % de 2013 à 2023, calcule le cabinet Trans-Missions (https://www.trans-missions.eu/y-a-t-il-moins-de-tgv-en-circulation-aujourdhui-quil-y-a-10-ans). Conséquence : avec la forte demande actuelle, ces trains sont souvent complets et les prix s’envolent vite. De nouvelles rames n’arriveront pas avant 2025.

    Promouvoir des #tarifs_sociaux et investir dans l’infrastructure

    Le coût des péages est aussi « une barrière à l’entrée » sur le marché français, ajoute Christian Desmaris. L’ouverture à la concurrence, lancée fin 2020, reste en effet timide : face au TGV, seules #Trenitalia et la #Renfe opèrent un petit nombre de trains. Sur le Paris-Lyon, l’arrivée de la compagnie italienne a été suivie d’une nette baisse de prix (https://www.alternatives-economiques.fr/concurrence-va-t-faire-baisser-prix-tgv-francais/00107606). Il est néanmoins trop tôt pour dire si la #concurrence produira à long terme les bénéfices espérés : plus de trains, des prix plus bas et un meilleur service.

    Un triptyque observé dans d’autres pays d’Europe, notamment en Italie. Mais chez le voisin transalpin, un coup de pouce décisif a joué : la baisse du tarif des péages décidée par l’Etat. Elle aurait même déclenché un cercle vertueux, la hausse du nombre de trains et de passagers accroissant au bout du compte les recettes pour le réseau. Le cabinet Sia Partners estime qu’une dynamique semblable serait possible en France si l’on baissait les péages de 20 % (https://afra.fr/actualites-afra/colloque-2023-comment-renforcer-le-rail-pour-reussir-la-transition-energetique).

    Or, pour l’instant, c’est tout le contraire qui est prévu : une hausse soutenue des péages jusqu’en 2030, avec déjà 8 % en 2024. Cette augmentation est critiquée. Dans le rapport cité plus haut, les sénateurs la jugent peu soutenable et appellent à un nouveau modèle dans lequel l’Etat financerait lui-même les #investissements dans le réseau, comme dans d’autres pays d’Europe, pour développer le train.

    Toutefois, serait-il juste que les impôts financent le TAGV ? Patricia Pérennes, du cabinet Trans-Missions, en doute, car la mobilité à grande vitesse bénéficie surtout aux plus favorisés. Si on veut la rendre plus accessible à certaines catégories de population, il vaut mieux « redynamiser les tarifs sociaux », aujourd’hui limités sur ce type de train, estime cette économiste.

    Mais pour développer l’usage du rail, la priorité selon elle est ailleurs : « Investir dans l’infrastructure classique » afin d’avoir des trains plus fiables, réguliers, sur des plages horaires étendues. Une meilleure offre, donc, notamment autour des métropoles.

    Sur ce sujet, le gouvernement a annoncé l’an dernier un plan de 100 milliards d’euros pour le ferroviaire, qui vise notamment à créer des « #RER » métropolitains. Son financement reste flou, mais une contribution fiscale des concessions autoroutières et des grands aéroports a été votée fin 2023.

    L’Etat a aussi lancé un « #Pass_Rail » destiné aux 16-28 ans. Coûtant 49 euros par mois et disponible entre juin et août 2024, il permet à ses détenteurs de prendre le train en illimité en France, hors TAGV et trains d’Île-de-France. Cependant, beaucoup d’économistes expriment des réserves sur ce type de mesures qui se traduisent parfois par une baisse des recettes et une saturation du réseau. En Allemagne, où une mesure similaire a été testée (sans limite d’âge), 5 % seulement des trajets effectués avec le Pass auraient été réalisés en voiture s’il n’existait pas. À court terme, le #report_modal s’avère donc limité.

    Plus largement, baisser le prix du train n’entraînerait pas de report massif vers le rail, juge Yves Crozet, qui note qu’aujourd’hui, « les TGV sont déjà pleins ». Pour vraiment limiter la part des transports les plus émetteurs, offrir une alternative, même bon marché, ne suffit pas. Il faut également les « embêter », affirme l’économiste : leur imposer des contraintes. Cela peut notamment passer par un prix plus élevé, qui prendrait vraiment en compte leurs externalités.

    https://www.alternatives-economiques.fr/prendre-train-coute-cher/00112094

    #prix #train #transport_ferroviaire #tarification

    • En tout cas, ça doit bien rapporter ! le toulouse-paris en TGV ouigo est toujours plein. Arrivée en gare de Montparnasse, tu peux compter jusqu’à 20 wagons avec un étage, à la louche près de 3000 personnes qui débarquent sur le quai. Et ni bar restaurant, ni même de bouteille d’eau, voire la veille du départ on t’annonce en pleine canicule que ton wagon risque d’avoir une clim en panne.

    • Au delà de la question de l’investissement, j’ai l’impression qu’il y a une impasse dans cet article sur la question de la tarification. Jusqu’aux années 90, en France, la tarification s’opérait au km, mettant en place une péréquation territoriale de fait. Brutalement on est passé au « yield management », la saloperie néolibérale qui veut que, plus il y a demande prévue sur un trajet, plus c’est cher.
      Avant cette révolution scélérate, je m’en rappelle très bien, le calcul était de dire que la bagnole c’était rentable à partir de 3 ou 4 (et non pas 2 ou 3 comme dit dans l’article, qui commence son raisonnement après le meurtre de la tarification kilométrique). Ça change pas mal la donne.

      Retour à la tarification kilométrique !

    • La « tarification au km » c’est encore le cas en Suisse (et je prie tous les dieux du ciel pour que ça reste ainsi pour toujours), égal quel train du prend, le prix est déterminé par les km que tu parcours. Tu peux donc faire un bout avec un train. Descendre, reprendre un autre train, tout cela avec le même billet que tu as dans la main et alors que tu ne pensais pas t’arrêter...
      Il y a des « billets dégriffés » sur certains trajets à certaines heures si tu les prends à l’avance (sur les trains moins fréquentés). Un rabais, mais même si tu achète ton billet 10 minutes avant de partir tu sais EXACTEMENT COMBIEN CELA COÛTE TON TRAJET. Il y a un prix qui est fixe et est calculé selon les km. Tu peux le trouver cher ou pas, mais au moins tu sais combien ton trajet va te coûter.
      Et tu sais aussi que si tu achètes le fameux « abonnement demi-tarif », eh bhein... les billets que tu achètes sont à demi-tarif, ce qui signifie exactement la moitié du prix de base. Point.
      Simple, non ?

      #service_public

  • #Mayotte va ériger un « rideau de fer » de technologies civilo-militaires de surveillance

    Le sous-préfet chargé de la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte vient de publier 11 demandes d’information réclamant aux industriels un arsenal impressionnant de technologies de #surveillance pour combattre le « défi migratoire » dans ce département de la #France d’outre-mer.

    Le 10 février dernier, #Gérald_Darmanin a annoncé qu’ « avec le ministre des Armées, nous mettons en place un "#rideau_de_fer" dans l’eau, qui empêchera le passage des #kwassa-kwassa [des #pirogues légères, qui tanguent énormément, et sont utilisées par les passeurs pour convoyer des migrants d’#Anjouan aux #Comores à Mayotte, ndlr] et des #bateaux, beaucoup plus de moyens d’interception, des #radars, et vous verrez un changement radical ».

    Concrètement, ce dispositif consiste en « une nouvelle vague d’#investissements dans des outils technologiques (radars, moyens maritimes…) permettant de déceler et d’interpeller les migrants en mer », précise le ministère de l’Intérieur à France Info.

    Il s’agit du prolongement de l’#opération_Shikandra, du nom d’un redouté poisson baliste du lagon qui défend son territoire et se montre extrêmement agressif envers les poissons et tout animal (plongeurs et nageurs inclus) qui traverse sa zone de nidification en période de reproduction.

    L’opération Shikandra est quant à elle qualifiée par le ministère d’ « approche globale, civilo-militaire, pour relever durablement le défi migratoire à Mayotte », « qui a permis une première vague d’investissements massifs dans ces outils » depuis son lancement (https://www.mayotte.gouv.fr/contenu/telechargement/15319/116719/file/26082019_+DP+Op%C3%A9ration+Shikandra+Mayotte.pdf) en 2019.

    Il était alors question de déployer 35 fonctionnaires supplémentaires à la #Police_aux_frontières (#PAF), plus 26 gendarmes départementaux et sept effectifs supplémentaires pour le greffe du TGI de Mamoudzou, mais également d’affecter 22 personnels supplémentaires aux effectifs embarqués dans les unités maritimes, de remplacer les cinq vedettes d’interception vétustes par huit intercepteurs en parfaites conditions opérationnelles (quatre neufs et quatre rénovés).

    En décembre dernier, Elisabeth Borne a annoncé le lancement, en 2024, du #plan_interministériel_Shikandra 2, contrat d’engagement financier entre l’État et le département doté de plusieurs centaines de millions d’euros jusqu’en 2027 : « Nous investirons massivement dans la protection des #frontières avec de nouveaux outils de #détection et d’#interception ».

    À l’en croire, la mobilisation de « moyens considérables » via la première opération Shikandra aurait déjà porté ses fruits : « Depuis 5 ans, près de 112 000 personnes ont été éloignées du territoire, dont plus de 22 000 depuis le début de l’année ».

    Les derniers chiffres fournis par la préfecture de Mayotte, en octobre 2023, évoquent de leur côté un total de 60 610 reconduites à la frontière (8 127 en 2020, 17 853 en 2021, 17 380 en 2022 et 17 250 en 2023, l’interception de 1 353 kwassa-kwassa, 17 192 étrangers en situation irrégulière interpellés en mer, et 59 789 à terre, la destruction de 622 barques et 424 moteurs, et la condamnation à de la prison ferme de 285 passeurs.

    https://next.ink/130597/mayotte-va-eriger-un-rideau-de-fer-de-technologies-civilo-militaires-de-survei
    #murs #barrières_frontalières #migrations #réfugiés #chiffres #statistiques #complexe_militaro-industrielle #technologie #frontières #militarisation_des_frontières

  • #Carte de #France des #fuites d’#eau_potable les plus importantes : Ardèche, Pyrénées-Orientales, Hautes-Alpes, Corse particulièrement touchées

    L’association Intercommunalités de France publie ce mercredi 20 mars une cartographie de 198 services d’eau potable dont le taux de fuites sur le réseau égale ou dépasse les 50 %. Il s’agit essentiellement de petites communes dites « isolées », solitaires dans leur gestion de l’or bleu, qui couvrent quelque 64 000 habitants.

    La sécheresse historique de 2022 a montré que l’or bleu devait être mieux géré en France. Cette année-là, plus de 1 000 communes ont eu des difficultés d’approvisionnement au robinet, un phénomène accentué par de nombreuses fuites dans les canalisations. En France, 20 % de l’eau potable est perdue lors de son acheminement. « C’est une situation aberrante qu’on doit corriger en urgence », avait tranché le président de la République fin mars 2023, en présentant un « plan eau », dont une partie était censée répondre à cet enjeu en mobilisant davantage d’aides. Le gouvernement avait alors identifié 170 communes prioritaires, victimes d’au moins 50 % de fuites, appelées « #points_noirs ».

    Mais il semblerait que le chiffre ait été sous-estimé. Ce mercredi 20 mars, #Intercommunalités_de_France, fédération nationale qui réunit métropoles, agglomérations, communautés urbaines et communautés de communes, dévoile une nouvelle carte, sur laquelle figurent 198 « points noirs » qui perdent donc plus de la moitié de leur eau. Cela représente 4 % des services d’eau en France et concerne un peu plus de 64 000 habitants. L’association a utilisé les données les plus récentes et les plus fiables de l’Observatoire national des services d’eau et d’assainissement, qui datent de 2022. La base, qui avait servi aux premières estimations officielles de 2023, s’est depuis étoffée sans toutefois devenir exhaustive car les communes les plus petites n’ont pas l’obligation de l’alimenter.

    Des petites villes dans le triste palmarès

    Parmi les « points noirs », tous ne sont pas pilotés de la même façon : 151 sont des régies municipales, 22 sont gérés en intercommunalité et 25 dépendent de syndicats des eaux. A travers cette cartographie inédite, Intercommunalités de France entend démontrer ce que le gouvernement avait déjà identifié : l’écrasante majorité des cas problématiques concerne de petites communes se débrouillant seules pour s’approvisionner en eau. Les #ressources_financières leur manquent pour entretenir les #réseaux et les subventions restent insuffisantes pour les inciter à réaliser des travaux réguliers. Ainsi, #Astet (Ardèche), une commune d’environ 40 habitants, se classe en tête de la liste des communes ayant le plus haut niveau de fuites en métropole : 91 %. Elle présente le même profil que les autres « fuyards » : un village de montagne solitaire dans sa gestion de l’eau. Rien de surprenant : en altitude, les réseaux sont les plus étendus et plus sujets aux fuites.

    « Refaire les #canalisations sur 1 km, c’est 1 million. Ça coûte très cher, précise à Libération Régis Banquet, vice-président en charge de l’eau d’Intercommunalités de France et président de Carcassonne agglomération. On a pris un retard phénoménal. Il faut renouveler les #tuyaux tous les cinquante ans pour qu’ils soient en bon état, or on les renouvelle tous les 120 à 140 ans. La prise de conscience qu’il faut porter attention à la moindre goutte d’eau est récente. »

    Si les services d’eau les plus en difficulté ne desservent en général que quelques dizaines ou centaines d’habitants, de petites villes figurent cependant dans le triste palmarès, comme #Scionzier, en Haute-Savoie, environ 9 000 habitants, ou #Contes, dans les Alpes-Maritimes, un peu plus de 7 500 habitants, qui fait partie d’un syndicat de quinze communes à proximité de Nice.

    « On doit agir vite et fort »

    Et une gestion mutualisée ne protège pas de tout. La communauté d’agglomération du Pays de Dreux, qui rassemble 78 communes à cheval entre Eure-et-Loir et Eure, connaît un taux de fuites de 74,7 %. La métropole de Perpignan, 36 communes, totalise, elle, près de 60 % de fuites. Dans ce type de cas, « ça n’est jamais l’ensemble de ses services qui présentent un rendement inférieur à 50 %, mais généralement quelques communes », précise Intercommunalités de France.

    La situation a peu de chances de s’être significativement améliorée depuis 2022, malgré le plan eau et les 53 millions débloqués récemment par l’Etat pour les fuites, car la réalisation de travaux ambitieux prend du temps. « C’est forcément un chantier de longue haleine », a reconnu le ministère de la Transition écologique mardi lors d’un point presse sur l’avancée du plan eau.

    « La situation est grave. Dans le contexte du changement climatique, on doit agir vite et fort. Une des solutions est le transfert vers l’intercommunalité pour toutes les communes gérant seules afin que la solidarité s’organise sur les territoires. Cette mise en commun des moyens permet de réaliser les #investissements colossaux nécessaires », plaide Régis Banquet. Il estime que 15 à 20 milliards d’euros devraient être exclusivement consacrés au renouvellement des #réseaux_d’eau dans les cinq ans à venir pour rattraper le retard accumulé.

    « Les petites communes isolées sont en difficulté »

    Il y a un an, Emmanuel Macron avait appelé à « mutualiser différemment » les ressources, en prenant en exemple « l’intercommunalité », un modèle à « consolider partout où c’est accepté ». La loi va dans ce sens. En 2026, plus aucune commune ne pourra gérer seule son eau. Mais certains maires s’y opposent. « Il reste un imaginaire un peu Manon des sources : “C’est le puits de mon village, je n’ai pas envie de le partager”. Ceux qui ont de l’eau ne sont pas toujours très enclins à en fournir à ceux qui n’en ont pas », explique Régis Taisne, chef du département « cycle de l’eau » à la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies. Et d’ajouter : « Les maires ruraux ont le sentiment qu’ils sont petit à petit dépossédés de toutes leurs compétences, celle sur l’eau est une de leurs dernières attributions. »

    Les deux départements comptant le plus de « points noirs » font justement partie de ceux dans lesquels beaucoup de maires rechignent au #regroupement, fait remarquer Intercommunalités de France. En tête, les Pyrénées-Orientales, avec 17 communes qui perdent plus d’un litre sur deux, alors que la sécheresse y sévit depuis trois ans, suivis par les Hautes-Alpes, qui en comptent quinze.

    « Le constat est clair : les petites communes isolées sont en difficulté, acquiesce Régis Taisne, qui est cependant moins catégorique qu’Intercommunalités de France. Il faut regrouper, mutualiser pour atteindre une taille critique permettant de faire face aux enjeux. Et dans beaucoup de cas, l’échelle intercommunale est cohérente. Mais dans d’autres, un autre #découpage_territorial peut s’imposer. Il existe par exemple de grands syndicats des eaux à l’échelle de toute la Vendée ou encore de l’Alsace-Moselle. » Cet expert invite surtout à rassembler des communes de diverses natures pour améliorer la solidarité : urbaines, rurales, de plaine, d’altitude, riches en eau ou dépourvues de ressources.

    https://www.liberation.fr/environnement/eau-potable-ardeche-alpes-maritimes-haute-savoie-la-carte-de-france-des-f
    #infrastructure #coût

    #cartographie #visualisation

    • Ce pays se « tiers mondise » à vitesse grand V. A quoi bon payer des impôts si c’est pour se retrouver avec des réseaux pareils !

  • Europe spent more on roads than rail in the last 25 years: These 10 countries bucked the trend

    A new report reveals how European countries are cutting railways and building roads.

    Europe’s rail network has dramatically declined over the past three decades, new research has warned, while investment in roads has soared.

    But with the funding gap between the two narrowing, could there be a light at the end of the (previously shuttered) tunnel?

    The length of motorways in Europe grew 60 per cent between 1995 and 2020, or 30,000km, according to research conducted by German thinktanks Wuppertal Institute and T3 Transportation and commissioned by Greenpeace.

    Meanwhile, railways shrank by 6.5 per cent, or 15,650km, and more than 2,500 railway stations were closed.

    The figures expose how governments prioritise cars over rail, warned Greenpeace EU senior climate campaigner Lorelei Limousin.

    “Millions of people outside cities have no option but to own a car to get to work, take kids to school or access basic services, living in areas with little or no public transport,” she said.

    “This is a direct result of governments dismantling local and regional rail networks while pouring money into roads.”

    However, there is a slight silver lining to the sobering research: the funding gap is narrowing.

    Between 1995 and 2018, European countries spent 66 per cent more on roads than railways. During the years 2018-2021, European countries spent 34 per cent more on extending roads than on extending railways.

    Nonetheless, the disparity is still jarring, Limousin commented.

    “Governments and the EU must hit the brakes on this dismantling of our train lines, reopen disused tracks and invest in rail – and stop the massive subsidies for roads that wreck the climate, pollute the air and make people’s lives miserable,” she said.
    Which European countries have invested in public transport?

    Trains are one of the most eco-friendly ways of getting around. Cars, vans and trucks are responsible for 72 per cent of Europe’s transport emissions, while rail accounts for only 0.4 per cent.

    But governments continue to pour money into polluting car infrastructure.

    EU-27 countries, Norway, Switzerland and the UK spent approximately €1.5 trillion on road infrastructure and only €930 billion on rail over this 1995-2020 period.

    Ten countries report a net increase of their railway networks’ lengths since 1995. These are Belgium, Croatia, Estonia, Finland, Ireland, Italy, Netherlands, Slovenia, Spain and Switzerland.

    The bulk of the railway closures took place in Germany (reduced by 6,706 km), Poland (by 4,660 km) and France (by 4,125 km). Despite this, these three countries still represent the longest total network lengths, followed by the UK and Spain.

    Between 2018 and 2021, Austria, Belgium, Denmark, France, Italy, Luxembourg and the UK invested more in rail than roads. The other countries spent more on roads than rail. In Romania, the funding gap was particularly stark, with the government spending 12 times as much on roads as it did on rail.

    Motorways grew most in Ireland, Romania and Poland, and least in Lithuania, Latvia and Belgium. In 15 out of the 30 countries analysed, the motorway length more than doubled, including Spain, Norway and Greece.
    What do researchers think should be done to improve the European rail network?

    Several European countries have launched cheap public transport fares in a bid to reduce emissions. More than three million people have purchased Germany’s Deutschlandticket, priced at €49 a month.

    But inexpensive fares are not enough. Greenpeace urged policymakers to pour money into railways, public transport, and cycle lanes, and divert it away from motorways and airports.

    The researchers believe that more than 13,500km of closed railway lines could be reopened “relatively easily.”

    “European nations have a commitment to reduce energy and transport poverty, and

    they are committed to the Paris Agreement,” the report authors urge.

    “Therefore, from a social and environmental perspective, the funding priorities for transport infrastructure need to shift accordingly.

    https://www.euronews.com/green/2023/09/19/europe-spent-more-on-roads-than-rail-in-the-last-25-years-these-10-countri

    #transports_publics #transports #rail #train #routes #automobile #investissements #transport_ferroviaire #Europe #transport_routier

    • Europe lost 15,000 km of rail, built 30,000 km of motorway since 1995

      Since 1995, European countries invested on average 66% more in expanding and refurbishing roads than in railways, new research has found. The new study (https://greenpeace.at/uploads/2023/09/analysis_development-of-transport-infrastructure-in-europe_2023.pdf) by the Wuppertal Institut and T3 Transportation Think Tank, commissioned by Greenpeace Central and Eastern Europe, looked at the investments in road and rail infrastructure by the 27 EU countries, as well as Norway, Switzerland and the UK.

      The study shows that European countries have spent approximately €1.5 trillion on road infrastructure and only €930 billion on rail in the last three decades, encouraging people to use cars instead of sustainable public transport.

      Click here (https://greenpeace.at/uploads/2023/09/factsheet_key-findings-and-country-data_transport-infrastructure-report_s) for a factsheet of the study’s main findings and country data.

      Lorelei Limousin, Greenpeace EU senior climate campaigner, said: “Millions of people outside cities have no option but to own a car to get to work, take kids to school or access basic services, living in areas with little or no public transport. This is a direct result of governments dismantling local and regional rail networks while pouring money into roads. Climate pollution from transport is through the roof, and we’ve seen people around Europe and across the world suffer the consequences. Governments and the EU must hit the brakes on this dismantling of our train lines, reopen disused tracks and invest in rail – and stop the massive subsidies for roads that wreck the climate, pollute the air and make people’s lives miserable.”

      This lopsided funding has come with a 60% increase in the length of Europe’s motorways since 1995 – more than 30,000 km – while European rail lines shrank by 6.5%, or 15,650 km. This contributed to a 29% increase in demand for motorised road transport between 1995 and 2019. Cars, vans and trucks are responsible for 72% of Europe’s transport emissions, while rail accounts for only 0.4%.

      About 13,700 km of mostly regional railway lines and more than 2,500 railway stations have been temporarily or permanently closed to passenger trains. This disproportionately affects rural communities, which suffer from reduced access to rail and other public transport. More than half of the kilometres of closed railway line could be reopened relatively easily, according to the study.

      The study looks at how the funding gap between road and rail in Europe has evolved over time, and finds that since 2018 the gap has begun to narrow, from 66% in favour of roads before 2018 to 34% since then. However, despite this, many European countries continued to close further railway lines and stations, and to plan and build new motorways and airport extensions.

      Transport remains the only sector in the EU that has consistently increased its domestic greenhouse gas emissions. Greenhouse gas emissions from transport have actually increased by 15% in the period from 1995 to 2019. At the same time, an average train journey in Europe produces 77% less greenhouse gas emissions than a car trip per passenger kilometre. Data shows that a dense and well-developed rail network is key to making public transport accessible and attractive to people, which brings pollution down.

      As European governments prepare to set their budgets for next year, Greenpeace is calling on national and EU policymakers to finally shift funding priorities from road to rail, better maintaining rail infrastructure, and making public transport more affordable.

      https://www.greenpeace.org/eu-unit/issues/climate-energy/46794/europe-lost-15000-km-of-rail-built-30000-km-of-motorway-since-1995
      #comparaison #rapport #étude #autoroutes #statistiques

  • Les 7 péchés capitaux de la #France libérale | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/7-peches-capitaux-de-france-liberale/00107264

    « Une France ultralibérale ? La bonne blague ! », titre l’éditorialiste des Echos Dominique Seux, le 28 mars dernier. La raison ? « Un pays qui assume des dépenses publiques équivalentes à 58,1 % du PIB et des ponctions fiscales et sociales aussi considérables reste un pays largement socialisé. » Le tournant #néolibéral de la France ? Un « mythe » pour l’économiste Elie Cohen le 17 mai dernier, qui plus est « ressassé ad nauseam » alors que « l’argument est parfois indigent ».

    Les libéraux usent et abusent régulièrement de l’idée : un haut niveau d’imposition, de #dépenses_publiques, de protection sociale, de redistribution, de déficits budgétaires et de dette publique serait la preuve que la France n’a pas connu d’évolution vers un fonctionnement toujours plus marqué par le libéralisme économique.

    #Libéralisme à tous crins

    C’est pourtant bien ce qui s’est passé depuis une quarantaine d’années. Les libéraux sont focalisés sur les #impôts et les dépenses publiques, en fait sur la remise en cause de la protection sociale qui nourrit les prélèvements obligatoires et les dépenses, parce que c’est leur dernière cible. Tout ce qui faisait par ailleurs l’intervention de l’Etat dans la période d’après-guerre a été progressivement remis en cause. Et la liste est longue.

    Ce sont les sept péchés capitaux du libéralisme économique français : une #finance libéralisée, le #libre-échange, un marché du travail libéralisé, des #privatisations, une contre-révolution fiscale au service des plus riches, une chute des #investissements publics, une domination de la lecture libérale du monde, à l’université et dans les médias. Libéralisation économique, il y a bien eu donc. Et le bilan, négatif, de toutes ces dynamiques, est impressionnant.

    Le cadre général a été porté par des évolutions mondiales vers le libre-échange et la libéralisation financière dans lesquelles la France s’est engouffrée vite et fort. Une fois la main mise dans l’engrenage libéral, le bras y passe, et le reste de l’économie aussi, dans une dynamique difficilement arrêtable.
    La libéralisation financière entraîne la mise en concurrence des régimes fiscaux qui obligent à baisser les impôts sur les acteurs les plus mobiles, les riches et les grandes entreprises.

    Ces dernières profitent de la liberté de circulation des marchandises pour s’implanter à l’étranger et de celle des capitaux pour mobiliser des actionnaires étrangers qui poussent à donner plus de place aux dividendes qu’à l’investissement.

    Recul de l’#Etat

    Des défaillances de marché, qui justifiaient l’intervention de l’Etat, on passe aux défaillances de l’Etat qui justifient de donner toute la place au marché. Il faut alors réduire l’intervention publique directe dans l’économie.

    L’investissement public chute : depuis les années 1990, il a été divisé par six, il représente aujourd’hui moins d’un quart de point de PIB.

    Concrètement, au nom de la baisse des dépenses publiques et des recettes fiscales des collectivités locales, les #écoles, les #routes, les #universités, etc., ne reçoivent plus les moyens nécessaires à leur développement.

    L’enseignement supérieur français craque de partout et ouvre la voie à un school business privé qui ne profite qu’à ceux qui en ont les moyens. Sans oublier les conditions de travail précarisées d’une partie des enseignants et des personnels administratifs.

    L’Etat intervenait également directement dans l’économie par l’intermédiaire des entreprises publiques. Droite et gauche confondues ont mené un long et important processus de #privatisations aux lourdes conséquences.

    Les entreprises rendues au privé se sont engagées dans une course au rendement qui a eu plusieurs conséquences néfastes : moindre effort de recherche que dans les autres pays, internationalisation plus poussée qu’ailleurs, désintérêt pour le développement des sites de production sur le territoire, priorité donnée aux actionnaires sur l’investissement, course à la baisse des prélèvements et à la hausse des subventions, à la #précarisation des contrats de travail. On a là la combinaison fatale de la #désindustrialisation française.

    Quant aux privatisations, ou au recul de l’Etat, dans les entreprises concernées par les services publics, le résultat n’a pas été meilleur. Des prestations plus chères, de moins bonne qualité, avec des conditions de travail dégradées pour les personnels.

    Tout cela est porté par un climat intellectuel dans lequel think tanks, économistes et éditorialistes libéraux occupent une place de plus en plus sans partage.

    Certes, même avec tout cela, la France n’est pas devenue un enfer ultralibéral. L’Etat social fait de la résistance en dépit de toutes ces attaques, et heureusement !

    Les temps semblent même commencer à changer : on reparle politique industrielle, taxation des riches, juste effort fiscal des multinationales, souveraineté économique, protectionnisme, etc. Il est temps : la France libérale est dans l’impasse.

  • Macron : Le grand « plan eau » qui fait flop

    Face à une sécheresse historique et à la pénurie qui s’annonce pire que celle de l’été dernier, avec des nappes phréatiques très en dessous de leur niveau habituel, Emmanuel Macron sort son « plan eau » : 50 mesures censées prendre le problème à bras le corps, présentées la semaine dernière dans les Alpes. Blast a suivi pendant des semaines sa préparation sous... influence. Enquête et décryptage sur un catalogue de mesures ineffectives dicté par les lobbies.

    Ménager l’attente... Dans le domaine du teasing et des effets d’annonce, Emmanuel Macron est passé maître. Annoncé depuis des semaines et retardé à plusieurs reprises, d’abord prévu début 2023 à l’occasion des « Carrefours de l’eau » organisés chaque année à Rennes, le plan sécheresse du gouvernement avait été remis à plus tard à la demande de l’Elysée. On l’attendait encore le 22 mars dernier lors de la journée mondiale de l’eau, qui offrait une fenêtre de tir idéale. Crise politique oblige, l’affaire avait dû être encore décalée. Et finalement le voilà, présenté jeudi dernier par le chef de l’Etat sur les rives du lac de Serre-Ponçon (Hautes-Alpes).

    En août 2022, la France a chaud. Le soleil (de plomb) cogne, les Français suent et les terres s’assèchent - un phénomène inquiétant, sans revenir jusqu’au cauchemar des incendies dans les Landes. En pleine canicule, les alertes remontées par les élus et les préfets se multipliant, Elisabeth Borne annonce la mise sur orbite d’une « planification écologique » plaçant l’eau au cœur de ses priorités. On sait aujourd’hui que près de 700 villages ou petites villes ont souffert de pénuries d’eau potable, chiffre qui à l’époque avait été minoré. Pendant plusieurs semaines, certaines populations avaient dû être alimentées par des citernes ou de l’eau en bouteille livrée par packs.

    Diagnostics clairement tracés

    Le coup de chaud de l’été 2022 passé, le chantier est lancé opérationnellement le 29 septembre par Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, et sa secrétaire d’Etat Bérangère Couillard, avec une phase de consultation. Début janvier 2023, les contributions de ces groupes de travail, comme celles des comités de bassin (des instances de concertation à l’échelle locale rassemblant opérateurs, Etat, collectivités, ONG, industriels, agriculteurs et consommateurs), sont présentées à la secrétaire d’Etat dans le cadre du Comité national de l’eau (un organe consultatif placé sous l’autorité du ministère de la Transition).

    De ces travaux et de leurs conclusions remises à Bérangère Couillard se dégagent « des diagnostics clairs et des propositions de solutions », « notamment autour de la REUT (réutilisation des eaux usées traitées) et du développement de la télérelève », se félicite la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau (FP2E) dans sa lettre publiée en mars dernier.

    La FP2E fédère 6 entreprises membres dont les multinationales Veolia, Suez et Saur. Ce lobby influent a participé activement à cinq des groupes de travail - sur la gestion des sécheresses, sur les usagers, la sobriété, le grand cycle de l’eau et les pollutions diffuses. L’occasion de pousser ses intérêts. A la sortie de la consultation, la FP2E pointe aussi « les blocages à lever », « relatifs notamment au financement, à la complexité des démarches administratives ou encore à la durée des autorisations ». Des freins « décourageants pour les porteurs de projet », note-t-elle.

    En réalité, cet investissement vient de loin. La FP2E, et avec elle les géants privés de l’eau, pousse ses pions depuis des mois : avant la présidentielle de 2022, ce syndical patronal avait présenté aux candidats son « programme ». Dès lors, tout était dit et la « feuille de route » tracée. Elle n’a pas changé depuis.
    Un gouvernement bien irrigué

    En France, la dernière grande loi sur l’eau date de 2006. Depuis, les effets du changement climatique sur le cycle hydrologique se font sentir, beaucoup plus puissamment et rapidement qu’on ne le pensait il y a encore quelques années. Résultat, l’édifice institutionnel de la gestion de l’eau à la française, qui a vu le jour à l’orée des années soixante, craque de toute part. Pourtant, personne ne veut ouvrir la boîte de Pandore que représenterait nécessairement l’élaboration d’une nouvelle loi. Celle-ci imposerait en effet de mettre au premier rang des discussions la question explosive de l’évolution du modèle agricole productiviste. Un sujet très actuel, le récent week-end de guerre civile dans un champ des Deux-Sèvres en étant une sidérante démonstration, autour de la question des méga-bassines. Et surtout un casus belli pour la FNSEA, très en cour à l’Elysée.

    Le plan présenté en grande pompe par Emmanuel Macron au lendemain de la pénible et interminable séquence sur les retraites a été bien irrigué. Pour parvenir aux 53 mesures qu’il exhibe, on a exhumé tout ce qui trainait au fond des placards depuis des lustres, afin de susciter un effet « waouh ». Ce catalogue ne fera pas illusion bien longtemps, comme on s’en apercevra rapidement, dès cet été. Il est le produit d’un véritable opéra-bouffe qui a vu tous les lobbies intéressés s’atteler dans l’urgence à la rédaction de rapports, de contributions et de propositions dont le contenu laisse dubitatif. Ils s’y sont mis, tous sans exception.

    Cet activisme n’est pas nouveau. C’est même un grand classique qui a débouché jusqu’à présent sur une série de grand-messes pour rien – des Assises en 2018-2019 au Varenne de l’eau du ministère de l’Agriculture en 2021-2022 (qui déroulait le tapis rouge à la FNSEA), avant que l’Académie des technologies ne s’y colle à son tour fin 2022. Une litanie sans rien changer qu’Emmanuel Macron n’a pourtant pas manqué de rappeler la semaine dernière, les énumérant pour s’en féliciter : « dès le mois de septembre, on a tiré les leçons, lancé les travaux, le ministre l’a rappelé, s’appuyant sur ce qui avait été fait dès il y a cinq ans ».
    Un plan « Copytop »

    Pour permettre au président de la République de sortir sa tête de l’eau et marcher sur le lac de Serre-Ponçon, une véritable usine à gaz s’est mise en branle à un train d’enfer. Depuis l’automne dernier, les contributions se sont ainsi empilées les unes sur les autres : mission d’information de la commission des affaires économiques du Sénat, copieux rapport du groupe prospective de la Chambre haute, propositions de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), du Comité national de l’eau - un organisme baroque, repaire de tous les lobbies, placé sous l’autorité du ministère chargé de la Transition écologique – ou encore, dernières en date, celles d’une autre commission sénatoriale. Sans oublier les 48 propositions du Comité de bassin Seine-Normandie le 3 février, avant l’audition organisée le 15 du même mois par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat (encore) !

    Au final, cette bataille d’experts s’est dénouée dans des réunions interministérielles (les « RIM ») opposant classiquement l’écologie, l’agriculture, Bercy, la DGCL du ministère de l’Intérieur, le tout sous la férule de Matignon - dont l’occupante connaît le sujet. « Béchu et Couillard n’y connaissent rien, c’est Borne qui pilote tout depuis le début », confirme une source proche du dossier.

    L’analyse de cette production frénétique de nos collèges d’experts, qui se sont copiés sans vergogne sous l’air du « y’a qu’à-faut qu’on », est édifiante. S’ouvre alors sous nos yeux l’étendue affolante de tout ce qui aurait dû être fait, ne l’a pas été et reste donc à faire - avec les remises en cause drastiques que cela implique.

    Depuis une quinzaine d’années, tous les organismes de recherche impliqués dans la question de l’eau, comme les inspections des administrations centrales, ont publié des centaines de rapports parfaitement informés, qui détaillent par le menu la montée des périls comme les mesures qui devraient être prises pour y faire face. En pure perte. Rien ne change, business as usual.

    Pollutions multiformes, pesticides, irrigation à outrance, imperméabilisation des sols, inondations, sécheresses, recul du trait de côte, chute dramatique de la biodiversité... La réalité est un cauchemar. Et l’élaboration aux forceps de ce nouveau « plan eau » illustre une nouvelle fois, jusqu’à la caricature, la « méthodologie » qui voit rituellement la montagne accoucher d’une souris.

    Que s’est-il passé, au juste ? Ce qui se passe en réalité depuis des lustres. L’affaire se joue en deux temps : l’état des lieux d’abord, puis les propositions. L’état des lieux, la phase 1, s’alimente des centaines de rapports disponibles. Rédigés par des fonctionnaires (IGEDD, CGEEAR, IGF, IGA…) ou par des collaborateurs du Parlement, très généralement compétents, ils renvoient les décisions à prendre au politique. C’est à cette étape, celle des propositions, que les choses se grippent. Pour s’en convaincre, il suffit de confronter pour chacun des rapports, et d’un rapport l’autre, l’état des lieux initial aux « propositions » d’actions élaborées. Le constat est accablant : l’intervention du politique neutralise tout espoir d’améliorer quoi que ce soit.

    Le sénateur et l’éléphant

    Sur le constat tout le monde s’accorde, globalement. A quelques nuances près : la France demeure un pays bien doté, avec des précipitations suffisantes pour répondre à de multiples usages - 32 à 35 milliards de m3 sont prélevés chaque année pour le refroidissement des centrales nucléaires, l’eau potable, l’agriculture, l’alimentation des canaux, l’industrie, etc. Mais les impacts du changement climatique sur le cycle de l’eau se font déjà sentir, y compris dans les bassins plus septentrionaux, provoquant l’eutrophisation des cours d’eau, l’évaporation à un rythme plus rapide et la diminution des pluies en été.

    Et puis, il y a « l’éléphant dans la pièce », selon l’expression du sénateur Renaissance Alain Richard... Co-rapporteur d’un rapport avec Christophe Jarretie (député Modem de Corrèze jusqu’en juin 2022), Alain Richard désigne ici la mobilisation de la ressource pour les besoins agricoles, qui explosent l’été quand il n’y a plus d’eau… D’où les conflits sur l’irrigation et les bassines, qui ont dépassé la côte d’alerte.

    Se prononçant en faveur de la multiplication des retenues, ce même rapport souligne pourtant « une autre limite aux stratégies d’économies d’eau pour l’irrigation agricole » : elle « réside dans la manière dont la marge de manœuvre permise par les économies se trouve redéployée. En améliorant le système d’irrigation, on peut mobiliser davantage d’eau pour les plantes à prélèvement égal. La tentation peut être alors de ne pas réduire les prélèvements mais d’augmenter la surface irriguée. Ce risque est d’autant plus fort qu’avec l’élévation des températures et la modification du régime des précipitations certaines cultures historiquement non irriguées qui n’avaient besoin que de l’eau de pluie, comme la vigne dans le Sud-Ouest, ne doivent désormais leur survie qu’à l’installation de dispositifs d’irrigation. »

    Le 5 février dernier, on a appris que la région Occitanie et six départements du Sud-ouest (Haute-Garonne, Gers, Hautes-Pyrénées, Tarn-et-Garonne, Lot et Landes) venaient de recapitaliser à hauteur de 24 millions d’euros la Compagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne (CACG). Spécialisée dans les barrages et les bassines, cette société d’aménagement régional était en quasi faillite. L’an dernier, sa gestion désastreuse a été sévèrement étrillée par la chambre régionale des comptes. Objectif de cette opération de sauvetage de la CACG ? « S’armer face au manque d’eau », notamment en « augmentant la capacité des réserves existantes »…
    Les diktats de la FNSEA

    Dans les débats autour de la crise de l’eau, on parle aussi beaucoup des « solutions fondées sur la nature ». Ça fait écolo à tout crin. « Cela implique d’aller à l’encontre de la tendance à l’artificialisation des sols, de désimperméabiliser, en particulier en milieu urbain, pour favoriser l’infiltration de l’eau de pluie ou encore apporter de la fraîcheur dans les villes lors des pics de chaleur », édicte le rapport de la commission des affaires économiques du Sénat. Problème, on oublie de dire que le principe du « zéro artificialisation nette » a suscité sur le terrain une véritable bronca des élus, de toute obédience, qui ont engagé un bras de fer avec le gouvernement sur le sujet.

    Notre éléphant, celui du sénateur Richard, est lui aussi au cœur des débats. « L’agriculture est le principal consommateur d’eau, indispensable à la pousse des plantes et à l’abreuvement du bétail, relève le Sénat. Mais l’adaptation des pratiques au changement climatique est encore trop lente et la transition vers l’agro-écologie doit être accélérée à travers tous les leviers possibles : formation, aides apportées par le premier ou le deuxième pilier de la politique agricole commune (PAC), recherche appliquée et expérimentation des nouvelles pratiques ».

    Des mesures et solutions de bon sens ? Probablement, sauf que le courant majoritaire de la profession agricole, incarné par la FNSEA, continue à s’opposer avec succès à toute évolution structurelle du modèle productiviste dominant et impose ses diktats à tous les gouvernements. L’actuel ministre de l’Agriculture Marc Fesneau l’a lui-même reconnu à mi-mots dans un récent article de Libération.

    Un autre sujet est lui aussi systématiquement évacué des « solutions ». Il mériterait qu’on y réfléchisse, pour reconsidérer le sujet dans son ensemble : chaque année, pour « équilibrer les fonds publics », l’Etat prélève 300 millions d’euros depuis quinze ans dans les caisses des agences de l’eau. « Les consommations domestiques d’eau potable, sur laquelle les redevances sont assises, sont sollicitées pour financer des domaines de plus en plus variés touchant de plus en plus au grand cycle de l’eau, et de moins en moins à la modernisation des stations d’épuration ou à la modernisation des réseaux de distribution d’eau potable, pourtant vieillissants », pointent ainsi les deux co-présidents du groupe de travail « Redevances des agences de l’eau et atteintes à la biodiversité ».

    En 2022, le duo Richard-Jarretie envisageait de compenser ce manque à gagner par la création d’une nouvelle taxe (assise sur la taxe d’aménagement départementale). Leur proposition de loi, qui aurait dû être adoptée en loi de finance rectificative, sera finalement sèchement rejetée par Bercy.

    La fuite politique

    Autrefois, « l’eau était gérée directement par les maires dans des syndicats intercommunaux à échelle humaine », mais « les regroupements de structures conduisent à dépolitiser l’eau », constate le rapport des deux parlementaires sur la question de la gouvernance. Résultat de cette évolution, « l’eau n’est plus que rarement une question politique débattue lors des campagnes électorales locales ».

    Désormais, « le pouvoir est passé du côté des techniciens. » « La politique de l’eau est dépolitisée et renvoyée à la recherche des meilleurs choix techniques possibles, constatent Jarretie et Richard. Les maires des grandes villes, les présidents des grandes intercommunalités ne siègent plus que rarement dans les organismes chargés de (sa) gestion. Ils y délèguent des élus, certes compétents, mais dont le poids politique propre est minime et qui n’ont pas tellement d’autre choix que de suivre les orientations de la technostructure de l’eau. »

    Parallèlement, cette dépossession d’une question éminemment politique s’accompagne d’une surenchère. Elle concerne la recherche et l’innovation, a priori louables sauf quand elles deviennent le paravent et le prétexte à l’inaction. Depuis une quinzaine d’années, les multinationales Veolia, Suez et Saur mènent avec succès un lobbying opiniâtre pour promouvoir une fuite en avant technologique. Censée apporter des solutions miracles, par exemple pour la réutilisation des eaux usées ou la recharge artificielle des nappes phréatiques, elle contribue en réalité au statu quo, pour ne rien changer aux pratiques délétères qui sont pourtant à l’origine de la dégradation croissante de la qualité de la ressource.

    Face à la production de ce discours et à cette fibre du tout technologique, difficile de résister. Pour deux raisons. « La compréhension des mécanismes de la politique de l’eau, tant dans ses aspects techniques qu’organisationnels est particulièrement ardue », soulignent Alain Richard et Christophe. Certes, « les SDAGE (schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux, ndlr) et les SAGE (schéma d’aménagement et de gestion des eaux, ndlr) sont soumis à l’avis du public. Les dossiers d’autorisation au titre de la loi sur l’eau font l’objet d’enquêtes publiques dont les éléments sont mis à disposition de tous sur les sites Internet des préfectures. Mais seuls quelques « initiés » sont capables de maîtriser les nombreux paramètres en jeu ». Face à cette complexité et au jeu des lobbies, les administrés sont désarmés : « La transparence des procédures ne garantit pas la participation du public et l’appropriation des enjeux à une grande échelle. » Par ailleurs, en matière de gouvernance encore, l’équilibre et les relations national/local ne se soldent pas vraiment en faveur de l’implication des échelons au plus près des administrés.

    Doit-on réfléchir et envisager de décentraliser l’action publique, pour plus d’efficacité ? Un nouveau vœu pieu. La Macronie méprise les 570 000 élus locaux français. Dans la pratique, ce sont désormais les préfets, et surtout les préfets de région, qui ont la haute main sur des politiques publiques revues à l’aune du libéralisme le plus échevelé.

    Un déluge de com

    Le 23 février dernier, Christophe Béchu et Bérangère Couillard présidaient le premier comité d’anticipation et de suivi hydrologique (CASH) de l’année. Objectif affiché ? « Informer les représentants des usagers sur la situation hydrologique actuelle et projetée en anticipation de risques potentiellement significatifs de sécheresse »...

    Pareille langue de bois n’augurait rien de bon, ou plutôt admirablement ce qui allait suivre cet interlude comme quand les deux membres du gouvernement, 24 heures plus tard, expliqueront qu’ils vont décider avec les préfets de mesures de restrictions... « soft ». Le lendemain de cette pseudo-annonce, Le Monde consacre son éditorial aux périls qui menacent, appelant face à l’urgence à la sobriété des usages. Comme un coup de pied à l’âne.

    En ce début d’année 2023, le rouleau compresseur de la com gouvernementale s’emballe. A donner le tournis. La veille de la réunion du CASH, le 22 février sur France Info, le ministre Béchu déclare la France « en état d’alerte ». Le samedi 25 février, en visite au Salon de l’agriculture, Emmanuel Macron en appelle à un « plan de sobriété sur l’eau » et invente les « rétentions collinaires » jusque-là... inconnues.

    Le lundi 27 février, Christophe Béchu, à nouveau, réunit les préfets coordonnateurs de bassin. La semaine suivante, il est en visio avec les 100 préfets de département. Dix jours plus tôt, la troisième mission d’information sénatoriale mobilisée auditionnait des directeurs d’agences de l’eau. En outre, pour tirer les enseignements pratiques de la sécheresse historique de 2022, une mission est confiée aux inspections générales, charge à elles d’établir un retour d’expérience auprès de l’ensemble des acteurs et usagers et de formuler des propositions d’amélioration. La mission, en cours, devrait rendre ses conclusions au 1er trimestre 2023.

    Des « solutions » ineptes

    Cette mise en scène à grand spectacle se distingue principalement... par son inanité : loin de répondre aux enjeux d’une crise systémique, il s’agit en s’appuyant sur des « évidences » (qui n’en sont pas) de « vendre » du vent en agitant des « solutions » (qui n’en sont pas) tout en promouvant une fuite en avant technologique qui elle va rapporter des milliards aux usual suspects du secteur...

    À Savines-le-Lac, dans ses mesures phare, Emmanuel Macron a notamment insisté jeudi dernier sur la nécessité de lutter contre les fuites pour atteindre les objectifs fixés - et « faire 10% d’économie d’eau ». En les réparant ?

    Édifié depuis la moitié du XIXème siècle, le linéaire du réseau français d’adduction d’eau atteint quelque 880 000 kilomètres. Estimé à 1 000 milliards d’euros, ce patrimoine national a été à l’origine largement financé sur fonds publics, avant l’invention de la facture d’eau. Propriété des collectivités locales, son taux de renouvellement est en deçà de ce qu’il devrait être idéalement (1% par an), calé logiquement sur la durée de vie des tuyaux.

    « Parce que tout ça, c’est le fruit de quoi ?, a fait mine de s’interroger Emmanuel Macron la semaine dernière. De sous-investissements historiques. Et pourquoi on se retrouve collectivement dans cette situation ? C’est que pendant très longtemps, on s’est habitué à ne plus investir dans nos réseaux d’eau ».

    Face à cette situation, la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 (dite loi « Grenelle II ») a introduit deux dispositions : l’obligation tant pour les services d’eau que d’assainissement d’établir pour fin 2013 un descriptif détaillé de leurs réseaux d’une part, et l’obligation pour les services de distribution de définir un plan d’actions dans les deux ans lorsque les pertes d’eau en réseaux sont supérieures au seuil fixé par décret (n° 2012-97 du 27 janvier 2012).

    En clair, si son réseau est excessivement percé, la collectivité sera pénalisée en se voyant imposer un doublement de la redevance « prélèvement » perçue par les agences de l’eau sur les factures des usagers. Par ailleurs, plus « incitatif », la Banque des territoires (Caisse des dépôts et consignations) a ouvert ces dernières années une ligne de crédit de 2 milliards d’euros « [d’]Aquaprêt ». Les collectivités sont donc invitées à s’endetter pour changer leurs tuyaux. Succès mitigé jusqu’à aujourd’hui.

    Pour donner la mesure du problème, il est utile de savoir que changer un kilomètre de tuyau coûte entre 50 000 et 200 000 euros. Depuis trois ans, regroupées sous la bannière « Canalisateurs de France », les entreprises du secteur ont augmenté leurs tarifs de 30 à 40%.

    Autrement dit, une fois ces éléments précisés, aucune progression sensible n’est à attendre sur la question des fuites. Il va donc falloir trouver ailleurs.

    D’autant que si Emmanuel Macron annonce des financements (180 millions d’euros par an « sur nos points noirs), il s’est bien gardé de préciser l’origine de ces fonds (en encadré).

    Les eaux usées, plan juteux des majors

    Devant les élus, face aux Alpes qui le toisaient, le chef de l’Etat a insisté sur une autre mesure forte : il faut « investir massivement dans la réutilisation des eaux usées », a-t-il asséné avec un air entendu.

    Réutiliser les eaux usées ? Encore une fausse bonne idée « frappée au coin du bon sens ». Pour le mesurer et se faire une idée de l’annonce présidentielle, il faut là aussi comprendre de quoi il s’agit. Cette idée est en réalité promue depuis une vingtaine d’années au fil d’un lobbying effréné de Veolia, Suez et de la Saur.

    Concrètement, il existe aujourd’hui à peine 80 unités de « réutilisation des eaux usées traitées » (REUT) dans l’hexagone, pour plus de 22 330 stations d’épuration, de la petite installation qui traite les rejets de quelques centaines d’usagers aux complexes géants implantés dans les métropoles.

    Le traitement des eaux usées n’a pas pour objectif de la rendre potable. Avant d’être traitée, cette eau usée reçoit un prétraitement afin d’éliminer le sable et les autres matières en suspension. Le process consiste ensuite à opérer des filtrations et traitements (mécanique, biologique, physico-chimique…) avant de la rejeter d’une qualité acceptable, fixée par la réglementation, dans le milieu naturel (les lacs, les rivières, la mer, etc).

    L’épuration classique, dite par boue activée, s’inspire du domaine naturel. Plus précisément des rivières, qui développent des boues au sol afin de supprimer la pollution - elle s’en nourrit. Dans une installation traditionnelle, on fournit de l’oxygène à la boue pour satisfaire ses besoins énergétiques et on la laisse se nourrir, avant de la séparer de l’eau traitée à l’aide d’un clarificateur. Les filières les plus modernes peuvent aujourd’hui compter jusqu’à 10 étapes de traitement successives, jusqu’aux ultra-violets (UV).

    Plus coûteux et bien moins répandu, le traitement membranaire repose sur le même principe, mais au lieu d’utiliser un clarificateur les membranes filtrent la liqueur mixte.

    Avec la REUT, il s’agit de mobiliser des traitements complémentaires pour améliorer la qualité de l’eau usée. L’objectif n’est plus de la rejeter dans le milieu naturel mais de l’utiliser pour l’irrigation, l’arrosage des espaces verts, des golfs ou la réalimentation des nappes phréatiques, des captages ou des réserves qui servent à produire de l’eau potable, comme Veolia l’expérimente à grande échelle en Vendée.

    Revers de la médaille, c’est... autant d’eau qui ne revient pas au milieu, qui en a pourtant besoin, les rivières comme les nappes phréatiques, pour le maintien du cycle naturel - sans négliger les inquiétudes suscitées par le contrôle sanitaire des eaux ainsi « réutilisées » par ses usagers. Sur ce terrain, les expérimentations citées en exemples par les défenseurs de l’usage de la REUT pour l’irrigation dans le sud de l’Espagne ou en Italie (jusqu’à 10% des eaux usées y sont retraitées) montrent plutôt le chemin à éviter : les systèmes hydrologiques concernés y ont été gravement dégradés par un recours intensif à la REUT…

    On retrouve ici encore les mêmes à la manœuvre. Car pour Veolia, Suez et Saur, nouveaux usages « non conventionnels » veut dire d’abord et surtout nouvelles filières, nouvelles technologies, donc nouveaux marchés… Ces lobbies ont déjà convaincu le gouvernement qu’il fallait « faire sauter les entraves règlementaires qui pénalisent le développement des projets ». Comme en atteste le décret publié le 11 mars 2022, censé encadrer cette pratique, réputée « incontournable » pour répondre aux tensions qui se font jour sur la disponibilité des ressources en eau.
    Construire des bassines ?

    La question de l’irrigation de l’agriculture est devenue sensible à l’aube des années 2000, dans plusieurs grandes régions françaises - la Charente, le Sud-Ouest, la Beauce, la Picardie, terres d’élection des grandes cultures irriguées. Alors que le changement climatique affecte déjà le cycle hydrologique, la fuite en avant d’un modèle agricole productiviste délétère va dès lors entrer en contradiction avec une gestion soutenable de la ressource en eau.

    L’impasse s’est faite jour dans le courant des années 80 quand l’Etat a considéré que tout prélèvement au-dessus d’un certain seuil devait faire l’objet d’une déclaration à ses services, après avoir délivré des autorisations au coup par coup, sans aucune limite, pendant des décennies. Une situation intenable.

    Chaque été, les préfets d’une vingtaine de départements prennent de manière récurrente des arrêtés sécheresse et 30% du territoire métropolitain est considéré en déficit structurel. « On a une quinzaine de départements, dont les Hautes-Alpes d’ailleurs, qui sont d’ores et déjà placés en vigilance », a rappelé le président de la République la semaine dernière. « On a ensuite une dizaine de départements qui sont d’ores et déjà en alerte ou alerte renforcée dans certaines zones », a-t-il encore ajouté.

    La récente actualité, avec le choc des images de Sainte-Soline, a définitivement popularisé le sujet des grandes bassines. Mais, au juste, qu’est-ce qu’une bassine ? Cet ouvrage de stockage d’eau pour l’irrigation est constitué de plusieurs hectares de bâches en plastique retenues par des remblais de 10 à 15 mètres. Mais il ne se remplit pas avec de l’eau de pluie en hiver : avec une pluviométrie moyenne de 800 mm par an, il faudrait... 15 ans pour la remplir. Elle n’est pas davantage alimentée par de l’eau de ruissellement, comme celle des crues - comme le sont les retenues collinaires. Les bassines sont donc remplies par l’eau des nappes phréatiques, ce à quoi s’opposent les militants mobilisés le 25 mars dernier dans les Deux-Sèvres. Il faut compter 2 mois pour remplir une bassine avec des pompes travaillant à 500m3/H.

    Une fois capturée, l’eau est exposée au soleil, à l’évaporation et à la prolifération bactérienne ou algale. Elle servira alors principalement à irriguer du maïs destiné à nourrir le bétail, dont une bonne partie sera exportée avant que nous réimportions le bétail qui s’en nourrit. On dénombre aujourd’hui une bonne quarantaine de sites avec des grandes bassines (ou des projets) sur le sol national.

    Depuis un demi-siècle, on se débarrassait au printemps de l’eau « excédentaire » pour pouvoir effectuer les semis. On a drainé prairies et zones humides, « rectifié » les rivières pour évacuer l’eau. Ces opérations ont eu pour résultat une diminution des prairies et une augmentation de l’assolement en céréales. Mais à force d’évacuer l’eau, on a commencé à subir les sécheresses et les irrigants ont commencé à pomper l’eau des nappes.

    La loi NOTRe à la poubelle ?

    Comme si ça ne suffisait pas, la loi NOTRe de 2015 - loi phare du mandat Hollande qui avait pour objectif de rationaliser l’organisation des 35 000 services d’eau et d’assainissement français jusqu’alors gérés par les communes, en transférant ces compétences aux intercommunalités - n’a cessé d’être détricotée par les élus locaux qui n’ont jamais accepté d’être privés de leurs prérogatives.

    Après trois premières lois rectificatives, une quatrième offensive est venue du Sénat : la chambre haute examinait le 15 mars une nouvelle proposition de loi qui prévoit que même si les compétences ont déjà été transférées il serait possible de revenir en arrière, même pour les interco ayant procédé à la prise de compétences ! « On ne pourrait rêver pire pour créer un bordel ingérable », soupire un haut responsable de la direction générale des collectivités locals du ministère de l’Intérieur.

    Dans son rapport annuel 2023, la Cour des comptes a posé le dernier clou au cercueil, dans le chapitre qu’elle consacre à la politique de l’eau en France. Conclusion d’une enquête d’ampleur menée avec les treize chambres régionales, le texte n’y va pas de main morte pour dénoncer cette mascarade : « Elle est incohérente [et ] inadaptée aux enjeux de la gestion quantitative de la ressource », fulmine-t-elle. Cette politique, telle qu’elle est menée, souffre de « la complexité et du manque de lisibilité de son organisation », constatent les sages.

    La Cour fustige, les lobbies dansent...

    Exemple ? Près de la moitié des sous-bassins hydrographiques ne sont pas couverts par un schéma d’aménagement et de gestion des eaux (Sage), dont l’élaboration... conditionne pourtant la mise en œuvre concrète des orientations du Sdage.

    « Lorsqu’ils existent, le contenu de ces schémas n’est pas toujours satisfaisant en raison de leur durée moyenne d’élaboration, proche d’une dizaine d’années, de l’ancienneté des données sur lesquelles ils s’appuient et de l’absence d’objectifs de réduction des consommations d’eau », pointent les magistrats financiers. Face à ces constats d’une sévérité sans précédent, la Cour des comptes demande donc de la « clarifier » en suivant mieux la géographie de l’eau et recommande de la (re)structurer autour du périmètre des sous-bassins versants.

    Mais qu’importent ces sombres augures et leurs appels... Le 22 mars, on se réjouissait, c’est bien là l’essentiel : Canalisateurs de France - les marchands de tuyaux qui réclament de 3 à 4 milliards d’euros d’investissements supplémentaires chaque année - organisaient un grand raout : une « matinée de l’eau » avec pour « grand témoin » l’incontournable Erik Orsenna, l’homme... qui se vantait de faire commerce de son entregent dans un portrait criant de vérité publié en 2016 par M le Monde. Le ton était donné.

    Dans ces conditions, après avoir observé pendant des mois ce qui se passait en coulisses, et constaté l’omniprésence de lobbies toujours plus offensifs, on ne pouvait s’attendre qu’au pire à l’annonce du fameux plan eau du gouvernement. A la lecture du document diffusé dans la foulée du discours d’Emmanuel Macron, on doit le dire, on n’a pas été déçu. Entre énièmes déclarations d’intention (jamais suivies d’effets), camouflage du réel, empilement de gadgets ineptes - le baromètre de ceci, le thermomètre de cela... -, le président de la République s’est fait le VRP d’un « plan waouh ». Présenté comme la « modernisation sans précédent de notre politique de l’eau », il tient en réalité du concours Lépine et du catalogue de la Redoute.

    À la sortie, une (seule) chose est acquise : l’été sera chaud. Et l’exercice d’esbroufe ne règlera rien.

    https://www.blast-info.fr/articles/2023/macron-le-grand-plan-eau-qui-fait-flop-lojNnq91RhyU46bCLV9S0w

    #eau #plan_eau #lobbies #Macron #plan #mesures #sécheresse #plan_sécheresse #REUT #réutilisation_des_eaux_usées_traitées #FP2E #télérelève #Veolia #Suez #Saur #lobby #FNCCR #Comité_national_de_l’eau #Comité_de_bassin_Seine-Normandie #RIM #irrigation #bassines #changement_climatique #irrigation_agricole #agriculture #Compagnie_d’aménagement_des_coteaux_de_Gascogne (#CACG) #zéro_artificialisation #dépolitisation #politique #politique_de_l'eau #technostructure #gouvernance #SDAGE #SAGE #schéma_d'aménagement_et_de_gestion_des_eaux #schéma_directeur_d'aménagement_et_de_gestion_des_eaux #politique_publique #libéralisme #comité_d’anticipation_et_de_suivi_hydrologique (#CASH) #inaction #réseau #investissements #sous-investissement #Aquaprêt #collectivités_locales #Canalisateurs_de_France #fuites #eaux_usées #épuration #bassines #nappes_phréatiques #industrie_agro-alimentaire #loi_NOTRe

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    voir aussi :
    https://seenthis.net/messages/997687

  • Pendant ce temps-là, les puissances occidentales mettent en ordre de bataille les esprits et transforment à vitesse accélérée leurs économies en «  économies de guerre  »

    Contre la guerre en Ukraine et sa généralisation
    https://mensuel.lutte-ouvriere.org/2023/02/25/contre-la-guerre-en-ukraine-et-sa-generalisation_521781.html

    Poutine, qui nie jusqu’à l’existence d’une nation ukrainienne, aura, par son sanglant mépris des peuples, contribué à ce que s’affirme le sentiment d’appartenir à l’Ukraine, alors qu’il peinait à prendre corps malgré les efforts du pouvoir et des nationalistes.

    L’échec relatif de Poutine résulte, entend-on souvent, de la mobilisation d’un peuple dressé pour défendre sa patrie, rien de tel ne motivant les soldats russes. Certes. Mais ce n’est qu’une partie de la réalité. Si l’Ukraine a tenu bon, malgré une industrie et une armée a priori moins fortes que celles du Kremlin, elle le doit avant tout à la trentaine de membres de l’OTAN, dont les États-Unis, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, la France, qui l’ont armée, financée et soutenue de bien des façons. Et ils ne cessent de surenchérir en ce domaine, tel Biden encore le 20 février à Kiev.

    Quand les pays de l’OTAN livrent à l’Ukraine des armements de plus en plus sophistiqués, de plus en plus efficaces, ils poursuivent un objectif immédiat proclamé  : éviter la défaite de l’Ukraine et faire durer la guerre afin d’affaiblir la Russie, et si possible la mettre à genoux.

    Cela pour montrer au monde entier ce qu’il en coûte de ne pas s’incliner devant l’ordre impérialiste. Les propos de Biden à Varsovie  : «  L’Ukraine ne sera jamais une victoire pour la Russie  », son refus affiché de toute négociation avec Poutine, le fait que les dirigeants occidentaux ont tous adopté la même posture et le même langage ces derniers temps, tout cela va dans le même sens.

    Le conflit en cours n’est pas la principale raison d’une escalade que l’Occident mène tambour battant. Il fait aussi office de toile de fond pour une mise en ordre de bataille des esprits, ne serait-ce que par la banalisation d’une guerre qui s’installe pour durer, dans une Europe qui n’en avait plus connu depuis 1945, exception faite des bombardements de la Serbie par l’OTAN, il y a un quart de siècle.

    Une mise sur le pied de guerre qui vaut aussi pour les économies de chaque pays, dans un monde capitaliste qui s’enfonce dans la crise sans que ses dirigeants y voient d’issue. Certes, les dirigeants du monde capitaliste n’ont pas encore choisi la fuite en avant vers une conflagration généralisée, comme celle qui conduisit à la Première et à la Deuxième Guerre mondiale, mais rien ne garantit que le conflit ukrainien ne risque pas, à tout moment, de précipiter l’humanité dans une nouvelle guerre mondiale.

    Le conflit en Ukraine sert déjà de terrain d’entraînement aux États impérialistes pour préparer l’éventualité d’un affrontement dit de haute intensité, que les états-majors militaires et politiques envisagent explicitement. Il sert aussi aux chefs de file de l’impérialisme à renforcer des blocs d’États alliés, avec leurs réseaux de bases sur le pourtour de la Russie et de la Chine.

    sommant les autres États de se rallier à ces alliances militaires et d’adopter des trains de sanctions contre la Russie, même quand cela va à l’encontre de leurs intérêts et de ceux, sonnants et trébuchants, de leurs capitalistes. On le constate pour l’arrêt des importations de gaz et de pétrole russes, l’interdiction de commercer avec la Russie, d’y maintenir des activités industrielles, ce qui pénalise des pays européens, dont l’Allemagne et la France, mais profite aux États-Unis.

    Si un fait nouveau, capital pour l’avenir de l’humanité, s’est fait jour au feu de cette guerre, c’est l’évolution rapide de la situation mondiale dans le sens de sa #militarisation.

    Poutine a répondu de façon monstrueuse à la pression continue de l’impérialisme en Europe de l’Est en lançant ses missiles et ses tanks sur l’Ukraine le 24 février 2022. Mais c’est l’impérialisme qui s’est préparé depuis longtemps à aller à la confrontation.

    ... à plonger tôt ou tard l’Ukraine dans la guerre, donc à faire de ses habitants les otages d’une rivalité qui les dépasse, car elle oppose le camp mené par les États-Unis à la Russie, avec son dictateur, ses bureaucrates et ses oligarques pillards. D’un côté ou de l’autre, il n’y a nulle place pour le droit des peuples à décider de leur destinée, même si on veut nous le faire croire.

    L’ex-chancelière Angela Merkel n’en croit rien. Elle le dit dans une interview où elle revient sur la crise qui s’ouvrit en février 2014, quand le président ukrainien d’alors, contesté par la rue et surtout lâché par des secteurs de la bureaucratie et de l’oligarchie, dut s’enfuir. Le pouvoir issu du #Maïdan s’alignant sur les États-Unis, Poutine récupéra alors la #Crimée et poussa le Donbass à faire sécession. Les accords de Minsk, que Merkel parrainait avec Hollande et auxquels avaient souscrit Moscou et Kiev, devaient régler pacifiquement le différend, prétendait-elle à l’époque. Elle avoue désormais qu’il s’agissait d’un leurre. «  Poutine, explique-t-elle, aurait [alors] pu facilement gagner. Et je doute fortement que l’OTAN aurait eu la capacité d’aider l’Ukraine comme elle le fait aujourd’hui. […] Il était évident pour nous tous que le conflit allait être gelé, que le problème n’était pas réglé, mais cela a justement donné un temps précieux à l’Ukraine.  » Et à l’OTAN pour préparer l’affrontement avec Moscou.

    Le conflit couvait depuis l’effondrement de l’#URSS en 1991. Dès ce moment-là, États-Unis et Union européenne furent à la manœuvre pour aspirer l’Europe de l’Est dans l’orbite de l’OTAN. Des conseillers de la Maison-Blanche expliquaient qu’il fallait détacher l’Ukraine de la Russie, pour que celle-ci n’ait plus les moyens de redevenir une grande puissance.

    Or, après les années Eltsine (1991-1999), d’effondrement économique, d’éclatement de l’État et de vassalisation humiliante du pays par l’Occident, Poutine et la bureaucratie russe voulaient restaurer la #Grande_Russie.

    Une première tentative de l’Occident pour aspirer l’Ukraine eut lieu en 2004 sous l’égide du tandem ­Iouchtchenko­-­Timochenko, tombeur du pro-russe Ianoukovitch. Elle tourna court, la population, dégoûtée, finissant par rappeler Ianoukovitch. Elle allait le chasser à nouveau en 2014. Cette fois fut la bonne pour le camp occidental et signifiait la guerre  : dans le #Donbass, que l’armée de Kiev et des troupes d’extrême droite disputaient aux séparatistes, elle fit 18 000 morts et des centaines de milliers de réfugiés. Huit ans plus tard, tout le pays bascula dans l’horreur.

    Les dirigeants américains et européens savaient que Moscou ne pouvait accepter une Ukraine devenue la base avancée de l’OTAN. Ils savaient quels risques mortels leur politique impliquait pour les Ukrainiens, et pour la jeunesse russe que Poutine enverrait tuer et se faire tuer. Cette guerre, l’OTAN l’avait rendue inéluctable depuis 2014, en armant, entraînant, conseillant l’#armée_ukrainienne et les troupes des nationalistes fascisants.

    Les dirigeants occidentaux n’en avaient cure, car faire la guerre avec la peau des peuples est une constante de la politique des puissances coloniales, puis impérialistes. On le vérifie encore une fois dans le sang et la boue des tranchées en #Ukraine, dans les ruines des HLM de #Kharkiv, #Kherson ou #Donetsk que les missiles des uns ou des autres ont fait s’effondrer sur leurs habitants. N’en déplaise aux médias d’ici qui ressassent la fable d’un conflit soudain opposant le petit David ukrainien isolé et désarmé qu’agresserait sans raison le grand méchant Goliath russe.

    À l’occasion du premier l’anniversaire de l’invasion de l’Ukraine, on a eu droit au rouleau compresseur d’une #propagande sans fard dans les #médias. Il y aurait le camp du Mal (la Russie, l’Iran et surtout la Chine), face au camp du Bien, celui des puissances qui, dominant la planète, y garantissent la pérennité du système d’exploitation capitaliste au nom de la démocratie ou de la sauvegarde de pays comme l’Ukraine, dès lors qu’ils leur font allégeance.

    Cette propagande massive vise à s’assurer que l’opinion publique adhère sans réserve à ce qu’on lui présente comme la défense d’un peuple agressé, en fait, à la guerre que mènent les grandes puissances par Ukrainiens interposés. Car, au-delà de ce qu’il adviendra de la Russie et du régime de Poutine – une des préoccupations contradictoires des États impérialistes, qui disent vouloir la victoire de Kiev tout en craignant qu’une défaite de Poutine déstabilise de façon incontrôlable la Russie et son «  étranger proche  » – ces mêmes États visent un objectif au moins aussi important pour eux. Ils veulent enchaîner à leur char de guerre leur propre population, dans le cadre ukrainien, tout en ayant en vue des conflits plus larges à venir.

    En fait, le conflit ukrainien a tout du prologue d’un affrontement plus ou moins généralisé, dont politiques, généraux et commentateurs désignent déjà la cible principale  : la Chine. Ainsi, Les Échos du 15 février a mis à sa une un article qui titrait  : «  Pour l’Amérique, la Chine redevient l’ennemi numéro un  », après que «  la guerre en Ukraine [avait un temps détourné son attention] de la confrontation  » avec la Chine.

    Déjà, les steppes, les villes et le ciel d’Ukraine servent autant aux états-majors et industriels occidentaux à affronter la #Russie, par soldats ukrainiens interposés, qu’à tester sur le vif leurs #blindés, pièces d’#artillerie, #systèmes_de_commandement, de communication, d’interception, de renseignement, et à en tirer les leçons voulues. Ils y voient aussi une aubaine pour se débarrasser de #munitions et d’engins plus ou moins anciens que les combats vont consommer . Conséquence favorable pour eux, cela justifie l’escalade des livraisons d’armes et, de ce fait, l’explosion des #budgets_militaires afin de doper les #industries_de_guerre.

    Cette conjoncture permet à des États d’engranger des commandes, parfois énormes, de pays dépendants de protecteurs plus puissants et des leaders des marchés de l’#armement.

    Ainsi, Varsovie a envisagé de donner à Kiev des vieux Mig-29 de conception soviétique pour les remplacer par des F-16 américains, et promis de lui livrer d’anciens chars Leopard, qu’elle remplacera par de nouveaux modèles. Évidemment, cela ne fait l’affaire ni de Dassault ni du char Leclerc français qui peine à trouver preneur. C’est que, même alliés au sein de l’OTAN, voire soucieux d’afficher leur unité, comme Biden l’a souligné lors de la promesse que lui et Scholtz ont voulue simultanée de livrer des tanks à Kiev, les États impérialistes restent rivaux sur ce terrain, comme sur d’autres. Les États-Unis se réservent la part du lion, avec des commandes d’armement qui ont doublé en 2022, à la mesure de leur puissance industrielle, de leur suprématie militaire… et des guerres à venir.

    Ces commandes d’armes pour l’Ukraine, qui s’ajoutent à celles que l’on dit destinées à remettre à niveau chaque armée occidentale, servent autant à tenir la dragée haute à #Poutine qu’à transformer à vitesse accélérée les #économies occidentales en «  #économies_de_guerre  », selon les termes même du programme que se sont fixé les ministres de la Défense des pays de l’#OTAN, lors de leur sommet des 14-15 février à Bruxelles. Depuis des mois, les dirigeants politiques occidentaux et plus encore les chefs de leurs armées discutent publiquement et concrètement d’une guerre généralisée qu’ils savent s’approcher. Ainsi, à Brest, l’#amiral_Vandier, chef d’état-major de la Marine, a lancé à la nouvelle promotion d’élèves-­officiers  : «  Vous entrez dans une Marine qui va probablement connaître le feu à la mer.  » Certains avancent même une date pour cela, tel le général Minihan, chef des opérations aériennes aux #États-Unis  : «  J’espère me tromper, mais mon intuition me dit que nous nous affronterons en 2025  » avec la #Chine.

    Ukraine  : un effroyable bilan humain, social et économique

    En attendant, la guerre en Ukraine a déjà tué ou blessé 180 000 militaires russes, à peine moins de soldats ukrainiens, et tué plus de 30 000 civils, estime le chef de l’armée norvégienne, membre de l’OTAN. 7,5 millions d’Ukrainiens ont trouvé refuge en Pologne, Slovaquie, Autriche, etc., et en Russie. Parmi eux se trouvent une écrasante majorité de femmes et d’enfants, car les hommes de 18 à 60 ans, mobilisables, ont l’interdiction de quitter le territoire. Il y a aussi plusieurs millions de déplacés dans le pays même.

    De nombreuses villes, grandes ou petites, ont été bombardées, parfois rasées, les infrastructures énergétiques partout frappées, ce qui a plongé la population dans l’obscurité et le froid. Le montant des destructions de routes, ponts, voies ferrées, ports, aéroports, entreprises, écoles, hôpitaux, logements… atteignait 326 milliards de dollars, selon ce qu’estimait le Premier ministre en septembre dernier. Ce montant, déjà colossal, n’a pu que croître depuis, ne serait-ce que parce qu’il s’accompagne d’énormes détournements qu’ont effectués et que vont effectuer ministres, généraux, bureaucrates et oligarques ukrainiens.

    Zelensky a reconnu la corruption de l’appareil d’État jusqu’au sommet quand il a limogé une partie de son gouvernement, dont les ministres de la Défense et de la Reconstruction, et plusieurs très hauts dirigeants. Cela ne change rien à la nature d’un État qui, source principale des nantis comme en Russie, est l’un des plus corrompus au monde  : plus que l’État russe, dit-on, ce qui n’est pas rien. En fait, Zelensky n’avait pas le choix  : une commission américaine de haut niveau avait débarqué à Kiev pour vérifier ce que devenait l’aide colossale fournie par l’oncle d’Amérique. Après tout, même si l’État américain est richissime, il a aussi ses bonnes œuvres (industriels de l’armement, financiers, capitalistes de haut vol) et ne veut pas qu’une trop grosse part des profits de guerre file dans poches des bureaucrates, oligarques et maffieux ukrainiens.

    Et puis, au moment même où l’Occident annonçait fournir des tanks à l’État ukrainien, il ne s’agissait pas que le régime apparaisse pour ce qu’il est  : celui de bandits prospérant sur le dos de la population. Cela s’adressait moins à l’opinion occidentale, qui ne connaît de la situation que ce qu’en disent les médias, qu’à la population ukrainienne.

    Victime des bombardements et exactions de l’armée russe, elle se rend compte qu’elle est aussi la victime des parasites de la haute bureaucratie, des ministres véreux ou des généraux voleurs. Et l’union sacrée n’a pas fait disparaître les passe-droits qui permettent aux nantis de profiter en paix de leur fortune à l’étranger, tandis que leurs sbires de la police raflent les hommes, valides ou pas, pour le front. Les résistances que cela provoque ici ou là n’ont rien pour étonner dans un tel contexte, d’autant que, si l’armée a d’abord pu compter sur des volontaires, ceux qu’elle mobilise maintenant n’en font, par définition, pas partie.

    Tout à leurs commentaires dithyrambiques sur un régime censé incarner la démocratie et l’unité d’un peuple derrière ses dirigeants, les médias français préfèrent tirer un voile pudique sur des faits qui pourraient gâcher leur tableau mensonger.

    [...] Le régime de la bureaucratie russe et de ses oligarques milliardaires, lui-même bien mal en point socialement et économiquement, corrompu, policier et antiouvrier, ne peut représenter aucun avenir pour la population ukrainienne, même russophone.

    Quant au régime qu’incarne Zelensky, ce chargé de pouvoir des grandes puissances et de leurs trusts qui lorgnent sur les richesses agricoles et minières de l’Ukraine ainsi que sur sa main-d’œuvre qualifiée, afin de l’exploiter avec des salaires misérables , ce qui a commencé dès 2014, le conflit lui a sans doute sauvé la mise, au moins dans un premier temps. Comme dans toute guerre, la population s’est retrouvée bon gré mal gré derrière un pouvoir qui se faisait fort de la défendre. Mais gageons que de larges pans des classes populaires n’ont pas oublié pour autant ce qu’avait fini par leur inspirer cet acteur devenu président, qui avait joué au «  serviteur du peuple  » pour mieux préserver les intérêts des nantis.

    S’affrontant sur le terrain par peuples interposés, les dirigeants occidentaux, représentants d’une bourgeoisie impérialiste qui domine le monde, les dirigeants russes, représentants des parasites qui exploitent les travailleurs de Russie, les dirigeants ukrainiens, représentants de leurs oligarques autant que des trusts occidentaux, sont tous des ennemis des classes populaires, de la classe ouvrière.

    Et les travailleurs, où qu’ils se trouvent, quelle que soit leur nationalité, leur langue ou leur origine, n’ont aucune solidarité à avoir, sous quelque prétexte que ce soit, avec «  l’ennemi principal qui est toujours dans notre propre pays  », comme disait le révolutionnaire allemand Karl Liebknecht en 1916, en pleine Première Guerre mondiale.

    Partout, la marche à une économie de guerre

    Le 6 février, Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU [...] : «   Le monde se dirige les yeux grand ouverts [vers] une guerre plus large .  »

    On vient d’en avoir la confirmation au sommet des ministres de la Défense des membres de l’OTAN. Il leur a été demandé, selon Les Échos, «  de passer en #économie_de_guerre  », de relancer et activer la #production_d’armements, et d’abord d’#obus, de #chars et de pièces d’artillerie, pour faire face à «  une #guerre_d’usure  » en Ukraine. Et de préciser que si, il y a dix ans, les États-Unis demandaient à leurs alliés de monter leurs #dépenses_militaires à 2 % de leur produit intérieur brut, ce chiffre est désormais considéré comme un plancher que beaucoup ont dépassé. La conférence sur la sécurité en Europe qui a suivi, à Munich, a réuni la plupart des dirigeants européens et mondiaux pour aller dans le même sens.

    C’est ce qu’ils font en cherchant à persuader leur population de l’inéluctabilité de la guerre  ; en lui désignant comme ennemis certains pays, au premier rang desquels la Russie et la Chine  ; en déployant une propagande insidieuse mais permanente dans les médias autour de thèmes guerriers  ; en mettant l’accent sur la préparation de la #jeunesse à servir «  sa  » nation, à la défendre, sans jamais dire qu’il s’agira de la transformer en #chair_à_canon pour les intérêts des classes possédantes. Le gouvernement français s’en charge avec son #Service_national_universel, qui vise à apprendre à des jeunes à marcher au pas, avec des reportages télévisés plus ou moins suscités sur le service à bord de navires de guerre, sur des régions sinistrées (Saint-Étienne) où la reprise de la production d’armes ferait reculer le chômage. Le nouveau ministre allemand de la Défense se situe sur le même terrain, lui qui veut rétablir le service militaire et faire de la Bundeswehr la première armée du continent grâce aux 100 milliards de hausse de son #budget.

    En juin dernier, Macron avait annoncé la couleur avec son plan Économie de guerre doté par l’État de 413 milliards sur sept ans. Il fallait «  aller plus vite, réfléchir différemment sur les rythmes, les montées en charge, les marges, pour pouvoir reconstituer plus rapidement ce qui est indispensable pour nos #armées, pour nos alliés ou pour celles [comme en Ukraine] que nous voulons aider  ». Et, s’adressant aux dirigeants de l’organisme qui regroupe les 4 000 entreprises du secteur militaire, il leur avait promis des décisions et, surtout, des #investissements. Pour les #profits, la guerre est belle…

    Bien au-delà du conflit ukrainien, la cause profonde de l’envolée des budgets militaires est à chercher dans la crise du système capitaliste mondial, qui va s’aggravant sans que quiconque dans les milieux dirigeants de la bourgeoisie en Europe et en Amérique sache comment y faire face.

    Comme à chaque fois que le monde se trouve confronté à une telle situation, la bourgeoisie et ses États en appellent à l’industrie d’armement pour relancer l’économie. Car, grâce au budget militaire des États, elle échappe à la chute de la demande qui affecte les secteurs frappés par la baisse du pouvoir d’achat des couches populaires et, en dopant le reste de l’économie par des commandes de machines, de logiciels, de matériaux, de matières premières, etc., la bourgeoisie peut espérer que cela l’aidera à maintenir le taux de profit général.

    [...] même quand certains prétendent chercher une solution de paix à une guerre que leur politique a suscitée, la logique de leur politique d’armement continu de l’un des deux camps sur le terrain, celle de la militarisation de l’économie de nombreux pays sur fond d’une crise générale dont l’évolution leur échappe, tout cela fait que, de la guerre en Ukraine à un conflit plus large, la distance pourrait être bien plus courte qu’on ne le croit.

    Contrairement à ce qu’affirme Guterres, ce n’est pas toute l’humanité qui avance vers l’abîme les yeux grands ouverts. Les dirigeants politiques de la bourgeoisie ne peuvent pas ne pas voir ce qu’ils trament, eux, et dans quels intérêts, ceux de la bourgeoisie. Cela, ils le discernent en tout cas bien mieux que les masses du monde entier, auxquelles on masque la réalité, ses enjeux et son évolution qui s’accélère.

    Oui, en Ukraine, en Russie, comme partout ailleurs, le niveau de la conscience et de l’organisation de la classe ouvrière est très en retard sur cette course à la guerre dans laquelle la bourgeoisie engage l’humanité. Et plus encore au regard de ce qu’il faudrait pour l’enrayer, la transformer en guerre de classe pour l’émancipation des travailleurs du monde entier.

    C’est ce que firent les bolcheviks en Russie en 1917, en pleine guerre mondiale. C’est sur cette voie qu’il faut que s’engagent, en communistes révolutionnaires et internationalistes, en militants de la seule classe porteuse d’avenir, le prolétariat, toutes celles et tous ceux qui veulent changer le monde avant qu’il ne précipite à nouveau l’humanité dans la barbarie. Alors, pour paraphraser ce que Lénine disait de la révolution d’Octobre  : «  Après des millénaires d’esclavage, les esclaves dont les maîtres veulent la guerre leur [répondront]  : Votre guerre pour le butin, nous en ferons la guerre de tous les esclaves contre tous les maîtres.  »

    #guerre_en_ukraine #capitalisme #crise

    • Royaume-Uni : hausse significative du budget militaire

      A l’occasion de la mise à jour de sa doctrine de politique étrangère, le Royaume-Uni a annoncé son intention de porter à terme son #budget_défense à 2,5 % du PIB.

      Face aux « nouvelles menaces », le #Royaume-Uni va investir cinq milliards de livres supplémentaires dans sa politique de défense. Cette rallonge va porter ce budget à 2,25 % du PIB à horizon 2025, un redressement jamais vu depuis la guerre froide.
      Cette enveloppe doit permettre de « reconstituer et de renforcer les stocks de #munitions, de moderniser l’entreprise nucléaire britannique et de financer la prochaine phase du programme de #sous-marins_Aukus », a souligné Downing Street dans un communiqué, le jour même de la signature à San Diego du contrat entre l’Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni. A terme, l’objectif est de revenir à des dépenses militaires équivalentes à 2,5 % du PIB, bien au-dessus de l’engagement pris au niveau de l’#Otan (2 % du PIB).

      Ces annonces interviennent au moment où le Royaume-Uni met à jour sa doctrine de politique étrangère dans un document de 63 pages qui fait la synthèse des principaux risques pour la sécurité du pays. La dernière mouture, publiée il y a trois ans, exposait les ambitions de la « Global Britain » de Boris Johnson au lendemain du Brexit. La #Russie y était identifiée comme la principale menace pour la sécurité. La #Chine était qualifiée de « défi systémique » et le document annonçait un « pivot » du Royaume-Uni vers l’axe Indo-Pacifique.
      Les tendances observées sont toujours les mêmes, mais « elles se sont accélérées ces deux dernières années », observe cette nouvelle revue. « Nous sommes maintenant dans une période de risques renforcés et de volatilité qui va probablement durer au-delà des années 2030 », note le rapport.

      (Les Échos)

      #militarisation #impérialisme

    • Les importations d’armes en Europe en forte hausse

      Les #achats_d'armement ont quasiment doublé l’an dernier sur le sol européen

      Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’Europe s’arme massivement. C’est ce que confirme le dernier rapport de l’#Institut_international_de_recherche_sur_la_paix_de_Stockholm (Sipri), publié lundi. Hors Ukraine, les #importations_d'armements sur le Vieux Continent se sont envolées de 35 % en 2022. En intégrant les livraisons massives d’#armes à l’Ukraine, elles affichent une hausse de 93 %.

      […] Sur la période 2018-2022, privilégiée par le #Sipri pour identifier les tendances de fond, les importations d’armes européennes affichent ainsi une hausse de 47 % par rapport aux cinq années précédentes, alors qu’au niveau mondial, les transferts internationaux d’armes ont diminué de 5,1 % sur cette période. Un contraste majeur qui témoigne de la volonté des Européens d’« importer plus d’armes, plus rapidement », explique Pieter ​Wezeman, coauteur du rapport.
      Dans cette optique, outre les industriels locaux, les Européens comptent sur les #Etats-Unis. Sur la période 2018-2022, ces derniers ont représenté 56 % des #importations_d'armes de la région. Le premier importateur en #Europe a été le Royaume-Uni, suivi de l’#Ukraine et de la Norvège.
      […]

      En France, #Emmanuel_Macron a proposé une augmentation de 100 milliards d’euros pour la loi de programmation militaire 2024-2030 par rapport à la période 2019-2025. Le Premier ministre britannique, #Rishi_Sunak, vient pour sa part d’annoncer que le #Royaume-Uni allait investir 5 milliards de livres (5,6 milliards d’euros) supplémentaires dans la défense, dans un contexte de « nouvelles menaces venues de #Russie et de #Chine ». Plus symbolique encore, l’Allemagne du chancelier #Olaf_Scholz a annoncé, en mai 2022, le lancement d’un fonds spécial de 100 milliards pour moderniser son armée et rompre avec des décennies de sous-investissement.

      (Les Échos)

      #militarisation

    • La France s’apprête à relocaliser sur son sol une vingtaine de productions industrielles militaires , révèle mardi franceinfo. Ces relocalisations sont une déclinaison de « l’économie de guerre » réclamée par l’Élysée.

      Le mois dernier, on a appris que la France s’apprêtait à relocaliser la production de #poudre pour ses obus d’artillerie (de 155mm). Selon nos informations, en tout, il y aura une vingtaine de relocalisations stratégiques en France.

      Dans le détail, la France va donc de nouveaux produire sur son territoire des #coques de bateaux produites jusqu’à présent dans les pays de l’Est, des explosifs pour gros calibres produits en Suède, Italie ou encore Allemagne, mais, surtout, des pièces jugées « critiques » pour certains moteurs d’hélicoptères. On parle ici précisément des disques des turbines haute-pression des bi-moteurs RTM322. Jusqu’à présent, ces pièces étaient élaborées aux Etats-Unis puis forgées en Angleterre. Bientôt, l’élaboration et la forge seront faites en France dans l’usine #Aubert_et_Duval située dans le Puy-de-Dôme. […]

      (France Info)

      #militarisation #relocalisation #industrie_de_la_défense

    • Emmanuel Chiva est à la tête (de l’emploi) de la direction générale de l’armement (DGA). Son sale boulot : mettre en œuvre l’« économie de guerre » voulue par Macron.

      Un type qui pratique au quotidien "l’argent magique" et un "pognon de dingue" (public) au service des capitalistes de l’armement. Le principe : un vol à grande échelle des fruits du travail de millions de travailleurs pour produire en masse du matériel de destruction massive.

      Pour nous en faire accepter les conséquences (les futures baisses du pouvoir d’achat, les hôpitaux fermés, les écoles surchargées, les enseignants en sous-effectif, les transports dégradés, un budget de l’État écrasé par la dette, etc.), Le Monde lui tend ses colonnes : « Nous sommes entrés dans l’économie de guerre »
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/03/15/emmanuel-chiva-dga-nous-sommes-entres-dans-l-economie-de-guerre_6165595_3210

    • La marche vers un économie de guerre
      https://lutte-ouvriere.be/la-marche-vers-un-economie-de-guerre

      [...] Les USA augmentent fortement leur budget militaire, l’Allemagne débloque 100 milliards pour l’armée, la France annonce plus de 400 milliards de budget pour les prochaines années et en Belgique, 14 milliards de dépenses guerrières supplémentaires sont prévues d’ici 2030.

      Pour faire accepter l’envolée des dépenses militaires, alors que partout les besoins des populations sont criants, les dirigeants des pays capitalistes cherchent à persuader de l’inéluctabilité de la guerre. Ils désignent comme ennemis certains pays, au premier rang desquels la Russie et la Chine, et déploient une propagande insidieuse mais permanente dans les médias autour de thèmes guerriers.

      Les gouvernements mettent aussi l’accent sur la préparation de la jeunesse qu’ils comptent utiliser comme chair à canon. L’Etat belge s’en est chargé en ouvrant cette année, dans 13 écoles de la fédération Wallonie Bruxelles, une option « métiers de la Défense et de la sécurité » dans laquelle des jeunes sont préparés à devenir agent de sécurité, policier ou militaire, à partir de la quatrième secondaire technique !

      Au-delà du conflit ukrainien, la cause profonde de l’envolée des budgets militaires est à chercher dans la crise du système capitaliste mondial qui ne fait que s’aggraver.

    • Vers un doublement du budget militaire / Le Japon tourne la page du pacifisme
      https://www.monde-diplomatique.fr/2023/03/POUILLE/65605

      Ce samedi 27 novembre 2021, le premier ministre japonais Kishida Fumio effectue une visite matinale des troupes de défense terrestre sur la base d’Asaka, au nord de Tokyo. Après un petit tour en char d’assaut, il prononce un discours de rupture : « Désormais, je vais envisager toutes les options, y compris celles de posséder des capacités d’attaque de bases ennemies, de continuer le renforcement de la puissance militaire japonaise. » Selon le chef du gouvernement, « la situation sécuritaire autour du Japon change à une vitesse sans précédent. Des choses qui ne se produisaient que dans des romans de science-fiction sont devenues notre réalité ». Un an plus tard, M. Kishida annonce le doublement des dépenses de #défense et débloque l’équivalent de 315 milliards de dollars sur cinq ans. Le #Japon va ainsi disposer du troisième budget militaire du monde derrière ceux des États-Unis et de la Chine. Il représentera 2 % du produit intérieur brut (PIB), ce qui correspond à l’engagement pris en 2014 par les vingt-huit membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (#OTAN)… dont il ne fait pourtant pas partie.

      Ces décisions — qui s’inscrivent dans le cadre de la nouvelle « stratégie de sécurité nationale » dévoilée en août 2022 — changent profondément les missions des forces d’autodéfense, le nom officiel de l’#armée_nippone. Elles ne s’en tiendront plus, en effet, à défendre le pays mais disposeront des moyens de contre-attaquer. Et même de détruire des bases militaires adverses.

      Cette #militarisation et cette imbrication renforcée avec les États-Unis sonnent, pour la presse chinoise, comme dune dangereuse alerte. Certes, les rapports sino-japonais s’étaient déjà dégradés quand Tokyo avait acheté, le 11 septembre 2012, trois des îles Senkaku/Diaoyu à leur propriétaire privé et que, dans la foulée, Pékin avait multiplié les incursions dans la zone (8). Les visites régulières d’Abe au sanctuaire Yasukuni, qui honore la mémoire des criminels de guerre durant la seconde guerre mondiale, n’avaient rien arrangé.

      Mais le climat s’était plutôt apaisé dans la dernière période. « J’étais parvenu à un consensus important [avec Abe] sur la construction de relations sino-japonaises répondant aux exigences de la nouvelle ère (9) », a même témoigné le président chinois après l’assassinat de l’ex-premier ministre, en juillet 2022. Depuis l’annonce de la nouvelle stratégie de défense, le ton a changé.

      [...] en tournant le dos brutalement à sa politique pacifiste, le Japon se place en première ligne face à Pékin et éloigne tout espoir d’autonomie vis-à-vis des États-Unis. Cette impossible entrée dans l’après-guerre froide cohabite pourtant avec un dynamisme régional haletant où, de Hanoï à Colombo, ce pays vieillissant a construit les leviers de sa future croissance. Il y est en concurrence directe avec la Chine, très présente. Déjà, la plupart des pays asiatiques refusent de choisir entre Pékin et Washington, qui leur promet la sécurité. Et avec Tokyo ?

      (Le Monde diplomatique, mars 2023)

      #budget_militaire

    • Le géant de l’armement Rheinmetall surfe sur la remilitarisation de l’Europe (Les Échos)

      L’entrée au DAX, lundi, du premier producteur de munitions et constructeur de chars en Europe consacre le retour en force des combats conventionnels terrestres. Après une année 2022 record, Rheinmetall s’attend à faire mieux encore en 2023.

      Ce lundi, Armin Papperger, le patron de Rheinmetall, se fera un plaisir de sonner la cloche de la Bourse de Francfort pour marquer l’entrée de son groupe dans le Dax après une année record. Son cours a doublé et sa valorisation avoisine 10,5 milliards d’euros. « Le changement d’ère et la guerre en Europe ont ouvert une nouvelle page pour #Rheinmetall », a-t-il déclaré jeudi, lors de la présentation des résultats du premier producteur de munitions et constructeur de chars en Europe.

      Le retour des combats conventionnels terrestres a dopé le résultat net de ce dernier : il a bondi de 61 %, à 469 millions d’euros pour un chiffre d’affaires record de 6,4 milliards d’euros, en hausse de 13,25 %. Le résultat opérationnel (Ebit hors effets exceptionnels) a, lui, progressé de 27 %, à 754 millions d’euros. Et ce n’est qu’un début : « Je m’attends à ce que l’année 2023 soit de loin la meilleure année de l’histoire de l’entreprise en termes de commandes », a annoncé Armin Papperger.

      Carnet de commandes record

      Il a plusieurs fois loué devant la presse l’efficacité du nouveau ministre de la Défense Boris Pistorius, qui devrait, selon lui, permettre de débloquer enfin les 100 milliards du fonds de modernisation de l’armée allemande. Sur cette enveloppe, le patron de Rheinmetall estime pouvoir capter 38 milliards d’euros d’ici à 2030, dont 20 milliards répartis à parts équivalentes entre les chars et la numérisation des forces terrestres, et 8 milliards pour les munitions. A ces montants s’ajoute la hausse prévisible du budget de la défense allemande : Boris Pistorius a réclamé 10 milliards de plus par an et il faudrait même 10 milliards supplémentaires pour atteindre les 2 % du PIB. Un objectif pour tous les membres de l’Otan qui devrait rapidement devenir un prérequis minimum. Le réarmement généralisé des pays de l’Alliance atlantique ne peut donc que profiter à Rheinmetall. Il vient en outre d’élargir sa palette en s’invitant dans la fabrication du fuselage central du F-35 américain qui devrait lui rapporter plusieurs milliards d’euros. Le groupe, qui affichait déjà l’an dernier un carnet de commandes record de 24 milliards d’euros, estime avoir les capacités pour faire bien davantage.

      600.000 obus

      En Ukraine, Rheinmetall assure ainsi pouvoir livrer un peu moins de la moitié des besoins de la production d’artillerie. Avec l’achat du fabricant espagnol Expal Systems, qui devrait être bouclé dans l’année, la capacité annuelle du groupe passe à environ 450.000 obus, voire 600.000 d’ici à deux ans.

      Rheinmetall est en train d’agrandir une usine en Hongrie et souhaite en ouvrir une de poudre en Saxe avec la participation financière de Berlin. Selon Armin Papperger, l’intégration verticale de l’entreprise, qui produit elle-même ses composants, la met par ailleurs à l’abri d’un chantage éventuel de la Chine sur les matières premières. Quant à la main-d’oeuvre, elle ne manquerait pas : le groupe se dit « inondé de candidatures », il a recruté 3.000 personnes l’an dernier et compte en faire autant cette année. Toutes les planètes sont donc alignées aux yeux de Rheinmetall pour pousser les feux. Le groupe vise un chiffre d’affaires de 7,4 à 7,6 milliards d’euros en 2023, ce qui représenterait une nouvelle hausse de 15,5 % à 18,7 %. Sa marge opérationnelle devrait passer de 11,8 % à 12 % environ.

      #militarisation #militarisme #capitalisme #troisième_guerre_mondiale

    • La guerre en Ukraine accélère la militarisation

      La guerre en Ukraine accélère la militarisation de l’Europe. Tragédie pour les populations ukrainienne et russe qui ont déjà payé cette guerre de 30 000 morts, elle est une aubaine pour les militaires et les marchands d’armes. Première guerre dite «  de haute intensité  » en Europe depuis 1945, sur un front de plus de 1 000 kilomètres, elle permet aux militaires de tester leurs matériels, de valider ou adapter leurs doctrines d’utilisation. Elle offre un marché inespéré pour les marchands d’armes appelés à fournir munitions et missiles, drones ou chars détruits en grande quantité. Elle accélère la hausse des budgets militaires de tous les États.

      Une militarisation engagée avant la guerre en Ukraine

      La hausse des dépenses militaires dans le monde était engagée avant l’invasion russe de l’Ukraine. Selon le dernier rapport du Sipri, l’Institut international pour la paix de Stockholm, publié le 25 avril, les dépenses militaires dans le monde ont dépassé en 2021, pour la première fois, la barre des 2 000 milliards de dollars, avec 2 113 milliards de dollars, soit 2,2 % du PIB mondial. C’est la septième année consécutive de hausse des dépenses militaires dans le monde selon ce rapport, qui précise  : «  Malgré les conséquences économiques de la pandémie de Covid-19, les dépenses militaires mondiales ont atteint des niveaux records.  »

      Si la Russie, présentée comme le seul agresseur et va-t-en-guerre, a augmenté son budget militaire en 2021, qui atteint 66 milliards de dollars et 4 % de son PIB, elle n’arrive qu’en cinquième position dans le classement des puissances les plus dépensières, derrière les États-Unis, la Chine, l’Inde et la Grande-Bretagne.

      En Grande-Bretagne, avec 68,3 milliards de dollars, les dépenses militaires sont en hausse de 11,1 %. Après le Brexit, Boris Johnson a multiplié les investissements, en particulier dans la marine. Peu avant sa démission, il affirmait vouloir restaurer l’impérialisme britannique en tant que «  première puissance navale en Europe  » et marquait à la culotte les autres puissances impérialistes du continent. Il a été l’un des premiers dirigeants européens à se rendre à Kiev pour afficher son soutien à Zelensky. Toute une brochette de politiciens britanniques milite pour que les dépenses militaires augmentent plus vite encore dans les années à venir. Ainsi, Nile Gardiner, ancien collaborateur de Thatcher, affirmait en mars au Daily Express : «  Les dépenses de défense devraient doubler, de deux à quatre pour cent [du PIB] dans les années à venir si la Grande-Bretagne veut sérieusement redevenir une puissance mondiale.  »

      Johnson a renforcé par divers canaux sa coopération militaire avec les États-Unis. Ces liens étroits entre les impérialismes britannique et américain ont été illustrés par l’alliance #Aukus (acronyme anglais pour Australie, Royaume-Uni et États-Unis) contre la Chine. Cette alliance s’est concrétisée par la commande australienne de huit sous-marins à propulsion nucléaire, pour la somme de 128 milliards de dollars. Déjà en hausse de 4 % en 2021 par rapport à 2020, les dépenses militaires de l’Australie sont donc appelées à augmenter. C’est aussi la politique occidentale agressive vis-à-vis de la Chine, et les pressions américaines, qui ont poussé le Japon à dépenser 7 milliards de dollars de plus en 2021 pour ses armées, la plus forte hausse depuis 1972.

      Selon le rapport du #Sipri, dès 2021, donc avant la guerre en Ukraine, huit pays européens membres de l’#Otan avaient porté leurs dépenses militaires à 2 % de leur PIB, ce que réclament depuis longtemps les États-Unis à leurs alliés. Avec 56,6 milliards de dollars (51 milliards d’euros) dépensés en 2021, la France est passée de la huitième à la ­sixième place des États pour leurs dépenses en armement. La loi de programmation militaire 2019-2025 avait déjà prévu un budget de 295 milliards d’euros sur six ans, pour arriver à plus de 2,5 % du PIB en 2025.

      La guerre en Ukraine a donc éclaté dans ce contexte d’augmentation générale des dépenses d’armement, qu’elle ne peut qu’accélérer et renforcer.

      Les leçons de la guerre en Ukraine

      Pour les états-majors et les experts, la #guerre_en_Ukraine n’est pas une tragédie mais d’abord un formidable terrain d’expérimentation des matériels de guerre et des conditions de leur mise en œuvre. Chaque épisode – offensive contrariée des armées russes au début de la #guerre, retrait du nord de l’#Ukraine puis offensive dans le #Donbass, destruction méthodique des villes – et les diverses façons d’utiliser l’artillerie, les drones, l’aviation, les moyens de communication et de renseignement sont étudiés pour en tirer le maximum de leçons. Depuis six mois, des milliers d’experts et d’ingénieurs chez #Thales, #Dassault, #Nexter, MBDA (ex-Matra), #Naval_Group ou chez leurs concurrents américains #Lockheed_Martin, #Boeing ou #Northrop_Grumman, étudient en détail comment cette guerre met en lumière «  la #numérisation du champ de bataille, les besoins de munitions guidées, le rôle crucial du secteur spatial, le recours accru aux drones, robotisation, cybersécurité, etc.  » (Les Échos du 13 juin 2022). Ces experts ont confronté leurs points de vue et leurs solutions technologiques à l’occasion de l’immense salon de l’#armement et de la sécurité qui a réuni, début juin à Satory en région parisienne, 1 500 #marchands_d’armes venus du monde entier. Un record historique, paraît-il  !

      Les leçons de la guerre en Ukraine ne sont pas seulement technologiques. Comme l’écrivait le journal Les Échos du 1er avril 2022, «  la guerre entre grands États est de retour en Europe. » Cette guerre n’a plus rien à voir avec «  les “petites guerres” comme celles de Bosnie ou du Kosovo, ni les opérations extérieures contre des groupes terroristes (Al Qaida, Daech) ou des États effondrés (Libye, 2011)  ». Pour les militaires, cette guerre n’est plus «  une guerre échantillonnaire mais une guerre de masse  », tant du point de vue du nombre de soldats tués ou blessés au combat que du nombre de munitions tirées et du matériel détruit.

      Entre février et juin, selon les estimations réalisées malgré la censure et les mensonges de chaque camp, cette guerre aurait fait 30 000 morts russes et ukrainiens, plusieurs centaines par jour. L’Ukraine rappelle que la guerre est une boucherie, que les combats exigent sans cesse leur chair à canon, avec des soldats qui pourrissent et meurent dans des tranchées, brûlent dans des chars ou sont tués ou estropiés par des obus et des missiles. Leur guerre «  de haute intensité  », c’est avant tout des morts, parmi les militaires comme les civils. Préparer les esprits à accepter de «  mourir pour nos valeurs démocratiques  », autre déclinaison du «  mourir pour la patrie  », est l’un des objectifs de la #propagande des gouvernements occidentaux qui mettent en scène la guerre en Ukraine.

      Côté matériel, les armées russes ont perdu plusieurs centaines de chars. Les États-Unis et leurs alliés ont livré plusieurs dizaines de milliers de missiles sol-sol ou sol-air de type Javelin ou Stinger, à 75 000 dollars pièce. Une semaine après le début de l’invasion russe, le colonel en retraite Michel Goya, auteur d’ouvrages sur les guerres contemporaines, écrivait  : «  L’#armée_de_terre française n’aurait plus aucun équipement majeur au bout de quarante jours  » (véhicules de combat, pièces d’artillerie…). La conclusion de tous ces gens-là est évidente, unanime  : il faut «  des forces plus nombreuses, plus lourdement équipées [qui] exigeront des budgets de défense accrus  » (Les Échos, 1er avril 2022). Augmenter les budgets militaires, drainer toujours plus d’argent public vers l’industrie militaire ou sécuritaire, c’est à quoi s’emploient les ministres et les parlementaires, de tous les partis, depuis des années.

      Des complexes militaro-industriels concurrents

      La guerre en Ukraine, avec l’augmentation spectaculaire des #budgets_militaires qu’elle accélère, est une aubaine pour les marchands d’armes. Mais elle intensifie en même temps la guerre que se livrent ces industriels. L’annonce par le chancelier allemand, fin février, d’un emprunt de 100 milliards d’euros pour remettre à niveau la #Bundeswehr, autrement dit pour réarmer l’Allemagne, a déclenché des polémiques dans l’#Union_européenne. Le journal Les Échos du 30 mai constatait avec dépit  : «  L’#armée_allemande a annoncé une liste de courses longue comme le bras, qui bénéficiera essentiellement aux industries américaines  : achat de #F-35 à Lockheed Martin, d’hélicoptères #Chinook à Boeing, d’avions P8 à Boeing, de boucliers antimissiles à Israël, etc.  » Au grand dam des militaristes tricolores ou europhiles, le complexe militaro-industriel américain profitera bien davantage des commandes allemandes que les divers marchands de mort européens.

      Il en est ainsi depuis la naissance de l’Union européenne  : il n’y a pas une «  #défense_européenne  » commune car il n’y a pas un #impérialisme européen unique, avec un appareil d’État unique défendant les intérêts fondamentaux d’une #grande_bourgeoisie européenne. Il y a des impérialismes européens concurrents, représentant des capitalistes nationaux, aux intérêts économiques complexes, parfois communs, souvent opposés. L’#impérialisme_britannique est plus atlantiste que les autres puissances européennes et très tourné vers son vaste ex-­empire colonial. L’#impérialisme_français a développé ses armées et sa marine pour assurer sa mainmise sur son pré carré ex-colonial, en particulier en Afrique. L’impérialisme allemand, qui s’est retranché pendant des décennies derrière la contrition à l’égard des années hitlériennes pour limiter ses dépenses militaires, en se plaçant sous l’égide de l’Otan et des #États-Unis, a pu consacrer les sommes économisées à son développement économique en Europe centrale et orientale. Les interventions militaires ou diplomatiques n’étant que la continuation des tractations et des rivalités commerciales et économiques, il n’a jamais pu y avoir de défense européenne commune.

      Les rivalités permanentes entre Dassault, Airbus, #BAE, #Safran ont empêché la construction d’un avion de combat européen. La prépondérance des États-Unis dans l’Otan et leur rôle majeur en Europe de l’Est et dans la guerre en Ukraine renforcent encore les chances du #secteur_militaro-industriel américain d’emporter les futurs marchés. Ces industriels américains vendent 54 % du matériel militaire dans le monde et réalisent 29 % des exportations. L’aubaine constituée par les futures dépenses va aiguiser les appétits et les rivalités.

      Bien sûr, les diverses instances européennes s’agitent pour essayer de ne pas céder tout le terrain aux Américains. Ainsi, le commissaire européen au Commerce et ex-ministre français de l’Économie, Thierry Breton, vient de débloquer 6 milliards d’euros pour accélérer le lancement de 250 satellites de communication de basse orbite, indispensables pour disposer d’un réseau de communication et de renseignement européen. Jusqu’à présent, les diverses armées européennes sont dépendantes des États-Unis pour leurs renseignements militaires, y compris sur le sol européen.

      À ce jour, chaque pays européen envoie en Ukraine ses propres armes, plus ou moins compatibles entre elles, selon son propre calendrier et sa volonté politique. Les champs de bataille du Donbass servent de terrain de démonstration pour les canons automoteurs français Caesar, dont les journaux télévisés vantent régulièrement les mérites, et les #chars allemands Gepard, anciens, ou Leopard, plus récents. La seule intervention commune de l’Union européenne a été le déblocage d’une enveloppe de financement des livraisons d’armes à l’Ukraine, d’un montant de 5,6 milliards sur six ans, dans laquelle chaque État membre peut puiser. C’est une façon de faciliter l’envoi d’armes en Ukraine aux pays de l’UE les moins riches. Avec l’hypocrisie commune aux fauteurs de guerre, les dirigeants de l’UE ont appelé cette enveloppe «  la facilité européenne pour la paix  »  !

      Vers une économie de guerre  ?

      Pour passer d’une «  guerre échantillonnaire  » à une «  guerre de masse  », la production d’armes doit changer d’échelle. Pour ne parler que d’eux, les fameux canons Caesar de 155 millimètres sont produits en nombre réduit, une grosse dizaine par an, dans les usines #Nexter de Bourges, pour la somme de 5 millions d’euros l’unité. Pour en livrer une douzaine à l’Ukraine, le gouvernement a dû les prélever sur la dotation de l’armée française, qui n’en a plus que 64 en service. Juste avant le début de la guerre en Ukraine, Hervé Grandjean, le porte-parole des armées, rappelait les objectifs de l’armée française pour 2025  : «  200 chars Leclerc, dont 80 rénovés, 135 #blindés_Jaguar, 3 300 #blindés_légers, 147 hélicoptères de reconnaissance et d’attaque dont 67 Tigre, 115 #hélicoptères de manœuvre, 109 #canons de 155 et 20 drones tactiques notamment  ». En comparaison, et même si les chars des différentes armées n’ont ni les mêmes caractéristiques ni la même valeur, en trois mois de guerre en Ukraine, plus de 600 chars russes ont été détruits ou mis hors service.

      La guerre en Ukraine devrait donc permettre aux militaires d’obtenir davantage de coûteux joujoux. Ils ont reçu le soutien inconditionnel du président de la Cour des comptes, l’ex-socialiste Pierre Moscovici, pour qui «  l’aptitude des armées à conduire dans la durée un combat de haute intensité n’est pas encore restaurée  ». Et dans son discours du 14 juillet, Macron a confirmé une rallonge de 3 milliards d’euros par an pour le budget de l’armée. Mais pour rééquiper en masse les armées européennes, il faut que les capacités de production suivent. Le 13 juin, Le Monde titrait  : «  Le ministère de la Défense réfléchit à réquisitionner du matériel du secteur civil pour refaire ses stocks d’armes  », et précisait  : «  L’État pourrait demander à une PME de mécanique de précision qui ne travaille pas pour le secteur de la défense de se mettre à disposition d’un industriel de l’armement pour accélérer ses cadences.  » Et comme toujours, l’État s’apprête à prendre en charge lui-même «  les capacités de production de certaines PME de la défense, en payant par exemple des machines-outils  ». Les capitalistes n’étant jamais si bien servis que par eux-mêmes, le chef de l’UIMM, le syndicat des patrons de la métallurgie, est désormais #Éric_Trappier, le PDG de Dassault.

      Produire plus massivement du matériel militaire coûtera des dizaines, et même des centaines, de milliards d’euros par an. Il ne suffira pas de réduire encore plus les budgets de la santé ou de l’école. Les sommes engagées seront d’un tout autre niveau. Pour y faire face, les États devront s’endetter à une échelle supérieure. Les gouvernements européens n’ont peut-être pas encore explicitement décidé un tel tournant vers la production en masse de ce matériel militaire, mais les plus lucides de leurs intellectuels s’y préparent. L’économiste et banquier Patrick Artus envisageait dans Les Échos du 8 avril le passage à une telle «  #économie_de_guerre  ». Pour lui, cela aurait trois conséquences  : une hausse des #dépenses_publiques financées par le déficit du budget de l’État avec le soutien des #banques_centrales  ; une forte inflation à cause de la forte demande en énergie et en métaux parce que les #dépenses_militaires et d’infrastructures augmentent  ; enfin la rupture des interdépendances entre les économies des différents pays à cause des ruptures dans les voies d’approvisionnement.

      Avant même que les économies européennes ne soient devenues «  des économies de guerre  », les dépenses publiques au service des capitalistes ne cessent d’augmenter, l’inflation revient en force, aggravée par la spéculation sur les pénuries ou les difficultés d’approvisionnement de telle ou telle matière première. L’#économie_capitaliste est dans une impasse. Elle est incapable de surmonter les contradictions qui la tenaillent, et se heurte une fois de plus aux limites du marché solvable et à la concurrence entre capitalistes, qui engendrent les rivalités entre les puissances impérialistes  ; à la destruction des ressources  ; et à son incapacité génétique d’en planifier l’utilisation rationnelle au service de l’humanité. La course au militarisme est inexorable, car elle est la seule réponse à cette impasse qui soit envisageable par la grande bourgeoisie. Cela ne dépend absolument pas de la couleur politique de ceux qui dirigent les gouvernements. Le militarisme est inscrit dans les gènes du capitalisme.

      Le #militarisme, une fuite en avant inexorable

      Il y a plus d’un siècle, #Rosa_Luxemburg notait que le militarisme avait accompagné toutes les phases d’accumulation du #capitalisme  : «  Il est pour le capital un moyen privilégié de réaliser la plus-value.  » Dans toutes les périodes de crise, quand la rivalité entre groupes de capitalistes pour s’approprier marchés et matières premières se tend, quand le marché solvable se rétrécit, le militarisme a toujours représenté un «  champ d’accumulation  » idéal pour les capitalistes. C’est un marché régulier, quasi illimité et protégé  : «  L’#industrie_des_armements est douée d’une capacité d’expansion illimitée, […] d’une régularité presque automatique, d’une croissance rythmique  » (L’accumulation du capital, 1913). Pour la société dans son ensemble, le militarisme est un immense gâchis de force de travail et de ressources, et une fuite en avant vers la guerre généralisée.

      Pour les travailleurs, le militarisme est d’abord un vol à grande échelle des fruits de leur travail. La production en masse de matériel de destruction massive, ce sont des impôts de plus en plus écrasants pour les classes populaires qui vont réduire leur pouvoir d’achat, ce sont des hôpitaux fermés, des écoles surchargées, des enseignants en sous-effectif, des transports dégradés, c’est un budget de l’État écrasé par la charge de la dette. Pour la #jeunesse, le militarisme, c’est le retour au service militaire, volontaire ou forcé, c’est l’embrigadement derrière le nationalisme, l’utilisation de la guerre en Ukraine pour redonner «  le sens du tragique et de l’histoire  », selon la formule du chef d’état-major des armées, Thierry Burkhard.

      L’évolution ultime du militarisme, c’est la #guerre_généralisée avec la #mobilisation_générale de millions de combattants, la militarisation de la production, la #destruction méthodique de pays entiers, de villes, d’infrastructures, de forces productives immenses, de vies humaines innombrables. La guerre en Ukraine, après celles en Irak, en Syrie, au Yémen et ailleurs, donne un petit aperçu de cette barbarie. La seule voie pour éviter une barbarie plus grande encore, qui frapperait l’ensemble des pays de la planète, c’est d’arracher aux capitalistes la direction de la société.

      Un an avant l’éclatement de la Première Guerre mondiale, #Rosa_Luxemburg concluait son chapitre sur le militarisme par la phrase  : «  À un certain degré de développement, la contradiction [du capitalisme] ne peut être résolue que par l’application des principes du socialisme, c’est-à-dire par une forme économique qui est par définition une forme mondiale, un système harmonieux en lui-même, fondé non sur l’accumulation mais sur la satisfaction des besoins de l’humanité travailleuse et donc sur l’épanouissement de toutes les forces productives de la terre.  » Ni Rosa Luxemburg, ni #Lénine, ni aucun des dirigeants de la Deuxième Internationale restés marxistes, c’est-à-dire communistes, révolutionnaires et internationalistes, n’ont pu empêcher l’éclatement de la guerre mondiale et la transformation de l’Europe en un gigantesque champ de bataille sanglant. Mais cette guerre a engendré la plus grande vague révolutionnaire de l’histoire au cours de laquelle les soldats, ouvriers et paysans insurgés ont mis un terme à la guerre et menacé sérieusement la domination du capital sur la société. L’issue est de ce côté-là.

    • France. Militaires et industriels doutent d’être suffisamment gavés

      Les « promesses déjà annoncées : une hausse de 5 milliards d’euros pour combler le retard dans les drones, un bond de 60 % des budgets des trois agences de renseignement, une relance des commandes dans la défense sol-air , la reconstitution des stocks de munitions. Il a aussi promis plus de navires et de satellites pour l’Outre-Mer, des avancées dans la cyberdéfense, le spatial, la surveillance des fonds marins, le doublement du budget des forces spéciales, et enfin une progression de 40 % des budgets pour la maintenance des équipements, afin d’en accroître les taux de disponibilité.

      Ajouter à cette liste un doublement de la réserve, une participation potentiellement accrue au service national universel, la promesse de dégager 10 milliards pour l’innovation... « Toutes les lignes budgétaires vont augmenter, sauf la provision pour les opérations extérieures », a déclaré le ministre. Selon lui, les dépenses pour aider l’armée ukrainienne ne seront pas imputées sur le budget des armées. Ce dont beaucoup de militaires doutent. Un partage des frais entre ministères est plus probable.

      (Les Échos)

    • Pour eux, la guerre n’est pas une tragédie, mais une aubaine.

      Entre 2018 et 2022, la France a vu sa part dans les ventes mondiales d’armes passer de 7 à 11 %.

      Actuellement 3e sur le marché de l’armement, elle se rapproche de la 2e place. Un record qui contribue à la surenchère guerrière, en Ukraine et ailleurs, et qui alimente les profits des marchands d’armes.

    • La nouvelle #loi_de_programmation_militaire a été présentée en Conseil des ministres ce mardi 4 avril. Un budget de la défense en hausse de 40 % par rapport à la #LPM 2019-2025. Un montant historique

      D’autant que la LPM 2024-2030 n’inclura pas le montant de l’aide militaire à l’#Ukraine

      La politique de l’actuel président de la République contraste avec celle de ses prédécesseurs. Comme beaucoup de ses voisins, la France a vu ses dépenses de défense diminuer depuis la fin de la #guerre_froide

      Réarmement spectaculaire de la #Pologne par le biais de la Corée du Sud

      « Ce pays est en première ligne et sera potentiellement une grande puissance militaire en 2030 », a affirmé Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique lors de son audition au Sénat. Le 30 janvier dernier, le Premier ministre polonais a ainsi annoncé que le budget de la défense atteindrait 4 % du PIB en 2023.

      #militarisation #budget_de_la_défense

    • On ne prépare une guerre qu’à la condition de pouvoir la gagner. Et en l’état, les occidentaux commencent tout juste à comprendre que ce qu’ils pensaient assuré (première frappe nucléaire et bouclier ABM) de la part des américains, n’est finalement pas du tout si assuré que cela et que même, ma foi, la guerre est peut-être déjà perdue.

    • En l’état, ce n’est pas la guerre. Mais, oui, ils s’y préparent.

      Et cette nouvelle guerre mondiale ne sera pas déclenchée nécessairement quand ils seront certains de « pouvoir la gagner ».

    • L’Union européenne et ses obus : un petit pas de plus vers une économie de guerre
      https://journal.lutte-ouvriere.org/2023/05/10/lunion-europeenne-et-ses-obus-un-petit-pas-de-plus-vers-une-

      Mercredi 3 mai, le commissaire européen Thierry Breton a présenté son plan pour produire un million de munitions lourdes par an. Les industries d’armement européennes ne sont plus adaptées au rythme de production nécessaire pour des guerres de « haute intensité », ou même simplement telle que celle en Ukraine.

      Alors que l’armée ukrainienne tire 5 000 obus d’artillerie par jour de combat, la production annuelle du fabricant français Nexter ne permettrait de tenir ce rythme... que huit jours. Thierry Breton a annoncé une enveloppe de 500 millions d’euros pour stimuler dans ce sens les industriels de l’Union européenne. Elle fait partie d’un plan de deux milliards d’euros annoncé fin mars pour fournir des obus à l’armée de Kiev, sous prétexte « d’aider » l’Ukraine. Il s’agit d’abord de puiser dans les stocks nationaux, puis de passer des commandes, et enfin de remplir les caisses des industriels pour qu’ils produisent plus vite.

      Les sommes déployées par l’UE sont très marginales par rapport aux dépenses faites par chaque puissance impérialiste pour financer son propre armement et enrichir ses capitalistes de l’armement. Ainsi, la programmation militaire française a augmenté de 100 milliards d’euros, tandis que le gouvernement allemand promet, lui, 100 milliards pour moderniser son armée.

      L’annonce européenne vise sans doute surtout à afficher à l’échelle du continent, donc aux yeux d’un demi-milliard d’Européens, que l’on va vers une économie de guerre et qu’il faut s’y adapter dès maintenant. Dans ce qu’a déclaré Thierry Breton, il y a aussi l’idée de s’attaquer à tous les goulots d’étranglement qui bloquent cette marche vers une économie de guerre. Il prévoit des dérogations aux règles européennes, déjà peu contraignantes, sur le temps de travail, c’est-à-dire de donner carte blanche aux patrons pour allonger la journée de travail dans les usines concernées. Le flot d’argent public dépensé en armement, que ce soit au niveau des États ou de l’Union européenne, sera pris sur la population d’une façon ou une autre. Chaque milliard en plus pour les obus signifiera un hôpital en moins demain.

  • Pour grignoter 15 petits milliards par an, au lieu de saccager les retraites en faisant la poche des travailleurs, il suffit de prendre l’argent là où il est.

    Une piste, soufflée par Les Échos :

    Pourquoi tous les milliards [des #compagnies_pétrolières — plus de 200 milliards d’euros pour les majors occidentales l’an dernier] ne vont-ils pas où ils devraient aller ?

    Pour le moment, ces parasites multimilliardaires, ne sachant que faire de leur cagnotte amassé sur le dos des travailleurs, ils ne font pas seulement qu’ordonner à leur majordome Macron le pilonnage des retraites pour financer de nouvelles pluies de milliards à leur profit… ils s’occupent tranquillou de racheter leurs propres actions :

    Les #entreprises européennes ont quasi doublé les montants consacrés à l’acquisition de leurs propres titres l’an dernier, à 161 milliards d’euros. En France aussi, les sociétés du #SBF 120 ont signé une année exceptionnelle, avec plus de 27 milliards d’euros de #rachats_d'actions.

    (Les Échos)

    #réforme_des_retraites #bourgeoisie #parasitisme #super-profits #capitalisme #financement_des_retraites #profits #investissements

  • Comment BlackRock prépare l’avenir de l’Ukraine
    https://lvsl.fr/comment-blackrock-prepare-lavenir-de-lukraine

    Les opportunités que présente l’Ukraine ne sont pas passées inaperçues. De #BlackRock (à qui Volodymyr #Zelensky a officiellement souhaité la bienvenue) aux fonds européens, le pays est scruté par les géants de la finance. Et par les organisations internationales, qui comptent bien lui imposer un climat favorable aux #investissements. Au menu : #dérégulation, #privatisations et « fiscalité efficiente ». Il faut dire que le gouvernement ukrainien n’a pas attendu la fin de la guerre pour mettre en place ces #réformes. […]

    #prédation #capitalisme #ukraine

  • Le capitalisme : un système économique à l’agonie, un ordre social à renverser

    Cercle Léon Trotsky n°159 (22 février 2019)

    Le texte : https://www.lutte-ouvriere.org/publications/brochures/le-capitalisme-un-systeme-economique-lagonie-un-ordre-social-renvers

    Sommaire :

    La dynamique du capitalisme… et ses contradictions
    – Le travail humain, source de la valeur ajoutée
    – Le secret du #capital
    – La #reproduction_du_capital et ses #contradictions
    – La baisse du #taux_de_profit
    – Le capital, un produit collectif
    – La révolution sociale, une nécessité
    – L’#accumulation_du_capital… et de ses contradictions
    – Sans révolution sociale, la putréfaction continue

    Le #capitalisme aujourd’hui
    – Une courte phase de reconstitution des forces productives
    – Un #taux_de_profit restauré au détriment des travailleurs
    – La financiarisation de l’économie
    – La politique des banques centrales
    – L’#endettement général de la société… et ses conséquences
    – La #finance draine la plus-value créée dans la production
    – La flambée de la bourse et les #Gafam
    – La faiblesse des #investissements productifs
    – Baisse de la #productivité du travail
    – L’#intelligence_artificielle (#IA) et la fin du travail ?
    – La #Chine, moteur de la croissance mondiale ?
    – L’#informatique, nouvelle révolution industrielle ?

    La #révolution_sociale, seule voie pour sortir de l’impasse
    – Les forces productives sont plus que mûres pour le #socialisme
    – Réimplanter une #conscience_de_classe, reconstruire des partis révolutionnaires

    #lutte_de_classe #parti_ouvrier #parti_révolutionnaire #communisme #classe_ouvrière

  • Emmanuel Macron annonce une enveloppe de 413 milliards d’euros pour le financement des armées dans les sept années à venir
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/20/emmanuel-macron-annonce-une-enveloppe-de-413-milliards-d-euros-pour-le-finan

    Emmanuel Macron annonce une enveloppe de 413 milliards d’euros pour le financement des armées dans les sept années à venir

    Le chef de l’Etat a dévoilé vendredi les grandes orientations de la future loi de programmation militaire 2024-2030, placée sous le signe de la « transformation des armées » sur fond de retour de la guerre en Europe.

    L’effort budgétaire consenti est d’ampleur, même s’il risque d’être amputé par l’inflation et l’explosion des coûts de l’énergie. Emmanuel Macron a dévoilé, vendredi 20 janvier, les grandes orientations de la future loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030, alors que la guerre en Ukraine a mis en lumière des faiblesses dans le dispositif militaire français.

    Depuis la base aérienne de Mont-de-Marsan (Landes), le président de la République a notamment annoncé « un effort budgétaire de 400 milliards d’euros, qui permettra de couvrir un total de 413 milliards d’euros de besoins militaires » dans les sept années à venir.

    La prochaine loi de programmation militaire, qui sera présentée au Parlement en mars, promet donc de poursuivre l’effort financier en matière de défense après une LPM 2019-2025 de 295 milliards d’euros, qui avait mis fin à des années de coupes budgétaires dans les armées.

    Ces « efforts seront à proportion des dangers, c’est-à-dire considérables. [...] Nous devons avoir une guerre d’avance », a affirmé Emmanuel Macron, actant la fin des « dividendes de la paix » face à l’émergence de « nouveaux conflits » qui menacent partout dans le monde.

    Le budget alloué au renseignement militaire augmentera ainsi de près de 60 % sur la période 2024-2030, a également annoncé le chef de l’Etat, citant doublement du budget de la Direction du renseignement militaire (DRM) et de la Direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD).

    « On passe d’une logique de réparation à une logique de transformation des armées. On doit pouvoir être plus efficace et performant », soulignait l’Elysée avant ces annonces, alors que la guerre en Ukraine a poussé les Européens les plus rétifs à consacrer plus d’argent à leur défense. L’Allemagne a débloqué l’an dernier 100 milliards d’euros pour moderniser ses armées.

    Le Monde avec AFP

    Eh ben voilà, on indique clairement quelles sont les priorités en matière d’investissement et d’utilisation des ressources.

    #militarisation #armement #investissements_publics

    • Oui, c’est vraiment un principe central de cet illibéralisme totalement assumé : c’est pas juste qu’il faut prendre des décisions dégueulasses (ici annoncer une « enveloppe » monstrueuse pour les bidasses en même temps que la « réforme » des retraites), il faut le faire ostensiblement pour bien montrer que c’est pas la peine de donner ton avis.

    • Sébastien Lecornu : « La loi de programmation militaire permet à la France de rester une puissance mondiale »
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/20/sebastien-lecornu-la-loi-de-programmation-militaire-permet-a-la-france-de-re

      La France consacrera 413 milliards d’euros à ses armées entre 2024 et 2030, a annoncé Emmanuel Macron lors d’un déplacement, vendredi 20 janvier, sur la base aérienne de Mont-de-Marsan (Landes). Le ministre des armées, Sébastien Lecornu, détaille les priorités et les enjeux de cette nouvelle loi de programmation militaire (LPM), inédite par son ampleur.

      A quelle ambition correspond cette enveloppe de 413 milliards d’euros sur sept ans ?

      C’est une somme historique. Si l’on devait trouver une comparaison sur cet effort politique, budgétaire, militaire, technologique, il faudrait remonter aux gaullistes dans les années 1960, lorsqu’ils ont transformé notre modèle d’armée et se sont lancés seuls dans la course à l’atome pour faire de la France une puissance dotée. Cette loi a deux objectifs : nous protéger, y compris face aux menaces nouvelles, et nous projeter à l’extérieur, avec nos alliés, pour défendre, le cas échéant, notre sécurité et nos valeurs. Ce budget permet à la France de rester une puissance mondiale. Sans ce choix, nous serions relégués.

      Comment a été prise en compte l’explosion des facteurs, tels que le coût des matières premières et de l’énergie, dont beaucoup d’états-majors redoutent les effets ?

      C’est évidemment intégré. Le débat n’est pas là. Nous parlons désormais d’un doublement du budget annuel des armées entre 2017 – 32,7 milliards sur l’année – et 2030 ! Ces 413 milliards d’euros, c’est plus qu’une enveloppe budgétaire. C’est un effort demandé à la nation, au service d’une stratégie pour garantir la protection du pays.

      Cette enveloppe permettra-t-elle de répondre à toutes les demandes des armées ou devront-elles renoncer à certaines choses ?

      Avec 413 milliards d’euros, on peut difficilement parler de renoncement. En revanche, il faut faire des paris. N’espérons pas gagner une bataille en 2030 avec les équipements de 2020 : les sauts technologiques sont de plus en plus rapides. Ne faisons pas comme ceux qui s’accrochaient à leurs chevaux en repoussant les programmes de chars mécanisés… Il faut être agile.

      Le président utilise le terme de « transformation » pour caractériser cette nouvelle LPM, après que la précédente (2019-2023) a été qualifiée de « réparation ». Que voulez-vous transformer ?

      L’armée française a longtemps été abîmée, avec des ponctions brutales de budget. Notre appareil militaire a pu fonctionner au ralenti en matière d’entraînement, en matière de stocks, ou même parfois évoluer dans un environnement dégradé. Maintenant, il ne s’agit plus tant de réparer, même si cela va se poursuivre, notamment en matière d’infrastructures ou de soutien aux forces. L’évolution du monde nous impose d’adapter pragmatiquement notre modèle de défense : « Dis-moi tes dangers, je te donnerai ton armée. »

    • Vœux aux armées du Président Emmanuel Macron.

      Mesdames les Ministres,

      Monsieur le Président de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat,

      Madame la Présidente de la Commission de la Défense nationale et des Forces armées de l’Assemblée nationale,

      Madame la Présidente au Parlement européen, où j’étais ce matin,

      Mesdames et messieurs les Sénateurs,

      Mesdames et messieurs les députés,

      Mesdames les députés européennes,

      Madame la préfète,

      Monsieur le Président du conseil régional,

      Monsieur le Président de la Collectivité européenne d’Alsace,

      Mesdames et messieurs les maires,

      Mesdames et messieurs les élus,

      Monsieur le chef d’Etat-major des armées,

      Monsieur le délégué général pour l’armement,

      Madame la secrétaire générale pour l’administration,

      Monsieur le directeur général de la Gendarmerie nationale,

      Messieurs les chefs d’Etat-major,

      Mesdames et Messieurs les officiers généraux, officiers, sous-officiers, officiers mariniers, soldats, marins, aviateurs et personnels civils des armées,

      Mesdames et messieurs,

      [...]
      Vive la République et vive la France !

  • Visualizing Turkey’s Activism in Africa

    As Turkey gradually expands its influence at the regional and global level, Africa has become a major area of focus for Ankara. Africa’s global significance is rising due to vast untapped resources, growing demographics, rapid urbanisation and the accompanying growth of the middle class. Thus, Africa is not only rich in terms of raw materials but it also represents an increasingly growing market. This led to the “new scramble for Africa” where all established and rising powers are vying for increased influence.

    Turkish intention of reaching out to Africa was first declared by the then Ministry of Foreign Affairs through the publication of the Africa Action Plan in 1998. However, prior to 2005, which was declared the “Year of Africa”, Turkey’s relations with Africa was confined mostly to the states of North Africa, with whom Turkey shares a common history and religion. Today, Africa is one of the regions in which Turkey’s new foreign policy activism is most visible. Turkish-Africa relations are now institutionalised through the establishment of periodical Turkey-Africa summits. The growing importance given to Africa reflects the Turkish desire to diversify economic and military relations. It is also part of Turkey’s efforts to present itself as a regional and global actor. Expansion to Africa is one of the few topics that the Justice and Development Party (Adalet ve Kalkinma Partisi, AKP) government has consistently pursued, since coming to power in 2002. Moreover, since this policy is largely considered a success story, it will likely be appropriated by other political parties, if and when there is a change of government in Turkey.

    This visual platform aims to provide an overview of Turkey’s increased foreign policy activism in Africa. It is mainly based on primary data sources. These sources are listed in detail underneath the visuals. Additionally, the parts on diplomatic activism, economy, and Turkey’s soft power tools draw upon the growing and highly valuable literature on Turkey’s engagement in Africa, such as Tepeciklioğlu (2020), García (2020), Donelli (2021), and Orakçi (2022).

    Turkish policy in Africa is comprehensive and encompasses diplomatic channels, airline connectivity, economic cooperation, trade, investments, development and humanitarian aid, the provision of health services and education, cultural cooperation, as well as religious and civil society activism. Particularly, on the rhetorical level, Turkey distinguishes itself from traditional Western actors, especially former colonial powers by emphasizing cultural and humanitarian proximities and activities.

    In recent years, Turkey has integrated a military and security component into its economic, political, and cultural relations with African states. And while Ankara’s increased military and security interaction with African states has raised serious concerns in the West, Turkey has only a limited capacity to project military power in distant regions. But Turkey seeks to expand its economic engagement and actively cultivate its diplomatic relations with the continent.

    Overall, across the entire continent, Turkey has limited capabilities compared to more traditional powers such as the US, France, Great Britain, and the EU and rising powers such as China and Russia. However, it is creating pockets of influence where it challenges these actors and makes use of its cultural and diplomatic strength. Furthermore, Turkey itself is a rising actor. Its influence in economic, diplomatic and military realms is growing much more rapidly than that of traditional powers, leading to the projection that Turkey will become an even more important actor in Africa. The EU needs to recognise the growing footprint of Turkey and look for opportunities for cooperation rather than solely focusing on competition.


    https://www.cats-network.eu/topics/visualizing-turkeys-activism-in-africa
    #Turquafrique (?) #Turquie #Afrique #influence #coopération #coopération_militaire #défense #sécurité #armes #commerce_d'armes #armement #diplomatie #activisme_diplomatique #commerce #investissements #cartographie #visualisation #soft_power #coopération_au_développement #aide_au_développement #aide_humanitaire #culture #religion #Diyanet #islam #Maarif #Yunus_Emre_Institute

  • Les retraité.e.s canadien.e.s principaux actionnaires d’orpéa + Un récapitulatif depuis 2015 Ne dites pas que personne n’était au courant !

    C’est en 2013 que l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada OIRPC, une société de la Couronne qui place de l’argent de la caisse du Régime de pensions du Canada pour obtenir “le meilleur rendement possible ”, est devenu l’actionnaire principal du groupe Orpéa, à hauteur de 15 %.

    L’investissement initial de l’Office dans Orpéa était de 320 millions d’euros (plus de 450 millions de dollars actuels). Mais depuis la sortie de l’enquête journalistique qui cible Orpéa, son placement a perdu plus de 600 millions de dollars canadiens en une semaine.

    Malgré les pertes importantes encaissées suite aux révélations, l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada OIRPC, opéré par Investissements RPC (Régime de pensions du Canada), ne souhaite pas pour l’instant réagir publiquement.

    Dans la charte d’Investissements Régime de pensions du Canada RPC, il est inscrit : “Nous respectons en tout temps, et même dépassons, les normes éthiques rigoureuses que les 20 millions de cotisants et bénéficiaires du RPC et le RPC lui-même attendent de notre organisme. ”

    En septembre dernier, Investissements Régime de pensions du Canada RPC gérait plus de 540 milliards d’actifs et enregistrait un rendement net annualisé sur 10 ans de plus de 11 %.
    Comme le fonds contribue à pérenniser les pensions des Canadiens par ses placements, il dit rendre “des comptes au Parlement et aux ministres de finances fédéraux et provinciaux, qui sont les gérants du Régime des Pensions du Canada ”.

    Source : https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1858352/orpea-scandale-france-bourse-office-investissement-regime-pension-c

    Sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Orpea# : Actionnariat et expansion

    En 2006, la famille #Peugeot devient actionnaire d’Orpea, dont les marges de rentabilité sont jugées excellentes.

    En 2015, Orpea acquiert #Senecura en #Autriche qui a développé, dans une vingtaine de ses établissements, des synergies avec des écoles maternelles et des salons de coiffure qui lui versent un loyer. Ce modèle est ensuite développé en Suisse et en #Allemagne.

    En 2017, Orpea acquiert le groupe #Anavita en #tchéquie spécialisé dans les maisons de retraite médicalisées. Orpea poursuit son internationalisation avec la création de 1 000 lits au #Portugal et 2 000 lits au #Brésil en partenariat avec le groupe SIS.

    En 2018, le groupe acquiert quatre sociétés aux #Pays-Bas.

    En 2019, Orpea investit en Amérique latine avec l’achat de 50 % de Senior Suites au #Chili, de 20 % de Brasil Senior Living au #Brésil et d’un établissement en #Uruguay.

    En 2020, après le rachat du groupe Sinoué, Orpea poursuit le renforcement de son offre de soin en santé mentale en France et acquiert le groupe #Clinipsy.
    En 2020, le groupe s’implante également en #Irlande avec l’acquisition du groupe TLC, acteur dans les maisons de retraite, et devient ainsi le deuxième acteur en Irlande.

    Espionnage de salariés
    Fin 2014, la CGT porte plainte contre Orpea, dénonçant « un système visant à infiltrer le syndicat » : trois comédiens avaient été embauchés en 2010 dans le cadre d’un contrat passé avec la société de renseignements privée GSG, afin d’espionner les salariés.

    2015, accusation de maltraitance
    En 2015, vingt-huit familles de pensionnaires de l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) « Le Village », à #Boissise-le-Roi, écrivent à #Marisol_Touraine, la ministre française de la Santé, au préfet de Seine-et-Marne, au directeur départemental de la concurrence et de la répression des fraudes ainsi qu’au procureur de la République pour émettre un « signalement pour maltraitance par négligence active et passive », estimant que la qualité de la prise en charge des résidents « s’est détériorée » depuis le rachat de l’établissement par Orpea en 2013.

    2016 et 2017, maltraitance et conditions de travail
    Au Mans, en novembre 2016, des salariés de l’établissement « Les Sablons » pointent des conditions de travail « exécrables » débouchant sur une dégradation de la qualité de service, depuis l’arrivée d’une nouvelle direction en mai 2015.

    En décembre 2016, France 3 Alsace fait état de soupçons de maltraitance dans la maison de retraite de l’Aar, située à #Schiltigheim .

    À #Niort, en 2016 et 2017, l’ehpad de Sevret est l’objet de critiques de salariés et de familles, qui dénoncent un turn-over important (licenciement, démissions, etc.), un manque de personnel chronique et la maltraitance de résidents.

    À #Échillais (Charente-Maritime), une partie du personnel de l’ehpad se met en grève en juillet 2017 et pointe, de concert avec des résidents et familles de résidents, des cas de maltraitance et une dégradation des conditions de prise en charge des personnes âgées, conséquence d’un manque de personnel ; des salariés évoquent aussi des faits de harcèlement moral à leur égard.

    En janvier 2018, le site Mediapart pointe de nombreux dysfonctionnements dans l’Ehpad « Les Bords de Seine » à Neuilly-sur-Seine

    En septembre 2018, le magazine Envoyé spécial (magazine hebdomadaire de la rédaction de France 2 ) diffuse un reportage réalisé par Julie Pichot [archive] dédié aux conditions d’hébergement et de prise en charge des personnes âgées dépendantes dans les Ehpad privés à but lucratif, en particulier des groupes Korian et Orpea. Le reportage dénonce, témoignages de familles de résidents et d’employés à l’appui, un manque régulier de personnel (d’aide-soignants notamment), une prise en charge médicale insuffisante et une chasse aux coûts notamment dans le budget par résident alloué aux repas, tandis que le groupe Orpea dégage 89 millions d’euros de bénéfice en 2017

    Selon le magazine Télérama, le groupe Orpea a tenté d’empêcher, en 2018, la diffusion du reportage de Julie Pichot [archive] dans Envoyé spécial en introduisant un référé, qui est rejeté par le tribunal de grande instance de Nanterre le jour même de sa diffusion

    En octobre 2021, #Orpea fait l’objet d’une enquête préliminaire de la part du parquet national financier et une perquisition de son siège social est ordonnée. Les soupçons portent sur la cession d’une maison de retraite ayant eu lieu en 2008.

    #maltraitance #violence #pensions #retraite_par_capitalisation #canadiens #canadiennes #maisons_de_retraite #actionnaires #capitaux #retraites #investissements #France #espionnage #rentabilité #management

    • Félicitations à l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada qui a vu venir le scandale et la chute en bourse de ses 320 millions d’euros, sans rien faire.
      Il est vrai que ce n’était que l’argent des retraité.e.s.

  • L’ascension fulgurante de l’Israélien WebPals stimulée par des escrocs ? Simona Weinglass 19 September 2021
    https://fr.timesofisrael.com/lascension-fulgurante-de-lisraelien-webpals-stimulee-par-des-escro

    Jusqu’à récemment, WebPals était l’une des firmes hi-tech les plus dynamiques d’Israël. Mais des documents qui ont fuité révèlent des liens avec des clients douteux, et pire

    En 2017, la compagnie de marketing numérique WebPals était l’archétype de la réussite israélienne dans le secteur du hi-tech. Cette année-là, l’éminent quotidien économique Globes avait intégré la directrice-générale de Webpals, Inbal Lavi, dans son classement des « 40 jeunes Israéliens les plus prometteurs ».

    Un an plus tard, WebPals avait figuré à la troisième place du classement des entreprises technologiques se développant le plus rapidement en Israël, un classement réalisé par Dun & Bradstreet. La compagnie américaine avait également introduit WebPals dans sa fameuse liste des 100 meilleures firmes hi-tech pour lesquelles travailler au sein de l’État juif.

    WebPals fournissait des avantages – cafés gourmands, massages – et les employés évoquaient avec beaucoup de fierté une culture d’entreprise prenant ouvertement position en faveur de l’égalité sur le lieu de travail et en faveur des droits des femmes.

    En 2019, Lavi s’était enorgueillie des politiques d’embauche basées sur l’égalité mises en œuvre dans sa firme devant la Commission des Nations unies sur le Statut des femmes.
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    Mais des documents du département du Trésor américain, qui ont fuité auprès des médias, indiquent que la croissance et le développement de WebPals ont été aussi soutenus par des entreprises clientes pour le moins douteuses, dont les secteurs d’activité vont du jeu en ligne jusqu’à la pornographie en passant par les escroqueries aux investissements.

    Ces documents – qui sont issus de la fuite des dits « Dossiers de la FinCEN », comme les appellent les médias – révèlent qu’entre le mois d’août 2011 et le mois de décembre 2015, le compte bancaire de la firme a reçu des paiements de plusieurs entreprises spécialisées dans les options binaires, une industrie largement frauduleuse qui est dorénavant hors-la-loi en Israël et qui est fondée sur le principe de la fraude aux investissements. Ce secteur particulier a permis à des escrocs sans vergogne de s’emparer parfois des économies de toute une vie de victimes dans le monde entier.

    Les documents révèlent également qu’une entreprise-parente de WebPals, XLMedia, a été rémunérée par une société-écran opaque, enregistrée à l’étranger, qui aurait gagné de l’argent à partir de sites de rencontre arnaquant les internautes. Ces sites ont ainsi fait l’objet de plaintes sur des sites multiples de défense des consommateurs, les clients déplorant que leurs cartes de crédit aient été débitées sans autorisation préalable. Autre compagnie travaillant avec XLMedia, Pernimus Limited, propriétaire du site de rencontres extraconjugales Ashley Madison qui aurait été lié à la prostitution.
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    WebPals n’est pas la seule start-up technologique israélienne, au vernis progressiste salué par les médias, à attirer l’attention pour son implication présumée dans des activités frauduleuses ou non-éthiques. Les firmes israéliennes apparaissent ainsi encore et encore dans les milliers de Rapports d’activité suspecte (SARs), qui forment l’essentiel des Dossiers FinCEN.
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    Le 20 septembre 2020, BuzzFeed News, aux côtés du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et de plus de 100 organisations du secteur de l’information dans le monde, avait publié une série de reportages d’investigation sur la base des contenus de 2 500 documents qui avaient fuité de la FinCEN, l’autorité chargée des crimes financiers et de la lutte anti-blanchiment au sein du département du Trésor américain.
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    Diriger le trafic

    Quand Lavi avait rejoint WebPals en 2014, sa compagnie-parente XLMedia avait engrangé des revenus de 50,7 millions de dollars et des bénéfices avant impôt de 13,2 millions de dollars. En 2017, elle avait enregistré des revenus de 137,6 millions de dollars et ses bénéfices avaient été multipliés par trois, atteignant les 39,3 millions de dollars.
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    Toutefois, Lavi sera toujours restée vague concernant la manière dont la firme était parvenue à gagner autant d’argent.
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    Le SAR affirme qu’entre le 30 août 2011 et le 22 décembre 2015, la banque a observé un total de 1 720 virements, pour un total d’environ 82 915 467,91 dollars pour des comptes au nom de XLMedia.

    Parmi ces virements, des transactions provenant d’entreprises israéliennes issues de l’industrie des options binaires et du Forex : Safecap Investments Limited (Markets.com, TopOption.com), Anyoption Holdings Limited (AnyOption.com), Stepbystep Services Limited, Banc de Binary Limited (Banc de Binary, Option.FM), STK Ltd (Stockpair.com) et CST Media Limited (Opteck.com).

    Pendant approximativement la même période, continue le rapport, des comptes bancaires de WebPals ont effectué des transactions avec les entreprises de trading en ligne Algo Trade Limited et iOption Global Group, ainsi qu’avec Global Transaction Services LLC et Global Transaction Services (UK) Ltd — dont le propriétaire, Daniel Andrew Barrs, a été mis en examen au mois de mai 2016 aux États-Unis pour conspiration en vue de commettre une opération de blanchiment d’argent.

    Les transactions bancaires qui sont décrites dans le rapport d’activité suspecte suggèrent que les sociétés WebPals et XLMedia ont été impliquées dans le marketing d’affiliation – qui consiste, pour une entreprise, à confier la promotion de ses produits à une firme qui sera chargée de rediriger l’internaute vers les produits de son client, touchant une commission lorsque la première vente est effectuée.

    Un autre SAR montre qu’en juillet 2016, XLMedia a reçu de l’argent de Bulova Invest, une société enregistrée dans les îles Vierges britanniques qui aurait exploité des sites de rencontre frauduleux où des hommes esseulés devaient payer pour pouvoir s’entretenir avec les femmes inscrites ou pour les voir via webcam. Parmi les sites dont Bulova Invest était propriétaire, bediscreet.com, freesexmatch.com, getanaffair.com, hornyasia.com, saucysingles.com et upforit.com.

    Dans la présentation de 2015, Lavi avait reconnu que la plus grande partie de la clientèle de WebPals était constituée de sites de jeu en ligne et elle avait indiqué que son entreprise redirigeait les clients vers ces derniers par le biais d’un réseau formé de milliers de sites internet d’information, créés et écrits de telle manière à ce qu’ils figurent en très bonne place dans les propositions faites par l’outil de recherche de Google.
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    Ruzica, qui travaille dans l’événementiel en Allemagne, est convaincue qu’elle est tombée dans le monde frauduleux des options binaires au moment où son attention a été attirée par une publicité apparaissant dans le journal qu’elle était en train de lire sur internet.

    « Je ne me souviens plus si j’ai envoyé mon adresse courriel et mes coordonnées. Mais je souviens que j’étais sur le point de subir une opération au genou et que j’étais assise dans le bureau du médecin quand j’ai reçu le premier coup de téléphone », raconte-t-elle au Times of Israel, se rappelant de sa vulnérabilité à ce moment-là.

    Ruzica avait dit à son interlocuteur ne pas être intéressée – mais ce dernier avait insisté. « Il m’a téléphoné en permanence et il m’a dit que si je lui confiais les données de ma carte de crédit, cela ne coûterait que 250 euros et qu’il me donnerait une prime. »

    Ruzica a fini par perdre 80 000 euros, escroquée par Anyoption.com, une firme cliente de WebPals.

    La fraude aux options binaires a prospéré en Israël pendant environ une décennie avant que la Knesset ne rende l’activité illégale en octobre 2017, en très grande partie grâce au travail de journalisme d’investigation mené par le Times of Israel qui avait commencé par un article écrit au mois de mars 2016 et intitulé « Les loups de Tel Aviv : la vaste et immorale arnaque des options binaires dévoilée« .

    A son paroxysme, des centaines d’entreprises s’étaient engagées dans cette escroquerie, employant des milliers d’Israéliens pour escroquer des victimes dans le monde entier à hauteur de milliards de dollars. Les firmes sans scrupules trompaient leurs clients en leur faisant croire qu’elles faisaient des investissements juteux et qu’elles gagnaient de l’argent, les encourageant à augmenter leurs mises – jusqu’à une rupture des contacts avec les investisseurs et la disparition de tout les fonds déposés – ou presque. La vaste majorité des auteurs présumés de ces escroqueries ont depuis lors transféré leurs opérations à l’étranger ou se sont tournés vers d’autres arnaques tout en continuant leurs activités en Israël.
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    A Singapour, une femme de 32 ans s’est donnée la mort après avoir perdu de l’argent sur le site d’options binaires Option.FM, un site qui était exploité par Banc de Binary, une entreprise de l’industrie et cliente de WebPals. Elle avait tenté d’investir pour pouvoir payer les frais induits par le traitement de son mari qui était atteint d’un cancer.
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    « Israël a été un pôle pour de nombreuses compagnies spécialisées dans le jeu en ligne du, comme, par exemple, Party Poker. Même le père du poker en ligne [Isai Scheinberg] est originaire d’Israël », commente Anderson McCutcheon, cadre dans le marketing numérique qui a lui-même commencé dans l’industrie du jeu, auprès du Times of Israel.

    « Le marketing numérique reste le même indépendamment du produit », continue-t-il. « Regardez les pubs pour Booking.com ou pour Airbnb – les compétences nécessaires pour promouvoir un site de jeu en ligne ou celles qui sont nécessaires pour produire des sites plus légitimes sont à peu près les mêmes ».

    Cette industrie s’appuie lourdement sur Google et Facebook, qui permettent aux publicitaires de cibler les clients sur la base de leurs recherches passées ou de leurs habitudes d’achat. Et la liste des personnes qui ont acheté un produit donné dans le passé permet à Google et Facebook d’identifier de nouveaux clients dont le comportement est similaire.

    « Une fois que vous avez une bonne base d’audience, vous êtes en mesure d’identifier des personnes dont le modèle de comportement est le même et de leur présenter un produit qui, vous le savez, leur plaira. C’est approximativement la même chose avec Google. Google vous autorise à importer des adresses puis à cibler les gens appartenant à un groupe spécifique », explique-t-il.

    C’est ainsi, en fait, que les firmes d’options binaires sont largement parvenues à trouver leurs victimes – dont certaines qui ont perdu leurs économies de toute une vie – avant que Facebook n’interdise les publicités pour les options binaires en janvier 2018. Google, pour sa part, a suivi l’exemple de Facebook et les a interdites au mois de mars 2018.

    Selon l’avocat spécialiste en droit du travail et sociologue Nathan Newman, si la publicité ciblée peut aider des entreprises légitimes à trouver des clients, elle reste très attirante pour les firmes illégales ou manquant d’éthique qui peuvent amasser des profits considérables grâce aux liens susceptibles de se développer avec les clients qui seront particulièrement réceptifs au produit qu’elles proposent.
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    Investissements d’un oligarque
    Le Rapport d’activité suspecte de la Barclays ne révèle pas seulement le nom des partenaires commerciaux de WebPals mais aussi l’identité de ceux qui ont empoché les profits. Ainsi, selon le document, une entreprise des îles Caïmans appelée Israeli VC Partners LP a fait un virement d’un montant de 14 999 980 dollars à Webpals Marketing Systems Ltd.

    Au mois de décembre 2013, la compagnie Israeli VC Partners LP avait acheté une part de 18 % dans XLMedia pour la somme de 15 000 000 dollars, selon un document transmis par XLMedia avant son introduction sur le Marché des investissements alternatifs (AIM) de Londres, au mois de mars 2014.

    Selon le document d’admission de l’AIM, le propriétaire d’Israeli VC Partners LP est Viktor Vekselberg, un milliardaire russe. Après l’IPO, ce dernier était resté le deuxième plus important actionnaire de la firme. Il aurait vendu ses parts en 2017. Mais au moment de l’entrée en bourse, les autres actionnaires de l’entreprise étaient notamment l’homme d’affaires Zvika Barenboim et l’investisseur de 888.com, Shai Ben-Itzhak.

    A l’époque des investissements de Vekselberg dans XLMedia, l’homme était surtout connu pour être l’une des plus grandes fortunes de la Russie et un allié proche du président Vladimir Poutine sur les questions juives (le père de Vekselberg était Juif). Il avait pris le parti de la Russie lors du conflit avec l’aile américaine du mouvement Habad concernant les écrits de feu le rabbin loubavitch, et il avait aidé à financer le Musée juif et centre de la tolérance de Moscou.

    Au mois d’avril 2018, Vekselberg avait été sanctionné par le département américain du Trésor, avec 23 autres ressortissants russes, pour « des activités néfastes dans le monde entier – avec notamment l’occupation continue de la Crimée et l’instigation de violences à l’Est de l’Ukraine, la livraison de matériaux et d’armes au régime d’Assad, qui bombarde ses propres civils ; des tentatives de subversion des démocraties occidentales et des cyber-activités pernicieuses », avait déclaré le secrétaire au Trésor de l’époque, Steven Mnuchin.
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    Le pari sportif, une planche de salut ?
    Les revenus de XLMedia avaient plongé en 2020, à 54,8 millions de dollars – contre 117,9 millions de dollars en 2018 après la rétrogradation, par Google, des sites de casino dans ses classements de recherche au début de l’année. Autre facteur qui, selon la compagnie, avait contribué à cette chute de revenus : Un déclin des paris en ligne en raison de l’annulation des événements sportifs pour cause de pandémie de coronavirus.

    Mais une décision prise en 2018 par la Cour suprême américaine, renversant les interdictions fédérales des paris sportifs, pourrait bien changer la donne pour l’entreprise. Les critiques de cette décision prise par la plus haute instance judiciaire américaines craignent qu’elle n’encourage l’addiction, y compris chez les jeunes, ainsi que l’entrée « d’acteurs malveillants » dans l’industrie. Toutefois, depuis le jugement de la Cour suprême, l’industrie des paris sportifs connaît une croissance sortant de l’ordinaire. Une croissance qui représente une nouvelle opportunité pour, entre autres, XLMedia et Webpals.

    « XLMedia a identifié l’Amérique du nord comme un marché-cible déterminant… La compagnie va chercher à… augmenter ses investissements sur le marché croissant des sports américains par le biais de partenariats et d’acquisitions », a noté un communiqué de presse émis en date du 10 décembre 2020.
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    qui va vous prendre votre argent. Pour notre part, nous choisissons de travailler avec des clients dont l’entreprise a intégré la Bourse de Londres, dont les actions sont échangées à la Bourse suédoise : des clients qui ont une bonne réputation et qui ont le sens de la responsabilité ».

    #escroquerie #hi-tech aux #investissements #fraude #paris_sportifs #options_binaires

  • Héritages coloniaux. Les #Suisses_d'Algérie

    Quels rapports les pays européens entretiennent-ils avec leur #passé_colonial ? La manière dont ils traitent, relisent, reconstruisent, oublient ou dissimulent ce volet de leur histoire est déterminante pour comprendre la géopolitique mondiale d’aujourd’hui, et questionner nos sociétés actuelles.
    La Confédération, sous sa cape de #neutralité, a longtemps nié son implication dans des processus coloniaux. Pourtant, des Suisses ont participé du #peuplement de « l’#Algérie_française », où ils ont exercé des formes de #domination, notamment via des #investissements_privés. À la proclamation de l’indépendance algérienne, la Confédération s’est trouvée face à la délicate organisation du « #retour » des colons helvètes. Suite aux nationalisations et aux expropriations outre-mer, des biens ont dû être protégés, des pensions versées.
    Ce livre offre de précieux outils pour appréhender l’#histoire_coloniale dans un monde décolonisé. Étayée par des sources d’archives suisses, françaises, italiennes et anglaises – pour la plupart inédites –, cette étude reconstitue les jeux d’échelles et met en évidence le rôle déterminant de l’Association des Suisses spoliés d’Algérie ou d’outre-mer.

    https://www.seismoverlag.ch/fr/daten/heritages-coloniaux

    #colonialisme #colonisation #Suisse #Algérie #Association_des_Suisses_spoliés_d'Algérie_ou_d'outre-mer (#ASSAOM) #Marisa_Fois
    #livre

    –—

    Ajouté à la métaliste sur la Suisse coloniale :
    https://seenthis.net/messages/868109

    ping @cede

  • Le cadeau de Noël du gouvernement aux universitaires (26.12.2020)

    https://academia.hypotheses.org/29772

    –-> je pense n’avoir pas donné cette nouvelle le jours où elle est sortie du chapeau du gouvernement... ni les jours suivants...

    La fameuse #LPPR, devenue #LPR entre temps... la #loi_de_programmation_de_la_recherche (qui s’appelait #Loi_de_programmation_pluriannuelle_de_la_recherche) est sortie dans le #journal_officiel le matin du... #26_décembre_2020... oui oui oui... même pas 24h après #Noël, en pleine vacances universitaires !

    J’en fait donc un 6e fil de discussion, que j’ajoute à la métaliste sur les réformes qui intéressent l’#enseignement_supérieur :
    https://seenthis.net/messages/820330
    Et plus précisément :
    https://seenthis.net/messages/820330#message820388

    #facs #France #réforme

    • L’essentiel est sans cesse menacé par l’insignifiant : cycle bas.

      Il y a un an exactement, nous étions cinq mille à présenter notre candidature collective à la présidence du #Hcéres. Alors que les avant-projets de ce qui s’appelait encore la LPPR commençaient à transpirer, il s’agissait de poser comme fondamentaux les principes d’#autonomie et de #responsabilité des universitaires et des chercheurs dont il nous revient d’instituer les conditions effectives : la probation d’un travail scientifique doit être le fait de l’ensemble de la communauté des pairs ; le travail scientifique doit disposer de moyens budgétaires, d’une temporalité et de garanties statutaires permettant une recherche inscrite dans le temps long et à même de produire des ruptures intellectuelles significatives, plutôt que de livrer des résultats incrémentaux ; ce travail, enfin, doit s’effectuer en lien avec la transmission, la consolidation mais aussi la critique des savoirs existants telles que l’Université les assure.

      Les douze mois qui se sont écoulés ont à la fois confirmé nos pires craintes et conforté notre conviction que ce programme de refondation de l’#Université et de la recherche (https://rogueesr.fr/retrouver-prise) est une ardente nécessité. Dans les semaines et les mois à venir, RogueESR produira des notes d’analyse partant de ces principes pour articuler des propositions destinées à composer à terme une mosaïque cohérente. Nous vous invitons à contribuer à cette entreprise de réappropriation collective par des notes sur les questions auxquelles vous avez pu réfléchir, et qui pourront être mises en commun.

      Avant de nous lancer dans ce travail de fond, nous refermons un cycle par un commentaire d’actualité qui porte principalement sur la non-ouverture de l’Université et sur le Hcéres.

      Situation des universités

      À nouveau, nos pensées vont aux étudiantes et aux étudiants victimes de l’impéritie gouvernementale et bureaucratique qui s’est encore manifestée cette semaine par diverses déclarations gouvernementales et présidentielles sur la réouverture des universités, dont aucune ne présente la moindre crédibilité, ni le minimum d’ancrage dans la réalité de nos établissements.

      « On est sur le moment où le décret sort, il faut que ce soit au moins la veille du jour où les choses sont mises en place. »

      « Et là, j’ai bien entendu la demande du président : si l’idée, c’est qu’on puisse faire revenir l’ensemble des étudiants sur l’ensemble des niveaux avec des, voilà, des jauges à 20% ou à un cinquième de temps, les universités, ça par contre je vais le leur dire… »

      Frédérique Vidal, le 21 janvier 2021

      Ces phrases sont extraites des discours tenus pendant la visite Potemkine du président de la République à Saclay, à écouter ici : https://rogueesr.fr/vidal_riendepret

      L’annonce de M. Macron[1] a annulé en direct la circulaire prévoyant le retour des étudiants de L1 au profit d’un retour de tous les étudiants, un jour sur cinq, en février, comme initialement prévu. La nouvelle « circulaire », enregistrant le « souhait » du président de la République, contredit dans le même temps le décret du 15 janvier[2] qui est le seul à avoir une valeur réglementaire en vertu de la hiérarchie des normes. En attendant un probable pseudo-confinement, il n’est besoin d’aucun autre commentaire.

      Ces annonces, qui n’ont aucune prise sur le réel, montrent une ignorance totale des conditions d’élaboration des emplois du temps dans les facultés, un mépris de la situation des étudiants éloignés des établissements et un report sur les personnels de la responsabilité morale et professionnelle de la gestion d’une crise sanitaire sans les moyens qui devraient l’accompagner. Car le but de cette entreprise de communication est bien de renvoyer la colère des étudiants vers les universitaires. La gestion calamiteuse de la crise n’en est pas moins directement imputable au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, qui a obstinément refusé de mettre en œuvre les protocoles sanitaires et les garanties sociales qui auraient permis aux étudiants de rester sur les campus et d’y suivre des cours.

      Rappelons plus que jamais notre double obligation à l’égard de la jeunesse, qui est en train d’être sacrifiée : rouvrir les universités (https://rogueesr.fr/rouvrons-les-universites) le plus tôt possible pour permettre une formation et socialisation académiques de qualité, et garantir que cette réouverture se fasse dans le respect des procédures sanitaires requises (https://rogueesr.fr/rouvrons-les-universites), avec les #investissements que cela nécessite.

      Un mouvement large de destitution du Hcéres

      Le projet de destitution du Hcéres et de réappropriation communautaire des normes qualitatives de notre métier est aujourd’hui partagé par un grand nombre de collectifs, d’instances et de sociétés. L’Assemblée des directions de laboratoire appelle ainsi à un désaveu du Hcéres (https://adl.frama.site/blog/appel-desavouer-le-hceres), tout comme la Commission Permanente du Conseil National des Universités (CP-CNU) qui appelle l’ensemble des enseignantes-chercheuses et enseignants-chercheurs à ne pas siéger dans des instances d’évaluation et à refuser de participer aux comités de visite du Hcéres (https://twitter.com/CP_Cnu/status/1338951928550739969).

      Plusieurs structures engagées dans ce projet proposent d’organiser un colloque sur le Hcéres, en terrain neutre, au Sénat ou en plein air, le 19 ou le 26 juin prochain. M. Coulhon a été invité à ce colloque. À ce stade, il n’a pas fermé la porte et a même déclaré sur le réseau social Twitter (!) qu’il était prêt à y participer. De notre côté, nous soutenons cette initiative et y contribuerons vraisemblablement pour autant qu’elle permette d’y poser clairement la question des normes collégiales de probation, ainsi que celle de la temporalité budgétaire et statutaire dans laquelle doit s’inscrire une science de qualité.

      L’enjeu n’est pas de discuter des modalités d’une « bonne » évaluation, mais d’en questionner frontalement le principe et la nécessité, que nous percevons comme un dévoiement de la dispute scientifique entre pairs. La question de l’utilité pratique du Hcéres, pour sa part, ne se pose plus : sa paralysie de fait depuis octobre 2019 s’est révélée sans incidence préjudiciable pour notre travail. Prévenant nos désirs, le Hcéres a ainsi fait lui-même la preuve de son inutilité. Le décalage d’un an des prochaines vagues d’évaluation va dans le même sens : les formations comme les unités de recherche continueront de tourner normalement. Nos travaux devront donc porter sur les modalités de sa destitution.

      Recours en « abus de pouvoir » devant le Conseil d’État

      Une requête en annulation des deux décrets de nomination au Hcéres a été déposée le 4 janvier dernier au greffe du Conseil d’État par 11 enseignants-chercheurs titulaires. La démonstration juridique de 22 pages déposée en appui de ce recours pour « abus de pouvoir » s’appuie sur quelques éléments nouveaux. Il convient en particulier de souligner la chronologie troublante des textes parus au Journal Officiel pour acter ces nominations.

      Si l’on s’en tient à la chronologie des publications du Journal Officiel, il apparaît que les numéros des décrets de nomination du président du collège (texte n°65) et de nomination des membres du Collège (texte n°66), tous deux datés du 30/10/2020 et publiés le même jour (01/11/2020) au Journal Officiel, sont dans un ordre inverse à la logique voulue par la Loi. Cela pose un questionnement juridique fondamental portant sur le non-respect de la procédure voulue par le 5ème alinéa de l’article 13 de la Constitution et sur l’empiètement manifeste du Président de la République sur le domaine de compétences du Premier ministre.

      En outre, un arrêté du 22/12/2020 stipule qu’il est mis fin aux fonctions de M. Coulhon à l’Elysée « à compter du 1er novembre 2020 ». Outre le caractère rétroactif de cette décision, le problème de dates est patent, Thierry Coulhon étant président du Collège du Hcéres depuis le 30 octobre. Cette intrication de dates démontre que l’intéressé a bénéficié de son statut singulier de membre du cabinet du Chef de l’État durant l’intégralité de la procédure ayant abouti à sa nomination et ce, jusqu’à sa prise de fonction effective au Hcéres. Elle jette également le doute sur les déclarations de Thierry Coulhon lors de son audition, le 20 octobre dernier, devant les commissions du Parlement : le candidat avait laissé entendre qu’il n’était plus en fonction à l’Élysée, ce que vient démentir la date mentionnée dans l’arrêté du 22 décembre.

      En se requalifiant en « Président du Hcéres », quand il n’est que Président de son collège, en accélérant par des recrutements, l’inflation bureaucratique de cette institution, M. Coulhon bat en brèche le principe de pluralisme et d’autonomie collective qui devrait prévaloir dans toute institution scientifique. Il s’écarte également de l’intention du législateur qui a voulu, dès la création de l’AERES, puis du Hcéres, inscrire dans la Loi ce principe de collégialité comme le principe de fonctionnement de cette autorité administrative, directement dérivé du modèle fondateur primus inter pares de l’Université.

      Dans ces conditions, il nous semble plus que jamais nécessaire de reprendre le programme collectif d’une évaluation des bureaucraties, y compris celle en charge de l’évaluation, à l’aune de nos propres critères.

      [1] Autre extrait à écouter, ainsi que l’original, entre les minutes 39 et 43.

      [2] Le décret du 15 janvier prévoit que les étudiants de L1 pourront accéder en présence à l’Université « 8° — aux travaux dirigés et travaux pratiques destinés aux étudiants inscrits en première année des formations du premier cycle de l’enseignement supérieur et en première année du premier des cycles de formation dispensés dans les établissements mentionnés aux titres IV, V et VII du livre VI du code de l’éducation. »

      https://rogueesr.fr/20210125

  • « La déconsidération des universités par le milieu politique est un élément structurel »

    Pour #Mathias_Bernard, président de l’université Clermont Auvergne, la promulgation de la #loi_de_programmation_de_la_recherche (#LPR) est une « #occasion_manquée ». Il revient sur la LPR pour « Libération », mais aussi sur dix ans de politique des universités.

    Ça y est. La si polémique loi de programmation de la recherche a été promulguée le jeudi 24 décembre, et publiée ce samedi au journal officiel. Elle lisse sur dix ans une hausse de 5 milliards d’euros du #budget annuel de la recherche et prévoit une hausse des #primes des personnels scientifiques. Mais plusieurs éléments sont critiqués par la communauté universitaire.

    L’une des mesures les plus contestée, la pénalisation des #mobilisations_étudiantes, a été retoquée par le Conseil constitutionnel le 21 décembre. Les « sages » ont aussi émis des réserves sur la proposition d’une nouvelle voie de #recrutement_dérogatoire pour les #professeurs, les « #chaires_de_professeurs_juniors », qui permettrait aux présidents d’université de s’immiscer dans l’appréciation des mérites des futurs candidats.

    Pour le reste, le texte accentue la #compétition entre les chercheurs et entre les établissements en prolongeant la logique de financement par #appels_à_projets, en vogue depuis plus de dix ans. Président de l’université Clermont Auvergne, Mathias Bernard connaît bien le sujet. Pour Libération, il revient sur ce texte et sur les réformes successives des universités depuis plus de dix ans.

    La loi de programmation de la recherche a été promulguée. Quel est votre sentiment sur ce texte ?

    C’est une occasion manquée. Quand l’annonce d’une loi de programmation a été faite, en février 2019 par le Premier ministre, je me suis réjoui, comme beaucoup de collègues. Notre secteur a besoin de #stabilité pour se projeter dans le temps long. J’espérais que cette loi permette de rééquilibrer la part des #financements_récurrents par rapport à ceux distribués par appels à projets. Ce n’est pas le cas. Les nouveaux #moyens sont en majorité conditionnés.

    C’est problématique. Cette loi n’aborde ni la question des #investissements en #équipements_scientifiques ni celle de l’#emploi. Les seules mesures de #ressources_humaines visent à faciliter le recrutement de #contractuels. C’est une #déception.

    Dans quelle mesure la LPR s’inscrit-elle dans le train de #réformes_universitaires depuis dix, quinze ans ?

    La LPR est clairement dans la ligne de ce qui se fait depuis le milieu des années 2000 avec la création de l’#Agence_nationale_de_la_recherche [chargée d’animer la politique d’appels à projets, ndlr]. Ce qui est prôné, c’est la différenciation des universités. L’Etat nous demande de mettre en avant « la #signature » de l’établissement. Cela passe par la réponse aux appels à projets nationaux, internationaux, territoriaux… Le nombre de guichets s’est multiplié.

    En parallèle de cela, notre #dotation_de_base stagne alors que le nombre d’étudiants augmente. Je ne dis pas qu’il y a quinze ans le système était idéal, mais le point d’équilibre est largement dépassé.

    Quelles sont les conséquences pour les établissements ?

    C’est d’abord un #coût. Nous avons besoin de recruter des équipes pour suivre ces appels et aider nos chercheurs à y répondre. J’ai plusieurs dizaines de personnes qui travaillent à cela.

    Ensuite, c’est un changement dans le #statut des personnes employées. Si ma dotation de base stagne, je ne peux pas recruter de #fonctionnaires. La progression du nombre d’employés des universités augmente uniquement grâce aux contractuels. Là encore, avoir une part de contractuels dans nos personnels n’est pas problématique mais ils sont recrutés pour conduire des missions pérennes.

    C’est notamment le cas pour des #contrats_d’enseignants qui, il faut bien le reconnaître, sont payés au lance-pierre.

    La stagnation des financements récurrents attribués aux universités n’est-elle pas la conséquence d’une défiance du milieu politique vis-à-vis du monde académique ?

    Je dirais une #défiance et une #méconnaissance. Les deux vont de pair. Cela vient d’un système de formation des #élites qui ne les amène jamais à l’université. Ils la connaissent mal et en ont une représentation fantasmée et négative.

    Le secteur a dû aborder beaucoup de lois, en 2007, 2013, 2018 et maintenant 2020, et pourtant, aucune n’a reconnu les universités pour ce qu’elles sont, à savoir les opérateurs principaux en matière d’#enseignement_supérieur et de #recherche. Les arbitrages ne nous sont jamais favorables et ce quelle que soit la législature. Les moyens de l’Etat sont dispersés sur une multitude d’opérateurs. Malheureusement, le fait d’avoir une ministre, #Frédérique_Vidal, issue de nos rangs, n’a rien changé au problème de la #déconsidération des universités par le milieu politique qui est un élément structurel.

    La #loi_LRU de 2007 promettait l’#autonomie des universités…

    Mais cette promesse n’a jamais été tenue. L’autonomie a consisté à déléguer la gestion des mécontentements. S’est installée une forme de #bureaucratisation qui subordonne le conseil d’administration des universités à d’autres instances, comme les jurys des appels à projets ou l’administration du ministère, qui s’est investie dans une forme de #micro-management.
    Vous faites référence à la création par ce gouvernement des #recteurs_académiques_de_région qui sont aux universités ce que le recteur est à l’enseignement scolaire. Comment ce micromanagement s’illustre-t-il ?

    Par exemple, pendant la crise sanitaire, les universités ont le droit d’ouvrir des séances de travaux pratiques. Si je décide d’ouvrir un TP d’optique pour 20 étudiants le mardi de 17 heures à 19 heures, je dois obtenir un arrêté du recteur académique à Lyon. Je lui ai, en tout, transmis plusieurs centaines de demandes d’autorisation. C’est de la #bureaucratisation inutile.

    De même, dans le cadre de ce que nous appelons le « #dialogue_stratégique_de_gestion » que nous menons avec l’Etat, une petite partie du budget est conditionnée à la manière dont l’université met en œuvre les #politiques_publiques.

    Pourquoi n’êtes-vous ni membre de l’#Alliance_des_universités_de_recherche_et_de_formation (#Auref) ni de l’#Udice, qui réunit les dix universités dites « de recherche » de France ?

    Je suis contre l’idée d’un système universitaire à #deux_vitesses. Il me semble donc dangereux de l’institutionnaliser à travers des associations. Je suis très attaché aux dimensions de #formation et de recherche des universités. Nous devons concilier une mission de #service_public et une exigence d’#excellence. Le risque avec l’existence de ces deux associations est d’encourager les pouvoirs publics à acter cette division, et à différencier les moyens budgétaires et les outils législatifs attribués aux établissements en fonction de leur appartenance à une organisation ou à une autre.

    Cette différenciation pourrait passer, par exemple, par des droits d’inscription différenciés ?

    On sent bien que cela va être tenté. Une brèche a été entrouverte par le gouvernement en introduisant un droit d’entrée différencié pour les #étudiants_internationaux. Une mesure qui pourrait profiter économiquement à un petit nombre d’universités, qui ont la notoriété pour justifier des droits plus élevés. Mais elle pourrait vider les autres établissements de leurs étudiants internationaux.

    C’est une première tentative qui pourrait être prolongée par une différenciation des #droits_d’entrée pour les étudiants français. Certains présidents pourraient y voir une ressource supplémentaire. Pour ma part, je suis attaché à notre modèle d’un accès le plus ouvert possible à l’enseignement supérieur.

    Vos étudiants, justement, comment vont-ils ?

    Mal. Si j’en juge par le nombre d’entre eux qui se signalent auprès de notre bureau d’accompagnement psychologique, je dirais qu’il y a beaucoup de souffrances.

    Pourtant, dans le plan de #déconfinement du gouvernement, les universités sont les dernières à rouvrir. Comment expliquez-vous cela ?

    Cette annonce a suscité beaucoup d’émotion au sein de la communauté. C’est révélateur d’une forme de #déconsidération des universités qui ne rouvrent qu’après les lycées, les classes prépa, les églises…

    Le principal problème pour nous, dans cette gestion de crise, c’est le décalage systématique entre les décisions gouvernementales, qui créent de l’attente, et la notification précise de leur application. Cela nous met, nous, présidents, en porte-à-faux. Par exemple, il y a eu des annonces sur le recrutement de tuteurs pour accompagner les étudiants en difficulté en janvier, mais nous n’avons reçu ni les budgets ni les modalités avant les congés de fin d’année. De même, l’Etat s’est engagé à soutenir la prolongation des contrats doctoraux décalés par le Covid-19. Nous avons fait les avances dès septembre, mais les crédits ne sont arrivés qu’en toute fin d’année.

    https://www.liberation.fr/france/2020/12/26/la-deconsideration-des-universites-par-le-milieu-politique-est-un-element

    #université #ESR #France #LPPR

    Métaliste sur la LPPR :
    https://seenthis.net/messages/820330