• Quand un article sur les « bienfaits de la colonisation » fait imploser une revue scientifique | Slate.fr

    http://www.slate.fr/story/152360/article-bienfaits-colonisation-revue-scientifique

    Tout a commencé avec la publication par la revue universitaire Third World Quarterly, au début du mois de septembre, d’un article intitulé « The Case for Colonialism » (« Le bien-fondé du colonialisme »). L’auteur, Bruce Gilley, professeur de science politique à l’université de Portland, estime qu’il est « grand temps de réévaluer la signification péjorative » du mot « colonialisme » :

    « La notion selon laquelle le colonialisme est toujours et partout une mauvaise chose nécessite d’être repensée au regard du grave coût humain d’un siècle de régimes et politiques anticoloniaux. »

    Gilley estime que la pensée anticoloniale a surestimé les coûts et sous-estimé les bénéfices de la colonisation et a un peu vite écarté la légitimité politique des régimes coloniaux. Pour lui, les bases de cette pensée n’étaient pas scientifiques mais « politiques et idéologiques » : « Le but n’était pas l’exactitude historique mais un plaidoyer pour l’instant présent. » Il cite des exemples de pays qu’il juge détruits par la décolonisation, comme la Guinée-Bissau, et estime que « peut-être que les Belges devraient revenir » au Congo.

    #colonialisme

    • Quand Slate alimente le « Chomsky-bashing »

      Titre du paragraphe : « Soutien de Noam Chomsky »

      Emploi du l’expression « Certains défendent Bruce Gilley », alors qu’il s’agit d’une autre démarche car « défendre quelqu’un » supposerait qu’on adhère à ses idées ou son point de vue.

      Or un peu plus loin :

      Le cas le plus significatif, ici, est probablement celui du linguiste Noam Chomsky, membre du comité de rédaction de Third World Quarterly, qui a jugé que le retrait de l’article de Gilley était une option « dangereuse » et a estimé que les chercheurs devaient plutôt s’occuper de le réfuter.

      Mais là encore on commence par parler du « cas le plus significatif » (de quoi au juste) ce qui accrédite la thèse de départ, à savoir que Chomsky « défend » Gilley. Mais, ouf, le lecteur un peu fouineur apprend que Chomsky est contre le retrait de l’article et non pas pour les thèses qu’il défend, Chomsky s’en expliquant par le fait que l’article restant visible dans la publication, d’autres chercheurs auraient la possibilité de réfuter les thèses avancées par Gilley.

      Donc nous avons affaire à du mauvais journalisme et Jean-Marie Pottier, son auteur, fait preuve de suivisme et de conformisme intellectuel mais c’est sans doute ce qu’on attend de lui.

      Évidemment, ici ressurgit le spectre des thèses négationnistes de Faurisson auxquelles Chomsky aurait apporté son « soutien ».
      Voir ci-après une discussion sur un article de Wikipédia à propos de Robert Faurisson

      https://fr.wikipedia.org/wiki/Discussion:Robert_Faurisson

      En effet, toute autre interprétation est fallacieuse, Chomsky a été très clair sur ce point au cours de nombreuses conférences aux USA. En France. il y des émissions de Daniel Mermet sur ce sujet ainsi qu’un documentaire qui reprend cette polémique en l’éclaircissant. Chomsky précisa à propos de notre loi Gayssot « Staline et Hitler auraient été très heureux d’appuyer une telle loi ». Il indiqua également que si la liberté d’expression ne sert qu’à laisser s’exprimer des opinions favorables aux nôtres, elle ne sert pas à grand chose. Celle-ci n’a un sens que si des opinions que nous abhorrons peuvent avoir libre cours. Sa lettre en soutien au droit d’expression de Faurisson — et non pas à ses idées comme on semble le faire croire ici — ne disait pas autre chose.146.185.28.59 (discuter) 22 août 2014 à 18:27 (CEST)

    • J. Robinson explique ainsi que le calcul coûts/avantages de l’auteur revient à absoudre quelqu’un qui dirait « OK, j’ai tué ma femme, mais mon métier, c’est pompier » et ajoute que « construire des lignes électriques et ouvrir une école ne constitue pas un permis pour dépouiller et assassiner des gens ». Vijay Prashad, professeur au Trinity College (Connecticut) et un des membres démissionnaires du comité de rédaction de la revue, reproche lui à Gillay de s’inscrire dans un courant de « débrutalisation » de l’histoire coloniale très actif depuis une quinzaine d’années. Et, de manière plus actuelle, de refléter le climat politique :

      « Cet essai paraît à l’époque de Donald Trump, alors que le suprémacisme blanc est de retour et les cicatrices du colonialisme encore visibles. L’idée selon laquelle les penseurs progressistes, post-coloniaux et marxistes ont dénigré “l’histoire blanche” est un refrain constant des racistes. »

      Sinon, je connais bien la position de Chomsky sur la censure et il a toujours été très clair avec. https://blog.monolecte.fr/2015/05/06/pourquoi-la-liberte-dexpression-nest-pas-negociable

      D’ailleurs, le papier de Slate ne dit pas autre chose :

      Le cas le plus significatif, ici, est probablement celui du linguiste Noam Chomsky, membre du comité de rédaction de Third World Quarterly, qui a jugé que le retrait de l’article de Gilley était une option « dangereuse » et a estimé que les chercheurs devaient plutôt s’occuper de le réfuter

      .

      Il est important d’expliquer en quoi le postulat du bonhomme sur les bienfait du colonialisme est biaisé, donc d’en débattre et d’en démontrer les mécanismes, un peu comme il est contreproductif de punir un gosse sans lui expliquer pourquoi.

      Bien sûr, Lordon répliquerait que le problème de fond, c’est qu’il ne faut que quelques secondes pour balancer une idée-slogan fausse qui claque et qui marque les esprits, mais qu’il faut souvent bien plus d’une heure pour argumenter et démonter cette idée fausse. Or dans notre contexte médiatique de l’instantanéité et de l’éphémère, il n’y a plus de place pour les temps longs de la réflexion, juste pour les slogans…
      #médias #censure #liberté_d'espression

    • Bien sûr, Lordon répliquerait que le problème de fond, c’est qu’il ne faut que quelques secondes pour balancer une idée-slogan fausse qui claque et qui marque les esprits, mais qu’il faut souvent bien plus d’une heure pour argumenter et démonter cette idée fausse.

      Rapidité et paresse intellectuelle sont deux problèmes qui minent la crédibilité des médias.
      Ce n’est pas en cachant les malades de la peste que l’on éradiquera la maladie. Mais là, je ne fais que paraphraser ce que dis sur ton blog à propos des blattes ...

    • Reclaiming value from academic labor: commentary by the Editors of Human Geography (2017-11-07)

      There have long been discussions about the need for an alternative publishing model for academic research. This has been made clear by the September 2017 scandal involving #Third_World_Quarterly. The editor’s deeply problematic decision to publish an essay arguing in favor of colonialism was likely meant as click-bate to drive clicks and citations. But we should not lose sight of the fact that this latest scandal is only one recent manifestation of a long-simmering problem that has periodically commanded significant attention in the academic literature, blogs, email lists, conference sessions, and the popular press. As a direct result, over the last decade or more, new journals have been created that specifically endeavor to offer routes around corporate/capitalist academic publishing, and several existing journals have removed themselves from this profit-driven ecosystem. In this commentary, the editorial team of the journal Human Geography weighs in on what we see as the nature of the problem, what we are doing in response, what our successes have been, and what challenges remain.

      https://fennia.journal.fi/forthcoming/article/66683/27159
      #université #recherche #édition_scientifique #publications_scientifiques