• Parution le 19 avril du prochain ouvrage de Jérôme Baschet : Quand commence le capitalisme ? De la société féodale au monde de l’Economie (Editions Crise & Critique)
    http://palim-psao.over-blog.fr/2024/03/parution-le-19-avril-du-prochain-ouvrage-de-jerome-baschet-quan

    Nouveau livre de Jérôme Baschet !

    Quand le capitalisme a-t-il commencé ? L’interrogation paraît simple. Pourtant, aucun consensus n’émerge parmi les historiens : certains estiment sa genèse à deux siècles, d’autres à cinq ou huit siècles, voire à plusieurs millénaires. Il n’existe pas davantage d’accord sur la nature des facteurs à prendre en compte, ni, plus surprenant encore, sur la définition même du capitalisme.

    En adoptant un critère rigoureux pour distinguer le capitalisme des simples pratiques commerciales et monétaires, Jérôme Baschet remet en question bien des modèles historiques classiques et explore la complexité des forces à l’œuvre dans la transition du féodalisme au capitalisme. Il interroge les dynamiques internes de la société médiévale, soulignant les spécificités de la trajectoire européenne tout en récusant les biais eurocentriques. Défendant une perspective discontinuiste, il souligne que cette transition n’a rien d’une évolution linéaire prédestinée, mais qu’elle représente une rupture radicale dans l’histoire humaine et planétaire, dont la portée se révèle pleinement dans le contexte actuel de crise climatique et écologique.

    Sur les trois questions considérées – quand ? comment ? quoi ? –, l’auteur s’emploie à clarifier les termes des débats à mener, offrant ainsi une réflexion approfondie sur la formation historique du capitalisme, un monde caractérisé par l’autonomisation de l’économie et l’affirmation d’une logique d’illimitation, dont il nous est donné aujourd’hui d’éprouver les conséquences.

    #Jérôme_Baschet #capitalisme #histoire

  • Jérôme Baschet, Zapatiste (Rébellion), 2020
    https://sniadecki.wordpress.com/2022/12/24/baschet-zapatiste
    https://www.encyclopedie-anarchiste.xyz/spip.php?article212

    Un bon article synthétique, qui permet de balayer l’histoire zapatiste en peu de paragraphes, chronologiquement et organisationnellement.

    L’autonomie zapatiste, qui se construit depuis le 1er janvier 1994 dans les montagnes et la forêt du Chiapas, au sud du Mexique, constitue l’une des expériences rebelles contemporaines les plus remarquables par son ampleur, sa persistance et sa radicalité. Elle a pu déployer une forme d’autogouvernement populaire, en sécession complète par rapport aux institutions de l’État mexicain, en même temps qu’elle défend des modes de vie constituant une alternative concrète à la logique capitaliste dominante. Elle est le fruit d’une histoire très singulière, mais son écho et sa portée n’en dépassent pas moins les frontières du Mexique.

    #Jérôme_Baschet #zapatisme #EZLN #Mexique #Chiapas

    • Hommage libertaire au sous-commandant Marcos : auto-ironie d’un porte-parole à l’écart des aspirants caudillos – par Philippe Corcuff

      http://www.grand-angle-libertaire.net/hommage-libertaire-au-sous-commandant-marcos-auto-ironie-dun

      Le 25 mai 2014 a arrêté « d’exister le Sous-commandant Insurgé Marcos » (1). S’il s’est ainsi retiré de la scène politique active, il pourrait nourrir encore longtemps les imaginaires émancipateurs de ceux qui sont en quête d’une politique radicalement renouvelée, et pas de la énième resucée du marketing de « la politique autrement…comme avant ». En des temps particulièrement troublés, où le néoconservatisme et l’extrême droite prospèrent en France et, plus largement, en Europe (2), après l’assassinat de nos amis de Charlie Hebdo (3) et les crimes antisémites de ce tragique mois de janvier 2015, il apparaît particulièrement important de célébrer la figure hérétique de Marcos dans la perspective que « le côté obscur de la force » ne finisse pas par recouvrir la promesse d’émancipation. Et l’on peut souhaiter aux gauches radicales, si elles veulent sortir de leurs impasses respectives et conjuguées, la réinvention démocratique de porte-parole introduisant des grains de sable libertaires dans la domination politique qui s’insinue sans cesse dans les mécanismes de représentation, comme a commencé à le dessiner le sous-commandant.

      Sinon, @rastapopoulos que signifie le « M » qui a remplacé le « N » de EZLN ?

  • Jérôme Baschet, Un Moyen Âge rebelle, 2010
    https://sniadecki.wordpress.com/2022/12/22/baschet-moyen-age

    Dans presque toutes les régions d’Occident, les communautés rurales obtiennent la reconnaissance écrite de leurs droits, consignés dans des chartes de franchise. De même que dans les villes, où ces documents existent également, ils sont tantôt le résultat d’un conflit ouvert, tantôt le fruit d’un processus plus négocié. Dans le Languedoc, particulièrement dans la région de Béziers, les communautés conquièrent une forme d’organisation particulièrement avantageuse [9]. À partir du milieu du XIIIe siècle, chaque communauté villageoise élit librement ses représentants (lors d’une assemblée rassemblant tous ses membres masculins majeurs), sans intervention ni contrôle du seigneur, afin d’exercer une charge collective, renouvelée annuellement : le consulat. Le consulat possède une personnalité morale, dispose d’une maison, d’un sceau et d’un coffre pour ses fonds propres. Il obtient la concession de certaines taxes seigneuriales et peut acheter terres et biens. Il représente la communauté en cas de litige et organise tout ce qui a trait à la vie du village, notamment les travaux agraires et l’entretien des chemins. Les consuls ne reçoivent aucune rétribution et sont élus, sans possibilité d’un second mandat, par l’assemblée communale (tous les hommes de plus de quatorze ans). Le plus souvent, mais pas dans tous les villages, il revient à l’assemblée de prendre les décisions les plus importantes, les consuls étant seulement chargés de leur application.

    #moyen_âge #commune #communauté #démocratie #Histoire #Jérôme_Baschet

  • Un assez court manifeste concernant le concept de révolution | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-ecorev-2022-1-page-15.htm?u=d9493d3f-54c6-41cb-a9a1-da7b918098cd&WT.ts

    Par David Graeber

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    Le terme « révolution » est si galvaudé qu’il signifie tout et son contraire. Il y a des révolutions chaque semaine aujourd’hui : des révolutions bancaires, des révolutions cybernétiques, des révolutions médicales, et une révolution Internet chaque fois que quelqu’un développe un nouveau logiciel ingénieux.

    2
    Cette sorte de rhétorique est seulement possible parce que la définition commune de la révolution a toujours signifié quelque chose qui était de l’ordre du changement de paradigme : une rupture claire et fondamentale dans la nature de la réalité sociale après laquelle tout fonctionne différemment et les catégories antérieures ne s’appliquent plus. C’est ce qui fait qu’il est possible, par exemple, d’affirmer que le monde moderne est issu de deux « révolutions » : la Révolution française et la révolution industrielle, malgré le fait que les deux n’aient rien d’autre en commun que de sembler marquer une rupture avec ce qui les a précédées.

    S’il y a une erreur logique à la base de tout cela, c’est le fait d’imaginer que le changement social ou même technologique a la même forme que ce que Thomas Kuhn a appelé « la structure des révolutions scientifiques ». Kuhn se réfère à des événements comme la transition d’un univers newtonien à un univers einsteinien : il y a une percée intellectuelle et l’univers n’est plus le même par la suite. Appliqué à n’importe quoi d’autre que les révolutions scientifiques, cela impliquerait que le monde correspond vraiment à la connaissance que nous en avons, et que dès que nous changeons les principes sur lesquels notre savoir est fondé, la réalité change elle aussi. C’est exactement la sorte d’erreur intellectuelle élémentaire que nous devrions, selon les psychologues du développement, surmonter au début de l’enfance, mais il semble que ce soit le cas de peu d’entre nous.

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    En fait, le monde n’est pas tenu de répondre à nos attentes et, dans la mesure où la « réalité » réfère à quelque chose, c’est précisément à ce qui ne peut jamais être totalement compris dans nos constructions mentales. Les totalités, en particulier, sont toujours des créatures de l’esprit. Les nations, les sociétés, les idéologies, les systèmes clos… rien de cela n’existe vraiment.

    Une révolution à l’échelle mondiale prendra très longtemps. Mais on peut aussi reconnaître qu’elle a déjà commencé. La façon la plus facile de l’appréhender est d’arrêter de penser à la révolution comme à une chose – « la » révolution, la grande rupture cataclysmique – et plutôt de demander « qu’est-ce que l’action révolutionnaire ? » Nous pourrions alors avancer qu’une action révolutionnaire est toute action collective qui rejette, et donc défie, une forme de pouvoir ou de domination et, ce faisant, reconstitue les relations sociales, même au sein de la collectivité, dans cette perspective. L’action révolutionnaire ne doit pas nécessairement avoir pour objectif de renverser les gouvernements. Les tentatives de créer des communautés autonomes en dépit du pouvoir (en utilisant ici la définition de Castoriadis, soit des communautés qui constituent elles-mêmes, qui décident collectivement de leurs propres règles ou principes de fonctionnement, et qui les reconsidèrent continuellement) seraient, par exemple, des gestes révolutionnaires presque par définition. Et l’histoire nous montre que l’accumulation continue de tels gestes peut (presque) tout changer.

    #David_Graeber #Révolution

  • Le Janus de la science et de l’industrie

    Louis de Colmar

    https://lavoiedujaguar.net/Le-Janus-de-la-science-et-de-l-industrie

    Lorsque Greta Thunberg fustige les puissants de ce monde en les exhortant à « écouter les scientifiques » elle se situe au cœur des contradictions de ce temps. Elle idéalise la science en l’opposant aux basses œuvres de l’industrie, méconnaissant que cette industrie n’est que le bras armé de la science. Historiquement parlant, il est tout à fait impossible de les dissocier : science et industrie obéissent à une même vision du monde, à une même pratique effective du monde. Dans les deux cas, il s’agit d’être capable de reproduire à l’infini, sans pertes ou dégradations, des procédures expertes : la reproductibilité des expériences scientifiques est de même nature que la reproductibilité des mécanismes de fabrication industrielle ; bien plus, le propre de la reproductibilité industrielle est directement tributaire d’approches scientifiques particulières, la reproductibilité industrielle n’est qu’une généralisation et une massification de questionnements scientifiques élaborés à échelle réduite.

    Il est temps de sortir de la fausse opposition entre science-connaissance pure, et applications impures et détournées d’une même conception du monde.

    Le combat contre le réchauffement climatique ne peut qu’être corrélé avec le combat contre l’idéalisation de la science, contre sa mythologisation : le réchauffement climatique a bien pour origine la mise en pratique d’une représentation théorique du monde spécifiquement incarné par la science. L’expérimentation scientifique dans les laboratoires académiques ou privés n’est que le b.a.-ba de sa potentielle industrialisation, qui n’est jamais qu’un changement d’échelle. (...)

    #science #industrie #Greta_Thunberg #rationalité #crise #Guillaume_Carnino #Jérôme_Baschet #capitalisme #monde-robot #nature #idéologie #Marx #Pfizer #Moderna #révolution #économie #Paul_Ricœur

  • « L’invasion zapatiste » commence !

    Jérôme Baschet

    https://lavoiedujaguar.net/L-invasion-zapatiste-commence

    Cela avait été annoncé il y a six mois ; maintenant, nous y sommes.
    Le voyage zapatiste vers l’Europe a commencé.
    La « conquête inversée » a bel et bien débuté.

    Lorsque, le 5 octobre 2020, les zapatistes ont publié leur communiqué « Une montagne en haute mer », la surprise fut considérable, à l’annonce d’une tournée de l’EZLN (Ejército Zapatista de Liberación Nacional) sur les cinq continents, en commençant par l’Europe. Il faut dire que, si les zapatistes n’ont pas été avares d’initiatives tant au Chiapas qu’à l’échelle du Mexique (avec par exemple la Marche de la couleur de la terre, il y a tout juste vingt ans), c’est presque la première fois (à une petite exception près en 1997) qu’ils sortent des frontières de leur pays.

    Puis, le 1er janvier dernier, ils ont écrit et cosigné avec des centaines de personnes, collectifs et organisations une « Déclaration pour la vie » exposant les raisons de ce voyage : contribuer à l’effort pour que les luttes contre le capitalisme — qui sont indissociablement des luttes pour la vie — se rencontrent dans la pleine conscience de leurs différences et loin de toute volonté d’homogénéisation ou d’hégémonie.

    Au cours de ces six derniers mois, un ample processus d’organisation s’est mis en place à l’échelle européenne, mais aussi dans chaque pays ou « géographie », selon la terminologie zapatiste. Une coordination francophone a ainsi vu le jour, puis, en son sein, huit coordinations régionales fédérant collectifs et initiatives locales. Dans le même temps, l’EZLN a confirmé que se préparait une ample délégation composée de plus d’une centaine de ses membres, aux trois quarts des femmes, et qu’elle serait en outre accompagnée par des membres du Congrès national indien (...)

    #Mexique #zapatistes #Jérôme_Baschet #Europe #Gilets_jaunes #ZAD #planète_blessée

  • Covid-19, une maladie du « Capitalocène » ?
    https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-idees/covid-19-une-maladie-du-capitalocene


    Face à la multiplication de crises liées à la condition planétaire, dont le coronavirus est un avant-goût, certains craignent un effondrement à venir. Dans Basculements. Mondes émergents, possibles désirables.(La Découverte, 2021), Jérôme Baschet rejette cette idée d’effondrement, trop dépolitisée et déresponsabilisante à son goût, et préfère explorer, pour penser notre avenir, les basculements possibles.

    #capitalocène #anthropocène #colapsologie #capitalisme #chiapas #communaux #jerome_baschet

  • Réimaginer la terre avec les peuples autochtones

    Barbara Glowczewski

    https://lavoiedujaguar.net/Reimaginer-la-terre-avec-les-peuples-autochtones

    https://www.terrestres.org/2020/03/10/reimaginer-la-terre-avec-les-peuples-autochtones

    « À l’heure du plus grand défi de l’humanité, qui est la crise climatique causée par l’industrialisation du monde sous domination de la vision capitaliste, nous les Peuples Premiers, nous invitons le monde à revoir et reconsidérer sa relation avec ce que les Occidentaux appellent la Nature. Nous en dépendons complètement et pourtant nous restons continuellement sourds à ses cris de douleur. Chacun doit agir à son échelle, et la Guyane, en tant que pays amazonien à son rôle à jouer. La France, en tant que cinquième puissance mondiale doit assumer ses responsabilités et arrêter son hypocrisie. » Cette déclaration fut prononcée le 12 décembre 2019 par Yanuwana Christophe Pierre, réalisateur kali’na, président fondateur de la JAG (Jeunesse autochtone de Guyane), qui s’est mobilisée avec succès contre le projet de la Montagne d’Or, consortium de multinationales, russe et canadienne. Les peuples autochtones, habitants des forêts, savanes ou désert, soignaient la terre avant l’imposition de normes industrielles et administratives qui interdisent, par exemple en France, d’habiter l’endroit où l’on travaille, que ce soit une parcelle agricole ou un atelier d’artiste en ville. Le parc national en Amazonie guyanaise a autorisé le maintien de villages indiens mais leurs droits de chasse et de pêche, leurs pratiques ancestrales pour faire pousser leurs nourritures et construire leurs villages sont menacés tant par la normalisation des lois que par les orpailleurs clandestins qui polluent les rivières et la forêt en menaçant la survie de tous les habitants humains et non humains. (...)

    #peuples_autochtones #Barbara_Glowczewski #Irène_Bellier #Guyane #Montagne_d’Or #colonisation #Afrique #Australie #Canada #Mexique #Jérôme_Baschet #Malcom_Ferdinand

  • Basculements : Mondes émergents, possibles désirables, par Jérôme Baschet (Parution à La Découverte)
    http://www.palim-psao.fr/2021/03/basculements-mondes-emergents-possibles-desirables-par-jerome-baschet-par

    Nouveau livre de Jérôme Baschet, critiquant la collaspologie et la notion d’effondrement, et certaines formes d’anti-capitalisme, toujours en étant basé sur le les notions zapatistes du Chiapas (où il vit toujours) et la critique de la valeur. Et esquisses d’autres basculements possibles qu’un effondrement.

    Un livre à la croisée de différents courants : la critique de la valeur, l’appelisme, le zapatisme et la perspective fédéraliste-communaliste. Avec un bon dézingage de la perspective anticapitaliste tronquée et étatiste-autoritaire à la Frédéric Lordon. Un livre qui s’essaye à établir les scénarios des possibles, les critères de dépassement du capitalisme tout en abordant quelles seraient les questions stratégiques d’un nouvel anticapitalisme en cours de formation

    À la notion d’effondrement, qui dépolitise les enjeux en postulant une trajectoire unique et comme jouée d’avance, on opposera celle de basculements, qui permet de faire place à l’imprévisibilité croissante de notre temps et au rôle central de la mobilisation politique. Des basculements se produiront en effet, à relativement court terme, sur fond d’une crise systémique du capitalisme, certes produite par les « contradictions » environnementales qui ravagent la planète, mais aussi par des tensions internes entre un capitalisme fossile et un capitalisme techno-« écologique ». Sur cette base analytique, le livre esquisse plusieurs scénarios, tous parfaitement vraisemblables à ce stade.

    Il en est un sur lequel il attire particulièrement notre attention : celui d’une ouverture des possibles synonyme de basculements sociétaux et civilisationnels considérables qui nous engageraient vers des manières de vivre échappant aux logiques du système-monde capitaliste. Et nous placeraient face à des questions fondamentales : que peut être un agencement de la production qui renonce à la centralité des déterminations économiques ? Que peut être une politique qui privilégie l’autogouvernement populaire et assume une relocalisation communale ? Comment nouer de nouvelles relations aux non-humains qui cessent de nous extraire des interdépendances du vivant sans pour autant dissoudre entièrement la notion d’humanité ? Et par quels chemins faire croître de tels possibles ?
    Autant de questions auxquelles Jérôme Baschet – avec une érudition, une clarté et une liberté de pensée exceptionnelles – esquisse des réponses aussi plausibles et documentées qu’éminemment désirables.

    À 14min45 :
    https://www.youtube.com/watch?v=C74hOZMSLwg&t=885

    #Jérôme_Baschet #livre #capitalisme #anti-capitalisme #zapatisme #critique_de_la_valeur #collapsologie

  • Encyclopédie anarchiste
    Zapatiste (Rébellion)

    Jérôme Baschet

    https://lavoiedujaguar.net/Encyclopedie-anarchiste-Zapatiste-Rebellion

    À l’aube du 1er janvier 1994, les troupes de l’Armée zapatiste de libération nationale (Ejército Zapatista de Liberación Nacional) occupent sans combattre sept villes du Chiapas, dont sa capitale historique, San Cristóbal de Las Casas. Dénonçant l’exploitation et l’oppression des peuples indiens, la Première Déclaration de la forêt Lacandone est une déclaration de guerre à l’armée fédérale mexicaine et un appel à destituer le président Carlos Salinas de Gortari. Cette irruption ruine la fête des puissants et notamment de ce dernier qui, cette nuit-là, célébrait l’apothéose de sa politique néolibérale, avec l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena). Alors que le Mexique d’en haut rêvait de s’arrimer à la modernité du Nord, le Mexique d’en bas obligea à un complet renversement de perspective, en rappelant la réalité d’un tout autre pays. Celle d’un Mexique profond, ancré au Sud, dans la tradition des luttes armées latino-américaines ; celle d’un Mexique indien qui, ce jour-là, lançait un cinglant « ¡Ya basta ! » à cinq siècles d’oppression coloniale et de racisme toujours vivants. Un peu plus tard, le 1er janvier 1994 allait se charger également d’une signification planétaire : alors que triomphait la pensée unique néolibérale et le fameux There is no alternative de Margaret Thatcher, le geste audacieux des rebelles mayas était venu briser l’arrogante proclamation de la fin de l’Histoire qui faisait alors recette. En montrant qu’il était possible de rompre la chape de plomb du fatalisme et de la résignation, l’audace du soulèvement zapatiste a signifié pour beaucoup une féconde réouverture des perspectives de lutte. (...)

    #encyclopédie #anarchiste #Jérôme_Baschet #zapatiste #rébellion #histoire #Mexique #Chiapas #EZLN #autonomie

  • Basculements
    Mondes émergents, possibles désirables

    Ernest London

    https://lavoiedujaguar.net/Basculements-Mondes-emergents-possibles-desirables

    Dénonçant la notion d’effondrement, qui dépolitise les enjeux en postulant une trajectoire unique et comme jouée d’avance, Jérôme Baschet, qui a enseigné à l’Universidad Autonoma de Chiapas, à San Cristóbal de Las Casas, propose celle de « basculements » qui fait place, au contraire, à l’imprévisibilité croissante de notre temps et au rôle central de la mobilisation politique. Alors qu’« un microscopique fragment de l’à peine-vivant » a provoqué « la paralysie d’une machinerie aussi ample et ramifiée que l’économie mondiale », supposant la reproduction d’autres crises systémiques du capitalisme, il esquisse plusieurs scénarios, dont celui d’une ouverture des possibles qui nous engagerait vers des manières de vivre échappant aux logiques du système-monde capitaliste.

    Il tente, tout d’abord, de cerner les tendances principales que la crise du coronavirus a pu induire, amplifier ou affecter significativement : accélération de la numérisation généralisée ; modification des équilibres géostratégiques, confirmant l’effritement de l’hégémonie états-unienne et la montée en puissance de la Chine ; reconfiguration des circuits de la globalisation, notamment avec un mouvement de relocalisations productives dans un souci de souveraineté plutôt que dans une perspective écologique ; interventionnisme accru de l’État dont on attend une réponse face à la pandémie, que l’on critique ses manquements ou l’excès des mesures d’exception. Toutefois, ce serait une erreur de postuler une « opposition diamétrale » entre néolibéralisme et État, puisque le premier a toujours eu besoin du second pour assurer sa bonne régulation, l’État étant appelé à la rescousse pour socialiser les pertes et se désengageant à nouveau pour permettre la privatisation des bénéfices. (...)

    #Jérôme_Baschet #capitalisme #économie #globalisation #néolibéralisme #État #pandémie #crise #effondrement #modèle_chinois #Frédéric_Lordon #Murray_Bookchin #Erik_Olin_Wright #expérience_zapatiste #Gilets_jaunes #stratégies #rupture

  • Le vingt et unième siècle commence maintenant

    Jérôme Baschet

    https://lavoiedujaguar.net/Le-vingt-et-unieme-siecle-commence-maintenant

    Les historiens considèrent volontiers que le XXe siècle débute en 1914. Sans doute expliquera-t-on demain que le XXIe siècle a commencé en 2020, avec l’entrée en scène du SARS-CoV-2. L’éventail des scénarios à venir demeure, certes, très ouvert ; mais l’enchaînement des événements déclenchés par la propagation du coronavirus offre, comme en accéléré, un avant-goût des catastrophes qui ne manqueront pas de s’intensifier dans un monde convulsionné, marqué par les effets d’un réchauffement climatique en route vers 3 ou 4 degrés de hausse moyenne. Ce qui se profile sous nos yeux, c’est un entrelacement de plus en plus étroit des multiples facteurs de crise qu’un élément aléatoire, à la fois imprévu et largement annoncé, suffit à activer. Effondrement et désorganisation du vivant, dérèglement climatique, décomposition sociale accélérée, discrédit des gouvernants et des systèmes politiques, expansion démesurée du crédit et fragilités financières, incapacité à maintenir un niveau de croissance suffisant, pour ne mentionner que cela : ces dynamiques se renforcent les unes les autres, créant une extrême vulnérabilité qui tient au fait que le système-monde se trouve désormais dans une situation de crise structurelle permanente. Dès lors, toute stabilité apparente n’est que le masque d’une instabilité croissante. (...)

    #Covid-19 #Jérôme_Baschet #histoire #système-monde #Philippe_Sansonetti #Anthropocène #Capitalocène

  • « Le XXIe siècle a commencé en 2020, avec l’entrée en scène du Covid-19 », Jérôme Baschet
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/04/02/jerome-baschet-le-xxie-siecle-a-commence-en-2020-avec-l-entree-en-scene-du-c

    La pandémie est un fait total révélant que le système-monde se trouve désormais dans une situation de crise structurelle permanente, analyse l’historien Jérôme Baschet, dans une tribune au « Monde ».

    Tribune. Les historiens considèrent volontiers que le XXe siècle débute en 1914. Sans doute expliquera-t-on demain que le XXIe siècle a commencé en 2020, avec l’entrée en scène du Covid-19. L’éventail des scénarios à venir est, certes, encore très ouvert ; mais l’enchaînement des événements déclenchés par la propagation du virus offre, comme en accéléré, un avant-goût des catastrophes qui ne manqueront pas de s’intensifier dans un monde convulsionné par les effets d’un réchauffement climatique en route vers 3 °C ou 4 °C de hausse moyenne. Se profile sous nos yeux un entrelacement de plus en plus étroit des facteurs de crise qu’un élément aléatoire, à la fois imprévu et largement annoncé, suffit à activer.

    Effondrement et désorganisation du vivant, dérèglement climatique, décomposition sociale accélérée, discrédit des gouvernants et des systèmes politiques, expansion démesurée du crédit et fragilités financières, incapacité à maintenir un niveau de croissance suffisant : ces dynamiques se renforcent les unes les autres, créant une extrême vulnérabilité découlant du fait que le système-monde se trouve désormais dans une situation de crise structurelle permanente. Dès lors, toute stabilité apparente n’est que le masque d’une instabilité croissante.

    L’envoyé du vivant

    Le Covid-19 est une « maladie de l’anthropocène », ainsi que l’a relevé Philippe Sansonetti, microbiologiste et professeur au Collège de France. L’actuelle pandémie est un fait total, où la réalité biologique du virus est devenue indissociable des conditions sociétales et systémiques de son existence et de sa diffusion.

    Invoquer l’anthropocène – période géologique où l’espèce humaine modifie la biosphère à l’échelle globale – invite à prendre en compte une temporalité à triple détente : d’abord, les années récentes où, sous la pression des évidences sensibles, nous prenons conscience de cette époque nouvelle ; ensuite, les décennies de l’après-1945, avec l’essor de la société de consommation et la grande accélération de tous les marqueurs de l’activité productive (et destructive) de l’humanité ; enfin, le tournant des XVIIIe et XIXe siècles, lorsque la courbe des émissions de gaz à effet de serre décolle, en même temps que le cycle des énergies fossiles et de l’industrialisation.

    Le virus est l’envoyé du vivant, venu nous présenter la facture de la tourmente que nous avons nous-mêmes déclenchée. Anthropocène oblige, la responsabilité humaine est engagée. Mais de qui exactement ? Les trois temporalités mentionnées permettent d’être plus précis. A l’horizon le plus immédiat, s’impose la sidérante affaire de l’évaporation des stocks de masques depuis 2009 et l’indolence qui ne les reconstitue pas à l’approche de l’épidémie. Encore n’est-ce là qu’un aspect de l’accablante impréparation européenne.

    Cette incapacité à anticiper témoigne d’une autre maladie du temps : le présentisme, par quoi tout ce qui déborde l’immédiat s’évanouit. Le mode de gestion néolibéral de l’hôpital, froidement comptable, a fait le reste. Manquant de moyens, en sous-effectif et déjà épuisés en temps normal, les personnels soignants ont crié leur désespoir sans être entendus. Mais le caractère irresponsable des politiques menées est désormais avéré aux yeux de tous.

    « Capitalocène »

    Pour Philippe Juvin, chef des urgences de l’Hôpital Pompidou, à Paris, « des insouciants et des incapables » nous ont conduits à nous retrouver « tout nus » devant l’épidémie. Et si Emmanuel Macron a voulu s’ériger en chef de guerre, il ne devrait pas négliger le fait que cette rhétorique pourrait, un jour, se retourner métaphoriquement en accusation pour trahison.

    Cette incapacité à anticiper témoigne d’une autre maladie du temps : le présentisme, par quoi tout ce qui déborde l’immédiat s’évanouit
    Remonter à la seconde moitié du XXe siècle permet de repérer plusieurs causalités de la multiplication des zoonoses, ces maladies liées au passage d’un agent infectieux de l’animal à l’humain. L’essor de l’élevage industriel, avec son ignominie concentrationnaire, a aussi de déplorables conséquences sanitaires (grippe porcine, grippe H5N1, etc.). Quant à l’urbanisation démesurée, elle réduit les habitats des animaux et les pousse davantage au contact des humains (VIH, Ebola).
    Ces deux facteurs n’ont peut-être pas joué dans le cas du SARS-CoV-2. En revanche, la vente d’animaux sauvages sur le marché de Wuhan n’aurait pas eu de telles conséquences si cette ville n’était devenue l’une des capitales mondiales de l’industrie automobile. La globalisation des flux économiques est bel et bien à l’œuvre, d’autant que l’expansion insensée du trafic aérien a été le vecteur d’une fulgurante diffusion planétaire du virus.

    Enfin, il faut aussi se reporter deux siècles en arrière, pour donner à l’anthropocène son véritable nom : « capitalocène ». Car il n’est pas le fait de l’espèce humaine en général, mais d’un système historique bien spécifique. Celui-ci, le capitalisme, a pour caractéristique majeure que l’essentiel de la production y répond, avant tout autre chose, à l’exigence de valorisation de l’argent investi. Même si les configurations en sont variables, le monde s’organise alors en fonction des impérieuses nécessités de l’économie.

    Compulsion productiviste mortifère

    Il en résulte une rupture civilisationnelle, dès lors que l’intérêt privé et l’individualisme concurrentiel deviennent les valeurs suprêmes, tandis que l’obsession de la pure quantité et la tyrannie de l’urgence conduisent au vide dans l’être. Il en résulte surtout une compulsion productiviste mortifère qui est l’origine même de la surexploitation des ressources naturelles, de la désorganisation accélérée du vivant et du dérèglement climatique.

    Au sortir de l’urgence sanitaire, rien ne sera plus comme avant, a-t-il été dit. Mais que changer ? L’examen de conscience s’en tiendra-t-il à une temporalité de courte vue ou considérera-t-on le cycle complet du « capitalocène » ? La véritable guerre qui va se jouer n’a pas le coronavirus pour ennemi, mais verra s’affronter deux options opposées : d’un côté, la perpétuation du fanatisme de la marchandise et d’un productivisme compulsif menant à l’approfondissement de la dévastation en cours ; de l’autre, l’invention, qui déjà tâtonne en mille lieux, de nouvelles manières d’exister rompant avec l’impératif catégorique de l’économie et privilégiant une vie bonne pour toutes et tous.

    Préférant l’intensité joyeuse du qualitatif aux fausses promesses d’une impossible illimitation, celle-ci conjoindrait le souci attentif des milieux habités et des interactions du vivant, la construction du commun, l’entraide et la solidarité, la capacité collective d’auto-organisation.

    Le coronavirus est venu tirer le signal d’alarme et mettre à l’arrêt le train fou d’une civilisation fonçant vers la destruction massive de la vie. Le laisserons-nous repartir ? Ce serait l’assurance de nouveaux cataclysmes aux côtés desquels ce que nous vivons actuellement paraîtra a posteriori bien pâle.

    Jérôme Baschet a été enseignant-chercheur à l’EHESS (Paris). Il est l’auteur, entre autres, de « Défaire la tyrannie du présent. Temporalités émergentes et futurs inédits » (La Découverte, 2018) et « Une juste colère. Interrompre la destruction du monde » (Divergences, 2019).
    Jérôme Baschet(Historien)

  • Lettre à Cléone, depuis le Chiapas

    Jérôme Baschet

    https://lavoiedujaguar.net/Lettre-a-Cleone-depuis-le-Chiapas

    Chère Cléone,

    C’est une joie de vous écrire, même si je sais l’impossibilité de se porter au degré d’intensité de votre verbe ardent et de votre rebelle périple à travers géographies et calendriers.

    Bien sûr, le sentiment de fraternité-sororité m’inclinerait au tutoiement, mais votre être multiple impose tant de respect. Vous êtes si nombreuse, Cléone, si heureusement collective, que je crois plus convenable d’opter pour la seconde personne du pluriel.

    Vous venez de plus loin que nous, et pourtant vous nous avez devancés. Chargée de féroces siècles d’expérience, vous avez pris de l’avance sur nos futurs possibles. Les plus tragiques, mais aussi les plus désirables d’entre eux. Ceux dont nous avons le devoir de débattre davantage, de parler sans cesse plus fort. Ceux qu’il nous incombe de rendre dès maintenant visibles, hautement sensibles et puissamment actifs. Non pour demeurer confits dans une attente béate ou pétrifiés par l’angoisse, mais pour nourrir l’action présente, au milieu des immenses périls qui s’accumulent. (...)

    #Jérôme_Baschet #Chiapas #Cléone #zapatistes #Rojava #Gilets_jaunes

  • Interrompre la destruction du monde

    Ernest London

    https://lavoiedujaguar.net/Interrompre-la-destruction-du-monde

    Jérôme Baschet
    Une juste colère. Interrompre la destruction du monde

    En automne 2018, « une véritable irruption populaire a fait vaciller le pouvoir », en France. Depuis le Chiapas rebelle où il vit, Jérôme Baschet a observé le mouvement des Gilets jaunes comme annonciateur de nouvelles formes d’explosions sociales vouées à se multiplier, expression d’une « juste colère », pendant de la « digne rage » des zapatistes. Avec méthode, il cherche à encourager et à amplifier cette dynamique afin d’« interrompre la destruction du monde ».

    La goutte d’eau a fait déborder le vase. « Et là où beaucoup s’affligeaient de ne voir que le marécage stagnant d’une majorité dite silencieuse et passive ont surgi mille torrents impétueux et imprévisibles, qui sortent de leur cours, ouvrent des voies inimaginables il y a un mois encore, renversent tout sur leur passage et, malgré quelques dévoiements initiaux, démontrent une maturité et une intelligence collective impressionnante. » (...)

    #Jérôme_Baschet #Gilets_jaunes #Chiapas #Macron #démocratie #économie #Capitalocène #Wallerstein #collapsologie #blocage #dépossession #soulèvement #autonomie

  • L’autonomie zapatiste avance et nous interpelle

    Jérôme Baschet

    https://lavoiedujaguar.net/L-autonomie-zapatiste-avance-et-nous-interpelle

    Au Chiapas, le mois d’août a apporté une nouvelle réjouissante qui devrait susciter l’intérêt de toutes celles et ceux qu’atterrent l’emballement productiviste et sa spirale destructrice. Dans un contexte pourtant difficile, marqué par la nécessité de défendre leurs territoires face aux mégaprojets très offensifs du nouveau gouvernement mexicain, les zapatistes ont annoncé d’importantes avancées dans la construction de leurs instances d’autogouvernement, ainsi qu’une nouvelle phase d’échanges et d’interactions avec d’autres luttes, au Mexique et ailleurs.

    Quatre nouvelles communes autonomes viennent s’ajouter aux vingt-sept qui existaient depuis 1994 et sept nouveaux caracoles, avec leurs « conseils de bon gouvernement » respectifs, s’ajoutent aux cinq déjà créés en 2003. Tout en invitant à participer à la construction de ces nouveaux caracoles (selon des modalités qui seront précisés ultérieurement), le même communiqué, signé par le sous-commandant Moisés, porte-parole de l’EZLN, annonce une impressionnante salve de rencontres, nationales et internationales (...)

    #Mexique #Chiapas #EZLN #zapatistes #autonomie #autogouvernement #peuples_originaires #avancées #rencontres #territoires #femmes #arts #sciences #cinéma #Samir_Flores #López_Obrador #gilets_jaunes

  • Une juste colère
    https://floraisons.blog/podcast9

    Nous rencontrons Jérôme Baschet à propos de son livre" Une juste colère, Interrompre la destruction du monde", qui sort le 12 septembre aux Éditions Divergences. Tout d’abord on reviendra sur la civilisation marchande et sa critique. Puis on s’attardera sur le mouvement des Gilets Jaunes, notamment en le mettant en parallèle avec le mouvement zapatiste. Pour terminer on proposera une réflexion sur la complémentarité des stratégies et de la nécessité de la lutte offensive. Durée : 1h37. Source : floraisons

    https://d3ctxlq1ktw2nl.cloudfront.net/staging/2019-7-30/22103885-44100-2-fa819f7174ab4.m4a

  • Miroir du ciel

    Natalie

    https://lavoiedujaguar.net/Miroir-du-ciel

    Paris, le 8 juillet 2019
    Amis,

    L’École de la terre, dans sa version limousine, vient de clôturer sa semaine d’intenses cogitations intitulée : « Désarchiver le passé ». On put entre autres y écouter Rocío Martinez, Jérôme Baschet, Pierre-Olivier Dittmar, Élise Haddad, Alèssi Dell’Umbria, Sophie Wahnich… On put également s’entendre et discuter sans crainte, boire et danser la bourrée, et tant d’autres choses encore.

    Marie-France Houdart, qui est anthropologue et vit à demeure dans la région depuis quelques années, nous entretint — en altitudes boisées, puis, pour conclure, au pied d’une fontaine villageoise — des « Mémoires de l’eau et de la terre ». Sa géniale conférence (laquelle tenait de l’art des conteuses) nous remit en tête ceci : l’eau, miroir du ciel, est un haut lieu de pouvoirs et de légendes. Retour aux sources, manière de nous agiter les mémoires endormies, ou tentative de nous édifier ? Marie-France nous raconta une très ancienne histoire selon laquelle, au fond d’une fontaine vit une vieille. Le sol de sa maison s’enracine à la surface de l’eau car la vieille vit tête à l’envers, et, lorsqu’il lui arrive de grimper tout au fond, donc sur le toit, la vieille touche au ciel. (...)

    #École_de_la_terre #histoire #Limousin #Jérôme_Baschet #Marie-France_Houdart #Mémoires_de_l’eau #chimères #Parlement #goélands #sauroctones #tétrapodes #Apocalypse

  • Vingt-cinq ans d’insurrection zapatiste :
    « C’est une forme de démocratie réelle, radicale »

    https://lavoiedujaguar.net/Vingt-cinq-ans-d-insurrection-zapatiste-C-est-une-forme-de-democrati

    Le 1er janvier 1994, jour d’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange nord-américain (Alena), commençait le soulèvement zapatiste dans le sud du Mexique. Communes autonomes, conseils de bon gouvernement, assemblées régionales, propriété collective des terres : Jérôme Baschet revient pour Rapports de force, site d’information pour les mouvements sociaux, sur cette expérience longue de vingt-cinq ans.

    Les zapatistes ont montré qu’une autre voie de transformation radicale était possible. C’est celle qu’ils dénomment autonomie et qui associe autogouvernement populaire et formes de vie autodéterminées. Elle ne demande qu’à croître partout où la dévastation provoquée par l’hydre capitaliste se fait de plus en plus flagrante et où toutes les solutions traditionnelles ont montré leurs limites ou leurs impossibilités. Cet esprit de l’autonomie n’est peut-être pas si éloigné de ce qui s’exprime dans les courants les plus novateurs des gilets jaunes, tels qu’on peut les voir à l’œuvre notamment dans la récente Assemblée des assemblées convoquée, fin janvier, à Commercy.

    #Mexique #zapatistes #Jérôme_Baschet #entretien #démocratie #révolution #rébellion #autonomie

  • La Rébellion zapatiste

    Ernest London

    https://lavoiedujaguar.net/La-Rebellion-zapatiste

    Jérôme Baschet analyse comment le zapatisme est une critique, un dépassement du guévarisme. Il raconte le processus de transformation d’un groupe d’avant-garde révolutionnaire en un mouvement indigène de résistance. L’EZLN est une guérilla qui s’est transformée en armée régulière en surmontant son extériorité avec la population paysanne, en passant d’une lutte politico-militaire à une lutte plus politique que militaire, en rupture avec la tradition latino-américaine. « Le zapatisme est la guérilla de la fin de la guérilla. »

    Le zapatisme est également une critique du léninisme dans le sens où il refuse la prise du pouvoir, militaire comme électorale, mais construit une nouvelle forme de pouvoir politique par en bas, une organisation politique construite depuis la société elle-même, dans une logique d’autonomisation et d’auto-organisation. Même si l’origine marxiste du « cocktail zapatiste » n’est jamais niée, le zapatisme revendique le droit à l’indéfinition et apparaît comme « une critique en acte des expériences révolutionnaires du XXe siècle ». (...)

    #Jérôme_Baschet #essai #Mexique #zapatisme #EZLN #guérilla #critique #léninisme #recension

  • 25 ans de l’#EZLN : Amère célébration

    Face à la menace que représente une avancée aussi brutale de l’hydre capitaliste, ici parée du masque du progressisme, la posture zapatiste s’est donc exprimée avec une extrême fermeté. « Nous n’allons pas nous laisser faire ». « S’ils viennent un tant soit peu nous provoquer, nous nous défendrons ». « Nous allons nous défendre ; nous allons nous battre si c’est nécessaire ».
    /.../ Un autre aspect des paroles de Moisés a suscité de nombreux commentaires et interrogations. Le porte-parole zapatiste a en effet martelé, tout au long de son discours, un « NOUS SOMMES SEULS ! » reçu par beaucoup comme un véritable coup de poing dans l’estomac.

    C’est une Autre Pensée qui me vient en lisant les réactions et interrogations que transmet #Jérôme_Baschet devant cette solitude assumée et même revendiquée : elle me rappelle ce qui m’a fait rentrer en France quand #El_Sub nous a renvoyé-e-s nous battre contre chaque tête de l’Hydre Capitaliste dans chaque pays en 2016. Seul moyen d’en venir à bout.
    Ce n’est qu’en nous occupant, frontalement, des chemins tortueux qu’emprunte cette hydre, partout avec l’aide des progressistes, socialistes, en marchistes, communistes même parfois, que nous pourrons venir à bout de cette folie destructrice en cours.
    Et c’est précisément pour ça que je suis mal devant l’avenir aménagé de l’ex #zad #nddl tout comme je suis mal devant les revendications des #giletsjaunes. Précisément pour ça que je suis aussi critique. Mais aussi précisément pour ça que je n’en veux pas à celleux qui luttent pour survivre quand même.
    Tenter de s’aménager une survie face à la gueule de l’Hydre, face à la guerre (car il est certain depuis avril 2018 que le gouvernement FR nous fait la guerre) c’est humain. Je suis trop couarde moi-même pour condamner ça. Mais il ne faut pas me demander d’y voir une victoire.
    La lucidité d’un #Moisés, d’un #Galeano, et de tant d’autres, souvent Indigènes, c’est à dire encore proches de l’Essence Vitale et sachant que tout est lié, sont autant de phares dans la tempête qui se déchaîne. Croire en « notre » sécurité lors d’une pause en fond de cale est un leurre : le navire sombre.

    https://lundi.am/Amere-celebration

  • Notes anthropologiques (XXV)

    Georges Lapierre

    https://lavoiedujaguar.net/Notes-anthropologiques-XXV

    Mexico 2018
    Première partie
    De l’idéologie et de la réalité I

    Il est grand temps de distinguer l’idéologie de la réalité, et vice versa ! La fin visée par une autre anthropologie est d’arriver après un voyage mouvementé à la vaste plage de la réalité. Le plus souvent nous parlons idéologiquement de la réalité. Tous ceux qui prétendent décrire ou analyser la réalité dans laquelle nous nous trouvons sont des idéologues et, bien souvent, les idéologues sont aussi des militants qui cherchent à imposer leur vision ou une certaine vision de la réalité. Ces idéologues sont en général payés par l’État et leur vision de la réalité ne s’éloigne pas de celle voulue par la pensée dominante, leur appréhension ne s’écarte guère d’un convenu plus ou moins implicite et ce qu’ils présentent comme des nouveautés a la saveur du bon sens et du bon goût reconnaissable entre mille, et dans laquelle tous se reconnaissent avec une certaine satisfaction. Quand ils ne sont pas directement payés par l’État, les idéologues portent en eux l’idée de l’État, quoi qu’ils disent et quoi qu’ils fassent. L’idéologie est le propre d’une pensée séparée. (...)

    #Mexique #réalité #idéologie #histoire #Jérôme_Baschet #présentisme #capitalisme

  • Adieux au #capitalisme. #Autonomie, société du #bien_vivre et multiplicité des mondes

    Il est temps de rouvrir le futur. Et d’engager résolument la réflexion sur ce que peut être un #monde_libéré de la #tyrannie_capitaliste. C’est ce que propose ce #livre, en prenant notamment appui sur les expérimentations sociales et politiques accumulées par l’insurrection et les communautés zapatistes, une « #utopie_réelle » de grande envergure.
    Pratiquer une #démocratie_radicale d’#autogouvernement et concevoir un mode de construction du #commun libéré de la forme #État ; démanteler la logique destructrice de l’expansion de la #valeur et soumettre les activités productives à des choix de vie qualitatifs et collectivement assumés ; laisser libre cours au #temps disponible, à la #dé-spécialisation des activités et au foisonnement créatif des #subjectivités ; admettre une véritable #pluralité des chemins de l’#émancipation et créer les conditions d’un véritable #échange_interculturel : telles sont quelques-unes des pistes qui dessinent les contours d’un #anticapitalisme non étatique, non productiviste et non eurocentrique.
    En conjuguant un effort rare de projection théorique avec une connaissance directe de l’une des expériences d’autonomie les plus originales et les plus réflexives des dernières décennies, #Jérôme_Baschet s’écarte des vieilles recettes révolutionnaires dont les expériences du XXe siècle ont montré l’échec tragique. Il propose d’autres voies précises d’élaboration pratique d’une nouvelle manière de vivre.


    http://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Adieux_au_capitalisme-9782707177230.html
    #livre #zapatisme #Etat-nation #productivisme #résistance #alternatives

  • Défaire la tyrannie du présent et faire front avec la ZAD

    Franz Himmelbauer

    https://lavoiedujaguar.net/Defaire-la-tyrannie-du-present-et-faire-front-avec-la-ZAD

    Jérôme Baschet
    Défaire la tyrannie du présent

    Ce matin dès six heures (et probablement avant, mais je dormais encore), la radio crache ses « infos » sur l’expulsion en cours à Notre-Dame des Landes. Il y a une journaliste sur place (une envoyée de cette radio, je veux dire) : les médias, une fois de plus, ont été « embarqués » dans les fourgons de la police. Mais les flics ne les laissent pas approcher de trop près le théâtre des opérations. L’envoyée spéciale se plaint de ne rien voir, dans la brume épaissie par les lacrymos.

    Un coup d’œil à zad.nadir.org, le site de la ZAD. Le premier message d’alerte a été émis un peu avant trois heures et demie du matin. Le « flash infos » rapporte ce tweet du bouffon qui sert de sinistre de l’Intérieur : « Ce matin, à partir de 6h, la @Gendarmerie débutera une opération d’expulsion des occupants illégaux des terrains de Notre-Dame-des-Landes. » La « @Gendarmerie »…

    #lecture #Jérôme_Baschet #historicité #présentisme #délocalisé #Notre-Dame-des-Landes #Michaël_Ferrier #Fukushima #demi-vie