Face à l’arbitraire patronal et au harcèlement, le syndicalisme s’implante dans le jeu vidéo - Basta !
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20 février 2023 par Simon MauvieuxSouvent présentée comme créatrice d’emplois, l’industrie du jeu vidéo peine désormais à se cacher la réalité de ses conditions de travail. Une partie des travailleurs du secteur commence à se syndicaliser. Et ils se font de plus en plus entendre.
Le drapeau rouge et noir siglé « STJV » intrigue alors que la place d’Italie à Paris se remplit de monde pour une deuxième grande journée de mobilisation contre la réforme des retraites.« Vous êtes quelle organisation ? » demande un homme aux couleurs de la CFDT. « On est le Syndicat des travailleuses et travailleurs du jeu vidéo », répond le porteur du drapeau.
Encore peu connu du grand public et des acteurs des mouvements sociaux, le STJV attire de nouveaux adhérents depuis sa création en 2017 et multiplie les actions ces derniers mois. Ils sont maintenant plusieurs dizaines de développeurs, designers, graphistes 3D, travaillant pour des fleurons du secteur, comme Ubisoft, Don’t Nod ou Gameloft, à rejoindre les manifestations contre la réforme des retraites.
« Le jeu vidéo est un secteur très peu syndiqué, peu politisé, mais d’énormes pas sont faits depuis quelques années », se félicite Frédéric* [1], développeur et l’un des cofondateurs du STJV. Le jeu vidéo a longtemps été un milieu à part, presque incompatible avec le syndicalisme.
« Nos patrons ne connaissent pas forcément la loi »
« C’est la première fois que je fais grève », explique Thomas*, designer de l’expérience utilisateur depuis juillet dernier dans un studio parisien. Il poursuivait ses études lorsque le STJV est né et s’est syndiqué dès qu’il a commencé à travailler. « Il y a une culture de la neutralité dans le jeu vidéo, cet esprit startup où on ne parle pas vraiment de politique, témoigne-t-il. Mais en fait, on est tous confrontés à un moment à de mauvais traitements, nos patrons ne connaissent pas forcément la loi et le fait d’en parler, ça aide à créer une conscience collective. »
À ses côtés, Julia*, 26 ans, graphiste 3D, voit d’un très bon œil la syndicalisation croissante du secteur.« C’est rassurant de savoir qu’on peut compter sur le STJV, et que des gens commencent à avoir cette conscience-là. Il y a des actions, des grèves, ça permet de libérer la parole sur les conditions de travail », se réjouit-elle.
Pierrick*, 15 ans d’expérience dans le jeu vidéo, a vu éclore le syndicalisme naître dans le secteur au fil de sa carrière. Pas encore adhérent au STJV, il pourrait franchir le pas. « J’ai vécu des trucs hallucinants dans ma carrière et il n’y avait rien pour s’opposer à ça, on a longtemps été tout seul dans nos coins à vivre les mêmes problèmes et on ne pouvait pas vraiment se rebeller, se rappelle-t-il. Les syndicats répondent à de vrais besoins. »