Les résistances françaises aux vaccinations : continuité et ruptures à la lumière de la pandémie de Covid-19
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Parallèlement aux représentations paternalistes ancrées dans les discours de l’époque [~dernier quart du 19e siècle], de la part des #médecins libéraux, première profession en nombre représentée à la Chambre des députés et au Sénat, la résistance provient en grande partie d’une répulsion de l’intrusion de l’État dans le cadre de leur exercice professionnel. La lecture des négociations à l’Académie de médecine au temps du premier projet de loi d’obligation vaccinale fait apparaître que ce n’est pas tant l’inoculation qui est discutée par les médecins récalcitrants que les enjeux pour la profession médicale. Les médecins sont en effet en quête de légitimité après la dissolution des corporations sous la Monarchie constitutionnelle par la loi Le Chapelier du 14 juin 1791. « Il ne s’agit pas encore de la liberté du citoyen livrée à l’arbitraire de la loi », annonce ouvertement le médecin Jules Guérin, « c’est la liberté du médecin couvrant de sa volonté et de son droit la liberté de son client [...] la #vaccine obligatoire serait donc une atteinte portée à la liberté professionnelle, et une source de conflit perpétuel entre le droit du médecin et l’arbitraire de la loi » [5]. Ces débats s’inscrivent clairement dans un climat d’affirmation corporatiste de la profession médicale puisque dans le même temps est créé le premier syndicat de médecins (1881).
[...] Les systèmes de santé favorisant l’exercice de la médecine dans un cadre libéral, comme en France, ou au contraire l’extension d’un modèle de soins médicaux publics et la fonctionnarisation des médecins, vers lequel se dirigent alors des pays comme la Suède ou l’Allemagne, impactent le statut social de ces professionnels. Le positionnement social qu’implique le cadre libéral favorise davantage le recrutement politique et de fait l’influence de la profession au sein du Parlement, ce qui n’est ainsi pas sans lien avec le retard français à adopter l’obligation vaccinale. Après plusieurs années de débats houleux, la vaccination antivariolique obligatoire est finalement votée par le Parlement avec la loi du 15 février 1902 consacrant pour la première fois la notion de santé publique.