Il faut relever le manque de représentativité de ce vote, auquel ont pris part à peine plus de 10 % de cette vaste communauté (environ 180 000 personnes et 59 000 inscrits) , l’une des plus nombreuses hors d’Europe et d’Amérique du Nord. A 80 % binationaux, juifs ayant quitté la France pour s’établir en Israël, nombre d’entre eux ne souhaitent plus depuis longtemps voter dans leur pays d’origine, ou ne s’y sentent plus légitimes. En 2017, la participation s’élevait à 14,5 % à peine, hors Jérusalem. Reste que ce résultat était attendu de longue date, et qu’il pèse au sein de la communauté juive française, que M. Zemmour a profondément divisée.
Le Pen obtient 3,3 % des voix
Ces électeurs sont passés outre les réécritures de l’histoire du polémiste, qui s’est interrogé sur l’innocence du capitaine Dreyfus, et qui a tenté d’exempter le régime de Vichy de sa responsabilité dans l’extermination des juifs de France, durant la seconde guerre mondiale. Ils ont souffert qu’il qualifie d’« étrangers avant tout » des enfants juifs tués en 2012 par Mohammed Merah à Toulouse, parce que leurs familles avaient choisi de les enterrer en Israël.
Ils n’ont pas écouté les appels du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) et du grand rabbin de France, ce « rabbin de cour », selon M. Zemmour, qui demandaient à la communauté de ne pas voter pour lui. Parmi les digues qu’a fait sauter ce candidat juif d’origine algérienne, il y a donc celle-ci : les Français d’Israël ont libéré une parole et un vote d’extrême droite, eux qui n’ont jamais accepté la « normalisation » de Marine Le Pen.
Trop associée à son père et au Front national, ex-Rassemblement national, la candidate d’extrême droite obtient 3,3 % des voix, à peine moins qu’en 2017. Cela fait douter d’un report massif en sa faveur au second tour, de la part d’une communauté qui avait voté en 2017 à 60 % pour François Fillon (Les Républicains), puis à plus de 90 % pour M. Macron au second tour.
Discours banalisé en Israël
Eric Zemmour a séduit en déployant, en France, un discours depuis longtemps banalisé en Israël. Sa dénonciation d’un supposé « grand remplacement » des Français par des populations arabes et noires et son obsession de la sécurité ne sont pas l’apanage des extrêmes en Israël. Elles recoupent le discours de la droite de gouvernement israélienne, de l’ex-premier ministre Benyamin Nétanyahou.
Il fait aussi écho aux craintes particulières d’une communauté qui cite majoritairement l’absence de sécurité en France comme la première raison de son alya (son émigration vers Israël). En fin de campagne, M. Zemmour s’était rapproché de la famille de Jeremie Cohen, un jeune homme juif renversé, le 16 février, par un tramway à Bobigny alors qu’il fuyait un groupe d’une quinzaine d’agresseurs. M. Zemmour avait touché en Israël, en se demandant si M. Cohen était tombé sous les coups de « barbares (…) parce que juif », alors que sa mort avait jusque-là reçu peu d’écho.
M. Zemmour séduit enfin de nouveaux Israéliens souvent mal intégrés, parlant mal l’hébreu, appauvris depuis leur départ. Peu au fait de la réalité palestinienne, ils lisent le conflit et l’occupation des territoires, en vigueur depuis 1967, au prisme de leur propre histoire familiale : celle des colonies françaises du Maghreb, et de la disparition des communautés juives après les indépendances arabes.
Les conditions de cette fin de campagne auraient pu augurer d’un vote plus important en sa faveur. Elle s’est déroulée au rythme de quatre attaques terroristes perpétrées par des Palestiniens dans des villes israéliennes, qui ont fait 14 morts depuis le 22 mars, dont une conscrite franco-israélienne, Shirel Aboukrat, originaire de Nétanya, au centre du pays.
Il est donc question ici d’environ 3200 électeurs. _Le Monde continue son tardif battage contre Le Pen et Z. (dans cet article en foutant la honte aux juifs votant ou tenté de voter extrême droite : Dreyfus, Vichy, même pas besoin de rappel que la fondation du FN s’est faite avec d’authentiques nazis).
Leur report de voix compte pour que dalle, sauf si la suite de la campagne mobilise davantage les juifs d’extrême droite, ici (j’espérais un aperçu sur l’inquiétant vote des juifs de France), et là-bas.