• Corona Chroniques, #Jour49 - davduf.net
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    Ailleurs, un autre front se dessine : celui de qui parle, et de qui nomme. Après quatre jours sans trop rien dire, les sociétés de rédacteurs des principaux journaux réagissent enfin à la drôle d’idée du gouvernement, surgie en milieu de semaine : la labellisation des « sources d’informations sûres et vérifiées » en cette période de #Covid19 qui « favorise la propagation de #fakenews » (selon l’annonce de #Sibeth_Ndaye, grande pourvoyeuse en la matière, porte-parole du gouvernement, et auteure de l’inoubliable « J’assume de mentir pour protéger le président de la République »). Drôle, délétère et désespérée compilation de bons points sur le site officiel de #Matignon : qu’un gouvernement soit à ce point acculé pour appeler à la rescousse les services de fact checking de la presse en dit long. Sur lui, en premier lieu — mais aussi sur le monde des médias. Durant des décennies, l’essentiel exercice de fact checking consistait, dans les grandes rédactions anglo-saxonnes, à faire vérifier par d’autres leurs propres informations, avant de glisser en terrain de chasse aux rumeurs réseaux-sociales, vérificateurs-vitrines d’un journalisme de neutralité apparente, de moins en moins enclin à descendre dans l’arène, et se contenant d’en relater une partie des aventures, au point que certains, comme le philosophe #Alain_Cambier, parlent d’expédient efficace mais insuffisant.

    Au Figaro, #Arnaud_Benedetti déclare : « L’escalade de l’engagement, [c’est quand] une structure ne parvient plus à enrayer la mécanique de déni qu’elle a enclenché. Sa survie est alors indexée sur la perpétuation de ce déni. Ce n’est là plus l’État légal-rationnel mais une forme pathologique d’État. L’administration fédérale aux États-Unis savait dès 1965 qu’elle avait perdu la guerre au Vietnam, mais elle a préféré mentir à son opinion. C’est un peu la même chose avec la pénurie des masques qui n’a pas fini de fragmenter la réputation de l’exécutif et de démonétiser sa parole. »

    Demain, Après demain, ce terrain de la parole prise — comme on on prend position (tireur couché, ou franc tireur ; reporter ou copiste ; narrateur ou falsificateur) — sera probablement plus dévastateur que jamais, et #Debord plus spectaculaire qu’Avant (« Dans le monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux. »). Et c’est Pendant que chacun fourbit ses armes — d’où la voracité à tout lire, tout le temps, dans nos dimanches de confinement et de tous les jours — c’est maintenant que se constitue notre arsenal d’Après, à coups de banderoles vers la rue, de carnets vers les siens ; à grands renforts de comités informels et de graffitis fugaces (aujourd’hui, sublime, vu sur Twitter : drone d’ambiance, cet État d’urgence).

  • Corona Chroniques, #Jour48 - davduf.net
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    Conseil des ministres exceptionnel « dédié à la déclinaison opérationnelle des mesures » du #Déconfinement. À #Olivier_Véran, la bonne bouille inoffensive de la Santé, de venir annoncer la mauvaise nouvelle, la loi d’Etat d’urgence sanitaire s’inscrira dans la lignée de ses grandes sœurs : elle fera durer le plaisir du pouvoir et les supplices sur les libertés, elle sera prolongée de deux mois, jusqu’au 24 juillet, et plus si affinités (et l’on sait combien la République excelle dès qu’il s’agit de permanenter ses exceptions).

    Comme toujours, double discours. Sans rire : « notre stratégie repose d’abord sur l’adhésion des Français », ou : « nous faisons confiance à l’esprit de responsabilité des Français », quand, dans les faits, depuis deux mois, tout n’est que verticalité du pouvoir et démonstrations de force, paroles culpabilisantes et saillies moralisatrices, honte bue et masques perdus, infantilisation et incompétences, surveillance et punitions, #Lallement et amendes, et maintenant ça : des « brigades d’ange gardien », dixit Mielleux Véran, pour désigner d’obscurs ficheurs de « contact tracing ». Vient le tour de #Castaner, autre double, maléfique cette fois, à la mode confinée — barbe de quarantaine, cheveux qui s’allongent, ventre qui sommatise. Le ministre de l’Intérieur annonce le vent mauvais, la policisation rampante de la société : le gouvernement a décidé d’ « élargir la liste des personnes habilitées à constater les infractions ». Désormais, si la loi passe (et elle passera mardi, à priori), les pas encore formés (adjoints de sécurité, gendarmes adjoints volontaires), les vieux de la veille (réservistes police et gendarmerie) et les recalés des écoles de police (vigiles des transports) « pourront constater les non-respects de l’état d’urgence sanitaire et le sanctionner ». On sait ce que ce surcroit de pouvoir annonce : il est un avant goût de la mise en place du flicage généralisé de l’Après. Pas encore total, mais déjà tautologique. Cet après midi, Hassina Mechaï écrit : « Le déconfinement s’annonce comme la prolongation du confinement par d’autres moyens. Un confinement portatif où nous serons tous coupés des uns des autres dans un espace public qui ne fera plus commun. »

    Pour s’en rendre compte, il suffit d’écouter attentivement #Christophe_Castaner, non comme font les 20H, quand le ministre égrène les nouvelles dispositions, mais quand il tente de les justifier, dans un joyau de #novlang : « L’objectif du gouvernement n’est pas d’empêcher les gens de se déplacer. L’objectif du gouvernement, c’est d’empêcher que le virus se déplace. Or, pour se déplacer, le virus utilise celles et ceux des Français qui se déplacent. »

  • Corona Chroniques, #Jour47 - davduf.net
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    12h, une poignée de volontaires des #Brigades_de_Solidarité_Populaire gagne la place du marché Croix de Chavaux à #Montreuil. Dans leurs cageots, des invendus de Rungis, qu’ils sont allés chercher hier, des fruits qu’ils ont triés, et des légumes qu’ils distribuent à une centaine de pauvres parmi les pauvres, les confinés de TOUT ; geste simple et magnifique, geste barrière suprême, « élan solidaire et autogestionnaire », comme ils disent ; une solidarité pensée, qui doit plus à l’Après qu’à l’Avant, à l’autodéfense qu’à la charité. Depuis le #Corona, le camion des BSP (création italienne, depuis internationale) maraude dans les quartiers populaires, un camion fait des tournées en continu, deux cantines mitonnent des repas prêts pour ceux qui n’ont même pas de cuisine.

    Mais 13h20, les voitures de police qui pimponnent. Mais 13h20, les motos des voltigeurs qui débarquent. Mais 13h20, #Lallement qui fait sonner la troupe. C’est brigades contre brigades, braves contre #BRAV (Brigades de Répression de l’Action Violente Motorisées). La distribution gratuite de denrées est interrompue. On nasse, on verbalise, pour manifestation non déclarée. Aux Brigadistes de rue — gantés, masqués, gelés — qui se plaignent d’être contrôlés comme Avant, sans précautions sanitaires ni distance d’aucune sorte, les Brigadistes de #préfecture rétorquent comme dans un aveu de l’Ordre imbécile : « Vous n’avez rien à dire, vos masques ne sont pas aux normes. »

  • Corona Chroniques, #Jour44 - davduf.net
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    Il est 19h36, Édouard Philippe tient le perchoir, comme un bientôt souvenir. Depuis maintenant plus de trois heures trente, l’Assemblée assemble ses discours — ils disent débat mais s’applaudissent, ils disent démocratie mais swipent en attendant leur tour de porte-parole ou de portefeuille ministériel — cette Assemblée qui nationalise nos attentions dans un alignement parfait de médiocrité et de mensonges parfaits : un dénommé Gilles Legendre remercie le chef du gouvernement de parler avec « le même principe de vérité et de transparence avec nous » qu’avec le peuple « depuis le début de cette crise » — et l’on songe, immédiatement, aux confidences de l’ancienne ministre de la Santé, démissionnaire d’avant l’Épreuve : « Quand j’ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections municipales n’auraient pas lieu. On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade. »

    Entre deux députés, la petite télé en fenêtre incrustée sur l’ordinateur laisse échapper son inconscient, et son inconscient laisse échapper ce que le gouvernement ne peut tout à fait dire (c’est le jeu d’idiot utile auquel s’adonnent éditorialistes et politiques depuis des lustres, ils se nourrissent plus sûrement qu’ils ne se contredisent et, en période de crise, plus que jamais) : ce 11 mai à venir, censé être celui du #déconfinement, est « une libération sous condition » (Anna Cabana, BFM TV, spécialiste de la spécialité). Avec des régions au régime de semi liberté, donc, en rouge, en vert, une double peine qui s’annonce plutôt, nouvelle infantilisation de nos destins, sommés que nous sommes d’attendre et de nous taire, alors qu’on pressent tous ce qui se passe : rien, il ne se passe rien. Juste des empoignades. Pour faire les grands.

    Et puis, il est 19h37, l’heure des braves, quand la journée se termine, une de moins au cauchemar de nos coronas ; quand on se dit qu’il va bientôt être temps d’actionner le CTRL-W et fermer ce soupirail à pixels ; cette heure où l’on n’attend plus rien de nos attentes mais où, soudain, Edouard Philippe, d’un ton las, et exténué, de ses grands bras secs, se fait petit, se fait comme nous, impuissant, et seul, à lire ses notes, à dire qu’il va répondre à ça, et puis non, et puis à ça, et qu’il finit par lâcher lunettes et superbe : « Je choisis entre de mauvaises décisions… »

    Ce n’est pas un lapsus, pas même un aveu, c’est plus sobre que le cynisme avoué mais pas pardonné d’une Agnès Buzyn : c’est un déconfinement à lui seul, une soupape de l’esprit et du corps, une façon de déchirer son attestation, et les mensonges. Qu’il ajoute, dans un rattrapage de bonne figure « …entre des décisions moins mauvaises que d’autres » n’y change rien, en baissant la garde, le temps d’une phrase, le premier des ministres vient de reconnaître que nos colères ne sont pas vaines.

  • Corona Chroniques, #Jour43 - davduf.net
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    Sur France Info, la procureur de Nanterre tente de relativiser ce qui s’est déroulé sur #L’Ile-Saint-Denis, dans la nuit de samedi à dimanche. Coursé par la police, un cambrioleur présumé se jette à la Seine. Quand il est repêché, les injures racistes fusent. Un policier : « Un bicot comme ça, ça ne nage pas », un autre : « Ha ha ha, ça coule. Tu aurais dû lui accrocher un boulet au pied ». Pour la représentante du parquet, c’est évidemment inadmissible mais elle demande à ce qu’on ne généralise pas.

    Que le #Confinement soit, à l’évidence, marqué par un sur-#brutalité policière dans les quartiers populaires n’est pas évoqué. Pour ce cas là, justice sera faite, promet-elle. Pour celui-ci. Comme si ce qui importait, plus que tout, au fond, serait de continuer à narrer la fable d’une justice indépendante, d’une séparation des pouvoirs, persister à faire croire au mythe des démocraties bourgeoises pour reprendre Agamben. Ici, pour une raison implacable : la vidéo qui a capté l’instant a ce détail qui fait toute le différence, ils étaient deux à saisir la scène, un vidéaste et un preneur son [1]. L’abus de pouvoir est parfaitement audible, parfaitement odieux.

    Sur Twitter, les #syndicats de #police embrayent. Et me revoilà confiné avec eux, comme avant notre escapade, comme avant les cinq jours avec les enfants, retour à l’anormal pour bon et de mauvais : les yeux rivés sur l’écran, en pas même un quart d’heure, je plonge. A leur tour, si le syndicats lâchent leurs collègues, c’est évidemment pour mieux resserrer leurs rangs et tenter de faire oublier le racisme systémique dans une partie de la Maison police. Il s’agit avant tout d’isoler les cas du cluster, de les mettre en quarantaine. Et mieux : de les exhiber. Enfin, c’est au tour des meilleurs #journalistes de #préfecture de voler au secours de leurs sujets et de leurs sources (c’est leur droit, et leur militantisme) : dans leur fougue, ils ne voient pas qu’ils se précipitent, et leurs alliés, dans leur propre perte.

    (Comment sortir de là ?)

  • Corona Chroniques, #Jour42
    http://www.davduf.net/corona-chroniques-jour42

    DIMANCHE 26 AVRIL 2020 - JOUR 42 MATIN, MIDI et SOIR. Déconnexion totale, pour match de foot épique au stade de la Prairie, première (et dernière) rencontre à huis-clos de la Corona Coupe 2020. Les Pros contre les Amateurs ; les pros étaient deux ; les amateurs, quatre ; la presse, absente. Un match fou pour époque folle : sans préparation, sans protection, ni masque, ni crampons, avec un soupçon d’antijeu (démocratique), trois lois d’urgence (deux penalties, un coup franc), des licences de jeu (...) #Coronavirus

    / Une

    http://www.davduf.net/IMG/mp3/merci_a_toi_o_soignant_vlasta_ray.mp3

  • Corona Chroniques, #Jour42
    http://www.davduf.net/corona-chroniques-jour41

    DIMANCHE 26 AVRIL 2020 - JOUR 42 MATIN, MIDI et SOIR. Déconnexion totale, pour match de foot épique au Stade de la Prairie, première (et dernière) rencontre à huis-clos de la Corona Coupe 2020. Les Pros contre les Amateurs ; les pros étaient deux ; les amateurs, quatre ; la presse, absente. Un match fou pour époque folle : sans préparation, sans protection, ni masque, ni crampons, avec un soupçon d’anti jeu (démocratique), trois lois d’urgence (deux penalties, un coup franc), des licences de jeu (...) #Coronavirus

    / Une

    http://www.davduf.net/IMG/mp3/merci_a_toi_o_soignant_vlasta_ray.mp3

  • Corona Chroniques, #Jour40 - davduf.net
    http://www.davduf.net/corona-chroniques-jour40
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    « Ce qui s’est passé, là, c’est inadmissible. Nous dire que, « oui, on aurait dû prévoir », mais ils n’ont jamais rien prévu ! L’État n’a jamais rien prévu, ils s’en foutent de nous ! La seule chose que l’État veut, c’est le CAC 40, c’est la bourse et leur putain d’économies : y’en a marre. Le peuple est en train de crever, on vous fait crever, soulevez-vous, c’est fini, là ! Il faut qu’on prenne conscience des choses. Ses 500 balles, il peut se les mettre au cul, Monsieur Macron ! METS LES TOI AU CUL TES 500 BALLES, voilà, j’en veux pas ! »

    Vidéo verticale contre verticalité du pouvoir, on voit maintenant les mains de l’aide soignante, qui supplient, ses mains, qui accusent, il y a du Jacline Mouraud chez elle. Mouraud : cahier de doléances à elle seule, un Facebook Live à six millions de vues, Qu’est-ce que vous faites du pognon des Français ?, 18 octobre 2018, futur cri de ralliement des jaunes gilets — appel ignoré, déjà, des télés et des élites, des premiers de cordée et des déconnectés, des laquais et des épargnés, jusqu’à ce que…

    • L’image reprise n’est pas entière

      Voici ma traduction de ce que le pharmacien a écrit :

      Le gouvernement va vous laisser crever parce que la pénurie de masques ne l’a pas effleuré un instant mais soyez heureux car les hommes peuvent encore s’acheter une bite toute dure. Ah ah ah je détends l’atmosphère de ma rue, comme on se marre pour éviter d’angoisser baisons, quelle légereté.

      Un jour, j’ai sorti un pote qui pleurait qu’il ne pouvait pas débander si je ne le soulageais pas en écartant mes cuisses. C’est vrai quoi, t’es pas sympa copine. Dehors, vite, à la porte ! Une bite au viagra c’est pas humain et c’est pas agréable de vivre avec un mec qui pense que « les femmes » ne rêvent que de ça. Avec le confinement du macronrona, pour les femmes qui sont en face de ces hommes, ça va pas du tout être drôle.

    • @touti depuis 5 minutes je tourne et retourne dans ma tête ton histoire de pote sorti et alors là j’avoue que je suis proprement sidéré... vraiment sidéré, au sens ou se bousculent des pensées comme « non mais c’est pas possible », « mais si visiblement c’est du vécu », etc... Quand à l’affiche en question oui, j’ai comme l’impression que ton interprétation est à peu près la bonne, mais quoi de plus surprenant dans une société de la performance, ou aucune question n’est justement posée sur ce qu’est la performance, ce que ça recouvre, en particulier en terme de désirs de domination.

      Bon, de l’humour de pharmacien de merde quoi.