Les habits neufs de la suprématie blanche ! La lutte des classes nouvelle version...
#auto-identification #MERI (Metis exclusive radical indigenous, c’est leur faute !) #appropriation_culturelle
Ce n’est pas la faute des Cris, insistent-ils. Mais il faut bien le dire : depuis la signature de la Convention de la Baie-James, en 1975, les représentants de ce peuple autochtone ont montré qu’ils savaient négocier. Au fil des traités conclus avec le gouvernement, ils ont obtenu la plus grosse part du gâteau. « Nous autres, on subit », lâche Luc Michaud.
Exclus de ces pourparlers historiques, ces hommes qui ont passé toute leur vie dans le Nord se considèrent aujourd’hui comme laissés-pour-compte. Il y a trois ans, ils ont décidé de se faire entendre… en créant de toute pièce une communauté autochtone à Chibougamau.
« On voulait être du côté des gagnants. »
-- Luc Michaud, chef des Métis autoproclamés de Chibougamau
Le conseiller municipal de 59 ans, yeux bleus et visage rougeaud, est le chef de ces Métis autoproclamés. Il admet ne pas savoir précisément qui sont ses ancêtres autochtones. Cela ne l’a pas empêché de porter une imposante coiffe de chef lors d’une visite à Paris à l’été 2017.
Les « Métis » de Chibougamau se sont joints à un mouvement qui a explosé au Québec depuis une douzaine d’années : celui de Blancs qui se proclament Métis – et revendiquent les droits et privilèges qui y sont rattachés – en invoquant des tests génétiques contestés ou de vagues ancêtres autochtones.
Le nombre de Québécois qui se sont désignés comme Métis auprès de Statistique Canada en 2016 a bondi de 149 % par rapport à 2006 – une croissance plus rapide que partout ailleurs au pays.
Le professeur Leroux a aussi découvert que l’origine du mouvement ne s’explique pas uniquement par une quête d’identité collective. Dans l’est du Québec, des groupes « métis » ont plutôt été créés en réaction aux revendications territoriales des Premières Nations.
« C’est une stratégie politique pour s’opposer aux Micmacs et aux Innus. »
-- Darryl Leroux, professeur à l’Université Saint Mary’s de Halifax
Un exemple parmi d’autres : sur la Côte-Nord, un homme qui défendait autrefois les « droits des Blancs » au sein d’une organisation antiautochtone – et qui n’hésitait pas à traiter les Innus de « talibans rouges » dans les médias locaux – se présente aujourd’hui comme un… chef de clan métis !
L’entreprise de forage des deux frères fait partie du paysage de la ville depuis plus de 50 ans. Jusque-là, ceux-ci n’avaient jamais évoqué de racine autochtone.
Serge Larouche cultive un sentiment d’injustice évident face aux concessions faites au peuple cri par le gouvernement. « On n’a aucun droit. »
En 2011, Robert Haché a écopé d’une peine de quatre ans de prison pour trafic de drogue. Au centre de réception de Sainte-Anne-des-Plaines, on lui a demandé s’il était autochtone – une question de routine pour les nouveaux détenus.
Robert Haché se souvenait des discussions de ses oncles à propos du « sang indien » qui circulait dans la famille. Il a tenté sa chance.
Au pénitencier de Cowansville, un intervenant lui a soumis une liste d’organismes prêts à le représenter. « J’ai pogné le premier du bord. » C’était la CPAC, qui n’est reconnue ni par Ottawa ni par l’Assemblée des Premières Nations. Son grand chef, Guillaume Carle, est largement considéré comme un usurpateur de l’identité autochtone, comme l’a révélé une enquête de La Presse en novembre.
« La façon dont on détermine si un délinquant est autochtone se fonde sur le principe de l’autodéclaration », explique Kathleen Angus, administratrice régionale des Initiatives autochtones à Service correctionnel du Canada.
C’est ainsi que Robert Haché a obtenu sa carte de membre de la CPAC – un document sans valeur juridique – au pénitencier.
« Je suis tombé dans l’aile des Amérindiens. On avait pas mal plus d’avantages. »
-- Robert Haché, Métis autoproclamé
Du tabac. De la viande d’orignal. Mais surtout, une cellule à occupation simple.
Pas moins de 550 des 7600 habitants de la ville ont payé 250 $ pour passer le test d’ADN, selon Luc Michaud. Aucun n’a été refusé au sein la communauté – pas même une immigrée irlandaise, dont le test a étrangement révélé que du sang autochtone coulait dans ses veines.
Les échantillons de salive ont été analysés par Viaguard Accu-Metrics, un laboratoire de Toronto qui a aussi découvert, l’an dernier, des racines autochtones à des journalistes de la CBC d’origines russe et indienne. Le labo a même obtenu des résultats positifs à partir d’échantillons prélevés sur… des chiens !
Enfant, Ron Simard a lui-même subi la violence, le racisme et la pauvreté. Le colosse de 40 ans se rappelle le logement de Chibougamau où les sept enfants de la famille dormaient dans une seule pièce, cordés les uns sur les autres. Il se rappelle les abus, l’alcool, l’anxiété, la colère.
Il se rappelle tous ces maux, fréquents chez les autochtones, que le gouvernement cherche aujourd’hui à soulager en réparant les erreurs du passé. Ces maux dont n’ont jamais souffert les « Métis », qui réclament eux aussi divers privilèges « ancestraux ».
L’opportunisme de ces demandes n’échappe pas à la mairesse de Chibougamau, Manon Cyr. « C’est assez paradoxal qu’en 2019 des gens revendiquent les mêmes droits que les autochtones, quand on connaît l’histoire des autochtones au Québec », laisse-t-elle tomber.
Pour le chef « Métis » autoproclamé Luc Michaud, il suffit à un Québécois d’avoir parmi ses ancêtres une autochtone ayant vécu au XVIIe siècle pour se déclarer Métis et obtenir les droits qui en découlent. Jugement après jugement, les tribunaux du pays lui donnent tort. Voici l’état du droit sur la question.
Les organisations québécoises qui se proclament métisses exploitent une confusion autour du terme « Métis » utilisé dans la Constitution. Ce mot « ne vise pas toutes les personnes d’ascendance mixte amérindienne et européenne, mais plutôt les peuples distincts qui, en plus de leur ascendance mixte, possèdent leurs propres coutumes, façons de vivre et identité collective reconnaissables et distinctes », précise la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Powley.
Dans une procédure en cours à Maniwaki, le juge Pierre Dallaire, de la Cour supérieure, a prévenu en 2016 qu’il serait « plus facile de clouer du Jell-O sur un mur » que de cerner les « allégations remarquablement vagues et insaisissables » qui lui ont été présentées pour prouver l’existence d’une communauté métisse historique en Outaouais.
Une ancêtre au XVIIe siècle
En consultant des forums de recherches généalogiques, Darryl Leroux a découvert que des milliers de « Métis » québécois se réclamaient des mêmes ancêtres autochtones, soit une poignée de femmes ayant vécu… au XVIIe siècle.
Même reconnus, des Métis ne pourraient exercer leurs droits sur le territoire des Cris, fait remarquer le député fédéral Roméo Saganash. « Je peux chasser dans la région de la Baie-James parce que je suis cri et que c’est mon territoire traditionnel, explique-t-il. Je ne pourrais pas faire la même chose sur le territoire des Attikameks ou des Innus. Si je vais chasser en Gaspésie ou sur la Côte-Nord, je dois suivre les mêmes règles que tous les Québécois. » Quand Luc Michaud lui a raconté avoir une ancêtre autochtone aux États-Unis, Roméo Saganash lui a expliqué que c’est là-bas, et non à Chibougamau, qu’il devrait revendiquer des droits. « Je pense qu’il aurait dû comprendre. »
Parce que non, c’est pas la fête du slip, c’est la reconnaissance de droits préexistants à la colonisation...
Les propos tenus dans le passé par des « Métis » du Saguenay, de la Côte-Nord et de la Gaspésie révèlent l’opportunisme de leurs prétentions identitaires, voire l’hostilité manifestée par certains d’entre eux à l’égard des autochtones. En voici quatre exemples.
« La communauté métisse est la seule porte de sortie pour contrer la démarche des Amérindiens, à l’heure actuelle, qui veulent ramasser tout le territoire », a-t-il expliqué en 2008 à un anthropologue du Collège universitaire de Saint-Boniface.