• Désinformation : la lente et inquiétante dérive de Facebook
    https://www.la-croix.com/societe/desinformation-la-lente-et-inquietante-derive-de-facebook-20250308

    Analyse

    Il y a deux mois, Mark Zuckerberg s’est aligné sur l’idéologie libertaire d’Elon Musk en affaiblissant considérablement la modération sur Facebook et Instagram. À l’heure du rapprochement entre les États-Unis de Donald Trump et la Russie de Vladimir Poutine, les spécialistes de la désinformation redoutent le pire.

    Mélinée Le Priol, le 08/03/2025 à 15:38

    Désinformation : la lente et inquiétante dérive de Facebook
    Facebook, qui compte trois milliards d’utilisateurs actifs mensuels, est en train de prendre une direction similaire à celle du réseau social X. imageBROKER / rafapress/MaxPPP

    Facebook pourrait-il, à terme, connaître une vague de départs semblable à celle de X (ex-Twitter) lors du retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier ? Le plus puissant des réseaux sociaux est en tout cas en train de prendre une direction similaire avec la quasi-suppression de la modération des contenus haineux et mensongers. À une différence près : il est dix fois plus gros, avec environ trois milliards d’utilisateurs actifs mensuels contre 335 millions pour X.

    « Facebook est un paquebot lent à manœuvrer : la détérioration de ses contenus va se faire graduellement », prévoit Tristan Mendès France, collaborateur de l’Observatoire du conspirationnisme. « Mais à de telles échelles, l’impact sur la population mondiale pourrait être énorme. »

    « La machine va s’emballer dans des proportions encore difficilement imaginables », confirme Olivier Ertzscheid, enseignant-chercheur en sciences de l’information à l’université de Nantes (1). « Comme personne ne voit jamais la même chose au même moment, sur Facebook, et que les interactions se font surtout dans des groupes privés, il est difficile d’évaluer la diffusion des contenus viraux. En tout cas, sur Instagram, où des études récentes ont pu être faites, la visibilité des contenus politiques est déjà en train d’exploser. »
    Un bonus pour les contenus viraux

    En cause : la volonté du patron de Meta, Mark Zuckerberg, de « restaurer la liberté d’expression sur (ses) plateformes » pour être plus en phase avec le « tournant culturel » que signe selon lui le retour au pouvoir de Donald Trump. Le 7 janvier, à la surprise générale, il annonçait l’abandon de son programme de vérification des faits et de ses systèmes de détection de discours haineux. Selon le Center for Countering Digital Hate (CCDH), cela pourrait se traduire par l’arrêt de 97 % de son travail de modération actuel. Et donc par un « raz-de-marée » de contenus préjudiciables pour les internautes.

    Une mesure plus discrète n’a été relevée que dans un second temps par certains médias américains, comme le site d’investigation ProPublica : Meta relance aussi ces temps-ci un programme de monétisation offrant un bonus aux contenus les plus viraux. S’il n’est encore accessible que sur invitation, il sera ouvert plus largement courant 2025.

    « On le sait, les clés de la viralité sont l’absence de nuance, les raccourcis, les formules choquantes, l’injure : tout ce qui fait surréagir, rappelle Olivier Ertzscheid. Le fait de “récompenser” financièrement ce type de contenus va encore renforcer des comptes déjà très influents, en leur donnant des moyens supplémentaires pour continuer de se professionnaliser. »

    Ces comptes dits « super-spreaders » (dont les publications se répandent plus vite que les autres) bénéficiaient déjà à plein des effets « naturels » de la viralité en ligne. Pendant la pandémie de Covid-19, par exemple, seules douze personnes étaient à l’origine des deux tiers des partages de contenus antivax sur Facebook, selon le CCDH.

    « Opportunité historique »

    « C’est un cauchemar », lâche le journaliste Thomas Huchon. « Tout ce qu’on a réussi collectivement à faire évoluer avec nos révélations, notamment sur Cambridge Analytica, va être remis en place. Tout ce qui faisait que Facebook était encore un peu acceptable va disparaître. »
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    Pour ce spécialiste des fausses nouvelles et des théories conspirationnistes, la dérive est d’autant plus grave que « Facebook est un univers dans lequel beaucoup de gens ne pensent même pas qu’ils vont s’informer », étant plutôt venus pour partager des photos ou garder le lien avec d’anciennes connaissances. Or en 2016, la start-up britannique Cambridge Analytica avait ciblé des millions d’utilisateurs de Facebook selon leurs opinions politiques et ainsi pesé sur deux scrutins majeurs : le Brexit et la première élection de Donald Trump.

    Ces évolutions surviennent à l’heure du rapprochement spectaculaire entre Washington et Moscou. Selon plusieurs médias américains, les agences chargées de la lutte contre la cybercriminalité et les ingérences informationnelles ont récemment reçu l’ordre, aux États-Unis, de ne plus considérer les acteurs russes comme une menace. Tristan Mendès France y voit « une opportunité historique pour les acteurs de la désinformation ».
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    Face à une Union européenne fragilisée et divisée, le président américain a « politisé à l’extrême » la question de la régulation des plateformes sociales. « Pour Trump, quiconque s’en prend à elles attaque les États-Unis, poursuit Tristan Mendès France. Il ne fait guère de doute que Meta va profiter du bouclier que lui offre Trump. »

    (1) Auteur du Monde selon Zuckerberg. Portraits et préjudices, C&F Éditions, 2020, 15 €, 112 p.

    #Facebook #Olivier_Ertzscheid #Liberté_expression

  • Opinion | Mark Zuckerberg’s Macho Posturing Looks a Lot Like Cowardice - The New York Times
    https://www.nytimes.com/2025/01/15/opinion/mark-zuckerberg-donald-trump.html

    Jan. 15, 2025
    A black-and-white profile photo of Mark Zuckerberg wearing a dark shirt and a necklace with a single, square charm.
    Credit...Photo Illustration by The New York Times. Source Photograph: David Zalubowski/Associated Press
    Listen to this article · 7:33 min Learn more

    By Zeynep Tufekci

    Opinion Columnist

    I really, really wanted to like Mark Zuckerberg’s gushing appearance on Joe Rogan’s podcast last Friday. Zuckerberg, the chief executive of Meta, Facebook’s parent company, made some important points about the inadequacies of fact-checking as well as the troubling ways that governments can manipulate private companies.

    Having grown up under an authoritarian regime, I cherish the right to free speech that Zuckerberg kept talking about. But having gone on to study the way that authoritarian regimes work, I know to focus on what people do, not what they say.

    On the podcast, Zuckerberg told Rogan about how society had become too “neutered or emasculated” and gushed about “masculine energy” and his newfound devotion to jujitsu.

    I’m not their target audience but I feel their vibe. A.C.L. tears, which they spent some time commiserating about, are pretty nasty. And I have a soft spot for martial arts content.

    But one of the most recent actions that Zuckerberg’s supposedly emboldened company took was to banish tampons from office men’s rooms. (The products had been provided for transgender or nonbinary employees.) “Masculine energy,” my lady-parts — that is the most snowflake move I’ve heard of in a long time. If the men in your company can’t even handle the sight of a box of tampons, you’ve got bigger problems than an A.C.L. tear.

    It wasn’t the only bizarre contradiction of the week.

    Zuckerberg says that in the name of free speech, the company he founded “to give people a voice” will no longer attempt to moderate hate speech and misinformation. Facebook will now allow users to allege, among other things, “mental illness or abnormality when based on gender or sexual orientation.” And the rule that prohibited users from claiming that people of certain races were responsible for spreading the coronavirus? It’s gone. Slander whoever you like. Knock yourself out.
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    Hate speech in the 21st century is a complicated issue. We can’t just moderate our way out of our very real conflicts over immigration, transgender rights, pandemic response and other issues. Zuckerberg conveniently neglected to mention that Facebook profits off tribalizing, inflammatory, conspiratorial content, which has been shown to keep people scrolling. He is right, however, that fact-checking could never catch more than a tiny portion of those posts. (Though how is that a defense, by the way?) He’s also right that fact-checkers lost a good deal of public trust by overstepping their boundaries. Even if those mistakes were rare, fact-checking is a trust-based mechanism, and that was enough to break it.

    So for better or worse, on a range of charged topics, people can now more or less say whatever they want on the platform.

    Oh, wait:

    This week Meta announced a change to Facebook’s Messenger App. Users who want to customize their wallpaper can still do so, but they will no longer have the option to use themes with colors of the transgender and nonbinary flags.
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    Whatever one’s position on transgender rights, limiting people’s ability to express themselves — in private conversations with their friends — is not a great way to kick off a free-speech crusade.

    It’s a long way from where Zuckerberg was during the Biden or the Obama administration. In those very different political climates, he apologized for Facebook’s role in promoting fake news and hate speech and vowed to take action. The platform even kicked Donald Trump off on Jan. 7, 2021.

    But Trump (and his buddy Elon Musk) doesn’t like restrictions on hate speech, and now neither does Zuckerberg. Transgender rights are a flashpoint for Trump’s base, so tampons and theme colors have got to go. Flattery and obeisance are how powerful people keep themselves in favor with strongman regimes. Cash works, too.

    Look at the Saudis. When Trump came into the office the first time, they had a problem: He had accused them of having links to the Sept. 11 attacks and of wanting “women as slaves and to kill gays.” So in advance of his visit in 2017, the Saudi capital, Riyadh, was dotted with billboards showing his face and his tweets. The Saudis have spent lavish sums at his properties and funded tournaments at his golf courses. Crown Prince Mohammed bin Salman’s wealth fund invested $2 billion in Jared Kushner’s investment fund, even though it reportedly had yet to turn a profit. And just last year, a new Trump Tower in the Saudi city of Jeddah was announced.

    Silicon Valley was slow to learn the lesson — too many years under an imperfect but functioning democracy, I guess — but they’re catching up fast. Today, tech moguls are rushing to donate millions to Trump’s second inauguration. They’re clamoring to dine at Mar-a-Lago. Amazon reportedly paid $40 million for exclusive rights to a new documentary about Melania Trump.

    It’s mortifying, or should be.

    If, however, Zuckerberg is telling us the truth that the Biden administration pressured Facebook employees during the Covid pandemic, trying to get them to take down vaccine-related content — even when it was true and discussed actual side effects, or was humorous or satire — then I share his sense of outrage. During the pandemic, the authorities weren’t always sufficiently transparent about the uncertainties or trade-offs of public health policy. And while anti-vaccine forces did weaponize information in bad faith, the solution was for officials to level with the public, not to strong-arm the platforms.

    Since Zuckerberg and Rogan were talking about the illegitimate use of government power to pressure companies, I eagerly waited for them to talk about how Trump had, just last September, threatened to throw Zuckerberg in jail for life because of some nonpartisan donations he and his wife made to strengthen the election infrastructure when it was creaking under the weight of the pandemic. Trump claimed those donations were a plot against his candidacy.

    I mean, a strongman presidential candidate threatening a powerful chief executive for exercising his rights as a citizen — that’s bad, right? That’s anti-free speech? That’s lawfare?

    But nah. Neither Zuckerberg nor Rogan mentioned it. They just praised Trump.

    Facebook is in a strange spot. Many Democrats don’t like the company because they think it’s gotten too powerful. Lina Khan, the current chair of the Federal Trade Commission, brought an antitrust suit against it. But many Republicans don’t like it either. Vice President-elect JD Vance is a fan of Khan. Several red states, including Texas and Florida, have repeatedly sued or passed laws targeting the company. Many in Trump’s base see Zuckerberg as just another unprincipled, Harvard-trained member of the elite.

    Zuckerberg told Rogan that “one of the things that I’m optimistic about with President Trump is I think he just wants America to win.” And then he got to the heart of the matter: He suggested that Trump use the power of the U.S. government to defend Meta abroad — for instance, from the huge fines that the European Union has imposed on it for violating data privacy and antitrust rules.

    When discussing his love for jujitsu, Zuckerberg told Rogan that the sport let him “just express myself, right?”

    “It’s like when you’re running a company, people typically don’t want to see you being this ruthless person who’s just, like, ‘I’m just going to crush the people I’m competing with,’” he said. But in martial arts, “you’re rewarded” for being ruthless.

    What is the reward for boasting about your own toughness while charting your umpteenth cowardly zigzag in order to please the people in power? I guess we’re about to find out.

    #Meta #Zeynep_Tufekci #Mark_Zuckerberg #Masculinisme #Liberté_expression #Néofascisme_numérique

  • Meta et X instrumentalisent-ils la liberté d’expression à des fins économiques ? | France Culture
    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/entendez-vous-l-eco/entendez-vous-l-eco-emission-du-vendredi-10-janvier-2025-1383616

    Le revirement spectaculaire de Meta quant à la régulation des réseaux sociaux pour s’aligner avec la position réactionnaire d’Elon Musk montre un changement de paradigme majeur dans la gouvernance des réseaux sociaux : quelles conséquences peut avoir ce revirement dans l’économie de l’information ?
    Avec

    Valérie Peugeot Chercheuse au sein du laboratoire de sciences sociales et humaines d’Orange Labs, présidente de l’association Vecam, think-tank citoyen qui déchiffre les enjeux sociétaux liés au numérique et membre du collège des commissaires de la CNIL.
    Anne Bellon Politiste, maîtresse de conférence à l’Université de Technologie de Compiègne, spécialiste des politiques numériques et de la régulation d’Internet.
    Nikos Smyrnaios professeur en sciences sociales à l’Université de Toulouse

    Le revirement de Mark Zuckerberg a lieu quelques jours avant l’investiture de Donald Trump, et pour Anne Bellon, ce revirement est « opportuniste » afin de garantir son poids dans les négociations à venir dans les régulations des grandes plateformes.

    Le chercheur Nikos Smyrnaios est quant à lui « surpris du changement discursif de Mark Zuckerberg qui s’aligne à des positions très réactionnaires » et qui vont à l’encontre des positions officielles de Meta à partir de 2016 et du scandale de Cambridge Analytica et d’ingérence russe lors de l’élection en 2016. Mais selon lui, Mark Zuckerberg n’a pas nécessairement changé d’idées politiques mais « souhaite défendre ses intérêts économiques ce qui est très dangereux ».
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    Valérie Peugeot explique comment ces patrons de géants de la technologie instrumentalises les « utopies fondatrices d’internet où* la liberté d’expression était central avec une répartition du pouvoir ». Alors que cela fait bien longtemps que ces mêmes patrons ont concentré ces pouvoirs. Qu’ils parlent de liberté d’expression, et s’en fassent les hérauts, est « cynique ». « Reconvoquer la liberté d’expression est ancien » pour les Etats-Unis qui essayent de garder un contrôle sur la façon dont la vision américaine des faits se répand. Déréguler ne permet pas à redonner du pouvoir à la communauté des internautes comme au début de l’Internet, selon Valérie Peugeot, c’est plutôt « une instrumentalisation du crowdsourcing, donc de ce que les utilisateurs produisent comme contenus, pour s’autoréguler ».

    Pour le moment, le revirement de Mark Zuckerberg ne concernerait que les Etats-Unis « mais dans sa vidéo il a vertement fustigé l’Union Européenne et ses régulations », qui est un véritable argument économique.

    Mais alors ce revirement aura-t-il des conséquences sur l’économie de l’information ? Selon Valérie Peugeot, il faut relativiser l’importance de ces réseaux sociaux. « Même si cette influence est importante, il a été prouvée que c’est bien la polarisation de médias traditionnels comme Fox News qui ont eu un véritable impact en 2016 ».

    Une des solutions pour lutter contre la puissance des réseaux sociaux selon les mains dans lesquelles ils tombent, serait de « déconcentrer la gouvernance de ces géants de la Tech » et selon Anne Bellon, des enquêtes sont en cours aux Etats-Unis pour réfléchir à démanteler ces géants de l’Internet. Ces efforts risquent d’être remis en cause par l’Administration Trump.

    #Medias_sociaux #Régulation #Podcast #Meta #Liberte_expression

  • Opinion | The Point: Conversations and insights about the moment. - The New York Times
    https://www.nytimes.com/live/2024/10/08/opinion/thepoint#musk-trump-influence

    Par Zeynep Tufekci

    Elon Musk has not been at all subtle in his efforts to help Donald Trump win the presidency. Musk hasn’t just endorsed him or donated tens of millions of dollars to pro-Trump PACs or appeared at Trump rallies to jump up and down with joy. Musk is also using the full power of his ownership of X to portray Kamala Harris as an existential threat to America while spreading many falsehoods.

    The Republicans’ silence about Musk’s blatant politicking via his social media platform demonstrates their party’s deep hypocrisy when it comes to Big Tech’s power over politics.

    A rule to push Musk’s posts to more people was apparently hard-coded into the platform’s software after Musk got upset that President Biden’s posts about the Super Bowl received more views than his. Musk reportedly threatened to fire his own engineers unless they made sure his posts were super amplified. Sure enough, Musk’s posts now get tens of millions of views.

    Musk has posted on X, for example, that “if Trump is NOT elected, this will be the last election” (103 million views). He has described Kamala Harris as “just a puppet” (20 million views) or “the Kamala puppet” (28 million views). He also regularly claims what he describes as the “the Kamala Dem machine” or “the Dems” are out to ensure a “permanent one-party rule in America” (33 million views).

    Musk also routinely makes false claims about mass electoral fraud committed to help Democrats. For example Musk posted that Arizona is “refusing to remove noncitizens from the voter rolls” and shared a post claiming that hundreds of thousands of illegal immigrants had registered to vote there — both of which prompted a correction attempt from the county recorder based in Phoenix, who is a Republican.

    But Musk goes on, undeterred.

    It’s not hard to imagine what many Republicans would be saying if a Silicon Valley C.E.O. had come out as hard for Kamala Harris as Musk has for Trump. Years ago, Republican legislators raised concerns that tech companies were secretly putting their thumbs on the algorithmic scales in favor of the Democrats. In response, Republican lawmakers held hearings in which they claimed that tech platforms were biased against conservatives, which they suggested was antithetical to free speech.

    Where are they now?

    If Republican legislators were actually serious about Big Tech’s influence on politics, they’d be dragging Musk to Congress to hold him accountable for shameless partisan favoritism. Instead, they’re reaping the spoils of Musk’s influence while saying nothing.

    #Elon_Musk #Donald_Trump #X_influence #Algorithme #Liberté_expression

  • « Une atteinte à la liberté d’expression » : le syndicat brestois Olivier Cuzon visé par une plainte de Gérald Darmanin - France Bleu
    https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/une-atteinte-a-la-liberte-d-expression-le-syndicat-brestois-olivier-cuzon

    Le professeur et syndicat brestois Olivier Cuzon est visé par une plainte pour diffamation à l’encontre de la police et la gendarmerie. Plainte déposée par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, indique Olivier Cuzon dans un communiqué. L’homme a été entendu ce vendredi 19 avril après-midi au commissariat de Brest.

    "C’est la publication d’un article sur le site de Sud éducation 29, dont je suis le « directeur de publication du journal » qui est à l’origine de cette plainte, lit-on dans le communiqué. Le paragraphe sur lequel est fondé la plainte est le suivant : « Ce questionnement est important quand on connait la culture droitière, misogyne et homophobe sous de trop nombreux képis. Les enquêtes de Médiapart révélant l’existence de groupuscules nazis dans certaines casernes, les groupes de discussions racistes des policiers et gendarmes, ou la participation récente de militaires en civil à la répression des dernières émeutes de banlieues ne plaident pas en faveur du républicanisme des militaires. ».

    Olivier Couzon poursuit : "Il y a dans cette plainte une atteinte intolérable à la liberté d’expression d’un journal syndical, qui par principe a une expression engagée." Et conclut : "Au delà, cette plainte s’inscrit dans un contexte plus global de tentatives de mettre un coup de pression contre des militant.es qui s’expriment librement pour faire connaître leurs analyses des politiques gouvernementales."

    #Police #Liberté_expression #Syndicalisme

  • YouTube : de la libre expression à l’acceptation des fausses informations - AOC media
    https://aoc.media/analyse/2023/06/20/youtube-de-la-libre-expression-a-lacceptation-des-fausses-informations

    Par l’auteur et l’autrice du livre « La Machine YouTube »

    YouTube a récemment modifié ses règles de modération des fausses informations électorales, laissant désormais libre cours aux vidéos qui reprennent des accusations infondées de fraude ou de trucage. Si la plateforme le justifie au nom du Premier amendement, c’est surtout du côté de son modèle économique qu’il faut aller chercher les véritables raisons d’un revirement qui réactive la crise épistémique de l’espace public états-unien.

    Les vidéos remettant en cause les résultats de la dernière élection présidentielle aux États-Unis, bannies de la plateforme depuis la proclamation officielle des chiffres du scrutin en décembre 2020, sont désormais accessibles : « we will stop removing content that advances false claims that widespread fraud, errors, or glitches occurred in the 2020 and other past US Presidential elections »[1]. Ainsi, peu importe que ces vidéos reprennent des accusations infondées de fraude ou de trucage, pour cette élection comme pour les précédentes, il s’agit pour la firme californienne de ne pas restreindre l’expression politique (« curtailing political speech »[2]).

    C’est donc indirectement sous la bannière du Premier Amendement de la Constitution que YouTube se place pour justifier un tel revirement. La plateforme s’inscrit à cet égard dans une tendance observable également chez ses concurrentes au cours de ces derniers mois, comme l’illustre de façon emblématique la réouverture du compte officiel de Donald Trump sur Twitter (novembre 2022), précédant la levée des restrictions sur sa chaîne YouTube (mars 2023).

    « Broadcast yourself », slogan des origines

    La première vidéo postée sur YouTube, en avril 2005, est l’œuvre de l’un des trois fondateurs de l’entreprise. Jawed Karim semble alors mettre lui-même en pratique le slogan « Broadcast Yourself » puisque, en l’occurrence, il rend librement accessibles les images de sa visite d’un zoo. En apparence très banale, cette vidéo inaugure un style de prise de vue et un esthétique amateur qui, adoptés par une myriade de vidéastes plus anonymes, deviendront la marque de fabrique de YouTube.

    Ces vidéos face cam – c’est ainsi que sera qualifié le genre icônique afférent –, ne relèveront toutefois pas de l’auto-diffusion au sens strict du terme. La diffusion (broadcast) n’est pas assurée par soi-même (self) mais par l’entremise de la plateforme. C’est elle qui, hébergeant les productions des vidéastes, les met dans le même temps à disposition des internautes. Le slogan masque donc cette intermédiation de YouTube, qui n’a pourtant rien de neutre. Elle conduit, par la mise au point des algorithmes de classement et de recommandation, à favoriser la « découvrabilité » de certaines vidéos. Plus encore, une telle intermédiation a pour finalité de tirer profit de cette activité.

    Dès lors YouTube réactive la crise épistémique de l’espace public états-unien, dont les racines remontent aux émissions d’ « agitateurs de droite extrême »[17] à la radio (Rush Limbaugh) et à la télévision (Tucker Carlson sur Fox News), mais qui s’est particulièrement manifestée en ligne lors de la présidentielle de 2016 au point d’annihiler les référents communs nécessaires au débat démocratique.

    Parce que les plateformes numériques occupent une place croissante dans l’espace public contemporain, leur capacité à organiser un débat de qualité est essentielle : « Some shared means of defining what facts or beliefs are off the wall and what are plausibly open to reasoned debate is necessary to maintain a democracy. »[18]. La trajectoire de YouTube peut laisser penser qu’une telle préoccupation démocratique passe le plus souvent après des considérations de nature économique, en dehors de circonstances très particulières. Or, un encadrement plus pérenne de ses contenus paraît légitime car la plateforme de vidéos prend une part croissante à la vie publique et procède à une modération de contenus de moins en moins éloignée des choix éditoriaux effectués par les médias traditionnels[19]. De la même manière que l’on exige par exemple, en France et depuis des années, une « maîtrise de leur antenne » par les médias audiovisuels[20], une régulation plus structurelle des plateformes numériques semble primordiale.

    Yvette Assilaméhou-Kunz
    PSYCHOLOGUE SOCIALE, MAÎTRESSE DE CONFÉRENCES EN PSYCHOLOGIE SOCIALE, IRMÉCCEN, UNIVERSITÉ SORBONNE NOUVELLE

    Franck Rebillard
    CHERCHEUR EN SCIENCES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION, PROFESSEUR EN SCIENCES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION À L’UNIVERSITÉ SORBONNE NOUVELLE ET CHERCHEUR/CO-FONDATEUR AU SEIN DE L’INSTITUT DE RECHERCHE MÉDIAS, CULTURES, COMMUNICATION ET NUMÉRIQUE (IRMÉCCEN)

    #YouTube #Liberté_expression #Economie_numerique

  • Twitter Suspends Over 25 Accounts That Track Billionaires’ Private Planes - The New York Times
    https://www.nytimes.com/2022/12/14/technology/twitter-private-jet-accounts-suspended.html

    Twitter on Wednesday suspended more than 25 accounts that track the planes of government agencies, billionaires and high-profile individuals — including one that followed the movements of the social media company’s owner, Elon Musk, who has said he was committed to “free speech.”

    Jack Sweeney, a 20-year-old college student and flight tracking enthusiast, said he woke up on Wednesday to find that his automated Twitter account, @ElonJet, had been suspended. In recent months, the account amassed more than 500,000 followers by using public flight information and data to post the whereabouts of Mr. Musk’s private plane. Twitter later reinstated the @ElonJet account before suspending it again.

    Mr. Musk had been aware of @ElonJet for months. After buying Twitter for $44 billion in October, he said that he would allow the account to remain on the platform. “My commitment to free speech extends even to not banning the account following my plane, even though that is a direct personal safety risk,” Mr. Musk tweeted last month.

    My commitment to free speech extends even to not banning the account following my plane, even though that is a direct personal safety risk
    — Elon Musk (@elonmusk) November 7, 2022

    Mr. Sweeney’s personal Twitter account was also suspended on Wednesday, along with the other accounts that he runs that track the planes of tech billionaires such as Mark Zuckerberg, Jeff Bezos and Bill Gates. Mr. Sweeney shared a message that he had received from Twitter, which said his account had been suspended for violating rules “against platform manipulations and spam.”

    `#Twitter #Elon_Musk #Liberté_expression

  • Elon Musk and the Tech Bro Obsession With ’Free Speech’ | Time
    https://time.com/6171183/elon-musk-free-speech-tech-bro

    “Freedom of speech” has become a paramount concern of the techno-moral universe. The issue has anchored nearly every digital media debate for the last two years, from the dustup over Joe Rogan at Spotify to vaccine misinformation on Facebook. Meta founder Mark Zuckerberg gave a major speech at Georgetown in 2019 about the importance of “free expression” and has consistently relied on the theme when explaining why Facebook has struggled to curb disinformation on the platform.

    “It does seem to be a dominant obsession with the most elite, the most driven Elon Musks of the world,” says Fred Turner, professor of communication at Stanford University and author of several books about Silicon Valley culture, who argues that “free speech seems to be much more of an obsession among men.” Turner says the drive to harness and define the culture around online speech is related to “the entrepreneurial push: I did it in business, I did it in space, and now I’m going to do it in the world.”

    But “free speech” in the 21st century means something very different than it did in the 18th, when the Founders enshrined it in the Constitution. The right to say what you want without being imprisoned is not the same as the right to broadcast disinformation to millions of people on a corporate platform. This nuance seems to be lost on some techno-wizards who see any restriction as the enemy of innovation.

    In a culture that places a premium on achieving the impossible, some tech titans may also see the liberal consensus on acceptable speech as yet another boundary to break. In Silicon Valley, bucking the liberal conventions about harmful speech can seem like the maverick move.

    Jason Goldman, who was on the founding team at Twitter and served on the company’s board from 2007 to 2010 before joining the Obama Administration, says the tech rhetoric around free speech has become an obsession of the mostly white, male members of the tech elite, who made their billions in the decades before a rapidly diversifying workforce changed the culture at many of the biggest companies in Silicon Valley.

    They “would rather go back to the way things were,” Goldman says, “and are couching that in terms of ‘free speech’ or ‘we’re not going to allow politics to be part of the conversation.’”

    Goldman says it’s “naive” to believe that Musk can throw out Twitter’s guardrails without degrading the platform. “To say you’re just going to allow for any type of abuse or harassment,” he says, “is an inherently anti-speech position, because you’re going to drive out a set of users who would use your product but no longer feel safe.”

    Tech titans often have a different understanding of speech than the rest of the world because most trained as engineers, not as writers or readers, and a lack of a humanities education might make them less attuned to the social and political nuances of speech.

    “Tech culture is grounded in engineering culture, which imagines itself as apolitical,” says Turner. Engineers, he adds, often see the world in terms of problems and solutions, and in that context, speech becomes a series of data points that get circulated through a data system, rather than expressions of social or political ideas.

    #Elon_Musk #Fred_Turner #Liberté_expression

  • Rachat de Twitter par Elon Musk : pourquoi la « liberté d’expression » défendue par le milliardaire inquiète
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/04/26/rachat-de-twitter-par-elon-musk-pourquoi-la-liberte-d-expression-defendue-pa

    Entre déclarations à l’emporte-pièce, critiques mal digérées et relations tendues avec les médias, le patron de Tesla a démontré à plusieurs reprises sa conception toute personnelle du principe qu’il entend défendre avec le rachat de la plate-forme.

    Sans surprise, l’annonce ravit la droite conservatrice américaine, qui reproche régulièrement aux entreprises de la Silicon Valley de favoriser les démocrates. Le sénateur républicain Jim Jordan, par exemple, a salué « le retour de la liberté d’expression » sur la plate-forme, tandis que la sénatrice du Tennessee, Marsha Blackburn, connue pour ses positions conservatrices, a déclaré qu’il s’agissait d’un « grand jour pour être conservateur sur Twitter » et qu’il était « temps que Twitter devienne ce qu’il est censé être : une plate-forme numérique ouverte à toutes les opinions ».

    En France aussi, certains se réjouissent de l’événement, particulièrement à l’extrême droite. « Le rachat de Twitter par Elon Musk : une très bonne nouvelle pour la liberté d’expression ! Stop censure, on suffoque ! Vive la liberté ! », a par exemple écrit Florian Philippot, président des Patriotes et ancien bras droit de Marine Le Pen.

    A l’opposé du spectre politique, pourtant, on s’inquiète de ce culte d’une liberté d’expression absolue défendue par le nouveau patron de Twitter, à rebours des efforts menés depuis plusieurs années par la plate-forme pour améliorer la modération des contenus haineux. La sénatrice démocrate Elizabeth Warren a immédiatement mis en garde contre un « accord dangereux pour notre démocratie ». Dans l’Union européenne, le commissaire responsable du marché intérieur, Thierry Breton, a prévenu que le réseau social « devrait s’adapter totalement aux règles européennes », tandis que le secrétaire d’Etat chargé de la transition numérique en France, Cédric O, a tenu à rappeler que « le Digital Services Act – et donc l’obligation de lutter contre la désinformation, la haine en ligne, etc. – s’applique[rait] quelle que soit l’idéologie » du propriétaire de Twitter.

    Censure à géométrie variable

    Elon Musk a aussi nourri une relation plus que houleuse avec les médias dont la couverture de son entreprise automobile lui déplaisait. Sur son compte Twitter, en 2018, il n’a pas hésité à multiplier les messages très hostiles à l’encontre d’une journaliste de Business Insider, qui avait enquêté sur Tesla, tandis que des médias comme Reuters ou CNBC ont fait l’objet de sa colère publique. Toujours sur son compte Twitter, M. Musk a longuement détaillé sa défiance et sa réprobation vis-à-vis des médias traditionnels, caressant même l’idée de créer un service de notation des médias et des journalistes. Le plan initial était d’appeler cette structure « Pravda », du nom du journal officiel du Parti communiste sous l’Union soviétique. Elon Musk étant extrêmement suivi par une foule de fans en adoration, chacune de ses critiques était amplifiée et démultipliée, occasionnant d’importantes vagues de harcèlement visant spécifiquement les femmes journalistes, nombreuses à désormais s’autocensurer lorsqu’il s’agit de couvrir Tesla ou Elon Musk.

    La culture de la liberté d’expression façon Musk semble par ailleurs savoir cohabiter avec une certaine dose de la censure qu’elle prétend pourtant combattre, dès lors qu’elle sert les intérêts de ses entreprises. En 2021, selon l’agence de presse Bloomberg, sa société Tesla n’a ainsi pas hésité à se rapprocher des autorités chinoises afin de se plaindre des attaques à ses yeux injustifiées dont elle faisait l’objet sur les réseaux sociaux du pays, demandant que Pékin intercède en sa faveur et bloque certains de ces messages. La Chine représente en effet le deuxième marché, après les Etats-Unis, pour le constructeur d’automobiles électriques.

    #Twitter #Elon_Musk #Liberté_expression

  • A 23-Year-Old Coder Kept QAnon and the Far Right Online When No One Else Would - Bloomberg
    https://www.bloomberg.com/news/features/2021-04-14/qanon-daily-stormer-far-right-have-been-kept-online-by-nick-lim-s-vanwate

    Trop facile l’argument de la liberté d’expression pour favoriser les néo-nazis.

    Two and a half months before extremists invaded the U.S. Capitol, the far-right wing of the internet suffered a brief collapse. All at once, in the final weeks of the country’s presidential campaign, a handful of prominent sites catering to White supremacists and adherents of the QAnon conspiracy movement stopped functioning. To many of the forums’ most devoted participants, the outage seemed to prove the American political struggle was approaching its apocalyptic endgame. “Dems are making a concerted move across all platforms,” read one characteristic tweet. “The burning of the land foreshadows a massive imperial strike back in the next few days.”

    In fact, there’d been no conspiracy to take down the sites; they’d crashed because of a technical glitch with VanwaTech, a tiny company in Vancouver, Wash., that they rely on for various kinds of network infrastructure. They went back online with a simple server reset about an hour later, after the proprietor, 23-year-old Nick Lim, woke up from a nap at his mom’s condo.

    Lim founded VanwaTech in late 2019. He hosts some websites directly and provides others with technical services including protection against certain cyberattacks; his annual revenue, he says, is in the hundreds of thousands of dollars. Although small, the operation serves clients including the Daily Stormer, one of America’s most notorious online destinations for overt neo-Nazis, and 8kun, the message board at the center of the QAnon movement, whose adherents were heavily involved in the violence at the Capitol on Jan. 6.

    Lim exists in a singularly odd corner of the business world. He says he’s not an extremist, just an entrepreneur with a maximalist view of free speech. “There needs to be a me, right?” he says, while eating pho at a Vietnamese restaurant near his headquarters. “Once you get to the point where you look at whether content is safe or unsafe, as soon as you do that, you’ve opened a can of worms.” At best, his apolitical framing comes across as naive; at worst, as preposterous gaslighting. In interviews with Bloomberg Businessweek early in 2020, Lim said he didn’t really know what QAnon was and had no opinion about Donald Trump.

    #Extrême_droite #Premier_amendement #Liberté_expression #Fachosphère

    • Je sais bien, mais en même temps, l’article pourrait (devrait ?) se résumer à ceci :

      “There’s already a good recipe that was used for ISIS. Why don’t you use it on the far right?”

      It’s tougher to keep a site such as the Daily Stormer offline as long as somebody like Lim is willing to support it. U.S. laws governing domestic extremism are less expansive than those focused on international terrorism, partly to protect the rights of U.S. citizens with unpopular political views.

      Le type fait dans la cradingue, c’est indéniable, mais apparemment pas dans l’illégal. Ce sont les États-Unis, où il y a désormais une communication publique massive (notamment suite à la catastrophe Trump, QAnon, White supremacist…) pour avoir une maîtrise collective de l’expression publique (« on » décide que certaines expressions n’ont pas leur place dans la sphère publique, et notamment sur le Web), mais dans le même temps on refuse complètement d’y donner une forme juridique (because Premier amendement).

      Donc on mène de grandes campagnes d’indignation collective, et on fait pression sur les plateformes pour faire supprimer certains contenus (il y a d’ailleurs deux activistes qui le disent tout à fait explicitement dans l’article), tout en se rendant bien compte que ces expressions ne sont par ailleurs pas illégales (le gars de l’article ne dit absolument pas qu’il maintiendrait des contenus illégaux aux États-Unis, jihadistes ou pédophiles par exemple). Et qu’en même temps on semble prendre bien soin à ne pas ouvrir ce débat pour que les limites de l’expression publique soient mieux encadrées par des tribunaux, plutôt que laissées à la discrétion des plateformes (qui en profitent pour virer plein d’autres choses discrètement par ailleurs).

    • Oui, ça je suis bien d’accord. Mais les motivations du gars, est-ce qu’on ne s’en fout pas un peu ? Des fachos qui hébergent des fachos, on s’en cogne un peu de leurs alibis, la question elle est vite répondue.

      Ce qui me chagrine, c’est qu’on a un article extrêmement long, qui aborde la question de l’illégalité (ou plutôt de l’absence d’illégalité) dans une unique phrase, et qui au contraire se focalise sur les mouvements de pression organisés pour que les grandes plateformes dégagent certains contenus, plutôt que d’avoir une régulation encadrée par la loi. Et qui, dès le début, titre sur la notion de « When No One Else Would ».

      Et je trouve ça extrêmement inquiétant : parce qu’on trouvera toujours un facho pour héberger des fachos, surtout tant que le fait d’héberger des sites fachos n’est pas illégal.

      Ce qui me semble la pente dangereuse de ce genre de considération, c’est qu’on considère fondamentalement dangereux et illégitime qu’on puisse s’héberger (et s’exprimer) en dehors des grandes plateformes. C’est le sens du titre et des activistes de l’article : s’il suffit de faire pression sur les grandes plateformes pour se débarrasser des fachos, nickel ; mais s’il est encore possible de trouver un hébergeur qui le fera « When No One Else Would », on atteint les limites de cette forme de « régulation » de l’expression publique.

      Alors même que si ces formes d’expression étaient interdites par la loi, comme Daesh et la pédophilie, ce ne serait pas du tout la même question – puisque l’hébergeur facho ne revendique à aucun moment de contrevenir à la loi et d’héberger des contenus illégaux.

      La conclusion inévitable de cette façon de voir, c’est qu’il ne faudrait pas laisser aux gens la possibilité de s’exprimer ou accéder à des contenus en dehors des grandes plateformes. Parce que, à nouveau, tant que c’est légal, en l’état actuel des interwebz et tant qu’il n’y a aura pas une interdiction légale de le faire, on trouvera toujours des fachos pour héberger des fachos.

      (Accessoirement, ça aurait tendance à me renvoyer à une autre préoccupation pénible que j’ai depuis quasiment 20 ans : le volontarisme des fachos à se déployer et s’organiser sur les interwebz, à réellement « faire du réseau », et au contraire une immense passivité/méfiance des progressistes qui pour une large part ont décidé que monter une page Facebook c’était bien suffisant, et qui se retrouvent à poil une fois qu’ils se font éjecter des grands réseaux sociaux. Et ensuite on va chouiner contre les méchants GAFA.)

  • François Le Ménahèze, écrivain et formateur en pédagogie : « La liberté d’expression des enseignants n’existe plus » (ladepeche.fr)
    https://www.ladepeche.fr/2020/10/23/francois-le-menaheze-ecrivain-et-formateur-en-pedagogie-la-liberte-dexpres

    En tant que journaliste, on se rend compte que, si on sort des représentants syndicaux, il est de plus en difficile de trouver des enseignants qui acceptent de nous répondre à visage découvert, même parfois sur des sujets qui n’appellent pas la polémique. On doit souvent faire avec des témoignages anonymes. Est-ce qu’il y a une règle qui leur interdit de s’exprimer ?

    #éducation #enseignant·es #liberté_expression

  • Comment la Chine impose sa propagande sur les réseaux sociaux en France
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2020/07/28/la-propagande-chinoise-s-invite-sur-les-reseaux-sociaux-en-france_6047454_44

    « Taux d’engagement faible »

    « Notre analyse montre que les pages de médias d’Etat chinois connaissent une forte croissance, mais un taux d’engagement beaucoup plus faible que les médias américains, explique Vanessa Molter, chercheuse à Stanford et coautrice avec la spécialiste de la désinformation Renee DiResta d’une étude sur l’usage des réseaux sociaux par les médias chinois anglophones, publiée le 8 juin. Cette différence peut s’expliquer par des contenus qui suscitent moins de réactions, par une audience qui est moins active sur Facebook, ou être le signe d’une activité anormale de ces pages. Si ces “like” sont effectivement des faux, leur avantage serait que la plupart des gens considèrent qu’une audience importante est liée à un média légitime. Pour un utilisateur peu averti, plusieurs millions de “like” peuvent donner l’impression qu’une page est particulièrement fiable. »

    Dès 2007, les dirigeants du Parti communiste avaient officialisé leur campagne de promotion d’un soft power à la chinoise. Le groupe de télévision étatique national, China Central Television (CCTV), se voit à cette époque doté de moyens colossaux pour développer ses chaînes, préexistantes ou fraîchement lancées, en anglais, français, espagnol, russe ou arabe. Mais ces tentatives peinent à convaincre à l’étranger.

    Alors que la Russie théorise en 2013 sa « guerre hybride », qui se joue sur le théâtre conventionnel, mais aussi dans le cyberespace et l’opinion publique du pays ciblé, sur les questions de nature à déstabiliser de l’intérieur les pouvoirs en place, le régime chinois poursuit dans un premier temps un objectif bien plus nombriliste. Il s’agit de promouvoir la culture de l’empire du Milieu, mais surtout de tenter de faire accepter comme légitimes son modèle de parti unique et ses politiques.
    Projection de puissance

    Mais l’objectif évolue, aux mains d’un secrétaire du Parti communiste chinois (PCC), Xi Jinping, arrivé au pouvoir en 2012 et qui porte une politique bien plus assumée de projection de puissance. En chemin, le modèle ennemi, la démocratie américaine, perd de son ascendant moral sous l’exercice du mandat de Donald Trump.

    C’est alors que survient la crise du Covid-19. Oubliant au passage sa lenteur à donner l’alerte – du fait de la peur qui règne dans les échelons hiérarchiques locaux vis-à-vis de la direction du PCC –, la Chine voit une opportunité de valorisation de son modèle politique, dont sa capacité à contrôler strictement la population et son confinement, en miroir des errements constatés en Europe et, surtout, dans les Etats-Unis de Trump.

    En juin, un rapport de la Commission européenne blâmait pour la première fois la Chine, au côté de la Russie, pour une « déferlante » de « fake news » qui s’est abattue durant la crise sanitaire. Bruxelles faisait le constat d’un « effort coordonné » des sources d’information officielles chinoises pour rejeter toute responsabilité dans la pandémie et promouvoir sa réponse. Le 4 juin, Facebook a commencé à afficher un avertissement permanent sur les comptes de médias dont « la ligne éditoriale est contrôlée par un Etat » ; une mention en ce sens s’affiche désormais sur les pages de CGTN dans toutes les langues.

    Face à ces vecteurs de propagande, la tentation est forte de répliquer. Le régulateur de l’audiovisuel du Royaume-Uni étudie actuellement l’opportunité de bloquer la diffusion de la chaîne CGTN en anglais, pour avoir diffusé des aveux forcés de prisonniers politiques aux mains de la police chinoise contraires à la charte éthique de l’audiovisuel britannique. En février, l’administration Trump a enregistré les bureaux des médias officiels chinois sous le statut de missions diplomatiques. Mais le jeu est dangereux pour la liberté d’informer : Pékin renchérit et a expulsé le mois suivant tous les journalistes américains du New York Times, du Washington Post et du Wall Street Journal installés sur son territoire – réduisant encore les sources d’information sur la Chine.

    #Chine #Facebook #Télévision #Propagande #Liberté_expression

  • Laure Murat : « La “cancel culture”, c’est d’abord un immense ras-le-bol d’une justice à deux vitesses »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/08/01/la-cancel-culture-c-est-d-abord-un-immense-ras-le-bol-d-une-justice-a-deux-v

    Tribune. C’est une guerre culturelle. Elle est à la fois plus ancienne qu’on le croit et plus inédite qu’on le pense. Dans la cacophonie des passions et des controverses qu’elle suscite et dont la presse se fait désormais quotidiennement l’écho, elle vaut surtout pour les questions qu’elle pose. De quoi s’agit-il ? De la « cancel culture », soit littéralement la culture de l’annulation, qui consiste à pointer du doigt une personnalité ou une entreprise dont un propos, ou une action, a été considéré comme répréhensible ou « offensant » et à lui retirer son soutien via les réseaux sociaux.
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    Cette définition, assez large pour faire consensus, désigne avant tout un mode d’expression composé de discours – de la critique à l’insulte – et d’actions – du sit-in au déboulonnage de statues. Elle recouvre une multitude de pratiques, du boycott – droit politique – au cyberharcèlement – délit moderne.
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Thomas Chatterton Williams : « Un espace public corseté par la “cancel culture” ne sert pas les intérêts des minorités »

    Autant dire d’emblée que la « cancel culture », dont le terme remonterait à 2015, fait du neuf avec du vieux. Elle est l’outil le plus récent d’une contestation politique de plus en plus intense, issue des minorités et de la gauche radicale américaine, s’inscrivant dans le combat des droits civiques et du féminisme, excédées par l’impunité du pouvoir et la passivité des institutions face au racisme, à l’injustice sociale, au sexisme, à l’homophobie, à la transphobie, entre autres.

    Black Lives Matter et #metoo sont parmi les mouvements qui empruntent à la « cancel culture » pour dénoncer des situations iniques, exiger des institutions qu’elles prennent leurs responsabilités en cessant d’honorer des personnalités accusées d’agressions sexuelles ou d’œuvres racistes.
    « Tyrannie des minorités »

    C’est ainsi qu’on a vu nombre de journalistes harceleurs quitter leur poste, ou le Parlement américain accepter, sous la pression, de retirer du Capitole les statues des confédérés. La mort de George Floyd a imprimé une impulsion nouvelle à cette vague qui gagne l’Europe, où l’on a vu à Bristol [Royaume-Uni] la statue d’un marchand d’esclaves être jetée à l’eau par la foule, ou [l’ancien roi des Belges] Léopold II être emporté par une grue à Anvers. L’activité sur Twitter a explosé, les exigences se sont démultipliées. La machine s’emballe.
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    Dernier recours d’une population exaspérée, marginalisée et sans autre voix ni pouvoir que l’Internet, la « cancel culture » est devenue l’arme à double tranchant de « clicktivistes » sans frein qui, à force d’oukases et de menaces tous azimuts, s’attirent aujourd’hui de plus en plus de critiques. « Tyrannie des minorités », « appel à la censure », « intolérance et ostracisme », la « cancel culture » annoncerait la fin de la liberté d’expression, selon une tribune publiée dans Harper’s Magazine et dans Le Monde, et signée par 150 personnalités, plutôt classées à gauche.

    Ce délire de pureté, de transparence et d’une cohérence forcenée fait craindre,
    en France, et au prix d’un anachronisme classique, l’avènement d’une nouvelle Terreur

    Un récent sondage (Politico, 17-19 juillet) montre que 44 % de l’électorat américain désapprouvent ces pratiques, 32 % y sont favorables et 24 % se déclarent sans opinion, cependant que 55 % des 18-34 ans reconnaissent y avoir déjà pris part. Plus important, une majorité des sondés (53 %) estiment que ceux qui tiennent des propos offensants en public doivent s’attendre à des conséquences sociales. Si bien que l’on parle plus volontiers aujourd’hui d’« accountability culture » ou culture de la responsabilité. En clair : assumez vos actes et vos propos.
    Dérives inquiétantes

    Ce principe qui n’a rien d’exorbitant s’accompagne néanmoins de dérives inquiétantes et d’amalgames qui laissent perplexes. Le patron d’une chaîne alimentaire dans le Minnesota a manqué de fermer son entreprise à cause d’un tweet raciste de son adolescente de fille, qui a déchaîné une campagne sans précédent sur les réseaux sociaux.

    Sur Twitter, l’effet de concaténation des offenses confine au vertige. Si j’« annule » X et que Y le soutient, Y sera « annulé » à son tour, et s’il s’enferre, tous ses « followers » avec lui. Certains se voient reprocher des propos tenus il y a vingt ans ou des amitiés anciennes avec untel qui aurait fait une blague sexiste. Des vies sont détruites, au terme de campagnes d’exclusion dignes des plus cruels bizutages.

    Ni prescription ni seconde chance ne sont au programme dans ces mises au pilori et ces excommunications. Les êtres seraient des blocs, sommés de justifier tout acte et toute parole. Ce délire de pureté, de transparence et d’une cohérence forcenée fait craindre, en France, et au prix d’un anachronisme classique, l’avènement d’une nouvelle Terreur et d’un conformisme moral proprement frénétique.
    Nouvelle dictature de l’opinion ?

    La « cancel culture », nouvelle dictature de l’opinion ? Ce raccourci, Donald Trump, son ennemi juré, est le premier à le faire. Le 3 juillet, n’accusait-il pas ce « fascisme d’extrême gauche » d’être la « définition même du totalitarisme » ? Etrange saillie venant d’un homme qui passe son temps à humilier publiquement jusqu’à ses plus proches collaborateurs, ne supporte aucune contradiction, appelle au renvoi de certaines personnalités (notamment des journalistes) et a gagné en célébrité par une émission de télé-réalité, The Apprentice, consistant à éliminer (à « annuler » ?) les candidats à coups de : « You are fired ! » (« Vous êtes viré ! »). Etrange image en miroir aussi que ce face-à-face entre une foule en colère et un président écumant toujours de rage, dans un monde de plus en plus polarisé, clivé, qui a perdu le sens du dialogue – sans même parler de celui de la dialectique.
    La querelle de la « cancel culture » oppose de nombreux intellectuels aux Etats-Unis

    Aux Etats-Unis, la nouvelle gauche, née des mouvements #metoo et Black Lives Matter, serait à l’origine d’un phénomène qui inquiète de nombreux intellectuels américains, la « cancel culture », autrement dit une tendance à vouloir faire taire des voix jugées dissonantes, dangereuses ou haineuses. Né sur les réseaux sociaux, ce phénomène se traduit par des mobilisations qui ont fini par provoquer des démissions, renvois, annulations de conférence, etc. Cinq des auteurs de la tribune que nous publions (Mark Lilla, Thomas Chatterton Williams, George Packer, David Greenberg et Robert Worth) sont des intellectuels engagés dans la défense de la liberté d’expression. Avec les 150 personnalités qui se sont jointes à leur appel, ils estiment qu’une frange de la gauche radicale américaine pratiquerait ainsi une forme de censure. Publié sur le site du mensuel américain Harper’s, ce texte devrait l’être également en Allemagne, en Espagne et au Japon.

    Plusieurs événements récents témoignent de ces nouvelles tensions. Début juin, le directeur des pages « Opinion » du New York Times, James Bennet, a été licencié après la parution d’une tribune signée par un sénateur républicain appelant à l’envoi de l’armée contre les manifestations violentes. Tant au sein de la rédaction du quotidien new-yorkais que sur les réseaux sociaux, ce texte a suscité une vive émotion, certains estimant qu’il pouvait porter atteinte à la sécurité des personnes noires. Sans soutenir le contenu de cet article, d’autres personnalités ont estimé que James Bennet avait été limogé avec un empressement douteux, comme s’il fallait au plus vite donner satisfaction aux internautes en colère. Parmi les signataires de la présente tribune se trouvent d’ailleurs plusieurs grandes signatures du New York Times.

    Autre renvoi ayant suscité l’indignation, celui de David Shor, un analyste de données qui a été licencié début juin par son employeur, Civis Analytics, une société de conseil politique proche des démocrates. Il était reproché à M. Shor d’avoir retweeté l’étude d’un chercheur, de l’université de Princeton (New Jersey), qui tendait à démontrer que les manifestations violentes, comme il a pu y en avoir récemment aux Etats-Unis pour dénoncer les violences policières, ont un impact positif sur le vote républicain. Cette attention portée aux conséquences néfastes des manifestations violentes avait été considérée, par certains militants, comme une manière de faire taire la colère des populations noires aux Etats-Unis.

    D’autres intellectuels ne partagent pas cette vision du débat sur la « cancel culture ». Ils estiment au contraire qu’il va permettre de donner davantage la parole aux minorités généralement moins ou peu entendues. D’autres encore jugent que les dénonciateurs de la « cancel culture » font fausse route : selon eux, les menaces sur la liberté d’expression viendraient bien davantage de l’extrême droite que de la gauche radicale. Ils ajoutent que le recours à l’intimidation et à la violence pour faire taire ses opposants serait d’abord et avant tout, aux Etats-Unis, le fait des suprémacistes blancs. Ils rappellent également que Donald Trump a, lui aussi, durement attaqué la « cancel culture » le 4 juillet.

    Posons cette hypothèse. Et si la « cancel culture » n’était que l’avatar logique, inévitable, d’une démocratie à bout de souffle, dite désormais « illibérale », et de l’ère de la post-vérité ? L’enfant illégitime de la pensée occidentale et du capitalisme débridé, dans une société supposément universaliste, aveugle à ses impensés et incapable de reconnaître les crimes et les conséquences sans nombre de l’esclavage et de la colonisation ?

    Enfant illégitime, c’est-à-dire hors institution, qu’une de ces drôleries pas si paradoxales de la langue française appelle aussi : enfant naturel. N’allez pas chercher la violence de la « cancel culture » ailleurs que dans la brutalité du pouvoir. Là se loge le danger, et là l’impasse. Car, comme le rappelle la poétesse Audre Lorde, « The master’s tools will never dismantle the master’s house » (« Les outils du maître ne démantèleront jamais la maison du maître »).
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    Le problème de la « cancel culture » est celui de la riposte, d’une réponse politique adéquate à l’impunité. Car qui annule qui ? Du jour où le footballeur Colin Kaepernick s’est agenouillé en 2016 pendant l’hymne américain pour protester contre les violences policières envers les minorités, il n’a plus été admis à jouer dans aucune équipe de la NFL (National Football League). Et que dire de ces femmes innombrables, violées, harcelées ou qui ont été renvoyées pour avoir refusé une faveur sexuelle à leur employeur ? Annulées, elles aussi, en silence, sans autre pouvoir que de dire, un jour, sur les réseaux sociaux : Moi aussi… Celles qui sont mortes sous les coups de leur compagnon n’auront pas eu cette opportunité.
    Le racisme et le sexisme honorés

    Pendant ce temps-là, alors qu’on reproche aux féministes leur « maccarthysme », Roman Polanski est honoré par toute une profession qui se pique de distinguer l’homme de l’artiste et Gérald Darmanin, sous le coup d’une accusation de viol, décroche le portefeuille de l’intérieur dans un gouvernement qui a juré de faire de l’égalité homme-femme une priorité. Cet exquis sens de la nuance et du paradoxe qui caractérise le patriarcat finit par lasser.

    Car la « cancel culture », c’est aussi et peut-être d’abord cela : un immense ras-le-bol d’une justice à deux vitesses, une immense fatigue de voir le racisme et le sexisme honorés quand les Noirs se font tuer par la police et les statistiques de viols et de féminicides ne cessent d’augmenter. Le lien établi entre l’actualité et l’histoire, les drames du quotidien et les grands récits officiels a souvent fait polémique.

    « On ne réécrit pas l’Histoire », dit-on. Or rien n’est plus faux : on passe son temps à réviser nos jugements, à découvrir de nouveaux éléments, à fournir des interprétations inédites. La « cancel culture », à qui il est reproché de sortir les choses de leur contexte et d’imposer un regard manichéen sur le passé, braque le projecteur sur des aspects le plus souvent liés à l’histoire coloniale, dans le but de rééquilibrer un récit jugé mythique, partial, incomplet, pour mieux s’en émanciper.

    Churchill a régulièrement fait des déclarations sur l’inégalité des races, Victor Schœlcher n’a, certes, pas été le seul à abolir l’esclavage. Fallait-il pour autant tagger d’un « racist » la statue du premier à Londres et renverser celle du second en Martinique, au motif qu’il faudrait honorer en lieu et place l’esclave Romain, dont l’arrestation en 1848 pour avoir joué du tambour avait déclenché le soulèvement libérateur ? Non.

    Il est urgent en revanche d’entendre un cri d’alarme qui partout se répand et d’en comprendre les vrais enjeux, afin que la catharsis, la punition et les exactions en tout genre ne deviennent le seul mode de (non) communication entre le pouvoir et le peuple, dans un monde verrouillé par une spéculaire et mortifère logique de flics.

    Laure Murat est historienne et essayiste, professeure de littérature à l’Université de Californie, à Los Angeles.

    #Cancel_culture #Minorités #Liberté_expression #Histoire

  • Mark Lilla, Margaret Atwood, Wynton Marsalis… : « Notre résistance à Donald Trump ne doit pas conduire au dogmatisme ou à la coercition »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/07/08/mark-lilla-margaret-atwood-wynton-marsalis-notre-resistance-a-donald-trump-n

    Un tel débat est intéressant, même si on peut toujours douter de l’emphase mise sur quelques cas pour les confondre avec une atmosphère de censure, ou plutôt de "gorkisme", qui n’est pas encore si prégnante que veut le dire le texte (mais le danger existe, notamment dans des cercles fermés, j’en ai fait l’expérience amère dans les groupes "soit-disant gauchistes" des années 1970). La liberté d’expression a elle-même des limites, notamment le discours de haine, la diffamation,... Mais la définition même ce ces limites est un enjeu politique. Certes, ce sont la droite et l’extrême-droite, notamment en ce qu’ils tiennent les cordons de la bourse des médias, qui sont les acteurs majeurs en ce domaine, et les revendications des minorités de vouloir "faire fermer leur g..." aux haineux sont totalement compréhensibles. Mais là encore, l’expérience du XXe siècle (réalisme socialiste, Djanov, Lin Piao, Yao Wen Yang,...) montre que sous des couleurs de "défense des opprimés" peut se mettre en place un système de censure d’autant plus sauvage qu’il fait appel aux "tribunaux populaires" et se réalise en "lynchages médiatiques". Pour autant, les signataires ne sont pas blanc bleu, car souvent ils négligent la colère des minoritaires et opprimés devant l’immobilisme de la "classe créative" face aux injustices intersectionnelles (classe, race, genre, culture,...). Un débat complexe, où tous les points de vue ont une part de justice et de réalisme. Il ne faudrait pas que cela devienne un chiffon rouge pour diviser les mouvements... ce qui est parfois présent dans des tournures "imprécises" du texte (qui a dit quoi et qui interdit quoi et quand et dans quelles circonstances,...). Comment inventer un art libre et une pensée ouverte sans sombrer dans le relativisme et ignorer les grands déséquilibres et inégalités qui percluent notre monde.

    Tribune. Nos institutions culturelles sont aujourd’hui à l’épreuve. Les puissantes manifestations en faveur de la justice raciale et sociale revendiquent une réforme de la police trop longtemps différée et font plus largement entendre des appels pour davantage d’égalité et d’inclusion dans notre société, notamment dans l’enseignement supérieur, le journalisme, la philanthropie et les arts.

    Mais cette nécessaire prise en compte a aussi renforcé tout un ensemble de postures morales et d’engagements politiques qui risquent d’affaiblir les règles du débat public et l’acceptation des différences au profit d’un conformisme idéologique. Autant nous avons salué la première phase de ce mouvement, autant nous voulons nous élever contre la seconde.

    Les forces illibérales gagnent du terrain partout dans le monde et trouvent un puissant allié en Donald Trump, qui représente une réelle menace contre la démocratie. Notre résistance ne devrait pas conduire au dogmatisme ou à la coercition. L’inclusion démocratique que nous appelons de nos vœux ne peut advenir que si nous refusons le climat d’intolérance général qui s’est installé de part et d’autre.
    Crainte des représailles

    L’échange libre des informations et des idées, qui est le moteur même des sociétés libérales, devient chaque jour plus limité. La censure, que l’on s’attendait plutôt à voir surgir du côté de la droite radicale, se répand largement aussi dans notre culture : intolérance à l’égard des opinions divergentes, goût pour l’humiliation publique et l’ostracisme, tendance à dissoudre des questions politiques complexes dans une certitude morale aveuglante. Nous défendons le principe d’un contre-discours solide et même caustique de toutes parts.
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Non, Emmanuel Macron n’est pas l’incarnation du racisme systémique »

    Or, les appels à sanctionner rapidement et sévèrement tout ce qui est perçu comme une transgression langagière et idéologique sont devenus monnaie courante. Plus inquiétant encore, des dirigeants institutionnels, ne sachant plus où donner de la tête pour limiter les dégâts, optent pour des sanctions hâtives et disproportionnées plutôt que pour des réformes réfléchies.

    « La censure, que l’on s’attendait plutôt à voir surgir du côté de la droite radicale, se répand largement aussi dans notre culture »

    On renvoie des rédacteurs en chef pour avoir publié des articles controversés ; on retire des livres sous le prétexte d’un manque d’authenticité ; on empêche des journalistes d’écrire sur certains sujets ; on enquête sur des professeurs à cause des œuvres littéraires qu’ils citent en classe ; un chercheur est renvoyé pour avoir fait circuler un article scientifique dûment examiné par des pairs ; et on limoge des dirigeants d’organisation pour des erreurs qui ne sont parfois que des maladresses.

    Quelles que soient les raisons invoquées, la conséquence en est qu’il est de plus en plus difficile de prendre la parole sans craindre des représailles. Nous en faisons déjà les frais, à en juger par l’aversion au risque qui se développe parmi les écrivains, les artistes et les journalistes, inhibés par la peur de perdre leur gagne-pain s’ils s’écartent du consensus ou même s’ils ne font pas preuve du zèle attendu pour se conformer.
    La justice n’existe pas sans la liberté

    Cette atmosphère étouffante va finir par nuire aux causes les plus vitales de notre époque. Restreindre le débat, que ce soit le fait d’un gouvernement répressif ou d’une société intolérante, nuit immanquablement à ceux qui ne détiennent pas le pouvoir et nous rend tous moins aptes à participer à la vie démocratique.

    Pour vaincre de mauvaises idées, il faut les exposer, argumenter et convaincre, et non pas essayer de les taire ou espérer qu’elles disparaissent.
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le réalisateur Jean-Pascal Zadi : « Il y a autant d’identités noires en France que de Noirs »

    Nous rejetons les faux choix qu’on nous présente entre la justice et la liberté : l’une n’existe pas sans l’autre. En tant qu’écrivains, notre métier repose sur la marge que la société nous accorde pour l’expérimentation, la prise de risque et même l’erreur. Nous avons besoin de préserver la possibilité d’un désaccord de bonne foi sans conséquences professionnelles désastreuses. Si nous ne défendons pas ce qui est la condition même de notre travail, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que le public ou l’Etat le fasse pour nous. (Traduit de l’anglais par Pauline Colonna d’Istria)
    La querelle de la « cancel culture » oppose de nombreux intellectuels aux Etats-Unis

    Aux Etats-Unis, la nouvelle gauche, née des mouvements #metoo et Black Lives Matter, serait à l’origine d’un phénomène qui inquiète de nombreux intellectuels américains, la « cancel culture », autrement dit une tendance à vouloir faire taire des voix jugées dissonantes, dangereuses ou haineuses. Né sur les réseaux sociaux, ce phénomène se traduit par des mobilisations qui ont fini par provoquer des démissions, renvois, annulations de conférence, etc. Cinq des auteurs de la tribune que nous publions (Mark Lilla, Thomas Chatterton Williams, George Packer, David Greenberg et Robert Worth) sont des intellectuels engagés dans la défense de la liberté d’expression. Avec les 150 personnalités qui se sont jointes à leur appel, ils estiment qu’une frange de la gauche radicale américaine pratiquerait ainsi une forme de censure. Publié sur le site du mensuel américain Harper’s, ce texte devrait l’être également en Allemagne, en Espagne et au Japon.

    Plusieurs événements récents témoignent de ces nouvelles tensions. Début juin, le directeur des pages « Opinion » du New York Times, James Bennet, a été licencié après la parution d’une tribune signée par un sénateur républicain appelant à l’envoi de l’armée contre les manifestations violentes. Tant au sein de la rédaction du quotidien new-yorkais que sur les réseaux sociaux, ce texte a suscité une vive émotion, certains estimant qu’il pouvait porter atteinte à la sécurité des personnes noires. Sans soutenir le contenu de cet article, d’autres personnalités ont estimé que James Bennet avait été limogé avec un empressement douteux, comme s’il fallait au plus vite donner satisfaction aux internautes en colère. Parmi les signataires de la présente tribune se trouvent d’ailleurs plusieurs grandes signatures du New York Times.

    Autre renvoi ayant suscité l’indignation, celui de David Shor, un analyste de données qui a été licencié début juin par son employeur, Civis Analytics, une société de conseil politique proche des démocrates. Il était reproché à M. Shor d’avoir retweeté l’étude d’un chercheur, de l’université de Princeton (New Jersey), qui tendait à démontrer que les manifestations violentes, comme il a pu y en avoir récemment aux Etats-Unis pour dénoncer les violences policières, ont un impact positif sur le vote républicain. Cette attention portée aux conséquences néfastes des manifestations violentes avait été considérée, par certains militants, comme une manière de faire taire la colère des populations noires aux Etats-Unis.

    D’autres intellectuels ne partagent pas cette vision du débat sur la « cancel culture ». Ils estiment au contraire qu’il va permettre de donner davantage la parole aux minorités généralement moins ou peu entendues. D’autres encore jugent que les dénonciateurs de la « cancel culture » font fausse route : selon eux, les menaces sur la liberté d’expression viendraient bien davantage de l’extrême droite que de la gauche radicale. Ils ajoutent que le recours à l’intimidation et à la violence pour faire taire ses opposants serait d’abord et avant tout, aux Etats-Unis, le fait des suprémacistes blancs. Ils rappellent également que Donald Trump a, lui aussi, durement attaqué la « cancel culture » le 4 juillet.

    Sont notamment signataires de cette tribune : Martin Amis, écrivain britannique ; Anne Applebaum, historienne américaine ; Marie Arana, essayiste et éditrice américaine ; Margaret Atwood, romancière canadienne ; John Banville, romancier irlandais ; Jennifer Finney Boylan, auteure, professeure à l’université Columbia (New York) ; David Brooks, chroniqueur américain ; Ian Buruma, journaliste et essayiste néerlandais ; Noam Chomsky, professeur émérite de linguistique, Massachusetts Institute of Technology ; Roger Cohen, chroniqueur américain ; Kamel Daoud, écrivain algérien ; Gerald Early, professeur de lettres modernes, d’anglais, d’études africaines et d’études afro-américaines, université Washington de Saint-Louis (Missouri) ; Jeffrey Eugenides, romancier américain ; Richard T. Ford, professeur de droit à l’université de Stanford (Californie) et spécialiste des discriminations ; Francis Fukuyama, politiste américain ; David Greenberg, professeur d’histoire, université Rutgers (New Jersey) ; Bill T. Jones, danseur et chorégraphe américain ; Joy Ladin, poète américaine ; Mark Lilla, essayiste et professeur de sciences humaines à l’université de Columbia (New York) ; Greil Marcus, essayiste et critique musical américain ; Wynton Marsalis, musicien américain ; Mark Oppenheimer, essayiste américain ; George Packer, journaliste et essayiste américain ; Nell Irvin Painter, historienne, spécialiste de l’histoire du sud des Etats-Unis et des Afro-Américains au XIXe siècle ; Steven Pinker, professeur de psychologie cognitive, université Harvard (Massachusetts) ; J.K. Rowling, romancière britannique ; Salman Rushdie, écrivain britannique ; Gloria Steinem, essayiste et militante féministe américaine ; Michael Walzer, professeur émérite de science sociale à Princeton (New Jersey) ; Thomas Chatterton Williams, essayiste et journaliste américain ; Robert F. Worth, journaliste américain ; Fareed Zakaria, journaliste américain, spécialiste des relations internationales. La liste complète des signataires :

    Liste Signataires Tribune Cancel Culture by Le Monde on Scribd

    #Liberté_expression

  • Steven Levy Mark Zuckerberg has long said he doesn’t want to be the arbiter of truth.
    https://link.wired.com/view/5cec29ba24c17c4c6465ed0bc85rb.28hc/698b9ee1

    par Steven Levy

    But despite all his protestations, Zuckerberg is not only the arbiter in chief of the world’s dominant social media platform, he’s an active one. That was never more clear than in the nearly two-hour remote session he had with thousands of concerned employees on Tuesday, when he defended his decision not to take down, mitigate, or fact-check several posts by Donald Trump that seemed, in the eyes of employees, to violate Facebook’s policies. In a transcript of the session—the leak of an internal meeting was once an unthinkable act of disloyalty at Facebook, but now it’s an inevitability—Zuckerberg talks in detail about how he consulted with key aides and painstakingly analyzed his community standards, all to make the final call himself. In this case, he decided that Trump’s use of the phrase “When the looting starts, the shooting starts” was not a call to violence or a racist “dog whistle,” despite arguments to the contrary.

    The drama was heightened by two factors. First, the internal opposition to Zuckerberg’s choices was unprecedented, as employees publicly tweeted their displeasure and staged a “virtual walkout” on Monday. Some even quit the company. Also, a group of the company’s earliest employees published a letter lamenting Facebook’s departure from its original ideals. As I wrote earlier this week, what bothered them was not just the two tweets Trump had cross-posted to Facebook. The frustration came from the fact that, for years now, the “free expression” Zuckerberg celebrates has meant hosting misinformation, hate, and divisiveness.

    The second factor is an external threat: a movement to tamper with or repeal legislation that gives Zuckerberg the power to make those decisions without taking legal responsibility for everything that his almost 3 billion users post. That law is known as section 230(c) of the 1996 Telecommunications Act. It frees platforms like Facebook and Twitter of liability for what people share, distinguishing them from publishers like The New York Times or WIRED. But it also gives platforms the editorial discretion to police the content to make their platforms safe and civil. In reaction to the power of big tech companies, some politicians are arguing that platforms should be treated more like publications than, say, phone lines. One is Donald Trump, who last week issued an executive order dictating that the government should strip platforms of that sanctuary status if they’re deemed politically biased. Another declared foe of Section 230 is Joe Biden, though he hasn’t called for a government truth squad like Trump has.

    Zuckerberg’s decision on the president’s posts wasn’t affected by Trump’s threatened executive order, but it certainly favored Trump and the conservative cause. More significantly, it was well in keeping with Facebook’s tendency to allow and even promote content that divides and inflames. Zuckerberg tried to contextualize this for his employees, saying that while his free-expression tilt might allow toxic content to thrive, it also gives voice to the powerless, allowing them to post things like video evidence of police brutality. “I would urge people not to look at the moral impact of what we do just through the lens of harm and mitigation,” he told employees.

    At Twitter, though, CEO Jack Dorsey did look at Donald Trump’s tweets through that lens. After too long a period of keeping his hands off of Trump’s discordant content, he ordered that Twitter tag two disputed tweets. And Snap’s CEO Evan Spiegel went even farther, removing Trump’s posts from the Discover section of the platform, on the grounds that the president’s words are divisive and racist. In a letter to employees Spiegel explained:

    As for Snapchat, we simply cannot promote accounts in America that are linked to people who incite racial violence, whether they do so on or off our platform. Our Discover content platform is a curated platform, where we decide what we promote … This does not mean that we will remove content that people disagree with, or accounts that are insensitive to some people … But there is simply no room for debate in our country about the value of human life and the importance of a constant struggle for freedom, equality, and justice. We are standing with all those who stand for peace, love, and justice and we will use our platform to promote good rather than evil.

    Trump supporters—and certainly Trump himself—might complain about what Twitter and Snap did. But the companies are exercising their rights under 230 exactly in the way that the law permits.

    Zuckerberg should take note. Yes, it’s crazy for one person to have such massive control over what people say online. But like it or not, our system gives leaders of huge corporations massive power. In his total control of Facebook, he must be the arbiter—of harm. We must demand that he perform that role in the best possible way, minimizing the toxic speech posted by his customers, whether they are peons or presidents. His employees are speaking out. His billions of users should let him know as well. And the government should back off.

    #Facebook #Liberte_expression #Division

  • Proceedings Against Almost Half a Million People for Violating Covid-19 Measures - English Bianet
    İsmail Çataklı, the Spokesperson for the Ministry of Interior, has announced that 520 of 1,152 social media users who posted “provocative” coronavirus posts were taken into custody and 11 of them have been arrested.

    #Covid-19#Turquie#Confinement#Répression#Liberté_expression#justice#migrant#migration

    http://bianet.org/english/human-rights/225226-proceedings-against-almost-half-a-million-people-for-violating-covid-

  • 510 People Detained Over Coronavirus Posts in 2 Months - Bianet English
    In a statement released by the Ministry of Interior, it has been announced that 10,111 social media accounts have been probed due to “provocative” and “baseless” coronavirus posts in the last 65 days

    #Covid-19#Turquie#Réseaux_sociaux#Répréssion#Liberté_expression#prison#migrant#migration

    http://bianet.org/english/human-rights/224638-510-people-detained-over-coronavirus-posts-in-2-months

  • Depuis la Palestine, Radio Alhara décloisonne la quarantaine - Middle East Eye
    Née dans les chambres de Palestiniens forcés au confinement en Cisjordanie, élargie à d’autres pays voisins, Radio Alhara propose émissions originales et mix éclectiques qui titillent les oreilles et l’imagination d’auditeurs dans le monde arabe et au-delà.
    #Covid-19#Palestine#Quarantaine#Liberté_Expression#radio#Société_civile#migrant#migration

    https://www.middleeasteye.net/fr/reportages/depuis-la-palestine-radio-alhara-decloisonne-la-quarantaine

  • How a ban on pro-Trump patterns unraveled the online knitting world - MIT Technology Review
    https://www.technologyreview.com/s/615325/ravelry-ban-on-pro-trump-patterns-unraveled-the-online-knitting-world-censorship-free/?truid=a497ecb44646822921c70e7e051f7f1a

    When knitting site Ravely banned all pro-Trump content it caused a schism in the community—but it also shone a spotlight on how women are using niche sites to politicize.

    But the infighting in one of the internet’s most niche communities is about more than just politics and knitting. It’s a glimpse of how otherwise ignored populations—here, predominantly older women—are using online platforms to organize and make their voices heard. And the Ravelry falling-out highlights questions other platforms, like Facebook and Twitter, have tiptoed around: What constitutes hate speech, and how should censorship work online?

    For some, the politicization of knitting groups started in earnest with the Women’s March in 2017. Thousands of women knitted “pussy hats” to protest the “grab ’em by the pussy” comment the president was revealed to have made in 2005. Nearly 5,000 knitters were active on Ravelry’s dedicated subgroup for the march. Three years later, a majority remained active, says Sandra Markus, a professor at the Fashion Institute of Technology. Together with Ioana Literat, a professor at Columbia University Teachers College, she published a paper last year that chronicles online “craftivism” and how politics has grown with it.

    But with the ban on Trump-related content, many of those voices moved elsewhere. In the eight months since the ban, a slew of right-leaning Ravelry copycats have sprung up. Deplorable Knitter launched her own site, subtitled “The Adventures of a Politically Incorrect Knitter,” where she’s gained a cult following and is currently hosting a knit-along of a hat and cowl emblazoned with “Women for Trump.” There’s the independent 18,000-strong Fiberkind, whose threaded chat layout most resembles Ravelry. And there’s Trump-supporting Freedom Knits, “where artistic freedom is respected.” It has grown to 400 members in the two months since it launched.

    The increased politicization of the online knitting world has come as part of a demographic shift. While the community still skews older and mostly female, it is fast diversifying. Millennials—who are generally more politically active and came of age in the AIM chatroom—are now signing up to Ravelry and its offshoots. “They’ve been awakened in this particular moment to capitalize on their identity,” Literat says.

    Online communities that are hyperspecific to certain hobbies also help engender dialogue across the political divide—a key point in a polarized political environment where people spend much of their time in ideological bubbles, says Literat.

    “You get a much wider spectrum of opinions in these spaces,” she says. “You see people who are already politically engaged, but also people who aren’t coming to these places, at least at first, because of politics.”

    The controversy shines a light on the future of political organizing: ultra-niche, small-but-vocal online communities built around an otherwise nonpolitical hobby or interest. For Literat, Ravelry’s ban presents a litmus test for the future of niche-site censorship and whether it’s best to forge a single, politically homogenous community or to splinter fringe users off.

    It is also giving women a new way to become politicized online. For Amy Singer, the founder of another knitting site, Knitty, that’s good news.

    “The one thing that crafts have always done is bring solace,” she says. “It gives us a way to express what’s upsetting us, hope for change, and bring comfort. Knitting’s not for grannies. We’re not scared any more.”

    #Tricot #Culture_participative #Politisation #Liberté_expression #Culture_numérique

  • A Regulatory Framework for the Internet – Stratechery by Ben Thompson
    https://stratechery.com/2019/a-regulatory-framework-for-the-internet

    The Three Frees
    There are, in Internet parlance, three types of “free”:

    “Free as in speech” means the freedom or right to do something
    “Free as in beer” means that you get something for free without any additional responsibility
    “Free as in puppy” means that you get something for free, but the longterm costs are substantial

    (…)This distinction might square some of the circles I presented at the beginning: how might society regulate content without infringing on rights or destroying competitive threats to the largest incumbents?

    Start with this precept: the Internet ought to be available to anyone without any restriction. This means banning content blocking or throttling at the ISP level with regulation designed for the Internet. It also means that platform providers generally speaking should continue to not be liable for content posted on their services (platform providers include everything from AWS to Azure to shared hosts, and everything in-between); these platform providers can, though, choose to not host content suppliers they do not want to, whether because of their own corporate values or because they fear boycott from other customers.

    I think, though, that platform providers that primarily monetize through advertising should be in their own category: as I noted above, because these platform providers separate monetization from content supply and consumption, there is no price or payment mechanism to incentivize them to be concerned with problematic content; in fact, the incentives of an advertising business drive them to focus on engagement, i.e. giving users what they want, no matter how noxious.

    This distinct categorization is critical to developing regulation that actually addresses problems without adverse side effects. Australia, for example, has no need to be concerned about shared hosting sites, but rather Facebook and YouTube; similarly, Europe wants to rein in tech giants without — and I will give the E.U. the benefit of the doubt here — burdening small online businesses with massive amounts of red tape. And, from a theoretical perspective, the appropriate place for regulation is where there is market failure; constraining the application to that failure is what is so difficult.

    Proposition selon laquelle les plateformes publicitaires telles que #facebook devraient être réglementées par le gouvernement, alors que les autres plateformes devraient être réglementées par le marché, le tout avec une infra neutre et libre pour tous. L’idée est que le contenu problématique ne soit pas intégré dans le modèle de tarification d’une plateforme publicitaire.

    #Régulation #Plateformes #Plateformes_publicitaires #publicité #Liberté_expression #Monopoles #domination #GAFAM #Super-Aggrégateurs #censure #youtube #Apple #Google #Amazon #Facebook

  • It’s the (Democracy-Poisoning) Golden Age of Free Speech | WIRED
    https://www.wired.com/story/free-speech-issue-tech-turmoil-new-censorship

    Par Zeynep Tufekci

    In today’s networked environment, when anyone can broadcast live or post their thoughts to a social network, it would seem that censorship ought to be impossible. This should be the golden age of free speech.

    And sure, it is a golden age of free speech—if you can believe your lying eyes. Is that footage you’re watching real? Was it really filmed where and when it says it was? Is it being shared by alt-right trolls or a swarm of Russian bots? Was it maybe even generated with the help of artificial intelligence? (Yes, there are systems that can create increasingly convincing fake videos.)

    Or let’s say you were the one who posted that video. If so, is anyone even watching it? Or has it been lost in a sea of posts from hundreds of millions of content pro­ducers? Does it play well with Facebook’s algorithm? Is YouTube recommending it?

    Maybe you’re lucky and you’ve hit a jackpot in today’s algorithmic public sphere: an audience that either loves you or hates you. Is your post racking up the likes and shares? Or is it raking in a different kind of “engagement”: Have you received thousands of messages, mentions, notifications, and emails threatening and mocking you? Have you been doxed for your trouble? Have invisible, angry hordes ordered 100 pizzas to your house? Did they call in a SWAT team—men in black arriving, guns drawn, in the middle of dinner?

    These companies—which love to hold themselves up as monuments of free expression—have attained a scale unlike anything the world has ever seen; they’ve come to dominate media distribution, and they increasingly stand in for the public sphere itself. But at their core, their business is mundane: They’re ad brokers. To virtually anyone who wants to pay them, they sell the capacity to precisely target our eyeballs. They use massive surveillance of our behavior, online and off, to generate increasingly accurate, automated predictions of what advertisements we are most susceptible to and what content will keep us clicking, tapping, and scrolling down a bottomless feed.

    So what does this algorithmic public sphere tend to feed us? In tech parlance, Facebook and YouTube are “optimized for engagement,” which their defenders will tell you means that they’re just giving us what we want. But there’s nothing natural or inevitable about the specific ways that Facebook and YouTube corral our attention. The patterns, by now, are well known. As Buzzfeed famously reported in November 2016, “top fake election news stories generated more total engagement on Facebook than top election stories from 19 major news outlets combined.”

    For Facebook, YouTube, and Twitter, all speech —whether it’s a breaking news story, a saccharine animal video, an anti-Semitic meme, or a clever advertisement for razors— is but “content,” each post just another slice of pie on the carousel. A personal post looks almost the same as an ad, which looks very similar to a New York Times article, which has much the same visual feel as a fake newspaper created in an afternoon.

    What’s more, all this online speech is no longer public in any traditional sense. Sure, Facebook and Twitter sometimes feel like places where masses of people experience things together simultaneously. But in reality, posts are targeted and delivered privately, screen by screen by screen. Today’s phantom public sphere has been fragmented and submerged into billions of individual capillaries. Yes, mass discourse has become far easier for everyone to participate in—but it has simultaneously become a set of private conversations happening behind your back. Behind everyone’s backs.

    The most effective forms of censorship today involve meddling with trust and attention, not muzzling speech itself. As a result, they don’t look much like the old forms of censorship at all. They look like viral or coordinated harassment campaigns, which harness the dynamics of viral outrage to impose an unbearable and disproportionate cost on the act of speaking out. They look like epidemics of disinformation, meant to undercut the credibility of valid information sources. They look like bot-fueled campaigns of trolling and distraction, or piecemeal leaks of hacked materials, meant to swamp the attention of traditional media.

    This idea that more speech—more participation, more connection—constitutes the highest, most unalloyed good is a common refrain in the tech industry. But a historian would recognize this belief as a fallacy on its face. Connectivity is not a pony. Facebook doesn’t just connect democracy-­loving Egyptian dissidents and fans of the videogame Civilization; it brings together white supremacists, who can now assemble far more effectively. It helps connect the efforts of radical Buddhist monks in Myanmar, who now have much more potent tools for spreading incitement to ethnic cleansing—fueling the fastest- growing refugee crisis in the world.

    The freedom of speech is an important democratic value, but it’s not the only one. In the liberal tradition, free speech is usually understood as a vehicle—a necessary condition for achieving certain other societal ideals: for creating a knowledgeable public; for engendering healthy, rational, and informed debate; for holding powerful people and institutions accountable; for keeping communities lively and vibrant. What we are seeing now is that when free speech is treated as an end and not a means, it is all too possible to thwart and distort everything it is supposed to deliver.

    By this point, we’ve already seen enough to recognize that the core business model underlying the Big Tech platforms—harvesting attention with a massive surveillance infrastructure to allow for targeted, mostly automated advertising at very large scale—is far too compatible with authoritarianism, propaganda, misinformation, and polarization.

    #Zeynep_Tufekci #Médias_sociaux #Liberté_expression #Espace_public #Désinformation #Attention

  • How making politicians unblock trolls could hurt speech online - The Verge
    https://www.theverge.com/2019/9/6/20847366/politicians-twitter-trolls-blocking-legal-ruling-trump-ocasio-cortez-free-

    Last week, the Knight First Amendment Institute urged Rep. Alexandria Ocasio-Cortez (D-NY) to unblock critics on Twitter. The Knight Institute has led a push to treat politicians’ social media accounts as public forums, filing a successful lawsuit against President Donald Trump for his Twitter-blocking habits. Ocasio-Cortez argued that the issue was more nuanced, though: she said she was blocking “less than 20 accounts” and that it was for harassment, not political viewpoints.

    Social media poses some unique problems that physical spaces don’t, however. It can operate at a scale that wouldn’t be possible offline, and it’s easy to hijack a conversation or amplify a point of view with automated posts or a handful of dedicated people acting in bad faith. Trolls can attack anyone who participates in a conversation, not just politicians, and they can do it across all of social media, not just in a single thread or post. This can turn supposedly open spaces into deeply hostile or unnavigable ones — not just for public figures like Trump or Ocasio-Cortez, but for anybody who wants to engage with them.

    As writer and law professor Tim Wu, journalist Zeynep Tufekci, and many others have pointed out, new tactics like troll armies and spammed responses have made traditional First Amendment protections less effective at promoting free speech online. “It is no longer speech or information that is scarce, but the attention of listeners,” explained Wu in a 2017 Knight Institute blog post. “No one quite anticipated that speech itself might become a censorial weapon, or that scarcity of attention would become such a target of flooding and similar tactics.”

    #Politique #Twitter #Liberté_expression #Trolls

  • Facebook Is Censoring Harm Reduction Posts That Could Save Opioid Users’ Lives
    https://www.vice.com/en_us/article/qv75ap/facebook-is-censoring-harm-reduction-posts-that-could-save-opioid-users-lives

    As Facebook rolls out its campaign with the Partnership for Drug-Free Kids to “Stop Opioid Silence” and other initiatives to fight the overdose crisis, some stalwart advocates in the field are seeing unwelcome changes. In the past few months, accounts have been disabled, groups have disappeared, posts containing certain content—particularly related to fentanyl—have been removed, and one social media manager reports being banned for life from advertising on Facebook.

    In its efforts to stop opioid sales on the site, Facebook appears to be blocking people who warn users about poisonous batches of drugs or who supply materials used to test for fentanyls and other contaminants. Just as 1990s web security filters mistook breast cancer research centers for porn sites, today’s internet still seems to have trouble distinguishing between drug dealers and groups trying to reduce the death toll from the overdose crisis. VICE reviewed screenshots and emails to corroborate the claims made in this story.

    Facebook seems to be especially focused on fentanyl. Claire Zagorski, a wound care paramedic at the Austin Harm Reduction Coalition in Texas, said she informally surveyed other harm reduction groups about their experiences. About half a dozen reported problems with reduced distribution of posts or outright rejection—especially if they were trying to report a specific, local instance of fentanyl-tainted drugs. Two of the organizations affected were a harm reduction group called Shot in the Dark in Phoenix, Arizona, and Southside Harm Reduction Services in Minneapolis, Minnesota.

    “I think it’s important to remember that they’re not being like, ‘Hooray drugs!’" Zagorski said. "They’re saying, ‘Be warned that this contaminated supply could be lethal.’”

    Devin Reaves, executive director and co-founder of the Pennsylvania Harm Reduction Coalition, who hasn’t personally had posts blocked, said: “Facebook wants to address the opioid crisis, but when harm reductionists try to inform their communities about what’s dangerous, their posts are being blocked.”

    Why then is Facebook cracking down?

    When reached for comment, a Facebook spokesperson said the company is investigating these incidents. After VICE contacted Facebook, the company restored posts from Southside Harm Reduction and Shot in the Dark, as well as Louise Vincent’s ability to post her email address, which apparently triggered a spam filter unrelated to opioids.

    Facebook also told VICE that Marcom was blocked from posting ads due not to fentanyl test strips, but due to posts related to kratom, an herb used by some as a substitute for opioids. Facebook has decided that kratom is a “non-medical drug” and is removing posts and groups related to it—even though its use is considered to be a form of harm reduction.

    Marcom said he hadn’t posted any kratom-related ads since 2018 and added, “It’s extremely frustrating that they have chosen to ban a proven safe plant medicine, as Facebook used to be a space where tens of thousands went daily for help getting off of opiates and other pharmaceuticals.”

    #Facebook #Opioides #Liberté_expression #Régulation

  • Créer un cadre français
    de responsabilisation des réseaux sociaux :
    agir en France avec une ambition européenne

    Remise du rapport de la mission de régulation des réseaux sociaux | numerique.gouv.fr
    https://www.numerique.gouv.fr/actualites/remise-du-rapport-de-la-mission-de-regulation-des-reseaux-sociaux
    https://www.numerique.gouv.fr/uploads/Haine+en%20ligne.jpg

    La problématique de la haine en ligne est devenue insupportable pour nos citoyens. Cette situation pose une triple responsabilité : celle des auteurs des contenus qui doivent assumer leurs propos, celle des réseaux sociaux qui, en toute transparence, doivent proposer une organisation susceptible de bannir la haine en ligne et celle des États qui doivent fixer des règles pour les auteurs, pour les réseaux sociaux et assurer qu’elles soient respectées.

    C’est dans cet esprit de vigilance constructive et de dialogue qu’Emmanuel Macron, président de la République, et Mark Zuckerberg, PDG de Facebook, ont acté le lancement d’une mission de régulation des réseaux sociaux en mai 2018.

    Le rapport rendu public aujourd’hui et remis à Cédric O, secrétaire d’État chargé du Numérique, propose des pistes de réflexions et d’actions qui viendront nourrir les travaux parlementaires des prochains mois.

    Lancée en mai 2018, la mission a mobilisé trois rapporteurs et sept experts de haut niveau issus de ministères et d’autorités administratives indépendantes.

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    Synthèse
    Les réseaux sociaux permettent à tout citoyen de publier les contenus de son choix et de les partager avec d’autres utilisateurs du réseau. Ils ont ainsi révolutionné l’industrie des médias et les modes de communication en offrant aux citoyens et à la société civile un support d’expression directe. Le recours aux médias classiques n’est plus obligatoire pour communiquer publiquement. La possibilité pour les citoyens d’exercer leurs libertés d’expression, de communication, et de s’informer sont donc considérablement accrues par ces services.
    Néanmoins, les capacités offertes par les réseaux sociaux suscitent des abus inacceptables de ces libertés. Ces abus sont le fait d’individus isolés ou de groupes organisés auxquels les grands réseaux sociaux, Facebook, YouTube, Twitter ou Snap, pour ne citer qu’eux, n’apportent pas de réponse pleinement satisfaisante à ce jour. Or, par l’ordonnancement qu’ils réalisent des contenus publiés et par leur politique de modération, les réseaux sociaux sont en mesure d’agir directement sur ces abus les plus manifestes pour les prévenir ou y répondre et limiter ainsi les dommages en termes de cohésion sociale.
    Une intervention publique pour que les plus grands acteurs adoptent une attitude plus responsable et plus protectrice de la cohésion de nos sociétés apparaît donc légitime. Compte tenu des enjeux de libertés publiques, cette intervention doit faire l’objet de précautions particulières. Elle doit (i) respecter la diversité des modèles de réseaux sociaux, qui forment un ensemble particulièrement hétéroclite, (ii) faire preuve de transparence, notamment en y associant la société civile, (iii) viser un objectif d’intervention minimum conformément aux principes de nécessité et de proportionnalité et (iv) s’en remettre aux juridictions pour la qualification de la licéité des contenus pris individuellement.
    La démarche actuelle d’autorégulation des réseaux sociaux est intéressante en ce qu’elle démontre que les plateformes peuvent faire partie de la solution aux problèmes constatés. Elles ont inventé des réponses variées et agiles : retrait, moindre exposition, rappel à la règle commune, pédagogie, accompagnement des victimes. Toutefois, l’autorégulation est toujours en développement. Elle se contente trop souvent de proposer une réponse ex-post (après l’apparition du dommage). Elle manque de crédibilité, du fait de l’asymétrie extrême d’information, provoquant un sentiment de « story telling » qui suscite une suspicion sur la réalité de l’action de la plateforme.
    L’intervention publique doit reposer sur un équilibre entre une politique répressive, indispensable pour lutter efficacement contre les auteurs des abus, et une logique de responsabilisation accrue des réseaux sociaux fondée sur une régulation ex ante, pour capitaliser sur la logique de prévention et la capacité d’autorégulation des plateformes.
    Compte tenu de l’unicité et de l’ubiquité des réseaux sociaux, qui dépassent les frontières des États membres – un service unique accessible sur plusieurs géographies – cette régulation ex ante doit s’inscrire dans une dynamique et un cadre européens. Néanmoins, la règle actuelle dite du pays d’installation, selon laquelle seul le pays qui accueille le siège du réseau social peut intervenir pour réguler ce réseau, s’avère inefficace. Par les excès qu’ils permettent, les réseaux sociaux créent des dommages dans d’autres États membres, et difficilement observables par l’Etat membre d’installation.
    Toute initiative française devra donc avoir pour ambition d’inverser la logique européenne actuelle au profit d’une logique du pays de destination, selon laquelle la plateforme est responsable devant l’État membre où le dommage se produit, pour renforcer la capacité de chacun des États membres à maîtriser les conséquences de la globalisation. Cet objectif doit être pris en compte dès la conception d’une fonction de régulation des réseaux sociaux pour que le dispositif apparaisse pertinent aux yeux de nos partenaires européens, alors même que la politique en matière de régulation des industries de médias diffère sensiblement d’un pays à l’autre.
    p. 2
    La mise en place d’une régulation ex ante devrait respecter trois conditions : (i) suivre une logique de conformité selon laquelle le régulateur supervise la bonne mise en œuvre de mesures préventives ou correctrices, sans se focaliser sur la matérialisation des risques ni chercher à réglementer lui-même le service fourni, (ii) se concentrer sur les acteurs systémiques capables de créer des dommages conséquents dans nos sociétés sans créer de barrière à l’entrée pour de nouveaux acteurs européens, (iii) rester agile pour affronter les enjeux futurs dans un environnement numérique particulièrement évolutif. Le dispositif législatif devra donc viser à créer une capacité institutionnelle à réguler et non une régulation figée sur les problèmes actuels.
    Cette régulation pourrait reposer sur les cinq piliers suivants :
    Premier pilier : Deuxième pilier :
    Troisième pilier : Quatrième pilier : Cinquième pilier :
    Une politique publique de régulation garante des libertés individuelles et de la liberté d’entreprendre des plateformes.
    Une régulation prescriptive et ciblée sur la responsabilisation des réseaux sociaux mise en œuvre par une autorité administrative indépendante, reposant sur trois obligations incombant aux plateformes :
    • transparence de la fonction d’ordonnancement des contenus ;
    • transparence de la fonction de mise en œuvre des CGU et de modération
    des contenus ;
    • un devoir de diligence vis-à-vis de ses utilisateurs.
    Un dialogue politique informé entre les acteurs, le gouvernement, le législateur, le régulateur et la société civile.
    Une autorité administrative indépendante partenaire des autres branches de l’État et ouverte sur la société civile.
    Une ambition européenne pour renforcer la capacité des Etats membres à agir face à des plateformes globales, et réduire le risque politique lié à la mise en œuvre dans chaque Etat membre.

    #Médias_sociaux #Régulation #Concurrence #Liberté_expression #Transparence

  • Lettre ouverte collective sur la PPL Cyberhaine
    http://g5nx.mjt.lu/nl2/g5nx/mvq98.html?m=AMMAAEGMoicAAcgEAqQAAGbveFMAARpaD8cAGpz2AAct2wBdG5WB8ryKbPNRSw

    La propagation des contenus haineux a des conséquences particulièrement nocives pour notre démocratie et pour les citoyens. Il est plus que jamais nécessaire de lutter contre ce phénomène. La proposition de loi visant à lutter contre la haine sur Internet actuellement en examen à l’Assemblée nationale entend ainsi traiter un pan de la problématique en renforçant la responsabilité des opérateurs de plateformes dans la modération des contenus en ligne. Cette exigence est légitime et nécessaire. Toutefois, ce texte soulève des inquiétudes quant à ses conséquences sur nos droits et libertés, et notamment les libertés d’expression et d’information ou d’accès à la justice.

    Nous devons impérativement penser la cohérence de ces textes afin d’assurer une régulation efficace des plateformes. Celle-ci ne peut reposer que sur une approche systémique, c’est-à-dire veiller aux systèmes eux-mêmes, plutôt qu’aux contenus. Comme le recommande la mission « Régulation des réseaux sociaux » dans son rapport paru en mai dernier, il convient de mettre en œuvre une régulation visant à renforcer les obligations de transparence et de diligence de ces acteurs. À ce jour, deux points figurant dans la version actuelle de la loi bousculent l’équilibre fragile entre la dignité humaine et la liberté d’expression, au détriment de cette dernière.

    1. Le manque de définition des contenus visés par la loi

    La définition des contenus de haine en ligne est complexe, elle fait encore l’objet de discussions juridiques et académiques. Eu égard au périmètre et à la nature de l’intervention qu’il induit, l’objet de ce texte doit être précisé et doit reposer sur des définitions claires, en particulier en ce qui concerne le caractère « manifestement » illicite d’une « incitation à la haine » ou d’une « injure discriminatoire » à raison de « la race, de la religion, du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap ». Lors du dernier examen de la commission des lois au sein de l’Assemblée nationale, ce périmètre a été étendu au-delà des seules infractions de haine manifeste qui étaient auparavant visées par le texte.

    2. La préservation de nos libertés fondamentales par le renforcement de la place du juge judiciaire

    Si la position et le comportement des grands acteurs du numérique posent la question de la préservation de notre souveraineté, il est contradictoire de fragiliser cette dernière en donnant aux plateformes des prérogatives propres au domaine du droit et de la justice. Seule la décision de justice, issue du pouvoir de l’État institué démocratiquement, est acceptable quand il s’agit de censurer un propos, acte « particulièrement radical » comme le qualifie le Conseil d’État dans son avis. La protection de nos droits fondamentaux repose sur l’équilibre des pouvoirs démocratiques.

    Nicolas Chagny, Président de l’Internet Society France ; Christiane Féral-Schuhl, Présidente du Conseil national des barreaux ; Henri Isaac, Président de Renaissance Numérique ; Jacques-François Marchandise, Délégué général de la Fing ; Julie Owono, Directrice exécutive de l’Internet Sans Frontières ; Malik Salemkour, Président de la Ligue des droits de l’homme ; Salwa Toko, Présidente du Conseil national du numérique

    #Loi_Avia #Liberté_expression #Internet