• RAGEMAG
    http://ragemag.fr/liberalisme-de-gauche-et-liberalisme-de-droite-par-jean-claude-michea

    C’est donc, en dernière instance, le libéralisme culturel – et certainement pas l’austérité religieuse ou le puritanisme moral – qui constituera toujours la forme d’esprit la plus adaptée à une société de croissance et de consommation illimitées (un point que la sociologie critique américaine avait su établir dès les années cinquante). Il y a donc bien – pour répondre à votre question – une différence réelle entre la sensibilité de la gauche libérale moderne (celle qui a renoncé, depuis maintenant plus de trente ans, à l’idée qu’on pourrait encore rompre avec le capitalisme) et celle de la droite libérale. La première prend effectivement son point de départ privilégié dans le libéralisme culturel – ce qui explique qu’elle puisse toujours jouer sa différence électorale sur les questions « sociétales » (mariage gay, légalisation du cannabis, vote des étrangers, etc.). La seconde, au contraire, prend d’abord le sien dans les dogmes du libéralisme économique. Mais à partir du moment où on a compris que chacun des deux moments de la doctrine est philosophiquement condamné à chercher dans l’autre le complément idéologique qui lui fait structurellement défaut, on ne s’étonnera plus que, dans la pratique, la différence entre la droite et la gauche ait fini par perdre l’essentiel de son ancienne pertinence. Si on veut réellement rompre avec le système capitaliste – et retrouver ainsi le trésor perdu du socialisme originel – il faudra donc apprendre à repenser tous les clivages politiques imposés par la société du spectacle.

    #libéralisme-culturel #libéralisme-économique #philosophie #Michéa