• Le Terrier ou la construction, nouvelle traduction en cours du récit de Kafka

    j’ai organisé le terrier et il semble que ce soit une réussite. De l’extérieur on ne voit à vrai dire qu’un grand trou, mais en réalité celui-ci ne conduit nulle part, après seulement quelques pas on se cogne contre une paroi de roche naturelle, je ne veux pas me vanter d’avoir conçu intentionnellement cette ruse, c’était plutôt le vestige d’une de ces nombreuses et vaines tentatives de construction, mais finalement il me parut avantageux de ne pas boucher ce trou.

    www.oeuvresouvertes.net/spip.php ?article2843

    #Kafka #Terrier #traduction #LaurentMargantin

  • Blogs de voyage : c’est le thème de la prochaine dissémination de la web-association des auteurs qui aura lieu le 26 septembre.

    Présentation

    C’est Robert Walser qui s’exclame un jour : « Je veux écrire des lettres au monde entier ! ». Nombre de ses petites proses res­semblent à des lettres qu’il aurait pos­tées dans un vil­lage, parti sur les che­mins de Suisse (Walser, on le sait, était un grand mar­cheur). Qu’aurait-il fait d’une machine lui per­met­tant d’écrire et de publier en che­min, en pleine nature ?

    Dernièrement, je regret­tais ici même que Kenneth White n’ait pas raconté son voyage au Canada direc­te­ment sur un blog au lieu d’en faire un livre : il aurait eu cer­tai­ne­ment plus de lec­teurs (même lui) ! J’ai relaté per­son­nel­le­ment un séjour aux Kerguelen en étant connecté depuis là-​bas, il est désor­mais pos­sible de se ser­vir du web un peu par­tout dans le monde, dans les coins les plus recu­lés, voire dans l’espace (je suis au quo­ti­dien les tweets de quelques astro­nautes de la sta­tion ISS).

    On a tous lu de ces « rela­tions de voyage » écrites par des hommes ou des femmes qui n’étaient pas for­cé­ment écri­vains, mais qui sai­sis par l’expérience du voyage ont eu envie de la trans­mettre à leurs sem­blables. Dans les récits de voyage écrits par des écri­vains en deve­nir (je pense aux lettres de Flaubert avan­çant sur le Nil), on assiste sou­vent à une trans­for­ma­tion dans l’écriture elle-​même, les lieux tra­ver­sés, les événe­ments vécus influant direc­te­ment sur celui ou celle qui est en route (Michaux dans Ecuador).

    Alors, que faisons-​nous main­te­nant que nous pou­vons effec­ti­ve­ment écrire au monde entier en temps réel ? Où sont-​ils, ces récits de voyage numé­riques ? Lors de cette dis­sé­mi­na­tion (rendez-​vous le der­nier ven­dredi de sep­tembre, soit le 26), prio­rité sera don­née à des auteurs contem­po­rains, mais des échos d’auteurs voya­geurs du passé sont aussi envi­sa­geables : après tout, pour­quoi Linné en Laponie ne tiendrait-​il pas un blog aujourd’hui ? Cela le ren­drait plus moderne que pas mal de nos auteurs contem­po­rains, plus que jamais cloués à leurs villes et à leurs éditeurs.

    http://www.webasso-auteurs.net/dissemination-septembre-ecrire-au-monde-entier-blogs-voyage

    #disséminations #webassoauteurs #littérature #openaccess #LaurentMargantin

  • Suite du Chenil

    « Souvent, au milieu de la nuit, ils apparaissaient réellement autour de mon lit, assis en train de me fixer de leurs yeux qui brillaient dans l’obscurité, c’était des chiens de race pour la plupart, les mêmes que j’allais bientôt retrouver au chenil, la même attitude de chiens bien dressés et obéissants, pouvant rester des heures à attendre à côté de leur maître qu’il se lève pour le suivre, ils étaient assis autour de mon lit en silence, la gueule fermée, la tête toujours tournée vers moi, sans s’occuper de ce qui se passait dans la rue, d’ailleurs il ne se passait plus rien puisque tous les chiens étaient désormais dans ma chambre rassemblés autour de mon lit, à attendre quoi je l’ignorais, je restais allongé les yeux fermés, les ouvrais juste de temps en temps pour voir s’ils étaient encore là, et les statues de chien étaient toujours là, un doberman approchait son museau de mon nez, me reniflait puis me léchait une joue, ce dont j’avais horreur, pourtant je ne bougeais pas et le laissais faire, écœuré mais immobile, d’autres chiens à tour de rôle s’approchaient de moi et comme le doberman me léchaient le visage, j’avais le temps dans l’obscurité de plonger mes yeux dans les leurs, je sentais leurs poils effleurer ma peau, puis tout à coup la langue râpeuse et humide, je ne m’essuyais jamais le visage par crainte de les effrayer en sortant ma main de sous les draps, jusqu’au matin ils venaient vers moi et me léchaient le visage, jusqu’au matin ils restaient près de moi immobiles, sans faire de bruit, jusqu’au moment où rouvrant les yeux je voyais qu’ils avaient disparu, qu’il faisait jour dehors, et je pensais qu’ils étaient retournés dans la rue, qu’ils étaient allés se cacher quelque part dans les champs, sûr qu’ils reviendraient la nuit suivante. »

    http://oeuvresouvertes.net/spip.php?article2489

    #Oeuvresouvertes
    #LaurentMargantin

  • Début du récit Le Chenil

    « Je me souviens qu’en arrivant au sommet de la colline une fois sous les arbres on ne voyait pas le chenil, mais que ça sentait, oui, ça sentait l’odeur des clebs à plein nez mêlée à celle des feuillages et de l’herbe de la forêt d’abord, et puis plus loin plus que l’odeur des clebs, des clebs tu disais comme tous ceux qui travaillaient au chenil. Odeur infecte de bêtes enfermées dans des cages à plusieurs dizaines pendant plusieurs jours, odeur infecte qui finissait par imprégner tous les vêtements, au point que la mère se plaignait de ma puanteur quand je rentrais le soir, tu pues m’avait-elle dit dès le premier soir en guise de salut (ce qui avait au moins l’avantage de remplacer les remarques désagréables qu’elle répétait en boucle depuis des années), odeur infecte qui, le premier jour, m’avait donné envie de gerber, et d’ailleurs j’avais gerbé en sortant du chenil le dernier jour de la première semaine, gerbé à cause de l’odeur qui m’était rentrée dans la gorge sans que je m’en rende compte et avait fini par me rendre malade, gerbé parce que, le dernier jour de la première semaine, j’avais découvert la véritable origine de l’odeur que je retrouvais chaque matin en haut de la colline, une fois sous les arbres. »

    http://www.oeuvresouvertes.net/spip.php?article2178

    #LeChenil #LaurentMargantin #littérature #openaccess #récit #Oeuvresouvertes